<<

Studi Francesi Rivista quadrimestrale fondata da Franco Simone

177 (LIX | III) | 2015 Varia Anno LIX - fascicolo III - settembre-dicembre 2015

Edizione digitale URL: http://journals.openedition.org/studifrancesi/1186 DOI: 10.4000/studifrancesi.1186 ISSN: 2421-5856

Editore Rosenberg & Sellier

Edizione cartacea Data di pubblicazione: 1 décembre 2015 ISSN: 0039-2944

Notizia bibliografica digitale Studi Francesi, 177 (LIX | III) | 2015 [Online], online dal 01 décembre 2016, consultato il 12 février 2021. URL: http://journals.openedition.org/studifrancesi/1186; DOI: https://doi.org/10.4000/studifrancesi. 1186

Studi Francesi è distribuita con Licenza Creative Commons Attribuzione - Non commerciale - Non opere derivate 4.0 Internazionale. SOMMARIO Anno LIX – fasc. III – settembre-dicembre 2015

ARTICOLI

François Suard, Relectures de et de Roncevaux aux xive et xve siècles: “Myreur des Histors”, “Croniques et conquestes de Charlemaine”, p. 437. Hozumi Orii, Panurge’s Quest and the Sixteenth-Century Idea of the Labyrinth, p. 450. Bartolo Anglani, Le due memorie di Jean-Jacques Rousseau, p. 465. Mary Jo Muratore, Covert Conundrums: Chaos Unvoiced in Assia Djebar’s “Les Enfants du nouveau monde”, p. 479. Dominique Viart, Le scrupule esthétique: que devient la réflexivité dans les fictions contemporaines?, p. 489.

TESTI INEDITI E DOCUMENTI RARI

Olivier Delsaux, Une nouvelle «nouvelle» apocryphe de la première traduction française du “Decameron”. L’imprimé Paris, Vérard, 1485 et la nouvelle d’Olivier Maillart (VIII, §6), p. 501. Maria Chiara Morighi, Lettere di Livia Veneziani a Valery Larbaud, mediatore intellettuale nella fortuna postuma di Italo Svevo, p. 510. Marco Piazza, A. Gimeno y Cabañas: “Quando incontrai Marcel Proust” (1932), p. 515.

DISCUSSIONI E COMUNICAZIONI

Francesca Bottero, Émile Zola a Genova, p. 521. Mario Richter, Sulla religione di Rimbaud, p. 532. Bruno Tritsmans, Marines fantômes. Aventures et mythologies de la mer chez Henri Bosco, p. 538. Laura Brignoli, La part du romanesque dans l’hétéro-autobiographie de Robbe- Grillet, p. 546.

RASSEGNA BIBLIOGRAFICA Medioevo, a cura di G.M. Roccati, p. 557; Quattrocento, a cura di M. Colombo Timelli e P. Cifarelli, p. 566; Cinquecento a cura di S. Lardon e M. Mastroianni, p. 573; Seicento, a cura di M. Pavesio e L. Rescia, p. 585; Settecento, a cura di F. Piva e V. Fortunati, p. 590; Ottocento: a) dal 1800 al 1850, a cura di L. Sabourin e V. Ponzetto, p. 595; Ottocento: b) dal 1850 al 1900, a cura di I. Merello e M.E. Raffi, p. 618; Novecento e xxi secolo, a cura di S. Genetti e F. Scotto, p. 625; Letterature francofone extraeuropee, a cura di E. Pessini e J.-F. Plamondon, p. 635; Opere gene- rali e comparatistica, a cura di G. Bosco, p. 648.

Finito di stampare nel mese di dicembre 2015 isbn: 978-88-7885-388-1

sf177.indb 435 19/12/15 01.04 sf177.indb 436 19/12/15 01.04 François Suard

ARTICOLI

Relectures de Roland et de Roncevaux e e aux xiv et xv siècles: “Myreur des Histors”, “Croniques et conquestes de Charlemaine”

Abstract Two texts of the late Middle Ages (last years of the xivth century, early in the second half of the xvth) were told in prose about the battle of Roncesvalles, with the death of Roland and the twelve peers: Jean d’Outremeuse’s Myreur des Histors and the Cronicles and conquests of Char- lemaine, compiled by Aubert. This article analyzes the work of proofreading that was undertaken by these authors. Our hypothesis is that they both either follow a preestablished pattern, or in an unpredetermined way carry on the essential data of Pseudo-Turpin and Ronc- esvaux inversely to varying degrees in order to expand the story of the battle itself on which the Pseudo-Turpin appears quite laconic. In accordance with his usual, Jean d’Outremeuse, often in a fairly dry writing, highlights the role of Ogier, to whom he attributes exploits traditionally associated with Roland, changing very freely both models. David Aubert (closer to Roncesvaux, more developed than the Liège columnist and not hesitating to redouble episodes) retains in Roland his essential role and is attentive to the characters’ psychology of Roland, or .

1. Pour bien comprendre le type de relectures de l’histoire de Roncevaux et du per- sonnage de Roland à la fin du Moyen Âge, il faut d’abord rappeler quelques transfor- mations de la légende qui se sont fait jour auparavant.

1.1. La Chronique de Turpin (PsT) Après le Roland d’Oxford, la seconde œuvre relatant la bataille où Roland trouve la mort est l’Historia Karoli magni et Rotholandi (ca 1150), connue sous le nom de Chronique de Turpin ou Pseudo-Turpin1. On connaît sa caractéristique majeure, qui consiste à proposer, dans un récit à prétention historique, une lecture cléricale des expéditions de en Espagne, où Jacques l’a convié pour libérer la terre des Sarrasins; c’est dans la dernière expédition que prend place le récit de la bataille de Roncevaux. La chronique mentionne deux adversaires des Français, Marsile et Baligant2 son frère, qui sont associés dès le début, alors qu’ils sont mis en scène successivement dans le Roland d’Oxford (O). Charles leur a envoyé Ganelon pour les sommer de se convertir et de payer tribut, mais ceux-ci, feignant d’accepter, ont acheté le messa- ger qu’ils ont comblés de présents afin qu’il leur livre les guerriers de Charlemagne. Charles confie à Roland et Olivier la charge de l’arrière-garde (pas question d’une désignation par Ganelon). Le combat aboutit à la mise à mort de tous les chrétiens,

(1) Édition C. Meredith-Jones, Historia Karoli (2) Nous adoptons, comme pour le Myreur et les Magni et Rotholandi ou Chronique du Pseudo-Tur- Croniques et conquestes, l’orthographe de la version pin, Paris, 1936; traduction de B. Gicquel, La Lé- d’Oxford. gende de Compostelle, Paris, Taillandier, 2003.

sf177.indb 437 19/12/15 01.04 438 François Suard

sauf Roland, Baudoin, Thierry, Turpin et Ganelon3, indication surprenante, car plus tard on retrouve Ganelon auprès de Charlemagne, ainsi que Turpin. On notera que ces différents éléments sont rassemblés en un seul chapitre (21), et que le récit de la bataille générale est très bref. Les derniers exploits de Roland et surtout ses derniers instants, particulièrement édifiants, sont au contraire développés sur deux chapitres (22 et 23); le héros y est présenté comme un martyr de la foi (le texte évoque l’âme «beati Rotholandi martiris» au chap. 23). Roland prononce de très édifiantes prières avant de mourir, et Turpin est gratifié au chap. 24 d’une vision dans laquelle un ange lui déclare: «tubicem virum cum multis fert ad superna» («Michel porte vers le ciel le héros sonneur de cor»). En ce qui concerne Turpin lui-même, l’auteur de la chronique a peut-être voulu concilier deux traditions, celle de l’archevêque présent sur le champ de bataille, et celle du rédacteur de son histoire. Il fallait donc que Turpin survive, mais le «dédou- blement» de l’archevêque et plus encore la présence de Ganelon sur le champ de bataille posent un problème non résolu. Baudoin, fils de Ganelon, qui ne joue aucun rôle actif dans O, et Thierry, qui combattra au chap. 26, apparaissent dans la chronique au chap. 23, après que Roland a sonné du cor (il n’y a pas de débat à ce sujet avec Olivier), à la fois pour rallier les chrétiens survivants et pour prévenir Charlemagne. Ces deux personnages devaient rester en vie, l’un parce qu’il portera à l’empereur la nouvelle de la mort de Roland, l’autre parce qu’il doit pouvoir affronter le champion de Ganelon. Le texte leur donne pourtant un rôle peu honorable: ils se sont cachés dans les bois au cours de la bataille (chap. 21). Baudoin, le premier, rejoint Roland qui «par signes, lui de- manda de l’eau. Celui-ci chercha de l’eau sans en trouver et, voyant que Roland était à l’article de la mort, il le bénit»4. Puis, craignant d’être capturé par les Sarrasins, il enfourche le cheval de Roland et rejoint l’empereur (chap. 23). Vient ensuite Thierry, qui assiste aux derniers instants de Roland. Notons qu’avant de tenter vainement de briser son épée, Roland accomplit un dernier exploit, qui donne lieu à une péripétie curieuse (chap. 22). Le héros capture un Sarrasin qui se cachait dans les bois et l’attache à un arbre, avec promesse de le libérer s’il lui montre Marsile. Le païen s’exécute, et Roland tue Marsile; aussitôt prend la fuite; il ne sera plus question de lui par la suite. Avant d’exterminer les Sarrasins et de prendre Saragosse, Charles trouve le ca- davre d’Olivier attaché à des piquets et sauvagement mutilé: «Depuis le cou jusqu’aux ongles des pieds et des mains, il avait été écorché avec des couteaux tranchants, trans- percé de javelots, de flèches, de dards et d’épées, et frappé à grands coups de bâton» (chap. 26)5: pas question de ce supplice, dont ne sait s’il précède ou suit la mort du preux, dans O.

1.2. Les Roncevaux ou Roland rimés (mss de Châteauroux-Venise7) Les relectures versifiées du texte d’Oxford, qui apparaissent au xiiie siècle, agrémentent la narration de péripéties nouvelles et transforment aussi la perception du personnage de Roland; on trouvera le détail de ces modifications dans l’ouvrage de Jules Horrent, La Chanson de Roland 6. Au-delà de l’amplification fréquente des

(3) «Ibi interficiuntur omnes pugnatores praeter (4) B. Gicquel, op. cit., p. 567. Rotolandum, et Balduinum, et Turpinum, et Tedri- (5) B. Gicquel, op. cit., p. 573. cum et Ganalonum» (p. 183): «Là sont tués tous (6) La Chanson de Roland dans les littératures les combattants sauf Roland, Baudouin, Turpin, française et espagnole au Moyen Âge, Paris, Les Thierry et Ganelon». Belles Lettres, 1951.

sf177.indb 438 19/12/15 01.04 Relectures de Roland et de Roncevaux aux xive et xve siècles 439

scènes (Ganelon laisse plusieurs fois tomber le bâton qui lui est confié en vue de l’ambassade), le texte insiste sur la soif de Roland (3024, 3976-3979), mais les mo- difications les plus importantes concernent l’attitude de Roland à l’égard d’Aude, la place faite à celle-ci après la mort de Roland et les péripéties de la capture de Ganelon. Contrairement à O, Roland n’oublie pas son amie au moment de mourir et la regrette doucement (3910-3916, 4253); plus tard, les circonstances dans lesquelles la dame apprend la mort de Roland puis trouve la mort font l’objet d’un petit roman émouvant (songe prémonitoire, fausses nouvelles données d’abord par Charlemagne, intervention apaisante d’un ange). Quant à Ganelon, il réussit par deux fois à s’enfuir avant d’être supplicié de la même manière que dans O. Au total, une version comme celle du ms. V7, dont la prose des Croniques et conquestes est assez proche et que nous prendrons comme référence, compte 8397 vers7, contre 4002 dans O.

1.3. Galien Le Myreur et les Croniques et conquestes connaissent l’histoire de Galien, fils d’Olivier et de Jacqueline, fille de l’empereur de Constantinople; les circonstances plaisantes de la conception de ce nouveau héros sont contées dans le Pèlerinage de Charlemagne. Ses aventures sont associées au récit de la bataille de Roncevaux; elles sont probablement apparues au xiiie siècle, mais ses témoins, en vers ou en prose, datent du xve siècle, et constituent une nouvelle version de la bataille. Galien combat aux côtés de Roland et d’Olivier; il est témoin des derniers moments de son père. Plus tard, il participera à la bataille contre Baligant8. Nos deux proses se contentent de mentionner l’arrivée de Galien auprès de Charlemagne, alors que la bataille est presque achevée.

2. Ces préliminaires une fois acquis, nous pouvons passer à l’examen de la relecture des événements de Roncevaux par Jean d’Outremeuse dans le Myreur des Histors (avant 1400, M)9 et par David Aubert, écrivain au service de Philippe Le Bon, dans les Croniques et conquestes de Charlemaine (1458, Da)10. Le premier texte est une chronique universelle en quatre livres (seuls les trois premiers nous sont parvenus), destinée à célébrer la ville de Liège et, pour la période carolingienne et même au-delà, Ogier le Danois; elle commence à Noé et va jusqu’en 1340 pour la partie conser- vée, mais elle devait également couvrir les années 1341-1399. Le second ouvrage est une histoire poétique en prose de Charlemagne qui, faisant essentiellement appel aux chansons de geste mais aussi à des chroniques et notamment au Pseudo-Turpin, retrace jusqu’à sa mort l’histoire de l’empereur. Dans les deux textes, les événements de Roncevaux occupent une place impor- tante; ils recourent aux mêmes sources, peut-être transmises par un texte perdu: le Pseudo-Turpin et les Roncevaux représentent les modèles essentiels. Ces sources, ou ce modèle unique, reçoivent une mise en œuvre originale dans chacune des deux proses.

(7) Édition J. Duggan, The Châteauroux- (9) Voir l’édition d’A. Borgnet et S. Bormans, 7 Version, in La Chanson de Roland, The Bruxelles, 1864-1887; la bataille de Roncevaux fi- French Corpus, Part 3, Turnhout, Brepols, 2005. gure dans le second livre, au t. 3 de l’éd. cit. (1873), Nous désignons ce texte par le sigle V7; avec O, V7 pp. 128-166. constitue ce que nous appelons la vulgate. (10) Voir l’édition de Robert Guiette, Bruxelles, (8) Voir Le Galien de Cheltenham, édité par D.M. 3 voll., 1940-1951. La bataille de Roncevaux figure Dougherty et E.B. Barnes, Amsterdam, Benjamin, dans les t. 2, pp. 241-277, et 3, pp. 5-75 et 86-99. 1981 et Galien le Restoré en prose, édité par H.-E. Keller et N.L. Kaltenbach, Paris, Champion, 1998.

sf177.indb 439 19/12/15 01.04 440 François Suard

2.1. Place de l’événement Roncevaux Dans les deux proses, il s’agit, conformément aux données du Pseudo-Turpin, de la dernière partie des expéditions de Charlemagne en Espagne. On se souvient que le texte d’Oxford situe son récit au terme de sept années de guerre (v. 2); le PsT s’est engouffré dans la brèche, peut-être après d’autres textes perdus, pour conter quatre expéditions en Espagne, marquées par les exploits de Charlemagne (combat contre ) et de Roland (combat contre ). C’est à la fin de la dernière expédi- tion qu’intervient la tragédie de Roncevaux. M et Da suivent ce schéma, le premier faisant seulement de plus larges emprunts au PsT que le second.

2.2. Circonstances de la trahison de Ganelon Ganelon est envoyé à Saragosse auprès des rois Marsile et Baligant pour leur demander soumission et tribut: c’est ce qu’indique le PsT, alors que O et les Ron- cevaux ne mentionnent que Marsile. Mais le récit de cette ambassade n’est pas fait dans la chronique latine: seules les conséquences en sont indiquées: trahison de Ganelon, fausses promesses des païens, dons de ceux-ci à Ganelon (vingt chevaux chargés d’or). Il est ajouté que mille belles Sarrasines sont envoyées aux Français, dont certains forniqueront avec elles, ce qui causera leur mort. Le martyre purifiera ces pécheurs, et ceux qui n’ont point péché mourront quand même, afin de recevoir la récompense du martyre. Nos deux proses ne reprennent pas ce passage édifiant. La place de l’ambassade est différente dans M et dans Da. Aubert termine d’abord l’ensemble des combats engagés contre les Espagnols (mort de Ferragut, conquête de Morinde); M situe au contraire l’ambassade avant la lutte finale contre Agolant, fidèle en cela à son habitude d’entrelacer les événements. Le schéma de l’ambassade funeste est le même dans les deux récits. Ganelon se rend à Saragosse et livre son message, mais un Sarrasin se rend compte qu’il est prêt à trahir. Le pacte maudit est conclu le lendemain, et Ganelon est comblé de présents. Le récit est plus développé dans Da, avec une analyse psychologique plus poussée, et les raisons alléguées à la trahison sont différentes. Pour M, Ganelon, en se rendant à Saragosse, tendoit toudis que ilh pouwist metre Ogier a mort, Rollant, Olivier et les altres bons che- valiers, affin qu’ilh fust vengiez d’eauz, et qu’il awist Charle le roy a conseilhir tous seuls, n’y awist nuls qui li debatist chu qu’ilh diroit (p. 128).

Dans Da, Ganelon est furieux d’avoir été proposé par Roland pour cette mission: et, de celle heure en avant, il print Charlemaine et Rolant en si grant hayne qu’il disposa en son cuer que, par trahison, s’il pouoit, il les feroit morir (2, p. 242)11.

À Saragosse, Ganelon fait son «mandement», et M montre tout de suite l’esprit de trahison à l’œuvre: Ganelon fait «I male conclusion», car il déclare que Charle- magne n’aurait pas exigé de tribut de «vitailhe» (de nourriture) «si ne fut Ogier, Rol- lant, Olivier, et chis en parlerent mult outrageusement» (p. 129). Le même texte ne mentionne pas de réaction violente de Marsile devant les exigences de Charlemagne. L’analyse de Da est plus subtile, plus développée et s’inspire davantage de la version traditionnelle de O ou des Roncevaux. Ganelon salue Marsile au nom de son Dieu («cellui que tous Sarrazins aourent vueille sauver le roy Marcille et toute

(11) Cette raison apparaît aussi à la fin du dis- land et Olivier «me jugerent de venie chi; que Dies cours de Ganelon à Saragosse dans M: Ogier, Ro- m’en puist vengier» (p. 129).

sf177.indb 440 19/12/15 01.04 Relectures de Roland et de Roncevaux aux xive et xve siècles 441

sa compaignie!», 2, p. 243), ce qui est une première compromission avec l’ennemi. Le roi garde le silence, ainsi que les autres Sarrasins, d’où la frayeur du messager, qui commence son propos par une formule d’excuse: «A vous, sire roy, sui envoié, mais je n’ay autre charge que vous baillier ceste lettre et ne sçay le contenu d’icelle» (ibid.). Il expose la nécessité de se soumettre aux injonctions de la lettre, sauf à s’exposer à de graves conséquences. Puis il s’enhardit et demande, au nom de Charles, que Marsile vienne à Pampelune se faire baptiser, en soulignant la puissance militaire de l’empe- reur. Cette gradation paraît fort bien observée. Pour toute réponse, Marsile veut lancer un couteau à Ganelon, mais la reine l’en empêche, ce que regrette le narrateur; en fait, la reine s’est «enamouree» du messager, ce qui reprend l’intervention de Bramimunde à la laisse L de O, LVII de V7. Mais il déplace cette intervention et fait de la reine un véritable conseiller. Elle rappelle à son époux les garanties qu’on doit accorder à un messager, et Marsile s’apaise. La lecture de la lettre de Charles lui cause un nouveau déplaisir, mais il ne menace plus Ganelon: il l’interroge sur la puissance de Charlemagne, qui dépend beaucoup de Roland. Le stratagème futur est déjà en germe dans la description que fait Ganelon de la position de Roland lorsque l’armée est en marche: toujours à l’avant-garde lorsqu’il s’agit de marcher au combat, à l’arrière-garde lorsque l’on revient de la bataille (2, p. 245): c’est déjà annoncer la place à laquelle sera affecté, sur son conseil, le neveu de Charles. Deuxième temps de la narration: une pause intervient, dans laquelle un person- nage déclare que le messager va trahir les siens. Dans M, c’est Marsile lui-même qui, tandis que Ganelon est parti à son hôtel, déclare à ses barons: «Li rois Charle nos at tramis i chevalier qui est i trahitour» (pp. 129-130), qui permettra de faire mourir «li Danois», Roland et Olivier. Blanchardin est envoyé à Ganelon, qui détaille le piège: on enverra à Charles le tribut qu’il réclame, avec promesse de venir à Paris en vue du baptême,

et de chu li livreis plenges de gens de nient, et soient bien vestus, et dites qu’ilh sont de grant sanc estrais (p. 130).

Tous les «hauls princes», c’est-à-dire les trois précédemment cités, seront à l’arrière-garde. Blanchardin rend compte de sa mission, et au matin Ganelon voit à nouveau Marsile, qui lui remet une «cheree» d’or, qu’il conduit à Bordeaux (p. 131). Ce deuxième temps est considérablement développé chez Da; c’est un neveu de Marsile qui prend son oncle à part et lui confie ses soupçons:

Sire, j’ay veu muer cestuy crestien sa maniere tantost qu’il a parlé de Rolant. Espoir qu’ilz heent l’un l’autre, et vouldroit cestui tresbien le dommage de Rolant, lequel seroit la destruc- tion de Charlemaine et des siens et le grand prouffit de vous et des vostres (2, p. 245).

Il s’agit donc de conforter Ganelon dans sa haine en l’achetant avec des présents. Nouvelle entrevue avec Marsile, qui ne renonce pas tout de suite à ses menaces mais dépeint aussi en Ganelon un fin débatteur: Marsile ne peut lui ôter la vie, dit-il,

car, quant il vous eust pleu me faire morir en ce monde, si fust l’ame demouree vivant pardurablement, laquele est faitte pour le corps (2, p. 247).

Cette argumentation de type théologique n’est évidemment pas une manière de réhabiliter le traître, mais plutôt de souligner son art du langage (et donc du men- songe); Marsile lui déclare du reste:

sf177.indb 441 19/12/15 01.04 442 François Suard

Pas ne perdy son temps qui premier te manda a l’escole, car tu es bien duit de ton fait (ibid.).

D’autres textes du xve siècle, comme la prose bourguignonne de Renaut de Mon- tauban, souligneront de leur côté cet art de la parole de Ganelon. La trahison est maintenant proche, mais elle n’est pas encore scellée: le prosateur prend son temps. Abandonnant le ton de la menace, Marsile promet des richesses et offre à boire à Ganelon dans une coupe merveilleuse; celui-ci accepte, et Marsile se dit «que le marchié se feroit comme il fist». Il emmène ensuite Ganelon sur un tertre, d’où il lui fait admirer toutes ses troupes, et Ganelon déclare enfin qu’il accepte, si les promesses de Marsile sont exécutées, de lui livrer «Rolant, Olivier et les douze pers de France avec la fleur de la chevalerie crestienne» (2, p. 249). Dans le détail du guet-apens, la formulation de Da n’est pas très claire. Le traître commence par dire que Roland et Ogier ont l’habitude de conduire l’avant-garde, mais qu’Ogier est aussi de temps à autre à l’arrière-garde. «Si ordonneray Rolant et Ogier aler avant et les douze pers aprés, de quoy je seray creu sans quelque souspe- chon» (2, p. 249). Tel quel, le texte est à peu près incompréhensible, d’une part parce que Roland ne fera pas l’avant-garde, et que le moment venu Ganelon le désignera, suivant la tradition, pour l’arrière-garde, d’autre part parce que Roland fait de toute façon partie des douze pairs. Le plus vraisemblable est que le texte soit ici corrompu, et qu’il faille lire «Sy ordonneray Ogier aler avant et Rolant et les douze pers aprés». Éléments supplémentaires, peut-être ajoutés par Da pour assurer la liaison avec Aspremont: Ganelon décrit Roland à Marsile en mentionnant son puissant cheval (non nommé), l’épée et l’ qu’il a pris a Aumont (2, p. 250).

2.3. L’ambassade de Blanchardin et ses conséquences Dans M, Blanchardin part aussitôt annoncer à Charles la feinte soumission de Marsile. Il est accompagné par des otages qui constituent eux aussi un leurre: ce sont de pauvres gens habillés en personnages de haute noblesse: «et les at informeis qu’illh dient qu’ilh sont de plus grans c’on powist troveir en regne de Saragosse» (p. 136): ils seront comblés de richesses à leur retour. L’ambassade arrive auprès de Charlemagne, et les propositions de Marsile sont acceptées: le retour de l’empereur en France peut commencer. La suite de l’ambassade de Ganelon est très différente dans Da, car les Croniques reviennent en quelque sorte au point de départ du récit de Roncevaux et font comme si la trahison n’était pas encore scellée des deux côtés. Tandis que Ganelon, à son retour auprès de Charlemagne, expose brièvement les résultats de sa mission (il «fist rapport de ce qu’il avoit exploittié devers Marcille», 2, p. 251), c’est-à-dire la pro- messe de soumission du Sarrasin, Da nous montre Marsile peu confiant dans la fidé- lité de Ganelon au pacte conclu, et c’est pour cette raison qu’il envoie Blanchardin en ambassade. On voit donc que Da abandonne ici le schéma du PsT suivi par M, et qu’il se prépare à renouer avec la tradition de la vulgate rolandienne, tout en justifiant ce qui suivra, c’est-à-dire une seconde ambassade de Ganelon. L’ambassade de Blanchardin se déroule donc conformément aux versions en vers, ainsi que le conseil tenu par Charles, avec les prises de position antagonistes de Roland et de Ganelon, l’appui donné par Naimes à la position du traître, les proposi- tions faites par les barons pour porter le message, et la désignation finale de Ganelon par Roland. On notera que le souci de faire le lien avec la première visite à Marsile est sensible dans le propos de Roland, qui justifie sa proposition d’envoyer Ganelon en rappelant qu’«il a desja congnoissance a l’admiral Marcille, et […] congnoit son langage et sa maniere, car il a esté devers luy et parlé» (2, p. 256); il en va de même

sf177.indb 442 19/12/15 01.04 Relectures de Roland et de Roncevaux aux xive et xve siècles 443

dans l’expression de la colère de Ganelon contre Roland, car «il fault que je retourne dont je suis eschappé une fois par la grace de Dieu» (2, p. 257). Ganelon part donc pour Saragosse en compagnie de Blanchardin, mais il reste muet sur ses intentions: que pourrait-il dire en effet de nouveau, puisqu’on sait qu’il est décidé à trahir, ce qui n’est pas le cas dans la version de O ou dans les Ronce- vaux? Blanchardin n’a donc pas à sonder son compagnon. L’entrevue avec Marsile se déroule suivant les étapes habituelles: message de Ganelon, colère de Marsile, atti- tude courageuse du messager, qui montre que Da a bien compris le personnage: c’est un chevalier courageux, «et n’avoit en son fait faulte que de loyaulté» (2, p. 260). Comme dans les textes versifiés, Langalie (l’algalife), mais aussi Baligant – souvenir du PsT –, interviennent pour modérer la colère de Marsile, et la trahison est confir- mée12: «Rolant, Olivier et l’orgueil de France demourront derriere» (2, p. 263). Ga- nelon jure sur son épée, et dix preux sarrasins jurent de leur côté la mort des douze pairs. Comme otages, «Marcille ordonna vingt Sarrazins telz que bon lui sembla, et les fist tres bien habillier comme grans seigneurs»: il y a donc tromperie, et Da rejoint ici M. Le traître reçoit «dix sommiers chargiés de finance» (2, p. 264), tandis que vingt autres sont destinés à Charles.

2.4. La désignation pour l’arrière-garde Après le premier (M) ou le second (Da) retour d’ambassade, la trahison de Ga- nelon se concrétise avec la désignation de Roland pour l’arrière-garde. Avant cet acte décisif, Da, qui s’inspire toujours des modèles versifiés, mentionne un songe néfaste de Charles (2, p. 265; cf. O ll. 56-57; V7 ll. 63-64), dont l’empereur ne tiendra pas compte. Pour la désignation des places dans l’armée qui fait retraite, le résultat est le même dans les deux textes et suit la tradition, mais certains traits sont différents. Dans M, conformément à la promesse qu’il a faite aux Sarrasins, Ganelon propose de mettre comme «conduiseur» de l’arrière-garde Ogier, Roland et Olivier. Charles ac- cepte ce «bon conselhe», mais plusieurs barons protestent, et Ogier accuse Ganelon d’être «trahitour […] et lere parfais» (p. 138). Les barons décident qu’Ogier condui- ra l’avant-garde, que Naimes, Thierry, Salomon et Renier resteront avec l’empereur, et que tout le reste des combattants sera à l’arrière-garde. Dans Da, et conformément à la tradition de la vulgate, Roland et Olivier sont désignés par Ganelon pour l’arrière-garde, et Ogier, qui n’est pas intervenu dans le débat, conduira l’avant-garde. Comme M, le chroniqueur signale un mouvement de protestation des barons, d’autant que Roland a mentionné lui aussi un songe qui lui a révélé que les pairs «sont tous venduz et trahis» (2, p. 266): ce songe n’est pas mentionné dans la vulgate; il est probablement ajouté par Da. Naimes, qui craint aussi une trahison, conseille que la moitié de l’armée soit confiée à Roland, qui la refuse.

2.5. La bataille On notera l’étymologie de Roncevaux, donnée par M:

se li nomons Ronchevale por les ronche qui croisent en celle valee, car li valee en est toute plaine de bussons de ronche qui porte I fruit que ons appelle meure (p. 139).

Le récit de la bataille, on l’a dit, est des plus brefs dans le PsT. Même si certains éléments en sont repris par nos prosateurs, ils devront être étoffés par des données

(12) C’est le titre du chapitre: «Comment la tra- Guennelon et l’admiral Marcille», p. 262. hison de Rainchevaulx fu confermee par le desleal

sf177.indb 443 19/12/15 01.04 444 François Suard

inspirées par la vulgate versifiée, amplification qui peut toutefois résulter d’une ver- sion perdue du PsT, suivie par M et Da. Le début du combat est très différent selon les deux textes. S’écartant de la vulgate, M montre «Balduin de Niez […] le freire Rollant de part sa meire et astoit fis Genes» apercevant le premier l’ennemi. Le roi Namelon (M multiplie à plaisir les homonymes ou, dans le cas précis, quasi-homonymes) accuse aussitôt Ganelon de trahison, ce qui entraîne la protestation de Baudouin. Namelon, qui sait «droit espan- gnois», parlemente avec les Sarrasins, et l’un d’eux affirme que Ganelon «comme faux et trahitre vos at vendut, mains ilh at fauseit que li Danois n’est avecque vous»; il ajoute que «li ostage que Blanchardin donat ne valent pais le fuelh d’on sapin» (p. 140). Un Sarrasin propose un combat de douze contre douze – souvenir probable du premier engagement de la bataille dans la vulgate –: six Sarrasins sont tués et six blessés. La version de M, qu’il l’ait inventée complètement ou trouvée dans son modèle, souligne de toute façon l’importance d’Ogier, attitude constante chez lui: les Sarra- sins recherchent la mort de ce héros avant même celle de Roland. On verra encore par la suite des preuves de la prééminence que M accorde au Danois. La version de Da est au contraire proche des Roncevaux, avec la découverte, faite du haut d’un tertre par Roland et Olivier13, de la masse des Sarrasins, et la prière adressée à Dieu par Roland. Dans V7, elle se termine par la demande de vengeance contre Ganelon (vv. 1561-62), alors qu’elle est beaucoup plus pieuse chez le chroni- queur:

si me vueilles estre propice et misericors, non mie selon noz deffaultes et meffais, mais selon ta sainte grace, amour et pitié, et veulles noz pechiés pardonner et les ames de ceulx qui morront en ton service recevoir en ta tres sainte gloire, ou tu regnes et regneras sans fin (2, p. 270).

Ce ton est sans doute inspiré par le commerce avec le PsT. La découverte des païens conduit Olivier à prier Roland de sonner du cor: il y a deux demandes consécutives chez Da, alors qu’elles sont séparées par la première bataille dans M. On notera que ces demandes sont absentes du PsT, ce qui renvoie Da et M à la tradition de la vulgate. Dans les deux textes, la première bataille contre l’ennemi est victorieuse, mais Marsile vient à la rescousse, avec Langalie dans Da, Baligant dans M. Da, qui suit décidément la vulgate, ne néglige pas le fameux passage des présages de la mort de Roland:

Il faisoit si horrible temps que chascun pensoit estre le finement du monde, pour les signes qui se demoustroient es contrees (2, p. 275),

signes que le chroniqueur développe sur un long paragraphe; Da connaît aussi le passage qui concerne Gautier, alors que M l’ignore. Dans les deux textes, Roland, voyant le massacre des siens, annonce son inten- tion de sonner du cor, provoquant ainsi les reproches d’Olivier. Dans Da, Turpin, comme dans la vulgate, apaise la querelle, et c’est l’occasion pour le chroniqueur de constater qu’il y a deux versions à propos de l’archevêque: l’une le fait survivre à la bataille, dans un livre «abregié en beau langage de prose, extrait es librairies a Saint

(13) Notons le détail réaliste: les deux compa- la tête baissée, «affin qu’ilz ne fussent veus» (2, gnons, en joignant ce poste d’observation, ont pp. 268-269).

sf177.indb 444 19/12/15 01.04 Relectures de Roland et de Roncevaux aux xive et xve siècles 445

Denis» (3, p. 7) par un auteur qu’il n’est pas besoin de nommer (il s’agit sans doute d’une version du PsT), et l’autre, qui le montre mourant en présence de Roland. Et il ajoute «Si ne scay lequel croire des deux», ce qui ne l’empêche pas de continuer à suivre la vulgate. Dans M, qui ne peut évidemment faire intervenir Turpin, c’est un certain Aristant14 qui invite Roland à sonner du cor. Ici encore, pas de rapport avec le PsT. Le son du cor est porté «par la grace de Dieu» (Da), par l’ange de Dieu (M) jusqu’auprès de Charlemagne, que Ganelon s’efforce de tromper, avant d’être arrêté par Ogier, sur la demande de celui-ci dans Da. Dans M, le rôle d’Ogier se distingue désormais nettement de la vulgate, et donc de Da. Il invite en effet son oncle Gon- debeuf, roi de Frise, à rejoindre Roland; c’est lui qui, sans trouver le héros, tuera d’abord Baligant, puis Marsile, après que Roland lui aura coupé le poing droit: nou- velle preuve du rôle prééminent que M entend donner à Ogier dans la bataille, mais aussi du fait qu’il s’écarte ici de la version du PsT, où Roland tue Marsile. Da, lui, ne fait pas mourir Marsile au cours de la bataille menée par Roland; ce dernier, affron- tant le païen, «lui emporta l’espaule a tout le bracs d’icellui coup» (3, p. 15), à la suite de quoi Marsile s’enfuit à Saragosse, ce qui conduira, conformément à la vulgate, à l’intervention de Baligant. Da ne raconte pas la mort de Turpin, «car espoir estoit il demouré en la com- paignie de Charlemaine, laquele chose se puet bien faire et croire aussi par ce que cy aprés vous devisera l’istoire» (3, p. 11). Il conte en revanche la mort d’Olivier, grièvement blessé par Langalie avant de tuer celui-ci (c’est la version de la vulgate), puis frappant Roland sans le reconnaître. À partir de ce moment, M s’écarte de la vulgate. Chez lui, Olivier ne meurt pas en présence de Roland: il lui fait ses adieux et s’éloigne du champ de bataille, conduit par un chevalier, mais les Sarrasins tuent celui-ci; ils traînent Olivier et le lient «a i arbre de III loiiens des propres cencles de son diestrier, puis ont talhiet del chief jusqu’a tallons tout a coroies» (p. 144). Ce trait, emprunté au PsT, se retrouvera cependant plus tard chez Da, lorsque sera opérée la quête des morts. Viennent ensuite les derniers moments de Roland, avec sa vaine tentative pour briser Durendal, et le meurtre du païen qui voulait lui dérober l’arme. À partir de ce moment, Da entremêle le souvenir de la vulgate et la tradition du PsT, qui le rap- proche de M. Roland trouve le corps d’Olivier «entre plus de mil paiens» (p. 17), ce qui est caractéristique de la vulgate, mais cela ne l’empêche pas, lorsque Charlemagne fera rechercher les corps des pairs, de montrer Olivier martyrisé comme dans le PsT et dans M: Ilz le trouverent mort, gesant estendu en croix, lié de hars a quatre pielz fichiés en terre, despoullié comme tout nu, escorchié par semblant depuis le col jusques es piés, mais non mie partout» (3, p. 43).

De même que M et le PsT, Roland sonne du cor «pour savoir se crestien ne paien se adrecheroit point a luy» (3, p. 19), car il souhaite confier son épée. Puis il se livre à un planctus qui développe considérablement les laisses 176 de O et 237 de V7. Dans M, le héros insiste à ce moment sur sa culpabilité à l’égard d’Ogier, d’Olivier et des Français: Hey! bon Danois, flour des flours, de sens, proeche et puissanche, je moy repens que je toy corocha onques; or le moy pardonneis, car en morant vous prie merchi, mains vos ne altre

(14) Il y a un Arastagnus rex Britanniae cité par le que le ms. du Vatican Reg. 624 traduit par Arus- PsT au chap. 29 parmi les princes enterrés à Belin, tans.

sf177.indb 445 19/12/15 01.04 446 François Suard

al siecle ne vieray. Cuens Oliviers, compains que j’ay tant ameit, vos asteis mors, dont j’ay la culpe, car, quant mon corps refusay a soneir, je mis al mort XXm hommes, chu que Genes avoit vendut je lyvray parfaitement par mon orguilhe (pp. 146-147).

Roland rappelle en effet les circonstances, propres à M, dans lesquelles Roland s’est montré jaloux d’Ogier et a même voulu le tuer15. En revanche, il n’est pas question d’Aude. Da met surtout en avant la douleur qu’éprouve Roland devant la séparation d’avec Aude:

A Dieu, Ande, chiere et leale amie, la plus belle du monde, plaine de bonté et de toute honneur, gracieuse et bien adrechie! Au jour d’uy se fait la separation que jamais ne puet estre rejointe; au jour d’uy sont voz amours perdues et les miennes esgarees a tousjours mais. Las! que tant aura vostre cœur de grief douleur a souffrir, quant il saura l’adventure mortele et tra- hison mauvaise qui fait ainsi departir noz leales amours! (3, p. 20).

La tradition de la soif de Roland, que Turpin, avant de mourir, tente en vain de désaltérer, est présente dans la vulgate (O l. CXLV; V7 l. 224). On la trouve dans les deux proses, mais fidèle à la tradition du PsT, où c’est Baudouin, frère de Roland, qui cherche en vain de l’eau. Da semble connaître une tradition orale selon laquelle la soif est la cause essentielle de la mort du héros, argument qu’il réfute:

Et pour ce que pluiseurs dient en parler commun que Rolant ne moru si non de soif, je, qui ay escript ce livre, ne le vueil mie ainsi confermer, car, supposé qu’il eust eu toute l’eaue du monde, il estoit feru tant mortellement que, sans la grace de Dieu, jamais n’en pouoit eschaper (3, p. 17);

il en tient compte cependant, car la soif est présente dans le planctus de Roland:

et endure tant de soif que a paine puis je mouvoir mes levres, et se j’eusse a boire, je ne mourroie point ancoires (3, p. 20).

Conformément au PsT (chap. 23), Baudouin et Thierry sont présents dans Da aux derniers moments de Roland; M ne mentionne en revanche que Baudouin. C’est le frère de Roland qui annonce à Charlemagne le massacre de l’arrière garde; dans Da, il emporte en plus, sur la recommandation de Roland, l’épée et l’olifant. M ne men- tionne pas ce trait, pas plus que le PsT ne l’avait fait, mais les deux proses montreront pourtant, comme le PsT, l’épée et l’olifant près du corps de Roland à Blaives16: Da peut avoir voulu combler un manque dans l’information. M est sobre à propos de la mort de Roland: «en riant s’en partit l’arme que li angele, en chantant, ont enporteit» (p. 147). Da est plus prolixe et suit de très près le PsT dans les gestes qui accompagnent la commendatio animae du héros: «Prist la pel de son corps entre le cœur et les mamelles» (3, p. 22) et déclare son espérance de résurrection du corps: ‘en ceste propre char verray mon saulveur’»; «puis mist sa main sur ses yeulx, et dist aussi par trois fois ceste parole: «Et ces yeulx mesmes te verront tenir ton jugement» (ibid.)17. Mais de son côté M cite in extenso le passage où Turpin à la vision des anges emportant au ciel l’âme de Roland (p. 148).

(15) Voir A. Goosse, J. d’Outremeuse, Le My- fortiter tenens manibus et eciam evellens ait: Et in reur des Histors, fragment du second livre, Bruxelles, carne ista videbo Deum salvatorem meum. Et misit 1965, pp. 105-110. manus suas super oculos, et tribus vicibus simili- (16) PsT, chap. 29; Da, 3, p. 73; M, p. 165. ter ait: Et oculi isti conspecturi sunt» (Meredith- (17) PsT: «Tribus vicibus carnem suam et pellem Jones, p. 199).

sf177.indb 446 19/12/15 01.04 Relectures de Roland et de Roncevaux aux xive et xve siècles 447

Nous arrêterons ici l’analyse détaillée du récit fait par les deux proses, nous contentant désormais de quelques remarques. Baudouin joue dans M un rôle plus important que dans Da, affirmant devant Charlemagne qu’il a bien Berte pour mère, mais qu’il ne saurait être fils du traître Ganelon (p. 149). Da est conforme à la vulgate pour la suite immédiate de l’arrivée de Charles sur le champ de bataille, à savoir l’intervention de Baligant, la grande bataille qui se déroule alors et la mort du païen. Cette séquence est bien entendu ignorée de M, puisque Baligant a été chez lui tué par Ogier: le chroniqueur passe tout de suite à la prise de Saragosse. Les deux textes se rencontrent à nouveau en associant Galien, le fils d’Olivier, à la suite de l’histoire. Le jeune homme est présenté rapidement dans M comme «le filh bastar Olivier de Viayne qu’ihl gagnat en le voie oultremere a Boregas, et astoit chesti jour venus en l’oust pour veoir son peire» (p. 150). Da mentionne Galien au moment de la quête des morts, mais s’intéresse surtout aux circonstances de sa conception, en résumant le Pèlerinage de Charlemagne (pp. 43-46); le jeune homme, une fois arrivé à Roncevaux, voit le corps de son père et se lamente; le prosateur n’a pas grand-chose de plus à en dire, ajoutant seulement que «fu Galien en la grace de Charlemaine, car il fu depuis vaillant a merveilles, et au restor d’Olivier servi l’empereur» (3, pp. 46-47). Notons encore dans les deux proses le miracle accompli par Dieu pour per- mettre de distinguer les corps des chrétiens de ceux des païens: dans M les Sarrasins «devinnent estos d’espines pendantes, qui ne portent ne fruis ne flours: bien le voient chis qui passent la. Et li cristoiens demorerent tos, et ensi furent conneus» (p. 151); de même dans Da: «les corps des paiens estoient convertis en haies et buissons, es- pines et ronches, entre lesquelles estoient les bons et vaillans crestiens» (3, p. 42). Ce miracle ne figure pas dans le PsT, dont il retrouve pourtant l’esprit. Les conséquences de la bataille de Roncevaux, à plusieurs différences près, sont conformes à la vulgate: Ganelon s’enfuit par deux fois, est repris; Aude meurt de douleur en apprenant la mort de son ami; Pinabel est vaincu par Thierry, Ganelon est supplicié. Da est nettement plus développé que M et plus fidèle au schéma des Roncevaux, par exemple lors des propositions en vue du supplice qui doit être infligé à Ganelon, propositions multiples dans la vulgate (V7, ll. 436-441, Da 3, pp. 97-98). M ne retient pour sa part que la proposition de Baudouin (que «ses corps fust a coroie trenchiet de jour en jour» et qu’à la fin «en fut fait IIII pieches et as portes drechiez», p. 164)18: dans Da, comme dans la vulgate, Ganelon sera «seulement» écartelé. Mais d’autre part Aubert, conformément à la logique qu’a suivie de son côté un ms. comme Venise 4, intercale la prise de Narbonne par Aimeri entre la conquête de Saragosse et les conséquences de la mort de Roland (mort d’Aude, supplice de Ganelon).

3. Conclusions

3.1. On a noté de grandes ressemblances entre la version du Myreur et celle des Cro- niques, dont la première et la plus importante est le mélange entre la vulgate des Roncevaux, représentée surtout par V7, et la tradition du Pseudo-Turpin. Il n’est pas impossible que cette dernière tradition ait été représentée par un texte qui, pour la bataille, était plus développé que celui, remarquablement bref, qui nous est parvenu. Le fait que le miracle des Sarrasins transformés en ronces se trouve dans les deux

(18) Ce supplice semble être l’écho de celui que les Sarrasins ont infligé à Olivier.

sf177.indb 447 19/12/15 01.04 448 François Suard

proses tardives alors qu’il est absent du PsT, mais tout-à-fait conforme à son esprit, va dans ce sens.

3.2. Mais les différences entre les deux récits sont nombreuses. La plus apparente est le culte rendu par Jean d’Outremeuse à Ogier en cette partie du récit comme dans l’ensemble de sa chronique. Rappelons que c’est Ogier plus que Roland dont les Sar- rasins cherchent la mort, que c’est lui qui tue les principaux adversaires des chrétiens, Marsile et Baligant. Roland reste au contraire le héros principal chez David Aubert. Une autre différence très importante est la réduplication par Da de l’ambassade de Ganelon auprès de Marsile, la première représentant la tradition du PsT, la seconde celle de la vulgate, alors que M ne connaît que la première: on peut ajouter que, d’une manière générale, M est plus fidèle que Da au PsT, et Da plus fidèle aux Roncevaux qu’à la Chronique de Turpin. Une troisième différence, aussi sensible, concerne l’écriture des proses. Celle de Jean d’Outremeuse est d’abord celle d’un chroniqueur: assez sèche, elle rassemble les faits mais ne s’attarde pas sur les sentiments des personnages. Chez lui le personnage de Roland diffère peu de la vulgate. Il est plus complexe chez David Aubert, et se montre plus sensible, avant même de sonner du cor, à la mort de ses compagnons; il manifeste son affection pour Aude. De même, la mort de celle-ci ne fait l’objet que d’une seule phrase dans M: «Aprés renvoiat Charle Olivier a Viane; et deveis savoir que Belaide morut dedens thier jour, et fut ensevelie joste Rollant» (p. 165). Le même passage est développé sur quatre feuillets entiers dans Da et insiste sur le pathétique des scènes décrites, inspirées par V7. D’une manière générale, le travail de Da est celui d’un écrivain qui s’intéresse au comportement des personnages, l’analyse avec finesse et recherche un style soutenu, d’une grande qualité esthétique, et qui sait noter un détail significatif. Ainsi, lorsqu’Aude meurt, Charlemagne qui l’a reçue dans ses bras croit à une pamoison, mais il «la senty beaucoup plus pesante qu’il n’avoit acoustumé par avant. Et adont la cuida relever de bout, quant morte la trouva» (3, p. 71).

3.3. Quelles peuvent être les sources des deux textes? Il est difficile d’aller au-delà du constat de l’emprunt par les deux proses à une double tradition, celle du Pseudo-Tur- pin et celle des Roncevaux, traditions qui ne sont suivies fidèlement ni par l’un, ni par l’autre des prosateurs. Dans certains cas, on peut être sûr que les divergences avec la tradition sont l’œuvre des adaptateurs: tout ce qui chez M met Ogier en valeur, voire au détriment de Roland, est de cet ordre; très probable également est l’attribution à Da de la réduplication de l’ambassade de Ganelon auprès de Marsile. Il est clair aussi que Da est un compilateur autant qu’un écrivain, qui n’hésite pas à résumer une chan- son extérieure à son sujet (le Pèlerinage de Charlemagne) à propos d’un épisode de celui-ci (l’arrivée de Galien auprès de Charlemagne)19, ou à rappeler un épisode rele- vant de la tradition de Renaut de Montauban (le poing coupé de Marsile par Roland à Angorie, qui explique la haine du Sarrasin)20. Les deux proses suivaient-elles un modèle unique qui, associait déjà, tout en les modifiant, la tradition du Pseudo-Turpin et celle de la vulgate, ou bien ont-elles «pioché» tour à tour dans l’une ou dans l’autre? David Aubert s’est-il inspiré de Jean d’Outremeuse, dans la version du Myreur copiée par Jean de Stavelot? Avec l’épisode du Sarrasin qui montre à Roland celui qu’il croit être Marsile – épisode que Da emprunte au PsT mais que M néglige –, il est clair que le Myreur ne peut être le

(19) 3, pp. 43-46. (20) 3, pp. 15-16.

sf177.indb 448 19/12/15 01.04 Relectures de Roland et de Roncevaux aux xive et xve siècles 449

seul modèle de Da. De toute façon, et quel que soit le modèle suivi, les deux prosa- teurs l’interprètent avec liberté, tout en laissant subsister des contradictions. Ainsi Da reconnaît qu’il existe au sujet de Turpin plusieurs traditions, mais choisit celle qui fait mourir l’archevêque à Roncevaux, tout en signalant plus tard sa présence lors du service funèbre des guerriers morts, «car le noble Turpin estoit illec, que aucuns disoient qu’il estoit mort, et y fist le service devotement» (3, p. 47). La seule question à laquelle nous pouvons proposer une réponse est celle de savoir pourquoi les deux prosateurs ont mêlé la tradition turpinienne et la vulgate. C’est d’abord une affinité de perspective: il ne s’agit pas pour eux d’isoler les événe- ments de Roncevaux, comme ils le sont dans la vulgate. Ces événements prennent place à leurs yeux dans une succession historique, telle que la Chronique de Turpin, connue par de multiples mss, la présente. Par ailleurs la mort de Roland, dans ce texte, a pris une coloration religieuse qu’il est difficile d’oublier. Mais le PsT dit peu de choses sur la bataille proprement dite, d’où la nécessité de recourir à la vulgate, en ajoutant éventuellement des péripéties (les exploits d’Ogier dans M) pour pouvoir construire un récit suffisamment étoffé. La vulgate, telle que nous la connaissons, pouvait suffire à alimenter les re- cherches des prosateurs; les éléments donnés par le PsT demandaient de leur côté à être complétés. L’ont-ils été à l’initiative des prosateurs, ou bien ceux-ci ont-ils connu une version différente de celles qui nous sont parvenues? Nous l’ignorons. Sans avoir d’argument indiscutable pour le prouver, nous croirions pourtant volontiers qu’un texte associant vulgate et PsT, et les transformant sur certains points, a existé et a pu servir de modèle à M, puis à Da.

françois suard

sf177.indb 449 19/12/15 01.04 Hozumi Orii

Panurge’s Quest and the Sixteenth-Century Idea of the Labyrinth

Abstract Ra­be­lais’s Tiers Livre is sometimes described as a labyrinth of signs. Is it, then, based on the idea of the labyrinth? If, as some researchers assert, this narrative has a concentric structure, then it is similar in form to the traditional church labyrinth. However, an important differ- ence exists in that church labyrinths suggest Christ’s Harrowing of Hell, whereas Panurge, the antihero of the Tiers Livre, neither descends into the underworld nor combats the Devil, but is instead seduced by him. This paper contends that Ra­be­lais, on the basis of the concept of the labyrinth, has substituted hell with earthly life and Christ, the combatant hero, with a cowardly antihero. To confirm this hypothesis, this paper analyses the representations of the underworld, the Devil and the sword in Ra­be­lais’s narrative fiction. In parallel, it investigates the influence of Erasmus’ Enchiridion, focusing on its view of this life as a labyrinth, and con- trasts Panurge’s words and actions with the Erasmian ideal of the Christian soldier. Finally, it proposes a new interpretation of the praise of the herb Pantagruelion, comparing Rabe­ ­lais’s description of the plant with the flight of Daedalus from the Cretan labyrinth and with the resurrection of Christ from the underworld.

In Ra­be­lais’s Tiers Livre de Pantagruel, Panurge worries about whether to get married1. At his master’s recommendation, he attempts various divinations and seeks advice from sages. However, he fails to achieve a satisfactory resolution and remains in a quandary until the end of the tale. François Rigolot comments that the entire Tiers Livre endlessly revolves around a single problem, calling it a textual labyrinth2. If so, were these features deliberately constructed? Did Ra­be­lais intend to create a labyrinthine text? According to Rigolot, he was probably inspired by Jean Bouchet’s Le Labyrinthe de Fortune and its influence is especially apparent in the episode re- garding Panurge’s dream. However, the Tiers Livre may be more deeply based on the idea of the labyrinth than Rigolot believes. In Greek mythology, a labyrinth appears as a structure designed to imprison the Minotaur which was eventually slain by Theseus. Because of this myth, the Minotaur or the battle between Theseus and the Minotaur was often depicted at a labyrinth’s centre during Roman times. Christianity, too, gradually adopted the motif of laby- rinths, which increasingly began to appear on cathedral floors, especially from the thirteenth century onwards. The introduction of labyrinths into Christian culture is related to the Apocryphal Gospel of Nicodemus, which claims that Christ entered the underworld during the time between his crucifixion and resurrection, bound Satan in chains and freed the imprisoned souls. Labyrinths had symbolized not only prisons

(1) References to the Tiers Livre are from the (2) F. Rigolot, Le labyrinthe du songe-mensonge: critical edition by Jean Céard. Ra­be­lais, Le Tiers de la “Fortune” de Bouchet au “Tiers Livre” de Rabe­ ­ Livre, Paris, Librairie Générale Française, 1995 lais, in Les Grands Jours de Ra­be­lais en Poitou, ed. (hereafter TL). All translations are the author’s, ex- by M.-L. Demonet, Genève, Droz, 2006 («Études cept where otherwise noted. rabelaisiennes», 43), pp. 119-132.

sf177.indb 450 19/12/15 01.04 Panurge’s Quest and the Sixteenth-Century Idea of the Labyrinth 451

but also the underworld since antiquity3, and with the Christianization of Greek and Roman mythologies, they seamlessly came to signify Christ’s Harrowing of Hell4. In the Middle Ages and the Renaissance, a labyrinth would have conjured up images of an armed warrior descending into the underworld to battle the Devil. This was due to its direct or indirect associations with heroes regarded as foreshadowing Christ, such as Theseus, who slew the Minotaur in the labyrinth; Hercules, who extracted Cerberus from the underworld and Aeneas, who also descended into the underworld and returned victorious. These elements are also present in the Tiers Livre. First, this book alludes fre- quently to the underworld or the act of descending into the underworld (for example, the stone of Sisyphus, the puncheon of the Danaids, the fictitious book De patria diabolorum, the golden bough, the Sibyl of Panzoust, Dathan and Abiram, Proser- pina’s close-stool and Demogorgon’s black chamber). In particular, Chapter 23 cen- tres on abduction by devils. Second, the story makes countless references to devils, who permeate the narrative, although the characters rarely discuss actual battle with them. This is unsurprising since, as Pantagruel points out, Panurge is seduced by the Devil: «L’esprit maling vous seduyt» (TL, 187). Third, arms and war are the story’s recurring themes; the prologue, for instance, extensively lists weaponry and armour and glorifies war, while the story’s body demonstrates an interesting concern with its avoidance. Along with his desire to get married, Panurge expresses his intention to withdraw from military service and lays down his arms. The combination of the three themes – descent into the underworld, seduction by the Devil and renunciation of arms – renders a portrait of a cowardly antihero who will not combat the Devil. His disavowal of warfare reveals his inability to wield his inner sword and results in spiritual disarmament. The descent into the underworld and battle with the Devil may, therefore, be regarded as the story’s framework. Hence, the connection between the Tiers Livre and the labyrinth, especially the church labyrinth, merits examination. Edwin Duval argues that the Tiers Livre is organized symmetrically around Chapter 255. If so, we may indeed compare the book’s structure to a traditional laby- rinth, which has a centre point and is roughly symmetrical (fig. 1). Some researchers, however, dispute Duval’s theory: Marie-Luce Demonet, among others, considering a historical change in the concept of the labyrinth, asserts that Ra­be­lais’s works lack a centre point6. Labyrinths, which had been unicursal during the Middle Ages, un- derwent secularization and diversification in the second half of the sixteenth century, when they increasingly began to exhibit forks and dead ends. According to Demonet, Ra­be­lais’s works are comparable to the later, more complex concept of the labyrinth and therefore have no fixed centre. However, this argument is misleading because whether unicursal or multicursal, nearly all labyrinths of the time had a centre point. Further, to obtain greater insight into this story’s structure, we must focus on tradi- tional church labyrinths as Panurge’s relationship with the Devil is a major theme of the story. Interestingly, labyrinths symbolized not only Christ’s Passion but also uncontrolled human passions. Also noteworthy is that this story begins with one of Christ’s last words on the cross, consummatum est. It is, therefore, conceivable that

(3) In Virgil’s epic poem, for example, a laby- (5) E. Duval, Panurge, Perplexity, and the Ironic rinth adorns the door of the temple visited by the Design of Rabe­ ­lais’s “Tiers Livre”, «Renaissance hero prior to journeying to the underworld (Ae- Quarterly», XXXV, 3, 1982, pp. 381-400. neid, 6.27). (6) M.-L. Demonet, Les textes et leur centre à la (4) C. Wright, The Maze and the Warrior: Renaissance: une structure absente?, in La Renais- Symbols in Architecture, Theology, and Music, sance décentrée, ed. by F. Tinguely, Genève, Droz, Cambridge, MA, Harvard University Press, 2001, 2008, pp. 155-173. pp. 37-86.

sf177.indb 451 19/12/15 01.04 452 Hozumi Orii

Ra­be­lais has, on the basis of the labyrinth metaphor, replaced hell with earthly life and Christ, the combatant hero, with a cowardly antihero.

Panurge’s quest and the theme of descent into the underworld

The connection between Panurge’s quest and the theme of descent into the under- world has already received some attention. Marcel Tetel studied De patria diabolorum, a fictitious book that appears in the discourse of Panurge, and stated that the Tiers Livre follows Panurge’s descent into the underworld7. Florence Weinberg focused on the structural similarity between the Tiers Livre and the Aeneid’s sixth book: «There is a circular structure in the Aeneid: the hero’s katábasis, his journey to Hades and back again. Panurge’s itinerary through the Tiers Livre imitates the sixth book of the Aeneid in that it, too, is a katábasis»8. Her interpretation is particularly noteworthy because it may explain both the ideological link and structural similarity between the Tiers Livre and the labyrinth. The beginning of the story depicts Panurge’s rule of his castellany Salmigondin, noting that he squanders several years’ income in two weeks through incessant ban- queting. Pantagruel warns him against extravagance by telling him the story of a man named Albidius, who set fire to his own house after squandering all his wealth solely because he wanted to say consummatum est. These words, however, were also Jesus’ final words before he was crucified. In addition, Pantagruel likens Panurge’s great feasts to «l’aigneau Paschal». The Book of Exodus explains that when the Lord slew the firstborn of Egypt, He instructed the Jews to kill one lamb per family and devour it by morning. He further specified that they were to burn any leftovers and sprinkle the lamb’s blood on the doorposts of their houses to avoid calamity. This story is regarded as foreshadowing the sacrifice of Jesus, the Lamb of God, on the cross. The combination of the phrases «l’aigneau Paschal» and «consummatum est», therefore, suggests Christ’s death, and we may infer that the passage is intended to highlight the difference between Panurge and Christ. Viewed in this light, it is scarcely accidental that the antihero praises debts and debtors in subsequent chapters. Just as his selfish extravagance (tout est consommé) contrasts with the Saviour’s self-sacrifice (consum- matum est), so his paradoxical economy, founded on debts, can be regarded as an inversion of the economy of redemption9. Thus, the Tiers Livre starts not only with Panurge’s extravagance and debts but also, on a deeper level, with Christ’s crucifixion and redemption, which suggests that the former’s itinerary through the story should be compared and contrasted with the latter’s Passion and descent into the labyrin- thine underworld. The scene immediately prior to the first divination also has profound implica- tions. First, Pantagruel describes the use of dice to predict one’s future as the Devil’s bait. However, Panurge disregards the danger and regularly carries dice with him, even considering them an amulet: «C’est le verd du Diable, comme expose Merl.

(7) M. Tetel, Ra­be­lais et Folengo. “De patria (9) Edwin Duval notes, «In the Latin of the Vul- diabolorum”, in Ra­be­lais en son demi-millénaire, gate, Christ’s metaphors of “debts”, “debtors”, and ed. by J. Céard and J.-Cl. Margolin, Genève, “remission from debt” are of course perfectly con- Droz, 1988 («Études rabelaisiennes», 21), gruent with the economy (and the vocabulary) of sal- pp. 203-211. vation, since “redemption” is literally nothing more (8) F. Weinberg, Panurge’s Route Down and Out than a “buying back”, a “paying off”, or a “ransom” in the “Tiers Livre”: A Katábasis, in Ra­be­lais in Con- (redimo < re-emo)». E. Duval, The Design of Ra­ text, ed. by B.C. Bowen, Birmingham, AL, Summa, be­lais’s “Tiers Livre de Pantagruel”, Genève, Droz, 1993, pp. 3-19. 1997 («Études rabelaisiennes», 34), pp. 49-50.

sf177.indb 452 19/12/15 01.04 Panurge’s Quest and the Sixteenth-Century Idea of the Labyrinth 453

Coccaius libro secundo de patria diabolorum. Le Diable me prendroit sans verd, s’il me rencontroit sans dez» (TL, 117). This statement clearly indicates Panurge’s inabil- ity to resist the Devil’s temptations. He carries the dice to ward off devils; however, ironically, his reliance on them attracts evil spirits who wish to carry him to their realm. Next, Panurge casts the dice and vows to charge into the devils if his interpre- tation is mistaken: «Je me donne à travers tous les Diables, comme un coup de boulle à travers un jeu de quilles ou comme un coup de canon à travers un bataillon de gens de pied» (TL, 117). Significantly, the verb se donner also implies devoting oneself. Pantagruel’s reply, therefore, is not coincidental: «ja besoing n’estoit en faire si hor- rificque devotion» (TL, 117). Bewitched by the Devil’s bait, Panurge charges towards it to embrace rather than attack it. The second divination is an oneiromancy. Here Pantagruel remarks that «l’Ange maling et seducteur au commencement resjouist l’homme, en fin le laisse perturbé, fasché et perplex» (TL, 151). Although the reference is to Panurge’s dream, it also reveals the reason why he gets lost in the labyrinth of signs. Not completely under- standing the nature of the Devil’s temptations, he falls into its trap and becomes increasingly perplexed. The theme of descent into hell is even more evident in the next episode in which a sibyl appears and the golden bough carried by Aeneas on his journey into the underworld is mentioned. The Sibyl of Panzoust closely resembles a witch, prompting Panurge to fear the impending onset of the devils: «il m’est advis que je oy Proserpine bruyante; les Diables bien toust en place sortiront» (TL, 173). Following this, Panurge meets a deaf-mute, Nazdecabre, whose name means goat’s nose. His name is significant because Satan was often represented as a goat and evil spirits were sometimes believed to be deaf and mute. We may, therefore, interpret that the Devil lurks behind or within Nazdecabre10. The situation worsens when Pa- nurge consults Raminagrobis. The entire encounter appears to abound with devils. Panurge believes that the old poet is slandering the mendicant friars and declares that his soul will be carried away by devils and fall into hell: «Sçavez vous où? Cor Bieu, mon amy, droict dessoubs la scelle persée de Proserpine» (TL, 219). However, Panurge himself fears being taken by devils, and therefore his words ironically betray his condition. In a conversation with Epistemon, Panurge proposes a voyage to seek the oracle of Saturn, who he claims is in the Ogygian Islands, «lié de belles chaines d’or dedans une roche d’or, alimenté de ambrosie et nectar divin» (TL, 237); he thus shows himself to be fascinated by this pagan god. The myth surrounding Saturn is decidedly paradoxical: on one hand, he represents the primeval utopia that existed during the Golden Age, over which he ruled; on the other hand, he closely resembles Satan, having castrated his father Uranus with a sickle and devoured his own children. Further, he was later imprisoned in Tartarus by his son Jupiter. Satan is also double-faced and imprisoned in Tartarus. It is, therefore, probable that the reference to Saturn, bound in chains on the Ogygian Islands, alludes to Satan, bound in chains in the depths of hell. Panurge’s consultation with the Faustian occultist Her Trippa happens approxi- mately near the centre of the story. Of all the divinatory episodes, this one, with its sinister atmosphere, brings Panurge closest to the Devil11. The occultist proposes

(10) See Jean Céard’s introduction to the Tiers Timothy Chesters calls the consultation with Her Livre (TL, xxi). Trippa «the most unambiguously diabolical en- (11) Jean Céard comments that «jamais Panurge counter in the Tiers Livre». T. Chesters, Ghost n’a éprouvé si vivement l’impression d’avoir visité Stories in Late Renaissance France, Oxford, Oxford quelque antichambre de l’enfer». J. Céard, La Na- University Press, 2011, p. 194. ture et les prodiges, Genève, Droz, 1996, p. 147.

sf177.indb 453 19/12/15 01.04 454 Hozumi Orii

nearly forty dubious, bizarre and even unpleasant divination methods, including nec- romancy, in quick succession. Panurge detects the Devil’s scent on him and declares him a madman served by evil spirits. He goes on to call Her Trippa a wizard of the Antichrist and a long-robed devil, finally exclaiming, «Vray Dieu, comment il m’a perfumé de fascherie et diablerie, de charme et de sorcellerie!» (TL, 249). We may, therefore, infer that the antihero’s meeting with the demonic occultist constitutes the centre of this textual labyrinth. Previous studies on labyrinths have noted that The- seus’ encounter with the Minotaur at the labyrinth’s centre can, on a deeper level, be regarded as an encounter with the unconscious aspects of one’s own existence12. Her Trippa foretells the infidelity of Panurge’s future wife, but the occultist is entirely una- ware of his own wife’s deception. As for Panurge, he criticizes Her Trippa: «Il ne sçait le premier trait de philosophie, qui est CONGNOIS TOY» (TL, 243). However, this principle is also the key to solving his own problem. Thus, in essence, Panurge is unknowingly confronting his own shadow. The episode of Her Trippa is, therefore, appositely placed at the story’s centre point. Panurge’s subsequent conversation with Frère Jean serves to recapitulate the story’s first half. Here Panurge recounts the events that occurred when he watched the Passion Play. He claims that everyone present became sexually aroused by the magical power of his codpiece and the actors playing the devils started having in- tercourse with the spectators. His story clearly reflects his own relationship with the Devil. Following this, Frère Jean tells the story of a jeweller named Hans Carvel, who had long been worried about his wife’s faithfulness. One night, the jeweller dreams that the Devil has given him a magic ring that would prevent his wife’s infidelity; however, when he awakes, his finger is not inside a ring but inside his wife’s private parts. This story also describes Panurge’s condition because he not only shares Hans Carvel’s worry but also has yielded himself to the Devil by foolishly indulging his misguided faith in divination and occult power. Thus, the next chapter begins a new stage of the story.

The Tiers Livre and changing perceptions of the labyrinth

Considering the aforementioned reasons, Panurge’s itinerary through the Tiers Livre can indeed be seen as not only a wandering through the labyrinth (as pointed out by Rigolot) but also a descent into the underworld (as noted by Weinberg). In addition, the story starts with Christ’s last words on the cross. Therefore, the Tiers Livre, based on the concept of the church labyrinth, may well describe the antihero’s itinerary as an antithesis of Christ’s descent into the labyrinthine underworld. This possibility is intensified by the work’s concentric composition, which, moreover, places the story’s most diabolical encounter at the centre. Although Panurge’s perplexity remains unresolved in the story’s second half, this does not contradict our hypothesis. Despite passing the centre, he remains in the labyrinth, and the journeys to and from the centre of a labyrinth are equally arduous because they are subject to identical entanglements. Therefore, it is only natural that Panurge faces difficulties until the end of the story. Furthermore, the principal subject of the Tiers Livre being marriage, Panurge’s sexual desire drives the story. Note that the labyrinth and carnal passions have a historical association because the Minotaur was the offspring of Pasiphaë’s

(12) J. Pieper, Das Labyrinthische: über die Idee p. 43; H. Kern, Through the Labyrinth: Designs and des Verborgenen, Rätselhaften, Schwierigen in der Meanings over 5000 Years, trans. by A.H. Clay, Geschichte der Architektur, Basel, Birkhäuser, 2009, Munich, Prestel, 2000, p. 187.

sf177.indb 454 19/12/15 01.04 Panurge’s Quest and the Sixteenth-Century Idea of the Labyrinth 455

lust for a bull. This makes Chapter 34 particularly noteworthy as it precisely refers to Pasiphaë and other women who had intercourse with animals. Their uncontrolled curiosity and passion, too, seem to reflect Panurge’s problem and suggest the reason why our antihero becomes lost in the labyrinth of perplexity13. In the prologue as well, words and expressions related to the underworld assume importance. First, Rabe­ ­lais compares his third book to Diogenes’ barrel, which itself is likened to Sisyphus’ stone. Then, he equates his book to the «rameau d’or sacré à la deesse soubsterraine» or the «couppe de Tantalus representé par figure entre les saiges Brachmanes». He continues: «Bon espoir y gist au fond, comme en la bouteille de Pandora: non desespoir, comme on bussart des Danaïdes» (TL, 29). These expressions indicate that the Tiers Livre is closely connected with endless labour in the underworld as well as with hope for liberation. Labyrinths have long been intimately associated with labour. Virgil highlighted the phonetic similarity between labyrinthus and labor, and medieval writers believed that labyrinth is derived from labor and intus, meaning labour within14. Ra­be­lais probably had this tradition in mind. Finally, the end of the story, in which the narrator refers to the invention of sails and the possibility of human flight, is also related to labyrinths, especially to the myth of Daedalus. As a matter of fact, Pliny the Elder – and later Polydore Vergil – at- tributes the invention of the sailboat to Daedalus and Icarus15. Rabe­ ­lais was certainly aware of this. Thus, considering the foregoing analysis, we can reasonably estimate that the Tiers Livre constitutes a labyrinth. Let us now consider the position of the Tiers Livre in the history of the labyrinth. During the late Middle Ages, the development of the doctrine on purgatory particu- larly added force to the story of Christ’s descent into hell; thus, labyrinths began to appear on church floors and were associated with hell rather than earth16. However, a significant change occurred in the sixteenth century. The advent of the Reformation again transformed the concept of the labyrinth, undermining the authority of the and internalizing and personalizing matters of faith17. As a result, medieval connotations of the labyrinth regarding descent into the underworld and battling the Devil were gradually lost and replaced by implications of solitary human life in a world replete with sin. As Craig Wright notes, «the emphasis now begins to shift away from He to I, from Christ to the Christian, from Hell back to earth»18, and it is against this background that, later, the metaphysical poet Henry King calls life «a crooked Labyrinth» and describes it as «a perplexed Circle, in whose round nothing but Sorrowes and new Sins abound»19.

(13) H. Orii, «Oncques ne feut faict solœcisme»: (18) Ibid., p. 86. See also H. Diehl, Into the Maze of l’interprétation et l’image du membre viril dans le Self: The Protestant Transformation of the Image of the “Tiers Livre” de Ra­be­lais, «Études rabelaisiennes», Labyrinth, «The Journal of Medieval and Renaissance 44, 2006, pp. 31-46, especially pp. 43-45. Studies», XVI, 2, 1986, pp. 281-301. (14) W. Fitzgerald, Aeneas, Daedalus, and the (19) The Poems of Henry King, ed. by M. Crum, Labyrinth, «Arethusa», XVII, 1984, pp. 51-65; P. Oxford, Clarendon Press, 1965, p. 173. Note that Reed Doob, The Idea of the Labyrinth: From Classi- Ra­be­lais’s contemporary Jean Thenaud, too, in his cal Antiquity through the Middle Ages, Ithaca, NY, Le Triumphe de Prudence (1517), describes earthly Cornell University Press, 1990, p. 97. life as a «difficil et perplex labirinte»: «O ma totalle (15) Pliny, Naturalis historia, 7.56; Polydore esperance, affin que ne soye devoré du Minothaure Vergil, De inventoribus rerum, 3.15.10. See also infernal, qui rugist en cestuy labyrinthe ouquel suys Pausanias, Graeciae descriptio, 9.11.4-5. According plus que perplex et esgaré […], te plaise m’envoyer to Pausanias, Daedalus invented sails, not wings, to le raidz plus resplendissant que le soleil de ta grace flee Crete. […].» J. Thenaud, Le Triumphe de Prudence, ed. by (16) C. Wright, The Maze and the Warrior, T.J. Schuurs-Janssen, Genève, Droz, 1996, pp. 14- pp. 76-78. 19. See also S. Geonget, La Notion de perplexité à (17) Ibid., pp. 86-100. la Renaissance, Genève, Droz, 2006, pp. 164-165.

sf177.indb 455 19/12/15 01.04 456 Hozumi Orii

This change is corroborated by illustrations in several emblem books, including Guillaume de La Perrière’s Le Theatre des bons engins (1539). La Perrière’s labyrinth resembles the classic Chartres-type labyrinth, but a man in contemporary costume replaces the devilish beast usually found at the centre of those labyrinths (fig. 2)20. This man is neither a hero nor a warrior; according to the corresponding poem, he is a mere mortal drowning in empty pleasures. Here it seems as if the fact that labyrinths once symbolized the underworld has been all but forgotten. Another example is an il- lustration in Herman Hugo’s Pia desideria emblematis (1624), which depicts a pilgrim at a labyrinth’s centre21. Thus, the warrior of the labyrinth had metamorphosed into a solitary pilgrim by the early seventeenth century at the latest22. As the Reformation progressed, church labyrinths steadily disconnected with Easter; liturgical dances that had been performed on church labyrinths were gradually abolished23, and from the seventeenth century onwards, church labyrinths were used solely for simulated pilgrimages. In the late sixteenth century, forks and dead ends began to appear in increasingly diverse garden labyrinths, and by the end of the century, multicursal labyrinths had become the norm, although garden labyrinths continued to retain a centre, irrespective of whether they were multicursal or unicursal. Garden labyrinths without centres did not appear in France until the seventeenth century, around the time of Louis XIV24. Given the temporal background against which the Tiers Livre was written, we may assume that Ra­be­lais’s labyrinth has a centre, but we remain uncertain as to whether it is unicursal or multicursal. Panurge is faced with many interpretations and decisions, but this does not drive the book’s structure in any particular direction. After all, he is seduced by evil spirits and therefore cannot freely choose his path. Furthermore, labyrinths in classic literary works are frequently described as quite complex structures, even when the works date from eras when all pictorial labyrinths were unicursal. Thus, literary multicursal labyrinths have coexisted with visual uni- cursal labyrinths since ancient times25. Considering the theme of descent into the un- derworld, the Tiers Livre is probably a traditional labyrinth similar to the type found on cathedral floors; however, at its centre is neither Christ nor a hero but a man who yields to the Devil’s temptations. This work thus reflects the changing perceptions of the labyrinth in the sixteenth century. In addition, it also mirrors the changes in per- ceptions of the Devil that occurred during the Reformation, after which people were compelled to confront the forces of evil by themselves instead of trusting the church for protection as they had done during the Middle Ages26. Ra­be­lais’s narrative fiction ingeniously portrays a man placed in this position. What, then, inspired Ra­be­lais to create a labyrinthine text? François Rigolot believes that the Tiers Livre was influenced by Jean Bouchet’s Le Labyrinthe de Fortune (1522). However, considering the story’s theme, we suggest that Ra­be­lais was inspired by Clément Marot’s L’Enfer (c. 1526). This satirical poem is structured around three long, almost symmetrically arranged discourses: a commentary on the underworld (i.e. prison) by the minister of hell, the prisoner’s interrogation by the

(20) H. Kern, Through the Labyrinth, p. 221; C. for even longer in Chartres. See C. Wright, The Wright, The Maze and the Warrior, pp. 92-94. Maze and the Warrior, pp. 132-158. (21) H. Kern, Through the Labyrinth, p. 209. (24) H. Kern, Through the Labyrinth, p. 265; C. (22) C. Wright, The Maze and the Warrior, Wright, The Maze and the Warrior, pp. 228-230. pp. 94-100, 207-216. (25) P. Reed Doob, The Idea of the Labyrinth, (23) To celebrate Christ’s resurrection, the clergy p. 41. performed a dance on the labyrinths of certain ca- (26) J.B. Russell, The Prince of Darkness: Radi- thedrals as part of Easter ceremonies. This tradition cal Evil and the Power of Good in History, Ithaca, continued until 1517 in Sens, 1538 in Auxerre and NY, Cornell University Press, 1988, pp. 167-168.

sf177.indb 456 19/12/15 01.04 Panurge’s Quest and the Sixteenth-Century Idea of the Labyrinth 457

judge Rhadamanthus and the accused Marot’s apologia27. Thus, its three prominent attributes are typical characteristics of labyrinths: descent into the underworld, an almost symmetrical structure and a confrontation with a Satan-like character in the centre. Several additional facts accentuate the similarities between L’Enfer and lab- yrinths. First, owing to the legend of the Minotaur, labyrinths may evoke the idea of prisons. Second, in the Middle Ages and the Renaissance, Virgil’s underworld was undoubtedly regarded as a labyrinth28. Finally, L’Enfer contains a reference to Christ’s Harrowing of Hell, which the church labyrinth symbolized. These factors suggest that Marot may have based the structure of L’Enfer on a labyrinth, and this would have influenced Rabe­ ­lais as he was well acquainted with the poet. Like Marot, who remains detained until the end of the poem, Panurge is imprisoned by his dilemma until the end of the story. Considering these elements, the relation- ship between the two works deserves more attention. However, although L’Enfer superimposes real-world experience upon the journey into the underworld, it does not focus on individual perplexity. There may be yet another work that inspired Ra­be­lais, as discussed in the following section.

Panurge as an unarmed man and the Erasmian ideal of the Christian soldier

In addition to symbolizing prisons and the underworld, the labyrinth signified the battleground for combat with the Minotaur or Satan. It is, therefore, unsurpris- ing that the Tiers Livre contains many references to weapons and armour. For exam- ple, the prologue extensively lists weaponry while describing the preparations for a defensive battle in ancient Corinth, and the text makes several allusions to arms. Interestingly, however, the prologue’s valiant atmosphere is missing from the story; on the contrary, Panurge finds war tedious and sheds his armour. Why is the difference between the two sections so significant? The answer possibly lies in the words of St. Paul, who explains that one must be armed to overcome the wiles of the Devil: «Put on the whole armour of God, so that you may be able to stand against the wiles of the devil. […] fasten the belt of truth around your waist, and put on the breastplate of righteousness. […] Take the helmet of salvation, and the sword of the Spirit, which is the word of God»29. Needless to say, St. Paul is speaking of armour in a spiritual sense. His words support the view that despite being in a labyrinth (which represents a battleground), Panurge has literally discarded his arms and, along with them, his spiritual armour and is therefore powerless against the Devil’s temptations. The theme of spiritual arms recalls Erasmus’ Enchiridion militis Christiani (1503), a handbook on repelling the Devil’s attacks. Interestingly, Erasmus uses the labyrinth as a metaphor for the sinful world.

We shall try to pass on briefly certain rules – some wrestling holds, one might say – with the help of which you can easily extricate yourself from the labyrinthine errors of this world and, using these rules like the thread of Daedalus, find your way into the clear light of spiritual living30.

(27) On closer inspection, the structure of the (29) Ephesians 6:11-17. All biblical quotations poem reveals further indications of subtle symme- are from the New Revised Standard Version. try. See H. Orii, La structure de “l’Enfer” de Clé- (30) Erasmus, Enchiridion, trans. by R. Hime­ ment Marot, «Réforme, Humanisme, Renaissance», lick, Bloomington, Indiana University Press, 1963 LV, 2002, pp. 7-24. (hereafter E), p. 83. (28) P. Reed Doob, The Idea of the Labyrinth, p. 239.

sf177.indb 457 19/12/15 01.04 458 Hozumi Orii

Note that Erasmus has replaced Christ and the underworld with individual Christians and this world, respectively31. For him, the battle with the Devil occurred not in hell but here and now: «Like Virgil’s Aeneas you should shrug off as nothing all the bogey men and fantasies that assail you, so to speak, in the very jaws of hell» (E, 90). Erasmus took the medieval concept of the labyrinth and recast Christ’s battle with Satan as a battle within oneself. Signs of the new sixteenth-century perspective on labyrinths emerge in this book, which may be connected to the Tiers Livre. Like the Tiers Livre, the Enchiridion advocates the importance of knowing one- self. Erasmus compares the wisdom of the world with that of Christ, saying of the latter, «The chief point of this wisdom is simply to know yourself» (E, 62). The Enchi- ridion posits that battling the Devil is equivalent to battling oneself; therefore, knowl- edge of oneself is paramount, for in that lies the hope of victory. On the basis of this thought, Erasmus introduces readers to St. Paul’s dualism of the spirit and the flesh, urging them to live according to the former32. The Tiers Livre employs irony to impart a similar message. Panurge declares, «Oncques ne feut faict solœcisme par le vaillant champion qui pour moy faict sentinelle au bas ventre» (TL, 117). Because he relies on his physical desires for judgement and interpretation, he is unable to make proper decisions and succumbs to the Devil’s temptations. According to Erasmus, people such as Panurge especially need to know themselves. As previously mentioned, the wisdom of Christ is the thread that guides one through the labyrinth, and it can be attained only through self-knowledge. Therefore, the words know thyself are aptly placed at the centre of this textual labyrinth. Enchiridion means both handbook and dagger. Erasmus states, «I have fashioned for you an enchiridion, that is to say, a kind of hand dagger, which you should never put aside, not even at the table or in bed» (E, 58). He argues that our lives are an incessant battle with the forces of evil and his book is the sword needed for that bat- tle. How, then, are sword and its synonyms treated in the Tiers Livre? Like Erasmus, Panurge insists that swords can fend off devils, citing the examples of Hercules and Aeneas, who carried a club and a sword, respectively, into the underworld. He also mentions a marshal named Trivulzi who, on his deathbed, requested a dagger so that his soul might defend itself on its journey to its final resting place. However, Panurge does not speak of spiritual swords; instead, he teases his friend, using the word brag- mard, which means both dagger and phallus: «Nous parlons de harnoys fourbiz, et d’espées resplendentes. Ainsi n’est il de ton bragmard. Car par discontinuation de officier et par faulte de operer, il est par ma foy plus rouillé que la claveure d’un vieil charnier» (TL, 229). Since Panurge is complying with the dictates of the flesh, he is acting under the Devil’s influence. His double entendre’s vulgar meaning, therefore, hints at his relationship with the Devil. Additional wordplay hinging on the sword’s phallic connotations occurs in the episode of Nazdecabre, in which Panurge «monstroit le default de sa braguette: puys sous sa chemise print son pistolandier à plein poing, et le faisoit melodieusement clicquer entre ses cuisses» (TL, 197). Pistolandier, like bragmard, can mean both

(31) C. Wright, The Maze and the Warrior, marks: «Le Minotaure […] participe de la creature pp. 86-90. raisonnable, et de celle qui est incapable de raison. (32) «Man is a being of a most unusual sort, Ce sont nos discours d’un costé, et de l’autre nos composed of two or three vastly unlike parts: a soul affections, et concupiscences, deux extrémes per- that is like something divine and a body like that petuellement accouplez en nous, dans le labyrinthe of a dumb brute», asserts Erasmus (E, 63). In this de nostre vie pleine de discours, embroüillemens, context, it is interesting to note that the Minotaur et incertitudes […].» P. Dinet, Cinq livres des hié- has long been regarded as a figure for human bes- roglyphiques, Paris, J. de Heuqueville, 1614, p. 385. tiality. Pierre Dinet (1555-1595), for instance, re-

sf177.indb 458 19/12/15 01.04 Panurge’s Quest and the Sixteenth-Century Idea of the Labyrinth 459

dagger and phallus. As mentioned above, the Devil is probably manifesting through Nazdecabre; in its presence, Panurge is not only parading his lack of a codpiece but also brandishing his penis instead of a sword. Another reference to swords appears in the story’s central episode, in which Panurge gifts Her Trippa «une grande espée bastarde bien dorée à fourreau de velours» (TL, 239). Having recently insisted that a sword can ward off devils, it is ironic that Panurge presents the Faustian occultist with an ornate but useless sword. Shortly after that, he takes offence at the outcome of the divinations and insults Her Trippa, but he remains under the Devil’s influence. In fact, he disregards the true meaning of Jesus’ words, «Why do you see the speck in your neighbour’s eye, but do not notice the log in your own eye?»33, and, ironically, uses these words to inveigh against another. We thus observe that Panurge unwit- tingly abuses the sword of the Spirit. In his present condition, he would never be able to extricate himself from the labyrinth of perplexity. Like Erasmus, Ra­be­lais seems to be trying to teach his readers how to use spir- itual weapons. This is evident from the prologue, which is filled with talk of war and words related to weapons, arms, ramparts and strongholds. It informs us that the Corinthians had learned that the Macedonian king was arriving with his great army and therefore they prepared for an attack. Everyone was armed and ready at their posts: «Chascun exerceoit son penard: chascun desrouilloit son bracquemard» (TL, 17). Likewise, everyone in France is mobilized to defend their fatherland. The move- ment is perfused with harmony, and Ra­be­lais relates to the words of Heraclitus, «war is the father of all good things». In the sixteenth century, l’homme armé was often considered emblematic of l’âme armée34. It is conceivable that while talking about actual events, Ra­be­lais simultaneously reflects on spiritual war35. Furthermore, he de- clares that he himself is armed with a stick: «Voyez cy le baston que Diogenes par testament ordonna estre près luy posé après sa mort pour chasser et esrener ces larves bustuaires et mastins cerbericques» (TL, 31). This statement is strongly reminiscent of the anecdote of the marshal Trivulzi, which is not surprising given the story’s un- derlying theme. Note that Rabe­ ­lais again recounts another defensive battle in the concluding chapter’s final part: according to the narrator, Julius Caesar’s Roman army set fire to the Piedmont Castle’s tower but failed to inflict any damage on it because it was built of larix, an incombustible wood. Similar to the prologue, this episode may allude to spiritual warfare. In fact, the narrator continues that Pantagruel uses this wood to protect the abbey of Theleme as well as the ships in his arsenal. As previously explained, the story’s main body speaks only of avoiding military service. In addition to the sword of the Spirit, St. Paul states that we must gird our- selves with the complete suit of holy armour. Panurge, too, recognizes the effective- ness of arms against devils when he notes that Aeneas was covered in shining armour, with the cutlass in his belt well furbished and cleaned of rust. However, Panurge himself is entirely unarmed, both spiritually and physically. He dons a toga, the gar- ment of peacetime in ancient , and declares, «Je suis las de guerre: las des sages et hocquetons. J’ay les espaules toutes usées à force de porter harnois. Cessent les armes, regnent les Toges» (TL, 87). Further, he insists that Nature created humans to enjoy peace, not war. Although this corresponds to Erasmus’ view of peace36, the two do not concur on the subject of spiritual warfare. In fact, the following extract from the Enchiridion shows that their views are diametrically opposed:

(33) Matthew 7:3. (35) Compare, for example, with Zwingli’s patri- (34) C. Wright, The Maze and the Warrior, otic poem Der Labyrinth (1516). pp. 164-205. (36) Erasmus, Adagia, 4.1.1.

sf177.indb 459 19/12/15 01.04 460 Hozumi Orii

Since we are all engaged in such formidable and taxing warfare and have enemies so numerous, so committed to our destruction, so zealous, so vigilant, so well-armed, so treacher- ous, so skillful, are we not of dubious sanity if we, on our part, do not arm ourselves, stand on guard, and hold all things suspect? But just as if conditions were absolutely tranquil, we snore away flat on our backs; we do nothing, we enjoy ourselves and, as they say, idly look after our skins […] You lunatic! You cry «Peace! Peace!» when you have God as your enemy, who alone is peace and the author of peace. (E, 39-40)

Erasmus’ portrayal of the lazy, misguided fool who lays down his spiritual arms aptly describes Panurge, who comically runs from war yet declares his phallus a val- iant champion. By removing his codpiece, «piece premiere de harnois militaire» (TL, 89), Panurge also discards his spiritual armour. His talk of furbished arms and bright swords only disguises the rustiness of his spiritual sword, and his defeat by the Devil is entirely predictable. Therefore, we may conclude that the Tiers Livre reflects Eras- mus’ view of the Christian life stated in the Enchiridion. Panurge is the antithesis of not only Christ but also the ideal Christian soldier, and his perplexity is depicted as a wandering through the labyrinth precisely in the Erasmian sense.

«Bon espoir y gist au fond»: Christ, the Redeemer of the labyrinth

Further consideration of the idea that the Tiers Livre emulates a labyrinth’s structure reveals deeper layers of meaning in the work. As stated previously, this story starts with Christ’s last words on the cross, consummatum est, which, combined with the expression «l’aigneau Paschal», implies his crucifixion. Given this beginning, it is noteworthy that the final chapter’s title, «Comment certaine espece de Pantagruelion ne peut estre par feu consommée», contrasts sharply with consummatum est37. The praise of the asbestine Pantagruelion may, therefore, relate to Christ’s resurrection. In fact, the description of the plant that is purified rather than burnt when thrown into fire powerfully evokes the mystery of the resurrection: while the paschal lambs were completely consumed and burnt, the Lamb of God sacrificed himself but, mys- teriously, was never «consumed», for he descended into hell, vanquished Satan and rose again victorious. Moreover, since Christ is, according to Erasmus, «the author of wisdom, rather wisdom itself» (E, 59), it is not surprising that he is praised at the end of a story centred on the quest for truth. The Tiers Livre provides a conclusive lesson on the importance of recognizing the limitations of worldly wisdom and constantly seeking the wisdom of Christ because, after all, he is the sole and eternal Redeemer of the labyrinth. In addition, the incombustible plant is also connected with labyrinths. Polydore Vergil, in his De inventoribus rerum (1499), discusses the invention of labyrinths and origin of cremation within the same chapter, in which he also refers to an incombus- tible linen cloth38. As is well known, this work owes a great deal to Pliny’s Naturalis historia, which reports that the funeral tunics of certain kings were made from incom- bustible linen to ensure the separation of the body’s ashes from those of the pile39. At a separate instance, it states that certain ancient labyrinths were constructed as tombs for kings40. Therefore, to those familiar with Pliny’s work, labyrinths were reminiscent of the ancient cremation practice and incombustible linen cloth. It is thus that Poly-

(37) F. Rigolot, Ra­be­lais’s Laurel for Glory: A (38) Polydore Vergil, De inventoribus rerum, 3.10. Further Study of the Pantagruelion, «Renaissance (39) Pliny, Naturalis historia, 19.4. Quarterly», XLII, 1, 1989, pp. 60-77. (40) Naturalis historia, 36.19.

sf177.indb 460 19/12/15 01.04 Panurge’s Quest and the Sixteenth-Century Idea of the Labyrinth 461

dore Vergil compiled these elements in one chapter, as Ra­be­lais combined them in the last chapter of the Tiers Livre. Interestingly, Rabe­ ­lais further associated these ele- ments with Christ’s resurrection. Although even monarchs and rulers such as Mauso- lus are inevitably reduced to ashes when thrown into fire, the asbestine Pantagruelion can emerge from it unscathed. This comparison with royalty renders the mysterious plant an appropriate allegorical representation of Christ and his resurrection41. Thus, the book begins with the Saviour’s crucifixion and ends with his resurrec- tion. Note that he descends into the underworld between the time of his crucifixion and resurrection. Panurge’s actions, therefore, follow those of Christ, but in a sig- nificantly different manner. For example, Panurge’s economy, symbolized by extrava- gance and debt, is the exact opposite of Christ’s economy of salvation, who settled the debts of humanity with his own death. At the book’s centre, when Panurge misuses Jesus’ words to criticize Her Trippa, his self-love contrasts sharply with Christ’s char- ity. Also striking is the difference between Panurge’s experience at the Passion Play and Christ’s Passion. Ra­be­lais, of course, uses the ambiguity of passion because, as previously noted, labyrinths symbolized not only the Passion but also carnal passions. Ra­be­lais demonstrates this intentional ambiguity through two puns in the prologue: first, «Lapathium acutum de Dieu», which means God’s sharp-pointed dock but sug- gests the Passion of Christ (lapathium was then pronounced la passion)42; second, «au cul passions», which means both occupations and passions in the ass43. The phonetic similarity between lapathium acutum and la passion à cul merits attention. With this play on words, Rabe­ ­lais announces the story’s main theme. Initially, Panurge’s per- plexity appears unrelated to Christ’s Passion, but its significance becomes clear when it is compared with the latter. This comparison is warranted because the Tiers Livre is based on the idea of a labyrinth, which originally symbolized Christ’s descent into the underworld. Returning to the topic of the Pantagruelion, we note that previous studies have regarded this plant as a symbol of human wisdom. Madeleine Lazard states, «la plupart des critiques s’accordent à voir dans ce texte une apologie enthousiaste et optimiste du génie de l’homme et de son pouvoir»44. This idea is valid but incomplete, for Ra­be­lais balances praise of human wisdom with hints of its limitations45. The Pan- tagruelion is a fantastic plant with many uses, including, however, harmful ones. A typical example is the sail, the invention of which, great though it is, can lead to destructive consequences. In fact, Pliny states that it is difficult to determine a curse

(41) A similar use of the figure of asbestos is other readings. See, for example, Y. Delègue, Le found in St. Athanasius’ De incarnatione Verbi. Pantagruélion ou le discours de la vérité, «Réforme, It states that just as the stubble wrapped with as- Humanisme, Renaissance», XVI, 1983, pp. 18- bestos does not fear fire, so the body clothed with 40; M.-L. Demonet, Polysémie et pharmacie dans Christ does not fear death. le “Tiers Livre”, in Ra­be­lais et le “Tiers Livre”, ed. (42) «Envers les guerroyans je voys de nouveau by É. Kotler, Nice, Publication de la faculté des percer mon tonneau […] Je n’y fauldray par Lapa- lettres, arts et sciences humaines de Nice, 1996, thium acutum de Dieu» (TL, 25). pp. 61-84; L.-G. Tin, Le Pantagruélion. Réflexions (43) «Les geants Doriphages avalleurs de fri- sur la notion d’exégèse littéraire, in Ra­be­lais et la mars, ont au cul passions assez et assez sacs au croc question du sens, ed. by J. Céard and M.-L. Demon- pour venaison» (TL, 29). et, Genève, Droz, 2011 («Études rabelaisiennes», (44) M. Lazard, Ra­be­lais et la Renaissance, Paris, 49), pp. 113-124. However, due to limitations of PUF, 1979, p. 54. See also L. Sainéan, La Langue space, a more detailed discussion must be reserved de Ra­be­lais, Paris, De Boccard, 1922, I, pp. 25-27; for another occasion. V.-L. Saulnier, L’énigme du Pantagruélion, ou du (45) Mireille Huchon, in her edition of Ra­be­ “Tiers” au “Quart Livre”, «Études rabelaisiennes», lais’s complete works, pertinently points out that 1, 1956, pp. 48-72; D. Quint, Origin and Origi- «le Pantagruélion reprend les réflexions sur la nality in Renaissance Literature. Versions of the mètis [cunning intelligence] mises en œuvre dans Source, New Haven, CT, Yale University Press, Pantagruel». Ra­be­lais, Œuvres complètes, Paris, 1983, pp. 167-206. Needless to say, there are many Gallimard, 1994, p. 1451.

sf177.indb 461 19/12/15 01.04 462 Hozumi Orii

befitting the inventor of sails46. According to the Tiers Livre’s narrator, the Olympian gods were alarmed by human beings’ unimpeded sailing and worried that they might eventually fly, enter the territory of the celestial signs and threaten their divine posi- tion. This observation could be interpreted as praise for human wisdom, but it actu- ally indicates the problem of impious curiosity, for it implies that knowledge inflates people with arrogance and makes them think of themselves as equal to the gods47. From this perspective, we can assume that the theme of the labyrinth reminded Ra­be­lais of Daedalus and Icarus’ flight from the Cretan labyrinth. In fact, according to Pliny, Icarus was the one who invented sails and Daedalus the mast and yards (see above). Furthermore, Ovid relates that Daedalus instructed his son to pay no atten- tion whatsoever to the constellations48; Icarus, however, overcome by the desire to touch the heavenly realms49 or the abodes of the stars50, ignored his father’s instruction and fell into the sea. In this vein, Polydore Vergil, in his discussion on the invention of sailing, deplores humankind’s recklessness and refers to Daedalus’ flight: «God gave us the solid earth, an element well suited to sustain us, but we venture into sky and sea. Daedalus constructed his wings and approached heaven itself, did he not?»51. These themes – human knowledge and ingenuity, invention of the sailboat, possibility of human flight and hubristic violation of the divine realm – also appear in the praise of Pantagruelion, which confirms Ra­be­lais’s interest in escaping the labyrinth. In the final chapter, Rabe­ ­lais suggests the ultimate way to proceed through the labyrinth of perplexity. Since he shares Erasmus’ belief that true wisdom consists of always treating Christ as the model for one’s life and especially the goal of all erudi- tion, it is highly likely that the praise of the asbestine Pantagruelion is a praise of Christ or Christ’s wisdom52. The ambiguous verb consommer (or consumer), skilfully interwoven into the text at the story’s beginning and end, refocuses our attention on Christ’s Passion and resurrection as the antithesis of the protagonist’s perplex- ing quest. The Lord sacrificed himself on the cross, redeemed humanity’s debts and descended into the underworld; however, he bound Satan in chains, freed the impris- oned souls and re-emerged unscathed rather than being consumed. Thus, by follow- ing him, we too can eventually escape the labyrinth53. Panurge’s endless perplexity mirrors our own situation, but we are asked to take heart: «Bon espoir y gist au fond, comme en la bouteille de Pandora: non desespoir, comme on bussart des Danaïdes» (TL, 29). After all, church labyrinths once played an important part in Easter ceremo- nies. Ra­be­lais was certainly aware that labyrinths symbolized not only prisons and the underworld but also victory and resurrection. To review, the Reformation triggered a significant transition in the labyrinth’s symbolic meaning, which became associated with this world rather than the under- world and with a battle within oneself rather than a duel between Christ and Satan.

(46) Pliny, Naturalis historia, 19.1. See also penhaver, Cambridge, MA, Harvard University Polydore Vergil, De inventoribus rerum, 3.6.1. Press, 2002, p. 463. (47) G. Defaux, Le Curieux, le glorieux et la sa- (52) If the Pantagruelion represents the wisdom gesse du monde dans la première moitié du xvie siècle: of the world and the asbestine Pantagruelion that l’exemple de Panurge, Lexington, French Forum of Christ, they are respectively analogous to Hu- Publishers, 1982, p. 194; E. Duval, The Design of maine Discipline and Veritable Doctrine, allegorical Ra­be­lais’s “Tiers Livre”, pp. 210-213; T. Maus de characters in Bouchet’s Le Labyrinthe de Fortune. Rolley, Élévations. L’écriture du voyage aérien à la François Rigolot comments that Panurge seems Renaissance, Genève, Droz, 2011, pp. 111-118. to follow Humaine Discipline and that Pantagruel (48) Ovid, Metamorphoses, 8.206-207; Ars Ama- seems to align himself with Veritable Doctrine. F. toria, 2.55-56. Rigolot, Le labyrinthe du songe-mensonge, p. 122. (49) Metamorphoses, 8.224. (53) Compare with Guillaume Budé’s reflection (50) Ars Amatoria, 2.38-40. on Christ’s Harrowing of Hell. Budé, De transitu hel- (51) De inventoribus rerum, 3.15.1. Polydore lenismi ad christianismum, trans. into French by M. Vergil, On Discovery, ed. and trans. by B.P. Co- Lebel, Sherbrooke, Éditions Paulines, 1973, p. 76.

sf177.indb 462 19/12/15 01.04 Panurge’s Quest and the Sixteenth-Century Idea of the Labyrinth 463

Later, even the image of a heroic soldier began to disappear from labyrinths, being replaced by a solitary pilgrim. This change can be traced back to Erasmus’ Enchi- ridion, which, using the labyrinth as a metaphor for this life, states that the battle with the Devil occurs within oneself: «Indeed, the battle array of the foe emerges from the depths of our own nature» (E, 62-63). The Tiers Livre is also positioned in the midst of this transition. It exhibits the structure of a church labyrinth and employs the themes of descent into the underworld and battle with Satan; however, it transposes them into our world and depicts the perplexity of a mortal figure similar to ourselves. By focusing on the labyrinth’s association with both Christ’s Passion and carnal pas- sions, Ra­be­lais created an incomparable textual labyrinth in which order and disor- der successfully coexist as they did in visual labyrinths of the era.

hozumi orii

sf177.indb 463 19/12/15 01.04 464 Hozumi Orii

Figure 1: Plan of the labyrinth in the nave of Chartres Cathedral (c. 1215). Courtesy of Jeff Saward. http://www.labyrinthos.net.

Figure 2: Guillaume de La Perrière, Le Theatre des bons engins, Paris, Denis Janot, n.d. (1544), Glasgow University Library, SM686, fol. E8v.

sf177.indb 464 19/12/15 01.04 bartolo anglani

Le due memorie di Jean-Jacques Rousseau1

Abstract The purpose of this paper is to investigate the relationship between memory and oblivion in Rous­seau’s Confessions, in the belief that oblivion is not simply memory loss, but that it plays an active role in the construction of memory itself. We will analyse some episodes of the above mentioned autobiography, focusing first of all on that of the broken comb, which in the au- thor’s memory performs the function – rather late – of “premier souvenir”. By setting the be- ginning of his conscious life to so an advanced time, Rousseau­ relegates all other memories to a kind of prehistory of the individual, which is why they appear loose, impressionistic and ‘idyl- lic’. What precedes the trauma of the comb must be ‘forgotten’, so that two types of memory take shape. The first of these memories, of an immediate and sentimental character, connects directly the present to the past (or so it seems), while the second one, of a more fragmentary nature, intertwines remembrance and oblivion. Moreover, from the excess of confidence with which the autobiographer uses these instruments derives also the tangle of contradictions that compromise the functioning of these mechanisms and leave residues, which we can connote as “clues” that refer to another possible story.

Dis-moi ce que tu oublies, je te dirai qui tu es. (Marc Augé, Les formes de l’oubli)

Le pagine di questo saggio si pongono in rapporto diretto con un libro, pubblica- to qualche tempo fa2, di cui costituiscono lo sviluppo e l’integrazione. Pur consapevole che nel tempo trascorso la bibliografia rousseauia­ na­ è tanto cresciuta, in quantità e in qualità, da rischiare di rendere obsolete alcune conclusioni raggiunte (o alcune ipotesi formulate) verso la fine del secolo scorso, ritengo per me utile e necessario ripartire dal nucleo fondante di un libro che nei suoi termini essenziali e nella mia prospettiva anali- tica non riesco a considerare del tutto superato. Mi sembra anzi necessario riproporlo, quel nucleo, e svilupparlo nelle riflessioni sulla memoria e sull’oblio, perché il panora- ma della letteratura rous­seauiana­ risulta ancora condizionato dallo schema ideologico della ‘totalità’ e del sistema ‘chiuso’ e concluso. S’intende che non posso nemmeno immaginare di mettere in discussione con le mie scarse competenze le ipotesi di ricerca e le conclusioni raggiunte da decine e decine di specialisti delle discipline diverse nelle

(1) Questo saggio fa parte di una ricerca in corso Gallimard («Pléiade»), 1986 (i ed. 1959). Nelle ci- sulla memoria e sull’oblio in Rousseau­ e in Sten- tazioni riproduco il testo fornito dagli editori, non dhal. Si tratta dunque del frammento di un discorso modernizzato e non normalizzato secondo l’orto- più ampio di cui per ragioni di spazio non posso grafia francese corrente. Di ogni citazione indico il discutere l’impostazione e su cui non posso fornire libro delle Confessions in numero romano maiusco- tutte le indicazioni bibliografiche necessarie. Con- letto e il numero di pagina in cifra araba. fido di poter colmare queste lacune nella stesura (2) Si veda Le maschere dell’Io. Rousseau­ e la definitiva del lavoro. Il testo utilizzato è: ­J.-J. Rous­ menzogna autobiografica, Fasano, Schena, 1995, seau, Les Confessions, in Œuvres complètes, i. Les in cui ho discusso largamente la bibliografia rous­ Confessions. Autres textes autobiographiques, Paris, seauia­na fino a quell’anno.

sf177.indb 465 19/12/15 01.04 466 Bartolo Anglani

quali si suole dividere il pensiero del filosofo. Posso però osservare che, quali che siano nei singoli punti i risultati scientifici ottenuti, rimane ancora largamente dominante la disposizione a considerare il pensiero rousseauia­ no­ come un sistema compiuto, ovvero come una costruzione nella quale tutto si tiene e nella quale alla fine i conti tornano tutti senza scompensi e senza perdite gravi. Le incoerenze, che gli studiosi più sensibili avvertono in tale sistema, sono interpretate prevalentemente se non esclusivamente come contraddizioni ‘orizzontali’, frutto di imprecisioni e di mancanze via via corrette o modificate dal filosofo nello sviluppo del suo pensiero. Eppure parecchio tempo fa Starobinski aveva osservato che la «bipolarità» di Rous­seau consiste «non solo nel pas- saggio dal pro al contro, in una oscillazione tra due termini antitetici» ma soprattutto nel fatto che Rous­seau, dinanzi ad uno stesso problema, «ricorre volta a volta ad una retorica dell’antitesi o a una dialettica dell’oltrepassamento»: ossia che a volte in lui «tutto si paralizza in un sistema di opposizioni senza uscita di tipo manicheo» e a volte «i conflitti trovano la loro soluzione su un piano superiore». Mi pare che qui il critico abbia indicato la natura del problema senza tuttavia andare fino in fondo, benché abbia ribadito opportunamente che la «spiegazione psicologica» di queste oscillazioni non è sufficiente. Questa impostazione si rivela molto utile per chi voglia affrontare il problema dell’Io e dell’autoconoscenza, in quanto la «conoscenza di sé» in Rousseau­ si richiama a due metodi diversi: o «l’io diventa straniero a se stesso, allo scopo di vedersi da spettatore, come un oggetto esterno», o, al contrario, «cerca di conoscersi per sen- timento, senza uscire da sé, grazie a una intuizione immediata che viene prima di ogni divisione della coscienza», in modo che non sia possibile alcuno stato intermedio fra «l’unità completa e la scissione assoluta»3. Sulla spinta di queste indicazioni ci sarebbe da lavorare parecchio intorno al tema della duplicità e della scissione in rapporto a quello dell’unità e della totalità. Qui mi limiterò ad analizzare alcuni passi del primo libro delle Confessions. Uno dei momenti decisivi, il primo vero evento drammatico delle Confessions, è quello del pettine rotto. A proposito del quale mi permetto di rammentare che nel mio libro di tanti anni fa tentai di ‘falsificare’ il racconto di Rous­seau, non certo per dimostrare in maniera inequivocabile che Jean-Jacques era il colpevole del misfatto ma per verificare che l’autore aveva condotto la narrazione dell’evento in modo da lasciare aperte entrambe le ipotesi, quella dell’innocenza e quella della colpevolezza. Da un lato Rous­seau nega con enfasi di aver rotto il pettine, ma dall’altro lato scrive un racconto che, come un racconto poliziesco, non può avere altro colpevole che lui4. Di qui la natura doppia e contraddittoria della pagina rousseauia­ ­na. Qui però non mi occupo del racconto e della sua doppiezza (che nella mia prospettiva do per pre-

(3) J. Starobinski, Jean-Jacques Rousseau­ et le invece a quello della «sculacciata» (Ph. Lejeune, La péril de la réflexion, in L’œil vivant. Corneille, Ra- punizione dei bambini. Lettura di una confessione di cine, La Bruyère, Rous­seau, Stendhal, Paris, Galli- Rous­seau, in Il patto autobiografico [1975], Bologna, mard, 1999 [i ed. 1961], pp. 205-206 e pp. 209-210. il Mulino, 1986, p. 78). Le osservazioni di Lejeune La traduzione è mia. partono dal presupposto non dimostrato che Jean- (4) L’episodio del pettine rotto, sul quale esiste Jacques sia completamente innocente della rottura una bibliografia ricchissima da me solo sfiorata nelle del pettine e si occupano delle motivazioni e delle Maschere dell’Io, può avere certamente altri signifi- conseguenze del gesto, tutte comprese in una logica cati oltre quello su cui mi soffermo in queste righe, ‘erotica’ fondata sulla teoria del complesso d’Edipo e può dunque essere sottoposto a molte altre letture. e dell’incesto. Se rifiuta una lettura integralmente Mi permetto però di affermare che fra tutti questi sessuologica o moralizzante dell’episodio, Lejeune significati quello integralmente sessuale mi pare il considera essenziale «l’aspetto simbolico della per- meno accreditabile, al contrario di ciò che ritiene versione, come linguaggio dell’amore perduto», che Lejeune quando rimprovera a Starobinski di aver eli- richiede essenzialmente «una sola via» per l’analisi, minato, appunto, «l’aspetto sessuale del problema» quella della «decifrazione psicanalitica» (ivi, p. 86) ed anzi di aver fatto dell’episodio stesso «una spe- che spinge a parlare di «sadismo mascherato in ma- cie di origine assoluta», qualifica che per lui spetta sochismo» (ivi, p. 91).

sf177.indb 466 19/12/15 01.04 Le due memorie di Jean-Jacques Rousseau 467

supposta) ma del commento che Rous­seau aggiunge e che riguarda appunto il tema della memoria:

Je sens en écrivant ceci que mon pouls s’élève encore; ces momens me seront toujours présens quand je vivrois cent mille ans. Ce premier sentiment de la violence et de l’injustice est resté si profondément gravé dans mon ame, que toutes les idées qui s’y rapportent me rendent ma prémiére émotion; et ce sentiment, relatif à moi dans son origine, a pris une telle consistance en lui-même, et s’est tellement détaché de tout interest personnel, que mon cœur s’enflamme au spectacle ou au récit de toute action injuste, quel qu’en soit l’objet et en quelque lieu qu’elle se commette, comme si l’effet en retombait sur moi (i, p. 20).

Non si può non cogliere il valore eccezionale di un ricordo ‘totale’ che non pre- senta gli aspetti della distanza, dell’ironia, dell’illusionismo che contraddistinguono gli altri ricordi registrati nelle prime pagine delle Confessions. Qui non si avverte alcuno scarto tra il fatto e il ricordo e non si vedono gli effetti dell’oblio, come se i trent’anni trascorsi da allora si fossero annullati di colpo. Nella sua forma – si po- trebbe dire in quanto ‘genere letterario’ – l’episodio del pettine rotto è un «premier souvenir»5, nel senso che fonda la vocazione e la personalità del soggetto, o si propo- ne di farlo, rendendolo addirittura ‘universale’, «détaché de tout interest personnel». Rous­seau nell’esperienza del pettine rotto ha scoperto non solo o non tanto la figura del suo destino e quasi la forma del suo mestiere futuro, quanto l’investitura di un dovere umano: quello di chi dovrà patire per le ingiustizie del mondo. Ciò che lo salva dal divenire una caricatura di Don Chisciotte è che tale vocazione sembra doversi esplicare non in performances eroiche rivolte a salvare le vittime dell’ingiustizia, ma solo nella sofferenza interiore. Persino la missione della denuncia filosofica del male non è compresa in questa prima emozione. Tutto è concentrato sul soggetto. Tanto basta, comunque, per fare di questo ricordo un tipico «premier souvenir» rivelatore di una vocazione. Si può dire insomma che in questa epifania è contenuta l’immagine del futuro capro espiatorio. Esso però, a differenza di tanti altri primi ricordi, è collo- cato non all’inizio della vita cosciente bensì a una età abbastanza avanzata del sogget- to, quando Jean-Jacques ha già vissuto ed ha avuto alcune esperienze che ne hanno condizionato il carattere. Gli autobiografi fanno i salti mortali per far coincidere il «premier souvenir» con l’inizio della vita cosciente, mentre Rousseau­ lascia aperta una sfasatura temporale notevole senza preoccuparsi di colmarla. Quanto l’episodio sia considerato da lui alla stregua di un classico «premier sou- venir» è dimostrato dal fatto che nella prima versione delle Confessions l’ha attribuito al suo nono anno di vita e nella versione definitiva all’ottavo anno, mentre è assoda- to che egli fu accolto dai Lambercier quando aveva dieci anni e tre mesi. Rousseau­ ha dunque «ringiovanito di due anni l’episodio di Bossey per situarlo il più presto possibile nella sua infanzia» – nel «paradiso perduto» – allo scopo di sottolineare la sua «innocenza»6. Le osservazioni cronologiche di Lejeune sono molto puntuali ma non considerano il fatto che anche ad otto anni è un po’ tardi per avere un «premier souvenir», tant’è vero che nel caso di Casanova la collocazione del primo ricordo proprio ad otto anni appare frutto di una forzatura automitologizzante. Ma Casanova conduce la sua manipolazione della storia fino a negare di avere ricordi di fatti pre- cedenti, mentre Rous­seau non può cancellare le molte cose, abbastanza significative, avvenute prima dell’episodio di Bossey. E così, se non può negare i fatti più antichi,

(5) Per una discussione intorno a questo pro- L’“Histoire de ma vie” di Giacomo Casanova, a cura blema mi permetto di rimandare al mio intervento di M. Mari, Milano, Cisalpino, 2008, pp. 125-152. su Il “premier souvenir”. Nascita di uno scrittore, in (6) Lejeune, La punizione cit., p. 91.

sf177.indb 467 19/12/15 01.04 468 Bartolo Anglani

a cominciare dalla morte della madre, fa in modo che essi perdano di importanza e siano relegati in una specie di preistoria che precede la vera nascita dell’Io. Quei ricordi hanno un’aura «mitica» che l’episodio del pettine rotto distrugge per sempre buttando il bambino nella tragedia della vita. È probabile che esista una logica in questo procedimento che viola la retorica non scritta del primo ricordo. L’episodio del pettine rotto, con la punizione che ne consegue, è presentato come l’esilio dal Paradiso Terrestre, «le terme de la serenité de ma vie enfantine» (i, p. 20). Ma, purtroppo, perché ci sia l’esilio è necessario che ci sia stato prima il soggiorno nel Paradiso Terrestre. Ed è anche necessario che sia stata commessa una colpa, perché non si viene cacciati dal Paradiso Terrestre se si è completamente innocenti. È indispensabile, insomma, che sia avvenuta una specie di peccato originale perché inizi la storia, individuale e collettiva. Rous­seau racconta tutto l’episodio secondo il modello del peccato originale, della colpa e della cacciata, ma dimentica o meglio mistifica un particolare: questa volta Adamo è – o pretende di essere – assolutamente innocente. Questa mistificazione – che si può anche chiama- re rimozione, con l’avvertenza però che l’inconscio non c’entra per nulla – provoca all’indietro e in avanti una catena di mistificazioni che diventano essenziali allo scopo di tenere in piedi la costruzione mitica. È dunque per effetto di questa mistificazione (di una rimozione che funziona come un oblio) che tutto ciò che precede il peccato sembra abitare un tempo senza tempo, un tempo circolare senza modificazioni, e non certo perché in tal modo Rousseau­ raggiunga l’identificazione di sé con la propria origine7: ed è esattamente per questa ragione che egli racconta gli anni che precedono l’episodio del pettine sotto il tempo dominante dell’imperfetto, evitando di datarli con precisione e ‘dimenticandoli’, tagliandoli, impedendo a se stesso di ricostruirli nella loro integrità. L’immagine edenica attribuita da Rousseau­ ai suoi primi anni di vita è infatti facilmente falsificabile, nel senso che essa esprime una mitologia personale più che la realtà: tanto è vero che molti indizi contrari disseminati nel testo permettono di ricostruire il quadro di un’infanzia molto meno ‘idillica’ di come l’autobiografo vo- glia far credere e di come poi molti interpreti l’hanno accettata senza sottoporla a un processo doveroso di verifica testuale. Eppure egli non poteva raccontare quegli anni che in questo modo, se voleva che il pettine rotto svolgesse la sua funzione di vero inizio della «caduta» dell’uomo, e non si rendeva conto (o se ne rendeva conto, ma gli andava bene così) che la sua ricostruzione avrebbe mostrato vuoti, contraddizioni, scarti, incongruenze che avrebbero potuto mettere in discussione lo schema adottato. Rousseau,­ dunque, sul piano teologico respingeva la teoria del peccato originale e poi usava il modello Eden/Caduta per segnare i passaggi simbolici della sua nar- razione, costruita sul ripetersi di esilî e di cacciate a ripetizione da ciò che volta in volta è rappresentato come Paradiso8. In questo punto si annida una contraddizione insuperabile e ingovernabile, che esprime a livello altissimo il conflitto su cui si regge l’edificio autobiografico e quello filosofico che gli è strettamente connesso. Da un lato Rousseau­ ha bisogno di rappresentare i suoi primi anni di vita come innocenti, allo

(7) Mi riferisco alle tesi di J.-F. Perrin, Le chant caduta» mentre «il bambino è innocente e vittima de l’origine: la mémoire et le temps dans les “Confes- di un malinteso» (Il libro i delle “Confessioni”, in sions” de Jean-Jacques Rous­seau, Oxford, Voltaire Il patto autobiografico cit., p. 108, nota), Lejeune si Foundation, 1996 («SVEC», 339), che per man- arrende alla ‘lettera’ del testo e non immagina che la canza di spazio non posso discutere nel merito ma logica debba essere rovesciata, o meglio colta nella che costituiscono un punto di riferimento costante sua duplicità: da un lato Rous­seau si presenta come nelle mie osservazioni. innocente e nega la colpa originaria, ma dall’altro (8) Quando osserva che «la Genesi e il primo li- racconta la sua vita come una serie di esilî e di cac- bro delle Confessioni non hanno alcun rapporto» ciate da Paradiso e usa il modello della Genesi che tra loro perché «Adamo è responsabile della sua presuppone la colpa.

sf177.indb 468 19/12/15 01.04 Le due memorie di Jean-Jacques Rousseau 469

scopo di confermare la teoria dell’uomo che nasce buono e diventa cattivo perché corrotto dalla società e dalla storia; ma, dall’altro, per raccontare questo processo si serve di uno schema – quello della cacciata dal Paradiso – che presuppone una colpa e dunque insidia dall’interno la presunzione di innocenza. Benché segnati da tristezze e dolori, i primi anni di vita devono essere compresi sotto il cartellino dell’Eden perché l’episodio del pettine assuma e sviluppi tutto il suo potenziale fondativo. Questo sche- ma si ripeterà altre volte: Rousseau­ tenderà ad attribuire al periodo appena trascorso un valore di quiete e di felicità e si rappresenterà ogni volta gettato da quell’istan- te nell’inquietudine e nell’infelicità. Ma proprio la ripetizione del meccanismo getta all’indietro una luce straniante sul primo anello della catena e contribuisce a metterlo in discussione. Gli interessi del narratore, affascinato dal meccanismo dell’esclusione che permette di drammatizzare all’infinito il racconto della vita, contrastano non solo con quelli del pensatore ma soprattutto con la logica stessa dell’archetipo del Paradiso e dell’Esilio, secondo cui la rottura e la cacciata dovrebbero verificarsi una volta sola, pena lo sbiadimento o addirittura la falsificazione del loro valore simbolico. L’espulsio- ne dal Paradiso può assumere un valore epocale e totalizzante, nella vita dell’individuo e dei popoli, se avviene una volta per sempre e divide quella vita in due periodi ben di- stinti e incomunicabili. Adamo ed Eva non possono essere espulsi due volte (o addirit- tura più volte) dall’Eden; il popolo eletto non può rimanere nella cattività d’Egitto due volte, se non si vuole che il suo ritorno nella Terra Promessa diventi una specie di déjà vu e smarrisca ogni connotazione tragica e fondativa. La lettura delle Confessions rivela invece «che la catastrofe dell’espulsione dal Paradiso è avvenuta a più riprese», osserva Starobinski, ma attribuisce questo fenomeno ad una specie di coazione a ripetere che spinge Rousseau­ a rivivere lo stesso evento «in un grandissimo numero di circostanze, proprio come i nevrotici ripetono un avvenimento traumatizzante nei sogni o nel loro comportamento», anche se poi precisa che lungo il racconto si verificano «altri comin- ciamenti solenni», come se il narratore «esitasse a precisare l’istante iniziale in cui il suo destino si immerge nelle tenebre». Sta di fatto che Rousseau­ conserva un potere miracoloso di «ricreare il paradiso e di reimmergersi in esso», ma lo riconquista solo «con l’intenzione oscura di perderlo ancora e di affrontare ancora una volta il male dell’esilio», obbedendo al suo impulso di «ricollocarsi nell’Eden»9. La descrizione del processo è impeccabile (ed è sempre utile per togliere senso e valore alle ricostruzioni beatamente idilliche dell’infanzia e dei paradisi rousseauia­ ­ni) ma non coglie fino in fondo la natura della pulsione che spinge Rous­seau a fabbricare via via sempre nuovi Paradisi ed a perderli ed a ritrovarli: una pulsione che è indici- bile non perché sia radicata in zone oscure dell’inconscio nevrotico ma perché può essere detta solo da chi riconosca ad alta voce la duplicità immedicabile del sistema. Rous­seau può dare al lettore tutti gli indizi necessari per ritrovarla ma non può essere egli in prima persona a nominarla, e infatti quando tenta le sintesi del suo sistema sceglie un corno o l’altro del dilemma e finisce per disconoscerne la duplicità. La contraddizione continua a parlare nella tessitura verbale e nella peripezia, si distende nel tempo ed evita di farsi riconoscere, in quanto tale, nella sua struttura ‘verticale’. È la ripetizione dell’evento che maschera e segnala al tempo stesso la contraddizione annidata nella visione e nel pensiero di Rousseau­ tra due concezioni radicalmente opposte, fra le quali egli crede di aver scelto una volta per sempre con i contenuti ef- fettuali della sua esposizione filosofica. La forma ‘letteraria’ del suo racconto tradisce una doppiezza costitutiva che, a differenza di ciò che pensano i decostruzionisti, non può essere risolta in maniera altrettanto univoca sostituendo l’ideologia dichiarata

(9) J. Starobinski, Jean-Jacques Rousseau­ et le péril de la réflexion cit., p. 182. La traduzione è sempre mia.

sf177.indb 469 19/12/15 01.04 470 Bartolo Anglani

con un’altra ideologia o, peggio, sentenziando che il risultato di questa contraddi- zione apre la strada a una specie di nulla, ad una macchina nichilista che manda in frantumi ogni ipotesi positiva. La ‘verità’ di Rous­seau, se ne esiste una, sta invece proprio nella violenza con cui le due ipotesi si contrappongono senza che una sia più vera dell’altra generando la formazione di compromesso della scrittura letteraria che riproduce via via lo schema della caduta e dell’esilio. Il valore assoluto e fondativo dell’esperienza non può essere ripetuto all’infinito e attribuito ad episodi sempre nuovi. Resta comunque segno di una precisa volontà sim- bolizzatrice il fatto che, a quest’altezza del racconto, Rousseau­ attribuisca tale valore all’episodio del pettine rotto, che è il primo della serie ma accade in un’età abbastanza avanzata dell’individuo ed è stato comunque preceduto da altri ricordi. Si intuisce così per qual ragione egli non potesse (e non volesse) individuare un «premier souvenir» in corrispondenza con l’inizio della vita cosciente. Gli era necessaria l’esistenza di una fase primitiva ed edenica, nella quale al soggetto mancavano le nozioni del bene e del male, perché l’espulsione dal Paradiso potesse fondare una vita ricca di significato (benché inizialmente negativo). Per creare questa fase primitiva gli basta «écarter tous les faits» e inventarne altri o manipolare qualche fatto realmente accaduto. Egli ricorda alcuni avvenimenti di quell’epoca della sua vita ma non può fondare su nessuno di essi la retorica del «premier souvenir» perché essi sono tutti ancora esterni ed estranei alla storia e precedono la caduta vera e propria. Si comprende così perché i primi ricordi debbano presentarsi in forme precarie, frammentarie, insidiate dall’oblio, e al tempo stesso perché essi debbano assumere quella parvenza idillica e autoapologetica che ha illuso tanti interpreti con la sua autosufficienza artificiale. Sul piano del progetto e della vocazione, i primi tempi dell’esistenza rousseauia­ na­ non hanno senso non perché l’autore sia incapace di attribuirglielo ma perché essi non possono né devono averlo. Se ne avessero, l’episodio del pettine rotto perderebbe il suo valore primario di iniziatore della catena di eventi che hanno portato Jean-Jacques ad essere ciò che è diventato. Sul piano antropologico, gli anni dell’infanzia corrispon- dono alle epoche primitive dell’umanità non ancora soggetta alla storia. Ma l’analogia tra l’individuo e l’umanità, che dovrebbe rappresentare il punto forte dell’ideologia rousseauia­ na­ (e che in quanto tale viene accettato da molte ricostruzioni di essa), non tiene perfettamente e anzi lascia sfuggire alcune contraddizioni che diventano esplicite proprio a proposito del «premier souvenir». Il «premier souvenir» è per sua natura ‘to- tale’, in quanto coinvolge l’interezza dell’essere e imprime un segno profondo sulla per- sonalità a venire. Esso è non tanto un episodio che condiziona causalmente lo sviluppo dell’essere quanto l’epifania di un’essenza che già esiste, di cui il soggetto fino a quel momento non era consapevole, e che deve manifestarsi in forme altamente significative per perpetuare il suo ricordo negli anni a venire. Per questa ragione la maggior parte degli autobiografi fa coincidere il «premier souvenir» con l’inizio della vita cosciente, a volte retrodatandola esageratamente o posticipandola altrettanto esageratamente, e dunque manipolandola in modo che essa stia al posto giusto, all’inizio della consape- volezza di sé. Non avrebbe alcun valore epifanico un evento che precedesse di molto le capacità dell’individuo di ricordare, a causa della reciprocità di memoria e di identità: e non ne avrebbe nemmeno uno che arrivasse troppo tempo dopo l’inizio della memoria e la costituzione dell’Io. È la memoria che permette di costruire l’identità, è l’identità che garantisce la coerenza della memoria e decide cosa ricordare e cosa dimenticare10. Spostando a un’età relativamente matura la data del primo ricordo, Rous­seau ha relegato in una specie di preistoria, ossia di tempo senza storia e soprattutto senza si- gnificati ‘grandi’, gli anni precedenti. Ma non poteva verisimilmente svuotarli di ogni

(10) Cfr. J. Candau, Mémoire et identité, Paris, PUF, 1998, p. 10.

sf177.indb 470 19/12/15 01.04 Le due memorie di Jean-Jacques Rousseau 471

ricordo. Qui l’analogia tra vita individuale e storia dell’umanità mostra il suo limite, perché la storia dell’umanità primitiva che precede la scrittura è davvero perduta o può essere ricostruita a fatica con largo ricorso alle congetture, mentre la storia personale lascia nell’anima dell’individuo tracce che possono essere ‘dimenticate’, modificate, continuamente riscritte ma non cancellate del tutto. Qualcosa dev’essere pur accaduto, in quegli anni, e qualche frammento di ciò che è accaduto dev’essere si- curamente rimasto nel ricordo, anche se richiede di essere riconquistato e ricostruito per avere senso. O forse tutto è rimasto: ma se l’autobiografo raccontasse quel «tutto» metterebbe in crisi lo schema storico-mitologico che sta costruendo. Si tratta dunque di trovare il modo di raccontare quegli eventi senza attribuir loro quel valore fondati- vo che nella strategia autobiografica spetta al pettine rotto. È per questa ragione che i ricordi di quegli anni non possono essere completi e che i ‘dettagli’ spiccano nitidi in primissimo piano mentre la logica che li tiene insieme rimane nell’ombra o tende a risolversi (pur senza riuscirci, tranne che per i lettori disposti a lasciarsi incantare dalla magia del racconto) in una dimensione ‘idillica’ priva di distinzioni. Il periodo edenico non può avere conflitti; ma, poiché è una creazione mitica che non corri- sponde alla realtà effettiva, non può essere rappresentato in tutti i suoi aspetti che smentirebbero l’aura che gli viene attribuita. Occorre dunque ‘dimenticare’, selezio- nare i ricordi, destrutturare il tessuto dell’esistenza precedente, fingere di non poter ricordare ogni cosa, privilegiare certi dettagli apparentemente privi di senso e scar- samente allusivi alla futura identità del personaggio: tutto questo perché l’episodio del pettine rotto si accampi in tutta la sua violenza come il fatto simbolico generatore che getta una luce livida e premonitrice sul resto della vita. Il guaio, per il progetto rous­seauia­no, è che tale operazione non avviene senza contraddizioni e senza residui. Per fortuna sua e nostra, s’intende, perché il fascino delle Confessions sta proprio nei conflitti tra progetti diversi e incompatibili che si trovano tutti, con pari energia, alla radice dell’impresa autobiografica. Intanto, il funzionamento precario della me- moria, progettato come funzionale al progetto di mitizzazione, acquista autonomia e comincia a sprigionare significati propri, alternativi rispetto al Significato vocazionale che dovrebbe scaturire dal racconto del pettine rotto. L’alternarsi di pieni e di vuoti perde il suo carattere casuale e contribuisce a delineare una pratica della memoria e dell’oblio destinata a durare ben oltre la rivelazione del pettine rotto e dunque al di là dell’epoca ‘idillica’. Intanto, dopo il passo esaltato che collega il passato e il presente in una specie di corto circuito, le esemplificazioni date da Rousseau­ ripristinano in un certo senso i meccanismi della memoria parziale concentrata sui dettagli, che appare in conflitto con la tentazione della memoria ‘totale’:

Près de trente ans se sont passés depuis ma sortie de Bossey sans que je m’en sois rappellé le séjour d’une maniére agréable par des souvenirs un peu liés: mais depuis qu’ayant passé l’age mur je décline vers la vieillesse, je sens que ces mêmes souvenirs renaissent tandis que les autres s’effacent, et se gravent dans ma mémoire avec des traits dont le charme et la force augmentent de jour en jour; comme si, sentant déjà la vie qui s’échappe, je cherchais à la ressaisir par ses commencements. Les moindres faits de ce tems-là me plaisent par cela seul qu’ils sont de ce tems-là (i, p. 21).

Ecco un esempio sublime di una scrittura che sa illudere il lettore con una melo- dia continua nascondendo sapientemente i passaggi di tono e le vere e proprie disso- nanze. Da un lato Rous­seau dice di aver ricordato ininterrottamente per trent’anni le vicende di quel soggiorno; ma sùbito aggiunge che quei ricordi consistono in «souve- nirs un peu liés», non in una illuminazione totale quale ci si potrebbe aspettare da una magica memoria infantile. Questi ricordi sembrano comunque venire alla coscienza

sf177.indb 471 19/12/15 01.04 472 Bartolo Anglani

in termini ben precisi; ma anche in questo caso Rous­seau aggiunge una piccola con- traddizione quando dice che man mano che egli invecchia quei ricordi «rinascono» mentre altri (quali?) si cancellano, e si «imprimono» nella sua «memoria» con aspetti la cui «forza» e il cui «incanto» si accrescono «di giorno in giorno», quasi che egli, sentendo la vita sfuggirgli, volesse riacchiapparla dalle sue «origini». Se quei ricordi sono sempre stati vivissimi, come fanno ora a rinascere e a diventare più forti man mano che si allontanano nel tempo? Quali sono gli altri ricordi che invece cedono e si pèrdono? Il ragionamento di Rousseau­ è fondato sulla distinzione implicita (ma non meno significativa) tra «souvenir» e «mémoire»: i ricordi esistono, vanno e vengo- no, ma sono «poco legati» tra di loro, e diventano «memoria» solo quando vengono fortificati e riunificati dalla distanza mitica. Quello della «memoria» è dunque dav- vero un meccanismo assai diverso dal semplice ricordare, tanto che si costruisce nel presente e nella consapevolezza piena dell’operazione compiuta. Forse finché erano semplici «souvenirs» quei ricordi avevano perfino una data ed appartenevano a una cronologia: ma ora, entrati nella «mémoire», pèrdono ogni connotazione precisa e rimangono ancorati a «ce tems là». Alla epifania assoluta e immediata, fondata sul sentimento («je sens»), succede un elenco di ricordi in cui riprende forza la funzione della vista («je vois»). Rousseau­ proclama di ricordare «tutto», ma l’attimo epifani- co è trascorso e la mente (in senso lockiano) non riesce a dare un quadro totale del passato e deve affidarsi al potere della vista che è per sua natura limitato e selettivo:

Je me rappelle toutes les circonstances des lieux, des personnes, des heures. Je vois la servante ou le valet agissant dans la chambre, une hirondelle entrant par la fenêtre, une mouche se poser sur ma main, tandis que je récitois ma leçon; je vois tout l’arrangement de la chambre où nous étions; le cabinet de M. Lambercier à main droite, une estampe représentant tous les papes, un barometre, un grand calendrier; des framboisiers qui, d’un jardin fort élevé dans lequel la maison s’enfonçoit sur le derriére, venoient ombrager la fenêtre, et passoient quelque- fois jusqu’en dedans. Je sais bien que le lecteur n’a pas grand besoin de savoir tout cela; mais j’ai besoin moi de le lui dire (i, p. 21; corsivi miei).

Non ci si lasci sviare dalla tonalità preromantica del passo: qui si vede in azione non la memoria sentimentale, che per sua natura coglie la totalità dell’esperienza, ma la memoria visiva che è selettiva e soggetta alla parzialità del punto di vista e può realizzarsi solo nel presente, a grande distanza cronologica dai fatti. La nitidezza dei singoli dettagli si realizza nell’istante in cui l’autobiografo vede e non crea la visione globale che è propria della memoria. Proprio perché ogni particolare è perfetta- mente identico a ciò che era trent’anni prima, e non è stato rielaborato dal lavoro ricostruttivo della memoria, il lettore si trova di fronte a tanti dettagli singolarmente veri ma non a una totalità densa di significato. In questa scena manca il colpo d’oc- chio, manca la percezione totale di un evento: che del resto in quanto tale, nella sua individualità, non è mai avvenuto. La ragione apparente di questa dispersione sta nel fatto che i ricordi qui registrati appartengono ancora al tempo idillico, sono insomma un flash-back che riporta l’autore (e il lettore, chiamato direttamente in causa) al mondo precedente la caduta. Il narratore ricorda perfettamente «tutte le circostanze dei luoghi, delle persone, delle ore», ma non può dirle, ossia non può ricostruire e ritradurre in parole il sistema complesso della realtà di quel tempo; così che quando riproduce un ricordo si china sempre su dettagli, su fatti minimi che non hanno altra importanza che quella di essere stati, e che al lettore davvero interessano poco perché ciò che li lega non è detto. Ogni particolare ha un senso ma tutti insieme i particolari non producono un senso. La precisione dei dettagli è ingannevole, come nei sogni, perché lascia tutto il resto immerso nel vago di un passato imprecisato. Mentre l’episodio del pettine rotto introduce una gerarchia di

sf177.indb 472 19/12/15 01.04 Le due memorie di Jean-Jacques Rousseau 473

valori molto precisa, e stabilisce in anticipo ciò che meriterà di essere ricordato e ciò che dovrà essere dimenticato, i ricordi che arrivano spontaneamente alla mente dell’autobiografo sono privi di ordine e sono talmente isolati da non garantire un senso alla vita futura del soggetto. La memoria visiva è tanto più precisa nei dettagli quanto inefficace per quanto riguarda i rapporti generali e il medesimo tessuto umano del passato. A suo modo an- che questa è una epifania: l’apparizione di un mondo che rinasce e si manifesta all’oc- chio del narratore con la vivezza dell’immediato. Il lettore è così messo di fronte a due epifanie, reciprocamente contraddittorie: una, totale, racconta la scoperta improvvisa e violenta del male e dell’ingiustizia e si presenta come fondatrice della personalità intera del soggetto e madre della sua vocazione futura; l’altra, fatta di frammenti, racconta la scoperta di cose prive di importanza e perfino di significato e non riesce né vuole totalizzare l’esperienza per riempire di senso tutti i particolari del mondo, ma fa intuire l’esistenza di un altro soggetto, di un altro progetto, di una memoria ‘in minore’ (ma non meno tenace) che continuerà a interferire con la strategia ‘in mag- giore’ anche in séguito. L’occhio che guarda è vergine, non è condizionato da schemi conoscitivi preformati e non è in grado di instaurare alcuna gerarchia tra le immagini. Tutto sta sullo stesso piano. Non si sa cosa sia il bene e cosa sia il male. Questa epi- fania, a differenza di quella del pettine rotto, non crea un mondo complesso e totale. L’epifania proustiana, alla quale spesso ci si richiama commentando queste pagine di Rous­seau, sarà molto più totalitaria e tenderà infatti a sostituire interamente l’espe- rienza del presente con una dimensione estetica: dalla tazza di tè di Marcel sorgerà un intero mondo, un mondo complesso che certo dovrà essere poi esplorato fin nelle fibre più intime per essere pienamente conosciuto, ma che già al suo primo apparire è, appunto, non un aggregato casuale di immagini ma un mondo più vero che prende il posto del mondo empirico quotidiano. E infatti il meccanismo memoriale viene innescato in Marcel non tanto dalla vista quanto dall’odore e dal sapore, cioè da sensi che non hanno un ‘punto di vista’ ma sono coinvolgenti, totali e non controllabili dal soggetto. Fino a quel momento «la vue de la petite madeleine», benché ripetuta nel corso degli anni, non gli aveva «rien rappelé» prima che egli la mangiasse, perché a soccorrere la memoria dell’uomo,

quand d’un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l’odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impal- pable, l’édifice immense du souvenir11.

Da una gocciolina nasce per Proust l’edificio immenso del ricordo, una realtà memoriale integrale che fa appunto ritrovare il Tempo Perduto; mentre per Rousseau­ i ricordi del primissimo tempo dell’infanzia restano allo stadio di frammenti privi di gerarchia e di senso. Ha scritto Starobinski, nel suo primo libro rous­seauia­no, che «le lacune della sua memoria» non «inquieteranno mai» Rousseau,­ e che mai egli dirà a se stesso, come Proust, che «l’avvenimento dimenticato nasconde una verità essenziale», poiché per lui «ciò che sfugge alla sua memoria non ha importanza». Non credo però che, come afferma il grande critico, questo comportamento sia dovuto a un «ottimismo che non si smentisce mai e che conta sul pieno possesso di una eviden- za interiore», e sono più propenso a ritenere che la facilità nell’accettare le proprie

(11) M. Proust, À la recherche du temps perdu, vol. i, Paris, Gallimard («La Pléiade»), 1987, p. 46.

sf177.indb 473 19/12/15 01.04 474 Bartolo Anglani

amnesie sia il segno di una contraddizione che non può essere ‘detta’ in altro modo. Resta pur sempre il fatto che le Confessions «sono innanzitutto un tentativo di rettifi- care l’errore degli altri e non certo la ricerca di un “tempo perduto”»12. La contraddizione che insidia il progetto rous­seauia­no e al tempo stesso ne mol- tiplica il fascino appare evidente nel fatto che lo scrittore non riesce ad abbandonare bruscamente il primo tempo della sua esistenza e, anche dopo aver inciso con l’epi- sodio del pettine rotto una linea di separazione tra i due mondi, torna indietro alle «petites anecdotes de cet heureux âge, qui me font encore tressaillir d’aise quand je me les rappelle», e fra cinque o sei possibili ne sceglie «une, une seule» che intende «conter le plus longuement qu’il me sera possibile, pour prolonger mon plaisir» (i, pp. 21-22). È la «grande histoire du noyer de la terrasse», tanto nota ai lettori delle Confessions (i, p. 22) da consentirmi di non riferirla. Anche in questo caso l’oblio svolge una parte notevole, non tanto nel deformare il ricordo della «petite histoire», che in quanto tale «m’est si bien restée ou revenue» in tutta la sua interezza, quan- to nell’impedire all’adulto, durante un viaggio a Ginevra nel 1754, di realizzare il «projet» di andare «à Bossey revoir les monumens des jeux de mon enfance, et sur- tout le cher noyer qui devoit alors avoir déja le tiers d’un siécle»:

Je fus si continuellement obsédé, si peu maitre de moi-même, que je ne pus trouver le moment de me satisfaire. Il y a peu d’apparence que cette occasion renaisse jamais pour moi. Cependant je n’en ai pas perdu le desir avec l’espérance; et je suis presque sûr, que si jamais, retournant dans ces lieux chéris j’y retrouvais mon cher noyer encore en être, je l’arroserois de mes pleurs (i, p. 24).

Nelle Confessions ricorrono molti di questi «cependant», che nella scrittura autobiografica rousseuiana occultano una spiegazione che non può essere scritta perché se lo fosse incrinerebbe la logica mitica del racconto, e che d’altra parte non può essere del tutto eliminata perché è la spia di un’altra verità o meglio di un’altra logica che continua a parlare nel testo. L’uso del «cependant» è il sintomo di un cambiamento di tonalità in cui i passaggi intermedi sono stati eliminati per far credere all’esistenza di una certa continuità melodica. È facile scommessa che non sarà stato certo per mancanza di tempo se Jean-Jacques durante quel viaggio si è guardato bene dal recarsi sui luoghi amati per rinverdire i ricordi che possono esistere, ben protetti nella memoria, solo a patto di essere ‘dimenticati’. È come se Rous­seau volesse resistere al richiamo della memoria immediata di cui ha appena dato testimonianza. L’oblio non è né un difetto di memoria né l’effetto di un ‘siste- ma’ di parcellizzazione ma il prodotto della scelta, volontaria e cosciente, di non completare i vuoti rimasti nel ricordo. Rousseau­ non ha alcuna voglia di ritrovare il suo «temps perdu», ed anzi rifugge con ostinazione dai rischi che quel tempo ritorni e lo trovi impreparato a riceverlo. Un atteggiamento non dissimile lo spinge a far deviare il battello quando, navigando sul lago di Ginevra, egli vede su un’altra barca due sue «anciennes amours»:

vingt ans après, étant allé voir mon pére, et me promenant avec lui sur le lac, je demandai qui étoient des Dames que je voyois dans un bateau peu loin du nôtre. Comment, me dit mon pere en souriant, le cœur ne te le dit pas? Ce sont tes anciennes amours: c’est Mme Cristin, c’est Madlle de Vulson. Je tressaillis à ce nom presque oublié: mais je dis aux bateliers de changer de route, ne jugeant pas, quoique j’eusse assez beau jeu pour prendre alors ma revanche, que

(12) J. Starobinski, Jean-Jacques Rous­seau. La Rous­seau [1957], Paris, Gallimard, 1971, pp. 217- transparence et l’obstacle, suivi de sept essais sur 218. La traduzione è mia.

sf177.indb 474 19/12/15 01.04 Le due memorie di Jean-Jacques Rousseau 475

ce fut la peine d’être parjure, et de renouveler une querelle de vingt ans avec une femme de quarante (i, pp. 29-30)13.

La persona importante fra le due è certamente la signorina Vulson, che vent’an- ni prima, a Nyon, aveva diviso il cuore (o qualcosa di simile) di Jean-Jacques con la signorina Goton. Jean-Jacques aveva undici anni e Mlle Vulson undici di più, mentre la «petite» Goton aveva quasi la sua stessa età. Le due ragazze rappresentavano le «deux sortes d’amour» fra cui la vita di Rousseau­ sarebbe stata divisa per sempre, due «diverses natures» di amore che Jean-Jacques fu sempre capace di provare «tous deux à la fois»: uno, in cui egli svolgeva la parte passiva e si lasciava non solo domi- nare ma anche picchiare; l’altro, in cui era invece lui a impadronirsi tanto «publique- ment» e «tyranniquement» della donna da non poter sopportare «qu’aucun homme approchât d’elle». Mlle Goton era la dominatrice, e, senza essere particolarmente bella, «avoit une figure difficile à oublier, et que je me rappelle encore, souvent beau- coup trop pour un vieux fou» (i, p. 27). Della sorte di Mlle Goton, così ben ricordata, non si saprà nulla (e proprio perché essa è scomparsa e non rischia di interferire con il presente può essere ricordata), mentre Mlle Vulson la si vede ricomparire vent’anni dopo nella sequenza del lago. Tale evento inatteso mette in crisi il meccanismo della memoria e dell’oblio: Mlle Vulson sarebbe dovuta scomparire anch’essa per essere ricordata interamente. Ora che inopinatamente riappare bisogna trovare il modo di dimenticarla. È meglio non entrare per ora nella complicata speculazione erotica che Rous­seau intesse intorno al rapporto con le due ragazze, ed è più opportuno ricor- dare soltanto che la fine della passione per Mlle Vulson era stata per il ragazzo una specie di «catastrophe». Quando Jean-Jacques non stava a Nyon dal padre ed era tor- nato a Ginevra, per «tempérer les douleurs de l’absence» i due si scambiavano lettere «d’un pathétique à faire fendre les rochers», finché la ragazza venne fino a Ginevra a trovare il piccolo amico facendogli credere di essere venuta apposta per lui:

Pour le coup la tête acheva de me tourner; je fus ivre et fou les deux jours qu’elle y resta. Quand elle partit, je voulois me jeter dans l’eau après elle, et je fis longtemps retentir l’air de mes cris. Huit jours après, elle m’envoya des bonbons et des gants; ce qui m’eut paru fort galant, si je n’eusse appris en même temps qu’elle était mariée, et que ce voyage, dont il lui avait plû de me faire honneur, étoit pour achetter ses habits de noces. Je ne décrirai pas ma fureur; elle se conçoit. Je jurai dans mon noble courroux de ne plus revoir la perfide, n’imaginant pas pour elle de plus terrible punition. Elle n’en mourut pas cependant; car vingt ans après […] (i, p. 29).

Questo antefatto chiarisce forse il «furore» che invade il ragazzo ma non il com- portamento del giovanotto cresciuto e soprattutto non spiega la modalità di racconto scelta da Rous­seau anziano, che nella parte che riguarda il passato è condotto in una tonalità ironica, falsamente eroica, comune ad altri momenti dell’infanzia. La doman- da del padre, ironica a sua volta in senso più deciso, sembra scaturire dall’interno del sistema rous­seauia­no. È come se il padre dicesse al figlio: ma come, il cuore non te lo dice? tu, che tanto parli di sentimento, non riconosci all’istante la persona di cui vent’anni fa sei stato innamorato? Ma Jean-Jacques opera una rimozione, anzi una

(13) Questo è uno dei tanti momenti ‘proustiani’ premier livre des “Confessions”, «Revue des Scien- che mandano in visibilio i critici idillici, per i quali ces Humaines», n. 149, 1973, p. 73; trad. mia). Ba- «il nome di Mlle Vulson, come quello di Gilberte sta leggere il passo con un po’ di rispetto per ciò Swann, diventa l’eco magica che comporta la dis- che esso contiene per vedere che esso è fondato soluzione di tutto un periodo e arresta il corso del proprio sulla distanza del presente dal passato e tempo» (Ch. Robin, La mémoire affective dans le sull’oblio della persona amata.

sf177.indb 475 19/12/15 01.04 476 Bartolo Anglani

rimozione doppia: prima finge di non riconoscere le due donne, che pure non sono molto lontane, e poi, dopo che il padre gli ha rivelato ciò che egli non voleva sapere (ma che in realtà già sapeva), ordina al battelliere di cambiar rotta. Come sempre avviene nelle Confessions, Rousseau­ espone nitidamente la spiegazione ‘ufficiale’ del suo gesto ma lascia qualcosa di non detto (o detto lateralmente e obliquamente) che richiede un’altra spiegazione in conflitto con la prima. Jean-Jacques spinge la sua ipo- crisia fino a interrogare il padre sull’identità di quelle due donne, che anche a causa della scarsa distanza egli non può non aver riconosciuto, per quanto debole di vista come spesso ama rappresentarsi. Si badi che l’ipocrisia non è solo del personaggio Jean-Jacques ma anche del narratore Rousseau,­ che a distanza di tanti anni men- tre compone le Confessions continua a negare di aver riconosciuto Mlle (anzi, ormai Mme) Vulson. Anche in questo caso avviene la coincidenza perfetta tra il personaggio e il nar- ratore, tra il Jean-Jacques di allora e il Rousseau­ maturo. Con la tecnica spregiudicata dei grandi bugiardi, per evitare che l’avvicinamento eccessivo fra le due barche lo co- stringa ad ammettere di aver riconosciuto le donne e anche a rivolgere loro la parola, egli chiede al padre chi siano allo scopo di poter deviare il percorso in tempo con il debole pretesto della «revanche» alla quale ha rinunciato. Ma così si tradisce, perché la vista di due perfette sconosciute fra tante persone in gita non avrebbe attirato la sua attenzione e non lo avrebbe stimolato alla domanda. Avrà incontrato altre barche durante la passeggiata sul lago, ma non si sarà preoccupato di identificarne ogni volta gli occupanti. La sua ipocrisia è confermata ulteriormente dall’affermazione di avere «presque oublié» non il viso e l’aspetto ma il nome della donna: ma non era «difficile à oublier»? E poi, cosa vuol dire «presque oublié»? Si può dimenticare mezzo nome o mezzo volto? In questo modo egli non si compromette affermando di averne dimen- ticato il viso e l’aspetto perché non può ammettere di aver riconosciuto le due donne. Chiunque abbia avuto da ragazzo una passione, anche meno esagerata di quella provata da Jean-Jacques, sa che una sensibilità particolare – quella che il padre sor- ridendo chiama «cuore» – permette all’individuo di riconoscere le persone amate, anche se trasformate dal tempo, soprattutto se l’incontro avviene nei luoghi stessi in cui si svolse la storia d’amore (o di desiderio, quando l’amore è stato in una sola direzione). Se quella di Jean-Jacques fosse stata davvero una memoria «affettiva», lo scenario del lago avrebbe dovuto riattizzare il fuoco del ricordo, non attutirlo e addirittura spegnerlo. E poi, non è lo stesso Rous­seau ad avere sostenuto di poter ricordare ogni cosa, ogni minimo dettaglio del passato? Il padre infatti ha ragione: non è tanto lo sguardo, inteso come strumento tecnico neutro, che dovrebbe rivelare a Jean-Jacques l’identità delle due donne, ma il «cuore» che conosce tutto immedia- tamente senza passaggi logici e senza attardarsi nei dettagli. La motivazione del gesto (la volontà di non rinnovare una querelle di vent’anni prima) è evidentemente inven- tata all’istante. L’aspetto bizzarro della faccenda è però che Rousseau­ ripeta la stessa scusa tanti anni dopo nelle Confessions, pari pari, quando non c’è più il padre al quale rifilare quella balla. La prima spiegazione che viene alla mente è che Jean-Jacques non intenda lasciar turbare e contaminare il suo ricordo dalla realtà del presente: le donne saranno invecchiate nel frattempo, e il giovane non ha voglia di verificare dal vivo la loro metamorfosi. Ma credo che questa spiegazione sia troppo banale e comunque occulti un dato decisivo, ossia che il ricordo di Mlle Vulson, come è conservato nel «cuore» dell’ex-innamorato, è già frutto dell’oblio, e che il timore di Jean-Jacques non è quello (comune alla maggior parte degli esseri umani) di confrontare un bel ricordo del passato con la realtà meno gradevole del presente, bensì quello di dover colmare i ‘vuoti’ del ricordo stesso, quei vuoti che hanno costituito il ricordo come tale. Evitando di incontrare Mlle Vulson, Jean-Jacques evita non di rimanere deluso dall’immagine degradata del presente ma di essere costretto a vedere la donna per

sf177.indb 476 19/12/15 01.04 Le due memorie di Jean-Jacques Rousseau 477

quello che è sempre stata. E infatti l’oblio non è intervenuto nel tempo a sbiadire pian piano l’immagine reale della donna, ma ha cominciato ad agire nell’istante stesso in cui il ragazzo ha conosciuto la verità sullo stato matrimoniale dell’amata. Anzi, il processo della dimenticanza è iniziato anche prima, e si può dire che l’oblio è stato consustanziale al rapporto tra Jean-Jacques e Mlle Vulson: Absent d’elle j’y pensois, elle me manquoit; présent, ses caresses m’étoient douces au cœur, non aux sens. J’étois impunément familier avec elle; mon imagination ne me demandoit que ce qu’elle m’accordoit; cependant je n’aurois pu supporter de lui en voir faire autant à d’autres. Je l’aimois en frère; mais j’en étois jaloux en amant (i, p. 28).

Mlle Vulson è fin dall’inizio una figura dell’assenza e della distanza: Jean-Jacques sente la sua mancanza quando ella non c’è, ma quando c’è le sue carezze toccano il suo cuore e non i suoi sensi. Si tratta di un oblio intermittente, che agisce proprio quando l’oggetto amato è presente, e si attenua quando esso è assente. L’avverbio «impunément» si riferisce sicuramente, come in altri luoghi delle Confessions, alla masturbazione, o meglio alla mancanza di essa: Jean-Jacques (che a dire di Rous­seau avrebbe scoperto questa pratica alla veneranda età di diciannove anni)14 è ben consa- pevole del fatto che il rapporto con Mlle Vulson può essere tenuto «impunément», ossia senza il ricorso alla masturbazione. Questo è un altro caso in cui il discorso ‘in maggiore’ delle Confessions viene smentito da un discorso ‘in minore’, che senza ricorrere a dichiarazioni impegnative sémina dubbi e fa trapelare un’altra possibile verità, e crea una formazione di compromesso che continua a dire le due verità senza, di fatto, privilegiarne una sull’altra e senza consentire al lettore di sapere come siano realmente andate le cose (ammesso che tale accertamento sia l’obiettivo di chi legge le Confessions e di chi le ha scritte). Se Rous­seau sosterrà a tempo débito di aver scoperto la masturbazione a diciannove anni, perché questa datazione corrisponde al suo progetto filosofico, egli lascia nelle pagine precedenti i segnali di una scoperta molto più precoce, a partire dall’effetto ottenuto su di lui dalle sculacciate di Mlle Lambercier per passare a quello del «tic-tac» di Mlle Goton. Questi aspetti della vita erotica di Jean-Jacques non riguardano direttamente il discorso che sto tentando di fare, ma meritano di essere richiamati perché ineriscono anch’essi al grande territorio della memoria e dell’oblio, dal momento che non è dato sapere fino a che punto i ricordi di questo tipo siano la registrazione di fatti accaduti o non piuttosto la ristrutturazione poetica e simbolica dei fatti stessi. È indubbio, per esempio, che il giovanissimo Jean-Jacques abbia conosciuto le due signorine Goton e Vulson, ma non è possibile accertare fino a qual punto Rousseau­ non abbia ‘arran- giato’ quei ricordi per costruire un universo simbolico provvisto di una architettura e di corrispondenze e analogie che sono impossibili da realizzarsi in una normale vita umana, per quanto eccezionale. Se si tiene conto di questo aspetto, si comprende anche meglio in che modo l’oblio non possa essere il risultato dei guasti del tempo e della decadenza della memoria, ma sia piuttosto un fattore funzionale alla costitu- zione originaria del ricordo. Jean-Jacques non ha ‘dimenticato’ davvero nulla, pro- babilmente ricorda ogni cosa benissimo in tutti i particolari ma usa alternativamente

(14) In realtà (sempre secondo il racconto forte- È solo in séguito che, rassicurato sullo stato della mente inattendibile delle Confessions) è stato du- sua salute, Jean-Jacques si dedica intensamente a rante il primo soggiorno in Italia tra il 1728 e il 1729 quel «dangereux supplément qui trompe la nature» che egli ha perso il suo «pucelage» benché non la e salva tanti giovani da altri disordini «aux dépends sua «virginité», senza però sua colpa in quanto la de leur santé, de leur vigueur et quelquefois de leur «premiére eruption» è stata «involontaire» e ha vie» (iii, pp. 108-109). suscitato in lui «des allarmes» sulla propria salute.

sf177.indb 477 19/12/15 01.04 478 Bartolo Anglani

la memoria e l’oblio per perfezionare la sua strategia narrativa e autocelebrativa. Da questa lucidità deriva il trattamento diverso che egli riserva ai ricordi pre- e a quelli post-caduta. Ma dall’eccesso di sicurezza con cui l’autobiografo utilizza tali strumenti deriva anche il groviglio delle contraddizioni che poi rendono difficile far funziona- re questi meccanismi senza lasciare residui, «spie» che rimandano ad un’altra storia possibile.

bartolo anglani

sf177.indb 478 19/12/15 01.04 mary jo muratore

Covert Conundrums: Chaos Unvoiced in Assia Djebar’s “Les Enfants du nouveau monde”

Abstract Its latent poetic bedrock and implicit celebration of triumph notwithstanding, Assia Djebar’s Les Enfants du nouveau monde appears to be in ludic embattlement with its very being. Signifiers are often separated from what they ostensibly signify, a subversive de-coupling of rhetoric and meaning that creates an ambivalent text, one decidedly at odds with the gauzy myths of triumph and re-birth suggested by the title. Shifting constantly between the horror of what was lost and the uncertainty of what lies ahead, the narrator struggles visibly in her attempt to communicate that which is not yet, and might never be. The structural disarray is too blatant to be accidental or unintentional, and leads the reader to infer that the cataclys- mic event depicted (the French-Algerian war) is one that language can but jaggedly bestride.

Its latent poetic bedrock and implicit celebration of triumph notwithstanding, Les Enfants du nouveau monde, as textual entity, endlessly deludes and, in a real sense, combats the reader. Refusing to drive the novel’s plot in any clear direction, the narrator moves a hodgepodge of characters back and forth in time without of- fering any indication as to how their conglomeration might serve to create a unity of purpose. Ciphers stand as ersatz sign-posts, misguided and misguiding, and seem conspicuously fashioned to invoke the contours of a fragmented and senseless uni- verse. Obliged to wander through the tangled jumble of adversarial personages, conflicting themes and disjointed ideas without the benefit of clear signals from the narrator, the reader struggles to find a unifying thread that might serve to weave the disparate components together. Connecting the episodic vignettes proves impossi- ble, however; the slipperiness of the novel’s self-reflective surfaces defy the reader’s efforts to force integration1. Indeed, the narrative appears to be in ludic embattle- ment with its very being. As is endemic to Euro-imitative post-modern novels, of which Les Enfants du nouveau monde is surely an example, linearity is eschewed and, as consequence, un- hinges the very precepts of conventional tale-telling2. But unlike other post-modern fictional accounts, Djebar’s novel appears to be in constant struggle against itself, constructing, then deconstructing, any over-arching meaning by separating signi- fiers from what they ostensibly signify. This subversive de-coupling of rhetoric and meaning, combined with the absence of closure, creates an ambivalent text that

(1) D. Hess, L’Histoire et la perception du temps: that of the Algerian writer Kateb Yacine. La non-linéarité chez Assia Djebar, «Présence (2) G. Bigelow in Revolution and Modernity: Francophone: Revue Internationale de Langue et Assia Djebar’s “Les Enfants du nouveau monde”, de Littérature», 54, 2000, pp. 65-80, theorizes that «Research in African Literatures», 34, 2 2003, Djebar’s elliptical style is a response to the tension p. 14, argues that the novel’s modernism is not and conflicts of her historical and cultural past, intended to be an imitation of European models while E. Accad in Assia Djebar’s Contribution to but is rather an attempt to translate new behav- Arab Women’s Literature: Rebellion, Maturity, ioral paradigms and social roles that citizens were Vision, «World Literature Today», 70, 4, 1996, obliged to adopt in the wake of the revolution. p. 806, compares her circular style of writing to

sf177.indb 479 19/12/15 01.04 480 Mary Jo Muratore

is decidedly at odds with the gauzy myths of triumph and re-birth suggested by the title. Whatever meaningful messages the text might be harboring are carefully hidden behind dense thickets of highly stylized prose that embellish but do not elucidate3. A number of factors contribute to the text’s overall opacity, one of which is surely the narrator’s reluctance to establish a clearly defined point of view, either towards the pivotal conflict at hand, or the myriad characters whose lives the war disrupts4. The war as spectacle is center-staged briefly in the opening chapter, but this pivotal event is in fact accorded, as though in passing, minimal allusion, and is cast less as a heroic confrontation between good and evil than a blind destructive force crushing the placid contentment and well-being of whomever it encounters. Though the fighting on the mountain draws the occasional attention of the town’s inhabitants, it is significant that the narrator chooses to “narrate” from the moun- tain only twice, by which point, the novel has all but played out. The reader is thus obliged to rely on the accounts of the characters in witness to make sense of the war, characters whose understanding is in turn limited and unreliable. As they struggle to make sense of what they see, many observers are unable to accurately distinguish triumph from tragedy. Evasive aerial dives are mistaken for crashes: «“Un second abattu!”, s’exclame-t-il, prenant le vol piqué d’un autre avion pour sa chute»5. The Algerians peering at the war from their windows or watching it play out as they sip coffee in the cafés are not alone in misunderstanding the war. The Europeans fail to grasp the depth of Algeria’s commitment to the cause, and attribute the current violence to a handful of agitators: «La guerre, nous la faisons contre une poignée d’agitateurs – commence Ferrand, comme d’ordinaire – nous aurons vite fait d’en finir!»6. Many anticipate a quick return to the status quo: «“La guerre, la mon- tagne”, un simple éclair de folie, à guérir comme toutes les folies»7. The narrator’s reluctance to communicate a clear position toward the war can be seen in the representation of the characters’ viewpoints as well8. The omniscience of the narrator extends not only to the Arab protagonists fighting for their country’s independence, but to the French soldiers who tyrannize and humiliate them, to the police who torture and kill suspected conspirators, and even to Algerian informers who denounce their compatriots9. This strategy dilutes the reader’s focus and cre-

(3) B. Cooper in Banished from Oedipus? Buchi (8) In a masterful review of Djebar’s career-long Emecheta’s and Assia Djebar’s Gendered Language interrogation of the tensions and hierarchies of Al- of Resistance, «Research in African Literatures», geria’s post-colonial condition, H.A. Murdoch of- 38, 2, 2007, p. 148, discusses at length some of the fers the following observation in Woman, Post-Co- linguistic dilemmas encountered by post-colonial loniality, Otherness: Djebar’s Discourses of Histoire writers, specifically Emecheta and Djebar, who and Algérianité, «L’Esprit créateur», 48, 4, 2008, wrestle with a number of identities and personali- p. 32: «If, in a point that was made at the begin- ties: «What both writers, nonetheless, share pro- ning of this essay, writers like Djebar ultimately foundly, in their novels, and this is the pith of my seek to reclaim the notion of the nation from a argument, is a focus on finding their voices and contested set of discourses predicated on power identities in the context of the multiple cultures and its implicit corollary of repression, then un- and languages». Another interesting article on covering renewable palimpsests of discursive rep- Djebar’s use of gendered language is by Z. Smail resentation helps to mediate identity into patterns Salhi, Between the Languages of Silence and the of remembrance and re-creation rather than na- Woman’s Word: Gender and Language in the Work tionalism’s finite and limited paths of forgetting». of Assia Djebar, «International Journal of the (9) See also J.-M. Clerc, La Guerre d’Algérie Sociology of Language», 190, 2008, pp. 79-101. dans l’œuvre cinématographique et littéraire d’Assia (4) See also, Bigelow, op. cit., p. 13. Djebar, «L’Esprit créateur», 41, 4, 2001, p. 91: (5) A. Djebar, Les Enfants du nouveau monde, «Aussi caractéristique est le souci qui s’amorce, Paris, Rene Julliard, 1962 («10/18»), p. 15. dans ce roman, de faire entendre toutes les voix, (6) Ibid., p. 256. même celles des “bourreaux”, avec une égale (7) Ibid., p. 146. préoccupation d’impartialité et d’authenticité».

sf177.indb 480 19/12/15 01.04 Covert Conundrums 481

ates ambivalence. The narrator’s habit of recording the thoughts of the Europeans, the presumed enemy, serves to humanize them, especially when their sentiments appear to align with those of their Algerian counterparts. Both sides in the conflict despise the war; both are paralyzed by omnipresent fear; both wax nostalgic for pre-war conditions. Certainly, the narrator offers numerous examples of French military arrogance and cruelty:

Le soldat, sa mitraillette en avant, lui frôle le ventre: «Redresse-toi! Debout!», et l’homme les yeux voilés de fatigue, dans un ultime effort répète: «Debout! Debout!». Ses jambes flagellent, ses genoux s’amollissent. «Debout! chien! Fils de chien!» gronde le soldat qui, de ce pays, a pris les insultes et la passion10.

Détail peut-être cocasse, mais qu’il n’oubliait pas: durant tout le trajet, Martinez, d’un air froid, vidait la cendre de sa pipe en la frappant à petits coups sur le crâne de Youssef11.

But it is noteworthy also that the Europeans are not wholly demonized. The French soldiers are portrayed not just as blood-thirsty aggressors, but as weary sub- ordinates forced to fight in a war they hate («“Sale guerre!” marmonne-t-il encore et il suit des yeux le dos de l’officier, un homme sec qui est venu, a interrogé, en passant, avant de partir»12). One of the most sympathetic characters in the novel is Bob, a young Frenchman about to begin his military service. His tender attachment to Touma, a liberated Arab woman, reveals a cultural open-mindedness that is cer- tainly a-typical in his culture. Moreover, his palpable grief in the wake of Touma’s death serves to make him more victim than victimizer: «Tandis que les cris stridents des voitures effilochent le silence, Bob, au milieu de la place désolée, se penche sur Touma, la soulève. Et le garçon, avant de pénétrer dans son café vide, l’aperçoit qui erre autour du kiosque: le corps de la jeune fille sur ses bras tendus de suppliant, il déambule aveuglément»13. Conversely, not all Arabs rally around the cause of the rebel fighters. Suzanne’s husband Omar flees to France, even though his beleaguered countrymen desper- ately need his legal expertise. While the reasons for his departure are never fully elucidated, there are a number of plausible explanations: fear, self-protection, dis- approval, cowardice, even arrogance. Rebel and former close friend Mahmoud be- lieves Omar’s departure can be traced back to his intellectual pride: «Omar ne représentait pas seulement le cas banal de l’intellectuel dépassé par la réalité; mais s’il ne sombrait pas dans l’embourgeoisement, il s’avançait sur un chemin plus dan- gereux: celui de l’orgueil solitaire qui se grandit lui-même et choisit pour cela le désert»14. The narrator’s occasional sympathy towards both French and Arab characters creates the impression of a text at war with itself. This sense of internal conflict is strengthened by the random, disconnected nature of the narration. The narrator seems unable to sustain a focus on any one subject, temporal moment, or geo- graphical setting for any length of time. More problematic still, there is little or no connection between vignettes. Each episodic enterprise that appears intended to engender meaning, simple or co-extensive, remains inconsequential. For example, Chérifa’s early and culturally uncharacteristic marital rebellion, the focus of atten- tion in chapter one, appears to be without meaningful follow-up or consequence.

(10) Djebar, op. cit., p. 20. (13) Ibid., p. 282. (11) Ibid., p. 193. (14) Ibid., p. 262. (12) Ibid., p. 21.

sf177.indb 481 19/12/15 01.04 482 Mary Jo Muratore

On the contrary, the courageous defiance she exemplified when she rejected her first husband seems to evaporate when she learns that her new husband, Youssef, is on a list of suspects about to be arrested. Her earlier boldness («Cet éclair en elle – et elle se découvrit tenace, non plus nonchalante, ni indifférente –, sans encore savoir ce qu’elle allait faire, elle se vit prête à obéir sur-le-champ, allégresse qui l’envahit, à cette nécessité du départ»15) has all but disappeared. How to reconcile the daring audacity of the unhappily married Chérifa with the anxiety she now manifests at the prospect of walking through the town unaccompanied by an escorting spouse16? Indeed, upon learning that Youssef is in danger, she remains rooted in fear, unable to take control of the situation, unable to access the rebellious courage so promi- nently on display during her first marriage: «Pour une épouse heureuse vivant au coeur d’une maison d’où elle ne sort pas, selon les traditions, comment prendre, pour la première fois, la décision d’agir?»17. In fact, in her second marriage, Chérifa appears to exemplify the traditional values of her culture. She is an extremely de- vout and conservative Muslim whose noble bearing and sense of inner peace is the envy of all: «…oui, même elles, saluaient en Chérifa sa noblesse, son charme fait de réserve lointaine»18. As Youssef’s wife, she betrays no trace of self-centered rebel- lion, reveals no resentment towards her subordinate status. Completely devoted to her husband, Chérifa appears content to be nothing other than her husband’s reflection:

Chérifa, dans la chambre voisine où du coin du rideau soulevé, elle surveillait le cortège qui partait, ne pouvait distinguer s’il éprouvait à cet instant une douleur trop vive. Elle le regretta, prête, comme elle l’était depuis le début de ce second marriage – «heureux», sou- pirait-elle – à guetter sur le visage de l’époux chaque sentiment qu’elle se mettait aussitôt, dans un mouvement de mimétisme spontané qui l’emplissait de joie diffuse, à ressentir sur- le-champ avec une égale intensité. «Son miroir, disait-elle, je ne suis plus que son miroir!»19.

Unlike some of the women in the community, Chérifa does not envy the free- doms enjoyed by her European counterparts. On the contrary, she takes pleasure in her role as traditional wife and devout Muslim. She finds great satisfaction taking care of her home where she can «s’asseoir des heures entières sur un matelas, à la turque, faire les moindres travaux accroupie, pieds nus, sur le carrelage»20. Chérifa’s early rebellion is but one example of a significant event that appears almost superfluous in that it is not exploited or developed as the text progresses. Though Lila, one of the two primary female protagonists, is distraught at the death

(15) Ibid., p. 35. Gaze: Speleology and Vivisection in Assia Djebar’s (16) The issue of the female gaze (both as sub- “L’Amour, la fantasia” in Arab Women’s Lives ject and object) is a frequent subject of critical Retold: Exploring Identity Through Writing, ed. commentary. Some articles related to this topic in- N.A. Hassan Golley, Syracuse, Syracuse Univer- clude M. Bacholle, Women in Their Apartment: sity Press, 2007, pp. 16-34; M. Mortimer, Reap- The Trespassing Gaze, «West Virginia University propriating the Gaze in Assia Djebar’s Fiction and Philological Papers», 48, 2001-2002, pp. 18-28; Film, «World Literature Today: A Literary Quar- M. Dobie, The Woman as Look and the Woman terly of the University of Oklahoma», 70, 4, 1996, as Voice: Assia Djebar and Leïla Sebbar, «Con- pp. 859-66; S.F. Teixidor, The Gaze Beneath the structions» 9, 1994, pp. 89-105; L.-C. Huughe, Veil: Portrait of Women in Algeria and Morocco, Déconstruction du regard panoptique orientaliste: in Francophone Women: Between Visibility and In- La Contribution narrative d’Assia Djebar et de visibility, eds. C.H. Mcfadden and S.F. Teixidor, Leïla Sebbar, «Études Francophones», 15, 2, 2000, New York, Peter Lang, 2010, pp. 47-76. pp. 89-99; L. H­ uughe, «Écrire comme un voile»: (17) Djebar, op. cit.,137. The Problematics of the Gaze in the Work of As- (18) Ibid., p. 26. sia Djeabar, «World Literature Today: A Literary (19) Ibid., p. 50. Quarterly of the University of Oklahoma», 70, 4, (20) Ibid., p. 26. 1996, pp. 867-876; K. Eileraas, Dismembering the

sf177.indb 482 19/12/15 01.04 Covert Conundrums 483

of both her mother and her young infant, neither of these tragedies serves to eluci- date her acute resentment in the wake of her husband’s decision to join the fight- ers on the mountain. Nor does her close relationship with her father, detailed at length in the novel, serve to deepen our understanding of her motives or demeanor. Likewise, Omar’s quarrel with Mahmoud, frequently referenced in the text, has no discernible consequence or aftermath. Other episodes prove equally tertiary. Youssef’s guilt for having arranged an unhappy marriage for his sister Zineb ap- pears to be nothing but random commentary: «Non, inutile de se mentir, pense Youssef, cela avait été plus grave; il le sait mais veut l’oublier, car il se croit respon- sable – responsable du malheur d’une jeune femme qui ne s’arrête de pleurer le jour de ses noces, et les mois qui suivent»21. In fact, Zineb eventally adapts to her unhappy situation: «…on pouvait dire que son ménage allait sans histoires, comme tant d’autres. On croit étouffer un jour; on se résigne ensuite, plus ou moins vite»22. Likewise, the battling Chicou brothers do not advance the plot in any way. They offer a comforting cadence to the passing hours, appearing as they do at key points in the narrative where they provide ribald entertainment and philosophical inspira- tion to their compatriots. But the ritualistic vulgarity of their quotidian squabbling/ reconciliation appears little more than a mise en abyme of the novel’s inability to communicate a unified message. Objects, as well as characters and events, prove to be equally misleading. Items with symbolic potential are saliently decontextualized, only to re-appear, and often, as but a misplaced redundant refrain, in alternative segments within which they have neither focus nor function. Re-emerging visual markers, like the kiosk, the bitter orange trees, and the palm tree on the square, tease the reader with an antici- pated consequentiality that fails to materialize. These recurring images provide an illusion of continuity and coherence that is at odds with the fractured nature of the narrative wherein they materialize. Perhaps the most significant evidence of a narrative at war with itself can be found in the various chapter titles. As configured, they belie the very notion of titu- lar ascription in that the content they would purportedly foretell is bypassed and overridden by numerous intrusions. Often, the highlighted characters only adopt, if that, a tertiary status that is almost unworthy of mention. Of the nine characters for whom each chapter is named, six occupy a marginal role in the chapters to which they lend their name. Had the narrator not placed the named characters in a position of prominence, it is unlikely the reader would have identified them as principal participants at all. The disjunction between the significance afforded to the characters by virtue of their titular designation and the reality of their marginal status establishes a conflict between what is rhetorically signified and what actually takes place. With rare exceptions, the chapter opens with characters other than the one named in the chapter title. More significantly, perhaps, the titular character often plays a minor role in the overall narrative (the case for Khaled, Hassiba, Bob) whereas characters vastly more significant (Bachir, Saidi, and Youssef, for example) have no chapter named for them at all. As indicated above, each chapter is named for a single individual, but with rare exceptions (chapters one and two specifically), the story of the titular character is embedded deep within, and in many cases, overshadowed by another character’s more compelling story. Even in the first two chapters where the focus is sustained primarily on the character named in the title, significant digressions serve to de-

(21) Ibid., p. 54. (22) Ibid., p. 55.

sf177.indb 483 19/12/15 01.04 484 Mary Jo Muratore

focus and at times even trivialize the targeted subject. Chérifa, the titular character of chapter one, is introduced only after a description of the secluded compound she shares with several other women, an account of the residents’ obsession with watching the fighters on the mountain, and an introspective peek at how both Al- gerians and the French view the war in which they are engaged. One might argue that this Balzacian strategy has a certain logic behind it, but no such logic justifies the decision to cut short Lila’s story (chapter two) at the very moment a visitor knocks at her door. The narrator’s abrupt decision to abandon Lila in mid-story is not the only time her story-line is interrupted. While Lila is the primary focus of the chapter dedicated to her, other significant events and characters intrude upon her account. La vieille Aicha’s funeral takes place during this chapter, a funeral where we meet the young medical student Bachir, a key figure in the narrative. The chapter also includes a segment depicting the relationship between Chérifa and her neighbor Amna, a friendship that will prove vital to Youssef’s survival. These digressions momentarily displace Lila from center-stage and dilute a focus that was supposedly hers alone. Chapter three is titled for Salima, an imprisoned school-teacher and rebel sym- pathizer. But she is accorded only secondary attention in the chapter she heads. Her story is bracketed between the more compelling story line involving Hakim’s growing suspicions about Chérifa’s husband, Youssef, and his wife Amna’s decision to lie to her husband to protect Chérifa. Chapter four’s ostensible focus is the des- picable Touma, the informer. While Touma does play a significant, though sinister, role during the course of the novel, in this particular chapter, she is hardly more than a footnote. Touma’s chapter begins with the narrator picking up the thread of the story line that was abruptly abandoned at the end of chapter two (Suzanne’s visit to Lila’s apartment). The narrator then moves the reader’s attention to Ché- rifa’s anxiety-filled trek through town to find her husband’s furniture shop. Touma, seated at an ice cream shop, catches sight of Chérifa as she passes by. It is only then that the narrator begins to focus on Touma who meets up with Bob and his friends. The chapter ends with Chérifa still frantically trying to reach her husband. Chapter five opens with Hakim’s story, the man for whom the chapter is named. But the narrator does not devote exclusive attention to him. This chapter also contains a detailed description of Ali’s and Lila’s relationship. The reader is also informed (via a lengthy account told by Ali to Lila) of Saidi’s earlier arrest after a three day tryst with a European woman. Saidi will later be arrested and tortured to death after Touma reports his activities to the police. As the chapters progress, the significance of the titular character becomes in- creasingly muted. Chapter six is named for Hassiba, a woman committed to helping the rebel fighters on the mountain. We encounter her as she steps off the train from the capital that makes a stop at the Palais d’Armes. As a symbol for the many heroic women who took up arms alongside their Algerian brothers, Hassiba exemplifies female heroism. Nevertheless, she is only a background figure in a chapter focused more intently on the respective pasts of Youssef and Lila. Hassiba’s story is fleshed out, albeit briefly, in chapter seven, a chapter named for Khaled, a character who plays an extremely minor role, both in the chapter and in the overall narrative. Khaled is a lawyer who was commissioned by Suzanne to provide legal assistance to the imprisoned Salima. In the chapter, he can be found visiting Suzanne when Lila happens to pay her a chance visit. Because of the lateness of the hour, Khaled accompanies Lila back to her apartment when they meet Bachir, an encounter that unleashes a tragic sequence of events for Bachir and Lila, but not for Khaled. Alerted by Lila’s landlord who has been suspicious of Lila since their first meet- ing, the police arrive, murder Bachir (suspected of arson) and arrest and imprison

sf177.indb 484 19/12/15 01.04 Covert Conundrums 485

Lila. In addition to the Lila/Bachir encounter, this chapter actually includes some of the most significant events of the novel: Chérifa’s arrival at her husband’s shop; Youssef’s decision to accompany Harissa as she leaves with a contingent to join the fighters on the mountain; Touma’s murder by her brother; Lila’s first halting steps on a journey of self-awareness and self-liberation. Khaled is external to all of these events. The eighth chapter is named for Bob, a character who plays no significant role in the novel at all. He is by every «Bob» definition an outsider: he is French, he is about to join the military, and he is in love with Touma, the woman all respect- able Algerians despise. He does witness her murder, but he is for all intents and purposes, an irrelevant bystander. The last chapter is named for Ali, Lila’s husband. References to him are strewn copiously throughout the narrative, but as a physical presence, he has an extremely minimal role. In the chapter that bears his name, he utters but a few words («Tu as eu peur?»), a question he twice repeats, and one that was posed initially by the rebel leader, Mahmoud. The misleading chapter titles find their parallel in self-annulling and/or con- tradictory images embedded in the text’s descriptive passages. Events are centered around the town’s square, la Place d’Armes, perhaps the text’s most unifying fea- ture. However, as a unifying trope, the square fails to achieve its intended goal. The geographical space where all unfolds (or, actually, does not) is a melting-pot of sorts, a locale of multi-cultural gathering, akin to Rick’s Café Américain in the film Casablanca. But the seeming resemblance is deceptive and short-lived. Whereas the film, like the novel, does accommodate a chaotic blend of multi-hued characters in a variety of circumstances, there is in the 1940’s script a purposeful assemblage of personages – all aspiring, all in quest. The heterogeneous blend of personali- ties ultimately head in a common direction of sorts. Not so in the work of Djebar where the grand hub of activity takes place on the same day, but with no coherent direction or purpose. Those who frequent the square have different allegiances, values, and concerns; once they leave, their limited sense of community evapo- rates. So what might have been a stead of coherence and signification appears as little more than a disappointing contrivance, as allusive as those who inhabit it. Arabs and Europeans occupy separate spheres with little or no contact. Opposing social entities eye each other warily; enemies seem to be everywhere and nowhere. Unemployed Algerians idly nurse a cup of coffee in the Arab cafés while affluent Europeans frequent their own bistros. The Algerian community itself lacks a sense of solidarity. The Chico brothers quarrel endlessly; Youssef chastises a waiter for insulting Touma; Youssef’s partner refuses to let Chérifa wait for Youssef in his shop; Touma informs on fellow Algerians; her brother kills her for dishonoring the family23. Though they frequent the same cafés, Algerians appear isolated from one another: «…ou qu’ils rêvent devant le seul café turc qu’ils peuvent se payer de la journée»24; «Ils les entendent [les convois], les oublient et ne songent plus qu’à leur sieste où ils vont pouvoir sombrer»25. United in their ideological quest for freedom from colonial oppression, they are bound together not because of a communal al- legiance to the land or their shared culture, but rather by bloodshed and death: «Le jeune Youssef découvrait ainsi qu’une patrie, ce n’est pas une terre commune, ni même seulement une misère partagée mais du sang versé ensemble et dans le

(23) Accad argues that Touma’s murder demon- own. Touma’s real crime then is not collaboration strates how the «old order» continues to dominate with the enemy, but rather moral turpitude (op. the ideology underpinning the revolution in that cit., p. 807). he must restore the family honor by killing his sis- (24) Djebar, op. cit., p. 139. ter before the rebels will accept him as one of their (25) Ibid., p. 196.

sf177.indb 485 19/12/15 01.04 486 Mary Jo Muratore

même jour, les mêmes chants interrompus»26. Characters come and go, sometimes to return again, each time rather insipidly, for the framework of the text forbids any but scattered and variegated «instantanées». Against the backdrop of a distant war, they appear bereft of significance, either individually or collectively. The novel’s interpretive dilemmas are conflated further by the ploys intrinsic to the perambulating structures that pervade and ultimately overtake the text: so that, the Frenchman, «Bob» is assigned a name at odds with the cultural heritage he would presumably represent, just as the over-arching title of the whole, Les Enfants du nouveau monde, conjures up a notion of rejuvenation, an arena of re- birth and joy, that the work fails to center-stage or even to actualize. At the level of structure, utter incoherence and structural disarray dislodge the very possibility of consecution or sense. Flashbacks of various historical periods, some recent, some further back in time, are interwoven with the present. The future, the new world celebrated in the title, is but a theoretical articulation. If the end of the novel is to be interpreted as a victory, it is one that is only barely distinguishable from defeat. From the bombed remnants of a village emerge an old woman and a child, neither of whom expresses fear, but, if truth be told, neither of whom expresses emotion of any kind. For these two survivors, nothing has really changed. In Djebar’s world of supposed re-birth, positive images must be manufactured and/or aesthetically constructed from the remnants of despair. Images of horror, the screams of the tortured, are transformed into melodious refrains: Quand l’homme ensuite se tait, une peur l’envahit; elle s’applique à attendre, attendre un nouveau cri, un nouveau signe de vie et d’horreur à la fois. «Le chant de mon pays», reprend-elle, tandis que l’homme reprend aussi, râles d’abord saccadés, brefs, puis qui se gonflent de nouveau en un seul cri ample, immense que Salima suit de toute sa volonté parce qu’il lui semble qu’au bout il ouvrira une porte vers l’azur27.

Beauty becomes synonymous with the vulgar excesses of the Chicou broth- ers, «poets» who know the beauty of mad intoxication: «“Mais non, proteste l’interlocuteur, ce sont nos poètes!” et peut-être en effet est-ce la seule beauté qu’il connaisse, celle de l’ivresse folle»28. For Bachir, too, beauty is negatively tinged: «“Que la beauté est cruelle”, cette phrase danse en lui; intuition, angoisse?»29. Thoughts of the future are expressed via ambiguous oxymorons: «…le foyer de la Révolution se trouvait vraiment là, dans cet enivrement presque triste»30. In this context, liberation itself takes on the antithetical imprecision of indecipherability. Even the presumably omniscient narrator is obliged to speculate: «Peut-être est-ce ce que se dit Chérifa; peut-être se prend-elle pour une personne familière de la pénombre…»31. What then is at stake here? In the fear-constrained social network represented in the text, how is the reader to confront the significance of shadowy clues that misdirect, if not confound outright? From the opening passages, images of impreci- sion abound. The indistinguishable houses surrounded by indistinguishable sounds and murmurs confound travelers caught in «un dédale de ruelles». Although the fighting on the distant mountain is a focal point for the townspeople, that spectacle too, is shrouded in mystery. Spectators are unable to decipher the meaning of the «arabesques éphémères que le hasard semble tracer, comme une écriture mystéri-

(26) Ibid., p. 194. (29) Ibid., p. 222. (27) Ibid., p. 182. (30) Ibid., p. 105. (28) Ibid., p. 141. (31) Ibid., pp. 137-138.

sf177.indb 486 19/12/15 01.04 Covert Conundrums 487

euse mais qui tue»32. Compounding this visual fog of war, the narrator moves from subject to subject, from past to present, from reality to recollection without transi- tion. In any universe so contrived, sequentiality is barred, development is blocked, closure is banned. The structural disarray is too blatant to be accidental or unintentional, and one is led to ponder the function of the chaotic, the theory of chaos, subjacent and operative, and how it proscribes integrality33. It has been theorized, and not without reason, that reading is an incremental process, each paragraph, page or chapter reshaping and, in a sense, transforming all that precedes it while, at the same time, anticipatorily preparing the stage for the segments to follow. Such theo- retical stance is awkwardly forefronted by Djebar’s third work, wherein each parcel of text, anchored in chaos, structured of chaos, dismantled by chaos fails to bring to bear the «incrementality» we seek and which, ostensibly, would lend sense to an otherwise senseless narrative. Neither poetics nor hermeneutics comes to the reader’s rescue, who remains adrift to and beyond the novel’s end. Even the decon- structionist framework fails to adduce a plurality of contradictions, which would, in their own way, provide some brand of cognitive dissonance. The vestigial matter of Les Enfants du nouveau monde, therefore, engages us to explore the quintessence of otherness, to construct possible signifieds for all the missing signifiers. The lack of closure leaves readers with more questions than conclusions about the characters they meet. Will Lila and Salima be tortured in prison? Does Bob quest revenge for Touma’s death? Do Mahmoud, Ali and Youssef survive? What becomes of Hassiba? In a sense abandoned by the narrator, readers are left with the straggling bits and pieces that punctuate the pages in a continuum of covert conundrums. The shadows angling along the walls of Djebar’s narrative never come fully into view; whatever truths the narrative is harboring emerge only as scattered remnants jettisoned by the vortex of cultural conflict, social upheaval and the violence of war. In the end, we are left with no indication of a clear victory for either side, just the textual documentation of a country, a culture and a novel at war with itself. One is then left to ponder, not the singular events or tales of the day re- counted, but the totality of that which is told and that which is untold (le non-dit, l’innommable, l’indicible). In point of fact, it is the very quintessence of the unsay- able that relentlessly hovers above the text and compels its condition of baleful wantingness, its allure of vacuity. To be sure, the war, peripherally referenced in the work, allusions de-centered and untold, resides at the center of an account that, amidst the ongoing turmoil and the uncertainty of triumph, defies telling. And thus we are confronted with the pre-emptive, the prefacial sketch of an event and a national destiny that cannot yet be spoken, that summons silence, via circumlocu- tion. The prosaic, accessory evocations can but harbinger, without concretization, the final destination, not yet textually reached. The novel is, in a sense, inversely anachronistic, in that it sets out to poeticize, before its time, an aftermath it knows not, couched in the yet unfulfilled hopes of a title and a dream of liberation. It is perhaps for this reason that from the very wellspring of the muddled, the faltering,

(32) Ibid., p. 14. vertical juxtaposition between voices to justify the (33) Alternatively, K. Lachman, The Allure of lack of synthesis in this work: «The relationship of Counterpoint: History and Reconciliation in the the part to the whole is thus complex and highly Writing of Edward Said and Assia Djebar, «Re- regulated. Each voice must be fully realized on its search in African Literatures», 41, 4, 2010, p. 164, own and able to stand independently. All voices uses Said’s theory of counterpoint, a musical term are considered of equal importance; no voice that places equal emphasis on the horizontal and dominates, except momentarily».

sf177.indb 487 19/12/15 01.04 488 Mary Jo Muratore

the indeterminate grasp for that which is not yet, and might never be, that which language can at best jaggedly bestride, we sense the quivering soul of a work whose vision, in all its intensity, can only grope toward actualization34. mary jo muratore

(34) Djebar’s disappointment with the war’s History, «World Literature Today: A Literary failure to improve the lives of women is well-doc- Quarterly of the University of Oklahoma», 70, umented. For a brief review of some of these is- 4, 1996, pp. 813-822; and C. Zimra, Not So Far sues, consult D. Amrane-Minne, Les Femmes algé- From Medina: Assia Djebar Charts Islam’s «insup- riennes dans la guerre, Paris, Plon, 1991; M. Cook, portable» feminist revolution, «World Literature Arab Women Arab Wars, «Cultural Critique», 29, Today: A Literary Quarterly of the University of 1994-1995, pp. 5-29; H. Gafaiti, The Blood of Oklahoma», 70, 4, 1996, pp. 823-834. Writing: Assia Djebar’s Unveiling of Women and

sf177.indb 488 19/12/15 01.04 dominique viart

Le scrupule esthétique: que devient la réflexivité dans les fictions contemporaines?

Abstract Reflexivity is one of the main features of modern literatures, as they are focused on formal experimentation. However, what do such meta-literary practices become when literature turns again to face external objects? Are these practices dismissed, transformed, shifted? Our analy- sis reveals that we can pinpoint some playful forms of reflexivity that have a relationship of merry nostalgia with the literary heritage, as well as more critical forms aiming for the deepest match between the object to be expressed and the chosen expression. Marked by both ethical concerns and a certain aesthetic disquietude, such works, which we will name “critical fic- tions”, question literary history and interrogate their own writing practice, thus guiding us from the “age of suspicion” to the age of scruple.

Le critique d’art américain Clement Greenberg a donné une célèbre définition des pratiques esthétiques de la Modernité comme celles où les arts se consacrent à «leur medium même»: «L’art pictural moderniste,» écrit-il «[…] attire davantage l’at- tention sur les qualités physiques, immédiates de la peinture»1. Ce faisant, Greenberg met en évidence un trait majeur des œuvres modernes: celui de la réflexivité. S’agis- sant de littérature narrative (ou poétique), c’est une littérature qui se contemple à son propre miroir, et n’a d’autre objet que sa propre pratique, ainsi que l’a bien montré Lucien Dällenbach dans son essai sur le Récit spéculaire2. À partir de Gide (mais aussi bien de Mallarmé et de Proust) et jusqu’au Nouveau Roman, le critique met l’accent sur la dominante métalittéraire des textes modernes, leur mise en abyme. Or, c’est, à l’inverse, en se donnant des objets extérieurs à elle-même que la littérature contem- poraine succède, au tournant des années 1975-84, aux dernières avant-gardes, qu’il s’agisse pour elle de traiter à nouveaux frais du sujet, du réel, de questions d’Histoire ou de société3. Ce faisant, les écrivains contemporains paraissent s’éloigner de cette littérature moderne que Roland Barthes appellait «intransitive»4, essentiellement pré- occupée d’elle-même et si radicale dans son geste d’autonomisation. Qu’en est-il de cette réflexivité dominante, dès lors que la littérature se consacre à des objets extérieurs? Peut-on considérer que les écrivains contemporains en re- viennent à un usage direct, non réflexif, de l’outil verbal, à une pratique «naïve» des formes littéraires? Pas vraiment. Il existe certes bien des œuvres immédiates, soucieuses surtout de mettre en musique les habituels ressorts du romanesque, en se contentant de les adapter aux modes culturelles et aux pratiques sociales actuelles. Mais elles ne sont pas particulièrement caractéristiques de notre temps: les mêmes prospéraient à l’époque du Nouveau Roman sans plus laisser de traces que n’en lais- seront celles qui encombrent aujourd’hui les étals des libraires. Si l’on s’attache en

(1) C. Greenberg, Art et Culture [Art and (4) «Pour l’écrivain, écrire est un verbe intransi- Culture, 1961], Éditions Macula, 1988, p. 77. tif», R. Barthes, Essais critiques, Seuil, 1964, p. 149. (2) L. Dällenbach, Le récit spéculaire, Seuil, 1977. Voir aussi: «Écrire, verbe intransitif?», 1970, repris (3) Voir D. Viart et B. Vercier, La Littérature dans œuvres complètes III, Seuil, 2002, p. 618. française au présent, Bordas [2005], 2008.

sf177.indb 489 19/12/15 01.04 490 Dominique Viart

revanche à des textes plus exigeants avec eux-mêmes, il est évident qu’ils n’ont pas abandonné toute réflexivité, bien au contraire: on ne se débarrasse pas du «soupçon» d’un revers de manche. Mais cette réflexivité se configure désormais selon d’autres voies et d’autres enjeux. C’est ce que je propose de mettre en évidence.

Réflexivités ludiques: revisiter l’héritage littéraire

Il me semble que l’on peut, en première approche, distinguer deux régimes de réflexivité en littérature contemporaine. Le premier serait un régime ludique: l’écri- vain travaille le texte en jouant avec les modèles littéraires ou culturels auxquels il feint d’adhérer pour mieux les détourner. Il jongle en virtuose avec les souvenirs d’un héritage littéraire plus ou moins proche ou lointain, ou encore avec les instances nar- ratives qui gouvernent cet héritage. Un bon exemple de cette pratique est offert par Jean Echenoz et les rappropriations amusées qu’il élabore successivement du roman policier (Cherokee), du roman d’aventure (L’Equipée malaise), du roman d’anticipa- tion (Nous trois), du roman réaliste (Un an)… ou encore, plus récemment, du roman historique (14). Le texte est alors l’objet de variations parodiques fondées sur une réflexivité implicite, qui multiplie les allusions intertextuelles à Dashiell Hammett ou à Manchette (Cherokee), à Conrad, à Stevenson… voire, dans 14, à Victor Hugo et à Henri Barbusse5. L’écrivain s’autorise aussi de micro-pastiches qui sont autant de clins d’œil à l’Histoire littéraire: ainsi ce passage des Grandes Blondes où le lecteur averti repère très vite l’allusion à La Modification de Butor (par le recours à la seconde personne du singulier) ou au film Playtime de Jacques Tati (dans le décor ici évoqué):

Vous êtes Paul Salvador et vous cherchez quelqu’un […]6.

Et le lendemain, vous êtes quelqu’un qui cherche Paul Salvador. Votre voiture vous trans- porte vers l’est de Paris, du côté de la porte Dorée, non loin du bois de Vincennes. Vous vous garez devant l’immeuble neuf qui abrite la société Stocastic Film: six étages de bureaux et de studios, soixante millions de chiffre d’affaires au coin de l’avenue du Général-Dodds et du boulevard Poniatowski. Vous entrez sans vous faire remarquer. Étanche comme un bunker, le hall est meublé de plantes vertes et de luminaires indirects, en son milieu se dresse une haute sculpture abstraite polychrome, totem planté de biais dans un paillasson de gravier. À droite un rang d’exceptionnelles réceptionnistes tout ongles, cils et seins, à gauche rien de particulier. Au fond, les ascenseurs. Oubliez les réceptionnistes, foncez vers l’ascenseur. Vous traversez le hall, nul ne vous demande rien. […] Attendez. Quoi qu’il advienne, on ne va pas vous remarquer7.

Le jeu avec l’héritage littéraire – et cinématographique – est patent. La réflexi- vité demeure toutefois implicite et purement intertextuelle, non sans jouer à confron- ter la littérature et le 7e art en croisant leurs références réciproques, comme le font également bien d’autres écrivains contemporains, tels que Tanguy Viel, Pierre Alferi, Jean-Philippe Toussaint, Yves Ravey, Patrick Deville ou Christine Montalbetti… Nombre d’entre eux – c’est notamment le cas de Christine Montalbetti, en

(5) Pour ce dernier roman voir: P. Schoentjes, 1995, p. 7. Le livre présente aussi de nombreuses «14 de Jean Echenoz. Un dernier compte à régler allusions à Hitchcock, notamment à ses actrices avec la Grande Guerre», Critique, n. 786, no- «grandes blondes» et à Vertigo. vembre 2012. (7) Ibid., p. 26. (6) J. Echenoz, Les Grandes Bondes, Minuit,

sf177.indb 490 19/12/15 01.04 Le scrupule esthétique 491

cela d’Echenoz – aiment aussi à multiplier les variations sur les instances narratives, en s’autorisant des intrusions incongrues dans la diégèse sous forme de métalepses. Le narrateur de Je m’en vais, autre roman d’Echenoz8, parodie de ce que les Gon- court auraient appelé le «roman artiste», s’exclame ainsi tout à coup «Je commence à en avoir assez de Baumgartner» et voici que la fiction, toute prête à obtempérer, met à mort le personnage ainsi nommé dans les pages qui suivent. Pour ces écrivains qui renouent avec le plaisir narratif, c’est une manière de montrer qu’ils ne sont pas dupes de leur art. La nécessité propre au récit et à la dié- gèse n’est pas telle qu’ils se vouent à une intégrale transparence narrative. Ils aiment au contraire à se montrer marionnettes en mains, animant depuis les coulisses de la création les rebondissements et les péripéties auxquels ils consentent. La question de la vraisemblance, si aiguë pour un romancier traditionnel, est le cadet de leur souci. La liberté qui les anime n’est pas sans rappeler celle de Diderot, qui interpelait son lecteur au seuil de Jacques le fataliste. C’est d’ailleurs cet exemple célèbre que Chris- tine Montalbetti a en tête, dans L’Origine de l’homme, lorsque l’écrivaine qu’elle est morigène son héros peu pressé: «à ce rythme c’est sûr, Jacques risque de rater sa diligence. Ohé, Jacques un peu d’énergie, je lui fais de grands signes qu’il ne voit pas, je m’égosille mais en vain […]», puis, le personnage ayant enfin hâté ses préparatifs, l’écrivaine se rassure: «L’histoire, ainsi, peut commencer, et en voici le narré, comme notre petit héros bien équipé trottine vers l’arrêt de la diligence […] bien décidé à accomplir son programme de héros»9. Que dire de cette forme implicite de réfléxivité? D’abord, on le remarquera, qu’elle ne tranche pas de manière si radicale avec les pratiques néo-romanesques: c’était bien en démarquant des formes littéraires avérées – celle du roman policier et de la tragédie antique (Œdipe) par exemple – qu’Alain Robbe-Grillet donnait dans Les Gommes ses premières lettres de noblesse au Nouveau Roman. Même chose avec le «roman colonial» dans La Jalousie. Echenoz fait-il autre chose avec Le Méridien de Greenwich et Cherokee, qui travestissent le roman policier à leur tour? Sans doute est-ce avec moins d’esprit de sérieux (encore que Robbe-Grillet ait été lui-même très enjoué), mais ce n’est pas radicalement différent. Il n’est du reste pas surprenant que l’on ait d’abord reçu les romans d’Echenoz comme les dignes successeurs du Nou- veau Roman. Et l’on dirait la même chose des variations plus radicales et loufoques que livre à son tour Eric Chevillard, moquant le roman exotique dans Oreille rouge ou le conte dans Le Vaillant Petit Tailleur10. Seconde remarque: tout décalés et ironiques qu’ils soient, ces romans célèbrent leurs modèles. Leur critique est moins tueuse qu’affectueuse. Alors que les Nouveaux Romanciers faisaient de Balzac leur tête de turc et n’avaient de cesse que de contester les formes traditionnelles du roman dans leur prétention au réalisme, les romanciers contemporains ne cachent pas leur goût du romanesque. Nous sommes des «crapules romanesques» s’écrit Pierre Michon dans Rimbaud le fils. Et Jean Echenoz célèbre Stevenson dans la préface qu’il écrit pour la réédition du Maître de Ballantrae aux éditions P.O.L. On pourrait à cet égard parler de «réflexivité nostalgique», dans la mesure où il s’agit plus de célébrer les grandes œuvres de la littérature passée que d’en discuter l’esthétique. Leur relation au cinéma est du reste de même nature: il suffit de lire Western de Christine Montalbetti pour goûter l’esthétique de la lenteur

(8) J. Echenoz, Je m’en vais, Minuit, 1999. mode très décalé). (9) C. Montalbetti, L’origine de l’homme, POL, (10) É. Chevillard, Oreille rouge, Minuit, 2005; 2002, pp. 26-28 (il s’agit en fait du paléontologue Le Vaillant Petit Tailleur, Minuit, 2004. Jacques Boucher de Perthes, mais traité sur un

sf177.indb 491 19/12/15 01.04 492 Dominique Viart

mise en image par Sergio Leone; de lire les romans de Tanguy Viel, et pas seulement Cinéma, pour voir combien ils se nourrissent de Mankiewicz ou de Scorsese.

Les fictions critiques

La réflexivité relève en revanche moins de la célébration oblique que de la dis- cussion esthétique dans une forme littéraire émergente que j’ai proposé d’appeler «fictions critiques». Ces fictions critiques se caractérisent en fait par un triple geste critique: envers l’objet externe du texte littéraire, qu’il s’agisse du sujet, du réel, de l’Histoire ou de quoi que ce soit d’autre; envers les formes littéraires historiquement attestées qui mettent en œuvre de tels objets; envers leur propre pratique d’écriture. Aussi s’agit-il de textes qui ne se satisfont pas de revisiter les modèles littéraires et de jouer avec, mais questionnent le geste littéraire de l’intérieur. À quoi s’ajoute assez fré- quemment une quatrième dimension critique, adressée, celle-là, aux disciplines natu- rellement dévolues à traiter scientifiquement de ces mêmes objets (la psychanalyse pour le sujet; la sociologie pour les questions du réel ou du social; l’histoire… etc). Deux exemples canoniques peuvent illustrer ce propos. J’emprunte le premier à l’œuvre de Serge Doubrovsky. On se souvient que son livre Fils11, auquel on doit la première définition de l’autofiction, rapporte les pensées qui assaillent un profes- seur en train de préparer son prochain cours dans une université américaine. Ses réflexions, qui tiennent plus du flux de conscience que de la pensée construite, dé- ploient une investigation du sujet par lui-même, proche de la parole libre déversée sur le divan d’un psychanalyste. Le texte est entraîné par une effervescence de jeux de mots, d’analogies verbales, de coq-à-l’âne et autres facéties de langage. Mais ce même livre fournit en outre une réflexion très critique sur la forme littéraire de l’auto- biographie, sur ses implications et ses empêchements, et lui substitue cette forme nouvelle – l’autofiction, donc – appelée à connaître un large succès, que le narrateur définit comme «fiction d’événements et de faits strictement réels». Critique de sa propre existence, harcelé par le traumatisme d’un sombre passé familial, le narrateur invente une forme en contestant la légitimité à ses propres yeux de celle que la tradi- tion a institué en fait d’écriture de soi. Le second exemple n’est pas moins connu: c’est celui d’Annie Ernaux. En 1983, La Place12 se consacre à la figure paternelle, dans un texte soutenu par une réflexion de nature sociologique. Dès le seuil de son livre, l’auteur récuse la pertinence des récits de vie romancés qui pourraient lui servir d’exemples:

Par la suite, j’ai commencé un roman dans lequel il était le personnage principal. Sensa- tion de dégoût au milieu du récit. Depuis peu, je sais que le roman est impossible. Pour rendre compte d’une vie soumise à la nécessité, je n’ai pas le droit de prendre d’abord le parti de l’art, ni de chercher à faire quelque chose de «passionnant» ou d’«émouvant». Je rassemblerai les paroles, les gestes, les goûts de mon père, les faits marquants de sa vie, tous les signes objectifs d’une existence que j’ai aussi partagée. Aucune poésie du souvenir, pas de dérision jubilante. L’écriture plate me vient naturellement, celle-là même que j’utilisais en écrivant autrefois à mes parents pour leur dire les nouvelles essentielles.

à ces modèles récusés, Annie Ernaux substitue une autre pratique, celle du «ré- cit de filiation», conçu comme un recueil que gouverne un scrupule majeur: le refus de toute esthétisation.

(11) S. Doubrovsky, Fils, Galilée, 1977. (12) A. Ernaux, La Place, Gallimard, 1983.

sf177.indb 492 19/12/15 01.04 Le scrupule esthétique 493

Ces deux exemples montrent l’intrication des strates critiques mention- nées plus haut. La première, qui concerne l’objet traité, entre en dialogue avec les sciences humaines: psychanalyse lacanienne pour Doubrovsky ou sociologie bourdieusienne pour une Annie Ernaux, très influencée par La Distinction, parue quatre ans auparavant13. La seconde strate concerne la littérature et ses formes, remises en question au sein même de ces livres, selon une démarche qui demeure marquée par la nouvelle critique. L’autobiographie chez l’un, le roman ou la bio- graphie romancée chez l’autre y sont considérées comme des formes inadéquates de représentation du sujet psychique ou social. Cette seconde strate s’articule en outre aux réflexions alors récemment développées par la critique littéraire: Pacte autobiographique selon Lejeune pour Doubrovsky dont le livre invente un objet impensable dans la typologie mise au point par le critique; Ère du soupçon selon Nathalie Sarraute pour Annie Ernaux. Une troisième strate critique se formule en même temps, non plus tournée vers la littérature comme réservoir de formes jadis explorées, désormais invalidées, mais critique de l’écriture en train de se faire. C’est en effet, dans les deux cas présentés ci- dessus, une critique qui cherche à définir sa propre pratique: «autofiction» pour l’un, «écriture plate» pour l’autre. Le phénomène est d’autant plus remarquable que les écrivains renoncent par ailleurs à produire des articles ou manifestes destinés à four- nir le paratexte de leurs œuvres, sauf à y être contraints, comme Serge Doubrovsky et Annie Ernaux, par la demande universitaire. Notons que si l’autofiction a pu sus- citer un grand nombre de discussions et débats théoriques parmi les chercheurs, les écrivains eux-mêmes ne s’y sont guère mêlés, sinon dans leurs œuvres mêmes. Ainsi de Marc Weitzmann, qui conteste dans son roman Chaos la recevabilité de l’auto- fiction, «montre littéraire clandestin»: plutôt que de construire une argumentation en bonne et due forme, c’est par le truchement d’une fiction qu’il mène sa critique, en poussant l’exercice à sa limite. L’écrivain délègue à son frère fictif la fonction de narrateur, et devient lui-même le personnage du roman, sauf que ce personnage, Juif comme lui et nommé de son propre nom, est présenté sous les traits d’un négation- niste cynique: «C’était cela, l’autofiction. Ou plus précisément, c’était cela, la part de fiction dans l’auto: une structure mensongère construite pour donner un sens au chaos. Une entreprise de survie basée sur la mystification, qui n’altérait pas seulement les faits, mais l’identité de celui qui les énonçait […] un jeu avec l’échec. Échange de place. Identités truquées»14.

La pensée littéraire des fictions critiques

Les discussions mises en œuvre par les fictions critiques s’adressent donc simul- tanément à des objets ou des disciplines extérieurs à la littérature (l’expérience du sujet, la famille, la question historique ou sociale…/la psychanalyse, l’histoire, la so- ciologie…) d’une part et, d’autre part, à la littérature elle-même en tant que réservoir formel (les formes attestées par l’histoire littéraire) et en tant que pratique (le geste d’écrire, l’écriture à l’œuvre, les choix poétiques opérés). Ce sont bien sûr ces deux derniers aspects qui relèvent de la réflexivité. Revenons d’abord sur la critique des formes littéraires avérées: elle tend à construire au sein même des œuvres, de manière implicite et souvent sauvage, une Histoire littéraire partielle ou fragmentaire. Les écrivains affichent dans leurs textes

(13) P. Bourdieu, La Distinction, Minuit, 1979. (14) M. Weitzmann, Chaos, Grasset, 1997. L’au- teur souligne.

sf177.indb 493 19/12/15 01.04 494 Dominique Viart

mêmes de quelle littérature ils héritent et comment ils envisagent leur rapports avec cet héritage. On trouve de ce phénomène quantité d’exemples. Les plus évidents se manifestent dans cette forme littéraire contemporaine qu’avec Alexandre Gefen nous avons appelée «Fiction biographique»15, notamment dans celles qui mettent en scène une figure d’artiste ou d’écrivain, lesquelles sont, à ce titre, bien évidemment les plus favorables à une problématisation des questions esthétiques qu’incarnent ces figures. Dans Rimbaud le fils, par exemple, Pierre Michon évoque ainsi, de manière très iconoclaste la fameuse «Lettre du voyant» du jeune poète, mythifiée par la théorie littéraire:

[…] la lettre dite du Voyant; c’est un avatar de la vieille justification idéaliste, volonta- riste, missionnaire, magicienne, du poète – l’épate, le rideau de fumée pro domo; ça porte les habits neufs de l’orphisme démocratique, car c’est fait pour plaire, à des poètes de Douai et d’ailleurs16.

Nul doute que ne se lise là la distance prise avec les théorisations modernes qui ont fait de cette lettre l’une de leurs références majeures. Du reste, ce même livre caricature les exégètes du poète en «Gilles» de pantomime, inspirés du Pierrot de Watteau:

Le Gilles est mieux informé que Banville; un siècle de travaux l’informent; il en sait bien plus long sur la vie de Rimbaud que Rimbaud n’en sut jamais, on l’a dit avec raison; il est plus moderne que Banville, avec plus de résolution moderne; enfariné, moderne […]. Gilles regarde passer dans le vide l’œuvre et la vie d’un autre. Il appelle cela Arthur Rimbaud. Il l’invente: c’est la féérie que lui-même n’est pas17.

Les termes d’«invention» et de «féérie» proclament que les textes consacrés à Rimbaud instituent une figure qui ne dit pas Rimbaud mais la fascination que le poète exerce sur ceux qui le lisent. La construction théorique élaborée à partir de cette «Lettre du Voyant» ne manifeste rien d’autre que la défaillance d’une pensée théorique qui s’éprouve insuffisante face à une œuvre qui lui échappe. Le texte de Michon peut alors dévoiler et dénoncer non sans ironie les conceptions de la Moder- nité issues d’une telle mythification:

Les Gilles ont vu le passant considérable; ils ont cru le voir passer; inventé qu’il passait; là où il est passé ils voient un grand sillon qui coupe en deux le champ de la poésie, rejetant d’un côté la vieillerie, pleine de belles œuvres certes, mais vieillerie, et de l’autre le fier arpent ravagé du moderne, où rien peut-être ne pousse, mais moderne18.

Michon réfléchit ainsi la modernité. Il en démasque le discours constitutif, pré- tendument théorique, comme une fiction fascinée. L’écrivain défait la «vulgate» sa- cralisée par la critique des années 60-70: «[…] soudain nous savons, comme si la brise le disait, que la mort de l’alexandrin n’a pas plus d’importance, ni de vérité, que la Vulgate populaire, cette histoire simplette de deux jeunes gens pleins de génie qui s’aiment et se tirent dessus. C’est une autre Vulgate, celle de l’alexandrin, guère moins

(15) Voir A. Gefen, Vies imaginaires: le récit bio- Bordas, 2008. graphique comme genre littéraire aux dix-neuvième (16) P. Michon, Rimbaud le fils, Gallimard, et vingtième siècles (Thèse inédite, Université Paris 1991, p. 66. IV, 2003), Vies imaginaires, Anthologie de la bio- (17) Ibid., pp. 56-57, je souligne. graphie littéraire, Gallimard, 2014; D. Viart & B. (18) Ibid., p. 58. Vercier, La Littérature française au présent [2005],

sf177.indb 494 19/12/15 01.04 Le scrupule esthétique 495

sotte que celle de la voyance, que nous avons concoctée sous nos calottes de soie, à l’usage de nos pairs. Une Vulgate absolument moderne»19. Les théories ne sont, écrit encore Michon dans Vie de Joseph Roulin, que de «pompeuses balivernes auxquelles pourtant obscurément […] nous croyons tous»20. L’écrivain manifeste ce même esprit critique en bien d’autres occasions sur lesquelles je ne reviens pas, sinon pour citer encore ce passage de Trois auteurs où Michon revisite les hiérarchies esthétiques ins- tituées en considérant qu’«à tout prendre, pour un auteur, il est moins fatiguant de poser à l’écrivain-qui-écrit qu’à l’écrivain-qui-n’écrit-pas. Ou, sans préjudice de la valeur littéraire respective des deux hommes les plus aimables de notre panthéon: la frime mallarméenne est plus épuisante que la frime balzacienne»21.

De tels exemples sont certes attendus parce qu’empruntés à des textes qui s’at- tachent à des figures d’écrivains. Mais on en trouve de semblables dans des entre- prises littéraires sans rapport avec la littérature comme objet ni avec les fictions bio- graphiques. Dans Impatience, François Bon mène au sein même de son texte une critique du genre romanesque comme «accumulation d’histoires mièvres et artifices de sujets ou noms posés avec effets de réalité»22. Plusieurs passages de cet ouvrage, écrits en italiques, viennent ainsi instruire le procès d’une forme qui ne lui paraît plus opératoire pour dire le monde:

Le roman ne suffit plus, ni la fiction, les histoires sont là dans la ville, qui traînent dans son air sali, suspendues aux lumières, ou très haut dans les rues vides, les rues mortes comme des quartiers sans enseignes. On préférerait un pur documentaire, on préférerait la succession muette des images, un carrefour et son feu rouge […]. On préférerait l’inventaire étage par étage des noms et des vies, avec les lieux traversés et les phrases que chacun prononce quant à ces lieux, qui sont la vérité pour lui de sa trace sur la terre et cela multiplié par l’infini des hommes pris dans les étages de la ville, cela qui ne constitue pas fiction ni roman mais l’inventaire exact de la ville devant nous23.

Ce passage est sous-tendu par une réflexion éminemment critique sur la forme romanesque et débouche sur la tentation de lui substituer quelque chose d’autre, dont l’inspiration perecquienne et son goût de l’«infra-ordinaire» se laisse entendre. Sans vouloir accumuler les exemples, je pourrais évoquer également l’évocation par ce même écrivain des Tragiques grecs, placée au cœur de son livre Parking24, ou, pour changer de référence, les pages que Pierre Bergounioux consacre à Flaubert dans L’Orphelin25, et encore celles où, dans L’Imitation du bonheur, Jean Rouaud dé- plore le tournant scientiste que la pratique de Zola inflige à l’écriture romanesque26. À chaque fois, il y va bien de l’élection d’une œuvre, d’un écrivain ou d’un événement majeur de l’Histoire littéraire choisis comme symptômes, contrepoints ou illustra- tions de cet envers quoi, avec quoi ou contre quoi le texte entend s’écrire. Attaché à traiter de l’objet qu’il s’est donné selon des voies indemnes de toute contestation, l’écrivain contemporain inscrit dans son texte les modèles auxquels il lui semble per- tinent de souscrire ou dont il préfère s’affranchir désormais.

(19) Ibid., p. 83. (23) Ibid., pp. 12-13. (20) P. Michon, Vie de Joseph Roulin, Verdier, (24) F. Bon, Parking, Minuit, 1996. 1988, p. 38, je souligne. (25) P. Bergounioux, L’Orphelin, Gallimard, (21) P. Michon, Trois auteurs, Verdier, 1997, 1992. pp. 28-29. (26) J. Rouaud, L’Imitation du bonheur, Galli- (22) F. Bon, Impatience, Minuit, 1998, p. 23. mard, 2006.

sf177.indb 495 19/12/15 01.04 496 Dominique Viart

L’inquiétude formelle

On vient de voir que la critique du roman par François Bon s’accompagnait, comme dans les exemples initiaux de Doubrovsky ou d’Annie Ernaux, d’une entre- prise de substitution d’une autre forme. C’est à cette entreprise que je veux mainte- nant m’intéresser en ce qu’elle suppose l’énoncé concomitant d’un projet et donc une réflexion non plus sur l’héritage littéraire mais sur l’écriture en train de se faire. Dans Impatience comme dans La Place ou dans Fils, ce projet est explicite: «Non plus de roman, jamais, mais cueillir à la croûte dure ces éclats qui débordent et résistent, non, plus d’histoire que ces bribes qu’eux-mêmes [les acteurs qui disent la ville] portent et comme avec douleur remuent sans s’en débarrasser jamais, plus de tableau qui unifie et assemble, mais dans le dispositif noir laisser résonner les linéaments d’images et de sons, le grossissement des visages abîmés et tout ce sur quoi on achoppe soi-même pour dire, plus de calme mais l’agitation, se porter soi-même à cette rencontre des éclats où on achoppe, et le mal qu’on se fait et le poison qu’on s’injecte et la dureté que c’est de continuer ici […]»27. «Dispositif noir»: c’est le nom, inspiré de l’espace scénique du théâtre, qu’avance François Bon comme substitut possible du roman. Mais l’on mesure en même temps dans son propos toute la précarité de ce projet, affichée par la réitération du verbe «achopper». Aussi est-ce l’écriture dans son incertitude même qui se donne ici à lire. Car la troisième strate de réflexivité, celle qui se porte sur l’écriture en train de se faire, est majoritairement celle d’une autocritique permanente: une remise en question du texte comme tel, un aveu de sa difficulté constitutive. Les exemples de tels aveux abondent dans la littérature contemporaine. On peut en mentionner briè- vement quelques-uns. Dans Je ne parle pas la langue de mon père (2003) de Leila Sebbar, la narratrice, qui essaie de restituer ce que son père ne lui a pas dit à propos de la guerre d’Algérie, se trouve acculée, malgré elle, à faire recours à des hypothèses, pour combler le manque. Au fil des chapitres, elle ne cesse de s’interroger sur le sta- tut des récits qu’elle livre: fictions, rêveries, récits reçus et rapportés… L’incertitude du texte devient ainsi peu à peu une thématique insistante, au point de se déployer en réflexion sur la nature littéraire et/ou documentaire de la restitution historique, comme travaillée en sourdine par cette impossibilité qu’énonce aussi Sarah Kofman dans Paroles suffoquées (1987): «Parler il le faut, sans pouvoir». Un autre exemple, que je choisis volontairement de nature très différente, est celui offert par Patrick Deville dans Pura Vida, Vie et mort de William Walker28. Au milieu de ce premier volet d’une série de romans partis en quête des destins d’aventuriers, d’ex- plorateurs, de savants dispersés à travers le monde29, l’écrivain note: «J’accumulais ainsi des notes pour une histoire du sandinisme ou même du Nicaragua. Ou de l’Amérique centrale dans son ensemble. Et éventuellement pour des récits qui rassembleraient un jour lointain certains couples historiques sur le modèle des Vies parallèles de Plutarque, la vie et la mort de Simon Bolivar et de Francisco Morazàn, de Narciso López et de Louis Schlessinger, d’Augusto César Sandino et de Tacho Somoza, d’Antonio de la Guardia et de Roque Dalton, du vrai Che Guevara et du faux, le Che punto − 50. Il ne m’échappait pourtant pas, à la présenter ainsi, qu’une entreprise d’aussi vaste enver- gure devait de loin excéder les modestes forces à ma disposition […]»30.

(27) F. Bon, Impatience, op. cit., p. 67. L’italique (29) Voir, du même auteur: Equatoria, Seuil, est choisi par l’écrivain. 2009; Kampuchéa, 2011; Peste & choléra, Seuil, (28) P. Deville, Pura Vida, Vie et mort de William 2012; Viva, Seuil, 2014. Walker, Seuil, 2004. (30) Pura Vida, Vie et mort de William Walker, p. 174.

sf177.indb 496 19/12/15 01.04 Le scrupule esthétique 497

Dans le récit qu’elle publie sous le titre Villa Chagrin, Marie Cosnay mêle des fragments de la vie du peintre Bram van Velde et de sa compagne Marthe Arnaud à quelques épisodes de l’existence amoureuse de la narratrice31. Le passé s’y conjugue au présent, les périodes et les questions se recoupent et se recouvrent, selon une mise en œuvre que l’auteur même avoue dans son texte ne pas complètement maîtriser: «J’avais accepté que coexistent des réalités diverses, deux au moins, et qu’il n’y ait pas de passage. J’inventais la folie mais je la tenais sur mes pieds, et présumais de mes forces»32. Cette difficulté devient à son tour objet de réflexion, dans un dialogue que le livre entretient avec celui que Beckett consacre aux frères van Velde, Bram et Geert, sous le titre Peintres de l’empêchement auquel Villa Chagrin emprunte son exergue: «Un dévoilement sans fin, voile derrière voile, plan sur plan de trans- parences imparfaites, un dévoilement vers l’indévoilable, le rien, la chose à nouveau […]»33. En écho au propos de Beckett sur Bram: «Je ne peux voir l’objet pour le représenter, parce que je suis ce que je suis», Marie Cosnay écrit: «l’objet disait, lui: je ne peux être représenté, car je ne suis pas ce que je suis ou je suis le contraire»34. Cet aveu de relative impuissance malgré lequel les livres s’élaborent cependant, se formule non par coquetterie mais comme fondement même de certaines écritures contemporaines: c’est ce que j’appellerais volontiers leur «point de non-appui». On retrouve le même aveu de précarité dans un autre livre de Marie Cosnay, André des ombres: «Il est des choses qu’on croit ne pouvoir jamais dire parce que d’une part rien n’en sera cru, pas un mot, enfin parce qu’elles sont anciennes comme le partage des sexes et qu’on ne sait, alors, comment il convient d’en parler»35. Mais il n’est pas propre à ce seul auteur: une semblable hésitation se formule dans L’Adversaire d’Em- manuel Carrère36, dans une lettre adressée au protagoniste du fait divers prétexte du livre, auquel l’auteur écrit: Cher Jean-Claude Romand,

Il y a maintenant trois mois que j’ai commencé à écrire. Mon problème n’est pas, comme je le pensais au début, l’information. Il est de trouver ma place face à votre histoire. En me mettant au travail, j’ai cru pouvoir repousser ce problème en cousant bout à bout tout ce que je savais et en m’efforçant de rester objectif. Mais l’objectivité, dans une telle affaire, est un leurre. Il me fallait un point de vue. Je suis allé voir votre ami Luc et lui ai demandé de me raconter comment lui et les siens ont vécu les jours suivant la découverte du drame. J’ai essayé d’écrire cela, en m’identifiant à lui avec d’autant moins de scrupules qu’il m’a dit ne pas vouloir apparaître dans mon livre sous son vrai nom, mais j’ai bientôt jugé impossible (techniquement et moralement, les deux vont de pair) de me tenir à ce point de vue. […] Difficulté qui est la vôtre évidemment bien plus que la mienne, et qui est l’enjeu du travail psychique et spirituel dans lequel vous êtes engagé: ce défaut d’accès à vous-même, ce blanc qui n’a cessé de grandir à la place de celui qui en vous doit dire «je». Ce n’est évidemment pas moi qui vais dire «je» pour votre compte, mais alors il me reste, à propos de vous, à dire «je» pour moi-même. À dire, en mon nom propre et sans me réfugier derrière un témoin plus ou moins imaginaire ou un patchwork d’informations se voulant objectives, ce qui dans votre histoire me parle et résonne dans la mienne. Or je ne peux pas. Les phrases se dérobent, le «je» sonne faux37.

Cette lettre n’est pas simplement un épisode, certes important, dans la relation qui s’installe “ou ne s’installe pas” entre Jean-Claude Romand, pseudo-médecin qui a

(31) M. Cosnay, Villa Chagrin, Verdier, 2006. (35) M. Cosnay, André des ombres, Éditions (32) Ibid, p. 11. Laurence Teper, 2008, p. 139. (33) S. Beckett, Peintres de l’empêchement, (36) E. Carrère, L’Adversaire, POL, 2000. Minuit, 1990. (37) Ibid., pp. 205-206. (34) M. Cosnay, op. cit., p. 61.

sf177.indb 497 19/12/15 01.04 498 Dominique Viart

trompé, dix-huit ans durant, tout son entourage avant de tuer ses parents, sa femme et ses enfants, et l’écrivain, elle est surtout un passage métalittéraire majeur, qui per- met de mesurer et de comprendre rétrospectivement l’hésitation narrative du livre, lequel n’offre pas moins de cinq incipit successifs, chacun abordé selon un point de vue et une structure pronominale différents. Un tel entrelas entre la question formelle et la relation de l’écrivain à son objet est particulièrement intéressant: il articule la difficulté «humaine» éprouvée par Car- rère au choix de la forme de son texte, la question éthique et la question esthétique. On retrouve de semblables hésitations dans son roman Limonov au sujet d’une fi- gure certes très différente. C’est dire que ces hésitations explicites sont désormais constitutives des œuvres mêmes. C’est dire encore, s’il en est besoin, que le travail de la forme a cessé d’être un en-soi, pour se lier au projet poursuivi, à l’objet dont l’écriture fait élection. La plupart des œuvres contemporaines interrogent ainsi leurs choix esthétiques et formels, et surtout leur pertinence par rapport à l’objet traité dans le cours même du texte. Aussi est-ce désormais la relation éthique de l’écri- vain avec l’objet de l’écriture qui gouverne la recherche et l’élaboration d’une forme adéquate. Pour le dire autrement: c’est la nécessité que l’on éprouve d’avoir à parler de quelque chose ou de quelqu’un qui décide de la forme finale – roman, récit ou autre – du livre. Et ces délibérations esthétiques, les modèles auxquels elles recourent ou qu’elles condamnent, les difficultés qu’elles traversent, les tergiversations dont elles font l’objet… s’inscrivent comme tels dans l’œuvre elle-même, sans pour autant y prendre la place de la thématique abordée, contrairement à ce qui se passait dans l’économie propre aux dernières avant-gardes.

Il importe, au moment de conclure, de souligner qu’aucun de ces espaces de réflexivité inscrits dans les livres-mêmes ne produit de théorie ni même de posture figée. Si Doubrovsky ou Ernaux s’en tiennent respectivement à l’autofiction ou à l’écriture plate (quoique, s’agissant d’Annie Ernaux, son livre Les Années s’affran- chisse de cette exigence de platitude), les écrivains qui leur succèdent ne conçoivent jamais les espaces de réflexivité que comme les moments d’une pratique de créa- tion en évolution constante. C’est ainsi que François Bon n’hésite pas à remettre en question son refus du roman pour écrire Daewoo38 ni à reprendre pour ce livre une forme littéraire initialement dénoncée, quitte pour cela à en modifier les définitions: «Pourquoi appeler roman un livre quand on voudrait qu’il émane de cette présence si étonnante parfois de toutes choses, là, devant un portail ouvert mais qu’on ne peut franchir, le silence approximatif des bords de ville un instant tenu à distance, et que la nudité crue de cet endroit précis du monde on voudrait qu’elle sauve ce que béton et ciment ici enclosent, pour vous qui n’êtes là qu’en passager, en témoin?»39 s’interroge-t-il au seuil du livre avant d’y revenir et de concéder: «On appelle roman un livre parce qu’on a marché un matin dans ce hall où tout, charpente, sol et lignes, était redevenu géométrie pure […] et le territoire arpenté, les visages et les voix, les produire est ce roman. Ils appellent le récit parce que le réel de lui-même n’en pro- duit pas les liens»40. Il faudrait bien sûr commenter plus avant cette redéfinition qui s’instaure sur la double contestation du réalisme et du romanesque comme mode de production du réel, mais ce n’est pas ici le lieu41. On notera aussi que, des avant-gardes à la contemporanéité, la réflexivité litté- raire a changé de régime. À la clôture théorique du texte et à l’esthétique de la rup-

(38) F. Bon, Daewoo, Fayard, 2004. (41) Voir D. Viart, François Bon, étude de (39) Ibid., p. 9. l’œuvre, Bordas, 2008. (40) Ibid., pp. 13-14.

sf177.indb 498 19/12/15 01.04 Le scrupule esthétique 499

ture s’oppose une double ouverture, sur le dehors, l’extériorité du texte, d’une part; et, d’autre part, une ouverture de l’œuvre en train de se faire sur l’histoire littéraire dans laquelle elle s’inscrit, fût-ce pour la contester. Mais surtout la réflexivité a changé d’enjeu: à une réflexivité ciblée sur la littératureen elle-même succède une réflexi- vité marquée par un souci d’efficacité et de justesse envers le dire et l’objet à dire: d’adéquation de la forme produite aux enjeux qu’elle se donne. Qu’en est-il alors de l’esthétique? Elle ne vise certes pas le beau comme expression du bien, ce qui était la doctrine néoplatonicienne du classicisme, elle ne prétend pas maîtriser la claire for- mule dans laquelle elle s’énonce comme le souhaitait Boileau. Bien au contraire: elle se donne comme approximations et insuffisances. Mais ce n’est pas là le sentiment romantique d’une émotion toujours en excès sur le langage, ni la quête d’un sublime idéalisé de l’expression poétique. Cette esthétique ne s’immerge pas non plus dans l’inconnu pour le seul plaisir de «trouver du nouveau», selon les préceptes d’une Modernité qui se voulait rimbal- dienne; elle n’explore pas pour eux-mêmes les possibles et les limites de la sphère verbale, mais tente d’ajuster sa forme au mieux afin de la hisser à la hauteur de ses exi- gences. C’est, de façon exemplaire, le propos des Vies minuscules de Pierre Michon42: tout un livre s’écrit pour dire la difficulté à écrire. Mais il ne s’agit plus, comme dans La Modification ou L’Emploi du temps, d’inventer un roman qui soit à lui-même sa propre écriture, préfigurant la célèbre formule de Ricardou qui substitue «l’aventure d’une écriture» à «l’écriture d’une aventure». Il s’agit de s’inventer soi-même comme écrivain en revisitant les exemples de désirs plus ou moins aboutis, plus ou moins échoués, qui ont scandé une enfance et lui ont fourni ses modèles. Comme la critique l’a amplement montré, il fallait que Michon retraverse à la fois sa propre expérience, celle de ses ascendants familiaux ou électifs et se déprenne des injonctions de la Mo- dernité avant-gardiste pour parvenir à écrire ce livre. En redevenant transitive, la littérature n’a pas renoncé à sa réflexivité: elle en a simplement déplacé le cours. À côté de l’esthétique ludique, que l’on dira peut-être «postmoderne», évoquée au début de ce propos, la réflexivité critique contempo- raine affiche désormais une sorte de déontologie formelle, une «morale de la forme» pour reprendre l’expression de Roland Barthes, proche de ce que, dans le champ de la poésie, Michel Deguy et Jean-Claude Pinson appellent une «poéthique». Ce qui pourrait aussi s’énoncer d’une formule: à l’ère du soupçon a succédé l’ère du scrupule.

dominique viart

(42) P. Michon, Vies minuscules, Gallimard, 1984.

sf177.indb 499 19/12/15 01.04 sf177.indb 500 19/12/15 01.04 olivier delsaux

testi inediti e documenti rari

Une nouvelle «nouvelle» apocryphe de la première traduction française du “Decameron”. L’imprimé Paris, Vérard, 1485 et la nouvelle d’Olivier Maillart (VIII, §6)

Abstract Edition of an apocryph short story inserted by the French publisher Antoine Vérard in his edition of Laurent de Premierfait’s translation of Boccaccio’s Decameron (Paris, 1485) and that is substitued to the authentic sixth novel of the eighth Day. This short story stages the popular theme of a woman deceived by a lover who gives her an object of value in order to sleep with her and who manages to get back his gift by accusing her of keeping it as a pledge.

Dans un article paru en 1999, G. Di Stefano mettait en perspective les diffé- rentes nouvelles de la première traduction française du Decameron (1414) qui, au cours de la transmission du texte aux xve et xvie siècles, se sont substituées à celles traduites au départ par Laurent de Premierfait1. De fait, pour la nouvelle X, §10 (Griselde), onze des quatorze manuscrits du texte français ont remplacé la traduc- tion de la version italienne de Boccace telle qu’elle apparaît dans le seul manuscrit original du texte français conservé (Vatican, BAV, pal. lat. 1989), par l’une ou l’autre des traductions françaises de la traduction latine de Pétrarque, éditées en 1933 par E. Golenistcheff2. De même, le manuscrit Paris, BnF, fr. 239 du premier Decameron français présente une traduction originale de la nouvelle VIII, §10, indépendante de celle de Laurent de Premierfait; G. Di Stefano édita cette nouvelle, inconnue de la critique, en appendice à son article de 1999. Enfin, le manuscrit Paris, BnF, fr. 240 et tous les imprimés de la première traduction du Decameron – qui, à quelques modi- fications micro-structurelles près, reproduisent l’édition princeps d’Antoine Vérard (Paris, 1485)3 – ont substitué une nouvelle apocryphe à la nouvelle VIII, §10 de Boc-

(1) «La première traduction française du Deca- (3) Sur la version imprimée par A. Vérard, meron: le ms. Paris, BN fr. 239 et la nouvelle de Ian- J. macfarlane, Antoine Vérard, libraire parisien, cofiore (VIII, §10)», Romania, 117 (1999), pp. 82- Londres, Bibliographical Society, 1900, n. 1; M.B. 106. Sur le Decameron de Laurent de Premierfait, Winn, Anthoine Vérard, Parisian Publisher (1485- voir, entre autres, P. Cucchi et N.J. Lacy, «La tra- 1512). Prologues, Poems and Presentations, Genève, dition manuscrite des Cent nouvelles de Laurent de Droz, 1997 (Travaux d’Humanisme et Renaissance, Premierfait», Le Moyen Âge, 80 (1974), pp. 483- 313), p. 48; M. Huchon, «Définition et description. 502; G. Di Stefano (éd.), L. de Premierfait, Deca- Le projet de l’Heptameron entre le Caméron et le meron, Montréal, Ceres, 1998 (Bibliothèque du mo- Decameron», dans M. Tetel (éd.), Les visages et les yen français, 3) [édition critique]; G. Di Stefano, voix de Marguerite de Navarre, Paris, Klincksieck, «Il Decameron da Boccaccio a Laurent de Premier- 1996, pp. 51-65; Ead., «Caméron et Décameron. De fait», Studi sul Boccaccio, 29 (2001), pp. 105-136. l’influence du Boccace travesti à la française», dans (2) E. Golenistcheff-Koutouzoff, L’Histoire S. Mazzoni Peruzzi (éd.), Boccaccio e le letterature de Griselidis en France au xive et xve siècle, Paris, romanze tra Medioevo e Rinascimento, Florence, Champion, 1933; cf. aussi G.S. Purkis, «Laurent Alinea, 2006, pp. 57-82; M. Messina, «Le due pri- de Premierfait’s Translation of the Decameron», me traduzioni in francese del Decameron», Revue Medium Aevum, 24 (1955), p. 11; Ph. de Mézières, romane, 12 (1977), pp. 39-54; L. Sozzi, «Per la Livre de la vertu du sacrement de mariage, éd. J.B. fortuna del Boccaccio in Francia. I testi introdut- Williamson, Washington D.C., 1993. tivi alle edizioni e traduzioni cinquecentesche»,

sf177.indb 501 19/12/15 01.04 502 Olivier Delsaux

cace traduite par Laurent. Celle-ci sera reprise par Nicolas de Troyes dans son Grand Parangon des Nouvelles nouvelles (1535-1536) et sera, à ce titre, éditée en 1869 par E. Mabille4; elle figurera également dans les Joyeuses narrations (Lyon, Benoist Rigaud et Jean Saugrain, 1557). Cependant, jusqu’ici, à part une brève mention d’H. Hauvette en 19035, aucune étude sur le Decameron français, y compris la mise au point de G. Di Stefano citée, n’a remarqué que les imprimés du texte ont substitué une autre nouvelle apocryphe à une nouvelle authentique du Boccace de Laurent de Premierfait. Il s’agit de la nouvelle VIII, §6 du Decameron6. Pourtant, cette substitution n’est pas anodine. Jusqu’à la publication de la nouvelle traduction d’Antoine Le Maçon (initiée en 1531 et parue en 1545 chez Etienne Roffet), les lecteurs du Decameron français, en particulier les rédacteurs de recueils de nouvelles qui s’en inspirèrent, n’eurent pas accès à la nou- velle VIII, §6 de Boccace7. Cette courte notice entend rendre ce texte accessible. L’«oubli» et le caractère inédit de cette nouvelle apocryphe sont d’autant plus étonnants qu’elle fut reprise par Nicolas de Troyes dans son Grand Parangon des Nou- velles nouvelles: La viixx viiC nouvelle de par maistre Guillaume de la Bouge. Est d’un gentil homme qui donna pour cinquante escus de velours a une barbiere pour faire son plaisir d’elle et come son serviteur trouva façon de le ravoir8. Cependant, elle a échappé aux deux éditions partielles de ce recueil9. E. Mabille signale dans l’introduction de son édition que cette nouvelle est «imitée» de la nouvelle VIII, §2 (p. xli); K. Kas- przyk l’identifie correctement avec la nouvelle VIII, §6 de l’impression Vérard du Decameron et la signale comme apocryphe (p. 360)10.

Studi sul Boccaccio, 6 (1971), pp. 11-80; L. Sozzi, son porc. Par quoy les ii compaignons font rempson- «Boccaccio in Francia nel Cinquecento», dans C. ner Calandrin, s’il ne veult que la chose soit dicte à sa Pellegrini (éd.), Il Boccaccio nella cultura francese, femme (éd. G. Di Stefano, p. 901). Florence, Olschki, 1971, pp. 211-356; P. Salwa, (7) La dernière édition du Decameron tradu- «L’art de vivre et la leçon de vie. Boccace et son it par Laurent de Premierfait est datée de 1541: adaptateur (Vérard, 1485)», dans Studi francesi, 73 chez Oudin Petit (Universal Short Title Catalo- (1981), pp. 73-82; Id., «La prima novella del Deca- gue, n. 38527), chez Ambroise Girault (USTC, meron nell’edizione di Antoine Vérard del 1485», n. 86931), pour Pierre Sergent (USTC, n. 40090) et La nouvelle française à la Renaissance, éd. L. Soz- pour François Regnault (USTC, n. 88663). zi, Genève, Slatkine, 1981 (Bibliothèque Franco (8) Paris, BnF, fr. 1510, ff. cccxxv v° - Simone, 2), pp. 121-128; O. Delsaux, «La forme cccxxvii v° (La viixx viiiC nouvelle de par mai- imprimée du Decameron de Boccace traduit par stre Guillaume de la Bouge). À notre connaissance, Laurent de Premierfait (Paris, A. Vérard, 1485)», elle n’apparaît pas dans d’autres recueils (Cent dans Le roman dans les premiers imprimés, éd. A. Nouvelles nouvelles, Joyeuses narrations, Joyeuses Schoysman, à paraître. adventures, Heptameron, Facécies du Pogge, Paran- (4) Paris, A. Franck, 1869 (Bibliothèque elzévi- gon des Nouvelles honnestes et delectables, Cent rienne) [édition partielle], nouvelle §36 (D’une fille nouvelles de Philippe de Vigneulles). Il n’est pas qui ne vouloit point avoir de mary qui eust genitoi- impossible que cette nouvelle ait inspiré Charles res), pp. 148-160. Sur cette substitution, H. Hau- Bourdigné (Legende de maistre Pierre Fai- vette, De Laurentio de Primofato, Paris, Hachette, feu, Angers, 1532, §31 Comment de rechef fut amou- 1903, p. 92; L. Loviot, «Les joyeuses narrations reux de quelque dame, a qui, pour ce faire, donna 1557 et 1596», Revue des livres anciens, 1 (1913), trois aulnes de escarlatte, éd. F. Valette, Genève, pp. 303-304. Droz, 1972 (Textes littéraires français, 184), p. 88). (5) H. Hauvette, De Laurentio de Primofato, Pa- (9) Éd. E. Mabille, Paris, A. Franck, 1869 (Bi- ris, Hachette, 1903, p. 96. bliothèque elzévirienne); éd. Kr. Kasprzyk, Paris, (6) Voici le résumé proposé par le tra- Didier, 1970 (STFM), p. 27; cf. aussi Id., Nicolas de ducteur français: Deux Florentins peintres nommez Troyes et le genre narratif en France au xvie siècle, Brunet et Fufalmace emblerent ung beau porc d’un Varsovie-Paris, 1963, pp. 331-332. aultre peinctre, appellé Calandrin, qui par eulx fut (10) Dans son édition des Cent nouvelles de Phi- enhorté et induict a faire experimant pour retrouver lippe de Vigneulles, Ch. Livingston mentionne éga- le porc, et le experimant fut fait par noix de galles et lement que la nouvelle VIII, §6 des imprimés de la de zinzembre verd et de garnache. A Calandrin fu- traduction française du Decameron est apocryphe rent donnees deux crotes d’un chien en forme de ii (Genève, Droz, 1972 [Travaux d’Humanisme et Re- noix de galles confectes en aloé; et car Calandrin ne naissance, 120], pp. 24 et 219). les pot mascher ne avaler, il sambla que il mesme eust

sf177.indb 502 19/12/15 01.04 Une nouvelle «nouvelle» apocryphe de la première traduction française du “Decameron” 503

Dans le cadre énonciatif, Vérard11 laisse transparaître qu’il s’agit d’un ajout qui n’offre qu’une variation sur les nouvelles du début de la Journée (j’ay estudié et aprins une nouvelle consonante aux premieres imposees sur ceste journee, col. clxxix c-d); la moralisation, ajoutée dans l’imprimé Vérard à la fin de toutes les nouvelles, dé- nonce d’ailleurs les mêmes vices d’avarice et de convoitise dénoncés dans la nouvelle VIII, §1 et, plus particulièrement, dans la nouvelle viii, §212. De fait, cette nouvelle reprend un thème populaire13, que l’on trouve dans les nouvelles viii, §1 et viii, §2, celui de la dame trompée par un amant qui lui offre un objet de valeur afin de pou- voir coucher avec elle et qui parvient à reprendre possession de ce bien en l’accusant, auprès de son mari, d’avoir gardé ce bien en gage; dans la nouvelle apocryphe, il s’agit de quatre a cincq aunes de draps de veloux (dans la viii, §2, il s’agissait d’un mantel de drap bleu). La transposition du motif à la femme d’un barbier pourrait être une manière d’illustrer les locutions (de)mener le rasoir ‘plumer, tromper’ ou faire la barbe à qqn ‘tenir tête, narguer’14, sans que l’on ne puisse exclure un jeu sur barbe ‘pubis’ (cf. faire sa barbe sus elle dans le texte, l. 45)15 – la nouvelle VIII, §2 convoquant aussi ce type d’images grivoises, en particulier celle du mortier et du moulin a moudre. Il n’est peut-être pas non plus innocent que la tromperie mise en scène concerne des draps; la première édition datable de Pathelin est imprimée la même année que le Decameron de Vérard (Lyon, Guillaume Le Roy, 1485). La rédaction de cette nouvelle s’inscrirait dans une certaine tendance de Vérard, observable ailleurs dans son impression du Decameron français, à modifier le texte pour davantage l’inscrire dans la tradition des textes comiques, farcesques et facétieux, et qui justifie d’ailleurs sans doute son choix d’imprimer, un an après les Cent nouvelles boccaciennes, les Cent Nouvelles nouvelles bourguignonnes (24 décembre 1486)16; le résumé donné dans la table des matières va également dans ce sens.

L’on notera aussi que Vérard italianise la nouvelle en la plaçant à Florence et en mettant un scène un gentil homme habitant près du baptistère de San Giovanni. Cependant, le personnage du mari infidèle et au départ berné par la barbière n’a quant à lui rien d’italien puisqu’il est nommé Olivier Maillart. Or, coïncidence ou discrète plaisanterie de Vérard: Olivier Maillard était l’un des grands auteurs de ser- mons et de textes spirituels de l’époque, dont la vie fut un combat acharné contre les mauvaises mœurs et dont les sermons ont été très tôt imprimés, notamment par Vérard (en 1499)17.

(11) Le principe de parcimonie et les exemples (Vérard, 1485)», dans Studi francesi, 73 (1981), avérés de remaniements textuels et d’ajouts péri- pp. 73-82. textuels attribuables à Vérard nous conduisent à (13) S. Thompson, Motif-Index of Folk-Literature, penser que cette substitution est apparue lors de Bloomington, Indiana UP, 1955-1958, n. K1581.3. la composition du texte pour l’imprimé Vérard (14) G. Di Stefano, Dictionnaire des locutions de 1485. Aucun élément linguistique n’indique un en moyen français, Montréal, Ceres, 1991, s.v. «ra- substrat plus ancien. La langue du texte n’infirme soir». pas cette hypothèse. Sur les pratiques éditoriales (15) R.M. Bidler, Dictionnaire érotique. Ancien de Vérard, voir, entre autres, M.B. Winn, Anthoine français, moyen français, Renaissance, Montréal, Ce- Vérard. Parisian Publisher (1485-1512)…, pp. 16- res, 2002, s.v. «barbe». 18; Le moyen français, 69 (2011), Antoine Vérard, (16) Sur cette question, voir les articles cités dans en part la bibliographie de M. Ricci, pp. 161-171; la note 3. M. Okubo, «Antoine Vérard et la transmission (17) A. de La Borderie, Œuvres françaises d’O- des textes à la fin du Moyen Âge», Romania, 125 livier Maillard, sermons et poésies, Nantes, Société (2207), pp. 434-480. des bibliophiles bretons, 1877; O. Maillard, Istoire (12) F. clxviii r° et clxx v°. Sur les mora- de la Passion douloureuse, éd. T. Steiner, Bern, Pe- lisations ajoutées par Vérard, P. Salwa, «L’art de ter Lang, 2011. vivre et la leçon de vie. Boccace et son adaptateur

sf177.indb 503 19/12/15 01.04 504 Olivier Delsaux

Restent à comprendre les raisons de cette substitution. La nouvelle remplacée est la deuxième des quatre nouvelles du Decameron consacrées au peintre Calandrin (VIII, §3; VIII, §6; IX, §3; IX, §5). À première vue, la substitution pourrait s’expli- quer par un souci stylistique de variété ou un souci philologique d’authenticité face à une nouvelle qui reprend des personnages déjà mis en scène trois nouvelles aupa- ravant et qui, vu qu’il s’agit du seul cas de redondance dans le Decameron, a pu être perçu, à ce stade de la reproduction du texte (avant la lecture/copie des nouvelles IX, §3 et IX, §518), comme une interpolation, à corriger. Le responsable de la substitution a également pu considérer que la nouvelle ne répondait pas au thème de la Journée, consacrée aux femmes trompées par des hommes (d’où l’insistance de l’énonciateur- narrateur sur cette question chez Vérard). En effet, la nouvelle se limite à mettre en scène un Calandrin berné par Bruno et Buffalmacco; sa femme n’a qu’un rôle secon- daire dans le récit. Dans l’hypothèse d’une substitution volontaire, l’on confirmerait alors la fonction de «machine à raconter» que fut le Decameron italien et français: des acteurs de la transmission du texte auraient modifié et remplacé certaines nouvelles (dans ce cas-ci en s’appuyant sur les nouvelles VIII, §1 et VIII, §2)19. Cependant, plus probablement, il pourrait s’agir d’une intervention destinée à remédier à un accident dans la transmission du texte: une lacune matérielle20 – argument avancé par G. Di Stefano pour rendre compte de la substitution des nouvelles de Griselde et VIII, §10.

olivier delsaux

(18) L’on notera que la précision En deux nouvel- Colloque de Metz, juin 1996, éd. V. Engel et M. les, scestassavoir en la lxxiiie et lxxvie, compte- Guissard, Ottignies, Quorum, 1997, pp. 28-39. es sur la viiie journee precedant, fut assez cleremant (20) La lacune pourrait avoir une origine hu- monstré quel homme estoit Calandrin et aussi les maine. Un lecteur aurait été à ce point choqué ou aultres, desquelz je parlerai en ceste presente nouvel- intéressé par cette nouvelle particulièrement terre à le au début de la nouvelle IX, §3 (éd. cit., p. 1023) terre où l’on vole un porc et où l’on fait manger des est, logiquement, modifiée chez Vérard: Vous crottes à Calandrin, qu’il aurait arraché les folios debvez savoir quelz hommes ont estez autreffois Bru- contenant cette nouvelle. Cependant, sur la base net et Fusalmace paintres florentins demourans oudit de tels critères, d’autres nouvelles auraient pu être lieu de Florence. Et, pource, je vueil de rechief reciter supprimées. Du reste, aucun des manuscrits conser- une finesse qu’ilz firent a Caladrin [sic] (f. ccxii c). vés du Decameron français ne présente de lacune à (19) L. Rossi, «Entre fabliau et facétie: la nou- cet endroit (C. Bozzolo, Manuscrits des traductions velle en France au xve siècle», dans La nouvelle de françaises d’œuvres de Boccace (xve siècle), Padoue, langue française aux frontières des autres genres, du Antenore, 1973 (Medioevo e Umanesimo, 15)). Moyen Âge à nos jours, volume premier, Actes du

sf177.indb 504 19/12/15 01.04 Une nouvelle «nouvelle» apocryphe de la première traduction française du “Decameron” 505

¶ Cy ensuit la somme de la lxxvi nouvelle comptee par Philomene sur la viii journee, dont Laurette est royne [viii, §6]21

Puis que nous avons encommencé de parler sur ceste viii journee d’aucunes decepvances que font les hommes aux femmes, ainsi qu’il a pleu a dame Laurette de nous imposer ceste matiere ou quelque autre, j’ay estudié et aprins une nouvelle consonante aux premieres imposees sur 4 ceste journee. Par quoy, s’il vous plaist tous de moy escouter, je la vous compteray en la maniere qui s’ensuit. ¶ La forme22 de la nouvelle Nagueres, en nostre cité de Florence, demouroit ung gentil homme nommé Olivier Maillart, 8 lequel estoit homme de grant et noble lignaige, demourant auprez de l’eglise sainct Jehan. Advint que cestui noble homme alla sus ung barbier pour faire sa barbe, ainsi comme gens sont acoustumé de faire aux festes, pour estre plus honneste et plaisant aux gens de bien avecques qui il conversoit. Or, advint que cestui barbier avoit une moult belle femme espousee, laquelle 12 faisoit la barbe a cestui gentil homme, qui avoit les mains si doulces et si souples pour le mes- tier, pour bien paigner et pour moullier que merveilles; ceste femme icy estoit aussi duyte a faire la barbe que le meilleur barbier de Florence. Lors, voiant cestui gentil homme que ceste femme estoit si propre et lui faisoit sa barbe si doulcement, commença a estre enbrasé du feu 16 d’amours envers elle, tant que nuit ne jour il ne dormoit. Si pensa comme il pourroit parvenir a son amour. Et, de fait, depuis la premiere fois qu’elle lui eut fait sa barbe, cestui chevalier ne se passoit point ung jour sans aller veoir ceste barbiere en lui monstrant plusieurs signes d’amours, ainsi comme font jeunes gens qui sont amoureux d’aucunes jeunes femmes. Cestui 20 Olivier de plus en plus fut embrasé d’amours envers ceste femme, car tant alloit en avant et plus l’amour croissoit, a l’occasion de ce qu’il venoit chascun jour la veoir en sa maison. Par quoy, il ne se peut plus tenir de lui dire la douleur qu’il souffroit pour elle. Et, ainsi comme il estoit venu une fois entre les autres, la trouva seule, pour ce que son mary 24 estoit allé sur les champs pour soy esbatre a prendre des oyseaulx, ainsi comme ont de cous- tume les barbiers, qui, aux simples jours, n’ont gueres a besongner et, pour, ce mettent leur estudie a aller prendre leur deduyt aux champs. Lors, quant cestui Olivier se sentit tout seul avec elle, luy commença a dire la douleur de sa maladie, en lui disant: «Dame, s’il vous plaisoit 28 a moy escouter, je seroie grandement tenu envers vous». Adonc respondit la dame qu’elle l’escouteroit voulentiers en bien et honneur. Puis lui dist Olivier: «Certes, dame, il faut que mon cueur se desclaire a vous, car il ne peut plus porter la douleur ne la misere de sa maladie. Pour laquelle chose, je vous prie, tant comme je 32 puis, qu’il vous plaise vous consentir et m’accorder la chose que je vous vueil demander, c’est assavoir que se je n’ay aucun plaisir d’amour avec vous, je cuide brief que je mourray, car je endure pour vous plus que jamais homme crestien n’endura pour personne. Donc, je vous prie

(21) La lxxvi est d’un gentil homme qui donna et l’accent aigu, accentué les e toniques finaux et pour cinquante escuz de veloux à une barbiere pour ajouté une ponctuation moderne en suivant, autant faire son plaisir (table des matières, A). Le texte de que faire se peut, la logique syntaxique et expressi- l’imprimé Paris, A. Vérard, 1485 (exemplaire Paris, ve du système de signes de l’imprimé (qui se limi- BnF, Rés. Y2 402, ff. clxxix, v° - clxxxi v°) tent à des virgula suivies ou non d’une majuscule a été collationné avec les imprimés de 1500 (Paris, pour distinguer les unités syntaxiques majeures du Antoine Vérard [exemplaire Paris, BnF, Rés. Y2 texte); la séquenciation suit celle de l’imprimé; les 205, ff. cxx r°-v°] [B] [aucune variante textuelle lettrines sont rendues par une mise en gras. Nous dans les exemplaires sur vélin Chantilly, XVIII C 13 n’avons retenu que les variantes qui offraient une et Paris, BnF, Vélins 639) et 1521 (Paris, veuve Mi- alternative sémantiquement acceptable. chel Le Noir [exemplaire Londres, BL, C.47.f.24, (22) Des nouvelles I, §6 à I, §8, la nouvelle pro- ff. lxxxxviii v°- lxxxxix verso] [C]) et prement dite commence sans titre; puis de I, §9 à avec sa transcription par Nicolas de Troyes dans le II, §1, Vérard introduit le titre Cy s’ensuit la nou- Grand Parangon des nouvelles nouvelles (Paris, BnF, velle; puis supprime à nouveau le titre de II, §2 à fr. 1510, ff. cccxxv v° - cccxxvii v° [D] [il II, §8, pour à partir du II, §9 adopter le titre qui semble suivre l’édition de 1521 ou une édition po- sera régulièrement utilisé ensuite (La forme de la stérieure]). Nous avons distingué i de j, u de v, réso- nouvelle). lu les abréviations, introduit l’apostrophe, la cédille

sf177.indb 505 19/12/15 01.04 506 Olivier Delsaux

que vous me vueillez donner vostre amour et je me soubmectz a vostre voulenté pour faire ce 36 qu’il vous plaira de moy commander, en vous gardant vostre honneur et vostre renommee». La femme ouyant ces parolles fut fort troublee et esbahye, car elle avoit esté nouvellement mariee et ne savoit encores que c’estoit que d’amour. Par quoy, elle se excusa honnestement envers lui et lui dist: 40 «Olivier, je vous ayme autant que personne du monde a vous faire plaisir et service en toutes choses licites et honnestes, mais en celle chose que vous me demandez je ne m’y congnois point ne aussi jamais ne m’y consentiroie, car j’ay mon mary aussi honneste que vous, qui ne seroit point content se je me abandonnoie a telle chose faire». 44 Lors Olivier fut dolent et mary en cueur de la response de ceste femme et, sans plus mot dire, se partit et s’en alla par desplaisance, bien tost aprés, a plus de cinquante lieues de Florence, pour passer son dueil et sa merencolye; et y fut l’espasse de deux ou de trois ans. Et au bout de trois ans s’en revint a Florence. Et, pour ce qu’il y avoit long temps qu’il n’avoit veu sa femme ne ses 48 enfans ne ses parens et amys, avoit achetté environ de quatre a cincq aunes de drap de veloux pour faire une robe a sa femme pour sa bien venue, affin qu’il fust mieulx receu et qu’elle lui fist bonne chiere. Et, en passant parmy la ville de Florence, luy souvint encores de ceste belle barbiere. Et s’en 52 vint son veloux soubz son esselle pour faire sa barbe sus elle, laquelle il trouva seule. Et, quant il la vit, il fut encores plus ravy d’amours qu’il n’avoit oncques en sa vie esté, pour sa beaulté. Si la salua et baisa moult doulcement. Puis lui dist qu’il vouloit qu’elle lui fist sa barbe; laquelle incontinent print ung rasouer et la lui fist. Et, en la faisant, lui compta comme par elle il s’en 56 estoit party de la ville de Florence et que se c’estoit son plaisir de faire sa voulenté, qu’il aymoit encores mieulx que jamais n’avoit fait. Laquelle lui respondit qu’elle n’en feroit riens. Et lors lui commença a promettre plusieurs dons, comme or, argent, robes, joiaulx et plusieurs autres choses; laquelle tout reffusa. 60 Et aprez plusieurs parolles, lui dist: «Dame, veez cy pour cinquante escus d’or de veloux que je vous donne et me faites le plaisir que je vous demande». Lors la barbiere, envieuse et couvoiteuse d’avoir celle belle piece de veloux, incontinent, sans plus plaider, s’i accorda. «Mais, dist elle, je vous requier que la chose vous tenez secrete, car, 64 ainsi comme vous savez, je suis de noble lignage et si ay mon mary qui est honneste homme, par quoy s’il estoit sceu, je seroie villennee et deshonnouree a tousjours mais». Adonc Olivier lui ottroia que jamais n’en ouvriroit sa bouche pour en parler. Puis lui bailla son veloux et luy dist: «Tenez! Faites en ce qu’il vous plaira». 68 Adonc le print et le mist dedens son coffre. Et aprés, le fist monter en sa chambre et eulx deux ensemble prindrent du deduyt et plaisance tant qu’ilz voulurent, jusques a heure competente qu’elle sceut que son mary devoit revenir. Et quant il fut temps de partir, Olivier print congé d’elle; puis s’en alla. Et, en s’en allant, com- 72 mença a penser qu’il avoit perdu son veloux, dont lui en faisoit grant mal, et mauldissoit l’eure que oncques lui avoit baillé. Pour laquelle cause, il s’en vint tout courcé a son logeis. Et quant vint a soupper, le paige regarda son maistre et veit qu’il faisoit mauvaise chiere et souppiroit tresfort. Si commença a demander a son maistre qu’il avoit et s’il estoit malade. Lors le maistre 76 lui respondit qu’il n’avoit rien et ne lui vouloit point dire, car il avoit paour qu’il ne l’acusast envers sa femme. Le paige, voyant que son maistre ne pouoit de rechief boire ne mengier et gettoit encores plusieurs souppirs a l’occasion qu’il avoit perdu cestui veloux, ne s’en peut tenir de le interroguer qu’il avoit, en lui disant: 80 «Maistre, dites moy, s’il vous plaist, quel ennuy vous avez et, se je puis, je y mettray remede». Adoncques Olivier, voyant son paige qui fort l’interroguoit, ne se peut tenir qu’il ne lui comp- tast sa male fortune et luy dist toute la maniere comment il avoit baillé son veloux a ceste ditte barbiere. Adonc le paige ouyant son maistre ainsi compter son cas, commença a rire. Puis dist 84 a son maistre: «Si vous me voulez donner une bonne robe, je vous iray querir vostre veloux; et ouquel cas que je ne le vous apporte, je veulx avoir les deux oreilles couppees». Et son maistre lui respondit ainsi: «Si tu me veulx promettre de le me apporter, je te prometz que tu auras une bonne robe». 88 Adoncques le paige demanda a son maistre ung grant blanc et son maistre lui bailla. Et quant i l’eut, il s’en alla en la maison du barbier ou son maistre avoit fait sa barbe. Et quant il vint a l’uys dudit barbier, il hurta fermement. Lors le barbier, ouyant hurter a son huys, demanda qui

sf177.indb 506 19/12/15 01.04 Une nouvelle «nouvelle» apocryphe de la première traduction française du “Decameron” 507

c’estoit et le paige respondit que c’estoit le paige de Olivier Maillart. Et quant le barbier ouyt 92 le paige, qui congnoissoit bien ledit barbier, fut tout esbahy, car il y avoit long temps qu’il n’en avoit ouy parler. Si lui fist ouvrir l’uys et le fist monter en sa chambre ou il estoit. Et puis lui demanda qu’il vouloit et le paige luy dist: «Mon maistre se recommande a vous et vous prie que vous lui envoiez son veloux qu’il avoit 96 laissé pour gaige de sa barbe a l’occasion qu’il n’avoit point de monnoye; et veez la ung grant blanc qu’il vous envoie». «Quoy, ce dist le barbier a la femme, avez vous retenu son veloux pour gaige de sa barbe? Que de fievre quartaine soiez vous espousee!». 100 Et commença forte et ferme a tencer sa femme. Puis lui dist qu’elle lui baillast. Lors la femme dist a son mary: «Je ne l’avoye point prins pour gaige, mais il m’avoit prié que je lui gardasse». Adonc la femme bailla le veloux au paige, lequel le print et s’en retourna fort joieux vers son maistre, lequel lui donna une bonne robe; et aussi l’avoit il bien gaignee. Puis compta a son 104 maistre la maniere comme i l’avoit eu et comme le barbier avoit tencé sa femme, dont Olivier se print a rire. Et aprés se mocqua d’elle et compta la finesse a ung chascun. En ceste nouvelle est monstré comme, par une des mauldites branches du pechié d’avarice nommee couvoitise, on est souvent deceu et trompé. Aprés y est monstré comme par celle branche on chiet en ung autre pechié mortel, c’est luxure, comme il appert de la barbiere qui 108 par couvoitise print le veloux du gentil homme et se abandonna au pechié de luxure pour gaigner le veloux. Finablement est demonstré comme elle en fut deceue a la parfin. Et ainsi jamais chose que on acquiert par couvoitise ne porta jamais, a nul, prouffit, mais dommaige et deshonneur23.

(23) 7 C D et demouroit | 8 B Baptistere. [Flo- D seroit pas | 44 C D celle femme | 48 D de velours rence, Baptistère de San Giovanni, lieu de l’action ou plus largement | 52 B C D laquelle il trouva seule dans la nouvelle VIII, §3, qui met en scène Calan- omis | 53 C D il fut plus ravy | 56 D s’en estoit allé | drin: E per avventura trovandolo un dì nella chiesa 57 C D qu’il l’aymoit mieux | 58 C D or et argent | di San Giovanni] | 9 D cheux | 10 C D ont de cou- 68 D dedens sa | 72 D voyant de rechef que | 77 D stume de | 20 D tant plus alloit en avant et tant plus ne boire ne menger | 82 C D ditte omis | 89 C il l’eut | 28 C D plaisoit de escouter | 29 D en bien et en | 90 C D barbier et hurta | 92 C D le barbier veit | honneur | 33 C D Je cuyde que brief je mourray | 33 95 C D recommande bien à vous | 95 C D vous prie B C D j’ay enduré | 36 C D gardant vostre renom si vous plaist | 95 C D a chascun | 106 D En ceste et vostre renommee | 39 C D envers lui omis | 42 C nouvelle […] deshonneur omis

sf177.indb 507 19/12/15 01.04 508 Olivier Delsaux

Glossaire sélectif Le but de la liste qui suit est d’offrir une aide à la compréhension du texte; elle comprend une sélection des mots disparus ou dont le sens a évolué, en particulier ceux qui pourraient prêter à confusion pour un lecteur moderne. Nous citons les substantifs et les adjectifs sous la forme du singulier (masculin pour les adj.); les verbes, sous la forme de l’infinitif (les formes verbales reconstruites sont entre crochets). [estre] acoustumé de (v.): avoir l’habitude de (10). [apparoir] (v. impers.): apparaître, être visible (107). aune (s.f.): unité de mesure pour la longueur des draps (48). avant (adv.): aller en a.: durer, se poursuivre (20). [bailler] qqch (v.): donner, offrir (82), rendre (100, 103). [baiser] qqn (v.): embrasser (54). besongner (v. intr.): travailler, être occupé (25). bien (s.m.): en b. et honneur: en tout bien tout honneur (29). bien venue (s.f.): bon accueil que l’on reçoit, que l’on attend ou cadeau que l’on offre après un voyage (49). blanc (s.m.): grant b.: pièce de monnaye (88, 97). brief (adv.): rapidement, immédiatement (33). chambre (s.f.): pièce d’une maison (93). champs (s.m.): aux c.: à la campagne [par opp. à la ville] (24). [cheoir] (v. intr.): tomber, chuter (107). chiere (s.f.): [faire] bonne c.: faire bon accueil (50); [faire] mauvaise c.: être affligé, faire triste mine (74). competent (adj.): approprié (69). [compter] qqch (v.): raconter (103, 105). se consentir (v. intr.): donner son accord, acquiescer, approuver (32). consonant a (adj.): qui est en accord avec (3). [converser] avecques qqn (v.): fréquenter qqn (11). courcé (adj.): fâché, irrité (73). coustume (s.f.): avoir de c.: avoir l’habitude, faire habituellement (24). couvoiteux de + inf. (adj.): désireux de (62). decepvance (s.f.): tromperie (1). [decevoir] qqn (v.): tromper, abuser qqn (107). deduyt (s.m.): plaisir qui vient d’un divertissement (26), plaisir qui vient de l’activité sexuelle (69). de rechief (adv.): de surcroît (77). [deshonnourer] qqn (v.): compromettre l’honneur de qqn (65). desplaisance (s.f.): mécontentement ou chagrin (45). dolent (adj.): triste, affligé(44). dommaige (s.m.): préjudice, tort (110). duyt a (adj.): habile à (13). [enbraser] qqn (v.): enflammer[figuré] (15, 20). [encommencer] de + inf. (v.): commencer à (1). ennuy (s.m.): tourment, tristesse (80). envieux de (adj.): désireux de (62). [envoyer] qqch a qqn (v.): adresser, faire parvenir qqch à qqn (94). esbahy (adj.): étonné, surpris (37, 92). espouser de qqch (maladie) (v.): guérir (99). estudie (s.f.): [mettre] son estudie a: s’appliquer à (26). ferme: cf. fort. fievre (s.f.): f. quartaine: fièvre intermittente qui revient tous les quatre jours [imprécation cou- rante] (99). finesse (s.f.): ruse, mauvais tour (105). fort (adj.): fort et ferme: énergiquement, vivement (100). fort (adv.): avec force, avec détermination (81). fortune (s.f.): male f.: mauvais sort, hasard malheureux (82).

sf177.indb 508 19/12/15 01.04 Une nouvelle «nouvelle» apocryphe de la première traduction française du “Decameron” 509

honneste (adj.): élégant, beau (10). honnestement (adv.): en conformité avec la morale, les bonnes mœurs (38). honneur (s.): cf. bien. hurter (v. intr.): frapper (à une porte) (90). huys: cf. uys. imposer qqch (v.): attribuer (2), soumettre, proposer (2, 3). incontinent (adv.): aussitôt (55). logeis (s.m.): habitation (73). mais (adv.): a tousjours m.: pour toujours (65). mary (adj.): affligé, déçu (44). mauldit (adj.): condamnable, réprouvable sur le plan moral, réprouvé par Dieu (106). merveille (s.f.): chose digne d’admiration, d’émerveillement (13). mestier (s.m.): métier à tisser (13). misere (s.f.): état malheureux, digne de pitié (31). moullier (v.): modeler (13). nagueres (adv.): récemment (7). nouvellement (adv.): récemment (37). occasion (s.f.): a l’o. que: pour le motif que, parce que (78, 96). oncques (adv.): jamais (73). [ottroier] que (v.): consentir à ce que, accorder que (66). paige (s.m.): jeune valet (74, 77, 81, 88, 91, 103). parmy (prép.): par, à travers (51). parvenir a qqch (v): atteindre, obtenir qqch (16). passer qqch (v.): surmonter, laisser passer (46). se passer qqch (v): renoncer à qqch, s’abstenir de qqch (18). plaider (v. intr.): argumenter, discuter (63). plaisance (s.f.): plaisir (en l’occurrence sexuel) (69). porter qqch (v): supporter, endurer qqch (31). propre (adj.): qui agit de façon précise, nette, élégante (15). prouffit (s. m.): [porter] p. a qqn: profiter à qqn (110). quartain (adj.): cf. fievre. querir qqch (v.): rechercher, retrouver qqch (84). [ravyr] qqn (v.): emporter, transporter [domaine amoureux] (53). rechief: cf. de rechief. se [recommander] a qqn (v.): saluer qqn (95). robe (s.f.): habit d’une seule pièce, vêtement de dessus (85, 87, 103). signe (s.m.): témoignage, manifestation (18). simple (adj.): s. jour: jour ordinaire [opp. à festes ligne 8] (25). somme (s.f.): résumé (titre). souper (v. intr.): prendre son repas du soir (74). sus (prép.): chez (9, 52). tencer qqn (v.): réprimander, injurier (100, 104). [tenir] (v.): [estre] tenu envers qqn: être redevable à qqn, lui être obligé [domaine amoureux] (28); se [tenir] de + inf., se [tenir] que: s’abstenir, s’empêcher de (78, 81). tost (adv.): vite, rapidement (40). uys, huys (s.m.): porte (93). veez cy, veez la (présentatif): voici (61). veloux (s.m.): drap de velours (passim). [villenner] qqn (v.): mépriser (65).

sf177.indb 509 19/12/15 01.04 maria chiara morighi

Lettere di Livia Veneziani a Valery Larbaud, mediatore intellettuale nella fortuna postuma di Italo Svevo

Abstract This article is a commentary on three unpublished letters from the “Valery Larbaud” Multime- dia Library of Vichy. The letters, reported here in their entirety, were written to Valery Larbaud by Livia Veneziani, Italo Svevo’s widow. In these letters, Mrs. Veneziani asks the French writer to convince James Joyce to write a preface in English for a new edition of the novel Senilità. At the moment of Svevo’s death, Joyce had promised Livia his unconditional support in promot- ing her husband’s works; but in time, he seemed to have gone back on his word. Thus, Larbaud remains Livia’s only hope in contacting Joyce. Although the friendship between Svevo and Joyce is widely renowned and many studies frequently focus on how it started and grew, little is known about its evolution. It is a fact that Joyce, above all, was responsible for “discover- ing Svevo” and was one of his most devoted admirers. However, these letters provide a more complete view of their relationship: they prove the existence of some kind of tension between the two writers.

I documenti riportati costituiscono parte del materiale, segnalatomi come inedi- to, da me reperito presso la Mediathèque Valery-Larbaud della città di Vichy.

Si tratta di lettere inviate da Livia Veneziani a Valery Larbaud, testimonianze decisamente interessanti che vanno a completare il profilo della vicenda relativa alla fortuna di Italo Svevo. Il rilievo di tali missive (risalenti rispettivamente al 7 febbra- io, 10 marzo e 14 aprile 1931) è dato dal fatto che esse illuminano il rapporto che intercorreva tra James Joyce e lo scrittore triestino. La vulgata racconta che i due intellettuali si incontrarono a Trieste e che, da un iniziale rapporto lavorativo, la loro divenne un relazione di profonda amicizia e reciproca stima. Le lettere in questione non smentiscono tale verità, tuttavia ne ridimensionano la portata. Joyce è una figura legata principalmente all’esordio di Svevo ma cosa avvenne dopo la morte dello scrit- tore è spesso taciuto; il materiale qui presentato contribuisce a far luce sulla vicenda.

Livia Veneziani, dopo la scomparsa del marito, continua l’opera di diffusione dei romanzi sveviani. Valery Larbaud non perde, nel corso degli anni, il prezioso ruolo di intermediario che aveva ricoperto agli albori della “scoperta” di Italo Svevo. Era stato proprio l’italianisant d’Oltralpe (su suggerimento dello stesso Joyce) a riconoscere la grandezza di Senilità e la deflagrante modernità de La coscienza di Zeno, all’epo- ca – siamo nel 1925 – quasi completamente trascurati dalla critica italiana. Dopo la lettura di quest’ultimo romanzo Joyce si era permesso di consigliare all’amico triesti- no qualche strategia promozionale, con una lettera datata 30 gennaio 1924:

Grazie del romanzo con la dedica. Ne ho due esemplari […]. Sto leggendolo con molto piacere. Perché si dispera? Deve sapere che è di gran lunga il Suo migliore libro. Quanto alla critica italiana non so. Mi faccia mandare degli esemplari di stampa a

sf177.indb 510 19/12/15 01.04 Lettere di Livia Veneziani a Valery Larbaud 511

1) M. Valery Larbaud Chez «Nouvelle Revue Française» 3 rue de Grenelle

2) M. Benjamin Crémieux Chez «Revue de France» (troverà l’indirizzo su un esemplare)

3) Mr. T.S. Eliot Editor «Criterion» 9 Clarence Gate Mansion Upper Baker Street

4) M. F. Ford «The Transatlantic Review» 27 Quai d’Anjou Paris

Parlerò o scriverò in proposito con questi letterati […]1.

La promessa è mantenuta, come dimostra una missiva dello stesso Joyce di qual- che tempo successiva: «Caro amico: Mandi i libri senz’altro. Ho già parlato di lei a Larbaud ed a Crémieux […]. Il suo libro sarà certo apprezzato […]2». Così di fatto avviene, perché lo scrittore irlandese può comunicare quanto se- gue il primo aprile 1924: «Caro amico: Buone notizie. M. Valery Larbaud ha letto il Suo romanzo. Gli piace molto. Ne scriverà una recensione nella “Nouvelle Revue Française”»3. Fu proprio grazie all’acuta sensibilità di Larbaud, unita all’insostituibile contri- buto di Benjamin Crémieux e di Marie Anne Comnène, che l’opera sveviana otten- ne dunque un’inarrestabile risonanza sia in Francia che – se pur tra accese polemi- che – in Italia. La graduale ascesa dello scrittore triestino è infatti testimoniata dalla corrispondenza epistolare tra l’autore e i critici francesi che si occuparono della sua opera. Nessuna immagine potrebbe rendere in maniera più efficace l’emozione pro- vata da Svevo nel ricevere la prima missiva di Larbaud:

Ma ecco nel 1925, inatteso, improvviso, un sole di gloria sorgere e illuminare la sua vita. Aveva ormai sessantatre anni. Ricordo quel giorno di gennaio. Eravamo seduti intorno alla grande tavola che riuniva per la colazione assieme a noi anche la famiglia di Letizia con i tre bambini. Egli aprì distrattamente una lettera giunta da Parigi. Cominciò a leggerla ad alta voce e già nell’intestazione restò senza fiato. Cominciava così: «Egregio signore e Maestro». Era la lettera di lode e compiacimento di Valery Larbaud4.

La lettera cui Livia Veneziani fa riferimento è quella che apre la corrispondenza tra Larbaud e Svevo e che risale all’11 gennaio 1925. Sin da subito l’intellettuale fran- cese aveva riconosciuto il valore dei romanzi sveviani e si era mostrato disponibile a

(1) Carteggio con James Joyce, Valery Larbaud, (3) Ivi, p. 33. Benjamin Crémieux, Marie Anne Comnène, Eu- (4) L. Veneziani, Vita di mio marito, stesura di genio Montale, Valerio Jahier, a cura di B. Maier, L. Galli, prefazione di E. Montale, Milano, dall’O- dall’Oglio, Milano, 1965, p. 29. glio Editore, 1976, p. 100. Miei i corsivi. (2) Ivi, p. 31.

sf177.indb 511 19/12/15 01.04 512 Maria Chiara Morighi

farsi carico della diffusione degli stessi in una Francia pronta ad accogliere come uno dei suoi figli uno scrittore negletto nella propria patria. La lettura delle opere di Sve- vo, effettuata dagli intellettuali d’Oltralpe su suggerimento dello scrittore irlandese, ha costituito dunque l’indispensabile premessa per il loro intervento a favore dell’au- tore, fino ad allora pressocché ignorato. È pertanto evidente che l’intercessione di James Joyce ha rappresentato una tappa imprescindibile nella complicata vicenda del successo editoriale di Svevo. A quanto risulta dalle testimonianze Joyce, dopo la morte dell’amico, aveva garan- tito alla signora Veneziani il proprio appoggio e la propria disponibilità ad intervenire, con qualsiasi provvedimento si fosse rivelato necessario, a favore di questi. Quando a Livia viene suggerito di pubblicare in America Senilità corredandola di una prefazione scritta da Joyce (per garantire al romanzo un maggior successo), la signora Veneziani si rivolge allo scrittore irlandese, reclamando quanto le era stato promesso. La risposta di Joyce è un netto rifiuto. Proprio per questo motivo Livia scrive a Larbaud chiedendogli una mediazione, sollecitandolo a convincere lo scrittore irlandese a compiere quest’ul- timo passo volto ad onorare la memoria del marito; il tutto, senza esito positivo. Difficile immaginare una situazione di tal genere, dal momento che sembra in- comprensibile il comportamento di Joyce alla luce di quello che si è sempre volu- to rappresentare come un rapporto d’amicizia sincera. Eppure segnali di un ripen- samento erano già riscontrabili nel 1929, anno in cui esce il numero di «Solaria» (marzo-aprile) dedicato a Svevo, al quale furono chiamati a contribuire, ognuno con il proprio intervento, molti intellettuali che ne avevano riconosciute le capacità artisti- che. L’adesione di Joyce all’iniziativa è prettamente formale: dalla lettera che si limita ad inviare da Parigi egli conferma l’amicizia che lo aveva legato allo scrittore, sottoli- nea il ruolo avuto nella “scoperta di Svevo” ma non dedica una sola parola all’opera dell’amico, demandando la formulazione di giudizi ai critici italiani. Anche nella comunicazione strettamente privata Joyce conferma la propria re- nitenza: al fratello Stanislaus egli confessa il rifiuto di scrivere quella prefazione tan- to insistentemente richiesta dalla signora Veneziani e lascia trapelare l’esistenza di un’«antica frustrazione»5, sperimentata sin dagli anni della giovinezza, rispetto alla famiglia Schmitz-Veneziani. Joyce avrebbe molto sofferto la situazione di subalternità sociale in cui egli versava: l’evidente distanza di classe tra le due famiglie sarebbe sta- ta – agli occhi di Joyce – costantemente rimarcata dall’entourage dello scrittore trie- stino, traducendosi nell’esclusione da qualsiasi iniziativa in cui fosse coinvolta l’alta società cittadina, nonché in altri atteggiamenti a questo affini. Che tale senso d’infe- riorità fosse o meno legittimato da reali episodi di discriminazione, resta il fatto che Joyce lo percepiva come tale e mai, come dimostrano le circostanze, venne superato; il tutto nonostante Svevo fosse in più di un’occasione intervenuto economicamente a favore dell’amico. È possibile che tale situazione abbia in qualche modo influenzato la scelta dello scrittore irlandese di non adempiere alla propria promessa di collaborazione. La prefazione sarà scritta da Stanislaus Joyce e soltanto riletta, senza l’apporto di alcuna modifica, dall’autore dell’Ulisse. Vani, dunque, i tentativi di Livia di ottenere da questi l’ultimo benevolo gesto nei confronti del marito da poco scomparso.

maria chiara morighi

(5) G. Finocchiaro Chimirri, Italo Svevo e James Svevo scrittore europeo, Firenze, Olschki, 1994, Joyce. Mappa di un incontro memorabile, in Italo p. 61.

sf177.indb 512 19/12/15 01.04 Lettere di Livia Veneziani a Valery Larbaud 513

LIVIA SCHMITZ-SVEVO VILLA VENEZIANI TRIESTE 10 Monsieur Valery Larbaud Ce 7 février 1931 Paris

Lors de mon dernier séjour à Paris Joyce m’a montré une lettre qu’il avait reçue de vous de Rome dans laquelle vous lui parliez de mon mari disant que la valeur de son œuvre com- mence à être reconnue en Italie. Cela m’encourage à m’adresser à vous à propos de la publi- cation de Sénilité en anglais. Zeno a été publié en Angleterre et en Amérique et le succès a été grand d’après les critiques qui me sont parvenues des divers argus de la presse. Mais à ce qu’il paraît le succès de vente en Amérique n’a pas été bien fort car l’éditeur m’écrit: the public did not support Zeno very well. Maintenant Sénilité va être publiée et l’éditeur américain voudrait pouvoir la lancer mieux avec une préface de Joyce. Il se promet un succès immédiat sous l’égide de Joyce. Mais Joyce refuse de faire cette préface disant qu’il ne veut pas déroger à une proposition qu’il s’est fait [sic] de ne jamais écrire de préface ni de <…> des lectures. Il dit en outre que son nom “would damn the book in the eyes of readers in England and America for whom I am still a pariah”. Je ne suis pas de son avis, ni surtout mon éditeur américain qui insiste et voudrait que j’aille à Paris tâcher de convaincre Joyce. J’ai écrit à Joyce lui rappelant l’offre qu’il m’a fait [sic] lors de la mort de mon mari: “Please remember me if at anytime my help can serve to keep alive a memory of an old friend for whom I had always affection and esteem”. J’ai pensé que le moment était venu pour lui d’accomplir cette promesse et j’ai eu un refus. Or je viens vous prier si vous pouvez m’aider à obtenir cette petite faveur. Il n’est pas nécessaire d’écrire des pages. Il me suffirait quelques lignes dans lesquelles il parlerait de l’admiration qu’il a toujours eue pour Senilità; il en savait même quelque passage par cœur. Je me remets à vous et vous serais extrêmement reconnaissante si vous pouviez m’obtenir cela. Ce ne serait qu’accroître ma reconnaissance car si vous saviez quels moments heureux vous avez fait passer à mon mari quand il a reçu votre première lettre et quand il vous a connu à Paris!

Si vous êtes d’opinion qu’il ne faut pas insister auprès de Joyce veuillez me l’écrire et me dire ce que vous pensez. Je vous prie d’excuser le dérangement que je vous cause et agréer, Monsieur, avec mes remerciements mes plus cordiales salutations

Livia Schmitz Svevo

LIVIA SCHMITZ-SVEVO VILLA VENEZIANI TRIESTE 10 Ce 10 mars 1931

Cher Monsieur Larbaud,

Je viens de recevoir votre carte du <…> <…> et vous remercie vivement. Je regrette de vous savoir souffrant et aussi de vous avoir dérangé dans ces circonstances. Je vois que votre lettre est listée à grand deuil et sans connaître la perte que vous avez subie je vous envoie mes condoléances. J’espère que Joyce va se décider à écrire cette préface et c’est le dernier moment parce que l’éditeur m’écrit que le livre est prêt. Sénilité va sortir aussi à Paris ces jours-ci. L’article de votre ami Justin O’Brien sur l’œuvre de mon mari est magnifique! Je l’ai fait copier et traduire en italien pour l’insérer dans une petite publication qui va sortir le mois prochain. Je nous renouvelle, cher M. Larbaud, mes remerciements et vous envoie avec mes cor- diales salutations les bons souhaits de complète guérison.

Livia Schmitz Svevo

sf177.indb 513 19/12/15 01.04 514 Maria Chiara Morighi

Trieste ce 14 avril 1931

Cher Monsieur Larbaud,

Je vous remercie de votre lettre du 20 mars et de vouloir bien vous occuper de mon affaire malgré que vous soyez souffrant. J’ai vu M. Crémieux à Milan. Il m’a dit que Joyce lui a parlé de ma demande mais qu’il ne veut pas écrire cette préface pour ne pas interrompre ses travaux. Ceci est une excuse qui ne vaut pas grand-chose parce que ce n’est pas dans l’intention de l’éditeur que la préface occupe plusieurs pages. Il suffirait de quelques lignes qu’il pouvait dicter à sa fille ou à Nino Frank qui s’occupe très volontiers des choses de mon mari. Crémieux m’a donné, je crois, un bon conseil. Il m’a dit de prier miss Beach et Mlle Monnier de préparer la préface et de la faire signer par Joyce un jour qu’ils travailleraient ensemble comme cela arrive souvent. Je ne sais pas si miss Beach acceptera ou saura l’écrire. L’éditeur désire que Joyce confirme que Sénilité lui plaisait beaucoup et qu’il a encouragé mon mari à écrire de nouveau. Joyce voulait que Crémieux écrive cette préface. Mais Crémieux a refusé. Et en effet, tout ce que Crémieux a réussi si bien de faire en France pour l’œuvre de mon mari n’aurait pas le même succès en Amérique. Mais vous, cher Monsieur, ne vous sentiriez vous d’écrire ces quelques lignes en Anglais et les envoyer à miss Beach pour les faire signer? Vous auriez ainsi un double mérite à mes yeux et je vous en serais infiniment reconnaissante. Excusez-moi si j’ose vous déranger et vous demander tant de choses. Mais vous avez tant fait pour faire connaître l’œuvre de mon mari en France que peut-être vous voudrez bien aussi avoir un peu de mérite de la faire mieux connaître en Amérique aussi. Veuillez agréer, Monsieur, avec mes meilleurs vœux pour votre santé, mes plus cordiales salutations

Livia Schmitz Svevo

sf177.indb 514 19/12/15 01.04 marco piazza

A. Gimeno y Cabañas: “Quando incontrai Marcel Proust” (1932)

Abstract The spanish reception of Proust’s work between the 1920s and the 1930s is lively and marked not only by the first translation of the Recherche in order of appearance (1920), but also by a large number of articles published in newspapers and periodicals. In this scenario, we can meet the evocation of a dinner at Proust’s home by a Spanish nobleman and doctor, Amalio Gimeno y Cabañas. The dinner took place in 1894, within the 9th International Sanitary Conference in Paris, in respect of which the Count Gimeno was part of the Spanish delegation. He was in- vited by Professor Adrien Proust, father of the future author of the Recherche, and a key figure in the Conference itself. It was on that evening that the Spanish doctor met French professor’s wife, and also the young Marcel, who was 22 years old. Some years later, Gimeno y Cabañas rebuilt that episode and finely outlined the figures of Madame Weil and his son Marcel.

Presentazione: un medico spagnolo in Boulevard Malesherbes

La ricezione spagnola dell’opera di Proust tra gli anni Venti e gli anni Trenta ha conosciuto una fase piuttosto vivace, testimoniata non soltanto dalla precocità della traduzione dei primi volumi della Recherche, ad opera del grande poeta Pedro Sali- nas, un vero e proprio primato mondiale (la sua traduzione di Du côté de chez Swann esce nel 1920, due anni prima di quella inglese e ben sei rispetto a quella tedesca)1, ma anche da una nutrita schiera di articoli su quotidiani e periodici, apparsi dal 1919 in poi2. In alcuni casi questi interventi non fanno altro che riprendere i contenuti di la- vori già pubblicati in Francia, in altri invece rappresentano analisi ben più originali e convincenti. Ad ogni modo il dossier che potrebbe essere raccolto collazionando tutti gli articoli dedicati a Proust usciti in quegli anni in Spagna testimonierebbe la diffusa conoscenza della sua opera nei circoli letterari spagnoli, con un picco di massima effervescenza di poco antecedente alla pubblicazione postuma dell’ultimo volume della Recherche, complice forse anche la querelle sul presunto plagio di Salinas nei confronti di Proust con la mirabile raccolta di racconti Vigilia del piacere del 19263.

(1) Cfr. H.E. Craig, Pedro Salinas as Proust’s M. Proust, pubblicato in «Índice, revista mensual», First Translator, in «Confluencia: Revista Hispáni- 2, 1921, pp. 22-23, e recentemente pubblicato in ca de Cultura y literatura», 18 (1), 2002, pp. 129- traduzione italiana in: P. Salinas, Due intermezzi 138. Sulle traduzioni in spagnolo della Recherche di lettura, a cura di I. Antici, con una nota di M. si veda: Th. Barège, Un ping-pong transatlantique: Piazza, Milano, Mimesis, 2014, pp. 36-43. les traductions de Proust en espagnol, in E. de Dam- (2) Cfr. H.E. Craig, Proust in before the pierre, A.-L. Metzger, V. Partensky et I. Paulin Civil War, in «Transitions: Journal of Franco-Iberi- (éd.), Traduction et parages: que pensons-nous de- an Studies», 1, 2005, pp. 56-76. voir transmettre?, Société française de littérature (3) Cfr. J.M. Barrera López, EI azar impecable: générale et comparée, Vox poetica, 2014, pp. 379- Vida y obra de Pedro Salinas, Sevilla, Editorial Gua- 391. Salinas detiene anche un altro primato, in dalmena, 1993, pp. 135-138. L’opera di Salinas è: quanto tra i primissimi autori di lavori letterari Víspera del gozo, Madrid, Revista de Occidente, ispirati da Proust al di fuori del contesto franco- 1926; trad. it. di C. Greppi, Vigilia del piacere, To- fono, grazie al monologo teatrale Para un descanso rino, Einaudi, 1976. en “La recherche du temps perdu”, emprendida por

sf177.indb 515 19/12/15 01.04 516 Marco Piazza

Una produzione critica che si confronta anche con il tentativo avviato da più parti di svalutare l’opera colpendo il suo autore, la cui omosessualità e il cui snobismo da rentier erano ormai noti al pubblico spagnolo. Operazione che però viene sostan- zialmente sventata, tanto è vero che è pressoché unanime, tra la fine degli anni Venti e l’inizio degli anni Trenta, la consapevolezza della grandezza del romanzo proustiano, al di là delle debolezze o dell’originalità dell’uomo Proust4. Consapevolezza che tra- spare anche da un pezzo sui generis e probabilmente unico nel panorama giornalisti- co di quegli anni quale è quello qui presentato per la prima volta al pubblico italiano e ancora non accessibile in traduzione francese5. Ne è l’autore un nobile spagnolo, il conte Amalio Gimeno y Cabañas, nato a Cartagena nel 1850 e morto a Madrid nel 1936, medico, diplomatico e uomo politico, ministro di vari dicasteri tra il 1906 e il 1919, al tempo della monarchia di Alfonso XIII6. Dal 1875 professore universitario nella facoltà di medicina di varie università spagnole, nel 1885 assurge a una certa notorietà per aver fronteggiato l’epidemia di colera che aveva sconvolto promuovendo una vaccinazione massiva della popolazione valenziana sulla scorta delle recenti scoperte del dottor Koch sull’origine virale del colera e tenendosi direttamente in contatto con Pasteur a Parigi onde rice- vere utili dritte nel trattamento degli infetti7. L’epidemia spagnola non era stata certo l’unica di quegli anni in Europa, tanto che fin dalla metà del secolo era maturata l’idea della necessità di una politica sani- taria europea di collaborazione internazionale entro cui promuovere azioni e misure preventive comuni. Di qui le Conferenze sanitarie internazionali cui parteciparono congiuntamente scienziati e diplomatici dei vari paesi coinvolti. Tra il 1851 e il 1938 ne ebbero luogo ben quattordici, sette delle quali a Parigi, come la Nona, svoltasi tra il 7 febbraio e il 3 aprile 1894, alla quale prese parte lo stesso conte Gimeno, scelto per rappresentare il suo governo quale esperto dotato anche di comprovate abilità politiche (già deputato dal 1886, è senatore dal 1891)8. Convocata dalla Francia, come le due precedenti, la conferenza era centrata sulla questione del controllo sanitario dei pellegrinaggi verso la Mecca, il principale fattore di propagazione del colera verso ovest. L’esigenza di un cordone sanitario da allargare fino alla zona del canale di Suez era ben chiara: dopo il 1865 vi erano state ben otto epidemie di colera alla Mecca, e l’ultima, nel 1893, era stata particolarmente grave, avendo esteso la sua area d’influen- za proprio sul Golfo Persico. Si trattava dunque di perfezionare e di irrobustire ulte- riormente le misure già prese negli appuntamenti precedenti. Misure che in occasione della Settima Conferenza, svoltasi a Venezia, avevano finalmente visto l’Inghilterra

(4) Cfr. H.E. Craig, Proust in Spain before the tat de València, 2010, pp. 109-158, in particolare Civil War cit., p. 64. pp. 110-116. Gimeno y Cabañas fu insignito del (5) Del testo dà particolareggiate notizie H.E. titolo di conte nel 1920. Craig in un suo recente articolo: Un délégué médi- (7) Cfr. M.J. Báguena Cervellera, Amalio Gi- cal espagnol est invité chez les Proust en mars 1894 meno y la epidemia de cólera de 1885 en Valencia, et fait la connaissance de Marcel, in «Bulletin Marcel in C. González Monte, J.L. Fresquet Febrer, S. Proust», 61, 2011, pp. 31-36. In esso l’autore for- Lledó Matoses, F. Morales Olivas, A. Pallas Re- nisce parte delle informazioni da noi qui riportate, gueira (comité editorial), Memoria, Instituto Médi- citando solo un paio di passi dell’articolo in tradu- co Valenciano, 1979-2009 cit., pp. 183-191. Gimeno zione francese. si occuperà anche dell’epidemia del 1890 sempre (6) Sulla datazione corretta dell’anno di nascita a Valencia e in quello stesso anno si recherà a Ber- di Amalio Gimeno, di norma erroneamente indica- lino per studiare la tubercolina di Koch: cfr. C.P. ta come 1852, e sulla sua biografia cfr. C.P. Aguirre Aguirre Marco, La concepción de la enfermedad de Marco, La concepción de la enfermedad de Amalio Amalio Gimeno y Cabañas (1850-1936) cit., p. 112. Gimeno y Cabañas (1850-1936), in C. González (8) Cfr. J.B. Mateos Jiménez, Actas de las Con- Monte, J.L. Fresquet Febrer, S. Lledó Matoses, ferencias Sanitarias Internacionales (1851-1938), F. Morales Olivas, A. Pallas Regueira (comité in «Revista Española de Salud Pública», a. 79, (3) editorial), Memoria, Instituto Médico Valenciano, 2005, pp. 339-349, p. 344. 1979-2009, Valencia, Publicacions de la Universi-

sf177.indb 516 19/12/15 01.04 A. Gimeno y Cabañas: “Quando incontrai Marcel Proust” (1932) 517

cedere rispetto al suo rifiuto, dettato da forti interessi commerciali, di accettare l’idea di un contagio per opera del bacillo di Koch e dunque di addivenire all’introduzione della quarantena per chi proveniva dalle aree infette9. Decisivo, per le sue abilità diplomatiche, nel portare gli inglesi alla firma della Convenzione siglata nel 1892 era stato un eminente igienista francese, Adrien Proust (1834-1903), che farà parte della delegazione francese – insieme al suo collega Paul Brouardel (1837-1906), la cui consorte Louise lo ritrarrà in una tela a olio oggi espo- sta al Musée Carnavalet – anche durante la Nona Conferenza cui partecipa Amalio Gimeno y Cabañas. Proust, professore alla Facoltà di Medicina di Parigi dal 1885, aveva dedicato la sua carriera allo studio delle epidemie e alla messa a punto di effica- ci strategie difensive contro il contagio – tanto che il suo modello di cordone sanitario è applicato ancora oggi, come nel caso di Ebola10: diventato noto nel campo dell’epi- demiologia con un’opera del 1873, si era dedicato alla prevenzione del colera a più riprese, dando alle stampe in quegli anni un lavoro corredato da incisioni che rappre- sentano la quarantena cui erano sottoposti i pellegrini che rientravano dalla Mecca11. Ebbene, in occasione della Nona Conferenza parigina, il professor Proust invitò a cena a casa sua il suo omologo spagnolo, il professor Gimeno y Cabañas, una sera di marzo del 1894, dimostrando grandi doti di ospitalità e offrendo uno spettacolo di poesia e di recitazione in cui l’attore Coquelin cadet si esibisce in un monologue spi- rituel su un passo di Victor Hugo12. Lì il medico spagnolo fa conoscenza della moglie del professore francese, Jeanne Weil, e anche del figlio minore della coppia, il futuro autore di À la recherche du temps perdu. All’epoca Marcel aveva 22 anni e da pochi mesi si era messo a studiare per conseguire una laurea in lettere che di fatto si tramuta ben presto in filosofia – da lui effettivamente conseguita nel marzo del 1895 –, dopo aver preso in considerazione differenti ipotesi di carriera (conservatore di museo, archivista al Ministero degli Esteri, ecc.) e aver interrotto gli studi di giurisprudenza che nei voti paterni erano finalizzati all’esercizio della professione di notaio13. Di quella serata il conte Gimeno si sarebbe ricordato trent’anni dopo – come lui stesso racconta nelle pagine che seguono – in occasione di un’altra cena, questa volta a Ginevra, e su sollecitazione dell’anfitrione, il delegato francese all’Assemblea delle Nazioni Unite, ovvero il giornalista e uomo politico Henri de Jouvenel (1876-1935), che durante il pasto lo aveva fatto sedere al suo fianco, complice anche la simpatia nata durante i lavori dell’Assemblea, di cui Gimeno fu vicepresidente tra il 1921 e

(9) Cfr. N. Howard-Jones, Les bases scientifiques Era solito recitare nel salotto di Madame Lemaire, des Conférences sanitaires internationales 1851- frequentato da Marcel Proust a partire dai primi anni 1938, Genève, Organisation Mondiale de la Santé, Novanta: cfr. J.-Y. Tadié, Marcel Proust. Biographie, 1975, pp. 64-72 e 79-85. Paris, Gallimard, 1996, trad. it. di G. Bogliolo, Vita (10) Cfr. G. Weissmann, Ebola, Dynamin, and di Marcel Proust, Milano, Mondadori, 2002, p. 175. the “Cordon Sanitaire” of Dr. Adrien Proust, in «The (13) Cfr. ivi, pp. 147, 201-206, 227-230. Non FASEB Journal», n. 29, 2015, pp. 1-4. è questa la sede per dar conto in modo esaustivo (11) A. Proust, Essai sur l’hygiène internationale, dell’ampia bibliografia sui rapporti tra Marcel e il Paris, G. Masson, 1873; Id., Le choléra. Étiologie et padre, in rapporto anche alle tracce della frequen- prophylaxie, Paris, G. Masson, 1883; Id., La défen- tazione dei lavori di medicina del secondo nell’ope- se de l’Europe contre le choléra, Paris, G. Masson, ra del primo. Ci limitiamo a segnalare la monografia 1892. Sull’operato di Adrien Proust a livello in- di M. Miguet-Ollagnier, Gisements profonds d’un ternazionale si veda: D. Panzac, La priorité du Pr. sol mental: Proust, Besançon, Presses Universitaires Adrien Proust: la défense sanitaire, in «La Revue de Franche-Comté, 2003, ove più di un capitolo è du Praticien», n. 54, 2004, pp. 2080-2085. Si veda, dedicato a questa tematica e che in certa misura ri- anche, dello stesso autore: D. Panzac, Le docteur prende i contenuti di lavori dell’autrice già apparsi Adrien Proust, père méconnu, précurseur ignoré, Pa- in precedenza. Sulla conoscenza da parte di Marcel ris, L’Harmattan, 2003. degli studi sull’afasia condotti dal padre insieme al (12) Si tratta di Alexandre Honoré Ernest Co- collega Ballet cfr. S. Poggi, Gli istanti del ricordo. quelin (1848-1909), detto Coquelin cadet per distin- Memoria e afasia in Proust e Bergson, Bologna, il guerlo dal fratello Constant, detto Coquelin aîné. Mulino, 1991, pp. 54-61.

sf177.indb 517 19/12/15 01.04 518 Marco Piazza

il 1923. Il conte spagnolo tace però sulle ragioni che lo hanno spinto nove anni più tardi – attingendo ai suoi appunti dell’epoca – a dare alle stampe la storia del suo incontro con il giovane Proust sotto forma di un articolo per l’edizione andalusa del quotidiano monarchico e cattolico «ABC»14. Forse vanno ricercate nella crescente popolarità dell’autore della Recherche e soprattutto nel desiderio di difenderne la memoria contro i suoi detrattori, che di lì a poco sotto il franchismo si sarebbero moltiplicati, facendo di Proust uno dei bersagli preferiti del regime, come del resto è avvenuto anche sotto il fascismo italiano. marco piazza

(14) L’articolo, a firma «Conde de Gimeno» e in- web all’indirizzo: (ultima consultazione: ne dell’Andalusia, p. 23. Lo si può consultare sul 02.02.2015).

sf177.indb 518 19/12/15 01.04 A. Gimeno y Cabañas: “Quando incontrai Marcel Proust” (1932) 519

Quando incontrai Marcel Proust

Ginevra, settembre 1923. Henri de Jouvenel, uno dei delegati francesi nell’Assemblea, invitò a cena vari amici e compagni della Società delle Nazioni, in un salottino grigio verda- stro, colore dominante nelle stanze dell’Hotel Des Bergues. Una cortese deferenza in segno d’onore verso il nostro paese aveva fatto sì che sedessi a lato dell’anfitrione. Poiché le lettere E ed F, iniziali di Spagna e Francia15, si trovano una di seguito all’altra nell’alfabeto, il protocollo prevedeva che Jouvenel e io sedessimo vicini, nelle Commissioni, facendo suscitare in noi una mutua simpatia. Mentre sopra i fiori e i calici s’incrociavano domande e risposte alle quali l’ingegno s’im- pegnava a conferire acutezza, e mentre eravamo immersi nel rumore del piccolo alveare umano lì riunito, che, animato e allegro, era già arrivato al dessert, io e il mio compagno intrattene- vamo una conversazione sui letterati di ambedue i paesi. Lui si vantava di conoscere i nostri romanzieri contemporanei, e io mi compiacevo di non ignorare molti dei suoi, ripercorrendo delicatamente la tastiera del romanzo francese. Poco più tardi continuammo la piacevole chiacchierata affacciati al balcone, assaporando la bellezza della notte. Il fresco del lago saliva fino a noi e una grande luna, rossastra e brillante, faceva capolino dalle cime lontane del Monte Bianco. – Parlava di Proust? – domandò il mio interlocutore – Probabilmente, deve aver cono- sciuto suo padre; è stato professore nella Facoltà di Medicina a Parigi. La mia memoria, stimolata, si sollevò di colpo e una visione remota attraversò veloce il mio ricordo, già risvegliato. Poi mi resi conto che non solo avevo conosciuto il padre, ma anche il figlio, molti anni prima, quando era giovane e proprio a casa sua. Chi avrebbe potuto imma- ginare che quel ragazzo pallido e assonnato che mi fu presentato una sera, sarebbe diventato, con lo scorrere del tempo, un così famoso romanziere! ––– Le cose andarono così. Svolgevo la mia funzione di plenipotenziario per la Spagna du- rante la Conferenza Sanitaria Internazionale che ebbe luogo a Parigi nell’inverno del 1893, quando un certo giorno di marzo ricevetti un amabile biglietto, col quale Monsieur e Madame Proust mi invitavano a pranzo nella loro casa, al numero 9 del Boulevard Malesherbes. Il dottor Proust, in quanto professore di Igiene della Facoltà, era membro della delegazione francese e sapeva ottemperare molto bene ai doveri di ospitalità verso i suoi colleghi stranieri. L’immobile in cui vivevano i Proust, molto vicino alla Madeleine, è stato poi il medesimo che fece da scenario al romanziere per la sua opera Le côté de Guermantes. Incontrai lì quella sera commensali interessanti, medici, letterati e artisti. Il cibo si rivelò estremamente piacevole; e non lo furono meno le successive due ore di poesia selezionata e di arte squisita. Durante un intervallo apparve in un salone, con un’andatura negligente e languida, un giovine, figlio dei proprietari di casa. Così spiegarono la sua assenza da tavola: ne era causa un particolare tenore di vita a cui lo costringeva, fin dall’infanzia, una tenace malattia, a causa della quale era per lui più penoso il giorno della notte, che a causa dell’insonnia trascorreva lavorando, per dormire dopo, con il sole. Sua madre s’incaricò di fornirmene i dettagli, caricando le sue parole di un tono così tenero, che la rendeva interessante. Dopo pochi minuti mi si avvicinò il giovane Proust. Lo attrasse il fatto che ero spagnolo, e a causa di ciò divenni l’obiettivo della sua curiosità. A distanza di anni, posso adesso confessare con un certo rimorso che la sua conversazione finì per stancarmi un po’. La mia memoria si è sempre rivelata sufficientemente fedele, ma per rafforzarla devo rifarmi ai numerosi appunti che ho preso in vita e che mi permettono di rivivere quanto mi è capitato. Quella notte, e in quei momenti, ero piuttosto distratto: speravo di sentir recitare Coquelin cadet, che era lì presente, e ascoltavo per gentilezza e con un’inquieta attenzione il ragazzo che, pieno di cultura, nello strafare s’inter- rompeva quando gli pareva. Si dimostrava versato in archeologia ma sprovvisto di notizie sulla

(15) Nelle rispettive lingue nazionali i due pae- Conferenza, ossia al francese, per la quale pure il si iniziano l’uno con la lettera ‘E’ e l’altro con la paese di Gimeno inizia con la ‘E’: «Espagne» [Nota lettera ‘F’: «España» e «France». Ma non si può del Curatore]. escludere che l’Autore si riferisca alla lingua della

sf177.indb 519 19/12/15 01.04 520 Marco Piazza

Spagna; poneva domande specialmente riguardo le nostre cattedrali, alcune delle quali meritava- no, per lui, ammirazione più che lode, e si esprimeva con un tono di voce monotona, trascinando lentamente le frasi, come se da poco qualcuno fosse venuto a interrompergli il sonno. Alla fine si udì distinta e chiara la voce di Coquelin, che in piedi e vicino al pianoforte prese a recitare un grazioso monologo incentrato sulla frase Elle est morte, che Victor Hugo ha collocato in un passaggio drammatico del finale di Le roi s’amuse, sottolineandola con la viva espressione del suo volto glabro e dal profilo affilato16. Gli dovetti il fatto di essermi svincolato dalla conversazione con il giovane Proust, con il quale non tornai più a parlare. Ma io, che ho la mania di scorgere somiglianze, sovrapponendo l’una all’altra le figure umane per trasfor- marle in ciò che la mia immaginazione pretende di vedere, mi divertii a confrontare il figlio con la madre. La signora Proust era una dama a cui l’età conferiva un leggero pallore, come di frutta matura. I suoi deliziosi e dolci occhi neri avevano delle pupille profonde che invitavano il curioso a penetrare, attraverso di esse, l’anima che vi abitava. Aveva le sopracciglia arcuate e capelli neri, in mezzo ai quali s’intravedevano alcuni filamenti bianchi in parte celati, come se non desiderassero annunciare una vecchiaia precoce. Il figlio era una copia fedele della madre nella tinta diafana del viso e nel nero delle ciocche cascanti che accompagnavano i baffetti, che parevano un tizzone tracciato di fretta. Lo sguardo era però più smorto e le palpebre pigre nello scoprire del tutto i bulbi oculari un po’ sporgenti. Il padre era tutta un’altra cosa. Il dottor Proust, aveva raggiunto quel punto della vita in cui gli anni danno a certi uomini un’aria di serietà che incute rispetto. Il suo corpo tondo, le spalle quadrate e il collo largo gli davano un aspetto geometrico, con una barba brizzolata e un volto abbastanza espressivo che volgeva sempre all’indietro per via del continuo guardare da sotto gli occhiali. Aveva il physique du rôle dell’accademico assennato e non c’era un momento in cui lo si potesse dimenticare. Brouardel, decano della Facoltà con cui mantenevo relazioni amichevoli nella Conferen- za sanitaria, mi parlò di quella famiglia. La madre era ebrea e i suoi lineamenti fini e delicati ben confermavano la purezza della razza; il marito, cattolico. Il figlio, un essere originale, che faceva resistenza a qualsiasi disciplina. Amava lo studio libero e la vita fuori dall’ordinario. Possedeva una cultura estesa; era sempre alla ricerca di emozioni, curioso di cose rare, incerto nell’intraprendere una carriera, una volta soldato volontario in un reggimento di linea, un’altra propenso alla carriera diplomatica, studente di diritto, frequentatore dei salotti aristocratici, cronista mondano; un giovane, in fin dei conti, che sciupava le sue buone qualità per via del suo carattere ribelle che veniva assecondato dalla condiscendenza materna. Sono colpevole di non aver dato allora la dovuta importanza né alla scena né ai personag- gi. Di tutto ciò avrei custodito uno scolorito e confuso ricordo se Jouvenel, a Ginevra, non me lo avesse riportato di colpo alla memoria. Andando, come dice il titolo di un’opera di Marcel Proust, À la recherche du temps perdu, e ripulendo dalla polvere il mio deposito del tempo che fu, mi causa insofferenza lo scherzo che il tempo mi ha giocato, e che sempre giocherà a tutti coloro che si lanciano in giudizi avventati con l’incoscienza di ciò che compierà il destino. Il giovane del 1893, morto ventinove anni più tardi, aveva dentro di sé i semi di uno scrittore originale come pochi altri. Che importanza hanno le imperfezioni del suo stile, che Souday definiva coriaceo e sgrammaticato17, se quelle sono come i nei che invece di imbruttire, rendono belli certi volti? Nei suoi lunghi capoversi, che occupano pagine e pagine rendendo laboriosa la lettura, brilla di continuo e si fa evidente l’ingegno, che zampilla come scintille di fuoco dall’acciarino sfregato senza sosta e con ruvidez- za. Ciò che non potrà mai esser negato è che Marcel Proust fu, come romanziere, un maestro senza possibili discepoli, perché sarebbe tanto difficile imitarlo! il conte de gimeno (traduzione dallo spagnolo di Simona Manca)

(16) L’espressione è pronunciata nel finale del V del monarca. Da quest’opera è tratto il Rigoletto di e ultimo atto dell’opera – rappresentata per la pri- Giuseppe Verdi [Nota del Curatore]. ma volta nel 1832 – dal medico che esamina il cor- (17) Qui l’autore si riferisce ai rilievi critici di po di Blanche, la figlia del buffone di corte, sedotta Paul Souday (1869-1929), disseminati nel suo Mar- dal re Francesco I, che finisce assassinata al posto cel Proust, Paris, Kra, 1927 [Nota del Curatore].

sf177.indb 520 19/12/15 01.04 francesca bottero

DISCUSSIONI E COMUNICAZIONI

Émile Zola a Genova

Abstract In my paper, I will focus my attention on Émile Zola’s first Italian journey, in order to demon- strate to what extend the writer played a pivotal role in both Italian and in French literary life. Towards the end of September 1892, the travel of Émile Zola and his wife Alexandrine across the Ligurian Riviera represents the first encounter between the French writer and his father Francesco’s native country. During his brief stay in Genoa, Zola visited a town animated by celebrations for the Colombian Exposition, on the occasion of the four-hundredth year since discovery of America. Once there, he had the opportunity to meet distinctive personalities and journalists and to talk about his vision of Italian and French politics, his works and projects, Le docteur Pascal and the Three Cities Trilogy, and about his impressions on contemporary Italian men of letters. The numerous interviews granted in Liguria and in the French Riviera on his way back, attest the Émile Zola’s relevance as an intellectual both in Italy and in France.

La prima volta che il nome di Genova compare occasionalmente in un testo zoliano, meta irraggiungibile dell’evaso Philippe Cayol nei piani architettati dal fra- tello Marius per farlo fuggire dal carcere di Aix, è il 1867, economicamente parlando l’anno nero di Zola, e la pubblicazione di Les mystères de Marseille1, prima a puntate sul «Messager de Provence» e poi in volume presso l’editore marsigliese Arnaud, diviene una delle sue principali fonti di reddito. Tredici anni e otto capitoli del ciclo dei Rougon Macquart più tardi, tra le righe dell’edizione princeps di Nana2 (1880), Genova è messa in relazione con i suoi preziosi tessuti di seta, come accadrà più tardi in Rome (1896), il secondo tomo della trilogia delle Trois Villes, e Fécondité (1899), il primo dei cosiddetti Quatre Évangiles e senza dubbio uno dei romanzi meno apprez- zati dalla critica3. Tuttavia l’incontro vero e proprio di Émile Zola con il capoluogo ligure risale al 1892 e sarà solo un appunto dei suoi taccuini preparatori alla stesura del secondo libro del ciclo delle tre città, Rome, datato 31 ottobre 1894, a permettere di prenderne coscienza:

(1) «Il avait besoin d’une voiture pour la fuite, et del libro: «Fecondité non sarà per alcuni un bel ro- il préférait se procurer à Marseille cette voiture qui manzo (io non oso giudicare perché sono un profa- le conduirait à Aix et qui ramènerait ensuite son no), ma […] bisogna ricordarsi soprattutto che lo frère. La veille, il s’était entendu avec un capitaine scopo e l’intenzione con cui fu scritto è di giovare marin, qui devait conduire Philippe à Gênes» (É. alla Francia, che esso vuol essere cioè più che un’o- Zola, Les mystères de Marseille, Paris, Charpentier, pera d’arte un’opera patriottica. E se il patriottismo 1885, p. 266). è sempre una virtù, diventa nel caso di Emilio Zola, (2) «Henri IV avait habité ce château historique, condannato e infamato dalla giustizia del suo pae- où l’on conservait sa chambre, avec le grand lit ten- se, più che una virtù un atto di sublime generosi- du de velours de Gênes. Nana, suffoquée, eut un tà che nessuno forse avrebbe compiuto e che non petit soupir d’enfant» (É. Zola, Nana, Paris, Char- tutti purtroppo sanno comprendere ed ammirare» pentier, 1880, p. 218). (S. Sighele, Conversazione con Zola e con Nordau, (3) Controcorrente in tal senso Scipio Sighele, «L’Illustrazione italiana», XXVI, 50, 10 dicembre navigato intervistatore di Zola e cultore dell’indagi- 1899, p. 404). ne di matrice positivista, che esalta i toni patriottici

sf177.indb 521 19/12/15 01.04 522 Francesca Bottero

L’après-midi, notre grande course au travers de Rome, pour le premier coup d’œil. Gênes et Aix, les souvenirs qui me reviennent. Beaucoup de grandeur, mais éparse et triste. L’horreur nauséabonde des vieux quartiers. Les linges tendus aux fenêtres, une corde éloignée du mur par un bâton. Des lessives entières, des draps longs qui pendent, des chemises, des linges blancs, puis le bariolage du linge de couleur. L’odeur faite d’huile rance et de misère4.

Di quella nota salta agli occhi il parallelismo tra l’intrico delle strade romane e l’immagine di rimando dei vicoli genovesi a ridosso del porto, dove i panni stesi tra un alto edificio e l’altro si contendono la poca luce filtrante a fatica tra i tetti. È un’oc- chiata non priva di rigetto e curiosità insieme, che lascia intuire quanto l’ambiente dei quartieri poveri di Genova abbia toccato le corde di Zola, studioso attento di quel tipo di umanità difficile e sventurata. A monte del suo viaggio a Roma, sul finire dell’ottobre 1894, sta infatti quella bre- ve scappata oltreconfine avvenuta nel settembre 1892 dopo un tour nel Sud della Fran- cia, dapprima a Lourdes, per prendere visione del portentoso via vai di fedeli in visita ai luoghi dell’apparizione mariana e dell’ingegnoso meccanismo commerciale innescato dagli stessi pellegrinaggi, e poi ad Aix-en-Provence, per collezionare nuovi appunti in vista del capitolo conclusivo della saga dei Rougon-Macquart, Le Docteur Pascal. Genova in origine non rientra tra le mete del suo itinerario estivo, iniziato in Normandia il 7 agosto e terminato a Montecarlo il 6 ottobre 1892, ma già il 18 set- tembre dello stesso anno, sul quotidiano «Le Rappel», erano state formulate alcune ipotesi intorno alla possibilità di un viaggio oltreconfine5, che trovano conferma in una lettera di Zola a Louis Gallet6 del medesimo giorno. Apparentemente, infatti, è su suggerimento della moglie Alexandrine7 – in quel periodo provata dalla scoperta della relazione extraconiugale del marito con Jeanne Rozerot – che i due coniugi si spingono fino in Liguria:

− Ah, sapete, – egli mi disse – è una semplice scorsa che ho fatto fin qui, ma di passata. Mi trovavo a Monaco e m’è parso cosa d’un momento dare una capatina fino a Genova. In- vece, quanto è stato lungo il viaggio! Non finiva mai, con quelle interminabili fermate ad ogni stazioncina e col caldo enorme che faceva in quei compartimenti8.

Di questo viaggio in Italia rimangono, dunque, solo alcuni cenni, per lo più nelle biografie zoliane, mentre si tende a individuare in quello del 1894 il primo appunta- mento ufficiale tra il sommo autore francese e la patria di suo padre Francesco.

(4) É. Zola, Mes voyages. Lourdes. Rome, jour- (5) «M. Zola, venant d’Aix en Provence, a pas- naux inédites présentés et annotés par R. Ternois, sé la journée d’hier a Marseille, d’où il se rendra Paris, Fasquelle, 1958, p. 143. Riproposto nella tra- à Toulon et Nice, peut-être même jusqu’à Gênes» duzione di Silvia Accardi e con una prefazione di (Les on-dit, «Le Rappel», 18 settembre 1892, p. 2). Cesare De Seta, il Diario romano uscì in Italia solo (6) «Nous ne rentrerons que le 7 octobre, nous nel 1994 presso la casa editrice Sugarco ripresentan- allons à Nice et à Gênes» (É. Zola, Correspondan- do l’apparato di note e il saggio di Ternois del 1958; ce. Juin 1890-Septembre 1893. Tome VII, éd. sous nel giugno 2013 è stato ripubblicato (É. Zola, Il mio la direction de B.H. Bakker, conseiller littéraire H. viaggio a Roma, traduzione a cura di S. Accardi, Na- Mitterand, Montréal-Paris, Les Presses de l’Uni- poli, Intra Moenia, 2013) a breve distanza di tempo versité de Montréal-Publications du Centre natio- dalla riedizione del romanzo stesso (É. Zola, Roma, nal de la recherche scientifique, 1989, p. 319). traduzione a cura di E. Trevi, Roma, Bordeaux, (7) «Nous avons parcouru toute la petite Cor- 2012). Lo stesso Ternois approfondì brevemente, niche et nous avons atteint la frontière. Sur les in- tre anni dopo, la vicenda del soggiorno genovese di stances de ma femme, je me décidai à pousser avec Zola in alcuni passaggi del libro Zola et son temps. elle jusqu’à Gênes» (V. Garien, Émile Zola à Mon- Lourdes-Rome-Paris (Paris, Societé Les Belles Let- te-Carlo, «Le Petit Niçois», 5 ottobre 1892, p. 1). tres, 1961), in cui fa riferimento ad alcuni degli ar- (8) P. Guastavino, Un colloquio con Emilio Zola, ticoli pubblicati in Italia – e nello specifico a Geno- «Caffaro», 29 settembre 1892, p. 2. va – durante la permanenza in città dello scrittore.

sf177.indb 522 19/12/15 01.04 Émile Zola a Genova 523

È innanzitutto la curiosità di conoscere il Paese paterno che conduce lo scrittore ad aggiungere una tappa al suo viaggio e sarà questo uno dei principali argomenti sui quali ruoteranno le interviste concesse da Zola ai giornalisti liguri. L’accoglienza riservata, infatti, a quell’uomo giunto in città quasi di soppiatto è sorprendente se rapportata alla eco pressoché nulla che ne ha anticipato l’arrivo in Italia. Émile Zola arriva a Genova, alla stazione di piazza Principe, a mezzogiorno del 27 settembre 1892 e da qui si sposta all’Hotel Isotta, collocato nella centralissima via Roma, per prendervi alloggio. Dopo pranzo si muove in vettura, assecondando la curiosità di dare una prima occhiata alla città, e verso sera rientra in albergo dopo aver prenotato una carrozza per la mattina successiva. Il 28 settembre lo scrittore e sua moglie non solo proseguiranno il loro itinerario turistico, ma saranno ospiti degli organizzatori dell’Esposizione Colombiana al banchetto allestito al ristorante Zola, suo omonimo, nel padiglione Nord della fiera, insieme ai rappresentanti più in vista del bel mondo genovese. In quella giornata, appena dopo colazione, Zola concede la prima intervista a Pietro Guastavino, redattore di «Caffaro»9; la seconda è rilasciata a Silvio Antonio Caligo (in arte Ausonio de Liberi) giornalista del «Se- colo xix»10. Dai dettagli così raccolti nelle notizie che rimbalzano da un quotidiano all’altro, apprendiamo quindi che il soggiorno genovese di Zola si prolungherà fino al 29 settembre, giorno in cui l’autore e la moglie ripartiranno alla volta di Sanre- mo11. A farsi per primo portavoce di un generale benvenuto, è proprio «Caffaro» che, a partire dal 28 settembre 1892, illustra con regolarità i movimenti dello scrittore in città:

Caffaro, a nome suo, a nome della cittadinanza genovese, saluta l’illustre e forte roman- ziere, augurandosi che nella visita alla città nostra, ove si compie di recente un avvenimento storico di grande importanza per le due nazioni Italia e Francia, trovi ispirazione a una nuova opera del suo ingegno che fecondi e faccia rifiorire nel suo paese il germe dell’unione, della fratellanza fra i due popoli12.

(9) La medesima intervista è riproposta il giorno littéraire H. Mitterand, Montréal-Paris, Presses de successivo sulla prima pagina del «Corriere della l’Université de Montréal-CNRS, 1995, p. 489), per Sera» (Sangiorgio, Emilio Zola intervistato da un sottoporgli la lettura di un testo in versi ispirato alla corripondente del “Corriere della Sera”, «Corrie- scena dello spettacolo di marionette, a cui assiste re della Sera», 29-30 settembre 1892, pp. 1-2) e un gruppo di bambini all’inizio del quarto capitolo sarà l’unica citata da Gian Carlo Menichelli nella di Une page d’amour. La poesia, intitolata Mario- bibliografia degli scritti italiani su Zola (G.C. Me- nette, fu poi inserita nella raccolta Parva accompa- nichelli, Bibliographie de Zola en Italie, Florence, gnata da una breve nota: «Dalla Page d’Amour di Institut Français de Florence, 1960, p. 75). È assai Zola» (P. Guastavino, Parva, Genova, Stabilimento probabile che sotto lo pseudonimo di Sangiorgio Tipografico F.lli Verardo, 1882, pp. 33-36, conser- si celasse lo stesso Guastavino, il quale per un lun- vato nel Fondo antichi e manoscritti della Bibliote- go periodo era stato corrispondente da Genova ca Civica Berio di Genova). per il noto quotidiano milanese: «Ricordo che i (10) [A.] d[e]. L.[iberi], [S.A. Caligo], Un’in- colleghi mi raccontavano che [Pietro Guastavino] tervista con Emilio Zola, «Il Secolo xix», 29-30 nel 1892 all’epoca dell’Esposizione Colombiana a settembre 1892, p. 3. Genova nell’occasione del ricevimento dei sovrani (11) È forse una svista dovuta alla stanchezza di nel Castello di Edilio Raggio a Cornigliano Ligure, cui Zola si lamenta nella lettera da Genova a Nu- essendo corrispondente del “Corriere della Sera” ma Coste, quella che gli fa datare il foglio, in cui mandò a questo giornale per telegrafo […] tutto racconta della serata del banchetto, al 27 settembre il resoconto della festa» (E. Arvigo, Anch’io ho 1892 (É. Zola, Correspondance. Juin 1890-Septem- qualche cosa da dire…, in Caffaro a ricordo del suo bre 1893. Tome VII cit., pp. 320-321). Dalla consul- 50° anno 1875-1924, Genova, Stabilimento Grafico tazione di periodici locali e non risulta infatti che la Editoriale, 1924, p. 20). Pietro Guastavino aveva cena si sia svolta la sera di mercoledì 28 settembre già contattato Zola sul finire del 1881 (É. Zola, 1892. Correspondance 1890-1902. Tome X Supplément, (12) Emilio Zola a Genova, «Caffaro», 28 settem- éditée sous la direction de B.H. Bakker, conseiller bre 1892, p. 3.

sf177.indb 523 19/12/15 01.04 524 Francesca Bottero

L’Esposizione Colombiana del 1892, allestita in occasione del 400° anno dalla scoperta dell’America, era stata inaugurata il 10 luglio e aveva suscitato l’attenzione dei mezzi di comunicazione italiani e stranieri, attraverso la partecipazione di imprese europee e americane. Nelle sfilate delle squadre militari internazionali, e in particolar modo in quella della flotta francese, si era voluto vedere, inoltre, un segno di rinno- vata stima e cortesia tra le due nazioni13. Lo stesso Zola, nel primo dei suoi colloqui genovesi, non si sottrae dall’esprimere un parere concorde sulla valenza di questa cir- costanza14: lo scrittore di fatto non crede alla plausibilità di un’allenza tra Italia e Ger- mania e ritiene che proprio la riunione di queste due squadre nel porto di Genova, sia un segno della pacificazione in corso fra i due stati; come figlio di un italiano questo breve viaggio gli darà modo di percepire intimamente il legame con la terra paterna:

Io vengo in Italia perché spinto dal grande affetto che sento per questa vostra terra che è stata, si può dire, la continua aspirazione artistica della mia vita. Avevo sett’anni quando morì mio padre; ma s’egli fosse vissuto, avrei certo avuto maggiore occasione di recarmi qui, nel dolce paese del sole. Ho conservato viva e costante l’intenzione di venire in Italia, di recarmi nel paese di mio padre ove esistono miei parenti che non conosco neppure, ma le preoccupa- zioni della vita, i miei studi, il lavoro assiduo a cui mi sono dedicato, m’hanno impedito finora di mettere in opera questo mio desiderio. […] Io non parlo l’italiano, ma lo leggo e lo capisco perfettamente; questo prova che nelle mie vene scorre metà di sangue italiano e metà di sangue francese, e che nel mio cuore non vi può essere che viva la fiamma dell’affetto per l’Italia15.

Alcuni quotidiani francesi sottolineano la simpatia di Zola per l’Italia in maniera evidentemente ambigua16, se lo scrittore si premura di rimarcare in tre distinte occa- sioni – prima su «L’Éclaireur de Nice»17, poi su «Le Journal»18 e infine su «L’Écho de Paris»19 – le esatte parole pronunciate al banchetto serale del 28 settembre durante il brindisi in onore delle due nazioni. Le sue precisazioni non mancheranno di sollevare

(13) «Si le roi d’Italie va à Gênes, à présent ou plus (17) «Si vous parlez de mon discours, me fait tard, en août ou en septembre, il semble certain que observer le maître, rétablissez exactement ce que l’escadre française ira. Elle ira rendre une politesse, j’ai dit. On a mis dans ma bouche des paroles payer une dette de courtoisie que nous avons con- que je n’ais pas prononcées. On m’a fait boire à tractée, il y a deux ans, et dont il n’a pas tenu qu’à l’Italie, ce n’est pas exact. J’ai remercié le comité nous de nous acquitter bien plus tôt. […] C’est ce et j’ai dit qu’en foulant pour la première fois le sol que l’escadre française est prête à aller faire à Gênes, de l’Italie, je m’étais senti profondément ému; j’ai si le roi d’Italie y va. Gênes ou la Spezia, peu impor- terminé en ces termes: “Comme Français, comme te. Peu importe le lieu comme peu importe la date. fils d’Italien, je bois à la bonne union, à la bonne L’essentiel est que l’un des deux pays ne demeure pas amitié de la France et de l’Italie!”» (A. Woisard, en retarde sur l’autre, dans cet échange de civilités, Une interview de M. Zola, «L’Éclaireur de Nice», 4 dans ce mutuel témoignage de respect et d’estime» ottobre 1892, p. 1). (Bullettin du jour, «Le Temps», 26 luglio 1892, p. 1). (18) «Je vous serais reconnaissant d’en parler (14) Su questo punto si sono soffermati sia René dans votre interview, pour retablir les faits, qui ont Ternois (Zola et son temps. Lourdes-Rome-Paris cit., été plus ou moins dénaturés par les journaux. Voici pp. 246-249) che Henri Mitterand nel secondo exactement ce qui s’est passé: […] Un banquet eut dei tre tomi della biografia zoliana (Zola. L’hom- lieu, le soir même. Plusieurs toasts me furent por- me de Germinal 1871-1893, Paris, Fayard, 2001, tés, auxquels je répondis de mon mieux, n’étant pas pp. 1095-1098). orateur. Je me bornai à remercier mes convives et (15) P. Guastavino, Un colloquio con Emilio Zola à boire à la bonne union de la France et de l’Ita- cit., p. 2. lie» (P. Brulat, Un entretien avec émile Zola, «Le (16) «Le comité de l’exposition a offert un ban- Journal», 10 ottobre 1892, p. 2). quet, hier soir, en l’honneur de M. Zola, de passage (19) «On a dit que, dans un toast, j’avais bu à à Gênes. Au dessert, M. Zola a remercié le comité l’Italie. Ce n’est pas tout à fait exact. Je vous serais et a exprimé ses sympathies pour l’Italie» (Der- obligé de retablir mes paroles, don’t voici le texte nières nouvelles, «Le Temps», 30 settembre 1892, precis: “Comme Français, comme fils d’Italien, je p. 4). Questa notizia, apparsa lo stesso giorno an- bois à la bonne amitié et à la bonne union de la che su «Le Journal», l’indomani verrà riportata si- France et de l’Italie”» (G. Stiegler, Les projets de stematicamente da «Le xixe Siècle» e da «Gil Blas» Zola, «L’Écho de Paris», 11 ottobre 1892, p. 3). e il 2 ottobre 1892 da «Le Petit Parisien».

sf177.indb 524 19/12/15 01.04 Émile Zola a Genova 525

il disappunto di alcuni giornali locali, tra cui il «Secolo xix», e la notizia di uno Zola apparentemente “ingrato” verrà ripresa anche dal «Colombo»20, periodico ufficiale dell’Esposizione: A quel che pare, Zola ci tiene a far dire e a far sapere che è inexact che egli Comme français, comme fils d’italien abbia bu à l’Italie! e ci tiene talmente a far sapere che non ha bu a l’Italie che il Petit Marseillais di stamani riproduce per esteso la notizia21! Zola non ha bevuto all’Italia, ma sì all’unione dell’Italia con la Francia. La distinzione ci appare abbastanza cavil- losa, ma poco… naturalista22.

In realtà deve trattarsi più che altro di porre un freno a un’ondata di giudizi tendenziosi messi in circolazione all’uscita della Débâcle, a causa della dissacrante rappresentazione dell’esercito francese a Sedan fatta nel libro. Si accoda a questa scia la lettera dell’ufficiale bavarese Tanera apparsa il 19 settembre 1892 sulla prima pagina del «Figaro»23, che costringe lo scrittore a rimarcare i suoi propositi intorno alla stesura dell’opera: Questi critici dell’ultima ora mi accusano di poco sentimento pietoso, e soprattutto, d’a- ver fatto fare magra figura ai generali e all’esercito francese. Nella Débâcle tutto quanto ri- guarda fatti militari e descrizioni relative è pura storia. Non potevo prendermi il gusto di fare dell’invenzione laddove mi trovavo sottomano tanto materiale da compilarne dieci romanzi. Io attinsi tutte le mie notizie dai rapporti dello Stato Maggiore prussiano e dalla farraggine di pubblicazioni che uscirono dopo la guerra, in difesa dei generali francesi accusati fieramente e acerbissimamente. […] In quanto a quell’ufficiale tedesco che mi rimprovera d’aver sminuito il valore e la forza dell’esercito francese, ognuno vede quanto siano tendenziose le sue ragioni, e quanto prema naturalmente agli ufficiali prussiani ingrossare le cose dal lato contrario24.

In effetti, come appare dalla variegata accoglienza riservata alla Débâcle, anche in Italia non vengono meno i detrattori dei suoi testi25, in particolar modo in ambito cattolico, dove si è prestata una specifica attenzione alla visita dell’illustre scrittore a Lourdes. Ne è un esempio il trafiletto con il quale «L’Eco d’Italia» – quotidiano uf- ficiale genovese per l’opera dei congressi cattolici in Liguria – si sofferma sull’arrivo di Zola a Genova: Giacché ieri facemmo un cenno della presenza in Genova del troppo famoso romanziere Zola, aggiungeremo per la cronaca, che ieri sera gli fu offerto un banchetto […]. Si fecero i consueti brindisi e si dice che Zola si dimostrò entusiasta di Genova. E si capisce. I giornali intanto fanno al Zola e al suo pessimo sistema letterario una grande reclame. […] Se è vero in-

(20) La riconoscenza di Zola, «Colombo», I, 12, opuscolo del teologo Fino intitolato Il romanzo 12-13 ottobre 1892, p. 3. sperimentale [a proposito dell’“Argent” di é. Zola. (21) Le retour de M. Zola, «Le Petit Marseillais», Appunti critici] e stampato in Torino dalla Tipogra- 4 ottobre 1892, p. 3. In realtà il «Petit Marseillais» fia Artale. Fra le altre cose ivi è detto che, digiuno riprende pressoché fedelmente alcune confidenze di forti studi e di soda cultura, lo Zola s’impancò a di Antoine Woisard, autore dell’intervista pubbli- voler fare il letterato e sbagliò vocazione!! In via di cata il medesimo giorno su «L’Éclaireur de Nice». benigna concessione però […] gli si accorda una (22) Zola e l’Italia, «Il Secolo xix», 6-7 ottobre dose energica di coraggio!!! A me pare che si ri- 1892, p. 2. chieda un bel coraggio invero non nel combatte- (23) La Débâcle jugée par un officier allemand, re la tendenza zoliana e la scuola naturalista, ma «Le Figaro», 19 settembre 1892, p. 1. Zola rispose nell’ostinarsi a non riconoscere nello Zola un inge- al suo rientro a Parigi con un articolo dal titolo Re- gno vigoroso ed un artista insigne» (G. Depanis, La tour de voyage («Le Figaro», 10 ottobre 1892, p. 1). Guerra franco-prussiana ed Emilio Zola, «Gazzetta (24) P. Guastavino, Un colloquio con Emilio Zola Letteraria», XVI, 28, 9 luglio 1892, p. 218). La nota cit., p. 2. in questione scatenò l’immediata replica di Gio- (25) «Ma è realmente artista lo Zola? La do- condo Fino cui seguì, nel numero successivo della manda non sembrerà arrischiata se si bada ad un rivista, un botta e risposta con Depanis.

sf177.indb 525 19/12/15 01.04 526 Francesca Bottero

fatti quel che gli si fa dire, egli, a proposito di Lourdes, avrebbe detto roba da chiodi, secondo il costume anticlericale, dei cattolici e della nostra Religione. Noi lo compiangiamo. Bisogna essere però ben ostinati e ben ciechi per non credere dopo aver visto i miracoli26.

Le domande intorno al nuovo viaggio dell’autore tra i pellegrini e ai suoi inten- dimenti in merito si succedono a raffica da un’intervista all’altra, sia in Italia che Ol- tralpe; l’argomento religioso, l’ipotesi di un libro che racchiuda le impressioni sopra Lourdes, le indagini di un naturalista nei luoghi del miracolo stuzzicano l’appetito dei giornalisti curiosi e di fatto il progetto del ciclo delle tre città è un prodotto del soggiorno genovese27: A Lourdes, io sono stato molto frastornato nell’opera mia di osservazione e di studio, da tutte quelle voci dei giornali che mi facevano dire e ridire, che mi facevano ora un convertito, ora uno scettico indurito nell’ateismo. […] Il Docteur Pascal è l’ultimo volume della serie dei Rougon Macquart, il ventesimo; ma, in realtà, è il primo di una triade di romanzi in cui svol- gerò lo studio completo del sentimento religioso di questa fin de siècle. […] Poco fa vi dissi che sarei ritornato in Italia senza alcun progetto letterario. Ebbene, dico a voi quello che finora non avevo confidato a nessuno, neppure agli intimi di casa mia. Il progetto vago, indistinto, l’ho già in mente e ne vado, a poco a poco, costituendo nel mio cervello le linee grandiose. Dopo il Docteur Pascal, con la scena a Lourdes […] verrò in Italia e mi stabilirò a Roma per iscrivere un libro sull’eterna città, con le scene religiose del presente. E un terzo libro scriverò in seguito, sempre su questo argomento […] con a teatro un’altra famosa città di cui non posso dire il nome per ora28.

Pare dunque che il Docteur Pascal dovesse fungere non solo da conclusione alla celebre saga dei Rougon-Macquart, ma anche da anello di congiunzione con la trilo- gia successiva di argomento religioso, di cui avrebbe rappresentato il primo dei tre volumi; tuttavia durante la tappa successiva del suo itinerario ligure, la città di San- remo, in cui soggiorna sulla via del ritorno verso la Francia tra il 29 e il 30 settembre 1892, Zola si esprime diversamente: Il grande romanziere manifestò i suoi intendimenti letterari. Egli ritorna a Parigi per terminare il Docteur Pascal col quale chiude la serie dei Rougon Macquart. Questo romanzo, contrariamente a quello che fu scritto da altri giornali, non ha alcuna relazione coi pellegri- naggi a Lourdes, ma è un lavoro intimo nel genere della Faute de l’abbé Mouret o della Page d’Amour29.

(26) Per la cronaca, «L’Eco d’Italia», 29-30 set- americani d’Italia: essi formano una popolazione tembre 1892, p. 3. Il giornale, rifacendosi alle fon- laboriosa; e chi lavora, certe malattie dell’anima, ti francesi, dedicò ampio spazio al soggiorno di le ignora completamente» (La Bocca di Marmo Zola a Lourdes e polemizzò contro lo scetticismo [A. Niceforo], Corriere di Roma. Un’intervista con dell’autore (cfr. [G.C.] Cece, Zola a Lourdes, «L’E- Emilio Zola, «Il Secolo xix», 6-7 novembre 1894, co d’Italia. La domenica», 28 agosto 1892, p. 1; V., pp. 1-2). Corriere francese, «L’Eco d’Italia», 29-30 agosto (28) P. Guastavino, Un colloquio con Emilio Zola 1892, pp. 2-3; Un nuovo libro di Zola, «L’Eco d’Ita- cit., p. 2. lia», 1-2 settembre 1892, p. 2; V., Corriere francese, (29) Emilio Zola a Sanremo, «Il Pensiero di «L’Eco d’Italia», 5-6 settembre 1892, p. 2; [G.C.] Sanremo», V, 40, 2 ottobre 1892, p. 1. Nell’inter- Cece, Un taccon che non tacca, «L’Eco d’Italia. La vista con Antoine Woisard Zola cita i tre giornali domenica», 25 settembre 1892, p. 1). che hanno raccolto le sue confidenze durante il (27) «E ricordandosi Zola, ch’io ero corrispon- soggiorno in Liguria, oltre «Caffaro» e il «Secolo dente letterario d’un giornale genovese, mi doman- XIX», viene menzionato il «Pensiero di Genova»: dò – E a Genova s’interessano molto al problema in realtà questo quotidiano non esiste, esiste bensì religioso? – Non lo credo: a Genova, gli animi il suo corrispettivo sanremese sul quale vengono non hanno tempo di occuparsi soverchiamente del raccolte le tracce del passaggio di Zola nella Riviera grave problema. I genovesi sono gli inglesi, i nord- di Ponente.

sf177.indb 526 19/12/15 01.04 Émile Zola a Genova 527

È la permanenza a Genova, e forse anche la calda accoglienza italiana dimostrata la sera del banchetto tenuto in suo onore, a solleticare la propria immaginazione nel proposito di scrivere un libro che parli di pace:

M. Boselli30, entre autres, député au Parlement italien et ancien ministre de l’instruction publique, s’exprima avec éloquence. Il parla noblement de la paix entre enfants de la même race et du besoin qu’on avait de renouveler, d’affermir l’ancien pacte d’amitié. Pendant que M. Boselli parlait, j’étendais ses paroles, je les appliquais à une œuvre plus profonde et plus vaste encore […]. Déjà, l’idée m’était venue d’achever mon œuvre projetée par un troisième et der- nier roman se déroulant en pleine vie intellectuelle de Paris. Mais, dans ce pays étranger et en présense de l’hommage tout spontané rendu à ma patrie, cette idée prit corps et se consolida. […] C’est ainsi, continua Émile Zola, que je fus amené pour la première fois, au banquet de Gênes, à parler de ma trilogie et à rapprocher ces trois noms: Lourdes, Rome, Paris31.

Zola è sinceramente commosso e colpito da questa maniera così festosamente italiana di riceverlo: poco importa che non abbia un cambio per la sera e si presenti col medesimo abito del viaggio, sin dal suo arrivo in stazione, la città si mobilita per fargli sentire il proprio calore32. Più che altro si trova spiazzato da quella clamorosa considerazione a livello letterario, che stenta a essergli riconosciuta negli ambienti accademici francesi33. Il rapporto di amicizia instaurato nel tempo con gli intellettuali italiani è il punto di partenza per un dialogo più accurato sulla situazione letteraria del nostro Paese, incentrato, principalmente, sui corrispondenti dalla Francia, che hanno contribuito lar- gamente a divulgare l’opera dello scrittore in Italia. Zola menziona innanzitutto Jacopo Caponi, l’inviato di «Perseveranza» e del «Fanfulla», che si è curato delle traduzio- ni italiane dei suoi romanzi, e Attilio Luzzatto, il direttore di «Tribuna giornale a cui conced[e] ordinariamente la riproduzione dei [suoi] lavori»34: il Caponi, nei Ricordi di Folchetto35, dove un intero capitolo è dedicato a Zola e dreyfusismo, annoterà di aver accompagnato la signora Luzzatto alla villa di Médan e, durante il soggiorno romano del 1894, di aver ricevuto in custodia dalle mani dello scrittore francese due lettere destinate alla ricerca dei suoi parenti italiani. In questo circolo di conoscenze maturate tra una conversazione e l’altra, spuntano anche il nome di Luigi Gualdo, considerato in Patria un mediatore tra la cultura francese e quella italiana e molto apprezzato Oltralpe

(30) Paolo Boselli, all’epoca ex Ministro della (31) V. Garien, Émile Zola à Monte-Carlo cit., p. 1. pubblica istruzione e deputato di centro-destra del (32) «On me port huit toasts, entre autres celui- Regno d’Italia per il collegio di Savona, era stato nel ci qui me touche profondément: “Comme nous 1867 segretario generale della commissione italiana venons d’honorer la marine française en saluant all’Esposizione Universale di Parigi e fu inviato in sa flotte dans notre port, nous saluons aujourd’hui diverse occasioni a trattare con le autorità france- en vous la littérature française”. Madame Zola en si i termini del trattato sul commercio tra Italia e avrait les larmes aux yeux» (G. Stiegler, Les projets Francia. Quando tornò in Italia nel 1894, Zola fece de Zola cit., p. 3). in modo di incontrare nuovamente Boselli, diventa- (33) «Cepedant je reviens de Gênes ou j’ai pas- to nel mentre Ministro delle finanze: «Oggi Emilio sé quelques jours dans la plus cordiale intimité avec Zola fu ricevuto in udienza dal Ministro Ferraris: quelques hommes qui peuvent se flatter de connaî- e più tardi, come aveva promesso, si recò dall’on. tre et même de représenter pour une grande part Boselli, ch’egli conobbe a Genova, all’epoca dell’e- l’opinion publique en Italie; et je ne me suis pas sposizione colombiana. I due illustri personaggi aperçu que mes œuvres ni mon nom fussent un ob- parlarono a lungo delle condizioni generali di Ro- jet de réprobation de l’autre côté des Apennins» (V. ma. […] A me risulta […] che il grande scrittore, Garien, Émile Zola à Monte-Carlo cit., p. 1). nel suo colloquio con l’on. Boselli, si mostrò assai (34) P. Guastavino, Un colloquio con Emilio Zola soddisfatto e contento del suo viaggio a Roma, che cit., p. 2. è destinata, secondo lui, a un avvenire degno del (35) [J. Caponi], Ricordi di Folchetto, Torino, So- suo nome e della sua storia» (Emilio Zola, «Il Seco- cietà Tipografico-Editrice Nazionale, 1908. lo xix», 1-2 dicembre 1894, p. 1).

sf177.indb 527 19/12/15 01.04 528 Francesca Bottero

per i suoi romanzi in lingua36, e quello di Felice Cameroni, ricordato da Silvio Antonio Caligo come «il critico valente e modestissimo, apprezzato dai buoni e dagli onesti, ed ignoto – forse – a tutti i mestieranti (e quanti sono!) della nostra letteratura»37. Durante l’intervista con Victor Garien per il «Petit Niçois» – senza dubbio una delle più riuscite e meno ripetitive fra le tante che si accavallano nel periodo tra il 27 settembre e l’11 ottobre 1892 – affiorano evidenti le tracce dell’amichevole rapporto tra il maestro e il giornalista del «Sole», autodefinitosi zoliste à jet continu: − Tenez, me dit-il, puisque nous parlons de l’Italie, j’ai là-bas quelques amis. Voyons si l’un d’eux me témoigne qu’il se souvient de moi!… Et sa main, feuilletant un grand nombre de missives qui portaient le timbre vert à l’effigie du roi Humbert I, tomba sur une lettre dont ses yeux connaissaient bien l’écriture. Il la prit, l’ouvrit et, après l’avoir lue, me la tendit en sou- riant. Elle était du docteur Felice Cameroni et conçue dans les termes siuvants, que je traduis de mémoire avec le plus de fidélité possible: Milan, le 29 septembre. A quelque chose bonheur est mauvais (ces mots sont en français dans le texte). Très cher revenant de Gênes, cherchez à oublier la triplice noia (le triple ennui) des entrevues journalis- tiques et des toasts portés à votre célébrité universelle pour ne vous rappeler que d’un chose: c’est qu’au delà des Alpes on vous estime et on vous aime. Avec sa vieille amitié de près de vingt ans, et plus ours que jamais, Cameroni renouvelle ses meilleurs augures de cordialité au Docteur Pascal 38.

Associato al nome di Cameroni, quello di Francesco De Sanctis, colui che «contribuì tanto a fare apprezzare nel mondo letterario italiano le opere [di Zo- la]»39: fu infatti una conferenza dal titolo Zola e l’Assommoir, tenuta al Circolo filologico di Napoli il 15 giugno 1879, unita a una serie di articoli comparsi nel 1877 sul periodico napoletano «Roma» e confluiti poi nella seconda ristampa dei Nuovi saggi critici (1879) con il nome di Studio sopra Emilio Zola, a spingere lo scrittore francese a ringraziarlo per l’attenzione rivolta ai suoi lavori e per l’entusiasmo de- stato in Italia nei suoi confronti40 e, nel 1893, a dieci anni dalla sua scomparsa, a ri- cordarlo come uno dei primi critici realmente capaci di interpretare il suo modo di fare letteratura: «À cette époque, en France, rien n’avait paru sur mes livres d’aussi net et d’aussi large. Et c’est pourquoi j’ai gardé à la mémoire de De Sanctis une très grande reconnaissance»41. All’interno del panorama letterario italiano, Zola non dimentica Matilde Serao, condirettrice del «Mattino» di Napoli insieme al marito Edoardo Scarfoglio42, Giosuè

(36) Ne è un esempio il ricordo che ne fa «Le la (Cameroni e Zola. Lettere, a cura di P. Tortonese, Gaulois» a due giorni dalla sua scomparsa: «C’est Paris-Genève, Champion-Slatkine, 1987). en français qu’il a écrit deux de ses œuvres les plus (39) Emilio Zola a Sanremo cit., p. 1. réputées: Une Ressemblance et Un Mariage excen- (40) É. Zola, Correspondance. Juin 1877- trique. Et à ce propos il est à remarquer que les Ita- Mai 1880. Tome III, éditée sous la direction de liens ont un don particulier pour s’assimiler notre B.H. Bakker, conseiller littéraire H. Mitte- langue au point que le lecteur puisse malaisément rand, Montréal-Paris, Les Presses de l’Université démêler leur origine. […] Gualdo […] écrivait le de Montréal-Publications du Centre national de la français avec assez d’aisance pour qu’aucun des recherche scientifique, 1982, p. 358. nôtres ne pût s’imaginer qu’il ne fût pas un com- (41) É. Zola, Correspondance. Juin 1890-Septem- patriote» (Un Domino, Billet du soir, «Le Gaulois», bre 1893. Tome VII cit., p. 399. 17 maggio 1898, p. 1). (42) «Sono io che ebbi l’onore e il piacere di pre- (37) [A.] d[e]. L.[iberi], [S.A. Caligo], Un’in- sentarla al pubblico intellettuale francese, quando tervista con Emilio Zola cit., p. 3. nel 1884 il Figaro mi chiese di riunire in un suo (38) V. Garien, émile Zola à Monte-Carlo cit., p. 1. numero unico in occasione dell’Esposizione di To- La lettera qui riportata – e tradotta da Garien in fran- rino. Io feci appello allora ai più rinomati scrittori cese – è inedita e non compare nel testo che racchiude d’Italia e anche ad alcuni artisti per collaborare coi la corrispondenza del giornalista milanese con Zo- loro schizzi a questo supplemento del Figaro. […]

sf177.indb 528 19/12/15 01.04 Émile Zola a Genova 529

Carducci, poeta assai celebre all’epoca43, e il piccolo gruppo del verismo italiano, quei Giuseppe Giacosa, Luigi Capuana e Giovanni Verga, con i quali è da tempo in contatto e di cui segue l’attività, dentro e fuori l’Italia, grazie anche alla mediazione dello stesso Gualdo: «Mi disse eziandio come egli creda prossima la rappresenta- zione a Parigi, d’una riduzione dei Tristi amori di Giuseppe Giacosa, che dovrebbe avere il titolo La Provinciale»44. Fu proprio Luigi Gualdo che nel 1888 si adoperò per promuovere la rappresentazione del rifacimento francese di Cavalleria rusticana, del quale lo stesso Zola non si dimostrò particolarmente convinto, senza riscuotere però quel successo che connotò l’opera teatrale dopo l’intervento di Pietro Mascagni. È di questa versione – motivo di una lunga causa tra Verga e il musicista livornese insieme con la casa editrice Sonzogno – che Zola parla «con entusiasmo»45, aggiungendo di aver ricevuto di recente la visita dell’autore siciliano46. Il pensiero del teatro rimanda alla mente l’adattamento per le scene italiane di Thérèse Raquin, del quale chiede notizie a Caligo: «Emilio Zola mi si dimostrò am- miratore sincero di molti ingegni italiani, e si informò con piacere delle migliori in- terpreti italiane di Teresa Raquin, della quale non gli riuscirono dimenticati i modesti ma energici giudizi del vostro critico drammatico»47. Zola, mostrando così di tenersi

[Ebbi] l’onore anche di vedere i suoi romanzi ac- des allusion à des amis communs, Verga, Coppée, colti dall’austera e difficile Revue des deux mondes» Placci et d’autres, le sujets que Gualdo aborde ([J. Caponi], Ricordi di Folchetto cit., pp. 355-356). dans ses lettres antre 1890 et 93» (P. de Montera, Il numero di «Le Figaro. Supplément littéraire du Luigi Gualdo 1844-1898. Son milieu et ses amitiés dimanche» al quale Caponi fa riferimento è quel- milanaises et parisiennes. Lettres inédites à François lo del 25 giugno 1884 che accoglie in prima pagi- Coppée. Pages oubliées, Roma, Edizioni di Storia e na – insieme ad altri pezzi di Emilio Pinchia, Giu- Letteratura, 1983, pp. 112-113). seppe Giacosa, Luigi Gualdo, Filippo Filippi e Ce- (45) Ibid. sare Cantù – un brano della scrittrice napoletana, (46) «Ho avuto recentemente la visita del vostro qui paragonata a George Sand, dal titolo Délivran- Verga, l’autore di Cavalleria rusticana; abbiamo ce. Per esigenze di spazio un semisconosciuto Gio- pranzato assieme e passai con lui delle ore piace- vanni Verga venne inserito nel numero successivo volissime» (P. Guastavino, Un colloquio con Emilio (G. Verga, Petit monde, «Le Figaro. Supplément Zola cit., p. 2). Il rapporto tra Giovanni Verga ed littéraire du dimanche», X, 27, 5 luglio 1884, p. 1). Émile Zola non consiste soltanto in uno scambio (43) «Sarò lietissimo il giorno in cui potrò strin- di lettere e di idee intorno all’arte del romanzo: ci gere la mano al vostro forte poeta, il Carducci» (P. sono alcuni evidenti richiami all’opera dell’autore Guastavino, Un colloquio con Emilio Zola cit., p. 2). siciliano in diversi capitoli dell’epopea zoliana dei Émile Zola forse non sapeva quali fossero le idee del Rougon-Macquart, segno di un’attenta lettura dei poeta circa il metodo sperimentale: «Che cosa di testi verghiani più noti (W. Joyce ed E. Mahler più essenzialmente falso del teatro! […] Nessuno Schächter, Giovanni Verga and Émile Zola: a que- ha dimostrato meglio del signor Zola questo che io stion of influence, «Journal of European Studies», avvento con rapide parole. Ma nessuno ha più torto VII, 28, dicembre 1977, pp. 266-277). Quanto, del signor Zola, quando dopo una tale dimostrazione invece, ai loro incontri ne vengono attestati ufficial- crede di rimediare a tutto col dramma sperimentale. mente soltanto due: il primo a Médan nel giugno Fra gli altri cataplasmi del secolo decimonono non 1882 e il successivo a Roma nel 1895, in occasione ci mancava proprio altro che cotesto! Ma non vede del secondo soggiorno di Zola in Italia. Il critico il brav’uomo, non sente, che è un’arte che muore in Romano Luperini parla di un altro viaggio di Verga una civiltà che finisce?» (G. Carducci, In aspettazio- a Parigi in occasione dell’Esposizione Universale ne d’una recita di Sara Bernhardt, «Don Chisciotte», del 1889 (R. Luperini, Verga, Roma-Bari, Laterza, 7 marzo 1882, poi in Opere. Prose, I, a cura di E. 1975, p. 4), ma non è stato possibile ritrovare alcun Giammattei, Milano-Napoli, Riccardo Ricciardi riferimento a un’ulteriore visita di Verga a Zola. Editore, 2011, pp. 433-435). (47) [A.] d[e]. L.[iberi], [S.A. Caligo], Un’in- (44) [A.] d[e]. L.[iberi], [S.A. Caligo], Un’in- tervista con Emilio Zola cit., p. 3. Il critico teatrale tervista con Emilio Zola cit., p. 3. «Message porté à milanese Filippo Filippi, all’uscita del volume zolia- Paul Souchon, agent général de la Société des Au- no Théâtre, raccolta delle sue pièces per il palcosce- teurs, que Giacosa représente, de son côté, à Mi- nico, aveva stroncato l’attività teatrale dell’autore lan; mariage inattendu de Paul Bourget; déjeuner francese – e in particolare Le Bouton de rose, Les avec Zola, Bruneau et Gallet “les trois auteurs du héritiers Rabourdin e Thérèse Raquin – con un arti- Rêve”; […] achat du texte de la dernière comédie colo dal titolo Il teatro di Zola apparso sul «Corrie- de Paul Alexis devenu le collaborateur de Giacosa re della Sera» del 2 dicembre 1878. Questo e altri pour La Provinciale, cette mauvaise adaptation des pezzi con cui Felice Cameroni replicò a Filippi sulle Tristi Amori – tels sont, pour ne rien dire de rapi- pagine di «Arte drammatica», furono inviati dall’a-

sf177.indb 529 19/12/15 01.04 530 Francesca Bottero

al corrente delle sorti dei suoi lavori teatrali, fa un breve accenno a Giacinta Pezza- na, moglie separata di Luigi Gualtieri – letterato di origine romagnola citato fra gli ospiti del banchetto sanremese insieme al medico Antonio Vio Bonato48 – e acclamata interprete, con una giovane Eleonora Duse, alla prima italiana di Thérèse Raquin, rappresentata nel luglio 1879 al Teatro dei Fiorentini di Napoli: «Emilio Zola ricordò al professore Gualtieri come la signora Gualtieri-Pezzana sia stata la prima e certo la più potente interprete in Italia della sua Thérèse Raquin»49. Non può mancare, infine, nel novero dei suoi ricordi, la figura di Edmondo De Amicis e non è un caso che buona parte dei nomi evocati da Zola siano già stati fatti nel corso degli incontri avvenuti tra i due nel 1878 e nel 1880, da cui scaturirono rispettivamente i Ricordi di Parigi50 e i Ritratti letterari51; Zola può esprimere «un lu- singhiero giudizio»52 su De Amicis, scrittore assai noto in Francia per aver contribuito a sdoganare, attraverso quelle lunghe conversazioni, l’immagine di un intellettuale estremamente attento nel divulgare le proprie idee dalle pagine di giornali e riviste: «Nous sommes ici, sur la frontière, bien placés pour nous en apercevoir. Hier encore, je relisais l’admirable panégyrique que trace de vous, dans son livre Ritratti letterari, et avec cette langue si chaude et si colorée qui lui est propre, l’écrivain qui s’appelle Edmondo de Amicis»53. È questo un fenomeno che nel corso degli anni assumerà proporzioni enormi e che lo scrittore francese non mancherà di analizzare di lì a pochi mesi in una “intervi- sta sull’intervista” concessa ad Henry Leyret del «Figaro»54, nella quale torna a men- zionare l’episodio dei guaiti dei piccoli cagnetti scambiati da De Amicis per gridolini di bimbi, durante il suo primo incontro in casa Zola55.

mico a Zola nel dicembre 1878 (Cameroni e Zola. 1880, ritornò sull’episodio anche dopo la morte Lettere cit., pp. 68-70). dello scrittore francese, quando ne tracciò un breve (48) «La conversazione fu animatissima vicino a ritratto a distanza di pochi giorni dalla sua scom- Zola ed alla sua signora. Il dottor Bonato, che visse parsa: «Ritorno alla mia prima visita, del 1878, per a Parigi molti anni e fino a pochi giorni or sono, aggiungere un ricordo, che per molti anni mi fece frequentando la casa dell’editore Charpentier ave- sorridere, ma che ora mi commove. Mi condusse va avuto occasione di conoscervi lo Zola, e quindi da lui Alessandro Parodi […] il quale, prima della vennero in campo ricordi comuni della vita parigi- presentazione, domandato da me se lo Zola aves- na» (Emilio Zola a Sanremo cit., p. 1). Antonio Vio se figliuoli, mi rispose (sbagliando forse col Dau- Bonato faceva parte della colonia italiana a Parigi e, det): – Sì, due bambini. – Fondandomi su questo, come risulta dal «Journal de médecine et de chirur- quando scrissi la relazione della mia visita, per chiu- gie pratique» del 1872, esercitava la sua professione dere poeticamente l’articolo, dissi d’aver udito dal presso l’ambulatorio del Théâtre-Italien. salotto, mentre m’accommiatavo dal mio illustre (49) Ibid. ospite, il vocio allegro dei suoi due piccoli rampolli. (50) E. De Amicis, Emilio Zola, «L’Illustrazione Ma lo Zola non aveva figlioli, e dopo aver letto il italiana», V, 44, 3 novembre 1878, pp. 275, 278-279 mio scritto, quando rivide il Parodi, gli disse scher- e 282 [1ª parte], e 45, 10 novembre 1878, pp. 291 e zando: – Quel buon D. ha tanta tenerezza paterna 294-295 [2ª parte], poi in Ricordi di Parigi, Milano, nel cuore che regala dei bambini anche ai coniugi Treves, 1879, pp. 213-290. sterili. – E quella mia invenzione dei due picco- (51) E. De Amicis, Emilio Zola, «Gazzetta Lette- li Zola mi fruttò in seguito le canzonature di vari raria», V, 2, 8-15 gennaio 1881, pp. 9-14, poi, con giornalisti italiani, ai quali l’autore dell’Assommoir, il titolo Emilio Zola polemista, in Ritratti letterari, da loro visitato a Parigi, aveva ripetuto lo scherzo Milano, Treves, 1881, pp. 51-106. detto al mio amico. Vedete ora la singolarità del ca- (52) [A.] d[e]. L.[iberi], [S.A. Caligo], Un’in- so. Avevo inventato; ma ero stato profeta. Ecco che tervista con Emilio Zola cit., p. 3. alla morte del povero Zola, venticinque anni dopo (53) V. Garien, Émile Zola à Monte-Carlo cit., p. 1. quella mia visita, saltano su i due figliuoli […]. Chi (54) H. Leyret, M. Émile Zola interviewé sur sa che il grande scrittore, quando andava a visitare i l’interview, «Le Figaro», 12 gennaio 1893, p. 4, poi suoi bambini nella villetta vicina a Médan, non si sia in D.E. Speirs, D.A. Signori, Entretiens avec Zola, ricordato qualche volta dell’inconscia profezia del Ottawa-Paris-Londres, Les Presses de l’Université suo amico lontano?» (Ricordi e note di Edmondo d’Ottawa, 1990, pp. 108-112. De Amicis su Emilio Zola, «La Stampa», 17 ottobre (55) Edmondo De Amicis, dopo aver chiarito 1902, pp. 1-2). vis à vis con Zola la propria svista nell’incontro del

sf177.indb 530 19/12/15 01.04 Émile Zola a Genova 531

Ecco allora come da un giornale all’altro, da Genova alla Costa Azzurra, si rin- corrano le note che richiamano il suo passaggio, si indugi sui suoi pensieri e sulle sue impressioni, si analizzino con sottile minuzia le sue parole; l’ambiente genovese si ri- vela dunque attento a cogliere l’importanza di quel soggiorno fortuito, di quell’autore che la diffusione delle sue opere oltreconfine, ma anche un’accurata tela di notizie diramate con costanza da tanta parte della stampa italiana, ha contribuito a rendere eccezionalmente famoso pure aldilà delle Alpi. Se si osserva la bibliografia che segna la permanenza di Zola in Liguria, non si può non spalancare gli occhi di fronte a una sì copiosa mole di ragguagli e informazioni che si susseguono da una testata all’altra solo in ambito locale, senza contare le pagine dedicate allo scrittore da un gruppo di periodici satirici come «Il marchese Colombi», il «Sacripante Re di Circassia» o il «Successo», che a Genova trovavano ampio spazio sul finire del secoloxix 56. E di Genova, di quella città così fuori dalle rotte usuali degli eredi del Grand Tour, Zola è «entusiasta. Sovra ogni altra cosa lo hanno colpito il Porto, e la città bassa. Le caratteristiche di quest’ultima, in tutta la sua vetustà lo elettrizzarono, dac- ché egli ami vigorosamente ciò che, senza ragioni preconcette d’immobilizzazione, sopravvive al proprio tempo colpisce la fantasia e dà alle cose dei profili speciali, che l’artificio non riesce ad immaginare»57. Non è un caso, forse, che qualche anno dopo, in seguito alla condanna inflittagli dalla corte d’appello francese dopo l’esplosione dell’affaire Dreyfus, progetti di ab- bandonare il suo esilio londinese per trasferirsi proprio nei dintorni di Genova e qui di stabilirsi con la moglie in attesa che la situazione in Francia prenda una piega diffe- rente58; saranno solo le rimostranze di Alexandrine a impedire che il viaggio avvenga e che Zola trovi rifugio in Riviera. L’incontro di Zola con la Liguria rimane dunque un episodio isolato, ma ciò basta a lasciare in lui un ricordo indelebile della superba città di mare: «Gênes, toute à son commerce, active et bruyante, une des dernières reines de cette Méditerranée, de ce lac aujourd’hui infime qui a été la mer opulente, le centre où roulaient les richesses du monde»59.

francesca bottero

(56) Solo per fare un esempio, sarà il periodico je passerai là de grandes journées de bon travail. «Liguria» a diffondere la traduzione dell’intervista Sois tranquille, je pense à tout, j’arrange déjà tout pubblicata sulla «Revue Illustrée» sul finire del dans ma tête, et lorsque tu seras là-bas, en Italie, 1892, sulla falsariga del “questionario di Proust” au moment voulu, je t’expliquerai comment je vois (Confessioni di grandi artisti: Emilio Zola, Alfonso notre installation au bord de la mer, dans une petite Daudet, Armand Silvestre, Catulle Mendes, «Ligu- station, de San Remo à Gênes» (da una lettera di ria», II, 1, 7 gennaio 1893, p. 2). Émile Zola alla moglie del 14 agosto 1898, in Corre- (57) [A.] d[e]. L.[iberi], [S.A. Caligo], Un’in- spondance. Octobre 1897-Septembre 1899. Tome IX, tervista con Emilio Zola cit., p. 3. éd. sous la direction de B.H. Bakker conseiller lit- (58) «Et c’est pourquoi je te donne rendez-vous teraire H. Mitterand, Montréal-Paris, Les Presses à Gênes. Tu me dis que ce ne serait pas prudent. de l’Université de Montréal-Publications du Centre Ah! grand Dieu! qu’on sache donc où je suis, et national de la recherche scientifique, 1993, p. 174). tout sera terminé. Il faut absolument que, dans les (59) É. Zola, Rome, in Œuvres complètes. De premiers jours d’octobre au plus tard, nous réglions Lourdes à Rome. Les trois villes 1894-1896, tome notre hiver, que nous ne pourrons certainement pas 16, publiées sous la direction de H. Mitterand, passer en France. Je ne veux pas non plus le passer présentation, notices, chronologie et bibliographie ici, pour toutes sortes de raisons. Le mieux sera par J.L. Cabanès et J. Noiray, Paris, Édition Nou- donc d’aller au soleil. Tu t’en trouveras bien, moi, veau Monde, 2007, p. 733.

sf177.indb 531 19/12/15 01.04 mario richter

Sulla religione di Rimbaud

Abstract Rimbaud’s relation to religion is particularly complex. Some significant examples from his work allow to grasp the hieratic nature of the poet’s research. Dissatisfied with the existing religion, Rimbaud constantly aims to the Absolute and to the Mystery in their purity, complex- ity and truth, often through a behaviour seemingly opposite to religious sentiment.

Nella vita e nell’opera di Rimbaud la religione ha un’incidenza di grande rilievo e interesse, assumendovi tuttavia aspetti particolarmente complessi, che talora potreb- bero anche apparire compromessi in una intrigante ambiguità. Rimane comunque certo che il poeta ha incessantemente cercato i valori religiosi nella loro purezza, nella loro profondità, nella loro verità libera da ogni vincolo, da ogni ipocrisia, una verità capace anche di assicurare la salvezza. A questo proposito, il suo migliore amico d’infanzia e compagno di scuola, Er- nest Delahaye, ci ha lasciato una testimonianza preziosa, della cui autenticità non ab- biamo ragione di dubitare. Vale la pena di citarla per intero, perché ci rivela la serietà, sicuramente eccezionale in un bambino, con la quale Rimbaud viveva l’educazione religiosa ricevuta: …à douze ans il était d’une foi ardente, d’une dévotion exaltée jusqu’au martyre s’il l’avait fallu. Un dimanche, comme les élèves sortaient de la chapelle, le “pion” se trouvant par hasard absent, ou trop loin pour voir ce qui se passait à la porte, des “grands” se hâtèrent de manifester l’esprit fort que l’on a d’habitude quand la barbe pousse au menton, en barbotant avec délices dans le bénitier, en se jetant au visage l’eau sainte… et autres impiétés joyeuses. Rimbaud, tout petit, bondit de fureur à la vue du sacrilège; il s’élança, voulut les repousser, subit des bourrades, répondit par des coups de poing, tant qu’il pouvait, en reçut davantage, s’obstina, griffa, mordit, se cramponna aux vêtements des profanateurs, jusqu’à l’intervention, enfin, de l’autorité, qui mit tout le monde en retenue. Cette bataille lui valut, au collège, la qualification, qu’il accepta avec fierté, de “sale petit cagot”1.

Si noti che Delahaye non ha trascurato di sottolineare che lo scolaretto accettò «avec fierté» l’infamante qualifica inflittagli dai compagni di scuola. È proprio questa “fierté” che si rivela essere davvero la forza motrice di tutta l’avventura poetica di Rimbaud e, in particolare, del suo comportamento nei rapporti con la religione esi- stente. In effetti il giovane poeta fa ogni cosa con “fierté”. Mira sempre molto in alto. Predilige le «sombres choses»2.

(1) F. Eigeldnger-A. Gendre, Delahaye témoin complete, Introduzione, revisione e aggiornamento de Rimbaud, Neuchâtel, à La Baconnière, 1974, di M. Richter, Biblioteca della Pléiade, Torino-Pa- pp. 272-273. ris, Einaudi-Gallimard, 1992. Si veda anche la più (2) «Et comme il savourait surtout les sombres recente edizione della Bibliothèque de la Pléiade choses…» (Les Poètes de sept ans, v. 55). Tutte le curata da André Guyaux con la collaborazione di citazioni di Rimbaud sono qui tratte da A.R., Opere Aurélia Cervoni (2009).

sf177.indb 532 19/12/15 01.04 Sulla religione di Rimbaud 533

Se l’oggetto della religione è l’assoluto e il mistero, si può senz’altro affermare che Rimbaud non cessa di tendere a suo modo alle altezze dell’assoluto e alle emo- zioni del mistero che la religione ha l’irrinunciabile compito di perseguire e coltivare. Rimbaud tiene infatti lo sguardo costantemente fisso sull’«Infini terrible» che atter- rì, come si legge in Ophélie, l’«œil bleu» della troppo tenera eroina shakespeariana. Solo il “Poeta” – e Rimbaud si è «reconnu poète»3 – è in grado, senza soccombere, di affrontare «l’âpre liberté», che è una forma dell’assoluto e del mistero. Leggere Rimbaud significa compiere un drammatico percorso, di carattere essenzialmente “religioso”, verso l’inconnu, al di là della struttura duale su cui si fonda la cultura esistente. Ciò significa addentrarsi nello spazio inesplorato che separa i due termini dell’opposizione, uno spazio nel quale si dovrebbe nascondere l’autentica realtà, la «vraie vie»4. In Rimbaud si avverte sempre una particolare gravità, estranea a ogni forma di humour5, che potremmo chiamare sacerdotale; ed è indubbio che proprio questo aspetto ha potuto dare «l’impression vivante et presque physique du surnaturel» a Paul Claudel, che si è spinto fino a definirlo «un mystique à l’état sauvage»6. È l’impressione che sempre si prova di fronte a Rimbaud, anche in quelle parti della sua opera che sulle prime potrebbero apparire frivole, blasfeme o addirittura indecenti. Basti ricordare alcuni testi che sono annoverabili fra i più lontani dallo spirito religioso. Sicuramente la novella Un cœur sous une soutane si presenta come una pesante e irridente satira della religione, almeno nella forma insegnata e praticata nei seminari dell’Ottocento. Nessuno può negare che si tratti di un testo anticlericale. Non è tuttavia possibile limitarsi soltanto a questo aspetto. Infatti, un’attenta lettura della novella permette nello stesso tempo di capire che la sua portata è di gran lunga più grande e che l’orizzonte vi si allarga fino a raggiungere valori assoluti. Il protago- nista Léonard si rivela sempre meno ridicolo, sempre meno lontano dal lettore, per quanto questo possa sentirsi protetto dall’ipocrisia impostagli dalla sua cultura. La lingua e la psicologia di Léonard sono l’immagine realistica e sincera, ossia mostruosa (e dunque insopportabile), di tutto un sistema culturale, quello esemplarmente inau- gurato in epoca moderna da Leonardo (da Vinci) e dal suo continuatore Galileo, uno dei principali fondatori della scienza sperimentale – Galileo a cui il Léonard della novella di Rimbaud si assimila assoggettandosi ai dogmi della Chiesa. Osservato in quest’ottica, Léonard appare una chiara anticipazione del “nègre” che occupa la scena della prima importante parte (“Mauvais sang”) di Une saison en enfer, preludendone in particolare il modo di esprimersi. La puzza dei piedi di Léo- nard e del sesso di Thimotima sta candidamente insieme con lo Spirito Santo, perché il povero seminarista si esprime nei termini più realistici e più sinceri a lui consentiti. L’eccitazione sessuale dei suoi diciott’anni fa tutt’uno con la sua educazione religiosa, si esprime nella particolare lingua che gli è insegnata in seminario7.

(3) « – Et le Poète dit qu’aux rayons des étoiles pose est loin de trouver chez Rimbaud un terrain | Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cueil- approprié. Jamais, il faut le dire, un tel humour ne lis…»; «[…] il faut être fort, être né poète, et je parviendra à s’exprimer dans son œuvre que d’une me suis reconnu poète» (lettera a Izambard del 13 manière occasionnelle et encore ne répondra-t-il maggio 1871). qu’imparfaitement à l’idée d’ensemble que nous (4) «Quelle vie! La vraie vie est absente. Nous nous en faisons» (A. Breton, Œuvres complètes, t. ne sommes pas au monde» (Une saison en enfer, II, Pléiade, p. 1013). “Délires I”). (6) Si veda “Ma conversion” et “Arthur Rim- (5) È quanto Breton ha appunto osservato nel- baud”, in Œuvres en prose, Pléiade, pp. 1009 et 514. la sua Anthologie de l’humour noir: «Ce qu’il y a (7) Cfr. M. Richter, Rimbaud: “Un cœur sous de confondant, de glaçant et de magnifique dans une soutane”, in «Parade Sauvage», 11, Décembre l’humour, tel que nous l’envisageons, la faculté de 1994, pp. 12-18. réaction paradoxale ultra-désintéressée qu’il sup-

sf177.indb 533 19/12/15 01.04 534 Mario Richter

Poesie come Soleil et Chair e Les Premières communions fanno vedere quanto il giovane poeta, sempre più insoddisfatto della religione che ha nutrito la sua infan- zia e che egli ormai irride apertamente, ne cerchi un’altra che gli appaia più umana e soprattutto più pura, più universale, più concreta e più vera. Non si può negare che la prima di queste poesie (che del resto nella versione primitiva comporta un titolo esplicitamente religioso: Credo in unam…) risulti tutta percorsa da uno slan- cio concepibile soltanto da chi abbia ricevuto un’istruzione religiosa. Ad esempio, rivolgendosi a Venere, il locutore esclama: «Tu viendras lui [all’Uomo] donner la Rédemption sainte! […] – Le Monde a soif d’amour: tu viendras l’apaiser»). Con spirito non diverso, nella seconda poesia, intende respingere quello che chiama «le baiser putride de Jésus». Nel maggio del 1871 tiene a far sapere che nella sua infan- zia, contrariamente alla testimonianza consegnata da Delahaye, «il n’aimait pas Dieu; mais les hommes» (Les Poètes de sept ans, v. 48). Steve Murphy ha fatto certamente bene a mostrare l’implicazione comunarda di Rimbaud nella maggior parte dei suoi componimenti in versi8. Tuttavia, sull’esempio dei grandi romantici, si percepisce anche con sufficiente chiarezza che quell’esperien- za politica il poeta l’ha vissuta sotto l’impulso di una visione più alta, più esigente, una visione prossima alla religione se non all’idolatria. Basta per questo leggere la sua lettera a Izambard del 13 maggio 1871: «Je serai un travailleur: c’est l’idée qui me retient, quand les colères folles me poussent vers la bataille de Paris». Tramite il par- ticolare “lavoro” di cui parla, egli mira infatti a un valore superiore, a un’esperienza assoluta, di tipo soprannaturale, ossia la ‘veggenza’ necessaria per arrivare all’ignoto, all’inconnu. Così medita di trovare una lingua senza precedenti, una “énormité” si- curamente accostabile a un alto e universale valore religioso («Énormité devenant norme, absorbée par tous»9). Nella stessa occasione ci fa anche sapere che intanto Baudelaire è diventato il suo idolo, che però egli considera, in forza appunto del suo spirito religioso, proprio “un vrai Dieu”10. Persino una poesia esplicitamente pornografica come il Sonnet du trou du cul è ascrivibile, per quanto riguarda Rimbaud, alla sua ricer- ca fisico-metafisica. Il sonetto è il risultato di una collaborazione fra Verlaine e Rimbaud. Verlaine è l’autore delle quartine, Rimbaud delle terzine. Ora, mentre il primo si attiene scrupolosamente alle regole scurrili del genere, il secondo ardi- tamente le infrange. Anche in questo testo scritto per figurare nell’Album zutique (1871-1872) Rimbaud non rinuncia a impegnare tutta la tensione seria della sua ricerca. Egli sa bene che la parola “Rêve” ha per Verlaine una portata nobile e pressoché sacra11. Così gli gioca un brutto tiro: la mette insieme a ciò che, nella gerarchia di valori esistente, appare al suo opposto: «Mon Rêve s’aboucha souvent à sa ventouse; | Mon âme, du coït matériel jalouse, etc.». Che Verlaine ritenesse del tutto intollerabile che l’amico potesse accostare la purezza ideale del “Rêve” all’organo del corpo considerato più volgare, è provato dalla correzione che egli si permise d’introdurre nella parte del testo non sua quando volle raccogliere il sonetto nell’opuscolo sodomitico Hombres (che sarà pubblicato “sous le manteau” soltanto nel 1903): il primo dei due versi citati – provocatorio e serio, a suo modo “religioso” – fu ricondotto (vista appunto la concezione altamente spiritualistica e quasi sacra da lui attribuita al “Rêve”) alla volgarità richiesta dal genere, e dunque così riformulato: «Ma bouche s’accoupla souvent à sa ventouse». Quando, nella

(8) Si veda Rimbaud et la Commune. Microlectu- (10) «Baudelaire est le premier voyant, roi des res et perspectives, Paris, Éditions Classiques Gar- poètes, un vrai Dieu». nier, 2010. (11) Cfr. il «Prologue» dei suoi Poèmes satur- (9) Lettera a Demeny del 15 maggio 1871. niens.

sf177.indb 534 19/12/15 01.04 Sulla religione di Rimbaud 535

lettera a Delahaye del 14 ottobre 1875, Rimbaud liquiderà definitivamente con “fierté” il convertito Verlaine chiamandolo sprezzantemente “Loyola” (ossia un “gesuita”, da lui inteso come un devoto ipocrita) e aggiungendovi la sua ultima già citata “poesia” (denominabile La Chambrée de nuit o Rêve), “poesia” che André Breton giudicò essere una «cime» e «la plus difficile de la langue française»12, spin- gerà la sua ricerca “religiosa”, cominciata con Un cœur sous une soutane, fino al suo grado più estremo. Specialmente il terzo verso di questo testo («Émanations, explosions: un génie») fa vedere a quale lingua mirasse Rimbaud: il verso ci mette di fronte a una situazione, è il caso di dirlo, “esplosiva”, in cui si tratta di “éma- nations”, cioè dei cattivi odori esalati dalle reclute e, appunto, di “explosions”, che si possono intendere non soltanto come gli urli e gli schiamazzi nella camerata notturna ma anche, verosimilmente, i peti, dal momento che questi sono delle emanazioni e insieme delle esplosioni. E tuttavia il termine “génie” che conclude il verso, assorbe i primi significati bassamente materiali spostandoli sul piano figu- rato, non escluso quello spirituale, religioso. Nel momento stesso in cui si incontra la parola “génie” alla fine del verso, percorriamo in un solo istante, attraverso l’energia semantica dei due significanti (“émanations”, “explosions”), l’enorme distanza che tiene fra loro lontani i due opposti poli del sistema simbolico esisten- te (essenzialmente dualistico), sistema la cui evidente realtà si trova d’un tratto svalorizzata, demistificata, annientata. Si sa che émanation (dal latino emanatio) è un termine propriamente teologico che designa il modo con cui il Figlio procede dal Padre e lo Spirito Santo dal Padre e (secondo la dottrina cattolica) anche dal Figlio. Se si tiene presente che la cultura romantica ha volentieri assimilato il poeta a Cristo, non è difficile vedere nel termine émanation un sinonimo di afflato, di ispirazione, magari anche accompagnato da un profumo d’incenso. E si sa pure, del resto, quanto la parola génie si accosti, nello stesso Rimbaud, a Cristo (si pensi, ad esempio, all’Illuminazione Génie). Si aggiunga che il genio, essendo una forza spirituale con un valore neutro e dunque sprovvista di una connotazione positiva o negativa (il genio può essere buono o cattivo), si colloca per definizione al di là (o al di qua) del Bene e del Male: è una virtualità, un’energia, una forza di natura spirituale, che pure si presta a essere anche abbassata, in questo contesto, a un suo possibile significato militare. Quanto a explosion (si ricordi l’inizio de “L’ Éclair” in Une saison en enfer: «Le travail humain! C’est l’explosion qui éclaire mon abîme de temps en temps»), si tratta di un sinonimo di illumination, di luce improvvisa, il che permette di accostarlo a quello di furor, la manifestazione folgorante che inva- de la mente del genio o del poeta in preda all’ispirazione divina. Ci troviamo qui al centro di convergenza nel quale giungono a fondersi i due opposti poli del sistema simbolico vigente. La materia e lo spirito scompaiono per rivelare una realtà altra. Il “génie” è appunto questo centro di convergenza neutro e polisemico: è insomma «le point de l’esprit où – per riprendere quanto ha detto Breton nel suo Second Manifeste du Surréalisme (1930) – la vie et la mort, le réel et l’imaginaire, le passé et le futur, le communicable et l’incommunicable, le haut et le bas cessent d’être perçus contradictoirement»13. Anche nelle Illuminations è possibile scorgere, più d’una volta, la tensione grave e religiosa che non cessa di orientare il “travail” di Rimbaud. Ricordo almeno Aube, in cui il locutore riconosce la “déesse” («À la cime argentée je reconnus la déesse»)

(12) Cfr. Entretiens, in Œuvres complètes, t. III, metto di rinviare al mio libro Les Deux “cimes” de Pléiade, p. 452 e Anthologie de l’humour noir, “Pa- Rimbaud: “Dévotion” et “Rêve”, Genève, Slatkine, ratonnerre”, t. II, p. 867. 1986, p. 53 ss. (13) Per un commento più puntuale, mi per-

sf177.indb 535 19/12/15 01.04 536 Mario Richter

oppure Dévotion, in cui fa la sua apparizione una misteriosa deità dal nome non meno misterioso (Circeto)14. Il singolare “travail” al quale Rimbaud si è arditamente dedicato a partire dal maggio 1871 rimane l’irrinunciabile punto di riferimento esplicativo di uno dei mag- giori enigmi presenti in Une saison en enfer, appunto quello della religione, che Alain Vaillant considera giustamente «la véritable obsession» dell’opera (l’unica pubblicata dall’autore). Questo critico ha così riassunto l’atteggiamento bivalente che il maggio- re protagonista di Une saison tiene nei riguardi della religione: D’un côté, le texte est empreint d’une profonde, presque violente nostalgie à l’égard de l’idéal chrétien, de son enveloppante charité, de son exigence de haute et pure spiritualité, détachée des médiocres réalités de la vie commune. De l’autre, Rimbaud est convaincu que cette spiritualité, justement, est incompatible avec le monde de l’époque où il est contraint de vivre […] le catholicisme d’Occident ne saurait jamais être qu’une religion abâtardie, un mélange impur d’idéalisme mystique et de matérialisme païen. Dans l’absolu, il n’y a qu’une seule alternative acceptable, mais définitivement irréalisable: soit être un Sage et un pur esprit, soit être un vrai nègre 15.

In realtà Rimbaud si è sforzato, attraverso l’ostinato esercizio del suo orribile “travail”16, di abolire proprio questa opposizione, questa alternativa: ha voluto essere nello stesso tempo, trascendendo la struttura duale su cui si fonda la cultura dell’Oc- cidente, un saggio e un negro. Quando, nella terza sezione di “Mauvais sang” (Une saison en enfer), asserisce «J’attends Dieu avec gourmandise», si rivela simultanea- mente un “saggio” e un “negro”, il saggio aspettando Dio, il negro aspettandolo con la gola (la gourmandise), ossia con uno dei sette peccati capitali. Il saggio-negro (o poeta-negro) si è allontanato dalla sua iniziale educazione cristiana che gli appare de- turpata dalla menzogna, il che significa che ha abbandonato l’ipocrisia dei “bianchi” che l’hanno battezzato con la forza del “canon” («Les blancs débarquent. Le canon! Il faut se soumettre au baptême, s’habiller, travailler», dove il “canon” è da intendersi insieme come arma da fuoco e dogma della Chiesa, in questo caso il battesimo). Si è liberato dei “couples menteurs” che regolano la cultura esistente, a cominciare da quelli della religione. Alla fine di Une saison dice di poter “ridere” di tutto ciò17. Si è impossessato dell’energia del mito privandolo nel contempo del suo prestigio, della sua autorità, della sua credibilità. Per essere davvero “fort”, il saggio-negro deve far suo il bot- tino di chi egli ha definito “voleur” (Cristo). In altri termini, si sforza di fondare, scartando Cristo, una nuova Eucaristia, tenendo conto che questo sacramento è considerato una fusione perfetta, grazie al corpo e al sangue del Cristo risuscitato, della carne e dello spirito, la coppia oppositiva per eccellenza del sistema duali- stico. La “Beauté”, che inizialmente il negro cristianizzato ha trovato “amara” e l’ha ingiuriata («Un soir, j’ai assis la Beauté sur mes genoux. – Et je l’ai trouvée

(14) O dobbiamo seguire Eddie Breuil, che «Puisqu’il a cultivé son âme, déjà riche, plus qu’au- pretende di attribuire le Illuminations a Germain cun! Il arrive à l’inconnu, et quand, affolé, il finirait Nouveau? (cfr. Du Nouveau chez Rimbaud, Paris, par perdre l’intelligence de ses visions, il les a vues! Honoré Champion, 2014). Qu’il crève dans son bondissement par les choses (15) «“Posséder la vérité dans une âme et un inouïes et innommables: viendront d’autres horri- corps”: la morale énigmatique d’Une saison en en- bles travailleurs; ils commenceront par les horizons fer», in Énigmes d’‘‘Une saison en enfer”, textes réu- où l’autre s’est affaissé» (lettera a Paul Demeny, del nis par Y. Frémy, «Revue des Sciences Humaines», 15 maggio 1871). Mio il corsivo. 313, janvier 2014, pp. 22-23. (17) «Un bel avantage, c’est que je puis rire des (16) L’aggettivo che qualifica il lavoro a cui si vieilles amours mensongères, et frapper de honte deve dedicare il “poète” è dello stesso Rimbaud: ces couples menteurs».

sf177.indb 536 19/12/15 01.04 Sulla religione di Rimbaud 537

amère. – Et je l’ai injuriée»)18, è da ultimo diventata la “verità” («et il me sera loisi- ble de posséder la vérité dans une âme et un corps»). Il locutore afferma che questa verità egli la potrà finalmente far sedere sulle sue ginocchia come una vera donna, potrà “possederla” (nel senso pregnante del verbo). Questa “verità” che potrà essere da lui posseduta come una donna è l’ignoto, l’autentica realtà, lo spazio inesplorato e terribile che si cela fra l’anima e il corpo, fra l’astratto e il concreto, fra lo spirituale e il materiale, forse anche fra qualcosa che assomiglia a Cristo e al suo avversario, in ogni caso una “verità” interamente umana, una “réalité rugueuse à étreindre” (“Adieu”) finalmente liberata da ogni “malice” cristiana (quella che ha schiavizzato il negro battezzandolo col canon), una realtà, una “sagesse nouvelle”, un “Noël sur la terre” (“Matin”) che potrà stringere soltanto chi sarà davvero capace di rinunciare (pagando di persona) a ogni mito consolatorio, a ogni precedente creazione. Non c’è dubbio che in Rimbaud ha sempre il sopravvento una “fierté” di natura sacerdotale. In ciò sta certamente la principale caratteristica della sua personalità e della sua opera. Verlaine, che lo conosceva bene, era a tal punto convinto di quanto il giovane ex amico continuasse a essere effettivamente animato nel suo “travail”, malgrado tutto, da uno slancio religioso, che nel 1875 giunse, da fervente convertito, a nutrire la speranza di poter ricondurre anche lui alla fede cattolica: «Je te voudrais tant éclairé, réfléchissant – gli diceva –. Ce m’est un si grand chagrin de te voir en des voies si idiotes, toi si intelligent, si prêt (bien que ça puisse t’étonner!)»19. Rimbaud gli appariva “si prêt” perché appunto era persuaso di conoscere bene la profonda struttura religiosa del suo carattere: una struttura religiosa da cui l’“horrible travail- leur” traeva ancora le principali risorse per compiere un’impresa della quale i “versi” di Une chambrée de nuit (o Rêve) mostravano una non esaurita vitalità. Si capisce per quale ragione Breton, nel momento in cui il suo gruppo optò per una adesione incondizionata al materialismo dialettico, non esitò a ricredersi, in quell’alto e so- lenne tribunale che è il Second manifeste du Surréalisme, sul culto precedentemente tributato a Rimbaud: Inutile de discuter encore sur Rimbaud: Rimbaud s’est trompé, Rimbaud a voulu nous tromper. Il est coupable devant nous d’avoir permis, de n’avoir pas rendu tout à fait impos- sibles certaines interprétations déshonorantes de sa pensée, genre Claudel20.

E non dovrebbe nemmeno suscitare eccessivo stupore la testimonianza di Isabel- le Rimbaud, che assistette l’infelice fratello nei suoi ultimi giorni di vita all’ospedale di Marsiglia e che già un anno dopo lo presentò come “un saint, un martyr”, precisando anche che «de ses lèvres ne sortaient plus que des paroles de résignation, d’espérance religieuse, de prières; et il exprimait ses sentiments avec des termes tellement angéli- ques, tellement immatériels, que je ne crois pas que personne, même parmi les , ait jamais eu une fin plus édifiante»21.

mario richter

(18) Cfr. M. Richter, La “Beauté”, clef de lecture (19) Lettera a Rimbaud del 12 dicembre 1875. de “Une saison en enfer”?, in Malédiction ou révo- (20) A. Breton, Œuvres complètes, t. I, Pléiade, lution poétique: Lautréamont/Rimbaud (Colloque p. 784. de Cerisy-la-Salle, 15-22 juillet 1989), Valencien- (21) Lettera a Louis Pierquin del 17 dicembre nes, Presses Universitaires de Valenciennes, 1990, 1892. pp. 167-175.

sf177.indb 537 19/12/15 01.04 bruno tritsmans

Marines fantômes. Aventures et mythologies de la mer chez Henri Bosco

Abstract The interest for maritime adventure in literature, especially in the 19th and 20th century, finds its origin in the desire to oppose a society that is seen as «morass», and to valorize «vital energy» (Alain Corbin). This essay analyses the poetics of maritime adventure in the work of Henri Bosco (1888-1976). Henri Bosco, whose work is haunted in depth by the crisis of civilization (the «soleil noir»), projected to write a «roman marin», with the pirate Bras-de-fer as pro- tagonist. In fact, he transforms this promethean figure in ferryman or phantom (Le Trestoulas (1934), L’Epervier (1963)), and opposes static figures such as the temple or the mas (L’Oustaou di Dieu) to the instable and sometimes threatening maritime theme. Those scriptural processes inform the poetic complexity of L’Enfant et la rivière (1945), very close to what can be called an art of mètis (Marcel Détienne, Jean-Pierre Vernant).

Aventures marines, feux et cendres

e L’espace marin a exercé une fascination durable sur la littérature du xx siècle, et ce pour les raisons qu’Alain Corbin a évoquées dans Le territoire du vide. L’ima- ginaire marin s’enracine en effet profondément dans une opposition avec la société. Alors que celle-ci est perçue comme aliénante, comme un «miasme», la mer offre l’occasion d’un regain d’énergie vitale, d’une confrontation virile avec la violence des éléments naturels1. La mer devient dès lors le théâtre d’une quête, voire d’une «mys- tique moderne» ou d’un «réenchantement du monde»2, et derrière l’aventure marine se profile l’ombre de Prométhée3. e En même temps, l’aventure marine tend, tout au long du xx siècle, à se dégrader, et la littérature n’en garde alors, selon le mot de Jean-Yves Tadié, que le «goût de cendre»4. Il rejoint ainsi la réflexion plus générale sur l’aventure qu’ont menée Georg Simmel et Vladimir Jankélévitch, très sensibles à la précarité de l’aventure qui risque à tout moment de verser dans le jeu5. Le topos de l’aventure marine comme quête se fragilise, et la hiérophanie qui la sous-tendait devient «cryptique»6, au point de n’être

(1) A. Corbin, Le territoire du vide. L’Occident et (4) J.-Y. Tadié, Le roman d’aventures, Paris, le désir du rivage, Paris, Aubier, 1988, p. 319. Voir Puf, 1996 («Quadrige»), p. 189. Voir aussi L. encore M. Roux, L’Imaginaire marin des Français, Rasson et B. Tritsmans (éd.), Marines écrites. Paris, L’Harmattan, 1997, qui parle de «réponse à Récits de mer au xxe siècle, Lille, Roman 20-50, l’absurde» (p. 20). 2004 («Actes»). (2) Ces expressions sont empruntées à S. Ve- (5) Voir, de G. Simmel, «La philosophie de nayre, La gloire de l’aventure. Genèse d’une mys- l’aventure», Mélanges de philosophie relativiste. tique moderne, Paris, Aubier, 2002, et à J. Grif- Contribution à la culture philosophique, Paris, fet, Aventures marines. Images et pratiques, Paris, Alcan, 1912, pp. 110-116, et de V. Jankélévitch, L’Harmattan, 1995. L’Aventure, l’ennui, le sérieux, Paris, Aubier, (3) Sur le mythe de Prométhée dans l’imaginaire 1963. de la modernité, voir F. Flahault, Le crépuscule de (6) M. Eliade, Traité d’histoires des religions, Prométhée. Contribution à une histoire de la déme- Paris, Payot, 1949, p. 3; Images et symboles, Paris, sure humaine, Paris, Mille et une nuits, 2008. Gallimard, 1952, p. 25.

sf177.indb 538 19/12/15 01.04 Marines fantômes. Aventures et mythologies de la mer chez Henri Bosco 539

plus lisible que sous la forme de traces, de résidus, et qui s’exprime par une (petite) mythologie du rivage. Le récit devient alors un palimpseste, où les topoi mythiques restent certes lisibles, mais disséminés et devenus fantômes textuels7.

Le corsaire et ses doubles

Telle est la perspective dans laquelle nous proposons de relire l’œuvre quelque peu oubliée de Henri Bosco (1888-1976), alors que bien des maîtres de la critique, de Gaston Bachelard à Jean-Pierre Richard, la tenaient en haute estime. Elle présente une sensibilité très forte à la «sauvagerie» ou au «mal» dans le monde, à la terre «qui s’enfonce» et qui donne un «sentiment de panique»8, – autant de figures de la bar- barie de la guerre qu’il voit se profiler dès les années Trente, et, plus généralement, de la crise de la civilisation qui le hantait comme un «soleil noir»9. En même temps, il relègue cette sauvagerie dans les marges de l’œuvre, comme la «Préface» tardive (1957) du Mas Théotime (1945)10, et il s’inscrit résolument dans une démarche répa- ratrice, voire rédemptrice. C’est sur ce contexte que la thématique marine vient se greffer sous des formes très diverses. Henri Bosco affichait volontiers son goût pour le roman maritime, et notamment pour Conrad, Kipling et Melville11. Il se traduit par une prédilection pour la figure du corsaire Bras-de-fer ou Sabinus, qui figurait déjà dans une pièce d’Eglogues de la mer (1928), reprise dans Le roseau et la source (1949), ou encore dans Sites et mirages (1951). Il s’agit d’un guerrier qui combat les Turcs devant les îles Hyères, et Bosco se réfère souvent à ce personnage dans une perspective oppositionnelle. En 1935, il écrit à Audisio qu’il veut se «corriger» des «fins de romans trop mystérieuses et incompréhensibles»12, et c’est plus précisément après «L’Habitant de Sivergues» (1933) et L’Ane culotte (1936) qu’il songe à écrire un «roman marin»13. On retrouve le personnage dans l’œuvre tardive, et notamment dans le cycle des Balesta, ou encore, dans Bras de fer, bref récit publié en 1959 dans la collection «Plaisir des contes». En même temps, l’aventure du corsaire, qui relève de ce que Bosco a pu appeler son «désir profond», s’oriente dans un sens négatif et se transforme en naufrage: «ne pouvant pas naviguer un bateau, je l’ai fait couler»14.

(7) J. Starobinski s’est montré attentif à la pré- New light on the origins and symbolism of “Mali- sence d’un «monde archaïque» dans les textes de croix” by Henri Bosco, «The French Review», 47, la modernité (Les cheminées et les clochers, «Ma- (1974), p. 776. gazine littéraire», 280, (septembre 1990), pp. 26- (12) «Cahiers Henri Bosco», 39/40, (1999-2000), 27). Dans la perspective de la poétique du récit, p. 19. voir M. Charles, Introduction à l’étude des textes, (13) Lettre à Noël Vesper du 28 janvier 1933 Paris, Seuil, pp. 106 et 177, et plus récemment, De (Lettres à Noël Vesper, Terrasses de Lourmarin, la cohérence chez Balzac, «Poétique», 67, (2011), 1986, p. 51. Voir aussi la lettre à sa mère du 17 pp. 351-382. mai 1936, citée par Claude Girault dans la très (8) Henri Bosco et les voix de la terre, «Nouvelles riche «note» qui suit «La Chanson du corsaire» littéraires», 2248, (22 octobre 1970), p. 2. Voir aus- («Cahiers Henri Bosco», 39-40, (1999-2000), si J. Onimus, Le mal, «Cahiers Henri Bosco», 29, p. 19). (1989), pp. 127-144. (14) Propos cités par C. Girault, Propos sur (9) Voir la lettre à Jean Denoël du 2 avril “Malicroix”, «Cahiers Henri Bosco», 19-20, 1974 («Cahiers Henri Bosco», 32-34, (1992-1994), (1980), p. 92, note 2. Voir encore, sur cette pro- p. 168), et à François Bonjean du 4 mai 1946 («Ca- blématique, l’article de S. Beckett, «Navires, hiers Henri Bosco», 37-38, (1997-1998), p. 138). naufrages et nautoniers/nautonières: le mythe de (10) Genèse du “Mas Théotime”, «Cahiers Henri Charon dans l’œuvre de Henri Bosco», M. Zupan- Bosco», 22, (1982), pp. 15-20. cic (éd.), Mythes dans la littérature contemporaine (11) J.-P. Cauvin, Henri Bosco et la poétique du d’expression française, Ottawa, Le Nardis, 1994, sacré, Paris, Klincksieck, 1974, p. 253; J. Price, pp. 171-180.

sf177.indb 539 19/12/15 01.04 540 Bruno Tritsmans

Dans une œuvre fortement marquée par le jeu de miroir et le glissement de sens15, tout se passe comme si l’aventure marine et la figure du Corsaire se disséminaient. Je propose, dans cette perspective, de retracer un parcours du Trestoulas (1934) à L’Épervier (1963), pour focaliser ensuite sur le détail textuel dans L’Enfant et la rivière (1945).

Barques-fantômes et tartanes

Bosco a rédigé Le Trestoulas en mai-juin 1934, et il plaçait ce texte sous «l’inspi- ration de la Terre»16. Initialement, le récit est en effet profondément enraciné, et son protagoniste est un berger habitant un mas, la Jassine:

Mi-ferme, mi-bergerie, séparée du chemin par un jardin et une murette, la maison de Clapu était située assez haut dans les terres, à la racine des sources (pp. 20-21)17.

L’orientation verticale est encore renforcée par la «bergerie abandonnée» que Clapu possède sur le plateau du Trestoulas, couverte de «tuiles blanchâtres», et par- dessus laquelle se dresse «une haute falaise» (p. 25). Mais la bergerie permet aussi d’accéder à la profondeur: elle s’enfonce «profondément dans la terre» (p. 37), et si on y trouve «un manteau de berger», celui-ci y côtoie «un paquet de bougies et une lanterne-tempête» (p. 114) destinées à éclairer le «trou béant» creusé derrière la che- minée, et qui permet d’accéder aux réserves aquatiques souterraines. Sur le portrait de Clapu en berger se greffent des éléments menaçants, et le tra- ditionnel bâton de berger devient ainsi une «grande pioche», dotée de «deux grandes dents luisantes» (p. 12). De même, le troupeau n’est mentionné qu’en passant (p. 87), et il cède la place au culte voué par Clapu au sanglier devant un «autel barbare» du monde aquatique souterrain (p. 118). Dans ce monde, Clapu se transforme de berger en passeur18 et il se meut sur un radeau à l’aide d’«une de ces pelles de bois qui […] servent de van», et qui est éclairé par «un tronc de pin entier» (p. 117). Le Trestou- las présente ainsi à l’évidence une version nocturne du topos maritime, et l’espace aquatique devient lieu de sauvagerie et d’engloutissement19. Il est cependant révélateur que la fin du récit réintroduise l’espace maritime. On y apprend en effet que l’histoire de Clapu est rapportée par André Cheynes à bord d’un «bateau ancré, bien à l’abri, dans la crique de la ‘Maison de Dieu’» (p. 171). Cette «Maison de Dieu» avait déjà été décrite dans un texte plus ancien intitulé L’Oustaou di Dieu, que Bosco avait envoyé à sa mère la veille de Noël 1936, et il s’agit en fait d’une bastide ruinée et abandonnée sur les falaises de Porquerolles. La ruine de la bâtisse est toutefois compensée par la remontée, dans le souvenir, d’un «vieux cantique de la mer»

(15) Voir le Diaire de Bosco, cité par J. Onimus: (17) Nos références renvoient à: H. Bosco, Le «À chaque personnage, je crée son ombre». Jean Trestoulas, Gallimard, 1935 («Folio»). Onimus présente Bosco comme «emprisonné par (18) Sur l’instabilité de la figure du berger chez ses propres reflets», qui inhibent l’action («Le Bosco, voir mon étude Le berger et ses fantômes. thème du double», Henri Bosco. Mystère et spiri- Fables en filigrane chez Henri Bosco, «Poétique», tualité, Paris, Corti, 1987, pp. 95-108). Voir encore 174, (2013), pp. 251-260. les «Entretiens avec Monique Chabanne», «Cahiers (19) Cf. encore la dérive en barque dans «At- Henri Bosco» 27, (1987), pp. 90, 106, 111, 131. las» (Des Sables à la mer, Paris, Gallimard, 1950, (16) Lettre à sa mère du 31 juillet 1934; publiée pp. 169-189). par C. Girault dans «Cahiers Henri Bosco» 39/40, (1999-2000), p. 24.

sf177.indb 540 19/12/15 01.04 Marines fantômes. Aventures et mythologies de la mer chez Henri Bosco 541

où l’on voit trois tartanes bleues arriver d’Orient pour la fête des Rameaux avec un char- gement de palmes20.

Bosco emprunte ce topos à l’un de ses textes les plus anciens et les plus fonda- mentaux. Parmi les Noëls et chansons de Lourmarin qu’il avait publiés en 1929 figure en effet une pièce intitulée «Le Noël de la barque», qui évoque «une barque chargée d’oranges» venue du «pays de l’Encens»21. Sites et mirages (1951) et Le Roseau et la source (1949) font d’ailleurs écho à ce topos fondateur, et évoquent à leur tour «des balancelles qui remontaient, chargées d’oranges, vers le Nord», et une «balancelle bleue» qui porte sur la mer «cent corbeilles d’oranges»22. Dans Le Trestoulas, le topos s’infléchit de façon révélatrice:

Vers le large, par-delà l’île du Levant, une sorte de voilier-fantôme avait louvoyé jusqu’à la nuit. Maintenant il apparaissait, plus irréel encore, à quelques encablures de la côte (p. 171).

Aux «tartanes bleues» chargées de palmes du vieux cantique s’est substitué un «voilier-fantôme» sur fond nocturne. Du coup, le parcours rédempteur qui se des- sinait dans Le Trestoulas entre le labyrinthe aquatique souterrain et la crique de la «Maison de Dieu» tend à se dissoudre, et tout se passe comme si le voilier-fantôme faisait écho à la barque infernale de Clapu. C’est pour pallier cette érosion du par- cours rédempteur que le récit procède à une deuxième recontextualisation. Plus de deux ans après avoir appris le récit dans la crique, le narrateur retrouve André Cheynes dans «une petite propriété» qu’il possède entre le cap Léoube et le cap Benat, «près de la mer» (p. 173). À la différence de la «Maison de Dieu», où les «tartanes bleues» deviennent «voilier-fantôme», cette propriété, située «près de la mer», offre une image de l’enracinement, qu’amplifiera plus tard Le Mas Théotime (1945), et la cueillette des amandes en est comme l’image emblématique23. Par cette poétique du récit feuilletée, Bosco tient manifestement à se distancier de ce qui lui paraissait des «créatures parties dans le monde des Ombres»24. On retrouve ces éléments dans L’Épervier (1963), où Bosco évoque les derniers combats du corsaire dans les îles grecques. Après un long séjour à Pierrelousse, où ses ancêtres s’étaient retirés, le narrateur s’installe dans une maison «près du Cap Bénat», face à l’île du Levant (pp. 285-286)25. C’est de la pointe du cap, qui donne sur un rivage creusé de «petites criques» où les pêcheurs se mettent parfois à l’abri, qu’il observe «deux petites barques en train de pêcher» (p. 286), ou encore la sortie des bateaux à l’occasion d’une «nappe d’air qui venait du Sud» et qui apporte une «étrange douceur»:

l’on apercevait sur cette eau paisible leurs barques, qui posaient des palangres. Ou bien, à petits coups de rames, deux à deux, ils traînaient leurs filets sous l’île du Levant (p. 294).

(20) L’Oustaou di Dieu, «Cahiers Henri Bosco», (23) L’amande est symbole de «la naissance et de la 39/40, (1999-2000), pp. 26-30. Voir là encore la résurrection» (C. Morel, Dictionnaire des symboles, «note» très fine et documentée de Claude Girault. mythes et croyances, Paris, L’Archipel, 2002, p. 46). (21) H. Bosco, Sept Noëls de Lourmarin, Paris, (24) Dédicace (1973) du Trestoulas à Monique Editions M. Combre, pp. 8-9. Baréa (fac-similé dans «Cahiers Henri Bosco», (22) Sites et mirages, Paris, Gallimard, 1951, p. 24; 41/42, (2001-2002), p. 127). Le roseau et la source, Paris, Gallimard, 1949, p. 118. (25) Nos références renvoient à: H. Bosco, L’Épervier, Paris, Gallimard, 1963.

sf177.indb 541 19/12/15 01.04 542 Bruno Tritsmans

Cette scène évoque les tartanes bleues du vieux cantique, mais comme en mi- neur: les barques traînent leurs filets, tandis que la référence à l’Orient se dissémine (le Sud, l’île du Levant). La reprise en demi-teintes du topos rédempteur se poursuit encore. Le narrateur possède en effet encore une «bicoque» ou «un bout de bastide» situé au «sommet des falaises» de l’île du Levant, et qu’on appelle «L’oustaou dou marri-ferri» ou «La maison du mauvais garçon» (p. 295)26. En fait, le lieu s’avère habité par des inconnus qui y laissent des traces de foyer et un «petit calèn» (p. 297), et qu’un vieux pêcheur associe à la présence d’«une espèce de trois-mâts carré», «mâté et […] caréné pour courir au vent comme un épervier de la mer» (p. 297). Plus tard, le pêcheur verra surgir un trois-mâts qui est une «ombre de navire» (p. 315), dont les feux clignotent sans qu’on ne voie un équipage. L’aventure héroïque du corsaire, qui avait vogué sur d’«immenses mers» (p. 318) avec «L’Épervier», s’infléchit dès lors dans le sens du fantomatique, et le narrateur même semble tenté de prendre le large sur le navire fantôme devenu menaçant (pp. 317-318) et de dériver ainsi vers les «profondeurs» (p. 315)27. On retrouve ainsi les différentes composantes de la scène marine fondatrice de Bosco, mais le trajet rédempteur s’enlise. Même la «Maison de Dieu», qui était dans Le Trestoulas un refuge contre les fantasmagories, est doublée par la «maison du mauvais garçon», et est hantée par des figures spectrales.

Retissages

L’espace de L’Enfant et la rivière (1945) est réduit et bien différent des vastes étendues marines, car l’action se passe au bord du Rhône. Il est cependant révélateur qu’on y voie réapparaître la figure du navigateur, mais devenue cliché. Au début, il est thématisé par le biais d’un «vieux crocodile empaillé» (p. 16)28 qui a appartenu à l’oncle navigateur Hannibal, et qui est suspendu au plafond du grenier en compagnie d’un bric-à-brac de vieux habits, de chandeliers d’argent et de livres reliés de cuir qui gisent parmi des papiers jaunis (p. 16). Au moment du dénouement réapparaît un «ancien Navigateur», «gloire du village» (pp. 86, 95). À l’aventure marine fossilisée s’oppose le voyage de Pascalet dans les bras du Rhône. Il relate en effet qu’il a dérivé dans une vieille barque «un peu vermoulue» (p. 28) jusqu’à une île de bohémiens. Après y avoir libéré Gatso, il s’empare de la barque des bohémiens ornée d’«une rose des vents en cuivre» (p. 48) pour s’engager sur un «bras mort» (p. 49) de la rivière, qui forme une étendue lacustre que le protagoniste appelle le «monde des eaux dormantes» (p. 102). L’aventure de Pascalet recompose l’aventure maritime, mais de façon en quelque sorte miniaturisée. On retrouve dans le récit une thématique diffuse de la menace et de l’engloutissement, qui se décline sur plusieurs plans29. D’entrée

(26) «La chanson du corsaire» que Bosco avait le «Liminaire pour L’Épervier», qui évoque une envoyée à sa mère en 1934 est signée «Lou mar- «côte abritée» hantée par d’«étonnantes épaves» ri-ferri» («Le mauvais garçon») («Cahiers Henri («Cahiers Henri Bosco», 41-42, (2001-2002), Bosco», 39-40, (1999-2000), p. 15), et parmi les p. 46). manuscrits de Noëls et chansons de Lourmarin fi- (28) Nos références renvoient à: H. Bosco, L’En- gure un «Noël du diable» («Cahiers Henri Bosco», fant et la rivière, Paris, Gallimard, 1953 («Folio/ 39-40, (1999-2000), pp. 12-14). Plus»). (27) Cette tentation est amplifiée dansLe Récif (29) Voir, sur ce récit, les études d’A. David (Le (1977), où le protagoniste, Markos, quitte le mas même et l’autre: jeux de miroirs dans “L’Enfant et du Liguset pour Paros, puis pour un récif, et finit la rivière”, «Cahiers Henri Bosco», 30-31, (1990- par être entraîné par un navire-fantôme. Voir aussi 1991), pp. 223-246) et de M. Arouimi (La quête my-

sf177.indb 542 19/12/15 01.04 Marines fantômes. Aventures et mythologies de la mer chez Henri Bosco 543

de jeu, l’accès à la rivière est interdit au jeune Pascalet, parce qu’il y a «des trous morts où l’on se noie, des serpents parmi les roseaux» (p. 12), et certains pois- sons pêchés par Bargabot sont «hérissés d’épines», tandis que d’autres «ouvrent leurs gueules goulues dans le vide» (p. 22). La fin du récit mentionne encore le «monde mouvant et secret» (p. 111) des profondeurs aquatiques, où des monstres «aux écailles phosphorescentes» (p. 111) surgissent. Cette face nocturne du monde apparaît aussi sur l’île des bohémiens, où Pascalet voit une femme-sorcière égorger un coq sur le feu (p. 32), tandis qu’un ours rôde à proximité (p. 35). Enfin, au cœur des «eaux dormantes», Pascalet et Gatso croient voir les traces des griffes d’une bête, qu’ils appellent «Racal» (p. 65), et qu’ils estiment d’une telle férocité «que même le taureau de combat et le buffle prennent la fuite devant lui» (p. 66). Tous ces éléments contribuent à évoquer le monde aquatique souterrain du Trestoulas, où Clapu vouait un culte au sanglier. Face à cette menace de dérive dans la sauvagerie, L’Enfant et la rivière esquisse à son tour des parcours rédempteurs, lisibles jusque dans le détail textuel, et on re- trouve là, de façon déplacée et indirecte, les tartanes bleues venues d’Orient et la «Maison de Dieu». À l’eau noire, habitée par les monstres, s’oppose parfois une thématique so- laire, en particulier quand, à l’aube ou au soleil couchant, «une buée d’or pâle se levait lentement de la lumière» (p. 44), ou que les eaux se colorent «de rose, d’or et d’hyacinthe» (p. 59). Le parcours rédempteur peut également se lire dans la présence d’oiseaux, tel ce «vol de plumes mouillées» (p. 44), et qu’on retrouve dans les autres figures du bestiaire ailé, tel le papillon (pp. 51, 59), la libellule ou le gerris (p. 59). De même, les étoiles formant de «grandes figures célestes» s’inscrivent sur cet axe qui oppose nuit et lumière: Ils brûlaient très loin en silence. Leurs feux se reflétaient, en tremblant, dans la rivière, maintenant luisante et noire (p. 33).

Il arrive enfin que cette luminosité surgisse dans la profondeur des eaux, et sous les «reflets glauques», on voit alors se glisser un «doigt d’argent», puis «quelques bulles d’air, détachées d’une algue» (p. 51). Le monde aquatique peut devenir trans- parent, et les fonds «ri[ent] de soleil» (p. 112) et sont mystérieusement éclairés «en dessous par des feux invisibles» (p. 111). Sous le roc, entre les galets, quelquefois une «bulle d’air» (p. 112) éclot. Par ce réseau thématique subtil et complexe, le texte tisse ainsi des parcours rédempteurs fragiles et instables. Par ailleurs, Bosco sollicite aussi des figures moins fluides, plus solides, à l’image de la «Maison de Dieu». Au cœur des eaux dormantes se trouve en effet une île avec une chapelle, qui offre «un très vieux visage, roussi par les lichens et le long travail du soleil»: Au-dessus de la porte, on avait creusé une niche où se trouvait une petite Vierge de plâtre colorié. Les couleurs en étaient parties. On devinait un peu de rose sur la robe. Une inscription en lettres bleues entourait cette modeste image (p. 69).

La chapelle de Notre-Dame-des-Eaux-Dormantes est corrélée à une thématique solaire, qu’on retrouve, affaiblie certes, dans le jeu des couleurs, et elle s’oppose à la

thique d’Henri Bosco dans “L’Enfant et la rivière”, tiques, Paris, L’Harmattan, 2008, pp. 617-629), qui dans P. Schnyder (éd.), Métamorphoses du mythe. lit l’Apocalypse, que Bosco avait traduite en 1942, Réécritures anciennes et modernes des mythes an- en filigrane.

sf177.indb 543 19/12/15 01.04 544 Bruno Tritsmans

dérive dans les eaux nocturnes. Tout se passe comme si l’on trouvait ici un écho de l’Orient et de ses «tartanes bleues». Par ailleurs, ce lieu sacré discrètement rédempteur est ensuite relayé par le «petit théâtre» (p. 74) qui s’est installé dans le village, et de façon significative devant l’église au «porche profond et plein d’ombre» (p. 87). Le théâtre réintroduit la thématique rédemptrice par le biais de la «multitude de petits lampions et de grandes lanternes vénitiennes multicolores» (p. 87), ainsi que par la pièce de marionnettes jouée par Savinien et qui montre à la fois le vol d’un enfant par une sorcière et la réparation par saint Théotime. Tout se passe comme si l’espace théâtral, «filet de charme» d’un «magicien» (p. 92), permettait ainsi de conjurer la menace des eaux dormantes. Après le spectacle, les lampions s’éteignent, mais il est révélateur qu’on ait oublié d’éteindre une chandelle, qui brûle en tremblotant et la lueur de sa flamme invisible épandait au-dessus du léger toit une faible et mystérieuse couronne de lumière (p. 97).

Pascalet s’avoue fasciné par cette lumière fragile, mais la scène est interrompue par la venue de Bargabot. Celui-ci amène en effet «un petit bachot» avec «deux rames immenses et, comble d’arrogance, un mât» (p. 103), et sur lequel il invite Pascalet à «embarquer». Il hisse ensuite la toile «rapiécée» et appareille (p. 104), coupe les «tourbillons noirs» et saute «par-dessus les eaux tumultueuses» (p. 104). On voit que Bargabot reprend ainsi, avec ce radeau à la voile «rapiécée», le fil de l’aventure marine du corsaire, et ce d’autant plus qu’il possède une «immense canardière» qui laisse dans les airs «une longue traînée d’étincelles rougeâtres» (p. 104)30.

Temples et nébuleuses

Face à la dérive et à l’engloutissement qui menacent son imaginaire marin axée sur le corsaire, l’écriture de Bosco tend vers la complétude symbolique, vers ce que Paul Ricœur appelait les «grands symbolismes»31. C’est dans ce sens aussi qu’on peut lire la «Maison de Dieu», mais aussi, plus généralement, la fascination de Bosco pour «les temples au bord de la mer, puissamment assis sur la terre sombre»32, et dont le château de Lourmarin a sans doute été, à ses yeux, une des formes tangibles: Je bâtis sans cesse au sein de mes nuées.

Ou encore: Je construis des temples au milieu des nuages33.

(30) Dans Bargabot (1958) surgit à nouveau le p. 36), et à R. Ytier, Bosco, l’amour, la vie, Lyon, Au- souvenir du corsaire, sujet de «tout un livre à faire» banel, 1996, p. 190. L. Marco (Quand les nuages ont (p. 72), mais Bargabot même, blessé par les no- un destin, «Cahiers Henri Bosco», 11, (avril-octobre mades, meu rt en dérivant dans sa barque (p. 82). 1976), pp. 72-75) a épinglé les mêmes images. Sur (31) P. Ricœur, Le symbole donne à penser, «Es- le château de Lourmarin, voir W.P. Romain (Henri prit», 27, (juillet-août 1959), p. 71. Voir encore son Bosco à Lourmarin, «Cahiers Henri Bosco», 30-31, entretien avec F. Ewald (Paul Ricœur: un parcours (1990-1991), pp. 167-192), et G. Riegert (De Naples philosophique, «Magazine littéraire», 390, (sep- à Lourmarin, une amitié méditerranéenne. Henri tembre 2000), p. 20 e.s.). Bosco-Jean Grenier, dans G. Dugas (éd.), La Médi- (32) Songe du temple, «Cahiers Henri Bosco», terranée, de Audisio à Roy, Paris, Manucius, 2008, 8-9, (1975), pp. 3-4. pp. 49-55). Il est révélateur que Bosco ait refusé (33) Ces citations sont empruntées au Diaire de d’écrire sur le château: «Le château, c’est le château, 1963 («Cahiers Henri Bosco», 39-40, (1999-2000), il se suffit à lui-même» (R. itierY , op. cit., p. 159).

sf177.indb 544 19/12/15 01.04 Marines fantômes. Aventures et mythologies de la mer chez Henri Bosco 545

Cette poussée informe à la fois le trajet du Trestoulas à L’Epervier, mais aussi le détail de la poétique de L’Enfant et la rivière. On voit que la «maison de Dieu», appelée à conjurer la dérive mais réinvestie par le fantomatique, y prend des formes fragiles, tels la chapelle aux figures effacées et le théâtre de marionnettes34. C’est à cette fragilisation de la complétude mythique que Maurice Blanchot s’était montré très sensible dans sa lecture de Hyacinthe35, et il est révélateur que Bosco ait à l’occasion évoqué une poétique de l’«à peu près»36, proche de cet art de la mètis cher à Dédale37, et dont le tissage des fils de nuages par le vent «à travers un treillis léger de vapeurs»38 offre une très belle image emblématique.

bruno tritsmans

(34) Il faut mentionner ici, en miroir, le double Georges Lemoine», Georges Lemoine, écrire, des- travail d’illustration de L’Enfant et la rivière par siner, Avranches, Editions H. de l’Abbaye, 2009, Georges Lemoine, qui cherche à conjurer la bri- pp. 14-31). sure par l’aquarelle (Gallimard, 1967), marquée (35) M. Blanchot, Faux pas, Gallimard, 1943, par l’alliance entre les éléments et par une dyna- p. 221. mique ascendante (oiseaux, papillons), ou par le (36) Pages du “Diaire”, «Cahiers Henri Bosco», dessin (Gallimard, 1979) et son jeu du microcosme 39-40, (1999-2000), p. 32. et du macrocosme, du détail et de la totalité (le mur (37) Sur Dédale et l’artisan, voir M. Détienne et en pierres sèches, les galets de la rivière qui des- J.-P. Vernant, Les Ruses de l’intelligence. La mètis sinent des figures,…). Voir sur ce point l’introduc- des Grecs (Paris, Flammarion, 1974), et F. Frontisi- tion de F. Vie à Georges Lemoine. La terre, l’eau, Ducroux, Dédale: mythologie de l’artisan en Grèce, le ciel (Paris, Gallimard, 1987), et la belle étude Paris, Maspéro, 1975. d’I. Roussel-Gillet («Les petites musiques de (38) L’Enfant et la rivière cit., p. 44.

sf177.indb 545 19/12/15 01.04 laura brignoli

La part du romanesque dans l’hétéro-autobiographie de Robbe-Grillet

Abstract In the light of the recent, lively critical debate on the “Romanesque”, I have considered the ideas Robbe-Grillet has expressed in his criticism and fiction in order to clarify the meaning it has for him and the role it plays in his Romanesques. I have examined Pour un nouveau roman, Le Voyageur, his latest collection, and the Correspondance, following the development of an idea which, subsequently, I compared to the Romanesques. I found out that for Robbe-Grillet the romanesque adds an essential ingredient to the strength of passion, in both life and fiction: simulation. Only a disproportionate representation, which is obviously false, can approach the intensity of the “fantasme” understood in the Freudian sense. Fictionalizing his autobiography allowed him, also, to represent himself in the act of writing, in his specific function of inventor of stories, thus abstracting his work from the problem of reality and fiction which autobiogra- phy inevitably implies.

à l’origine des Romanesques de Robbe-Grillet, on sait qu’il y avait le projet d’un «Robbe-Grillet par lui-même»1 qui devait paraître aux éditions du Seuil, mais qui n’a, dans les faits, jamais vu le jour, ayant été remplacé par la trilogie autobiographique2. Cet ouvrage devait faire partie de la collection «Écrivains de toujours» à laquelle Roland Barthes avait, lui aussi, participé avec un texte fragmentaire3 dans lequel la notion de sujet est éclatée (il ne se désigne en effet qu’à la troisième personne du singulier ou à la première du pluriel, ou encore par ses initiales). Ce refus du sujet, d’intrigue et de personnages s’accompagne chez Barthes de l’utilisation du roma- nesque tel qu’il l’entend, à savoir «un mode de notation, d’investissement, d’intérêt au réel quotidien, aux personnes, à tout ce qui se passe dans la vie». Ce choix est à l’origine d’un texte ainsi décrit: C’est un discours romanesque plus qu’un discours intellectuel et c’est pourquoi il accepte parfois d’être un peu bête. Dans la mesure où ce n’est pas le sujet intellectuel qui s’identifie avec ce qu’il énonce, mais un autre sujet, un sujet romanesque, qui accepte donc de lâcher par- fois des idées ou des jugements que le sujet trouve un peu bêtes, mais qu’il lâche tout de même parce que cela fait partie de son imaginaire. Et sans le dire4.

Les deux notions fondamentales évoquées ici (sujet et romanesque) nous seront utiles pour nous glisser dans l’autobiographie de Robbe-Grillet par le biais de l’éti- quette qu’il a voulu y coller à partir de la parution du deuxième volume et bien avant

(1) Il en parle au tout début du Miroir qui re- (2) En réalité, dans la note qu’il met en bas de vient, Éditions de Minuit, 1985, p. 10. Dorénavant page, il affirme que l’écriture de ce livre avancerait cité sous le sigle MR placé immédiatement après la «en parallèle» avec celle des Romanesques. Mais on citation. De même, A renvoie à Angélique ou l’en- sait que cela n’a jamais dépassé le stade de projet. chantement, et DJC au dernier tome de la trilogie, (3) Roland Barthes par Roland Barthes, Seuil, Les Derniers Jours de Corinthe, parus également 1975. chez Minuit, respectivement en 1988 et en 1994. (4) Leçon, III, Seuil, 1995-96. «Vingt mots-clés pour Roland Barthes», p. 327.

sf177.indb 546 19/12/15 01.04 La part du romanesque dans l’hétéro-autobiographie de Robbe-Grillet 547

la rédaction du troisième. Ce n’est en effet qu’en 1988 que la rubrique «Ouvrages d’Alain Robbe-Grillet» figurant au verso du titre se conclut de la manière suivante:

Romanesques Le miroir qui revient, 1985 II. Angélique ou l’enchantement, 1988 III. La mort de Corinthe, à paraître un jour.

Du coup, les lecteurs se sont rendu compte qu’il s’agira là d’une trilogie (le der- nier volume paraîtra en 1994 sous le titre Les derniers jours de Corinthe) et que le côté romanesque est plus important que ne le laissait supposer la désignation d’«autobio- graphie» (MR, 16), utilisée de prime abord. L’étiquette finalement choisie après quelques hésitations5 n’est pas passée ina- perçue, d’autant plus qu’elle était affichée sur la prière d’insérer, mais elle a été éva- cuée un peu rapidement comme une «provocation suprême»6, à laquelle, venant de cet auteur, on pouvait, tout compte fait, s’attendre. Dans ce qui suit, nous cherche- rons à faire la part du romanesque, autrement dit à mettre en lumière la fonction que revêt cette notion dans la trilogie autobiographique. Mais avant d’entrer dans le vif du sujet, il est nécessaire de s’arrêter sur la signifi- cation courante de ce terme. Le Trésor de la langue française donne cinq définitions de ce substantif, qui vont du sens propre lié à ce qui concerne le «roman», aux sens figu- rés de «Caractère original, captivant, lyrique de quelque chose», «Amour sentimen- tal, imagination débordante, goût des intrigues, de l’extraordinaire, idéalisme», «Ce qui sort de l’ordinaire, ce qui jouit d’un prestige particulier», «Esthétique de l’imagi- nation, du rêve». Ces définitions neutres du substantif s’accompagnent pourtant de caractérisations plus marquées au niveau de l’adjectif. Est défini comme romanesque ce qui est «digne de figurer dans un roman par son caractère pittoresque, singulier, peu banal; qui excite l’imagination» ou encore: «qui se complaît dans les sentiments élevés, hors du commun, dans la passion, la poésie; qui se fait de la vie, de la personne aimée une conception idéale, peu en rapport avec la réalité; qui se laisse aller aux caprices de l’imagination, de la rêverie». La césure de la dernière définition d’avec le réel nous transporte résolument en dehors de la fiction: «Qui évoque un roman par son caractère fictif, mensonger, son manque de vérité». On sait bien en effet qu’il se- rait arbitraire de définir les fictions qui ne sont ni vraies ni fausses, comme «menson- gères». Le problème se pose différemment dans le cas de l’autobiographie, bien sûr. Quoi qu’il en soit, le terme romanesque, qu’il soit pris comme adjectif ou subs- tantif, semble résumer toutes les caractéristiques de ce que Robbe-Grillet avait vigou- reusement contesté dès ses débuts littéraires. Appartiennent au «flot romanesque»7 ces quelques notions «périmées» qu’il entreprend de battre en brèche pour fonder les assises d’une nouvelle façon de raconter, qui sache dépasser les stéréotypes formels des romans traditionnels, où «l’invention, l’imagination, deviennent à la limite le sujet du livre»8. La trilogie autobiographique ne contredit pas ces principes précoces: travaillée de trous et de manques, dépourvue de causalité, n’ayant même aucun souci chrono- logique, elle conteste le romanesque tel qu’il était conçu par le jeune Robbe-Grillet.

(5) «En fait je n’ai pas su quoi mettre sur la cou- (6) J.-M. de Montremy, Robbe-Grillet, le désen- verture» avoue Robbe-Grillet dans une conférence chanteur, «La Croix», 4 février 1988. à l’Ens en 1986 publiée dans M. Contat (éd.), (7) Pour un Nouveau Roman, Éditions de Mi- L’auteur et le manuscrit, Presses Universitaires nuit, 1963, édition de référence: Gallimard, 1968 de France, 1991, pp. 37-50 et dans Le Voyageur, («Idées»), p. 35. p. 255. (8) Ibid., p. 36.

sf177.indb 547 19/12/15 01.04 548 Laura Brignoli

L’étiquette choisie serait alors paradoxale, énonçant le contraire de ce que contient le livre. Mais entre-temps, cette notion a pris des contours plus précis qui, en fait, peuvent être convoqués pour expliquer le sens du titre collectif et enlever une part de paradoxe, pour le réintroduire ailleurs. Car si l’écriture globale de la trilogie de- meure contraire au romanesque, certains passages n’en relèvent pas moins, et du romanesque le plus «outrageux»9. Il importe alors d’en élucider le sens et la fonction. Le sens a été appréhendé par le biais de toute une série de réflexions et débats qui se sont succédé depuis 199610, donnant ainsi lieu à des distinguos et des caractéri- sations très utiles pour qu’on puisse s’orienter à l’intérieur de cette notion. Aussi faut- il immédiatement laisser de côté le sens générique, qui identifie le «romanesque» à «ce qui concerne le roman», et qui peut même désigner les narrations les plus antiro- manesques, pour privilégier le sens thématique «qui contient ou qui forme des idées, des images, des rêveries dignes des romans. Une imagination romanesque. Tempé- rament romanesque – Une personne romanesque – passionné, rêveur, sentimental»11. Jean-Marie Schaeffer12 énumère quatre caractéristiques essentielles de l’éthos roma- nesque, que l’on peut résumer comme suit: 1) L’importance des passions dans leurs manifestations les plus extrêmes; 2) Des typologies actantielles tout aussi outrées et polarisées; 3) La prolifération des événements; 4) Le contre-modèle de la réalité. C’est cette vision du romanesque qui tend à catalyser les plus récentes réflexions sur le sujet13, et qui s’inscrit à contre-pied de la vision barthésienne. Barthes ne nous offre pas de définition nette de cette notion mais, en cherchant à démêler ses ambi- guïtés14, on arrive à comprendre qu’il oppose le romanesque à l’intellectuel comme ce qui a trait à la vie vécue, même au quotidien, contre ce qui se limite à en analyser les épures. Ailleurs, il pousse plus loin sa vision du romanesque qui n’est «ni le faux, ni le sentimental»15 mais ce qui sans posséder la continuité du roman, sans évoquer à la troisième personne des personnages qui, de surcroit ont un nom propre, sort de l’essai et donne accès à la littérarité. L’idée barthésienne place donc cette notion sur un versant de valorisation de l’écriture, ce qui ne correspond pas à l’idée générale- ment admise dont on a, ces derniers temps, examiné les facettes. Si, hors du roman,

(9) «Les deux protagonistes [l’auteur et Co- des cultures, le sens thématique du mot roma- rinthe] sono traités différemment, le premier dans nesque est cité avant son sens générique. un registre classiquement autobiographique, à la (12) «La catégorie du romanesque», in G. De- première personne, le second sur un mode outra- clerq et M. Murat (éd.), Le Romanesque, Presses geusement romanesque, à la troisième». Ph. Gas- Sorbonne Nouvelle, 2009, pp. 291-302. parini, Autofiction, une aventure du langage, Seuil, (13) Voir les articles de A. Schaffner «Le 2008, p. 139. romanesque: idéal du roman?» et de Th. Pavel, (10) La revue «L’Atelier du Roman» a été la «L’axiologie du romanesque», in Le Romanesque première à s’intéresser à la question en lui consa- cit., pp. 267-282 et 283-290. Le Centre d’études crant quatre articles: Y. Hersant, Le roman contre du roman et du romanesque de l’Université de le romanesque, 6, 1996, pp. 145-153; Ph. Roger, Picardie publie, depuis 2004, une revue consacrée Sceicco bianco contre chevalier blanc, 8, 1996, à des études sur la notion de Romanesque au titre pp. 147-161; Th. Pavel, Les sources romanesques éponyme. B. Pingaud est le seul romancier-critique du roman, 10, 1997, pp. 139-161; L. Proguidis, contemporain à s’être posé la question dans La Roman égale romanesque, 8, 1996, pp. 187-201. bonne aventure. Essai sur la «vraie vie», le roma- Tous ces articles ont été traduits et publiés dans le nesque et le roman, Seuil, 2007. volume Romanzo e romanzesco, Pesaro, Metauro (14) Comme le fait E. Bury, Barthes “romanesque”, edizioni, 2004. Plusieurs autres suivront, voir les «L’Information littéraire», LI, 4, octobre-décembre notes suivantes. 1999, pp. 42-51, repris dans Fabula http://www. (11) A. Rey, Dictionnaire culturel en langue fran- fabula.org/forum/barthes/18.php (consulté la der- çaise, Paris, Le Robert, 2005. L’emphase est dans le nière fois le 24 février 2014). texte. Comme il est logique dans un dictionnaire (15) «Au séminaire», 1974, III, p. 22.

sf177.indb 548 19/12/15 01.04 La part du romanesque dans l’hétéro-autobiographie de Robbe-Grillet 549

le romanesque peut s’avérer une forme de valorisation, dans le roman, il revêt une connotation négative. Robbe-Grillet lui-même tend à cristalliser dans le «modèle romanesque» (MR, p. 17) les lois d’un genre devenues si conventionnelles qu’elles le font sombrer dans le factice. Mais plus que son sens générique – donc formel – ce qui nous intéresse c’est la définition thématique de romanesque, qu’en 1958 il voyait se concentrer dans la tragédie: Le domaine d’élection de la tragédie [est] le «romanesque». Depuis les amoureuses qui se font bonnes sœurs jusqu’aux policiers-gangsters, en passant par tous les criminels tourmentés, les prostituées à l’âme pure, les justes contraints par leur conscience à l’injustice, les sadiques par amour, les déments par logique, le bon «personnage» du roman doit avant tout être double. L’intrigue sera d’autant plus «humaine» qu’elle sera plus équivoque. Enfin le livre entier aura d’autant plus de vérité qu’il comportera de contradictions16.

En trente ans de travail, la notion évolue, et l’adjectif se module. Il l’utilise encore à deux reprises dans sa trilogie pseudo-autobiographique, en premier lieu dans un sens générique pour évoquer ses propres travaux qu’il définit comme étant d’«aléatoires architectures romanesques» (DJC, p. 143). L’autre occurrence, douze pages plus loin, est plus intéressante mais son sens n’affleure que si l’on considère la manière dont Robbe-Grillet enchaîne la narration, adoptant pour passer d’un sujet à l’autre ce qu’il avait défini comme la «structure de glissement»17: il parle d’Henri de Corinthe marchant dans un «désastreux cimetière des identités et des uniformes» (DJC, p. 153), représentation explicite d’une certaine écriture, vers lequel l’a conduit sa réflexion sur le «roman en ruine» (DJC, p. 152). Admettant l’émergence irrationnelle de ce souvenir18, il enchaîne sur l’évocation d’un flacon de parfum, le Narcisse noir de Caron: Le nom prédestiné du parfumeur, passeur des morts, a dû se joindre dans mon imagi- naire d’enfant rêveur à une observation personnelle souvent répétée: quand on penche trop le corps pour se regarder dans la mare d’un sous-bois, le visage qui apparaît au fond de l’eau semble noir. […] Ainsi c’est un moi négatif dont le clair Narcisse était amoureux et qu’il voulait embrasser pour se confondre avec lui (DJC, p. 155. Nous soulignons).

L’emblème mythique de l’écriture du moi, Narcisse19, s’éprend ici d’une image qui a été abolie de la face claire de l’existence, son image négative, et c’est celle-ci, perçue de façon «fugitive», qui va bientôt se placer du côté de l’improbable, du rêve: «À peine quelques années plus tard, elle apparaît comme une pure vision onirique […] devenue avec le temps de moins en moins crédible, de plus en plus irréelle, romanesque» (DJC, p. 155. Nous soulignons). Le romanesque est donc une vision onirique que, tout “irréelle” qu’elle est sous l’angle référentiel exigé par l’autobiographie, on aurait pourtant tort de croire dénuée de liens avec la réalité, parce qu’en fait, c’est sa face négative: elle tend à obliquer vers l’imaginaire et là, plongeant ses racines dans le vécu, elle trouve, par là même, les moyens adéquats pour faire surface.

(16) «Nature, humanisme, tragédie» in Pour un (19) N’oublions pas qu’une des premières études Nouveau Roman, cit., p. 69. sur la littérature personnelle est le Narcisse roman- (17) A. Robbe-Grillet, Le Voyageur, Christian cier de J. Rousset (Corti, 1973) qui se termine avec Bourgois éditeur, 2001, p. 153. un chapitre sur La Jalousie de Robbe-Grillet. (18) «Selon une logique dont l’enchaînement m’échappe» (DJC, p. 154).

sf177.indb 549 19/12/15 01.04 550 Laura Brignoli

Si on pouvait avoir eu la tentation de placer le romanesque robbe-grilletien à l’opposé de la réalité, l’analyse du passage que nous venons de citer montre qu’il n’en est pas ainsi, ou mieux que la réalité et la vérité, travaillées par l’existence, soumises à ses aléas, ne restent telles que si l’on parvient à en montrer les ambiguïtés. Lorsque la vérité prend une majuscule, elle devient dogme (MR, p. 11) et instrument de l’op- pression20. Pour que la réalité et la vérité coïncident, elles doivent laisser percer les failles, les trous, les fêlures mais surtout les possibilités et les significations infinies ou l’insignifiance des objets et des individus. On en trouve un exemple encore plus explicite dans un texte de Robbe-Grillet destiné à présenter Roland Barthes. Non pas une image de Roland Barthes, mais l’individu dans sa complexité21. Après avoir tenté de l’appréhender pendant quatre pages, il constate que la description conséquente, logique, risque de donner de l’homme une image monolithique qui ne lui correspond nullement, qui le dissèque. Il n’a alors qu’une possibilité: «l’inventer à [sa] guise, ouvertement»22. Il nous présente ainsi un Roland Barthes romancier, c’est-à-dire ce que celui-ci n’a jamais réussi à devenir, mais qu’il a intensément désiré être23. Un Roland Barthes finalement délivré de ses peurs et de ses cuirasses, vivant sur le mode joyeux ce qui dans sa vie avait été source d’obsessions inexprimées. Ainsi donc, le romanesque prend ici la forme d’un désir, l’image, la réalisation onirique de tout ce qui était enfoui en lui: le côté négatif de son existence et, en même temps, le plus ambigu, le plus énigmatique, contradic- toire et complexe. En un mot, romanesque: «les boîtes les plus animées de Paris, […] Palaces24 de la drague et du romanesque». Le romanesque robbe-grilletien dans la dernière période de sa production appa- raît donc bien éloigné de tout ce que l’on désigne normalement par ce terme. Mais pour que ce sens n’aille pas jusqu’à exclure les autres, voilà qu’on trouve aussi dans son autobiographie les éléments empruntés au romanesque le plus stéréotypé, contre- modèle de la réalité où les aventures prolifèrent et où les épisodes sont souvent inter- changeables et qui revêt ici la forme de roman d’espionnage, roman de guerre ou roman chevaleresque. On ne saurait opérer un tri entre ces trois réalisations d’une même expression romanesque: le roman d’espionnage prime, mais parfois la pré- sence d’un uhlan, d’une charrette qui transporte une jeune fille blonde, ou une clai- rière et une source dans un bois construisent une ambiance chevaleresque xve siècle, qui glisse aussitôt vers la scène de la première guerre mondiale et sans transition se confond encore avec l’atmosphère louche et corrompue des luttes pour le pouvoir en Amérique latine. Si l’on peut isoler sans mal les pages romanesques du Miroir 25, il n’en va pas de même avec le deuxième volume, Angélique ou l’enchantement, qui ne

(20) Le Voyageur cit., p. 168. (Barthes)», Fabula/Les colloques, Enseigner la litté- (21) «Un Roland Barthes de plus», Le Voyageur rature à l’université aujourd’hui, URL: http://www. cit., pp. 171-177. fabula.org/colloques/document1483.php, page (22) Le Voyageur cit., p. 175. consultée le 25 mars 2014. Par. 31. (23) Et qu’il n’a pu que se préparer à être. Voir (24) Le Palace est le nom d’une boîte de renom La Préparation du roman I et II. Cours et séminaires des années 60-80, qui réunissait le Tout-Paris et qui, au Collège de France (1978-1979 et 1979-1980), dans les années 70, a vu l’émergence de la culture gay. texte établi, annoté et présenté par N. Léger, Paris, (25) Au point qu’on a pu observer que leur Seuil/Imec, 2003. Robbe-Grillet semble prendre nombre augmente progressivement jusqu’à l’épi- au pied de la lettre le titre de ce cours. F. Schuere- sode central du miroir pour diminuer ensuite de là wegen considère qu’en fait c’est justement là que à la fin du volume: A. Goulet, «L’Autre de l’écri- Barthes a pleinement réalisé son désir, inventant ture du Moi: Henri de Corinthe, le vampire», in une forme nouvelle: «Il s’agit du projet d’écrire une A. Hornung et E. Ruhe (dir.), Autobiographie & “seconde” Recherche du temps perdu, sous la forme, Avant-garde, Actes du colloque de Mayence (21, 22 non pas d’un roman, mais d’une série de cours faits et 23 juin 1990), Tübingen, Gunter Narr Verlag, au Collège de France…», «Du mépris de la rigu- 1992, pp. 53-68. eur philologique comme dispositif pédagogique

sf177.indb 550 19/12/15 01.04 La part du romanesque dans l’hétéro-autobiographie de Robbe-Grillet 551

présente plus aucune régularité dans l’apparition des fragments, lesquels sont aussi nettement plus nombreux. Dans le dernier volume, ils diminuent en nombre, mais occupent la plus grande partie du récit et dans la partie centrale du volume, les pages de fiction se confondent avec des souvenirs vérifiables. Robbe-Grillet n’aura pas été le premier à affirmer que le «biais de la fiction est beaucoup plus personnel que la prétendue sincérité de l’aveu» (MR, p. 17) et non seulement parce que l’écran protectif de l’invention narrative donne toutes les libertés d’expression du moi, mais aussi parce que d’une part, seule l’aventure roma- nesque est capable de trouver les mots et les situations aptes à représenter l’infinie variété et ambivalence de toute aventure humaine, et que de l’autre, il montre «par l’exemple l’impossibilité de clarifier les rapports que les conditions situationnelles de la vie entretiennent avec le processus mental de la production fictionnelle» 26. Mais cette interprétation n’explique qu’en partie l’insertion, dans l’autobiogra- phie, de ces traits «outrageusement romanesques», dont il était «facile de se mo- quer»27 en 1958. Le romanesque recèle donc tout l’excès que l’on trouve dans ce contre-modèle de la réalité, et qu’il a voulu insérer dans son autobiographie dans ses traits les plus traditionnels: le miroir magique28, la jeune fille perdue dans les bois, la lavandière à la robe candide qui va bientôt se tacher de sang, la chaussure à haut talon sur la charrette, etc. C’est là que les passions donnent libre cours à leurs mani- festations les plus extrêmes, confinant même à la violence. Le romanesque est affiché, voire exhibé, parce qu’il doit fonctionner comme un masque: Personnellement je suis de ceux qui croient – comme Sophocle – à la valeur cathartique des représentations effectuées au grand jour. Mais, pour que cette fonction puisse opérer plei- nement, les acteurs athéniens portaient des masques stéréotypés sur le visage, afin de détruire toute possibilité d’illusion réaliste (A, p. 198. Nous soulignons).

La fiction romanesque dans cette hétéro-autobiographie fonctionne pour lui comme le masque du théâtre grec, qui évite «que le spectateur naïf, ou le lecteur, ne cède à la douceur de s’identifier sans réfléchir à l’acte représenté» (ibid.) et comme lui, elle doit être stéréotypée. Voilà pourquoi il utilise le patrimoine romanesque le plus reconnaissable et que, tout en la stigmatisant, il ne se prive pas d’avoir recours à l’«adjectivité poisseuse» (MR, 55), et même «la plus sirupeuse» (A, p. 84) dans de longs passages fictionnels29. Pour que le masque exerce son rôle et qu’il stimule la réflexion, il doit être bien visible et alors il l’affiche.

(26) P. Van Den Heuvel, «Réel imaginaire et ligne par l’Université de Stuttgard: http://www.uni- imaginé vécu dans les Romanesques d’Alain Robbe- stuttgart.de/romlit/forschung/astree/book1.htm). Grillet», in A. Hornung et E. Ruhe (dir.), Autobio- Mutatis mu­tandis, ce passage de l’Astrée constitue graphie & Avant-garde cit., pp. 109. un intertexte important pour Le Miroir qui revient: (27) Pour un nouveau roman, op. cit., p. 69. il renvoie à un des romans où le romanesque s’ex- (28) Ce miroir magique rappelle un épisode d’un prime dans toute sa force. roman baroque, qui est considéré un des arché- (29) Comme le suivant: «Le visage du conte types du romanesque: l’Astrée d’Honoré d’Urfé. Henri, épuisé par son travail sans fin et par le Au centre du pays édénique dans lequel est située manque de repos nocturne, laisse cependant un l’histoire centrale, Fôret, se trouve la «fontaine de pâle sourire s’ébaucher sur ses lèvres lasses, à cette la vérité d’amour», source enchantée dans laquelle, double évocation du solitaire roc noir devenu en s’y penchant pour se mirer, on voit le visage de gigantesque (bête d’un Gévaudan légendaire qui la personne aimée, à côté de laquelle on verra celui mesurait plus d’un mètre au garrot) et du bourdon ou celle qu’il aime. C’est devant cette fontaine ma- fantôme que mettait en branle le héros infernal gique que se conclut la cinquième partie du roman immortalisé par Barbey d’Aurevilly» (DJC, p. 158. écrite par son continuateur Baro (cinquième par- Nous soulignons). tie, livres VII-XI, cfr. l’édition électronique mise en

sf177.indb 551 19/12/15 01.04 552 Laura Brignoli

À la fonction «cathartique»30, s’ajoute néanmoins un autre aspect qui dépasse le champ strictement littéraire pour concerner une attitude envers la vie. Il est exposé sans détours une seule fois, dans la Correspondance, où Robbe-Grillet, après avoir résumé les étapes de la liaison entre Catherine et lui, dit ceci: Et nous entrons ainsi, maintenant, dans une période que je qualifierais de «psycholo- gique», celle du drame! Toutes les apparences y sont: gifles, larmes, repentir et pardon. Mais, une fois de plus, la part de fiction y paraît étrangement présente, comme si nous étions inca- pables de sentiments simples, honnêtes, tout d’une pièce; or, les tiens sont ambigus et réticents, sans cesse contaminés par l’expression truquée que tu leur donnes; quant aux miens ils s’em- pêtrent à chaque instant dans les miroirs d’une «pensée» toujours présente, qui me condamne à ne vivre, le plus souvent, que de reflets.

Son esprit «travailleur» s’interpose entre lui et la vie et fait écran. Mais il conti- nue aussitôt de cette façon: Ne va pas en conclure, pour autant, que ce drame manque d’intérêt, ou de force. Sou- viens-toi de ce qui se passe pour les amours charnelles: elles n’atteignent leur paroxysme que dans les fictions, les images, les symboles, les mythes31.

En fait, la fiction est bel et bien ce qui permet même aux amours charnelles d’ar- river à l’acmé, à un degré d’intensité que n’a pas la vie. Ainsi donc, la fiction permet, d’une part, de construire une complexité et une ambiguïté que l’aveu tend à exclure, et de l’autre, elle contient tout naturellement cet ingrédient indispensable à la force des passions: la simulation, le jeu. Ce n’est pas un hasard si les références à la simula- tion, au théâtre, aux rites, abondent dans les œuvres de Robbe-Grillet: les exemples sont légion et vont de «La chambre secrète», la dernière des Instantanés, animation à l’envers d’un tableau qui représente une scène dans «quelque édifice, temple ou théâtre»32, jusqu’à la «réunion» qui, en fait, se déroule comme «un dialogue préfa- briqué entre trois personnages» suivant un «scénario» «consacré aux justifications théoriques du crime» du Projet pour une révolution à New York33. Mais les exemples se multiplient dans chaque ouvrage de notre auteur. Le romanesque permet alors bien plus que d’inclure les fantasmes dans la représentation d’une vie qui n’a fait que s’en nourrir: il est ce qui permet la représentation démesurée qui, seule, a quelques chances de se rapprocher de la beauté et de l’intensité du fantasme. Force est de constater que l’importance de la fiction va bien au-delà de la litté- rature et se répercute directement sur la perception de la vie. C’est comme si Robbe- Grillet n’était capable de vivre qu’en passant par la fiction, qu’on l’appelle simu- lacre, théâtre, ritualisation… ou écriture. Mais il ne faut pas confondre cela avec l’incapacité proustienne de vivre ailleurs que dans la littérature34. C’est un masque que Robbe-Grillet interpose entre lui et les événements – certains événements – pour qu’ils soient vécus librement dans toute leur force. Dans l’œuvre, cela ne lui sert pas seulement à souligner la véridicité de la fiction par rapport à la confession, permettant une «explicitation de l’unité du vécu et de l’imaginé»35, mais il définit l’attitude d’une vie qui a besoin de la fiction – rituelle à l’occurrence – pour vivre à fond ses émotions.

(30) Il faut bien mettre le mot entre guillemets, (33) Éditions de Minuit, 1970, pp. 37-38. puisqu’il est loin de renvoyer à la catharsis grecque, (34) Souvenons-nous d’une des plus célèbres supposant un horizon moral commun qui manque citations de À la Recherche du temps perdu: «La dans l’œuvre de Robbe-Grillet. vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la (31) Alain et Catherine Robbe-Grillet, Corres- seule vie par conséquent réellement vécue, c’est la pondance 1951-1990, Fayard, 2012, p. 47. Nous littérature», M. Proust, Le Temps retrouvé (1927), soulignons. Gallimard («Pléiade»), p. 895. (32) Instantanés, Éditions de Minuit, 1962, p. 102. (35) P. Van Den Heuvel, art. cit., p. 109.

sf177.indb 552 19/12/15 01.04 La part du romanesque dans l’hétéro-autobiographie de Robbe-Grillet 553

Si Robbe-Grillet enveloppe sa vérité de romanesque, ce n’est pas seulement – ou mieux pas tant – parce qu’elle est indicible, soumise à la plus sévère des censures, mais bien parce que ce n’est qu’à travers le romanesque – que l’on doit appréhender au sens de stéréotype, de rite culturel – qu’elle s’avère, s’épanouit et devient finale- ment réelle. Paradoxalement, c’est donc la partie fictionnelle de sa narration qui au- thentifie son autobiographie. Et non pas parce que l’on reconnaît à la fiction l’expres- sion d’une vérité qui dépasse la contingence36, mais parce que ce n’est qu’à travers la représentation que certaines vérités peuvent s’exprimer dans toute leur intensité. On aura dès lors bien compris que l’étiquette de la trilogie est bien plus qu’une simple boutade paradoxale, digne de cet auteur iconoclaste. Mais prenons encore en considération sa fonction par rapport à la spécificité autobiographique. Celle-ci implique en fait la coïncidence entre Protagoniste, Auteur et Narrateur, au point que le narrateur devient inutile ou inopérant car c’est «tout bonnement l’auteur qui raconte»37. À moins que l’auteur ne veuille insérer dans son autobiographie l’activité de narrateur qu’il a exercée toute sa vie: il continuera alors à reconnaître de façon autonome la fonction du narrateur. À partir d’une certaine date, Robbe-Grillet a subordonné toute son existence à l’écriture. Cette tâche a depuis lors primé sur toute autre, y compris sa vie familiale38. Comment pouvait-il mieux représenter l’authen- ticité de quelqu’un qui a été essentiellement un écrivain? Tout simplement, en se montrant dans sa fonction la plus spécifique, celle qui consiste à inventer des histoires qui donnent corps aux fantasmes: le romanesque lui permet de se représenter dans sa fonction distinctive d’inventeur d’histoires39. En insérant l’histoire de Corinthe, le je assume pleinement ses fonctions de narrateur. Mais on ne peut pas s’en tenir là: en fait, le redoublement du protagoniste entraîne aussi le redoublement du narrateur. Le je narré est montré en tant que je narrant: Hommes de peu de foi, pourquoi pleurez-vous? écrit à la suite le comte Henri […] Ici, le mémorialiste obstiné que gagne la fatigue s’interrompt un instant, il trempe derechef son stylo- graphe au mécanisme défectueux dans un reliquat de liquide noir au fond du fidèle encrier de verre, cubique, massif, rassurant, mais il demeure la plume d’or en l’air (DJC, p. 144).

Le passage est riche, et répond également à l’objection possible qui consiste- rait à se demander pourquoi, s’il a tant besoin de romanesque, il a tant fait pour le contester: Construire sur des ruines, en effet, ne signifie pas remettre debout quelques nouveau système de cohérence, de vérité, de verrouillage, comme si de rien n’était. C’est au contraire prendre l’état des notions ruinées et la notion même de ruine comme ferment d’une existence à inventer, légère et vacante (DJC, p. 145).

À en croire Thomas Pavel, les sources du roman plongent dans le romanesque40. L’autobiographie traditionnelle, selon Robbe-Grillet, qui prend comme exemple celle de Sartre, Les Mots, cherche les racines d’une vocation, décèle tous les signes de

(36) «Un roman est vrai non en dépit de son roma- établi du roman, à ses règles du jeu» (Le Voyageur, nesque, mais grâce à lui», B. Pingaud, op. cit., p. 51. p. 153) insérer le romanesque le plus usé dans un (37) Voir G. Genette, Fiction et diction, Seuil, récit autobiographique permet de bouleverser les 1991, pp. 87-88. règles du jeu autobiographique, et de continuer à (38) C’est ce qu’il dit à Catherine, que la réalisa- assumer son image d’iconoclaste. Mais cette raison tion de son œuvre venait d’abord. Cfr. Correspon- n’est certes pas la plus importante. dance cit. (40) Th. Pavel, «Les sources romanesques du (39) En même temps, comme «le romancier roman» cit. moderne» est «celui qui refuse de se plier à l’ordre

sf177.indb 553 19/12/15 01.04 554 Laura Brignoli

l’écrivain qu’il était destiné à devenir, va aux sources du romancier en lui construisant une cohérence qu’il ne cesse de critiquer. Lui, par contre, qui refuse la cohérence puisqu’elle ne répond pas à sa perception de la vie, va aux sources du roman. En cherchant, comme tout autobiographe, les sources de soi, il trouve en fait les sources du roman même. Ce qui cadre bien avec la fierté du personnage… On pourrait pousser le raisonnement un peu plus loin jusqu’à trouver dans la «narration de soi»41 le fondement de son être: Robbe-Grillet aurait eu l’intuition qu’il n’existe aucune motivation rationnelle qui soit à la base de nos actions, mais unique- ment des récits, que c’est la narrativité qui réunit les fragments épars d’une person- nalité éclatée42. Mais cela nous amènerait vers des considérations philosophiques par trop éloignées de ce parcours. Limitons-nous à montrer pour conclure qu’insérer le romanesque dans une au- tobiographie revient à choisir l’impossibilité de stipuler un pacte quelconque avec le lecteur43. Au vu de ce que nous venons de dire, il semble évident que Robbe-Grillet veut situer son entreprise pseudo-autobiographique «au-delà ou en deçà du vrai et du faux»44 et ne revendique pour elle qu’un jugement esthétique. Il avait bien raison d’appeler «nouvelle» cette autobiographie qui, tout en restant confession, livre de mémoires, «dépasse l’autobiographie d’un réel advenu et […] retrouve l’autobiogra- phie des possibilités perdues, c’est-à-dire les rêves mêmes, les vrais, les rêves réels, les rêves qui furent vécus avec complaisance et lenteur. L’esthétique spécifique de la littérature est là»45. laura brignoli

(41) «Sans le secours de la narration, le pro- vérifie, l’histoire d’une vie ne cesse d’être refigurée blème de l’identité personnelle est en effet voué à par toutes les histoires véridiques ou fictives qu’un une antinomie sans solution: ou bien l’on pose un sujet se raconte sur lui-même. Cette refiguration sujet identique à lui-même dans la diversité de ses fait de la vie elle-même un tissu d’histoires racon- états, ou bien l’on tient, à la suite de Hume et de tées. […] L’identité narrative n’est pas une identité Nietzsche, que ce sujet identique n’est qu’une illu- stable et sans faille; de même qu’il est possible de sion substantialiste […] Le dilemme disparaît si, à composer plusieurs intrigues au sujet des mêmes l’identité comprise au sens d’un même (idem), on incidents […] de même il est toujours possible de substitue l’identité comprise au sens d’un soi-même tramer sur sa propre vie des intrigues différentes, (ipse); la différence entre idem et ipse n’est autre voire opposées. […] En ce sens, l’identité narra- que la différence entre une identité substantielle tive ne cesse de se faire et de se défaire» P. Ricœur, ou formelle et l’identité narrative. L’ipséité peut Temps et récits III, Le temps raconté, Éditions du échapper au dilemme du Même et de l’Autre, dans Seuil, 1985, pp. 442-443. la mesure où son identité repose sur une structure (42) Voir aussi l’idée lacanienne du moi comme temporelle conforme au modèle d’identité dyna- produit de l’écriture: Ecrits, Seuil, 1966. mique issue de la composition poétique d’un texte (43) D’autres en ont longuement parlé. Cfr., narratif […] À la différence de l’identité abstraite entre autres, l’article de F. Wagner, Des coups de du Même, l’identité narrative, constitutive de canif dans le contrat de lecture, «Poétique», 172, 4, l’ipséité, peut inclure le changement, la mutabi- 2014, pp. 387-407. Il ne nous semble pas nécessaire lité, dans la cohésion d’une vie. Le sujet apparaît reprendre la question dans les détails. alors constitué à la fois comme lecteur et comme (44) G. Genette, Fiction et diction cit., p. 20 scripteur de sa propre vie selon le vœu de Proust. (45) G. Bachelard, La terre et les rêveries de la Comme l’analyse littéraire de l’autobiographie le volonté, José Corti, 1948, pp. 95-96.

sf177.indb 554 19/12/15 01.04 La part du romanesque dans l’hétéro-autobiographie de Robbe-Grillet 555

Bibliographie supplémentaire

Alain Robbe-Grillet: balises pour le xxie siècle, Actes du colloque international d’Ottawa (1er-3 juin 2009), Presses de l’Université d’Ottawa/Presses Sorbonne Nouvelle, 2010. Allemand R.-M., Duplication et duplicité dans les Romanesques d’Alain Robbe-Grillet, Minard, 1991. Autobiographie & Avant-garde, Actes du colloque de Mayence (21, 22 et 23 juin 1990), Gunter Narr Verlag, 1992. Choe A.-Y., «L’écriture et la scène originaire: Le Miroir qui revient», in F. Migeot (dir.), Ambi- guïté et glissements progressifs du sens chez Alain Robbe-Grillet, Actes du colloque de Be- sançon (2002), Besançon, Presses universitaires, Presses universitaires franc-comtoises, 2004. Critique, n. 651-652, août-septembre 2001. Frelick N.M., Hydre-miroir: les Romanesques d’Alain Robbe-Grillet et le pacte fantasmatique, «The French Review», 70, 1, October 1996, pp. 44-55. Gasparini Ph., Autofictions. Une aventure du langage, Seuil, 2008, («Poétique»), chap. VI, pp. 131-146. Gasparini Ph., Est-il je? Roman autobiographique et autofiction, Seuil, 2004. Kamkhagi V., Per un tentativo di definizione della “nouvelle autobiographie” di Alain Robbe- Grillet, «Il Confronto Letterario», XXI, 41, 2004, pp. 261-276. Lejeune Ph., «Nouveau Roman et retour à l’auto-biographie», in M. Contat (dir.), L’Auteur et le manuscrit, Presses Universitaires de France, 1991, pp. 51-70. Marazza C., Le ambiguità della scrittura nell’“auto-biografia” di Alain Robbe-Grillet, «Franco- fonia», 8, 15, 1988, pp. 87-97. Migeot F., Miroir aux revenants, revenants au miroir, «Revue des sciences humaines», 240, 1995, pp. 129-141. Migeot F., Entre les lames: lectures de Robbe-Grillet, Presses universitaires franc-comtoises, 1999, («Annales littéraires»), pp. 67-83. Pautrot J.-L., Robbe-Grillet, Sartre, Duras: mer, musique, écriture, «The French Review», 68, décembre 1994, pp. 274-282. Wagner F., «‘Qu’est-ce que c’est moi?’ (La dialectique intime/extime dans (et autour de) La Reprise, d’Alain Robbe-Grillet)», in A. Mura-Brunel et F. Schuerewegen (dir.), L’intime, l’extime, crin, 41, 2002, pp. 67-79. Wagner F., Le pervers et ses lecteurs. Sur le sado-érotisme robbe-grilletien, «Revue d’études culturelles», 1, printemps 2005, pp. 277-286. Wagner F., Pannes de sens, Apories herméneutiques et plaisir de lecture, «Poétique», 142, 2, 2005, pp. 185-203. Wagner F., Des coups de canif dans le contrat de lecture, «Poétique», 172, 4, 2012, pp. 387-407. Wagner F., Le moi qui revient (Un exemple d’autofiguration: les “Romanesques” d’Alain Robbe- Grillet I), «Vox poetica», 1/1/2013, http://www.vox-poetica.org/t/articles/wagner2012a. html. Wagner F., Ceci n’est pas une autobiographie (Un exemple d’autofiguration: les “Romanesques”, C:\Users\Utente\AppData\Local\Microsoft\Windows\Temporary Internet Files\ Content.IE5\JY7FQS1L\ d’Alain Robbe-Grillet II), «Vox poetica», 13/7/2013 http:// www.vox-poetica.org/t/articles/wagner2012b.html. Wagner F., Raconter est-il devenu proprement impossible? Fabula et intrigue dans l’œuvre roma- nesque d’Alain Robbe-Grillet, «Fabula», http://www.fabula.org/atelier.php?Fabula_et_ intrigue.

sf177.indb 555 19/12/15 01.04 sf177.indb 556 19/12/15 01.04 RASSEGNA BIBLIOGRAFICA

Medioevo a cura di G. Matteo Roccati

Medieval Oral Literature, edited by Karl Reichl, lob, e la premessa del presidente, Stefano Zamponi, Berlin-Boston, De Gruyter, 2012 («De Gruyter Le- il volume si articola in quattro parti che riproducono xikon»), pp. 743. l’articolazione del convegno. La prima parte, propriamente dedicata agli auto- Il libro è un ampio e articolato reading sull’orali- grafi, comprende diciotto interventi ripartiti in set- tà letteraria del Medioevo, dallo sguardo molto am- te sezioni, di cui le prime due contengono contribu- pio: sono infatti variamente rappresentate le aree oc- ti di portata più generale. Nella prima sezione, «Ge- cidentale (romanza e germanica), slava, greca, araba, neral aspects», l’intervento di Everardus Overgaauw persiana, turca ed ebraica. Un’introduzione generale (Comment reconnaître un autographe au Moyen Âge? del curatore (Plotting the Map of Medieval Oral Litera- pp. 3-15) pone l’attenzione sugli elementi da tenere in ture) affronta definizione e confini dell’oralità, toccan- conto nell’identificazione di un autografo in assenza di do in particolare di performance, trasmissione dei testi un’esplicita sottoscrizione da parte dello scriba, men- e formazione dei performers, composizione e presen- tre quello di Teresa de Robertis (Una mano tante scrit- za di tracce di oralità nei testi, generi «orali» o segna- ture. Problemi di metodo nell’identificazione degli au- ti dall’oralità. La prima parte del volume («Concepts tografi, pp. 17-38) invita a riflettere sulle occasioni in and Approaches») affronta i concetti generali e le te- cui uno stesso scriba fa uso di scritture o sistemi grafici orie dell’oralità: rapporti con la letteratura e la cultu- diversi e sulle questioni che questo solleva in merito ra scritta; realizzazioni delle performances e dei perfor- all’attribuzione. Nella seconda sezione, «Autographs mers; definizione di una poetica dell’oralità. La secon- in Learned Societies», Peter Gumbert considera la da parte («Traditions and Genres») traccia vari quadri diffusione degli autografi nella tradizione storiografi- storico-culturali, fra i quali sono di particolare interes- ca esaminando in particolare il caso olandese (Manu- se per il francesista quelli di Dominique Boutet (The scripts of Historians in the Northern Netherland, p. 39- “” and Orality, pp. 353-369), Anne L. 47), mentre Giovanna Murano presenta un excursus Klinck (Woman’s Song in Medieval Western Europe, di autografi italiani riflettendo sulle occasioni del loro pp. 521-554, in partic. 531-535) e Lucilla Spetia (The ritrovamento e sulle ipotesi di attribuzione (Autografi Pastourelle as a Popular Genre, pp. 581-588). di Italiani illustri. Sec. xii-xvi med., pp. 49-66). Seguono cinque sezioni tematiche che offrono casi di studio più [walter meliga] puntuali: «Autographs in Pre-Romanesque Age» (pp. 67-96; fra cui il contributo di Louis Holtz a proposito Medieval Autograph Manuscripts. Proceedings of di Mannon de Saint-Oyend, pp. 87-96), «Autographs th the xvii Colloquium of the Comité International de of High Middle Ages» (pp. 97-162), «Autographs in Paléographie Latine, held in Ljubljana, 7-10 Septem- Northern Europe» (pp. 163-200), «Autographs in Sou- ber 2010, edited by Nataša Golob, Turnhout, Brepols thern Europe» (pp. 201-244; in cui figurano due con- 2013 («Bibliologia», 36), pp. 601. tributi dedicati agli autografi di Matteo d’Acquasparta a cura di Jacqueline Hamesse, pp. 201-208 e Amandine Il volume raccoglie gli atti del XVII convegno pro- Postec pp. 209-226, e un contributo sulle chiose del mosso dal Comité International de Paléographie Latine. Petrarca a cura di Maddalena Signorini (pp. 227-244) L’insieme dei trentasette interventi presentati prende e «Autographs in Hispanic World» (pp. 245-279). in esame un ricco ed eterogeneo insieme di testi (preva- La seconda parte del vol. comprende sei contri- lentemente testi letterari in latino, trasmessi da codici buti dedicati ai progetti in corso in campo paleogra- realizzati fra il ix e il xvi sec.), il cui esame è supportato fico e codicologico: Digital Scriptorium (Consuelo W. da numerosi esempi e riproduzioni fotografiche. Oltre Dutschke, pp. 281-290), German Medieval Manu- alla riflessione sullo statuto dei testi autografi medieva- scripts Online (Rudolf Gamper, Christine Glassner, li, tema centrale del convegno, i contributi presentati Astrid Breith, pp. 291-302), Corpus catalogorum Bel- offrono un panorama delle ricerche in corso in ambito gii (Albert Derolez, pp. 302-310), I manoscritti del- paleografico e codicologico. la letteratura italiana delle origini (Sandro Bertelli, Dopo l’apertura della curatrice del vol., Nataša Go- pp. 311-328), Autografi dei letterati italiani (Giuseppi-

sf177.indb 557 19/12/15 01.04 558 Rassegna bibliografica

na Brunetti, pp. 329-338), e Novissima palaeographica Matthieu Marchal, Variations lexicales et édition: étu- (Stefano Zamponi, pp. 339-347). de comparée des deux témoins manuscrits de “Gérard Le ultime due parti hanno un carattere autonomo de Nevers”, mise en prose du “Roman de la Violette”; rispetto al tema del convegno. La terza parte, intitola- Thomas Verjans, Le linguiste et la variante: quelle(s) ta «APICES Session», raccoglie cinque interventi sele- leçon(s) en tirer?; Marc Kiwitt, Le problème de la va- zionati dall’Association Paléographique Internationale: riance et l’édition des textes en ancien français rédigés Culture, Écriture, Société (pp. 349-428); la quarta par- en caractères hébreux; Christine Silvi, La mouvance te, «Extended Posters», raccoglie i contributi di otto du livre imprimé en français: l’exemple des incunables giovani ricercatori sulle loro ricerche in corso. Fra que- du “De proprietatibus rerum” de Barthélemy l’Anglais sti segnaliamo in particolare: Dominique Stutzmann, dans la traduction de Jean Corbechon. La seconda parte Système graphique et normes sociales: pour une analyse («L’auteur, le copiste, l’enlumineur: variance et créa- électronique des écritures médiévales (pp. 429-434), poi tion») è composta da: Nathalie Koble, L’intratextua- sviluppato nel progetto ANR ORIFLAMMS; Maria lité inventive: la singularité critique d’un compilateur de Gurrado, Ricerche di paleografia digitale: il progetto lais; Olivier Delsaux, Variantes d’auteur ou variance de GRAPHEM (pp. 435-440) dedicato al riconoscimento copiste: ‘l’escripvain’ en moyen français face à la mou- automatizzato ed all’identificazione delle componen- vance de ses manuscrits; Stefania Cerrito, Entre Ovi- ti di base delle scritture medievali; Jakub Kujawinˇ ski, de et “Ovide moralisé”: la variance des traductions des Correzioni di copista o correzioni di traduttore? Indizi “Métamorphoses” au Moyen Âge et à la Renaissance; del carattere autografo del ms. Paris, Bibliothèque natio- Florence Tanniou, Les variantes et le sens de la réécri- nale de France, fr. 688 (pp. 447-452), manoscritto che ture dans les versions du “Landomata”; Sandrine Héri- contiene il volgarizzamento francese di cinque opere ché-Pradeau, «Ceste lame n’ert ja levee» ou l’esthéti- storiografiche latine; Max Schmitz, Le “Viridarium” que du retable dans le “Lancelot propre”; Irène Fabry, de Jean Raynaud. Une encyclopédie inédite de la fin du L’ambassade du roi Loth et de ses fils auprès des barons e e 14 – début du 15 siècle (pp. 481-502). rebelles: variations iconographiques; Matthieu Verrier, Il vol. si chiude con una selezione di riproduzioni Variations sur le mythe d’Actéon dans les enluminures a colori (pp. 489-501), l’indice delle illustrazioni (pp. de l’“Ovide moralisé” et de l’“Epistre Othea”. Una bre- 503-511), l’indice dei manoscritti e dei documenti ci- ve Conclusion di Françoise Vielliard chiude il volume. tati (pp. 513-521), l’indice dei nomi (pp. 523-530), la bibliografia (pp. 531-595) e i contatti dei partecipanti. [walter meliga]

[graziella pastore] Ji-hyun Philippa Kim, Pour une littérature médiéva- le moderne. Gaston Paris, l’amour courtois et les enjeux Cécile Le Cornec-Rochelois, Anne Rochebouet, de la modernité, Paris, Champion, 2012 («Essais sur le Anne Salamon (dir.), Le texte médiéval. De la variante Moyen Âge», 55), pp. 218. à la recréation, Paris, Presses de l’Université Paris-Sor- bonne, 2012 («Cultures et civilisations médiévales», Il lavoro ha come obiettivo lo studio della genesi del 54), pp. 274. celeberrimo concetto di «amour courtois» attraverso l’analisi dei rapporti che il suo inventore Gaston Pa- Il volume discende da un incontro di studi dell’Uni- ris ha intrattenuto con il decadentismo – in relazione versità di Paris-Sorbonne e raccoglie diversi interven- sia ai suoi studi sia alle sue frequentazioni personali – e ti sulla questione, particolarmente sentita nella cultura delle ricerche che egli ha dedicato alle opere del Me- accademica francese, della variazione ovvero della mo- dioevo e a quelle di alcuni artisti del suo tempo. L’a- bilità del testo medievale. Le ricerche si richiamano al- mour courtois appare così condensare in sé vari punti le celebri nozioni di mouvance di Paul Zumthor (1972) di tensione fra Medioevo e modernità e fra adesione e di variance di Bernard Cerquiglini (1989), anche se sentimentale e ricerca nei confronti del passato: Paris con una buona capacità di analisi e di approfondimen- è infatti al centro del processo che in Francia fa della to autonomi e con una sensibile indipendenza rispet- letteratura medievale un oggetto di attività scientifica to a quelle formulazioni teoriche, più brillantemente e dell’indagine storica e filologica su di essa una par- esposte che sostenute da un’effettiva pratica filologica te di un sistema di conoscenze analogo a quello delle ed editoriale. La varietà delle prospettive di analisi – fi- scienze naturali, in ciò ben distinto dal gusto e dal sen- lologica, letteraria, linguistica, codicologica, iconogra- timento romantici di cui fu eminente rappresentante fica – consente di affrontare diverse situazioni testuali, suo padre Paulin. anche se il ventaglio della letteratura presa in esame, Nel primo capitolo (pp. 17-47), l’autrice analizza le per quanto ampio, resta sostanzialmente limitato al condizioni culturali della Francia della seconda me- romanzo e al racconto cortesi d’oïl (la considerazio- tà del xix secolo in relazione alla situazione e al mo- ne dell’epica e della lirica avrebbe certamente offerto vimento d’opinione che prende il nome di décadence campi di riflessione ancora più ampi). (dunque non soltanto il Decadentismo letterario), nel- Dopo un’introduzione di Joëlle Ducos (Avant- la quale il nuovo studio del passato rappresentato dal- propos: Variance, variante, variation) e un intervento la filologia romanza costituisce un progresso scientifi- metodologico di Patrick Moran, Le texte médiéval co moderno, unito alla tensione verso il superamento existe-t-il? Mouvance et identité textuelle dans les fic- delle condizioni di “decadenza” nella quale era rite- e tions du xiii siècle, la prima parte («Le philologue et nuta versare la Francia stessa del periodo intorno al- les variantes») comprende gli interventi di: Stefania la guerra franco-prussiana. Gaston Paris d’altra parte Maffei, Mouvance de l’œuvre, fixation du texte: essai partecipava alla vita culturale del suo tempo: come si d’édition critique de quelques passages de “Guillaume vede nel secondo capitolo (pp. 49-95), egli aveva l’abi- d’Angleterre”; Oreste Floquet e Sara Centili, Pour tudine di tenere dei salons ai quali intervenivano ora i une grammaire de la mouvance: analyse linguistique colleghi romanisti ora gli intellettuali e i letterati del de quelques structures adiaphores; Gilles Roussine- momento, fra i quali Paul Bourget – poeta, romanziere au, De l’utilité des variantes pour l’édition de textes; e critico letterario, particolarmente interessato alla cri-

sf177.indb 558 19/12/15 01.04 Medioevo 559

si della décadence nonché alla psicologia amorosa – e nelle condizioni culturali del suo tempo ma piuttosto Sully Prudhomme – poeta interessato all’amore e alla dall’uso troppo ampio e generico che ne è stato fatto. filosofia. Il terzo capitolo (pp. 97-127) mostra come Chiudono il volume delle Annexes di documenti il concetto di amour courtois – divenuto dopo la sua concernenti Paris (lettere, una conferenza, l’elenco dei «invenzione» da parte di Paris nel celebre articolo di corsi al Collège de France), un indice dei nomi e una «Romania» (1883) una categoria, apprezzata o criti- bibliografia delle fonti primarie e secondarie. cata e tuttavia ineliminabile, degli studi di letteratura medievale – fuoriesce da un lavoro critico sui roman- [walter meliga] zi della Tavola Rotonda e sul Lancelot in particolare, dove il nuovo concetto serve come criterio di confron- to dei romanzi arturiani francesi verso la materia bre- «Bien dire et bien aprandre», Revue de Médiévis- tone preesistente e dove l’argomento centrale è un al- tique. La volonté didactique dans la littérature médié- tro (i rapporti fra il romanzo di Chrétien e la versione vale (tome I) 29, 2013. in prosa). L’amour courtois è per Paris un’arte e una scienza insieme, prodotto delle modificazioni che sono Ce volume réunit un premier groupe des com- state apportate dalla tradizione francese alla leggenda munications données lors des journées d’études que di una regina rapita e poi liberata (Ginevra), e in que- l’équipe Alithila de l’Université de Lille 3 a organisées sto si oppone all’amore tristaniano, rimasto allo stadio en décembre 2011: comme le rappellent Sarah Bau- “semplice” e “naturale” delle fonti celtiche, salvo poi delle-Michels et Marie-Madeleine Castellani dans subire la stessa evoluzione una volta entrato nell’am- l’Avant-propos (p. 5-9), il s’agissait alors de réfléchir sur biente letterario francese. Dallo studio dell’evoluzione la «tentation», voire sur la «volonté» didactique omni- dei miti amorosi di Lancillotto e di Tristano secondo présente dans des œuvres n’ayant pas pour but premier Paris si rileverebbe così «un préjugé» (p. 118) o «une d’instruire ou de former leurs destinataires, mais plutôt certaine idéologie» (p. 122), per i quali il mito e il suo de les distraire. significato sono “puri” alle origini per divenire oggetto S’attachant au Roman de Rou de Wace, Fran- dell’arte e della convenzione nel corso della loro riela- çoise Laurent relève que le changement de mètre, de borazione. Il concetto di amour courtois troverebbe co- l’alexandrin à l’octosyllabe, coïncide avec le change- sì un rapporto con la décadence della cultura letteraria ment de source (du prosimètre De moribus de Didon della Francia fin de siècle (già illustrata nel primo capi- de Saint-Quentin, à la prose de Guillaume de Jumièges) tolo) e anche un certo parallelismo con la stessa pratica et avec une accentuation de la dimension didactique; e di editore critico di Paris, anche se qui (p. 124) il col- par ailleurs, les goûts de la cour anglo-normande au xii legamento con la critica del testo di matrice lachman- siècle ne sont sans doute pas étrangers à l’adoption du niana – ancorché percorribile nell’idea di una comune mètre adopté pour la littérature didactique en général visione “degenerativa” della trasmissione – andrebbe (vies de saints, romans antiques et historiographie) (Un sostanziato meglio e più ampiamente che con una sola vecteur formel du discours didactique: l’octosyllabe dans citazione dal libro, “ideologicamente” antilachmannia- le “Roman de Rou” de Wace, pp. 17-30). no e tecnicamente superficiale, di Bernard Cerquigli- Aimé Petit met en relief la volonté didactique – af- ni (Éloge de la variante, 1989). Infine, nel quarto capi- fichée dès les prologues – qui se déploie dans quelques tolo (pp. 129-161) sono discussi gli scritti a proposito passages descriptifs des romans de la triade antique: di tre personaggi contemporanei – Jules Michelet, Ri- descriptions de la tente d’Adraste dans Thèbes, du chard Wagner e Frédéric Mistral – pubblicati da Pa- char d’Amphiaraüs dans Enéas, de l’Orient dans Troie ris in diversi momenti della sua vita e che permettono (La volonté didactique dans les romans d’Antiquité, di approfondire e di sostanziare con nuovi argomen- pp. 31-49). ti le ragioni dell’opposizione fra l’amore tristaniano e Sandrine Legrand s’interroge sur les raisons qui ont l’amour courtois. Di Michelet, Paris esamina sfavore- amené Christine de Pizan à faire d’Hector à la fois le volmente il trattato L’Amour (1858), dove si ritrovano destinataire de son Epistre et le sujet de nombre des considerazioni sull’amore come “arte” in un periodo di exempla évoqués. De fait, la figure du héros troyen est “decadenza” che non possono non richiamare quelle double et paradoxale: ancêtre de la maison royale de di Paris sull’amour courtois, anche se andrebbe segna- France et guerrier troyen destiné à une fin tragique, il lata la discordanza temporale fra queste ultime e l’arti- incarne par là une mise en garde contre la démesure colo su Michelet, che precede di più di un ventennio. (Comment faire d’un héros un modèle de vertu? Hector Di Wagner, l’ultimo narratore di Tristano, che crede dans l’“Espistre Othea” de Christine de Pizan, pp. 51- ingenuamente all’origine germanica del mito, Paris, in 64; dossier iconographique aux pp. 65-70). lavori degli anni maturi dal 1883 al 1897, apprezza la Observant la fréquence des chastoiements dans les capacità di estrarne il sentimento profondo e di riatti- chansons de geste lors du départ des jeunes héros de varne la forza nel “decadente” mondo moderno. Infi- leur foyer familial, Sarah Baudelle-Michels consacre ne, Mistral, nel 1896 viene apprezzato da Paris per la une analyse aussi savante qu’amusée à des passages ti- sua opera linguistica ma forse ancora di più per la sua rés de quelques chansons de révolte, poesia, che, per quanto difettosa nelle sue connessioni et Renaut de Montauban en prose (version bourgui- con la letteratura occitana medievale, rappresenta un gnonne) en particulier. Tout en constituant des pas- tentativo di riscatto dalla “decadenza” in cui versava sages dépourvus de fonction dramatique, et dont le il mondo meridionale e dalla décadence tutta di quel contenu est partagé entre morale chrétienne et simples periodo. Come l’autrice osserva nella conclusione (pp. règles de comportement, les chastoiements gardent une 163-165), il concetto di amour courtois, oggi «incom- valeur littéraire certaine par la fonction rétrospective préhensible» (p. 165), si decodifica attraverso la rilet- qu’ils assument au moment où le drame se produit (Les tura insieme della cultura medievale e di quella dell’e- ‘chastoiements’ dans les chansons de geste de la révolte, poca e dello studioso della sua invenzione, anche se pp. 73-84). andrebbe ricordato il fatto che le difficoltà che l’amour La visée didactique des chansons du cycle de courtois produce nella ricerca odierna sulla letteratura Guillaume ne fait pas de doute: Sonia Marteau sou- medievale non provengono dalla sua genesi in Paris e ligne en particulier les aspects rattachés à une réflexion

sf177.indb 559 19/12/15 01.04 560 Rassegna bibliografica

politique centrée sur le rôle du roi, des barons, des ec- contemplation de Dieu et de la Trinité rendue possible clésiastiques, et surtout sur la nécessité d’établir et de par la dévotion et l’amour (Le “Videmus nunc per spe- conserver un équilibre fondé sur la justice (La volonté culum”, un sermon didactique de Jean Gerson, pp. 199- didactique dans le cycle de Guillaume d’Orange, pp. 85- 211). 101). [maria colombo timelli] Caroline Cazanave compare les visées didactiques dans deux œuvres fort lointaines dans le temps: les e deux Moniages Guillaume du xii siècle et la réécriture «Bien dire et bien aprandre», Revue de Médiévis- en prose réalisée pour la jeunesse française par Louis tique. La volonté didactique dans la littérature médié- Gabriel-Robinet en 1970-71; elle ne peut que constater vale (tome II) 30, 2014. que les types d’enseignements affichés dans les textes répondent à des exigences et à des principes diffé- Ce deuxième tome complète les Actes des journées rents: dans les Moniages, Guillaume offre le modèle d’étude lilloises présentés ci-dessus. d’un héros devenu saint à la fin de sa vie, alors qu’au Alice Lamy consacre son article à la Cosmographia e xx siècle il s’agit plutôt de promouvoir la connaissance de Bernard Silvestre, œuvre totalisante qui réunit an- du Moyen Âge à travers ses œuvres et un vocabulaire ciens et nouveaux savoirs, ainsi que des données scien- propre (Guillaume et les voies didactiques de ses “Mo- tifiques et des conceptions philosophiques parfois in- niages”, pp. 103-117). conciliables, et qui aspire à maîtriser et à transmettre C’est à deux recueils de Miracles de la Vierge, ce- la totalité des connaissances. Le prosimètre, avec son lui d’Adgar (vers 1165) et celui de Gautier de Coin- style varié et son mélange de genres, se révèle la forme ci (1218-1233) que Jean-Louis Benoit consacre ses idéale pour essayer d’organiser cette matière indomp- réflexions: si l’intention didactique est intrinsèque au table. La volonté didactique et pédagogique de Ber- genre même, il est alors intéressant d’analyser les mo- nard doit néanmoins se mesurer avec un savoir mysté- dalités d’insertion de ce discours, ainsi que le recours à rieux et caché qui lui échappe sans cesse et que seul le des stratégies et procédés propres de la littérature pro- langage imagé de la poésie peut dévoiler en partie (La fane, en l’occurrence courtoise (Enseignement et litté- volonté didactique de Bernard Silvestre dans la “Cosmo- rature dans “Les Miracles de Notre-Dame” de Gautier graphia”, un idéal poétique vecteur de savoirs universels, de Coinci et “Le Gracial” d’Adgar, pp. 121-138). pp. 7-24). Marie-Madeleine Castellani propose une lecture Chloé Chalumeau s’interroge sur le rôle que l’inser- de La Manekine en rapport avec les motifs que Phi- tion de l’île Tournoyante joue dans l’espace fictionnel lippe de Remi a tirés des contes folkloriques sous- de l’Estoire del Saint Graal. Cette œuvre, qui associe jacents: elle peut ainsi souligner, sur le plan stylistique les savoirs incompatibles de la Bible et de la physique et formel, l’emploi fréquent des proverbes et le rôle antique, parvient à combiner le propos édifiant de la qui leur est assigné, et sur le plan narratif le relief pris Vulgate avec une explication scientifique du monde. par les personnages, devenus les modèles d’une sain- En poussant plus loin l’interprétation de cet épisode, teté toute laïque (Philippe de Remi ou la tentation du C.C. reconnaît dans l’île, qui subit l’attraction contra- sermon, pp. 139-149). dictoire du ciel et de la terre, l’image du roman qui os- L’article co-signé par Stéphanie Le Briz et Géral- cille également entre la tentation didactique et le plai- dine Veysseyre est divisé en deux volets. Est d’abord sir de la pure narration (L’île Tournoyante, lieu de la analysée la structure du Pèlerinage de l’âme, sa triparti- difficile coexistence des savoirs dans l’“Estoire del Saint tion, sa difficulté croissante, ainsi que la diversification Graal”, pp. 25-38). et multiplication des domaines abordés, qui dénon- En étudiant les descriptions des mirabilia orien- cent une sorte d’ambition encyclopédique de la part taux dans le Roman de Toute Chevalerie de Thomas de Guillaume. L’étude s’élargit ensuite à la lecture et de Kent, Huguette Legros analyse leurs formes, leurs réception de l’œuvre à travers l’examen des marginalia fonctions et les rapports qu’elles entretiennent avec la qui marquent 29 des 46 manuscrits conservés: très di- fiction. Si le but premier de Thomas est de transmettre vers entre eux, ils partagent néanmoins un respect ab- des connaissances pseudo-scientifiques à ses lecteurs, solu pour le contenu, ainsi qu’une attention marquée ces digressions se révèlent tout aussi nécessaires à la pour les aspects didactiques du texte (‘Sens faire rien, compréhension du sens ultime de l’itinéraire oriental pou vau li sens’: mise en œuvre et réception de l’ambi- d’Alexandre: un chemin de croissance personnelle et tion didactique de Guillaume de Digulleville en son “Pè- spirituelle à la découverte du divin (Insertions et signi- lerinage de l’âme” (ca 1355), pp. 151-180). fications des discours encyclopédiques dans le “Roman Destiné à la dévotion privée, le commentaire sur les de Toute Chevalerie” de Thomas de Kent, pp. 39-54). sept psaumes pénitentiels possède déjà une longue tra- Le traitement des mirabilia dans une version tar- e e dition au xv siècle, tant en latin qu’en langue vulgaire. dive (fin du xv siècle) du Devisement du Monde (1298) La lecture allégorisée qu’en propose Christine de Pi- est au cœur de la contribution de Denis Lorée. Dans zan, objet de la contribution de Bernard Ribémont, les pages concernant la merveille persane du puits correspond à une profonde vision didactique, qui s’ex- ardent, le remanieur détourne le sens initial du récit prime dans les enseignements moraux et théologiques polien pour proposer une interprétation apologétique appuyés tant sur l’Ancien que sur le Nouveau Testa- du phénomène. Il y a donc là glissement de l’écriture ment, mais aussi par des réflexions politiques (Entre objective et du désir didactique du Vénitien vers une pénitence privée et didactisme: Les “Sept Psaumes allé- perspective réflexive et heuristique dans les interpola- gorisés” de Christine de Pizan, pp. 181-197). tions tardives (‘Rien de tout cela n’est vrai…’ À propos Élisabeth Pinto-Mathieu étudie le rapport entre la de quelques interpolations tardives du “Devisement du réflexion théologique de Jean Gerson et sa visée didac- Monde”, pp. 55-70). tique telle qu’elle se révèle par exemple dans le ser- Giacomo Giacomazzi relève chez Thomas la volonté mon Videmus nunc per speculum (1402) inspiré par la d’attribuer plusieurs niveaux de sens au célèbre épisode première Épître aux Corinthiens de saint Paul: l’homé- du philtre dans le Roman de Tristan. Analoguement aux e lie prend la forme d’un dialogue intérieur entre l’Âme théologiens du xii siècle, qui étudient la nature en tant et sa sœur Raison, qui aboutira à une connaissance et que integumentum d’une réalité différente, Thomas

sf177.indb 560 19/12/15 01.04 Medioevo 561

cache derrière le motif de la folie d’amour une profonde Conceptualizing Multilingualism in Medieval En- réflexion sur l’âme humaine (Pouvoir et signification du gland, c.800-c.1250, Edited by Elizabeth M. Tyler, philtre dans le “Roman de Tristan” de Thomas d’Angle- Turnhout, Brepols, 2011 («Studies in the Early Middle terre: «la rhétorique de la vérité», pp. 73-80). Ages», 27), pp. XII-368. Le but de l’étude de Marie-Geneviève Grossel est de relever la présence du propos didactique dans la ly- Le volume rassemble une quinzaine de contribu- rique des trouvères. Le registre sentencieux peut s’y tions, les suivantes intéressent plus particulièrement la exprimer à travers un simple proverbe, voire occuper Rassegna. Bruce O’Brien, Translating Technical Terms plusieurs strophes du chant, qui se fait ainsi véritable in Law-Codes from Alfred to the Angevins, pp. 57-76; chastoiement. Cette intention didactique paraît s’am- Orietta Da Rold and Mary Swan, Linguistic Conti- plifier au cours du temps, ce qui peut s’expliquer par guities: English Manuscripts 1060-1220, pp. 255-270 la tentative des poètes de faire revivre la doctrine, dé- (à propos d’un projet de catalogue électronique de sormais vieillie, de la Fine Amour (De la sentence au manuscrits axé sur la langue utilisée); Andrew Tay- ‘chastoiement’: la tentation didactique dans la chanson lor, Can an Englishman Read a “Chanson de Geste”?, de trouvères, pp. 81-97). pp. 321-336 (sur la culture littéraire anglo-normande); Dans un article dense, Catherine Gaullier-Bou- Thomas O’Donnell, Anglo-Norman Multiculturalism gassas met en relief la valeur didactique du Roman and Continental Standards in Guernes de Pont-Sainte- du Châtelain de Coucy. En relatant la légende d’un Maxence’s “Vie de Saint Thomas”, pp. 337-356; David trouvère historique, Jakemés exploite le lyrisme des Trotter, Intra-textual Multilingualism and Social/So- poèmes enchâssés dans l’intrigue romanesque pour cé- ciolinguistic Variation in Anglo-Norman, pp. 357-368. lébrer l’idéal de la fin’amor incarné par le couple pro- tagoniste. Si les circonstances de la double mort des [g. matteo roccati] amants sacralisent et légitiment leur passion adultère en conciliant l’amour courtois avec la foi chrétienne, le discours autobiographique réaffirme lui aussi les ambi- The “Chanson de Geste” and its Reception. Essays tions didactiques de l’auteur (“Le Roman du Châtelain presented to Philip E. Bennett by members of the So- de Coucy et de la Dame de Fayel”: un miroir de l’amour ciété Rencesvals, Edited by Marianne J. Ailes, Elisa- idéal?, pp. 99-113). beth Cobby, Peter S. Noble, Edinburgh, Société Ren- En proposant l’analyse de trois pièces tirées du cesvals British Branch, 2012 («British Rencesvals Pu- répertoire des conduits – genre poétique latin mis en blications», 5), pp. 166. musique – Anne-Zoé Rillon-Marne vise à montrer l’apport de la mélodie à la transmission du message Mélanges dedicati all’epica francese, con ingressi di didactique porté par le texte. L’entrelacs des mots et quella occitana e dei cantari italiani, in onore di uno du chant permet d’atteindre les cœurs des fidèles et dei più importanti medievisti inglesi. Dopo una bre- contribue à véhiculer d’une façon plus efficace l’ensei- ve presentazione della carriera di Philip Bennett con gnement moral offert par la poésie (La musique comme l’elenco delle sue pubblicazioni e una veloce introdu- e e outil didactique dans la lyrique latine (xii -xiii siècles), zione alla raccolta, la miscellanea comprende gli inter- pp. 115-132). venti di: Marianne J. Ailes, Giants and Outsize War- Intégré sans fractures à la diégèse, le didactisme riors: Difference and Assimilation in the “Geste du roi”; amoureux de Flamenca exploite une intertextuali- Jane E. Everson, An Author and his Ghosts: Editorial té savante, tout en faisant un usage modéré et ponc- Problems of a Posthumous First Edition (su Francesco tuel des figures allégoriques. ValérieF asseur souligne Cieco e il suo Mambriano); Joël H. Grisward, Puzzle la confiance accordée par l’auteur à la supériorité de pour marionnettes: Aymeri de Narbonne et Carcas de l’expérience individuelle au détriment de tout savoir Carcassonne; Bernard Guidot, De la chanson de geste livresque et de la généralisation des discours théo- au roman populaire: quelques aperçus fondés sur “Milles riques (Le didactisme amoureux de “Flamenca”: entre et Amys”, réécriture d’Alfred Delvau; Françoise H.M. mémoire savante et volonté d’expérience, pp. 133-147). Le Saux, Prowess, the Nine Worthies and the Hundred Commerçant et écrivain amateur, Philippe de Vi- Years War: The Prologues to the “Chroniques” of Jean e gneulles est l’auteur au début du xvi siècle des Cent Froissart and Enguerrand de Monstrelet; Leslie Zar- Nouvelles Nouvelles, œuvre qui s’inscrit dans la riche ker Morgan, Flohart, Guinehart, Serpents and Femi- tradition des recueils de récits brefs. La visée didac- nie: “Carnaval au féminin” in the Guillaume d’Orange tique du prologue et les nombreux enseignements par- Cycle; Finn E. Sinclair, The Present of History: The semés dans les nouvelles permettent à Alexandra Ve- “Canso de la Crozada”; François Suard, Durendal: quel- lissariou de mettre en évidence l’habilité de Philippe ques avatars d’un objet mythique; Jean-Claude Valle- à concilier la narration d’histoires amusantes avec sa calle, Destinée individuelle et destinée collective dans volonté édifiante («Des nouvelles bonnes à oyr»: la fonc- “Aquilon de Bavière”. tion didactique des “Cent Nouvelles Nouvelles” de Phi- [walter meliga] lippe de Vigneulles, pp. 149-164). Consacrant son étude au Livre de Caradoc, Maria Colombo Timelli compare la mise en prose anonyme La faute dans l’épopée médiévale. Ambiguïté du juge- de 1530 avec la source en vers (Première Continuation ment, sous la direction de Bernard Ribémont, Rennes, de Perceval, version longue) antérieure de trois siècles. Presses Universitaires de Rennes, 2012 («Interféren- Les ajouts et les interventions du prosateur révèlent sa ces»), pp. 254. ferme intention pédagogique aussi bien que la nouvelle interprétation qu’il donne du récit: à l’histoire initiale Il volume (che raccoglie gli atti di un colloquio del d’un couple idéal il superpose sa volonté de proposer 2010 sull’argomento) affronta la questione della colpa à ses lecteurs un modèle féminin à imiter (Le “Livre de all’interno dell’epica francese – con presenza anche di Caradoc” dans la version en prose de 1530: une ‘école quelle latina e occitana – pur nel quadro definito dalla des femmes’?, pp. 165-178). dominante visione cristiana e dalla netta separazione [martina crosio] morale fra le parti che i testi ci presentano in lotta fra

sf177.indb 561 19/12/15 01.04 562 Rassegna bibliografica

di loro. L’introduzione di Bernard Ribémont (La faute Anonimo Padovano, L’Entrée d’Espagne. Rolando épique, mesure et démesure) si interroga sul problema da all’Oriente, a cura di Marco Infurna, Ro- delle circostanze attenuanti della colpa e sugli apporti ma, Carocci, 2011, pp. 414. dei diritti romano, canonico e consuetudinario; con- sidera poi la ben più complessa e articolata realtà dei L’Entrée d’Espagne, ponderoso poema epico sull’i- testi letterati e in particolare delle chansons de geste; nizio della spedizione contro i pagani della penisola infine, prendendo spunto dai saggi pubblicati, rileva iberica da parte di Carlo Magno, Rolando e degli altri la presenza di una certa ambiguità nel trattamento del- paladini, è senza dubbio alcuno il capolavoro della co- la colpa, pur a fronte di un atteggiamento nettamente siddetta letteratura franco-italiana. manicheo in materia morale, e di vari problemi con- Scritta verosimilmente intorno al 1330 da un Ano- nessi all’agire politico e personale, anche in relazione nimo Padovano (sulla cui identità non è stato sinora alla concezione cristiana del peccato. Gli interventi so- possibile formulare ipotesi minimamente credibili), no numerosi e suddivisi in tre parti: «Trahison et cir- l’opera è la prova più evidente del successo riscontra- constances atténuantes», sul grande problema del tra- to in Italia dall’epica francese di argomento carolingio: dimento in diversi testi (, Daurel tale successo in area padana portò fino alla stesura, «in et Beton, Florence de Rome, Doon de la Roche) e sui una scripta frutto di una più o meno consapevole, più personaggi delle donne saracene convertite; «Une cul- o meno deliberata disposizione all’interferenza di fran- pabilité et une innocence qui se cherchent», sulla que- cese e italiano» (p. 9), di rimaneggiamenti ma anche di stione della colpevolezza (specialmente a proposito di invenzioni originali. Garin le Lorrain, Huon de Bordeaux, Chanson d’Antio- L’Anonimo Padovano dichiara di tradurre e mettere che, Aquilon de Bavière e alcune chansons tarde); «La in versi l’Historia Caroli Magni et Rotholandi (compo- guerre, le héros et la mort», sulle condizioni ambigue sta nella prima metà del xii secolo e attribuita fittizia- della guerra epica e dell’eroe (Guglielmo d’Orange) e mente all’arcivescovo Turpino), ma in realtà produce la relativizzazione della colpa nella morte e nel crimine. una vera e propria meraviglia per originalità e quali- La raccolta è un bell’esempio di collaborazione fra tà artistica: un’opera in assenza della quale (come eb- analisi letteraria e ricerca sul diritto medievale e risulta be a dire Antoine Thomas, che nel 1913 fornì per la di grande utilità agli studiosi dell’epica medievale co- collana della Société des anciens textes français quella me agli storici. che a tutt’oggi rimane l’unica edizione del poema) non [walter meliga] avremmo con ogni probabilità avuto il , l’Or- lando innamorato e l’ furioso. Va in particolare sottolineato che nel sistema di va- Lectures du “Couronnement de Louis”, sous la direc- lori esaltato nell’Entrée d’Espagne le qualità cavallere- tion de Denis Hüe, Rennes, Presses Universitaires de sche tipiche e topiche dell’epica carolingia vengono Rennes, 2013 («Didact Français»), pp. 250. corroborate e integrate dalla sapienza e dalla devozio- ne, dando vita ad un modello di comportamento e a un Il libro presenta una serie di contributi su vari aspet- ideale umano che vanno ben al di là del credo religio- ti dell’indagine critica su una delle chansons de geste so e si traducono in un esclusivismo aristocratico che più famose del ciclo di Guglielmo d’Orange. Dopo coinvolge – è questo il dato più importante – entrambi un’introduzione generale di Denis Hüe sulla posizio- gli schieramenti in campo. ne e sulla diffusione della canzone, la prima parte del Il poema è tradito in maniera lacunosa (la seconda libro è dedicata agli «Éléments historiques» e raccoglie parte è afflitta dalla perdita di circa cinquemila versi) i saggi di: D. Collomp, “Le Couronnement de Louis” dal ms. Fr. Z. 21 (= 257) della Biblioteca Marciana di et les tiroirs de l’histoire; L. Sunderland, La vengeance Venezia, il quale spesso «presenta un testo piuttosto royale dans “Le Couronnement de Louis”; E. Dehoux, scorretto» (p. 37). Successivamente all’edizione Tho- «Tes pere ne porta onc corone». Familles et pouvoirs mas, sono stati rinvenuti a Châtillon (Valle d’Aosta) e dans “Le Couronnement de Louis”. La seconda parte, a Reggio Emilia alcuni frammenti (appartenenti a due «Éléments textuels: l’économie du récit», comprende: diversi manoscritti), che permettono in alcuni punti di C. Lachet, Quelques échos structurants et signifiants sanare lacune o di migliorare il testo. dans “Le Couronnement de Louis”; Ph. E. Bennett, Il volume curato da Marco Infurna fornisce un’am- «Trestot aveit entroblïé Orable». De la réception difficile pia scelta dell’Entrée d’Espagne sulla base dell’edizio- du “Couronnement de Louis” dans le “Cycle de Guillau- ne Thomas, corretta – laddove necessario a parere del me”; F. Suard, Le mouvement dans “Le Couronnement curatore – sia nella veste tipografica sia nella lezione, de Louis”; N. Lenoir, Le problème des Normands dans sempre tuttavia con la segnalazione in nota dei luoghi “Le Couronnement de Louis”. La terza parte, dedica- in cui ci si allontana dall’editio princeps. ta a «Figures et personnages», contiene lavori di: M. Il testo è corredato da una traduzione a fronte e, al Herweg, Louis le Multiple. Préambule à une «histoire fondo del volume, da un essenziale ma efficace appa- poétique» de Louis le Pieux; H. Legros, Le personnage rato di note. Ricchi e ben esibiti i riferimenti biblio- de Guillaume dans “Le Couronnement de Louis” entre grafici. tradition et innovation; J. Simpson, L’œuvre et l’ombre [giuseppe noto] des géants: fantômes et ruines dans “Le Couronnement de Louis”. La quarta e ultima parte, dedicata a «Épi- sodes», comprende: M. Ott, Guillaume à Tours: le Stefka Georgieva Eriksen, Writing and Reading pèlerin, le portier, le clerc et l’abbé (“Couronnement de in Medieval Manuscript Culture. The Translation and Louis”, laisses XXXV-XLVI); V. Naudet, Chanter les Transmission of the Story of Elye in Old French and armes? Combats et guerres dans “Le Couronnement de Old Norse Literary Contexts, Turnhout, Brepols, 2014 Louis”; D. Kullmann, Le prologue du “Couronnement («Medieval Texts and Cultures of Northern Europe» de Louis” et le motif du vilain jongleur. Chiude il volu- 25), pp. xxii+262. me una buona lista di «Sources et bibliographie». L’opera, rielaborazione di una tesi di dottorato, [walter meliga] esplora gli aspetti della composizione e della trasmissio-

sf177.indb 562 19/12/15 01.04 Medioevo 563

ne delle gesta di Elye de Saint-Gilles in tre diversi con- guistica (fra il codice norvegese e quello islandese, fra testi: le Fiandre e la Norvegia nel xiii sec., l’Islanda nel xiii e xv sec.): «In both process, the result of rewriting xv sec. Attraverso una esposizione chiara e logicamente strategies adopted by the various rewriters – whether ben strutturata, lo studio è incentrato sull’esame di tre making no change or changing an element – is a text- manoscritti: Paris, BnF fr. 25516, testimone unico della witness which fits well within its respective target cul- chanson de geste Elye de Saint-Gilles (composta fra la fi- ture. Despite the strong adaptational tendencies occur- ne del xii e gli inizi del xiii sec.), realizzato nel Nord-Est ring during both parts of the process, the intralingual della Francia intorno al 1280 (del quale Bernard Guidot process may be characterised as bringing more innova- ha recentemente fornito una nuova edizione, Champion tions than the intralingual one» (p. 226); «The compa- 2013); Uppsala, Uppsala Universitet, MS de La Gar- rative analysis of the three versions of the story of Elye die 4-7 fol., unico testimone medievale norvegese del- also demonstrate the validity of my second hypotheses, la traduzione norrena in prosa, forse commissionata da that different version of one and same text-work may Hákon IV, realizzato intorno al 1270, probabilmente nel have been read in different ways depending on, among Sud-Ovest della Norvegia; Stockholm, Kungliga Biblio- others factors, the historical and cultural context, the teket, Holm Perg 6 4to, uno dei numerosi manoscritti type and function of the text, the communicative situa- del xv sec. che testimonia la fortuna che ebbe all’epoca tion, and the competence of the audience» (p. 226). la storia di Elíss in Islanda. Dopo una sezione preliminare (contenente 12 ripro- [graziella pastore] duzioni a colori dei manoscritti analizzati, di cui 6 del codice francese), ed una breve introduzione (pp. 1-5), il vol. si articola in cinque capitoli e si conclude con la Joseph Bédier, Le Roman de Tristan et Iseut, édition bibliografia (pp. 233-257). critique par Alain Corbellari, Genève, Droz, 2012 Il capitolo 1 («Writing and Reading in the Middle («Textes littéraires français», 619), pp. 298. Ages», pp. 7-35), espone le premesse metodologiche del lavoro, cominciando da un sommario riepilogo del- Alain Corbellari, grande specialista di Joseph Bédier le posizioni della «traditional philology» e della «New e della sua opera letteraria e filologica (si veda Joseph Philology», al fine di esplicitare l’importanza che l’esa- Bédier écrivain et philologue, Genève, 1997 [«Studi me degli elementi formali e del contesto di produzio- francesi», XLIII, n. 127, p. 131]), pubblica un’edizio- ne avrà nel seguito del lavoro. L’A. introduce inoltre le ne critica del celeberrimo Roman de Tristan et Iseut del ipotesi che saranno poi avvalorate nel capitolo conclu- grande maestro della medievistica francese. Com’è no- sivo: «First, each version of a text-work is an intelligent to, il romanzo è un adattamento in francese moderno response to a previous version, and all versions may be e in racconto unitario della storia di Tristano e Isotta; regarded as significant […] Second, all aspects of a me- meno noto è che l’opera ebbe un successo straordina- dieval text, both material and textual, should be taken rio, con circa seicento fra riedizioni e ristampe, mol- into consideration when it is being interpreted. Finally, te delle quali toccate da aggiunte e correzioni rispet- the text as a product is conditioned by its cultural, histo- to alle precedenti e al manoscritto originale di Bédier. rical, and social context and, at the same time, responds A questo si aggiunge che il Roman è anche un’opera to the demands of its potential communicative context» letteraria di pregio, scritta con grande gusto e capaci- (p. 9; cfr. p. 226). L’A. precisa infine i due temi portan- tà stilistica, e che ha esercitato una grande influenza ti dell’opera, writing e reading, facendo rapidamente il sulla concezione che della letteratura medievale hanno punto delle pratiche medievali e delle teorie moderne; avuto il grande pubblico e anche vari scrittori, almeno l’attenzione è posta in particolar modo sulle analogie fra prima della diffusione delle edizioni dei testi originali le attività di traduzione e di commento (entrambe capaci con versione a fronte. Le motivazioni per un’edizione di fornire una nuova interpretazione del testo in un di- critica sono dunque certamente valide. verso ambiente storico-culturale, nel primo caso a livel- L’introduzione di Corbellari traccia un eccellente lo interlinguistico, nel secondo intralinguistico), e sulle profilo del modo nel quale Bédier ha lavorato e delle modalità di lettura e ricezione dei testi. vicende del Roman nel clima culturale primonovecen- I capitoli 2, 3 e 4 sono dedicati ognuno alla descri- tesco (e, per quanto riguarda Tristano, dominato dal- zione dei manoscritti precedentemente citati: Elye de la presenza di Wagner). All’edizione critica, condotta Saint-Gille in BnF, fr. 25516 (pp. 37-100), Elíss saga in con buon senso sul manoscritto e su alcune edizioni De la Gardie 4-7 fol. (pp. 101-158), Elíss saga in Holm rilevanti per la loro posizione nella storia editoriale Perg 6 4 to (pp. 159-207). I tre capitoli seguono una del libro, fa seguito un’appendice contenente la ver- struttura fissa che comporta dapprima una introduzio- sione di un capitolo soppresso, un intervento di Remy ne storico-culturale sul contesto di produzione dell’o- de Gourmont e un esempio del lavoro di Bédier stes- pera, seguita dallo studio del testimone in esame, e da so sulle sue fonti in colonne sinottiche (in questo ca- una conclusione che sintetizza e rielabora gli elemen- so, il cap. XVII confrontato con i passi interessati del ti precedentemente trattati. La descrizione dei mano- romanzo in mittelhochdeutsch di Eilhart von Oberg). scritti si articola in «mise en livre» (elementi di struttu- Chiudono il lavoro un glossario delle voci desuete usa- ra codicologica, contenuto del codice ed eventuali re- te da Bédier e un indice dei nomi e dei proverbi pre- lazioni intertestuali), «mise en page» (disposizione del senti nel testo. testo, con particolare attenzione al ruolo strutturante e [walter meliga] retorico delle iniziali, rubriche miniature e marginalia), e «mise en texte» (punteggiatura, abbreviazioni). Nel capitolo 5 («The Transmission and Transforma- Hélène Bouget, Écritures de l’énigme et fiction ro- e e tion of a Text-Work: Comparative Analysis of Three manesque. Poétiques arthuriennes (xii -xiii siècles), Pa- Versions», pp. 209-231), a dispetto di una certa ridon- ris, Honoré Champion, 2011 («Nouvelle bibliothèque danza, l’A. espone le conclusioni e convalida le ipotesi du Moyen Âge», 104), pp. 534. formulate nell’introduzione, comparando da un lato la traduzione interlinguistica (dall’antico francese al nor- L’ouvrage, issu d’une thèse soutenue en 2007, est reno, nel corso del xiii sec.), e dall’altro quella intralin- organisé en quatre parties: la première donne une des-

sf177.indb 563 19/12/15 01.04 564 Rassegna bibliografica

cription rhétorique et sémantique des énigmes (typo- loin on nous avertit que telle omission est «fructueuse logie, syntaxe, lexique), la deuxième traite des moda- à commenter mais pourrait tout aussi bien témoigner lités du discours énigmatique (les figures qui posent d’une bifurcation du projet de l’auteur après le com- l’énigme, l’échange problématique), la troisième exa- mencement du roman» (ibid.). Et naturellement, per- mine le rôle de l’énigme dans la composition roma- siste le problème de l’état de la copie unique qui nous nesque (situations types, fonctions dramatique et transmet le texte. Déjà Foerster écrivait, au terme de structurante, incomplétude du récit et réception), la son édition passablement normative: «Der Text selbst quatrième étudie deux grands paradigmes de l’énigme: ist sehr nachlässig überliefert und [es] bleibt immer le Graal et l’énigme identitaire (l’incognito). La biblio- noch eine Zahl von Verderbnissen zurück, für die ich graphie (pp. 479-519), l’Index des œuvres et des auteurs keine sichere Heilung wusste» (p. LXIII). Damien de du Moyen Âge et celui des figures et des notions com- Carné écrit donc à juste titre: «Difficile à éditer, Le plètent le volume. Chevalier aux deux épées n’est pas si facile à traduire [g. matteo roccati] non plus». C’est que les deux choses sont liées, puisque l’édition et la traduction anglaise de Rockwell ne sont pas toujours venues à bout d’un texte récalcitrant (voir Francesco Zambon, Metamorfosi del Graal, Roma, le compte-rendu de William Kibler dans Encomia 28 Carocci, 2012 («Frecce», 141), pp. 414. (2006), pp.68-69 ou le nôtre dans Vox Romanica, 69 (2010), pp. 295-300), si bien que le présent traducteur, Il volume raccoglie diciannove contributi sul Gra- tout en en faisant son édition de référence, a souvent al – dalle origini e dai successivi sviluppi medievali dû s’en écarter, rejoignant, faute de mieux, le texte della leggenda alla sua rinascita nelle riscritture otto- établi, au prix d’interventions parfois musclées, par novecentesche e nei media contemporanei – di uno Foerster. La traduction discute en note quelques-unes dei maggiori esperti, non solo italiani, di questo mito des divergences les plus notables, mais ne les signale straordinario. I contributi, apparsi originariamente in pas toutes. Malgré cela, le travail de Damien de Carné rivista o in opere collettive, sono stati profondamente constitue pour l’heure la synthèse la plus complète des rimaneggiati per comporre il volume, che rappresenta efforts exégétiques fournis par la critique, grâce, d’une una delle migliori introduzioni alla comprensione delle part, à l’intégration des propositions de Foerster et des storie del Graal e delle sue funzioni. auteurs de comptes-rendus de l’édition Rockwell, et, [walter meliga] de l’autre, à des réflexions personnelles. Le style de la version française est alerte et moderne. Les braies deviennent des «pantalons», la gaste capele Le Chevalier aux deux épées. Roman arthurien du est la «Chapelle Abandonnée». Mais quelques termes e xiii siècle, texte présenté et traduit par Damien De du texte original sont conservés quand le contexte em- Carne, Paris, Classiques Garnier, 2012 («Moyen Âge pêchait des confusions: ainsi surcot ou chemise, mais en Traduction», 2), pp. 246. aussi les heures de la journée et les mesures. La tra- duction est naturellement en prose, la numérotation Le Chevalier aux deux épées fait partie de ces ro- des vers de l’édition Rockwell est introduite tous les mans arthuriens en vers de la seconde, voire troisième dix vers, et des paragraphes numérotés, correspondant génération après Chrétien de Troyes qui attirent au- aux alinéas de l’édition, facilitent la lecture. Une bi- jourd’hui plus que naguère les chercheurs. Édité une bliographie, ainsi qu’un index des noms propres, com- première fois par Foerster (Halle, Niemeyer, 1877), il plètent ce volume bien fait et utile. a fait l’objet de deux éditions récentes (Robert Ivey, Lewiston, NY, Edwin Mellen Press, 2006 et Paul Vin- [richard trachsler] cent Rockwell, Cambridge, D.S. Brewer, 2006) dont la seconde contient aussi une traduction anglaise. La pré- sente traduction en français par Damien de Carné est Il Romanzo di Folco Fitz Waryn (Fouke Fitz Waryn), donc la bienvenue, puisqu’elle permet un accès facile Edizione, traduzione e commento a cura di Margheri- et agréable à ce roman qui, transmis par le seul manus- ta Lecco, Alessandria, Edizioni dell’Orso, 2012 («Testi crit Paris, Bnf, f. fr. 12603, semble avoir peu circulé della Letteratura Anglo-Normanna», 1), pp. 220. au Moyen Âge. La traduction est précédée d’une in- troduction (pp. 7-29) qui rappelle brièvement le peu Nuova edizione (e prima italiana) del romanzo sul- qu’on sait sur le roman: composé sans aucun doute la base di quella del 1975 a cura di E.J. Hathaway- après Chrétien de Troyes, mais pas nécessairement P.T. Ricketts-C.A. Robson-A.D. Wilshere (Oxford, après la Post-Vulgate, le roman est placé, par le tra- Blackwell, 1975 [«Anglo-Norman Text Society», 26- ducteur, dans une fourchette assez vaste comprenant 28]) ma con revisione sull’unico manoscritto (Londra, «quelques décennies» (p. 9) autour des années 1230. British Library, Royal 12), accompagnata dalla tradu- De manière prudente, on lui prête une origine anglo- zione italiana e preceduta da una buona introduzione normande, qui expliquerait le nombre plutôt élevé de sugli aspetti letterari e linguistici del testo. Il lavoro è vers irréguliers que le copiste picard n’a pas tous re- particolarmente apprezzabile, soprattutto in relazione dressés (p. 23). À coup sûr, le texte se situe dans le all’articolata strutturazione del romanzo (già nella per- groupe, assez consistant, de romans arthuriens en vers duta versione in versi) e alla particolare forma lingui- dont Gauvain est le héros et se nourrit d’une tradition stica, che denuncia il progressivo ingresso dell’inglese. déjà dense. On saura gré au traducteur de ne pas avoir All’introduzione seguono due appendici, l’una dedica- cédé aux sirènes de son propre texte et d’avoir su se ta alla ricostruzione dei passaggi in versi a partire dalla retenir d’interpréter tous les éléments que contient au- redazione prosastica, l’altra agli eventi e personaggi e jourd’hui le récit comme s’il s’agissait sans aucun doute ai luoghi presenti nel romanzo. L’edizione è completata possible de détails placés là par un auteur omniscient: da un indice dei nomi e da un glossario. «quelques problèmes de cohérence narrative nuisent à la conjointure appréciée des médiévistes» (p. 21), pré- [walter meliga] vient-il avec un léger goût pour la litote. Un peu plus

sf177.indb 564 19/12/15 01.04 Medioevo 565

Nicolaas Unlandt, Le chansonnier français de la so narrativo: in questo modo Agata Sobczyk (maître de Burgerbibliothek de Berne. Analyse et description du conférences presso l’Università di Varsavia, dove insegna manuscrit et édition de 53 ‘unica’ anonymes, Berlin-Bo- letteratura medievale francese) riesce, attraverso molte- ston, De Gruyter, 2012 («Beihefte zur Zeitschrift für plici prospettive (teologica, antropologica, narratologi- romanische Philologie», 368), pp. lxxxii-403. ca), a illuminare un aspetto fondamentale della cultura medievale (e della filosofia medievale) che poco spazio Lo studio di Nicolaas Unlandt sul canzoniere france- aveva finora trovato negli studi specialistici. se di Berna (siglato C da Schwan) rappresenta un buon Il volume si segnala anche per la trascrizione (alle esempio di indagine su una silloge lirica medievale e of- pp. 291-298) di alcuni contes ‘esemplari’ inediti tratti dai fre molti materiali, suscettibili anche di uso in ulteriori mss. Paris, Bibliothèque nationale de France, fr. 1834 indagini. Il volume comprende un’introduzione, con de- (xv secolo) e fr. 1136 (xiv secolo); Genève, Bibliothèque scrizione del codice e del contenuto, un’analisi linguisti- Publique Universitaire, fr. 57 (xv secolo). Ampia e ben ca, l’edizione di 53 componimenti, l’indice del contenu- costruita la bibliografia esibita alle pp. 299-317; molto to del canzoniere, varie tavole di analisi e concordanza, utili l’Index des auteurs et des œuvres (pp. 318-323) e un indice dei nomi e un glossario. Per quanto riguarda la l’Index des personnages historiques et mythologiques (pp. descrizione e il contenuto del codice, l’autore non tiene 324-325). purtroppo conto del lavoro precedente di Paola Moreno [giuseppe noto] («Intavulare». Tables de chansonniers romans, II. Chan- sonniers français, 3. C (Bern, Burgerbibliothek 389), par Paola Moreno, Liège, Université de Liège, 1999), che Guillaume de Digulleville, Le dit de la fleur avrebbe rappresentato un utile apporto, soprattutto per de lis, édité par Frédéric Duval, Paris, École des la parte codicologica – non ben organizzata e sviluppata chartes, 2014 («Mémoires et documents de l’Ecole des da Unlandt – e per la tavola delle attribuzioni dell’Intro- chartes», 95), pp. 344. duction (I.1.1-2, 5) nonché poi per la tavola del contenu- to del canzoniere (si veda sotto). Lo studio linguistico Le dit de la fleur de lis, écrit en 1338, au moment où (II) è condotto con attenzione – anche se un maggiore le conflit franco-anglais s’annonce, est un songe allégo- confronto con la letteratura scientifica sul lorenese sa- rique dont le but est d’exalter la dignité royale; il est rebbe stata utile – ma è l’edizione dei 53 unica anonimi conservé dans deux manuscrits (Ars. 3646 et BNF, lat. di C (III-IV; pp. lxxii-lxxxii e 1-141) a costituire l’ap- 4120) «largement fautifs» (p. 136). Piaget le publie en porto più interessante del volume: qui i componimenti 1936, mais, prisonnier de son époque, il est incapable sono dati in edizione diplomatica e poi critica e accom- d’en saisir la complexité littéraire et en donne une édi- pagnati da un sintetico e chiaro commento filologico e tion simplement documentaire (hâtive par bien des as- metrico. All’edizione segue un’ampia sezione di annessi pects et fournissant un texte banalisé, cf. pp. 13-14), (V), dove troviamo il Tableau synoptique del contenuto source de nombreux contresens dans les travaux qui del canzoniere (V.1; pp. 143-292), che risulta molto utile ont suivi, notamment chez les historiens. La présente per le informazioni che fornisce (maggiori di quelle del édition entend donc rendre justice à l’œuvre et, pro- volume di «Intavulare»), in particolare i dati sulla consi- fitant du fait que le texte est relativement court (1336 stenza del pezzo e la lista degli altri testimoni. Chiudono octosyllabes), examiner de manière approfondie les questa sezione e il volume, nell’ordine, una bibliografia, nombreux problèmes qu’il pose et fournir un modèle varie concordanze che riguardano i 53 componimenti d’ecdotique. Très soignée, elle donne d’abord les deux editi (con le bibliografie di Raynaud-Spanke e di Linker, versions manuscrites, imprimées en regard, ensuite le con il repertorio di Mölk-Wolfzetter e con altre pub- texte est établi critiquement. La méthode est conserva- blicazioni), un indice dei nomi e il glossario (V.6) delle trice, mais non imitative, dans l’édition synoptique, ré- voci più frequenti (dove però non è spiegato né risulta solument reconstructionniste dans la suivante (même perspicuo il criterio del limite a trenta occorrenze, oltre si elle s’appuie sur un manuscrit de base). il quale i lemmi sono esclusi dalla registrazione: p. 345) Le volume, au-delà de la mise à disposition d’un dit nei testi editi. difficile et important dans l’histoire intellectuelle, est un [walter meliga] véritable outil pédagogique. Son intérêt est plus grand encore du point de vue du statut du texte qui y est af- firmé. Après des décennies d’approche archéologique, Agata Sobczyk, Les jongleurs de Dieu. Sainte simpli- plus ou moins réfléchie, le témoin n’est plus saisi comme cité dans la littérature religieuse de la France médiéva- une trace à respecter, dont il s’agit de restituer l’altérité le, Łask, Oficyna Wydawnicza Leksem, 2012, pp. 326. fondamentale, même si l’on tend à éviter les difficultés de compréhension inutiles. Ici, tout en ménageant litté- L’espressione jongleurs de Dieu contenuta nel titolo è raires et linguistes grâce à l’édition synoptique et s’adres- una citazione da Cesario di Heisterbach, cistercense del sant aux «historiens, qui cherchent à interpréter le mes- xiii secolo e autore del Dialogus miraculorum, nel qua- sage de Guillaume de Digulleville, considéré comme fait le i simplices sono indicati come ioculatores Dei sancto- historique, plutôt que l’un de ses avatars déformés» (p. rumque angelorum: essi, infatti, al medesimo modo degli 136), l’éditeur propose un «artefact» (ibidem), une nou- acrobati che sono capaci di camminare tenendo la testa velle version, dans une certaine mesure transhistorique in basso e i piedi per aria, invertono radicalmente i valori et orientée «vers le lecteur moderne non-linguiste» (p. mondani, tramutando la follia in ragione e la ragione in 142). Les textes des manuscrits étant reproduits fidèle- follia e vivendo – esattamente come i saltimbanchi – nel ment dans l’édition synoptique, le débat sur une telle discredito sociale e nel disprezzo morale. attitude n’a même pas lieu d’être, mais on mesure la dis- Il saggio, dopo aver inquadrato la questione nella sua tance qui la sépare des pratiques courantes. dimensione teologica, riesce a cogliere le esatte coor- L’introduction présente l’œuvre et justifie la nou- dinate entro le quali è necessario collocare il tema del velle édition. Elle examine ensuite l’attribution, le titre, ‘semplice’ nella cultura medievale: si tratta di coordina- la structure du dit, avant de donner l’interprétation te che sono, ad un tempo, tanto scritturali e patristiche du contenu. Sont analysés d’une part les thèmes poli- quanto dell’esegesi biblica quanto – ancora – del discor- tiques, d’autre part la construction allégorique du signe,

sf177.indb 565 19/12/15 01.04 566 Rassegna bibliografica

la fleur de lis. A l’inverse de la démarche habituelle troduzione e accompagnata da una buona bibliografia; dans l’écriture allégorique, allant du signifiant au signi- secondo l’uso della collana, il testo è tradotto in fran- fié, Guillaume relate dans son songe la production du cese moderno. L’introduzione affronta essenzialmen- signe à partir du signifié, le signe étant l’ouvrage de per- te due punti problematici: la materia e l’ambiente di sonnifications allégoriques divines qui le destinent à la composizione del jeu e la sua ricezione e rappresen- royauté. Le dit lui-même «peut ainsi se lire comme une tazione. Dominguez osserva la scarsa originalità delle “allégorie de l’écriture allégorique”» (p. 81), c’est-à-dire fonti dell’, che consiste sostanzialmente in una comme une métaphore du travail de l’écrivain (même riscrittura della Bibbia e dei suoi commenti più noti; si le propos est à nuancer, cf. p. 84). La description des considera poi i rapporti fra la parte più propriamente manuscrits suit, ainsi que des Remarques linguistiques drammatica e le sezioni seguenti (Ordo prophetarum e (pp. 96-125) précises et fouillées, ne visant pas la des- Dit des quinze signes) e quelli del testo nel suo insie- cription de la langue, mais l’examen des données utiles à me nei confronti del calendario liturgico. L’attenzione l’établissement du texte. L’étude de la versification (pp. all’unità dell’opera e del manoscritto di Tours è diffusa 125-131) et celle de la tradition textuelle (pp. 131-135), e Dominguez avanza la possibilità di una scrittura in l’explicitation argumentée des principes d’édition (pp. più tempi, discutendone poi la destinazione a un pub- 135-143) et la bibliographie (pp. 145-160) terminent blico di laici o al contrario di chierici e monaci. È poi l’introduction. L’Edition synoptique des deux manuscrits esaminata la complessa questione della performance, et l’Edition critique (accompagnée d’un riche apparat de dove la curatrice analizza con molta acribia le istruzio- notes) du dit suivent. Le glossaire (pp. 311-334), l’Index ni che accompagnano il testo e le didascalie dei perso- nominum et l’Index rerum complètent l’ouvrage. naggi; anche l’esame molto attento della versificazione e delle rime, in particolare di quelle irrelate, è inserito [g. matteo roccati] nella discussione generale sulla funzione e la destina- zione dell’opera. Il lavoro è senz’altro da considerare fra i migliori de- Le Jeu d’Adam, Édition bilingue, établie, traduite, dicati all’Adam, soprattutto per la capacità di eviden- présentée et annotée par Véronique Dominguez, Paris, ziare le questioni tuttora aperte, di cui sono discussi Champion, 2012 («Champion Classiques. Série ‘Mo- tutti gli aspetti importanti, senza forzature verso una yen Âge’», 34), pp. 368. loro più o meno sicura definizione.

La nuova edizione del Jeu d’Adam di Véronique Do- [walter meliga] minguez è molto accurata, preceduta da un’ampia in-

Quattrocento a cura di Maria Colombo Timelli e Paola Cifarelli

Nicole Chareyron, Éthique et esthétique du récit de les «Frontières du récit viatique» (pp. 23-82): de fait, voyage à la fin du Moyen Âge, Paris, Honoré Cham- l’existence même d’un genre «récit de voyage» est su- pion, 2013, pp. 539. jette à caution, et N.C. souligne les difficultés qu’on ren- contre à vouloir le cerner, notamment vis-à-vis de genres Issu d’une thèse HDR soutenue en 2006, ce volume proches tels les chroniques, les encyclopédies et descrip- a été édité par Jean Meyers et Michel Tarayre avec la tions du monde, ou même certaines œuvres de fiction; collaboration de Liliane Dulac et Pierre André Sigal, le problème se pose tant parce que des contaminations qui ont voulu que les résultats des recherches de Nicole et échanges existent entre ces types de textes, que parce Chareyron, décédée en janvier 2007, soient finalement que des récits de voyage peuvent être enchâssés dans mis à la disposition des chercheurs. En effet, après s’être n’importe quelle œuvre. Une définition demeure cepen- concentrée dans d’autres ouvrages sur la question de dant possible: «ce récit à socle biographique ou autobio- l’altérité, N.C. interroge ici les textes pour y repérer les graphique est le fait d’un narrateur qui conte un dépla- traces de l’identité des voyageurs médiévaux; son corpus cement authentique ou imaginaire, le plus souvent dans impressionne pour son ampleur (cf. pp. 487-507): envi- un laps de temps donné, et qui en fait le sujet essentiel ron cent trente titres en latin et dans de nombreuses lan- de son histoire» (p. 79); sa poétique pouvant être syn- gues vulgaires – français, italien, espagnol, anglais – da- thétisée en une sorte d’aphorisme réussi: «dire vrai, le e e tant du xii au xvi siècle, œuvre de pèlerins, explora- faire savoir» (p. 82). teurs, missionnaires, marchands, voire espions. Si la Avec la deuxième partie on entre dans le vif du su- perspective adoptée est largement historique, ce volume jet («L’identité du voyageur ou l’envers du monde», intéressera nos lecteurs dans la mesure où de très nom- pp. 83-167): la présence de l’auteur, plus ou moins af- breux auteurs français sont convoqués; nous citerons, firmée et visible, s’annonce d’abord dans le paratexte, parmi les plus connus, Robert de Clari, Geoffroy de Vil- qui offre déjà son image et lui permet de proclamer le lehardouin, Marco Polo, Jean de Mandeville, Bertran- but de ses voyages et de son écriture, mais aussi d’envi- don de la Broquière et Guillebert de Lannoy, Gilles le sager des destinataires; N.C. analyse divers voyageurs- Bouvier, Jean Thenaud. types – missionnaires, pèlerins, descripteurs de terres, L’étude est organisée en cinq parties, dont la pre- savants – pour passer ensuite à la reconstruction de mière s’attache à définir, dans la mesure du possible, différents «héros viatiques»: humanistes-philosophes,

sf177.indb 566 19/12/15 01.04 Quattrocento 567

pionniers et aventuriers, serviteurs de princes. La fi- Pour un nouveau répertoire des mises en prose. Ro- gure de l’auteur n’est cependant pas seule en cause, et man, chanson de geste, autres genres, sous la direction d’autres instances interviennent dans la narration (troi- de Maria Colombo Timelli, Barbara Ferrari et Anne sième partie: «De la figure auctoriale à l’identité narra- Schoysman, Paris, Classiques Garnier, 2014, pp. 387. tive», pp. 169-241): N.C. relève les formes de la voix qui organise le récit et l’implication des différents types de Les dix-neuf contributions recueillies dans ce vo- lecteurs, mais aussi l’intervention de substituts du nar- lume, en grande partie issues d’un colloque qui s’est rateur (informateurs de tout genre: marins, marchands, déroulé en septembre 2012 en préparation du Nouveau guides etc.) qui concourent à fournir des informations, Répertoire de mises en prose (Paris, Classiques Garnier, ou de transcripteurs chargés de la mise par écrit. Tout 2014), proposent une grande variété d’approches sur cela montre bien la complexité de la construction du les ‘mises en proses’, comme le souligne Claude Thiry récit de voyage, qui s’appuie nécessairement sur un en- dans l’Introduction (pp. 9-10). semble très diversifié d’identités, d’intentions, de pro- Avec la seule exception de l’article de François cédés discursifs. Suard, la présentation suit l’ordre alphabétique des La quatrième partie interroge les deux versants de noms des auteurs: nous essaierons en revanche de ces récits: la perception du monde visité d’une part, sa mettre en relief les trois ensembles génériques annon- représentation par les mots de l’autre («De la percep- cés dans le titre. tion à la traduction du monde», pp. 243-349). De fait, Les romans font l’objet de sept études. Luca Barbieri la dimension sensorielle du voyageur, son expérience (Les versions en prose du “Roman de Troie”. État des charnelle, se situent au cœur du récit et permettent recherches et perspectives, pp. 33-67) offre une analyse entre autres au lecteur de participer au voyage narré approfondie des cinq proses issues du Roman de Troie et éventuellement de s’identifier au narrateur. Les cinq de Benoît de Sainte-Maure, longtemps oubliées par la sens sont successivement analysés, car saveurs, par- critique, dans le but d’en souligner l’intérêt littéraire fums, sons, et surtout couleurs et images, provoquent et philologique: il rappelle d’abord la question des toute sorte de sensations psychologiques, agréables ou modèles ayant pu inspirer chaque prose, pour étudier déplaisantes, qui méritent d’être rapportées et consti- ensuite les proses classées par Jung Prose 1, 3, 5, qui se tuent la «vision du monde» transmise par le texte. distinguent pour «leurs caractéristiques individuelles La lecture de N.C. s’avère particulièrement aiguë à bien nettes» (p. 45), en faisant référence en particulier l’égard du langage utilisé pour représenter, plutôt que au contexte d’élaboration (lieu et date, pp. 46-52), à le monde, les impressions que celui-ci provoque: non l’organisation de la matière et à la structure du texte seulement chaque découverte est filtrée par ce qui est (pp. 52-56), au problème des sources (pp. 56-59), au déjà connu, mais la langue mise en œuvre a recours à traitement réservé aux histoires d’amour (pp. 59-64) et des lieux communs, formules de l’indicible, clichés ré- au rôle des dieux païens (pp. 64-67). currents que seule une connaissance approfondie des Sergio Cappello explore Le passage à l’imprimé des textes et une grande sensibilité de la part du critique mises en prose de romans (pp. 69-84) en étudiant les permettent de déceler. Dernière question essentielle, la cas de Giglan et de Guillaume de Palerne. La consul- centralité du temps dans le récit de voyage: temps ca- tation d’inventaires et l’analyse du matériel typogra- lendaire, mais aussi temps narratif (avec analepses, pro- phique (bois gravés et caractères) lui permettent d’at- lepses, réitérations, digressions, ekphraséïs), qui occulte tribuer l’editio princeps des deux romans à l’atelier pa- souvent la chronologie «réelle»; temps chronologique, risien des Trepperel, ce qui confirme en contrepartie temps intime, temps de la mémoire, temps de l’écriture, «le rôle subalterne de l’imprimerie lyonnaise» (p. 84) forment autant de strates qui coexistent et qui contri- dans ce domaine pendant les années 1520. Giglan fait buent à l’épaisseur de ces récits. aussi l’objet de la contribution de Sylvie Lefèvre (Gi- La dernière section revient sur l’identité du voya- glan et Claude Platin entre Lyon et Paris, pp. 195-212), geur et sa mise en scène dans le texte, en s’attachant qui reprend le même dossier en parcourant les étapes e maintenant aux aspects esthétiques («De l’identité que la critique a suivies depuis le xviii siècle avant de culturelle à la représentation esthétique», pp. 351-475). parvenir à fournir un tableau plus clair des premières Sont d’abord examinées les questions linguistiques: ces éditions de ce roman. voyageurs se sont nécessairement confrontés à des lan- L’étude des modifications apportées par le trans- gues «autres» qu’il s’agit de représenter; mais tout récit lateur d’Erec et Enide au portrait de la protagoniste entre aussi en résonance avec les récits antérieurs, récu- amène Carol J. Chase (Le diable est dans les détails. pérés, parfois adaptés, formant une «bibliothèque men- Les vêtements d’Enide dans l’“Erec” en prose du e tale» (p. 386) qui peut être à l’origine de voyages fictifs, xv siècle, pp. 101-115) à une réflexion sur le rôle inédit purement littéraires. D’autre part, le voyageur présent qu’Enide assume dans la mise en prose: cette attention dans le texte est moins un homme que sa mise en scène, pour quelques détails de la vie matérielle d’Enide (par- sa projection, image proche d’une figure romanesque, fois au détriment d’Erec lui-même) concourt à lui attri- mais toujours centrale, à une époque surtout – le xve buer un rôle plus central dans la quête et l’aventure, siècle – où l’homme s’installe au centre de l’univers. en réorientant ainsi «la lecture du poème de Chrétien» La «Conclusion» (pp. 477-486) propose une syn- (p. 115). thèse fondée sur trois notions: la diversité des récits de Maura Felice (“Richard sans Peur”. Des vers à la voyage, l’expression / image de soi qu’ils véhiculent, la mise en prose, pp. 139-150) considère le passage des poétique du soi qu’ils transmettent. vers à la prose du roman de Richart sans Peur sous Une riche bibliographie, qui distingue les sources pri- la plume de Gilles Corrozet: les amplifications et les maires (récits de voyage), les sources «autres» (œuvres ajouts du translateur ont pour résultat une mise en littéraires, philosophiques, médiévales ou modernes), la évidence de l’élément merveilleux, qui perd sa valeur bibliographie critique, occupe plus de quarante pages symbolique en devenant un pur «expédient poétique» (pp. 487-528); l’index des noms (pp. 529-532) facilitera (p. 149). les recherches ciblées sur tel auteur ou texte anonyme. Mariagrazia Ricci (“Robert le Diable” en prose, pp. 245-256) présente la fortune éditoriale de la mise e e [maria colombo timelli] en prose de Robert le Diable entre xv et xvi siècle

sf177.indb 567 19/12/15 01.04 568 Rassegna bibliografica

(12 éditions répertoriées) et, par l’étude des variantes, L’étude d’Yvonne Vermijn (Trois traditions manus- les rapports que l’on peut dégager entre les éditions crites parallèles. La “Chanson de Bertrand du Guesclin” conservées. et ses mises en prose de 1380 à 1480, pp. 347-360) porte Shira Schwam-Baird (La longue vie de “Valentin sur les deux proses (contemporaines à la source en vers et Orson”, pp. 297-306) parcourt l’histoire éditoriale et indépendantes l’une d’autre) issues de la Chanson de de Valentin et Orson: pour ce qui concerne le texte, Bertrand du Guesclin: l’analyse du contenu et du style comme aucune trace de la version en vers ne subsiste, amène l’A. a formuler quelques hypothèses à propos l’A. a pu confronter la prose française avec une version des raisons politiques et socio-culturelles qui les sous- en moyen bas-allemand; dans un deuxième volet de tendent. son article, S.S.-B. analyse les variations de l’iconogra- Six contributions, enfin, prennent en considération phie dans les éditions anciennes conservées. des textes de genres divers. En analysant l’incunable Un deuxième groupe d’articles porte sur les rema- de l’Ovide Moralisé de Colard Mansion (1484) et son niements des chansons de geste. Dans une vaste étude rapport avec le manuscrit appartenu à Louis de Bruges d’ensemble, François Suard (Les proses épiques. Diffi- (Paris, BnF, fr. 137), Stefania Cerrito (Colard Mansion cultés et intérêt du classement, pp. 11-32) questionne relit les “Métamorphoses”, pp. 85-99) relève quelques la bipartition adoptée par Georges Doutrepont dans éléments textuels et codicologiques utiles pour la com- son célèbre répertoire pour envisager une nouvelle préhension du travail exécuté par l’imprimeur bru- perspective du classement des proses épiques. En re- geois: l’examen porte sur l’introduction (trois prohe- marquant les changements profonds que les modèles mes et l’adicion du compileur), les modifications struc- subissent dans le processus de réécriture en prose et turelles et textuelles (division de la matière en cha- en soulignant les difficultés d’analyse du rapport entre pitres, interventions sur la langue et le style), la glose au texte-source et texte-cible, F.S. reconnaît l’utilité d’un texte, que Mansion reprend de Bersuire (traduit peut- classement par ordre alphabétique qui, à travers des être par Mansion lui-même), et, enfin, l’iconographie. renvois internes, puisse rendre compte de la nature La contribution d’Olivier Delsaux (De l’édition du complexe, et somme toute inclassable, de ces œuvres. texte-source à celle du texte-cible et vice versa. Le cas des Jean-Charles Herbin se penche sur les proses issues “Vigiles des morts” de Pierre de Nesson copiées et dé- de la Geste des Loherains pour en évaluer le rapport rimées par Jean Miélot, pp. 117-138) montre combien avec la source; il identifie ainsi Trois conceptions de l’examen des mises en proses peut aider dans l’étude la mise en prose (pp. 165-194) bien distinctes: prose- de leurs sources en vers: une analyse approfondie du résumé, condensant sensiblement la matière, dans le remaniement en prose de Jean Miélot en rapport avec cas du ms Arsenal 3346; prose-réécriture, abandon- la varia lectio des Vigiles des morts de Pierre de Nesson nant le style et le ton épiques en faveur d’une écriture peut en effet fournir des suggestions précieuses pour plus proche de la chronique, pour la prose de David l’établissement de l’édition critique du texte-source. Aubert; prose-dérimage, enfin, fidèle au texte-source, Barbara Ferrari offre un premier recensement des pour le texte produit par Philippe de Vigneulles. Réécritures en prose de poèmes hagiographiques fran- e e Giovanni Palumbo (Un texte en éclats. La “Chanson çais (pp. 151-163), produites entre xiii et xvi siècle. de Roland” à l’épreuve de la prose, pp. 229-243) s’inter- Si l’étude de ces mises en prose pose des problèmes roge sur le passage problématique de la Chanson de Ro- communs à bien d’autres genres littéraires (but des land à la prose: en nuançant les positions des «grands adaptations, rapport avec les sources en vers, identifi- romanistes du passé» (p. 241), G.P. identifie quelques cation des mises en prose en l’absence du modèle), B.F. textes qui, à travers des procédés divers, ont puisé à la remarque que le nombre exigu d’éditions critiques et tradition rolandienne: entre autres, Galien le Restoré, d’études empêche de fait une appréciation globale de , de Jean Bagnyon, Fleur la valeur de ces textes. des Histoires de Jean Mansel, les différentes compi- Le Compte du mantheau maltaillé (BnF, fr. 2153) fait lations autour des Neuf Preux, Myreur des Histors de l’objet de la contribution de Stefania Marzano (Une e Jean d’Outremeuse, Chroniques et Conquestes de Char- mise en prose inédite du xvi siècle, pp. 213-227), qui lemaine. présente le résultat de ses recherches quant à l’auteur, Anne Schoysman (Un épisode de suture dans l’“His- au contexte de production et de diffusion du déri- toire de Charles Martel” de David Aubert et ses rap- mage, ainsi aux problèmes d’identification du modèle; ports avec l’“Histoire de la reine Berthe et du roi Pépin”, elle offre enfin une analyse du rapport entre la prose et pp. 279-295) se penche sur la tradition de la mise en la source en vers. prose de L’Histoire de la reine Berthe et du roi Pépin: Gilles Roques (L’intérêt lexicologique des mises transmise par un seul manuscrit (Cracovie, B.U. Jagel- en prose, pp. 257-277) propose une étude des chan- lonne, Ms. Gall. Fol. 130), on en retrouve un épisode gements lexicaux entre le Pèlerinage de l’âme de interpolé dans la compilation des Histoires de Charles Guillaume de Digulleville et la mise en prose de Jean Martel; cette double transmission pose en de nouveaux Galopes: si le respect de celui-ci pour sa source est évi- termes la question de la date et de l’identité de l’auteur dent, les modifications qu’il y apporte montrent un de la version en prose. souci de modernisation qui, selon G.R., permet pour- Martine Thiry-Stassin (La parole racontée et l’his- tant au lecteur moderne de «mieux goûter le texte en toire montrée. David Aubert et Jean Le Tavernier, vers» (p. 277). pp. 321-342) nous livre une riche analyse des 18 gri- Elina Suomela-Härmä (De ‘Renart’ à ‘Regnart’, sailles de Jean Le Tavernier illustrant la Chanson des des vers à la prose, pp. 307-320) consacre son étude Sainses en prose dans le ms Bruxelles, KBR 9068, en à la prose issue de Renart le Nouvel: elle s’interroge étudiant en particulier le rapport qui s’établit entre d’abord sur les raisons qui ont pu amener le prosateur texte (rubriques et contenu des chapitres) et images, anonyme à choisir un genre de texte somme toute ‘non ainsi que l’interprétation, souvent pleinement critique, conventionnel’ dans le panorama des mises en prose; du texte qui sous-tend le travail du miniaturiste. Nous d’autre part, elle présente une analyse comparative tex- signalons une petite erreur dans l’ordre de reproduc- tuelle et stylistique entre source en vers et dérimage, en tion des images 4-5, qui doivent être renversées pour soulignant l’originalité et les enjeux de celui-ci. bien illustrer l’analyse. Le volume est complété de deux Index: noms de

sf177.indb 568 19/12/15 01.04 Quattrocento 569

personnes et titres des œuvres anonymes (pp. 361-373) dernières appartenant pour la plupart à des hommes et manuscrits (pp. 375-376), dus à Stefania Marzano. d’Église et/ou à des titulaires d’un grade académique; la taille des collections peut aussi être condition- [mariagrazia ricci] née par l’activité littéraire de certains fonctionnaires ou par leur implication dans les milieux intellectuels de l’époque. Au-delà des aspects quantitatifs, la com- Céline Van Hoorebeeck, Livres et lectures des fonc- position des librairies représente un aspect essentiel, tionnaires des ducs de Bourgogne (ca 1420-1520), Turn- en même temps reflet des intérêts des propriétaires et hout, Brepols, 2014, pp. 660. marque d’un (double) milieu: le fonds religieux s’avère en effet important, ainsi que la littérature historique Issu d’une thèse de doctorat défendue en 2007 et ré- (tant d’histoire universelle qu’histoire régionale) et visée pour la publication en 2009, ce gros livre consti- juridique (droit canonique et civil); suivent les textes tue une contribution importante dans le domaine de scientifiques, transversaux dans l’ensemble du cor- l’histoire de la lecture dans les Pays-Bas méridionaux pus, et littéraires, sans qu’il soit possible de dégager pendant un siècle environ. Si sa seconde partie est en- des lignes de force (à l’exception bien évidemment de tièrement constituée de répertoires et catalogues, son l’omniprésent Roman de la Rose). De fait, comme le but n’est pas seulement documentaire, dans la mesure souligne C.V.H., «la disparité des profils de lecteurs où C.V.H. se livre surtout à une analyse des données re- et des types de lectures invite […] à une conclusion cueillies qui permet de mieux cerner un panoramique en demi-teinte» (p. 174). Une réflexion originale porte culturel plus complexe et plus nuancé qu’on ne le sur la présence, dans les mêmes bibliothèques, de livres croit, loin de l’affirmation récurrente selon laquelle les manuscrits et imprimés: si ceux-ci ont pu s’imposer fonctionnaires des ducs de Bourgogne ne se seraient pour des raisons toutes pragmatiques chez certains efforcés que d’imiter la bibliothèque ducale dans leurs fonctionnaires, en particulier universitaires et hommes collections personnelles. d’Église, d’autres raisons, d’ordre souvent symbolique, Examinons d’abord le corpus réuni par l’A. La expliquent la fidélité de tant d’autres au manuscrit. tâche n’était pas aisée; il s’agissait d’abord de définir Troisième et dernier volet, le rapport entre le «fonctionnaire», à savoir «tout individu qui exerce ces hommes et les livres: le rôle que les fonction- de manière récurrente ou occasionnelle un office ré- naires bourguignons ont joué dans la production li- tribué au service de l’État bourguignon» (p. 12): un vresque – aspect où l’émulation semble s’être imposée groupe de 103 fonctionnaires a ainsi pu être constitué, au moins en partie –, les fonctions «sociales» jouées présentés dans des notices synthétiques dans le Réper- par le livre au sein d’une communauté assez homo- toire biographique (pp. 329-381); celui-ci est suivi d’un gène, les usages que cette communauté a faits du livre riche Répertoire documentaire (pp. 383-526), où sont et ses pratiques de lecture. De cette analyse tripartite réunis – toujours selon l’ordre alphabétique des pos- ressort l’image de deux lecteurs-type: le lecteur «pro- sesseurs – les documents relatifs à leurs collections fessionnel» et l’«amateur». Sans entrer ultérieurement (catalogues, inventaires après-décès, testaments…), dans les détails, soulignons l’intérêt des pages consa- et d’un Catalogue descriptif (pp. 527-612) qui propose crées à certains artisans et artistes ayant travaillé pour une notice pour chaque livre dont on a pu reconnaître ces fonctionnaires: les copistes bien connus David Au- le propriétaire parmi les fonctionnaires bourguignons bert (pp. 224-226) et Jean du Quesne (pp. 226-227), le recensés. relieur Liévin Stuvaert (pp. 227-229). C’est cette documentation de première main que Dans l’ensemble, le caractère «disparate et hétéro- C.V.H. a su exploiter pour en dégager un tableau en gène» (p. 324) du groupe des fonctionnaires étudiés trois volets. ici n’a nullement empêché C.V.H. d’esquiver deux Une première section est ainsi consacrée aux ques- pièges: d’une part, elle a su éviter les remarques trop tions méthodologiques (Corpus, fondements documen- générales, évidemment dépourvues de tout intérêt, de taires et méthodologie, pp. 17-47) concernant d’abord l’autre elle n’a pas renoncé à tirer quelques conclu- «les hommes», tous des officiers certes, mais très dif- sions (pp. 324-327). En somme elle a su faire un usage férents entre eux de par leur formation, leurs charges, intelligent d’un ensemble de documents très vaste, et leur degré de proximité avec le prince etc., puis «les montrer comment une documentation si diverse peut livres», autre ensemble hybride puisque le corpus rete- permettre de reconstituer des bagages culturels, des nu comprend aussi bien les livres encore conservés que intérêts, des habitudes de lecture, d’individus dont les les simples mentions dans des documents d’archives. noms sont aujourd’hui parfois peu connus, mais qui Ce qui en ressort, c’est bien entendu la complexité ont composé un des milieux culturels les plus vivaces des questions qui se posent dans des recherches de ce de l’histoire de la «France» de l’Ancien Régime. genre, mais aussi la lucidité dont C.V.H. fait preuve lorsqu’elle s’interroge sur la valeur même d’une en- [maria colombo timelli] quête fondée sur des données nécessairement partielles et très diverses. Un passionnant Voyage au cœur des librairies est Histoire de Gérard de Nevers. Mise en prose du “Ro- proposé en deuxième lieu (pp. 49-207). La difficulté man de la Violette” de Gerbert de Montreuil, édition majeure tient à la détermination de la taille des collec- critique de Matthieu Marchal, Villeneuve d’Ascq, tions, «l’impossible mesure des inconnues», comme Presses Universitaires du Septentrion («Textes et pers- le souligne à juste titre l’A.: l’hétérogénéité des docu- pectives. Bibliothèque des Seigneurs du Nord»), 2013, ments, la notion même de «propriété», et les pratiques pp. 422. liées à la circulation des livres (prêts, dons…) consti- tuent autant d’obstacles à la reconstruction définitive Cette nouvelle édition de la mise en prose anonyme d’une bibliothèque privée. Il a néanmoins été possible du Roman de la Violette de Gerbert de Montreuil à C.V.H. de dessiner deux ensembles vraisemblables: (1227-1229, poème appartenant à ce que Gaston Pa- les collections qui comptent moins de 10 volumes ris appelait le «cycle de la gageure») vient presque un (84) et celles qui en présentent plus de 20 (15), ces siècle après la première édition scientifique, publiée

sf177.indb 569 19/12/15 01.04 570 Rassegna bibliografica

par L.F.H. Lowe en 1928. Fondée sur le même témoin (pp. 103-314). Celle-ci est très satisfaisante; le texte est (Bruxelles, KBR, 9631, appartenu comme le seul autre accompagné, dans les marges latérales, de notes philo- manuscrit, Paris, BnF fr. 24378, à Philippe le Bon), logiques rendant compte de l’aspect paléographique elle répond à toutes les exigences d’un travail philo- du ms. B et des rares interventions de l’éditeur, et d’un logique moderne et comble les lacunes de l’édition double apparat en bas de page présentant, au premier précédente qui ne présentait ni analyse linguistique niveau, toutes les variantes significatives du ms. P et, ni apparat complet des variantes. Dans l’introduction au deuxième, les notes au texte. Les aquarelles du (pp. 15-101), après avoir fait rapidement le point sur Maître de Wavrin sont reproduites en noir et blanc, les sources, le titre, la dédicace à Charles de Nevers avec l’indication de leur emplacement et la descrip- et la datation (entre 1451 et 1464), M. Marchal four- tion du sujet. En soulignant à juste titre que «l’appa- nit une description détaillée des manuscrits, tous les rente proximité entre le moyen français et le français deux richement illustrés: celui de Bruxelles (B) par le moderne est trompeuse» (p. 317), M. Marchal a opté maître de Wavrin (numérisation en couleur sur Bel- pour un glossaire étoffé (pp. 317-386); en effet, dans gica), et celui de Paris (P) – probablement comman- les vingt premières pages du manuscrit je n’ai trouvé dité par Philippe le Bon – par Loyset Liédet. La col- que trois mots qui auraient pu être intégrés: posses- lation de B et P et la comparaison avec les témoins de ser ‘détenir qqc., avoir la jouissance de qqc.’ (Prol,4 ilz la source versifiée permettent d’établir que les deux ont possessé et tenu leurs terres et seignouryes); serye copies dérivent indépendamment l’une de l’autre d’un ‘harmonieuse’ (I,10 a voix basse et serye, moult doulce- ancêtre commun en prose qui pourrait être identifié ment encommencha de chanter); (sur) costiere ‘du côté avec la réécriture originale; en l’absence de toute in- de’ (IX,2 il regarda sur costiere). Chaque article est formation sur celui-ci, l’attribution de l’œuvre à Jean structuré en deux parties: description des signifiants de Wavrin, suggérée par une partie de la critique, ne (variantes graphiques et formes fléchies) et descrip- se fonderait pas, selon l’éditeur, sur des données sûres, tion des signifiés, afin de permettre au lecteur «d’iden- les faits linguistiques et stylistiques pouvant être le fait tifier les formes observées avant d’en étudier les diffé- du copiste et non de l’auteur. Quant au modèle direct rents sens» (p. 318; cependant, dans les cas d’occur- du prosateur, il est aussi perdu, puisque l’interpola- rence unique il ne me semble pas nécessaire d’insérer tion d’un épisode arthurien tiré de la Continuation du deux fois le même renvoi au teste). Les variantes lexi- Conte du Graal de Gerbert de Montreuil qui figure cales intéressantes du ms. de Paris sont réunies dans le dans les deux manuscrits en prose manque dans tous complément du glossaire (pp. 387-388). les témoins connus de la source. Le choix d’éditer le Les annexes comprennent aussi: l’index des noms texte de B, plus proche de l’original en vers, s’impo- propres (pp. 389-394), la table des proverbes (pp. 395- sait; par ailleurs, c’est la rédaction de ce manuscrit qui 396) et une série de tableaux illustrant les rapports est passée à l’imprimé, transmise par deux éditions pa- entre la mise en prose et sa source (correspondance e risiennes du xvi siècle (Hémon Le Fèvre, 1520; Phi- chapitres/vers, vestiges des fragments lyriques dans lippe Le Noir, 1526) dont se sont servis les adaptateurs la prose, principales additions). Le tableau de la tra- e e des xviii et xix siècles. L’étude approfondie de la mise dition textuelle de Gérard de Nevers (pp. 397-405) est en prose prend en compte tous les aspects du travail suivi d’une riche bibliographie, organisée en sections du prosateur qui, même en restant fidèle à sa source, (pp. 407-422). «s’en écarte en réalité constamment» (p. 35): l’opéra- Au total, il s’agit d’un travail de grande qualité; une tion de dérimage est ainsi accompagnée du rajeunis- seule remarque: il faut corriger l’affirmation selon la- sement du lexique (actualisé davantage par le copiste quelle avant l’article de M. Demaules publié en 2006 de P); l’insertion de la dédicace à Charles de Nevers dans Le goût du lecteur à la fin du Moyen Âge aucun dans le prologue et la mention de la descendance des commentateur n’aurait signalé la présence dans la Vio- protagonistes dans l’épilogue créent un lien entre le lette de deux chansons de Bernard de Ventadour (p. 18 personnage historique et le héros du roman. Deux et note 5), puisque tant F. Michel que D.L. Buffum, changements de perspective, enfin, réorientent le ré- dont les éditions du Roman de la Violette figurent dans cit: dès le début, le remplacement du portrait courtois la bibliographie finale, citent bien les deux poèmes (cf. du roi par l’évocation des conflits féodaux modifie le Michel 1834, pp. 199-200; Buffum 1928, pp. lxxxv et contexte narratif; mais c’est surtout le choix du prosa- lxxxviii). À ce propos toujours, on pourra ajouter à la teur d’éliminer la très grande partie des nombreuses bibliographie l’article de W.D. Paden, Old Occitan as insertions lyriques de la source qui atténue la tonalité a Lyric Language: The Insertions from Occitan in Three courtoise de l’œuvre de Gerbert de Montreuil au pro- Thirteenth-Century French Romances («Speculum», fit de la dimension narrative épique et chevaleresque. 68, 1993, pp. 36-53). L’analyse des suppressions, additions et modifications [barbara ferrari] montre, en même temps, la fidélité à la structure du texte en vers, organisé autour des deux motifs narra- tifs de la gageure et de l’errance, et l’évolution de la Géraldine Veysseyre, Les manuscrits rubriqués du technique littéraire recherchant une plus grande vrai- “Pèlerinage de vie humaine” de Guillaume de Digulle- semblance. Une bonne trentaine de pages (pp. 65-94) ville (première rédaction). Ou comment mettre en cha- sont consacrées à l’étude linguistique de B, dont l’ori- pitres à défaut de mettre en prose, «Bibliothèque de gine septentrionale ne fait pas de doute. Les traits dia- l’École des chartes», 170, 2012, pp. 473-557. lectaux propres aux domaines picard et wallon se ren- contrent surtout au niveau graphique et phonétique, Nous tenons à signaler, bien qu’en retard, ce long tandis que la morphosyntaxe en est moins marquée article de G. Veysseyre en raison de l’ampleur de la ré- et se caractérise plutôt par l’abondance des résidus de flexion qu’il propose. l’ancienne langue. Les derniers paragraphes portent Œuvre allégorique en vers composée par Guillaume sur le lexique et sur la riche variété d’ornements stylis- de Digulleville vers 1330-1331 (première rédaction), tiques employés par le prosateur. L’analyse de l’œuvre le Pèlerinage de vie humaine est transmis, parmi bien et les critères suivis pour l’établissement et la présen- d’autres, par un manuscrit réalisé entre 1460 et 1480 tation du texte précèdent l’édition proprement dite aujourd’hui conservé à Londres (BL, Add. 22937),

sf177.indb 570 19/12/15 01.04 Quattrocento 571

qui se signale par une particularité: une division en Livia Visser-Fuchs, ‘Une très belle besogne’: Jean chapitres introduits par des titres-résumés, selon une de Wavrin’s description of battles, in «Publication du e e pratique qui à cette époque s’observe essentiellement Centre Européen d’Études Bourguignonnes (xiv -xvi dans les œuvres rédigées en prose, originales ou adap- s.)», 54, 2014, pp. 57-76. tations de modèles versifiés plus anciens. Loin de se limiter à ce constat ou à une présentation analytique de Pour rédiger son Recueil des Chroniques et an- ces rubriques (dont la transcription partielle est néan- chiennes Istories de la Grant Bretaigne, et en particu- moins proposée en annexe, aux pp. 540-557), G.V. lier pour composer le récit des nombreuses batailles organise son propos autour de quelques sujets précis qui s’y déroulent, Jean de Wavrin a certainement qui s’élargissent à chaque fois vers des perspectives exploité des sources documentaires diverses: tout beaucoup plus vastes. Elle commence ainsi par inter- comme d’autres chroniqueurs bourguignons – Jean roger l’abondante tradition manuscrite des trois Pèle- Lefèvre, Enguerrand de Monstrelet, Mathieu d’Es- rinages (Vie humaine, Âme, Jésus Christ) pour consta- couchy, par exemple –, il a tiré profit de lettres ou ter que les témoins les plus précoces ne présentent de comptes rendus qui circulaient dans le milieu des aucune rubrication: la rédaction des titres intermé- Ducs Valois; dans d’autres cas, surtout pour les ba- diaires doit en effet – ici comme pour d’autres textes tailles “anglaises”, il a pu compter sur ses connais- e e des xiv -xv siècles – être attribuée aux divers artisans sances personnelles. Ce qui caractérise davantage du livre (copistes et rubricateurs) qui interviennent au son écriture, c’est cependant le rapprochement qui fur et à mesure dans la transmission des textes. Un pa- peut être fait entre certains passages de son Recueil ragraphe à part porte sur le manuscrit de Londres et et quelques romans dont il possédait des exemplaires, sur quatre copies également dotés de rubriques, bien pour la plupart illustrés par le peintre connu comme qu’en nombre sensiblement inférieur: sans entrer dans le «maître de Jean de Wavrin»: Gillion de Trazegnies, les détails, on signalera tout spécialement l’intérêt des Florimont, Jean d’Avennes, Blancandin, Gilles de titres de chapitres pour reconnaître des relations de Chin, Seigneurs de Gavre. Une sélection des passages parenté entre les copies; pour ce qui est du Pèlerinage comparables est donnée en appendice (pp. 74-76). de vie humaine, le manuscrit Add. 22937 est visible- ment isolé par rapport aux quatre autres (stemma à [maria colombo timelli] la p. 489). Une analyse de la forme et du contenu des rubriques peut aussi s’avérer intéressante dans la me- sure où elle permet de s’interroger sur leur fonction: si Anton van der Lem, L’Automne du Moyen Âge à dans certaines œuvres les titres, lus consécutivement, Leyde, in «Publication du Centre Européen d’Études e e offrent un bon résumé du texte, dans d’autres cas ils se Bourguignonnes (xiv -xvi s.)», 54, 2014, pp. 179-190. limitent à offrir des résumés très partiels; le rubricateur du manuscrit de Londres semble surtout privilégier le Rédigées par un conservateur de la Bibliothèque contenu donné au début des chapitres, en rédigeant de l’Université de Leyde, ces belles pages sont consa- des «résumés tronqués» (p. 503) qui recyclent pour crées à Johan Huizinga. Elles font d’abord le point la plupart des éléments du texte et en offrent ci et là sur les études les plus récentes qui lui ont été consa- une «mise en prose» partielle. Mais la lecture propo- crées: des thèses surtout, ainsi que l’édition de sa cor- sée par G.V. permet une fois de plus d’aller au-delà respondance; suit la présentation chronologique de sa du simple constat pour repérer d’autres fonctions des bibliographie, enrichie de détails biographiques par- rubriques, qui peuvent guider l’enlumineur, en pré- fois très vifs (ainsi, sa visite à l’exposition de la Toison sentant des détails parfois absents même du poème, d’or en 1907 à Bruges, où il se rendit à bicyclette avec ou accompagner le lecteur dans l’interprétation du sa jeune épouse); surtout la genèse de l’Automne du texte, par exemple lorsque les titres contiennent des Moyen Âge, sa réception dans l’Europe entière, ses gloses du vocabulaire allégorique cher à Guillaume. nombreuses traductions, intéresseront certainement Par ailleurs – autre observation intéressante – les titres les lecteurs de notre Rassegna. L’article est enrichi sont assumés par une voix extérieure au poème, qui de belles photos en couleur, parmi lesquelles on ne s’exprime à la troisième personne (Comment le pele- peut pas manquer de signaler la photo de la seule rin…); qui plus est, leur longueur et leur complexité page conservée du manuscrit de Herfsttij der Midde- vont souvent à l’encontre des conventions du genre, leeuwen (p. 186). qui imposeraient plutôt la brièveté et la synthèse. Dans [maria colombo timelli] le manuscrit de Londres le rapport entre titres et en- luminures est des plus stricts: mais c’est l’auteur des rubriques qui semble garder le contrôle du texte et de Félix Fabri, Les Errances de frère Félix, pèlerin en sa lecture; dans cette perspective, G.V. pose aussi la Terre Sainte, en Arabie et en Égypte, édition de Jean question capitale de la fonction des rubriques pour le Meyers et Michel Tarayre, vol. 3 et vol. 4, Paris, lecteur: repère dans un texte long et foisonnant, le titre Classiques Garnier, 2014, pp. 435 et pp. 364. sape en même temps «tout effet de surprise» et «accen- tue la coloration didactique» de l’ouvrage de Digulle- Faisant suite à la publication des premiers volumes ville; une fois de plus, on touche là à une question qui en 2013, ces deux tomes se situent au sein du pro- concerne l’ensemble des textes et des manuscrits pro- jet éditorial de révision et republication de l’édition e duits au xv siècle. et de la traduction de l’Evagatorium de Félix Fabri, Guide pour le lecteur de l’époque, guide pour l’en- conçues par Nicole Chareyron et parues aux Presses lumineur, mais aussi guide pour le lecteur et l’éditeur de l’Université Paul-Valéry (t. I et II, 2000-2003) et d’aujourd’hui, les titres de chapitres constituent, non aux Presses Universitaires de la Méditerranée (t. III, pas un complément accessoire, mais bien la charpente 2006). sur laquelle s’appuie sa réception. Le troisième volume de l’ouvrage est consacré à deux journées capitales dans le pèlerinage en Orient [maria colombo timelli] du frère prêcheur d’Ulm: le 14 et le 15 juillet 1483 (Ulm, Stadtbibliothek 19555, 1-2, ff. 108b-164a).

sf177.indb 571 19/12/15 01.04 572 Rassegna bibliografica

Avec un talent d’historien, d’encyclopédiste et même nous est montrée par les textes et par les documents. d’archéologue, le pèlerin poursuit dans ses errances C’est en effet pour rendre compte de la concordance physiques et ses divagations verbales: il décrit Jéru- des phénomènes spécifiquement littéraires avec l’évo- salem et le Saint Sépulcre, en offrant au lecteur des lution linguistique et les données de l’histoire que renseignements détaillés sur son voyage. la date de 1450 a été choisie comme limite pour la Le quatrième volume se focalise sur la période du première période (Des jongleurs à la scène. Le Moyen 16 au 20 juillet 1483 (Ulm, Stadtbibliothek 19555, Âge avant 1450), tandis que l’année 1550 sert à déli- 1-2, ff. 164a-210a). Après la visite de Jérusalem, Fa- miter conventionnellement la tranche chronologique bri s’engage dans les excursions habituelles en Terre des grands textes dramatiques, dont le caractère reli- Sainte: Bethléem, les monts de Judée, le Jourdain. En gieux n’est que l’un des aspects multiples caractéri- faisant preuve d’une érudition complète et d’un es- sant ces spectacles monumentaux (Deuxième partie. prit critique pointu, il dresse un portrait de la réalité L’expansion du texte. Le Moyen Âge de 1450 à 1550). contemporaine, tout en s’intéressant à la composante Le succès du théâtre à l’antique et d’inspiration ita- e mémorielle des lieux. lienne autour du milieu du xvi siècle marque enfin L’édition, établie d’après les principes suivis pour le début de l’expérience du ‘théâtre renaissant’, dont le premier tome (Paris, Classiques Garnier, 2013, la brièveté chronologique contraste avec l’importance pp. 63-65), présente un apparat en bas de page qui pour la formation du grand théâtre classique du siècle signale les ratures, des corrections et des passages suivant (Troisième partie. Renaissance. 1550-1620). ajoutés dans les marges par l’auteur. Ayant choisi de Le dépassement de l’«optique évolutionniste» se baser sur le manuscrit autographe Ulm, Stadtbi- (p. 13) dans cet ouvrage va de pair avec une attention bliothek 19555, 1-2, les éditeurs répertorient les va- particulière pour tous les aspects liés à la transmission riantes du codex Hartmann Schedel (Münich, Baye- écrite: les conditions de diffusion et de circulation des rische Staatsbibliothek, clm 188-189), du codex Jo- œuvres, leur mouvance, leur mise en texte, les trans- hannes Nuer (Münich, Bayerische Staatsbibliothek, formations affectant le support écrit à partir de l’in- clm 2826-2827) et de l’édition K.D. Hassler de 1843- vention de l’imprimerie occupent une place de pre- 1849. La traduction, qui a bénéficié de l’aide appor- mier plan dans l’Introduction générale qui ouvre le vo- tée par un travail d’équipe, se caractérise par des lume (pp. 15-110) et la présence d’une série d’images notes explicatives et complémentaires en bas de page: reproduisant les différentes typologies de manuscrits on y trouvera l’identification des citations, des com- dramatiques souligne l’importance attribuée par les mentaires historiques et littéraires, des repères intra- auteurs à ces aspects. C’est en effet la distinction textuels et des références bibliographiques. entre théâtre et écriture du théâtre qui constitue la Les deux volumes se terminent par un Index des base des théories actuelles sur la dramaturgie médié- noms (pp. 423-425; pp. 353-355), un Index des lieux vale, selon lesquelles «les textes dramatiques [sont] (pp. 427-429; pp. 357-359) et un Index des sources, les formalisations variables d’une expérience d’abord divisé en deux sections (références bibliques et au- corporelle et orale» (p. 28). On comprend alors la teurs) qui reprend uniquement les passages cités ex- place que tient la performance dans le tableau dres- plicitement par Fabri ou dont il s’est inspiré direc- sé dans l’introduction. Là encore, le cahier iconogra- tement (pp. 431-435; 361-364). Le troisième volume phique situé au cœur du volume permet de visualiser présente enfin un Annexe qui reproduit les dessins les auteurs au travail, les personnages, les comédiens, contenus dans le manuscrit autographe de l’Evagato- les dispositifs de représentation. rium (pp. 421-422). Souhaitant montrer que l’écriture polytopique et [elisabetta barale] polyphonique du théâtre médiéval s’accommode mal des classifications par genres auxquelles l’historio- graphie traditionnelle nous avait accoutumés, G.P. et Le Théâtre français du Moyen Âge et de la Renais- D.S. organisent les deux premières parties en sections sance – histoire, textes choisis, mise en scène, sous la thématiques (Représentations de la société, Merveille direction de Darwin Smith, Gabriella Parussa, Oli- et merveilleux, Entre Bien et Mal, Guerre et politiques, vier Halévy, Paris, Éditions L’Avant-scène théâtre, Condition humaine, Fonctions du langage…) dont les 2014, pp. 547. catégories «ne sont pas exclusives les unes des autres ni constitutives d’une totalité», mais permettent La recherche dans le domaine du théâtre médiéval au lecteur de s’orienter et de disposer d’une clé de et renaissant a considérablement avancé au cours des lecture pour les textes. Quant à la dernière partie, dernières décennies et une grande partie des acquis elle est organisée par O.H. et ses collaborateurs en historiographiques ont été mis en discussion, à par- quatre chapitres, rendant compte de l’évolution tir des théories sur la genèse du ‘fait dramatique’ au chronologique dans l’émergence de la tragédie et de Moyen Âge et jusqu’aux périodisations, aux classe- la comédie (Le renouveau du théâtre antique, Lau- ments par genres et aux théories sur les pratiques de sanne, 1550 et Paris, 1553, par O.H.; La dramaturgie représentation. L’anthologie que D. Smith, G. Parus- tragique de Jodelle à Garnier, par E. Buron; La dra- sa et O. Halévy ont conçue, avec l’aide de nombreux maturgie de la comédie humaniste, par V. Larchet; La spécialistes, synthétise admirablement les nouvelles tragédie pendant les guerres de Religion, par C. Thou- perspectives ouvertes par les études récentes et met à ret). À la fin de chaque section, des indications bi- la disposition d’un public large un ensemble à la fois bliographiques permettent au lecteur d’aller plus loin vaste et organisé de connaissances sur les productions et de saisir les tendances critiques actuelles. dramatiques de quatre siècles. La présentation des extraits au sein des différentes Le choix d’organiser la matière en trois parties sections n’est pas l’aspect le moins novateur de cette chronologiquement cohérentes (Moyen âge avant anthologie. Chaque passage, précédé d’une présenta- 1450, 1450-1550, 1550-1610) trahit déjà l’intention de tion rapide contextualisant le passage, est suivi d’un dépasser la conception traditionnelle d’une rupture Commentaire et parfois aussi d’observations de met- e nette entre période médiévale et xvi siècle, au profit teurs en scène qui ont monté des spectacles à partir d’une vision plus conforme à la réalité telle qu’elle des textes en question; ces remarques, qui constituent

sf177.indb 572 19/12/15 01.04 Cinquecento 573

le pendant du chapitre de l’Introduction intitulé For- les principes sont exposés à la fin de l’introduction: e tunes scéniques au xx siècle par H. Solterer, V. Do- restituer aussi bien l’économie dialogique des œuvres minguez et O. Halévy, montrent la vitalité et l’actua- que leur dimension sociale, politique et culturelle lité de la dramaturgie médiévale et renaissante, qui dans une langue intelligible au lecteur contemporain; peut parler encore à l’homme contemporain malgré approcher l’économie métrique sans pourtant recou- la distance qui nous sépare inévitablement de leur rir au mètre, trop contraignant et risquant souvent de contexte et de leur esprit. glisser dans le «mirlitonisme et le calque» (p. 98). Quant aux textes eux-mêmes, ils sont fournis très L’anthologie se clôt sur un Dictionnaire des auteurs, souvent dans de nouvelles éditions critiques, qui anti- un Dictionnaire des metteurs en scène, un Glossaire cipent parfois des publications en cours (cf. à titre théâtral fournissant l’explication des termes tech- d’exemple l’extrait de Colin, fils de Thérot le maire, niques relatifs au domaine dramaturgique, un Index e xvi siècle, pp. 286-289, ou celui du Jeu de l’Argent, des noms propres et un Index des œuvres. vers 1470, pp. 343-344, ou encore celui du Mystère La gageure de concilier intention divulgatrice et e de la sainte Hostie, fin du xv siècle, pp. 260-261); rigueur scientifique n’est pas toujours simple à tenir; grâce à la compétence philologique des AA., le lec- on pourra féliciter les auteurs d’avoir réussi dans cette teur disposera donc toujours de textes édités selon entreprise, car le présent ouvrage constituera désor- les principes scientifiques les plus solides. Pour les mais un instrument indispensable non seulement textes de la Renaissance, le recours systématique aux pour s’introduire à la culture théâtrale du Moyen Âge éditions anciennes, modernisées dans l’orthographe et de la Renaissance, mais aussi pour en approfondir et la ponctuation, est toujours accompagné du ren- les différents aspects, grâce à la richesse des apparats voi à l’édition critique de référence, lorsqu’elle existe. bibliographiques. Les textes médiévaux sont assortis de la traduction [paola cifarelli] en français moderne, exécutée par les auteurs et par leurs collaborateurs suivant une ‘philosophie’ dont

Cinquecento a cura di Sabine Lardon e Michele Mastroianni

Marie Barral-Baron, L’Enfer d’Érasme. L’huma- atermoiements. Or, il y a aussi une tragédie qui se joue niste chrétien face à l’histoire, Genève, Droz, 2014 chez l’humaniste de Rotterdam. Le monde chrétien se («Travaux d’Humanisme et Renaissance», n. DXXIII), transforme en un spectacle cauchemardesque et, tous pp. 752. les jours, des lettres d’amis lui rappellent, de manière inexacte ou odieusement exagérée, qu’il est le premier Ecco un libro veramente importante. Importante responsable de ces bouleversements. Dès le début du per gli studiosi di Erasmo, che trovano qui uno stru- mouvement réformateur, Érasme est ainsi accusé d’être mento interpretativo dell’evoluzione e delle oscilla- le père de la Réforme. Son refus d’endosser cette pa- zioni del grande umanista per quanto concerne il rap- ternité provoque d’ailleurs le mépris de beaucoup de porto con la rivoluzione religiosa in corso durante gli disciples de Luther» (p. 304). ultimi vent’anni della sua vita; importante per gli stu- Abbiamo qui una disamina attenta, attraverso lo diosi della letteratura cinquecentesca (in particolare spoglio di un cumulo vastissimo di testi (dalla corri- della letteratura religiosa, ma non solo) che si trovano spondenza alla trattatistica all’opera filologica) letti per confrontati con il problema di definire le appartenenze recepire i movimenti di Erasmo intorno alla crux in- confessionali. terpretativa della storia passata e presente (e dei suoi Sulla linea delle ricerche di André Godin, ma in ma- nessi). L’A. stessa riassume il suo procedere nell’inda- niera estremamente più organica e complessa, l’A. in- gine, sottolineando come «afin de reconstituer et d’ex- daga sulla percezione che Erasmo ha del tempo stori- pliquer le cheminement de l’humaniste chrétien, des co, anche a livello di inconscio, nel suo volere ricupera- acclamations décernés par ses contemporains, en 1516, re un’età dell’oro cristiana, passando attraverso l’histo- à l’isolement relatif dans lequel il termine sa vie, en ria sacra neotestamentaria riletta con la mediazione dei 1536, il convient tout d’abord d’analyser les différents Padri. In questa operazione, però, al momento dell’e- aspects du rapport d’Érasme au passé, avant la Réfor- vento luterano, non riesce a cogliere nella sua realtà il me. Son obsession de l’histoire sacrée, objet de tou- presente, di qui deriva sia l’incapacità di una condanna tes ses attentions, au détriment de l’histoire profane, sia l’incapacità di rendersi conto che la rottura è una qu’il méprise et dont il se méfie, explique la ‘folie’ du vera rottura. Con chiarezza Marie Barral-Baron affer- texte sacré qui le saisit au cœur de la décennie 1510 ma che «les silences de la plume d’Érasme ne témoi- et le rend ainsi hermétique à la réalité. Le kairós de gnent pas seulement d’une volonté de sauver l’héritage 1521, qui lui fait prendre tardivement conscience du humaniste. Il y a un ‘drame Érasme’ qui a trop sou- malheur qui s’abat sur la Chrétienté, le plonge dans un vent été dissimulé par le drame de Luther. L’humani- immobilisme qu’il justifie d’abord au nom de l’unité du ste est en effet toujours présenté comme un savant ou christianisme […]. Bouleversé par la force destructrice un pur esprit qui aurait maîtrisé ses propos, joué avec des événements historiques, qu’il aperçoit en 1525, il ses colloques et provoqué ses contemporains avec ses connaît une crise intérieure qui se traduit par une per-

sf177.indb 573 19/12/15 01.04 574 Rassegna bibliografica

te de confiance dans un langage qui l’a, selon lui, trahi. ron – diventa la sua bouée de sauvetage (pp. 351-355). Habité par une détermination nouvelle, il tente alors Intorno a questo problema si muove tutta l’analisi di d’atténuer les conséquences de sa réaction tardive fa- questo saggio eccezionale, che, nel passare al setaccio ce à Luther, mais ses reniements partiels et en déca- i testi in cui Erasmo costruisce e poi distrugge il suo lage avec la chronologie de son temps, arrivent trop sogno concernente il ricupero di un’età felice, pren- tard. Cette difficulté éprouvée par Érasme à vivre dans dendo coscienza della tragicità della storia e vivendo in son siècle et à réagir en prise directe avec l’événement, maniera estremamente tormentata il kairós della Rifor- s’explique par la nature de sa conception du temps. ma, illustra quel continuo interrogarsi che rappresenta, Jusqu’à la Réforme, et même jusqu’en 1525, l’huma- in fin dei conti, la chiave interpretativa di una schiera niste s’est cru maître du temps, persuadé qu’il était de di intellettuali che per tutto il Cinquecento cercano di sa capacité à vivre dans le temps de Dieu et à négliger individuare le frontiere che delimitano la cristianità. le temps humain. Mais la prise de conscience de son erreur le conduit finalement à recomposer sa vision du [michele mastroianni] passé et à ancrer sa vie et son œuvre dans la réalité du temps présent qui s’impose désormais à lui. Érasme se découvre alors dramatiquement humain, incapable Clementina Marsico, Nell’officina di Josse Bade: la d’influencer le cours tragique des événements et de re- pubblicazione delle «Elegantie», «Bibliothèque d’Hu- staurer l’unité brisée du christianisme» (pp. 47-48). manisme et Renaissance», LXXVII, 1 (2015), pp. 133- Oltre a fornire una ricostruzione accurata (potrem- 159. mo dire sottile, per la capacità di penetrare in anfrat- ti nascosti e spianare le pieghe della coscienza) delle L’A. incentra il suo intervento sulle figure di Loren- reazioni di Erasmo di fronte al kairós, il voluminoso zo Valla, linguista, filosofo, filologo e teologo di grande saggio offre uno strumento esemplare, sul piano meto- fama e di Josse Bade, suo editore e uno dei principali dologico, per gli studiosi che devono confrontarsi con trasmettitori dell’opera di Valla in Europa. Si sofferma, un’epoca in cui la frontiera confessionale si sta costi- nella prima parte, sul ‘fenomeno Valla’ evidenziatosi tuendo in Francia e in Europa con un movimento len- dopo i ricchissimi censimenti dei suoi manoscritti e di to, per nulla lineare, che durerà tutto il Cinquecento, numerosi contributi pubblicati in occasione del cen- come hanno egregiamente dimostrato i lavori di Thier- tenario della nascita dell’erudito italiano, e sull’ope- ry Wanegffelen (cfr. soprattutto Ni Rome ni Genève. ra valliana che riscosse il maggior successo a partire e Des fidèles entre deux chaires en France au xvi siècle, dal Quattrocento e per i secoli successivi: le Elegantie Paris, Champion, 1997), di cui Marie Barral-Baron lingue latine. Si evidenzia che di tale opera sono sta- sembra quasi costruire una premessa che va ben al di là te pubblicate numerosissime edizioni e ristampe e che dell’indagine, così esauriente, su Erasmo, allargandosi centinaia di studenti europei l’hanno impiegata come a una problematica che investe veramente i rapporti manuale di riferimento per l’apprendimento della lin- cultura/teologia per quanto concerne l’intero ambito gua latina. I recenti censimenti delle stampe del xv e della prima Riforma. xvi secolo, realizzati da Marielisa Rossi, hanno messo Soprattutto l’A. approfondisce l’acquisizione di una in luce il fatto che molti editori e curatori, soprattutto coscienza storica da parte di Erasmo (cfr. cap. II del- cinquecenteschi, non si sono limitati a riproporre nel- la prima parte: Passé et histoire. Où Érasme acquiert le stampe l’opera intera di Valla, ma l’hanno arricchi- une conscience historique, pp. 145-219) mettendo con- ta con complessi apparati paratestuali, che ne hanno tinuamente in luce come questo processo intellettua- modificato e meglio specificato la lettura. Tra questi, le, fondato sempre su un’indagine filologica rigorosa e spicca appunto la figura di Josse Bade (1462-1535, no- sulla preoccupazione costante di un ritorno alle fonti, to ai contemporanei come Iodocus Badius Ascensius), debba fare i conti con lo choc prodotto dalla rivolu- che fa delle sue edizioni valliane veri e propri labora- zione luterana. In effetti, Erasmo «du fait de son inca- tori per l’indagine linguistica e grammaticale, al fine di pacité à rejoindre le camp des luthériens, découvre en rendere il testo originale più chiaro e di approfondire effet que quelque chose le retient, l’empêche d’y aller, gli argomenti più importanti con meticolose ricerche e lui interdit de tout abandonner. Érasme a comme un annotazioni. Lo studioso francese fu uno dei più famo- poids en lui qui le visse et le cheville à la Croix usée, si umanisti della prima metà del Cinquecento e uno dei maltraitée, mais qui a le passé pour elle. L’humaniste più importanti editori, critici e commentatori dell’epo- ne peut pas rejeter la foi de son père, l’Église de saint ca; entrò in contatto diretto con Battista Guarini e Fi- Jérôme, d’Origène, d’Augustin, bref, de tous les siens. lippo Beroaldo il Vecchio e lavorò con celebri stampa- Il a le sens de l’histoire et c’est la Réforme qui lui en tori quali Trechsel a Lione e Jean Petit a Parigi e di- fait prendre conscience. Luther ne crée ni provoque venne egli stesso stampatore. Commentò autori classici l’attachement d’Érasme à l’histoire, il le lui révèle. La latini e contemporanei, e pubblicò numerosi testi, con présence d’une pensée de l’histoire a toujours été sous- l’aggiunta del cosiddetto textus ascensianus, una sintesi jacente à ses écrits des années 1510, mais n’en ayant di nozioni linguistiche e grammaticali ridotte in versi, pas conscience et n’en voyant pas l’utilité, l’humani- in quanto queste erano ritenute più utili della prosa ai ste n’a jamais pris le temps d’en parler» (p. 366). Nel fini dell’apprendimento mnemonico della lingua. L’o- suo attaccarsi alla storia, là dove Lutero costruisce una pera di Valla non subì questa riduzione da parte di Ba- concezione di questa stessa Storia fondata sull’esclu- de, ma in alcune edizioni delle Elegantie compaiono, sione, Erasmo allarga enormemente il campo d’indagi- tra i capitoli o tra le epitomi di Bade stesso, versi che ne dalla patristica a tutto il pensiero prescolastico, e a sintetizzano concetti particolarmente complessi. La partire dal 1524, proprio per una volontà che si fa an- prima edizione dell’opera valliana curata da Bade esce che filologica, si dimostra ben più indignato dalla vo- nel 1497 a Parigi; ne seguono altre tre a pochi anni di lontà di Lutero di rompere con le tradizioni ancestrali distanza e se ne aggiungono trentaquattro, fra edizioni della Chiesa di quanto non lo sia riguardo alla discus- e ristampe, entro il 1544. sione di specifici punti dottrinali e pratiche ricorrenti Nel presente studio, l’A. si pone il problema della che accetterebbe facilmente di emendare. Così, la sto- paternità dei paratesti che affiancano le edizioni di Val- ria – è la formula felice impiegata da Marie Barral-Ba- la e si chiede, in primo luogo, se possano essere attri-

sf177.indb 574 19/12/15 01.04 Cinquecento 575

buiti con certezza a Bade oppure se siano il risultato di sicus Interpres». L’“Eloge du mois de mai” de Caspar un’ampia collaborazione all’interno dell’officina tipo- Scheit (Worms, 1551), pp. 91-106) et de A. Leclercq grafica e, in secondo luogo, se siano lavori originali o («Extranea lingua». L’enjeu des langues pendant la pre- rifacimenti di testi altrui. Soprattutto relativamente al- mière croisade, pp. 41-52) abordent la question des la seconda questione, vengono analizzate le varie fonti rapports entre langues et d’identités culturelles diffé- delle quali si serve lo stesso Bade e i giudizi che l’eru- rentes: les adaptations en allemand des romans cheva- e dito francese dà sull’opera e sullo stile di Valla. Viene leresques réalisées par Wolfram von Eschenbach (xii - e considerato, poi, l’apparato paratestuale delle edizioni xiii siècles) révèlent comment les personnages de ces badiane, caratterizzato da un sunto del capitolo e da cycles, en particulier les Français et les Provençaux, aggiunta di materiali nuovi, quali precisazioni, con- peuvent être vus et représentés par un allemand; à la fronti, paragoni con altri autori, soprattutto con i ‘mo- cour d’Heidelberg, Caspar Scheit traduit deux textes derni’, novità assoluta per un commento alle Elegantie. latins, qui avait été composés comme cadeaux de noces Nel complesso, spiccano le modalità di lettura dell’o- à la cour, et ce en transposant dans la poésie formes et pera valliana da parte di Bade, che dà l’avvio a una me- procédés typiques du domaine musical; les chansons ticolosa ricerca, in cui i materiali vengono confrontati de croisades mettent sur scène des personnages dont e accresciuti, dando vita a un testo che farà scuola e la diversité ethnique est rendue par le recours à des che contribuirà in maniera determinante a diffondere expressions puisées aux langues respectives. Le plu- in modo critico e personale il pensiero e le opere di rilinguisme des personnages est central aussi dans la Valla in Europa. Satyre Ménippée analysée par D. Ménager (Le mélange [filippo fassina] des langues dans la “Satyre Ménippéé” (1594), pp. 125- 134). Un cas particulier de «rencontre» entre deux lan- gues est examinée par A. Laimé, qui étudie la fonction Langue de l’autre, langue de l’auteur. Affirmation des poèmes latins de Nicolas Petit dans les préfaces des e e d’une identité linguistique et littéraire aux xii et xvi œuvres en français de Jean Bouchet, dans lesquelles les siècles, études réunies par Marie-Sophie Masse, Anne- deux langues trouvent une légitimation réciproque Pascale Pouey-Mounou, Genève, Droz, 2012 (« Tra- (L’altérité des langues au service d’une littérature natio- vaux d’Humanisme et Renaissance », n. CDXCVII. nale. Les poèmes latins de Nicolas Petit dans l’œuvre de Jean Bouchet (1524-1532), pp. 67-90). Ce volume, issu d’un colloque tenu à l’Université La deuxième section introduit le concept d’«Au- de Picardie-Jules Verne en 2007, propose un rappro- torité», à l’égard de laquelle les langues vernaculaires chement intéressant entre deux moments de l’his- cherchent à préciser leur statut. Cette autorité peut e e toire littéraire française – le xii et le xvi siècle – dont être représentée par la langue sacrée: M. Kiwitt (Hé- la critique a souvent mis en relief les parallélismes breu, français et «judéo-français» dans les commentaires en tant que moments de «renaissance» des lettres. bibliques des pašţanim, pp. 137-154) déchiffre les élé- Ce recueil d’études aborde la question délicate de ments vernaculaires présents dans les gloses des com- e la constitution d’une identité linguistique et litté- mentateurs bibliques de foi hébraïque au xii siècle raire au cours des deux époques en question, dans le en France et en Allemagne; le rapport entre l’hébreu, cadre des rapports de la culture d’oïl avec les langues langue mystérieuse et mystique, et le latin ou les lan- «autres» (le dialectes occitans, le latin ou les autres gues vulgaires fait l’objet de quelques Annotationes de langues vivantes). Sébastien Castellion sur ses traductions de la Bible, Le volume s’articule autour de trois sections: la pre- visant à désacraliser la langue hébraïque (M.-C. Go- mière («Territoires») vise à analyser les pratiques de mez-Géraud, Sébastien Castellion et l’hébreu. Les an- confrontation et d’intermédiation qui sous-tendent le notations de la Biblia (1551): un discours sur la langue, choix d’écrire dans une langue régionale ou nationale, pp. 243-257). L’autorité biblique peut être réélabo- ainsi que les mises en scène de la rencontre et du métis- rée selon des schémas interprétatifs appartenant à la sage entre langues et cultures diverses. Cette confron- culture vernaculaire, comme le modèle des romans tation peut s’opérer à l’intérieur même du royaume de épiques (B. Milland-Bove, Le style épique dans le “Ro- France: dans l’une de ses chansons, le poète artésien man de Dieu et de sa mere” d’Herman de Valenciennes, Conon de Béthune aborde la question du français péri- pp. 167-181), ou en confiant le rôle du narrateur à une phérique à partir des reproches que Philippe Auguste figure féminine, ce qui apparenterait le récit religieux et sa mère ont adressés à son égard et à sa manière de à la fabula (E. Thorington, Contes de bonne femme. s’exprimer en français (G. Gros, Comment peut-on Voix féminines dans la translatio de la langue sacrée vers être artésien? Réflexion sur la Chanson III de Conon la langue vernaculaire dans la littérature française des e e de Béthune, p. 25-40); la contribution de M. Jourde xi et xii siècles, pp. 155-166), ou encore en adaptant e (Diglossie et auctorialité au xvi siècle en France méri- partiellement l’ouvrage aux goûts mondains des desti- dionale. Sur la figure du transfuge, pp. 107-124) montre nataires (M.-G. Grossel, Des lectures au réfectoire des e comment au xvi siècle, la diglossie existant dans les moines jusqu’au château de la comtesse. Traduction des territoires du Midi entre en jeu chez certains auteurs “Vies des Pères” pour Blanche de Champagne (ca. 1205- dans la représentation d’une transformation identi- 1220), pp. 183-194). La confrontation peut s’opérer taire, qui se réalise dans différents personnages (le aussi avec le latin en tant que langue de culture, et se «voyageur» Marot, qui quitte en même temps son résoudre dans une défense de la dignité du français: il Quercy et sa «langue maternelle» pour se déplacer à en est ainsi pour Charles de Bovelles et son traité de Paris et adopter «la paternelle / Langue Françoyse es géométrie en langue vulgaire (A.-H. Klinger-Dollé, grands Courts estimé»; le «prêtre défroqué» qui se fait La langue française «langue de l’autre» dans les “Géo- poète, et qui change de statut en même temps qu’il se métries pratiques” et les recueils de proverbes de Charles construit une langue poétique; la femme poète, qui sait de Bovelles (1479-1567), pp. 195-210); Jacques Pele- rimer en provençal et en français). Les contributions tier, dans la préface de sa traduction de l’Art poétique de R. Pérennec (Couloirs et surfaces intermédiaires d’Horace et Joachim Du Bellay dans la Deffence dé- entre l’auteur et l’autre dans les adaptations de Wol- passent tous les deux la conception de la simple «trans- fram von Eschenbach, pp. 53-66), E. Kammarer («Mu- lation» fidèle à son modèle d’autorité, le premier pour

sf177.indb 575 19/12/15 01.04 576 Rassegna bibliografica

s’attribuer le statut d’auteur, le second pour privilégier dans trois traductions avant 1540, pp. 347-359) aborde l’imitation, qui «ne se contente plus de transmettre un l’analyse comparative des textes liminaires de trois tra- contenu, mais prétend absorber la force propre de son ductions de romans sentimentaux espagnols (la Prison modèle» (J. Vignes, Identité linguistique et appropria- d’amour de Diego de San Pedro, la Penitence d’amour tion littéraire. “L’Art poetique d’Horace, traduit en Vers de Pietro Urrea, et la traduction de Grimalte y Gradis- François” par Jacques Peletier du Mans (1541-1545), sa de Juan de Flores exécutée par Maurice Scève, avec pp. 211-225; C. Gutbub, Joachim Du Bellay et l’«illus- le titre La deplourable fin de Flamete); pour l’A., ces tration» du français. Le motif de la translation comme textes montrent trois différentes modalités de trans- «Loy de Nature», pp. 227-242). latio vulgaire, ayant en commun la valorisation de la La troisième et dernière section est consacrée aux langue-cible et la constitution d’une nouvelle posture «Passages» et examine les problématiques concernant du traducteur comme un nouvel auteur. Enfin, dans les la transmission et l’adaptation des textes, ainsi que celle deux auto-traductions d’Étienne Dolet étudiées par E. de l’appropriation des modèles. Un premier groupe de Rajchenbach («Avecques exhortation à tous les lettrés communications s’articule autour des romans médié- françoys, s’aymer et soubstenir l’un l’autre». Deux auto- vaux: D. James-Raoul (“Cligès” de Chrétien de Troyes. traductions d’Etienne Dolet, pp. 361-377), l’éditeur hu- Un style atypique entre style des autres et style d’auteur, maniste, fervent latiniste qui traduit les Fata et le Ge- pp. 261-273) met en évidence des procédés narratifs nethliacum pour la naissance de son fils se confronte que Chrétien de Troyes adopte dans son Cligès, et qui au double rôle d’auteur et de traducteur, partagé entre sont redevables au modèle du roman byzantin, mais l’exigence de fidélité au texte latin et une certaine li- qui seront dépassés dans sa production successive; les berté d’invention. En conclusion du volume, une vaste jeux sur l’anthroponymie des personnages dans deux bibliographie conçue en deux sections (textes origi- romans de Hue de Rotelande et Aimon de Varennes naux et littérature critique, pp. 379-421) rassemble les semblent faire référence aux romans de l’Antiquité, titres des ouvrages cités dans les communications. et posent ainsi les bases d’une translatio studii extrê- mement allusive (F. Mora, S’approprier de la langue de [alessandro bertolino] l’autre. Jeux sur l’onomastique et translatio studii chez Hue de Rotelande et Aimon de Varennes, pp. 275-286); l’adaptation en langue allemande du Roman de Renart Aa. Vv., Des «arrests parlans». Les arrêts notables par l’alsacien Heinrich der Glîchezâre constitue une à la Renaissance entre droit et littérature, études réu- «translation» non seulement linguistique, mais aus- nies et publiées par G. Cazals et S. Geonget, Genève, si culturelle, qui favorise la naissance de la figure de Droz, 2014, pp. 268. l’auteur-romancier dans l’espace germanophone (D. Buschinger, “Reinhart Fuchs”, adaptation du “Roman Cet ouvrage réunit les actes du colloque qui s’est de Renart”, ou la naissance de l’auteur-romancier de tenu les 2 et 3 juin 2011 au CESR de Tours dans le langue allemande, pp. 287-296); C. Gaulier-Bougas- but d’étudier, selon une approche pluridisciplinaire, le e e sas (Des romans anglo-normands des xii et xiii siècles rôle des grands arrêts (c’est-à-dire des arrêts de justice e à leur récréation en prose au xv siècle. “Horn”, “Pon- ayant fait jurisprudence sur un point notable) à la fin thus et Sidoine”, et les romans de “Gui de Warewic”, du moyen âge et aux débuts des temps modernes, au pp. 297-310) étudie les différences entre deux romans temps de la genèse de l’arrestographie. anglo-normands (Ponthus et Sidoine et Le roman de Après l’introduction de Géraldine Cazals et Ste- Gui de Warewic) et leur mise en prose française du phan Geonget (pp. 7-16), le volume s’articule en XVe siècle, en mettant en évidence deux modalités trois chapitres. Chapitre 1: «De la pratique à l’arrêt de réception très différentes, l’une très affranchie du notable». texte-source, l’autre dans le signe de la continuité. De Patrick Arabeyre (L’ombre portée du parlement de la littérature romanesque on passe à la satire dans la Paris sur le premier recueil d’arrêts toulousain (début e communication de A.-L. Metzger-Rambach (Com- du xvi siècle), pp. 19-42) poursuit l’étude, déjà enta- ment les mots viennent aux auteurs. Le cas de la lettre mée par ailleurs, d’un recueil d’arrêts du parlement pythagoricienne, pp. 311-325), qui approche la traduc- de Toulouse. La comparaison méthodique de ses dif- tion latine de la Narrenschiff de Sebastian Brant par férentes éditions (de l’édition lyonnaise de 1513-1514 Locher (1497), et l’adaptation française qui en à la quatrième édition, à Paris en 1551, en passant par fait Pierre Rivière. L’analyse de l’A. se concentre en les rééditions lyonnaises de 1513 et 1516) permet de particulier sur les implications du motif de la «lettre montrer comment le projet initial d’Étienne Aufréri pythagoricienne» dans les deux versions: le choix entre d’élever un monument à la mémoire du parlement de volupté et vertu a comme effet la prédominance accor- Toulouse se voit progressivement infléchi par la part dée à la valeur de l’éloquence, dans la version latine, grandissant d’arrêts du parlement de Paris (pour abou- et une perspective plus moralisante dans la version en tir à une proportion de 97 arrêts toulousains contre vulgaire, liant deux lectures différentes à deux langues 314 arrêts parisiens dans l’édition parisienne établie distinctes. S. Provini (Les étapes de la translatio d’un par Charles Du Moulin en 1551). Marie Houllemare genre. L’héroïde politique sous Louis XII, de la première (De la collecte aux collections d’arrêts du parlement de e “Epistola Annae reginae” de Fausto Andrelini (1509) Paris au xvi siècle, pp. 43-57) interroge la pratique aux «epistres royalles» françaises, pp. 327-345) retrace des collecteurs d’arrêts, qui assistent aux audiences les étapes à travers lesquelles l’héroïde politique s’est et consignent les arrêts dans des recueils manuscrits diffusée en France: le rôle de médiateur entre la tra- à usage personnel, afin de dégager leurs motivations dition ovidienne et l’«epistre royalle» française aurait selon le moment de leur carrière juridique, du jeune été joué par l’Epistola Annae Reginae de Fausto An- avocat en formation qui cherche ainsi à compléter, par drelini; à partir des traductions françaises par Crétin la pratique, une formation essentiellement théorique, à et De Villebresme se développa ensuite une produc- l’avocat en exercice, qui se montre plus sensible dans tion vernaculaire originale, achevant ainsi la translatio. sa collecte à l’art oratoire de ses confrères ou au ma- La contribution de M. Thorel (L’altérité au principe gistrat qui ne retient que la décision de justice. Xavier de l’auctorialité. Les enjeux d’une translatio vulgaire Godin (Prolégomènes aux premiers recueils d’arrêts no-

sf177.indb 576 19/12/15 01.04 Cinquecento 577

tables du parlement de Bretagne, pp. 59-83) s’intéresse mat insolite (in-12) et ordonné en plusieurs traités dis- aux arrêts notables à travers les recueils de deux arrê- tincts, permet de montrer comment l’auteur se pose tistes bretons, Noël Du Fail et Guillaume de Lesrat, «en architecte et non en simple maçon» (p. 190), afin afin de dégager l’intérêt de ces recueils souvent contro- de produire un recueil encore imparfait certes, mais versés, mais qui permettent d’instruire les praticiens et déjà construit. Géraldine Cazals (Les arrêts notables nous font mesurer aujourd’hui l’importance de la juris- et la pensée juridique de la Renaissance, pp. 203-224) prudence. Sonia Vernhez Rappaz (Avis de droit ou ar- rappelle également la méfiance suscitée par ces recueils e rêts «notables», la jurisprudence à Genève au xvi siècle, dont le recensement reste à faire, tant au niveau des pp. 85-99) rappelle également cette valeur des recueils cours locales qu’à l’échelle nationale. L’étude diachro- e d’arrêts notables qui, dès le xiii siècle concourent à nique montre comment le recueil d’arrêts se développe consolider les institutions juridiques et à éclairer les depuis la fin du moyen âge en s’émancipant de manière e praticiens. Elle montre comment l’essor, au xvi siècle, progressive des genres juridiques médiévaux (recueil des recueils imprimés relève d’une volonté de promou- de notables et questiones), avec lesquels ils peuvent voir la jurisprudence locale dans un contexte de multi- encore présenter des points de contact. De composi- plication des parlements de province, en contribuant à tion et de qualité littéraire variées, le recueil d’arrêt naît dégager une interprétation commune de sources mul- de l’évolution des procédures judiciaires et reflète les tiples (droit romain, droit coutumier, ordonnances). La enjeux juridiques d’une époque soucieuse de codifier comparaison entre les avis de droit genevois et la pra- et de rationaliser le droit. Nicolas Warembourg («Non tique des arrêts en France permet de dégager les diffé- exemplis sed legibus». L’autorité des arrêts à la lumière rences entre les deux systèmes juridiques. des droits savants, pp. 225-240) interroge la valeur ju- Chapitre 2: «L’écriture des arrêts notables». Valé- ridique même de l’arrêt en se demandant si les pré- rie Hayaert («Serio ludere» et humanisme juridique: cédents peuvent constituer une base légale suffisante les Gloses de Benoit Le Court aux “Arrêts d’Amour” pour motiver une décision judiciaire. Anne Rousse- de Martial d’Auvergne, pp. 103-126) se penche sur le let-Pimont (Valeur et typologie des arrêts d’après les commentaire de Benoit Le Court aux Arresta Amorum arrêtistes, pp. 241-258) montre que la jurisprudence de Martial d’Auvergne, mélange d’érudition huma- peut être une source du droit à l’époque, lorsque la niste et de posture philosophique ironique et plaisante, décision émane d’une juridiction respectée. Toutes les appliquant au commentaire juridique le principe ho- décisions des cours n’ayant pas la même valeur, il y a racien: vertere serio ludi (AP, 226). Olivier Descamps donc une typologie des arrêts et seuls certains types (Quelques remarques sur certains aspects de la respon- pourront prétendre à un caractère normatif, étudié à sabilité dans les arrêts notables de Jean Papon, pp. 127- travers deux recueils, respectivement de Louis Le Ca- 141) montre comment le genre de l’arrêt notable s’ins- ron et Bernard de La Roche-Flavin. crit à la croisée de la littérature et du droit, à travers En réunissant les contributions d’historiens du droit l’étude d’un recueil de Jean Papon (1556) qui se signale et des lettres, ce volume (complété par un index des par l’emploi du français et la collecte d’arrêts de plu- noms d’auteurs) constitue une étude très riche de la sieurs parlements de France, les références fréquentes pratique des recueils d’arrêts dont elle permet d’envi- à la législation royale et une sélection subjective, en sager à la fois l’ambiguïté (recueils à la fois controver- particulier attentive à ce qu’on appelle de nos jours la sés et utiles - aussi bien pour les juristes de l’époque notion de «responsabilité». Bruno Méniel (Les “Plus que pour les chercheurs d’aujourd’hui), l’hétérogénéi- notables et solennels arrests du Parlement de Bretagne” té (usage individuel ou public, diffusion manuscrite ou de Noël du Fail, pp. 143-157) se consacre pour sa part imprimée, variété typologique, construction variée…) aux arrêts bretons recueillis par Noël Du Fail afin de et la valeur à la fois juridique et littéraire (dans le cas montrer comment ce dernier assume une véritable pos- d’ouvrages imprimés), à travers la présentation de cer- ture d’auteur, soucieux de faire œuvre utile après avoir tains recueils saillants. Témoins des enjeux juridiques été écarté de ses fonctions de conseiller au parlement d’une époque (développement des parlements de pro- de Bretagne en raison de ses confessions religieuses, vince, multiplication des procès, volonté d’uniformi- dénonçant les tares de la justice (comme la démultipli- sation de sources plurielles), mais aussi d’un essor de cation des procès) et élaborant un recueil varié (par la la langue française, ces recueils présentent un intérêt diversité des cas traités et des milieux sociaux retenus). indéniable que le présent volume parvient pleinement Stephan Geonget (Louis le Caron, l’écriture de l’arrêt à démontrer. notable entre droit et littérature, pp. 159-178) s’inscrit [sabine lardon] également à la croisée de la littérature et du droit en montrant comment Louis Le Caron témoigne d’une double volonté de fonder d’une part un droit français Sergio Cappello, «Décalages contre-textuels: la e clair, émancipé de la tradition italienne et romaine et mise en prose du Manteau mal taillé du xvi siècle», in d’illustrer d’autre part la langue française en faisant de «Romanica» 16 – Études Romanes. Hommages offerts à la littérature un auxiliaire de l’écriture juridique. Florica Dimitrescu et Alexandru Niculescu, Éditions de Chapitre 3: «Ambitions et autorité des arrêts». l’Université de Bucarest, 2013, pp. 135-144. Jean-Louis Thireau (Les flottements de l’arrestogra- e phie au xvi siècle: les “Décisions notables” de Gilles Le Le récit connu sous le titre de Mantel mautaillé est Maistre, pp. 181-202) rappelle l’importance controver- un conte en vers octosyllabiques difficile à classer, mais sée des recueils d’arrêts: si chaque cour possède ses dont la visée parodique semble certaine: fabliau ou lai e recueils, ceux-ci ont leurs partisans, mais aussi leurs breton composé vraisemblablement entre la fin du xii e détracteurs, qui dénoncent le caractère subjectif et in- et le début du xiii siècle, il est centré sur l’épreuve de certain de la transcription, de la sélection et de l’in- fidélité, proposée dans le cadre de la cour arthurienne. terprétation des arrêts. Ceux-ci ne ressortissent pas de Sergio Cappello présente ici la version en prose trans- e fait à une pratique réglée. Manuscrits ou imprimés, ils mise par le manuscrit fr. 2153 de la BnF (xvi siècle) peuvent être d’un usage privé ou public, hésiter entre en s’arrêtant sur les modifications introduites par le le recueil construit ou la simple compilation. L’étude prosateur anonyme: celles-ci portent essentiellement du recueil de Gilles Le Maistre, publié sous un for- sur l’incipit, l’explicit, l’onomastique et surtout sur

sf177.indb 577 19/12/15 01.04 578 Rassegna bibliografica

une présence appuyée de Morgane; le dénouement laume Paradin, che tesse l’elogio della poetessa. Anche diffère aussi du texte médiéval, le couple exemplaire le testimonianze di Pierre de Saint-Julien, che ripren- formé par Caradoc et son amie quittant la cour pour de l’immagine di Louise come donna «monnayant ses vivre heureux en dehors du monde arthurien. L’exis- charmes», è confutata. L’A. porta come prova il fat- tence d’une édition imprimée (Lyon, François Didier, to che Saint-Julien non conobbe Louise Labé. Viene ca 1570), dont aucun exemplaire n’est conservé, est té- poi analizzato il rapporto che Labé ebbe con alcuni moignée tant par Du Verdier que, beaucoup plus tard, grandi eruditi dell’epoca. In primo luogo, con Jean de par le Marquis de Paulmy, qui en donna un bref ré- Tournes, che secondo Mireille Huchon sarebbe l’ide- sumé dans la Bibliothèque Universelle des Romans de atore della finzione letteraria intorno alla stessa Labé. février 1777. En tant que seiziémiste, Sergio Cappello L’A. ritiene che sia improbabile che tale ‘complot- s’interroge surtout sur le sens de ces réélaborations en to’ avesse una risonanza così ampia, addirittura al di prose d’un récit médiéval qui avait perdu de sa pré- fuori del milieu lionese. In conclusione, tutte le ipotesi gnance et qui n’avait plus de chances de «parler» aux presentate nella teoria di una Louise de papier vengo- e lecteurs de la seconde moitié du xvi siècle. no considerate da Barbier-Mueller semplici ipotesi e, pur ammettendo che attorno la figura di Labé vi siano [maria colombo timelli] più dubbi che certezze, nessuna delle prove presentate contro la sua reale esistenza avrebbe, secondo l’A., un vero fondamento, tale da giustificare le teorie su una Jean Paul Barbier-Mueller, Ne vouloir rien fors Louise Labé frutto di costruzioni politico-poetiche del que toy comprendre. «Défense et illustration de Louise Rinascimento francese. Labé», «Bibliothèque d’Humanisme et Renaissance», [filippo fassina] LXXVII, 1 (2015), pp. 7-42.

Nel 2006 Mireille Huchon pubblica un volume JoAnn DellaNeva, Reading and re-writing Rome: (Louise Labé. Une créature de papier, Genève, Droz) intertextuality and the sonnet sequences of Du Bellay, nel quale viene presentata la teoria secondo la quale Magny, and Piccolomini, «Bibliothèque d’Humanisme Louise Labé sarebbe stata, in realtà, una prostituta, e et Renaissance», LXXVII, 1 (2015), pp. 43-66. non avrebbe mai composto nulla, al punto che i suoi versi sarebbero stati scritti da un gruppo ristretto di Un soggiorno in Italia era, per la formazione degli eruditi lionesi, riuniti attorno alla figura di Jean de eruditi francesi del Cinquecento, una tappa pressoché Tournes, con la finalità di attribuire alla Francia dell’e- obbligata. E l’influenza della letteratura italiana si fa poca la paternità di una scrittrice in grado di eguagliare sentire in maniera consistente in ogni genere letterario Vittoria Colonna. Anche Jean Balsamo riprende questa del periodo, ma è soprattutto nella poesia – amorosa teoria, negando tuttavia l’identificazione della pseudo e non – che emerge in massima parte l’intertestualità autrice con una prostituta, ma accogliendo la propo- fra testi italiani e testi francesi. Questo lavoro prende sta di considerare le Euvres una finzione letteraria. La in considerazione due poeti francesi, Olivier de Ma- portata di questa tesi è significativa, al punto che, se gny e Joachim Du Bellay, che prestarono servizio come confermata, una parte della letteratura francese del segretari presso il Vaticano e che subirono profonda- xvi secolo dovrebbe essere rivista. Tuttavia, non man- mente il fascino del petrarchismo italiano. Tornati in cano gli oppositori, tra i quali si pone con forza l’A. Francia, pubblicarono dei canzonieri (Les Souspirs di di questo contributo, che cerca di smontare, una per Magny nel 1557 e Les Regrets di Du Bellay nel 1558). una, le prove che Huchon porta a sostegno della teo- Il modello italiano di entrambi questi autori sarebbe ria di una Louise Labé de papier. Il primo argomento il senese Alessandro Piccolomini, che nel 1549 pub- sul quale si dibatte è la totale inesistenza della poetessa blicò i Cento sonetti, nella cui prefazione si dice con sia prima sia dopo la pubblicazione della sua raccolta chiarezza che il poeta deve saper comporre sui sog- (1555). Vengono in questo senso fornite alcune indica- getti più disparati (scienze naturali, teologia, politica zioni biografiche, che permetterebbero di identificare ecc.) e che il sonetto non deve essere limitato alla poe- Louise Labé con Louise Charly, figlia di un fabbricante sia amorosa, ma deve trattare anche argomenti più seri di corde, soprannominato L’Abbé, e moglie sempre di alla stregua di Orazio. Inoltre, nel sonetto di apertura, un cordaio. I biografi dell’epoca (Du Verdier in parti- vengono indicati gli argomenti che non si devono trat- colare, come riporta Huchon) definiscono la poetessa tare: vittorie militari e materie intellettuali, riprenden- come courtisanne e citano una prostituta chiamata la do l’ode programmatica Laudabunt alii (1.7) del poe- Belle Cordière, sulla quale fu scritta anche una chanson. ta latino. Anche Du Bellay apre i suoi componimenti Tuttavia l’autore di questo studio nega che ci sia qual- con una sequenza di argomenti che vengono rifiutati sivoglia legame tra questa figura e la Louise lionese. Ri- (Je ne veulx point fouiller au seing de la nature), citan- sulta, comunque, altrettanto improbabile che attorno do quasi alla lettera il modello italiano, sia dal punto alla donna sia nato un vero e proprio salotto di eruditi, di vista tematico, sia da quello retorico e stilistico, e poiché pare non esista alcuna attestazione, nemmeno ribadendo il rifiuto della poesia d’amore. L’A. prose- marginale, su di esso nella Lione del tempo. gue repertoriando numerosi casi di riprese tematiche Un dato importante, su cui si basa Mireille Huchon, e intertestuali tra i due poeti, come la vita nella città è la presenza di Louise Labé tra i documenti relativi di Roma, la nostalgia per la propria dimora, la futili- a un processo, tenutosi a Ginevra, in ambito calvini- tà dei viaggi, l’inconsistenza dei beni terreni, la critica sta, contro una parente della lionese: in essi la donna è alle donne infedeli. Benché alcuni di questi argomenti definita nuovamente Belle Cordière, come sinonimo di siano da considerarsi topoi della lirica cinquecentesca meretrice. Viene però contestato a Mireille Huchon il europea, ripresi dalla poesia latina, tuttavia i rimandi fatto che la sua fonte biografica principale sia il chro- tra i due autori diventano, secondo le indicazioni for- niqueur Claude de Rubys. In effetti, Barbier-Mueller nite in questo contributo, un vero e proprio dialogo a cerca di dimostrare l’assoluta mancanza di buona fede distanza, fatto di riprese e citazioni, spesso anche lette- nelle testimonianze dello storico, che avrebbe scritto le rali. Lo stesso ragionamento viene fatto per l’opera di sue opere con la finalità di contraddire il rivale Guil- Magny, anche se l’A. ammette che il riferimento diretto

sf177.indb 578 19/12/15 01.04 Cinquecento 579

tra i due testi è riscontrabile solo in un sonetto, di cui attaque ou encore le fil directeur des rimes. L’étude se viene offerto il raffronto. In ogni caso, vengono eviden- concentre ensuite sur le premier quatrain pour dégager ziate numerose tematiche comuni, quali l’immagine di son inspiration philosophique, chrétienne et poétique Roma, la fragilità della vita umana, la morte che rende («Une vie heureuse», pp. 51-58) et mettre à jour le dia- tutti uguali e l’effetto distruttivo dell’amore. Nel com- logue qu’il établit avec d’autres poètes contemporains, plesso, l’imitatio che Magny opera a partire da Piccolo- comme Ronsard ou Dorat («Des reprises», pp. 59- mini è ben diversa da quella messa in atto da Du Bellay: 70), avant de s’intéresser à la double comparaison si tratta più di una riproduzione di specifici vocaboli o avec Ulysse et Jason («Deux héros», pp. 71-106), pour immagini, che riserva uno spazio, seppur minimo all’a- envisager dans un premier temps leur valeur exem- more, completamente assente nel testo di Du Bellay. plaire philosophique et chrétienne, puis leur dimen- In Magny inoltre il destinatario dei componimenti può sion métapoétique («Deux navigations», pp. 106-112). essere anche una donna, mentre gli altri due poeti pre- Le second quatrain, marqué par l’apparition du «je» diligevano indirizzare i testi agli amici. Un’analisi par- lyrique, aborde la question de l’exil et du dédouble- ticolare merita la descrizione dello spazio geografico: ment de l’exilé, écartelé entre deux lieux («Un exil», la Siena di Piccolomini, riletta peraltro attraverso gli pp. 112-138). Une fois la manifestation lyrique de la occhi del modello oraziano, viene ripresa da Magny e souffrance («Des émotions», pp. 138-149) replacée ricontestualizzata nella Cahors dell’autore francese. Il dans ses enjeux esthétiques et philosophiques (la pen- tema della guerra e, più in particolare, il rapporto tra sée stoïcienne en particulier), le commentaire montre i Signori che detengono il potere e il popolo, permet- comment le rapport à l’exil est densifié par l’écart entre te, poi, un interessante raffronto non solo tra Magny e la Rome chrétienne et la Rome païenne («Deux Rome», Piccolomini, sempre attraverso la mediazione di Ora- pp. 150-164) et combien alors l’image de la chemi- zio, ma anche tra Magny e Du Bellay, riguardo ai qua- née («Un foyer», pp. 164-177) et le désir de solitude li viene fornita una repertoriazione di riprese lessicali («Des désirs», pp. 177-186) s’inscrivent dans le cadre e stilistiche di grande interesse. In conclusione, dagli des exercices de meditatio de l’humanisme contempla- esempi riportati nel presente studio, si evince con chia- tif (la conscience de soi et le renoncement au monde rezza che Du Bellay legge Magny, che a sua volte legge participant d’une même quête de la sagesse). Mais la Piccolomini, il quale è chiaramente debitore di Orazio: quête de l’Anjou peut également revêtir une dimension si creano così delle reti di citazioni e riprese che oltre métapoétique. Le parallèle qui se met en place dans a offrire un eccellente esempio di intertestualità classi- le sizain entre Rome et l’Anjou relève des moyens de ca e moderna, permette anche una più ampia conside- l’amplification («Un parallèle», pp. 187-214). Le refus razione sull’universalità della vita, sulla difficoltà degli du marbre, symbole de richesse, de pouvoir et de va- uomini e sulle relazioni interpersonali: «the fact that nité, au profit de l’ardoise peut illustrer la préférence traces of these earlier readings reappear in each of the pour le français sur le latin en lien avec le mouvement later author’s own writings bears witness not only to de translatio studii («Du marbre», pp. 214-224), tout the ubiquitous practice of literary imitation but also to comme la préférence pour le «Loire gaulois» peut si- the universality of life’s basic concerns: loves lost and gnifier non seulement le choix de l’humble et des désirs gained, the pleasure of home, the brevity of our time mesurés mais également la revendication d’une iden- on earth, frustrations with the powerful, threats of war, tité poétique française («Un Tibre», pp. 225-233), en and the foibles of the younger generation» (p. 66). association avec la notion de douceur («La douceur», pp. 234-249) dans un poème qui privilégie le movere et [filippo fassina] l’expression de la douleur comme autant de moyens de s’éprouver vivant («Recommencement», pp. 250-253). Un index nominum et un index rerum complètent ce François Roudaut, Sur le sonnet 31 des “Regrets”. volume. Il s’agit donc d’une monumentale étude li- Éléments d’histoire des idées à la Renaissance, Paris, néaire de quelque deux cents pages, attentive à la fois Classiques Garnier, 2014, pp. 273. à la place du texte dans l’architecture du recueil, à sa composition (rimes et sonorités, scansion, choix des Cet ouvrage renoue avec le genre du commentaire mots), aux échos multiples entre ce sonnet et d’autres érudit pour se consacrer à la lecture filée d’un texte du même recueil ou du même auteur, au dialogue avec unique, le sonnet 31 des Regrets de Du Bellay afin de les auteurs païens et chrétiens, à la façon enfin dont faire resurgir ses sources occultées, racines souter- le sonnet s’inscrit dans les courants philosophiques et raines dont le texte se nourrit tout en s’en démarquant littéraires de son temps. Cet ouvrage atypique et pas- à travers un double travail d’imitation et de différen- sionnant parvient à concilier une érudition digne des ciation. La démonstration est en cela magistrale, dans humanistes (rassemblant autour de ce sonnet auteurs la mesure où le texte choisi est l’un des poèmes les plus païens et chrétiens, penseurs ou écrivains d’hier et cri- célèbres de la langue française, à l’attaque universel- tiques d’aujourd’hui) avec une clarté et une fluidité de lement connue, «Heureux, qui comme Ulysse», alors plume qui le font lire comme un roman, roman para- même que ses enjeux peuvent rester occultés par la doxal d’un sonnet en l’occurrence, ou plutôt roman de méconnaissance de ses sources masquées. Ainsi que la pensée, dans lequel le lecteur est amené à tracer son l’explique l’avant-propos (pp. 9-33), il s’agit donc de propre itinéraire parmi les deux niveaux de lecture et tenter de comprendre ce sonnet en faisant resurgir ses d’approfondissement que proposent le commentaire racines occultes, de façon non pas à simplifier le sens, analytique d’une part et les importantes notes de bas mais au contraire à enrichir et densifier la lecture. Le de page d’autre part. Au-delà de son intérêt pour l’his- commentaire commence par situer le sonnet dans son toire des idées et la littérature de la Renaissance, cette rapport avec les autres poèmes du recueil («Un ordre», étude présente donc une très belle démonstration de pp. 37-51): au niveau de la double page d’une part, ce que peut être l’exercice du commentaire poussé à dans ses liens avec les trois autres sonnets (suivant un son plus haut niveau et serait en ce sens à conseiller, de principe de disposition et de lecture mis en lumière par manière plus générale, à tous ceux qui s’engagent sur Francis Goyet); au niveau de l’agencement d’ensemble la voie de la recherche en Lettres. d’autre part, à travers les résonances qu’instaure son [sabine lardon]

sf177.indb 579 19/12/15 01.04 580 Rassegna bibliografica

Aa. Vv., “Didon se sacrifiant” d’Étienne Jodelle, Polizzi) riprendono questioni già affrontate recen- textes recueillis par Bruna Conconi, Bologna, Emil de temente dai rispettivi autori, proponendo comunque Odoya, 2014 («Analyses textuelles»), pp. 266. nuovi sviluppi. Ogni contributo è accompagnato da una bibliografia selettiva, mentre alle pp. 17-21 è pre- Il volume raccoglie gli interventi presentati in oc- sente un repertorio delle ultime pubblicazioni dedicate casione del seminario di Cesenatico del 13-15 ottobre alla tragedia di Jodelle che integra le bibliografie curate 2011 dedicato alla Didon se sacrifiant. Il contributo di da Sabine Lardon e Jean-Claude Ternaux (aggiornate, Jean-Claude Ternaux (Dramaturgie et figures fémini- queste ultime, al 2013-2014). nes dans “Didon se sacrifiant”, pp. 7-26) evidenzia di- I contributi raccolti sono i seguenti. Emmanuel verse tematiche centrali della tragedia: innanzitutto la Buron, Le sacrifice de Didon, Réseau d’allusions et scé- predominanza delle figure femminili, il cui spazio di nario sous-jacent dans “Didon se sacrifiant” d’Étienne parola è il più esteso – ma non per questo il più efficace Jodelle, pp. 23-47; John Nassichuk, «Ceste gent trom- (il fallimento della parola persuasiva decreta infatti la peresse…»: «foi», «feinte» et éthique de la parole dans morte della protagonista). Viene poi analizzato il per- “Didon se sacrifiant” pp. 49-113; Gilles Polizzi, Didon corso che conduce al suicidio attraversa le tappe del sur la scène de l’envie: propositions dramaturgiques, dolore, morale e fisico, e del furore, in cui ritroviamo pp. 115-150; Sylvain Garnier, Les chœurs chez Jodelle: l’eco delle analisi di F. Dupont sulla tragedia senecana. évolution des fonctions dramatique, lyrique et morale et Infine si mostra come la figura di Didon si sovrappon- de leur articulation, pp. 151-182; Mathilde Lamy-Hou- ga a quella di altre due eroine del mito, evocate nel- dry, Héros épique, héros tragique: la figure d’Énée de la tragedia stessa: Medea e Arianna. Un altro dei temi Virgile à Jodelle, pp. 183-196. cardine della pièce, quello della menzogna e dell’inter- Buron si interroga sul tema del sacrificio, che Jo- pretazione della parola dell’Altro, è affrontato da Éric delle introduce nella sua riscrittura del mito assimi- Lysøe (D’un mensonge qu’on nomme ici littérature, lando la figura di Didon a quelle di Ercole morente pp. 27-75). L’A. rileva inoltre come l’opposizione fra e di Cristo («sacerdos et hostia», così come la regina personaggi maschili e femminili si articoli sotto mol- di Cartagine è «prestresse et victime»). Assimilazione, teplici aspetti, e in particolare nell’ambito dei simboli questa, certamente problematica: in Didon è assente associati ai due protagonisti (e ai rispettivi campi) che la componente divina che la condurrebbe all’apoteosi, suggeriscono di leggere il confronto fra Didon ed Énée e la sua morte non apre a una prospettiva di salvez- come un dibattito fra tragedia ed epopea. Gilles Poliz- za collettiva. Tuttavia, osservando come Jodelle faccia zi (Le sein cassé: la topique de l’envie et l’invention du ricorso anche altrove al motivo della resurrezione di tragique dans “Didon se sacrifiant” de Jodelle, pp. 77- Cristo non già nelle sue implicazioni religiose ma quale 115), rifacendosi agli studi della psicanalista Melanie immagine del trionfo dell’uomo sulla morte (e in par- Klein, si interessa al tema dell’invidia quale patologia ticolare dell’immortalità del poeta), l’A. riconosce in che, nelle sue diverse forme, colpisce i principali per- Didon un personaggio che incarna la «vengeance de sonaggi della pièce determinandone le sorti. Motivo pe- l’homme» (v. 1966) contro l’umiliazione della caduta raltro fortunatissimo nel secondo Cinquecento, l’invi- imposta dagli dei: attraverso il suicidio, Didon divie- dia contribuisce in larga misura alla creazione di perso- ne «une figure exemplaire de la grandeur foudroyée» naggi complessi e contraddittori e alla definizione della (p. 36). Istituendo infine un parallelo con l’ drammaturgia jodelliana, in cui «l’exploration statique sacrifiant di Bèze, l’A. mostra come l’Énée di Jodelle, de la profondeur des caractères se substitue à l’action» negazione del modello virgiliano del pius Aeneas, rap- (p. 110). L’ultimo contributo, di Didier Souiller (“Di- presenti una sorta di versione esecrabile della figura don se sacrifiant” de Jodelle et “Dido, Queen of Cartha- di Abramo. Il contributo di Nassichuk parte da uno ge” de Marlowe: renaissance de la tragédie ou tragédie studio del lessico e della retorica dell’amore nell’opera de la Renaissance?, pp. 117-150) istituisce un confron- poetica di Jodelle per verificare la presenza dei mede- to fra le Dido(n) di Jodelle e di Marlowe, soffermandosi simi tratti caratteristici nell’opera drammatica. Il tema in particolare su questioni di carattere morale, filosofi- della «foi» e della «constance», già presente nelle poe- co e teologico ma toccando anche questioni legate alla sie e centrale nella Didon (ma pensiamo anche alla sua translatio generica. Ai contributi originali che abbia- rilevanza in altre tragedie coeve, come la Médée di La mo elencato si aggiunge la traduzione di un articolo Péruse), solleva interrogativi di natura morale intor- di Ruggero Campagnoli (Le sentiment du tragique dans no all’uso ambiguo della retorica politica e amorosa, “Didon se sacrifiant” de Jodelle, pp. 249-266, apparso strumento di persuasione e quindi, potenzialmente, di originariamente in «Studi di letteratura francese», 18 inganno. La trasposizione di genere operata sul canto (1990), pp. 17-31) e la trascrizione delle discussioni IV dell’Eneide, peraltro, crea spazi di espressione della che hanno animato il seminario (pp. 151-245). dimensione dell’interiorità che permettono a Jodelle di interrogare i silenzi del testo virgiliano, esplorando il [maurizio busca] motivo dell’incertezza e del sospetto dell’altro. Anche l’articolo di Polizzi guarda all’interiorità dei personag- gi, muovendo dagli studi psicanalitici di Melanie Klein Aa. Vv., “Didon se sacrifiant” d’Étienne Jodelle, sous sull’invidia e la gratitudine per illustrare le declinazioni la direction de Charlotte Bonnet, Anne Boutet, Chri- e gli effetti dell’envie (invidia, ingratitudine, maldicen- stine de Buzon et Élise Gauthier, Tours, Presses Uni- za) nei protagonisti della tragedia. L’A. individua nel versitaires François-Rabelais, 2015 («Perspectives lit- trattamento jodelliano dell’envie il principale motore téraires»), pp. 202. della pièce, nonché un’occasione di riflessione morale ed esistenziale. Garnier esamina invece il problema del Il presente volume, che va ad arricchire il nutrito ruolo del coro nelle tragedie di Jodelle. Nella Cléopâtre corpus delle pubblicazioni sulla Didon se sacrifiant ap- abbiamo un coro che nei primi due atti non interviene parse negli ultimi tre anni, riunisce i contributi dei cin- nell’azione ma porta su di essa il proprio sguardo, men- que specialisti che hanno animato la giornata di studi tre negli ultimi tre diviene un vero e proprio personag- del 19 ottobre 2013 presso il CESR di Tours. Alcuni gio: in questo modo il drammaturgo può dare ampio degli studi raccolti (segnatamente quelli di Buron e spazio a tutte le funzioni (drammatica, lirica, morale)

sf177.indb 580 19/12/15 01.04 Cinquecento 581

prescritte dall’Ars poetica oraziana. Nella Didon inve- céder à l’intégralité des deux articles en japonais, dont ce Jodelle opera una scelta originale, scindendo il co- le résumé permet de mesurer l’apport. ro in due sezioni (passando quindi dall’espressione di una doxa morale a quella di due posizioni opposte e [sabine lardon] inconciliabili) e prediligendone la funzione dramma- tica a discapito di quella lirica; l’A. rileva, inoltre, «un appauvrissement drastique du lyrisme [dont l’inspira- Jacques Yver, Le Printemps d’Yver, édité par Marie- tion] passe d’une logique poétique enthousiaste à une Ange Maignan en collaboration avec Marie Madeleine logique de clarté rhétorique» (p. 176). L’ultimo contri- Fontaine, Genève, Droz, 2015, pp. cli-756. buto, di Lamy-Houdry, indaga invece le implicazioni del passaggio di genere nella definizione dei personag- Viene finalmente ripubblicata un’opera che, malgrado gi di Énée e Didon. «De l’intertexte épique à l’amplifi- il successo di cui godette negli ultimi decenni del Cin- cation tragique, l’héroïsme devient problématique» (p. quecento (circa trenta edizioni, tutte postume, fra il 1572 188); tuttavia, secondo l’A., l’Énée di Jodelle, perso- e il 1600, oltre a due edizioni secentesche e una fortuna- naggio epico posto in una situazione tragica, rimane tissima traduzione inglese del 1578), non aveva finora be- un modello etico positivo che si oppone a Didon, per- neficiato di un’edizione moderna, ad eccezione di quella sonaggio epico che diviene tragico soccombendo alla di P. Lacroix apparsa nel 1841 e riproposta da Slatkine passione (in ciò l’A. si distanzia dalla lettura proposta nel 1970. In assenza del manoscritto originale, il testo di da Buron). riferimento adottato è quello dell’edizione che, basando- [maurizio busca] si su argomenti convincenti, M.-A. Maignan ritiene es- sere la princeps. La curatrice ha scelto di non uniformare le grafie differenti, né di correggere i problemi di accor- «Revue des Amis de Ronsard», XXVII, 2014, do delle persone verbali, dei participi e degli aggettivi; pp. 98. è però intervenuta, oltre che in caso di inintelligibilità o di errore manifesto, dissimilando i/j e u/v, sciogliendo le Ce bulletin annuel de la Société des Amis de Ron- abbreviazioni, introducendo o sopprimendo alcuni apo- sard du Japon 2014 comporte quatre contributions. strofi e spazi, e armonizzando le finali in -é(es). Gli inter- venti sulla punteggiatura e l’impaginazione sono consi- Chihiro Hayashi (L’effondrement des visions oni- riques – autour du “Songe” (1558) de Joachim Du Bel- stenti ma condotti in maniera tale da non modificare la lay, pp. 1-20, article en japonais suivi d’un résumé en scansione ritmica originale. Le varianti significative delle français, pp. 21-23) s’inscrit dans la continuité des prime edizioni sono segnalate in apparato. études de D. Russel, qui a souligné le rapport entre Il testo, corredato da un corposo apparato di note, l’emblème et les visions du Songe, et de M.-M. Fon- è preceduto da un’introduzione suddivisa in tre par- ti. Nella prima (pp. ix-xxxix) viene dapprima tracciata taine qui a étudié la construction du recueil, marquée la vicenda biografica di Jacques Yver basandosi sugli par l’alternance métrique des décasyllabes et alexan- scarni documenti d’archivio disponibili, per poi rico- drins et par la mise en page de l’imprimeur. C. Hayashi struirne l’ambiente religioso e intellettuale nel quale si attire ainsi l’attention sur la valeur structurante d’ex- è formato e ha vissuto. Se non è possibile stabilire dove pressions évoquant la vision, sur la fin des sonnets, sur abbia condotto i suoi studi, si può affermare che con la progression temporelle du recueil et sur l’incerti- tutta probabilità Jacques Yver abbia ricevuto una for- tude entre songe et veille que maintient sa structure mazione in diritto a Poitiers, e che negli ultimi anni di cyclique, pour interroger le rapport entre la poésie et vita abbia soggiornato a Parigi entrando probabilmen- les arts visuels, architecture et peinture. Akira Hamada te in contatto con Belleforest. Incerta anche la sua ap- (Trois étapes des “Quatrains” de Pibrac, pp. 25-40, ar- partenenza religiosa: spesso annoverato dalla critica fra ticle en japonais suivi d’un résumé en français, pp. 41- le file dei riformati, le sue frequentazioni sembrereb- 42) considère les Quatrains de Pibrac en reconstituant bero invece suggerire un’adesione al cattolicesimo. La leur publication progressive: 50 quatrains en 1574, 51 seconda parte dell’introduzione (pp. xxxix-cii) è dedi- nouveaux quatrains en 1575 et 25 supplémentaires en cata alla presentazione dell’opera. Testo difficilmente 1576 (édition définitive de 126 quatrains donc) pour classificabile nei limiti di un genere, il Printemps testi- tenter de percer la logique de leur ordonnance res- monia la vastità degli interessi letterari ma anche poli- pective. L’étude est complétée par un tableau réca- tici, storici e geografici del giovane Yver (in linea con il pitulatif des quatrains et de leur place selon les trois gusto dell’epoca per le grandi cosmographies). La cura- éditions successives. Jean-Pierre Dupouy (La figure de trice traccia i contorni della biblioteca yveriana, in cui Peithô, déesse de la persuasion, dans la poésie de Ron- spiccano fra gli antichi Ovidio, Plutarco e Plinio (ol- sard, pp. 43-65), part du sonnet 32 des Amours de 1552 tre a traduzioni di romanzi alessandrini: Dafni e Cloe, pour suivre la figure de Peithô dans plusieurs recueils Leucippe e Clitofonte), mentre fra i moderni, accanto a de Ronsard ou de ses contemporains, afin d’en dégager diversi storici francesi, italiani e inglesi, troviamo Ra- la dimension érotique, mais également métapoétique belais e l’, numerosi novellieri italiani comme symbole de la volonté de séduction exercée par (Boccaccio, Bandello, Arlotto…) e francesi (Boaistuau, l’auteur sur son lecteur. Jean Braybrook (Robert Gar- Belleforest, Marguerite de Navarre…), e ancora gli nier et l’orchestration du deuil, pp. 67-85) étudie l’im- Asolani e il Cortegiano, Bracciolini e Domenichi, e fra i portance du motif des pleurs dans le théâtre de Gar- poeti contemporanei Ronsard, Du Bellay e Belleau. La nier à travers un parcours de l’ensemble de ses pièces, questione dei rapporti fra prosa e poesia, e fra poesia, afin d’en dégager les enjeux dramaturgiques (fonction musica e danza è affrontata alle pp. lxx-lxxix, in cui cathartique, représentation scénique), mais également Maignan sottolinea peraltro la distanza del Printemps politiques et sociaux (cohésion communautaire et dalle bergeries e dalle raccolte di poesie commentate opposition au tyran), en resituant la question dans le dall’autore. Nelle pagine seguenti la curatrice conduce contexte de l’époque. invece un’analisi della prosa poetica di Yver. La terza Devant l’intérêt de ces communications, nous nous ed ultima parte dell’introduzione (pp. cii-cl) è infine permettrons seulement de regretter de ne pouvoir ac- dedicata alla posterità del Printemps in Inghilterra, do-

sf177.indb 581 19/12/15 01.04 582 Rassegna bibliografica

ve la sua diffusione è particolarmente rapida, e in Fran- Emiliano Ferrari, Montaigne. Une anthropologie cia, dove è solo dagli anni Ottanta del Cinquecento che des passions, Paris, Classiques Garnier, 2014, pp. 341. ottiene un vasto successo che sarà però di lunga durata: in particolare, la prima delle cinque storie (in cui com- Cette approche philosophique et anthropologique pare la figura di Solimano II) ispirerà direttamente e des passions dans les Essais, envisagées au sens subjec- indirettamente numerosi autori, fino al pieno Seicento. tif (discours sur l’homme fait à partir des passions et Oltre agli indici e alla bibliografia, completano la par les passions) et objectif (discours sur les passions) a presente edizione tre appendici a cura di M.M. Fon- pour triple objectif d’offrir une interprétation générale taine (che raccolgono i riferimenti alle opere di Plutar- de la philosophie des passions chez Montaigne, d’en co, una nota sulle traduzioni del Leucippe e Clitofonte examiner les sources afin de saisir les effets de conti- di Achille Stazio e una tabella analitica dei componi- nuité ou de rupture et de situer l’auteur des Essais dans menti poetici inseriti nel Printemps), un ricco glossario l’histoire de la philosophie moderne à travers son in- e un repertorio di espressioni proverbiali, sentenze e fluence sur Descartes et Hobbes en particulier. locuzioni familiari. La première partie («La connaissance physiolo- [maurizio busca] gique») envisage l’approche physiologique des passions chez Montaigne en rupture avec la conception aristo- télicienne, scolastique et hylémorphique, selon laquelle «Bulletin de la Société internationale des amis de le corps n’est compréhensible qu’à travers l’âme. Dans Montaigne», Classiques Garnier, 2013, 1, n. 57, pp. 119. «L’Apologie de Raymond Sebond» (II, 12), Montaigne reprend ainsi, pour l’ébranler, le rapport de cause Le bulletin s’ouvre sur un préambule d’Olivier à effet que l’hylémorphisme psychologique établit Guerrier (pp. 11-12), sur un émouvant hommage entre les opérations de l’âme et les réactions du corps, d’André tournon à la regrettée Katherine Almquist s’inscrivant en cela en faux par rapport aux théories qui nous a prématurément quittés (En souvenir de Ka- de Galien et d’Aristote, pour s’inspirer de Corneille therine Almquist, pp. 13-14) et sur le compte rendu du Agrippa (chapitre 1: «Une chose publique imaginaire». conseil d’administration du 6 juin 2013 de la SIAM Critique de l’hylémorphisme psychologique, pp. 21-40). (pp. 17-19). Le corps, de fait, semble parfois réagir de lui-même, Thomas Berns (Puissances et faiblesses de l’opinion sans être mû par l’âme, en réponse directe à un stimu- commune chez Montaigne, pp. 23-38) s’intéresse à la lus extérieur, comme c’est le cas pour certains mou- notion d’opinion commune chez Montaigne pour en vements involontaires ou réflexes, et certains actes de dégager les tensions et les valeurs. Il montre ainsi sa langage (chapitre 2: Mouvements sans âme. Le corps et négativité, sa vanité (vanité de régler sa vie sur la re- ses ressorts, pp. 41-59). Cette démarche de Montaigne nommée et l’opinion commune), sa fausseté (son illu- peut en cela être rapprochée de la doctrine physiolo- soire vérité), mais également la positivité et la simpli- gique mécaniste de Descartes, qui comprend toutes les cité des intuitions, la paradoxale utilité de l’illusion fonctions du corps (végétative, sensitive, motrice) sans que constitue l’opinion commune, ainsi que son rôle référence aux pouvoirs de l’âme (chapitre 3: Pour une pour l’histoire, la justice et la politique. Bérengère Bas- généalogie moderne de l’involontaire. Remarques sur set (Apophtegme et ‘ordre du discours’ dans les Essais Montaigne et Descartes, pp. 61-70). Pour autant, Mon- de Montaigne. L’apophtegme entre pertinence et contin- taigne ne remet pas en cause la théorie des humeurs, gence, pp. 39-68) rappelle que l’apophtegme résulte de qu’il connaît, mais élargit le champ de la notion de la rencontre fortuite entre une situation et un propos complexion (chapitre 4: Affectivité organique et «pas- approprié. Sa «fossilisation» en «mot doré» tente de sions corporelles». Complexions, humeurs, inclinations, l’arracher au hasard, là où Montaigne cherche à l’in- pp. 71-90). À travers une interrogation du rôle des sens verse à rétablir sa contingence initiale par le réemploi dans la génération des passions, Montaigne considère qu’il en fait et sa réappropriation / «à-propriation» la sensibilité corporelle dans ses effets sur l’affectivité (entendue au sens d’une réappropriation de la parole humaine dépassant ainsi la lecture de Sextus Empiri- d’autrui qui doit rester appropriée à la situation nou- cus pour s’appuyer sur des sources plus larges (cha- velle pour laquelle elle est mobilisée). Alain Legros pitre 5: «Des impressions violentes à nous troubler». (Montaigne aux points, pp. 69-79) et André Tournon L’émotion des sens, pp. 91-111). («… au premier que je rencontre». Remarques prélimi- La deuxième partie («La connaissance psycholo- naires sur le double texte de l’édition de référence (Bom- gique») montre comment la critique de l’hylémor- piani, Milan 2012)», pp. 81-99) s’intéressent à la ponc- phisme mène à l’abandon de la théorie architecto- tuation – ou plutôt à l’absence de ponctuation dans la nique tripartite de l’âme (végétative, sensitive, intel- pratique manuscrite de Montaigne qui préfère l’usage lective) pour aboutir à une nouvelle appréhension de de la majuscule à celui du point comme signe de seg- l’intériorité, en décomposant les phénomènes affec- mentation. Le volume se termine d’une part sur une tifs dans les différents mouvements psychiques qui note d’André Gallet (La “Mesnagerie” de 1600. Un le sous-tendent (jugement, imagination, souvenirs). réemploi de 1570-1572, pp. 101-103) qui revient, après La critique de l’hylémorphisme sous-tend de fait une le docteur J.-F. Payen et L. Feugère, sur l’édition de la nouvelle approche de la réalité psychique, débarras- Mesnagerie de Xénophon chez Claude Morel en 1600 sée des présupposés métaphysiques de la pensée ra- pour évaluer la part de réimpression en la comparant tionnelle aristotélicienne; libérée des fonctions orga- aux deux leçons antérieures de 1571 et 1572 et en four- niques que lui attribue la tradition philosophique et nir la collation; d’autre part sur une présentation, par médicale, l’âme peut alors être pensée comme une Edward Tilson (Prémices chatoyantes. Mireille Habert expérience de la conscience et un moyen de connais- déchiffre la traduction par Montaigne des «sainctes ima- sance empirique de vécus internes (chapitre 1: Em- ginations» sebondiennes, pp. 105-119), de l’étude de pirisme et introspection. Une psychologie morale et Mireille Habert, Montaigne traducteur de la “Théolo- performative, pp. 115-134). Ainsi que l’a montré gie naturelle” (Paris, Classiques Garnier, 2010) dont il Ernst Cassirer, l’histoire, chez Montaigne, est alors dégage tout l’intérêt. au service d’une connaissance de l’homme à travers [sabine lardon] une approche psycho-historique (chapitre 2: La fonc-

sf177.indb 582 19/12/15 01.04 Cinquecento 583

tion psychologique de l’histoire. «Anatomie de la phi- Seminari di storia della lettura e della ricezione, tra losophie», pp. 135-152). En cela, la conception, chez Italia e Francia, nel Cinquecento, vol. 3, a cura di Anna Hobbes, de la connaissance de soi (comme on peut Bettoni, Padova, CLEUP, 2014, pp. 136. la voir, entre autres dans l’introduction au Léviathan) pourrait être l’héritage de la méthode d’introspec- Il terzo volume dei Seminari di storia della lettura tion directe telle que la pratique Montaigne, dont e della ricezione, tra Italia e Francia, nel Cinquecento, les Essais ont été traduits en anglais dès 1603 (cha- che da diversi anni si svolgono all’Università di Pa- pitre 3: De la connaissance de soi à la connaissance de dova, sotto la direzione di Anna Bettoni, prosegue il l’homme. Hobbes, Montaigne et le «nosce te ipsum», percorso, già avviato nelle precedenti pubblicazioni, pp. 153-174). Et si les Passions de l’âme de Descartes di analisi della circolazione dei libri e della cultura marquent une rupture par rapport à l’approche ap- nell’Europa del Cinquecento. Filo conduttore, nel- pétitive des passions, les Essais représentent déjà une lo specifico, di questo volume, costituito da quattro évolution par rapport au modèle scolastique, en dis- contributi, è la concretezza e la materialità, intese tinguant les passions corporelles (dont la cause est sia dal punto di vista della pura corporeità, sia come externe à l’âme) et les passions de l’âme (chapitre esperienze di vita reale riflesse nel discorso lettera- 4: «Les passions qui sont toutes en l’ame». Contours rio: «la littérature n’a jamais été un espace autono- d’une typologie, pp. 175-184). Parmi les passions, la me, séparé du vivant et du matériel, coupé de la chair gloire constitue un cas particulier par sa complexité et des soubresauts. Aujourd’hui comme à la Renais- (en se composant de plusieurs passions: jalousie, dé- sance, elle se nourrit du réel, s’en imprègne pour le sir, espérance…), que Montaigne appréhende à tra- comprendre, le questionner, le repenser, parfois le vers sa dimension subjective et socio-culturelle (cha- transcender» (p. 51). pitre 5: Entre volupté, espérance et désir. La gloire Si parte da Rabelais, con l’intervento di Nadine comme passion complexe, pp. 185-197). Kuperty-Tsur (Genre, sexe et construction du savoir La troisième est dernière partie («La philosophie dans le chapitre XV de Pantagruel, pp. 29-50), che of- morale») montre comment la philosophie morale des fre un’interpretazione originale su un capitolo tra i Essais naturalise les passions sans les condamner. L’ap- più complessi dell’opera rabelaisiana, capitolo che, a proche physiologique et psychologique de la nature livello di struttura superficiale, appare incoerente, ma humaine chez Montaigne fait que l’être est saisi comme che, in realtà è ricco di rimandi e di riferimenti inter- sujet, en proie perpétuel aux passions qui peuvent ni. La struttura quadripartita, che parte da un dialogo naître du corps comme de l’âme. Or Montaigne s’op- tra Pantagruel e Panurge, prosegue con un conte ani- pose aux stoïciens, dans la mesure où il considère que malier e con una farce e si chiude con una riscrittura les passions nées du corps, indépendamment du juge- di una favola di Esopo, viene ricondotta a un’unica ment, rejaillissent sur ce dernier dans un second temps, matrice, analizzando gli elementi comuni e identifi- sans pouvoir être contrées (chapitre 1: La valeur vitale cando le analogie che legano i vari generi letterari che et conservatoire des passions. L’oikeiosis selon Mon- costituiscono il XV capitolo. Le murailles di Parigi, taigne, pp. 201-218). Les chapitres I.14, I.20 et I.39 che, a detta dei protagonisti, dovrebbero essere costi- minent ainsi les présupposés philosophiques et an- tuite dai sessi femminili, trovano una corrispondenza thropologiques du stoïcisme sur la douleur et la mort nel racconto del leone e della volpe, che scambiano (chapitre 2: Apathie et thanatophilie. De la meditatio l’organo genitale femminile con una ferita e tentano mortis à l’amour de la vie, pp. 219-235). Dès lors que di curarla. Allo stesso modo, l’aneddoto che chiude l’apathie (impassibilité stoïque) n’est pas envisageable, il capitolo, in cui un padre discute sulla verginità del- Montaigne pointe le caractère problématique et irréali- le sue due piccole figlie, riprende, estremizzandolo, sable de la tranquillité, la raison comme le corps étant il tema della sessualità femminile. Lungi dall’essere en proie à une agitation constante, et rejoint en cela la un giudizio misogino, l’intero capitolo è interpretato pensée de Leibniz comme de Locke (chapitre 3: La vie in questo saggio come una riflessione sul ruolo della inquiète. Mouvements imperceptibles, désir, imagina- donna e sul rapporto che l’uomo ha nei confronti dei tion, pp. 237-256). La raison peut dès lors rationaliser due sessi. et organiser les passions multiples qui agitent l’esprit Il contributo di Loris Petris (Entre poésie et «re- humain en utilisant à cette fin les passions elles-mêmes, alia»: Joachim Du Bellay, lecteur de Jean Du Bellay, comme la peur qui peut jouer un rôle de modérateur pp. 51-84) ha la finalità di confrontare le opere di Jo- (chapitre 4: Inefficacité de la raison et passions compen- achim du Bellay con quelle del suo mentore, Jean du satrices: III, 4, «De la diversion», pp. 257-275). Bien Bellay (soprattuto per ciò che concerne l’epistolario, que le corps réagisse de lui-même et agisse sur l’âme, ormai interamente edito), per rilevarne il contesto l’âme peut néanmoins tenter d’intervenir en retour sur storico e i realia che sottostanno alle due opere. Ven- le corps par le biais de l’accoutumance qui résulte d’un gono forniti numerosi esempi di come l’esperienza di travail sur soi constant, d’exercices réflexifs et d’une vita del cardinale Jean influenzi le opere di Joachim, véritable discipline de vie (chapitre 5: «Jugement re- risultando una vera e propria fonte di ispirazione. glé» et «fierté genereuse». Le bon usage des passions et Sono considerati, in questo intervento, alcuni degli la sagesse, pp. 277-304). Une bibliographie et un index elementi e degli eventi più importanti della vita del nominum complètent cet ouvrage, dans lequel nous cardinale, che Joachim riprende e sviluppa dal punto pourrons juste regretter que la prise en considéra- di vista letterario e poetico. In primo luogo, l’oppo- tion de la dimension diachronique du texte reste trop sizione tra vocazione poetica e obblighi professionali ponctuelle, mais qui apporte une contribution philo- (opposizione tra otium e negotium, peraltro, di matri- sophique aussi précieuse qu’indispensable aux études ce oraziana), che è ampiamente discussa nei testi di montaigniennes. Jean. Inoltre, viene descritta la biblioteca personale di Jean Du Bellay, che costituiva una miniera di testi [sabine lardon] e di informazioni alle quali Joachim poteva accedere: purtroppo non ne possediamo un inventario comple- to, ma una parte di questi testi è stata ricostruita a partire dagli ex libris. Ampio spazio in questo con-

sf177.indb 583 19/12/15 01.04 584 Rassegna bibliografica

tributo è dato al fatto cruciale nella vita del cardinale variationes del testo, si ipotizza che vi furono svaria- Du Bellay: la permanenza, a partire dal 1555, a Roma, te edizioni pirata derivate dalla trascrizione di una vissuta come un vero e proprio esilio. Questa tematica rappresentazione teatrale di successo. Vengono poi (anch’essa di matrice classica, con la figura dominan- evidenziati i debiti della pièce nei confronti di altri te di Ovidio) diventa topos anche nelle opere di Joa- testi francesi e italiani: la di Robert Gar- chim, soprattutto per quanto concerne i rapporti tra nier (1582), una delle prime tragicommedie francesi, necessità finanziarie e mélancolie. Infine, è persistente La Mort de Rodomont di Philippe Desportes (1572) nei testi di entrambi gli eruditi il tema delle ruines e e la di Pietro Aretino. Di queste opere ven- delle antiquités, che diventano vero e proprio simbolo gono forniti numerosi esempi di intertestualità. Infi- di quella concretezza che, a livello letterario, si con- ne, viene analizzata la struttura della Rodomontade, figura come immagine del mondo interiore. È pro- mettendo in luce una caratteristica interessantissima prio questo legame, fra letteratura e realia, che crea e peculiare: per ogni atto viene, infatti, applicato un un movimento testo-contesto, tale da permettere di sottogenere: nel primo atto la tragicommedia, nel se- vedere sotto una luce nuova molti riferimenti testuali, condo la tragedia, nel terzo e nel quarto la comme- che senza questa chiave di lettura, resterebbero in- dia burlesca, e ancora la tragedia nel quinto atto. Si comprensibili. può dire dunque che «la pièce restituisca una visione Claude Expilly e il suo rapporto con il milieu cul- arcimboldesca di una materia letteraria, quella ario- turale italiano sono invece oggetto di studio del lavoro stesca, probabilmente già ben conosciuta al pubblico di Alessandra Preda (Scrivere tra i versi altrui: la lezio- dell’epoca» (p. 115). ne italiana nell’opera di Claude Expilly, pp. 85-102), Nel complesso, il presente volume offre un percor- che ripercorre il viaggio in Italia (Torino, Padova e Ve- so coerente e brillante sul rapporto tra testo e mate- nezia) con il quale l’umanista completa il suo iter di rialità, collegando tra loro i singoli contribuiti, grazie giureconsulto. Soprattutto i suoi contatti con i salotti al fil rouge dei rapporti di intertestualità e di imitatio, eruditi padovani saranno fondamentali per la genesi in un periodo in cui il testo è vivo e si arricchisce con- delle sue opere, in particolare per i suoi canzonieri. tinuamente di nuovi elementi, a volte anche indipen- Modello importantissimo è, senza dubbio, Sperone dentemente dall’autore stesso che l’ha creato. Speroni, che introduce Expilly nella prestigiosissima biblioteca di Gian Vincenzo Pinelli. Anche il mercato [filippo fassina] librario veneziano offre all’erudito francese una quan- tità enorme di testi che andranno a comporre la sua corposa biblioteca. Proprio a Venezia si avvicina al Aa. Vv., French Renaissance and Baroque Drama. modello di Petrarca e dei petrarchisti italiani, di cui Text, Performance, Theory, edited by Michael Me- acquista i testi, e li commenta attraverso una serie di ere, Newark, University of Delaware Press, 2015, note autografe interessantissime per lo studioso mo- pp. xxxi-336. derno. Tutto questo materiale confluirà, infatti, nell’e- dizione dei 1596 dei Poëmes, che è una rielaborazio- I quindici contributi qui raccolti coprono un arco ne delle tematiche petrarchesche, contaminate anche temporale che va dall’ultimo Quattrocento ai primi da un altro modello, Tasso, emulato soprattutto per le decenni del Seicento, e contemplano una grande va- sue raffinatezze stilistiche. Altro modello fondamen- rietà di forme drammatiche (misteri, tragedie, farse, tale per Expilly sono gli Essais di Montaigne, nei qua- commedie, balletti di corte, pastorali, ma anche entrées li egli ritrova l’ideale di intellettuale saggio e stoico, royales) oltre a testi para- e metateatrali. Il volume, di in grado di resistere alla temperie dell’epoca. Con la grande interesse, intende richiamare l’attenzione sulla maturità, tuttavia, è ancora il modello di Petrarca che vivacità e la complessità del teatro dell’epoca, messe influenza la poetica di Expilly: questa volta non più il a lungo in ombra da una critica che ha privilegiato lo Petrarca sentimentale della lirica amorosa, ma l’uomo studio dei generi ereditati dall’antichità a discapito di delle meditazioni filosofiche sui temi dell’errore, della forme teatrali considerate minori. Alla chiarissima in- morte e dell’eterno, più attinenti alla consapevolezza troduzione di Michael Meere (pp. xv-xxxi), che defini- esistenziale della vecchiaia. sce le linee metodologiche adottate nella composizione Il rapporto fra letteratura francese e letteratura del volume e nei singoli contributi, seguono i capitoli italiana è centrale anche nell’ultimo contributo di qui elencati. questo volume, quello di Laura Rescia (Metamorfosi Andreea Marculescu, Mystery Plays Reloaded: di un eroe cavalleresco: sulle scene fran- Performing Demonic Possessions in the “Histoires vé- cesi di primo Seicento, pp. 103-118). Viene, infatti, ritables”, pp. 1-19; John D. Lyons, “Abraham sacrifi- preso in esame un testo del 1605, la Rodomontade di ant” and the End of Ethics, pp. 21-37; Caroline Gates, Charles Bauter, che narra, sotto forma di tragicom- Michael Meere, Farce, Community, and the Perfor- media, la discesa agli inferi di Rodomonte, personag- mativity of Violence in Rabelais’s “Quart Livre”. The gio dell’Orlando Furioso, abbandonato al suo destino Chiquanous Episode, pp. 39-61; Sara Beam, Calvin- di morte da Ariosto. La fortuna ariostesca in Francia ist “Comedie” and Conversion during the French Ref- tra la fine del Cinquecento e l’inizio del Seicento è ormation. “La comedie du Pape malade” (1561) and manifesta, anche se l’utilizzo di un genere letterario “La comedie du monde malade et mal pensé” (1568), come quello sperimentato da Bauter è, senza dub- pp. 63-82; Corinne Noirot, French Humanist Comedy bio, meno frequente. In questo studio viene in primo in Search of an Audience. The case of Jean de La Taille, luogo dimostrato che la Rodomontade ebbe una larga pp. 83-100; Ellen R. Welch, Rethinking the Politics of diffusione e fu quasi sicuramente rappresentata. Dal Court Spectacle. Performance and Diplomacy under the punto di vista intertestuale, viene citato Charles So- Valois, pp. 100-116; Antónia Szabari, Our Future Bar- rel, che nella sua raccolta di novelle La Maison des barism. Sacrifice, the Body, and Performance in Robert jeux (1657) parla proprio della rappresentazione sce- Garnier’s Greek Tragedies, pp. 117-138; Phillip John nica di una discesa agli inferi di Rodomonte abbinata Usher, Courtroom Drama during the Wars of Religion, a una forma espressiva irregolare; inoltre, attraverso pp. 139-152; Fabien Cavaillé, From the Politics of Per- una minuziosa analisi bibliologica e filologica delle formance to the Anthropology of Festivals. Montaigne’s

sf177.indb 584 19/12/15 01.04 Seicento 585

“Of the Education of Children” (I. 26) and “Of Coach- terni ed esterni che hanno decretato il modesto suc- es” (III. 6), pp. 153-165; Elizabeth Guild, Too late? cesso del genere. Welch prende in esame un genere The Drama of the Cannibals in Rouen, pp. 167-186; che fiorisce sotto la reggenza di Caterina de’ Medici, Christian Biet, Red and Black, Pink and Green. Jacques il balletto di corte, rilevandone in particolare la plu- de Fonteny’s Gay Pastoral Play, pp. 187-211; Sybile ralità dei livelli di lettura e la funzione svolta in oc- Chevallier-Micki, Stage Designs of Cruelty. Theater in casione delle grandi visite diplomatiche. I contributi Rouen at the Turn of the Seventeenth Century, pp. 213- di Szabari e Usher guardano entrambi alle tragedie 231; Alison Calhoun, The Court Turned Inside Out. di Garnier ma da angoli diversi: se nel primo viene The Collapse of Dignity in Louis XIII’s Burlesque Bal- considerata la dimensione del corpo e la teatralità del lets, pp. 233-246; Stephanie O’Hara, Poison in French sacrificio nellepièces di argomento greco, nel secon- Tragedy and Tragic Stories, 1600-1636, pp. 247-265; do vengono studiati il Marc Antoine e l’Antigone nei Richard Hillman, Et in Arcadia Alter Egos. Playing loro legami con il milieu del parlamento e con la di- Politics with Pastoral in Two French Baroque Dramas, mensione del dibattito pubblico. I capitoli a cura di pp. 267-293. Cavaillé e Guild, dedicati gli Essais di Montaigne, Data la diversità degli argomenti sviluppati e de- si concentrano rispettivamente sulla considerazione gli approcci metodologici adottati, in questa sede è di Montaigne per i jeux in quanto eventi utili alla co- possibile fornire solamente una brevissima sintesi dei munità (questione peraltro discussa da altri intellet- contributi, che non potrà rendere giustizia alla ric- tuali dell’epoca, da La Boétie a Boterò a Bodin), e chezza degli stessi. Marculescu mostra in che mo- sull’episodio dell’incontro con i Cannibali a Rouen do la rappresentazione della figura dell’indemoniato nel 1562 nel quadro di una performance politica. L’ar- nei misteri tardo-medievali crei un repertorio di im- ticolo di Biet è la traduzione di uno studio già appar- magini, gesti e parole che per tutto il Cinquecento so nel 2006 dedicato a Le beau pasteur di Fonteny, di andrà ad informare la narrazione di episodi di pos- cui viene messo in valore l’aspetto di sperimentazio- sessione (cosa che accade, ad esempio, nel Miracle ne e ricerca sulle potenzialità del dramma pastorale. de Laon di Jean Boulaese, 1566). Lyons rileva come Chevallier-Micki, rilevando la presenza di disposi- nella scena dell’Abraham sacrifiant in cui, alla pre- zioni scenografiche ricorrenti nelle pièces rouennesi senza di Satana travestito da monaco, il protagoni- del primo Seicento, ipotizza l’esistenza di strutture sta si interroga sull’ordine divino, venga denunciata di scena che venivano riutilizzate nelle diverse rap- la natura «diabolica» del giudizio umano in materia presentazioni, strutture la cui disponibilità avrebbe di morale, in una prospettiva influenzata dalla più influenzato la scrittura delle pièces stesse. Calhoun rigida dottrina protestante. Gates e Meere, in uno si occupa di un balletto burlesco del 1628 (Le Ballet studio di taglio antropologico, guardano all’episo- du grand bal de la douairière de Billebahaut) che inve- dio rabelaisiano dei Chiquanous mettendo in luce ce di magnificare i fasti della corte e la persona reale, il ruolo ambiguo della farsa, del jeu e della violen- mostra il re e i suoi dignitari ridiscendere i gradini za performativa nella costruzione di una comunità: della scala sociale. O’Hara si interessa agli episodi di se da un lato possono contribuire al rafforzamento avvelenamento nelle tragedie dei primi decenni del dei legami sociali, dall’altro possono denunciare (o Seicento sottolineando l’esistenza di forte legame fra alimentare) delle fratture in seno alla comunità stes- il motivo del veleno, il tema amoroso e le figure fem- sa. Beam, riconoscendo il peso della partecipazione minili; istituisce in un secondo momento una compa- a eventi collettivi nella definizione dell’identità del razione fra le tragedie prese in esame e alcuni canard singolo e della comunità, si interessa al ruolo delle coevi. L’ultimo contributo, di Hillman, è dedicato rappresentazioni teatrali (farse, commedie, moralità) alla tragedia Pandoste di Puget de La Serre e alla tra- nella diffusione delle idee della Riforma in Francia gicommedia La cour bergère di Mareschal, traduzioni ma soprattutto nella Ginevra di Calvino. Noirot si di pastorali inglesi composte in anni di tensioni poli- interroga sullo scarso successo della commedia uma- tiche che paiono riflettersi nelle pièces stesse. nista, scegliendo come caso-studio le commedie di Jean de La Taille e mettendo il luce gli ostacoli in- [maurizio busca]

Seicento a cura di Monica Pavesio e Laura Rescia

Projet Les Idées du Théâtre, http://www.idt.paris- Il a pour objectif de mettre en évidence la construc- sorbonne.fr/ tion et la circulation des «idées du théâtre» en Europe (France, Italie, Espagne), de la Renaissance à l’âge clas- Le projet Les Idées du Théâtre, conçu et dirigé par sique, à partir d’une analyse des textes liminaires (pré- Marc Vuillermoz, regroupe plus d’une centaine de faces, dédicaces, prologues, etc.) placés en tête de pu- chercheurs, français et étrangers. Financé par l’ANR blication des pièces françaises, italiennes et espagnoles e e (2011-2016), il repose sur le partenariat conclu entre le des xvi et xvii siècles. LLSETI de l’Université de Savoie-Mont Blanc (Cham- L’entreprise comprend diverses réalisations. La pre- béry, laboratoire leader), l’ILCEA de Grenoble, le CE- mière consiste en une édition scientifique annotée de LEC de Saint-Etienne, le CELLF de Paris IV, et les quelque neuf cents textes liminaires sur le site «Les deux grandes institutions que sont la Bibliothèque Na- Idées du théâtre» (http://www.idt.paris-sorbonne. tionale de France et la Biblioteca Nacional de España. fr/); elle s’est d’emblée accompagnée d’un numéro

sf177.indb 585 19/12/15 01.04 586 Rassegna bibliografica

spécial de la revue «Littératures classiques», Préface Le site IdT dispose de deux moteurs de recherche. et critique. Le paratexte théâtral en France, en Italie et Le premier, accessible via la fonction «Rechercher» e e en Espagne (xvi et xvii siècles) (n. 83, 2014). De cette proposée en haut à gauche de l’écran, permet une re- édition numérique émanera une anthologie, intitulée cherche par mot sur l’ensemble des pages du site. Le Les Idées du théâtre et publiée aux éditions Droz. Le second ouvre une «Recherche avancée», à l’intérieur Théâtre au miroir des langues, dictionnaire trilingue du corpus de paratextes édités, selon diverses modali- raisonné des termes théâtraux, également confié aux tés qui s’enrichissent mutuellement et permettent d’af- éditions Droz, s’attachera enfin à confronter les ré- finer la requête. flexions et les pratiques théâtrales françaises, italiennes Une base de données de ce type, éclairée par cet ap- et espagnoles. pareil critique conséquent et exploitable dans sa forme Le projet IdT a par ailleurs donné lieu à deux col- électronique au moyen d’outils spécifiques, constitue loques internationaux. Le premier, organisé par le pour l’ensemble de la communauté scientifique un ou- CELEC en novembre 2013 à Saint-Etienne, s’inté- til de travail d’une richesse inestimable. De fait, le site ressait aux liens ambivalents que le paratexte théâ- IdT rassemble en un corpus unique plusieurs centaines tral entretient avec l’Auctoritas («Le Paratexte théâ- de textes, essentiels à la connaissance du théâtre euro- e e e tral (xvi-xvii ) face à l’Auctoritas: entre soumission et péen des xvi et xvii siècles, mais que leur dispersion subversion. Regards croisés en France, en Espagne et avait jusqu’ici soustraits à l’attention de la critique. en Italie»). Le second s’est tenu à Chambéry et à Gre- Tous se répondent en un réseau de correspondances noble en juillet 2015, et a été centré sur «Les Mots et thématiques et conceptuelles, nées du dialogue fruc- les choses du théâtre», pour confronter les pratiques et tueux et constant que les praticiens italiens, français les lexiques théâtraux des trois domaines nationaux. et espagnols du théâtre entretiennent entre eux, moins Le site Les Idées du théâtre est hébergé sur la dans de gros traités théoriques que dans les innom- plate-forme du Corpus Électronique de la Première brables «préfaces» où ils débattent de la question des Modernité de l’Université Paris-Sorbonne, qui re- règles (de leur pertinence et de leur adéquation aux groupait jusqu’à présent trois projets éditoriaux – Le attentes du public), des vertus du théâtre, ou du tra- Règne d’Astrée (dir. Delphine Denis), Artamène ou vail sur les sources – question rendue cruciale par le le Grand Cyrus de Madeleine et Georges de Scudéry fait que les dramaturges des trois pays ne cessent de (dir. Claude Bourqui), et MOLIERE21 (dir. Georges réadapter les mêmes sujets. Forestier et Claude Bourqui) – conçus et élaborés se- C’est cette dimension internationale qui caractérise lon des modalités communes: mise en ligne au format le projet IdT. Longtemps cloisonnées dans les limites TEI/XML, coordination à une édition papier, moteur étroites du patrimoine national, les études théâtrales de recherche Philologic, équipement spécifique adap- ont pris ces dernières décennies une orientation com- té aux textes. L’ensemble des programmes du CEPM paratiste qui a permis de mettre en évidence certains partagent ainsi le principe d’une édition collaborative, aspects des échanges entre les trois pays, concernant mise en ligne mais conservant pour une part le support par exemple la fortune des dramaturges hors de leur du papier, un protocole d’encodage et des outils trans- pays d’origine, les récritures, adaptations et «traduc- versaux de documentation et de recherche. tions» des pièces, les interactions entre les genres théâ- Les principes éditoriaux ont été institués en vue traux, etc. Beaucoup plus récemment, cette ouverture de permettre l’utilisation du site aux chercheurs qui vers le théâtre étranger s’est encore élargie, donnant ne maîtrisent qu’une seule des trois langues du pro- naissance à quelques grands travaux dévolus au théâtre jet. Chaque texte fait l’objet d’une notice constituée européen. C’est dans cette perspective que s’inscrit le de quatre rubriques: Description, Mots-clefs, Présen- programme IdT, pour proposer aux chercheurs un ou- tation, Texte. Le tableau Description rassemble les élé- til d’exploration systématique de la réflexion sur l’art ments bibliographiques du texte présenté: son auteur, dramatique menée en France, en Italie et en Espagne l’auteur de la pièce concernée (qui ne signe pas tou- durant l’«âge d’or» du théâtre européen. jours les liminaires qui en accompagnent la publica- Par leur variété formelle, par la diversité des ques- tion), les titres du texte et de la pièce, le genre du texte tions dont ils débattent, les textes édités intéresseront liminaire (préface, dédicace, prologue, etc.) et celui de tout autant l’histoire littéraire, les études théâtrales la pièce, la date de la première édition et la langue du (dramaturgie, scénographie, histoire des théâtres, etc.), texte, l’édition prise en compte pour le travail (édition le champ rhétorique (avec le vaste corpus de discours originale dans la majorité des cas), le nombre de pages encomiastique des dédicaces), le domaine linguistique que comporte le texte dans cette édition, et l’URL de et lexicologique, et l’histoire du livre. sa reproduction numérique. Vient ensuite une série de Mots-clefs, donnés dans les trois langues, destinés à [sandrine blondet] rendre compte des notions dramatiques abordées par le texte édité et, surtout, du contenu de la réflexion qu’il propose à leur sujet. Ces deux tableaux sont sui- Enrica Zanin, Fins tragiques. Poétique et éthique du vis d’une Présentation qui rassemble, en un court texte dénouement dans la tragédie de la première modernité donné en français et, le cas échéant, dans la langue de (Italie, France, Espagne, Allemagne), Genève, Droz, la pièce, les informations contextuelles indispensables 2014, pp. 471. à la compréhension du texte, et met en évidence son intérêt, les «idées du théâtre» qu’il véhicule. Le Texte, Basato su una tesi di dottorato in letterature compa- enfin, est présenté dans sa langue d’origine, et bénéfi- rate diretta da François Lecercle, questo saggio affronta cie d’un apparat critique destiné à signaler et à éclai- un ampio discorso critico sulla tragedia della prima mo- rer tout autant les références historiques, littéraires, dernità nei tre paesi della Controriforma (la Germania scénographiques, etc., que les difficultés linguistiques. viene evocata soltanto sporadicamente, e soltanto come Les textes français bénéficient de surcroît de liens hy- controprova di un modello esemplare per i paesi prote- pertexte associant, page à page, l’édition IdT et le fac- stanti). Perché la tragedia moderna sia inestricabilmente similé de l’édition originale. Le lecteur a ainsi accès à legata a un epilogo tragico è la domanda d’avvio della tout moment à la matérialité du texte original. ricerca, per rispondere alla quale l’A. si deve confronta-

sf177.indb 586 19/12/15 01.04 Seicento 587

re con numerose altre questioni: il rapporto tra tragedia quelle edificanti; viene poi preso in esame il caso limi- e tragico, il problema della definizione della tragedia in te delle tragedie di martiri, che conducono il pubblico Spagna, cosa significhi un esito funesto – la fin malheu- dal pathos all’ammirazione per una “pédagogie de la reuse – e in cosa consista il dénouement. Dotata di solide conversion”. La terza parte, Renversement de fortune, letture, in particolare nell’area culturale francese e italia- amplia il focus critico spostando l’attenzione sul con- na, e di un’agilità critica degna di nota, l’A. intraprende cetto di azione, a partire dalla distinzione tra azione coraggiosamente il suo discorso, articolandolo in quat- semplice e complessa della tragedia, teorizzata ma poi tro distinte parti: Prolegomènes, Catastrophe, Renver- oltrepassata dalla pratica drammaturgica che compli- sement de fortune, Dénouement, dimostrando che per cherà le possibilità dell’intrigo, grazie a riconoscimenti affrontare il problema della fine della tragedia – e per parziali e rovesciamenti non riusciti. Le due tipologie tentarne un affresco di respiro europeo – occorre pas- di azione implicheranno comunque due scioglimenti sare attraverso un certo numero di tappe preliminari, differenti: l’intrigo semplice procede grazie a procedi- che occupano buona parte del suo saggio. Il periodo menti di suspense, preparando e ritardando l’epilogo, preso in esame copre poco più di un secolo, tra il 1550 mentre quello complesso cercherà la sorpresa, grazie a e il 1650; e le tre tradizioni drammaturgiche vengono una rivelazione o azione di rovesciamento. Seguendo le affrontate sia negli aspetti teorici che nelle realizzazio- logiche della causalità e della verosimiglianza, l’A. ana- ni drammatiche, escludendo soltanto i problemi della lizza una vasta casistica, operando le debite distinzioni rappresentazione scenica. La lettura incrociata di testi tra le tre aree culturali. Nella quarta ed ultima parte, teorici, dall’Antichità al 1650, di un corpus di circa 500 Dénouement, l’A. propone un modello formale dello pièces, e di importanti apporti critici contemporanei, co- scioglimento tragico, che vede articolato in due mo- stituisce la base di un lavoro la cui bibliografia finale, menti: in un primo tempo l’eroe agisce e/o commette di una cinquantina di pagine, rende conto di una vasta uno sbaglio; in un secondo momento, riconosce l’erro- e pluridisciplinare erudizione. Diamo conto di seguito re e/o cade in disgrazia. Questa sequenza di attività/ solo delle linee principali delle diverse sezioni in cui si passività, e la catena di azioni che ne derivano, permet- articola il saggio. terebbe di rendere conto della struttura della tragedia Nella prima parte, Prolegomènes, si affrontano i della prima modernità, attraverso tutta una casisti- problemi metodologici che un obiettivo di studio di ca – che viene presa in esame – di possibilità narrative. tale portata implica, articolandoli su tre capitoli, de- Rileggendo i casi esemplari di Didone e Edipo, e il loro dicati rispettivamente alla definizione del genere della trattamento dall’Antichità alla prima modernità, l’A. tragedia, al concetto di epilogo, e al rapporto tra eti- evidenza come il problema della giustizia e della giusta ca e poetica. Necessariamente instabile e vago sarà il punizione sia divenuto particolarmente problematico primo tentativo di delimitazione: saranno considerate nel periodo considerato; lo spettatore è chiamato ad tragedie tutti quei testi che gli autori indicano come ta- una interpretazione che, per quanto orientata, non im- li, o che gli editori sottotitolano in tal modo; o ancora pone mai soluzioni. È proprio in questa irresolutezza che il pubblico ritenga tali; o ancora che riprendono che la tragedia della prima modernità troverebbe l’es- «implicitement ou explicitement des éléments formels senza della sua poetica: opera aperta, e particolarmen- ou thématiques des tragédies anciennes ou modernes» te tormentata, essa si offre come sfida interpretativa, (p. 27). Nel corpus francese e italiano rientrano dun- che dalla sua propria crisi trae il suo significato. que alcune tragicommedie; mentre il problema dell’e- Come appare evidente, la sfida della delimitazione sistenza di una “tragedia spagnola” viene risolto con dell’oggetto d’indagine non può dirsi riuscita; ma tra l’affermazione che essa sia più di tipo “modale” (con i molti meriti del discorso critico dell’A. vi è quello di riferimento dunque al tono e al contenuto) che forma- non orientare mai l’analisi delle strutture drammatur- le. Questa prima parte si conclude con una rapida ana- giche in senso puramente tecnico, prendendo debita- lisi delle Tragödien di lingua tedesca. È con la seconda mente in considerazione la loro evoluzione diacronica, parte, suddivisa in due capitoli, e titolata Catastrophe, e riconducendo le scelte strutturali all’ideologia sog- che si entra nel vivo della questione. Nel quarto capi- giacente: la nascita della tragedia moderna esprimereb- tolo l’A. avanza la sua ipotesi più interessante, ovvero be dunque la tensione di un’arte che, dovendo conci- che sia stata la tradizione medievale, e non solo quel- liare due istanze antitetiche, l’esemplarità e il pathos, la greca, o senecana, che pure viene presa in esame, a trova nel carattere ambiguo e nell’epilogo tragico una legare il genere della tragedia all’epilogo tragico: non soluzione all’incapacità di rappresentare gli eccessi solo dunque, come noto, la Poetica aristotelica viene del particolare e il principio dell’universale. Pur nelle mal compresa (e a lungo l’A. si sofferma sugli esiti del- loro diverse tradizioni, le tragedie europee della prima la confusione operata tra peripezia e rovesciamento), modernità sembrano voler conciliare l’inconciliabile, anche a causa dell’intermediazione dei trattatisti italia- mostrando la contraddizione tra «ce qui devrait être ni, ma l’influenza dei grammatici latini si sarebbe fatta et ce qui est, en relevant l’écart qui sépare la foi en la sentire in primis nella trattatistica spagnola e altresì in providence divine et l’évidence de l’échec, de l’injus- quella italiana e francese. Quando la fin malheureuse tice et du malheur». diviene indispensabile, la tragedia moderna deve af- [laura rescia] frontare il problema di rendere moralmente accettabi- le un discorso che necessita di amplificazione del pa- thos. In questo senso, il quinto capitolo analizza a fon- Christian Jouhaud, Richelieu et l’écriture du pou- do le possibilità che si offrono al drammaturgo (epilo- voir. Autour de la journée des Dupes, Paris, Gallimard, go o soggetto tragico, epilogo tragico ed eroe negativo, 2015, pp. 341. eroe negativo e lieto fine) soffermandosi in particolare sui casi delle tragedie di Giraldi in Italia e Corneille Molto è stato scritto sulla “Journée des Dupes”, ma in Francia; entrambi influenzati dall’estetica della tra- sempre nello stesso modo: un giorno Richelieu viene gicommedia: secondo l’A. il drammaturgo francese in allontanato dal potere, il giorno dopo trionfa sui suoi particolare inserirebbe sempre nelle sue tragedie una nemici e diventa l’uomo più potente di Francia. struttura duplice (coppie di eroi, duplice finale e/o du- Il libro di C. Jouhaud ricostruisce la crisi politica del plice azione) per bilanciare le esigenze patetiche con 1630-1631, “le grand orage” in cui Richelieu rischia di

sf177.indb 587 19/12/15 01.04 588 Rassegna bibliografica

perdere il potere e la vita, per illustrare come quello scelto Le Page come nuovo centro di lavoro (cosa che i che è stato a lungo descritto come uno scatto d’ira del- “tristaniani” non possono che apprezzare!). la Regina madre nei confronti del suo ex favorito Ri- Il volume è nell’insieme vario e interessante, sugge- chelieu, che viene allontanato dal potere, sia in realtà risce punti di vista diversi nell’approccio di un testo or- il sintomo di un conflitto politico di più lunga durata. mai ben noto, ma sempre un po’ misterioso (autobio- Non si limita a descrivere la vicenda, ma studia le fonti grafia? presenza comica? o melanconica? classe sociale di quell’avvenimento, ne descrive i protagonisti celebri del protagonista e dell’autore?). Molto bella la coper- e meno conosciuti, i vincitori e i vinti, scruta i luoghi, tina, tratta da un’edizione del Page, in cui un giovane scopre le passioni dissimulate e i non detti. Insomma, (Tristan stesso?) “legge” un libro; donde le Lectures del analizza la vicenda come un fenomeno inserito in un titolo stesso. periodo storico ben definito, chiamato barocco. Una [daniela dalla valle] vicenda nata e sviluppatasi in un momento contraddit- torio e complesso della storia della Francia, attraver- sato da dinamiche di polarizzazioni (dissimulazione/ Balthasar Baro, Théâtre Complet, tome I, Edition ostentazione, visibile/invisibile, segreto/pubblico, si- de P. Escudé, P. Pasquier, A. Teulade, N. Courtès, lenzio/enfasi retorica), impossibili da cogliere in un’a- Paris, Classiques Garnier, 2014, pp. 410. nalisi unificante. La “Journée des Dupes”, secondo Jouhaud, non Conosciuto oggi quasi unicamente dagli specialisti s’inserisce dunque, come vogliono gli storici, in quel del teatro francese secentesco, Balthasar Baro fu, nella clima di armonia e di perfezione detta “classica”; le sua epoca, un poeta stimato e un drammaturgo di suc- fonti scritte sulla vicenda sono contraddittorie e diso- cesso. Come la maggior parte degli autori suoi contem- mogenee, possono essere confrontate, ma non montate poranei, fu autore di molte pièces, ma solo dieci sono in un discorso univoco. Lo storico non può, dunque, arrivate fino ai giorni nostri. Il teatro completo di Ba- ergersi a direttore d’orchestra, con analisi e interpre- ro, diretto da B. Louvat-Molozay, riunisce queste die- tazioni armoniche degli scritti relativi alla vicenda, ma ci opere in tre volumi. Il primo, che qui recensiamo, deve, come in un’autopsia, sviscerare l’avvenimento, contiene tre pièces: Cléosandre (1624), opera ibrida, per esplorarne le ramificazioni, grazie all’analisi degli libretto di un divertimento galante messo in scena a scritti voluti dal potere politico o nati in opposizione Toulouse nello stesso anno, scritto in francese e in oc- ad esso. citano, ma anche narrazione dei quattro giorni della fe- sta del Carnevale; Saint Eustache martyr (1649) poema [monica pavesio] drammatico agiografico, Cariste (1651), tragicomme- dia atipica. Queste opere, molto diverse tra loro, sono Lectures de Tristan l’Hermite. Le Page disgracié, sous rappresentative dell’estetica di Baro e delle tendenze principali del teatro barocco dell’epoca. Come affer- la direction de Mathilde Bombart, Rennes, Presses uni- mano P. Pasquier e B. Louvat-Molozay nell’introduzio- versitaires de Rennes, 2013, pp. 252. ne generale, il drammaturgo si appropria degli stere- otipi appartenenti ai diversi generi, per creare opere In una collana che comprende una serie di Lectures convenzionali, ma nello stesso tempo molto originali, dedicate a grandi autori della letteratura francese, da che devono essere riscoperte. Ronsard a Marivaux, da Charles d’Orléans a Stendhal, Dopo l’introduzione di P. Pasquier e B. Louvat-Mo- il numero degli autori secenteschi interessati si arric- lozay, il volume contiene le tre pièces modernizzate e chisce ora con il volume diretto da Mathilde Bombart e annotate dai rispettivi curatori (P. Escudé per Cléosan- consacrato al romanzo di Tristan l’Hermite, che in que- dre; A. Teulade e P. Pasquier per Saint Eustache martyr; sti ultimi ani ha ottenuto un notevole successo, grazie N. Courtès, per Cariste), precedute da ampie introdu- al suo inserimento nei testi dell’agrégation. zioni, una bibliografia e un indice dei nomi. I due volu- Si tratta di sedici articoli (segnaliamo almeno il no- mi, previsti per il 2015 e il 2016, conterranno rispetti- me di tutti gli autori, visto che non potremo soffermar- vamente Célinde, Clorise e Parthénie e Le Prince fugitif, ci su ogni contributo: Claire Chatelain, Olivier Roux, Clarimonde, Rosemonde e L’Amante vindicative. Peter Shoemaker, Véronique Adam, Gilles Siou- [monica pavesio] fi, Bruno Roche, Constance Griffejoen-Cavatorta, Mathilde Bombart, Bérengère Parmentier, Eric Tou- rette, Françoise Poulet, Brice Tabeling, Dominique Antoine le Metel d’Ouville, Théâtre complet, to- Bertrand, Olivier Lerplatre, Pierre Giuliani, Audrey me II, Les Trahisons d’Arbiran, L’Absent chez soi, Les Guerba), ordinati all’interno del volume sotto alcuni Soupçons sur les apparences, édition d’A. Teulade, Pa- titoli generali, da Le Page et ses contextes a La première ris, Classiques Garnier, 2013, pp. 503. personne en question, da Analyses transversales fino a Au cœur du texte. È abbastanza evidente che la mag- Dopo il primo volume, curato da M. Pavesio, de- gior parte degl’interventi s’impostano o partono dall’u- dicato agli adattamenti calderoniani, (cfr. SF 173 so della prima persona e dai numerosi problemi che pp. 356-357), A. Teulade pubblica un secondo volu- intorno a questo problema si sono impostati e s’impo- me delle opere teatrali di Antoine Le Métel d’Ouville, stano tuttora. Accanto a questa serie di analisi, altre contenenti le tre pièces adattate da Lope de Vega tra il cercano di mettere in evidenza alcune caratteristiche 1638 e il 1650. In questi anni il teatro di Lope riscosse del romanzo di Tristan in un quadro più generale del in Francia un discreto successo, e venne utilizzato an- romanzo francese, mentre altre ancora si soffermano che da Rotrou, che pubblicò ben sei pièces ispirate dal su alcuni punti specifici interni al romanzo. Gli autori grande inventore spagnolo della comedia nueva. degli articoli sono in parte dei “tristaniani” conosciu- Le comedias di Lope, particolarmente proteiformi, ti, attivi all’interno della società degli Amis de Tristan originarono opere appartenenti a generi diversi: gli l’Hermite, che pubblica ogni anno una rivista dedicata intrecci lopeschi sono inseriti da d’Ouville in tre for- a Tristan (i «Cahiers Tristan l’Hermite»), in parte (e per me distinte (una tragicommedia, una commedia, una lo più) sono giovani specialisti del Seicento, che hanno commedia eroica), ma presentano alcuni elementi che

sf177.indb 588 19/12/15 01.04 Seicento 589

le accomunano e le distinguono dalle pièces d’origine mente citati in nota. Questo saggio è particolarmente calderoniana. Sono più cupe, rispetto a quelle calde- apprezzabile per chiarezza, completezza, nonché per roniane, utilizzano meno il personaggio del servo co- la ricchezza di citazioni delle pièces esaminate, che mico, e sono caratterizzate dalla presenza di un per- occupano una parte ampia nell’economia delle pagi- sonaggio maschile malintenzionato. Dopo d’Ouville, ne; le aperture a letture critiche anche estranee allo questa fonte d’ispirazione sarà quasi completamente specifico corneliano (Lacan, Bobbio, Agamben) gli abbandonata da parte dei drammaturghi francesi, che conferiscono un respiro che spesso manca ai manuali preferiranno imitare le comedias di Calderón, più facili contemporanei, rendendolo sicuramente consigliabi- da regolarizzare. le per la didattica universitaria. Il volume contiene l’edizione critica delle tre pièces, interamente modernizzate, con ampie introduzioni, un [laura rescia] accurato glossario, una dettagliata bibliografia e un in- dice dei nomi. [monica pavesio] Martine Alet, Charles et son monde, Paris, Champion, 2014 («Libre pensée et littérature clandes- tine»), pp. 350. Myriam Dufour-Maître, La clémence et la grâce. Étude de “Cinna” et de “Polyeucte” de Pierre Corneil- Sdoganato dall’oblio che lo aveva avvolto fino al- le, Presses universitaires de Rouen et du Havre, 2014, la stagione della rivalutazione degli autori barocchi, pp. 191. Charles Sorel è ormai a pieno titolo entrato nel ca- none letterario, come attestano i programmi dell’a- Questo manuale, uscito a seguito dell’inserimento grégation, nonché la recente pubblicazione di edi- delle due tragedie corneliane nel programma dell’a- zioni critiche moderne di diverse sue opere. Grazie grégation del 2015, si propone come strumento di stu- alle edizioni Champion e agli sforzi di molti soreliani, dio agile ma completo e aggiornato delle due pièces, hanno visto la luce nel 2005 le Nouvelles françaises, alla luce delle più recenti acquisizioni della critica curate da Daniela Dalla Valle; a fine 2014, è stato il contemporanea. Prendendo avvio dalla messa in di- turno de L’Anti-roman du Berger Extravagant, lavo- scussione del mito dell’eroe in Corneille, questione ro immenso in due volumi curato da Anne-Elisabeth centrale affrontata nel primo capitolo, il percorso di Spica; e nel gennaio 2015 è toccato a La Bibliothèque lettura proposto dall’A. si articola su altri sei: il se- française, a cura di un nutrito gruppo di studiosi. Il condo orientato sulla drammaturgia delle due trage- saggio di Martine Alet, ancora edito da Champion, die, sia negli aspetti materiali della rappresentazione dimostra ora che questo rinnovato interesse critico si teatrale che nella genetica del testo; il terzo è impo- va estendendo non solo alle opere letterarie in senso stato sulla ricerca dei congegni retorici dei due testi, stretto, bensì anche a quelle teoriche, alla ricerca di con una particolare attenzione alla retorica “à double un orizzonte filosofico proprio dell’autore. Se per an- fond”; il quarto è interamente dedicato al problema ni è stata evidenziata una certa eterogeneità del pen- della spettacolarizzazione degli eventi su scena, e al siero di Sorel, non solo diacronicamente, ma anche complesso sistema di funzionamento di queste due sincronicamente, è oggi proprio questa apparente di- tragedie, tra ipotiposi, evocazione dell’immagine at- scontinuità a suscitare l’interesse dell’autrice di que- traverso la sollecitazione della fantasia, alla ricerca di sto denso saggio, di taglio prettamente filosofico, che questo fondamentale aspetto della poetica cornelia- rientra nella collezione dedicata al libertinaggio cura- na; il quinto affronta il problema della concezione del ta da Anthony Mc Kenna. Basandosi essenzialmente tempo, inteso nelle sue multiple accezioni di tempo sulla Science Universelle, qui messa a confronto con il finzionale, drammaturgico, teatrale e intimo (o tempo corpus romanzesco e novellistico, l’A. ricerca un si- dello spettatore); il sesto si concentra sulla dimensio- stema filosofico coerente per quanto riguarda l’idea ne ideologica delle due pièces, proponendo un parzia- di Natura in Sorel, partendo dall’assunto che l’oscilla- le rovesciamento dell’interpretazione canonica, attra- zione tra le affermazioni apparentemente in linea con verso un’indicazione di lettura che cerca in Polyeucte l’ortodossia vigente e le refutazioni di tali affermazio- la tragedia politica e in Cinna quella cristiana; il setti- ni sono proprie di una strategia tipicamente liberti- mo infine si sofferma sulla ricezione delle pièces, sugli na: contraddizioni, postura enunciativa, utilizzo del effetti voluti dal drammaturgo per i suoi spettatori, sottinteso, pratica dell’ellissi, non sarebbero che stra- inscrivendo sotto l’egida della douceur (la mitezza, tegie dell’accettabilità – per riprendere la nozione di così come descritta nel celebre saggio di Norberto Cavaillé – e non sottrarrebbero dunque serietà alla ri- Bobbio, qui opportunamente citato) non solo la vi- flessione filosofica soreliana. Tra le pieghe dell’appa- sione dei fatti presentati dal drammaturgo nelle due rente affermazione della sottomissione della Natura a tragedie, ma la sua stessa postura autoriale. Lontano Dio, emergerebbe pertanto un discorso implicito che da uno stoicismo estremo, Corneille sembra voler in- individua nella natura un senso immanente e materia- dicare al suo pubblico la duplice via, della clemenza lista; gli scritti di Sorel autorizzerebbero a un triplice e della grazia, attraverso la quale giungere al subli- livello di lettura, in cui il naturalismo cristiano, quello me. In appendice a questo percorso, si troverà una “conciliante”, e quello nettamente materialista si al- breve antologia critica, che da Péguy attraverso Béni- ternerebbero sapientemente, a delineare un orizzonte chou, Rousset, Fumaroli, conduce a Merlin-Kajman e volutamente sfaccettato. Il primo capitolo si concen- Kintzler. Una bibliografia volutamente succinta indi- tra sulla visione della fisica, il secondo sull’universo ca i testi imprescindibili (saggi e articoli) per inqua- e il suo funzionamento, mentre i successivi tre sono drare il problema critico su Corneille oltre che sulle dedicati alla natura umana, nella sua dimensione cor- due tragedie al centro dell’attenzione dell’A. Riuscen- porea e spirituale, poi nella sua specificità di natu- do ad evitare l’eccessiva eterogeneità che potrebbe ra ragionativa e dotata di volontà. L’analisi condotta derivarne, l’A. assume e armonizza diverse metodo- dall’A. le permette di ipotizzare una prospettiva coe- logie e numerosi contributi di tutti i maggiori criti- rentemente antiscolastica in Sorel, che emerge ancor ci corneliani, che vengono opportunamente e ampia- più chiaramente mettendo in relazione i testi sorelia-

sf177.indb 589 19/12/15 01.04 590 Rassegna bibliografica

ni con gli scritti filosofici di Descartes e di Cyrano de la musicologa C. Monnier. Insieme hanno ricostruito Bergerac. Ricchissimo di riferimenti a scritti coevi di quest’interessante commedia, in cui Baron s’inserisce natura atomistica ed ermetica, questo testo risulterà nella scia del suo maestro Molière, proponendosi di particolarmente utile alla lettura incrociata di liberti- rinnovare la commedia classica con un’estetica nuova. nismi europei di altro orizzonte geografico, oltre a te- L’editore approfondisce, nell’introduzione, le princi- stimoniare la definitiva centralità di questo poligrafo pali caratteristiche di questa commedia notturna, che del Seicento francese. tratteggia con cinismo una società decadente fin-de- règne e mette in crisi i valori assoluti dell’Ancien Ré- [laura rescia] gime. Si sofferma sul prologo drammatico, il più lungo nella storia del teatro francese fino alla fine delxviii secolo, e sull’intertestualità di una pièce, che riprende, Michel Baron, Le Rendez-vous des Tuileries ou Le a volte letteralmente, intere scene dell’Impromptu de Coquet trompé, Édition présentée, établie et annotée Versailles di Molière. Molto interessanti sono anche gli par J. M. Hostiou, avec la collaboration de C. Mon- annessi musicali, contenenti la ricostruzione delle par- nier, London, The Modern Humanities Research As- titure musicali che Charpentier scrisse per questa com- sociation, 2013, pp. 151. media, spesso parodiando alcune delle arie più famose di Lully. L’edizione critica, completata da un’esaustiva Creata nel 1685 e rappresentata alla Comédie-Fran- bibliografia, contribuisce alla riscoperta di una delle çaise, con le musiche di Marc Antoine Charpentier, Le numerose creazioni drammatiche della fine delxvii Rendez-vous des Tuileries è la prima pièce teatrale di secolo, purtroppo, completamente oscurate dalla fama Michel Baron, allievo di Molière e attore di grande suc- delle opere di Molière. cesso alla fine del xvii secolo. L’edizione della comme- dia, in tre atti e in prosa, preceduta da un prologo dram- [monica pavesio] matico, nasce dalla collaborazione tra J. M. Hostiou e

Settecento a cura di Franco Piva e Vittorio Fortunati

e e Penser l’Europe au xviii siècle. Commerce, Civilisa- que au xviii siècle, pp. 71-89) esamina la contraddizio- tion, Empire, édité par Antoine Lilti et Céline Spector, ne tra un’idea universale di jus gentium e la sua man- Oxford, Voltaire Foundation, 2014 («Oxford University cata applicazione nelle relazioni con i paesi extra-euro- Studies in the Enlightenment»), pp. x + 270. pei e mette poi in luce come la consapevolezza di tale contraddizione sia stata alla base delle prime critiche Le riflessioni raccolte da Antoine Lilti e Céline al colonialismo. Spector e derivate da un seminario e una giornata di La seconda parte è dedicata all’ambivalenza del «dol- studi tenuti all’École Normale Supérieure tra il 2008 ce commercio», vale a dire all’inscindibile legame tra il 2009 si differenziano dalla passata tradizione sull’i- espansione commerciale e conquista coloniale. Céline dea d’Europa, avente radici illustri nei lavori di Lu- Spector (Civilisation et empire: la dialectique négative cien Febvre e di Federico Chabod, perché non sono «il de l’Europe au siècle des Lumières, pp. 93-115) reinter- frutto di una storia culturale che si propone d’identifi- preta l’opera di Montesquieu e Robertson mostrando care “la presa di coscienza” dell’idea di Europa da par- come l’uno sia stato tra i primi ad intravedere l’ambiva- te delle élites intellettuali» (Introduction, p. 9). I diversi lenza del commercio, che rischiava di estendere su scala saggi mirano piuttosto ad «analizzare come l’Europa in mondiale la minaccia della monarchia universale, men- quanto idea o concetto è divenuta l’oggetto di un’inda- tre l’altro considerava il commercio la base sulla quale gine storica e filosofica» (ivi, p. 10). costruire l’Europa moderna. Kenta Ohji (La fin de l’An- I contributi sono suddivisi in tre sezioni. Nella pri- cien Régime en Europe selon l’“Histoire de deux Indes”, ma ci si interroga sul modo in cui è stato teorizzato l’or- pp. 117-136) rilegge l’Histoire de deux Indes evidenzian- dine europeo, attraverso l’analisi del concetto di equi- do come, soprattutto nelle voci stilate da Diderot, for- librio delle potenze. Bruno Bernardi (L’idée d’équili- te sia l’idea del contributo del commercio allo sviluppo bre européen dans le jus gentium des modernes: esquisse dell’Europa moderna, ma come al contempo sia Raynal d’histoire conceptuelle, pp. 19-45) rivela come la no- sia Diderot esprimano l’esigenza critica di riforme per zione di equilibrio delle potenze non sia un prodotto assicurare, in Europa, libertà economica e politica. della diplomazia del xvi secolo, quanto piuttosto una La terza sezione riguarda l’idea di «civiltà eu- costruzione retrospettiva dell’Illuminismo, che trova ropea». Antoine Lilti (La civilisation est-elle euro- e la sua prima formulazione in Saint-Pierre e in David péenne? Écrire l’histoire de l’Europe au xviii siècle, Hume. Stella Ghervas (La paix par le droit, ciment de pp. 139-165) delinea il caso simbolo di Voltaire, con- la civilisation en Europe? La perspective du siècle des tinuamente scisso tra il riconoscimento del relativi- Lumières, pp. 47-69) confronta i progetti per la pace di smo culturale e l’esaltazione del primato europeo. Saint-Pierre, Rousseau e Kant, mostra come gli ultimi Larry Wolff (La géographie philosophique des Lu- due superino la formulazione di Saint-Pierre verso una mières: l’Europe de l’Est et les Tartares de Sibérie au visione più marcatamente cosmopolita e democratica. regard de la civilisation, pp. 167-180), partendo dalla Jennifer Pitts (Empire colonial et universalisme juridi- vicenda del viaggiatore statunitense Ledyard, rivela

sf177.indb 590 19/12/15 01.04 Settecento 591

l’esistenza di una carta mentale dell’Europa, secon- cation du livre, la publicité, enfin, la vente. Déjà la dé- do la quale il grado di civiltà diminuiva man mano cision de publier soi-même un ouvrage était porteuse che si andava verso Est. Dominic Eggel (Le projet des de problèmes à surmonter: l’obtention d’un privilège Lumières mis en cause de l’intérieur: les classiques de qui garantisse les droits d’auteur, ensuite, le choix d’un Weimar à l’avant-garde des critiques de la civilisation imprimeur et, enfin, le financement de la publication, européenne, pp. 181-202) rilegge la critica di Voltai- où prédomine la «souscription» (chap. 3). L’A. dé- re fatta da Herder, Schiller e Fichte non come una montre que les auteurs-éditeurs étaient très soucieux reazione nazionalista, come un’autocritica dell’Eu- de la matérialité de leurs ouvrages (format, typogra- ropa moderna e della sua spinta imperialista. Sophia phie, papier, iconographie, reliure, etc.). Ce souci rend e Rosenfeld (L’Europe des cosmopolites: quand le xviii les auteurs-éditeurs fort sensibles aux contrefaçons e siècle rencontre le xxi , pp. 203-227), a mo’ di postfa- (chap. 4). Le chapitre suivant présente divers outils de zione, riflette su come l’Europa contemporanea abbia publicité et de promotion utilisés par les auteurs (pros- utilizzato il mito dei Lumi come fonte di legittima- pectus, affiches et annonces, préfaces, etc.), ce qui zione. Scopo (ben conseguito) del volume è quello di témoigne d’une «pratique auctoriale en pleine muta- fornire solide basi interpretative, al di là di falsi miti e tion». Le dernier chapitre est consacré aux moyens en- pregiudizi, relative all’idea d’Europa nel xviii secolo, trepris par les auteurs pour vendre leurs livres, le plus dalle quali possa partire una più matura riflessione del souvent, à domicile, parfois, chez des libraires associés. concetto stesso nell’età contemporanea. En concluant, Marie-Claude Felton constate que l’âge d’or de l’édition à compte d’auteur (de 1777 à la Révo- [giulia delogu] lution) témoigne d’un «processus de professionnalisa- tion et de modernisation de l’auteur». Un autre aspect de ce phénomène du passé du marché du livre est frap- Marie-Claude Felton, Maîtres de leurs ouvrages. pant: il paraît particulièrement actuel pour notre ère e L’édition à compte d’auteur à Paris au xviii siècle, Ox- du numérique où tout un chacun peut devenir auteur ford, Voltaire Foundation, 2014 («Oxford University grâce aux maisons d’édition dites “alternatives”. Studies in Enlightenment»), pp. 305. [regina bochenek franczakowa] L’ouvrage de Marie-Claude Felton est une étude mi- nutieuse et solidement documentée d’un phénomène toujours peu connu touchant l’édition et le marché Sonia Cherrad, Le Discours pédagogique féminin au e du livre en France au xviii siècle, à savoir, l’édition à temps des Lumières, Oxford, Voltaire Foundation, 2015 compte d’auteur à Paris. L’ouvrage se compose d’une («Oxford University Studies in the Enlightenment»), «Introduction», de six grands chapitres suivis d’une pp. 311. «Conclusion» et d’une importante «Annexe», conte- nant la liste des auteurs et de leurs ouvrages «édités à Il volume, composto da quattro capitoli e da sinte- Paris chez l’auteur» entre 1750 et 1791. Il faut souligner si introduttive e conclusive, s’incentra su un corpus di la présence d’une remarquable iconographie ainsi que scritti pedagogici femminili pubblicati nella seconda de tableaux qui visualisent les données statistiques. metà del Settecento francese ad opera delle già note L’enquête bibliographique menée par Marie-Claude Mmes Leprince de Beaumont, d’Épinay e de Genlis, Felton est basée sur deux sources: le catalogue général nonché delle meno conosciute Mmes o Mlles de La Fi- des imprimés de la Bibliothèque Nationale de France te, de Monbart, de Miremont, d’Espinassy e Le Mas- et le périodique «Catalogue hebdomadaire» (1763- son Le Goft, per dar luogo a una disamina compara- 1789). L’examen du corpus des ouvrages publiés à Pa- tiva delle loro proposte. Le direttrici su cui si muove ris chez l’auteur entre 1750 et 1791 a permis à l’A. de l’analisi mettono via via l’accento sui generi letterari constater d’abord que ce phénomène n’était pas mar- adottati dal corpus – spesso orientati verso forme dialo- ginal, surtout après les arrêts de 1777 permettant aux giche composite connotate da enciclopedismo e aper- auteurs de vendre directement leurs ouvrages. L’édi- ture filosofiche – (cap. I, «La naissance d’un discours tion à compte d’auteur est devenue une «nouvelle pédagogique féminin»), sugli estremi della discussio- pratique auctoriale autonome et moderne» (chap. 1). ne teorica intorno agli schemi formativi tradizionali e Cela commence par la prise de conscience et la reven- alle innovazioni propugnate dalla modernità (II, «Les dication des droits d’auteur: Malesherbes, et après lui, modèles éducatifs»), sui programmi disciplinari e le Luneau de Boisjermain, mettent en évidence l’injuste materie di studio da considerarsi irrinunciabili anche traitement des auteurs par les éditeurs. L’A. constate per le allieve (III, «Les savoirs féminins des Lumières») que, dès les années 1780, l’innovation réside dans la e, infine, sulle istanze socio-politiche ed economiche revendication par beaucoup d’auteurs du statut pro- che le pedagogiste non hanno mancato di sollecitare fessionnel «à la fois respectable et profitable». Dans sotto il velo delle loro finzioni narrative (IV, «Les le chapitre 2, on trouve le portrait de l’auteur-éditeur. fictions au miroir de la société des Lumières»). Emerge Cette catégorie d’auteurs n’est pas marginale (ils sont dall’indagine un quadro d’insieme in cui risalta la quelques centaines). Le relevé des publications exami- sostanziale comunanza d’intenti delle educatrici, non nées dans l’ouvrage (800 titres) démontre la présence solo avvicinate dall’analogia delle loro scelte estetiche, marquée des œuvres des sciences et des arts (57%) et ma anche dagli obiettivi, dalle idee di fondo e dalle des belles-lettres (25%), tandis qu’on rencontre très tendenze che le hanno indirizzate. Tutte in effetti si peu de théologie et de jurisprudence. L’homme de collocano nel solco delle Lumières, ma ne interpreta- lettres prend un sens moderne d’un métier et d’un état no le indicazioni a seconda dei propri convincimenti dans la société. Ce qui frappe, pourtant, c’est la pré- personali. Più riformiste che rivoluzionarie, accolgono sence de nombreux «écrivants», pour qui écrire et pu- ancora i retaggi del passato quando questi restano ade- blier n’était qu’une partie de leur activité profession- guati alla nuova società, ma sono pronte a dissociarse- nelle, une façon de transmettre leur savoir-faire. Les ne in caso contrario, in nome di presupposti basilari chapitres ultérieurs de l’ouvrage permettent de suivre quali l’ineludibilità formativa della riflessione e della les démarches de l’auteur-éditeur, concernant la publi- ragione contro il prevalere dell’esercizio mnemonico,

sf177.indb 591 19/12/15 01.04 592 Rassegna bibliografica

e la promozione entusiasta di un sapere autotelico e Anche per questo Montesquieu fu un viaggiatore allargato, opposto a un ammaestramento unicamente particolarmente attento e interessato a quello che l’Ita- utile e dunque limitato. Emergono anche – al di fuo- lia poteva offrirgli dai più diversi punti di vista: lo di- ri dell’impressione d’incompiutezza legata qua e là a mostrano le numerosissime note che egli prese durante conclusioni un po’ spicce riguardo al merveilleux e alle quel suo viaggio, molto probabilmente in vista di opere forme brevi –, i risultati ottenuti dal volume, fra cui che poi, per vari motivi, non riuscì a comporre se non in la rivalutazione dell’apporto tanto pedagogico quan- parte, e che rimasero manoscritte, consegnate al Voyage to letterario di queste illuministe francesi, e la chiara d’Italie, allo Spicilège e alle Pensées. Fu un viaggiatore, demarcazione del contesto storico-sociale che ha visto Montesquieu, che cercò con insistenza il confronto e il nascere le loro proposte settecentesche, contesto ben dialogo, attraverso le opere quando non gli fu possibile distinto dai successivi scenari del secolo decimonono. di persona, con i maggiori e più significativi rappresen- Suscita però perplessità, a questo proposito, la scelta tanti della cultura italiana dell’epoca, di cui rimangono dell’autrice di esaminare il Magasin des enfants di Mme abbondanti e visibili tracce nell’Essai sur le goût e so- Leprince de Beaumont, fonte d’indispensabili raffron- prattutto nell’Esprit des lois, ma anche nella biblioteca ti, sull’unica base di una riedizione dell’Ottocento, personale di Montesquieu, come dimostra l’attenta ana- che, come tutte le altre riedizioni di quel secolo, risulta lisi alla quale Eleonora Barria-Poncet ha sottoposto il aver alterato il testo originario per adattarlo a una mu- catalogo della biblioteca de La Brède, ed ancor più, for- tazione ormai avvenuta di valori, criteri ed esigenze. se, in quella che l’Autrice chiama la «bibliothèque invi- sible» del barone di La Brède, composta dalle opere che [elisa biancardi] egli ha certamente letto anche se la loro presenza non è attestata nel catalogo della sua biblioteca. Anche se qualche scelta dell’Autrice può non es- Eleonora Barria-Poncet, L’Italie de Montesquieu. sere del tutto condivisa, il volume, corredato da una Entre lectures et voyage, Paris, Classiques Garnier, ricchissima e utilissima serie di «annexes» (riguardanti 2013 («L’Europe des Lumières», 25), pp. 685. soprattutto le biblioteche bordolesi coeve) non man- cherà, perciò, di essere di grande utilità a quanti sono Presentiamo, anche se in ritardo, questo volume che interessati ad una migliore e più approfondita cono- gli studiosi di Montesquieu non mancheranno di ap- scenza non solo del pensiero di Montesquieu ma an- prezzare, in quanto viene in qualche modo a colmare che alla genesi delle sue diverse opere e a una migliore un vuoto, e apporta, nel contempo, un ricco e prezio- comprensione degli appunti, più o meno elaborati, che so contributo di informazioni e di stimoli sull’«Italie da quel suo viaggio in Italia, e più in generale, dalla de Montesquieu» ma più in generale sul progressivo sua conoscenza del nostro paese, della nostra arte e formarsi del suo pensiero. È noto quale interesse Mon- della nostra storia egli ha progressivamente tratto ed tesquieu abbia dimostrato nei riguardi dell’Italia: non elaborato. solo per il viaggio che vi ha fatto tra il 1728 ed il 1729, [franco piva] ma anche, e forse soprattutto, per lo spazio che l’Italia, la storia, l’arte e la cultura italiane hanno avuto nel suo pensiero e nella sua opera di «philosophe» fin dalla sua Gianluigi Goggi, «La biblioteca di Voltaire», in Bi- prima giovinezza. Ne sono sicuri testimoni i numero- blioteche filosofiche private. Strumenti e prospettive di ri- sissimi studi che a questo aspetto della sua opera sono cerca, a cura di Renzo Ragghianti et Alessandro Savo- stati dedicati nel corso degli anni. Meno noto è, invece, relli, , Edizioni della Normale, 2014, pp. 261-277. come Montesquieu abbia costruito questa sua ampia ed approfondita conoscenza dell’Italia. A cominciare Il volume nel quale il saggio di Gianluigi Goggi è dal modo in cui ha preparato il suo viaggio nel nostro inserito è il risultato di un progetto di ricerca, «Biblio- paese. Come tutti i suoi contemporanei, a questo viag- teche dei filosofi, Biblioteche filosofiche private», sorto gio Montesquieu si è preparato in maniera molto ac- alcuni anni dalla collaborazione tra un gruppo di ri- curata. Ma come? Prima di tutto attingendo alla ricca cerca della Scuola Normale di Pisa ed il Dipartimen- biblioteca di famiglia, nella quale lo spazio fatto alla to di Scienze Umane dell’Università di Cagliari, con cultura italiana era ampio, come era tradizione nella l’intenzione di «agevolare con materiale di prima con- regione geografica, fortemente aperta ad altri paesi, tra sultazione un aspetto particolare degli studi storico- cui l’Italia, nella quale Montesquieu è nato ed è cre- filosofici, quello delle ricerche sulle letture dei filosofi sciuto: e come dimostra il confronto al quale l’autrice e sul loro patrimonio librario personale» (Alessandro ha sottoposto la biblioteca di La Brède con altre im- Savorelli, «Premessa», p. 9). Gianluigi Goggi, dopo portanti biblioteche bordolesi del tempo. Patrimonio, aver ricordato, per sommi capi, come è nata l’impo- quello della biblioteca di famiglia, che Montesquieu ha nente (oltre 6000 volumi) biblioteca messa assieme da arricchito ed aggiornato proprio in vista e in prepa- Voltaire negli ultimi vent’anni della sua esistenza (in razione del viaggio che il futuro autore dell’Esprit des pratica, a partire dalla sua decisione di stabilirsi defi- lois, alla ricerca di conferme e, soprattutto, di nuovi nitivamente a Ferney) ed aver ricordato come quella stimoli, aveva accuratamente progettato. D’altra parte biblioteca, acquistata dopo la morte del «philosophe» per lui il viaggio in Italia (che avrebbe peraltro amplia- da Caterina II, è arrivata all’Ermitage, prima di passare to e completato con la visita di altri paesi e soprattutto definitivamente alla Biblioteca Nazionale Russa di San dell’Inghilterra) costituì, fin dall’inizio, qualcosa di più Pietroburgo, ha posto in luce, da un lato, come essa del tradizionale Grand Tour con il quale i rampolli del- sia servita a Voltaire per completare la sua formazione le grandi famiglie usavano già allora completare la loro filosofica e la sua informazione di storico e di polemi- formazione; traeva origine e rispondeva, come è noto, sta; dall’altro come, dopo il suo trasferimento in Rus- ad esigenze assai più ampie e profonde: quelle che lo sia, sia diventata essa stessa oggetto di indagini sempre portavano non solo ad ammirare le opere che le varie più accurate. Si è trattato, prima di tutto, di ricostruire culture avevano prodotto in Italia, ma ad osservare e quella biblioteca nella sua interezza, visto che nel cor- studiare come quelle stesse popolazioni e quelle civiltà so dei suoi vari trasferimenti, una parte dei libri che la si fossero evolute nel tempo, e sotto quali spinte. componevano erano andati dispersi; lavoro non facile,

sf177.indb 592 19/12/15 01.04 Settecento 593

come documenta l’autore, e non ancora concluso. Si sins”, pp. 59-69), mentre Marianne Charrier-Vozel è trattato poi di rilevare, pubblicare e studiare le no- (Les concepts de la beauté et de la laideur dans le projet te che Voltaire ha apposte, talvolta in maniera sovrab- pédagogique de M.L. de B., pp. 105-115), Rotraud von bondante, su una parte consistente dei suoi libri (oltre Kulessa (La fonction du dialogue dans le “Magasin des duemila su un totale di circa seimila) nel corso delle enfants”, pp. 73-83) e Jeanne Chiron (Dynamiques de sue letture. Voltaire era un lettore molto attento ed retranscription, jeux de mise en fiction, pp. 85-102) s’in- estremamente reattivo. Leggere significava per lui con- terrogano su tematiche specifiche e strategie enunciati- frontarsi attivamente con il libro letto, reagire ad esso ve dei Magasins. Quanto all’Illuminismo, un dibattito sull’istante; la sua penna era in continuo movimento. s’instaura fra Guilhem Armand, soprattutto sensibile Le «notes marginales» di cui i suoi libri sono, a volte, ai fondamenti secenteschi, cartesiani e pascaliani, di letteralmente coperti, sono di vario tipo. Per gli stu- Marie Leprince (Lumières de la raison et Lumière de diosi si è trattato, e si tratta ancora, visto che il lavoro, la foi chez M.L. de B., pp. 117-128) e Alicia C. Mon- prossimo alla conclusione, non è stato a tutt’oggi stato toya, che asserisce invece la piena appartenenza della ultimato, non solo di pubblicare quelle «notes» ma an- pensatrice al contesto culturale dei Lumi (M.L. de B. che di studiarle, di capirne l’origine e la destinazione. et les “Lumières religieuses”, pp. 131-143). Con le os- Entrare nel mondo di quelle annotazioni, ha infatti servazioni di Béatrice Bomel-Rainelli sulla Réception significato, e significa ancora per lo studioso di Voltai- scolaire de M.L. de B. ai giorni nostri (pp. 145-160) si re, entrare nel mondo stesso del patriarca di Ferney, conclude questo primo gruppo di contributi e si apre capire il suo modo di reagire agli stimoli che ogni libro la serie dei nove saggi successivi, che s’incentrano sulla offre, seguire il corso del suo pensiero, a volte ripercor- fiaba più famosa della narratrice. De La Belle et la Bête rere la genesi di alcune delle sue opere più interessanti. si interpretano qui le valenze iconografiche (Liliane In questa prospettiva possono essere di notevole inte- Cheilan, La Bête et le Prince dans quelques versions il- resse anche i cosiddetti «pots-pourris», vale a dire i nu- lustrées, pp. 175-188, e Martine Marzloff, “La Belle et merosissimi (146) «dossiers» (articoli, estratti di libri la Bête” dans les éditions contemporaines destinées à la a stampa e testi di altro genere) che Voltaire (o i suoi jeunesse, pp. 189-199), i possibili significati psicanaliti- segretari) hanno costituito nel tempo, sulla base delle ci (Thierry Jandrok, Métamorphoses, pulsions et désirs letture fatte, in vista (ma non sempre) delle opere che dans “La Belle et la Bête”, pp. 215-225) e i meccani- il Patriarche intendeva o aveva in mente di compor- smi di tipo linguistico (Dorothée Cooche-Catoen, Les re. Testi compositi e, perciò, di difficile lettura ed in- enjeux de la parole dans “La Belle et la Bête”, pp. 203- terpretazione, questi «dossiers» costituiscono l’ultima 213), nonché le trasformazioni apportate alla fiaba da frontiera di una biblioteca estremamente interessante e alcuni dei tanti adattamenti cinematografici, teatrali o composita, e di un lettore altrettanto curioso e ricco di narrativi che se ne sono ispirati. Dopo le considerazio- stimoli, quale fu il patriarca di Ferney. ni di Benjamin Andréo sulla sua resa filmica da parte Bel saggio, di facile lettura ma assai bene informato di J. Cocteau («Peu à peu le style se métamorphosait», e documentato dal punto di vista bibliografico. pp. 229-241) e quelle di Pierre-Louis Fort su due pièces, Belle des eaux di B. Castan e La Belle et les bêtes [franco piva] di A. Arias e R. de Ceccatty (“La Belle et la Bête” à la scène, pp. 243-259), le analisi di alcune riscritture com- pletano la miscellanea: Émilie Pezard individua in Hu- Marie Leprince de Beaumont. De l’éduction des filles go e Flaubert delle Variations pessimistes sur “La Belle à “La Belle et la Bête”, sous la direction de Jeanne Chi- et la Bête” (pp. 263-274), Dearbhla McGrath tratteg- ron et Catriona Seth, Paris, Classiques Garnier, 2013, gia il Rôle de la méchante fée dans deux réécritures de pp. 379. “La Belle et la Bête”, ovvero in Beast di D.J. Napoli e in Beastly di A. Flinn (pp. 275-283), mentre Sylvie Le due parti in cui si suddivide la miscella- Rosienski-Pellerin si dedica a Là où la mer commen- nea – «Formes et enjeux d’un projet pédagogique» e ce di D. Demers, un romanzo dall’intertestualità così «La Belle et la Bête dans tous ses états» – danno so- densa da situarsi non solo nella scia de La Belle et la prattutto spazio ai Magasins e alla celebre fiaba, ma si Bête, ma anche, a vari livelli, in quella del Magasin des occupano anche di aspetti meno noti della produzione enfants (“La Belle et la Bête” au cap Enragé, pp. 285- di Marie Leprince de Beaumont, pedagogista, pensa- 294). Nell’insieme, oltre alla suggestione di molti sag- trice, romanziera e conteuse di notevole successo tra il gi di sicuro interesse – in cui si nota però il frequente xviii e il xix secolo e attualmente in corso di rivaluta- ricorso a riedizioni ottocentesche, sempre modificate zione da parte della critica contemporanea. Una Intro- se non addirittura deformate rispetto a quelle del Set- duction e delle Annexes, entrambe curate da Catriona tecento –, emerge dal volume una ricchezza di stimoli Seth, illustrano rispettivamente le più recenti scoperte che conferma il potenziale d’indagine ancora offerto biografiche sulla scrittrice (pp. 7-42) e la banalità fuor- dalla produzione multiforme e in parte inesplorata di viante delle notices ottocentesche scritte sul suo conto, Marie Leprince de Beaumont. in parte responsabili dell’immagine riduttiva che l’ha [elisa biancardi] screditata per tutto il Novecento (pp. 295-338). All’in- terno di questo inquadramento complessivo, i primi otto saggi si concentrano sull’aspetto pedagogico delle Imagination scientifique et littérature merveilleu- sue opere, che viene esaminato nelle sue modalità nar- se. Charles Tiphaigne de La Roche, textes recueillis et rative, manualistiche e dialogiche, nel carattere illumi- présentés par Yves Citton, Marianne Dubacq, Philip- nista dei suoi obiettivi e nelle peculiarità della sua ri- pe Vincent, Presses Universitaires de Bordeaux, 2014 cezione tanto in ambito filosofico che scolastico. Così, («Mirabilia»), pp. 392. «Ma chère Julie n’a jamais lu de romans» di Pierre-Oli- vier Brodeur (pp. 47-57) evidenzia la modernità, mal- Spesso ignorato dalla critica, ma riletto con nuovo grado le apparenze, del romanesque educativo di Marie interesse dopo il 1950, il settecentesco Tiphaigne de Leprince, Sonia Cherrad segnala il peso del racconto La Roche vede precisarsi in questa miscellanea i moti- verosimile nei suoi manuali (L’histoire dans les “Maga- vi d’interesse suscitati oggi dalla sua opera. Corredati

sf177.indb 593 19/12/15 01.04 594 Rassegna bibliografica

di un’introduzione e di un saggio conclusivo di note- verne, pp. 233-263, e Conclusion. Merveille et alter- vole ampiezza (pp. 7-72 e 319-353) nonché di un’an- modernité, pp. 319-353), agganciano il pensiero dello nexe storico-libraria (Françoise Weil, T. de La R. et le scrittore alle prospettive più avanzate della nostra tar- monde de la librairie, pp. 355-361), i contributi rac- da modernità: alla luce delle teorie epistemologiche, colti nel volume appaiono suddivisi in quattro gruppi. filosofico-politiche e antropologiche di I. Stengers, Il primo («Charles Tiphaigne en son siècle»), collo- B. Latour, M. Hardt, G. Simondon e Ph. Descola, le ca l’autore nell’ambito delle correnti di pensiero della “bizzarrie” di Tiphaigne possono configurarsi oggi co- sua epoca. Il secondo, «Le travail de l’écriture et de me un’anticipazione di interrogativi, proposte e solle- la pensée», segnala la singolarità delle sue principali citazioni della più attuale contemporaneità. strategie letterarie, e gli ultimi due («Les croisements entre sciences et merveilles» e «Les ambivalences du [elisa biancardi] merveilleux moderne»), tematicamente contigui, in- dagano in modo via via più approfondito sulle specifi- cità del suo immaginario. Dal quadro articolato che ne Marguerite de Coüasnon, Écrire de soi. Madame de risulta affiorano ambivalenze di varia natura – e forme Genlis et Isabelle de Charrière, l’autorité féminine en di coerenza che le sottendono –, in linea di massima fictions (1793-1804), Rennes, PUR, 2013 («Interféren- connesse con la duplicità dei risvolti che Tiphaigne ces»), pp. 310. rilevava ed evidenziava nella modernità del suo tem- po. La miscellanea sottolinea infatti, fin dall’inizio, Interessata alla scrittura femminile del diciotte- come il deliberato gioco di affermazioni antitetiche a simo secolo e alla ricezione di Rousseau, l’A. coniu- cui ricorre l’autore abbia guidato in direzioni opposte ga in questo volume tratto dalla sua tesi di dottora- i giudizi dei suoi contemporanei (Marianne Dubacq, to i suoi due centri di ricerca. Coüasnon tratta infatti La réception de Tiphaigne, pp. 73-85), e come tutta- dell’opera di due illustri femmes de lettres mettendola via questa stessa eterogeneità racchiuda la cifra della in relazione con la figura del Ginevrino, accostamen- sua coerenza profonda (Philippe Vincent, Bigarrure to necessario se si considera il periodo di produzione et cohérence, pp. 87-120); una coerenza che Jacques letteraria preso in esame: 1793-1804. Come sottolinea Marx (De la tradition à l’anticipation, pp. 49-72) ve- nella Préface Isabelle Brouard-Arens, si tratta infatti de per parte sua come un incitamento a condividere di un decennio difficile per delle scrittrici che si pro- una épistémologie de la participation, cioè un’intera- pongano di prendere posizione nei confronti di un’at- zione tra razionale e irrazionale in grado di avvicinare tualità radicale: in questo contesto storico-politico meglio l’uomo alla natura. Il secondo gruppo di saggi Isabelle de Charrière e Madame de Genlis dimostra- individua un’ulteriore forma di coerenza nella rifles- no la loro originalità e audacia, riuscendo a propor- sione etica di Tiphaigne sulla vanità umana e sui suoi re testi che si situano, con i dovuti distinguo, «par- paradossali effetti positivi (Julie Boch, Sub specie va- mi les œuvres engagées avec le paradoxe qui consi- nitatis, pp. 135-153), e dedica nuovo spazio ai mec- ste à dépasser l’esprit partisan: être engagée par une canismi dell’ambivalenza, ora individuati nei disposi- écriture de la distance» (p. 8). In effetti, quelle che tivi linguistico-letterari volentieri adottati dall’autore Brouard-Arens considera come «passeuses» culturali (Michèle Bokobza Kahan, Auctorialité et margina- (p. 7) adottano una posizione intermedia tra i valori lité, pp. 107-120), ora nella stratégie du loufoque, cioè di un Ancien Régime ormai decaduto e gli ideali di nell’associazione di serio e bislacco che sconcerta il un Nuovo Mondo in perenne divenire. Lo fanno lettore ma al tempo stesso lo sorprende positivamente reinterpretando il pensiero di Rousseau – pensatore (Florence Boulerie, Tiphaigne et les idées loufoques, all’epoca assurto a vero e proprio maître à penser pp. 121-134), oppure ancora nella metafisica duali- dei rivoluzionari – relativamente alla valorizzazione stica che, pur rifacendosi in gran parte ai valori dei del ruolo femminile a livello individuale e collettivo philosophes, viene usata dallo scrittore proprio per e alla sua posizione nella società. Se le figure dell’e- mostrare a questi ultimi le insufficienze del loro ma- migrato e del paria si possono considerare come una terialismo (Jean-François Perrin, Les “Bigarrures phi- metafora del destino delle femmes d’esprit dell’epoca, losophiques”, pp. 155-172). Entrando poi nel campo nella loro produzione Isabelle de Charrière e Mada- delle intersezioni fra sapere scientifico e merveilles, si me de Genlis tratteggiano educatrici, madri e scrittri- nota che a fianco di studiosi che ne analizzano aspet- ci che, come loro stesse, si pongono in contrasto con ti specifici – l’incidenza di immagini e modelli vegeta- la doxa rivendicando, pur se a livello ideale, un ruolo li in Emmanuelle Sempère, Le végétal chez Tiphaigne femminile nuovo e attivo nella società rivoluzionaria. (pp. 211-230), le invenzioni fittizie in Yoshiko Terao Secondo Marguerite Coüasnon, l’interesse dimostra- et Denis Reynaud, La captation du son et de l’ima- to da queste autrici nei confronti di una Rivoluzione ge (pp. 289-299), o la meccanizzazione della psiche in fieri si concretizza nel tentativo di riconciliare gli umana in Isabella Mattazzi, Imaginaire mécanique et estremi e di moderare le istanze più radicali, ripren- mécanismes de l’imaginaire (pp. 301-318) –, altri atti- dendo e rivisitando il pensiero rousseauiano al fine di rano di preferenza l’attenzione su quanto può ricolle- rimodellare l’immagine femminile «coniugalista», e di garsi al passato oppure al futuro nel sincretismo teori- ipotizzare la possibilità femminile di un’affermazione co di Tiphaigne. Da un lato, Carmen Ramirez mostra individuale nello svolgimento di un ruolo importante i tratti non solo barocchi ma anche medievali del suo a livello pedagogico e critico. immaginario (Merveilleux mélancolique et éloge de la Basato soprattutto sull’analisi dei legami interte- curiosité, pp. 265-287), mentre Aurélia Gaillard lo ri- stuali tra Madame de Genlis e Isabelle de Charrière porta a un’epoca ben più vicina a lui, riscontrandovi da un lato e il Ginevrino dall’altro, il presente volume il marchio di Fontenelle, continuatore della galanterie contribuisce alla riflessione sulla ricezione postrivo- secentesca, piuttosto che quello dell’illuminista ante luzionaria di quest’ultimo, ribadendo al contempo la litteram Spinoza (Ni fable, ni système, pp. 175-191). modernità del pensiero e della scrittura di due autrici Dall’altro, Guilhem Armand (Tiphaigne ou la vocation ancora ingiustamente sottovalutate. fantaisiste de la science, pp. 193-209) e Yves Citton (nei due saggi a lui dovuti, Cette bêtise qui nous gou- [paola perazzolo]

sf177.indb 594 19/12/15 01.04 Ottocento 595

Chiara Gambacorti, Sade: une esthétique de la du- Il metodo applicato è ineccepibile: procedere an- plicité. Autour des romans historiques sadiens, Paris, zitutto a un’analisi testuale minuziosa, che sola può Classiques Garnier, 2014 («L’Europe des Lumières», permettere di cogliere i meccanismi della scrittura sa- 30), pp. 504. diana e mettere in luce i diversi procedimenti testuali (strategie narrative, artifici di stile, ecc.) «qui ébranlent Prendendo spunto dal suggerimento-invito pubbli- sourdement l’apparente orthodoxie morale et religieu- cato fa Michel Delon nella «Préface» al primo volume se des ouvrages étudiés» (p. 23). Procedere poi a una delle Œuvres di Sade, di suddividere la produzione sa- contestualizzazione storico-letteraria delle opere pre- diana in testi essoterici o esoterici, secondo il loro gra- se in esame per stabilire, da un lato, l’originalità del do di decenza o di pornografia, l’autrice mostra come progetto estetico e romanzesco di Sade rispetto alla ri- il versante sovversivo del Marchese si celi in realtà nei flessione estetica e alla produzione romanzesca dell’e- suoi testi più anodini, a partire dal loro funzionamento poca, dall’altro l’originalità e le implicazioni etiche ed interno: rispetto o violazione del patto di lettura. Sotto estetiche della scrittura sadiana della Storia, rispetto al- il discorso moralizzatore del narratore/autore, è pos- le fonti storiche e letterarie da cui lo scrittore prende sibile reperire un discorso antitetico che ne sovverte ispirazione. i valori. «Ce double discours axiologique», sostiene Lo studio si articola in tre parti, ognuna delle quali Chiara Gambacorti, definisce un’estetica della dupli- è dedicata a un romanzo (nel presunto ordine crono- cità (p.18) che ci viene presentata come una grande in- logico di redazione) ed è composta di tre capitoli, pre- venzione sadiana. Peccato che l’autrice non conosca i ceduti da una prefazione e seguiti da una conclusione. testi secenteschi che l’hanno teorizzata, in particolare il Né i capitoli, né le introduzioni e le conclusioni che trattato Della dissimulazione onesta (1641) di Torquato li accompagnano sono strutturati allo stesso modo e Accetto, dove addirittura il messaggio dello scrittore si riguardano le stesse problematiche. Risulta pregevole nasconde nei silenzi, nelle cesure e nelle cicatrici che il dialogo incessante che l’autrice stabilisce tra i tre ro- si è imposto! manzi storici e le altre opere sadiane. Va però riconosciuto a Chiara Gambacorti il merito Un’osservazione può tuttavia essere fatta a Chiara di aver preso in esame i tre romanzi sadiani (La Mar- Gambacorti: quando si pubblica una tesi di dottorato quise de Gange, Adélaïde de Brunswick, Isabelle de Ba- (sostenuta nel 2012 dalla candidata) presso una casa vière) che la critica aveva sino ad ora trascurati. Tutti editrice prestigiosa come i Classiques Garnier, è op- e tre sono stati scritti a Charenton, negli ultimi anni di portuno dichiararlo e magari evitare quelle ripetizioni vita del marchese (molto probabilmente tra il 1807 e e quei costrutti accademici che, tipici e quasi necessari il 1813), a testimonianza della sua attività letteraria in in lavori di quel genere, rischiano, in un’opera destina- quel periodo; tutti e tre sono romanzi storici che rive- ta ad un pubblico più vasto, di appesantire inutilmente lano un rapporto ambiguo e complesso con la Storia e la lettura di un’opera che avrebbe invece meritato e la scrittura della Storia. Costituiscono, quindi, un cor- tratto vantaggio da una redazione più snella e lineare. pus omogeneo e interessante per l’analisi dell’estetica della duplicità. [marisa ferrarini]

Ottocento a) dal 1800 al 1850 a cura di Lise Sabourin e Valentina Ponzetto

Roxane Martin, L’Émergence de la notion de mise et ce qui relève de la réception par le spectateur ou la en scène dans le paysage théâtral français (1789-1914), critique. Paris, Classiques Garnier, 2013, pp. 257. L’ouvrage se divise en quatre parties qui suivent les grandes évolutions de l’histoire du théâtre: de la Révo- Pourquoi et comment la mise en scène s’est-elle dé- lution au décret de 1807 qui rétablit les privilèges dra- e veloppée au cours du xix siècle jusqu’à aujourd’hui, matiques; de 1807 à 1829 où la fonction de metteur en où elle a une position primordiale? Roxane Martin scène prend son essor grâce au mélodrame; de 1830 à s’attache à «l’émergence» d’une «notion», c’est-à-dire 1864, extension du drame romantique; enfin de la fin à un processus lent qui part d’une pratique, la mise des privilèges dramatiques, en 1864, à 1914. en scène, pour aboutir à la reconnaissance d’un métier, Le premier chapitre rappelle que la suppression dans une période et un espace délimités: dans «le pay- des privilèges dramatiques et la reconnaissance du sage théâtral français» entre 1789 et 1914, depuis la droit d’auteur en 1791 entraînent la prolifération des représentation de Charles IX de Marie-Joseph Chénier théâtres et l’élargissement à un public populaire du jusqu’à la fin de la direction d’Antoine à l’Odéon. répertoire classique. Pièces de circonstances ou chefs- Le «paysage théâtral français», expression qui d’œuvre du passé, il convient qu’ils deviennent immé- couvre Paris et la province, permet d’étudier, outre le diatement accessibles au public, grâce à la convergence texte dramatique, tout ce qui concourt à produire un de tous les éléments scéniques: le texte, parfois récrit spectacle: les conditions physiques de la représenta- pour lui donner «un accent prophétique», devient une tion, l’architecture du théâtre, la chorégraphie, les dé- sorte de matériau scénique parmi d’autres. Le désir de cors, la musique, l’organisation des troupes (directeurs propagation des idées révolutionnaires au moyen des et comédiens), le rôle joué par les autorités politiques, fêtes, qui associent le spectateur autour des «éléments

sf177.indb 595 19/12/15 01.04 596 Rassegna bibliografica

scéniques», crée ce que Roxane Martin désigne par la tragédie ou la comédie, et surtout au sujet de la mise «un langage scénique innovant». La Montagne, puis le en scène des chefs-d’œuvre du répertoire classique. Directoire, suivirent la même politique culturelle: «fa- Le quatrième chapitre, «Le matériel et l’immatériel. çonner l’esprit public», exercer une stricte surveillance 1865-1914», examine les changements importants qui sur les théâtres, lieux de rassemblement populaire. La découlent de la liberté accordée aux théâtres. L’aboli- reprise par les censeurs de l’autorité sur les spectacles tion des privilèges dramatiques accroît la concurrence favorise l’amplification des didascalies et le développe- entre les théâtres. Soucieux de rentabilité, les direc- ment de la mise en scène qui doit exprimer l’interpré- teurs cherchent le succès en engageant des acteurs cé- tation: c’est sous le Directoire que se banalise l’emploi lèbres et en donnant davantage de responsabilités au du mot «mise en scène». metteur en scène dont le «métier» se met en place: il L’excellent deuxième chapitre montre comment le doit à lui seul élaborer le spectacle, diriger les acteurs mélodrame, dont l’apogée se situe sous l’Empire et les et produire le travail d’interprétation. Mais il échoue premières années de la Restauration, a joué un rôle dé- à la fin du siècle à se faire reconnaître juridiquement cisif dans la notion de la mise en scène comme créateur comme artiste et créateur. Contre les goûts du public du spectacle autant et même parfois plus que le texte. qui le portent vers les spectacles à la mise en scène coû- Le décret de 1807, qui revient aux formes de l’Ancien teuse, certains appellent à une réforme théâtrale afin Régime, marque un recul mais n’annule pas les acquis de maintenir un théâtre «d’art», un théâtre populaire, de la Révolution. Les réformes subsistent au sein du en opposition avec un théâtre mercantile. L’ambition mélodrame, genre nouveau, qui combine dans une d’Antoine au Théâtre Libre est d’élargir le public et structure codifiée musique, texte, pantomime, effets de s’affranchir des contraintes économiques, de la cen- spéciaux, alternance de mouvement et d’immobilité, sure et de la Société des auteurs et compositeurs dra- pour produire un spectacle «à fonction cathartique»: matiques. L’esthétique de la scène qu’il expose dans sa «le mélodrame transmue un monde injuste en une so- célèbre Causerie de 1903 sera introduite ensuite sur ciété fondée sur le triomphe de la vertu» (p. 64). Le les théâtres subventionnés. C’est dans le répertoire public préfère aux «grands genres» des scènes offi- classique qu’Antoine a apporté, une fois directeur de cielles, les genres secondaires du vaudeville et du mé- l’Odéon, de véritables réformes: il s’agit de «boule- lodrame. Dans cette deuxième partie, R. Martin, qui verser le spectateur afin de l’engager à réfléchir autre- dirige l’édition critique des Mélodrames de Pixeré- ment le monde contemporain» (p. 222). D’Antoine à court, démontre l’influence capitale du mélodrame, et Vilar, le problème de la mise en scène est crucial pour singulièrement celle de Pixerécourt, sur le changement le répertoire classique: comment le jouer pour en faire du rôle du metteur en scène: il exigea des théâtres de jaillir le sens caché ou ignoré? Le développement du e province que les pièces fussent montées selon les in- rôle du metteur en scène au cours du xix siècle, puis dications de la brochure publiée, ce qui les amena à la constitution de la mise en scène comme art indépen- engager un directeur de la scène. L’évolution du mélo- dant conduisent à une réflexion plus globale sur les en- drame vers le drame historique introduit un souci de jeux politiques et sociaux du théâtre. À la définition réalisme favorisé par des innovations techniques dans traditionnelle de la mise en scène comme «organisation la construction des théâtres (éclairage au gaz, profon- matérielle de la représentation», R. Martin en substitue deur de scène accrue, éclairage latéral, technique du une nouvelle: «la mise en scène est un concept inven- panorama et du diorama). Ces innovations qui font du té de toute pièce pour réfléchir la relation entre une peintre-décorateur l’élément central de la représenta- œuvre, un public et l’image qu’il se fait de son identité tion, l’influence du jeu réaliste des comédiens anglais culturelle» (p. 224). qui interprètent Shakespeare, apportent «un renouvel- L’ouvrage de Roxane Martin apporte par son éten- lement dans la posture, la mimique, les déplacements due, la variété des sources, son érudition, un regard e et le maquillage de l’acteur» (p. 86). À partir de 1825, nouveau sur l’histoire du théâtre au xix siècle, étudié à le baron Taylor introduira au Théâtre-Français l’expé- partir du spectaculaire: que veut-on montrer au spec- rience acquise dans le mélodrame, et toutes les scènes tateur? En prenant le parti de considérer que le spec- officielles auront un directeur de la scène à la fin de la tacle qui lui est proposé est le fruit d’un ensemble qui Restauration. englobe un espace, des techniques et des praticiens de Cette rupture esthétique ouvre la voie au théâtre l’illusion, des musiciens, des danseurs, des acteurs, un romantique, objet du troisième chapitre: «La mise en metteur en scène, elle montre que le texte d’une pièce scène ou le brouillage des catégories génériques (1830- de théâtre n’en est qu’un élément, pas toujours le prin- 1864)». R. Martin récuse la périodisation tradition- cipal, et que, loin d’être fixe, il est sujet à reprises, réin- nelle qui clôt l’histoire du drame romantique sur Les terprétations, renouvellement. Elle en vient alors à en- Burgraves en 1843. Elle prolonge l’étude de la mise en visager le spectacle comme formé d’un triangle: auteur, scène romantique jusqu’en 1864 quand l’abolition dé- éléments scéniques, spectateur. À partir de ce triangle, finitive des privilèges dramatiques rompt la distinction s’élabore une histoire qui place le metteur en scène au entre les scènes officielles et les théâtres du boulevard. centre: c’est lui qui révèle le sens, c’est lui qui établit la Le théâtre romantique semble aussi difficile à définir communion entre la scène et le spectateur. Ce rôle de que le romantisme lui-même des Lettres de Dupuis et créateur et de constitution d’un «démos régi par une Cotonet. R. Martin estime que c’est la mise en scène qui identité culturelle commune» (p. 226) lui semble mis assure l’unité esthétique. Le drame romantique, social en question aujourd’hui par la multiplicité des réali- ou historique, s’empare des codes scéniques du mélo- sateurs d’une œuvre dramatique, la circulation mon- drame tout en les utilisant à ses propres fins, mélange diale des œuvres sur internet, le rôle nouveau donné des genres, mélange entre les théâtres officiels et ceux au «consommateur/lecteur/spectateur», chargé à son du boulevard, mélange des publics. La dramaturgie est tour de donner sens et unité, là où il n’y a que dispa- chargée de manifester la dimension sociale et politique rate et informe. Le livre s’achève donc sur cette ques- du théâtre. Mais la critique se trouve divisée: si elle ad- tion paradoxale: la mise en scène est-elle en train de met que les genres visuels comme le ballet, la féerie, disparaître? En reprenant des discussions récentes, le cirque ou la pantomime exigent une mise en scène l’A. ouvre alors des perspectives qui, faute d’exemples, spectaculaire, en revanche elle la blâme pour le drame, laissent le lecteur en proie à ses questions.

sf177.indb 596 19/12/15 01.04 Ottocento 597

Cette étude comprend un grand nombre de notes 85). Dans la fiction du cénacle (Balzac, les Goncourt, érudites, références, exemples, biographies, une Zola) se retrouvent les mêmes éléments et les mêmes bibliographie copieuse et un index des noms qui procédés référentiels, au moyen des clés, et en même rendent aisée une recherche par le lecteur. Le style et temps se mettent en place les éléments d’une nouvelle la mise en pages sont généralement clairs. Il est d’au- légende. Denis Saint-Amand a choisi une autre mise e tant plus à regretter quelques coquilles et de surpre- en scène du milieu littéraire français du xix siècle qui nantes négligences d’expression («générer» p. 10 et fait basculer la réalité du côté de la fiction, sous la p. 139, «réformes initiées» pp. 53, 86, et 210, «fonc- forme de micro-récits, dans la lignée de La Lorgnette tions… renseignées» p. 121, «actées», p. 122). Néan- de Monselet (1857) (Figurations et médiogrammes. Les moins, cet ouvrage demeurera indispensable à tous les micro-fictions du “Petit Bottin des Lettres et des Arts”, historiens du théâtre comme à ceux qui s’interrogent pp. 86-97). Dans ses notices fictionnelles, cet inven- sur son avenir. taire satirique se livre à une désacralisation de l’écri- [mariette delamaire] vain et de l’artiste dont la portée n’est efficace que pour les connaisseurs du champ littéraire fin de siècle. Rachilde serait-elle la reine du genre? à coup sûr, ré- Aa. Vv., Romans à clés. Les ambivalences du réel, sous pond Michael R. Finn dans Plaisir d’offrir, joie de rece- la direction d’Anthony Glinoer et de Michel Lacroix, voir. Le roman à clef décadent et Rachilde (pp. 98-112), Presses Universitaires de Liège, 2014, pp. 203. car, entre 1880 et 1890, elle apparaît comme person- nage dans sept romans, qui ne sont pas tous des por- En présentant ce recueil, Anthony Glinoer et Mi- traits à charge, et même dans un pamphlet venimeux; chel Lacroix rappellent que, si le corpus des fictions quant à ses œuvres, elles fourmillent de personnages à clés est vaste, il est peu étudié, du moins pour la facilement reconnaissables (Catulle Mendès, Maurice période postérieure à la Révolution française. Depuis Barrès, etc.) Du roman à clés on passe à cette «espèce le répertoire historique de Drujon (1888), l’étude de de roman à clés» que pourrait être celui de Proust, ce genre littéraire a été délaissée, sans doute à cause du moins accessoirement, voire accidentellement dit d’une production souvent médiocre. Néanmoins, de- Elisheva Rosen (La pratique des clés au prisme de la puis une décennie, on note un intérêt nouveau (voir, “Recherche”, pp. 113-130). En dépit de Proust dé- par exemple, de Sean Latham, The Art of Scandal. Mo- clarant que dans son livre «il n’y a pas un seul per- dernism, Libel Law, and the Roman à Clef, 2003, dont sonnage “à clefs”», bien des lecteurs ont relevé les on lira l’introduction aux pp. 21-42), stimulé par la marques d’une écriture cryptique et le jeu des iden- mode de la bio-fiction, forme dérangeante et parfois tifications a commencé dès la parution de l’œuvre. honnie car elle s’apparente à la recherche d’un suc- Plus que le goût des clés, c’est le processus de réfé- cès de scandale, comme on l’a vu lors de récents pro- renciation et ses dysfonctionnements qui caractérisent cès. Le roman à clés suppose un lectorat capable de la pratique biaisée de Proust, comme le montrent ces reconnaître les individus cachés derrière les noms de exemples de codage: Morel réglant ses comptes avec la fiction; mais s’il arrive que le lecteur soit aveugle M. de Charlus à coups de «petites chroniques trans- ou peu au fait de l’actualité, les chroniqueurs, et pas parentes», le duc de Guermantes redoutant que des seulement ceux de la presse littéraire, ont tôt fait de écrivains ne mettent sa femme dans leurs ouvrages, ou, l’informer. Sous l’Ancien Régime, les romans à clefs subtile provocation, deux occurrences bien connues: comportaient une clef imprimée; de nos jours, la l’une concernant le personnage de Charles Swann et presse et la télévision commentent et décryptent à son modèle présumé Charles Haas, l’autre, la plus cé- l’attention des ignorants qui n’ont pas le bonheur de lèbre, à propos des Larivière, les parents millionnaires faire partie du public initié. On se reportera à l’en- de Françoise, personnes réelles dont le narrateur se quête menée par Mathilde Bombart pour la période porte garant. Signalons, parmi les autres contributions e 2002-2012 (Romans à clés: une pratique illégitime au concernant le xx siècle, et parce qu’elle confirme en filtre de la critique littéraire des journaux, pp. 43-65). quelque sorte la «vanité des romans à clefs» (P. Assou- Pour certains, un des enjeux de cette pratique, qui line) et leur mode de lecture réducteur, celle d’Anne n’est d’ailleurs peut-être pas le plus décisif, c’est sa Strasser (“Les Mandarins”, les clés pour le dire, référentialité littéraire; pour d’autres, négliger l’effet pp. 131-144): Beauvoir met en scène la vie littéraire des clés entraînerait un appauvrissement de la lecture avec ses écrivains fictifs qu’on a voulu confronter à puisqu’on se priverait d’une forme de réflexivité. Quel des acteurs de l’histoire littéraire, dans un récit qui est statut accorder à la notion de roman à clés? Les études plus un roman autobiographique qu’un roman à clefs. rassemblées privilégient quelques-unes de ses moda- Il est donc nécessaire de dépasser le simpliste examen lités, particulièrement les fictions de la vie littéraire. du cryptage pour apprécier toutes les postulations des Bien que celle de Michel Lacroix (Imaginaire, légen- romans à clés. daire, fictif: romans à clés et fiction de la vie littéraire, [michel arrous] e pp. 11-20), envisage deux cas du xx siècle (Victor-Lé- vy Beaulieu dans L’Énigme du retour (2009), de Dany Laferrière, et Cocteau dans Les Faux-monnayeurs), Nathalie , Voyages et fantasmes de voyages elle intéressera les dix-neuviémistes car elle examine à l’époque romantique, Toulouse, Presses universitaires la réécriture de légendes littéraires autour des figures du Mirail, 2014, pp. 307. d’écrivains légendaires ou imaginaires, réécriture qui suppose un lecteur apte au décryptage et capable de À en croire Roger de Beauvoir, il y aurait le «touriste repérer les connotations et les décalages. À partir de littéraire» et même le «touriste qui n’a pas vu», sans la notion d’illusio littéraire, dans le cas de la fiction- parler d’autres avatars du type «touriste», d’où la sus- nalisation du motif cénaculaire, Anthony Glinoer et picion qu’on peut éprouver à l’égard du récit de voyage Vincent Laisney reviennent sur les raisons du dis- car l’écrivain qui voyage est d’abord un écrivain avant crédit qui a frappé le roman à clés et sur sa double d’être un voyageur. Nathalie Solomon a raison de rap- ambivalence, à la fois fictionnelle et fonctionnelle (Les peler cette évidence illustrée par les écrivains roman- illusions perdues, ou les romans cénaculaires, pp. 67- tiques. À partir d’exemples choisis dans des textes via-

sf177.indb 597 19/12/15 01.04 598 Rassegna bibliografica

tiques fort dissemblables (Chateaubriand, Lamartine, lence. Face au pays réel, c’est le désappointement pour Custine, Stendhal, Hugo, Dumas, Nerval et Flaubert), certains, la «désillusion complète» (Flaubert), ce qui ne sont esquissées les règles qui font du récit de voyage, limite en rien le souci de dire la vérité du pays, quitte à considéré comme un objet narratif, une forme ou un la révéler sur le mode de l’ironie, jusqu’au trait grinçant modèle littéraire, ce qui implique l’étude du rapport à de Flaubert. La partie fictionnelle des récits fait l’ob- la réalité (la problématique réalité référentielle). C’est jet des trois derniers chapitres («Récits imaginaires», une réalité qui souvent n’existe qu’à partir d’autres re- pp. 241-293). Dans les récits de voyage, la fiction, as- présentations, littéraires, personnelles ou culturelles, similée à l’obsession romanesque, est-elle centrale ou et qui est réorganisée par la fiction. Hypothèse de dé- anecdotique? À lire Nerval ou Gautier, et tout autant part: le voyage littéraire serait «avant tout imaginaire», Dumas, il est évident que «le narrateur n’est pas autre quoique «issu d’une expérience vécue». D’où la néces- chose qu’un romancier»; sans doute est-ce vrai aussi, sité de s’interroger sur la réalité du voyage. avec des modalités différentes dont il aurait fallu tenir Dans la première partie («Sur le genre», pp. 25- compte, pour Stendhal qui, tout en peignant les Fran- 122), l’auteur s’intéresse aux variations des marques çais du «King Philippe», se livre à ce qu’on pourrait génériques et montre comment le narrateur, qui manie appeler des digressions fictionnelles (récits enchâssés, l’ironie, voire l’autodérision, s’emploie à détourner l’at- récits amorcés ou esquissés, allusions à des récits sup- tention du lecteur. Tous les narrateurs jouent avec les posés connus, etc.). Cette logique digressive fonctionne codes du genre – d’ailleurs insuffisamment précisés –, à plein dans ses récits de voyage, mais on la retrouve les uns feignant d’adhérer aux modèles ou restant dans aussi bien chez Nerval, à un autre degré: le Voyage en l’indécision formelle entre fiction et autobiographie Orient établit avec la fiction un rapport si déterminant quand, à partir de leurs carnets de notes, ils mettent et si complexe que s’abolit la frontière entre la relation en ordre le récit dans une relation rétrospective (le ré- véridique et la fiction. Dans ce récit de voyage, le narra- cit de voyage recomposé); les autres procédant à un teur compte plus que les lieux visités, aussi N. Solomon «montage» selon une logique narrative variable qu’on peut-elle dire, à propos du rapport de Nerval à la fic- peut suivre dans les «dérives» nervaliennes et la ten- tion, que «le monde est de la littérature». dance systématique à la digression chez Stendhal. On Au moment de conclure, et après avoir proposé des remarquera dans la deuxième partie («Composition»), analyses convaincantes, N. Solomon craint que son le chapitre VI: «Ordre ou désordre». N. Solomon pro- lecteur n’ait pas les idées beaucoup plus claires sur pose d’appréhender cette logique narrative à partir des ce qu’il advient de la réalité sous la plume des voya- affirmations du métadiscours qui visent et parviennent geurs romantiques. Qu’elle se rassure. Sans doute est- à intégrer «sans l’effacer, l’hétérogénéité du récit à un il difficile de démêler chez eux le vrai du faux, mais ensemble censé être cohérent» (p. 138). Mais cette re- dans l’écriture romantique du voyage la recomposition vendication de cohérence est plus virtuelle que réelle, compte plus que la représentation puisqu’elle permet notamment chez Gautier et Nerval, et même chez La- de voir le monde dans toutes ses potentialités. Si le fan- martine dont la maîtrise affichée n’annule pas «une sen- tasme l’emporte, c’est heureux! sation de spontanéité, voire d’improvisation» (p. 146). [michel arrous] Dans la troisième partie («Rêver le pays», pp. 161-200), les chapitres VII, «Hallucinations», et VIII, «Malgré le réel», abordent le vif du sujet, le pouvoir du fantasme. Aa. Vv., L’Invention de la Sibérie par les voyageurs e e Même s’il arrive qu’il corresponde à ce que le voyageur et écrivains français (xviii -xix siècles), sous la direc- a sous les yeux (à propos des femmes sur les terrasses tion de Sarga Moussa et Alexandre Stroev, Paris, Ins- de Malte, Lamartine déclare: «David vit ainsi Bethsa- titut d’études slaves, 2014, pp. 231. bée»; dans les Cyclades, Nerval constate la mort de Pan; chez Hugo, devant la Mäuseturm, le fantasme se Même s’ils ne sont pas tous allés loin au-delà de l’Ou- confond avec les paysage), le pouvoir du fantasme est ral, les voyageurs français se sont intéressés à la Sibérie e tel que le voyageur confond le lieu tangible et le lieu dès le xvii siècle: la première description française de la e rêvé, le passé et le présent, ou plutôt perçoit le pas- Sibérie date de 1687; mais c’est au xviii , rappellent Sar- sé dans le présent. Les fantasmes se nourrissant de la ga Moussa et Alexandre Stroev dans leur introduction réalité, la fiction l’emporte. Quant à l’authenticité du (pp. 9-12), que l’espace sibérien est devenu une contrée voyage (chapitres IX et X, «Voyage et réalité», «In- «presque familière» aux lecteurs. Certains voyageurs terprétation», pp. 203-238), ce n’est pas une question échouèrent, tel ce capitaine d’origine suédoise qui par- «sans doute oiseuse» et N. Solomon a raison de ne pas ticipa à l’expédition en Mongolie de l’ambassadeur Go- s’en détourner. Ce qui importe, c’est le traitement de lovkine en 1805-1806, à laquelle se joignit Jean Potocki, l’expérience, réelle ou imaginée. Un voyageur comme et dont Michel Cadot a étudié le journal (Une expédi- Gautier, mais c’est vrai aussi de Stendhal, subvertit les tion manquée vers la Chine: le voyage d’Alexander Ama- codes du genre, si bien qu’il arrive que le voyage res- tus Thesleff de Saint-Pétersbourg à Ourga, pp. 52-59). semble plus à une aventure qu’à un exposé fiable: de Avec Jules Legras et la polémique sur la colonisation à la e témoin, le voyageur devient héros. Dans tous les cas fin duxix siècle (pp. 60-76), Olga Danilova permet aux de figure, c’est au lecteur de distinguer les plans de la dix-neuviémistes non slavisants de découvrir l’œuvre réalité, en tenant compte des interventions de l’auteur, d’un rigoureux observateur qui connaissait déjà très si singulières soient-elles. L’exemple des Promenades bien la Russie d’Europe. Grâce à Legras (1866-1939), dans Rome est convaincant: l’intention pédagogique la Sibérie cessa d’être une terra incognita pour les Fran- de Stendhal qui se veut le plus exact possible est évi- çais. Il la visita trois fois à l’époque du rapprochement dente, mais la singularité de son regard est telle que «la entre la Russie et la France, la première pour étudier page la plus descriptive devient absolument originale ses peuples, au moment où la construction du Trans- et personnelle» (p. 220). Dans d’autres cas, le narra- sibérien déclenchait un colossal mouvement d’émigra- teur s’octroie une marge de liberté par rapport au réel, tion qui devait perturber ou dénaturer les populations par exemple par rapport à l’actualité immédiate ou à autochtones. Il donna des conférences sur l’Asie russe la modernité devant laquelle Chateaubriand gémit (les septentrionale, publia en 1899 son journal de voyage Turcs chez Périclès) et que Gautier dénonce avec viru- romancé (En Sibérie), et traduisit les souvenirs de

sf177.indb 598 19/12/15 01.04 Ottocento 599

P. Iakoubovitch sur le bagne sibérien (1901). La Sibé- fortune entre 1830 et 1900 car on monnaya son histoire rie fut la terre de la relégation, d’abord pour les Russes sous diverses formes, y compris un drame catholique condamnés à la déportation, puis pour les Français qui en 1894. Les bibliographies chrétiennes recommandent s’étaient enrôlés au service des Confédérés polonais en l’aventure de Prascovie comme un modèle pédago- 1769, et bien sûr pour les prisonniers lors de la débâcle gique; quant à l’École de la République, elle n’est pas en de 1812 qu’évoque Marie-Pierre Rey dans La Sibérie des reste! Marie-Laure Aurenche (La Sibérie au temps des soldats napoléoniens en exil (pp. 90-99). Quelques-uns voyageuses du “Tour du Monde”, pp. 188-207), signale des milliers de captifs qui échappèrent aux exécutions que Le Tour du Monde, recueil lancé par L. Hachette sommaires ont raconté leurs souffrances et leur solitude et Ed. Charton, fera découvrir la Sibérie à un large pu- parmi les populations «tartares» et «mahométanes». Ils blic dans les années 1860-1914. Dans la masse de ces ont aussi décrit une terre moins inhospitalière qu’il n’y publications, parfois de seconde main et illustrées, sont paraît. Les plus chanceux furent reçus dans des familles distingués les récits de la nationaliste polonaise Ewa Fe- de l’élite francophone et francophile, entre autres le gre- linska, déportée de 1839 à 1844 en Sibérie occidentale, nadier Beulay qui dépeint les mœurs des élites russes puis sur la Volga (Revelation of Siberia, by a banished à Oufa et relève la corruption de la haute administra- lady, Wilno, 1853, Londres, 1854), de la violoncelliste tion. On est bien loin de l’image contrastée, associant Lise Barbier-Cristiani qui raconta son périple en Sibérie barbarie primitive, vision idyllique ou même paradis orientale dans des lettres à sa famille entre 1849 et 1852, libertin, de La Sibérie utopique des Lumières présentée de l’épouse d’un diplomate français, Mme de Bourbou- par Alexandre Stroev (pp. 111-124). Les récits d’une lon, qui parcourut les mêmes contrées, et de Marie de e vingtaine de voyageurs, entre la fin du xviii et le début Ujfalvy-Bourdon, Française mariée à un ethnologue e du xx , permettent à Alain Guyot de faire le départ hongrois qui voyagea dans la Sibérie occidentale en entre réalité et fantasme, afin d’isoler quelques éléments 1879. Sont analysés les regards qu’elles portent sur le constitutifs d’une typologie du paysage sibérien (Le mode de vie, les croyances des populations sibériennes paysage sibérien: paysage du Nord?, pp. 138-152). Tous que la civilisation n’a pas encore atteintes, par exemple s’accordent sur la démesure d’un espace quasiment les Ostiaks et les Bachkirs de l’Oural, les Bouriates et les inhabité, notamment les steppes herbeuses ou arides Khalkhas de Mongolie, les tribus nomades de la Lena aux confins de l’Asie centrale, sur le caractère extraor- et les peuples du Kamchatka. Mais, curieusement, chez dinaire d’une nature soumise à de violents contrastes ces voyageuses qui parcoururent la Sibérie parfois au saisonniers. Une fois l’Oural franchi, un autre monde péril de leur vie, sans parler pour certaines des affres de commence. Il faudra du temps pour que soit reconnue l’exil, la perception des altérités sibériennes n’a rien de la valeur esthétique des paysages sibériens qui exercent spécifiquement féminin. sur les voyageurs «le même type de fascination que les Le recueil, enrichi d’une cinquantaine d’illustra- contrées arctiques». tions, se clôt sur la traversée de la Russie, de Moscou e Tout au long du xix siècle se construit l’image litté- à Irkoutsk, qu’accomplit comme courrier du tsar le fils raire de la Sibérie. Dans La Sibérie, monde possible de d’un chasseur sibérien chargé de prévenir le grand-duc e la fiction française auxix siècle (pp. 155-167), Charlotte de la trahison fomentée par le colonel Ogareff, lequel Krauss aborde l’invention d’une «Sibérie française» veut livrer la ville de Sibérie orientale aux Tartares. C’est ou «à la française», notamment avec Gustave Doré donc Michel Strogoff face aux “hordes tartares” (pp. 208- qui exploite tous les clichés sur la Russie. La Sibérie 216) que Sarga Moussa évoque, en mettant en évidence fascine et devient un objet de fiction avec Dumas (Le chez Jules Verne une idéologie «qu’il faut bien appeler Maître d’armes, 1840), Scribe qui exploite le filon (La raciste». Le romancier ne tint aucun compte des obser- Czarine, 1855), et bien sûr Jules Verne (1876). Autre vations qu’on lui fit, pas plus de celles du prince Or- aspect du récit de voyage avec La rencontre en Yakou- loff, ambassadeur du tsar à Paris, que de celles de Tour- tie d’un jeune scientifique allemand et d’un poète russe: gueniev qui jugea sur épreuves le livre invraisemblable genèse d’une “Lettre” romantique (pp. 168-178), par mais amusant: «L’invraisemblable est dans l’invasion Anne-Victoire Charrin. Dans sa longue lettre rédigée de la Sibérie par le khan de Boukhara – de nos jours; en français, le poète pétersbourgeois Alexandre Bes- c’est comme si je voulais représenter la France enva- toujev (1797-1837), décabriste assigné en résidence hie par la Hollande». Domine dans ce roman idéologi- à Yakoutsk, s’adresse à G.A. Ermann, jeune scien- quement orienté une imagerie dépréciative que Verne tifique membre de la grande expédition en Sibérie exploite en réactivant la peur du péril asiatique. Force qu’Alexandre de Humboldt entreprit pour le compte est de constater que la sauvagerie tartare a séduit les de Nicolas Ier en 1828-1830. Bestoujev avait étudié les premiers lecteurs, même si demeure la sombre image mœurs sibériennes, notamment la religion des célèbres du «pays d’où l’on ne revient plus» (Un Français en Si- chamanes du Kamchatka, mais aussi la nature sauvage bérie, roman populaire d’Eugène Müller, 1881). Il est et «antéhistorique» du pays. Sarah Al-Matary donne dommage qu’on n’ait pas tiré parti des nombreux ar- un autre exemple de la vision romantique des cultures ticles publiés en revues après 1830; notons cependant extra-européennes avec la fameuse histoire sibérienne que sont signalées l’étude d’Alexandre de Humboldt qui inspira à Pouchkine La Fille du capitaine (Une Si- sur les Bouriates («Revue des deux mondes», 1832) et e bérie à l’usage des familles: la fonction édifiante de la celle de Saint-René Taillandier sur «La Sibérie au xix figure de Prascovie Lopouloff en France (1806-1900), siècle» (ibid., 1855). pp. 179-187). Est retracé le cheminement de cette his- [michel arrous] toire, du roman, en fait une longue nouvelle, de Mme Cottin, Élisabeth ou les exilés de Sibérie (1806), d’où on tira vite un mélodrame à succès et, en 1853, un drame Lettres d’Odessa du duc de Richelieu (1803-1814), lyrique, à sa réécriture par Xavier de Maistre dans Les éditées par Elena Polevchtchikova et Dominique e Prisonniers du Caucase (1825). Sans doute aurait-il fallu Triaire, Ferney, Centre International d’Étude du xviii préciser que Mme Cottin a créé une Sibérie d’opéra, siècle, «Archives de l’Est», 2014, pp. 304. ce qui n’empêcha pas sa dernière œuvre de connaître encore de beaux succès de vente entre 1816-1820 et Rochechouart, Richelieu, Rastignac: on ignore sou- 1836-1840. La «jeune Sibérienne» eut une étonnante vent que ces noms de légende ont résonné au début

sf177.indb 599 19/12/15 01.04 600 Rassegna bibliografica

e du xix siècle bien loin de France, sur les bords de Pouchkine, qui fréquente à Odessa les restaurants et la mer Noire, dans une province que l’on appelait à les salons des colons français. cette époque la «Nouvelle Russie» et qui correspond Le lecteur de cet intéressant ouvrage aura malheu- à l’actuelle Crimée. Le héros de cette page méconnue reusement besoin d’être bilingue, dans la mesure où de l’influence française en Russie est Armand-Emma- de nombreux termes russes utilisés par Richelieu dans nuel, duc de Richelieu (1766-1822), dont le présent sa correspondance n’ont pas été transcrits ou traduits. ouvrage publie un choix de correspondance datant de On ne pourra par ailleurs pas s’empêcher de remar- l’époque où l’aristocrate russophile ayant servi sous les quer que, par une ironie amère de l’actualité, l’ouvrage ordres de Catherine II occupe les fonctions de gou- paru en 2014 avant l’annexion de la Crimée est déjà lui- verneur d’Odessa. Cette publication permet de retra- même un objet d’histoire, puisqu’il évoque la région cer le rôle décisif joué par les Français dans le déve- comme partie intégrante de l’Ukraine: de fait, en 2015, loppement de la cité: à l’arrivée de Richelieu, Odessa le terme «Nouvelle Russie» est réapparu, mais pour dé- n’était, de l’aveu même de ses habitants, comme Apol- signer un parti séparatiste de l’Est de l’Ukraine, et non lon Skalkovski, qu’une «misérable petite ville qui assu- l’époque heureuse de l’insouciante Odessa. rait à peine sa survie» (p. 8); or les efforts de Richelieu, relayés par une importante colonie française, contri- [victoire feuillebois] buent entre 1803 et 1814 à faire d’un petit port peuplé de modestes artisans le «terminus Sud» de l’Empire russe, pour reprendre la formule de Fernand Braudel Germaine de Staël, Œuvres complètes, série I, (p. 9). En témoignent ces vers de mirliton de L’Odes- Œuvres critiques, t. II, “De la Littérature” et autres es- siade d’Alphonse Chapelon, professeur au lycée Riche- sais littéraires, sous la direction de Stéphanie Genand, lieu de la ville (p. 61): «Oui, j’aime Odessa, morbleu!/ Paris, Honoré Champion, 2013, pp. 795. Et je conçois qu’on s’y plaise:/Odessa, par Richelieu,/ Est d’origine française!». De la Littérature, paru en 1801 comme chacun sait, La province que le tsar Alexandre Ier confie à Ri- refuse de fonder une poétique, vu sa conception libé- chelieu en 1803 est en effet presque une terre vierge: rale de la littérature, tout en ouvrant les voies à la nou- contrée récemment conquise sur l’Empire Ottoman, velle génération romantique. La pensée de Mme de elle ne dispose d’aucune administration et n’a guère de Staël relève d’une «esthétique éclatée du disparate» chance de rivaliser avec la ville toute proche de Kher- qui allie à l’esprit de dissidence l’ouverture des fron- son comme principal port de la mer Noire. Mais le tières et le refus des règles, y compris celles qu’elle monarque russe décide de valoriser ce territoire avec pourrait elle-même concevoir. Quant aux comptes l’aide de Richelieu: ce dernier fait venir d’Europe oc- rendus, préfaces, articles et traités rédigés de 1795 à cidentale de très nombreux colons qui participent au 1817, qu’y adjoint cette édition, ils ont souvent pour développement économique d’une ville ne disposant à mission de rétablir le contact avec ses lecteurs français, l’origine d’aucune infrastructure pour les accueillir et exilée qu’est l’animatrice du groupe d’opposition réuni manquant même du strict nécessaire – lorsqu’il prend à Coppet, et transforment la critique en un dialogue son poste, le gouverneur doit lui-même faire impor- d’auteurs. Bienveillante, accueillante et respectueuse ter en urgence vingt-cinq chaises, introuvables en ville des idées d’autrui, la châtelaine helvète pratique la (p. 25)! Lorsque Richelieu repart, la ville est en pleine «description animée des chefs-d’œuvre» sans courtisa- expansion, et si cosmopolite que les poteaux signalant nerie mais avec un esprit polémique sachant user de la les noms des rues sont en plusieurs langues (p. 59). Ri- rhétorique sans négliger la sensibilité. chelieu contribue également à instaurer un climat très Le volume commence par L’Essai sur les fictions de particulier à Odessa et à en faire une cité libérale: beau- 1795 (pp. 19-65), édité et préfacé par Stéphanie Ge- coup des colons ont fui des persécutions dans leur pays nand (pp. 21-37): Mme de Staël ne manque pas de et trouvent en Nouvelle Russie une réelle tolérance po- hardiesse, car, alors qu’elle n’a encore écrit que trois litique et religieuse auprès d’une joyeuse population nouvelles, elle ose se distinguer de la démarche critique faite de petits hobereaux occupés à prospérer et à jouir. alors dominante dans le traité de Marmontel comme La correspondance éditée par Elena Polevcht- au sein du cours de La Harpe. Elle croit plus à la puis- chikova et Dominique Triaire rend justice au talent sance de l’imagination qu’aux vertus de l’imitation et d’administration d’un Richelieu, à travers des lettres prône le charme par le naturel. Elle souligne aussi com- qui soulignent l’originalité de ses projets, marqués par bien les tensions historiques provoquées par la Terreur l’influence physiocrate, et son dévouement – la mé- ont perturbé le classement générique des fictions et moire locale a conservé la légende d’un Richelieu qui élargi la géographie des modèles, la littérature anglaise refuse d’abandonner la ville ravagée par une épidémie notamment ayant conféré à la vérité des caractères, à de peste, et de fait on le devine souvent atteint par les la force des contrastes, à l’énergie des situations, à la souffrances endurées par les colons et les premiers ha- mélancolie des paysages la valeur que leur reconnaîtra bitants. Elle contribue ainsi à entretenir l’image d’un la subjectivité romantique. grand serviteur de l’État, dont la statue trône encore De la Littérature considérée dans ses rapports avec les aujourd’hui en haut des fameux escaliers d’Odessa. institutions sociales (pp. 67-388) suit, établi et préfacé Par ailleurs, les nombreuses illustrations et la très riche par Jean Godzink (pp. 69-100). Cet écrit, célèbre dès introduction dressent un tableau vivant de la vie dans sa publication, doit à L’Esprit des lois sa méthode phi- cette «perle de la mer Noire», qui à l’époque est une losophique héritée des Lumières; mais Mme de Staël perle de culture française: une forte communauté mar- conclut à la réciprocité des influences entre société seillaise prospère dans cette atmosphère méridionale et œuvres littéraires. Elle adopte bien sûr la question (p. 10, pp. 22-23), tandis que les jardins botaniques de la perfectibilité en art une conception progres- de la ville sont transformés en petit Versailles (p. 46). siste de l’histoire, mais se refuse à négliger le Moyen- Ce climat particulier constitue un moment important Âge qu’elle qualifie plutôt de «pas immense sur dix des échanges culturels franco-russes: Charles Nodier siècles», comparant d’ailleurs les barbaries de la Ré- lui-même songe à s’installer en «Tartarie» (p. 36) et on volution française à celles des invasions de la fin de retrouve à intervalles réguliers dans l’ouvrage le jeune l’empire romain: la marche en avant n’exclut pas les

sf177.indb 600 19/12/15 01.04 Ottocento 601

violents soubresauts, les pauses et l’alternance entre de Necker, de Mme de Staël et de ses enfants dans la expérience acquise et action innovatrice. Si tous deux lutte contre la traite des Noirs et précise que le sujet pratiquent l’étude des climats, des espaces, là où Mon- reste peu exploré, même si certains chercheurs en ont tesquieu cherchait une loi universelle établissant l’évo- souligné l’intérêt. S’appuyant sur les archives privées lution des types sociopolitiques, Mme de Staël préfère d’Auguste, Léonard Burnand (Abolir pour agir: l’en- dégager les rapports propres à une entité nationale à gagement antiesclavagiste d’Auguste de Staël, pp. 9-29) un moment précis de son histoire. Elle se heurtera aus- montre ensuite le rôle déterminant que joua le fils de si bien aux critiques de Fontanes, inférant de sa condi- Mme de Staël dans le mouvement abolitionniste fran- tion féminine une excès d’exaltation passionnée dans çais des années 1820: à la tête du Comité pour l’abo- l’analyse, qu’à celles de Roederer, déniant la réciprocité lition de la traite des Noirs, constitué au sein de la d’influences entre société et littérature, qu’il voit plutôt Société de la Morale chrétienne, Auguste s’inspire suivre mœurs et politiques, au contraire des sciences du modèle anglais pour mobiliser le gouvernement et seules perfectibles. Aujourd’hui on s’intéresse davan- l’opinion publique à son combat: pétitions, plaidoi- tage aux genres, aux auteurs par périodes, comme elle rie auprès du dauphin, exposition d’instruments de y invitait par sa méditation sur les conséquences de la contrainte rapportés d’une enquête menée à Nantes Révolution française. sur le trafic négrier illicite et publication des résultats Le reste du volume titré «Mélanges» (pp. 389- de cette enquête ont certainement contribué à la pro- 758), établi, annoté et présenté par Florence Lotte- mulgation de la loi du 25 avril 1827, qui induit un dur- rie, Christine Pouzoulet, Stéphanie Genand, Ma- cissement des sanctions à l’encontre des personnes re- rie-Claire Hoock-Demarle, Jean-Pierre Perchellet, connues coupables de commerce négrier, étape impor- Catriona Seth et Aurelio Principato, donne à lire les tante dans l’avancée d’un combat si cher au grand-père comptes rendus d’ouvrages effectués par Mme de et à la mère d’Auguste. C’est ensuite la figure de Ben- Staël (L’Éducation pratique de Maria Edgeworth et jamin Constant qui est mise à l’honneur: tout en pré- Des Signes et de l’art de penser de Degérando en 1800, cisant la spécificité politique de son implication contre Voyage sur la scène des six derniers livres de l’Énéide la traite, Frédéric Jaunin (pp. 31-57) analyse les réac- et Recherches sur la nature et les lois de l’imagination tions aux discours qu’il prononça devant l’assemblée de Bonstetten en 1804 et 1807, Comparaison entre la parlementaire entre juin 1821 et mars 1827 pour mieux Phèdre de Racine et d’Euripide de Schlegel et Histoire comprendre les raisons de l’insuccès de son combat au des républiques italiennes du Moyen Âge de Sismondi Palais Bourbon, avant avril 1827. Stéphanie Genand e en 1807, Tableau de littérature française pendant le xviii (Staël et l’Afrique: esthétique et politique de l’altérité, siècle de Barante en 1809, Le Repentir, poème d’Elzéar pp. 59-76) se penche quant à elle sur la complexité de de Sabran en 1817); puis ses préfaces à Lothaire et Mal- la question de l’esclavagisme chez Germaine de Staël, ler, roman traduit de l’allemand en 1807, aux Lettres et qui aborde le sujet à la fois dans des textes politiques, pensées du maréchal prince de Ligne en 1809, aux Mé- sa correspondance et trois œuvres de fiction. L’auteur moires sur la guerre des Français en Espagne d’Albert montre la portée symbolique de l’engagement de l’écri- Jean Michel Rocca en 1817; ses articles sur De l’Esprit vain, dans lequel s’inscrivent à la fois des valeurs fami- des traductions en 1816, les Réflexions sur l’injustice de liales et sa propre lutte contre toute forme d’asservisse- quelques jugements littéraires en 1817; enfin ses essais ment, notamment au sein du mariage. Rapprochant les sur les Philosophie et littérature allemande. Histoire de personnages d’esclaves féminines créés dans les nou- ma vie future de Jean-Paul Richter en 1803, Du Talent velles et les figures de Corinne ou Delphine, S. Génand d’être aimable en conversation en 1807 et Tableau histo- fait alors l’hypothèse d’une «identité inconsciemment rique de l’Institut pour les pauvres de Hambourg d’après africaine de G. de Staël» propre à éclairer sa concep- les rapports donnés par le baron de Voght en 1809; et tion des passions. Marcel Dorigny (pp. 77-92) aborde des notices biographiques sur Jean de Müller lors de enfin les théories de Sismondi qui, dans un contexte sa préface à la IVe partie de l’Histoire de la Confédéra- de remise en question du colonialisme, apporte des tion suisse en 1806, sur Aspasie, Camoëns et Cléopâtre arguments économiques à la lutte contre la traite des dans la Biographie universelle, ancienne et moderne de Noirs. Dans le sillage de la Société des Amis des Noirs, Michaud en 1812. il prône une Nouvelle colonisation dont la prise d’Al- Chronologie, bibliographie, index nominum ter- ger constitue, en France, la première étape: antiescla- minent ce panorama de la production critique vagiste, favorable à la circulation des marchandises et staëlienne qui a l’avantage de présenter ensemble son des sciences et à l’expansion des idées issues des Lu- écrit majeur, son premier essai et ses mises en œuvre mières, cette colonisation conçue comme une œuvre ponctuelles, corpus ainsi complet qui la montre au fil de civilisation devait s’étendre à l’Afrique tout entière. de son évolution. La deuxième partie de ce numéro porte sur l’ou- [lise sabourin] vrage De l’Allemagne, dont on célèbre le bicentenaire en 2014. Intitulé «De l’Allemagne (1814-2014). Une mémoire au présent», ce volet s’ouvre sur une rapide Aa. Vv., Madame de Staël et le Groupe de Coppet. Le étude de la réception de l’œuvre jusqu’à nos jours, par Groupe de Coppet face à l’esclavage; “De l’Allemagne” Marie-Claire Hoock-Dermale (pp. 95-103), puis Flo- (1814-2014). Une mémoire au présent, 2014, «Cahiers rence Lotterie (pp. 105-111), dans un texte au titre staëliens», n. 64, pp. 216. évocateur Jeter un pont sur l’abîme: (re)lectures alle- mandes de “De l’Allemagne”, offre une présentation Le numéro 64 des «Cahiers staëliens» présente deux synthétique des contributions d’auteurs allemands qui parties distinctes: la première rassemble les textes issus composent le dossier. Kurt Kloocke (pp. 113-132) d’une journée d’étude interdisciplinaire sur l’engage- présente deux importantes études que Villers consa- ment antiesclavagiste de Coppet, organisée au châ- cra en 1814 à De l’Allemagne: dans un compte rendu teau de Coppet le 8 septembre 2013 par les sociétés et l’introduction pour une édition de l’ouvrage chez le staëlienne, constantienne et sismondienne, à l’initia- libraire Brockhaus, l’écrivain reconnaît dans la pen- tive de l’Institut Benjamin Constant. La présentation sée de celle qui fut longtemps son amie ses propres de Léonard Burnand (pp. 7-8) rappelle l’implication théories énoncées en particulier dans sa Philosophie

sf177.indb 601 19/12/15 01.04 602 Rassegna bibliografica

de Kant. S’il estime qu’elle n’a pas parfaitement saisi Benjamin Constant, est la deuxième partie d’un article la philosophie et les mœurs allemandes, il partage sa dont la première partie parut dans le numéro précé- perception des divergences qui opposent Français et dent (n. 37, 2012) des «Annales Benjamin Constant». Allemands et la rejoint dans sa conception de la nation Le chapitre V, rédigé par Antonio Trampus (pp. 35- et des liens que celle-ci entretient avec la littérature, 62), présente le long compte rendu du Commentaire tout comme dans la conviction que la compréhension de Constant que Giovanni Valeri fit paraître dans la et l’accueil de la culture de l’autre favorisent le progrès revue italienne «Antologia» en 1824, et propose une des deux pays. Bien moins élogieuse est la recension traduction française de ce compte rendu, qui consti- de De l’Allemagne par Jean-Paul, qu’étudie Gérard tue la première tentative de discussion de la pensée R. Kaiser (pp. 133-145): pour Jean-Paul, un sentiment de l’écrivain en Italie. Le Chapitre VI, rédigé par Kurt de vanité nationale et de supériorité aristocratique em- Kloocke (pp. 62-78), présente un autre compte rendu, pêchent chez les Français et l’auteur de De l’Allemagne anonyme cette fois, paru dans la même revue en 1826, le développement d’une véritable empathie, seule apte et qui offre une subtile analyse de la première traduc- à transmettre la culture allemande de manière authen- tion italienne du texte de Constant. Kurt Kloocke pu- tique. En analysant l’échec de l’«amazone de l’esprit», blie le compte rendu italien, dont la lecture est facilitée Jean-Paul expose sa propre conception de la critique par un résumé succinct en français. Olivier Meuwly littéraire, qui repose sur la recherche d’une singula- (pp. 79-104) étudie ensuite avec clarté et précision les rité esthétique et l’«idée d’une rencontre passionnée nombreuses annotations que La Harpe porta sur son et sans violence avec ce qui est étranger en tant que exemplaire des Principes politiques de Constant, pour tel». L’article suivant nous permet encore de mieux montrer qu’elles révèlent la parenté d’esprit des deux comprendre les réticences qui accompagnèrent la ré- hommes et constituent une sorte de «fondement théo- ception de l’ouvrage en Allemagne: en confrontant la rique du libéralisme laharpien», qui s’affirmera surtout représentation que De l’Allemagne offre du caractère dans les années 1820. Le numéro se poursuit par un allemand à celle de Schlegel, Jochen Strobel (pp. 147- volet intitulé «inédits»: Nora Köhler (pp. 107-135) 163) montre comment Mme de Staël décrit les spécifi- publie un manuscrit acquis par la Bibliothèque can- cités d’une nation figée dans un présent déjà dépassé, tonale et universitaire de Lausanne en 2011; il s’agit tandis que le critique la conçoit dans une perspective d’une étude que le général Montesquiou consacra à historique et évolutive, et l’envisage essentiellement la première brochure politique de Constant, sous le dans les liens qu’elle entretient avec les autres pays titre «Analyse et critique de l’ouvrage de Benjamin d’Europe. Olaf Müller (pp. 165-186), dans un bel ar- Constant intitulé De la force du gouvernement actuel ticle intitulé «L’air et les poêles ne conviennent ni à ma de la France, et de la nécessité de s’y rallier». Françoise santé, ni à celle de ma fille». La naissance de “De l’Alle- Launay (pp. 137-154), dans un article intitulé Benja- magne” et les traditions littéraires de l’exil, rappelle que min Constant et la rue d’Anjou, mystères dévoilés, fait Germaine de Staël publia son texte pour la première état des résultats de ses recherches sur l’endroit pré- fois en 1813, alors qu’elle était en exil, et redonne toute cis où était domicilié Benjamin Constant rue d’Anjou- son importance à ce contexte en dévoilant l’usage stra- Saint-Honoré à Paris. Nous trouvons, dans la troisième tégique que l’écrivain en fit. Enfin AxelB laeschke partie de ce numéro («Œuvres complètes de Benjamin (pp. 187-197) présente son édition critique de De l’Al- Constant»), la publication par Paul Delbouille et lemagne, qui paraîtra dans le cadre des Œuvres com- Guillaume Poisson (pp. 157-161) d’un second exem- plètes de Mme de Staël en cours de publication chez plaire de l’engagement pris entre Benjamin Constant Slatkine. Ce volume s’achève sur un in memoriam et Germaine de Staël au début de leur relation, dont le d’Othenin d’Haussonville, signé par Michel Delon. Le premier exemplaire, aujourd’hui inaccessible aux cher- rapprochement des thématiques abordées, qui mêlent cheurs, se trouve dans les archives du château de Bro- toutes deux poétique et politique, permet de mettre glie; puis Paul Delbouille et Frédéric Jaunin (pp. 163- l’accent sur la question des représentations de l’altérité 168) dressent l’inventaire des éditions d’Adolphe de- au sein du groupe de Coppet, et en ce qui concerne puis 1885, date à laquelle s’achève le relevé des œuvres plus particulièrement Mme de Staël, sur la fragilité des publiées de Constant par C.P. Courtney. Enfin Paul frontières entre altérité et identité. Delbouille (pp. 169-170) fait le point sur la publica- tion des Œuvres Complètes de Benjamin Constant, et [catherine thomas] le volume s’achève sur une série de comptes rendus d’ouvrages relatifs à Benjamin Constant et au groupe de Coppet. Aa. Vv., «Annales Benjamin Constant», n. 38, 2013, [catherine thomas] pp. 212.

La première partie du volume, intitulée «Ben- Stendhal, Mémoires d’un touriste, préface de Do- jamin Constant et le groupe de Coppet», s’ouvre minique Fernandez de l’Académie française, édition sur un article de Philippe Lejeune (pp. 9-34), qui se de Victor Del Litto revue par Fanny Déchanet- penche sur une figure oubliée de l’entourage de Ben- Platz, Université Grenoble-Alpes, Paris, Gallimard, jamin Constant: Amélie Fabri, vainement courtisée par 2014, «Folio Classique», pp. 838. l’écrivain en 1803, essentiellement connue à travers le regard qu’il pose sur elle dans Germaine et Amé- Uscita in formato poche, e con la bella prefazione di lie, sa correspondance et son journal. Présentant et Dominique Fernadez, questa nuova edizione dei due commentant pour la première fois le journal d’Amé- tomi dei Mémoires d’un touriste, tra le cose meno note lie et les notes qu’elle apposa sur des billets d’invita- di Stendhal, è occasione di lettura per un pubblico me- tion retrouvés, Philippe Lejeune redonne une voix à no specifico, ma inteso a scoprire anche altre sfaccetta- cette femme largement sous-estimée par Constant et ture del milanese. Nel 1836 Henri Beyle, in congedo da explore les divers enjeux que prend sous sa plume Civitavecchia dove era stato nominato nel 1831 conso- l’écriture de soi. L’étude suivante, qui porte sur la ré- le di Francia negli Stati della Chiesa, rientra in Francia ception du Commentaire sur l’ouvrage de Filangieri de e questo gli consente, come riporta Romain Colomb,

sf177.indb 602 19/12/15 01.04 Ottocento 603

suo cugino ed esecutore testamentario, nella corposa l’edizione appartenuta a Stendhal del Fondo Stendhal Notice, inserita nell’edizione dei Romans et Nouvelles della Fondazione Primoli di Roma, fondo inventariato pubblicati da Michel Lévy nel 1854, di visitare vari di- e curato da Massimo Colesanti che ne è il Presiden- partimenti francesi e trarne un’opera che viene mes- te; i due volumi dei Mémoires d’un touriste si presen- sa in cantiere nel maggio del 1837 con un viaggio a tano in quattro tomi interfoliati e, come rileva Cole- ovest, che tocca Nantes, Vannes, Le Havre e Rouen. santi nell’Introduzione al Catalogo del Fondo Stendhal. Il viaggio nel sud-ovest e nel sud-est della Francia ini- Biblioteca Primoli, (Roma, Ed. di Storia e Letteratura, zierà l’11 marzo 1838 con partenza da Angoulême per 2002, p. xvii), l’acquisizione di questo esemplare «let- concludersi ad Avignone nel susseguente mese di giu- teralmente coperto di note e di cui il conte [Joseph- gno. La seconda parte del testo si chiude con la visita Napoléon Primoli] menava gran vanto, avvenne con a Fourvoirie che viene datata primo settembre 1837 e tutta probabilità […] nel 1878» (Ivi, p. xvii). segue il reportage da Grenoble, città natale di Beyle, di La pubblicazione, come sopra rilevato, si vale della qualche giorno precedente. I Mémoires d’un touriste. pregevole préface di Dominique Fernandez (pp. 7-27), Par l’auteur de Rouge et Noir, vengono pubblicati in intensa riflessione su un’opera coordinata a un discor- due volumi dall’editore parigino Ambroise Dupont nel so sul dentro, che non solo si limita al linguaggio e in giugno del 1838. Colomb sottolinea altresì la poca for- particolare a quel linguaggio che parla per immagini di tuna del lavoro, che fu accolto «avec froideur». La sua città incontrate, visitate da Stendhal in un coinvolgente personale opinione, comunque, non è affatto negativa, rapporto venutosi a creare, bensì si serve di esso quale evidenziando che i «Mémoires ont eu l’honneur d’être stimolo iniziale per far entrare in gioco altre determina- traduits en allemand». Quest’interessante edizione ci zioni, proprie al meccanismo del testo, in un’importan- pone anche a confronto con alcuni giudizi della stam- te operazione che costituisce un vero e proprio spazio pa dell’epoca, relativamente alla fortuna dell’opera, cui dove entrare e percepire intensamente l’oggetto espo- accennava Romain Colomb (Annexes. Comptes rendus sto. Sono pagine che investono il lettore, anche il letto- des “Mémoires d’un touriste”, pp. 631-61); dalla lunga re meno esperto, con quella che potremo definire un’i- recensione firmata M.B. sulla «Gazette de France» del niziazione all’universo stendhaliano che, nei Mémoires, 27 luglio 1838 e riportata integralmente, allo stralcio testo non romanesque, ripropone ancora un volta, sulla dal feuilleton di «Le Temps» del 9 agosto 1838, siglato linea di Rome, Naples et Florence, un tracciato in sen- E.B. e alle pagine redatte da Arnould Frémy su «La Re- so documentario, contribuendo non poco a svelare vue de Paris» nell’agosto dello stesso anno. È d’uopo piccole storie di città di provincia, più o meno note, altresì sottolineare l’importanza data dall’editore Du- e venendo così a perpetuarne l’essenza. Un’aggiornata pont alla divulgazione dell’opera, che iniziò, dal mese bibliografia (pp. 689-92) e un denso apparato di no- di maggio del 1838, a farne pubblicare a più riprese te (pp. 693-829) chiudono questa nuova, importante su «Le Constitutionnel» alcuni passaggi e pubbliciz- pubblicazione dei due tomi dei Mémoires d’un touriste. zandola anche su altre testate. Comunque i Mémoires furono molto recensiti e non solo in Francia: il periodi- [annalisa bottacin] co londinese «The Quarterly Review» (vol. 65, n. 129, décembre 1839-mars 1840) ne parlò dettagliatamen- te. (Cf. Stendhal sous l’œil de la presse contemporaine Pierrette Pavet, Stendhal et le ridicule, Paris, Euré- (1817-1843), textes réunis et publiés par V. Del Litto, dit, 2013, pp. 467. Paris, Champion, 2001, pp. 625-722). Nel corposo ap- parato (pp. 663-829), il lettore potrà allargare il suo Le ridicule chez Stendhal a été bien moins sou- campo d’indagine atto a visualizzare Stendhal uomo e vent abordé que le comique ou l’ironie, sans doute artista; in effetti, viene presentata, a cura di Mariella di parce qu’il est difficile de donner une définition pré- Maio, una quanto mai precisa e dettagliata chronolo- cise de ce phénomène fugace. Ce n’était pas le senti- gie (pp. 665-670), seguita da una Notice (pp. 671-688), ment de Beyle qui écrit à sa sœur: «J’ai enfin trouvé che si riporta a quelle redatte da Victor Del Litto nel- le ridicule. On nomme ridicule l’action d’un homme le edizioni Pléiade da lui curate, con allargamenti di qui tend au même bonheur que nous, et qui se trompe Fanny Déchanet-Platz, intesa a trasmettere al lettore de route…». Pierrette Pavet, sans négliger le point de la configurazione di un’opera sulla cui genesi manca vue de Blin selon lequel le ridicule se réduirait à un qualsiasi informazione, al di fuori della testimonianza «problème de la personnalité», a choisi d’en étudier les di Colomb. Questo suggerimento di una classificazione codes et les modalités chez Stendhal. che viene intrapresa, considerando in un primo stadio Sont d’abord précisés les rapports ou plutôt le dia- la nascita dell’opera, quindi l’elaborazione della stes- logue du sublime et du ridicule à partir de l’exemple sa con alcune annotazioni di Stendhal, estrapolate dal d’Alceste – auquel est pertinemment comparé Oc- recto e dal verso di un grande foglio dal titolo Touriste. tave –, sur lequel Stendhal porte un tout autre regard Tome Ier. Observations pour l’Auteur e altresì altre ag- que Rousseau. Autre figure incontournable et qui nour- giunte di mano di un copista sono di enorme rilevan- rit la réflexion stendhalienne: Don Quichotte. À la dif- za. In questa prospettiva si rivelano assai utili le pagi- férence de bien des romantiques français, Stendhal en ne dedicate agli Exemplaires annotés dei Mémoires, del rit franchement tout en nuançant son aspect dérisoire Bucci e del Primoli. Dei Mémoires d’un touriste, editi car il apprécie son enthousiasme pour le grand: «Loin da Dupont nel 1838, ora nel Fondo Bucci (che racco- de nier le ridicule de Don Quichotte, Stendhal a la fi- glie l’intero lascito di Civitavecchia) depositato presso nesse de l’associer au sublime, comme si l’un et l’autre il Centro Stendhaliano della Biblioteca Sormani di Mi- étaient les deux faces indissociables d’une même chose, lano vi è un unico volume (sul dorso in tela compare d’un même caractère» (p. 72). Dans le ridicule du Che- il titolo Voyage en France e manca il frontespizio), con valier à la triste figure on perçoit «ce que sera le roman l’aggiunta di tredici carte bianche di cui dodici con no- stendhalien: un mélange de sérieux et de comique, te manoscritte, idem alla fine (si può accedere al sito de tendresse et de légèreté» (p. 74). On n’est pas loin del Centro Stendhaliano al seguente indirizzo internet: du mélange de sublime et de dérision que Stendhal a www.digitami.it/stendhal/ anche per la consultazione retrouvé chez l’Arioste. Ce lien entre sublime et déri- delle postille con le relative trascrizioni). Più completa sion, P. Pavet le retrouve quand elle envisage le ridi-

sf177.indb 603 19/12/15 01.04 604 Rassegna bibliografica

cule «comme enjeu de la chasse au bonheur», allant dans les pratiques sociales de la mode et du langage. Le jusqu’à poser la question que d’aucuns trouveront inat- Rouge met en scène des ridicules à la mode, tels ceux tendue: «De l’Amour est-il un livre drôle?» (p. 117). de Beauvoisis ou de Korasoff, admirés par Julien. Au Non sans finesse sont relevés les aspects comiques de terme de sa description minutieuse, P. Pavet a raison l’amour dont l’Italie serait préservée. Il y a bien sûr le de dire que chez Stendhal, obsédé par le ridicule, la ridicule du fiasco amoureux, mais surtout ce ridicule pensée du ridicule ou de la fonction démystificatrice essentiel que P. Pavet voit dans «l’absurdité fondamen- du ridicule féconde l’illusion romanesque. tale et dérisoire de toute démarche amoureuse, qui fait dépendre entièrement le bonheur d’un individu du [michel arrous] caprice d’autrui» (p. 121). La cristallisation qui équi- vaudrait à un égarement, à un délire, n’y échappe pas; elle serait même «la source de ridicule la plus fertile et Renée Dénier et René Bourgeois, Flâneries dans la plus subtile» (p. 127) puisque, Stendhal le dit, «du Londres au temps de Stendhal, Virieu, Entre-Temps moment qu’il aime, l’homme le plus sage ne voit plus éditions, 2014, pp. 118. aucun objet tel qu’il est». Comme chez Pétrarque, il y a chez Stendhal une poétique de l’erreur amoureuse. Et Après Count Stendhal. Henri Beyle et l’Angleterre P. Pavet de se demander s’il faut ranger l’auteur dans (Paris, Ph. Rey, 2011), Renée Dénier, cette fois avec le camp des railleurs ou des raillés: «Enfin, de qui se René Bourgeois, suit Stendhal à Londres, en 1817, moque-t-on dans De l’Amour?» (p. 135). S’il arrive, on 1821 et 1826, séjours connus d’après le «Journal d’un lui accordera, qu’il y ait dans le discours de Stendhal voyage à Londres en 1817», écrit par le mystérieux une bonne part d’autodérision, il paraît exagéré d’affir- Schmidt, et quelques pages du Journal de 1821 et des mer que l’amour est souvent sous le signe du ridicule Souvenirs d’égotisme. Les auteurs ont eu la bonne idée car – et P. Pavet rectifie son appréciation – ce qui pour- d’adjoindre à ces témoignages ceux de quelques autres rait être une «tare» vaut promesse de bonheur. voyageurs (Mme d’Avot, Albert de Montémont, le Dans la deuxième partie intitulée «Le ridicule au traducteur Defauconpret, l’imprimeur Crapelet, No- cœur du héros» (pp. 167-292), après avoir précisé dier, Jouy et son Hermite, ainsi que leurs prédéces- l’impact du ridicule dans la singularité d’Octave, P. Pa- seurs Baert-Duholant et Simond que Stendhal a lu de vet voit dans le ridicule une «composante obligée du près). Tous font le métier en conscience et, face aux héros», qu’il s’agisse de Julien, Fabrice ou Lucien, ce us et coutumes des Londoniens, s’étonnent, admirent, qui nous vaut une subtile lecture du motif capital de sourient ou déplorent, mais aucun n’est prêt à «s’an- la chute de cheval et de ses conséquences sur la for- gliser». Stendhal n’est jamais déçu car il applique la mation et la conduite des personnages. Cette finesse règle qui veut qu’on ne prenne dans un pays que ce dans l’analyse se retrouve quand est abordé «le ridi- qui fait plaisir. On suit le guide et ses collègues dans cule au féminin», avec les deux Mina et Valentine, une le Strand, «très supérieur à la rue Saint-Honoré», avec des héroïnes les plus typiques de ce point de vue, aux- ses boutiques «presque aussi jolies que les plus belles quelles il faut ajouter le «cas particulier de Lamiel» de la rue Vivienne», à Saint-Paul – comme beaucoup (pp. 245-248). Celui de Mathilde aurait pu être invo- de voyageurs, il juge la cathédrale bien inférieure à qué. Ce qui les rapproche, c’est qu’elles ont le «ridicule Saint-Pierre et même au dôme de Milan: «intérieur du naturel», formule justifiée dans la mesure où elles assez mesquin», «cloaque». Il a le plaisir de marcher ont tendance à exagérer le naturel et donc à s’en éloi- dans Oxford Street «illuminée à perte de vue» et, dans gner, mais elles frôlent le ridicule sans jamais y tomber, Bond Street, s’offre des «biftecks à l’infini» et d’innom- à l’exemple de la Mina du Rose et le Vert qui «n’était brables «water-ices»; il dîne au café Piazza, va à Covent jamais ridicule et toujours si près de l’être». Là réside Garden pour Don Juan, remarque les «tétons des filles la singularité du naturel qui est en fait une grâce. Avec honnêtes tremblotants comme de la gelée», leurs pieds autant de subtilité, P. Pavet met en évidence les rap- en dedans et leurs grosses jambes. En 1821 il peut enfin ports entre égotisme et humour, ce qui lui permet d’af- admirer Kean dans Othello et Richard III. Il se pro- firmer que le ridicule ou la sensibilité au dérisoire est mène le long de la Tamise et se réjouit de la vue de au centre des Souvenirs d’égotisme. Le sentiment du Richmond qui lui rappelle sa chère Lombardie. Le lec- ridicule de soi et l’autodérision qui l’accompagne, sans teur est invité, en compagnie de Stendhal et d’autres oublier la dérision à l’égard d’un certain romantisme, «touristes», à d’agréables flâneries dans le Londres des nourriraient la réflexion de l’égotiste sur le roman et débuts de l’époque moderne. le conduiraient à la création littéraire. Sont alors ex- [michel arrous] plorées quelques grandes tendances de la narration stendhalienne, notamment l’ironie romanesque à l’en- contre des héros aux «ridicules singuliers», aussi bien Maria C. Scott, Stendhal, la liberté et les héroïnes que des personnages secondaires aux «ridicules com- mal aimées, Paris, Classiques Garnier, 2015, pp. 198. muns», la mobilité dans la technique des points de vue, les interventions d’auteur (jusque dans le soulignement Au titre près, cet ouvrage est la version traduite et de mots apparemment anodins) qui contribuent à di- révisée du livre paru en anglais en 2013 – Stendhal’s vers degrés à une «poétique du ridicule» dont l’étude Less-Loved Heroines. Fiction, Freedom, and the Fe- des nombreuses nuances prouve qu’on est souvent à la male – dans lequel l’auteur, qui se situe dans la pers- limite ou dans le paradoxe. pective de l’existentialisme français, apporte sa pierre Pour illustrer «Les richesses du ridicule», le dernier à la lecture sexuée, sans pour autant présupposer un chapitre passe en revue quelques autres manifestations Stendhal féministe. Sans revenir sur un précédent connues du ridicule: provincial, parisien, italien, fran- compte rendu de la première édition, rappelons que çais, et d’autres plus rares, comme le ridicule ostenta- Maria C. Scott discute la thèse selon laquelle les per- toire à la cour de Parme, le «ridicule sans public», ou sonnages audacieux féminins sont inférieurs aux hé- le «ridicule intime» propre à Fabrice. On l’aura com- roïnes discrètes qui emportent l’estime du lecteur. pris, le ridicule est partout, ce qui permet à P. Pavet Sont donc choisies Mina de Vanghel, Vanina Vanini, d’affirmer que «le ridicule c’est la vie» (p. 387), saisie Mathilde de La Mole et Lamiel, qui seraient au nombre

sf177.indb 604 19/12/15 01.04 Ottocento 605

des «héroïnes parmi les moins bien aimées de l’univers de Mozart et de Métastase («Viva la libertà!» Mozart et stendhalien». On pourrait aisément s’inscrire en faux la querelle du romantisme, pp. 63-70). Les problèmes contre cette affirmation, ne serait-ce qu’en rappelant politiques et poétiques allant de pair chez Stendhal, ce que certains lecteurs, et pas des moindres, ont dit François Vanoosthuyse traite de l’historicité des inter- de ces âmes fortes. Mais cette possible objection ne di- rogations de Stendhal, en rappelant opportunément minue en rien l’intérêt du propos qui est d’examiner l’importance de l’«Étude sur Shakespeare» de Guizot les interprétations contradictoires ou difficiles qu’on (1821) qui intervient en historien. Le grand mérite de a pu donner de ces «femmes non-conventionnelles». cette Situation de “Racine et Shakespeare” (pp. 71-89), Ce qui les caractérise toutes, c’est qu’elles jouent un qui n’omet pas de relever les limites du discours de rôle, mais il arrive que la «vie jouée» et la «vie spon- Stendhal – il ne concerne que la tragédie et, secondaire- tanée» se rejoignent (J. Starobinski). C’est le cas de ment, la comédie, au détriment du mélodrame –, c’est Mathilde vue comme un «personnage plus fascinant de pointer l’ambiguïté politique des deux pamphlets que Julien»: sa théâtralité ne l’empêche pas d’être sin- dans lesquels Stendhal s’adresse à une jeunesse qui ne cère ni d’être pleinement elle-même («Mathilde et le partage pas ses goûts. Il convient donc de relativiser paradoxe de l’authenticité», pp. 75-123). Le jeu de la modernité des thèses stendhaliennes, par exemple rôle qu’elle pratique ferait d’elle «la principale repré- sur la «tragédie historique et nationale». Pour sa part, sentante de la liberté stendhalienne» dans le roman. Olivier Bara voit dans les deux libelles un Manifeste Quant à Lamiel, bien qu’il soit impossible de savoir à pour la jeunesse (pp. 91-109). Au lieu de proposer le quoi ce roman aurait ressemblé s’il avait été achevé, modèle d’une école artistique, Stendhal appellerait «à et quoique le personnage de Sansfin semble, dans la la libération individuelle, à l’audace d’être soi», bref il dernière version passablement incohérente, prendre s’adresserait à une jeunesse bien différente de celle qui, le pas sur Lamiel, Maria C. Scott conteste la «sagesse manipulée par la presse de gauche, empêcha les acteurs critique dominante». Imprévisible et fille du caprice, anglais de se faire entendre en 1822. À partir de l’expé- Lamiel est une héroïne de la désobéissance et de l’éner- rience du spectateur qu’a été Stendhal de 1800 à 1825, gie. Que l’on considère la première ou la seconde ver- Sylvain Ledda signale la partialité du pamphlétaire qui sion, Lamiel affirmerait toujours sa liberté, alors que juge à l’aune de son plaisir des tragédies qui dérogent e les fictions réalistes du xix siècle sont plutôt hostiles ou acclimatent les règles classiques, ce dont Stendhal ne à la liberté de la femme. On ne manquera pas de rele- tient pas compte (“Racine et Shakespeare”: des spectacles ver que Lamiel, dans la seconde version, n’est plus que dans un fauteuil, pp. 111-133). Et pourtant Delavigne, l’acolyte du sadique Sansfin ou une héroïne domptée Guiraud, Arnault et Lemercier essaient de nouvelles par Valbaire. Est-elle encore vraiment maîtresse de sa formules. Si Stendhal s’en prend à la tragédie néo-clas- propre histoire? sique, il repère néanmoins des œuvres originales, Marie [michel arrous] Stuart de Lebrun (1820) ou Pinto de Lemercier (1802), qui pourrait servir de modèle à la «tragédie roman- tique». C’est la genèse parallèle du double pamphlet Aa. Vv., L’Année stendhalienne, n. 13, Paris, Hono- et du traité de 1822 que suit Xavier Bourdenet dans ré Champion, 2014, pp. 470. Divergence générique et complémentarités génétiques: “De l’Amour” et “Racine et Shakespeare” (1821-1823) Les treize études de la première partie de cette livrai- (pp. 135-148). Le profit tiré du second séjour londo- son invitent à redécouvrir Racine et Shakespeare, ce fou- nien en octobre-novembre 1821, au cours duquel il dé- gueux écrit de circonstance contre l’académisme et la couvre le jeu de Kean, est tel que dans l’essai intime survivance du système classique. Marginal et longtemps figure une part de l’argumentaire du pamphlet (voir les négligé par l’histoire littéraire, cet opus méritait d’être fragments 26, 59, 99, 103), conformément à la loi de réexaminé à nouveaux frais. De quoi Shakespeare est- porosité qui caractérise les œuvres stendhaliennes. Le il le nom? se demande Michel Guérin (pp. 17-38) qui rejet du vers au théâtre est un des arguments les plus rappelle le débat européen autour du nom de Shake- connus de Stendhal contre la langue de la tragédie clas- speare, auquel participe le «romanticiste» Stendhal, sique, contre «l’emphase obligée du vers alexandrin». bon connaisseur du répertoire allemand, qui s’oppose Afin d’évaluer les Enjeux de l’alexandrin dans la concep- au conservatisme chauvin du discours d’Auger. L’ana- tion stendhalienne de l’illusion théâtrale (pp. 149-160), lyse historique est reprise en détail par Gaëlle Loisel Nicolas Diassinous examine la position de Stendhal qui (Stendhal au carrefour des débats romantiques européens: «prône une absence de style au service du réalisme et généalogie de “Racine et Shakespeare”, pp. 39-52). Avec de l’illusion théâtrale», ce qui lui vaudra une critique précision est retracée la construction de l’opposition de la part de Lamartine. Stendhal reproche à la tragé- entre Racine et Shakespeare en Italie, avec la tentative die classique, dans laquelle il ne voit qu’un poème dra- avortée de Baretti, puis en Allemagne avec l’apport matique, son incapacité à créer l’illusion théâtrale par décisif de Schlegel et de Mme de Staël dont un opus- excès de discours. Est donc à proscrire le «beau vers» cule – De l’Esprit des traductions (1816) – est à l’ori- par lequel se fait entendre l’auteur travesti en un de gine de la querelle milanaise à laquelle Beyle prendra ses personnages. Stendhal, à la différence de Vigny et part. Sous l’égide de Barthes malmenant la tautologie Hugo qui défendront un peu plus tard le vers assoupli, qui voulut imposer la majesté racinienne («Racine est voit dans la lutte contre l’alexandrin la lutte contre la Racine»), Laure Lévêque évoque l’appareil idéologique «dénaturation du théâtre» (M. Crouzet). Pour Étienne à l’origine de la poétique stendhalienne (“Racine et Beaulieu, la promotion stendhalienne de la «tragé- Shakespeare” ou le “Contre Racine” de Stendhal, pp. 53- die nationale en prose» implique que l’œuvre soit un 61). On a tendance à oublier que la querelle littéraire pur miroir du présent, même si Stendhal a donné ou s’est doublée d’une querelle musicale: un épisode de la donnera force preuves de son attachement à la tradi- réception française en 1825 de Don Giovanni (la cen- tion (Régimes d’historicité romantiques dans “Racine et sure substitua Viva l’Ilarità à Viva la Libertà) permet à Shakespeare”, pp. 161-169). Bien qu’il ne la privilégie Béatrice Didier de montrer comment Mozart, associé pas dans sa réflexion esthétique, Stendhal n’exclut pas à Shakespeare, participe au combat en faveur du ro- la comédie. Aussi réfléchit-il, après Hobbes bien sûr, mantisme, combat déjà esquissé dans la Vie de Haydn, mais aussi Schlegel et Lessing, à son rôle dans l’illusion

sf177.indb 605 19/12/15 01.04 606 Rassegna bibliografica

théâtrale. Avec Stendhal et le rire comme expérience comme un travail de haute qualité, auquel on ne pou- (pp. 171-184), mais il s’agit moins du rire que de la «gai- vait guère reprocher qu’un défaut dont l’éditeur était té vraiment folle», Henri Scepi met en relief les liens du innocent: le choix, purement commercial, de publier comique avec la poétique du vrai et du naturel, ce que séparément La Duchesse de Langeais. La direction de la pièce romantique Lanfranc ou le Poète était censée GF s’est obstinée dans ce choix en publiant, en 2008, réaliser. Dans Racine et Shakespeare le recours à l’allu- une mise à jour de la seule Duchesse, dans le sillage du sion politique au théâtre est condamné, quoique la ré- film de Rivette, Ne touchez pas la hache, sorti l’année flexion politique soit loin d’en être absente. Mais com- précédente. ment parler de politique de façon littéraire, autrement Voici aujourd’hui une version toilettée de l’autre vo- que par l’allusion? Comment la tragédie romantique lume, qui réunit le premier et le troisième épisode de peut-elle parler du présent? Mauricio Melai (De la poli- l’Histoire, et qui s’ouvre de façon à la fois indiscrète et tique au théâtre: un coup de pistolet nécessaire?, pp. 185- déplaisante sur un entretien avec l’écrivain et traduc- 195) voit dans le pamphlet une réponse à la Charte de teur Claro (pp. 7-15); la volonté de séduire un public 1814, et dans Le Retour de l’île d’Elbe, une «lutte contre “djeune” est la seule justification de cet ajout bien inu- toute restauration, contre tout retour». Avec la question tile, dont Michel Lichtlé est naturellement innocent. d’Yves Ansel, “Racine et Shakespeare”, pamphlets tout Oublions vite ces huit pages pour relire (pp. 17-67) à fait démodés? (pp. 197-207), on s’attend à un contre- sa magnifique «présentation» de l’ensemble désarticu- pied. Si Racine et Shakespeare, à la différence de la pré- lé que forment ces deux épisodes privés de leur fleuron face de Cromwell, n’est pas passé à la postérité et n’a central. Il y avait un défi à relever dans la nécessité de joué aucun rôle, la faute en reviendrait à «la critique des parler à la fois de l’œuvre telle que Balzac l’a voulue, professeurs» (Thibaudet) qui a réduit ces deux pam- écrite et éditée, et des deux seuls morceaux conservés phlets au statut de documents, en occultant «bien des pour ce volume GF; nous pouvons constater qu’au- vérités dérangeantes». Les stendhaliens, et pas seule- jourd’hui comme naguère, la gageure est brillamment ment eux, doivent se pencher sur leur «longue» por- tenue. La caractérisation analytique des personnages, tée sociale, esthétique, historique et politique. Il faut de l’ancien bagnard Ferragus à de Marsay le cynique, les «sortir» de leur ghetto romantique. Aux oubliettes en passant par les femmes, touchantes (Mme Jules me- la question de l’alexandrin, l’épique, le dramatique et née à la mort par trop de dévouement) ou effrayantes tout le reste! On ne retiendra que la question de fond, (la marquise de San-Réal meurtrière par trop de pas- «l’inévitable obsolescence des œuvres éternelles» pro- sion), est de même qualité que les vues plus générales clamée par Stendhal, car telle est la thèse des pamphlets sur le Paris de Balzac ou sur ses convictions systéma- de 1818, 1823 et 1825. À méditer! tiques; il est clairement dit aussi que si les trois romans On lira dans les Varia le texte des conférences de dont nous lisons ici les premier et dernier forment un Michel Arrous (Stendhal néoclassique ou les «pouvoirs magistral ensemble, c’est plus par la description éga- de la sculpture», pp. 211-230), Sascha Lüthy (Méprise lement forte des passions qui habite chacun d’eux, en miroir: “Armance”, pp. 231-244), Nicolas Allard que par cette fameuse société des «Treize», qui peine (Anges et démons dans “Le Coffre et le revenant”, à exister autrement que comme une simple armature pp. 245-265), Claire Deslauriers (À propos des etc., (ce qui, bien sûr, ne suffit pas à justifier qu’on ait ainsi etc. stendhaliens, pp. 267-288), Jean-Jacques Labia (Le démembré l’œuvre). vert et le rose: Stendhal lecteur d’Auguste Lafontaine, Les deux «Notices» (pp. 311-323) apportent, en pp. 289-320) et René Bourgeois (Un grand commis de complément de cette vaste entrée en lecture, tous les l’État: Édouard Mounier, pp. 321-349). renseignements génétiques désirables. La «Chronolo- Jacques Houbert rouvre le dossier de la «fameuse gie» (pp. 324-333) est toujours aussi précise, et la «Bi- histoire» du certificat par lequel le général Michaud bliographie» (pp. 334-337) accueille de nombreuses atteste la bravoure et l’intrépidité du sous-lieutenant entrées postérieures à la date de la première édition du Beyle au combat de Castelfranco (1801). De l’origi- volume. L’annotation placée en bas de pages est mesu- nal disparu on ne possède que trois copies probable- rée, mais efficace, et l’édition matérielle du volume est ment établies en 1810 et 1839, dont une de la main de pratiquement sans défaut, ce qui mérite d’être signa- Stendhal. S’agit-il d’une «forgerie» manigancée par un lé avec insistance en un temps où on fait payer cher héros de papier? L’enquêteur se garde de conclure. Si- aux lecteurs tant de travaux imprimés en dépit du bon gnalons, publiés par J. Houbert, trois billets inédits de sens. Une heureuse réédition, qu’il fallait accueillir Stendhal (1822, 1827 et 1835) et une lettre par laquelle comme elle le mérite. À quand, chez GF, la nécessaire Félix Faure transmet en 1846 à Louis Crozet quelques refonte de deux volumes en un seul, qui rendrait enfin pages de Beyle. La moisson du «stendhaliste» est com- justice à la vraie Histoire des Treize de Balzac? plétée par deux lettres de Stryienski à Paupe relatives à l’Histoire des œuvres de Stendhal (1904), ouvrage qui [patrick berthier] s’écoula difficilement. Pour finir, une note œnologique effervescente d’Andrea Schellino sur le nébieu que réclame Fabrice: ce n’est pas l’Asti spumante, mais un Honoré de Balzac, La Commedia umana, scelta e vin mousseux d’imitation produit par des Français en introduzioni di Mariolina Bongiovanni Bertini, vo- Bas-Piémont. lume terzo, Milano, Mondadori, 2013, «I Meridiani», [michel arrous] pp. XIII-1575.

«Il n’y a rien qui soit d’un seul bloc dans ce monde, Honoré de Balzac, Ferragus, La Fille aux yeux d’or, tout y est mosaïque», scrive Balzac nella préface alla présentation, notes, annexes et bibliographie mises à prima edizione di Une Fille d’ève nel 1839. Nell’im- jour par Michel Lichtlé, Paris, Flammarion, 2014, maginario estetico-programmatico dello scrittore, è as- «GF», [1988], pp. 338. sai frequente l’utilizzo della metafora del mosaico per definire, a proposito della Comédie humaine, l’esigenza L’édition de l’Histoire des Treize par Michel Licht- quasi ossessiva del romanziere di presentare e di coor- lé a été reçue dès sa première mise en vente, en 1988, dinare tra loro i singoli tasselli finzionali in un quadro

sf177.indb 606 19/12/15 01.04 Ottocento 607

organico che, garantendo e preservando la specifica ri- re». Questo testo costituisce una delle colonne portanti levanza letteraria di ogni frammento narrativo, riveli, (insieme al Traité de la vie élégante e al Traité des exci- allo stesso tempo, un reciproco ed organico sistema di tants modernes) della Pathologie de la vie sociale all’in- relazioni attraverso cui, tra contrasti, analogie e rinvii, terno delle Études analytiques. risplenda la grande prosa del mondo. Il saggio balzachiano, che, a giudizio di Rose For- Questa stessa immagine del mosaico può, senza al- tassier (cf. introduction alla Pathologie de la vie sociale, cun dubbio, essere riferita alla magistrale e titanica im- Paris, «Nouvelle Pléiade», 1981, t. XII, p. 197), «ap- presa editoriale coordinata da Mariolina Bongiovanni paraît en quelque sorte comme la version laïque, mon- Bertini che, a partire dal 1994 (vol. I; e successivamen- daine, journalistique de Louis Lambert, comme la vul- te, nel 2005, vol. II), con il titolo La Commedia umana, garisation d’une pensée ésotérique», affronta, in realtà, ha dato alla luce, per la prima volta in forma così rigo- tematiche importanti e profonde che appartengono al rosa e sistematica, in Italia, una scelta così ampia, va- pensiero filosofico e metafisico di Balzac e che si ritro- riegata e significativa di romanzi e racconti tratti dalla vano espresse in romanzi quali La Peau de chagrin e, Comédie humaine, che, con la pubblicazione di questo appunto, Louis Lambert. terzo volume, giunge alla sua conclusione. [marco stupazzoni] Se, come scrive M. Bongiovanni Bertini nella no- ta all’edizione, «ogni esclusione all’interno della Comédie humaine è un sacrificio doloroso, che taglia Honoré de Balzac, Un Tenebroso Affare, traduzio- nel vivo un’opera organica, spezza i legami tra testi ne e postfazione di Felice Bonalumi, Vedano al Lam- nati da un’ispirazione fortemente unitaria, trascura bro (MB), Paginauno, 2014, «Narrativa», pp. 254. pagine e personaggi memorabili» (p. IX), è altrettan- to vero che i titoli presentati in questo terzo tomo il- Apparso tra il gennaio e il febbraio del 1841 ne luminano il lettore italiano di Balzac circa l’estrema «Le Commerce», Une Ténébreuse Affaire è riproposto varietà del genio balzachiano, circa «la sua capacità all’attenzione del lettori italiani grazie a questa nuova di spaziare dal realismo provinciale alla fantasmago- ed apprezzabile traduzione di Felice Bonalumi, al qua- ria parigina, dal registro mondano a quello filosofico le si deve anche l’interessante postfazione (pp. 249-254) e mistico, dalla più lucida ironia al più appassionato con cui si chiudono le pagine del volume. lirismo» (ibid.). Nel piano generale della Comédie humaine (cf. edi- Poliedrico e polifonico è il mosaico dei romanzi e zione Furne del 1846), il romanzo balzachiano è com- dei racconti contenuti in questo terzo volume, tutti preso all’interno delle Scènes de la vie politique, crono- corredati da esemplari saggi introduttivi redatti, per logicamente preceduto da Un Épisode sous la Terreur ogni singolo testo, dalla stessa Bongiovanni Bertini, e (1830), contemporaneo di Z. Marcas (1841) e seguito da eccellenti apparati di note al testo curati, così come da Le Député d’Arcis (1847). Basato su un episodio di le traduzioni, da autorevoli specialisti: Il Cugino Pons cronaca realmente accaduto (il rapimento del conte (da “Scene della vita parigina”), traduzione di Giovanni Dominique Clément de Ris da parte di agenti del mini- Bogliolo; note (oltre trecento) a cura di Claudia Moro; stro della Polizia napoleonica, Fouché), Une Ténébreu- Una Passione nel deserto (da “Scene della vita militare”), se Affaire contiene in sé le categorie e le tematiche fon- traduzione di Giancarlo Buzzi; note a cura di C. Moro; danti del Noir. Questo romanzo, dal finale tutt’altro Il Giglio nella valle (da “Scene della vita di campagna”) che consolatorio, ci permette, scrive Bonalumi, «una traduzione di G. Buzzi; note a cura di Chiara Cedrati; profonda riflessione, sulla società, vista da Balzac sen- La Pelle di zigrino (da “Studi filosofici”), traduzione di za falsi moralismi» (p. 251): si tratta di una visione G. Buzzi; note a cura di Anna Fierro; Il Capolavoro sco- della storia nella quale, in primo piano, si collocano nosciuto (da “Studi filosofici”), traduzione di Gabriella gli uomini che agiscono con le loro idee e i loro com- Mezzanotte; note a cura di Susi Pietri; I Proscritti (da portamenti. In quest’ottica, il crimine passa in secon- “Studi filosofici”), traduzione di Daniela Schenardi; no- do piano sia dal punto di vista ideologico sia sotto la te a cura di C. Cedrati; Séraphîta (da “Studi filosofici”), prospettiva narratologica in quanto il vero personaggio traduzione di D. Schenardi; note a cura di A. Fierro. del romanzo è, appunto, la Storia vista in tutte le sue Di particolare utilità per il lettore, è la bibliografia es- sfaccettature umane e sociali. senziale curata sempre da M. Bongiovanni Bertini con la quale si chiudono le pagine del volume (pp. 1553- [marco stupazzoni] 1570). Essa è suddivisa in due categorie fondamen- tali che comprendono: le Opere di Honoré de Balzac (edizioni delle opere complete; principali edizioni della Roland Chollet, L’Œuvre de Balzac en préfaces. «Comédie humaine»; principali edizioni di altre opere; Des romans de jeunesse au théâtre, textes réunis par la corrispondenza: edizioni complessive), e la bibliogra- Marie-Bénédicte Diethelm et Nicole Mozet, Paris, fia della critica che si articola in dodici sezioni, di cui Classiques Garnier, 2014, pp. 536. l’ultima: Balzac in Italia (pp. 1566-1570) propone un rigoroso ed esauriente quadro d’insieme sulla fortuna La disparition de Roland Chollet, balzacien incom- editoriale e critica di Balzac nel nostro Paese. parable qui nous a tant donné, fait de ce magnifique volume préparé avant sa mort un hommage funèbre; [marco stupazzoni] mais ce n’est pas un livre triste, puisque par cette pu- blication le commentateur éclairé qu’il fut demeure, au contraire, étonnamment vivant parmi nous, au- Honoré de Balzac, Teoria del camminare, tradu- jourd’hui, dans la modernité de sa vision de Balzac. zione di Carla Quercia, Roma, Ellint, 2014, «Lampi», Voilà en effet plus de cinquante ans (entre 1958 et pp. 89. 1962) que les textes de ce volume ont été écrits; or, les références inévitablement datées mises à part, ils Segnaliamo la pubblicazione di questa nuova tradu- sonnent comme s’ils étaient vraiment nés d’hier, par- zione italiana de La Théorie de la démarche, opera edita delà toute évolution pédante ou non de la critique. tra l’agosto e il settembre 1833 su «L’Europe littérai- Voici pourquoi.

sf177.indb 607 19/12/15 01.04 608 Rassegna bibliografica

Lorsqu’il a rédigé pour les éditions Rencontre, à vées ou non. On avance avec le plaisir de redécouvrir, Lausanne, des préfaces pour chacun des trente vo- et dans le désir de redécouvrir encore. lumes d’une nouvelle édition des Œuvres complètes À coup sûr ce fut une belle idée éditoriale que de de Balzac, Roland Chollet a voulu proposer un tra- vouloir faire un livre de la succession de ces préfaces vail vraiment nouveau. Voisinaient alors sur le marché, inspirées. Roland Chollet préfère à l’exhaustivité, im- achevées ou en cours, plusieurs grandes éditions: celle possible dans l’espace dont il dispose, un éclairage, de Marcel Bouteron et Henri Longnon chez Conard mais qu’il pousse à fond: ici sur la genèse, là sur la (quarante volumes de 1912 à 1940); ce que les bal- technique des personnages reparaissants qui crée peu zaciens appellent entre eux «vieille Pléiade», édition à peu un «roman sans frontières» (p. 331), ailleurs en- assurée par Bouteron seul en dix volumes de cette core sur des thèmes fondamentaux de la vision sociale collection de 1935 à 1937, et complétée en 1959 par et morale de Balzac, et partout sur la structure générale un onzième tome, confié à Roger Pierrot lui aussi ré- et particulière de l’œuvre entière. On se dit sans cesse cemment disparu; l’édition dirigée par Albert Béguin avec étonnement que tout cela a été écrit avant la mode et Jean-A. Ducourneau pour Formes et Reflets, 16 vo- du structuralisme, avant l’invasion de la narratologie lumes publiés de 1950 à 1953 et repris de 1962 à 1964 et de pas mal d’autres spécialités technicisantes: car si par le Club français du livre; enfin l’édition Maurice Roland Chollet fut dès cette époque, notamment dans Bardèche au Club de l’Honnête Homme en vingt-huit ce cycle de préfaces, un des plus grands généticiens de volumes parus de 1955 à 1963, et qui est donc la seule l’œuvre de Balzac, c’est bien en n’oubliant jamais la à ne pas être terminée lorsque Roland Chollet se met littérature. Pas de dissection, mais de vivants conseils au travail. La Pléiade et Bardèche proposent La Co- pour lire en toute intelligence une œuvre certes inache- médie humaine dans l’ordre voulu par Balzac et fixé, vée mais qui, «malgré ses voûtes éventrées et ses niches pour l’essentiel, par le catalogue dressé par lui en 1844 vides, […] donne une impression de plénitude et de (pour l’essentiel, car quelques redistributions d’une perfection» (p. 125). section à l’autre de l’œuvre sont encore décidées après On ne sait où puiser tant la visite du monument est cette date). Béguin et Ducourneau, en revanche, ont sans cesse passionnante, que Roland Chollet s’attache à adopté «un ordre nouveau» déterminé par la date de sortir de l’ombre un élément méconnu comme Les Pe- l’intrigue de chaque roman, en toute conscience des tites Misères de la vie conjugale (pp. 152-156) ou qu’en problèmes que posent à cet égard les romans à large deux pages denses il fasse le point sur la question mou- empan chronologique. Roland Chollet prend un autre vante du «romantisme» de Balzac (pp. 171-172). Les risque, non moins réel: celui de présenter les œuvres remarques lumineuses ne manquent pas non plus sur le en suivant la date non de leur intrigue, mais de leur rôle du lecteur, et sur «notre conscience, avec laquelle composition; pour les romans à plusieurs épisodes, la l’écrivain joue et hors de laquelle l’œuvre ne peut date choisie sera celle de l’achèvement, soit 1843 pour vivre» (p. 302): Roland Chollet parle souvent de la mé- moire de celui qui lit Balzac et qui ne peut bien lire Illusions perdues ou 1847 pour Splendeurs et misères Balzac que s’il fait, d’un roman à l’autre, travailler cette des courtisanes. mémoire grâce à laquelle il percevra ce que le critique Indépendamment des discussions qu’il peut susci- appelle dans plusieurs des préfaces l’unité de destinée ter, un tel choix a évidemment pour avantage de faire des personnages, reparaissants ou non. Des années relire Balzac dans l’ordre de l’élaboration de l’œuvre, après avoir écrit tous ces textes, Roland Chollet, qui se tout en proposant une forme originale de biographie trouvait alors en pleine rédaction de sa superbe thèse intellectuelle. Pour rendre cet aspect plus sensible, Balzac journaliste (Klincksieck, 1983), a été chargé par les éditrices – c’est une de leurs rares interventions de Pierre-Georges Castex, directeur de la nouvelle édition quelque importance – ont déplacé les préfaces des pre- «Pléiade» publiée de 1976 à 1980, de réaliser l’édition miers romans (de 1822 à 1825) en tête du volume, alors d’Illusions perdues, et les balzaciens savent à quel point que chez Rencontre les œuvres de jeunesse étaient relé- cette édition est insurpassable; or on constate que la guées vers la fin de l’ensemble; seuls se trouvent tou- préface de ce même roman pour Rencontre, quinze ans jours à la fin la préface des Contes drolatiques inachevés plus tôt (dans notre volume pp. 331-342), était déjà ex- (publiés de 1833 à 1837), ainsi que ce qui concerne le traordinairement riche malgré sa brièveté, ne serait-ce théâtre, réuni en un vaste chapitre allant de Cromwell que sur le thème de la «délégation» évoqué dans les (1819-1820) au Faiseur, créé après la mort de Balzac mêmes années par Gaëtan Picon dans son excellent dans une version défigurée. Nous nous trouvons fina- Balzac par lui-même (Seuil, 1956), petit ouvrage trop lement face à trois groupes de préfaces, celles des pre- négligé aujourd’hui et auquel on s’étonne un peu que miers romans (pp. 13-118), celles des romans de La Co- Chollet ne renvoie pas. médie humaine (pp. 123-425), enfin celles desContes Un mot sur la réalisation matérielle du volume, au drolatiques et du théâtre (pp. 427-501); le volume se cas où l’on m’aurait trouvé trop dityhrambique sur termine sur une postface de Marie-Bénédicte Diethelm le fond (mais saurait-on l’être!). Je me suis demandé consacrée à une évocation qui nous en apprend beau- pourquoi, au fil des pages, on trouvait tant de coquilles coup sur les travaux de Roland Chollet, mais dont le non corrigées, y compris portant sur des noms propres ton dithyrambique l’aurait fait sourire, modeste ingué- connus – ainsi, à quelques lignes de distance, p. 493, rissable qu’il était. sur l’acteur Lockroy (imprimé «Locroy») et sur le di- Ce qui est vrai, en revanche, c’est que la lecture de recteur des théâtres de la banlieue, Seveste (imprimé ces cinq cents pages de préfaces mises bout à bout pro- «Sévestre»); d’autres gênent la lecture, fût-ce en fai- duit un effet sidérant sur l’esprit du lecteur qui croyait sant sourire, comme lorsque Sarrasine est «détrom- bien connaître son Balzac; lue ou plutôt évoquée dans pée» (sic, au féminin, p. 169) sur l’identité du castrat ce nouvel ordre, La Comédie humaine révèle des tré- qu’il a pris pour une femme… Sans doute ces fautes-là sors et suscite sans cesse des envies de relecture. La dis- viennent-elles de coquilles non aperçues; mais j’ai fini tribution des romans dans chaque volume se faisant en par me convaincre que la plupart, parfois de taille, pro- fonction non seulement de leur date d’écriture mais de viennent de ce que, pour réaliser la présente édition, leur longueur, on voit se côtoyer textes brefs et textes on a scanné les textes des années soixante: technique ô longs, scènes parisiennes et de province, œuvres ache- combien précieuse par les gains de temps qu’elle per-

sf177.indb 608 19/12/15 01.04 Ottocento 609

met, mais dont on connaît les ravages en l’absence d’un menti sono preceduti da un interessante studio di Jean- contrôle scrupuleux des résultats. Quand on lit, p. 229, Claude Bologne, attuale presidente della Société des «bien que Vautrin ne sait rien», on saisit aussitôt qu’il Gens de Lettres: Balzac à la Société des Gens de Lettres faut lire «soit»… mais ce n’est pas au lecteur d’assu- (pp. 5-13), nel quale l’A. sottolinea la posizione deter- mer cette correction. Même chose pour les avatars de minata di Balzac contro le «contrefaçons» e il suo ruo- la conjonction «mais», qui devient «riais» p. 239 et lo fondamentale all’interno della Société des Gens de «niais» p. 370, en produisant ici et là, bien sûr, une Lettres (fondata nel 1837) soprattutto tra il 1839 e il phrase absurde. D’autres résultats aberrants comme 1841. «Son expérience, ses relations, son énergie et son «quelle» au lieu de «qu’elle» (p. 106), «soif l’histoire» imagination débordante – scrive l’A. – révolutionnent (au lieu de «soit», p. 324) ou «celle envergure» (pour la société» (p. 5): nell’aprile del 1840, Balzac propone «cette», p. 332) ont évidemment pour origine la même al comitato della società un testo alquanto rivelatore, absence de contrôle après le scannage. Si l’on ajoute à sotto la prospettiva giuridica, della precisa intenzione ces défauts quelques coquilles sur les titres («Illusion di voler dotare lo scrittore di uno statuto giuridico- perdues», p. 340, ou «La Tour de Nesles», p. 468), on economico definito. Ci riferiamo al Code littéraire pro- se retrouve tout de même face à un bilan qui n’est pas posé par M. de Balzac (qui pubblicato alle pp. 43-50) celui qu’il devrait être, surtout ici où il s’agissait de su cui riflette con acume Sandra Travers de Faultrier rendre à un chercheur aimé l’hommage qu’il mérite, nel saggio intitolato: Balzac et la législation sur le droit donc un hommage lui-même irréprochable. Roland d’auteur (pp. 29-42) che precede lo scritto balzachia- Chollet était évidemment le premier à savoir que le no. Balzac, osserva l’.A, «pose les grands problèmes du titre du drame de Dumas ne prend pas d’s, mais même droit d’auteur […]. Sujet de droit, pourvu d’une iden- si la faute était dans la page d’origine des éditions Ren- tité personnelle perçue comme un droit et non comme contre, elle ne devait pas subsister chez Garnier. une obligation, doté de capacités patrimoniales mais Il n’était pas question de dissimuler cette ombre au aussi d’une visibilité qui permet la participation, l’au- tableau, car elle était sur bien des points évitable; mais teur est une figure juridique riche» (p. 42). il ne faut pas non plus lui donner trop d’importance, La raccolta di studî che segue, raggruppati sotto il car ce qui doit compter avant tout, dans le bonheur titolo di Infortune et fortune de Mercadet, si apre con de lecture que nous procure ce grand livre, c’est le fait la breve nota di Anne-Marie Baron (“Le Faiseur” de que son auteur ne l’avait pas conçu comme tel, puisque Balzac au programme du concours d’entrée à l’ENS, bien sûr chaque préface était isolée en tête de chaque p. 51) in cui viene sottolineata la sorprendente attua- volume, mais que la réunion de toutes les préfaces pro- lità, ai giorni nostri, e il costante successo scenico della duit réellement l’œuvre d’un maître, un peu comme la pièce balzachiana. Jean-Marie Bernicat (Les représen- réunion des romans de La Comédie humaine produit tations du “Faiseur” [1971], pp. 51-65) ricostruisce in un roman unique, le livre de Balzac. Et tant pis si la modo esemplare la genesi letteraria e la fortuna in pal- modestie de Roland Chollet, déjà évoquée plus haut, coscenico dell’opera di Balzac a partire dalla sua pri- souffre de ce rapprochement qui, à moi, me saute aux ma rappresentazione, nel 1851, fino al 1957. A giudizio yeux. dell’A., sarebbe profondamente ingiusto «refuser obs- [patrick berthier] tinément de reconnaître en Balzac de réelles et grandes qualités de dramaturge […]. Balzac possède jusqu’à un degré peu commun ce don essentiellement “théâtral” Aa. Vv., «Le Courrier balzacien», nouvelle série, n. 25/26, octobre 2013, pp. 82. de communiquer, d’évoquer, d’animer, de mettre les âmes en contact» (p. 65). Thierry Bodin (À propos du In questo fascicolo doppio – l’ultimo dell’anna- “Faiseur” [1993], pp. 66-69), la considera come un ve- ta 2013 – del «Courrier balzacien», è posta al centro ro capolavoro, come una «pièce puissante, remarqua- dell’attenzione una questione cruciale e di estrema at- blement construite et écrite» (p. 69), e riflette, da una tualità che ossessionò la vita ed il percorso letterario prospettiva più generale, sulla produzione teatrale di di Balzac lungo tutto il corso della sua breve ma in- Balzac e sulla sua rilevanza non soltanto nell’economia tensa esistenza. Contro il dilagare delle cosiddette con- generale della sua opera letteraria, ma nell’ambito della trefaçons belges, il cui successo, a livello europeo, fu storia del teatro della prima metà dell’Ottocento. particolarmente rilevante tra il 1830 e il 1845, Balzac, Completano le pagine del fascicolo i seguenti in- molto attento ai problemi del mercato librario, inter- terventi: Anna-Marie Baron (La Cousine Bette Davis viene in diverse occasioni sulla questione come parte à la Cinémathèque française, pp. 70-71); id. (“Lucia di direttamente interessata alla tutela dei diritti d’auto- Lammermoor” à l’Opéra Bastille, pp. 72-74); Olivier re sulla propria opera. La Lettre adressée aux écrivains Got (Les Amis de Balzac à Douai, ou la recherche de e français du xix siècle, apparsa nella «Revue de Paris» l’introuvable, pp. 75-79); Saché d’octobre à décembre, il 2 novembre 1834, costituisce, da questo punto di vi- p. 80; Les activités de la Maison de Balzac, p. 81; Paru- sta, una testimonianza esemplare circa la presa di po- tions récentes, p. 82. sizione netta e decisa da parte dello scrittore rispetto [marco stupazzoni] ai temi della proprietà letteraria, dei diritti d’autore e della contraffazione editoriale. In questo fascicolo, sono pubblicati ampi estratti di questo importate do- Chiara Savettieri, L’Incubo di Pigmalione. Girodet, e cumento (Lettre adressée aux écrivains français du xix Balzac e l’estetica neoclassica, Palermo, Sellerio editore, siècle, pp. 15-23) a cui segue quella di una ulteriore 2013, «Le parole e le cose», pp. 140. testimonianza (presumibilmente) balzachiana (tutti e due i documenti sono presentati da Roger Pierrot, Il mito di Pigmalione come rappresentazione e cele- présentation et chronologie, p. 14): si tratta del Mémoi- brazione dell’artista ha avuto, essenzialmente a partire re sur la situation actuelle de la contrefaçon des livres dal xviii secolo (per merito, soprattutto, di Rousseau e en Belgique, présenté à MM. Les ministres de l’Intérieur di Winckelmann), numerose e svariate interpretazioni et de l’Instruction Publique par la Société des Gens de non soltanto letterarie ed artistiche, ma anche, in epo- Lettres, redatto nel marzo del 1841. Entrambi i docu- che più recenti, teatrali e cinematografiche. Pigmalione

sf177.indb 609 19/12/15 01.05 610 Rassegna bibliografica

incarna l’immagine dell’artista creatore al quale spetta Riconsiderando, in modo particolare, l’aspetto della la missione di fondere l’ideale con una illusione di vita. finzionalità e quello delle forme di riferimento alla re- In questo interessante e suggestivo studio, Chiara altà che gli scrittori presi a modello esprimono attra- Savettieri concentra la sua attenzione sulla figura del verso il testo narrativo, l’A. perviene ad un’idea di ro- mito cogliendone gli aspetti antitetici e interrelati rife- manzo come narrazione, nella quale è l’autore che rac- riti, in particolare, agli scritti ed alle opere del pittore conta rivolgendosi direttamente al lettore. Gli assunti francese Anne-Louis Girodet, e al messaggio estetico e le categorie elaborati dalla narratologia strutturalista del quale si fanno portavoce alcuni personaggi balza- per definire le istanze produttrici del discorso narrati- chiani in romanzi quali Sarrasine, La Maison du chat- vo (chi racconta è una figura, il narratore extra/omo- qui-pelote e Le Chef-d’œuvre inconnu. diegetico, distinta dalla persona dell’autore) vengono In Girodet, che esprime una concezione neoclassi- radicalmente messi in discussione da Ballerio nella sua ca dell’arte, il mito di Pigmalione è utile all’artista per analisi dell’incipit del Père Goriot balzachiano sulla ba- alimentare l’illusione che l’arte possa vincere la morte se di una differente prospettiva teorica ed ermeneutica. conciliando, attraverso la loro trascendenza nella for- L’ipotesi formulata dall’A. è che Balzac, proponendo ma artistica, la natura e la vita. La beauté è possibile so- «un’operazione tipica della postmodernità», crea «una lo se associata ad un contesto in cui «bello e morte ten- figura di narratore che si atteggia ad autore e che tratta dono a convergere in una dimensione erotica» (p. 33). da lettori i narratori » (p. 15). La semplice narrazione è La pittura di idee e non di imitazione che insieme le- messa en abyme e diventa il luogo in cui Balzac «riflette gano tra loro eros e thanatos scaturisce dalle proprietà sulla sua opera con i suoi lettori e cerca di agire reto- compensative, ricostruttive e consolatorie che Girodet ricamente su di loro» (p. 19). Questo presunto dialo- attribuisce all’arte nel tentativo di conciliare «ciò che go ermeneutico tra Balzac e il lettore si inserisce in un di fatto è inconciliabile: natura e idea, vita e morte, mi- orizzonte storico-letterario ben definito e circoscritto, mesi e concetto» (p. 44). nel quale autore e lettore sono riconosciuti come sog- Balzac, al contrario, che fu sempre affascinato dalla getti storici portatori di una concezione e di una inter- figura e dall’opera di Girodet e che affronta in diversi pretazione ben precise dell’opera letteraria. Negli oriz- suoi scritti il tema della creazione artistica, rivela come zonti di Balzac e dei suoi contemporanei, la narrazione l’arte non sia altro che l’altra faccia di thanatos; come è attribuita all’autore e non a un narratore (escludendo il sogno di un passaggio dall’arte alla vita non sia altro, i casi in cui la narrazione è affidata ad un personaggio): per il protagonista, che un incubo nel quale l’artista tra queste due figure, non esiste alcuna distinzione e il trova inesorabilmente il suo annientamento. Sarrasine dialogo ermeneutico tra autore e lettore si realizza in e Théodore de Sommervieux (nella Maison du chat-qui- un contesto di realtà a cui essi appartengono e non nel pelote) confondono l’arte con la vita e mettono a nu- dominio della finzione. do «il fondo di thanatos celato nell’apparenza illusoria Pur nella differente peculiarità del contesto storico dell’arte» (p. 47). In Balzac, l’arte è un’illusione che e socio-culturale, gli orizzonti di W. Scott e dei suoi non può mai consolare e la bellezza è un valore che non potrà mai conciliarsi con la realtà. lettori sembrano coincidere con quelli che l’A. traccia La questione centrale che attraversa tutta la poetica per Balzac. Anche per l’autore di Waverly, il dialogo er- letteraria balzachiana è quella che riguarda la solitu- meneutico avviene nell’ambito del reale e non nel con- dine, l’isolamento e il fallimento dell’artista nell’epoca testo esclusivamente pertinente alla finzione narrativa. moderna, nel momento in cui comincia ad affermar- L’A. riconosce ai due scrittori una presenza diretta nel si l’autonomia dell’opera d’arte rispetto ad un conte- testo e la loro legittima funzione di autorevolezza: in sto esterno funzionale e ricettivo che, per essa, si ri- Scott, come in Balzac, l’A. rileva «il persistente radica- velerà altamente problematico e distruttivo. Nel Chef- mento dell’enunciazione nella realtà di autore e lettori d’œuvre inconnu, è presente una riflessione filosofica e insieme lo statuto di verità ancipite che per essa viene sull’arte centrata sul rapporto tra creazione artistica rivendicato e riconosciuto, sulla base di una legittima- (l’ideale assoluto) e realtà (la vita). Il mito di Pigma- zione autoriale» (p. 64). Si tratta di una rivendicazio- lione, che incarnava il sogno neoclassico dell’identità ne di autorevolezza che, per quanto rivendicata da en- natura-vita, si rivela anche nel personaggio di Frenho- trambi gli scrittori, assume un carattere e una funzione fer, il quale, per eccesso di esprit (come in Sarrasine e in differenti: se W. Scott esibisce la sua maestria nel ricer- Girodet), nega all’opera d’arte l’obbligo di rispondere care, attraverso la memoria e le fonti storiche, il passato ad una funzione sociale anche sotto la prospettiva del- nel presente, Balzac vuole accreditarsi come scienziato la sua ricezione e mostra in quale misura l’eccesso di del suo tempo, come studioso dell’uomo suo contem- assoluto possa annientare ogni forma di creazione arti- poraneo appellandosi alla sua conoscenza diretta del stica. Balzac, osserva l’A., ha utilizzato «temi ed aspet- mondo ed alle inesauribili facoltà intuitive della sua ti della concezione estetica neoclassica, di cui rivela immaginazione. le aporie, per affrontare uno dei nodi esemplari della [marco stupazzoni] modernità: l’incommensurabile solitudine dell’artista» (p. 119). [marco stupazzoni] Elisa Gregori, «Une pluie d’or». “Liquidità” dei personaggi balzachiani, in Aa. Vv., Letteratura e de- naro. Ideologie metafore rappresentazioni, atti del XLI Stefano Ballerio, Il romanzo come narrazione e Convegno Interuniversitario (Bressanone, 11-14 luglio l’autore che racconta, in Sul Conto dell’Autore. Narra- 2013) a cura di Alvaro Barbieri e Elisa Gregori, Pado- zione, scrittura e idee di romanzo, Milano, Franco An- va, Esedra editrice, 2014, «Quaderni del Circolo Filo- geli, 2013, «Critica letteraria e linguistica», pp. 11-65. logico Linguistico Padovano», pp. 383-392.

Assumendo una prospettiva di indagine dichiara- Il denaro è un tema non esclusivamente letterario tamente ermeneutica, S. Ballerio analizza, in questo che costituisce uno tra i criterî fondamentali non sol- denso primo capitolo del volume, l’idea di romanzo tanto per comprendere le più svariate sfumature lega- elaborata attraverso gli scritti di Balzac e di W. Scott. te alla vita dello scrittore, ma soprattutto per cogliere

sf177.indb 610 19/12/15 01.05 Ottocento 611

alcune delle dinamiche centrali del sistema-Comédie section, elle commence carrément sous l’exil, avec six humaine. articles publiés dans «L’Homme» entre 1854 et 1856, Il movimento interno dei personaggi nei luoghi nar- et se poursuit par un choix régulièrement réparti de rativi dell’opera in perpetuo divenire può essere consi- textes publiés avant et après 1870. derato, secondo E. Gregori, come analogo al fluire del Soyons clairs: il n’est pas question de discuter les denaro. L’A. intravede uno stretto legame tra la mo- choix faits dans ce volume; la matière était si abon- bilità o la fluidità di alcune figure balzachiane e le di- dante que le tri a dû être douloureux et, pour la partie namiche che stanno alla base delle leggi economiche littéraire que je maîtrise mieux, les textes retenus du di una determinata società in continuo mutamento. La «Conservateur» donnent une fort bonne idée du talent circolazione dei personaggi romanzeschi, le loro tra- et, derrière un style encore en formation, du culot du sformazioni e le loro metamorfosi non costituirebbero jeune observateur du monde culturel de la Restaura- altro che l’applicazione, da parte di Balzac, delle «leg- tion. Ce que je veux dire, c’est qu’à un texte près pour gi che regolano il mercato» (p. 392): regolato dai mu- les deux premières sections (un de 1870 à la fin de la tamenti proprî delle leggi economiche, il personaggio première, un de 1828 en tête de la seconde), le fil du balzachiano si delinea e si trasfigura, all’interno della temps se déroule si naturellement qu’on se demande Comédie humaine, seguendo i criterî che determinano s’il n’aurait pas été plus simple de l’adopter comme la fluidità del denaro in tutte le sue forme. table des matières. En effet, il est visible, à lire la troi- sième section après la deuxième (c’est-à-dire en res- [marco stupazzoni] pectant le travail de disposition des textes tel qu’il a été élaboré par Marieke Stein), qu’on y retrouve des thèmes semblables en grand nombre, et que lorsque Hugo journaliste. Articles et chroniques, choisis et Hugo, en 1848, se bat pour la liberté de la presse, il uti- présentés par Marieke Stein, Paris, Flammarion, 2014, lise déjà, évidemment, la presse comme «tribune poli- «GF», pp. 464. tique». Et l’on peut même suggérer que, dès ses tout débuts, dès son appréciation comparée du libéralisme En même temps que Balzac journaliste, recensé aussi de Delavigne, auteur des Vêpres siciliennes, et du tradi- dans ces colonnes, la collection de poche «GF» pro- tionalisme d’Ancelot, son rival, auteur de Louis IX, le pose un volume consacré à Hugo journaliste, pris en Hugo presque adolescent encore en fait déjà, de la po- charge par Marieke Stein. Spécialiste de l’œuvre poli- litique dans la presse, et avec quel savoir-faire instinc- tique de cet écrivain, elle a, c’est naturel, accordé une tif! Autrement dit et pour en finir, l’ordre de la table grande place à cet aspect dans son anthologie. des matières ne convainc pas du tout, et j’aurais établi, Mais pourquoi ce Hugo «journaliste»? À vrai dire, quant à moi, des sections chronologiques, ou pas de quand, au contraire de l’éditrice, on n’est pas au pre- sections du tout. Ce regret est relatif, car, pour le reste, mier chef spécialiste de son œuvre, on aurait moins voilà un fort joli volume, bien établi et passionnant à spontanément tendance à le voir en journaliste, comme lire; on y suit les combats obstinés d’un homme, par un Gautier ou même comme un Zola, car on pense aux exemple contre le monstre de la peine de mort («De- immenses blocs de la poésie, des romans, des essais, puis trente-cinq ans […] j’essaie de faire obstacle au du théâtre. Et pourtant, Victor Hugo a écrit – avec de meurtre en place publique», p. 362). longues intermittences, c’est vrai – dans les journaux Est-il bien annoté? La réponse est toujours délicate pendant soixante ans! à apporter, sauf bien sûr quand une note est erronée; On devine, à consulter la table des matières, que et il ne faut pas négliger la pression exercée par les édi- Marieke Stein n’a pas eu la tâche facile, pour choisir teurs pour limiter la place accordée à l’appareil cri- d’abord, pour organiser ensuite. Le volume se répartit tique, toujours trop coûteux à leur goût. Mais l’impres- en trois blocs, thématiques par leurs titres, mais aus- sion que j’ai, c’est qu’à pas mal de reprises manquent si largement chronologiques. Ainsi la section «Victor des notes que j’aurais, moi, jugées nécessaires: le lec- Hugo critique et chroniqueur» (pp. 53-202) est-elle, teur actuel d’un tel volume saura-t-il qui était Dorat pour à peu près la moitié, consacrée – et c’est justice – (p. 143, dernier mot de la page), cité en même temps à une large anthologie de comptes rendus du «Conser- que Marivaux? ou le père Loriquet, vulgarisateur his- vateur littéraire», entre décembre 1819 et février 1821 torique évoqué à propos du débat sur l’enseignement (quatorze articles), complétée par un choix d’articles (p. 234)? Ces détails ne sont pas négligeables, car ils donnés à divers périodiques, dont «Le Réveil» et «La concernent la signification même du passage où ils se Muse française», entre 1822 et 1829. Les derniers ar- trouvent. Autre exemple, plus parlant encore: qu’était, ticles de cette première section, deux brefs textes, l’un en 1833, le «pont des Statues» (p. 199)? La réponse de 1833 dans «L’Europe littéraire», et surtout l’autre, demande une petite recherche: il s’agit du pont du bien seul, une lettre ouverte de 1870 dans «Le Rap- Carrousel, terminé en 1834 [et reconstruit de 1935 à pel», ne suffisent pas à empêcher le lecteur de croire 1939], ainsi nommé au moment de sa construction à que Hugo n’a été «critique et chroniqueur» que dans cause des quatre statues allégoriques placées à ses ex- sa jeunesse, alors que le chroniqueur, pour le moins, a trémités; peu importe cette érudition? Non, car l’ar- nourri pendant un demi-siècle la masse croissante de ticle de Hugo, dans «L’Europe littéraire» du 17 juillet ses Choses vues – mais ce ne sont pas stricto sensu des 1833, concerne en entier le fait que Thiers, ministre articles, et elles n’avaient pas ici leur place. de l’Intérieur, vient de retirer la commande de ces La deuxième et la troisième sections (pp. 203-305 et statues aux quatre bons sculpteurs d’abord sollicités pp. 307-427) s’intitulent «Le défenseur de la presse et (dont David d’Angers et Pradier, tout de même) pour des journalistes» et «La presse, tribune politique», et la confier en entier au seul Petitot; il est donc impor- se caractérisent par une dominante chronologique in- tant, me semble-t-il, de savoir sur quoi, sur quelle réa- verse de la première. Dans la deuxième section, un seul lité porte cette attaque sévère de Hugo contre la ma- texte de 1828, puis l’on passe à sept autres, dont six nière dont le ministre satisfait ainsi de «petites haines» dans «L’Événement», datant de la IIe République, et (p. 200). à un groupe équivalent d’articles, dont plusieurs dans D’autres notes, existantes là où on les attend, pa- «Le Rappel», entre 1869 et 1878. Quant à la dernière raissent un peu hâtives. Lorsque, en 1850, Hugo parle

sf177.indb 611 19/12/15 01.05 612 Rassegna bibliografica

de «trente-cinq années d’éducation du pays par la li- d’Aurevilly, on aurait beau jeu d’attaquer ces «mots où berté de la presse» (p. 235), il n’est pas satisfaisant de se prend le style», mais l’écriture de Stéphanie Bou- lire cette note 1: «L’ordonnance d’août 1830 qui sup- lard, maître de conférences en littérature française à prime la censure ouvre l’âge d’or de la presse»; car de l’université de Georgia Tech à Atlanta, spécialiste de 1850 à 1830 il n’y a que vingt ans, et on voudrait savoir Victor Hugo et de Claude Louis-Combet, est ainsi: à quelle liberté de la presse Hugo pense en 1815… Un étonnante quelquefois, mais presque toujours alerte, peu plus loin, on est bien obligé de parler d’une er- virevoltante, virtuose même, jouant avec les mots et les reur, contrariante de la part d’une hugolienne, lorsque ruptures de rythme, sinon de syntaxe – à prendre ou l’ode «À M. Alphonse de L.» [Lamartine], poème de à laisser. Ses références sont modernes (de Jean Ge- 1825 publié dans l’édition des Odes et ballades de 1826 net à Pina Bausch), critiques (de Blanchot à Barthes), [édition Jean Massin, t. II, p. 719 pour les vers cités], dramatiques (de Cixous à Novarina), romanesques (de est daté de… 1837 (p. 282, n. 1, avec de plus un titre Quignard à Annie Ernaux), philosophiques (d’Hei- inexact); et ce n’est pas une coquille, mais le résultat degger à Deleuze, de Lyotard à Derrida), mais c’est non vérifié de la réponse d’un moteur de recherche avant tout une disciple revendiquée de Jean Maurel. À bien connu: mieux valait rouvrir Hugo lui-même. ce titre, à l’image de cette page (267) où le nom du cri- Il n’y a pas d’édition parfaite, et on ne chassera ja- tique semble appelé par son commentaire d’Esmeralda mais toutes les coquilles (comme, par exemple, de da- en notre-damoiselle de Paris, demoiselle orientale dan- ter le même article de 1862 et de 1872 à quatre lignes sante (maure ailes), à moins que ce ne soit dans sa pré- d’intervalle, p. 299, dans le titre et dans le «chapeau»), destination écrite (mort elle), elle ose tout: les jeux de mais on ne sera jamais non plus assez rigoureux dans mots, en titre («L’impie-œuvre», «L’être H») ou dans le l’art minimal de tout vérifier. Je me permets ces re- texte (coups pour cous, l’une/lune, le Fun Club…), les marques parce que de tels défauts finissent par déparer mots valises (Hugoctopus, l’égouillotine), les parono- un bel ensemble, par ailleurs revigorant à lire comme mases (à tire-d’aile, à titre d’ailes; non des pires, noms peut être revigorante l’obstination d’un grand homme des pères), les séries lacaniennes («On signe ici. On à demander la justice partout où on la bafoue. saigne ici. On s’initie»), les effets de style: «Je m’arrête. J’arrête. Je m’arr. Je cou». [patrick berthier] Elle ne facilite pas ainsi le travail du critique qui ne sait plus s’il doit crier haro ou au génie (Hugo): quand elle écrit «Tous y passe» après «Tout y passe» (p. 290), Stéphanie Boulard, Rouge Hugo, Villeneuve est-ce une faute? Quand elle cite le «recueil des Voies d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2014, intérieures» (p. 345), est-ce un jeu de mots? Quand «Objet», pp. 424. elle date l’exécution de Guy Fawkes du «5 novembre 1863» (p. 197), est-ce une plaisanterie? Le «Hugo de Fondée en 1981 par Philippe Bonnefis, disparu en Contentin “qui refusa de prendre Narbonne”» dans 2013, la collection «Objet» des Presses Universitaires La Légende des siècles (p. 367) ne correspond ni à un du Septentrion se referme, 85 livres plus tard, avec cet personnage de Victor Hugo (à moins qu’il faille com- ultime opus. De là peut-être son luxe de publication prendre que Hugo de Cotentin était vraiment très inhabituel qui frappe dès l’abord: beau format, beau content ce jour-là) ni à une citation de La Légende papier et belles illustrations en couleur intégrées dans des siècles (rien à faire, ça ne tient pas dans un alexan- le texte. La collection présente certes un catalogue en- drin)… viable, avec des livres pour certains devenus classiques «Mais reprenons-nous, et suivons notre fil» (p. 286): de Bonnefis, Buisine, Pierssens, Bellemin-Noël, Stein- il serait tout de même bien injuste de faire à Stéphanie metz, Grojnowski, Farasse, Derrida, Combet, nous en Boulard le procès en sorcellerie qu’elle mérite peut- passons, et des meilleurs, mais celui-ci se distingue, à être, tant son inclassable essai peut procurer à la fois la fois chant du cygne et couronnement. C’est le pre- de délices et de tourments. Finissons sur les délices: mier de la série consacré à Victor Hugo, il porte le mil- une perspective brutale certes, mais originale et fé- lésime 85 qui lui fut fatal, un titre énigmatique, une conde, une belle intrication des images et de la prose, guillotine sur la couverture enfin, où la tête blafarde des modèles d’explication de texte, notamment de d’un condamné est projetée dans le ciel, bien plus haut L’Homme qui rit, des réseaux thématiques relevés et que les sombres piliers de l’échafaud, pendant que sur suivis comme Jean-Pierre Richard souvent (seulement le sol apparaît en rouge, comme le suggérait une note comme Pierre Richard quelquefois), de vraies réussites antérieure de Victor Hugo, «Le mot justice écrit par stylistiques, une plume d’essayiste proche à la fois de le sang dans les fentes du pavé» (dessin de 1857 inti- Jean Maurel et d’Annie Le Brun, ce qui convient pour tulé Justitia, curieusement légendé trois fois Justicia: en étudier le rouge, bref une originalité salutaire et revi- 4e de couverture, en p. 53 et dans la liste des œuvres gorante font de cet objet violent non identifié tombé – de même que la «carte de visite» dessinée reproduite sur Lille un trésor à découvrir – pour ceux qui ont le p. 333 est datée «vers 1860» juste au-dessous de la date goût de l’aventure. manuscrite qui indique très lisiblement 1864). [jean-marc hovasse] Aucune tromperie sur la marchandise: la guillo- tine, quelquefois exhibée mais le plus souvent irrepré- sentable, est en effet au cœur de cet essai qui montre Aa. Vv., Regards croisés, Théâtre et photographie, qu’elle est à l’origine ou au centre de toute l’œuvre ro- Maison de Victor Hugo, Paris Musées, 2014, pp. 89. manesque de Victor Hugo, directement ou indirecte- ment. «Ce livre propose donc une traversée de l’œuvre L’exposition Regards croisés liée au mois de la photo romanesque hugolienne», écrit l’auteur dans une in- automnal à Paris a eu lieu à la maison de Victor Hugo troduction pleine d’alacrité, «alternant des chapitres du 6 novembre 2014 au 1er mars 2015; présentée par consacrés aux motifs majeurs de l’œuvre, dans l’incar- Alexandrine Achille (Théâtre et photographie, pp. 1-8) nat des mots où se prend le style, avec des analyses de et par Florence Naugrette (Victor Hugo mis en scène, personnages romanesques particuliers et l’incontour- pp. 9-17), elle rassemble des clichés sur Ruy Blas vu nable tranchant de leur histoire». Si l’on était Barbey par Jean Vilar et Agnès Varda (pp. 18-46), Marie Tudor

sf177.indb 612 19/12/15 01.05 Ottocento 613

(pp. 47-55), Les Burgraves (pp. 56-66) avec un entre- d’abord été un observateur attentif et inquiet de l’ex- tien d’Antoine Vitez et Claude Bricage (pp. 67-71), pansion russe sous Nicolas Ier, particulièrement à par- Angelo, tyran de Padoue (pp. 72-88) avec Christophe tir de la guerre de Crimée, inquiétude qui ira grandis- Honoré. Ce cahier a donc l’avantage de donner à voir sant devant la politique expansionniste d’Alexandre II. des mises en scène récentes, outre quelques documents Sont alors rappelés ses contacts avec des Russes mon- anciens, manuscrits ou photos d’interprètes des années dains – à l’époque de La Guzla –, par exemple chez e 1870 au milieu du xx siècle. la bonne Mme Ancelot (confondue avec la Mme Azur [lise sabourin] de Stendhal), ou littérateurs, avec Mme de Lagrené et, plus tard, avec la comtesse Przezdziecka, sa découverte de Pouchkine, «son alter ego russe» dont il ne cessera Thierry Ozwald, Mérimée et la Russie, Paris, Euré- de promouvoir l’œuvre (bien qu’il n’ait pas été d’ac- dit, 2014, pp. 349. cord avec son interprétation de la figure de l’imposteur et qu’il ait souligné son insuffisance critique), sa cir- C’est à une réévaluation des rapports de Mérimée conspection à l’égard de celle de Gogol, et bien sûr la avec le monde russe qu’est consacré cet essai. Tout en rencontre en 1857 avec Tourguéniev qui inaugure un tirant parti des travaux antérieurs (voir la riche biblio- long commerce littéraire. graphie, pp. 311-327), Thierry Ozwald approfondit On en vient au vif du sujet avec la deuxième par- et renouvelle en bien des points l’interprétation de tie: «Malaise dans la civilisation européenne: le “syn- l’anthropologie pessimiste qui caractérise l’œuvre fic- drome métaphysique”» (pp. 80-135). Th. Ozwald voit tionnelle et l’œuvre savante de Mérimée. L’intérêt de dans La Guzla non seulement une matrice de l’œuvre l’analyse tient d’abord à la méthode choisie qui met en à venir, mais aussi les premiers linéaments du dia- évidence la singularité de l’entreprise de Mérimée, his- logue avec la Russie ou du moins avec l’orientalité de torien et slavisant, à une époque où la Russie est idéa- la Russie. À n’en pas douter, la «farce illyrique», qui lisée ou diabolisée, où une grande partie de l’opinion met en scène une violence invraisemblable souvent française est russophobe. Dès les années 1850, Méri- ignorée, est d’abord par ses outrances une «critique mée a conscience de l’antagonisme russo-européen acerbe des postures romantiques», surtout de la ten- qui ne peut aller que s’exaspérant dans l’Europe des dance à l’affabulation chez les premiers découvreurs nationalités. En tenant compte de l’histoire et de la re- des Slaves du Sud, les très fameux Morlaques et leur ligion russes, ce en quoi il se distingue du reportage non moins fameuse sauvagerie sans laquelle le credo polémique de Custine, aussi bien que des débats au- romantique de l’exotisme serait bien morne. Par-delà tour de la question du panslavisme, Mérimée élabore la satire, ce qui importe et que Th. Ozwald, qui a rete- une anthropologie historique de la violence dans la nu la leçon d’Edward Said, considère comme la ligne e e Russie et le monde slave des xvi et xvii siècles, aux de force que suit Mérimée, c’est que «l’exotisme orien- prises avec la barbarie et la civilisation. Déjà présente talisant masque en vérité l’incapacité notoire à pen- dans l’œuvre littéraire – en Corse, Mérimée cherchait ser l’autre, à le considérer dans son altérité» (p. 94). «la pure nature de l’HOMME» –, et dans l’Histoire de D’où la tendance à attribuer ou à projeter sur autrui sa Don Pèdre Ier, cette anthropologie se développe dans propre violence. Trois textes essentiels illustrent cet ail- les études consacrées à l’histoire de la formation de la leurs inquiétant qu’est l’Orient extrême, préfiguré par Russie, dans le but de «débusquer» et décrire ce que la Russie, et qui va hanter véritablement Mérimée: la Th. Ozwald nomme, en s’inspirant des analyses de Vision de Charles XI, où la Russie est présente comme René Girard, la «complexion mimétique». Si l’analyse «puissance originelle hostile et massive», L’Enlèvement de quelques-uns des grands moments de cette histoire de la redoute, où la terreur russe et le déchaînement met en évidence la violence et le carnage dans la ré- de la violence l’emportent comme le cauchemar sur la volte des opprimés, laquelle apparaît comme un cha- raison, enfin Lokis, dans une Lithuanie russifiée qui os, on peut s’interroger sur la validité d’une approche renvoie à une «réalité indicible». À la différence des qui tend à transformer la relation à autrui établie par tenants de la vision ethnocentrée de la Russie, espèce le sujet romantique en une instrumentalisation abou- de caricature de l’Autre, Mérimée, sans doute grâce au tissant à une perte d’identité. La «conception aber- voisinage de Tourguéniev, va «dépasser l’orientalisme rante de l’Autre», ou la «vision irréductiblement spé- colorisé à la russe». Sont alors repérés des analogies ou culaire de l’Autre» (p. 15), qui caractériserait le «moi» de parallélismes entre les deux œuvres, par exemple à romantique, arbitrairement confondu avec le «moi propos des effets nocifs du mimétisme, caractéristique impérieux» de l’Européen (E.W. Said), est fort discu- du modernisme bourgeois. Aussi relève-t-on dans les table car on peut tout aussi bien affirmer qu’il est arrivé récits exotiques de Mérimée, «une série de poncifs que aux romantiques de rencontrer et d’exalter l’Autre; de le narrateur s’emploie à faire s’agiter grotesquement» même pour la mention d’un «romantisme bien-pen- (p. 117); de même, dans ses préfaces à Pères et fils et à sant» qui aurait mérité quelques éclaircissements; mais Fumée, romans des années 1860 où Tourguéniev ana- il n’y a pas lieu de ferrailler. En revanche, tout en rap- lyse le malaise russe, il déplore la propension de la Rus- pelant qu’il y a eu de «bons Européens», on ne peut sie, en quête de son identité, à emprunter sans discer- qu’approuver Th. Ozwald quand il écrit que Mérimée nement à l’Occident. Tout aussi importantes, les pages révèle ce que cache le «tropisme exotique» d’une Eu- consacrées à l’accord des deux écrivains sur la question rope occidentale incapable de «penser le monde en de- du servage: le compte rendu que Mérimée donna en hors d’elle-même». Pour Mérimée, et Michel Crouzet 1854 des Mémoires d’un chasseur est un texte «capital» l’a clairement montré, dans la recherche de la vérité le par lequel il s’engage «en véritable militant». rapport avec l’histoire se confond avec le rapport au Intitulée «L’Anthropologie historique de Méri- savoir et à l’altérité. mée», la troisième partie est la plus ample (pp. 137- Avant d’examiner l’étude de l’histoire de la construc- 250). Hostile à toute forme de violence, particulière- tion de la Russie, et de s’enfoncer en pleine «cosaque- ment à la violence révolutionnaire, même si par ail- rie», Th. Ozwald rappelle, dans la première partie leurs il a de la sympathie pour le révolté, Mérimée – «À la rencontre du monde russe» (pp. 19-77) – que s’attache à montrer que le monde slave, parcouru par Mérimée, avant même d’être «féru de culture russe», a une violence pareille à une déferlante, livré à l’instinct

sf177.indb 613 19/12/15 01.05 614 Rassegna bibliografica

de destruction, est aussi le théâtre d’un processus ci- la matière historique une vaine trouvaille, une chose vilisationnel, c’est-à-dire d’un effort contre la violence inerte» (p. 206) –, ce qui lui permet donc de les dé- mimétique dans l’alternance dominants-dominés. La mythifier en examinant leur véracité. Il en va de même «passion» russe de Mérimée, on la découvre dans la tri- pour l’essai historique sur ces «adorateurs de la vio- logie que composent l’Épisode de l’histoire de Russie: lence» que furent à ses yeux les deux chefs de guerre les faux Démétrius (1853), l’Histoire du règne de Pierre cosaques, Bogdan Chmielnicki et Stenka Razine, es- le Grand (1864-1865 et 1867-1868) et Bogdan Chmiel- sai qui n’est pas, contrairement à ce qu’on a pu dire, nicki (1862-1863). La méthode de Mérimée dans son une simple traduction ou une adaptation de l’ouvrage enquête irait «à rebours de l’historiographie contem- de Kostomarov. La critique de Mérimée met à mal la poraine», dans la mesure où il s’opposerait «de toutes complaisante imagerie romantique du Cosaque (Hugo, ses forces» à l’idéologie des historiens libéraux et po- Byron, Liszt); sur ce point, Th. Ozwald réfute l’analyse sitivistes. Certes, Mérimée n’est pas «fataliste» comme qu’on a pu donner des «héros russes» de Mérimée, hé- Thiers et Mignet, ce qui ne l’empêche pas d’admirer sitant entre «la transgression sauvage et l’embourgeoi- l’œuvre du premier, mais dans son mode de connais- sement frénétique», analyse «trop tributaire de la my- sance et son rapport au passé, pour ce qui est de l’exac- thomanie romantique» (p. 234). Il n’y a pas chez Mé- titude critique de la représentation et de la conduite de rimée de fascination pour la violence qu’il condamne la narration, il nous paraît proche d’Augustin Thierry. sans appel; «bien au contraire, c’est le combat immé- Dans Les Faux Démétrius on aurait affaire à un anti- morial de l’humanité pour sa libération (libération qui Michelet dans la mesure où Mérimée s’efforce de ne délivre de la violence), qui l’intéresse au premier chef». pas intégrer les faits dans un système pré-établi, un peu Dans Les Cosaques d’autrefois, le scénario vertigineux à la manière de Fustel de Coulanges. C’est dans l’in- de la guerre perpétuelle («achever la guerre tout en la troduction à Stenka Razine (Les Cosaques d’autrefois, continuant») est décrypté dans toutes ses phases. 1865) que sont exposés ses principes d’historien: le Alors que Michel Cadot, tout en concédant à Mé- texte d’abord, puis les éléments légendaires (chansons rimée un talent d’habile vulgarisateur, avait relevé les populaires, traditions locales), soumis à un examen qui faiblesses et les lacunes de son entreprise, lui repro- préfigure la mythocritique (un bel exemple est donné chant, après Mongault, de ne pas «se soucier de la avec la déconstruction de la légende de Mazepa). Sou- signification profonde de l’épisode qu’il retrace», et cieux d’objectivité, Mérimée se garde des excès propres même d’avoir une conception de l’histoire «ornemen- à la déification aussi bien qu’à la diabolisation. De sa tale et romanesque» (La Russie dans la vie intellectuelle peinture du Temps des troubles, qui est au fond une française 1839-1856, rééd. Eurédit, 2014, pp. 387, tentative méthodique pour comprendre la lente et dif- 389-390), Jean-Louis Backès, dans l’édition critique ficile constitution d’une identité nationale, ressort une des Faux Démétrius (Champion, 2012), soulignait ses philosophie de l’histoire beaucoup plus proche que ne qualités d’historien; pour sa part, Thierry Ozwald dé- le pense Th. Ozwald de la pensée romantique, notam- montre que Mérimée, en jetant les fondements d’une ment du pseudo-hégélianisme de Cousin, avec l’accent anthropologie de la violence, a tenté d’expliquer les mis sur l’individu exceptionnel, particulièrement le li- faits et a été capable de faire revivre le passé russe dans bérateur ou le justicier. Th. Ozwald a néanmoins raison toute son originalité. C’est d’ailleurs à propos des Faux de rappeler que l’analyse mériméenne de l’histoire des Démétrius que Mérimée dira «avoir fait [s]on possible imposteurs repose sur deux principes: l’affaiblissement pour démêler la vérité et substituer à des hypothèses du sentiment national, d’une part; d’autre part, la loi du plus ou moins invraisemblables une explication plau- plus fort et de l’idolâtrie politique qui instaure le règne sible». de la violence et de l’imposture selon des scénarios im- [michel arrous] muables. Le récit n’est plus alors qu’un enchaînement d’épisodes violents dans lequel Th. Ozwald reconnaît un «processus sacrificiel» qui s’apparente à la «logique [Jean-Xavier Napoléon Vidal], Soupirs d’amour, du bouc émissaire» de R. Girard (aussi bien, semble-t- Œuvre romantique inédite du poète sanflorain Jean-Xa- il, qu’à la pensée de Maistre), logique déjà interrogée vier Napoléon Vidal, 1804-1878, édition intégrale et dans la Chronique du règne de Charles IX où l’on voit critique établie et annotée par Bruno Lagarrigue, Ni- à l’œuvre la destruction de l’Autre (chap. 17-22), «cet mègue (NL), Dr B.P.L. Lagarrigue [imp. Thoben Off- Autre abhorré […] né de soi-même» (p. 190). Cette ré- set Nijmegen à Malden (NL)], 2014, pp. 496. flexion sur la violence se double de considérations sur l’art de la guerre, et Th. Ozwald d’évoquer un Méri- Bruno Lagarrigue est un chercheur indépendant ins- mée polémologue et antirousseauiste qui juge que la tallé aux Pays-Bas, plutôt orienté vers l’âge classique, guerre a été l’état naturel de l’homme à ses origines, et à qui il est arrivé au cours de l’été 1998 cette bonne e qu’il se perpétue dans la Russie de la fin duxvi et du fortune de découvrir, «au fond des communs délabrés e début du xvii siècle, comme le montrent les rapports d’un château inhabité pendant plus de soixante ans», de force avec la Pologne, la Turquie, les Tartares, la en l’occurrence celui de la Chassagne à Pierrefort ra- Suède, les Cosaques… Le lecteur découvre Mérimée en cheté par ses amis après avoir appartenu au début du polémologue averti dont les réflexions sur la «science siècle à l’épouse du député du Cantal Armand Bory, du mal» préfigureraient les thèses de G. Bouthoul, par «une masse répugnante de vieux papiers» destinés exemple dans Boris Chmielnicki où sont analysés les à la décharge. Sauveteur puis dépositaire à partir de stratégies, les modalités de l’engagement, l’état d’es- 2001 de ce «trésor encore méconnu» composé de ca- prit des troupes. Avec l’Histoire du règne de Pierre le hiers de poèmes, de brouillons et de documents divers, Grand continue le questionnement sur la violence, dans il s’est senti investi de la mission de ressusciter leur au- la filiation directe de Voltaire dont Mérimée s’inspire teur, si modeste qu’il n’avait de son vivant publié que (pp. 207-209, 217-221). Il lit l’historien russe Oustria- deux poèmes, et sous le couvert de l’anonymat encore, lov dans le texte (avec l’aide de Tourguéniev), qui lui pour les cinq cents abonnés de La Haute-Auvergne. Au apporte les matériaux nécessaires à l’analyse des faits terme d’une enquête bien menée, Bruno Lagarrigue a – «Car sans un Oustrialov, pas de Mérimée possible; réussi à reconstituer la biographie de ce poète vraiment et sans un Mérimée, Oustrialov reste lettre morte, et inconnu et la retrace dans une préface remarquable.

sf177.indb 614 19/12/15 01.05 Ottocento 615

Né à Saint-Flour d’un père instituteur et d’une mère tôt les historiens, les sociologues et les érudits (pas for- marchande de tabac le 2 décembre 1804, jour du sacre, cément locaux) que les poètes. Mais on le recommande Jean-Xavier Napoléon Vidal n’avait pas volé son troi- aussi à tous les amateurs de curiosités éditoriales et lit- sième prénom. Son contrat de mariage, en 1833, l’enre- téraires. gistre comme expert géomètre. Il a un fils l’année sui- [jean-marc hovasse] vante. Une dizaine d’années plus tard, on le retrouve installé dans le Quartier Latin de Paris comme institu- teur et chef d’institution; il est décoré à deux reprises, Gérard de Nerval, Pandora et autres récits vien- en 1852 puis en 1856, par la Société pour l’Instruc- nois, textes présentés, éditées et commentés par Syl- tion élémentaire. Il achète un moulin à Roffiac en 1854 vie Lécuyer, avec la collaboration d’Éric Buffetaud et prend sa retraite à Saint-Flour au début des années et Jacques Clémens, Paris, Honoré Champion, 2014, 1860; il est inscrit au Salon littéraire de la ville à par- pp. 438. tir de 1864 et devient conseiller municipal en 1871. Il perd son fils unique, sculpteur, en 1862, sa femme en Vienne fut un lieu d’expérience affective majeure 1873, et meurt en 1878. Son bref hommage funèbre pour Nerval durant l’hiver 1839-1840 lorsqu’il obtint dans La Haute-Auvergne ne mentionne même pas son une mission qui allait lui conférer, croyait-il, la posi- goût pour les belles lettres. La fille de son demi-frère, tion sociale et financière stable qui lui fit toujours dé- en qualité d’exécutrice testamentaire, conserve ses pa- faut. Aussi, sous le patronage de Sterne, Casanova et piers et les transmet à sa mort, en 1908, à son cousin Hoffmann, entreprit-il de transfigurer par l’écriture germain le député Bory, lequel s’en débarrasse dans un son enthousiasme de voyageur, déjà visible dans sa coin du château de la Chassagne, apporté en dot par correspondance à son père, son observation de la vie sa femme. Depuis cette date-là, suivie de la disparition diplomatique, son expérience des salons autrichiens sans héritiers de leurs dépositaires, ils n’avaient pas re- et ses vagabondages sentimentaux. Naquirent ainsi les vu le jour autrement que par les fentes du plafond de Lettres de voyage parues dans «La Presse», les scéna- l’arrière-cuisine, qui laissaient passer juste assez d’eau rios dramatiques des Trois Ouvriers de Nüremberg et pour leur permettre d’échapper aux incendies. du Magnétiseur inspirés d’Hoffmann et de Grétry, des Retracée avec tant de détails, de documents d’ar- portraits de littérateurs pour les journaux viennois, les chives et d’études, l’histoire est si romanesque qu’on Amours de Vienne envoyées à Gautier qui, après paru- aurait pu la prendre, en des temps plus littéraires, pour tion dans la «Revue de Paris», finirent par intégrer Le une fiction – d’autant que le contraste entre cette œuvre Voyage en Orient à titre d’étape vers Constantinople. sauvée in extremis de l’oubli dont elle n’était jamais sor- Mais la «catastrophe» comme l’appelle Nerval – la tie et le luxe incroyable de sa publication ne laisse pas saisie d’une de ses lettres par la censure – suscita le be- de surprendre. Alors que tant d’auteurs, célèbres en soin de métamorphose du réel qui trouva finalement son leur temps, ont disparu et disparaissent chaque jour, issue dans Pandora. La compensation du fantasme dé- c’est ici le cas d’école d’un auteur complètement incon- plaça ainsi vers l’intervention de forces obscures la désil- nu qui entrerait directement en Pléiade 136 ans après lusion du succès. Sa fascination devant la pianiste Marie sa mort (cas très différent de celui de Jean d’Ormes- Pleyel, revue à Bruxelles à l’ombre de Jenny Colon, don- son, donc). Plus qu’une Pléiade, même: une édition na toute son ampleur à cette «dame brune» inspiratrice génétique imprimée en grand format sur papier bible, qui prolongea jusque dans les crises de 1841 et 1853- ou presque, avec des caractères typographiques «spé- 1854 la quête inaccessible de l’amour rêvé avant Aurélia. cialement créés pour cet ouvrage», illustrée d’une cin- Cette édition, outre une riche introduction (pp. 11- quantaine de photographies et de reproductions dans 98) et une annotation sérieuse de Pandora, fournit le le texte, bénéficiant d’un double système bicolore de texte de La Lettre sur Vienne, des Amours de Vienne, notes (les rouges et les noires), d’annexes fournies, les chapitres III à XIII Al-Kahira, souvenirs d’Orient. d’une bibliographie bien établie, d’un index nominum, Elle fait aussi le point sur la complexe genèse de cet en- et pour finir d’une belle reliure éditeur en toile. semble, donnant tous les documents (pp. 205-257) que Malgré l’enthousiasme sympathique et communica- sont les manuscrits des collections et la série de planches tif de son éditeur pour ce «monument de sensibilité» en fac-simile, ainsi qu’en annexes, la correspondance et ce «chef-d’œuvre littéraire», les écrits ressuscités de relative au séjour viennois de 1839-1840, les Souvenirs Jean-Xavier Napoléon Vidal n’obligeront pas à réviser intimes et Six Mois à Vienne d’Alexandre Weill, le scé- l’histoire de la poésie française, ni même auvergnate, nario du Magnétiseur, la traduction par Nerval de l’ar- e au xix siècle. Ils ne sont sans doute pas antérieurs ticle sur Camilla Pleyel paru en Silhouette d’artiste dans aux années 1860 et 1870, mais ce qui frappe surtout «L’Humoriste» de Saphir et le témoignage d’Antoni c’est qu’ils auraient pu être l’œuvre, abstraction faite Deschamps (pp. 259-382). des sujets d’inspiration politique, d’un chansonnier du [lise sabourin] caveau amateur de Voltaire autour de 1820 (qui aurait tout de même trouvé dans Chénier de quoi faire ce vers mémorable: «Orgéturix n’est plus, le courageux Hel- Théophile Gautier, Œuvres complètes, Romans, vète»). Il n’est regardant ni sur la rime, toujours ba- contes et nouvelles, tome 3, Partie carrée, Jean et Jean- nale et quelquefois incorrecte (indépendance/dépen- nette, texte établi, présenté et annoté par Françoise dance; facile/Mabille; repliées/imprégnées…), ni sur Court-Perez, Paris, Honoré Champion, 2014, pp. 501. le rythme: le vers «Paris essuyait le sang qui rougissait les rues» n’a jamais été corrigé; ses alexandrins, qui ne Le roman Partie carrée, d’abord intitulé Les Deux sont pas des vers libres, peuvent ainsi compter de 11 Étoiles en feuilleton et première publication, avant de à 14 syllabes. François Coppée cependant lui aurait trouver son titre définitif chez Souverain en 1852, est peut-être envié cette réussite qu’il faut chercher dans marqué par la dualité de personnalités troublées en le long poème misérabiliste intitulé «Rosa»: «Comme quête de leur véritable nature. Par ce steeple-chase aris- une jeune chatte elle adorait la crème»… tocratique, ce chassé-croisé de l’Angleterre à Sainte-Hé- Ce livre étonnant, qui s’achève par un bref Diction- lène, Gautier cherche à opérer le syncrétisme des romans naire des arts divinatoires, intéressera donc a priori plu- d’aventures, de conspiration et d’exotisme, avec son éru-

sf177.indb 615 19/12/15 01.05 616 Rassegna bibliografica

dition habituelle et sa fantaisie ironique. La description «Chopin Liszt» (i.e. «shoppin’ list» pour ne rien ou- de la beauté pure et du pittoresque réaliste fait s’entre- blier des courses). Cornelia Szabo-Knotik répertorie croiser les rues londoniennes et les paysages orientaux, les voyages européens qu’effectua Liszt au long de sa tandis que le refus du roman maritime à la Sue profite carrière, en diligence, en vetturino, en chemin de fer ou au symbolisme à la Cooper. Sur fond d’épopée napoléo- dans sa luxueuse voiture à la Offenbach, afin de définir nienne, néantisée par l’imprécision volontaire des data- son expérience spatio-temporelle (Travelling Europe tions, surgit l’actualité de 1848, sans portée politique tou- – Franz Liszt’s Experience of Space, pp. 79-100). Marie- tefois chez ce désabusé du romantisme comme de toute Claire Mussat (La Musique de l’Océan. Liszt et la Bre- idéologie. Gautier préfère fuir dans un passé immémo- tagne, pp. 101-121) refait ceux qu’accomplit Liszt en rial herméneutique ou s’évader dans un futurisme pré- Bretagne, avec leurs échos directs, en 1834 pour visi- vernien. L’Orient lui offre, par l’inspiration des planches ter Lamennais à la Chênaie, et en 1845, dans le cadre d’Edward Moor et la traduction du Sacountalâ de Kali- d’une tournée dans l’Ouest de la France où il fit of- dasa par Chézy en 1830, et grâce aux conversations in- fice de médiateur culturel. On découvre les liens qui diennes de Méry, tout ce qui convient à son goût de la attachent à l’Océan le jeune musicien qui prend d’ail- volupté, de la fureur, du mystère et de l’humour. leurs le temps de composer Crux. Hymne des marins, Jean et Jeannette explore une autre voie du roma- d’après une ode écrite par un érudit de Brest, pièce nesque amoureux traité avec persiflage, par son goût jouée en 1866 dans cette même ville et peu après à la Régence si apprécié du Doyenné dès 1834. Roman Sorbonne. Imre Kovacs retrace l’environnement his- d’apprentissage, roman galant, roman de genre conver- torique et culturel de la cantate, publiée en 1884, ins- e gent en un pastiche rococo jouant à la pastorale de cour. pirée par Les Poètes Franciscains en Italie au xiii siècle Cette comédie de l’amour chez des grands rêvant d’une de Frédéric – et non Antoine! – Ozanam, l’essai de Rio vertu absente de leurs mœurs suscite des tableaux plus sur la poésie chrétienne et La Vie de Sainte Élisabeth de th plastiques qu’analytiques, inspirés de Boucher, Frago- Hongrie de Montalembert (On the xix -century Recep- nard, Lancret et Watteau, corrigés en intérieurs plus tion History of Saint Francis: Liszt’s “Cantico del Sol di bourgeois par Chardin, tandis que le ton relève du Mo- San Francesco d’Assisi”, pp. 125-141). Après avoir fait lière des Précieuses ridicules ou d’un marivaudage sans l’historique de la création et des transformations su- profondeur: Gautier s’amuse à ressusciter le monde dé- bies par La Marseillaise, Laurence Le Diagon-Jacquin funt de l’avant Révolution française, avec une cocasse- considère l’hymne, qui n’était pas encore national, rie grotesque qui refuse de se laisser aller à la nostalgie. comme un matériau dont Liszt s’est emparé avec bon- Françoise Court-Perez donne une annotation très heur: en 1845, lors d’un concert à Nantes, il improvise détaillée, bien utile pour mieux apprécier les allu- sur l’appel des révolutionnaires dont il se sent proche, sions de cet auteur si cultivé (dommage que parfois appel qu’il pense intégrer à sa Symphonie révolution- les notes manquent de synthèse, comme découvrant naire, projet de musique humanitaire qu’il ne réalise- des faits historiques ou culturels assez connus, ou re- ra pas. Autre exemple, avec l’Héroïde funèbre qui cite cèlent quelques coquilles, répétitions et erreurs: Lu- La Marseillaise. Mais, à la fin des années 1840, l’aspect ciennes pour Louveciennes, p. 440; deux fois la même symbolique révolutionnaire disparaît car l’hymne de- note p. 446; la Chersonèse présentée comme une ville vient aux yeux de Liszt une apologie nationaliste de et non une péninsule, p. 462). Mais ses introductions la violence. À ce propos, on lira avec intérêt sa protes- (pp. 11-92 et pp. 289-351) sont très éclairantes pour tation de 1874 contre les «aberrations démagogiques» faire comprendre le lien entre ces deux romans parus de V. Hugo («Allons enfants…» ou la Marseillaise: mes- dans «La Presse» en 1848 et 1850 quoique à la gesta- sage universel dans l’imaginaire lisztien?, pp. 143-163). tion fort différente, de tons si décalés, mais unis par Dans la section «Liszt et la Religion», deux contri- l’amour du jeu. butions seulement, ce qui peut paraître fort peu quand [lise sabourin] on pense à la religiosité de Liszt. Ágnes Watzatka fait un tableau fouillé des conditions moralement difficiles dans lesquelles fut composée la messe pour le couron- er Aa. Vv., Franz Liszt. Un musicien dans la cité, sous nement de François-Joseph I roi de Hongrie, exécu- la direction de Cornelia Szabo-Knotik, Laurence Le tée à Bude le 8 juin 1867, sans que Liszt y fût officielle- Diagon-Jacquin et Michael Saffle, Paris, Hermann, ment invité. Par-delà les péripéties que dut surmonter 2013, pp. 385. le compositeur, l’œuvre est intéressante parce qu’elle offre la synthèse du national et du religieux (Piété, Voué à la musicologie, ce volume des actes du col- politique et musique: la “Messe du couronnement” de loque de Rennes en septembre 2011, sans doute moins Franz Liszt, pp. 167-187). Moins connues, les dernières varié que le précédent, offre cependant le résultat d’in- œuvres sacrées (oratorios, chorals, motets), qui ne sont vestigations nouvelles sur l’engagement de Liszt dans plus au sens strict de la musique liturgique car elles la vie musicale et artistique de son époque, et même sur n’étaient pas destinées au service religieux, font l’objet son influence tout au long du siècle et au-delà. d’une analyse stylistique de la part de Patrick Boenke Dans La musique de Liszt au miroir de Lina Ramann. (Outside the Public Sphere: Liszt’s Late Sacred Works as Symphonie en quatre mouvements (pp. 27-45), Rossa- Private Art Inspired by Religion, pp. 189-205). na Dalmonte présente la «courageuse biographe» James Deaville illustre, cette fois de manière moins (l’expression est de Liszt) qui, après avoir rédigé sur anecdotique, la gloire de Liszt (Theodore Thomas, th le Christus un essai qui émut le musicien, joua un rôle George P. Upton, and Franz Liszt: Educating xix cen- déterminant dans sa réception en publiant de 1880 à tury Chicago to and through the “Music of the Future”, 1894 les trois volumes de son Franz Liszt als Künstler pp. 209-224). Le chef américain Th. Thomas a fait und Mensch. Avec Collecting Liszt(iana) (pp. 47-75), connaître et apprécier à ses compatriotes les poèmes Michael Saffle aborde un aspect plaisant de la gloire, symphoniques de Liszt, à partir de 1864, à New York la Lisztomanie, pathologie inoffensive mais très néces- et dans ses tournées, à la suite de l’initiative d’un chef saire puisqu’elle contribue à assurer la survie des ma- local soutenu par le critique G.P. Upton. Autre décou- nuscrits, journaux intimes, feuilles de musique, lettres, verte, la réception de Liszt en Italie, précisément à jusqu’aux brimborions les plus inattendus, telle cette Florence, des années 1840 aux années 1880, grâce à la

sf177.indb 616 19/12/15 01.05 Ottocento 617

collaboration d’Annarosa Vannoni et Lucia Navarini Eugène Labiche, La Dame aux jambes d’azur, dos- Dell’Atti qui posent des jalons pour La réception de sier et notes par Olivier Bara, lecture d’image par Liszt dans la presse périodique musicale de Florence au Pierre-Olivier Douphis, Paris, Gallimard, 2015, «Fo- e xix siècle (pp. 225-264), en examinant les périodiques lioplus classiques», pp. 124. parus dans la capitale toscane dans les années 1840- 1850 et 1860-1870 (mentions des concerts donnés La Dame aux jambes d’azur est une petite pochade par Liszt, interprétations de certaines de ses œuvres, en un acte écrite par Labiche avec Marc Michel, le compte rendus d’études, traduction du fameux essai même collaborateur qui l’assiste pour certaines de ses de La Mara, manifestations en l’honneur de Liszt). pièces les plus célèbres, comme Un Chapeau de paille «Identités», ainsi s’intitule la dernière section. Après d’Italie ou L’Affaire de la rue de Lourcine. Elle a été avoir exposé la complexe histoire de la Silésie dans les représentée pour la première fois au théâtre du Palais- années 1840 et 1850 marquées par des mouvements ré- Royal en 1857 et a été composée spécifiquement pour volutionnaires, Małgorzata Gamrat évoque les séjours les comédiens de ce théâtre, qui y apparaissent princi- de Liszt, surtout chez le prince Lichnowsky (Liszt en palement dans leur propre rôle. Silésie, pp. 267-285). Dans ce pays, Liszt est devenu Il s’agit en effet d’une pièce fortement métathéâ- le personnage d’un poème célèbre de P. Kibisz (1902- trale, qui met en scène la troupe du Palais-Royal en 1963) et sa légende y est encore vivace. Avec Margit train de répéter, au milieu de mille petites tracasseries Rahkonen, nouvel apport concernant la présence de cocasses, une pièce imaginaire intitulée justement La Listz en Finlande (Liszt’s Students and Performances Dame aux jambes d’azur, qui a des allures de mauvais of Liszt’s Piano Music at the Helsinki Music Institute, drame historique, voire de mélodrame, et qui est cen- 1882-1894, pp. 287-299), où l’on voit, à travers l’évo- sée se passer dans une improbable Venise de la Renais- cation des professeurs de piano qui dirigèrent l’Insti- sance et dans un décor de forêt. Les répétitions, inter- tut de musique d’Helsinki, comment l’œuvre de Liszt rompues presque à chaque réplique par des détails tri- a conquis la Finlande. Et la Russie? Liszt donna son viaux sur la vie privée des acteurs ou par des considé- premier concert public à Saint-Pétersbourg en 1842, rations sur les ficelles du spectacle, ne sont qu’un pré- en 1843 à Moscou, puis en 1847 en Ukraine. Grâce texte pour des scènes drôles et pour une encore plus aux contributions de Marina Chernaya (Liszt’s Traces réjouissante déconstruction du monde théâtral dans in Russian Culture: On the Problem of Interactions with ces premières années du Second Empire. Contemporary, pp. 301-308) et de Galina Ovsyankina Le riche dossier signé par Olivier Bara accompagne (Liszt’s Ideas in Russian Music, pp. 309-320), on décou- le lecteur à la découverte de ce monde, lui permettant vrira les relations de Liszt avec les compositeurs russes de comprendre les enjeux d’une satire autrement dif- et son influence décisive sur l’école russe de piano, no- ficiles à saisir, faute des référents culturels appropriés, tamment Glinka, Borodine et Rubinstein, à l’exception et donc de goûter pleinement l’humour décapant de de Tchaikovsky dont les conceptions s’éloignaient par l’œuvre. Olivier Bara commence par situer la pièce trop de celles de Liszt, ce qui n’empêcha pas ce der- dans le contexte littéraire et théâtral de son temps. nier de travailler à un arrangement pour piano de la D’une part, il évoque le climat de «fête impériale» qui polonaise d’Eugène Onéguine. Zsuszanna Domokos domine les spectacles du Second Empire, dont La- offre un dernier aperçu de l’influence de Liszt et de biche et Offenbach représentent les figures de proue, ses activités, cette fois en Hongrie où il se rend en 1840 et qui offre un éventail de genres bouffes, parodique et et 1846, à une époque décisive dans la formation de la débridés: pochade, vaudeville ou opérette. De l’autre, nation et la mise en place de ses institutions culturelles. il retrace le déclin et les survivances du théâtre roman- Ce mouvement, Liszt l’accompagnera en donnant gra- tique et l’essor du nouveau drame d’idées ou comédie cieusement des concerts, en intervenant comme com- sérieuse avec Dumas fils et Émile Augier. L’ironie de positeur, directeur d’orchestre (pour la première du Labiche prend tous ces genres pour cibles. Une deu- poème symphonique Hongrie au Théâtre National en xième partie du dossier analyse donc la dimension 1856, et il ne manque jamais d’inclure dans ses pro- intertextuelle et parodique de La Dame aux jambes grammes l’air national, la Marche de Rakoczy dont il d’azur, dont le drame romantique à la Victor Hugo est introduira un arrangement dans la Rhapsodie hongroise la cible principale. Une troisième partie suit enfin l’his- n. 15), voire comme fondateur ou soutien de sociétés toire du texte à travers ses différents états et variantes, de musique. En 1873, à Budapest, il est honoré pour dues aux remaniements successifs d’une première ver- son cinquantième anniversaire; en 1874, à plusieurs sion de 1853 à celle définitive de 1857, aux interven- reprises, il proteste de son «religieux dévouement» à tions de la censure, ici très légères, et surtout à l’inté- son pays et se déclare touché par la bienveillance de gration progressive des données scéniques comme les ses compatriotes. En 1885, il eut aussi le projet de don- costumes, les positions des personnages sur le plateau, ner des leçons, une master class, à l’Académie royale de l’intervention sur scène du machiniste. musique. Ágnes Warzatka a signalé que, les relations Complètent le dossier une petite anthologie de de Liszt avec sa patrie ne connurent qu’une seule crise, textes comprenant des exemples de théâtre dans le déclenchée par la publication en 1859 de son livre sur théâtre, de Shakespeare à Pascal Rambert, une chrono- la musique des Bohémiens; mais dès 1861 les soupçons logie bio-bibliographique sur «Labiche et son temps» sur son patriotisme disparurent pour laisser place au (1815-1888) et un commentaire sur le décor de forêt héros national incontesté de la nation hongroise. du Théâtre de la reine au Petit Trianon par Pierre-Oli- Bien des contributions ici rassemblées témoignent vier Douphis. d’un patient travail de recherche que l’établissement Simple et clair sans jamais devenir simplificateur, d’une Correspondance générale – encore au stade de pro- didactique dans le plus noble sens du terme, ce petit jet – permettrait sans aucun doute d’approfondir. Néan- volume a beaucoup à apprendre à toutes sortes de lec- moins, l’érudition lisztienne des intervenants permet au teurs, en plus de nous faire découvrir une pièce ou- non-spécialiste de découvrir, dans ses configurations géo- bliée, au charme suranné et intemporel à la fois d’un graphiques, le parcours esthétique et politique de Liszt. «envers du décor» et d’une critique théâtrale mise en action. [michel arrous] [valentina ponzetto]

sf177.indb 617 19/12/15 01.05 618 Rassegna bibliografica

Ottocento b) dal 1850 al 1900, a cura di Ida Merello e Maria Emanuela Raffi

Giuseppe Bernardelli, Baudelaire nelle traduzioni si assiste a un significativo passaggio dalla valutazione italiane, con un saggio di Davide Vago, EDUCatt, Mi- (salvo il caso di Sonzogno) di un Baudelaire «della lano 2015, pp. 83. degerazione e della decadenza morbosa» a un Baude- laire «che pone volontariamente tra il proprio dolore La scarsa attenzione rivolta al saggio che nel 1972 e il volgo impudente il diaframma della perversione e Giuseppe Bernardelli pubblicò nel volume miscellaneo dell’impudenza». Questa importante svolta interpre- Contributi dell’Istituto di filologia moderna (Serie fran- tativa, che troverebbe le sue maggiori ragioni nel Mon cese, vol. VII, Vita e Pensiero, pp. 345-397, pagine che cœur mis à nu, si sviluppa in ambito vociano (soprat- infatti non sono state nemmeno segnalate nella nostra tutto per merito di Soffici), traendo relativa confer- rassegna dell’epoca) induce Davide Vago a riproporlo ma dalle traduzioni degli anni dieci (Icilio Bianchi, ora, a più di quarant’anni di distanza, illustrandolo con Vincenzo Oloysio, Paolo Buzzi, Giosafatte Tedeschi, una breve postfazione nella quale sono anche tracciate Decio Cinti). Bernardelli ha avuto il merito di tenta- alcune linee guida per un suo opportuno proseguimen- re, come si è detto, una periodizzazione, articolandola to e aggiornamento. in tre tempi, dell’intensa attività letteraria volta a tra- Il giovanile lavoro di Bernardelli si segnala soprat- sporre Baudelaire nella lingua poetica italiana. Il pri- tutto per la precisione e la compiutezza con cui ri- mo tempo (1893-1920), rappresentato da Sonzogno, sultano elencate le traduzioni italiane delle Fleurs du Buzzi e Cinti, si caratterizza per la serietà e umiltà tra- Mal e dei Petits poèmes en prose (ne sono registrate duttoria, la cui migliore prova risulta appunto quel- 96) pubblicate fra gli ultimi decenni dell’Ottocento la di Riccardo Sonzogno. Il secondo (1920-1950) è fino al 1970 circa. Naturalmente non si tratta soltanto quello di un ambizioso «baudelairismo trionfante» di di una rassegna. Bernardelli si è avventurato nell’ar- carattere «aulico-dannunziano», che presume di tra- duo compito di valutare la ricca attività traduttoria sporre con mezzi metrici la poesia di Baudelaire. Ber- che in Italia ha interessato l’opera poetica baudelai- nardelli segnala tuttavia, in questo periodo da lui giu- riana, cercando anche di delinearne una periodizza- dicato non particolarmente felice, le eccellenti riusci- zione. I primi echi di Baudelaire nel nostro paese si te di Diego Valeri. Il terzo (1950-1970) «nasce come rivelano con chiarezza in Emilio Praga, specialmen- reazione al dilettantismo e alla magniloquenza della te nella sua raccolta Penombre (1864), nel Re Orso traduzioni precedenti» e avrebbe in Luigi De Nardis (1865) e nel Libro dei versi (1877) di Arrigo Boito, in e Francesco Di Pilla i suoi più persuasivi esempi. La taluni aspetti della Scapigliatura lombarda e piemon- conclusione generale dell’indagine è peraltro la se- tese fino a trovare in Carducci un convinto, anche se guente: «I traduttori di Baudelaire, nonostante l’im- provvisorio, estimatore. L’Italia meridionale manife- pegno di personalità indubbiamente preparate e ac- sta anch’essa un vivo interesse per Baudelaire (Maria corte (ricordiamo Valeri, Parronchi, De Nardis ecc.) e Antonio d’Albavilla, Ermanno Scuderi, Francesco non sono mai andati più in là del risultato decoroso Muscogiuri, Trifone Nutricati…). Fra il 1870 e 1890 o gradevole. E poiché questi tentativi in sostanza ste- la fortuna di Baudelaire si esprime prevalentemente rili si distendono sul considerevole arco di ottant’an- con la traduzione dei Petits poèmes en prose esegui- ni (1893-1970), si può ascrivere ormai con qualche ta nel 1880 da Gerolamo Ragusa Moleti, già autore a fondamento la poesia di Baudelaire a quel tipo i cui Palermo, nel 1878 (Stamperia Montes, Girgenti), di valori non sopportano l’operazione linguistica della «un Carlo Baudelaire, probabilmente la prima mono- traduzione». grafia in assoluto dedicata in Italia al poeta francese». [mario richter] In questo stesso periodo pesa invece su Les Fleurs du Mal, in parte compromesse dalle maldestre caricature inizialmente eseguite dalla Scapigliatura, il giudizio di Federica Locatelli, Une figure de l’expansion. La Carducci, nel frattempo divenuto ostile nei riguardi périphrase chez Charles Baudelaire, Berne, Peter Lang, di Baudelaire, a cui si vuole attribuire la responsabi- 2015, pp. 194. lità degli esiti dannunziani e decadenti di fine secolo. Gli interventi critici si rivelano, nel complesso, par- Dedicato all’aspetto linguistico delle Fleurs du Mal, ticolarmente sensibili agli argomenti presenti nella il saggio di Federica Locatelli è introdotto da una pre- Notice elaborata da Théophile Gautier per l’edizione fazione di Michel Deguy in cui la poesia è vista soprat- postuma delle Fleurs du Mal (Lévy del 1868). Di note- tutto come «débat» e la poetica come «Théorie du voi- vole rilievo è la prima traduzione completa, in prosa, sinage ou éloignement ou rapprochement(s)» e in cui del libro poetico di Baudelaire, quella dovuta a Ric- la perifrasi, oggetto privilegiato dello studio, è indicata cardo Sonzogno (Milano 1893), scrittore in proprio come la figura per eccellenza dell’avvicinamento e del di scarsa fortuna, che tuttavia ha saputo capire per- détour, figura più creativa che comunicativa. fettamente «la complessità della poesia di Baudelai- Lo studio è diviso in tre parti. Nella prima Federica re, tesa miracolosamente al limite del sublime e del Locatelli presenta un quadro d’insieme delle ricerche grottesco», mettendo in guardia dai «facili approcci». poetiche simboliste, sottolineando la necessità sentita Con indubbia pertinenza Bernardelli ha sottolineato dagli autori di rielaborare il linguaggio per farlo arriva- l’«asciuttezza linguistica» e l’«efficace umiltà traspo- re all’inesprimibile, al sogno, alla sacralità del mistero; sitiva» di questo intelligente traduttore. Dallo scorcio tale sforzo comporta secondo l’A. un allargamento del- dell’Ottocento ai primi due decenni del secolo scorso la retorica che deve corrispondere a questa nuova po-

sf177.indb 618 19/12/15 01.05 Ottocento 619

etica, allargamento in cui Baudelaire ricopre un ruolo critica a sua volta divisa in due parti: l’elenco alfabetico fondamentale. Dopo alcuni paragrafi dedicati alla de- dei testi critici su Le Spleen, e, viceversa, l’elenco dei finizione della figura della perifrasi sia sotto il profilo componimenti con l’indicazione dei critici che se ne sintattico e lessicale che sotto quello semantico, anche sono specificamente occupati. utilizzando testi baudelairiani, l’autrice arriva a rico- [ida merello] noscere alla figura la capacità di creare «dans la chaîne du sintagme une ‘ré-union’ d’éléments à l’origine désa- grégés, ré-ordonnés selon la faculté synthétique de l’i- Pierre-Marc de Biasi, Anne Herschberg Pierrot magination artistique». L’A. analizza quindi, in tutta la & Barbara Vinken, Flaubert. Les pouvoirs du mythe, t. parte centrale dello studio, questo strumento di ricer- 1, Paris, Éditions des archives contemporaines, 2014, ca poetica utilizzato da Baudelaire, applicandolo a tre pp. 182. categorie fondamentali: «l’individualité», «le temps» e «l’espace». La «Renaissance orientale» è lo specifico mito nel Riprendendo il concetto di «nomination» utilizzato segno del quale viene letta, in questa serie di contri- da Deguy come ricerca del senso, l’A. studia la pre- buti, l’opera di Flaubert, ancora più largamente incor- senza dei nomi propri nell’opera baudelairiana soprat- niciata da una riflessione sul mito e la mitografia nei tutto nella «nomination biblique», comprensiva della rapporti fra la cultura tedesca e quella francese. L’am- ripresa di forme sintattiche, di parafrasi dalle Scritture piezza del progetto è chiaramente tracciata da Barbara e di trasposizioni dell’immaginario biblico. Vinken nell’avant-propos del volume e ripresa nell’In- La metafora del viaggio, che percorre largamente troduction di Anne Herschberg Pierrot che, dopo Les Fleurs fino all’approdo all’Inconnu, si manifesta aver mostrato la complessità e ricchezza di contenuti anzitutto per l’autrice sull’asse temporale, attraverso nella combinazione di mito antico e mito moderno in il concetto di «Infini» e un’ossessione per il trascor- Flaubert, presenta sinteticamente il volume. rere del tempo particolarmente evidente in «L’Hor- La prima delle tre parti in cui è diviso il volume af- loge» e «Les Sept Vieillards», poesie di cui mette in fronta «l’intertexte franco-allemand» nel rapporto fra luce l’amplificazione operata dalla struttura perifra- miti e simboli. Michel Espagne tratteggia soprattutto stica, all’opera anche in altri testi poetici («Harmonie il panorama storico-culturale dello studio del mito sul du soir», «Crupuscule du soir», «Crepuscule du ma- versante tedesco: da Heyne a Voss e Creuzer e da Wel- tin»), in cui appare tuttavia un diverso ordine tem- cker a Usener vengono presentati studi filologici di di- porale, infinitamente reiterato, creazione della poesia verso orientamento, ma tutti legati ad una lettura sim- e sottratto all’ordine naturale. Questo «contretemps» bolica dei miti antichi. È ciò che accade nella filologia poetico è ciò che caratterizza per l’A. la concezione classica tedesca almeno fino all’incontro con gli scritti baudelairiana del tempo, di cui la perifrasi appare di Renan nella «Revue germanique» e al nuovo rap- emblema. porto fra mito e pensiero naturale, che Agnès Bouvier La dilatazione dello spazio, ultima operazione peri- illustra nel suo studio Au rendez-vous allemand: la “Re- frastica esaminata, prende avvio dalla celebre afferma- vue germanique”, ou la philologie allemande au service zione di «Correspondances» («l’expansion des choses de la libre pensée française, in cui mette in risalto an- infinies») e accompagna tutto il viaggio del Poète: «le che il fondamentale apporto degli articoli scientifici e lieu du ‘voyage’ poétique apparaît ainsi comme une di quelli relativi all’origine delle lingue nel dibattito fra étendue immense, vague et indéfinie, se prolongeant materia e spirito che la rivista ha prodotto. All’impor- «en haut, en bas, partout»: l’homme baudelairien voit tante filologo tedesco Max Müller, introdotto in Fran- l’Infini «par toutes les fenêtres». Segue un’analisi det- cia da Renan, è dedicato l’articolo di Bertrand Mar- tagliata dei diversi luoghi in cui, nell’itinerario delle chal, Max Müller le tueur des mythes, suivi de Notes Fleurs, si espande il soggetto baudelairiano: «Se plon- sur Flaubert et Müller, in cui l’A. rileva i suoi tre ambiti ger dans la ville», «Se plonger dans la mer», «Se plon- fondamentali di intervento – «la science du langage», ger dans le gouffre». che si occupa del linguaggio non come mezzo ma come Nello studio, arricchito da tre annexes sulle occor- oggetto di studio; «la science des mythes», principale renze di nomi propri e altri aspetti linguistici in alcu- settore di investigazione del fondatore della «mytho- ni importanti poeti della seconda metà dell’Ottocento, logie comparée» e «la science de la religion» fondata preme con una certa evidenza la volontà di annette- sulla separazione fra mitologia e religione – e la loro re tout court Baudelaire al Simbolismo e di sorvolare influenza su Flaubert. In De Fontenelle à Dupuis: cha- sull’uso di termini realistici e non vaghi spesso presenti pitres de l’histoire de la mythographie, Ildikó Lörinzky nelle Fleurs. In questa prospettiva, che fa quasi coin- colloca la sua ricerca nel xviii secolo iniziando da Fon- cidere Baudelaire e Mallarmé, la perifrasi appare in- tenelle, autore molto apprezzato da Flaubert, e dalla dubbiamente la figura centrale della raccolta poetica. sua idea dell’origine psicologica dei miti, continuan- do poi con Vico (il mito visto come parte della filoso- [maria emanuela raffi] fia della storia) commentato da Michelet e infine con Charles de Brosses, volto a decifrare il carattere feti- cistico dei miti. Andrea Schellino, Bibliographie du “Spleen de Pa- La seconda parte del volume – «Idoles. L’empire ris”, Paris, Classiques Garnier 2015, pp. 211. de l’hagiographie» – considera più da vicino le opere di Flaubert, a partire dallo studio a due voci di Clau- Dopo i recenti saggi su Le Spleen de Paris, ecco ora, de Mouchard e Jacques Neefs, Flaubert et l’histoi- sotto la direzione di André Guyaux, questa beneme- re des religions: “La Tentation de Saint Antoine”. Gli rita bibliografia, immediatamente incontournable, che autori si interrogano in particolare sull’uso che Flau- ha utilizzato la rete di conoscenze creatasi intorno al bert fa dell’enorme erudizione raccolta e delle altret- convegno del 2011, in Sorbonne, su Baudelaire dans le tanto estese «puissances figurales» che essa consente, monde, per poter tenere veramente conto dell’interesse studiando particolarmente il materiale religioso e il mondiale sul poeta. Il lavoro si divide in una bibliogra- suo incrociarsi con i miti antichi. «La fascination re- fia delle edizioni e delle traduzioni, e una bibliografia ligieuse» è ciò che l’opera flaubertiana mette in sce-

sf177.indb 619 19/12/15 01.05 620 Rassegna bibliografica

na, sia come percorso nella storia delle religioni, sia la religione risente anche del dibattito introdotto da come progressione del testo, che passa, nelle diverse Cousin sulla filosofia hegeliana e della diretta lettu- edizioni, dal fascino delle divinità all’«extase» della ra dell’Esthétique da parte di Flaubert, l’autore del- materia e alla potenza fascinatoria della scrittura. In la Tentation e di Salambô arriva tuttavia a conclusioni Le défilé des dieux, de l’idole primitive à Loulou, Syl- diverse: «Alors que la désymbolisation implique une vie Triaire propone una lettura della progressiva sop- pensée du devenir, une dialectique, l’infini flauber- pressione della figura divina («le Dieu d’Israël») nel- tien dépend d’un travail de la forme. Il est du côté le successive edizioni della Tentation. Dal legame fra du déploiement sans fin de la vie». Pierre-Marc De religione e mitologia delle due prime edizioni si passa Biasi conclude il volume con una riflessione sulla no- infatti per l’A. alla separazione della mitologia diven- zione stessa di simbolismo: Le processus symbolique. tata scienza e oggetto di studio della linguistica ne- Symbole et désymbolisation dans “La Légende de Saint gli anni della terza edizione; «le Dieu d’Israël» viene Julien l’Hospitalier”. Il valore del simbolo per Flau- quindi progressivamente abbandonato e separato da bert appare all’A. soprattutto legato alla sua rarità e un Cristo divenuto simbolo vuoto di «un désir collec- alla sorpresa che produce e dunque a generi brevi co- tif de croyance». Trois contes costituisce per la Triaire me l’aforisma e l’apologo, pur nel contesto della vita la continuazione di quest’opera di separazione di Cri- quotidiana. Il lavoro del lettore flaubertiano appare sto dal «Dieu d’Israël» e della sua spersonalizzazione. in buona parte come la ricostruzione di un significa- A Hérodias e alla sua particolare versione della na- to che il processo simbolico del testo presenta come scita del cristianesimo «radicalement différente de la «un manque» in cui inserire «l’autre moitié de l’objet Bible» è dedicato anche lo studio di Barbara Vinken brisé». La «désymbolisation», concetto elaborato ne- (“Hérodias”. L’Église catholique romaine: fille de Ba- gli anni quaranta dell’Ottocento e ripreso dalla criti- bel) che affronta anzitutto il problema dell’«incom- ca – e dallo stesso De Biasi – a partire dalla fine degli préhensibilité» del racconto, dovuta secondo l’A. al- anni 1970, viene qui utilizzato per l’immagine di «Ju- la reinterpretazione dei miti della storia romana che lien tueur de dragon», dove il progressivo modificar- Flaubert opera contro la Chiesa cattolica romana, ro- si del nome del mostro evocato in relazione a diverse vesciando e snaturando le immagini bibliche: «Flau- leggende, lascia trasparire la presenza del «conteur» bert situe le christianisme dans le culte de Cybèle et che si appella alla veridicità della sua versione e lavora en fait une religion primitive mythique et, en tant que a sua volta per la «désymbolisation». telle, une phallolatrie». «Mythes. La réécriture symbolique», terza parte [maria emanuela raffi] del volume, si apre con un contributo di Henri Mit- terand – Zola: le jeu du mythe – che riporta l’attenzio- ne, con la consueta chiarezza e precisione, sull’ogget- Kate M. Bonin, Troubadours, Taxidermy, and Tran- to letterario, il romanzo, e sul suo funzionamento, la scendence: Reading Flaubert’s “Un cœur simple” with fiction narrativa. Coerentemente, i miti sono conside- Sand’s “Les ailes de courage”, «The French Review», rati come récits e classificati secondo tre tipi fonda- n. 3, March 2015, pp. 177-187. mentali: «les mythes abstraits» o meglio definiti con nomi astratti che traducono un aspetto dell’esistenza I numerosi legami fra il racconto di Georges Sand («le paradis perdu», «la fraternité meurtrière», «l’éter- Les ailes du courage e Un cœur simple di Flaubert, che nel retour», ecc.); «les mythes sans dieux ou noyau lo segue di qualche anno e i loro comuni legami con thématique originaire», coagulo di senso stratificato il mito rousseauiano dell’«enfant de nature», mediato su un personaggio reale o fittizio (Don Juan, Robin- anche da Bernardin de Saint-Pierre, sono il punto di son Crusoë, Jeanne d’Arc, Schéhérazade, ecc.); «les partenza della riflessione dell’A., che sottolinea pun- mythes médiatiques, ou dégradés», consacrati da una tualmente le somiglianze fra Clopinet e Félicité e al presenza temporanea nel discorso collettivo ed emble- tempo stesso la loro diversa parabola sociale, conclusa matici di un’epoca (Marilyn Monroe, la DS, ecc.). In con il successo di Clopinet e la sua simbolica trasfor- letteratura, e in particolare nell’opera di Zola, anche mazione in gigantesco uccello, mentre la decadenza an- sulla base degli studi di Jean Borie, di Olivier Got e che fisica segna la fine della protagonista di Un cœur di Roger Ripoll, Mitterand individua il ripresentarsi, simple. La differenza fondamentale fra le due situazio- da un romanzo all’altro, di una struttura omologabile ni è data, secondo l’A., dal fatto che l’apprendimento al mito di Edipo o comunque una struttura mitica di del tassidermista Clopinet è prodotto soprattutto dal base, benché organizzata in réseaux differenti. Nella contatto con la natura e che, anche se possiede ad un grande opera zoliana, accanto ad uno schema sociolo- certo punto tutti gli strumenti intellettuali per entrare gico positivista, agisce infatti per Mitterand uno sche- nel mondo dei naturalisti, preferisce nascondere que- ma mitologico che mette in scena i propri archetipi ste sue abilità con la parola scritta e mantenere la sua fondamentali: «le Sexe, la Mort, la Foi et l’Art». In «splendid intellectual independence». Félicité invece Hippolyte: réinterprétation flaubertienne d’un mythe mostra nel racconto flaubertiano tutti i limiti di una antique, Edi Zollinger si sofferma sulle riprese hugo- educazione da autodidatta e legge la realtà alla luce liane di Flaubert in Madame Bovary e in particolare sui delle sue esperienze elementari di cultura che attribu- quadri di Steuben di Esmeralda presenti nello studio iscono ogni cosa a cause soprannaturali e incompren- del notaio Guillaumin/Frollo. Ma il legame più forte sibili. Messi entrambi a confronto con fenomeni ignoti viene suggerito per la figura di Hippolyte, ripresa dalle senza un’adeguata istruzione, i due personaggi hanno vicende del martire cristiano riprodotte nel quadro di quindi reazioni contrapposte, anche se mosse dalla Heim presente nella cattedrale di Notre-Dame e sin- stessa curiosità esistenziale: «Both tales ask what can golarmente somigliante, nella ‘tortura’ che gli viene be learned through unmediated contact with the na- inflitta, al personaggio hugoliano di Quasimodo e al- tural world. It is the moment of stunned, uncompre- le torture minacciate per Esmeralda. Désymbolisation hending seeing that clearly engages the interest of both et resymbolisation: per Gisèle Séginger non si tratta authors». di due operazioni incompatibili per Flaubert nel suo [maria emanuela raffi] rapporto con le religioni. Se la désymbolisation del-

sf177.indb 620 19/12/15 01.05 Ottocento 621

Eddie Breuil, Du Nouveau chez Rimbaud, Paris, pier les textes d’autres personnes et montrer, à l’aide Honoré Champion Éditeur, 2014, pp. 196. d’une analyse graphologique, que c’est bien ce qu’il a fait pour mettre au propre les textes de son ami. Dans Ce livre, avec son titre-calembour, ne manquera la dernière partie de l’ouvrage, le critique s’efforce de sans doute pas de soulever des réactions. L’auteur prouver combien l’esthétique de Nouveau est pré- propose tout bonnement d’attribuer les Illuminations sente dans les Illuminations. Il la reconnaît d’abord non plus à Rimbaud mais à Germain Nouveau: «Rim- dans «Villes». S’approchant un peu de la méthode ré- baud n’est pas l’auteur – affirme-t-il – mais le scribe, ductrice d’Antoine Adam, il se refuse d’interpréter ce scribe de l’autre écrivain présent durant ces copies texte à la lueur de rêves et d’hallucinations, que bien [des Illuminations]: Nouveau». Si nous voulions ac- des critiques affectionnent. Plus concrètement, il l’in- cepter cette thèse surprenante, voire déconcertante, terprète «comme un microcosme voire comme une nous serions du même coup débarrassés d’un pro- ville à l’intérieur des villes» (p. 114) et l’explique en blème qui intrigue depuis toujours les rimbaldiens: recourant à une réalité parisienne de l’époque, à un savoir si la composition des textes rassemblés dans le lieu d’«illuminations», le luxuriant «Jardin Mabille», recueil intitulé Illuminations, publié pour la première ce «Mabille de rêve» que Nouveau évoque précisé- fois en 1886, précède ou suit (mais aussi en partie ment dans ses «Notes parisiennes». Dans «Ouvriers», précède et en partie suit) Une saison en enfer (1873). les références au Sud lui paraissent un signe évident Dans ce cas, on devrait en induire que toute l’œuvre de la présence de Nouveau, le Sud occupant une poétique de Rimbaud s’achève en réalité sur ce der- place déterminante dans la vie de ce poète. Le mys- nier ouvrage, dont la section qui le conclut, «Adieu», térieux «baou» de «Dévotion», terme qui semble être pourrait être effectivement considérée (bien des cri- un mot de la langue provençale avec la signification tiques l’ont d’ailleurs pensé) comme la renonciation de «herbe d’été susceptible d’être employée comme définitive du poète à la littérature. Quant aux ‘versi- litière», est attribué, ainsi que le poème tout entier, culets’ de Rêve (ou La Chambrée de nuit), que Rim- à Nouveau «lequel parlait la langue provençale et baud écrira dans une lettre à Delahaye du 15 octobre même l’enseignait» (p. 149). Certaines expressions 1875 et qu’André Breton jugera être «une cime», ils rares comme l’adjectif «éphémère» qualifiant un in- peuvent se lire comme un autre «adieu», qui pro- dividu ou comme «Les fleurs de rêve», «Libans de clame de façon énigmatique mais définitive la fin de rêve» et des tournures propres à la poétique de Nou- la poésie telle qu’on l’entend habituellement (on sait veau ne se retrouvent pas chez Rimbaud. Le choix que le Surréalisme bretonien en tirera profit). des titres, souvent dépourvus d’articles, semblent Évaluant et analysant avec une rigueur indéniable renvoyer à la peinture, c’est-à-dire à l’art pratiqué par tous les documents et tous les témoignages dont on Nouveau. «Avec ses Petits tableaux parisiens – ob- dispose, Eddie Breuil concentre d’abord son atten- serve l’auteur – publiés plus tardivement […], ce der- tion sur les circonstances qui ont abouti à l’agence- nier poursuit une esthétique qui était déjà en œuvre ment progressif et ensuite à la publication, en 1886, dans certaines Illuminations (comme les Villes), à sa- du recueil intitulé Illuminations. Il observe à la loupe voir une pure description de scènes ou de situations» la dernière rencontre de Verlaine et de Rimbaud à (p. 137). Quant à certains thèmes comme la chaleur et Stuttgart, et il s’arrête sur la missive de Verlaine à De- l’été associés à la stérilité et au malheur, le critique les lahaye du 1er mai 1875, où il est question de certains attribue uniquement à Nouveau, car chez Rimbaud ils «poèmes en prose» à envoyer à Nouveau pour être sont, au contraire, liés au bonheur. imprimés. Compte tenu de la formulation passable- En conclusion, avec ce livre Eddie Breuil s’efforce ment ambiguë de cette lettre («Si je tiens à avoir dé- de donner une réponse à la question qu’André Breton, tails sur Nouveau, voilà pourquoi. Rimbaud m’ayant face au compagnonnage et à la collaboration attestée prié d’envoyer pour être imprimés des ‘poèmes en des deux poètes, s’était posée dans Flagrant délit: prose’ siens, que j’avais; à ce même Nouveau, etc.», «Saura-t-on jamais quelle part de réciprocité fut mise où il faut reconnaître que le possessif «siens» pour- alors entre ces deux êtres de génie?». Et il conclut rait se référer aussi à Nouveau), rien en effet n’exclut son travail par un souhait: «Espérons qu’il [Nouveau] que ces ‘poèmes en prose’ soient en fait du poète pro- reçoive enfin le traitement auquel il a droit, et que vençal qui a fréquenté Rimbaud à Paris et à Londres sa production (qu’il a si souvent dépréciée, négligée, entre 1873 et 1874. L’Auteur en arrive à la conclusion voire reniée) ne soit pas associée trop rapidement à que les Illuminations sont le résultat d’un «mythe»: il quelques titres comme cette si problématique Doc- souligne qu’«à partir d’un simple titre, on a créé un trine de l’amour, publication à laquelle il s’est si vio- recueil en réunissant des manuscrits inédits dont au- lemment opposé. Son œuvre reste à connaître et à va- cun ne comporte (à l’époque) la mention “Illumina- loriser, à commencer par ses premières poésies dont tions”», que «les manuscrits rassemblés dans les Illu- les Illuminations font partie» (p. 166). minations ne cesseront d’ailleurs de changer» et que Pour terminer, il faut dire que la lecture de cet es- «les témoignages sur le fameux recueil s’avèrent donc sai ne parvient pas à dissiper un doute fondamental: particulièrement imprécis» (p. 34). Rabaissant le rôle peut-on vraiment penser que Nouveau-Humilis, sa- joué par Verlaine dans cette entreprise éditoriale au chant que les Illuminations étaient attribuées à Rim- caractère hétérogène et arbitraire, il soutient qu’elle baud et non pas à lui-même, ait toujours fait preuve est due surtout à Bouillane de Lacoste, qui cependant d’une humilité chrétienne si profonde et ait manifesté aurait commis l’erreur de faire confiance aux seuls un si total refus de son œuvre littéraire au point de ne témoignages de Verlaine, alors qu’il aurait dû se fier jamais révéler à qui que ce soit l’effective paternité davantage de Germain Nouveau. Celui-ci en effet, à d’un recueil poétique accueilli très favorablement? l’inverse de Verlaine enfermé dans la prison de Mons, Une thèse moins radicale que celle proposée ici par avait vécu avec Rimbaud précisément à l’époque où Eddie Breuil pourrait atténuer l’âpreté d’une éven- les textes réunis ensuite dans les Illuminations avaient tuelle polémique. été copiés. Eddie Breuil consacre plusieurs pages de [mario richter] son essai à des aspects qui s’avèrent cruciaux pour étayer sa thèse: prouver que Rimbaud acceptait de co-

sf177.indb 621 19/12/15 01.05 622 Rassegna bibliografica

Hisashi Mizuno, Rimbaud entre vers et prose. Des dienne» (p. 87). L’A. nuance la palinodie d’Une saison “Lettres du Voyant” à l’“Alchimie du verbe”, Paris, Ki- en enfer, puisque sa visée narrative, y compris ses consi- mé, 2014, «Détours littéraires», pp. 168. dérations dépréciatives, lui semble un rebondissement «vers la création de sa nouvelle poésie, comme l’on des- Spécialiste de Gérard de Nerval, auquel il a no- cend en enfer pour en ressortir en homme nouveau» (p. tamment consacré deux ouvrages en français: Nerval. 87). La trajectoire poétique de Rimbaud atteint, selon L’écriture du voyage (Paris, Honoré Champion, 2003) l’A., la suppression de toute opposition, de toute dua- et Gérard de Nerval poète en prose (Paris, Kimé, 2013), lité. Émancipé des principes poétiques baudelairiens, Hisashi Mizuno est professeur à l’université Kwansei Rimbaud réaliserait une poétique (et un langage) de la Gakuin, au Japon. Dans son dernier livre sur Rimbaud, pure présence, une poétique dégagée des dispositifs ré- qui recueille une série d’études parues dans plusieurs férentiels: «au-delà des fleurs du mal baudelairiennes, revues («Parade sauvage» et «Romantisme», notam- Rimbaud dépasse la vision du monde dualiste et arrive ment), il s’attache aux rapports entre vers et prose dans à ‘l’inconnu’ par la création de sa poésie exaltante de l’œuvre du poète, question parmi les plus débattues par fraîcheur sur le sol du nouveau Réel» (p. 127). la critique rimbaldienne. Plus précisément, il repère L’A. se tient «au-deçà» des Illuminations, qui ne dans la poésie de Rimbaud une transition entre des sont presque pas citées, ni considérées dans leur rela- poèmes qui nécessitent que la prose éclaircisse les prin- tion possible avec la thèse qu’il développe de l’ouver- cipes de leur composition, à des poèmes qui portent en ture de Rimbaud vers un nouveau «langage poétique». eux-mêmes la vocation à exprimer les fondements de L’hypothèse séduisante (et parfois forcée) qu’il avance leur genèse. Ce passage à un Rimbaud «poéticien» est d’une cohérence évolutive de la poésie de Rimbaud, selon l’A. confirmé en août 1871, avec l’envoi à Théo- risque d’autre part de prendre le dessus et de justifier dore de Banville de «Ce qu’on dit au poète à propos l’idée naïve d’un «progrès» poétique. Selon lui, Rim- de fleurs». Le chemin vers ce que l’A. définit comme la baud accomplit dans un court laps de temps un pro- «poésie informe», c’est-à-dire où «la distinction du vers grès «fulgurant» (p. 8); dépassant la «vision du monde et de la prose n’est plus de mise» (p. 125), est scandé dualiste» (p. 127), il va «au-delà de l’idée poétique de par quelques étapes, que le livre explore. Chaque étape Baudelaire» (quatrième de couverture). La notion de marquerait une évolution dans l’expérimentation des progrès en littérature est sujette à caution, puisqu’elle formes poétiques. propose une évolution tracée à partir d’un point d’arri- L’A. inaugure sa réflexion par une étude des lettres vée, l’avenir, qu’on postule comme un aboutissement. des 13 et 15 mai 1871 à Georges Izambard et à Paul De- En l’occurrence, ce «progrès» serait représenté d’un meny. À travers une analyse des poèmes contenus dans côté par la poésie de Rimbaud face à celle de ses pré- ces lettres, il propose une perspective originale concer- décesseurs romantiques et de Baudelaire; de l’autre, à nant leur relation avec la théorie dite du «voyant»: l’intérieur de son œuvre, par la poésie qu’on pourrait «Rimbaud voulait publier ses poèmes ou au moins les ramener à la théorie du «voyant» par rapport à celle faire apprécier à ses amis, et la prose sur la poésie a été qui précède 1872. Dans les deux cas, Hisashi Mizuno rédigée pour servir à valoriser ces poèmes en vers, qui fait sien le point de vue de Rimbaud – à des moments constituaient des exemples de la poésie de l’avenir» (p. différents –, sans considérer les périls d’une démarche 47). Les caractères les plus saillants de cette perspective antihistorique. vers une nouvelle poésie seraient la mise en discussion [andrea schellino] de la fonction référentielle du langage et la quête de «l’inconnu» par un sujet rejetant sa subjectivité. La deuxième étape de ce parcours rimbaldien cor- Andrea Schincariol, Le Dispositif photographique respond, selon l’A., à «Ce qu’on dit au poète à pro- chez Maupassant, Zola et Céard. Chambres noirs du nau- pos de fleurs» et aux fragments d’une paraphrase de ralisme, Paris, L’Harmattan, 2014, pp. 192. l’Évangile selon saint Jean (ici appelés, selon une vieille tradition éditoriale, «Proses évangéliques»). Même si La ricerca di A. Schincariol, il cui merito scientifi- dans le premier cas il reste dans le cadre de la poé- co è stato premiato dalla Società Universitaria di Stu- sie versifiée, le poème, selon l’A., constitue une petite di Linguistici e Letterari Francesi, s’inserisce nel pano- révolution: un ars poetica incitant la création d’une lit- rama di studi che, in particolare negli ultimi quindici térature nouvelle, par le biais d’une confrontation avec anni, interroga la complessità dei rapporti tra fotogra- la poésie de Banville. Concernant les fragments d’une fia e creazione letteraria realista-naturalista. Tenendo paraphrase de l’Évangile selon saint Jean, sur lesquels conto dell’insieme degli studi «photolittéraires» di cui il existe des études importantes de Pierre Brunel, dà conto nell’Introduzione, armato in particolare de- Yoshikazu Nakaji et Yves Reboul, l’A. s’intéresse au gli strumenti metodologici elaborati da Philippe Ortel travail du poète sur le sujet lyrique et sur l’«érosion» e dalla «école de Toulouse» (la «critique des disposi- descriptive du récit: par une stratégie de la rupture, tifs»), Schincariol si prefigge di «vérifier si le modèle du «discontinu», Rimbaud voudrait créer un «monde photographique opère une configuration (ou une re- qui ne serait plus le reflet du monde existant» (p. 82); configuration, ou une dé-configuration) du texte en la représentation, même au contact d’un épisode évan- évitant, autant que possible, les dérives métaphoriques gélique bien connu, serait brouillée. Derrière la paro- de l’analyse» (p. 14). Queste ultime sono, in effetti, una die, Rimbaud amorcerait le portrait du poète moderne, grande tentazione e un rischio reale per tale genere di impuissant et exilé, entouré d’un réel fictif. studi, che non sempre Schincariol, pur nella finezza Avec «Alchimie du verbe», dans Une saison en enfer, delle sue analisi, riesce ad eludere. objet du troisième chapitre du livre de Hisashi Mizu- I terreni d’indagine testuale, cui l’autore dedica un no, Rimbaud produirait un «Réel nouveau» (p. 126) capitolo ciascuno, sono Le Horla di Maupassant, Nana et indépendant, et réfuterait complètement le principe di Zola, Une belle journée e Terrains à vendre di Céard. de représentation. Il serait «la présence elle-même» Nel primo capitolo, Schincariol intende dimostrare co- (p. 126). Prose et vers, dans «Alchimie du verbe», se me la trasformazione fantastica della carta da visita in donnent en liberté, comme un «échantillon de l’or specchio, e la sua relazione con la fotografia del pro- poétique produit dans le creuset de l’alchimie rimbal- tagonista, dia luogo a una «déréalisation photographi-

sf177.indb 622 19/12/15 01.05 Ottocento 623

que» (p. 37) del soggetto. Nel secondo, come il testo la sua affermazione, attuata prima con la formazione zoliano inteso quale «appareil scopique», intrattenga della «Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de stretti rapporti con il modello fotografico (in partico- musique», rallentata dalla censura obbligatoria per le lare con l’intermittenza ottica, la proiezione delle im- canzoni e favorita infine dalla possibilità di rappresen- magini nella «camera oscura», la fotografia stereosco- tare nei cafés-concerts anche piccole pièces teatrali. pica). Nel terzo, infine, l’autore sottolinea come Céard, Sandrine Carvalhosa (Jules Vallès. La causerie dans complice la nozione tecnica di «aberration photo- tous ses états) torna decisamente a Vallès con la pra- graphique», mini dall’interno il modello naturalista e tica ottocentesca della causerie, genere ripreso nella apra un’interrogazione sulla realtà stessa, nonché sulle seconda metà dell’Ottocento soprattutto attraverso la nostre possibilità di coglierla e rappresentarla. prosa giornalistica e la conferenza, entrambe praticate dall’autore de L’Insurgé. Proprio in quel testo Vallès [agnese silvestri] dedica un capitolo alla «parole publique», che nel suo caso si proporrà presto di diventare non solo «populai- re» ma anche «démocratique». William Butcher, Jules Verne inédit, les manuscrits L’oralité dans “La Rue à Londres”: un lointain écho déchiffrés, Lyon, Ens éditions 2015, pp. 490. du cris parisien? di Céline Léger prende in esame la serie di articoli dedicati a Londra da Vallès, raccolti Testo fondamentale per seguire l’evoluzione della in La Rue à Londres e costruiti su «scène de rues rea- scrittura di Jules Verne, ma anche per definire i rap- liste», talvolta brutali, che riproducono la pur ridotta porti con l’editore Hetzel padre, propone un’amplis- oralità popolare attraverso l’uso del discorso diretto e sima raccolta di citazioni tratte dai brouillons scritti da dell’intervista. Al «cri du peuple» parigino viene quin- Verne tra il 1859 e il 1879. L’A. dichiara la sua distanza di contrapposta da Vallès la «résignation silencieuse» da tutte le metodologie, ma il controllo costante della di quello londinese. biografia, attraverso la corrispondenza, per poter orga- In Croyance et superstition chez Vallès, Silvia Dise- nizzare i materiali e comprendere le ragioni che hanno gni formula l’ipotesi di una possibile origine del perso- portato alle modifiche. Il corpus è infatti molto vario, naggio eponimo della trilogia di Vallès dalla biografia di difficile datazione, e di circa un milione e mezzo di di Pierre-Eugène-Michel Vintras, ‘visionario e profe- parole. W. Butcher ha deciso di decifrare sistemati- ta’. I «devins» hanno in effetti una presenza significa- camente solo gli inizi, i finali e i passaggi sconosciuti, tiva fra i personaggi di strada negli articoli di Vallès, inventando un sistema tipografico che permette di vi- mentre più complesso e ambivalente appare il rappor- sualizzare molto bene i vari stati del testo. Particolar- to con i «sorciers» e con altri elementi di divinazione mente interessanti i rapporti che emergono tra Verne e e predizione evocati nei romanzi, in particolare in Le Hetzel padre, preoccupato di censurare qualsiasi con- Bachelier e in Le Candidat des pauvres, giudicati ad un tenuto che possa turbare le giovani menti dei rampolli tempo risibili e inquietanti. borghesi, e di cambiare i titoli, cercando alternative ef- Jean-Noël Tardy affronta nel suo saggio «Il n’y a ficaci a quelli proposti dallo scrittore. rien d’écrit dans l’association». Vallès et les vétérans [ida merello] des sociétés secrètes i rapporti, positivi ma inquieti, di Vallès con le società segrete. Affascinato da Les Sai- sons durante la Monarchia di luglio, membro attivo Vallès et les cultures orales, «Autour de Jules Val- del «complot de l’Opéra-Comique» contro Napoleo- lès», Revue de lectures et d’études vallesiennes, n. 44, ne III, Vallès traspone le gesta dei cospiratori e il loro 2014, pp. 318. linguaggio «à la fois populaire et politique» nei suoi romanzi (Les Blouses) e nell’opera teatrale inedita La Corinne Saminadayar-Perrin (Cultures orales et Commune de Paris.

civilisation de l’imprimé au xix siècle) apre il volume Sulle citazioni, frequentissime nell’opera di Vallès, con un’introduzione sui legami, nella seconda metà si sofferma Élisabeth Pillet in Vallès et le «phrases à dell’Ottocento, fra letteratura e culture orali, sia che effet». Ciò che colpisce l’A. è il fatto che Vallès non queste ultime si esprimano nell’oratoria politica, nelle scelga tanto le citazioni a partire dagli autori o dal con- varie forme di «causerie journalistique», nella lettura testo culturale, ma dall’efficacia sonora della frase, dal- pubblica nei salotti, nelle «chansons populaires», poi la sua possibilità di diventare un «un mot historique»; nella «petite presse populaire». Sempre molto control- tutta la tipologia delle citazioni reperite riporta all’uni- lata e censurata durante il Secondo Impero la «voix du ca problematica su «le pouvoir des phrases qui circu- peuple» approda al romanzo solo verso la fine degli lent dans notre société et informent notre perception anni settanta con L’Assommoir di Zola e più tardi con du monde». Vallès e la prima versione in feuilleton dell’Enfant. La presenza della voce nell’opera vallesiana e le ten- Jean-Pierre Zubiate segue nel suo studio le trasfor- sioni fra testo e discorso che essa vi introduce occupa- mazioni della canzone nella seconda metà del xix se- no lo studio di Corinne Saminadayar-Perrin, “Verbum colo (Quand on chantait à ce temps-là: métamorphoses incarnatum”, Le corps de la voix dans l’œuvre de Jules du paysage chansonnier au temps de Vallès) seguendo- Vallès. Il suo stretto legame con il corpo ne fa agli occhi ne anche la circolazione nelle «goguettes», nei teatri, di Vallès uno strumento espressivo privilegiato e intra- nei cabarets, nei cafés-concerts. Autori come Nerval, ducibile nella forma scritta, sia che si esprima attraver- Champfleury, Charles Gille o Pierre Dupont, sosteni- so la «chanson populaire», sia che si voglia espressione tori della tradizione colta della canzone, lasciano il po- di una affermazione consacrata e per ciò stesso veritie- sto verso il 1860, a Couté e Bruant, icone del cabaret, e ra, sia che si proponga come espressione spontanea – e ad un prodotto che risente sempre più della progressi- quindi autentica – della lingua del popolo. va mercificazione del genere. Cécile Robelin si interroga in Le roman vallésien Anche Jean-Claude Yon affronta la questione della et la voix des morts sulla scelta della scrittura narra- canzone nello stesso periodo (La difficile affirmation de tiva operata da Vallès nel capitolo XI de L’Insurgé per la chanson dans le monde des spectacles sous le Second raccontare l’Histoire des vingt ans, storia inedita dei Empire) e dei pregiudizi negativi che accompagnano combattenti del 1848. In effetti, secondo l’autrice, nei

sf177.indb 623 19/12/15 01.05 624 Rassegna bibliografica

romanzi della trilogia trova spazio in modo più vivo Pierre Louÿs, Georges Louis, Correspondance croi- e diretto quella «voix du peuple» che tanto preme a sée 1890-1917, édition établie et annotée par Gordon Vallès e si annulla invece la distanza del lettore nel- Millan, préface de Dimitri Stolypine, tome I 1890- la «réception savante» che caratterizza la trattazione 1898, Paris, Champion, 2015, pp. 654. storica. Vingtras chansonnier: «le déjeuner chez Foyot» en- L’edizione delle prime 599 lettere scambiate fra tre ‘imitatio’ et ‘mimesis’ di Mourad Khelil è dedica- Pierre Louÿs e il fratellastro Georges, diplomatico, to ad un episodio del XXVII capitolo del Bachelier di 23 anni più anziano, formano la materia di questo e ai tentativi poetico/musicali che Vingtras vi intra- volume. Nella «Préface», Dimitri Stolypine sottolinea prende presso il ristorante Foyot. «Le chant – scrive il legame profondo che unisce i due fratelli e il ricco l’A. – organise une relation charnelle au pays, média- panorama della società parigina di fine secolo – e in tisée par la parole et l’alimentation, deux expressions un volume successivo della Belle Époque – che la cor- concrètes de l’oralité», ma mostra anche che «l’oral rispondenza offre, soprattutto per quanto riguarda le est plus lucratif que l’écrit» e, benché comporti una arti e le lettere. Ministro plenipotenziario in Egitto, perdita di status, ritrova le radici della satira e la riu- poi ambasciatore a San Pietroburgo fino allo scontro nificazione fra «la tête et le ventre». con Poincaré, Georges appare un interlocutore sen- Arouna Coulibaly afferma il carattere «incomplet sibile alla letteratura e a ciò che il fratello scrive, fino et fragmentaire» del quadro storico del suo tempo alle preoccupazioni dell’ultimo periodo per il conflit- fornito da Vallès nella sua trilogia (Fragments d’énon- to mondiale. Nell’«Avertissement» Gordon Millan, cés oraux, restes du passé et écriture subversive dans la autore di Pierre Louÿs ou le culte de l’amitié (1979), trilogie romanesque de Jules Vallès). Tracce di enun- precisa le condizioni di ritrovamento della corrispon- ciati orali (scolastici, popolari, regionali, parigini) denza, gli interventi di normalizzazione apportati e si incrociano nelle parole di Vingtras con tracce di il lavoro di decifrazione dei codici utilizzati dai due storia recente per costituire «une écriture de subver- corrispondenti per indicare persone o situazioni spe- sion» che si impadronisce dei segni e delle caratteri- cifiche. stiche della lingua orale. Un’ampia annotazione accompagna le lettere. Una serie di romanzieri del Novecento «transfu- ges sociaux», a partire da Vallès, è l’oggetto dell’inda- [maria emanuela raffi] gine di Jérôme Meizoz (Lettrés contrariés et batailles de voix après Vallès: Calet, Ernaux, Cherpillod, Louis), che riunisce in questa categoria autori sensibili al plu- Patrizia D’Andrea, Le Spiritisme dans la littérature rilinguismo sociale e impegnati a smascherare in varie de 1865 à 1913, Paris, Champion, 2014, pp. 618. forme la presunta compattezza della lingua e a rivela- re «la signification proprement sociale et politique de Come suggerisce il titolo, è lo spiritismo piuttosto l’acte d’écriture». che la letteratura a costituire oggetto di indagine, nei In La Folie Baudelaire et la Furie Vallès Alain Vail- suoi rapporti con la scrittura. In una prima parte, l’A. lant propone una lettura del violento articolo contro procede a una definizione del fenomeno, con una di- Baudelaire pubblicato da Vallès cinque giorni dopo stinzione tra lo spiritismo americano e quello france- la morte del poeta e che l’A. giudica «une caricature se, per indagare poi i processi di scrittura spiritica e féroce mais excellente». Ciò che segue nell’articolo, verificarne gli esiti letterari. L’A. utilizza una metodo- tuttavia, ossia la dimostrazione dell’ambiguità di Bau- logia neo-strutturalista per distinguere i vari elementi delaire nei confronti della religione e la presenza nel che concorrono al pensiero spiritista, nei suoi rappor- suo lavoro poetico di una parte di mistificazione, non ti col fantastico, con la mitologia e con le scienze oc- sembra giustificare la violenza di Vallès, né la giusti- culte. Ciascuno di questi rapporti è analizzato nei suoi fica il fatto che lo scrittore si scagli in realtà, secondo microelementi, per ciascuno dei quali viene proposto Vaillant, contro «le fantasme de parfaite synthèse de un testo letterario che vi si ispira. In tal modo la sto- l’idée et de la matière» che si incarna, a suo dire, nelle ria letteraria e l’analisi dei singoli autori sono sacrifi- Fleurs du Mal dopo aver attraversato tutto il roman- cati a un modello di analisi extra-letterario che inten- ticismo. de invece organizzare in successione i diversi aspetti L’evoluzione in senso politico del giornalismo val- del fenomeno. Così, è accordato largo spazio a Spirite lesiano è l’oggetto del dettagliato articolo di François e ad Avatar di Gautier (ma quasi a quattrocento pagine Marotin, Action politique et révolution (1868-1870), di distanza), mentre nel frattempo, in obbedienza allo che mostra come nel passaggio da «La Rue» a «Cha- schema, sono citate opere di autori meno noti e ancor rivari» a «Le Globe» e infine a «Le Peuple» e poi an- meno studiati (Camille Chaigneau, Mlle Krijanovskaïa, cora a «La Rue» del 1870 appaia chiara la convinzio- Léopold Davil, John-Antoine Nau, ecc.) su cui sareb- ne dello scrittore che «pour abattre un régime, il faut be stato interessante soffermarsi se il punto di vista del faire agir le citoyen en lui rendant la parole». La dif- saggio fosse incentrato sulla letteratura. Sorprende un fidenza nei confronti della retorica politica, che tutta- po’ la mancanza di attenzione agli autori della rivista via non gli impedisce di candidarsi per la «démocratie «L’Initiation» (se non a Lermina, di cui viene scelto un socialiste» nel 1969, gli provoca innumerevoli scontri testo, sempre rinunciando, in nome della metodologia ed incomprensioni fino alla proclamazione della Re- scelta, a un inquadramento storico-letterario), quando pubblica. invece alcuni di essi sono resoconti di sedute spiritiche. Une référence offenbachienne dans “L’Enfant” di Pregevole l’attenzione al fenomeno spiritista in Italia, Jean-Claude Yon segnala infine la probabile ripresa, in Germania e in Inghilterra, con un’altra sventagliata da parte di Vallès, della barcarolle di Offenbach «Ve- di esempi. nezia la bella» contenuta in Le voyage de MM. Duna- Il testo è corredato da un’ampia bibliografia, che te- nan père et fils. stimonia del grandissimo lavoro svolto. [maria emanuela raffi] [ida merello]

sf177.indb 624 19/12/15 01.05 Novecento e xxi secolo 625

Novecento e xxi secolo a cura di Stefano Genetti e Fabio Scotto

Luc Fraisse, L’Œuvre cathédrale. Proust et l’architec- tione del funzionamento della memoria nei dieci ca- ture médiévale, Paris, Classiques Garnier, 2014 («Bi- pitoli che compongono il suo saggio («L’apprentis- bliothèque proustienne», 9), pp. 598. sage»; «Perception et attention»; «La mémoire à court terme»; «La mémoire à long terme»; «Les faux souve- A venticinque anni dalla prima edizione (uscì nel nirs»; «Être expert dans un domaine»; «La cognition 1990), Luc Fraisse propone una nuova versione, rive- au fil de la vie»; «Lire les visages»; «Le sentiment d’être duta e arricchita con index nominum et rerum, del suo soi»; «Aux frontières de la psychologie cognitive»). ardito confronto tra il monumento della Recherche e La trattazione è spesso accompagnata da esempi l’architettura di una cattedrale medievale. L’idea di un di esperimenti svolti in passato da scienziati al fine di tale accostamento è in realtà di Proust stesso che, in valutare le capacità di apprendimento o le condizio- una lettera scritta verso la fine della sua vita, rivelava ni della memoria, per esempio il problema della scac- che avrebbe voluto intitolare le diverse sezioni della chiera senza due angoli oppure il fenomeno noto co- sua opera con i nomi delle parti che formano la strut- me “effetto cocktail party”. Nel primo caso, togliendo tura di una cattedrale (portico, vetrate, abside…), al i due angoli neri, il paziente dovrebbe dire se è possi- fine di ribadire – una volta per tutte – la profonda uni- bile ricoprire la scacchiera con le tessere del domino. tà alla base della propria creazione letteraria. Il sag- Il secondo esperimento prevede di ricordare le parole gio di Fraisse si struttura dunque come un dictionnai- dette in un orecchio e di ignorare quelle dette nell’al- re raisonné dell’architettura medievale in rapporto a tro. Al di là dei vari esperimenti e delle ricerche scien- Proust, secondo una triplice prospettiva, riconoscibile tifiche presentate, la grande novità proposta da André per ogni ‘lemma’ presentato: descrittiva, storica e sim- Didierjean sta nell’affiancare ad essi dei brani di À la bolica. L’A. non si limita a ritrovare e analizzare tutte recherche du temps perdu di Marcel Proust. Si tratta le immagini, legate a ogni parte costitutiva della cat- pertanto di un’opera che getta le basi di un ponte tra tedrale, nel testo della Recherche; egli cerca infatti di una scienza considerata obiettiva e la scrittura roman- spiegarle attraverso gli avant-textes (la nuova edizione zesca. Da una parte la psicologia cognitiva, che cerca di Proust nella «Bibliothèque de la Pléiade» proprio di descrivere i meccanismi del funzionamento dei pro- in quegli anni aveva reso accessibili nuovi documen- cessi cognitivi (memoria, apprendimento, percezio- ti), ma anche attraverso le lettere dello stesso Proust, ne ecc.). Dall’altra Marcel Proust, uno dei più grandi le sue vicissitudini personali, nonché gli altri suoi te- romanzieri del xx secolo, del quale si rivela la capaci- sti (La Bible d’Amiens di John Ruskin in particolare, tà di anticipare talvolta le conclusioni dei ricercatori che Proust tradusse e pubblicò nel 1904). Dal punto contemporanei nelle sue analisi dei meccanismi cogni- di vista della storia dell’architettura, inoltre, Fraisse si tivi. Eccellendo nella descrizione dei diversi compor- avvale dell’apporto costante di due fonti che l’autore tamenti dell’essere umano (quando impara, ragiona, si della Recherche ben conosceva: il Dictionnaire raisonné ricorda), le citazioni proustiane sono dunque utilizzate e e de l’architecture française du xi au xvi siècle di Viollet- da André Didierjean per illustrare meglio le sue teorie e le-Duc e L’art religieux au xiii siècle en France di Émile scientifiche. Mâle. Dal punto di vista della simbologia, ogni singolo Scopriamo così che Proust evocava già nella Prison- elemento architettonico viene infine analizzato in rela- nière la capacità dell’essere umano di apprendere le re- zione a tutti i suoi possibili significati, letterari e alle- gole astratte di una lingua sconosciuta semplicemente gorici, con particolare attenzione a quell’«autoréflexi- entrandovi in contatto di frequente. Oppure, sempre vité» operante in un romanzo che narra altresì la storia nello stesso volume della Recherche, Proust aveva in- di una vocazione artistica (p. 4). Si prenda ad esempio tuito che l’essere umano vive costantemente in un pro- la voce «vitrail» (pp. 501-528). Ai molteplici significa- cesso di apprendimento, ma non è in grado di memo- ti (effetti luminosi e cromatici, materici, visione dall’e- rizzare tutto. E proprio di ciò si rammarica il narratore sterno e dall’interno) e alle possibili fonti storiche del- durante un attacco di gelosia, poiché avrebbe voluto le vetrate della chiesa di Combray, l’A. fa seguire una ricordare con precisione tutte le parole di Albertine. disamina del rapporto tra i vitraux e il tempo perduto Lungo tutto il saggio di André Didierjean la psico- (la celebre età dei nomi), per giungere poi a metterli in logia cognitiva si intreccia dunque alle pagine della Re- rapporto con la costruzione sfaccettata dei personaggi, cherche, che in alcuni frangenti in maniera pionieristi- tipica dell’universo proustiano, l’atto della traduzione ca precorrevano i tempi. «Cependant, heureusement (in rapporto con il concetto di translucido) e, in defini- pour la psychologie cognitive, ces moments sont rares» tiva, quello della scrittura stessa del libro. (p. 10). [aron verga] [davide vago]

Camus et l’éthique, sous la direction d’Ève Morisi, André Didierjean, La madeleine et le savant. Balade Paris, Classiques Garnier, 2014 («Rencontres - Littéra- e e proustienne du côté de la psychologie cognitive, Paris, ture des xx et xxi siècles», 13), pp. 226. Éditions du Seuil, 2015 («Science Ouverte»), pp. 155. Il volume Camus et l’éthique, a cura di Ève Morisi, Professore di psicologia cognitiva all’Université de raccoglie dieci contributi di autori diversi, tesi a svilup- Franche-Comté, André Didierjean affronta la ques- pare una riflessione sul rapporto tra la variegata pro-

sf177.indb 625 19/12/15 01.05 626 Rassegna bibliografica

duzione di Camus e l’imperativo etico. Quest’ultimo, la propria attenzione sulla pena di morte con le Réfle- contrapposto alla morale, termine assimilato all’ideo- xions sur la guillotine, in cui si proclama con decisione logia borghese, assume aspetti molteplici, dimostrando contrario alla pena capitale (Marc Crépon, Le temps la profondità e la complessità del pensiero di Camus de la peine de mort. Une lecture des “Réflexions sur la al riguardo. guillotine”). L’esigenza etica, nella prospettiva laica dello scrit- Infine, in quel grande specchio rappresentato dalla tore, permette di superare il nichilismo e la tirannia sua opera, i personaggi stessi sono soggetti etici e il let- del caso, ponendo al centro l’uomo, l’unica verità in tore può proiettarsi in ognuno di loro (Alexis Lager, un mondo che sembra sprovvisto di senso (David H. L’œuvre camusienne, un miroir éthique et existentiel). Walker, Camus et l’éthique du hasard). Il concetto di Completa il volume una lunga intervista di Ève verità, d’altro canto, viene declinato in due modi diver- Morisi a Roger Grenier, il quale fece parte della pri- si nel romanzo L’Étranger, in cui il processo a Meur- ma équipe del giornale Combat accanto a Camus e a sault contrappone ciò che è giusto e ciò che è vero, in Pascal Pia e che attualmente è membro del comitato altre parole la giustizia intesa come il linguaggio del di lettura delle Éditions Gallimard. Diritto e la verità concepita come alètheia, svelamento, e come tale vissuta al di fuori del linguaggio (Franck [michela gardini] Planeille, Le juste et le vrai dans “L’Étranger”). Le preoccupazioni etiche di Camus si acuiscono con l’esperienza della Seconda Guerra Mondiale, come te- Josette Pintueles, Aragon et son “Œuvre poétique”, stimoniano le Lettres à un ami allemand, che attestano Paris, Classiques Garnier, 2014 («Études de littérature e e lo sforzo da parte dello scrittore di superare l’Assurdo des xx et xxi siècles», 44), pp. 460. in virtù di una rivolta collettiva. Tuttavia L’Étranger, pubblicato nel 1942, proprio negli anni del conflitto, Frutto di una tesi di dottorato sostenuta nel 2012 porta i segni irreversibili del trauma (Colin Davis, La all’Université Paris-Diderot, Paris 7, il volume di Jo- guerre de Camus. “L’Étranger” et “Lettres à un ami al- sette Pintueles affronta la poetica di Louis Aragon da lemand”). una prospettiva storico-editoriale, al fine di mostrare In una prospettiva al contempo estetica e filosofica, come, al momento della pubblicazione dei quindici vo- nei suoi romanzi Camus non manca di rappresentare lumi dell’Œuvre poétique presso il Livre Club Diderot, le varie sembianze che può assumere il Male, al fine di tra il 1974 e il 1981, «la notion d’“œuvre” se trouve capire il mondo e la natura umana. È anche per questo totalement dévalorisée par la critique» (p. 9), critica che il romanzo assurge a strumento per comprende- che pare preferirle, per via dell’influenza dello strut- re la complessità dell’esistenza (Sophie Doudet, Faire turalismo, la nozione di testo, a suo modo di vedere mal et faire le mal. “Les méchants” chez Camus). più aperta, oppure, sulla scia di Blanchot, la nozione Nel solco della fenomenologia di Max Scheler, Ca- di frammento. Si afferma insomma, parallelamente alla mus traccia i contorni di un’etica dell’amore, ricono- messa in discussione del concetto d’opera, un progres- scendo la possibilità della preesistenza dei valori, sulla sivo svilimento dell’autore (del quale è anche preco- scia anche dei pensatori greci antichi, prendendo in tal nizzata la morte, nei casi più estremi), e prende il po- modo le distanze dall’esistenzialismo (Samantha No- sto dell’opera la nozione di processo, o di lavoro. Per vello, De l’Absurde à l’Amour. La ‘révolution’ éthique molto tempo ritenuta una sorta di statica inumazione de Camus entre Nietzsche et Scheler). monumentale dell’Autore nella sua tomba-tempio di La riflessione etica approda anche ad una peculiare gloria, oggi l’idea di opera parrebbe però riprendere concezione del lavoro, quale emerge nel romanzo La piede, per quanto essa consente di appurare, in chiave Peste, in cui l’espressione «bien faire son métier» al- storico-sociologica, di un percorso visto nella sua glo- lude all’elaborazione di un’etica laica e squisitamente bale evoluzione stilistico-diacronica. umana (Guy Basset, «Bien faire son métier». Travail et Dialetticamente articolato in tre parti, lo studio di réflexion éthique chez Camus). Pintueles ha il merito di mettere in relazione la rifles- La ricerca di una via etica si arricchisce dell’eredità sione genetica sulla nascita del testo e la sua comuni- dei classici greci incontrando il concetto di misura, sia cazione al pubblico con le dinamiche para-testuali del- nel senso di limite che non deve essere superato come la sua ricezione e con la mediazione culturale che vi insegnato nella tragedia, sia nel senso di moderazione presiede in quella che è qui chiamata «la circulation come predicato dai filosofi. Il viaggio in Grecia com- sémiotique» (p. 460). Nella «Première Partie. Singu- piuto negli anni Cinquanta, inoltre, permette a Camus larité de l’Œuvre poétique. Une nouvelle Dépouille du di elaborare la «pensée de midi» che, abbracciando i Minotaure en costume d’Arlequin» (pp. 19-174), attra- paesi del Mediterraneo, viene contrapposta al razio- verso la preziosa testimonianza di Jean Ristat, viene ri- nalismo del Nord (Françoise Kletz-Drapeau, Éthique costruita l’interessante e travagliata avventura dell’edi- aristotélicienne et éthique camusienne. Penser la mesu- zione delle opere complete di Aragon, anche alla luce re). del particolare contesto dell’edizione di area “comuni- La biografia dello scrittore, francese d’Algeria («Ca- sta” di quel periodo, dall’editore Alphée alle Éditions mus était un Français d’Afrique du Nord, un pied noir, sociales e a Messidor (che qui Pintueles definisce «une viscéralement attaché à son terroir», ebbe a dire Albert complexe nébuleuse», p. 29, la quale entra in crisi, se- Memmi, cit. a p. 171) consente di estendere la riflessio- condo Julien Hage, attorno al 1978); la sottoscrizio- ne sull’etica alla questione del colonialismo. Come per ne ha comunque successo, le copie vendute saranno lo scrittore franco-tunisino, anche per Camus scrivere 16.003 alla fine del 1986, il pubblico pare apprezza- significa necessariamente pronunciarsi sui grandi pro- re l’ambizioso progetto di riproporre sessantaquattro blemi della storia e della politica, assumendo la respon- anni di poesia, nel contempo fornendo in modo quasi sabilità di una presa di coscienza collettiva (Hervé San- enciclopedico tutta una serie di chiarimenti d’ordine son, Éthique et responsabilité chez Albert Camus et Al- biografico, storico e filologico. Storia culturale e storia bert Memmi. De quelques convergences et divergences). dell’opera dialogano costantemente in queste pagine, In quanto scrittore engagé, Camus non si esime riproponendo nella sua complessità, la “situazione” dall’affrontare i temi legati alla giustizia, focalizzando di Aragon rispetto al surrealismo, allo stalinismo e ai

sf177.indb 626 19/12/15 01.05 Novecento e xxi secolo 627

rapporti con il PCF; viene in particolare approfondi- prima edizione del 1991 di Actes Sud) è uscita grazie ta la nozione di «circonstance», ovvero la tendenza a all’editore Michel de Maule nel 2014. Occorre felici- scrivere testi direttamente legati a temi di attualità, fra tarsi per tali iniziative, perché l’opera di questa poe- opportunità e opportunismo, come fu per le celebri e tessa dalle tinte erotiche e scure sa imporsi al lettore fortunate raccolte d’epoca resistenziale. La scelta del odierno, così come aveva saputo ammaliare Breton, singolare e maschile l’Œuvre poétique (nel senso di “un che le scriveva: «J’aime Madame, le parfum de l’or- Œuvre”), da Barthes contestata – Aragon lo defini- chidée noire – ultra-noire – de vos poèmes». sce un «singulier viril» (p. 68) – fa pensare al «Grand Il presente volume riprende dunque i testi contenu- Œuvre» mallarmeano (p. 129), ma qui esso designa ti nelle seicento pagine della prima edizione di Actes un’opera che mischia testi eterogenei di varia natura, Sud, intitolata Prose & Poésie. Vengono riprese le quat- dalla poesia alla critica e alla cronaca giornalistica, con- tro opere in prosa: Les Gisants satisfaits (1958), Jules formemente a un’idea di poesia che secondo il poeta va César (1958), Ça (1970) e Histoires nocives (1973); una ben al di là della mera distinzione fra verso e prosa per pièce teatrale, Le Bleu des fonds (1968); e sedici raccol- abbracciare estensivamente tutte le modalità del poiein te di poesia, da Cris (1953) a Trous noirs (1986), senza attraverso ciò che egli chiama la porosità dei generi. dimenticare la serie di poesie postume o pubblicate in Questa ambiguità s’estende anche alla datazione del- riviste e cataloghi. le opere e alla loro cronologia, che Aragon “vettoria- L’istinto da poeta che caratterizza la scrittura di Joy- lizza” attraverso assi tematici che associano al testo i ce Mansour emana fin nella sua prosa. I suoi maestri documenti e i commenti ad esso relativi. Ne risulta una e ispiratori sono Sade, Lautréamont, Bataille, senza sostituzione dell’autore all’opera che Pintueles enun- trascurare l’impronta lasciata da Artaud. Il suo senso cia nei termini seguenti: «La figure de l’auteur semble dell’immagine, la sua cultura artistica e la forza delle remplacer pour le lecteur la notion d’“œuvre” comme sue metafore sono legate al gruppo surrealista, che fre- facteur de cohérence et d’unité» (p. 130). quenta attivamente a Parigi a partire dagli anni Cin- La «Deuxième Partie. Ce que le commentaire fait à quanta. Nell’antologia curata da Penelope Rosemont, l’œuvre» (pp. 175-294) affronta gli aspetti strutturali Surrealist Women (Londra, The Athlone Press, 1998, relativi all’architettura d’assieme, nonché il paratesto; p. 203), veniva già descritta come uno dei tre poeti è noto che questa struttura para-testuale dell’Œuvre francofoni più importanti per il surrealismo nel secon- poétique aragoniana poco piacque a Genette, che in do dopoguerra: «With her deep-sea insolence, moun- Seuils la definì «triste gâchis» (p. 177); ciò nonostan- tain-high erotic rage, and bitter, insect-leggy laughter, te Aragon tende ad esaltare l’autonomia di questi pa- Joyce Mansour gave the world an astonishing body of ratesti, fino a farne dei testi autonomi. La «Troisième poetry such that no woman had ever written». Partie. L’Œuvre et ses médiations» (pp. 295-388) stu- Nata da un’agiata famiglia britannica coloniale in dia l’incorporazione del Journal (non inteso come “dia- Egitto, Mansour arriva alla lingua francese in segui- rio”, ma come “giornale”, lavoro giornalistico) nell’o- to al suo secondo matrimonio con Samir Mansour, pera poetica, della quale è, per le tematiche affrontate, nel 1949. Il suo rapporto con il francese, come scrive spesso l’ipotesto. Aragon mostra l’importanza dei gior- Paul Lombard nella sua breve prefazione al volume, è nali come occasioni di pre-pubblicazione di libri, spazi quello di una sradicata, di un’esiliata, passata attraver- di critica e informazione letteraria, fino a vedere nell’o- so prove identitarie che lasciano una traccia palpabile pera poetica una sorta di «dernière tribune» (p. 302). nella sua opera (la morte della madre quando aveva Nella «Conclusion» (pp. 389-394), Pintueles sot- quindici anni e del primo marito quando ne aveva di- tolinea il carattere insostituibile dell’Œuvre poétique, ciannove, in entrambi i casi per cancro): «Chez elle, la malgrado i suoi limiti e le sue lacune, che indusse- virginité de son français traduit l’urgence de ses messa- ro Jean Ristat a pubblicarne una seconda versione, e ges» (p. 9). L’ultimo racconto de Les Gisants satisfaits che la successiva, recente edizione delle Œuvres com- s’intitola per l’appunto «Le Cancer», e ripercorre in plètes nella «Bibliothèque de la Pléiade» a cura di Oli- chiave fittizia la sua vicenda biografica, segnando in vier Barbarant non ha potuto sostituire né superare. qualche modo la consapevolezza della sua condan- L’Œuvre rimane quindi «un nouveau roman inachevé». na all’urlo e alla violenza: «Les journaux déclarèrent In appendice un’interessante e ricca sezione di «An- que ma maîtresse était morte d’un cancer; personne ne nexes» (pp. 395-428), una «Bibliographie» (pp. 429- s’occupa de moi malgré la déposition peu favorable de 448) e un «Index des noms de personnes» (pp. 449- Satan; la maison fut vendue, la bosse enterrée. Depuis 456). lors, je vis tranquillement avec ma douleur, ma langue [fabio scotto] enfin déliée et le petit crabe trouvé incompréhensible- ment près du cadavre; certains jours j’ai l’impression qu’il me ressemble» (p. 84). Joyce Mansour, Œuvres complètes. Prose et poésie, [tania collani] préface de Paul Lombard, Parigi, Michel de Maule, 2014, pp. 640. Lectures de Marguerite Yourcenar. “Mémoires Tra il 2014 e il 2015, Joyce Mansour (1928-1986) d’Hadrien”, sous la direction de Bruno Blancke- riesce finalmente a occupare il posto che le spetta agli man, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2014, occhi della critica letteraria e artistica internazionale: pp. 280. una mostra è stata organizzata in suo onore al museo parigino del Quai Branly (Joyce Mansour, poétesse et Sedici studiosi, alcuni dei quali già noti ai cultori di collectionneuse, 18 novembre 2014-1 febbraio 2015); Marguerite Yourcenar, hanno dato vita a una miscel- la sua biografia, che lega indissolubilmente la sua sto- lanea che, pur inserendosi in una bibliografia già mol- ria a quella di André Breton e del movimento surrea- to abbondante, non mancherà di costituire un apporto lista, è pubblicata da Marie-Francine Mansour presso originale. Il volume è suddiviso in quattro sezioni: nel- le edizioni France-Empire (Une Vie surréaliste, Joyce la prima, «Figure d’Hadrien, structure des Mémoires», Mansour complice d’André Breton, 2014); e la riedizio- l’opera è analizzata sotto l’aspetto strutturale e stilisti- ne delle sue opere complete (ormai introvabile nella co. Aurélie Adler («Le graphique d’une vie humaine»,

sf177.indb 627 19/12/15 01.05 628 Rassegna bibliografica

pp. 21-33) sottolinea la peculiarità dei Mémoires ri- Arnaud Genon, Roman, journal, autofiction: Hervé spetto al genere autobiografico e la sua natura di opera Guibert en ses genres, Paris, Mon petit éditeur, 2014, in fieri, simile in questo agli Essais di Montaigne. Frank pp. 104. Wagner (Hadrien, ou la première personne, pp. 35-51) mette in luce, attraverso una fine e articolata analisi Nell’ambito degli studi guibertiani ad Arnaud Ge- narratologica, la “modernità” dell’opera. L’articolo di non spetta certo il posto d’onore. Quest’ultimo libro è Rémy Poignault (L’“Oratio togata” dans “Mémoires la rielaborazione di una parte della sua tesi di dottora- d’Hadrien”, pp. 53-66), la cui prima versione è appar- to e intende esplorare l’opera dello scrittore dal punto sa in Marguerite Yourcenar, écriture, réécriture, traduc- di vista dei generi letterari, o meglio della problema- tion (Tours, SIEY, 2000), descrive lo stile dei Mémoires tizzazione e “perversione” che Guibert fa subire loro. come quello di un discorso organizzato razionalmen- Se è vero che la tassonomia tradizionale sembra non te, caratterizzato da un registro lessicale alto. Secondo avere presa sulla letteratura del xx secolo, dominata Stéphane Chaudier (La comparaison a ses raisons…: dal genio e dal carattere inclassificabile e trasgressivo Hadrien-Yourcenar et la manie évaluative, pp. 67-80) la delle opere (e quella di Guibert non fa eccezione), è similitudine è, nella scrittura di Marguerite Yourcenar, vero pure che molte di queste opere aperte risultano uno strumento per dare un senso alla realtà descritta. debitrici dei generi che intendono soppiantare o neu- I Mémoires d’Hadrien come romanzo storico dalle tralizzare. Genon conduce una caccia meticolosa nella forti valenze filosofiche sono oggetto della seconda se- brughiera Guibert e vi scopre gli indizi del roman d’a- zione, intitolata «Envisager/dévisager l’Histoire». Ni- venture («Les Lubies d’Arthur et Vous m’avait fait for- colas Di Méo (L’Empire dans “Mémoires d’Hadrien”, mer des fantômes: la fiction à part entière», pp. 17-43), pp. 85-98) affronta alcuni degli interrogativi sollevati la perversione del genere diaristico («Le Journal, un dal romanzo, compreso il presunto antisemitismo del- genre déconstruit: Fou de Vincent et Voyage avec deux la sua autrice. Jean-Yves Célo (Guerre et paix dans enfants», pp. 45-70) e il suo correlato della scrittura “Mémoires d’Hadrien”, pp. 99-111) analizza il modo in non mediata che si fa riscrittura, vertigine della veri- cui il protagonista narratore giustifica l’uso della forza tà, impostura. Le esperienze umane vengono trascritte; e il ricorso alla guerra. Nelly Wolf (Un roman huma- a loro volta, quando si fanno scrittura, ri-tracciano e niste?, pp. 113-123) s’interroga sull’esistenza di temati- ri-disegnano i confini di quelle esperienze. Guibert ha che comuni ai Mémoires e agli Essais. Per Yvon Hous- spinto alle estreme conseguenze questa elementare ve- sais (“Mémoires d’Hadrien” ou le pari de l’éternité, rità, tale almeno dai tempi di Montaigne, e Genon ha pp. 125-138) lo scopo della scrittrice non è rievocare il l’indubbio merito di mettere in luce la “verità” guiber- passato, ma far riflettere il lettore su di esso. tiana. Nell’ultimo capitolo («Fictionnalisation de l’ex- La terza parte, «Du culturel et du pulsionnel», si périence vécue: aux limites de l’autofiction», pp. 71- apre col contributo di Laurent Demanze («Un homme 97) a essere messa in discussione è la nozione di auto- qui lit», pp. 143-155), in cui si mostra come nella forma- fiction, parola con la quale si è preteso di qualificare la zione di Adriano si concilino il letterato e l’imperatore. scrittura guibertiana. Se con questa parola intendiamo Secondo May Chehab (Figures et questionnements phi- la ricreazione del vissuto all’interno dello spazio testua- losophiques dans “Mémoires d’Hadrien”, pp. 157-182) il le, la costruzione della parola come avventura, allora “pluralismo filosofico” di Adriano risente dell’influsso À l’ami qui ne m’a pas sauvé la vie, l’enorme successo esercitato sull’autrice dal pensiero di Nietzsche. Marc- di Guibert, ci impone di interrogarci sui limiti stessi Jean Filaire-Ramos (Antinoüs, es-tu là? Présence, réso- dell’autofiction all’interno della sua scrittura. A ragione nance et sens de l’absence, pp. 183-197) mette in rilie- Genon sostiene che Guibert ci chiama ad aderire alla vo la presenza del giovane favorito anche al di fuori di sua verità, ad accogliere il suo racconto come squisita- Sæculum aureum, la sezione del romanzo dedicata alla mente autobiografico mentre nelle stesse righe ci con- sua vicenda. La funzione degli animali nei Mémoires e fronta con la vertigine della menzogna, del ritocco, del le analogie tra animali ed esseri umani sono, invece, l’ar- gioco di specchi, tra fantasmi più veri di qualsiasi ve- gomento del contributo di Pierre-Louis Fort («Appar- rità fattuale. Ma un’ombra si staglia sui colori fin qui tenir au même règne»; vies animales et humaines dans mostrati: l’AIDS, con la sua urgenza, il suo carattere “Mémoires d’Hadrien”, pp. 199-209). irreversibile, la sua verità, irrompe nella vita di Gui- L’analisi intertestuale accomuna i contributi presen- bert e nella sua opera; il processo di svelamento subi- ti nell’ultima sezione del volume, intitolata «Du livre sce un’accelerazione imprevista, la scrittura guibertia- à l’œuvre». D’une œuvre à l’autre, une traversée (pp. na è allo zenith. Genon ricostruisce la genesi di questo 215-229) di Sylvie Jouanny è uno stimolante confron- passaggio, da L’Incognito alla mostruosa verità sapien- to fra i Mémoires d’Hadrien e la trilogia Le Labyrinthe temente rielaborata fino a farla apparire finzione pura; du Monde, incentrato sui problemi della scrittura au- il colpo di genio di Guibert, il canto del cigno. Non vi è tobiografica. Anne-YvonneJ ulien (Les Carnets de no- dubbio per Genon che la grandezza di Guibert risieda tes de “Mémoires d’Hadrien”: protocoles de lecture des nell’essere riuscito non a dire la malattia ma a dire este- Mémoires, pp. 231-244) prende le mosse dai Carnets ticamente, cioè in una forma bella, la “sua” malattia, per evidenziare nel romanzo l’interferenza di due gene- la sua realtà ultima e non dissimulabile. Guibert tenta ri: il saggio alla Montaigne e la tragedia raciniana. Gli attraverso la fausse autofiction di sottrarsi alla sua fine, ultimi articoli appartengono a due percorsi di ricerca perlomeno di allontanarla e il genere gli offre l’oppor- ancora poco battuti nell’ambito degli studi yourcena- tunità di riscrivere alcune scene, di appropriarsi di al- riani, la critica genetica e lo studio della corrisponden- cune parole, certo non di sfuggire al suo destino, come za: ci riferiamo, rispettivamente, a Marguerite Yource- Genon nelle efficaci conclusioni ribadisce. nar et la politique du texte brûlé (pp. 245-254) di Elya- ne Dezon-Jones e a «En faveur de l’exact et du nu»: [fabio libasci] “Mémoires d’Hadrien” dans la correspondance de Mar- guerite Yourcenar (pp. 255-274) di Bruno Blanckeman. Il volume si chiude con alcune Notizie sugli autori dei contributi. [vittorio fortunati]

sf177.indb 628 19/12/15 01.05 Novecento e xxi secolo 629

Yona Hanhart-Marmor, Des pouvoirs de l’ekphra- nica complessa che come principio estetico, il montag- sis. L’objet auratique dans l’œuvre de Claude Simon, gio costituisce un insieme di procedimenti compositivi Amsterdam-New York, Rodopi, 2014, pp. 314. che consentono di entrare nella fabrique della creazio- ne artistica se pensati, sottolineano i curatori nel com- Fin dall’apparizione del Nouveau Roman, l’oggetto mentare il titolo del volume (Introduction, pp. 9-14), e lo sguardo sono emersi come i due elementi nei quali in termini non solo di funzionamento ma anche di ar- si condensa la novità narrativa introdotta dal gruppo. ticolazione, vale a dire di configurazione di un movi- È a una rilettura di questi due punti cardine che ap- mento unitario a partire da elementi separati, se non proda la monografia su Simon, entrambi centrali nella disparati. Onnipresente eppure storicizzabile, il mon- figura dell’ecfrasi. L’autrice supera la vasta bibliografia taggio viene concettualizzato tra il secondo Ottocento che ha trattato dei rapporti fra la scrittura di Simon e e le avanguardie storiche. Se Laurent Jenny mette in la pittura puntando la sua attenzione sulla consapevo- relazione questo fenomeno col paradigma sensoriale e lezza acuta della frattura che separa queste due arti. A immaginativo che, per moltiplicazione, dissociazione e questo paradosso preliminare si aggiunge la peculiarità sovrapposizione di impressioni scomposte e disarmo- della scrittura di Simon, autonoma e autoreferenziale niche, si afferma con la modernità urbana, da Baude- rispetto a qualsiasi immagine preesistente. Per quanto laire a Huysmans (Esthétique décadente et montage per- paradossale, la presenza massiccia dell’ecfrasi suggeri- ceptif, pp. 125-134), è ad Adorno, Benjamin, Brecht e sce all’autrice di chiedersi quale sia «sa place et sa fon- Lukács che fa appello Jonathan Degenève nel passare ction dans l’économie romanesque», e per rispondere in rassegna Cinq caractéristiques du montage (pp. 15- ricorre a due strumenti metodologici: la teoria della fo- 26). Le tensioni tra eterogeneità e interpenetrazione, tografia di Barthes e il concetto della dimensione au- frammentarietà e coerenza, giustapposizione e varia- ratica dell’opera d’arte elaborato da Walter Benjamin. zione, sequenzialità e manipolazione, materialità e im- Dopo aver definito con dovizia di esempi le carat- plicazione soggettiva guidano dunque una riflessione teristiche dell’ekphrasis simoniana, figura ambivalen- che ruota intorno ad alcune parole chiave eloquente- te che è motore più che pausa nella scrittura, l’autri- mente distribuite nei titoli delle quattro sezioni in cui ce passa a considerare la natura di un’ecfrasi che più il libro è suddiviso: «Bipolarité. Tensions poétiques: che descrivere ha la capacità di trasformare oggetti écrire le temps, un sujet, des tableaux», «Point de vue. insignificanti in opere d’arte. Ciò che permette que- Observations sur le travail textuel, l’événement énon- sta trasformazione è lo sguardo, simile al punctum bar- ciatif, le mouvement des formes: figures, images, pen- thesiano, ma contrario ad esso: mentre per Barthes è sées, perceptions», «Recyclage et composite. Mises en l’oggetto che casualmente possiede caratteristiche che scène de l’hétérogène», «Mise en rapport». lo rendono affettivamente interessante, nel caso di Si- Della varietà dei temi affrontati rende conto il DVD mon sono la memoria e l’immaginazione del soggetto che integra il volume e che contiene quattro interviste: a conferirgli un potere affettivo legato a ricordi, fanta- con i registi Bruno Dumont e Claire Denis, autrice del smi o esperienze vissute dal protagonista. Ancora più film L’Intrus, ispirato al testo in cui Jean-Luc Nancy incongrua appare la sua inscrizione nel tempo: invece torna sul trapianto di cuore che ha subito, un testo al di tentare di dissimularli, Simon insiste sugli elementi quale è dedicato l’intervento di Anaïs Frantz (Monta- che mettono l’immagine in movimento, e così i quadri ge ou pudeur? L’intimité en question dans “L’Intrus” de diventano meno rappresentazione statica che momen- Jean-Luc Nancy, pp. 39-48); con Georges Didi-Huber- to colto all’interno di una temporalità non immobiliz- man e con il poeta, prosatore e saggista Christian Pri- zata: invece di «picturaliser la peinture», Simon sceglie gent, sulla cui Morale du cut-up si sofferma Bénédicte di «narrativiser le tableau» (p. 150). E questo nei due Gorrillot mostrando come la ricezione di Burroughs sensi: sia la descrizione di un quadro o di una fotografia si traduca in una pratica autonoma del cut up & down, pian piano si mette in movimento e l’immagine statica una pratica che risente di influssi svariati, dai collages si trasforma in azione, sia un’immagine apparentemen- dadaisti fino agli assemblaggi di Maurice Roche (Prin- te parte della narrazione si scopre in seguito essere la gent monteur: une parenthèse cut-up?, pp. 191-203), e descrizione di una cartolina. che illustrano nel DVD le letture-performance a due Anche quando l’azione del tempo è così radicale da voci di testi di Prigent. trasformare l’oggetto in rovina, e lasciar emergere la Ai contributi di argomento cinematografico o tele- morte che è in esso, la scrittura ha il potere di riporta- visivo – Bertrand Rougé, À quoi tient une figure? Mon- re in vita, attraverso il racconto stesso della scomparsa tage, énergie, réflexivité, pp. 95-104, sul montaggio co- o la descrizione dell’immagine che l’attesta. E ciò che me operazione retorica e plastica ossimorica, dove la riesce a riesumare non è mai legato all’istante, ma si di- movimentazione di figure è dettata dall’accostamen- pana nel tempo e nello spazio, dimensioni plurali che to di contrari; Térésa Faucon, Énergie de l’intervalle, acquisiscono taluni oggetti chiamati «auratici». Sono pp. 105-113, sull’importanza degli scritti di coreografi, proprio questi, cartolina, tubo, tenda, cammeo, opera musicisti e filosofi del primo Novecento nell’elabora- lirica o altro, a consentire un dialogo fra le diverse di- zione di una teoria dell’intervallo in quanto passaggio mensioni temporali nelle quali si strutturano i romanzi da un movimento all’altro, come formulata da Vertov; simoniani. Hervé Joubert-Laurencin, Les théories du non-monta- [laura brignoli] ge n’existent pas, pp. 115-124, su André Bazin e altri te- orici; Stéphane Lojkine, sulla serie “Mad men”, saison 1, épisode 3, “Les Noces de Figaro”. Montage, démonta- Le montage comme articulation. Unité, séparation, ge, dispositif, pp. 175-188 – si affiancano quelli di ar- mouvement, Jonathan Degenève et Sylvain Santi (éds), gomento teatrale: da Corneille (Marc Vuillermoz, Un Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2014, pp. 227. foisonnement ordonné. “Clitandre”, ou l’art du monta- ge, pp. 137-145) alla scena contemporanea. In Conjoin- È innanzitutto sul piano teorico che questa raccolta dre le(s) réfractaire(s): du montage selon Michel Vinaver presenta un notevole interesse, nonché come esempio (pp. 161-173) Catherine Brun si sofferma sulle fonti metodologico di coesione interdisciplinare, malgrado coupées e collées, dysposées, secondo il termine di Didi- la diversità degli oggetti di studio. Inteso sia come tec- Huberman, per corrispondenze e attrazioni più che su

sf177.indb 629 19/12/15 01.05 630 Rassegna bibliografica

basi logiche. In Déliaison, tension, variation: pratiques tura francese contemporanea: da un lato, una corrente du montage chez François Tanguy et le Théâtre du Ra- fedele a quella «tradition du nouveau» di cui parlava il deau (pp. 147-160), Christophe Bident e Christophe critico d’arte Harold Rosenberg già alla fine degli anni Triau parlano della ricerca di una «hétérogénéité con- Cinquanta, una letteratura di spirito avanguardistico, tinuisée» (p. 153) perseguita, in chiave non narrativa totalizzante, che ambisce a inglobare il mondo ed è vo- e anti-rappresentativa, tramite il ré-agencement sincro- tata a mimarne il funzionamento, la meccanica; dall’al- nico e diacronico, spaziale, musicale e percettivo, dei tro, una corrente che rifiuta le ambizioni olistiche di materiali drammaturgici: immagini, suoni, parole, og- quel tipo di tradizione e, pur veicolando una riflessione getti, luci e colori. sulla dialettica tra «poïesis» e «autopoïesis» che fonde- Sul versante più strettamente letterario, Marie- rebbe la creazione letteraria, rifiuta di pensare la let- Hélène Boblet mostra la transizione dalla scrittura teratura come «mêmeté». Da una parte, quindi, una diaristica al romanzo in Le Temps immobile e Le Tem- «littérature puissance» che manifesta una fiducia scon- ps accompli di Claude Mauriac lettore del journal di finata nell’esercizio stesso della scrittura (esemplari, in Leiris (Des traces à la trame: de la mémoire et de l’oubli questo senso, sono L’Invention du monde di Olivier dans le montage claude-mauracien, pp. 29-38), mentre Rolin e Les Ruines de Paris di Jacques Réda); dall’altra Alain Cantillon, in À quoi ça tient, la Relation, dans una volontà tenace di svincolarsi da questa prospettiva les écrits d’Édouard Glissant (pp. 85-94), tratta delle (Littell, Houellebecq, il giallo, la fantascienza, la lette- implicazioni poetico-filosofiche e socio-politiche della ratura della Shoah, della colonizzazione, dell’identità nozione di Relation, con particolare attenzione all’a- sessuale e dell’identità di genere, ma anche Chevillard dresse à Barack Obama intitolata L’Intraitable beauté e Novarina). du monde. Se Irène Fenoglio espone Ce que les manu- Il saggio è organizzato in tre sezioni: la prima pro- scrits nous apprennent du geste d’écriture et des opéra- pone un’analisi contrastiva di queste due modalità at- tions de montage (pp. 63-84) riproducendo avantesti traverso cui la letteratura tenterebbe di situarsi in un di Saussure, Benveniste e Pascal Quignard, quest’ulti- contesto in cui il flusso di informazioni ha la meglio mo si rifà alle Noctes Atticae di Aulo Gellio per descri- sul referente. Nella seconda sezione Bessière mette vere il lavorio della citazione e della scrittura in quanto in luce il «malaise de la modernité» che emergereb- associazione di elementi mutilati, ritagliati ed espian- be dalle contraddizioni inerenti alla «tradition du tati durante il processo di lettura (Excerptio et cut-up, nouveau» (ambizione universalistica – dichiarazione pp. 205-208). In Claude Simon ou l’imagination verti- di marginalità; descrizione del presente – pretesa di cale. Nécessité du disparate (pp. 49-60), Mireille Cal- transtemporalità), polemizzando apertamente con il le-Gruber evidenzia il valore euristico che il montag- discorso degli scrittori e dei critici legati, anche in- gio assume in seno a una «morpho-logique» (p. 54) consapevolmente, a questo tipo di tradizione. Nella eminentemente rapsodica e ritmica, secondo la quale terza sezione viene infine analizzata quella parte della compresenza e combinatoria di elementi verbali e non letteratura francese che, rifiutando di ricercare il nuo- verbali, mescolanza di generi e accorgimenti tipogra- vo ad ogni costo, riesce a proporre sia una riflessione fici confluiscono in una «démarche polytechnique ou sulla rappresentazione e sulla temporalità che un’in- polytropique» (p. 58) che assimila letteratura, pittura terpretazione delle proprie condizioni d’esistenza nel e cinema conferendo al testo una credibilità svincolata nostro tempo. dalla verosimiglianza, bensì fondata su una magmatica [francesca lorandini] percezione sensoriale ed emotiva dell’insieme di fram- menti: «Il faudra que ça tienne comme un tableau» (p. 53). Viene così evidenziata l’interazione tra le arti che Maxime Decout, Écrire la judéité. Enquête sur un il discorso sul montaggio comporta e stimola. malaise dans la littérature française, Seyssel, Champ Vallon, 2015, pp. 304. [stefano genetti] Lo studio di Maxime Decout ripercorre la storia intellettuale e letteraria del concetto di judéité, termi- Jean Bessière, Inactualité et originalité de la littéra- ne coniato da Albert Memmi per indicare la relazione ture française contemporaine, Paris, Champion, 2014 soggettiva con l’identità ebraica, al di fuori di ogni di- («Unichamp Essentiel», 34), pp. 232. mensione religiosa. Il critico analizza le differenti ri- percussioni e risonanze della «question juive» a parti- Partendo dalla resistenza che la letteratura e la cri- re dall’inizio del xx secolo, in primo luogo nell’opera tica francesi sembrano opporre alle categorie di «post- di scrittori di origine ebraica, quali André Spire, Al- moderno» e «postcoloniale», Bessière propone una vi- bert Cohen, Élie Wiesel, Romain Gary, Edmond Jabès, sione d’insieme in chiave paradossale del periodo che Georges Perec e Patrick Modiano; tuttavia, egli non va dagli anni Settanta ad oggi. La narrativa e la poesia dimentica di mostrare come le differenti visioni dell’i- francesi rappresenterebbero un caso isolato sulla scena dentità ebraica siano rielaborate in un contesto com- internazionale poiché si sarebbero mostrate a un tem- plesso, fatto di dialoghi e di scambi, nel quale trovano po attuali e inattuali: caratterizzate, cioè, da un lavorio il loro posto anche scrittori antisemiti come Céline, o teorico-critico costante che ha comportato un distacco filosemiti come Marguerite Duras e Maurice Blanchot. dalla pura fattualità, ma sorretto da una ferma ambi- In questo modo, non solo Decout dà forma a una zione di lettura del contemporaneo. Un contempora- sintesi delle scritture della judéité finora assente nel neo che è da intendersi nell’ottica di Marc Augé, co- panorama critico, ma rimette coraggiosamente in di- me attualità messa costantemente in prospettiva: una scussione l’intero canone letterario francese alla lu- giustapposizione temporale che contiene un’interpre- ce di una questione disturbante ma continuamente tazione del passato che è anche un’ipotesi o una pro- presente. In particolare, due snodi storici mettono al posta di futuro – un tempo paradossale, per l’appunto. centro la problematica dell’identità e della memoria Con il piglio combattivo che reggeva Qu’est-il arrivé ebraica nei suoi rapporti etici e politici con la Fran- aux écrivains français?, Bessière descrive e interpreta la cia e più in generale con l’umanità: l’Affaire Dreyfus dualità irriducibile che sarebbe presente nella lettera- e Auschwitz.

sf177.indb 630 19/12/15 01.05 Novecento e xxi secolo 631

Il primo capitolo è dedicato alla «renaissance jui- La prima parte introduce ai recenti sviluppi del ro- ve» degli anni Venti, «qui ne fut pas un mouvement manzo e presenta, oltre ai dati sul suo stato di salute littéraire à proprement parler, mais un regroupement odierno e le motivazioni dei lettori, una panoramica de sensibilités» (p. 51), che riunì diversi scrittori in di testi teorici sulla lettura e sull’evoluzione della pro- una riappropriazione dell’identità ebraica in seno alla duzione narrativa a partire dal 1980, dalla poetica del nazione francese. Spire, Cohen, Fleg e altri cercarono postmoderno e dagli aspetti formali e tematici del nuo- così di trovare una conciliazione tra una judéité final- vo paradigma letterario all’engagement sociale o etico e mente emersa sulla scena politica con l’Affaire Dreyfus allo sguardo critico sulla realtà. e l’universalismo repubblicano francese che non volle- Nei tre capitoli della seconda parte si considerano ro rinnegare. gli elementi dell’estetica postmoderna riconoscibili Molto diverso è lo scenario post-genocidario al qua- nell’opera di tre autori contemporanei. Di Alain Na- le Decout dedica la maggior parte del suo studio, con daud si analizzano in particolare Auguste fulminant e alcuni brevi capitoli monografici sui differenti autori, La Fonte des glaces, mettendo in evidenza la ricerca ma soprattutto con analisi comparate che sovrappon- di una problematica verità a livello diegetico, la fram- gono costantemente all’esame dei testi letterari una mentazione dell’enunciazione che accresce il senso di contestualizzazione storica e filosofica. La memoria incertezza e la riflessione metatestuale che indaga le ebraica è al centro di costanti riconfigurazioni, poiché potenzialità etiche e estetiche della scrittura. Di Sylvie non è forgiata solo dai testimoni, ma vi si confrontano Germain si prende in esame la «totalité en pièces» (p. anche scrittori che non sono reduci dai campi e la cui 70) della struttura musiva di Éclats de sel dal punto di eredità culturale ebraica è pressoché assente: infatti, vista strutturale, simbolico e intertestuale, per ricono- come afferma Decout, la «judéité n’est en effet, pour scere nella Storia del xx secolo l’elemento imprescin- ces générations d’écrivains, ni religieuse, ni spirituelle. dibile di una scrittura che illustra la frammentazione Elle est tout simplement historique» (p. 163). del mondo moderno e della coscienza dell’uomo. Di Lo studio di Decout dimostra la sua originalità so- Antoine Volodine si delinea il post-exotisme che defini- prattutto nello studio degli scrittori filosemiti, veri e sce il suo universo letterario, dal cronotopo alla temati- propri «passagers clandestins» (p. 171) dell’identità ca politica, dalla struttura narrativa dell’interrogatorio ebraica, spesso influenzati da una visione essenzialista alla dimensione metatestuale di un’opera déstabilisante della judéité, legata ai concetti di alterità e di erranza, che confronta il lettore con la «permanente barbarie centrali nel pensiero di Levinas, di Derrida, di Lyotard. humaine» (p. 100) e richiede un «acte de lecture pro- Il lungo capitolo conclusivo traccia infine una sin- blématique qui défie les idées reçues des récepteurs» tesi dei mutamenti nel campo storico e intellettuale (p. 99). negli ultimi decenni, in particolare legati all’emergere La terza parte, incentrata sull’engagement del- di nuove forme di antisemitismo, più subdole e meno la scrittura (oblique perché non dichiarato esplici- riconoscibili. Inoltre, la letteratura della judéité deve tamente dagli autori), si apre con le «Femmes en confrontarsi con un «dovere di memoria» divenuto in- marge» (p. 117) protagoniste di Rose Mélie Rose di vadente e trovare nuovi percorsi per mettere in scena Marie Redonnet, Rosie Carpe di Marie NDiaye, La la propria ricerca identitaria. Chanson des mal-aimants di Sylvie Germain e Leur Cosa hanno apportato la memoria e l’identità ebrai- histoire di Dominique Mainard, che denunciano la ca a un secolo di letteratura e di pensiero, scandito da «perte de repère de la part de l’individu contemporain eventi storici che le hanno rimesse di volta in volta in laissé seul avec lui-même dans une époque où le nar- discussione? La scommessa riuscita del saggio di Ma- cissisme prime sur l’esprit de communauté» (p. 129) xime Decout è quella di fornire una risposta a questa e prosegue con «Deux héroïnes pour un malaise com- domanda mostrando i diversi percorsi intrapresi dalle mun» (p. 131) attraverso la lettura incrociata di Mon scritture della judéité e definendone allo stesso tempo cœur à l’étroit di Marie NDiaye e Le Ciel des chevaux il radicamento in un’epoca storico-letteraria ben deter- di Dominique Mainard. Da questa prima rappresenta- minata, secondo uno sforzo di sintesi diacronica. Il cri- zione della «condition de l’être humain dans le temps tico ha così fornito una nuova prospettiva sulla lettera- hypermoderne» (p. 131) si passa quindi alle «Recettes tura francese del xx secolo, che si rivela costantemente pour faire face à la crise», o strategie letterarie adottate attraversata dalla questione della memoria ebraica. per apportare «des tentatives de réponse aux question- nement modernes» (p. 115) in una prospettiva «sinon [elena quaglia] optimiste, du moins ouverte à la possibilité d’un apai- sement» (p. 141). Da una parte, il fantastico e il meravi- glioso cristiano dei romanzi di Sylvie Germain; dall’al- Elisa Bricco, Le Défi du roman. Narration et en- tra, lo sguardo ironico e umoristico con cui due autori gagement oblique à l’ère postmoderne, Bern, Berlin, così diversi e lontani come Christian Oster e Antoine Bruxelles, Frankfurt am Main, New York, Oxford, Volodine creano una distanziazione critica rispetto alle Wien, Peter Lang, 2015 («Littératures de langue fran- problematiche della condizione dell’uomo contempo- çaise», 22), pp. 207. raneo. Segue un ultimo capitolo dedicato ai testi di Je- an Rolin (Zones e La Clôture) e di Philippe Vasset (Un Come si legge nell’«Avant-propos», il titolo del vo- livre blanc. Récit avec cartes) che interrogano la città e lume allude «aux deux lignes directrices qui s’entre- le trasformazioni del suo tessuto urbano e sociale, mo- e croisent dans le roman au présent, de la fin du xx au strando, con uno stile sobrio e privo di commenti, una e début du xxi siècle: celle d’une poétique dite “post- realtà inconfortable, refoulée e dérangeante secondo moderne” qui interroge la création et la met en rap- «cet engagement contemporain fait d’éthique plutôt port avec d’autres formes artistiques, et celle sociocri- que de politique, d’éthos plus que de pathos» (p. 190). tique, qui témoigne d’une certaine emprise de la vie Completa il volume una Bibliografia critica sugli au- contemporaine et de sa complexité sur les œuvres ro- tori e i testi analizzati e sul romanzo francese contem- manesques» (p. 2). Due approcci ugualmente rivelato- poraneo (pp. 195-207). ri e della vivacità attuale della creazione in prosa e del suo profondo ancoraggio nel presente. [anna bucarelli]

sf177.indb 631 19/12/15 01.05 632 Rassegna bibliografica

Il ritorno dei sentimenti, a cura di Matteo Majora- menti; il disegno ha il compito di narrare il diffici- no, Macerata, Quodlibet studio, 2014 («Ultracontem- le rapporto con gli altri confermandoci la tendenza poranea», 2), pp. 201. positiva di un ritorno ai sentimenti, di un bisogno di esprimere quell’immateriale affettivo che rivendica il Il volume, curato e introdotto da Matteo Majora- suo spazio nella produzione letteraria francese con- no, che ha il merito di far parlare l’«immateriale af- temporanea. fettivo» in letteratura dopo l’ostracismo critico dei [fabio libasci] passati decenni, raccoglie interventi di Marie-Thérèse Jacquet (Pour une definition du “sentiment”, pp. 23- 50), Philippe Adam (L’adieu aux larmes, pp. 51-60), Marinella Termite, Le Sentiment végétal. Feuilla- Pierre Senges (Comment composer ses états d’âme, ges d’extrême contemporain, Macerata, Quodlibet Stu- pp. 61-76), Marinella Termite («Du plus loin des dio, 2014 («Ultracontemporanea», 3), pp. 224. sentiments» chez P. Modiano, pp. 77-100), Salvatore Pepe (C. Oster, sentimentale per vocazione, pp. 101- Il volume di Marinella Termite si legge con la stessa 112), Marinella Soldo (C. Angot: un’esplorazione fi- curiosità con la quale si scopre un giardino popolato da sica dell’amore, pp. 113-130), Giusi Alessandra Fal- piante e fiori sconosciuti. Un’introduzione (Entre les co (Sentimenti di scarto. V. Ravalec o dell’esclusione. feuilles, pp. 7-12), a firma di Marie Thérèse Jacquet, Da “Cantique de la racaille” a “Wendy”, pp. 131-148), ripercorre l’itinerario rigoroso con il quale l’A. ha me- Valeria Gramigna (L’écriture-monde: M. de Kerangal, ticolosamente costruito il suo testo, sottolineando il pp. 149-160), Valerio Rota (Disegnare i sentimenti: i carattere apparentemente frammentario di questo la- romanzi grafici di Edmond Baudoin, pp. 161-182). La voro che, al contrario, unisce coerentemente una se- ricchezza degli scritti è tale che sarebbe impruden- rie di analisi di alcune tra le più significative opere che te provare a restituirla in poche righe; basterà nota- costituiscono il panorama letterario dell’extrême con- re l’impegno degli autori nel ricavare una cartografia temporain. sentimentale nella letteratura francese contempora- Nel primo capitolo («Racines», pp. 15-41), Termi- nea. M.T. Jacquet rende conto del gioco complesso te esplicita l’approccio e la motivazione della sua ope- tra le parole e le cose, tra uso e abuso di concetti. Da ra: il regno vegetale riveste un ruolo di particolare im- uno spoglio attento di alcune voci come sentiment, portanza nella letteratura contemporanea, ponendosi émotion, passion, deduce l’importanza della poten- come forma di resistenza alla velocità, rimodellando i za evocativa delle parole, dell’indissolubile legame confini del presente, mettendo in discussione, insom- tra immaginazione e memoria nella rappresentazione ma, le dimensioni di tempo e spazio e costringendo il dei sentimenti. M. Termite, P. Adam e G.A. Falco ci lettore a ripensare la proteiforme nozione di vivente. portano nello spazio testuale di alcuni prolifici autori Nel secondo capitolo («La main verte de l’écrivain», come Modiano e Ravalec, Chevillard e Carrère; nelle pp. 43-55), la pagina del libro diventa una terra fer- loro opere si assiste a un ritorno esponenziale del sen- tile e lo scrittore un giardiniere, attraverso l’analisi timento, dalla parola alla sua muta rappresentazione. di romanzi di autori come Véronique Bizot, Richard Se in Ravalec la ricerca dei sentimenti può condurre Millet, Agota Kristof e Pierre Senges. In un paralle- alla morte, allo scacco, alla certezza di una vita umana lismo tra pluralità del vegetale e pluralità del sentire, priva di sentimenti, in Modiano questa ricerca equi- il terzo capitolo («Herbier», pp. 57-129) si costruisce vale all’acquisizione di uno spazio di profondità, di come un vero e proprio erbario dei sensi: l’intento riflessione. La paura, nella produzione più recente del dichiarato dall’autrice è quello di classificare le ca- premio Nobel, è costantemente evocata forse perché, ratteristiche di quelli che chiama «végétaux scriptu- come nota assai bene M. Termite, essa nasce dal peso raux d’aujourd’hui» (p. 60). I cinque sensi sono così della storia e contro questa pare lottare. P. Senges, il pretesto per entrare nei dettagli di opere quali Celui ricorrendo ad alcune intuizioni di Calvino nelle Lezio- qui court derrière l’oiseau di Marie Nimier, Tobie des ni americane, pone l’accento sul carattere “costruito”, Marais di Sylvie Germain e La Traversée de l’Europe letterario, delle emozioni ma, al pari dei grandi riti, in par les forêts di Alain Fleischer, solo per citarne al- grado di emozionarci se ben costruite. Pepe scanda- cune. Concluso l’erbario dei sensi, Termite compone glia con minuziosa attenzione la produzione di Chri- il suo quarto capitolo come fosse un mazzo di fiori stian Oster; nello spazio testuale dell’autore, egli sem- («Bouquet», pp. 131-186). L’autrice accosta così gli bra riconoscere la costante impossibilità di decifrare alberi-libri che attraversano le pagine di Vies minus- il sentimento, la difficoltà di viverlo. Gli antieroi oste- cules di Pierre Michon all’acacia dell’omonima opera riani tacciono i sentimenti, vi passano accanto o li vi- di Claude Simon e alla magnolia della Comédie clas- vono in solitudine. Forse li tacciono perché le parole sique di Marie Ndiaye. Nel quinto capitolo, intitolato mancano loro. Christine Angot, nel denso contributo «Clairière» (pp. 187-206), prendendo le mosse dalla di M. Soldo, sembra confermare questa tendenza: è scrittura di autori quali Jean Echenoz e Jean-Philippe il corpo a parlare, è il corpo che chiede l’azzeramento Toussaint, la studiosa sviluppa un’analisi del vegeta- della parola, l’assimilazione fisica di ogni sentimento. le letterario intorno alla suggestiva immagine di quel In altri casi il corpo diventa la sede dell’assenza di deserto non arido che è la radura. Marinella Termite ogni sentimento, della fuga, del limite. V. Gramigna tira le fila di tutti i romans botaniques da lei analiz- ci regala un appassionante viaggio nella scrittura di zati nell’ultimo capitolo («Branches», pp. 207-209): Maylis de Kerengal. I suoi protagonisti si ritrovano romanzi del presente, della fragilità e della lentez- schiacciati dal peso della Storia, con essa fanno i conti za, che testimoniano l’esistenza, da una parte, di un fino a sviluppare un sentimento di solidarietà comu- sentiment végétal letterario, in grado di rendere le si- ne a tutti rivelando come i sentimenti si costruisca- tuazioni “vegetali” e, dall’altra, di una vera e propria no nella lingua e attraverso di essa. L’ultimo scritto, scrittura vegetale, capace di esprimere la parzialità e di V. Rota, ci porta nel mondo del romanzo grafico la complessità del reale. di E. Baudoin, sottolineando l’estrema difficoltà che il mezzo grafico ha nel rappresentare i sentimenti. Il [eva feole] testo non è più il veicolo dell’espressione dei senti-

sf177.indb 632 19/12/15 01.05 Novecento e xxi secolo 633

Le goût des langues, les langues à l’œuvre, coordi- occasione della consegna del premio Nobel. Questo in- natrices Isa Van Acker et Adina Balint-Babos, 2014, tervento chiude la prima parte e insieme conduce alla «Les Cahiers J.-M.G. Le Clézio», n. 7, pp. 236. successiva, interamente dedicata alla creazione, in cui vengono presentati una poesia inedita di Rita Mestoko- Il settimo numero della rivista «Cahiers J.-M. G. sho e due testi della scrittrice franco-canadese Lise Ga- Le Clézio», pubblicata a Parigi dalle Éditions Com- boury-Diallo. Conclude il numero la sezione dal titolo plicités, propone una lettura dell’opera di Le Clézio «Témoignages», che raccoglie una serie di interviste a partire dal tema della lingua, o meglio, delle lingue, condotte dalle curatrici ad alcuni traduttori dell’opera come recita il titolo Le goût des langues, les langues à lecleziana (tedesco, svedese, giapponese e cinese); qui l’œuvre. Obiettivo dichiarato del volume è infatti quel- gli «artisans de l’ombre» (p. 148) escono allo scoperto: lo di valorizzare la polifonia e gli elementi di alterità si raccontano e raccontano la “miseria” e lo “splendo- che costellano la lingua di Le Clézio così da portarne re” del tradurre Le Clézio. alla luce la natura marcatamente meticcia. Ma questo Il volume, coniugando voci diverse e complemen- numero si pone sotto il segno della pluralità linguistica tari (studiosi, poeti, traduttori), consente al lettore di anche per l’ampio e ricco spazio riservato alla prati- penetrare nella lingua di Le Clézio a più livelli e di se- ca della traduzione. Proprio i contributi che aprono la guirne le migrazioni verso altre lingue. In queste pagi- prima sezione del volume affrontano il viaggio dell’o- ne – piace rimarcarlo – viene offerto spazio e visibilità pera lecleziana verso altre lingue. Il saggio di Naòmi alla traduzione e a chi la pratica; riesce difficile imma- Morgan (Traduire L’Africain en afrikaans: J.-M.G. Le ginare una scelta più felice per un testo concepito in Clézio en terre inconnue, pp. 23-35), dedicato alla tra- movimento fra le lingue. duzione del romanzo L’Africain in afrikaans – il solo [chiara denti] testo di Le Clézio di cui esista una traduzione in que- sta lingua –, si sofferma tanto sulle sfide traduttive (la traduzione del titolo, tra le altre) quanto sulle fortuna- Les Lieux de Pascal Quignard, sous la direction te coincidenze che hanno favorito la sua pubblicazio- d’Agnès Cousin de Ravel, Chantal Lapeyre-Desmai- ne. Nel secondo contributo Oh Bobae e Kang Geeye son et Dominique Rabaté, Paris, Gallimard, 2014 (Réception de l’œuvre de Le Clézio en Corée du Sud, («Les cahiers de la NRF»), pp. 256. pp. 37-47) spiegano le ragioni del successo riscosso ri- spettivamente dai romanzi Le Déluge e Poisson d’or in A una mappatura dell’opera di Pascal Quignard, Corea del Sud, per poi addentrarsi in un’analisi pun- tra tracce di vissuto e cartografia immaginaria, concor- tuale di alcune scelte traduttive. Ancora alla traduzio- rono gli Atti del convegno svoltosi presso l’Université ne è dedicato l’intervento di Celeste Bronzetti (“La du Havre il 29 e 30 aprile 2013: luoghi dell’esperienza Ronde et autres faits divers”: des nouvelles polyphoni- e del sapere, luoghi geografici – Le Havre, certo (So- ques et une langue de frontière, pp. 91-103) che, alla nia Anton, Pascal Quignard et la géocritique du Havre, luce della sua esperienza, richiama l’attenzione sulle pp. 21-25), ma anche Parigi e Sens, Ischia e l’Orien- difficoltà incontrate nel restituire in italiano la lecle- te – e luoghi testuali, luoghi perduti e «lieux interces- ziana “lingua di frontiera” – zona di incrocio tra più seurs» (Chantal Lapeyre-Desmaison, Agnès Cousin idiomi e dunque intrinsecamente polifonica. Su questi de Ravel, Préface, pp. 7-13: p. 8) si intersecano nel- fecondi intrecci – di lingue e di saperi – si concentra- le tre sezioni che compongono il volume: «Ruines», no i saggi di Raymond Mbassi Ateba (Africanismes et «Mémoires» e «Sources». créolismes dans la prose leclézienne, pp. 63-78) e Jean A partire dalla tavola rotonda L’origine est-elle un Claude Abada Medjo (Langues et savoirs dans l’œuvre lieu?, condotta da Dominique Rabaté e cui ha parte- de Le Clézio, pp. 105-117) volti a indagare la scrittura cipato anche l’autore (pp. 90-104; si vedano anche le eterolinguistica di Le Clézio; sia che si manifesti attra- Notes pour une table ronde à l’intention d’Agnès Cou- verso l’inserimento di africanismi e creolismi – che si sin de Ravel di Jacques Henric, pp. 85-89), si diramano insinuano e penetrano nel francese – sia che si realizzi le riflessioni sulle immagini spazio-temporali ricorrenti tramite la mescolanza di lingue e immaginari diversi, in una scrittura radicata nella «détresse originaire» (a l’eterolinguismo del testo lecleziano sottende una pre- usare l’espressione è Pascal Quignard, p. 98). In Varia- sa di posizione per una coesistenza possibile fra lingue, tions sur le lieu perdu (pp. 105-118), Chantal Lapeyre- linguaggi e culture. Anche il saggio di Maryam Sheiba- Desmaison interroga sulla scia di Foucault «l’essence nian (Effet de l’onomastique exotique dans la réception même du lieu perdu, au cœur de toute expérience de de la littérature de Le Clézio: “Histoire du pied et autres l’espace» (p. 105): di utopie in eterotopie, si approda fantaisies”, pp. 49-61) pone l’attenzione sulla presen- alla centralità del corpo come luogo. In À l’origine du za di lingue straniere, concentrandosi però in modo vide. Réfractions du “Dernier Royaume” – l’insieme specifico sull’onomastica esotica allo scopo di illustra- giunto con Mourir de penser (Grasset, 2014) al nono re l’effetto che i nomi propri sconosciuti producono tomo – Yves Ouallet sonda, tra vanità e pienezza, le sul lettore. Con Cécile Kostler («L’île des Cygnes, l’île implicazioni fisiche, etiche ed estetiche dell’esperienza Maurice. Isla Cisneros»: J.M.G. Le Clézio – oiseau mi- del vuoto (pp. 143-161). In merito a vari testi – il trat- grateur et tisseur de mots, pp. 79-89) il plurilinguismo tatello conclusivo della Leçon de musique in Guilher- lecleziano viene affrontato a partire da una dettaglia- me Massara, Musique et origine (pp. 162-176), La Voix ta analisi di una enigmatica frase chiave pronuncia- perdue e altri contes in Lea Vuong, Pascal Quignard et ta dal narratore alla fine del romanzo Ritournelle de le non-lieu du conte (pp. 220-232) – e da angolazioni la faim. Questa frase esemplifica efficacemente il -mo diverse – in riva all’acqua e nelle profondità marine si do in cui Le Clézio «manie la langue multiple en tant situano gli interventi di Arlette Farge (L’eau, la voix que voyageur-traducteur» (p. 79). Segue il contributo et l’ailleurs, pp. 183-185), di Irène Fenoglio (L’eau, le di Christophe Premat (Retrouver les voix autochtones: lien, pp. 186-207, sugli avantesti di Boutès pubblicati l’hommage de Jean-Marie Gustave Le Clézio à Rita Me- in Sur le désir de se jeter à l’eau) e di Sarah Barbedette stokosho, pp. 119-133) volto a studiare il legame tra Le («Mais il y a la mer – et qui l’épuisera?». Sur “Les Soli- Clézio e la poetessa di lingua innu Rita Mestokosho, a darités mystérieuses”, pp. 208-219, con un suggestivo cui lo scrittore rende omaggio nel discorso tenuto in parallelo orientaleggiante tra le descrizioni quignardia-

sf177.indb 633 19/12/15 01.05 634 Rassegna bibliografica

ne della costa bretone e le stampe del pittore e incisore traduzione di Bute firmata da Angela Peduto e pubbli- Henri Rivière) – si disegnano i movimentati contorni cata, nel dicembre 2014, dalla casa editrice astigiana di una psicogeografia letteraria. I romanzeschi Noms Analogon. de pays (à partir du “Salon du Wurtemberg”) su cui Incentrati sulla porosità delle frontiere tra i gene- proustianamente si sofferma Dominique Rabaté (pp. ri letterari (Mireille Calle-Gruber, Passages des gen- 119-131), così come i toponimi germanici e le cadenze res. Stases et extases dans les récits de Pascal Quignard, del tedesco (Agnès Cousin de Ravel, L’Allemagne de pp. 91-107), le categorie estetiche (Chantal Lapeyre- Pascal Quignard. «L’appel pur» de la langue, pp. 132- Desmaison, Pascal Quignard, un baroque contemporain, 142), vi assumono un ruolo tanto rilevante quanto gli pp. 109-129) o le istanze psicanalitiche (Yolanda Vile- innumerevoli riferimenti storici e libreschi (Nathalie la, Les “sordidissimes” et la question de l’objet, pp. 153- Piégay-Gros, Les lieux de l’érudition, pp. 233-245). 167, sulla nozione lacaniana di objet), gli interventi di Al confluire di spazio e tempo, di biografia e scrittu- San Paolo sono incorniciati da un inedito di Pascal ra, di letterale e metaforico, si colloca il topos delle ro- Quignard (Le hors frontière, pp. 9-17), dove la medita- vine, del quale Pascal Quignard stesso sottolinea l’im- zione sulla letteratura come secessione «hors cité» (p. portanza nel suo Entretien con Philippe Pintore (pp. 13) e dis-integrazione sociale assume accenti “politici” 177-185). Dai resti di Pompei (Bénédicte Gorrillot, che risuonano anche in Sur l’idée d’une communauté Pompéi ou la rhétorique spatialisée de Pascal Quignard, de solitaires (variazioni sulle rovine di Port-Royal edite pp. 51-68, su Le Sexe et l’effroi) – al sisma di Fukuoka nella collana «Arléa-Poche» nel marzo 2015), e dalla e alla crisi nucleare di Fukushima, di riva devastata in stimolante sezione «S’initier à la lecture de Pascal Qui- deriva della memoria si cementa il nesso che l’autore gnard», che riunisce i commenti di quattro studenti e stabilisce tra la propria infanzia nell’immediato dopo- le relative reazioni dell’autore. guerra in un porto bombardato (Pierre Lepape, Pascal Se in La singularité hors les frontières de l’identité Quignard au Havre, pp. 29-34; Jean-Louis Pautrot, (pp. 43-71), Irène Fenoglio si interroga, sulla scia di Les havres de Pascal Quignard, pp. 35-50) e l’occupa- Benveniste e dello psicanalista britannico Adam Phil- zione americana alla quale sotterraneamente reagisce lips, sull’espressione di una soggettività, al contem- in Giappone la danza butoh incarnata da Carlotta Ike- po solitaire e solidaire, svincolata dalla definizione di da, al cui fianco Quignard ha portato in tournée, da un’entità identitaria univoca, in Humain-animal: l’ul- Parigi a Tokyo, la sua Medea, l’ultima rappresentazione time frontière (pp. 21-41), Jean-Louis Pautrot riper- avendo avuto luogo proprio a Le Havre, a coronamen- corre un’ampia tradizione poetico-filosofica che da De- to del presente convegno (Carlotta Ikeda è mancata scartes arriva fino a Nietzsche, ai Surrealisti, a Bataille il 24 settembre 2014). Ed è sul dispositivo teatrale di e Derrida: tramite un’efficace ricapitolazione dei moti- questa pièce che sfocia l’intensa meditazione di Mireil- vi – memoria antropo-zoologica e bestiario, predazio- le Calle-Gruber (Au commencement la ruine du com- ne e anthropomorphose – che in Quignard concorrono mencement, pp. 69-84) sulla ferita come origine e sulla a destabilizzare il logo-antropocentrismo, sottolinea le rovina come fondamento, da Sarx (1977) fino a L’O- molteplici «figures de vivance» (p. 24) di cui la valoriz- rigine de la danse (2013). Le rovine della Storia sono zazione dell’animale nell’umano è portatrice. le macerie dalle quali rinasce una scrittura infranta ed Un cenno a parte merita la riflessione metacritica in- eterogenea, che veglia sui morti ed evoca fantasmi, om- titolata Le visage troué du critique quignardien (pp. 131- bre sottratte alla deportazione dell’oblio. È la spiaggia 151) dove Camilo Bogoya traccia il profilo – o, meglio, desolata, colma di detriti, sulla quale viene ricostruita i profili – del commentatore dell’opera di Quignard di- la città “assente” dove l’autore è cresciuto, uno spazio stinguendo tre tipologie: il «critique obéissant», il «criti- urbano catalizzatore e generatore di immagini in cui que transgresseur» e il «critique artiste». Mobilitando i Pascal Quignard riconosce una matrice della sua scrit- concetti di autorità e autorialità, di circolo ermeneutico tura nel testo L’Estuaire, contenuto nel catalogo, a cura e «sidération de la lecture» (p. 135), egli individua nel- di Dominique Rouet, della mostra fotografica allestita la sottomissione o identificazione, nella distanziazione per l’occasione (Pascal Quignard: une enfance harvaise, e nella ri-creazione tre modelli ricorrenti di ricezione. Nolléval, Éditions l’écho des vagues, 2013, pp. 6-11). Mette così in rilievo il rischio del mimetismo interpreta- tivo, se non della ripetizione, insito in un’opera che, tra [stefano genetti] autoreferenzialità e riscrittura, forgia e dispiega un lessi- co speculativo che anticipa e deprogramma il discorso critico cui pure fa appello, la frontiera e lo sconfinamen- Pascal Quignard. Littérature hors frontières, sous la to in questione essendo, in questo caso, quelli tra discor- direction de Irène Fenoglio et Verónica Galíndez- so e metadiscorso letterario all’interno dell’opera stessa Jorge, Paris, Hermann, 2014, pp. 212. e nel dialogo che si instaura con il lettore, a iniziare dal lettore “professionista”. Bordi, margini, soglie: tra linee di demarcazione e [stefano genetti] sconfinamenti si muovono gli atti del convegno tenu- tosi a San Paolo del Brasile il 7 e l’8 ottobre 2013. È stata tra l’altro l’occasione per presentare il program- Bernard Maris, Houellebecq économiste, Paris, ma di traduzioni in portoghese di testi di Quignard Flammarion, 2014, pp. 155. (Ruth Silviano Brandão, Traduire “Le Nom sur le bout de la langue”, pp. 169-176) e per sottolineare la centra- Questo saggio rischia di essere ricordato perché lità, nella pratica quignardiana, dell’attività traduttiva, l’autore, Bernard Maris, economista, giornalista, scrit- nonché dell’idea di traslazione – vale a dire di “meta- tore, fu una delle vittime dell’attentato alla rivista sa- fora” etimologicamente intesa – non solo come scam- tirica «Charlie Hebdo». È bene dunque rammentare bio linguistico-culturale ma anche come perdita dei che si tratta di un pamphlet contro la maniera di vivere confini spazio-temporali dettata dall’indissociabilità di di un Occidente succube delle politiche dettate dall’a- lettura e scrittura (Verónica Galíndez-Jorge, Lec(ri) strazione e dalle cifre dell’economia. Sin dalle prime ture, pp. 73-89). A questo proposito, volentieri si co- pagine è chiaro il bersaglio di Bernard Maris: «L’éco- glie l’opportunità di segnalare, sul versante italiano, la nomiste est celui qui est toujours capable d’expliquer

sf177.indb 634 19/12/15 01.05 Letterature francofone extraeuropee 635

ex post pourquoi il s’est, une fois de plus, trompé» (p. ne per i non iniziati; mentre Houellebecq, in quanto 14). È un libro suddiviso in cinque capitoli precedu- scrittore, li presenta meglio, mettendo in evidenza in ti da un prologo e chiusi da un capitolo mascherato particolare la guerra umana per preservare la propria da epilogo. Ogni parte descrive un tema economico e solitudine egoista. le relative teorie di grandissimi economisti: «Le règne È la battaglia voluta dal liberalismo economico, una absolu des individus ou Alfred Marshall»; «L’entre- lotta di tutti contro tutti ben descritta nel primo roman- prise et la destruction créatrice ou Joseph Schumpe- zo di Michel Houellebecq, Extension du domaine de ter»; «L’infantilisme des consommateurs ou John May- la lutte, «qui ne pourrait plus être publié aujourd’hui. nard Keynes»; «L’utile et l’inutile ou Marx et Fourier»; Parce que nos sociétés en sont maintenant arrivées à «Au bout du capitalisme ou Thomas Robert Malthus»; ce stade terminal où elles refusent de reconnaître leur «Qui mérite la vie éternelle? Ou (de nouveau) John mal-être» (p. 143). Bernard Maris sottolinea come Maynard Keynes». L’autore sottolinea a più riprese che Houellebecq illustri da una parte un mondo, quel- l’economia non è una scienza, anzi, non è nulla, sostie- lo degli economisti, dove esistono solo egoismo, cru- ne persino che tra un secolo circa ci si stupirà di come deltà e cinismo, dall’altra un punto di vista opposto, una civiltà abbia potuto concedere tanta importanza «à dove al primo posto vi sono la bontà e l’amore, paro- une discipline non seulement vide mais terriblement le che nell’epoca economica contemporanea sono in- ennuyeuse» (p. 14). concepibili, astratte. Invece per lo scrittore l’amore è Per dare più forza al proprio pensiero, Bernard il vero desiderio, ma le litanie ripetute a oltranza dal- Maris si affida ai romanzi di Michel Houellebecq. la società di mercato hanno infantilizzato il desiderio Quest’ultimo, nelle sue opere, affronta il tema del dei consumatori, destinato a restare sempre inesaudi- denaro, del lavoro parassitario e di quello utile, della to. Pertanto alla fine per Houellebecq sopravvivranno produttività, della competizione, della distruzione cre- solo i sognatori, i poeti, le donne, poiché più altruiste atrice. In Extension du domaine de la lutte la narrazio- dei loro compagni, e chi non si sottomette agli stimoli ne ruota attorno all’argomento del liberalismo e del- del denaro. In altre parole, quello che Maris definisce la competizione, nelle Particules élémentaires si parla «anti-homo-œconomicus» (p. 67). In conclusione Maris di consumismo e di individualismo assoluto, Platefor- riprende la domanda del romanzo La Possibilité d’une me affronta la questione della domanda e dell’offerta île, «Qui mérite la vie éternelle?», che per Houellebecq in ambito sessuale, La Possibilité d’une île racconta di ha una sola risposta: coloro che sono capaci di bontà. una società post-capitalista che ha realizzato il sogno Ancora una volta un saggio che ci presenta l’opera di dei consumatori, la vita eterna. Infine, La Carte et le Michel Houellebecq sotto una luce differente da quella territoire esamina il lavoro, l’arte e la distruzione cre- normalmente evidenziata dai media, limitata il più del- atrice. Tutti temi economici, che trattati dagli esperti le volte al suo lato pruriginoso. della materia risulterebbero di difficile comprensio- [aron verga]

Letterature francofone extraeuropee a cura di Elena Pessini e Jean-François Plamondon

Efstratia Oktapoda (sous la direction de), Mythes quelle opere scritte nell’epoca successiva al post-mo- et érotismes dans les littératures et les cultures franco- derno. L’estremo contemporaneo è dunque un’etichet- phones de l’extrême contemporain, Amsterdam/New ta che ingloba nuove forme di scrittura frammentaria, York, Rodopi, 2013, pp. 316. esigente, portatrice di esperienze individuali che, al tempo stesso, richiamano questioni collettive. Proprio Già a partire dal titolo, il volume coordinato da nei testi che appartengono a questo nuovo movimento Efstratia Oktapoda manifesta la sua attenzione per una storico e letterario, l’eros rappresenta una componente tematica che è spesso al centro degli interessi di quella fondamentale che si declina con realizzazioni plurime: che viene definita, con l’etichetta discussa e discutibile, la strumentalizzazione del corpo, la rappresentazione di letteratura de l’extrême contemporain. L’erotismo è, dell’intimità, lo sguardo pornografico. L’altro aspetto in effetti, una componente pervasiva della nostra quoti- importante che desumiamo dal titolo corrisponde al dianità e un numero crescente di opere critiche lo pon- fatto che l’eros viene trattato alla stregua di un mito dal gono al centro della loro attenzione. La peculiarità di momento che è proposto come un’immagine ossessiva. questo volume risiede nell’ampia introduzione critica Dopo aver tracciato un breve profilo di Eros in quan- che offre un’impalcatura teorica molto precisa dell’o- to divinità positiva della cosmogonia greca, Oktapoda rientamento che guida gli articoli riuniti nel volume. mette in evidenza come il corrispettivo romano del dio Pur trattandosi di una collettanea, la curatrice inten- dell’amore, ossia Cupido, sia un personaggio duplice. de proporre una diversa modalità di approccio al tema È proprio quest’ultima caratteristica che corrisponde dell’erotismo e fornire delle basi teoriche che aiutino a all’immagine di Eros che ritroviamo nell’estremo con- chiarire le scelte estetiche dei diversi autori convocati. temporaneo. L’erotismo rappresenta, da un lato, l’ori- Lo scopo del volume è proprio quello di colmare le gine della creazione e, dall’altro, la spinta che conduce lacune metodologiche in grado di spiegare la scrittura alla distruzione e segna la fine dell’uomo (Thanatos). erotica e la rappresentazione dell’eros attraverso testi L’erotismo diventa mito se consideriamo la sua presen- scritti e film. Il titolo della collettanea mette in luce an- za e la sua persistenza nel tempo. Non solo a livello che il fatto che il fulcro dell’attenzione è la letteratura teorico e critico (Oktapoda rintraccia le interpreta- dell’estremo contemporaneo. Tale definizione, coniata zioni elaborate da Freud, Bataille, Foucault, Barthes, da Michel Chaillou a metà degli anni Ottanta, designa Bruckner e Finkielkraut), ma anche a livello estetico.

sf177.indb 635 19/12/15 01.05 636 Rassegna bibliografica

Proprio nell’estremo contemporaneo assistiamo a delle i loro personaggi manifestino una profonda ribellione rappresentazioni finzionali dell’erotismo e a forme di nei confronti dei padri, ne restano comunque condi- trasgressione che meritano una particolare attenzione. zionati. Con il contributo Virginie Despentes et Coralie Se l’eros non è solo un mito, ma la raffigurazione di Trinh Thi et le (post)féminisme. La vengeance de viol un corpo e la valorizzazione della sua bellezza, il testo dans (le film) “Baise-moi” (pp. 217-235), July Monty si francofono si presenta addirittura come «un corps de occupa del film che ha suscitato un forte dibattito e di toutes les souffrances, de toutes les projections» (p. 8). cui è stata vietata la proiezione in molte sale francesi. Il Seguono questa lunga introduzione storica e teorica, motivo è da ritrovarsi nella violenza e nel desiderio di una serie di saggi che forniscono delle esemplificazio- vendetta di due donne vittime di stupro in un film che ni puntuali e specifiche del tema esaminato. Nel pri- intende cambiare le modalità di rappresentazione della mo, La crise de l’éternel féminin: la littérature érotique sessualità femminile e valorizzare le donne per ciò che féminine dans la francophonie contemporaine (pp. 47- sono, senza preconcetti e cliché. Safoi Babana-Ham- 76), Gaëtan Brulotte analizza una quarantina di testi pton, Pérégrinations mythiques et érotiques chez Nancy scritti da donne. L’esplosione della scrittura femmini- Huston et Milan Kundera: “L’Empreinte de l’ange” et le è uno degli aspetti fondamentali dell’estremo con- “L’Ignorance” (pp. 237-260), analizza la mescolanza dei temporaneo. Da questi romanzi emerge una letteratura registri erotico e politico per esprimere un’identità na- sovversiva che scuote il genere e lo rinnova sul piano ta dall’esperienza del viaggio nei testi di Huston e Kun- storico, sociale e morale. Segue il contributo di Christa dera. Entrambi di origine straniera, i due autori consi- Stevens, Pour en finir avec l’obscénité féminine: mythes derano le minoranze straniere in Francia come corpi sexuels et politiques érotiques dans “Pornocratie” de Ca- estranei della realtà sociale francese e ipotizzano la ri- therine Breillat (pp. 77-95) che analizza la nozione di costruzione dell’identità a partire da una prospettiva osceno, i riferimenti impliciti e espliciti alla mitologia pluriculturale e da esperienze erotiche. Murielle Lucie classica a partire dal “récit-pamphlet” di Breillat. Ka- Clément, in Gabriel Osmonde. Métaphysique des gros rin Scherdtner, Désir et relation. “L’usage de la photo”, seins et Troisième naissance (pp. 261-281), analizza i Annie Ernaux/Marc Marie (pp. 97-111) descrive l’op- testi di Andreï Makine, scritti con lo pseudonimo di posizione tra uomo e donna e la condizione passiva di Gabriel Osmonde, e individua la dimensione erotica, subordinazione di quest’ultima. Il desiderio fisico è pa- sensuale e carnale che è propria dell’autore. Rabia Re- ragonato all’avidità fotografica dei protagonisti del ro- douane, “Femme nue, femme noire” de Calixhte Beya- manzo ed è legato a tutto ciò che produce sofferenza la: pour une mythologie de l’érotisme africain (pp. 283- (la malattia, la perdita, la morte). Anche il contribu- 297) si sofferma su un romanzo della scrittrice cameru- to di Metka Zupancˇ icˇ , Marie-Sissi Labrèche et l’explo- nense e rintraccia una sorta di “erotismo africano” che ration des limites (érotiques) de l’être (pp. 113-129) si presenta la sessualità come un’estetica della trasgres- basa sull’opposizione eros/thanatos e riflette, dunque, sione in grado di sconvolgere i tabù e le regole stabilite sull’erotismo che porta all’autodistruzione. In questa dall’alto che impediscono alla donna la piena emanci- dinamica non è prevista la pietà, ma una nascente tene- pazione e l’accettazione della propria identità femmi- rezza verso se stessi che possa portare a una speranza nile. L’ultimo saggio, Le manque et l’excès: la sexua- di conciliazione e di dialogo con ciò che è più difficile lité dans la littérature antillaise (pp. 299-314), ci offre da raggiungere. Efstratia Oktapoda, Michel Houelle- uno sguardo sulla letteratura caraibica. Arzu Etensel becq. Entre représentation obsessionnelle de scènes de Ildem ricostruisce a livello storico e letterario il rap- sexe et déni de l’amour (pp. 131-147), mette in eviden- porto degli antillani con l’erotismo. Le parole-chiave za come le categorie dell’amore tradizionale, ossia il per comprendere questa evoluzione sono la mancanza, sentimento idealizzato e la passione fisica, siano prive intesa come assenza di erotismo, e l’eccesso. La prima di fondamento nell’ottica di Houellebecq. Attraverso è associata all’epoca della schiavitù e alla violenza per- un gioco multiplo di decostruzione dell’individuo, lo petrata dai bianchi sulle donne nere che sono costrette scrittore affronta i temi che maggiormente lo ossessio- a subirla pur di avere la vita salva. Con il passare del nano: la sessualità, la vecchiaia, la morte, il piacere e tempo, l’opposizione diviene meno tragica, ma l’uomo il desiderio. Con il contributo successivo, Expression caraibico resta associato ad un profonda sensualità e sexuelle dans le texte féminin au Maroc (pp. 149-174), istintualità. Il critico utilizza, in questo secondo caso, Najib Redouane ci offre uno sguardo sulla realtà ma- il termine eccesso. rocchina. Il critico rileva che il tema della sessualità, La collettanea si situa all’interno di un filone di suc- pur scontrandosi con gli obblighi morali e religiosi, so- cesso, rivisitandolo in una prospettiva originale, so- prattutto se affrontato da una prospettiva femminile, è prattutto per quanto riguarda la scrittura femminile trattato da alcune scrittrici (come El Hadj Nasser, Ri- dell’erotismo e la sua mitizzazione. ta El Khayate, Bahaa Trabelsi e Nedjma) proprio per combattere l’ipocrisia e per costruire una nuova forma [emanuela cacchioli] di soggettività. Il contributo di Alison Rice, Hybridi- tés et sexualités: le corps et la sensualité dans l’écriture des femmes d’Algérie (pp. 175-193) si sposta in Alge- Alphonse Tonyè (sous la direction de), Critique et ria. Ancora una volta le donne sono protagoniste e, nei réception des littératures francophones, Paris, L’Har- loro romanzi, considerano il corpo come un luogo di mattan, 2013, pp. 340. scrittura segnato dalla storia e dalla forza di una parola che si dimostra fonte di innovazione letteraria al con- Nel novembre del 2006, all’università di Yaoundé tempo stilistica e tematica. Susan Mooney, invece, con in Camerun, si è tenuto un convegno dal titolo «Criti- Empreintes paternelles sur la masculinité et la féminité que et réception des Littératures francophones 33 ans chez Nina Bouraoui et Michel Houellebecq (pp. 195- après», i cui interventi sono stati ora riuniti in volu- 216) ci offre un’ulteriore analisi delle opere di Houel- me. L’indicazione temporale riferita ai 33 anni mostra lebecq e le mette in relazione con i testi di Nina Boura- la volontà di porsi in continuità tematica e euristica oui. Secondo Mooney, i due autori rintracciano visioni con un altro convegno che si era tenuto nel 1978 e maschili e femminili che riflettono sulle forme di ses- che ruotava sempre attorno alla ricezione critica della sualità influenzate dalla paternità fondatrice. Sebbene letteratura africana. Lo scopo del convegno del 2006

sf177.indb 636 19/12/15 01.05 Letterature francofone extraeuropee 637

è quello di interrogarsi sui testi letterari “del Sud” e l’écriture poétique dans “Boulevard de la liberté” de Da- di considerarli per la loro portata poetica, i saperi che ti, d’Almeida, Perri, et Yamguen (pp. 157-170), Nde veicolano, la mediazione che viene compiuta durante analizza un’opera nata dalla collaborazione di diver- la lettura e la ricezione da parte di pubblici diversi. si autori che si sono accordati per trattare lo stesso Il volume è suddiviso in tre sezioni. La prima con- soggetto all’interno della medesima opera e a partire tiene alcuni contributi generali che inquadrano, a li- da scelte estetiche comuni. Patricia Bissa Enama, La vello teorico, la questione della ricezione critica del- poétique du “regard” dans “Trop de soleil tue l’amour” le letterature francofone. Richard Laurent OMGBA, de Mongo Beti (pp. 171-191), invece, rintraccia la me- Existe-t-il une littérature francophone? Statut et ambi- tamorfosi del soggetto narrante attraverso l’analisi guité de l’écriture en francophonie (pp. 13-22), si con- dello sguardo che lui stesso scambia con gli altri per- centra sulla definizione di un campo letterario franco- sonaggi. fono che esiste come spazio dialettico, ma che è diffi- La terza parte, dedicata agli snodi letterari, si apre cile da circoscrivere attraverso altre categorie. Le let- con il contributo di Joseph Dong Aroga, Du statut terature francofone si caratterizzano per una pluralità d’auteur en littérature orale (pp. 195-207). Il critico di codici estetici e di lingue (parliamo di diglossia o riflette sul cambiamento di statuto dell’autore quan- addirittura di poliglossia). Anche le infrastrutture let- do ci muoviamo all’interno della letteratura orale: da terarie faticano a rendersi autonome da Parigi, intesa co-autore, esecutore, oggi è divenuto autore a tutti gli come luogo simbolico catalizzatore. L’unico modo per effetti e rivendica la paternità delle sue opere. In Les svincolarsi da queste dinamiche consiste nell’approc- voix du silence dans “La Mémoire amputée” de We- ciare le letterature francofone per mezzo dell’etnocri- re Were Liking (pp. 209-225), Alice Delphine Tang tica, ossia con una modalità che intende analizzare e analizza il romanzo della scrittrice camerunense che interpretare le similitudini e le differenze tra culture rompe il silenzio per colmare i vuoti che segnano la diverse. Segue l’articolo di Désiré Nyela, Littérature storia del suo paese. Le nozioni di spazio fisico, spa- africaine? Certes, mais de quelle littérature parle-t-on? zio evocato e la rappresentazione dell’universo rura- (pp. 23-38), che esamina le varie etichette applicate le e urbano sono gli argomenti del saggio di Marie- alle letterature africane e individua la modalità com- Rose Abomo-Maurin, Le roman camerounais: topo- parativa circoscritta a un corpus limitato di testi al fine graphie, espace physique et espace vécu (pp. 227-244). di cogliere le analogie estetiche. Paul Zang Zang, con Con Poésie camerounaise et critique en francophonie: La question linguistique chez les écrivains francophones le cas de “Balafon” d’Engelbert Mveng (pp. 245-249), africains (pp. 39-62), prende in considerazione la que- Mathilde Zoa dedica la sua attenzione alla poesia e stione linguistica e la produzione letteraria a partire alle forme estetiche che ha assunto nelle letteratu- da tre momenti storici: prima dell’indipendenza, dopo re africane. Anche il contributo di Désiré Atangana tale evento e dopo il Duemila. Kouna, L’immigration, l’ici et l’ailleurs chez quelques La seconda parte è centrata su considerazioni este- romanciers camerounais postcoloniaux (pp. 251-262), tiche. Alphonse Tonyè, Généricité et transgénéricité si sofferma sull’individuazione di tendenze comuni. Il dans “Les arbres en parlent encore” de Calixthe Beya- suo studio prende in esame il genere narrativo e le no- la (pp. 65-82), si focalizza sul romanzo della scrittri- zioni di “ici” e “ailleurs”. Con L’état postcolonial afri- ce camerunense e ne analizza il contesto dell’enuncia- cain dans l’œuvre dramatique d’Aimé Césaire (pp. 263- zione, dell’enunciato e del significato. Il contributo di 293), Gérard-Marie Messina sceglie invece il genere Jean-Claude Azoumaye, La lecture déconstructive d’u- teatrale e, nello specifico, le opere di Césaire e ne met- ne allégorie héroïque, de “L’Ounbangui Chari à la Ro- te in rilievo la portata storica e poetica. Antoine-Guil- chelle” de Pierre Sammy Mackfoy (pp. 83-96), esami- laume Makani, Le chronotope de l’enfer dans le roman na la decostruzione del modello occidentale dell’eroe francophone d’Afrique centrale (pp. 275-293), analiz- e la sua ricontestualizzazione africana. In Narrativité za la dimensione spazio-temporale, la simultaneità dei et mondialisation adverbiale dans “Brouillons de vie” due aspetti e la loro interazione reciproca. L’articolo de Angéline Solange Bonono (pp. 97-108), Christiane di Joseph Abah Atangana, “Fils de prélat” d’Armand Félicité Ewane analizza l’uso dell’avverbio in relazione Claude Abanda: une astuce éditoriale (pp. 295-305), alle altre parti del discorso e come vettore di informa- esamina la scrittura innovatrice e sovversiva dello zione all’interno della strategia narrativa. Gérard-Ma- scrittore camerunense. Anche Élodie Carine Tang rie Noumssi, La poétique de l’ambivalence dans “L’a- si sofferma sull’originalità estetica della scrittura di venture ambiguë” de Cheickh Hamidou Kane (pp. 109- una giovane autrice nel suo contributo dal titolo: 132), si sofferma sull’originalità dello scrittore sene- L’exorcisme comme prétexte de dévoilement des réa- galese e sul suo testo che sfugge alle categorizzazioni lités des familles africaines dans “Ménages d’Afrique” ascrivibili alle grammatiche classiche. Con De la lan- de Ch. Julie Nlènd (pp. 307-316). Chiude la colletta- gue des auteurs au discours des critiques: la littérature nea Emmanuel Kamdem Fopa, Réception des littéra- camerounaise locale en devenir (pp. 133-141), Charles tures francophones en classe de “french” au Cameroun: Belinga B’Eno constata che, fino ad ora, la critica ha fortunes diverses des genres (pp. 317-324), che sceglie approcciato le letterature del Sud in modo improvvi- una prospettiva inedita. Il critico si sofferma infatti sato, come avviene sempre di fronte a un nuovo fe- sulla ricezione anglofona (e la mediazione discorsiva nomeno letterario. Il passaggio successivo è quello di che ne viene fatta) di testi francofoni. definire una direzione e di trovare una propria coe- Sebbene il volume si presenti come uno studio del- renza interna. Dal canto suo, Alpha Noël Malonga, la ricezione critica delle letterature francofone, l’atten- Migritude et auctoréférentialité ou la littérature africai- zione dei contributi si focalizza quasi esclusivamente ne francophone entre l’Afrique et l’Occident (pp. 143- sulle letterature africane e, all’interno di queste, so- 156), rileva l’importanza della biografia e della psico- prattutto sulla letteratura camerunense, la cui ricezio- logia degli autori e le ripercussioni di questi aspetti ne può comunque offrire uno spunto di riflessione im- sulle loro opere. Il critico vuole mettere in luce come portante per l’intero fenomeno. la letteratura africana sia frutto di esperienze indivi- duali e non solo di prese di posizioni collettive. Con [emanuela cacchioli] l’articolo “Le corps, le sexe et l’amour”: l’érotisation de

sf177.indb 637 19/12/15 01.05 638 Rassegna bibliografica

e e «ElFe xx et xxi siècles», Continents francophones, come dimostra la sua applicazione al romanzo di Assia sous la direction de Sabrina Parent, Anne Douaire- Djebar. Bisogna dire che in questo dossier le quotazioni Banny et Romuald Fonkoua, 2014, n. 4, pp. 187. di Sartre sono in rialzo, come conferma anche il saggio di Dominique Combe, «Situation d’“Orphée noir”: Sar- Per il dossier riunito in questo numero della «Revue tre et Césaire» (pp. 133-141), che non solo riconosce a annuelle de la Société d’étude de la littérature de lan- Sartre un ruolo chiave nella ricezione delle letterature e e gue française des xx et xxi siècles» si è scelto un titolo, “nere” di lingua francese, ma ne fa uno dei capostipiti almeno apparentemente, abbastanza vago da risultare degli studi postcoloniali: «Aujourd’hui encore la cri- quasi banale, Continents francophones, ma se si fa at- tique américaine continue à lire “Orphée noir” com- tenzione all’intero frontespizio della rivista ci si rende me un texte fondateur – avec Les Damnés de la terre conto che quell’etichetta così generica non deve essere de Fanon et le Portrait du colonisé d’Albert Memmi, stata scelta a caso, perché fa da perfetto contrappun- également préfacés par Sartre, qui demeure l’un des to alla definizione “littérature de langue française”, al penseurs français de référence pour les études post- singolare, scelta invece per indicare l’oggetto di studi coloniales» (p. 141). Scendono invece le quotazioni di della rivista e della Società che la pubblica. Il solo ac- Gide, il cui Voyage au Congo (1927) viene ridimensio- costamento dei due titoli fa, infatti, subito esplodere nato sia per quanto riguarda la sua presa di posizio- le contraddizioni e le ambiguità che caratterizzano il ne anticolonialista che la sopravvalutata attenzione ai mondo francofono e che hanno fatto tanto discutere in popoli e ai luoghi che attraversa. Certo, non bisogna questi anni. Come si coniuga l’idea di una letteratura in cedere alla tentazione di letture decontestualizzate, ma lingua francese, che sembra presupporre un’unità, con Robert Fotsing Mangoua, nel suo saggio André Gi- la molteplicità legata all’immagine di “continenti fran- de, l’anticolonialisme revisité (pp. 93-110), dimostra, cofoni”? Una delle aporie o almeno uno dei grandi in- attraverso la sua analisi puntuale, come Gide non fosse terrogativi che fanno fatica a trovare risposte adeguate, anticolonialista, ma si sia limitato a criticare le disfun- nonostante i fiumi di inchiostro che hanno fatto versa- zioni e pertanto le negatività del sistema, e come sia in re. Qualche goccia è caduta anche nelle pagine di que- fondo rimasto chiuso nel suo mondo: «Il est apparu sto volume, ad esempio nell’intervista che lo conclude, que Gide, en emportant en Afrique une bibliothèque fatta da Sabrina Parent à Marc Quaghebeur: «Franco- volumineuse, s’enfermait dans sa propre culture au phone», le mot qu’il s’agit d’habiter enfin (pp. 171-181), lieu de s’ouvrir à l’ailleurs […] sa représentation du in cui si recuperano in chiave decisamente positiva la continent noir reste conforme aux préjugés racistes tanto vituperata etichetta e le sue diverse declinazioni. élaborés par l’Occident depuis les années d’esclavage» Se il titolo del dossier è vago, ma, come si è visto, (p. 109). Letto dall’altra sponda e in contesto postcolo- perfettamente funzionale e dirompente nel suo rappor- niale il saggio di Gide mostra le corde. Ma non bisogna to simmetrico con quello della rivista, l’introduzione dimenticare che, all’epoca in cui è apparso, ha svolto (Allers-retours théoriques et méthodologiques dans les un’innegabile funzione di critica del sistema coloniale continents francophones, pp. 9-13), firmata dai tre cura- o almeno di un modello di colonizzazione finalizzata al tori, tutti noti studiosi dei “fenomeni” francofoni, pre- solo sfruttamento dei popoli colonizzati. cisa invece bene il contenuto molto più puntuale ed Il secondo saggio del dossier, di Anthony Mangeon, omogeneo del volume e le sue finalità: «Les littératures intitolato Crimes d’auteur. Ou comment lire les littératu- francophones invitent naturellement à repenser le “fait res françaises et francophones façon série noire (pp. 35- littéraire” – qu’il s’agisse de ses production, réception, 67), non riguarda, o solo marginalmente, il romanzo diffusion, instutionnalisation ou historiographie – hors poliziesco, perché i crimini di cui si tratta in questo du cadre strictement national. La discussion sur ce su- saggio, crimini reali, non concernono una vittima qua- jet est en pleine ébullition […] C’est dans ce contexte lunque, ma lo scrittore, evacuato dall’opera attraverso stimulant que la revue […] s’est interrogée sur les l’uso di uno pseudonimo, come è il caso di Romain Ga- phénomènes de type “osmotique” – transferts et ry/Émile Ajar in Pseudo (1976), o attraverso lo scontro échanges – opérant entre champs littéraires français et fra autore, narratore e personaggio che si disputano la francophones, du Nord comme du Sud. En engageant paternità della storia in Banal oubli (2008) dello scritto- un dialogue entre littératures francophones (Nord/ re haitiano Victor Gary. Particolarmente interessante, Sud), littérature française et théorie/méthodologies, in questo saggio, tutta la parte introduttiva in cui, at- les contributeurs de ce numéro se sont livrés à un véri- torno alla tematica indicata, quanto mai attuale in am- table décloisonnement des domaines et à un désencla- bito postcoloniale, emergono molti dei problemi che vement des systèmes de pensée» (p. 9). A prima vista concernono il dibattito attorno alle letterature di lin- potrebbe sembrare una di quelle prefazioni un po’ al- gua francese. Segue un saggio che si sofferma su alcuni tisonanti cui seguono frutti spesso modesti, ma biso- aspetti dello specifico letterario quebecchese, a parti- gna riconoscere che in questo caso il progetto di rot- re dal concetto di “hétérolinguisme” creato da Rainier tura è in buona misura rispettato, in una miscellanea Grutman agli inizi degli anni ‘90 (Myriam Suchet, De che pur affrontando argomenti disparati, trova una sua l’imaginaire hétérolingue à la lecture indisciplinaire. unità nella reinvenzioni di vecchi canoni o nella rilet- Propositions théoriques et méthodologiques à partir de tura comparativa di testi erroneamente canonizzati in quelques textes écrits en «québé-quois», pp. 69-91), ma formule che non reggono di fronte alle più approfon- per allargarne poi la portata al più vasto ambito della dite conoscenze storiche o al cambiato contesto cultu- letteratura, attraverso la teorizzazione, non so quanto rale. Per esempio, il primo saggio di Chloé Chaudet, convincente, di una «lecture indisciplinaire». Le renouveau de l’engagement littéraire, de Sartre aux Completano il volume due lavori molto importanti littératures francophones. L’exemple de “La Femme sans sul piano del dibattito teorico e, per certi versi, com- sépulture” d’Assia Djebar (pp. 15-33), recupera in chia- plementari: Maxime Del Fiol, Les “occidentalismes” ve positiva un concetto sartriano che sembrava ormai de la littérature arabo-musulmane d’expressions ara- desueto nelle nostre letterature occidentali, quello di be et française depuis l’expédition d’Égypte. Pour une letteratura impegnata, per rimodularlo nella formula di problématisation et une acclimatation du concept en «dénonciation d’un inacceptable», perfettamente fun- critique littéraire (pp. 111-132), e Guillaume Bridet, zionale in area francofona, ed in particolare maghrebina, Pour une histoire littéraire écrite du point de vue cos-

sf177.indb 638 19/12/15 01.05 Letterature francofone extraeuropee 639

mopolite. Éléments à partir de la circulation de l’œuvre lation des cultures nationales métropolitaines (anglaise de Tagore à travers le monde (pp. 143-169). Entrambi, et française d’abord mais aussi espagnole et néerlan- avendo come punto di riferimento l’opera di Edward daise) avec leurs émanations coloniales et postcolo- Said, si interrogano sulla lettura speculare dell’Occi- niales, se révèle complexe et changeante. Son analyse dente da parte dell’Oriente e viceversa, tentando di contraint le chercheur à dépasser les frontières entre andare oltre le barriere geografiche, linguistiche, ideo- les disciplines et à s’ouvrir à des réalités plurielles où logiche, senza però cadere nella trappola di un «mon- production littéraire et situations historiques entrent dial décontextualisé», senza cioè perdere il contatto nécessairement en osmose. con il reale: «saisir les textes littéraires au plus près de L’ouvrage, introduit par une étude de Claire Jou- leur singularité comme également les auteurs dans leur bert intitulée Le «postcolonial» à la différence des lan- plus grande autonomie: faits de ci et de ça, insoumis gues: culture, politique et enjeu de monde, se compose peut-être, certainement ouverts sur ce qu’on n’atten- de deux parties. La première, intitulée «Les Postco- dait pas» (p. 169). lonial studies et l’épreuve comparatiste» réunit diffé- Un numero davvero importante di questa giovane rentes expériences de lecture comparatiste conduites rivista, che cerca di rinnovare il dibattito teorico/meto- à partir des concepts, problèmes, thématiques et cor- dologico sulle letterature di lingua francese e, più in ge- pus propres aux Postcolonial studies développés dans nerale, sulle letterature postcoloniali, fondandosi però le monde anglophone. La deuxième, consacrée aux sempre, rigorosamente, sulle opere, gli autori e il loro «Caraïbes: lieu critique du postcolonial», rassemble contesto di riferimento. en revanche des études visant à sonder selon différents [carminella biondi] points de vue la situation tout à fait particulière de cette zone du monde, caractérisée par les multicolonia- lismes et les créolisations linguistiques. Claire Joubert (sous la direction de), Le postcolo- Dans son étude introductive, Claire Joubert pré- nial comparé anglophonie, francophonie, Presses Uni- sente les modèles intellectuels qui ont marqué les re- versitaires de Vincennes, Université Paris 8, Saint-De- cherches postcoloniales dans les multiples univers na- nis, 2014, pp. 288. tionaux et transnationaux. La difficulté de l’Europe à se repositionner culturellement dans un univers mon- Le postcolonial comparé anglophonie, francophonie, dialisé où la compétition économique prévaut sur la relève le défi d’ouvrir un dialogue inter et transdisci- réflexion intellectuelle est ici mise en cause. Quelle plinaire rassemblant les études de spécialistes de dis- conception de la connaissance reste valable dans ciplines différentes, de la littérature à l’anthropologie, une société qui fonde ses bases sur des perspectives de la linguistique à l’histoire et aux sciences humaines jusqu’ici inédites voire refusées dans le vieux conti- au sens large. Brisant les cloisonnements disciplinaires, nent? Voilà la question à laquelle Joubert essaie de mais aussi linguistiques et nationaux, cet ouvrage se répondre, ouvrant d’abord le débat sur les modèles propose de frayer de nouvelles pistes pour la compré- intellectuels développés en Inde, dans les Caraïbes et, hension des rapports entre la littérature, la produc- plus largement, en Amérique. La prise de conscience tion culturelle et la politique dans la mondialisation que les univers culturels de l’anglophonie et de la fran- actuelle. Les études qui y sont réunies, prenant comme cophonie ont été dépassés par l’Histoire en faveur point de départ les postcolonial studies anglophones, d’une conception plus généralement postcoloniale et s’interrogent sur l’histoire connectée des empires colo- mondialisée, a focalisé la réflexion intellectuelle de ces niaux britannique et français et entament une réflexion dernières années. Analysant les développements cri- sur les différentes approches intellectuelles et idéolo- tiques du postcolonial, Joubert propose une série de giques qui ont fondé leurs histoires comparées. définitions qui le dépassent en faveur du transcolonial, La riche bibliographie qui clôt le volume met en évi- du transnational et du multilinguisme; ces définitions dence l’essor que les études sur ce sujet ont eu dans mettent en cause les relations complexes entre colo- les premières années du troisième millénaire, en par- nialismes, esclavagismes, anticolonialismes, décolo- ticulier entre 2009 et 2013. En effet, exception faite nisations, postcolonialités et encore néocolonialismes pour les rares ouvrages de référence produits dans les et mondialisation. Joubert veut ainsi marquer la diffi- années soixante et soixante-dix du siècle dernier par culté, voire l’impossibilité d’inscrire la problématique des pionniers du débat sur les enjeux du colonialisme traitée dans ce volume dans des limites figées et la né- et du post-colonialisme tels que Léon-Gontran Damas, cessité donc d’adopter une perspective plus ouverte. Frantz Fanon, Edward Saïd, Aimé Césaire ou Léo- La première section du volume s’ouvre avec l’étude pold-Sédar Senghor, il faut attendre les années quatre- de Robert J.-C. Young, traduite en français par Hélène vingt-dix pour que cette problématique commence à Quiniou, intitulée Littérature anglaise ou littératures en émerger assez impérativement dans les milieux intel- langue anglaise?. Young développe, à travers une ap- lectuels et académiques. Un changement de perspec- proche historique et institutionnelle, la question de la tive entraîné par l’avancée de la globalisation qui sou- définition de la littérature en langue anglaise qui inclut lève de nouveaux problèmes sociaux mais aussi de à l’heure actuelle des œuvres littéraires produites par nouvelles mises en cause. des auteurs nés dans les anciennes colonies ou dans les Émilienne Baneth-Nouailhetas et Claire Jou- pays du Commonwealth. Il observe que toute tenta- bert, dans l’avant-propos du volume, définissent les tive de définition mène à une impasse: soit elle inscrit contours de l’ouvrage qui se présente tel un «chantier ces productions dans des bornes géographiques trop de recherche» (p. 5). Mettant en relation des histoires étroites, soit elle évacue toute référence à une langue nationales et intellectuelles différentes et des cultures particulière, soit elle contient un jugement de valeur universitaires n’ayant pas les mêmes traditions, ce vo- ou une approche politico-idéologique, soit encore elle lume met en avant une série de questions qui ont trait est trop neutre, donc difficile à utiliser. Comment s’en au comparatisme, à la littérature comparée, à la cri- sortir alors? Après avoir fait le tour des définitions, tique littéraire, à l’histoire, à l’anthropologie, à la socio- Young retourne à celle de «littérature postcoloniale», logie afin d’explorer le postcolonial – entendu comme telle qu’elle ressort des «postcolonial studies». Il ne espace disciplinaire – dans toute sa complexité. La re- s’agit plus de littérature au sens strict mais bien plutôt

sf177.indb 639 19/12/15 01.05 640 Rassegna bibliografica

d’une politique du savoir qui connecte la littérature au titutionnalisation de la francophonie se révèle donc de monde tout en allant bien au-delà des limites de cette plus en plus comme une arme à double tranchant. même littérature. Adhérer à cette approche signifie en- Dominique Combe consacre sa contribution à core une fois sortir des frontières entre les disciplines l’œuvre critique d’Edward Saïd, en particulier aux ou- mais aussi entre les langues. vrages Orientalism (1978) et Culture and Imperialism Christine Lorre-Johnston aborde la question des (1993) où cet intellectuel «international» théorise le whiteness studies et de l’impact problématique du «décentrement» du regard, une prise de distance cri- concept de whiteness sur les études littéraires post- tique par rapport au phénomène de la colonisation coloniales, à travers le cas de la critique littéraire ca- qu’il a pourtant vécu de l’intérieur. Dans ses écrits la nadienne. Retraçant d’abord l’émergence de ce nou- culture européenne, notamment la culture académique veau champ de recherche aux États-Unis – société française, est la référence principale, au détriment des multiraciale qui a connu les tensions liées à la ségré- manifestes et des textes programmatiques de l’antico- gation –, elle analyse ensuite son évolution au Canada, lonialisme et des principaux représentants de la lutte pays socialement très différent où ce concept est adop- contre la colonisation: Senghor et Damas d’abord mais té par les Canadiens français dans leur lutte identitaire aussi un contemporain tel que Glissant. Les figures de au cours des années soixante. L’évolution de la démo- Frantz Fanon et d’Aimé Césaire occupent en revanche graphie canadienne à la suite des modifications de la une place centrale dans la réflexion de Saïd et forment politique d’immigration qui a ouvert les frontières du un trio «tricontinental» et bilingue avec C.L.R. James. pays à des populations très variées a remis à l’honneur Selon Combe, s’il démontre bien connaître l’œuvre cette question identitaire, qui émerge dans les lois sur de Fanon, qu’il considère une sorte d’humaniste eu- la citoyenneté. Pour sortir des débats assez stériles au- ropéen que l’on peut lier à Foucault dans sa critique tour des mots à utiliser, les intellectuels proposent la radicale du pouvoir, Saïd connaît assez mal les écrits de notion de multiculturalisme qui renvoie à une société Césaire, exception faite pour le Cahier d’un retour au composite où on ne classe pas les personnes selon leurs pays natal et le Discours sur le colonialisme. Le Cahier origines et qui ne doit plus être ancrée sur la promo- fait en particulier l’objet d’une analyse approfondie, tion des valeurs anglo-européennes mais adopter en- faite à travers la lecture croisée de Fanon et de James vers elles une approche critique. qui permet de démarquer le poème des bornes de l’an- Jean-Marc Moura, avec son étude Critique fran- ticolonialisme et de la négritude et d’en relever l’élan cophone du postcolonial et critique postcoloniale de la universel. francophonie, ouvre un volet sur les études postcolo- Martin Mégevand développe une intéressante étude niales dans le champ francophone. Il relève d’abord sur Théâtre, terreur et mémoire en contexte postcolo- l’accueil sceptique et réticent que l’université française nial. Partant d’une analyse critique du phénomène de a réservé à la notion de postcolonial, le liant au regard la terreur et de la fascination qu’il exerce sur la socié- singulier que la France porte sur la colonisation, pas- té occidentale depuis le théâtre grec, en passant par sage historique faisant encore l’objet de questionne- le romantisme et ses romans historiques pour parve- ments problématiques. Il développe ensuite l’analyse nir aux théorisations d’Antonin Artaud sur le «théâtre de la francophonie dans le cadre institutionnel de l’Or- de la cruauté», Mégevand s’interroge sur la façon de ganisation internationale née de la volonté conjointe de repenser la terreur en contexte postcolonial et sur la la métropole et des anciennes colonies, qui donne un manière de mieux la représenter. Elleke Boehmer et statut particulier à la perspective postcoloniale fran- Stephen Morton ont publié sous leur direction, en çaise. La relation du français à la francophonie est à 2009, un ouvrage qu’on peut considérer une référence la fois institutionnalisée et universaliste mais n’en reste à ce sujet, Terror and the Postcolonial, où les chercheurs pas moins centrée sur une perspective qui fait de la essayaient de repenser le phénomène de la terreur en métropole le centre d’où la langue rayonne. Le débat le rattachant aux conditions d’exercice de la mondia- repose donc sur l’opposition nécessaire entre une litté- lisation. Robert Eaglestone y mettait en doute le fait rature française/francophone liée à un système cultu- que les formes fictionnelles du roman et de la nouvelle rel traditionnel, désormais anachronique, et une litté- fussent en mesure de transmettre la terreur au lecteur. rature-monde en français, ouverte et transnationale. Il reviendrait donc au théâtre, pratique artistique col- Après des années de questionnements qui ne sont lective fondée sur la répétition et la performance – et pas parvenues à délimiter et à définir sereinement ce qui relève des arts de la mémoire – de prendre le relais, domaine de recherche, on assiste à l’heure actuelle à ce qui est arrivé, en effet, à l’ère de la lutte anticoloniale un développement très net des études francophones avec l’algérien Kateb Yacine mais aussi en contexte dans la recherche et dans l’enseignement universitaires postcolonial avec Rwanda 94 du Groupov ou 11 sep- qui adoptent dans ce domaine une perspective trans- tembre 2001 de Vinaver. nationale et pluriculturelle. Beaucoup de travail de La deuxième partie, consacrée aux Caraïbes, débute recherche reste donc à faire sur les implications colo- avec une étude qui nous ramène au contexte anglo- niales, voire postcoloniales au sein des lettres franco- phone, L’institution de la littérature caribéenne anglo- phones. phone de J. Dillon Brown traduit par Hélène Qui- Alice Goheneix-Polanski adopte une perspective niou. On reprend ici le problème de la définition d’une historique pour approfondir la relation entre langue littérature caribéenne anglophone, qui – tout en la cir- française et francophonie dans son étude consacrée conscrivant – se rapproche de la question plus géné- à L’argument civilisateur dans la doctrine coloniale de rale présentée par Robert Young au début du volume la langue française. L’auteur veut souligner comment sur la définition à donner aux différentes littératures en l’argument civilisateur, qui liait l’apprentissage de la langue anglaise. Partant de l’analyse et de la définition langue française au progrès des individus colonisés, de la production littéraire de la génération Windrush, constitue une ambiguïté dans la francophonie contem- à travers un parcours historique et critique autour des poraine. Cette ambiguïté ne vient d’ailleurs pas seule- principaux ouvrages qui se sont occupés de cette ques- ment des intellectuels métropolitains mais est égale- tion et de deux auteurs de référence (Mittelholzer et ment affirmée par les principaux représentants de la Phillips), Dillon Brown propose d’analyser la littéra- francophonie tels que Léopold-Sédar Senghor. L’ins- ture caribéenne en langue anglaise sans la réduire aux

sf177.indb 640 19/12/15 01.05 Letterature francofone extraeuropee 641

catégories critiques traditionnelles liées à la colonisa- l’Amérique du Nord et le désir d’imiter les cultures tion et à la décolonisation pour en faire ressortir toute étrangères (américaines et européennes). la complexité. Myriam Cottias et Madeleine Dobie mettent en J. Michael Dash mise sur le phénomène de l’émigra- relation deux cas de migration des Amériques vers la tion, de la diaspora, lié à la mondialisation. Il choisit, France qui concernent deux femmes: Joséphine Baker, en guise d’exergue, le Traité du tout-monde d’Édouard icône de la danse et du chant universellement connue, Glissant où l’intellectuel martiniquais, reprenant le arrivée à Paris en 1924 et Mayotte Capécia, écrivaine néologisme créé par Marc Augé, théorise la mondiali- martiniquaise, émigrée en 1946. Elles ont toutes les sation comme un non-lieu, un espace interchangeable deux participé de l’effervescence de la culture noire où l’être humain reste anonyme. L’époque postcolo- à Paris et répondu à des stéréotypes de représenta- niale est une époque de mouvement, de déplacement, tion, Baker personnifiant la figure primitive de la sau- de mutation et de cosmopolitisme, donc forcément de vage sexuelle, Capécia la mulâtresse antillaise, sédui- contact et d’échange. L’hybridité, la créolisation et la sante mais tragique. Le souci de Cottias et Dobie est transculturation sont ses mots d’ordre, ce qui conduit cependant celui de comprendre comment et dans nécessairement, dans les Caraïbes, à la redéfinition quelle mesure ces deux femmes se sont servies de ces d’une identité – selon la formulation de Stuart Hall, représentations conventionnelles pour atteindre leurs puis de Paul Gilroy – diasporique, composée de toutes propres objectifs. Déplaçant l’attention de la représen- les présences (africaine, européenne et américaine) de tation que Baker fait de son corps, les chercheuses se cette partie du monde. Cette nouvelle identité transna- concentrent sur ses Mémoires où la danseuse reconnaît tionale est cependant mise en question par les poètes se sentir prise dans un piège, étant partagée entre son et les artistes. Dash analyse la perspective adoptée par image stéréotypée et le refus de cette image en faveur Glissant dans son Discours antillais puis dans Introduc- d’une identité plus vraie et complexe. Dans l’analyse tion à une poétique du divers où l’écrivain oppose au de la biographie de Capécia et de ses romans Je suis modèle abstrait des critiques le drame de la traite et de Martiniquaise et La Négresse blanche, elles relèvent l’esclavage qui restent sous-entendus à l’identité dias- comment l’utilisation de modèles figés n’empêche pas porique et insulaire. l’écrivaine martiniquaise d’aborder les facteurs qui in- terviennent sur le statut de l’individu dans la société: Sandra Monet-Descombey Hernández ouvre un volet sur Cuba, à travers l’œuvre de Nancy Morejón. des facteurs socioéconomiques mais aussi le fait d’être La situation sociale et intellectuelle de cette grande île colonial ou métropolitain. caribéenne est bien différente de celle du reste des Ca- Le volume se termine par une série d’annexes, par- raïbes. Cuba a fondé son discours intellectuel sur une mi lesquelles on a déjà signalé la riche bibliographie. opposition très nette au capitalisme globalisateur et sur Complexe et ambitieux, élargissant les horizons de la recherche aux histoires et aux littératures coloniales l’exaltation des concepts libérateurs de la décolonisa- espagnoles et néerlandaises, cet ouvrage constitue une tion et du marronnage culturel. Dans ce cadre More- nouvelle référence, destinée à repousser le point de dé- jón devient porte-parole, dans une perspective fémi- part des développements ultérieurs. niste, du passé occulté et oublié de l’esclave noir(e) et [elena fermi] du nègre marron, que l’histoire officielle a écartés de la reconnaissance nationale. Kathleen M. Gyssels consacre son article à l’œuvre «Expressions maghrébines», vol. 13, n. 2, hiver de Léon-Gontran Damas et d’Albert Helman. Guya- 2014, Nouvelles expressions judéo-maghrébines, dossier nais le premier, Surinamais le second, ils représentent coordonné par Guy Dugas et Sonia Zlitni Fitouri, deux univers proches mais deux langues différentes, pp. 187. le français et le hollandais, la première jouissant d’une diffusion et d’un prestige culturel qui lui donnent un Il dossier si apre con un omaggio di Denise Brahi- indéniable avantage sur la deuxième. Objectif com- mi à Guy Dugas, giustamente considerato come il padre mun à ces deux intellectuels: rétablir un lien entre degli studi sulla letteratura giudaico-maghrebina che, a toutes les littératures de la diaspora noire du Nouveau partire dagli anni’90 del secolo scorso, data di pubbli- Monde, à travers leur promotion par des anthologies, cazione della sua tesi sull’argomento, non ha mai smes- des revues, des traductions. Voici donc l’anthologie de so di battersi perché ne fosse riconosciuta la specificità Damas Latitudes françaises: poètes d’expression fran- all’interno della letteratura maghrebina di lingua fran- çaise, 1900-1945, œuvre pionnière publiée en 1947, qui cese. Una battaglia vittoriosa, come conferma anche fait émerger une tradition diasporique noire mais qui questo importante dossier, che si apre con un’introdu- est encore trop en avance sur son époque et Adyosi, zione della co-curatrice Sonia Zlitni Fitouri, dal titolo Afscheid, paru en 1996 où Helman bâtit à un moment Expressions judéo-maghrébines: “Une force qui demeure” bien plus favorable des passerelles entre les poètes (pp. 5-11) e si chiude con un aggiornamento bibliografi- provenant des différents espaces de la Caraïbe et de co a cura di Guy Dugas: Trente ans de littérature judéo- l’Amérique de la diaspora. maghébine (1982-2013) (pp. 53-171), che, con i suoi Claire Hennequet analyse les relations entre poésie quasi cinquecento titoli, ne indica la vitalità, malgrado et identité nationale dans l’œuvre de Walt Whitman, Jo- la difficile situazione attuale degli ebrei in quei territori sé Martí et Aimé Césaire. Elle essaye de comprendre s’il musulmani in cui hanno vissuto in pace da secoli. existe un lien entre la figuration de la modernité selon Sonia Zlitni Fitouri apre la sua introduzione cer- le modèle états-unien que l’on retrouve chez ces trois cando di riassumere gli elementi che costituiscono la poètes et l’image de la nation. Hennequet se concentre specificità della letteratura giudaico-maghrebina e che ensuite sur José Martí. L’intellectuel cubain, qui a passé giustificano, almeno in parte, le scansioni del dossier, toute sa vie d’adulte en exil, oppose dans ses écrits le che indicheremo in seguito: «Marquée des thèmes peuple nord-américain, matérialiste et superficiel, aux constants tels que l’Histoire, l’exil, l’identité, la mé- peuples de l’Amérique latine, prisonniers de leur idéa- moire, la nostalgie, la littérature judéo-maghrébine de lisme. Il se bat pour que l’Amérique latine trouve enfin langue française aspire désormais à une forme de plu- son identité, dépassant le sentiment d’infériorité envers ralisme qui «raconterait les mille et une façons d’être

sf177.indb 641 19/12/15 01.05 642 Rassegna bibliografica

juif que les écrivains et les artistes vont inscrire dans volontà di sovversione e nel suo amore per l’iconofilia leurs œuvres; les mille et une façons de vivre la judéité, che alimenta la memoria. Mentre il saggio di Zakharia de la rejeter, de la vivre obliquement, de la tenir à dis- Fatih, The Aesthetics of Fragmentation, or a Way to Re- tance, de la mimer, de la stimuler, de la représenter, de ad El Maleh (pp. 125-137), propone un nuovo approc- la déconstruire, de la réinventer, de l’imaginer. Pas plus cio critico all’opera di El Maleh, modellato sul proce- d’identité juive stabilisée que les autres, mais une mou- dimento frammentario della sua scrittura. vance, une fluidité». La citazione, tratta dal saggio di Un dossier importante, che cerca di fare il punto Régine Robin, Le Golem de l’écriture. De l’autofiction sulla scrittura giudaico-maghrebina, sia pure in manie- au cyber soi (Montréal, XYZ, 1997, p. 29), sottolinea la ra non sistematica, ma attraverso una serie di indagini ricchezza di una scrittura che si è liberata degli schemi su autori, opere o orientamenti culturali rappresentati- fissisti di un’identità ebraica monolitica, per modellar- vi che ci permettono, comunque, una visione abbastan- si sulla complessità di un vissuto che ha comportato e za esaustiva di questo fenomeno letterario. La biblio- comporta traumi, diaspore, contaminazioni. Alle carat- grafia delle opere dell’ultimo trentennio che chiude il teristiche indicate da Zlitni Fitouri, che nel complesso dossier e completa le bibliografie dei periodi preceden- non sembrano poi davvero molto diverse da quelle che ti, curate anch’esse da Guy Dugas, è quanto mai pre- si potrebbero usare per definire la letteratura maghre- ziosa per qualsiasi tipo di ricerca si intenda intrapren- bina di lingua francese, e forse tante altre letterature dere su questa letteratura. contemporanee, Guy Dugas, nel suo articolo di chiu- [carminella biondi] sura (Fantaisie, littérature mémorieuse, iconophilie… Retour sur quelques concepts discutables, pp. 139-152), ne aggiunge una che sembra meglio connotare questa Mathieu Labeau, Une nouvelle génération de ro- letteratura: la dimension fantaisiste, la dimensione ludi- manciers africains? Débats et enjeux (2000-2010), Paris, ca, il gusto del paradosso, dell’humour, della parodia, Anibwe, 2014, pp. 153. surrogata da un’iconofilia che, mentre sembra ancora- re al reale, all’oggettività, permette in realtà infiniti gio- Ce volume en petit format de poche aborde la ques- chi della memoria e della scrittura. tion de la nouvelle génération de romanciers franco- Dicevo che gli elementi individuati come caratteriz- phones issus des anciennes colonies (Afrique, Ca- zanti di questo tipo di letteratura, spiegano anche in raïbes, Océan Indien) qui, depuis une quinzaine d’an- larga misura la scansione del dossier, che si divide in nées désormais, a fait son apparition sur la scène litté- quattro parti: «Négocier une nouvelle identité»; «Mar- raire du vieux continent et qui a fait l’événement lors cher sur l’oubli»; «Supports visuels, supports mémo- de la rentrée littéraire 2014. C’est plus précisément sur riels»; «Conceptualisation». I due articoli che com- les romanciers africains que l’auteur, Mathieu Labeau, pognono la prima parte si concentrano su due autori se focalise dans ce petit ouvrage: il affirme vouloir po- che rappresentano molto bene la ricerca e, allo stesso ser un regard global sur la nouvelle génération afin de tempo, la difficoltà di una ricollocazione identitaria da mettre en relief à la fois son positionnement par rap- parte di personaggi che non trovano più un loro con- port à la littérature africaine et mondiale, sa relation testo di riferimento o che cercano di riadattarlo al loro avec ses prédécesseurs et ses démarches esthétiques processo di trasformazione. Si tratta dei saggi di Deb- spécifiques. L’approche adoptée étant celle d’ouvrir bie Bernard, Ironie, altérité et racisme dans “Le café de un débat que l’auteur sait être complexe, donc suscep- Madame Ben Djamil” de Claude Kayat (pp. 15-27) e di tible d’ultérieurs développements, l’analyse se focalise Mohamed Chagraoui, Tunisianité, judéité et égalité sur quelques écrivains considérés comme des modèles: dans les écrits de Gilbert Naccache (pp. 29-44). La se- le franco-djiboutien Abdourahman Waberi, les togo- conda parte, composta, come la prima, di due articoli, lais Kossi Efoui et Sami Tchak, le congolais Alain Ma- si focalizza sul tema della memoria e della sua perdita banckou et le camerounais Eugène Ebodé. L’étude de (dovuta ai processi di assimilazione) e sul suo rapporto quelques œuvres de référence de ces auteurs, basée con la storia: Wafa Ben Aziza, Nouvelles expressions sur les théories littéraires plus récentes énoncées par judéo-maghrébines entre mémoire et histoire: une écri- Dominique Maingueneau, offre aux lecteurs un simple ture en évolution (pp. 47-60); Danielle Dahan-Feucht, outil de consultation. Marlène Amara: du silence à l’expression revendiquée Le volume s’ouvre avec un panorama rapide de d’une mémoire (pp. 61-75). La terza parte si compone l’évolution du champ littéraire africain. Labeau y re- di tre articoli che non analizzano testi scritti, ma feno- lève les changements de perspective que la littérature meni visivi, che vanno dalla permanenza di una piccola de ce continent a subis à partir des années trente et du sinagoga alla periferia di Tunisi, all’iconografia utiliz- mouvement de la Négritude – lorsque les intellectuels zata sulle pagine di copertina nei testi giudaico-magh- étaient encore des colonisés et que, voulant se démar- rebini, passando per l’analisi di un film che racconta quer du discours du colonisateur, ils trouvaient leur l’esperienza negativa di ebrei marocchini trasferitisi, autonomie dans la référence continuelle à leur terre negli anni Sessanta, in Israele, dove non si riconoscono d’origine – jusqu’ à aujourd’hui, où les récits africains e non sono riconosciuti: Dora Carpenter-Latiri, Visi- sont engagés dans l’épopée du monde contemporain, tes de la sinagogue de La Goulette. La synagogue Beith en instance de mondialisation, dont ils brossent les Mordechai, rue Khaznadar, témoin et miroir d’une mi- contours, les failles et les promesses. Les romanciers norité de Tunisie (pp. 79-98); Denise Brahimi, À pro- de la nouvelle génération rejettent l’engagement en tant pos des Judéo-berbères marocains, un film: “Tinghir-Jé- que composante obligatoire de leur écriture, prennent rusalem” (pp. 99-103); Ewa Tartakowsky, Littérature leur distance du continent africain pour s’ouvrir à une des auteurs d’origine judéo-maghrébine. Les couvertu- perspective universelle et adoptent dans leurs œuvres res, masques à visage découvert (pp. 105-121). L’ultima une approche intertextuelle ouverte à des auteurs d’ori- parte, sulla concettualizzazione, contiene il già citato gines, d’époques, de genres tout à fait différents. Ils ont articolo di Guy Dugas, che cerca di enucleare uno spe- pris confiance en eux, ont conscience de la valeur de cifico giudaico-maghrebino, pur nelle infinite varianti leur œuvre dans le panorama mondial et veulent ainsi e trasformazioni di questa letteratura, specifico che in- se légitimer. Leur production se caractérise par ailleurs dividua, come si è detto, nell’aspetto ludico, nella sua du fait d’être une littérature de la diaspora, de l’exil, de

sf177.indb 642 19/12/15 01.05 Letterature francofone extraeuropee 643

l’émigration, car la plupart d’entre eux ne vit plus en comprendre le point de vue adopté par l’auteur pour Afrique. L’exil est cependant vécu et représenté par ces aborder l’œuvre d’Ahmadou Kourouma et son rap- auteurs de manière apaisée par rapport à leurs aînés; port avec le mythe. Amadou Ouédraogo, professeur il représente une opportunité, une occasion enrichis- de Littératures et cultures francophones d’Afrique et sante plutôt qu’un événement tragique. La nostalgie du de la Caraïbe à l’université de la Louisiane à Lafayette «pays natal», la nécessité d’un retour aux sources ne (États-Unis), conçoit l’œuvre romanesque de l’écrivain leur appartient plus. Ils ne sont pas non plus centrés ivoirien comme «l’émanation, sinon le reflet» (p. 18), sur la métropole et sur Paris comme sur les centres d’où de la culture malinké (à laquelle Kourouma apparte- la nouvelle littérature doit forcément rayonner mais, nait), donc comme une porte d’accès privilégiée pour déclarant la mort de la francophonie telle qu’elle était pénétrer à l’intérieur de ce monde, pour «dé-voiler et conçue et institutionnalisée, proclament la naissance […] saisir l’imaginaire collectif malinké dans sa com- d’une «littérature monde en langue française» caracté- plexité» (p. 23). L’univers mythique d’Ahmadou Kou- risée par le multicentrisme. Par ailleurs, il est évident rouma serait alors, dans la perspective d’Ouédraogo, que quelques questions se posent par rapport au rôle la manifestation littéraire de l’univers mythique ma- joué par les maisons d’édition (parisiennes pour la plu- linké et, plus en général, de la culture de cet espace part), dans les choix faits par les auteurs, ainsi que sur le géoculturel. L’œuvre littéraire serait une vision dans le poids du lectorat (pour la plupart occidental ou africain sens qu’elle permettrait au lecteur de mieux connaître occidental), visé par les auteurs. Cependant, l’évolution son contexte de production, à l’instar d’un document des rapports culturels entre l’Afrique et l’Occident est historique ou d’une pièce archéologique. Ce but est indéniable et cette relation se bâtit sur des bases iné- affiché sans équivoques: «par-delà l’élucidation de dites auparavant: celles de l’hybridité, d’identités non l’œuvre, il s’agira d’appréhender un peuple et une figées, sans cesse en changement. culture de la manière la plus totale possible» (p. 25). Les sujets des romans et des récits ont eux aussi Dans quel sens faut-il alors parler de «subversion»? subi des modifications au cours des décennies. Si, à Pour Ouédraogo l’œuvre de Kourouma se fait reflet l’époque coloniale, le sujet privilégié était la dénon- du monde malinké aussi bien dans sa version tradition- ciation de la colonisation, avec l’indépendance les nelle et vénérable que dans sa dégénérescence succes- écrivains ont plutôt ressenti le besoin de mettre l’ac- sive à l’ère des Indépendances (c’est-à-dire après 1960, cent sur les pouvoirs qui en étaient issus pour enfin quand les colonies françaises de l’Afrique occidentale se focaliser sur la critique de la tradition africaine et devinrent politiquement indépendantes). L’on com- des conditions d’immigration; les textes romanesques prend alors que la «subversion» évoquée dans le titre étaient donc des miroirs de la société africaine et, de ne décrit pas tellement ou principalement l’attitude de ce fait, ils adoptaient une perspective réaliste qui a été Kourouma face au mythe, mais qu’elle serait plutôt le mise de côté par la nouvelle génération. Beaucoup de trait distinctif d’une époque qui se caractérise par le jeunes romanciers choisissent de parler à la première pervertissement et le dévoiement des traditions ances- personne, donnant toute sa place à l’instance narra- trales, des mythes et des pratiques rituelles. L’œuvre de tive où le rêve, l’imaginaire, font souvent irruption Kourouma serait subversive surtout dans la mesure où pour brouiller les pistes de compréhension, pour faire elle raconterait une époque de subversion. sauter les frontières avec la «réalité». L’Afrique reste, Dans le but de conférer à son étude «les bases théo- même chez eux, protagoniste avec ses malheurs, l’écri- riques et le contenu ethnologique qui s’imposent» (p. ture n’abandonne pas le «style oral» ni la recherche 24), Ouédraogo s’appuie sur les travaux d’ethnologues de la tradition comme base d’une identité mais tout et d’anthropologues ayant étudié la société manden- cela est filtré à travers un regard subjectif qui finit par ka tels que Sory Camara, Youssouf Cissé, Dominique s’affirmer sur la réalité objective et par faire ressor- Zahan, Marcel Griaule et autres, tandis que le modèle tir l’incapacité des mots à dire la douleur du monde. pour une définition générale du mythe est offert par Cependant, le discours littéraire ne peut pas faire abs- Mircea Eliade. L’analyse de Ouédraogo se connote traction du contexte dans lequel il se développe et doit ainsi comme un perpétuel va et vient entre l’œuvre nécessairement se définir par rapport à des enjeux du romanesque de Kourouma et la réflexion ethnogra- champ. Ceci est d’autant plus vrai pour les romanciers phique et anthropologique. Cependant, on a souvent africains qui sont encore contraints de se définir non l’impression que l’œuvre littéraire est convoquée pour seulement par rapport à leurs prédécesseurs mais aussi justifier, confirmer, illustrer le récit anthropologique et par rapport aux écrivains occidentaux. ethnographique qui sert de paradigme pour interpré- Ce petit volume s’adresse à tout type de public. ter l’œuvre elle-même, et c’est précisément dans cette Tout en étant écrit par un spécialiste des littératures démarche qu’il nous semble voir la principale limite francophones, il n’a pas la prétention d’être exhaus- de l’étude. Il arrive de rencontrer, en guise de com- tif, ni celle de fournir des outils spécifiques aux cher- mentaire à des extraits tirés de quelques romans de cheurs. Il permet une lecture rapide, utile pour se faire Kourouma, de Camara Laye et de Massa Makan Dia- une idée générale des enjeux de cette thématique. Il baté, une phrase comme celle-ci: «Voilà donc l’image aurait peut-être fallu ajouter, en conclusion du volume, du sang telle qu’elle apparaît dans la conscience my- une bibliographie essentielle qui aurait facilité la tâche thique du peuple mandenka, et plus généralement aux lecteurs désirant approfondir leurs connaissances dans la culture négro-africaine» (p. 76). L’œuvre lit- à ce sujet. téraire devient conscience mythique d’un peuple, [elena fermi] elle reproduit une vision déjà établie du monde. Pour Ouédraogo il n’est pas question de mettre en évidence l’imaginaire personnel de l’auteur mais de montrer les Amadou Ouédraogo, L’univers mythique d’Ah- correspondances entre son œuvre et le contexte de madou Kourouma. Entre vision et subversion, Paris, production dont elle est issue. Quelques dizaines de L’Harmattan, 2014 («Critiques littéraires»), pp. 236. pages plus loin on peut lire: «la présence de l’espèce animale dans l’œuvre de Kourouma est particulière- Les termes de «vision» et de «subversion» rappelés ment remarquable, et s’inscrit parfaitement dans la dans le sous-titre de cette étude sont déterminants pour conception du monde du peuple malinké» (p. 105),

sf177.indb 643 19/12/15 01.05 644 Rassegna bibliografica

ou encore: «L’œuvre romanesque de Kourouma fait l’a déjà remarqué, du cercle vicieux: le personnage ro- ressortir l’une des caractéristiques les plus saillantes manesque me permet d’approfondir ma connaissance de la culture mandenka» (p. 132). Une démarche qui de la réalité extralittéraire, qui est à son tour indispen- devient cercle vicieux dans un passage comme celui sable pour saisir pleinement le sens du texte (et donc que nous rapportons ci-dessous: «Se situant au cœur du personnage). du mode de pensée négro-africain, l’expression sym- Parfois Ouédraogo semble reconnaître que l’œuvre bolique se trouve être le parfait substrat de la vision du littéraire est une transfiguration de la réalité et du monde telle qu’elle se dégage de l’œuvre de Kourou- monde, mais c’est une idée dont il s’éloigne aussi rapi- ma. Au reste, le sens du symbole, tel que Kourouma dement que possible pour rétablir une vision du ro- nous donne de l’appréhender, vient confirmer la per- man comme voie d’accès privilégiée à des contenus ception que révèlent à souhait l’histoire des religions, ethnographiques et anthropologiques: «Il serait ma- l’anthropologie, et l’ethnologie» (p. 90). lencontreux de toujours prendre au pied de la lettre L’ouvrage de Ouédraogo se compose de quatre cha- les portraits que l’auteur dresse de ces figures […]. pitres. Le premier, «Le mythe et le sacré: essence et Cependant, le seul fait de ces portraits témoigne du présence» (pp. 29-88), commence par une définition vif intérêt que l’auteur porte aux valeurs culturelles du concept de mythe («l’irruption du sacré, du sur- qui sous-tendent ces figures. […] par-delà le degré naturel, ou encore de “l’au-delà” dans le monde sen- de circonspection qu’il convient d’observer quant à sible», p. 30). L’auteur fait ensuite une sorte de recen- l’examen des figures relevant des phénomènes méta- sement des manifestations du sacré et du numineux physiques ou surnaturels, l’opportunité et l’intérêt de dans l’œuvre de l’écrivain ivoirien. L’abondante pré- la réflexion en eux-mêmes demeurent entiers, tant il sence de sorciers, féticheurs, marabouts, devins, divini- est indéniable qu’ils nous instruisent sur un ensemble tés, génies, totems, prières, sortilèges, sacrifices propi- de valeurs culturelles et les visions qui les fondent» tiatoires, etc. dans l’œuvre de Kourouma s’inscrit dans (p. 120). Une fois de plus il apparaît clairement que le la conception du monde négro-africaine qui, étant fon- but de l’auteur n’est pas celui de discuter la valeur de damentalement unitaire, abolit la distance entre le vi- l’œuvre littéraire mais, par le biais de celle-ci, d’explo- sible et l’invisible, les humains et les morts, l’existence rer «un ensemble de valeurs qui méritent d’être explo- terrestre et l’au-delà. Pour Ouédraogo, dans l’œuvre rées au même titre que tout autre système de valeurs et de Kourouma le mythe aurait une nette prédominance de croyances» (p. 121). par rapport au récit romanesque, car «loin de remplir Le dernier chapitre, «Extinction et subversion des une fonction accessoire ou périphérique, [il] se trouve mythes» (p. 163-205) est probablement le plus intéres- être le pilier central autour duquel se construit la nar- sant du point de vue de l’analyse littéraire car l’auteur ration» (p. 44). se met davantage à l’écoute des contradictions qui ré- Le deuxième chapitre, «Aspects d’un symbolisme sonnent à l’intérieur de l’œuvre de Kourouma: les fi- cosmique» (p. 89-115), se propose d’examiner, dans gures mystiques dont Ouédraogo a longuement parlé l’œuvre de Kourouma, les contours de l’attitude de dans les trois chapitres précédents sont enfin montrées l’homme face au monde. L’aspiration à la symbiose dans leur ambiguïté, «les desseins subversifs de l’auteur avec l’invisible et la réalité transcendante, caractéris- vis-à-vis du mythe et des croyances traditionnelles» (p. tique de la pensée négro-africaine, «va plus loin pour 181) sont reconnus pour tels, tout en précisant que englober les forces cosmiques, l’environnement natu- «les réprobations de Kourouma portent moins sur les rel, le bestiaire, les conditions atmosphériques» (p. 90), traditions elles-mêmes que sur les agents chargés de c’est-à-dire autant de forces avec lesquelles l’homme leur mise en pratique» (p. 201). En général, l’œuvre entre en relation et qu’il exploite «pour percer certains de Kourouma est toujours soumise à une opération qui mystères qui l’entourent» (p. 102). Bien qu’il admette vise à la rendre autant que possible aseptique et impar- la nécessité de considérer avec circonspection le traite- tiale: «Au regard du traitement que Kourouma fait des ment du mythe chez Kourouma, on a néanmoins l’im- traditions africaines, il est loisible d’affirmer qu’il porte pression que Ouédraogo sous-estime le rôle de l’iro- sur celles-ci un regard jamais empreint de subjectivité nie dans le récit kouroumien, surtout quand elle vise ou de partialité» (p. 183). Comment concilier, alors, certaines croyances ancestrales et pratiques rituelles. Il l’ironie kouroumienne avec cette prétendue absence lui arrive par exemple d’écrire que Birahima et Yacou- de subjectivité? Peut-on être ironique sans exprimer ba, les deux personnages principaux d’Allah n’est pas un point de vue personnel? Peut-on être objectivement obligé, «doivent leur salut à l’interprétation que le féti- ironique? Peut-on être, tout simplement, un romancier cheur sait faire des nombreux messages émis par les dépourvu d’un regard personnel, partiel et subjectif? animaux qu’ils rencontrent sur leur chemin» (p. 103), En conclusion, on peut dire que probablement comme si Kourouma avait conçu ce personnage doué cette étude rencontrera plus facilement la faveur des de pouvoirs incantatoires, comme si son roman était lecteurs intéressés à approfondir le thème de la culture réellement le reflet passif d’une mentalité mythique. malinké que celle des lecteurs qui attendaient de ce Le troisième chapitre, «Esotérisme traditionnel et livre une nouvelle perspective critique sur l’œuvre ro- substrat mythique» (p. 117-161), se veut une analyse manesque de Kourouma. des différentes «figures occultes qui sont légion dans [alexandre calvanese] l’univers romanesque de Kourouma» (p. 119), telles que le chasseur, le forgeron, le devin et le féticheur, tous censés détenir des pouvoirs mystiques. «Appré- Jean-Christophe Delmeule, Les mots sans sé- hender ces figures, écrit Ouédraogo, c’est cerner bien pultures. L’écriture de Raharimanana, «Documents des aspects et contours de la pensée mythique dans pour l’Histoire des Francophonies/ Afriques», n. 29, le contexte culturel qui sous-tend l’œuvre de Kou- Bruxelles, Peter Lang, 2013, pp. 227. rouma» (p. 118). On voit assez bien que Ouédraogo traite souvent les personnages romanesques comme Les mots sans sépultures è anche il titolo scelto da des données anthropologiques qui permettraient de Delmeule per l’ultimo paragrafo della conclusione del saisir le substrat culturel qui fonde l’œuvre de Kou- suo saggio, in cui si spiega il senso di un’espressione rouma, selon un schéma qui est très proche, comme on che ben riassume la trama profonda di tutta l’ope-

sf177.indb 644 19/12/15 01.05 Letterature francofone extraeuropee 645

ra dello scrittore malgascio Jean-Luc Raharimanana, l’Occident et de la France”, lui écrirait plutôt une litté- un’opera che vede intrecciarsi, in maniera drammatica, rature de toutes les mauvaises consciences y compris et il vissuto personale e quello di un popolo: «Les mots en premier lieu la sienne, en particulier une littérature sont à l’image des corps errants, brisés, marqués par de l’héritage impossible quand celui-ci sature l’être des cette amnésie de la parole. […] Les mots eux-mêmes falsifications et des fabulations historiques» (p. 24). sont peut-être morts. Souvent, Jean-Luc Raharima- Il saggio di Jean-Christophe Delmeule è il primo nana le dit. Impuissants, détachés de toute racine, ils importante lavoro critico consacrato allo scrittore mal- planent et volent dans un brouillard sans début ni gascio, che ne analizza puntualmente l’intera opera. È fin […] ils réclament une sépulture qui ne leur sera diviso in quattro parti, a loro volta divise, in maniera jamais accordée, car il est de leur mission d’accom- molto libera, in capitoli (suddivisi in brevi paragrafi). pagner les fantômes à la recherche d’un tombeau» Una scelta dettata dalla volontà di modellare la struttu- (pp. 211-212). A Madagascar, non avere sepoltura, ra del saggio non su un’astratta armonia dell’insieme, come lo stesso Raharimanana precisa in un’intervista ma sulla materia trattata. Così, la prima parte intitola- concessa a Boniface Mongo Mboussa («Africultures», ta «La poétique de la blessure» è composta di un solo n. 43, dicembre 2001 http://www.africultures.com/ capitolo che porta lo stesso titolo, mentre la seconda, php/?nav=article&no=73#sthash.SnBOZ7ZB.dpuf), a «La trilogie des abîmes», è composta di tre capitoli, proposito del romanzo Nour 1947, che racconta la vita la terza, «L’engagement paradoxal», di sei e la quarta, di un discendente di schiavi, è la cosa più brutta che «Le partage des signes: écriture et photographie», di possa accadere, perché significa spezzare i ponti con la quattro. Le parti sono precedute da un’introduzione tradizione: «…on présentait l’esclave comme un mem- che presenta brevemente l’opera e lo scrittore, anche bre à part entière de la famille. Néanmoins, il n’a pas in rapporto ai probabili autori che hanno contribuito droit au tombeau alors que celui-ci joue un rôle haute- alla sua formazione. Vi troviamo un primo riferimento ment symbolique à Madagascar: quand on meurt, c’est allo stile di Raharimanana e alla sua quête della parola grâce aux funérailles qu’on devient un ancêtre, ancêtre per dire l’indicibile, e quindi l’aporia che consiste nel protecteur, ancêtre de référence à qui on destine un tentativo, irrealizzabile, di dire il silenzio. «Alors sans culte». Questa frattura con il passato, frutto certamen- doute ne reste-t-il qu’une forme de silence […]. Com- te della colonizzazione ma anche di amnesie e silenzi ment ne pas penser à Munch à cette panique devant colpevoli degli abitanti dell’isola, e la volontà, impo- l’insupportable?» (p. 22). La conclusione, divisa in tente, di riannodare a un presente vitale i brandelli di quattro paragrafi, tira le fila del discorso che precede e questo passato, troppo spesso costruito su miti e men- apre sull’immagine di un caos che la parola non riesce zogne, costituisce l’ossatura di tutta l’opera di Raha- a disciplinare e, dunque, su prospettive per certi ver- rimanana (romanzi, novelle, poesia, teatro, saggistica), si apocalittiche sul futuro di un’opera ancora in piena uno dei grandi scrittori malgasci dell’“ultima genera- ascesa. Chiude il volume, una bibliografia delle opere zione”, dopo Jean-Joseph Rabearivelo, Michèle Rako- dell’autore e della critica che lo concerne, a cui si ag- toson, Jacques Rabemanamjara… giungono lavori di critica generale e lavori specifici su L’anno simbolo di questa frattura, che si è ovvia- Madagascar. mente prodotta nel tempo, è il 1947. Si può anche fis- [carminella biondi] sare una data precisa, il 29 giugno, il giorno del grande massacro da parte dei Francesi (ma anche delle auto- rità locali) che non solo sedano la rivolta dei malgasci F. Bart Miller, Rethinking Négritude through Léon- nel sangue (nessuno riesce a stabilire il numero di mor- Gontran Damas, Amsterdam/New York, Rodopi, coll. ti), ma li brutalizzano in maniera totalmente disumana: «Francopolyphonies», 2013, pp. 316. vengono infatti imprigionati in vagoni, lasciati senza acqua e senza cibo sotto il sole cocente, con le carni Sulla Négritude si è già detto e scritto veramente che cadono a brandelli… Coloro che si sono salvati si molto. Eppure questo movimento continua ad affasci- sono sempre rifiutati di parlare di questo evento “indi- nare numerosi critici e il presente volume ne è un’ul- cibile”. I Francesi non amano ovviamente parlarne, i teriore dimostrazione. L’attenzione di Bart Miller si responsabili malgasci ancora meno… Non è pertanto focalizza su Léon-Gontran Damas, uno dei maggiori strano che Raharimanana, che nascerà solo venti anni teorici del movimento insieme a Aimé Césaire e Léo- più tardi, tenti di dar voce al silenzio che circonda que- pold Sédar Senghor. Il critico si propone di enucleare sto evento, un evento che lo condizionerà come uomo le specificità ideologiche e letterarie che lo scrittore e e come scrittore, perché è un po’ il simbolo della storia politico della Guyana ha portato al movimento della del Madagascar, con morti che non hanno ricevuto la Négritude, ma anche di indagare l’evoluzione del con- loro sepoltura, che non possono pertanto essere ante- cetto all’interno della sua opera letteraria. Il volume nati e dunque dar luogo a un’epopea in cui un popolo è suddiviso in cinque parti: si apre con una ricca in- possa riconoscersi. Una mancanza grave, spesso surro- troduzione che situa Damas in un quadro teorico ben gata da miti fasulli. L’autore ha dedicato all’evento tre preciso e dettagliato; seguono quattro capitoli, dedicati opere importanti: il romanzo Nour 1947 (2001) e due a altrettante opere dello scrittore, costruiti come saggi volumi corredati di fotografie Madagascar 1947 (2007) indipendenti (con introduzione, sviluppo e conclusio- e, con il fotografo Men Pierrot, Portraits d’insurgés. ne) pur inserendosi nella totalità del lavoro. Le quattro Madagascar 1947 (2011). A questi si può aggiungere un sezioni forniscono un’analisi delle singole opere man- editoriale del 2010, per la rivista «Interculturel» (Lec- tenendo uno sguardo attento sulle diverse modalità di ce), dal titolo: Madagascar 1947: censure d’État pour intendere la Négritude nel corso del tempo. une pièce de théâtre. Questo non significa che Rahari- L’introduzione ha lo scopo di situare la particolare manana sia uno scrittore nostalgico del passato, perché visione di Damas all’interno del quadro generale del quel passato spesso è da lui riletto, o ricostruito, alla movimento e di delucidare il punto di vista del teori- luce di un presente che ne fa esplodere le contraddizio- co che spesso viene relegata in posizione subordinata ni: «…contrairement à Ahmadou Kourouma qui […] rispetto a Senghor e Césaire. Pur offrendo un quadro déclare: “Nous écrivons une littérature d’une mauvaise completo (anche se non esaustivo) della relazione che conscience, la littérature de la mauvaise conscience de si intreccia tra gli approcci dei tre teorici, tale conte-

sf177.indb 645 19/12/15 01.05 646 Rassegna bibliografica

stualizzazione si presenta come un ottimo strumento di uno scrittore inserito nel contesto storico-ideologico per tutti i neofiti e per coloro che non possiedono vaste in cui ha operato. conoscenze sull’argomento e intendono approfondire [emanuela cacchioli] il movimento della Négritude. Bart Miller muove dagli studi critici già elaborati da altri teorici per caratteriz- zare poi la particolare visione di Damas e giungere infi- Chamoiseau: Nomadismes et intranquillité, «Pré- ne a considerazioni più generali: «Damasian Négritude sence Francophone», Revue internationale de langue is essential to the understanding of Négritude as an an- et de littérature, n. 81, 2014, pp. 181. ti-colonial ideology with the considerable ramifications for postcolonial thought» (p. 18). Il fatto che la nozio- Dans son numéro 81, la revue «Présence Franco- ne di Négritude in Damas sia instabile è un’esemplifi- phone» consacre son dossier à l’œuvre de Patrick Cha- cazione della sua continua ricerca e sperimentazione moiseau; Célestin Monga et Samia Kassab-Charfi en che si concretizza, sia a livello ideologico che letterario, signent la présentation. La professeure de l’université attraverso diverse forme di resistenza al colonialismo. de Tunis a précédemment publié en 2012 un texte inti- Nell’introduzione, Bart Miller offre una panoramica tulé Patrick Chamoiseau (Paris, Gallimard/Institut degli studi critici effettuati, soprattutto in ottica post- français), entièrement centré sur la production de coloniale, a partire dalla metafora del viaggio, intesa l’écrivain martiniquais. Ces travaux qui se suivent come circolazione di idee e luogo di incontro. L’errance montrent bien comment ce dernier constitue actuelle- di Damas si è manifestata, infatti, anche con una speri- ment le cœur des recherches de Kassab-Charfi. Le titre mentazione di generi letterari volta a individuare quel- du dossier explicite le fil conducteur qui relie les diffé- la che può divenire la forma migliore per contestare il rentes réflexions soumises au lecteur. Le Nomadisme razzismo coloniale e l’assimilazione. (soulignons le pluriel employé dans le titre) doit être Il primo capitolo del volume è dedicato a Pigments considéré à la fois comme la condition des habitants (1937): si tratta della prima opera importante di Da- des Caraïbes, toutes les Caraïbes, dans leur parcours mas e, soprattutto, della raccolta poetica che inaugura historique et dans leur présent contemporain, la condi- la Négritude. I componimenti che completano il volu- tion des grands personnages créés par l’auteur, la clef me manifestano l’anti-colonialismo nascente del poeta d’une esthétique et d’une poétique qui se veulent à la che si sviluppa durante il suo soggiorno a Parigi mentre fois reflet et interprétation, problématisation et ques- è a contatto con gli altri teorici del movimento, in parti- tionnement sur un monde, notre monde, devenu colare con Césaire. In Pigments, Damas utilizza la poe- fluide, mouvant, difficile à appréhender. Dans son in- sia come forma di resistenza ideologica al colonialismo tervention qui ouvre le recueil, Samia Kassab-Charfi e all’imperialismo. Nel secondo capitolo, Bart Miller si examine l’œuvre de Chamoiseau à travers le concept sofferma su Retour de Guyane (1938). Il genere testua- de «nomadisme circulaire» qui semble – c’est l’hypo- le adottato, questa volta, è il saggio, cui si aggiungono thèse qui est mise en place – agir comme un fil rouge, elementi di studi etnografici. Scritto di ritorno a Parigi, en particulier dans les derniers récits de l’écrivain Bi- dopo un periodo trascorso nel suo paese natale, Da- blique des derniers gestes (2002), Les neuf consciences mas si prefigge lo scopo di svegliare le coscienze dei du malfini (2009) et L’Empreinte à Crusoé (2012). Un suoi concittadini e di spingerli a una contestazione nei nomadisme circulaire, et c’est le point de départ du confronti della Francia al fine di riprendere il control- travail de réflexion, qui définit la géographie de la Ca- lo amministrativo e economico della propria terra. La raïbe, le rapport à l’espace éclaté, interrompu, haché terza sezione è dedicata a Veillées noires (1943), una au sein des îles antillaises, qui définit aussi le rapport à raccolta di novelle tradizionali. In questi testi, Damas l’Histoire et à la langue. Nous assistons à une mise en coniuga la memoria storica e personale e la sua crea- place à la fois d’un nomadisme circulaire vécu par les tività letteraria. Il teorico della Guyana intende infat- héros chamoisiens – en particulier Balthazar Bodule- ti portare avanti un processo di resistenza che passa Jules, protagoniste de Biblique des derniers gestes – mais attraverso il recupero della tradizione culturale e una aussi à un nomadisme circulaire de l’écriture roma- rappresentazione di valori che vengono offerti come nesque qui s’exprime par «les dyspnées du récit, de la alternativa al colonialismo francese moderno. Il poe- syntaxe et de ses rythmes, dyspnées et altérations qui ma Black-Label (1956) costituisce il filo conduttore del ne sont pas sans évoquer les ‘souffrances du jazz’» (p. quarto capitolo. Damas considera questo testo come la 11) Le lecteur avisé reconnaît bien sûr dans cette idée sua opera più riuscita. Si tratta di una lunga riflessione d’un déplacement qui ne se fait plus sur le mode de la del narratore che si muove lungo la Senna e assume conquête, selon le schéma européen qui fait suivre à un alcool per trovare la forza di ricordare le tappe dram- lieu de départ, un lieu d’arrivée à soumettre, les ana- matiche delle sua storia e di quella del suo popolo: lyses théoriques qu’Édouard Glissant a, entre autres, schiavitù, colonialismo e neocolonialismo. Lo stato di développées dans Poétique de la Relation (1990). Dans alterazione alcolica viene da un lato ricercato proprio cette analyse des déplacements et des départs, des re- per la facoltà di rendere sensibile e ricettiva l’immagi- tours en arrière et du sur-place que font les person- nazione. Tuttavia, l’alcool ricorda all’uomo anche il suo nages chamoisiens, l’étude de L’Empreinte à Crusoé stato miserevole e, non a caso, il narratore si suiciderà acquiert une importance fondamentale – les autres au- proprio nell’ultima parte del poema. Il suo gesto può teurs de ce recueil y reviennent souvent. L’île sur la- essere equiparato a una sfida nei confronti dei limiti quelle a échoué le Robinson de Chamoiseau est le lieu imposti dall’assimilazionismo. d’un nomadisme mental où se met en place l’intran- Il saggio di Bart Miller è uno strumento utile per quillité du personnage. Le concept de nomadisme est gli studiosi che intendono approfondire la personali- aussi appliqué à la lecture de l’ouvrage Écrire en pays tà umana e artistica di Léon-Gontran Damas, ma an- dominé (1997) où Chamoiseau livre les secrets de sa che per gli studenti che si avvicinano per la prima vol- «sentimenthèque», des lectures qui ont nourri son écri- ta all’autore e al movimento della Négritude. L’analisi ture et sa pensée: «S’affranchissant de la référence uni- condotta da Bart Miller segue, infatti, un percorso li- voque à un auteur unique, Chamoiseau ‘ameute’ le neare che si dipana tra considerazioni specifiche e ri- peuple diversel des écrivains, reconnaissant nommé- flessioni di carattere generale, per ricostruire il profilo ment sa dette intellectuelle à leur égard, savourant et

sf177.indb 646 19/12/15 01.05 Letterature francofone extraeuropee 647

célébrant leurs poétiques ou leurs combats» (p. 21). L’Empreinte à Crusoé, l’écrivain se heurte à l’obscur de Dans le deuxième article, Géotropisme de Chamoiseau, ce qui a été recouvert par une taie de silence, au cours nous plongeons avec Jean-Louis Cornille, dans le ré- des siècles; le défi est autre. Il s’agit de reprendre une cit Biblique des derniers gestes, dans sa matière narra- histoire, celle de Crusoé, pour laquelle tout semble tive qui, par son aspect foisonnant et emmêlé, rappelle avoir déjà été dit depuis Defoe jusqu’à Tournier. Le ré- la luxuriance de la végétation martiniquaise, en parti- cit de Chamoiseau s’insère dans les interstices laissés culier de la mangrove, mais surtout se révèle être tissé par les autres pères de Robinson. Cilas Kemedjo, dans d’une multitude de relations avec d’autres œuvres Généalogie de l’errance, revient sur les rapports, d’écrivains majeurs de la littérature mondiale comme maintes fois examinés, entre les signataires d’Éloge de Perse, García Márquez, Glissant, Césaire, etc… Au la créolité (Chamoiseau, Bernabé et Confiant) et les sein de cette richesse de références et de points de deux grands intellectuels martiniquais que sont Aimé contact, Cornille trouve la trace du personnage de l’es- Césaire et Édouard Glissant. L’enquête s’avère ici par- clave révolté Benito Cereno, mis en scène par Herman ticulièrement intéressante car elle est menée à travers Melville dans le récit homonyme. Les affinités et les l’analyse de la représentation urbaine dans l’œuvre de ressemblances qui sont soulignées sont effectivement Chamoiseau. Dans l’En-ville des romans Texaco et surprenantes et laissent entrevoir des réseaux intertex- Chronique des sept misères, l’écrivain martiniquais suit tuels qui sont le propre des grandes narrations. La troi- la trace indiquée par Édouard Glissant d’une saisie du sième contribution Archéologie du cachot de Lydie réel de la Martinique qui toutefois ne doit pas s’enfer- Moudileno s’attarde sur Un dimanche au cachot et ap- mer dans une vision limitée, excluant le monde alen- profondit les rapports entre écriture, prison et mé- tour. C’est en particulier la mise en scène de person- moire dans l’un des derniers romans de Chamoiseau. nages tels que les pacotilleuses qui assurent les Le lecteur pourrait être surpris par la présence d’une échanges du petit commerce des îles de la Caraïbe qui étude sur un lieu aussi circonscrit et aussi limité au sein contribuent à forger une vision archipélique. La der- d’un recueil qui s’interroge sur les nomadismes mais en nière contribution, La condition postmétisse de l’éco- réalité le cachot dont le narrateur devra tirer la jeune nomiste Célestin Monga sort des sentiers battus de la fille qui s’y est enfermée, en refusant tout contact avec littérature et ouvre sur des perspectives stimulantes. l’extérieur, est un vestige de l’époque esclavagiste, un Monga y analyse l’évolution de la pensée théorique de des lieux antillais que Chamoiseau veut sortir de l’ou- Chamoiseau qui s’est sensiblement modifiée au fil des bli en le superposant à tous les autres cachots de l’His- années. «Il a subrepticement faussé le pas à la créolité toire auxquels les esclaves ont été contraints. Éric Hop- métisse, militante et minimaliste de ses débuts (créolité penot, dans son article Le miel de l’alphabet. L’autobio- énoncée surtout par opposition à la négritude) pour graphie archipélique de Patrick Chamoiseau, renifleur embrasser une humanité bien plus large car infinie, d’existence s’intéresse en particulier au premier des postmétisse en quelque sorte» (p. 135). Cette condi- trois volets de l’autobiographie de l’écrivain, Chemin tion postmétisse, dont Monga trace les grands traits, a d’école (1994). Il s’agit pour Hoppenot de montrer définitivement dépassé les limites exiguës de la créoli- comment Chamoiseau opère une subversion de l’écri- té; elle ne s’affirme pas seulement comme une transfor- ture autobiographique qui ne se limite pas à mettre en mation des théories chamoisiennes mais peut se lire scène des souvenirs, à dire le passé, à fixer par l’écri- aussi dans une œuvre qui change, dans une écriture qui ture des événements qu’il faut sauver de l’oubli mais cherche de nouvelles issues. serait plutôt tournée vers l’avenir, un avenir où les an- La richesse de ce numéro de «Présence Franco- ciennes oppositions qui charpentaient la société colo- phone» réside bien dans la diversité des approches à niale sont définitivement déclarées obsolètes. Dans l’œuvre de Chamoiseau mais ces travaux ont aussi le Chemin d’école, Chamoiseau met en place une nouvelle mérite de montrer comment se pencher sur un grand chronologie, un nouveau temps, un nouveau rythme écrivain convoque nécessairement des problématiques qui diffère considérablement des rythmes imposés par qui concernent la littérature de façon générale. l’institution scolaire de la métropole et il offre au lec- teur la saveur d’une nouvelle langue. Guillaume Pu- [elena pessini] geard de Gubert travaille, lui aussi principalement sur deux œuvres qui sont maintes fois reprises et objet d’analyse dans ce recueil de travaux critiques. Dans La Dany Laferrière, L’Art presque perdu de ne rien parole et ses impossibles sont examinés Un dimanche au faire, Paris, Grasset, 2014, pp. 419. cachot et L’Empreinte à Crusoé même si les renvois à d’autres récits sont présents. Deux romans pour expri- Ce texte de Laferrière a vu le jour à Montréal en mer trois impossibles: l’impossible à décrire, l’impos- 2011 aux Éditions Boréal mais n’est arrivé en France sible à dire et l’impossible à exprimer qui constituent qu’en 2014, publié chez Grasset. Ce livre ne déçoit pas les titres des différents paragraphes de l’étude. Dans les lecteurs assidus de l’écrivain, ils y retrouvent la frag- Un dimanche au cachot, Chamoiseau explicite la diffi- mentation interne qui détermine l’écriture de l’auteur culté à décrire l’horreur de l’esclavage, symbolisé par (rappelons entre autres les textes comme L’Odeur du ce lieu, ce trou noir où étaient enfermés les rebelles, café (1991), Le Goût des jeunes filles (1992) ou encore ceux qui osaient s’enfuir. Il s’agit pour lui de trouver Pays sans chapeau (1996) et Le Charme des après-midi au-delà de cette obscurité totale, à partir de ce gouffre sans fin (1997); il les a, en effet, habitués à cette écri- insondable, des traces de lumières, des pistes de clarté ture rapide, faite d’instantanés. L’Art presque perdu de auxquelles l’écriture va donner forme et consistance. ne rien faire est composé de 23 sections dotées d’un «L’œuvre de Chamoiseau est une liane tendue au-des- titre, qui à leur tour, selon le sujet abordé, sont divisées sus d’un gouffre et d’un abîme: l’indescriptible obscu- en paragraphes dont la longueur varie et qui portent rité du déshumain et l’indicible opacité du vivant. Elle un sous-titre. Chaque section principale est intercalée repose sur ces deux impossibilités: nommer l’indes- par une composition en prose poétique (25 au total) criptible du déshumain vomi par la cale et réciter l’in- dont l’intitulé anaphorique scande le rythme de l’ou- dicible du vivant retrouvé. La parole se décline ainsi en vrage: L’art de manger une mangue, L’art d’aimer, L’art hoquets et en traces, en cris et en chants» (p. 87). Avec de voyager, etc… Une sorte d’art de vivre que le nar-

sf177.indb 647 19/12/15 01.05 648 Rassegna bibliografica

rateur se plaît à nous rappeler. Dany Laferrière nous l’enfance» (p. 23), «Mon enfance est faite de désirs entraîne dans un parcours qui, comme il nous le sug- inassouvis» (p. 39), «Quand j’étais petit» (p. 254), gère lui-même, est une «biographie de [ses] idées». De «Quand j’avais trois ans» (p. 263), «Quand j’étais nombreuses réflexions animent ces pages et les thèmes enfant et que j’avais toujours les fourmis dans les affrontés sont le reflet d’une vie, d’une carrière, d’inté- jambes» (p. 373). L’enfance devient un temps auquel rêts divers, de sensations que le narrateur dissèque. Les l’auteur ne peut renoncer, c’est le centre autour du- titres des sections ne laissent pas toujours accéder le quel gravite, s’articule et s’amorce le «je» qui raconte. lecteur instantanément à ce qui va lui être proposé, il Le narrateur dans la section intitulée Un lecteur dans devra suivre la pensée de celui qui écrit dans ses mul- sa baignoire dévoile sa sentimenthèque (terme que tiples variétés, dans ses contradictions, au sein d’une nous empruntons à Patrick Chamoiseau dans son es- logique qui lui est propre. sai Écrire en pays dominé) et se concentre sur les livres Avec la première section, le narrateur nous invite à ou les écrivains qui ont, d’une façon ou d’une autre, «savourer» un monde au ralenti où il énonce les plai- laissé une trace chez l’homme de lettres: des livres sirs de la sieste qu’il a appris à connaître et surtout à comme Pedro Páramon de Juan Rulfo, L’Attrape- pratiquer en arrivant au Canada: «La sieste est une cœurs de Salinger, Les Liaisons dangereuses, Le Maître courtoisie que nous faisons à notre corps exténué par et Marguerite de Boulgakov; mais aussi des écrivains le rythme brutal de la ville» (p. 20). Dans un monde en comme l’Haïtien Jacques Stephen Alexis, Basho, Ta- continuel mouvement, il s’applique à observer, à ap- nisaki, Mishima, Hemingway, et surtout Borges pour privoiser le temps, à appréhender l’existence différem- lequel Laferrière se demande comment il est «pos- ment, son «mot d’ordre: ralentir. Ce qui est merveil- sible de ne pas succomber au charme d’un pareil es- leux, c’est qu’en ralentissant on parvient enfin à mieux prit» (p. 367). D’autres n’apparaissent pas dans cette apprécier le paysage et à s’intéresser à autre chose qu’à section mais sont cités dans l’ouvrage, nous pensons à nous-mêmes» (p. 22). Réjean Ducharme ou encore à Nelligan. Dans L’Art presque perdu de ne rien faire, l’auteur La matière que brasse Laferrière est hétérogène, puise dans les thèmes qui n’ont cessé d’alimenter ses certains l’ont d’ailleurs accusé d’avoir repris dans ce romans depuis le premier titre Comment faire l’amour texte ses chroniques matinales de Radio-Canada dans avec un nègre sans se fatiguer: l’enfance, la société, la l’émission C’est bien meilleur le matin sans les avoir mémoire, la littérature, le temps, l’amour, l’amitié, le trop retouchées. Grief injuste et peu probable pour nomadisme, la sédentarité, la guerre, le voyage… L’im- les connaisseurs de son œuvre qui se sont depuis possibilité de rendre compte de toutes les réflexions que longtemps familiarisés avec ces déambulations men- l’écrivain couche sur papier implique de ne s’arrêter que tales où le promeneur n’a pas un parcours tracé, il sur quelques aspects qui reviennent comme un leitmotiv flâne dans ses pensées et les remet aux lecteurs dans dans l’ensemble de ses textes. un désordre qui n’est qu’apparent. En premier lieu, l’enfance auquel le narrateur Cet art de vivre et de penser est d’une certaine fa- ne consacre pas une section à proprement parler, il çon contagieux, on ne ressort pas indemne de cette lec- l’introduit souvent dans ses narrations; c’est une ré- ture, elle nous invite à tenter des réflexions et surtout férence dont il ne peut se passer. Non seulement la on prend son temps. La lenteur, conseillée par l’auteur, sienne mais aussi l’enfance comme saison de la vie qui est le meilleur moyen de profiter de la vie mais surtout nous interpelle tous: «Il reste cette scène qui traîne d’ «une montagne de choses minuscules» (p. 233). dans ma mémoire encore éblouie: celle d’une grand- mère et de son petit-fils figés dans l’éternel été de [alba pessini]

Opere generali e comparatistica a cura di Gabriella Bosco

Elisabeth Schulze-Busacker, Vittorio Fortunati vastes intérêts de notre ami pour la littérature française (dir.), Par les siècles et par les genres. Mélanges en l’hon- des derniers siècles». La curatela si muove agilmente neur de Giorgetto Giorgi, Paris, Classiques Garnier, lungo i due assi proposti nel titolo, quello cronologico 2014, pp. 830. e quello di genere: per orientarsi lungo i quarantotto contributi la divisione per secoli sembra essere la scelta Per la cura di Elisabeth Schulze-Busacker e di Vit- più interessante al fine di apprezzare la distribuzione, torio Fortunati, convergono in questo volume – nato l’eterogeneità e le inaspettate comunanze tematiche tra dal desiderio di colleghi e amici di una vita di tributare gli interventi. onore alla poliedrica attività di Giorgetto Giorgi – qua- L’unico contributo di orbita non-letteraria stricto rantotto interventi che si propongono di restituire le sensu è quello di Annalisa Baicchi (pp. 23-50), scrit- cadenze di una voce culturale ricca di autorità non solo to in inglese, che discute di modelli cognitivi e speech nella francesistica, disciplina nella quale Giorgi è stato acts. Il resto degli interventi si rivolge alla letteratura, fin da molto presto e continua ad essere centrale, ma oscillando tra close-reading e analisi socio-culturale, in della letteratura tout court. I curatori di questo settan- due casi senza vincoli temporali: Dario Gibelli (pp. tottesimo volume della collana Rencontres presentano 349-368) analizza la dissimulazione operata da testi il bouquet di articoli redatti da una serie di specialisti che mettono in crisi le massime conversazionali di Gri- (per la quasi totalità italiani e francesi) in ordine alfabe- ce; Jacqueline Risset (pp. 603-616) rintraccia il mito tico, optando per una brevissima presentazione in cui dell’Odissea in, tra gli altri, du Bellay, Ronsard, Mon- la diversità dei contributi viene intesa come «écho aux taigne, Fénelon, Marivaux e Blanchot.

sf177.indb 648 19/12/15 01.05 Opere generali e comparatistica 649

L’epoca più lontana analizzata è il primo Umanesi- mulâtre»; Michel Delon (pp. 259-272) tocca l’immagi- mo francese, grazie a Dario Cecchetti (pp. 165-188) nazione sotterranea tra geologia e letteratura, da Dide- che ci guida nella ricca poesia in latino di Jean Gerson, rot a Stendhal. Lo spazio utopico (soprattutto pastora- Nicolas de Clamanges e Laurent de Premierfait; subito le) nella prosa tra 1790 e 1810 è l’argomento scelto da successivo è il contributo di Anna Maria Finoli (pp. Jean-Marie Roulin (pp. 617-629) in quel clima che por- 301-314) che descrive il colto ambiente dei Borgogna tò Chateaubriand ad affermare: «Tandis que la tragédie attraverso due biographies chevaleresques della biblio- rougissait les rues, la bergerie florissait au théâtre». Il ri- teca di Filippo II. Il Cinquecento per Nerina Clerici tratto delle influenze su quest’ultimo centrale pensatore Balmas (pp. 189-193) è riscoperta delle parole enig- da parte delle Confessions di Rousseau è ciò che propo- matiche di Salomé in un mystère; Daniela Mauri (pp. ne Aurelio Principato (pp. 571-591), da un certo punto 435-455), invece, ne enfatizza l’eclettismo di taglio ri- di vista parallelamente al compianto Lionello Sozzi (pp. nascimentale restituendo il «carattere multiforme» del- 735-749), che qui affrontava il problema dell’identità la grotta nei romanzi di Béroalde de Verville. del poeta in autori italiani e francesi. Di Bien loin d’ici, Il fulcro cronologico del volume è, come detto, il sonetto unicum nelle Fleurs du mal, e di predecessori ed Seicento. Si discute molto dell’influenza greco-latina: epigoni, leggiamo in Valerio Magrelli (pp. 419-433). con Emmanuel Bury in relazione a Madeleine de Scu- Sugli stessi fiori si concentra Mario Richter (pp. 593- déry (pp. 103-115); con Francesco Fiorentino (pp. 602), sceverando, nel linguaggio del poeta, «l’allusion 315-322) e quel Cinna di Corneille uscito a ridosso di symbolique […] et l’ambiguïté (ou bisémie)». Sempre due congiure contro Richelieu (1641-42); con Marie- di poesia tratta il contributo di Alain Niderst (pp. 491- Gabrielle Lallemand (pp. 383-397), contributo inne- 494), dedicato a Fêtes galantes di Verlaine «à la fois stato sull’analisi di Giorgi circa l’influenza delle Éthio- baigné de nostalgie et destructeur de toute nostalgie». piques di Eliodoro sulle forme lunghe; con Benedetta La bibliofilia e i rapporti editoriali tra Jouaust e Uzan- Papasogli (pp. 525-536), che, scrivendo di Mnemosi- ne sono il soggetto di Maria Giulia Longhi (pp. 399- ne, scopre dei «restes de platonisme» in d’Urfé e de 417), mentre del piacere di lasciarsi catturare «dans les Sales; con Philippe Sellier (pp. 723-733) che legge Les méandres et les arabesques de La Canne de jaspe» di Aventures de Télémaque attraverso la «grille d’analyse» Henri de Régnier discute Liana Nissim (pp. 495-510); derivata da Boileau, Rapin, Le Bossu, Bernard Lamy. ancora, Giovanni Saverio Santangelo (pp. 663-704) Ma vi sono, inoltre, le rifrazioni epistolari tra «récit de ricostruisce l’influenza culturale di André Dacier sulla fiction» e «fiction du récit» dell’intervento di Magda cultura europea di inizio Ottocento. Campanini (pp. 117-133); il triangolo tra realtà, finzio- La sfera della contemporaneità è nutritamente rap- ne e rappresentazione tracciato da Alberto Castoldi presentata, tra contaminazioni e formazione cultu- (pp. 153-163) a partire dalla Carte de Tendre; le respon- rale di Antonio Machado in Francia – con Giovan- sabilità etiche (nella fattispecie di Fedra nell’Hypolite ni Caravaggi (pp. 135-152) –, dimensione gnomica di Gilbert) analizzate da Daniela Dalla Valle (pp. e ricezione in Raymond Radiguet – Stefano Genet- 233-244); la creazione romanzesca in Les États et Em- ti (pp. 333-347) –, utilizzo della storia e scenografie pires de la Lune et du Soleil con Patrick Dandrey (pp. milanesi in Giono – André-Alain Morello (pp. 457- 245-257); la relazione tra tradizioni culturali francese e 469), – e scrittura del sé in biografie di individui non italiana nell’Astrée con Delphine Denis (pp. 273-283); illustri – Gianfranco Rubino (pp. 631-645). Fede che i tre trattati sul roman del Du Plaisir del 1683 con Ca- «guastò il piacere dei sensi», bellezza che rese «imper- mille Esmein-Sarrazin (pp. 285-300). Nello scanda- fetta la vocazione religiosa»: ecco le due polarità di cui gliare questo secolo si esplorano anche l’innestarsi di Eleonora Sparvoli (pp. 751-769) si serve per parlare missive nel Roman comique di Scarron (Vittorio Fortu- del Léviathan di Julien Green. E, ancora, quel Parade nati, pp. 323-332), le dinamiche di ricezione e i lettori del 1917 di Picasso, Satie, e Cocteau, e il ricordo di ideali ai tempi di La Calprenède, Mme de Sévigné e Cocteau su Apollinaire scoperto da Sergio Zoppi (pp. Du Plaisir (Philippe Hourcade, pp. 369-381), le strate- 787-794) in un numero della rivista espressionista «Der gie di legittimazione letteraria per generi come il conte Querschnitt» del 1922. A due scrittori tutt’ora in vita si de fées (Jole Morgante, pp. 471-490), le componen- dedicano, infine, FabioS cotto (pp. 705-721) – che ci ti antropologiche che Paul Pelckmans individua in La parla dell’influenza della traduzione (Shakespeare, Pe- Duchesse d’Estramène (pp. 537-551), le commistioni di trarca) sui sonetti di Yves Bonnefoy – e Laura Brigno- «littérature légère et élégante» e «prose et […] vers» li (pp. 89-102) che indaga sul rapporto tra scrittura in Le commerce galant tracciate da Franco Piva (pp. del sé e autobiografia nel prismatico narratore diÉcrire 553-570); il rapporto tra fonti storiografiche e inventio sur Tamara di Bénabou. autoriale e il confronto con il realismo stendhaliano in- [alessio mattana] tavolato da Giorgio Sale nel Dom Carlos di Saint-Réal (pp. 647-662). Al criticamente trascurato genere degli ana, infine, si dedica FrancineW ild (pp. 771-785). Aa. Vv., Les Héritages littéraires dans la littérature e e Il Settecento è rappresentato in maniera più snella. française (xvi -xx siècle), sous la direction de Franzis- François-Xavier Cuche ci parla de Les Trois Cousines ka Meier, Brigitte Diaz et Francine Wild, Paris, Clas- di Dancourt (pp. 213-232), mentre Elisa Biancardi siques Garnier, 2014, série «Civilisation médiévale», (pp. 51-72) confronta due trasposizioni italiane del pp. 318. Magasin des enfants di Madame Leprince de Beau- mont. Benedetta Craveri (pp. 195-212), ritrae Louise- Dans son Avant-propos (pp. 7-16), Franziska Meier Honorine Crozat du Châtel tramite le sue splendide invite le lecteur à la réflexion sur l’héritage, phéno- epistole e Letizia Norci Cagiano (pp. 511-524) situa mène littéraire qui sera abordé du point de vue du il suo contributo tra i Guaranì, a partire dal celebre destinataire de la transmission. Le corpus analysé se apologo di Montesquieu, abbracciando e l’utopia e la compose de textes choisis pour leur significativité dans e ricerca di modelli concreti. l’analyse des différentes attitudes des héritiers du xvi e Un trittico di articoli guida la transizione verso il di- au xx siècle. Il s’agirait donc de proposer des outils ciannovesimo secolo: Carminella Biondi (pp. 73-88) aptes à réorienter le regard vers le passé pour mieux se affronta le ragioni storico-culturali della «figure du situer dans la crise actuelle. Le volume est organisé en

sf177.indb 649 19/12/15 01.05 650 Rassegna bibliografica

cinq parties: «Sous l’Ancien Régime: l’héritage comme priation et l’évaluation successive des thèses du monar- réception»; «Après la Révolution: la contre-révolution chiste Bonald. en héritage»; «Après la Révolution: construire une tra- Julie Anselmi offre un aperçu sur le travail de Si- e dition»; «Au xx siècle: construire ses racines» et «Au syphe entrepris par Barbey d’Aurevilly dans L’impos- e xx siècle: le poids de l’histoire», auxquelles s’ajoutent sible héritage de Jules Barbey d’Aurevilly (pp. 133-148). une bibliographie (pp. 283-298), un index des noms L’auteur, converti aux idées anti-révolutionnaires au de personnes (pp. 299-307), des résumés des articles mépris de la société à lui contemporaine, confie son hé- (pp. 309-314) et une table des matières (pp. 315-317). ritage à l’imagination et à l’écriture littéraire. Son style Enrica Zanin, dans La “Poétique” d’Aristote: un hé- littéraire et la façon de se représenter marquent bien la ritage contesté (pp. 19-36), prend en considération la volonté, chez Barbey, de cristalliser un idéal esthétique réception de la Poétique d’Aristote en Italie, Espagne appartenant à des temps révolus. e e et France aux xvi et xvii siècles. D’après l’auteur, Brigitte Diaz entame la troisième partie du volume l’auctoritas de cette œuvre ayant lourdement influencé avec sa contribution, Héritages épistolaires: la lettre au la production des nations prises en examen, elle a pu grand écrivain (pp. 151-165). L’article suggère une lec- e être surmonté seulement pendant le xvii siècle. À cette ture critique des lettres adressées aux grands écrivains époque, la Poétique a effectivement commencé à être par les jeunes auteurs affiliés au Romantisme. La cas- considérée un héritage littéraire et les modernes ont pu sure avec le passé souhaitée et revendiquée par les ré- revendiquer l’autonomie de leur propre poétique. volutionnaires n’aurait pas eu lieu car la référence aux pères fondait encore toute légitimation artistique. Corneille, Rotrou et l’héritage des modèles espagnols, e à propos de quelques personnages de fils rebelles (pp. Dans Le grotesque: un héritage difficile à la fin duxix 37-51), par Francine Wild, analyse quelques pièces siècle (pp. 167-180), Virginie Leclerc analyse la récep- françaises inspirées par la production dramatique es- tion dynamique du grotesque entre la Renaissance et e pagnole pendant la première moitié du xvii siècle. La le Romantisme. Selon l’auteur, la volonté de réappro- question de l’héritage y est représentée en tant que priation du legs passerait initialement à travers le refus d’un modèle, de ce fait poussant certains auteurs du nœud moral de la succession familiale: le refus de l’hé- e ritier lui permettra de renouveler la dynastie sans per- xix siècle dont notamment Victor Hugo à créer par la pétrer les fautes des pères. suite une propre filiation et donc un propre héritage littéraire. Marie-Gabrielle Lallemand propose une étude in- téressante sur la Princesse de Clèves, roman qui entame Richard Trachsler remet en question le lieu com- symboliquement la période des histoires courtes à la mun de la critique qui a indiqué dans Chrétien de e Troyes le fondateur absolu d’un genre, de ce fait rédui- fin duxvii siècle. Refuser l’héritage du long roman. Les histoires insérées dans “La princesse de Clèves” de Ma- sant tous les auteurs arthuriens à de pures épigones. dame de Lafayette (pp. 53-67) a donc l’objectif de mon- Héritiers et épigones. Les auteurs des romans arthuriens en vers après Chrétien de Troyes (pp. 181-196) retrace trer que, même si l’enchâssement des histoires courtes les études de médiévistes qui portent sur les spécula- rappelle la structure des longs romans, la fonction des tions nées autour de la naissance du roman. histoires est ici indice d’un changement radical qui re- La quatrième partie prend en examen les rapports fuse la filiation propre à l’épopée. e des écrivains du xx siècle à la tradition. Dans Les fran- Fanny Maillet fournit une analyse intéressante des cités anglo-saxonnes d’Alain-Fournier (pp. 199-214), enjeux implicites dans le travail de restauration des fa- à partir de l’analyse du Grand Meaulnes, inspiré aux bliaux mené par la Bibliothèque universelle des romans. modèles d’outre-canal, Jean-Paul Rogues montre com- Les fabliaux dans la “Bibliothèque universelle des ro- ment l’homme et l’œuvre deviennent moyens pour mans”, ou comment s’accommoder d’un lourd héritage consolider un héritage de valeurs à caractère nationa- (pp. 69-88), consacré à une particularité de la produc- e liste. tion médiévale du xviii siècle, révèle ainsi comment la Le rapport ambivalent des avant-gardes à la tra- transmission d’un héritage soit partie fondante dans la dition est le sujet de Entre tradition et anti-tradition construction d’un genre. futuriste: l’héritage façon Cendrars (pp. 215-235), par La Révolution française est souvent considérée Marie-Paule Berranger. L’auteur confronte le rejet de comme un moment de rupture décisif dans l’histoire tout héritage d’Apollinaire, promoteur d’une poétique de l’homme occidental. Dans La révolution française profondément innovatrice, à la production de Cen- et ses héritages (pp. 89-103), Claire Gaspard s’inter- drars, dont le nom suggère déjà la velléité pour résur- roge sur l’évolution du concept de patrimoine cultu- e rection des cendres du passé pour fonder une nouvelle rel, voire sur l’héritage esthétique entre le xviii et le e lignée. xix siècle. Situé entre la Suisse romande, pays de campagnes, Une nouvelle conscience de la mort et un regard et la France, berceau culturel auquel il se rapporte plus sélectif vers le passé marquent donc le passage à la en faisant une référence constante aux classiques de deuxième partie de ce volume, qui s’ouvre avec «L’es- l’Antiquité, Ramuz construit son œuvre dans l’effort prit des anciennes races». La notion d’héritage chez Cha- de déclencher une tradition à partir de sa propre pro- teaubriand et Tocqueville (pp. 107-121), par Franziska duction littéraire. Charles-Ferdinand Ramuz face à deux Meier. L’auteur analyse la façon dont Chateaubriand héritages. Des histories locales, des pans de la littérature et Tocqueville se rapportent à l’hérédité de leur propre française (pp. 237-248) de Gérard Pouloin montre noblesse. Les deux étant issus de familles aristocrates, comment la tentative de l’auteur ne parvient pas, fina- leur situation sociale les place hors-la-loi après les faits lement, à concilier définitivement les deux héritages. de la Révolution. Le passé, tel qu’il est vécu par les auteurs appar- e D’un autre côté, l’héritage contre-révolutionnaire tenant au xx siècle, est le thème abordé dans la cin- est mis en évidence par Gérard Gengembre dans Pré- quième et dernière partie du volume. Marie Hartmann sence fictionnelle d’un héritage contre-révolutionnaire. esquisse les enjeux de la ré-élaboration d’un passé L’exemple du “Médecin de campagne” de Balzac (pp. traumatique tel que celui de la seconde guerre mon- 123-131). Le roman de Balzac représenterait une vi- diale dans Éclats du passé. Claude Simon, “Le Jardin sion modernisé de l’héritage, acquise à travers l’appro- des Plantes” (pp. 251-265). La volonté de transmettre

sf177.indb 650 19/12/15 01.05 Opere generali e comparatistica 651

un héritage intacte dans toute sa portée de douleur et comune fiducia nella poesia come strumento per de- d’indicible, mène Simon à expérimenter des formes criptare il reale, eredità del romanticismo tedesco; un nouvelles. confronto tra Vers dorés e Correspondances le permette L’article de Dominique Diard, Quatre continents poi di avvicinare la poetica dei due autori rispettiva- pour créer une «désidérade». Blessures d’histoire en hé- mente al fiore blu oggetto della quête di Heinrich von ritage et poétique d’archipel au-delà de l’héritage (pp. Ofterdingen e al garofano scarlatto della Kreisleriana 267-282), clôture le volume en proposant une réflexion di Hoffmann, mentre l’analisi di Un voyage à Cythère sur la dérive déterministe qui semble s’imposer déjà e di Le Port introducono la riflessione conclusiva in cui aux populations colonisées mais qui s’applique bien à la poesia è vista attraverso un gioco di specchi con la toutes sociétés. Héritage des principes libertaires de la pittura e con la prosa. Révolution, la figure de l’homo hereditans semblerait Pierre Reverdy. Dans la mouvance du cubisme (pp. condamnée à se reproduire dans un cercle éternel et 172-208) pone la scrittura del fondatore di Nord-Sud génétiquement prédisposé. a confronto con quella di Apollinaire, con lo scopo di [marta baravalle] meglio comprendere la sua postura rispetto alla pittura cubista e di addentrarsi poi nella sua riflessione sull’ar- te, definita «une rêverie critique» o, quando rapportata Corinne Bayle, La Poésie hors du cadre. Nerval, a Matisse, una «critique synthétique», sviluppando un Baudelaire, Reverdy, Char. Poésie, prose et peinture, Pa- discorso articolato che comprende anche Juan Gris e ris, Hermann, 2014, pp. 362. Picasso e che si conclude con una lettura di Le Hachi- schin in cui la presenza della figura di Modigliani riaf- Che cosa cerca la poesia quando sceglie di guardare fiora con forza. al regno vicino ed estraneo della pittura? Il quinto capitolo (René Char. La «conversation sou- Questa è la domanda alla base della monografia di veraine» du poète et des peintres, pp. 209-245) si ad- Corinne Bayle, che si addentra nell’opera di Nerval, dentra nei paesaggi natali di Char, elevati a mito dallo Baudelaire, Reverdy e Char alla luce di un’ipotesi: la sguardo del poeta, si sofferma sulla figura di Orione in meditazione del poeta riguardo alla pittura e la scrit- Aromates chasseurs, autorappresentazione dell’autore tura poetica del dipinto costituiscono il teatro per un come personaggio mitologico e pittore del cosmo, fa altro tipo di riflessione, quella della poesia su se stessa e riferimento all’opera di Nicolas de Staël, osserva come sulla necessaria ridiscussione dei propri confini a fron- la «double filiation» di Char con il paesaggio proven- te dell’ingerenza della prosa. Nella densa introduzione zale e con la pittura esprima e nutra il gusto del poeta (pp. 13-35) suddivisa in quattro parti, Corinne Bayle per i colori e, dopo essersi soffermato su La nuit tali- chiarisce il contesto storico e culturale illustrando le smanique, si chiude sulla figura di Van Gogh vista co- diverse forme di convergenza tra letteratura e arti gra- me «ultime miroir» del poeta. fiche nel diciannovesimo e ventesimo secolo e indivi- Intitolato Miroitements. D’un siècle à l’autre, d’un duando nel dialogo tra le due arti una delle cifre fon- art, l’autre, l’ultimo capitolo (pp. 247-296) fa dialogare damentali della modernità (Littérature et peinture), per autori fino a qui considerati separatamente. Reverdy poi porre le basi teoriche della discussione (Deux mo- e Char, definiti «poètes de la lucidité», si incontrano des d’expression spécifiques; Les «Deux Soeurs»: poésie sulla comune ammirazione per Baudelaire e sul pun- et peinture) e infine affrontare La question de l’image et to estetico essenziale della verità dell’opera, differen- de l’imaginaire osservando come il discorso della supe- te dal realismo e dalla verosimiglianza; entrambi sono riorità creatrice dell’imago sulla pictura implichi una ri- poi considerati nei rispettivi rapporti con la pittura di flessione più ampia riguardo al rapporto tra l’immagi- Braque e di Picasso e nella rilettura poetica di Baude- ne – testimonianza presente di un’assenza – e la morte, laire. La reinterpretazione di Char del romanticismo il tempo, la verità. tedesco, mediato dalla lettura di Baudelaire e Nerval, Per condurre la sua analisi l’A. sceglie il principio termina la sezione. del confronto con il diverso, osservando i testi selezio- Nelle conclusioni (Conclusions. La poésie et son ‘au- nati nei loro rapporti reciproci e nelle relazioni che in- tre’, pp. 297-307) Corinne Bayle osserva come la que- staurano con altri generi, altre forme espressive, altri stione della poesia, in un contesto che le nega una po- artisti (poeti e pittori, francesi e stranieri): il risultato sizione di rilievo, si avvicini alla situazione della pittura è, osserva Jean Roudaut nella Préface (pp. 7-12), uno in un momento in cui la riproduzione meccanica rimet- studio che nel suo non volersi esaustivo ha il merito di te in causa l’immagine artistica. Alla minaccia di spa- elevarsi a modello strutturale e teorico per letture che rizione la poesia reagisce cercando un’altra via in cui esulano dal corpus proposto. trovare forza espressiva: l’arte visiva costituisce allora Osservando che Nerval fu assai più curioso in fatto un’alterità alla quale rapportarsi per un rinnovamento d’arte di quanto gli scarsi riferimenti contenuti nella del linguaggio poetico che porta in sé la ridiscussione sua opera lascino pensare, il primo capitolo (Gérard de della nozione di frontiera del genere espressivo. Nerval. La peinture rêvée, pp. 37-87) convoca la pit- Chiudono il volume una raccolta di alcune tra le im- tura italiana ma anche Théophile Gautier e Prosper magini evocate, un’estesa bibliografia (pp. 307-349) e Marilhat, il cui contrappunto aiuta a chiarire il rappor- un indice dei nomi citati (pp. 351-359). to del poeta con l’Oriente, e poi Watteau, riferimento importante per le immagini della Cythère nervaliana. [roberta sapino] Nel secondo capitolo (Charles Baudelaire. La passion des images, pp. 89-131) un’attenta lettura di Les phares mostra come per Baudelaire il rapporto con l’arte sia in- Jean-François Plamondon (dir.), Émoi, émoi, émoi. scindibile dalla riflessione sulla scrittura, riflessione che Le discours autobiographique francophone comme espa- è poi analizzata tramite puntuali riferimenti all’opera di ce conflictuel, Olschki Editore, Primavera 2014, «Fran- Stendhal e Gautier, nonché di Delacroix, modello per la cofonia», n. 66, pp. 252. ricerca di una «poésie picturale idéale». In Nerval et Baudelaire. Un dialogue secret (pp. Come in un rapporto amoroso, anche nella scrittura 133-169) Corinne Bayle individua nei due poeti una “l’altro è necessario”, ci dice Adriana Cavarero in un

sf177.indb 651 19/12/15 01.05 652 Rassegna bibliografica

suo bellissimo saggio degli anni Novanta. Il soggetto Tenant, La guerre d’Algérie: les voix camusiennes d’un interagisce con l’altro, si rivolge continuamente a esso déchirement intime, pp. 147-162: la guerra d’Algeria in un rapporto che gli permette di affermarsi. Come si crea in Camus una tensione intima espressa soprattutto potrebbe, d’altronde, immaginare la presenza del sog- nei Carnets e in Le Premier Homme. Seguono un’ana- getto senza lo sguardo dell’altro? Cosa sarebbe il moi lisi del conflitto interiore espresso attraverso il lirismo senza l’autre? – «personne», risponde Jean-François tipico delle opere di Bauchau (Régis Lefort, De l’inti- Plamondon riprendendo il pensiero di Kaufmann nel me dans le poème d’Henry Bauchau, pp. 163-176), e lo primo contributo che funge da introduzione al volu- studio della religiosa quebecchiana Marie de l’Incarna- me collettivo (Émoi, émoi, émoi. Le conflit comme pro- tion in Les récits personnels de Marie de l’Incarnation ducteur du moi, pp. 3-20). Nella nostra epoca il sogget- ou de l’écriture autobiographique détournée di Alessan- to è proiettato verso l’esterno, si apre ai ritmi della col- dra Ferraro (pp. 177-192). Chiude il volume la lettura lettività abbracciando una serie di valori e di proble- dei Mémoires di Madame Roland, opera che coniuga matiche sociali. La presenza dell’altro è necessaria; non autobiografia e politica: La guerre des Mémoires. Con- siamo mai soli, nemmeno quando creiamo uno spazio flit et apologie de soi dans les “Mémoires” de Madame intimo e privato come potrebbe essere considerato il Roland di Luba Markovskaia (pp. 193-207). diario, dove il soggetto si lascia andare, senza freni ini- La seconda sezione di questo numero di «Francofo- bitori, ai movimenti della propria anima. Attraverso il nia» è dedicata ai comptes rendus e alle notes de lecture diario il soggetto si esprime, si afferma; il diario divie- di alcuni studi contemporanei (pp. 209-252). ne l’interlocutore ideale che permette di creare quello spazio «conflittuale» – di cui ci parla Plamondon – at- [francesca forcolin] traverso il quale l’io esiste. Conflittuale, perché l’inte- razione con l’altro non è mai semplice: è una relazione complessa ma funzionale alla costruzione e alla libera- Michel Collot, Pour une géographie littéraire, Cor- zione del moi. Conflittuale, perché l’autore si scontra ti, Paris, 2014, pp. 280. con la società, con le usanze, con gli eventi politici, ma anche con se stesso attraverso tensioni continue e moti Depuis 1990, les travaux portant sur le rôle de l’es- di ribellione. Conflittuale, perché nello spazio del testo pace en littérature se multiplient, mais c’est à partir e lo scrittore esprime la propria verità. du début du xx siècle que la géographie littéraire s’est La conflittualità è particolarmente evidente nel pat- constituée en discipline universitaire. Le propos de Mi- to di lettura che si instaura nell’autofiction, di cui si fa chel Collot est de parcourir les différentes approches portavoce, secondo Yves Baudelle, la scrittura di Ca- abordées jusqu’à présent et de les mettre en œuvre dans mille Laurens, come ci viene spiegato nel contributo les études monographiques qui clôturent son étude. “Romance Nerveuse” de Camille Laurens: une satire cli- Concernant la structure du volume, après une intro- nique de «l’exubérance irrationnelle» (pp. 21-38). Pro- duction de l’auteur (pp. 7-11), on retrouve deux macro- segue con il genere autofictif, ma inserendo note di gen- répartitions, intitulées respectivement «Orientations» der studies, Valeria Sperti con l’analisi della scrittura (pp. 13-129) et «Explorations» (pp. 131-270), suivies della quebecchese Nelly Arcan, in L’émoi douloureux d’une note bibliographique (p. 271) et d’un index. du regard divergeant chez Nelly Arcan, de “Putain” à La première partie présente les approches géogra- “Burqa de chair” (pp. 39-54). La conflittualità nel con- phique, géocritique et géopoétique dans leur complé- tributo di Enrico Guerini («Il faut que le public sache». mentarité. En guise d’introduction, Le tournant spatial L’aveu (homo)sexuel dans l’autobiographie de Julien (pp. 15-37) ouvre ainsi sur la mutation épistémologique Green, pp. 55-74) si esprime nella lotta interna tra l’a- qui affecte les sciences humaines depuis au moins un nima e la carne, nella difficoltà cioè, da parte di Julien demi-siècle. En analysant les domaines de l’histoire, de Green, a coniugare le proprie pulsioni sessuali con la la philosophie, de la géographie, de la critique et des morale cristiana. La passione emerge in maniera diffe- créations littéraires et des arts, l’A. veut ainsi offrir un rente ma altrettanto forte nel diario di Marie Bashkirt- compte rendu du déclin d’un modèle historique fondé seff morta di tisi all’età di 24 anni (Brigitte Diaz, Le sur l’idée d’un progrès linéaire et continu. “Journal” de Marie Bashkirtseff ou les mémoires d’u- Quelques précurseurs (pp. 39-57) nous propose un ne jeune fille enragée, pp. 75-92). Troviamo invece il portrait des auteurs qui ont contribué à développer conflitto, ma inteso in termini politici, nelle opere di cette discipline. À partir du déterminisme géogra- Stendhal, come ricorda Cécile Meynard in Le ‘moi’ phique de Taine, cette étude nous mène à explorer en émoi. Le rôle des conflits dans la construction iden- les frontières du régionalisme littéraire aussi. Ce n’est titaire de Stendhal, pp. 93-110. Sulla stessa scia si può qu’avec Thibaudet que le paysage s’inscrit dans un es- considerare l’articolo successivo (Louis-Serge Gill, pace essentiellement littéraire, mais, d’après Collot, cet De l’unité à la fragmentation: la pratique diaristique auteur ne parvient pas à lui donner un contenu théo- dans le “Journal, 1948-1971” d’Hubert Aquin, pp. 111- rique précis. L’apport du contexte culturel, social et 128), poiché l’autore studiato, Aquin, intreccia la pri- économique à la création littéraire est pris en compte ma persona narrativa con i conflitti internazionali degli seulement à partir des études de Ferré, qui s’adonne à anni ’60 del secolo scorso. Segue uno dei contributi la création de «cartes biographiques». Tout en ayant più interessanti e completi del volume: lo firma Véro- l’intérêt de mettre en relief le rapport entre les lieux nique Montémont (Visages du conflit dans le journal et la vie des écrivains, cependant elles reposent encore personnel: journaux de jeunes filles sous l’Occupation, sur la nécessité de références géographiques précises, pp. 129-146). Qui vengono studiati alcuni diari tenu- ce qui souvent est un obstacle insurmontable. ti da giovani donne – future scrittrici o donne ordina- À partir des années 1980, les méthodes et les instru- rie – durante l’Occupazione, diari che diventano una ments de la géographie ont été adoptés par la critique vera e propria testimonianza delle tensioni interiori littéraire dans l’analyse de l’inscription de la littérature nate dal rapporto instaurato con il nemico e tenute dans l’espace et des représentations de l’espace dans spesso segrete, rivelatrici della difficoltà ad accordare les textes. Approches géographiques (pp. 59-85) aborde principi ed azioni, di cui la carta si fa depositaria. Da ces tentatives de cartographier la littérature pour en sottolineare anche il contributo di Françoise Simonet- développer une réflexion ponctuelle sur l’apport de

sf177.indb 652 19/12/15 01.05 Opere generali e comparatistica 653

différents cadres de production et de réception de la rique, les milieux culturels s’inspirent réciproquement littérature. En passant à travers la poésie grecque an- et Supervielle en retiendrait l’étrangeté foncièrement tique et la production littéraire des anciennes colo- existentielle de l’être humain. nies, Michel Collot propose une analyse des effets de Y a-t-il un paysage africain? (pp. 173-189) est une in- la mondialisation sur la diversité culturelle. L’œuvre terrogation qui repose sur l’étude du rapport à l’espace exemplaire de Moretti, qui se focalise sur les apports dans les littératures africaines. La notion du paysage sociologiques dans l’analyse de l’espace urbain, per- comme «image du pays» étant issue d’une vision an- mettrait notamment de visualiser l’aller-retour entre la thropocentrée du monde, elle reflet un point de vue qui carte et le texte sans toutefois proposer une solution place l’homme en position de supériorité sur la nature. satisfaisante au risque d’abstraction auquel les pay- À la soumission culturelle et technologique des pays sages imaginés par les auteurs sont soumis. colonisés, Collot oppose l’existence d’une influence de D’après l’A., la géo-critique met en crise la vision matrice africaine et notamment post-coloniale sur la mo- du monde et les instruments de la géographie savante dernité occidentale, qui revendique le paysage comme en appelant un acte critique. L’espace étant conçu lieu d’exercice d’une pensée dans l’espace. toujours et déjà à travers un filtre culturel, elle vise à La géographie littéraire de Michel Butor est le sujet mettre en évidence l’interaction entre le réel et sa re- de Le Génie des lieux (pp. 191-213). Non seulement présentation littéraire. Selon Westphal, cette approche toute l’œuvre de Butor est parsemée de références aux ne rendrait pas justice aux espaces imaginaires qui font lieux réels et imaginaires, mais son exploration se ré- d’ailleurs l’objet des études de Jourde. Selon ce der- pand à l’espace de la page et du livre aussi. Véritable nier, la subjectivité serait au centre de toute concep- théoricien de la discipline, sa production prend diffé- tion de l’espace et engendrerait une création de la rentes formes, dont le trait unitaire serait paradoxale- part du lecteur aussi. En s’opposant à une exactitude ment donné par son caractère itinérant et fouineur. La strictement référentielle de la vérité littéraire, définition du Génie des lieux reposant sur les éléments et Richard, de leur côté, théorisent l’existence d’une qui ont une emprise particulière sur chaque individu, relation indissociable entre l’individu et le monde. Ap- le monde extérieur n’est donc aucunement séparé de proches géocritiques (pp. 87-104) introduit donc une l’homme, mais il contribue à en dévoiler le monde inté- lecture psychanalytique qui mène à considérer la co- rieur. construction de la part de l’auteur et du lecteur d’un L’intérêt de Simon pour les lieux est occasion, dans espace littéraire changeant. Approches géopoétiques Géo-graphie du Grand Nord (Claude Simon) (pp. 215- (pp. 105-129) ouvre sur la définition de géopoétique, 235), pour analyser le caractère des descriptions pour qui met l’accent sur le lien entre le rapport au monde et lesquelles son œuvre est souvent rappelée, notamment la création poétique. Revendiqué par Deguy et White, dans le cadre de Archipel et Nord. Dans un jeu d’illu- ce terme offre l’occasion à Michel Collot de revenir sur sions d’optique et d’équivoques sémantiques et symbo- l’étude de l’espace et les formes et genres littéraires. Au listes à saveur phénoménologique, la littérature de Si- lieu de chercher des repères géographiques, l’A. situe mon réfléchirait en effet une réalité poussant le lecteur sa démarche dans la quête de structures spatiales (une à interroger ses habitudes à travers une mise en page topologie s’oppose à une topographie). En empruntant fragmentée et spatialisée. la notion de chronotope à Bakhtine, la structure narra- Silvia Baron Supervielle entre deux rives (pp. 237-248) tive est de ce fait corrélée à l’organisation spatiale. Le nous invite à interpréter l’exil volontaire de l’auteure progrès de la focalisation interne et de la nouvelle au comme l’expérience de l’écriture, véritable pont entre sein de l’histoire littéraire serait donc directement lié l’Argentine, sa terre natale, et la France. L’horizon, le à une évolution de la conception de la relation entre paysage et la vision sont des images recourantes dans sa espace littéraire, référent, image et sens, ce dernier production poétique pour laquelle le mouvement se fait convoyé par la sus-dite relation. d’abord sur la page. La ré-écriture de son passé permet- En introduisant la deuxième partie de l’étude de trait de revivre plus intensément les événements, désor- Collot, Explorations se compose d’une analyse de mais situés à une distance qui donne lieu à leur évoca- quelques œuvres pour lesquelles serait envisageable tion et à leur signification. de prendre en compte la complémentarité des orienta- Le paysagisme abstrait de Pierre-Yves Soucy (pp. 249- tions proposées auparavant. 257) traite des paysages souvent désolants qui hantent Dans Du charme des landes au rideau cramoisi (Barbey l’écriture de Soucy, voyageur dont les poèmes sont dé- d’Aurevilly) (pp. 135-152), l’A. opère une comparaison pourvus de références à ses nombreux déplacements. entre deux œuvres de Barbey d’Aurevilly choisies pour Cependant, l’espace demeure un aspect essentiel de son la description de paysages mystérieux dont se caracté- œuvre autant au niveau des images déployées que de la rise la production de l’écrivain: le roman L’Ensorcelée mise en page. Sa poésie serait donc du paysagisme abs- et la nouvelle Le Rideau Cramoisi. C’est surtout la cor- trait puisqu’elle surgit des sensations et des émotions relation entre les genres et les cadres représentés à rete- éprouvées à contact du monde physique. nir particulièrement l’intérêt de Collot. Au roman cor- Le dépaysement (Jean-Christophe Bailly) (pp. 259- respond effectivement un extérieur rural qui fait appel 270) est présenté par Collot comme un exemple de ce au surnaturel, alors que dans la nouvelle on retrouve un que la géographie littéraire peut apporter au renouvel- intérieur urbain. Ici, c’est le langage réaliste à se faire lement des formes et des genres. À partir d’une expé- porteur du «fantastique de la réalité». rience directe des lieux qu’il décrit, Bailly écrit sur son Jules Supervielle entre l’Amérique et l’Europe (pp. propre pays, la France. Son dépaysement est renforcé 153-172) présente une réflexion sur le liens entre l’Uru- par le caractère fragmentaire du texte, qui répond aux guay, pays de naissance de Supervielle, et la France, pays caprices de sa sensibilité et à sa conception rhizoma- d’adoption de l’auteur. La distance entre les deux conti- teuse de l’identité nationale. Le message final de l’au- nents n’est pas seulement géographique puisqu’elle se teur est donc à la fois politique et philosophique, et fait symbole d’une déchirure existentielle pour cet écri- laisse au lecteur le choix de composer son propre itiné- vain en quête d’une place au monde. L’écriture se fait raire tracé grâce à une écriture complexe mais unitaire alors outil de recherche d’une identité qui ne se situe dans la création du sens. nulle part avec exactitude. En Europe comme en Amé- [marta baravalle]

sf177.indb 653 19/12/15 01.05 654 Rassegna bibliografica

Didier Coureau (dir.), Un cinéma de poésie, Gre- cinématographique». In Kinoptique du ciel d’encre (pp. noble, ELLUG, 2014, Recherches & Travaux, n. 84, 127-142) Christophe Wall-Romana propone l’idea pp. 220. che la poesia moderna sia caratterizzata da una ricer- ca di resa letteraria della visione in movimento e del Con il presente volume Didier Coureau prosegue un movimento, che egli osserva concentrandosi sull’ope- lavoro di ricerca sulle relazioni tra cinema e poesia in- ra di Mallarmé e Valéry e in particolare sulle immagi- trapreso insieme al gruppo di ricerca «Traverses 19-21» ni dell’universo astronomico e del volo degli uccelli, dell’Université Stendhal Grenoble Alpes e inaugurato luoghi privilegiati per la sperimentazione di una «nou- nel 2010 con l’organizzazione delle giornate di studio velle écriture mobile». Catherine Soulier (Une poésie «Cinéma, Arts vidéo, Poésie: les images au miroir des ‘sous influence’? (Ou quand la poésie fait son cinéma), images». Pur riferendosi al «cinema di poesia» teoriz- pp. 143-157) propone poi di riconsiderare le definizio- zato da Pasolini, il titolo raccoglie sotto di sé interventi ni di «cinélittérature», «cinégraphie» e «cinéfiction», piuttosto eterogenei per forma e contenuto che talvol- modificandole ove necessario, per render conto della ta debordano dal senso primo della formula pasolinia- complessità di operazioni come Une histoire passera ici na affrontando – riassume Coureau nell’agile introdu- di Ariane Dreyfus e Flip-Book di Jérôme Game, in cui zione (Un cinéma de poésie, interrogations premières, l’influenza del cinema contribuisce a ridefinire la no- pp. 5-11) – le diverse forme di commistione e influenza zione di poesia attraverso il confronto con un’alterità tra i due linguaggi, i punti di frattura e gli effetti d’eco, capace di scardinare i clichés idealizzanti ed estetizzanti le manifestazioni visuali e verbali di un certo «esprit de ancora spesso legati al genere. poésie» che è innanzitutto uno sguardo sul mondo. All’impronta accademica della prima parte del vo- La prima sezione, «Le cinéma et les poètes», si apre lume fa da contrappunto il capitolo conclusivo Poète con il contributo più corposo del volume (Esra Aykin, spectateur, poète filmeur, cinéaste poète, in cui la crea- “Was it a vision, or a walking dream?”. Constellations zione artistica accoglie e guida il discorso critico: Jac- intérieures, incandescences du sensible: “Bright Star” de ques Laurans (Le marcheur et son ombre, pp. 161-165) Jane Campion ou la nuit étoilée de Keats, pp. 15-53), propone una visione-narrazione di Le Marcheur, film volto a mettere in luce come la neozelandese Jane documentario in forma di autoportrait di Jean-Noël Campion riesca a sottrarsi alle convenzioni della bio- Christiani, Gérard Leblanc (Viecinéma, pp. 167-182) grafia d’autore dando vita a un’opera in cui il «regard riflette sulla propria pratica video-filmica ripercorren- poétique» di Keats affiora in un accordo intimo, intu- do poeticamente una relazione amorosa, mentre Frank itivo, che supera la sfera della citazione. In Des frag- Smith (Poésie hors-champ: “Eureka”, pp. 183-200) con- ments intranquilles: le cinéma d’Oliveira à la lumière divide il testo del suo film Eureka facendolo precede- de Pessoa (pp. 55-69), Guillaume Bourgois dapprima re da un’introduzione critica in forma di abbecedario, smentisce l’idea che l’opera di Pessoa sia totalmente un’analisi del proprio lavoro in cui le diverse voci emer- estranea all’ambito cinematografico, per poi mostrare gono «comme autant de forces en devenir». Chiude il come la sua estetica trovi un prolungamento nei film volume un contributo composito (“Asientos” (1995) di Oliveira, in cui il gioco sulla moltiplicazione delle de François L. Woukoache, pp. 201-213), nel quale il identità testuali e il costante dialogo tra mito e realtà testo delle voci fuori campo di Asientos, ad opera di contribuiscono a fare del cinema, come della poesia, François L. Woukoache e Claire Jaumain, è precedu- «un art du rapport». to da un’introduzione a cura di Didier Coureau e da Intitolato Cinéma poétique, poétique du cinéma, il un Texte de présentation dello stesso Woukoache, e secondo capitolo si interroga sulle modalità con cui il seguito poi da una poesia di Coureau intitolata Temps linguaggio filmico, rielaborato dall’interno, si confron- tissage (Asientos). ta con le proprie frontiere per generare nuove forme Muovendosi agilmente in un’area geografica e cul- poetiche. Il contributo di Thomas de Davydoff (Le turale di notevole estensione (dall’Inghilterra al Porto- «parti pris des choses»: Ozu et la poésie “Au contrai- gallo al Giappone agli Stati Uniti all’Africa), il volume re d’une fonction de numéraire facile et représentatif”, segue piste relativamente poco battute, propone nuove pp. 73-87) mostra come la consapevolezza dell’insuffi- strade, rileva connessioni tra mondi artistici anche lon- cienza del linguaggio comune si concretizzi nei film di tani, proseguendo con cura un lavoro di ricerca che, Ozu non sotto forma di silenzio, bensì come ricerca di afferma Coureau, è destinato a estendersi in pubbli- una lingua nuova, poetica, fatta di spazi vuoti e tempi cazioni future. sospesi, metonimie e immagini evanescenti, e in cui al- [roberta sapino] lo sguardo dell’uomo sull’altro si affianca quello, mae- stoso e temibile nella sua immobilità, delle cose sulle futilità umane. Olivier Salazar-Ferrer si sofferma su Magali Nachtergael et Lucille Toth (dir.), Dan- Maya Deren et la transfiguration filmique du temps (pp. se contemporaine et littérature. Entre fictions et perfor- 89-106), leggendo nell’opera teorica e filmica dell’arti- mances écrites, Centre National de la danse, Pantin, sta una manifestazione del «poétique» inteso come ten- 2015, pp. 237. sione tra una funzione disorganizzatrice, che scardina il linguaggio codificato, e una funzione creatrice, che Questo è un volume collettivo che parla di un passo elabora forme nuove in grado di agire sullo spettato- a due: quello tra la letteratura e la danza, l’incontro/ re attraverso l’emozione. In chiusura, Didier Coureau scontro tra due forme d’arte diverse, opposte, che sem- (“Correspondances” d’Eugène Green. La poésie proba- brerebbero estranee l’una dall’altra, due sistemi semio- blement, pp. 107-124) guarda a Correspondances di tici divergenti come il corpo e lo spirito ma che si cer- Green come a un «poème filmique», un’opera poetica cano, si scoprono, si toccano. È un legame che affiora fondata sulla visione e nutrita dall’intreccio di diverse all’inizio del secolo scorso con la nascita della danza corrispondenze: epistolari, ma anche – in senso baude- moderna, quando, ad esempio, Isadora Duncan affer- lairiano – corrispondenze tra oggetti, materie, parole, ma di danzare seguendo la musicalità di alcuni testi po- immagini, arti. etici, o quando Martha Graham incorpora nei suoi bal- La terza sezione inverte la prospettiva articolan- letti la scrittura di Emily Dickinson. Oggi, un gran nu- dosi intorno alle possibilità di generare «Une poésie mero di coreografie si appoggia a testi di diversa natura

sf177.indb 654 19/12/15 01.05 Opere generali e comparatistica 655

(filosofici, romanzeschi), reinterpretando, attraverso il pp. 135-140; Blogs de danseurs: enjeux croisés di Ali- gesto, la scrittura. Nel volume di Magali Nachtergael ce Gervais-Ragu, pp. 141-146; Narration en mouve- et Lucille Toth (Introduction, pp. 7-15), sono raccolti ment: I AM 1984 de Barbara Matijevic et Giuseppe studi di specialisti di varie discipline che spaziano tra Chico di Katja Simunic, pp. 147-151; «An account of le differenti culture, con l’obiettivo di sottoporre al let- an ongoing personal discourse»: la portée kinésique de tore un panorama eterogeneo e variegato, in un’opera l’écriture chez Simone Forti di Marie Canet, pp. 157- che si dichiara essere la prima a concentrarsi esclusiva- 161). mente sul rapporto tra danza e letteratura. È suddivi- La quarta sezione, «Écrire le mouvement: au-delà sa in quattro sezioni: la prima, «La littérature dansée», de la littérature», si sofferma sull’avant-texte, sugli si concentra sulla rappresentazione coreografica di al- schizzi, bozze, appunti, su tutti quei segni che espri- cune opere letterarie, proponendo prima una sorta di mono il processo della creazione coreografica, testimo- quadro generale e poi entrando via via nello specifico niando che il lavoro di scrittura è anche alla base della con l’analisi di singoli adattamenti (Mise en corps, mise danza (Danser – Écrire: sur l’écriture du mouvement di en voix: le texte et ses apparitions sur la scène choréo- Cottin, pp. 183-190; Jan Fabre et Anne Tere- graphique contemporaine di Lucille Toth, pp. 17-22; sa De Keersmaeker: asymétries du document di Magali Pourquoi la littérature mobilise-t-elle le corps dansant?, Nachtergael, pp. 191-197; Du théâtre à la danse: Ro- Alice Godfroy, pp. 23-30; La littérature sur un plateau: berto Zucco par Christian et François Ben Aïm di Lenaig Dominique Bagouet à l’écoute d’Emmanuel Bove, Céci- Le Yeuc’h, pp. 198-205). le Schenck, pp. 31-41; La poésie dans l’art chorégraphi- Alle prime tre sezioni si aggiungono tre Carnets mo- que contemporain, Biliana Vassileva, pp. 42-50; Fau- nografici che ampliano con ricerche e interviste l’inte- stin Linyekula: dynamiques postcoloniales de l’adapta- ro volume, mettendo l’accento su alcuni degli incontri tion. “La Création du monde (1923-2012)” et “Pour en più significativi tra danza e scrittura: il primo analizza finir avec Bérénice”, Carole Maccotta, pp. 51-62). il lavoro di Maguy Marin (Carnet Maguy Marin, pp. 63- Il secondo capitolo, «Écrivains en scène», si concentra 81), che si è ispirata in particolar modo alla scrittura di sul Festival Concordan(s)e (Le festival Concordan(s)e: jeux Beckett mettendo in scena May B a partire da Fin de d’influences entre texte et danse di Judith Mayer, pp. 83- Partie e En attendant Godot. Troviamo successivamen- 87), giunto questa primavera alla sua nona edizione, e te l’intervento di Stefano Genetti su Pascal Quignard che si presenta come «une aventure singulière où un (Carnet Pascal Quignard, pp. 103-125), che oltre a ri- écrivain rencontre un chorégraphe»: è rivelatore di un portare la pratica scritturale dell’autore restituisce la lavoro complesso, in cui lo scrittore collabora con il co- sua parola diretta grazie a una approfondita intervista. reografo entrando in scena ed esprimendosi con le pa- L’ultimo Carnet è dedicato alla coreografa Mathilde role, con i gesti, con la musica, come nel caso di Célia Monnier (pp. 163-181), la quale concepisce il proprio Houdart (Entretien avec Célia Houdart di Judith Ma- lavoro dall’incontro con altri artisti: dalla collaborazio- yer, pp. 88-93) o Olivia Rosenthal (Le pas de deux d’O- ne, ad esempio, con Christine Angot sono nati spetta- livia Rosenthal di Nancy Murzilli, pp. 94-100) che ha coli che si presentano come un dialogo tra donne che riconosciuto nel lavoro della coreografa Carlotta Sagna condividono il fascino e il rigetto per l’ambiente sociale il tema comune della follia, espresso nell’opera a quat- in cui sono nate e cresciute. tro mani Petite pièce avec Olivia. L’ultimo capitolo (Un livre: un chorégraphe, pp. 207- Il terzo capitolo, «L’auto-: s’écrire sur et hors 214) riunisce brevi dialoghi con alcuni coreografi scène», esplora la presa di parola del danzatore/co- (Chouinard, Gérard, Grandville, Rizzo) che delineano reografo sul web, sui social, perché, pur non essendo l’importanza della scrittura per il proprio lavoro. Chiu- nuova la pratica della scrittura in coloro che pratica- de la Post-face, le danseur meurtri (extraits) di Daniel no la danza, nell’ultimo decennio questa ha preso pie- Dobbels (pp. 215-222), a suggello di un interessantis- de in maniera significativa divenendo un’espressione simo volume collettivo, di piacevole lettura e ricco di di sé molto diffusa (Coming Out di Enora Rivière, spunti. pp. 127-134; L’autobiochorégraphie di Laura Soudy, [francesca forcolin]

sf177.indb 655 19/12/15 01.05 sf177.indb 656 19/12/15 01.05 sf177.indb 657 19/12/15 01.05 sf177.indb 658 19/12/15 01.05