99ème Année N° d’agrément P 801338 BELGIQUE - BELGIE P. P. Novembre 2012 1030 BRUXELLES 3 1/3392 Bureau postal de dépôt Millions 7 1030 Bruxelles 3 4Périodique mensuel d’études et d’actions de la Ligue Wallonne de la Région de Bruxelles, attaché à la diffusion de la culture française et à la promotion de la communauté Wallonie-Bruxelles

LE MOT DE LA PRÉSIDENTE Début octobre, visite à une amie installée Eh oui, « À quoi ça sert ? ». « Mais quoi sert à Je vous laisse avec ces quelques mots dans le Gard. Souriante, dans la douceur de quoi ? » chantait le regretté Allain Leprest. La d’espoir d’Aragon : l’automne méridional, sécateur à la main, question me poursuit sur la route du retour entre une touffe de lavande et un buisson sans que j’y trouve une réponse éblouis- Le drame il faut savoir y tenir sa partie et de laurier-tin, elle m’interroge sur ce pays sante de certitude – d’ailleurs, rien de plus même qu’une voix se taise qu’elle a quitté il y a dix ans sans esprit de stérile que les certitudes. En contournant Sachez-le toujours le chœur profond retour : « Et les Flamands… pas encore pris Saint-Étienne après avoir franchi le col de leur indépendance ? » la République, la question s’est modifiée : reprend la phrase interrompue « Et qu’en serait-il si nous ne faisions rien ? ». Du moment que jusqu’au bout de lui- Comment lui expliquer que, plus redou- Sans doute notre action est modeste, sans même le chanteur a fait ce qu’il a pu… table que la revendication d’indépen- doute ne pesons-nous pas comme nous dance flamande, s’installe une Belgique le voudrions sur les politiques et sur les Les Poètes, éd. Gallimard, 1960 flamande, sous le couvert d’une Belgique médias, sans doute nos objectifs sont à ‘unie’, coquille presque aussi vide que celles repenser chaque jour et à adapter aux réa- Marie-Claire DALOZE-WILLIQUET des défunts escargots qui hantent son jar- lités nouvelles, sans doute nos moyens 15 novembre 2012 din. Comment lui expliquer que cela se sont faibles et nos adhérents requis par fait avec la bénédiction de certains partis d’autres tâches et d’autres engagements. francophones ? Comment lui faire toucher Mais si tout à coup nous nous taisions ? Si Vous adhérez à notre combat ? Venez du doigt la trahison de ceux qui avaient dit : tout à coup cette protestation incessante, rejoindre notre équipe en donnant un « L’amputation de BHV, jamais ! Sauf avec un cette affirmation réitérée de notre identité, peu de votre temps et de vos idées. élargissement de Bruxelles, au moins aux six cette dénonciation des injustices… si tout communes à facilités » ? À mille kilomètres cela venait à s’effacer ? Résister n’est pas Merci ! de distance, tout cela pour elle est lointain, toujours immédiatement récompensé, la diffus, surréaliste peut-être, comme le disent lutte est longue, fatigante, certains s’y sont Contacter : Marie-Claire Daloze, à tort et à travers nombre de journalistes ou usés, qui nous ont quittés. présidente, avenue du Onze hommes politiques qui connaissent fort novembre 28, 1040 Etterbeek. peu de choses du surréalisme et encore Ce qui me préoccupe, au-delà du « À Tél. 02.734.77.02. moins du surréalisme wallon qui fut si quoi ça sert ? », c’est « Qui va continuer ? » Courriel [email protected] en Hainaut, notamment autour d’Achille Comment faire comprendre aux jeunes que Chavée. notre combat n’est pas un combat d’arrière- ou Guy Massenaux, secrétaire, rue garde en faveur d’une langue appelée à des Érables 8, 1040 Etterbeek. Tél. La conversation se poursuit à l’heure de devenir un jour une langue morte ? Comment 02.736.06.11. l’apéritif, sur la terrasse. Mon amie m’inter- leur faire prendre conscience - à eux que Courriel [email protected]. roge sur mes activités, le travail accompli bien trop de parents ont inscrits à l’école pour la Ligue wallonne, « 4 millions 7 »… et flamande - du trésor qu’ils ont dans la voix, le couperet de la question tombe : « Mais, dans la tête : les mots, les idées. Trésor qu’ils au fond, à quoi ça sert ? ». Le rosé dans enrichiront au contact d’autres langues et mon verre prend une saveur âcre, le silence d’autres cultures, mais qu’ils perdront irré- s’appesantit sur la garrigue et le soleil plonge médiablement s’ils négligent leur langue derrière le Mont Bouquet. Je souris pour ne maternelle au profit d’un ‘globish’ utilitaire pas gâcher la soirée et remets à plus tard et sans nuances. l’examen de la question. POLITIQUE

RAFRAICHISSANTES ÉMOTIONS Hal-Vilvorde." Et, sous l'avalanche des "gifles" flamandes et la "situation indécente Il y avait quelque chose d'émouvant à dement la scission de BHV sans aucun et ingérable" des six communes à facilités, entendre certaines déclarations scanda- élargissement de Bruxelles Madame Myriam Delacroix, bourgmestre lisées de femmes et d'hommes politiques de Rhode et maintenant députée cdH, dans la semaine suivant les élections com- À l'époque Philippe Moureaux déclarait : déclarait : "Je ne vois qu'une solution à tout munales. Les références indignées au "Scinder BHV serait faire de Bruxelles une cela : le rattachement de nos communes à manque d'éthique, de respect de la parole enclave en Flandre… On perdrait la der- la Région bruxelloise." donnée, des engagements, des accords nière carte dans nos mains". Pour Madame écrits, avaient aussi quelque chose de Milquet "l’élargissement de Bruxelles n’est Joëlle Milquet, Philippe Moureaux et "grinçant", n'est-il pas vrai, dans la bouche pas qu’un problème purement commu- Christos Doulkeridis étaient les signataires de représentants de partis signataires de nautaire : il y va aussi de l’équilibre dans le de l'accord de mars 2007 pour leur parti. l'accord du 29 mars 2007 qui liait solennel- pays". Le manifeste électoral MR soulignait Il est rafraichissant de voir leur sensibilité lement toute remise en cause de l'arron- que "En tout état de cause, l'élargissement retrouvée pour le respect des engagements dissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde à de Bruxelles, à tout le moins aux six com- et leur révulsion pour la trahison. la "condition d'élargir les frontières de la munes à facilités, constitue la contrepartie Région de Bruxelles-Capitale". Quatre de juridiquement certaine à la scission de Philippe DUVIEUSART ces cinq partis ont accepté - et voté - froi- l’arrondissement électoral de Bruxelles- L’IRRÉSISTIBLE ASCENSION DES NATIONALISTES FLAMANDS

Notre intention n’est pas d’analyser les La guerre de 1914-1918 transforme le résultats des élections en général, mais d’en mouvement flamand : de linguistique, son tirer des enseignements utiles à notre cause. combat devient politique. Les « maxima- listes » revendiquent dorénavant le fédéra- Saluons d’abord la confirmation de la lisme, voire l’indépendance en dehors du majorité francophone à Crainhem (malgré cadre belge : souvenons-nous du Raad van l’apparition d’une liste bilingue à l’initiative Vlaanderen créé avec l’aide de l’occupant. de Francophones aussi naïfs qu’irrespon- Dès 1919, contrairement aux « minimalistes » sables qui ont cru entendre rimer « scis- qui agissent dans le cadre des partis tra- sion » et « pacification ») et son renforce- ditionnels, ils créent le (FP), qui ment à , Rhode-Saint-Genèse obtient d’emblée 6, 9 % ; le FP est supplanté et Wezembeek-Oppem. Relevons aussi la en 1932 par le bonne tenue, comme l’a écrit notre prési- (VNV), qui atteint aux élections de 1939 dente, des « élus bruxellois lucides et fermes 15, 1 %. Certains considèrent déjà le VNV dans la défense des Francophones ». d’abord comme un parti d’extrême-droite : cette vision réductrice est erronée, car Trois points ont retenu particulièrement comment expliquer alors que, par rapport notre attention : l’ascension des nationalistes à 1936, REX s’effondre et le VNV progresse (sources : Pascal DELWIT, La vie politique en Belgique de 1830 flamands, qui parait irrésistible lorsqu’elle à nos jours, 2e éd. (2010), éditions de l’ULB pp. 102, 161, 277, et encore de 3 % ? est mise en perspective dans le long terme, 310 ; Pierre BLAISE, Vincent de COOREBYTER et Jean FANIEL, Les résultats des élections fédérales du 13 juin 2010, Courrier le vote flamand à Bruxelles, le comporte- hebdomadaire du CRISP n° 2082-2083, janvier 2010 ; LE Après la seconde guerre, tout est à recom- VIF/L’EXPRESS, 19 octobre 2012, pour les élections provin- ment des FDF et des « listes wallonnes » en ciales de 2012.) mencer : le mouvement a perdu ses diri- Wallonie. C’est ce premier point que nous geants compromis dans la collaboration et le développons aujourd’hui. Le graphique ci-dessus dessine les résul- CVP s’empresse de récupérer les éléments tats des partis nationalistes flamands de les plus présentables… Néanmoins, en Il convient de mettre en garde les Wallons 1919 à 2010 à la Chambre et en 2012 dans 1949, la Vlaamse Concentratie, dont les et les Francophones : le prodigieux succès les provinces, en excluant l’arrondissement cadres proviennent pour la plupart du VNV, de la N-VA en 2010 n’est ni circonstanciel, ni électoral de Bruxelles–Hal–Vilvorde jusqu’en obtient 3, 6 % ; lui succède la « Volksunie » lié exclusivement à la personnalité de Bart 2003 et en incluant les cantons de l’arron- (VU) en 1954, qui dépasse en 1968 le résul- De Wever, mais la résultante d’une histoire dissement administratif de Hal-Vilvorde tat du VNV : 17 %, et culmine en 1971 à 18, vieille de près d’un siècle, depuis que le mou- de 2007 à 2012 (en effet, certains cantons 8 %. Jusqu’à la signature du pacte d’Eg- vement flamand s’est projeté dans l’arène chevauchaient les limites de l’aggloméra- mont (1977), la VU comporte une impo- électorale en 1919 ; les résultats de 2012 tion jusqu’à la scission de la province de sante composante d’extrême-droite qui ne sont pas nécessairement le signe d’une Brabant) : cette convention n’a pas d’effet vit en symbiose avec des mouvements pause, voire d’un reflux, comme certains significatif sur la démonstration. ouvertement fascistes (Vlaams Militanten commentateurs voudraient s’en persuader. Orde, Were Di, Voorpost, cercles d’anciens [Graphique] Faisons-le parler. volontaires du Front de l’Est) ; considérant

2 POLITIQUE ces accords institutionnels - qui ne seront et ont tellement bien mis en quarantaine le Anvers et le reste : au demeurant pas exécutés – comme une VB qu’ils l’ont effacé de leurs têtes, n’ont trahison de la cause flamande, celle-ci fait rien vu venir. Ainsi, le « grand » politologue et « la victoire ou la mort » ? sécession (1978) : le Vlaams Volkspartij nouvelle étoile du PS Paul Magnette décla- L’enjeu des élections provinciales et com- (VVP) de Lode Claes, sénateur et ancien rait à Vers l’Avenir le 5 décembre 2007 : « On munales était clair : la rue du Village consti- échevin du « Gross Brüssel », et le Vlaams croyait qu’avec l’explosion de la Volksunie, tue une étape obligée dans la conquête de Nationaal Partij (VNP) de Karel Dillen (Were le nationalisme flamand avait disparu. C’est la rue de la Loi (« van de Dorpstraat naar de Di) forment le Vlaams Blok (VB), rebaptisé le contraire qui s’est passé. » Il était toujours Wetstraat », à quoi le CD&V rétorque pla- « » en 2004. là, avec un quart de l’électorat flamand, et tement : « stem lokaal in het stemlokaal ! »), certains ne le voyaient pas ! parce que la N-VA est encore une « géante L’ascension du VB croise dès lors le déclin aux pieds de naine ». Pour autant, « n’oubliez de la VU, qui implose définitivement après pas que nous sommes l’héritier ab intes- les accords du Lambermont en 2001 : l’aile L’apport de Bart De Wever tat de la Volksunie » (De Wever à Metro, 8 gauche de Bert Anciaux crée le parti Spirit, Bart De Wever semble avoir réussi ce que octobre 2012). Le pari est-il gagné ? qui formera un cartel avec le SP puis d’autres avaient vainement tenté : réunifier avant de disparaitre ; les centristes s’épar- l’expression politique du nationalisme fla- À Anvers, De Wever l’emporte avec 37, 3 % pillent entre CVP et VLD et l’aile radicale mand à un niveau supérieur à la fois quan- sur la liste « Stadslijst » de Patrick Janssens, fonde la Nieuw-Vlaamse Alliantie (N-VA), titativement et qualitativement, avec un cartel du SP et du CD&V (28, 6 %), alors indépendantiste et présidée par Geert parti bien organisé et discipliné doté d’une qu’en 2006 ce dernier, à la tête d’une liste Bourgeois puis Bart De Wever. Les métas- doctrine claire, forcément de droite (un néo- SP-Spirit (35, 3 %), avait mis en échec le VB tases de la VU envahissent le corps de tous libéralisme teinté d’esprit conservateur) et Filip Dewinter (33, 5 %). Mission remplie : les autres partis flamands. maximaliste (une Flandre indépendante en la N-VA est incontournable avec 23 sièges Europe) mais débarrassée de ses oripeaux sur 55, car les 5 sièges du Belang, étant Le tableau ci-après globalise les voix romantiques et de ses symboles répulsifs neutralisés, verrouillent le jeu. Les partis nationalistes de 1978 à 2012. (ne vient-il pas de déclarer que « le meilleur traditionnels pourraient être tentés de faire service que le mouvement flamand peut de l’obstruction pour prendre leur revanche VU/N-VA VB LDD Total rendre à une Flandre indépendante, c’est de sur la négociation du gouvernement fédé- 1978 11, 4 2 13, 4 disparaitre » (De Morgen, 23 octobre 2012), ral et montrer qu’ici aussi De Wever est 1981 15, 9 1, 4 17, 3 conforme aux vœux de l’aile marchante du incapable de gouverner, mais le formateur 1985 12, 6 2, 2 14, 8 1987 12, 8 3 15, 9 patronat flamand et aux aspirations d’un autoproclamé a un délai pour conclure qui 1991 9, 3 10, 3 19, 6 électorat qui n’accorde déjà plus qu’un court jusqu’au 2 janvier. Il peut aussi tenter 1995 7, 3 12, 2 19, 5 cinquième de ses suffrages aux partis de de détacher le CD&V du SP… 1999 8, 8 15, 4 24, 2 gauche. 2003 4, 9 18, 1 23 Dans le reste de la Flandre, la N-VA 2007 19 6, 5 25, 4 Ce coup de maitre, précédé entre autres obtient le poste de bourgmestre à Alost 2010 27, 8 12, 3 3, 7 43, 8 des tentatives de création d’une Forza et dans plusieurs communes du Brabant 2012 (P) 28, 5 8, 9 37, 4 Flandria, sur le modèle berlusconien, par le flamand (, Leeuw-Saint-Pierre, Le total des voix du VB et de la VU dépasse président du VB Bruno Valkeniers (éminent Londerzeel…) ; elle offre à la Flandre sa le record de 1971 : 19, 6 % en 1991, 24, représentant du patronat portuaire anver- première bourgmestre d’origine immigrée 2 % en 1999. En 2006, le sénateur Jean- sois, qui, cette fois, avait misé sur le mauvais (Mme Sminate, de père marocain mais Marie Dedecker, exclu du VLD, crée la Lijst cheval) et du ralliement de Dedecker à la « flamande avant tout ») après avoir fait élire Dedecker (LDD), à la fois néolibérale et N-VA en novembre 2006, qui se heurte au en 2010 une députée kurde au Parlement confédéraliste (6, 5 % en 2007, 3, 7 % en véto du partenaire CD&V, De Wever l’a réa- fédéral : son nationalisme est « inclusif ». 2010). Malgré l’éclipse provisoire de la N-VA, lisé en dévorant ses concurrents et non en Mission remplie ici aussi… qui a conclu un cartel avec le CD&V (ex- transigeant avec eux. À cet égard, l’épisode CVP), le total des voix nationalistes atteint en très médiatique de Marie-Rose Morel (fille Néanmoins, les résultats aux élections 2007 un nouveau record : 25, 45 %, pulvérisé d’un important industriel flamand) a égale- provinciales, seules comparables aux légis- en 2010 après la rupture du cartel : 43, 8 %. ment été mal interprété par l’établissement latives, sont mitigés : la N-VA n’y progresse La N-VA plume dorénavant le VB et la LDD. francophone : symboliques, la réunion de que de 1, 7 % par rapport à 2010 (1), ce qui Bart De Wever et de Frank Vanhecke, ex- ne compense pas le recul du VB (- 2, 4 %) Que conclure de tout cela ? Qu’il y a bien président du VB en rupture de ban, et la et l’absence de la LDD (3, 7 %), sous le pré- progression, par paliers, du nationalisme mise à l’écart des barons (barbons ?) de texte peu convaincant qu’elle est en faveur flamand ; que le VB, comme le VNV, n’était ce parti infligeaient une terrible défaite en de la suppression des provinces, et ce qui pas simplement un parti d’extrême-droite, termes d’image à l’extrême-droite. En effet, donne à penser que des électeurs du CD&V mais d’abord un parti nationaliste, qui nait la fin tragique de la belle intrigante venue passés à la N-VA sont rentrés au bercail. du sein de la Volksunie pour se consu- de la N-VA, qui brisa le triangle de fer entre Par ailleurs, la N-VA entre dans la députa- mer dans les bras de la N-VA. Les « bien- Vanhecke, Dewinter et Annemans, garant tion permanente de la province d’Anvers pensants » francophones, qui ont oublié le de la discipline et de la force du VB, avait (même majorité qu’au gouvernement tropisme droitier du mouvement flamand fait pleurer toutes les Margot du plat pays… flamand).

3 POLITIQUE

Conclusion N-VA est l’indépendance et que sa seule sidérées, mais également les embuches Pour un parti de contestation plutôt que différence avec le Belang sur ce point est que sèmeront sous leurs pas les autres de gestion, les résultats sont en règle géné- qu’il la souhaite négociée plutôt que pro- partis flamands, ainsi que les procès en rale inférieurs aux résultats nationaux ; par clamée unilatéralement. Il reconnait (tou- indignité démocratique qui ne manquent ailleurs, les mandataires locaux bénéficient jours dans l’entretien précité à Metro) qu’il pas déjà de leur être intentés (récupération d’un avantage certain sur les autres candi- a ressenti l’acceptation de la note Di rupo d’élus du Belang, marche sur l’Hôtel de ville dats aux législatives (évalué à 1, 2 pour un de juin 2011 par les autres partis flamands d’Anvers…). « Les Athéniens prononçaient bourgmestre, parait-il). Le résultat des natio- comme un terrible échec qui l’a plongé l’ostracisme en déguisant sous le nom nalistes flamands reste largement supérieur dans un désarroi profond (een diep mentaal de peur de la tyrannie la jalousie que leur à celui obtenu lors de toutes les élections dal). C’est alors que, dans un dramatique inspirait la renommée » (Plutarque, Vies précédentes, à l’exception de 2010. retour sur lui-même, il a décidé de partir à parallèles, Aristide, VII-2). la conquête d’Anvers et de se remettre en De Wever n’est probablement pas un pleine condition physique, et qu’il s’est mis Ce qui leur ouvre en revanche un boule- météore comme la Flandre en a connu à travailler comme il ne l’avait jamais fait vard, c’est le déficit de légitimité d’un gou- ces dernières années (Stevaert, Dedecker, de sa vie. Volonté de maitrise de soi, mais vernement fédéral qui n’a pas de majorité Leterme…) car il s’agit d’un esprit vraiment aussi de l’image qu’il veut projeter, au prix en Flandre et la manière qu’ont les partis supérieur, par son éloquence, son sens de peut-être d’une certaine rationalisation flamands qui l’ont adoptée de dévaluer la la stratégie et de la propagande, sa culture autojustificatrice ? sixième réforme de l’État non encore ache- politique et historique (de Gaulle, à la suite vée en en promettant déjà une septième. de Bergson, faisait observer que l’esprit Quoi qu’il en soit, De Wever est loin d’être humain est comme une flèche, qui se pro- un homme seul : la N-VA s’appuie sur des Nos partis politiques francophones, jette d’autant plus loin qu’elle est tendue vers cadres expérimentés de l’ex-Volksunie sachant ce qu’ils devraient savoir, seraient l’arrière), sa volonté de fer et sa capacité à (Geert Bourgeois, Frieda Brepoels, Jan donc bien inspirés de ne point borner leur capter les aspirations populaires. Plutôt Peumans…), des intellectuels brillants (Eric horizon et de préparer un véritable plan de que de le mépriser ou de le craindre, les Defoort, Bart Maddens, Dany Pieters…), salut public, qui, répétons-le, ne commence Wallons devraient aspirer à se doter d’un des députés fédéraux efficaces (Théo pas par la lettre B, mais par la lettre F. chef de cette valeur, mais bien davantage Francken, Jan Jambon, Sarah Smeyers…) inspiré par les idéaux de liberté, d’égalité qui exercent une influence réelle, comme on À suivre… et de fraternité qui leur sont chers. l’a vu dans les réformes du regroupement Jean-François GOOSSE familial et du code de la nationalité, même 4 novembre 2012 Pour autant, De Wever reconnait que « tout si le résultat peut appeler des réserves sur homme politique a sa date de péremption » le plan tant politique que légistique. Sans (1) Le Vif/L’Express du 19 octobre signale un recul, et qu’il considèrerait sa carrière comme parler de ses relais patronaux… mais en confondant les résultats de la Chambre réussie si son parti obtenait en 2014 un avec ceux du Sénat en 2010 (31, 7 %) ; or, cela rompt la continuité des séries statistiques fondées résultat qui lui permette de faire basculer Ce qui menace De Wever et son parti, c’est sur les résultats de la Chambre, et n’est pas perti- le pays dans un « modèle confédéral » [sic] : l’assurance excessive qu’entraine le succès nent en raison de l’existence d’une circonscription rappelons à cet égard que l’objectif de la et qui peut conduire à des actions incon- électorale flamande unique pour le Sénat À BRUXELLES, QUE S’EST- IL PASSÉ APRÈS LES COMMUNALES ? mum d’élus et dans un second, de gagner Les résultats sont mitigés pour le PS. S’il QUI GAGNE, QUI PERD ? les négociations qui s’ensuivent. Le parti récupère le poste de bourgmestre d'An- QUELLES LEÇONS EN TIRER ? sorti vainqueur de ce second tour est incon- derlecht, monsieur Moureaux doit rendre S’il n’est pas aisé de calculer les pour- testablement le cdH qui participera à onze l’écharpe de Molenbeek et madame Carthé centages exacts glanés par les différents majorités et un des siens ceindra l’écharpe se fait également ravir celle de Ganshoren. partis à l’occasion d’élections communales, tricolore de Woluwe-Saint-Pierre. Ce fait Malgré ces deux pertes, le PS conserve il est en revanche plus simple d’analyser nouveau fera passer le nombre de bourg- néanmoins sept mayorats sur dix-neuf ! ce qui s’est passé à l’issue de celles-ci. mestres cdH de deux à trois ! Si ce même Dans trois ans, il devrait rendre au MR En d’autres mots, qui augmente son parti se voit contraint de quitter deux majori- celui d’Ixelles. Ces deux partis seront donc influence en gagnant ou en rejoignant des tés dont celle, emblématique, de Bruxelles- presque au coude à coude quant au nombre majorités ? Qui en perd ? Qui profite de ville, il participera à cinq nouvelles coalitions ! de bourgmestres à Bruxelles. Plus grave plus de visibilité grâce à des mandats pour le PS, il ne participe plus qu’à neuf mayoraux ? Une belle victoire aussi pour le MR qui majorités, ayant été exclu de quatre autres enlève 5 mandats mayoraux en en per- sans conquérir de nouvelles places ailleurs. Un scrutin municipal s’apparente en dant 2 (Anderlecht et Woluwe-Saint-Pierre) Charles Picqué lui-même stigmatisera son quelque sorte à une élection à deux tours. mais en en gagnant deux autres (Molenbeek parti, estimant qu'il a mal négocié l'après Dans un premier temps, il importe, en effet, et Ganshoren). De plus, il participera à douze scrutin communal et qu'il n'a pas anticipé pour les différents partis, d’obtenir un maxi- majorités, soit une de plus que le cdH. certains évènements.

4 N°11 - Novembre 2012

Nouvelles de l'A.B.F. Comme annoncé dans notre livraison de septembre, les réunionistes Cet exposé a été vivement apprécié par l'assemblée, qui a enregistré bruxellois ont décidé, le mercredi 17 octobre, de créer l'Alliance avec satisfaction une évidente convergence de vues entre Wallons et Bruxelles-France (A.B.F.). Bruxellois.

L'assemblée, sous la présidence du professeur Marc Wilmet, était en Les personnes présentes (parmi lesquelles un représen- effet unanime sur la nécessité de constituer un mouvement plura- tant de « Forum Bruxelles Francophone ») ont jugé que la créa- liste, propre à Bruxelles et agissant en étroite concertation avec les tion d'un site Internet propre à l'A.B.F. était prioritaire : réunionistes de Wallonie, conformément aux conclusions du rapport plusieurs participants se sont portés volontaires pour travailler en- introductif. semble sur ce projet. Paul Durieux, venu de Liège, a présenté l'Alliance Wallonie-France La prochaine réunion a été fixée : (A.W.F.), qu'il anime : son groupe de parrainage composé de person- nalités de la politique, de l'université et des milieux sociaux et cultu- le jeudi 13 décembre 2012 rels les plus divers, son site Internet (alliancewalloniefrance.wordpress. à 19 h au Ciccio Bello, com), son questionnaire adressé aux candidats aux récentes élections place Wiener à Watermael-Boitsfort. provinciales et communales, sa participation à des réunions et débats (Cercle Condorcet de Liège, sections locales du Centre d'action laïque, À l'ordre du jour : du P.S., etc.). L'A.W.F. s'oppose résolument au mirage du confédéra- rédaction d'un manifeste, lisme et prône une intégration réaliste à la France, qui ne soit ni une in- proposition d'activités, suffisante association, ni une assimilation qui ne tiendrait pas compte site Internet, structuration du mouvement. de nos particularités. L'A.W.F. souhaite également contribuer au déve- Jean-François Goosse loppement d'initiatives parallèles en France, en s'appuyant sur la sym- Contacts : Jean-Paul Roos - 65, rue Middelbourg - 1170 Bruxelles pathie de l'opinion et sur les relais existants. Tél. : 0474.30.21.56 - Courriel : [email protected]

Présentation de l'A.W.F. L'Alliance Wallonie-France (A.W.F.) réduction drastique des services populations wallonne et bruxel- rences-débats, dans le cadre ou est un mouvement pluraliste fon- publics et prestations sociales, loise. non d'associations telles que les dé en mai 2011 dont l'objet est de en tout cas un appauvrissement Cercles Condorcet, les Unions so- rassembler le plus grand nombre dramatique de la population, L'A.W.F. « essaimera dans tous cialistes communales (U.S.C.), les de « Wallons lucides », c'est-à-dire sans doute « suivi de mouvements les arrondissements wallons ». sections locales du Centre d'ac- conscients de la disparition iné- sociaux importants, voire d'une « Respect » et « solidarité » sont les tion laïque (CAL), des Fédéra- luctable de la Belgique, en vue de insurrection », juge le professeur maîtres-mots de ses relations avec listes démocrates francophones « préparer dès aujourd'hui l'union d'économie émérite de l'univer- « ses amis bruxellois ». L'A.W.F. se (F.D.F.), du Mouvement réforma- [de la Wallonie] à la France ». sité de Liège Jules Gazon. fixe les objectifs concrets sui- teur (M.R.), etc. ; vants : ––Prendre contact et nouer des Cette « alliance étroite […] s'impose L'A.W.F. refuse ce faux choix entre liens avec les autorités respon- à nous, quel que soit notre attache- Charybde et Scylla. Elle propose ––Rassembler, en un grand mou- sables de la République française, ment à la Belgique », écrit l'ancien donc aux Wallons le choix de la vement populaire, les Wallons de en particulier les membres de l'As- ministre de la Communauté fran- France, choix de raison mais aus- sensibilité réunioniste, quelles semblée nationale appartenant au çaise Pierre Hazette. La 7e réforme si et avant tout de cœur : la Wallo- que soient leurs appartenances groupe d'amitié « France-Québec », de l'État, déjà en gestation, ne nie n'est-elle pas de langue et de et convictions politiques ou phi- mais aussi avec les élus locaux et laissera aux Wallons que le choix culture, bref de civilisation fran- losophiques, pourvu que celles- les citoyens. entre la continuation de leur as- çaises ? Plutôt que l'union-assimi- ci soient conformes aux valeurs François Detif servissement dans une Belgique lation, l'A.W.F. privilégie l'union- inscrites dans la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen Adresse du site électronique de l'A.W.F. : désormais confédérale, sans sé- intégration, soit le transfert des alliancewalloniefrance.wordpress.com curité sociale commune, et une compétences de l'État fédéral de 1789 ; Contacts : Paul Durieux, après-Belgique lourde d'écueils belge à la République française ––Informer le grand public des te- [email protected], 04.263.69.17 et de menaces. Une Wallonie in- et le maintien, fût-il provisoire, nants et aboutissants des évolu- dépendante ferait en effet face à de la Région wallonne dans ses tions institutionnelles belges, des Georges Régibeau, [email protected], un déficit des finances publiques prérogatives, augmentées ou non raisons et des voies de l'union de 0474.62.91.84 tel qu'il entraînerait une hausse de celles de la Fédération Wallo- la Wallonie avec la France, notam- considérable des impôts ou une nie-Bruxelles, selon les vœux des ment en organisant des confé-

Dans ce numéro du mois de novembre 2012, France-Wallonie-Bruxelles propose à ses lecteurs de larges extraits de l'étude que Jacques Lenain a consacrée en janvier 2012 à la communauté de destin entre la Savoie et Nice, d'une part, la Wallonie et Bruxelles, d'autre part, à plus d'un siècle et demi de distance. Cette étude est disponible dans son intégralité sur le site électronique de Jacques Lenain (www.belgique-francaise.fr). Savoie et Nice, Wallonie et Bruxelles, un même destin Un précédent intéressant : le rattachement de la Savoie et de Nice à la France, en 1860 […] Le vote d'adhésion des Savoyards rial français de regroupement de l'es- Toutefois, cette annexion radicale ne 1.5. Un évènement boulever- (ou Savoisiens) et des Niçois (ou Nis- pace gallo-romain, tout en devant lui conduira pas à une adhésion « affective » sant, le succès du mouvement sards) pour la France, hier, n'a pas été abandonner divers territoires pré-al- généralisée des populations savoyardes national italien le résultat d'un mouvement populaire, pins. En effet, les conflits, notamment et niçoises à la France. Si, en Savoie, l’as- […] Une première guerre, en 1848, d'un élan du cœur, mais la conséquence militaires, avec le Royaume de France similation « politique » ne rencontrera tourne nettement à l'avantage de l'Au- d'un « choix par défaut ». Ce rattache- seront répétés […]. Pour se protéger de pas de résistance, et si l'appartenance triche. Après une dizaine d'années d'in- ment, au moment de sa réalisation, n'a cette menace, la Capitale des « États de à la France suscitera même une vraie certitude, une nouvelle politique de pas été chaudement « souhaité », mais il a Savoie » sera transportée de Chambéry adhésion de la part d'une bonne partie rapprochement et d’alliance de l’État été massivement « accepté », parce qu'il à Turin en 1563, ce qui aura pour effet des Savoyards et de leurs milieux di- piémontais avec la France, conduite constituait « la moins mauvaise solution » majeur de leur donner un caractère « ita- rigeants, à Nice, ce premier rattache- par Cavour, ardent promoteur de l'uni- quand les Savoyards et les Niçois ont été lien ». Caractère italien définitif, qui sera ment, imposé, restera plutôt subi, no- té italienne, et chef du gouvernement, contraints de se choisir un nouvel État, renforcé par l'acquisition de la Sicile, ce tamment les premières années, à tout va permettre de faire évoluer favora- quand ils furent abandonnés par l’État qui permettra à ce « Duché » de devenir le moins par une fraction notable de la blement le rapport des forces avec l’Au- piémontais dont ils étaient jusqu’alors un « Royaume », puis de la Sardaigne, en population et des élites. triche. En 1859, la guerre reprend, et les sujets. Et, une fois devenus « citoyens échange de l'abandon de la Sicile […]. l'Autriche est militairement vaincue français », par accident et par intérêt, ils […] Après Waterloo, […] la Maison de Sa- par l'alliance franco-piémontaise (juin se sont, presque tous, très vite, aperçus 1.2. Jusqu'à la veille du voie retrouvera son Royaume […] agran- 1859). Le Piémont obtient la Lombar- que « Français »…ils l'étaient déjà. De- premier rattachement, di de Gênes et du pays génois, lui don- die. L'engagement français au service main, il pourra en être de même, pour un non désir de France nant une véritable dimension maritime. du projet piémontais de réalisation de la Wallonie et Bruxelles […]. En Savoie et à Nice, tout au long des Mais, du coup, le caractère italien de ce l'unité italienne avait pour contrepar- siècles, la loyauté des populations à Royaume sera encore plus affirmé, ce tie la cession de la Savoie et de Nice à I - Une histoire méconnue l'égard de la Maison de Savoie sera qui aura de lourdes conséquences. Le la France (accord conclu secrètement à et exemplaire : constante. Les élites locales et les popu- poids propre de la Savoie dans cet État Turin en janvier 1859). Et ce sera par le le choix « raisonné » des lations lui seront constamment fidèles. agrandi en sera diminué, et Nice perdra Traité de Turin de mars 1860 que sera Et ce d'autant mieux que l'opposition de plus tout rôle stratégique maritime acté le rattachement de la Savoie et de Savoyards et des Niçois pour permanente, multiséculaire, entre l'État pour l’État piémonto-sarde […]. Nice à la France, sous la condition de le rattachement à la France français et l’État savoyard-piémontais, son acceptation par les populations e ne pouvait qu'entretenir voire dévelop- 1.4. Au XIX siècle, une situa- concernées […]. En 2010, les populations et les institu- per de telles attitudes. À plusieurs re- tion devenue anachronique de tions de la Savoie et de Nice ont fêté prises, du XVIe siècle au XVIIIe siècle, les part et d'autre des Alpes 1.6. Les refus savoyard et le cent cinquantième anniversaire du armées françaises ravageront les pays Dans cet « Europe des nationalités » du niçois de faire partie de rattachement de leur pays à la France. savoyards et niçois, créant puis confor- XIXe siècle, l’État « sarde », de centrali- l'Italie nouvelle, de devenir En 1860, les ancêtres des Savoyards et tant des sentiments durablement dis- té piémontaise, renforcé, agrandi, et des Italiens des Niçois, depuis longtemps de langue tants, défavorables et même hostiles d'essence de plus en plus italienne, va Dans cette période critique de 1848- et de culture française (quasi totale- à l'État français. Cette fidélité à la Mai- consacrer de plus en plus ses forces 1860, l'engagement sans réserve du ment pour les premiers, partiellement son de Savoie et cette défiance pour la montantes à la grande idée de la réa- Royaume piémontais dans la réalisa- pour les seconds), bien que la Savoie et France seront donc entières, malgré lisation de l'unité nationale italienne. tion de l'unité italienne est la cause d'un Nice étaient séparées de la France de- une grande proximité linguistique et Pour y parvenir, il lui faudra vaincre et délaissement accentué de l’État cen- puis plus d'un millénaire, choisirent la culturelle avec la France. […] Plus pré- repousser l'Autriche impériale, puis- tral pour ses provinces transalpines, France, en se séparant du Royaume du cisément, la langue française standard sance installée à Milan comme à Ve- savoyarde et niçoise. […] Une telle mo- Piémont, et donc de la Maison royale de et la culture française s'imposeront, nise et au delà […]. bilisation […] pour […] un projet bien Savoie, parce que la voie italienne adop- massivement, dans la Savoie histo- étranger aux Savoyards comme à tée par celle-ci leur était devenue étran- rique. […] Dès lors, la Savoie et Nice seront de nombre de Niçois engendre alors le dé- gère, et parce que l'hypothèse de l'indé- plus en plus marginalisés dans cet État veloppement d'une opinion francophile, pendance n'était pas crédible. 1.3. La période révolutionnaire piémontais/italien en devenir. Margi- qui était contenue et réduite jusqu'alors. et impériale française et ses nalisation démographique puisque La guerre contre l'Autriche, et l'alliance 1.1. Une très longue séparation conséquences pour la Savoie la Savoie et Nice ne représenteront française pour laquelle le gouvernement d'avec la France, tant pour la et Nice plus qu'un septième de sa popula- italo-piémontais ne peut dissimuler qu'il Savoie que pour Nice À la suite de la Révolution, tous les tion totale. Marginalisation politique, va avoir pour prix l'abandon territorial […] Le partage de l'empire carolingien États de Savoie […] seront militaire- puisque le Royaume piémonto-sarde, de la Savoie et de Nice, favorisent du aboutit à l'affirmation de toute une sé- ment conquis et intégrés à la France et ses élites désormais massivement coup le retour d'un « parti pro-français », rie de quasi-États aux frontières orien- (1792-1793). Cette annexion mettra fin, pro-italiennes, porteront de moins en tant à Nice qu'en Savoie. L'option fran- tales du Royaume de France. Bien qu'is- temporairement, soit pour une petite moins d'intérêt à la Savoie « franco- çaise prend ainsi corps, plus par un effet sues de l'antique Gaule romanisée, ces vingtaine d'années, à une séparation phone », pourtant le foyer historique de rejet de la menace d'une intégration entités sont alors des membres semi-in- de près de mille ans d'avec la France du Royaume […]. Marginalisation géo- à l'Italie que par une mouvement d'at- dépendants de l'immense Empire ger- (et, pour Nice, de quatre siècles d'avec graphique et culturelle, tant pour la tirance spontanée pour la France. […] manique. La Savoie, région très mon- la Provence). Savoie, plus que jamais placée dans tagneuse qui chevauche la barrière des l'orbite territoriale de la France, que 1.7. Un choix raisonné Alpes, et la Provence, dont le pays Ni- Pendant cette période française, très pour Nice, petit port isolé devenu sans des élites pour la France, çois fait partie, sont de ceux-là. La « Mai- brève mais très dense, les Savoyards importance, ni militaire ni commer- qui a conditionné celui son de « Savoie », en place dès le XIe siècle et les Niçois subiront une forte assimi- ciale. Et, enfin, marginalisation écono- des populations […] absorbe rapidement le Piémont ita- lation institutionnelle et culturelle. L'État mique, du fait des désavantages liés à Avant de faire le choix de la France, qui lien, et s'étend même jusqu'aux portes français, républicain puis impérial, im- la frontière douanière avec la France, mettrait fin à un millénaire de sépara- de Lyon eu au nord du lac Léman. En posera son nouveau système politique puisqu'en Savoie l'économie s'orien- tion d'avec la France et à un demi-mil- 1388, Nice se sépare de la Provence et (suppression des ordres, égalité des in- tait de manière de plus en plus ma- lénaire d'appartenance à la « Maison de rejoint ces « États de Savoie ». dividus…) et juridique (de l'adminis- nifeste vers la vallée du Rhône et la Savoie », les populations et les élites sa- tration territoriale au code civil…). La France du second Empire, en pleine voyardes et niçoises vont rester divisées Alors que tous les pays voisins de la Sa- Savoie historique formera deux « dépar- croissance, et vers la Confédération sur la voie à adopter. En Savoie, la partie voie et de Nice seront progressivement tements », qui auront respectivement suisse, elle aussi active, notamment nord, proche du lac Léman (Sud-Gene- rattachés à la France (le Dauphiné en Genève (annexée aussi à la France) et pour le Nord de la Savoie. Et Nice, déjà vois, Chablais, Faucigny), avait un fort 1349, la Provence en 1481 […]), la Mai- Chambéry comme chef-lieu. Et le pays déclinante, perdra son statut de port attrait pour la Suisse, la Suisse romande son de Savoie saura échapper, jusqu'à niçois, agrandi de Grasse, sera consti- franc, déclassement très mal vécu et plus précisément, avec laquelle elle en- la Révolution, au mouvement territo- tué en un « département ». qui contribuera à l'isolement du pays tretenait depuis toujours des liens mul- niçois tout entier. tiples, économiques notamment. Re- joindre la Confédération suisse comme Pour l’État français, il était essentielle- rialement, il est a nouveau créé deux Assemblée unitaire des pays de Savoie), nouvel État cantonal pouvait donc être ment, cependant, de garantir aux élites Départements savoyards et un dépar- demeurent jalouses de leur autonomie tentant. La Confédération (en fait un locales des conditions d'intégration non tement niçois. (cette division de la Sa- infra-savoyarde. À Nice, la rivalité avec État pleinement fédéral depuis 1848) y défavorables pour toutes les catégories voie était déjà en place au sein même Marseille, ancienne et constante, ma- était plutôt favorable, et notamment ses d'intérêts en cause […]. Alors en pleine du « Duché »). L'assimilation législative est nifeste également la persistance d'une cantons « francophones ». Et, comme il force, le régime de Napoléon III, mé- institutionnelle sera menée rondement, forte identité nissarde. Mais, là aussi, se devait, l'Angleterre. Le sud de la Sa- lange baroque de modernité (indus- dans tous les domaines (législation gé- sans que cela débouche sur un mouve- voie, d'Annecy à Chambéry, par contre, trielle notamment) et de conservatisme nérale, système judiciaire, système édu- ment politique quelconque de demande inclinait nettement vers la France. À (religieux), était parfaitement armé catif, organisation religieuse, etc.). […] d'une autonomisation accrue. Nice, où le caractère italien était fort pour y parvenir […], sur les plans ad- présent, où la proximité territoriale avec ministratif et économique. En outre, la L'ouverture économique, suscitée par II - Pour la Wallonie et l'Italie était évidente, l'option de res- forte proximité du second Empire avec les investissements massifs de l’État Bruxelles, une situation ter avec le Piémont, et donc de s'ins- l’Église catholique […] va constituer un français, notamment dans les infras- semblable qui conduit crire dans l'Italie en voie d'unification, puissant moyen de rallier à la solution tructures ferroviaires et routières, et plutôt que de rejoindre la France, avait française les populations et les élites qui suivit cette intégration sur plusieurs à un choix « raisonné » beaucoup de défenseurs, dont Garibal- locales conservatrices, au moment où décennies, valida la réunion à la France identique pour la France di, pleinement Niçois et militant-com- le Royaume italien en cours de consti- dans le domaine économique. Toute- battant de l'unité italienne. tution paraissait comme trop « libéral » fois, il faudra attendre, pour Nice, l’ex- […] De même que l’État français aura et anti-papal, le sort de Rome, menacé plosion du tourisme méditerranéen, été hier le nouvel État apte à accueillir Pour autant, la France de 1860, unifiée, d'annexion, étant en jeu. et, pour la Savoie, celui des sports d'hi- les Savoyards et les Niçois, devenus des forte, prospère, aux institutions stables, ver, pour donner à ces deux pays des « étrangers » dans l’État- italien en à la culture semblable ou proche, aux Seule, l'attraction de la Suisse sur le standards de développement écono- construction, il peut être demain celui mœurs connues, paraissait finalement Nord de la Savoie justifiera un traite- mique et social de haut niveau, au- dont auront besoin les Wallons et les moins « lointaine » aux Savoyards et Ni- ment territorial particulier. Comme jourd'hui parmi les meilleurs des « pays » Bruxellois, quand ils n'auront plus leur çois que la nouvelle Italie, une construc- cette attraction menaçait l'unité de de France. […] place au sein de l’État belgo-franco-fla- tion étatique encore en devenir, à l'uni- celle-ci, ce qui inquiétait une large par- mand en désintégration, dont l'existence fication territoriale inachevée (Venise, tie des élites savoyardes qui étaient at- En Savoie comme à Nice, il existe bien est devenue incompatible avec celle de Rome étaient encore à « conquérir »), tachées à son maintien, l’État français une ligue locale « autonomiste », mais son l’État national flamand émergent. aux populations « étrangères », à l'ave- donnera son acceptation à la création rayonnement est marginal ou insigni- nir économique incertain, et qui me- d'une grande zone franche couvrant fiant. Même sous l'occupation italienne, 2.1. De très fortes similitudes naçait les intérêts, territoriaux notam- les territoires proches de Genève et du de 1940 à 1944, la population niçoise géographiques, culturelles et ment, de l’Église romaine. Et, de plus, le lac Léman. Cette zone franche, éga- manifestera sa fidélité à la France, ren- historiques fondamentales Royaume italo-piémontais ayant fait sa- lement favorable aux intérêts écono- dant vaine la volonté de l’État mussoli- Tout d'abord, la Wallonie et, dans une voir son intention de céder la Savoie et miques des Cantons romands (Genève, nien d'annexer Nice à l'Italie. En 1947, moindre mesure le Brabant bruxellois Nice à la France, sous la réserve de l’ac- Valais, Vaud) contribuera à neutraliser le petit pays niçois de Tende, qui était se situent, comme la Savoie et Nice, ceptation de ce transfert par les popula- les prétentions de la Suisse, d'autant resté italien jusqu'alors (par volonté pié- dans la continuité géographique de tions, lesdites populations et leurs élites plus aisément que les Cantons germa- montaise, et pour des motifs militaires la France […]. De même, une grande étaient confrontées à un abandon ma- niques n'étaient pas favorables à une notamment), après des pétitions répé- proximité culturelle, du fait d'une nifeste. Dès lors, pour obtenir cette ac- expansion de la Suisse « francophone ». tées des populations pour devenir fran- langue identique, associée à cette conti- ceptation des Savoyards et des Niçois, il çaises comme tous les Niçois, et à la nuité territoriale, est la marque perma- appartenait à l’État français de rassurer 1.9. Une approbation de la suite d'un plébiscite particulier, sera à nente des populations wallonnes […]. Et et de séduire les leurs élites dirigeantes, « solution française », par un son tour transféré de l'Italie à la France. la population bruxelloise se sera fran- afin de rendre acceptable par tous ou vote plébiscitaire cisée, au fur et à mesure de l'extension presque sa volonté « annexionniste ». La constatation du consentement des 1.11. Des identités « régionales » de la cité, une francisation aujourd'hui Savoyards et des Niçois à la réunion à conservées et assimilées dans bien plus complète que celle de la popu- 1.8. Un effet d'aubaine bien la France justifiait une consultation po- l'ensemble français lation de Nice avant son rattachement exploité, une proposition pulaire […]. En Savoie, le vote plébis- Aujourd'hui, le cadre territorial, légis- à la France. Politiquement, comme la d'intégration pertinente citaire se déroulera le 22 avril 1860. À latif et administratif qui inscrit la Sa- Savoie et Nice, les Pays-Bas méridio- Il ne suffisait pas à l’État français Nice, il aura lieu 15 et 16 avril 1860. […] voie et Nice dans l'ensemble français naux, dont sont constitutifs la Wallo- d'échanger son soutien, y compris mi- En Savoie, la consultation plébiscitaire est totalement banalisé (le régime fis- nie et Bruxelles, auront été séparées de litaire, à la construction de l'unité ita- apportera plus de 99 % de votes favo- cal et douanier de la zone franche nord- la France depuis onze à douze siècles, lienne contre la cession à la France des rables à la réunion (130 000 oui, dont savoyarde qui jouxtait la Suisse a dis- malgré leurs origines gallo-romaines territoires savoyards et niçois, sis du côté 47 000 « oui et zone franche », et 235 paru, dans l'entre deux-guerres, après et leur francisation culturelle. […] En- français des Alpes. Il fallait aussi neu- non), la faculté de voter pour « oui et une résistance de la Suisse). Les deux fin, un même non-désir de France, tant traliser les oppositions des États euro- zone franche » réduisant à peu le vote départements constitutifs de la Savoie que la loyauté à l’État monarchique en péens peu favorables à une telle exten- abstentionniste (600 environ). À Nice, (Savoie » et « Haute-Savoie ») font partie place a prévalu, […] est commune à la sion territoriale de la France (alors même le plébiscite donnera également 99 % de la Région Rhône-Alpes (huit dépar- Savoie et à Nice, d'une part, à la Wal- que, moins de vingt ans plus tôt, côté de votes favorables à la réunion (25 743 tements au total). Et le département de lonie et à Bruxelles, d'autre part, de belge, une extension similaire était re- oui, 160 non), soit « seulement » 84 % Nice (« Alpes maritimes ») fait partie de même qu'une expérience française de fusée, après le « reflux » de la Hollande). des inscrits, les opposants ayant géné- la Région Provence-Alpes-Côte-d'Azur teneur similaire avec la Révolution et Et, surtout, il était impératif d'obtenir ralement fait le choix de l'abstention. (six départements au total). l'Empire français. […] l'adhésion des populations concernées Moins de mille Niçois (hommes, mili- […]. Pour cela, l’État français n'eut pas taires et fonctionnaires notamment) Pour autant, le sentiment identitaire 2.2. Un processus semblable à proposer un cadre institutionnel spé- choisiront d'opter pour la nationalité des Savoyards et des Niçois reste entier. de marginalisation, sous cifique pour l'intégration de la Savoie piémontaise. La « réunion » effective des Au demeurant, les collectivités territo- l'effet du mouvement et de Nice, du fait que les élites et po- territoires et des populations de Savoie riales départementales en constituent national flamand pulations ne le demandaient pas. Cette et de Nice à la France sera accomplie le le cadre d'affirmation et d'expression. Le mouvement flamand saura trouver, absence de besoin d'un régime politique 14 juin 1860. […] Pour la Savoie, cette identité, sur le plan à compter du milieu du XIXe siècle, les et administratif particulier s'explique par politique et institutionnel, s'exprime moyens culturels puis politiques de ré- le fait que ces deux pays avait déjà relevé 1.10. Le temps accomplira, plus concrètement avec l'idée de fusion- sister à l'assimilation culturelle « fran- du cadre juridique et institutionnel fran- plus ou moins rapidement, ner les deux collectivités départemen- çaise », qui menaçait l'identité flamande, çais à peine quarante cinq ans aupara- son œuvre assimilatrice tales, pour n'en faire qu'un seule, et aus- notamment du fait même de la volonté vant (délai comparable aux cinquante L'organisation administrative française si celle de constituer une Région propre, première des élites « belges » d'imposer cinq ans de séparation des deux Alle- est, dès le moment de « 1'annexion » après séparation de la Région Rhône- la langue et la culture française à tout le magnes, dont la réunification se fit, elle (terme volontiers employé à l'époque Alpes. Mais des aspirations sans traduc- pays. Cette « mise à l'abri » du territoire aussi, sans le moyen d'un cadre spéci- et depuis), substituée en Savoie et à Nice tion substantielle, car Chambéry et An- flamand et de sa population de la me- fique pour l'Allemagne de l'Est). à celle de l’ex-État piémontais. Territo- necy, tout en collaborant (il existe une nace de francisation ab outira à une di- vision totale de la Belgique en deux ter- miner et orienter. L'appartenance lin- que ce qu'elle a été, en Savoie et à Nice, Or, l’État français d'aujourd'hui, […] lar- ritoires linguistiques exclusifs, Bruxelles guistique et culturelle des populations quelques années avant la « réunion ». Le gement décentralisé, reconnaît l'exis- exceptée. Du coup, ce processus de di- et de leurs élites, ainsi que les intérêts mouvement wallon, centenaire, opte, tence de cadres juridiques spécifiques vision culturelle puis de séparation poli- économiques et les intérêts de classe répétitivement, pour une identité wal- pour certaines de ses collectivités terri- tique et institutionnelle, accompagné du pèsent alors beaucoup plus que la « fi- lonne renforcée dans le cadre belge, toriales. Il sera donc en mesure, le mo- basculement du centre de gravité éco- délité » au régime monarchique et à ses puisqu'il est inapte à concevoir un ave- ment venu, de proposer aux élites et nomique de la Belgique, du Sud wallon institutions. Il faut savoir attendre, tout nir sans la Flandre et Bruxelles […]. Et aux populations franco-belges, wal- au Nord flamand, porte en lui la sépa- en le préparant, le « moment décisif » les forces sociales, culturelles, écono- lonnes comme bruxelloises, sous la ration complète des deux pays, évène- du changement d'allégeance politique miques et politiques bruxelloises s'ac- condition que celles-ci le lui demandent, ment provisoirement empêché par la si- et étatique pour de telles populations, crochent désespérément au cadre belge un cadre d'intégration adapté à leur si- tuation de Bruxelles, ville « francophone » quand certaines conditions sont réu- et à son ancrage royal, face à la menace tuation, qui tiendra compte notamment en terre flamande. […] nies, et, qu'alors, aucune « fidélité » an- flamande d'un contrôle coercitif voire de leur patrimoine identitaire et insti- cienne ne peut plus empêcher ce chan- d'une annexion. tutionnel « belge », tout en étant compa- On le voit, le mouvement national fla- gement. Il faut aussi un facteur extérieur tible avec une « appartenance » entière mand engendre le même effet sépara- puissant, qui oblige lesdites populations Et, comme il en fut pour la Savoie et à la France. Soit un statut d'intégration tiste avec la partie « francophone » du à reconsidérer le mythe d'une « identi- Nice, la fin de l’État commun peut sur- particulier, apte à assurer le maintien Royaume belge que le mouvement na- té propre », en l’occurrence celui d'une venir brutalement. Pour la Belgique, de l'autonomie acquise par les Régions tional italien l'a provoqué avec les pays « identité francophone » qui ne serait ce sera du fait de la paralysie totale de wallonne et bruxelloise, et qui conserve « francophones » du Royaume italien pourtant pas « française ». l’État fédéral belge, paralysie qui peut la substance des législations et insti- naissant. Mais il l'a fait et le fait encore désormais provoquer sa désintégration tutions belges dans la plupart des do- sur un rythme moins rapide. Alors que Pour la Belgique française, ce « moment à tout moment. Dans les deux situa- maines (législation générale, sécurité le Piémont, en s'italianisant à marche décisif » se rapproche. La Belgique « fla- tions, on constate une même incapaci- sociale, droit du travail, système édu- forcée – l'unité italienne est faite en trois mande » devient tout aussi étrangère té des élites […] à anticiper. Et qu'elles catif, organisation sanitaire, institutions décennies – et en repoussant ainsi à sa aux Wallons et à la grande majorité des ne peuvent se mettre en mouvement culturelles, etc.). périphérie territoriale, culturelle et éco- Bruxellois que le Piémont italien l'était qu'une fois placées au bord du préci- nomique les pays savoyard et niçois, ac- devenu hier, à un moment donné, pour pice. En attendant, elles s'accrochent à Et l’État français acceptera d'autant ceptera très vite de se séparer d'eux, la les Savoyards et les Niçois. Désormais, des options illusoires. Pour une partie mieux de proposer un statut particu- Flandre avance bien plus lentement, et la fin du Royaume de Belgique se pré- des Savoyards, ce fut la Suisse fédérale, lier d'autonomie à la Wallonie comme à peine encore aujourd'hui à s'émanciper sente au plus grand nombre comme pour une partie des Niçois, ce fut le ca- Bruxelles qu'il voudra obtenir, comme il totalement, à se séparer pleinement de une échéance certaine, sinon comme ractère italien de leur pays. Pour les par- en fut pour la Savoie et Nice, une appro- la Wallonie, du fait de son incapacité une échéance proche, car la dernière tis politiques franco-belges, c'est, très bation massive et sincère de ce statut, présente à conquérir ou à abandonner crise existentielle du Royaume belge, provisoirement, la Fédération Wallo- tant pour s'assurer l'intégration des po- Bruxelles, de son impuissance à impo- celle de 2007-2012, a provoqué le fran- nie-Bruxelles, une « structure » à laquelle pulations […] que pour faire taire les cri- ser la première option comme à accep- chissement d'une étape : il est désor- ces partis sont incapables de donner la tiques des États voisins, peu favorables ter la seconde. […] mais bien installé, au sein des élites moindre consistance, donc un simple à une telle expansion de la France en franco-belges comme des populations slogan, une formule creuse. Et c'est Europe. Comme le prévoit la Constitu- La subordination financière de la Wal- le sentiment, voire la conviction, que aussi, à l'opposé, une « voie propre », sé- tion française pour toute réunion à la lonie […] et la subordination territoriale l’État belge est condamné, et qu'il faut parée, pour la Wallonie d'un côté, et France d'un territoire et de sa popula- de Bruxelles, entièrement enclavée en mettre à profit le sursis obtenu par le Bruxelles de l'autre, et qui n'est qu'une tion […], dans la ligne de ce qui fut fait Flandre, enlèvent aux décideurs « fran- compromis passé en octobre 2011, peut- double impasse du fait de l’extrême dé- pour la Savoie et Nice, cette acceptation cophones » toute vraie marge de ma- être le dernier, pour se préparer à tout pendance financière de l'une et la to- […] devra être constatée par la consul- nœuvre face aux volontés flamandes autre chose. tale dépendance territoriale de l'autre. tation des populations de Wallonie et d'organiser ce qui reste de l’État com- Des « hypothèses », des « espérances » qui de Bruxelles, sur la base du cadre d'in- mun en fonction des intérêts de la na- 2.4. Un même choix possible donnent matière à une glose inépui- tégration-autonomie qui aura été négo- tion flamande. Et, parce que formatés pour la France, aussi non sable et inconsistante, et entretiennent cié avec leurs représentants politiques. depuis deux cents ans à cultiver une désirée et aussi nécessaire l'illusion qu'on travaille à quelque chose. Qui plus est, compte tenu de la spéci- posture antifrançaise, les élites fran- Quoi qu'il en sera du délai d'aboutisse- Mais, à la fin des fins, il faudra bien choi- ficité des entités wallonne et bruxel- co-belges ont une capacité moindre à ment du processus de désintégration de sir entre une dépendance nouvelle et loise, non assimilables l'une à l'autre, regarder vers la France que les élites la Belgique franco-flamande, le mouve- « sécurisante » à la France et le maintien et comme il en a été pour la Savoie et savoyardes et niçoises, il y a cent cin- ment national flamand construit avec d'une dépendance « paupérisante » à la Nice, cette consultation/approbation quante ans. Du coup, et plus encore que entêtement un projet dont les Wallons Flandre. […] devra donner lieu à un vote wallon et pour la Savoie et Nice, le sort de la Wal- et les Bruxellois sont exclus. Comme à un vote bruxellois distincts, wallon lonie et de Bruxelles reste suspendu à la les Savoyards et les Niçois le furent du 2.5. Un même effet d'aubaine d'abord, bruxellois ensuite. survenue d'une configuration imposée projet national italien porté par les Pié- à anticiper, tant pour la France de l'extérieur : une volonté flamande de montais. Sauf à accepter d'être margi- que pour la Belgique française Jacques Lenain presser le pas vers l'indépendance, im- nalisés et dominés, ils leur faudra donc La leçon historique qu'on peut tirer pulsée par les partis politiques flamands admettre que leur séparation d'avec les des conditions de réunion de la Savoie supplément à "4 millions 7" les plus radicaux, volonté conjuguée à la Flamands germaniques est inévitable, et de Nice à la France, outre celle qu'il paralysie de la structure fédérale belge, comme elle le fut pour ceux-ci d'avec faut savoir attendre un contexte favo- Novembre 2012 du fait de l’impossibilité des partis po- les Piémontais italiens. rable, constitué par le délitement du Éditeur responsable : litiques flamands et « francophones » de cadre étatique préexistant, est […] que Jean-Paul ROOS conclure des compromis de gestion. rue Middelbourg 65, Mais, pas plus, hier, en Savoie et à la tâche principale est de convaincre les 1170 Br u xel le s Mais une configuration séparatiste lente Nice, il n'existe, aujourd'hui, en Wal- élites franco-belges, tant wallonnes que à se mettre en place parce qu'elle se lonie et à Bruxelles un mouvement po- bruxelloises, que c'est de leur leur inté- Comité de rédaction : heurte toujours à l'obstacle bruxellois, François Detif, pulaire apte à porter les Wallons et les rêt de se rallier à un avenir français. […] Jean-François Goosse, qui semble encore insurmontable aux Bruxellois vers la France, malgré une Mais le contexte de la Belgique française Jean-Paul Roos nationalistes flamands. identité « française » commune, linguis- d’aujourd’hui est bien différent de celui Collaborateurs : tique et culturelle. Cette identité com- des pays savoyards et niçois d'hier. Car Pierre Bertrand, Cédric Chopin, Fran- 2.3. Un même cataclysme mune reste largement niée quand à ses l’État belge a été construit par les élites çois Detif, Paul Durieux, désormais inévitable : conséquences politiques nécessaires, belges elles-mêmes. C'est leur État. Et Jean-François Goosse, la fin de l’État commun et, malgré le processus de désintégra- cet État a presque deux siècles d'âge. Adrien Laurant, Pierre Mélot, Nous avons fait valoir, par le moyen de Jacques Rogissart, tion du Royaume belge, désormais évi- En outre, les législations et institutions Jean-Paul Roos. ce double « précédent » savoyard/niçois, dent et qui s'accentue, il n'y a pas, en « belges » en place sont autrement plus combien, en cas de crise majeure, exis- « Belgique française », un « parti français » importantes qu'il y a deux siècles, et ils Les articles publiés n’engagent que leurs tentielle, d'un pays, les forces géopoli- qui « compte », c'est à dire un mouve- serait impossible de les démanteler sans auteurs. France-Wallonie-Bruxelles ap- plique les rectifications orthographiques tiques à l’œuvre comptent autant sinon ment puissant qui milite pour la réu- provoquer un immense désordre et de approuvées par l’Académie française et plus que les sentiments des populations, nion à la France, ce qui fait que la si- grands ressentiments. […] publiées au Journal officiel de la Répub- sentiments que ces forces peuvent do- tuation y est, à ce jour, moins favorable lique française en 1990 POLITIQUE

Contrairement à son ancien parte- les socialistes de la ville n’arrêtaient pas Les libéraux unis au FDF auraient sans naire libéral, le FDF n’a pas bénéficié de de critiquer ouvertement le bilan de leurs doute été les grands vainqueurs incontes- la scission du MR. Il perd le mayorat de collègues humanistes. Le PS local a donc tés de ce scrutin. La séparation a eu lieu et Watermael-Boitsfort, n’en enlève pas de été conséquent avec lui-même. Pour ce qui nous ne referons pas l’histoire. La fusion nouveau mais conserve néanmoins trois concerne Molenbeek, dès le moment où le de deux partis ne donne jamais la somme postes de bourgmestre. S’il entre dans cdH avait quitté la liste du bourgmestre, les totale des résultats de deux listes. Certains deux nouvelles majorités, il est exclu de jeux devenaient davantage ouverts. Le prin- militants ne se reconnaissent, en effet, cinq autres ! Malgré ce recul, il continuera cipal intéressé en était-il bien conscient ? pas dans la nouvelle structure fusionnée. quand même à participer à dix coalitions. Là est la question ! Ne peut-on cependant pas imaginer une fédération libérale/FDF qui additionnerait Plus particulier est le cas d’Écolo, le deu- L’isolement du FDF là où il ne détenait les deux sigles et ne vaudrait que pour le xième parti en nombre de députés régio- pas le mayorat était également prévisible. niveau local ? naux bruxellois. S’il gagne son premier Les chartes portant sur la dernière révision mayorat à Bruxelles, il ne participera qu’à constitutionnelle à faire signer par les colis- Difficile de parler de Bruxelles sans évo- sept majorités soit une de plus qu’en 2006. tiers relevaient d’injonctions ubuesques. quer la périphérie. On ne peut que se réjouir De plus, elles n’étaient pas identiques dans que la sagesse ait prévalu et qu’un maxi- En ce qui concerne les alliances les plus chaque commune et certains partenaires mum de listes d’union des francophones s’y fréquentes même si elles sont parfois élar- ont parfois été dispensés de la signer soit présenté. C’était le voeu de cet homme gies ou venant en appoint d'autres partis, ce (par exemple Olivier de Clippele à Ixelles). de bon sens qu’est Georges Clerfayt. sont la violette (PS-MR) dans six cas, cdH- Résultat des courses, le FDF ne partici- FDF et FDF-, dans six cas également. pera pas au pouvoir à la Ville, à Anderlecht, En parlant du père, on ne peut s'empê- Les alliances les plus rares concernent le à Molenbeek, à Watermael-Boitsfort, à cher de faire état de la victoire de son fils à PS et Ecolo dans deux cas seulement et le Berchem et à Etterbeek. Signalons que Schaerbeek. Le choc des titans, Bernard PS et le cdH dans une seule coalition. pour cette dernière commune, il n’est pas Clerfayt contre Laurette Onkelinx, en a impensable que les deux échevins FDF maintenu plus d'un en haleine. L'issue était Les commentaires qui s’imposent sont exclus par leur parti soient remplacés par cependant prévisible. Difficile, en effet, nombreux. On ne retrouve d’abord aucune … des Flamands et ce, indépendamment d'imaginer l'électorat libéral se désolida- coalition de type olivier (PS-cdH-Ecolo). de la volonté du bourgmestre Vincent De riser massivement d'un bourgmestre en Cette formule, bien qu’au pouvoir dans les Wolf. Le bonnet d'âne du scrutin de 2012 va qui il peut se reconnaitre… pour servir de Régions wallonne et bruxelloise n’a mani- donc aux apprentis sorciers responsables marchepied à une vice-première socialiste ! festement pas la cote au niveau communal. de la scission de la liste du bourgmestre Elle s’apparente même au monstre du Loch d’Etterbeek ! À noter aussi le succès du dauphin de Ness : on l’agite souvent mais on ne la voit Magda De Galan à Forest. L'ancienne jamais ! Certains ont laissé sous-entendre Notons aussi que dans six communes, on ministre socialiste a bien réussi sa suc- qu’un poste de bourgmestre pour Olivier observe des listes du bourgmestre obtenant cession. Cela mérite d'être souligné, tant ce Deleuze aurait été négocié en même temps une majorité absolue. Si à Uccle et à Saint- phénomène est peu fréquent en politique. que la participation d’Écolo lors de la dernière Josse, la sociologie a joué en faveur du MR réforme de l’État. Si cela devait s’avérer, son dans le premier cas et du PS dans le second, Une telle étude portant sur les communes parti serait alors placé plus bas que les autres l’électeur a plébiscité la bonne gestion d’Au- wallonnes s'avèrerait également utile. Il au plan de la moralité politique. derghem, de Woluwe-Saint-Lambert, de s'agit cependant là d'un travail fastidieux Saint-Gilles et de Koekelberg. Cela mérite nécessitant la mobilisation de toute une On peut cependant émettre des doutes d'être souligné. Le même coup de chapeau équipe. Elle serait peut-être simplifiée par quant à la véracité de telles assertions. Le vaut aussi pour les bourgmestres d'Evere sa limitation à l'échelon provincial. PS qui a piloté la réforme de l’État ne fait, et d'Etterbeek dont les listes ont presque en effet, pas partie de la coalition commu- raflé la majorité des sièges. Jean-Luc ROBERT nale soutenant le dirigeant Écolo. Tout cela semble donc saugrenu bien que ce parti Si le cdH de monsieur Lutgen sort n'ait pas hésité, il y a quelques années, à vainqueur de l’après scrutin communal Petit rappel monnayer son soutien à une autre révision bruxellois, c’est sans doute aussi parce que La date d’échéance de votre abon- constitutionnelle en échange … de taxes contrairement à madame Milquet, il s’est sur des canettes et des rasoirs jetables ! octroyé plus de liberté dans le choix de ses nement figure sur la partie repliée de Rien ne peut donc nous étonner. partenaires en ne privilégiant plus systéma- l’étiquette. tiquement le PS. Gageons qu’à l’occasion Belgique 12 € De nombreux commentateurs se sont des élections régionales de 2014, le jeu Étranger (Europe) 20 € étonnés de l’éviction du cdH de madame des coalitions à Bruxelles sera très ouvert. Compte IBAN BE 62 1450 5390 3161 Milquet de la majorité à la ville de Bruxelles Des renversements sont d'autant moins à de la Ligue wallonne à 1000 Bruxelles et de la chute de Philippe Moureaux dans sa exclure que Charles Picqué envisage son Toute contribution au fonds de soutien commune. Cela n’avait pourtant rien d’éton- retrait de la politique régionale. nant. Depuis de nombreuses semaines, est la bienvenue ! Merci !

5 CULTURE & LITTÉRATURE LE FRANÇAIS, TERRE HOSPITALIÈRE Un livre de Joseph BOLY la Méditerranée (Maghreb, Liban, Égypte) Comme le livre en question porte le sous- et pour les composantes de l’ancienne titre Une passion pour la langue française, Joseph Boly, prêtre et religieux croisier, Indochine et de l’Océan Pacifique, écrire je peux aussi user de la métaphore de la poète et essayiste, membre de la Ligue en français implique un véritable choix car passion amoureuse pour signifier mon wallonne, est bien connu des milieux litté- les occasions de pratiquer le français sont rapport de connivence avec cette langue raires en Belgique et à l’étranger. Depuis de plus restreintes. Enfin viennent les exilés aux d’adoption. En vivant à présent de l’intérieur, longues années, son œuvre met en lumière situations très variées, qu’ils soient exilés c’est comme si j’étais parvenu à pénétrer la langue et la culture françaises dont il est volontaires ou non. l’intimité d’un être aimé. Avec lui je savoure un spécialiste et un ardent défenseur. avec gratitude la jouissance d’un échange Toujours dans l’avant-propos, l’auteur sans fin. « Le français, terre hospitalière » est consa- détaille les motivations qui poussent les cré à des écrivains de langues maternelles écrivains vers l’écriture en français, rai- Outre toutes ses ressources d’ordre sty- diverses qui ont choisi d’écrire en français. sons qui souvent s’entremêlent. Celles-ci listique, le français comporte une exigence Le titre est souligné par cette phrase de vont de l’héritage colonial à l’attraction de cohérence, de précision et de nuance Joseph Hanse : « Ma patrie, c’est la langue des grandes villes francophones (Paris, qui m’a permis de clarifier ou d’affiner ma française » à laquelle il souscrit entièrement, Bruxelles, Montréal) en passant par les pensée dans mes livres de recherche et de la langue étant pour lui - comme pour cha- traditions culturelles et humanistes et, bien réflexion. Pour ce qui est de mes créations cun de nous - Patrie et Mère. sûr, les qualités intrinsèques de la langue. poétiques et romanesques, je n’oublie pas que cette langue véhicule une longue L’intérêt de Joseph Boly pour ces écri- La suite du livre présente 67 écrivains tradition littéraire de type analytique et vains, partant pour la Francophonie, ne date contemporains francophones (l’auteur ne qu’elle a connu aussi une révolution dans pas d’aujourd’hui ; il a déjà consacré plu- vise pas l’exhaustivité). Nous y trouverons un le domaine du langage poétique. Ça ne me sieurs écrits à ce sujet. Une longue réflexion précieux guide de lecture. Pour chacun des prive pas, bien entendu, de tout ce que ma a présidé au choix du titre de cet ouvrage. écrivains (classés par ordre alphabétique), langue maternelle a pu me fournir comme S’il a préféré « Le français, terre hospita- les éléments suivant sont retenus : thèmes, images ou audaces syntaxiques. lière », c’est, écrit-il dans l’avant-propos, « parce qu’il y a dans le mot hospitalière 1) Notice biobibliographique. Un point essentiel : le français, tout en un je-ne-sais-quoi qui convient mieux à 2)  Motivation du choix du français comme me donnant accès à une culture autre, m’a la diversité singulière des motivations qui langue d’écriture. procuré cette distanciation par rapport à poussent un certain nombre d’étrangers 3) Perception de la langue française. ma culture d’origine et à mon passé. Je suis à recourir au parler français. […] De tout 4) Exemple d’écriture. devenu un écrivain dont l’esprit s’apparente temps mais plus particulièrement de nos à celui d’un Proust - sans prétention de jours, la langue française s’est révélée être Selon les écrivains, les présentations ne ma part ! – qui a repensé la vie et pour qui une terre hospitalière pour les écrivains des reprennent pas toujours ces quatre élé- la vraie vie est celle recréée, tardivement, pays dont le français n’est pas la langue ments et l’un ou l’autre de ces critères est par réécriture. » habituelle d’expression. […] Sous cet angle plus ou moins développé. elle est sans rivale et devance peut-être les Les exemples d’écriture, à la manière autres, y compris l’anglais, par le nombre Les textes consacrés aux motivations d’une mise en bouche, donneront envie de et la variété des auteurs qui, pour diverses du choix du français et à la perception de se plonger dans les livres présentés et d’y raisons, choisissent délibérément d’écrire la langue française raviront les amoureux séjourner durablement. en français plutôt que dans leur langue ou du français que sont les lecteurs de « 4 mil- dans une autre ». lions 7 ». Aucun pourtant ne nie les qua- Maroucha lités de la langue d’origine et beaucoup Qui sont ces auteurs ? Ce sont ceux qui s’attachent à souligner ce que la synthèse BOLY, J., Le français, terre hospitalière. Éditions M.E.O. et Association Charles Plisnier, 2012. « recourent à la langue française parce des deux a apporté à leur écriture. qu’elle fonctionne chez eux comme une [email protected] [email protected] langue seconde ou une langue d’appoint Un très bel exemple, celui de François Association Charles Plisnier, et ceux qui écrivent en français parce qu’ils Cheng, d’origine chinoise, reçu à l’Académie Maison de la Francité, rue Joseph II 18 1000 Bruxelles. vivent en France ou dans un pays de langue Française en 2003 : française, exilés ou non, ou bien entre- On ne peut aborder ces écrivains sans tiennent un relation particulière avec la « Dans mon livre Le Dialogue, récemment rappeler la thèse de doctorat soutenue langue et la culture françaises. » Les plus paru, j’ai constaté qu’abandonner sa langue à l’Université de Limoges en 2002 par nombreux sont ceux des pays où le français maternelle constituait un sacrifice certain. Anne-Rosine Delbart-Wilmet, également et langue de communication, d’enseigne- En revanche, épouser pleinement une autre membre de la Ligue wallonne, et présentée ment et souvent d’écriture (Afrique noire, langue, surtout une langue aussi riche que dans une version ‘grand public’ sous le titre Antilles, Océan indien). Pour les écrivains le français, comporte des compensations « Les exilés du langage ». (Pulim, collection des différents pays arabes du bassin de non moins certaines. Francophonies, Limoges, 2005).

6 FORUM

✒ Augustin DECHEF, La Hulpe - système dit binaire en rapport avec la numé- Germanisation des transports en com- rotation des stations alternant la préséance LE DIMANCHE 2 DÉCEMBRE 2012 mun. Je crois devoir attirer l’attention sur du français et du néerlandais, bien que un regrettable constat, à savoir l’entreprise Bruxelles soit à 90 % francophone, la voix, À 16 HEURES de flamandisation systématique, voire de fût-elle synthétique, qui annonce le nom à WOLUBILIS germanisation, pratiquée de plus en plus des stations en néerlandais massacre tant par la SNCB que par la STIB. littéralement la prononciation du nom de (1 Cours Paul Henri Spaak 1200 Bruxelles) ses stations, pourtant bruxelloises, ce, Il n’est que de se promener dans les par un accent outrageusement « à la fla- 16e CONCERT DE NOËL grandes gares de chemin de fer bruxelloises mande ». Bon sang, que le nom des sta- Organisé par l’Union des Groupements pour se rendre compte des machiavé- tions, à Bruxelles, soit prononcé tel que les liques manœuvres de la SNCB pour réduire Bruxellois ont l’habitude de le prononcer, wallons de Bruxelles (UGWB) l’influence du français à Bruxelles, ville que ces noms soient à consonance fla- et l’Association pour la Promotion comportant 90 % de francophones. Dans mande ou non. Les Bruxellois ont l’impres- toutes les boutiques des gares bruxelloises, sion de ne plus être chez eux dès lors qu’à d’Activités culturelles (APAC) je dis bien dans toutes, les inscriptions leur énoncé, ils ne peuvent même plus ou sont libellées uniquement en anglais ! ! ! à peine, reconnaitre, identifier le nom de Billets en vente à Wolubilis Anglomanie, effet de mode, snobisme, leurs stations. Que cette Société daigne ou chez Roland BARTHOLOMÉ (UGWB) : volonté manifeste de nuire au français ? se servir de voix bruxelloises capables de tél. 02.426.09.85 Sans doute un peu de tout cela, mais il y prononcer correctement le nom des lieux a réellement une tentative de colonisation bruxellois desservis ! Compte bancaire : BE61 0682 2028 6017 de notre mental par l’anglais. Et quand très très rarement traduction il y a, priorité ✒ Stéphane DESSY, par courriel - la est donnée bien sûr à l’anglais, ensuite au Belgique fait-elle encore partie des amis, peu importe l'intérêt des chansons. néerlandais et le français, lui, se voit relégué nations francophones ? L’opportunité C'est donc un message politique clair à en troisième position. Provocation certai- de la présence de la Belgique aux sommets l'Eurovision : la Belgique ne compte plus uti- nement et répugnant surtout ! Ne sommes- internationaux de la francophonie a été liser à l'avenir, lors de ses communications nous plus qu’une colonie anglo-saxonne, une nouvelle fois posée par des nationa- internationales, le français, pourtant l'une amerloque surtout, une propriété privée listes flamands, quelques jours avant les de ses langues nationales, même lors des de l’oncle Sam ? Répète-t-on le coup du élections communales, à l'occasion du évènements culturels. On sait depuis les Rwanda où le français a pratiquement été dernier sommet à Kinshasa. Corollaire : la années 60 que les nationalistes flamands remplacé par l’anglais via les militaires de Belgique fait-elle encore partie des nations se battent surtout contre le développement l’Ouganda anglophone ? francophones ? Par exemple, lors du dernier de la culture française : le « Walen buiten » concours Eurovision de la chanson, le 26 qui chassa de Leuven dans les années 60, Autre constatation, et non des moindres, mai 2012, comme pratiquement chaque l'université de Louvain, est davantage une tant à la gare Centrale qu’à la gare du Nord, fois ces dernières années, le jury "belge" a revendication "culturelle" que nationaliste toujours à Bruxelles, toutes les annonces communiqué ses résultats en anglais (alors ou même économique. Ce n'est donc pas de départ des trains et toutes les inscrip- que le français est une des deux langues cette énième tentative de ces groupes tions les mentionnant sont annoncées et officielles de l'Eurovision et même pas à la flamands qui est le fait le plus choquant : écrites prioritairement en néerlandais, deuxième position) et que le français reste on les connait. Le pire est qu'aucun des même celles indiquant la destination d’une une des trois langues officielles en Belgique nombreux ministres francophones de la gare wallonne ! ! ! Toutes ces provocations, - et même pas la "deuxième" puisque la culture n'a essayé de changer cette habi- faut-il le rappeler, dans une ville à 90 % Belgique, en théorie, ne hiérarchise pas tude, depuis qu'elle est instituée. Ils n'ont francophone. l'usage des langues dans ses communi- même jamais protesté, comme si cela était cations officielles. acquis : la Belgique parle anglais, même à La STIB n’est pas en reste dans le cadre des Francophones. de cette politique anti-francophone, elle Également, à la grande stupéfaction - qui a cru devoir remplacer l’appellation des et déception, ils sont encore naïfs - des À ma connaissance, aucune région suisse ses boutiques et kiosques de ses stations commentateurs TV de France 3, comme ne remet en cause la présence suisse à des de tram et de métro par des « bootik » et presque chaque année, ce jury belge n'a sommets de la Francophonie, ni même, lors des « kiosk » unilingues, vocables farfelus pas jugé utile de donner le moindre point de manifestations internationales, l'usage et équivoques s’il en est, uniquement des- à sa voisine française, alors que Rangoon du français qui est considéré comme un tinés à nuire au caractère francophone de n'est certainement pas la plus mauvaise atout pour le pays. Mais il est vrai que la Bruxelles. chanteuse d'Europe, comme sa carrière Suisse est une confédération… internationale le prouve. On sait que ce Et que dire de la prononciation du nom concours est éminemment politique et que Ce forum est le vôtre. Réagissez ! des stations, tant dans ses trams que dans la qualité des chansons reste accessoire : Écrivez-nous ! ses métros ? Là, c’est à proprement parler les pays scandinaves et autres…votent la honte ! ! ! En effet, de par la grâce d’un systématiquement pour leurs voisins et/ou

7 CULTURE & LITTÉRATURE LE COIN DES AMIS Un départ… Nous avons appris avec tristesse le décès de Jacques Van Linthout, membre de la Ligue Un anniversaire… wallonne. Louvaniste de naissance installé dans le Namurois, homme de grande culture, Nos plus chaleureuses félicitations à l’Asso- il était particulièrement attaché à la défense et à l’illustration de la langue et de la culture ciation wallonne de la Woluwe-Auderghem françaises. Nous présentons à ses proches l’expression de notre très profonde sympathie. (AWWA), qui vient de fêter ce 17 novembre son 80e anniversaire ! Nous lui souhaitons de vivre encore de nombreuses années, On savait déjà que Pieter De Crem, le NOTRE TERRE WALLONNE animées par le même dynamisme. ministre CD&V de la défense de la défense nationale était un flamingant fanatique. Il Ici, il n’y a pas de place pour la poli- Des remerciements… l'avait déjà largement démontré dans ses tique ni pour les présidents de partis. lI nous est impossible, vu le secret des choix de nomination des hauts gradés de Ici, c’est un autre langage dépourvu votes, de remercier personnellement tous l'armée. Il vient encore de se distinguer lors d’arrogance et d’injustice, c’est le lan- les électeurs bruxellois qui nous ont accordé des discussions préliminaires au budget gage rempli de fraicheur de la source, leur vote de préférence sur la liste FDF. Nous 2013 de l'État fédéral. Selon lui, plus ques- des feuillages, d’herbes. sommes heureux que « 4 millions 7 » accepte tion de raboter les subsides en faveur de de transmettre à tous notre reconnaissance. l'armée. Dédaignant le pouvoir des hommes Albert et Gilberte Lambot-Durand du Nord, les saisons se renouvèlent sur Pourquoi, selon vous ? Allez, question à les collines et sur les vallées. Les forêts Deux conférences… cinq francs ! Parce que l'armée ne pourrait peuplées d’arbres majestueux héber- Défense de la Langue Française (D.L.F.) alors plus remplir ses missions internatio- gent des oiseaux qui chantent jusqu’au Le mercredi 5 décembre à 19 heures à la nales ? Pensez-vous, pour peu, cela ne bord de leurs branches. Dans les sen- Brasserie de la Commission européenne, l'effleure même pas. Tout simplement, nous tiers ourlés de fleurettes, le promeneur rue Van Maerlant, 2 – 1040 Bruxelles. dit-il, parce que cela nuirait… à l'économie respire l’odeur de la sève, de l’écorce, flamande ! Il serait peut-être temps que les de l’humus. La nature se déploie en « Succès de la chanson française dans parlementaires francophones se penchent toute liberté pour se refléter sur les le monde, nouvelle génération » davantage sur la répartition régionales des cours d’eau. par Jean-Claude AMBOISE, docteur en commandes publiques à l'armée. droit, avocat au Barreau de Paris et spé- Le Wallon vigilant Occupant certaines berges, des cialiste de la chanson francophone castors construisent des barrages au Avec la participation de la chanteuse Maria š moyen de troncs d’arbres. C’est en Palatine et du comédien-écrivain Bernard automne, à la fin du jour, que le cerf, cet Tirtiaux. Torrent d'indignation dans la presse fran- animal robuste de deux-cent-cinquante Renseignements et inscriptions : 02.375.72.37 ou cophone quand la nouvelle majorité com- kilos, lance son cri rauque et prolongé [email protected] munale d'Alost veut nommer un échevin des qui se répercute de cime en cime. Le affaires flamandes chargé de lutter contre la cerf brame pour retenir autour de lui les Cercle Condorcet de Liège francisation de cette ville. Il faut dire qu'elle biches gracieuses. Sous le ciel wallon, Le mercredi 5 décembre 2012 à 20 heures y avait été fort dans le choix du titulaire pour le spectacle est prodigieux. au château de Colonster. ce poste : un ancien Vlaams Belang passé avec armes et bagages à la NV-A. Avec ses citadelles, ses rivières, sa "L'avenir du pétrole : panne d'essence, faune et sa flore, notre terre wallonne panne de sens" par Olivier PARKS, Certains ont peut-être oublié que est la gardienne de richesses natu- conférencier, expert et auteur, ingénieur l'avait précédée en cette matière. relles qui seront léguées à nos futures commercial HEC, maitrise en environne- En 2006, le collège de cette commune générations. ment ULg. confiait à une élue Groen la même com- Georgette PURNÔDE Renseignements : Cercle Condorcet de Liège pétence (Vlaams karakter, Integratie). Et Membre de l’Association des Écrivains Château de Colonster dire que certains osent qualifier Groen de Allée des Érables, B25, 4000 Liège info@cerclecon- belges et de l’Association Royale des dorcetdeliege.be parti modéré ! Écrivains de Wallonie Le Wallon vigilant

"4 Millions 7" applique les rectifications orthographiques proposées par le Conseil supérieur de la langue française et approuvées par l’Académie française

LA LIGUE WALLONNE DE LA RÉGION DE BRUXELLES ASBL Éditrice responsable : Marie-Claire Daloze-Williquet, présidente NOTRE JOURNAL "4 Millions 7" Avenue du Onze Novembre, 28, - Bte 2 - 1040 Bruxelles Adhésion : 12 € par an, 20 € pour l’étranger(10 numéros) à [email protected] verser au compte IBAN BE62145053903161 BIC GEBABEBB ISSN 2033-740X de Ligue Wallonne 1200 Bruxelles Toute contribution au fonds de soutien est bienvenue Les articles signés n’engagent que leur auteur

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