Tardiff.Maria.LMZ9508 2.Pdf
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Contact : [email protected] LIENS Code de la Propriété Intellectuelle. articles L 122. 4 Code de la Propriété Intellectuelle. articles L 335.2- L 335.10 http://www.cfcopies.com/V2/leg/leg_droi.php http://www.culture.gouv.fr/culture/infos-pratiques/droits/protection.htm Université de Metz Etudesgennaniques August Hennflngsct sa revue Der Gen'ûusder Ze'ùt Tome 2 Thèseprésentée en vue de I'obtention du Doctorat par Maria TARDIFF L)\ 34e Directeur de recherche : Monsieur Ie Professeur Année universitaire Jean MOES 1994-1995 de I'Université de Metz -306- CHAPITREIV LESLIBERTES ET LE LIBERALISMEECONOMIQI.JE La tranquillité publique est indispensable à la bonne marche des affaires. Or, la tranquillité et I'ordre publics ne sont garantis, pour Hernings, que par un gouvernement autoritaire. Mais, pour que I'activité économique et les affaires prospèrent, il faut aussi, par ailleurs, laisser un espace de liberté suffisant aux hommes. Nous nous demanderons donc, dans un premier temps,.quellessont les modalités pratiques envisagées par Hennings pour mettre en application, dans la société, le principe de liberté, puis nous examinerons comment ce même principe trouve sa traduction également dans les conceptionséconomiques qui sont exposées dans la revue, par Hennings ou ses collaborateurs. A/ Libertés et interdits 1) Liberté de presseet d'opinion Hennings prend fermement position contre toute monarchie consti- -307- -tutionnelle qu'il nomme "le système le plus instable de tous les systèmes" (1) et contre un système de représentation du peuple qui "dégénère en cabale et en luttes d'influences" (2). Il se prononce pour la monarchie absolue et fonde sa conception absolutiste du pouvoir sur un point de vue finalement assez méprisant du peuple : on doit traiter celui- ci comme un enfant ou comme un animal domestique. Il le cornpare même à "la bête de somme qui porte un Jupiter" et qui "comme celle-ci, est menée au temple par des rênes ou des coups" (3). Les "rênes" sont à coup sûr une entrave nécessaireet momentanée à la I'iberté de I'animal, mais les "coups" ont assurément quelque chose qui fait penser à une absence de respect, à une restriction importante, voire à une négation pure et simple de la liberté. Qu'en est-il exactement pour Hennings ? Quelles sont les libertés qu'il approuve ou qu'il rejette ? Ses conceptions politiques se fondent pour une grande part sur sa peur de la canaille, c'est- à-dire des couchesles plus bassesde la sociétépour lesquellesHennings et ses collaborateurs développent une variété infinie de dénominations. Walter Grab signale qu'il n'y avait pas de communication entre les "gens cultivés" et le peuple et eux-mêmes n'avaient pas non plus de relations entre eux : "En raison de leur point de vue individualiste, beaucoup de philosophes éclairés évitaient consciemmentde venir au contact direct avec les couchesinférieures de la population" (4). Hennings coûunence 7. Der knius dei 72it,779D XIS, page 343 : "das schwankendstealler Systeme". 2. Ibidem, page 342 sq. : "in Cabale und in Macht-Einflùsse ausartet". 3. Ibidem, page 339 : "das lastthier, welches einen Jupiter trâgt", "wie dieses, wird es mit Zùgel und StOpenzum Tempel gefiihrt". 4. Walter GRAB : DemokratischeStrômungen in Hamburg und Schleswig-Holstein zur Zeit der Ersten FranzôsischenRepublik, Hamburg 1966, Hans Christians Verlag, pages 250 et 251 : "Infolge ihrer individualistischen Einstellung vermieden es viele Aufklârer bewupt, mit den unteren Volksschichten in unmittelbare Berthnmg zu kommen". -308- par affirmer que la liberté de presse et d'opinion est un principe intangible et que le droit à la "communication" est un droit que la nature a donné à I'humanité et avec lequel on ne peut transiger : "La liberté de la presse est fondée sur I'exercice d'une force d'action que la nature nous a communiquée et qu'aucune constitution d'Etat ne peut nous donner ou nous ravir. Les penséessont une propriété intime et sacrée de I'humanité qui seulement par là devient humanité. La propriété présuppose la libre utilisation et, pour I'utilisation des pensées, il faut la communication. Celle-ci donc est un droit imprescriptible de I'humanité" (5). 2) Limitation du droit d'association et de réunion Mais I'affirmation solennelle et généreusede ce principe connaît, dès ses premières modalités d'application, une première différenciation qui, comme nous pouvons déjà le pressentir, sera riche de conséquences/en raison de ses imbrications avec d'autres formes de libertés concernées : "Nous exerçons (ce droit) par les paroles, l'écrit ou I'impression. Entre une idée exprimée par la parole et par l'écrit, il y a une grande différence. La langue parlée a un effet sur des personnesréunies dont I'attroupement échauffe les têtes. Les écrits s'adressent à des personnes isolées et disperséesqui lisent sans passion. Dans la bouche d'un homme éloquent, le langage est un éclair qui pulvérise et incendie; un discours imprimé est une lumière qui illumine et se répand sans brûler. Celle-ci produit un ef- 5. G Z, 1796VA,7 , page 841 : "Prepfreiheit ist in der Ausùbung einer Thatkraft gegrùndet, welche die Natur uns mitgetheilt hat, und die keine Staatsverfassunt uns geben oder rauben kann. Gedanken sind ein inniges und heiliges Eigenthum der Menschheit, die nur dadurch Menschheit wird. Eigenthum sezt freien Gebrauch zum Voraus, und zum Gebrauch der Gedanken gehôrt Mittheilung. Dese ist also ein unzerstôrbares Recht der Menschheit". -309- -fet dans le silence du cabinet, celle-là sur des massesrassemblées, et celle- là est donc, en considération de I'attroupement, I'affaire de la police" (6). On voit bien, par I'utilisation du terme "lumière" chargé de connotations positives, de quel côté penche le philosophe. Nous apprenons d'ailleurs, tout aussitôt, par un renvoi en bas de page, la véritable opinion de Hennings : "Nous nous sommes très souvent déclaré contre toutes corporations et castes,conrme étant despotiques et contraires à la liberté, et tout attroupement, formation de bandes, affichage public, clubs politiques (pas harmoniques etc...) appartiennent incontestablement à ce domaine" (7). En fait, Hennings est contre la liberté d'association. Il est, sans conteste, pour une limitation et un contrôle strict du droit de réunion, probablement parce qu'il pense, sans le dire toujours, que c'est de toute façon de I'intérêt des gouvernements, mais aussi parce qu'il a vraisemblablement une aversion personnelle envers ce genre de rassemblement,celle de l'érudit qui craint le contact avec le vtrlgaire. Mais il y a chez Hennings, plutôt que du mépris, une crainte irraisonnée de tous les dérapagesdont une foule rassembléepeut se rendre coupable : il y a la peur de la violence et une répulsion marquée pour tous les débordements de cruautés dont une foule déchaînéepeut se montrer ca- 6. Ibidem, page 841 sq. : "Wir ùben (dieses Recht) aus durch Wortg Schrift oder Druk. Zwischen einem ausgesprochenen und niedergeschriebenen Gedanken ist ein grosser Unterschied. Die Sprache wùrkt auf versammelte Menschen, deren Zusammenlauf die Kôpfe erhizt. Schriften befragen einzeln zerstreuete Menschen, die ohne Leidenschaft lesen. In dem Munde eines beredten Mannes ist die Sprache ein Blitzstrahl, der zerschmettert und zùndet, eine gedrukte Rede ist ein Licht, welches erleuchtet und sich verbreita, ohne zu sengen.Diese wùrkt in Schweigen des Cabinettes, iene auf versammelte Haufen, und daher ist iene in Hinsicht auf Zusammenlauf ein Gegenstand der Polizei". 7. Ibidem, page 842 en note : "Wir haben uns sehr oft gegen alle Corporationen und Casten als despotisch und Freiheits-widrig erklâret, und alles Zusammenlaufen, Rottiren, ôffentliches Affigiren, politische (nicht harmonische u.) Clubs gehôren unstreitig dazu". -3IG -pable. It hait la violence sous toutes ses formes : guerres, duels, révolutions, et si la vérité devait passer par une atteinte à I'ordre public, comme il le dit, il préfèrerait même se taire : "La vérité est le gardien le plus srir des trônes. ]e ne porterai jamais atteinte à la vérité. Mais je me tairai, si je ne peux plus parler sans interrompre I'ordre dont la conservation est la première de toutes les vérités politiques" (8), voilà ce que déclarait Hennhgr, en 1794,dans l"'annonce" du premier numéro de sa revue. Hennings établit donc des priorités dans la hiérarchie des valeurs, au premier rang desquellesil place donc I'ordre et la tranquillité publics qui ne sont peut-être pas encore tout à fait synonymes de liberté, mais qui sont les conditions sans lesquellesrpour Hennings, il n'y a pas de liberté possible. Hennings ressembleun peu à ce Monsieur Egg", dans la parabole racontéepar Monsieur Keuner à ses étudiants, qui, pendant sept ans, avait préféré se taire et servir l'agent que lui avait envoyé le dictateur, avant de répondre non, après que I'agent fut mort (9), à cela près que Hennings ne considérait pas la monarchie comme une dictature. Mais Hennings est sans cessesur ses gardes,sans cesse sur la défensive, et ce rejet de la liberté de réunion et d'association est une mesure de précaution supplémentaire destinée à se protéger du gros temps et à se mettre à I'abri des orages. Or, Hennings se méfie également de la parole, car c'est un moyen d'expression qui ne favorise pas la réflexion. C'est un art presque mon- 8. G Z, 77g4I7: "Ankùndigung", page3 : "Wahrheit ist die sicherste Wache der Thronen. Wahrheit werde ich nie verletzen. Aber ich werde schweigen, wenn ich nicht mehr reden kann, ohne die Ordnung zu unterbrechen, deren Erhaltung die erste aller politischen Wahrheiten ist".