Disciples Dans La Lumière De Michel
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Ita Wegman Disciples dans la lumière de Michel Textes sur l’histoire de l’humanité Essai introductif, traduction italienne et notes aux soins de Giancarlo Roggero Editions « TreUno » La première partie est tirée de : Ita Wegman, An die Freunde , Arlesheim 1960 (3 ème édition, 1968). La seconde partie est tirée de: Aus Michaels Wirken , aux soins de Nora Stein von Baditz, Stuttgart 1929 (5 ème édition, 1983) La traduction italienne de Giancarlo Roggero a été menée sur les éditions les plus récentes indiquées ci-dessus. La publication italienne advient avec l’autorisation de la Ita Wegman Nachlaß , Arlesheim (Suisse) (Traduit de l’Italien par Daniel Kmiécik) 1 SOMMAIRE Essai introductif (Giancarlo Roggero) I. Sur les voies de l’Archange de l’époque 1 L'homme et le monde suprasensible 2 Saint Michel dans la tradition chrétienne 3 La révélation de Michel dans l'œuvre de Rudolf Steiner 4 Appel au Tournant des Âges II. Ita Wegman - Une recherche sur les impulsions formatrices de son œuvre 1 Rudolf Steiner et Ita Wegman: les étapes d'une collaboration 2 Continuité et originalité dans les écrits de Ita Wegman 3 Les deux courants de Michel 4 Vers la formation d'un nouveau destin Première partie Aux amis – Lettres sur le Mystère de Michel Ita Wegman I. L'alitement, les derniers jours et les ultimes heures du Docteur Steiner II. En nous rappelant le Congrès de Noël III. L'ancien et le nouveau Goetheanum IV. Michel, gardien de l'anthroposophie V. Ancienne et nouvelle régence de Michel VI. Michel et ses adversaires VII. Impulsions michaéliennes en Orient et en Occident VIII. La connaissance du destin à la lumière de l'Archange Michel IX. Les deux courants de la Société Anthroposophique. X. Résurrection des impulsions des Mystères XI. Les catégories d'Aristote, un alphabet du Cosmos XII. Les métaux, véhicules d'influences planétaires XIII. Le moyen de la pensée et la " Philosophie de la liberté " XIV. Lumières et ombres autour du Mystère de Michel XV. Un souvenir des Mystères d'Éphèse XVI. La présence Rose-Croix en Bohême Seconde partie L’action de l’archange Michel dans l’histoire de l’humanité Ita Wegman I. La genèse des deux courants de Michel II. La confluence de la sagesse des Mystères dans les catégories d'Aristote III. Le Mystère du Golgotha et ses reflets au Moyen Âge IV. Vers la nouvelle régence de Michel V. L'image de l'Apocalypse et l'avenir de l'humanité 2 Troisième partie Réunir ce qui est divisé Deux écrits sur les destinées du christianisme Ita Wegman I. La légende du Temple - Paradigme de la vie spirituelle de l'humanité II. La Grécité et le Mystère du Golgotha. Appendice A Saint Michel au Moyen-Âge et dans le présent I. Saint Michel – Tiré de la Légende Dorée de Jacques de Voragine II. Le Climat intérieur de la Fête de Saint Michel – Rudolf Steiner 1. Le combat de Michel avec le dragon 2. Le combat de Michel face à la conscience contemporaine Quelques témoignages de l’Art figuratif Appendice B À propos de l’auteure 1. Impressions d'orient et d'occident dans les premières années (Giancarlo Roggero) 2. Souvenirs d'une enfance et d'une adolescence vécues ensembles (Charlien Wegman) 3. Aperçu de la vie d'Ita Wegman (Hilma Walter) 4. Trois Noël en temps de guerre à Ascona (Erica Müller) 5. Le futur ouvert (Liane Collot d'Herbois) 3 Essai introductif Sur les voies de l’Archange de l’époque dédié à Vittorio Vettori I. MICHEL OU BIEN LE SECRET DU CŒUR QUI PENSE L’époque de Michel est venue. Les cœurs commencent à avoir des pensées ; l’enthousiasme n’afflue plus seulement d’obscurités mystiques, mais bien plutôt de la clarté de l’âme soutenue par la pensée. Rudolf Steiner (Extrait des « Lettres aux Membres », 17 août 1924) 1. L’homme et le monde suprasensible. Parler aujourd’hui d’une réalité suprasensible est une entreprise ardue. Un préjugé plus ou moins net est très souvent en vigueur à ce sujet : le refus de prendre seulement en considération l’argument, ou d’un autre côté, une hypothèse facile, qui voudrait en circonscrire l’existence dans le domaine du paranormal, du magique, du suggestif. Une vision lucide et sereine, en accord avec une saine explication des forces humaines est au contraire plus rare à rencontrer, si nous faisons abstraction d’une tradition ecclésiastique par ailleurs négligée par ses propres interprètes et destinataires. Et pourtant il n’en est pas ainsi. Le plus simple concept que nous nous formons des choses, et même de celles matérielles, présuppose un contenu suprasensible, auquel nous ne prêtons cependant guère attention, celle-ci étant déployée sur les réalités matériellement conçues plutôt que sur la manière dont nous les concevons. Concevoir une chose signifie la considérer dans la permanence de son être, indépendamment des impressions singulières, temporaires, que nous en recevons au moyen des sens. Une telle permanence implique la non-soumission de notre intelligence aux conditions du monde sensible et sa capacité à puiser dans un domaine qui le transcende, donc au suprasensible. Dans la conception la plus élémentaire des choses, exprimée par l’immanquable prononcé intérieur « telle chose est », l’intelligence se réalise indépendante de la sensibilité, et justement par la grâce de cette liberté, elle peut percevoir les réalités sensibles dans leur aspect non transitoire, à savoir elle peut les « comprendre ». Ce type de considérations, inhabituel pour nos habitudes mentales actuelles, était au contraire évident pour une orientation de pensée précédente qui partait de la simple et universelle conception de l’être, en tant que présupposé à toutes les autres. La raison pour laquelle nous croyons 4 devoir remiser cette orientation de pensée parmi les choses dépassées, réside dans la manière dont, en tant qu’hommes modernes, nous expérimentons la réalité. L’attitude de notre esprit, qui résulte non seulement de notre éducation, mais d’une impulsion formatrice plus profonde, nous amène à faire en sorte que toute réalité perçue par les sens soit admise par nous, au moyen d’un procédé si habituel qu’il passe inaperçu, au sein des catégories spatio-temporelles, essentiellement mathématiques. Nous n’accueillons pas le sensible dans le simple flux de ses apparences, mais nous le décomposons et le focalisons dans une dimension perspective non-naturelle — l’enfant, jusqu’à un certain âge ne saisit pas le monde en perspective — due à une élaboration intérieure déjà complexe. Cette élaboration est entièrement l’œuvre de notre esprit, elle n’est pas donnée par nature : c’est elle qui fait en sorte que nous nous expérimentons dans le monde sensible comme des esprits actifs, en nous résolvant toutefois à croire que toute réalité s’épuise avec lui. L’activité de notre esprit dans le sensible, qui peut aussi nous rendre intrépides et nous conférer une sensation presque démesurée de domination et de puissance, si elle n’est pas intégrée par une aptitude d’auto- observation sincère et posée qui la retourne sur elle-même et sur ses propres principes, risque de mener à un esclavage fatal, destiné à barrer toute issue de notre existence au-delà de la dimension apparente et transitoire. Une reconversion de l’intelligence sur elle-même l’amènerait à affirmer que, si l’activité au moyen de laquelle elle configure en perspective le monde est son œuvre, elle ne peut pas en dire autant du donné sensible lui-même et la lumière d’essence dans laquelle elle peut le concevoir comme une chose existante en soi. Dans l’expérience de cette lumière, elle discernerait l’abandon constant d’un donné suprasensible qui demande à être reconnu et intégré dans la plénitude de la vie cognitive. La précédente orientation de pensée, à laquelle nous avons fait allusion, avait l’habitude de définir l’intelligence humaine comme une faculté « non organique ». Elle entendait dire avec ceci qu’à la différence des autres facultés telles que les sens, l’imagination, la mémoire, elle n’est pas liée à un organe corporel. Avec l’intelligence et la volonté qui émanent d’elle, l’homme transcende sa propre condition sensible. Il est en mesure de se concevoir lui-même et tout autre réalité quelconque comme un aspect, une manifestation spéciale, de cet être dont la lumière resplendit universellement en lui. Grâce au caractère « non-organique » de son intelligence, l’homme est doté de liberté et il peut se sentir membre d’un monde suprasensible. Telle est le simple dicté linéaire de cette conception plus ancienne. Notre difficulté à nous en approprier dérive de la manière de se déployer de notre intelligence qui, tournée avec une surprenante vigueur et efficacité vers l’œuvre organisatrice de la réalité sensible, en est contrainte aussi sur le plan subjectif, en s’ancrant de fait à un organe corporel, le système nerveux, lequel, tout autre que d’en constituer le principe, n’en est que l’instrument temporaire. Celui-ci fait en sorte que l’activité, en soi suprasensible de l’intelligence, puisse rester conditionnée par des modalités sensibles subjectives à caractère émotionnel et instinctif, lesquelles en altèrent le processus originaire, en obscurcissant en lui la conscience de sa propre nature. Ce que l’homme peut faire aux objectifs d’une telle conscience, est alors celui de libérer l’activité pensante dont il fait habituellement usage dans le lien sensible temporaire, en l’exerçant à se retourner sur les processus de formation du concept sur lequel elle se fonde. En se liant au sensible, elle s’est éveillée comme œuvre d’un esprit actif. Ce même esprit a maintenant la tâche de la reconduire à la plénitude de ses fonctions.