du 19/11/09 au 17/12/09 | un gratuit qui se lit 24

Thierry Fabre : les rencontres d’Averroès

cahier jeunesse détachable

Politique culturelle Les théâtres de Marseille 4 à 6 Événement Les Rencontres d’Averroès, 8 à 11 L’Aïd dans la cité 11 Rencontre avec Renaud-Marie Leblanc, 12,13 Biennale de la mémoire populaire 13 Théâtre Entretien avec Catherine Marnas, Théâtre Nono 14 Au programme 15 à 18 La Cité, les Bancs publics, la Minoterie 19 Le Gymnase, le Marie-Jeanne, le Lenche, le Daki-Ling 20 Le Gyptis, le Toursky, Beaucaire, Cavaillon, Martigues 22 Nîmes, Ouest Provence, Port-de-Bouc, Avignon 23, 24 Cirque/Arts de la rue Le Merlan 25 Ouest Provence, le Merlan, Sirènes et midi net, Martigues 26 Réserve et négoce Danse Au programme 27 à 29 Pourtant ils l’avaient dit, non ? aimez-la ou quittez-la ! Marie Avignon, Dansem, le Pavillon Noir 30 Musique N’Diaye l’a quittée, mais sans savoir qu’elle devait se taire, et Concerts 32 à 38 obéir à cette censure qu’on appelle désormais devoir de réserve. Au programme 39 à 41 Quel devoir a-t-on envers un Gouvernement quand on reçoit le Disques 44 Arts visuels prix Goncourt, décerné par un jury tout à fait privé ? Quand on Colloques 45 est secrétaire d’État, sans doute, il faut mesyrer ses propos. Au programme 46, 47 Aimez-le ou quittez-le, avait repris Nadine Morano à propos d’une Galerie du CG 13, Fontaine Obscure, autre femme noire, du Gouvernement. Un fonctionnaire territo- Espace Ecureuil, Villa Noailles 48, 49 Entretien avec Dominique Angel, Nîmes, Allauch 50,51 rial, un militaire, un policier, un enseignant a effectivement un Galerie de Visu, Regards de Provence, devoir de réserve. galerie Territoires Partagés 52 Cinéma Vraiment ? Montpellier, Cinehorizontès, Rencontres à l’échelle 53 L’affaire Marie N’Diaye nous fait avaler des couleuvres. Admettre Instants vidéos, Image de ville, Paul Carpita, Rachel 54, 55 ce qui ne devrait jamais passer. Un enseignant, un secrétaire Gardanne, Apt, Digne, Portrait de Bania Medjbar 56,57 d’État, un académicien, un sénateur n’a pas à s’imposer de ré- Sevrapek City, AFLAM, Festival Tous Courts 58 Cinambul, Au programme 59 serve, il a comme tout citoyen un devoir de résistance à ce qui Livres lui semble injuste, faux, dangereux. Les fonctionnaires de Vichy Rencontres littéraires, salon Ecrimed 60, 61 devaient-ils se taire sur les lois raciales ? Ceux d’Afrique du Sud Écritures Croisées, Théâtre du Petit Matin, CRDP 62,63 CIPM, Au programme, l’Europe des intellectuels 64, 65 obéir à l’apartheid ? La France de Sarkozy est loin de ce type de Livres : littérature, arts 66 à 69 régime. Il n’en demeure pas moins que ce bâillon appliqué aux Philosophie fonctionnaires d’État (et non de l’UMP) peut mener à de graves Entretien avec Spyros Théodorou 70, 71 Histoire aberrations. La fabrique scolaire de l’histoire, Bruno Etienne 72, 73 Ainsi le Gouvernement reproche-t-il à la presse de se prendre Sciences pour l’opposition. Les journalistes auront-ils bientôt un devoir de L’astronomie 74 Page des adhérents 75 réserve ? Non, cela ne passerait pas… Mais ceux qui travaillent dans les chaînes et les radios publiques ? Avancer l’énorme pour faire accepter l’insidieux : cette technique ZIBELINE JEUNESSE de pseudo-négociation est d’une grande efficacité. On veut faire Événement La convention des droits de l’enfant III des économies sur l’Éducation ? On annonce une réforme dras- Éducation tique des lycées, puis on la retire tout en supprimant des postes, Laterna Magica, Des dessins pour la paix IV Orchestre régional de Cannes, Ballet d’Europe V des heures et des options. On veut soumettre le monde de la Sciences Fête de la science VI culture ? On annonce une diminution sans précédent des sub- Rencontre Patrice Laisney VII Spectacles sides, et on obtient le soulagement de tous les artistes qui, les Château-Arnoux, Sainte-Maxime, Mômaix VIII yeux humides de reconnaissance, parviennent à obtenir le réta- Le Revest, Mômaix, le Gymnase, Le Massalia IX, X blissement d’un budget constant. Au programme XI à XV Regards Les intellectuels, les enseignants, les journalistes et les artistes CRDP, Entre tradition et modernité, Alcazar XVI ont en commun ceci : le seul devoir qui les conduit est de luci- Livres dité et de transmission. Sans réserve. Livres, Collection Tothème, Lire Ensemble, Toulon XVII, XVIII AGNÈS FRESCHEL 04 POLITIQUE CULTURELLE LES THÉÂTRES DE MARSEILLE Les théâtres marseillais souffrent, se plaignent, nous alarment : de financements, ils ont de plus en plus de mal à assurer les Sonner l’alarme Nous avons hésité avant de publier ces tableaux : la entendu qu’elle investisse dans la construction, la Capitale culturelle, il faudrait évidemment faire pour lecture de chiffres, dans l’objectivité qu’elle semble réhabilitation et la mise aux normes de ses bâtiments ce territoire un effort particulier. induire, est en fait d’une grande traîtrise. Ces chiffres culturels qui tombent tous en ruine. Cela coûte L’État, globalement, investit beaucoup plus à Paris ne sont significatifs que si on les ramène à des extrêmement cher, et la ville est pauvre… qu’en «Province». Si notre région n’est pas plus lésée réalités plus globales : ce qu’une société est capable Le Département l’est aussi : le Conseil Général 13 que d’autres, il reste anormal que tous les théâtres de mettre dans le football, par exemple, et qui n’a consacre une part énorme de son budget à assurer les nationaux (hors Strasbourg) soient à Paris, et que aucune commune mesure avec ce qu’elle met dans la minima sociaux. Quant à la Région, une part impor- Paris et l’Île de France reçoivent près de 65% des culture… tante de son budget culture est alloué à l’emploi dépenses de l’État en ce qui concerne le spectacle Et puis, à l’intérieur même des budgets alloués à la culturel (pour les mêmes raisons économiques) et aux vivant. culture, quelques réalités sont importantes à rappeler. festivals qui animent la vie (économique et culturelle) saisonnière : cela fait le charme estival de la région Théâtres vertueux Les subventions dans leur contexte et la bonne santé économique des industries touris- Nous voulons donc rappeler en publiant ces chiffres la La Ville de Marseille aurait certainement plus d’argent tiques locales, mais appauvrit aussi les structures grande vertu des théâtres marseillais : chacun apporte à donner à ses théâtres, si elle n’était obligée de pérennes, et l’offre culturelle pour les habitants. à cette ville qui se veut Capitale une immense prendre en charge totalement, par exemple, son Opéra richesse. Le Merlan fait venir des spectacles qu’on ne municipal (18 millions d’euros). Toutes les autres Le rôle de l’État voyait pas à Marseille avant, et qu’il coproduit large- grandes villes (Paris bien sûr, mais aussi Lyon, Il faut savoir que sur 100 euros de dépenses publiques ment, le Gyptis n’accueille que des créations qu’il aide Strasbourg, Bordeaux, Montpellier, Toulouse, Nancy, en faveur du spectacle vivant, l’État verse en à produire, le Toursky draine un public énorme, et tous Rouen, Metz, Lille…) ont des opéras financés au moyenne, nationalement, hors Paris, un peu moins ont le souci soit d’accompagner les artistes de la moins en partie par l’État et aidés par les Départe- d’un tiers (32%) et les collectivités territoriales un région, soit de faire venir le public vers des formes ments et les Régions. Au niveau des équipements la peu plus des deux tiers (68%). Cet équilibre est à peu nouvelles tout en éduquant le goût et/ou en démo- Ville a accumulé tant de retards depuis trente ans près respecté à Marseille. Or dans un contexte cratisant le répertoire. De plus tous pratiquent des qu’elle manque cruellement de plateaux capables économique régional particulier, ce tiers s’avère politiques tarifaires basses et militent pour un accès d’accueillir de grandes productions : il faut bien insuffisant. Si la France veut que Marseille soit une des jeunes et des populations défavorisées à la culture Les cinq théâtres Cinq théâtres à Marseille reçoivent plus d’un million d’euros de subvention. Trois sont situés dans les quartiers Nord, deux en centre-ville. Ils réunissent à eux seuls plus de 200000 spectateurs sur les 280000 spectateurs environ qui fréquentent les théâtres marseillais au cours d’une année. Nous reviendrons dans la suite de notre enquête sur les lieux plus petits ou moins généralistes, ainsi que sur les autres théâtres de la région.

Les subventions prises en compte sont votées pour l’année civile 2009. Pour l’heure l’État a «gelé» 50000 euros sur la subvention allouée à la Criée, qu’il n’a pas restitués.

Attention : ces chiffres ne représentent pas la dépense globale des collectivités pour les théâtres marseillais. La ville regorge de théâtres plus petits ou moins généralistes et de compagnies drama- tiques subventionnés par les collectivités. 05 acculés par des baisses conséquentes et/ou successives missions qui sont les leurs, et ont peur de l’avenir.

-il n’est qu’à regarder le prix des places dans les Benoit, soit désemparé au point de parler d’agonie de qu’à leur détriment. théâtres parisiens, ou à l’OM, ou au Dôme, pour s’en son théâtre ? Qu’ensemble enfin les directeurs de Tous ces écueils rendent les directeurs méfiants quant persuader. théâtre écrivent une lettre commune pour dire leurs à la prise de parole publique sur des sujets économiques. Bref, même s’ils n’ont pas le même cahier des charges difficultés économiques ? Zibeline tient donc à les remercier particulièrement, chacun va au-delà de ses missions imposées : les Le système de subventionnement place constitu- tous, d’avoir pris ce risque réel de parler de leurs théâtres marseillais programment beaucoup d’auteurs tivement les directeurs de structures culturelles en difficultés économiques : les punitions directes contemporains, beaucoup de créations, et plutôt plus situation de dépendance, et donc d’allégeance, vis-à- (retrait de subventions) existent dans un secteur qui de femmes qu’ailleurs. Le public populaire y est parti- vis des collectivités qui affectent l’argent public. dépend si directement de la puissance publique. culièrement soigné, les scolaires également, et les Celles-ci peuvent augmenter ou diminuer, bloquer Aujourd’hui, à force de recul, une volonté d’agir grosses productions «vues à la télé» sont bannies de voire retirer les subventions avec une grande facilité, ensemble pour construire l’avenir culturel de Marseille toutes ces salles. Le nombre de propositions diffé- et une opacité certaine : les chiffres sont publics, mais sur des bases solides semble à l’œuvre. Marseille 2013 rentes et de toutes tailles est impressionnant, les mal surveillés dans un secteur difficile à appréhender fera un flop si elle n’est pas entendue : il y a urgence places de théâtre vendues à Marseille éloquent (plus dans sa complexité. à augmenter de façon conséquente, et intelligem- de 280000 places tout théâtre confondu), les petites Ce même système de subventionnement place les ment, et en toute connaissance du terrain, et toutes salles font preuve d’un dynamisme fou, les grandes se théâtres dans une situation de grave concurrence collectivités confondues, et sans népotisme d’amitié penchent vers les créateurs à qui elles ont permis entre eux : ils connaissent la réalité des enveloppes ou de clan, les budgets alloués à la culture. d’émerger... affectées à leur domaine, et savent que l’augmenta- AGNES FRESCHEL tion de l’un, dans ce contexte rigide, équivaudra à une Silence, concurrence, vieillissement diminution de leur part. Pourquoi le malaise et la sensation de délitement Le gel des subventions favorise aussi, du moins dans sont-ils donc aussi palpables ? Qu’est ce qui, au-delà les établissements où les directeurs ne sont pas nommés, de la crise économique générale, affecte à ce point la un net vieillissement des équipes, et une méfiance vie théâtrale ? Faut-il qu’un homme, Richard Martin, envers ceux qui arrivent du dehors : affecter des lignes entre en grève de la faim ? Qu’un autre, Jean-Louis budgétaires à de nouveaux venus ne pourrait se faire

Les directeurs parlent Le Toursky Zibeline : Avez-vous subi, ces dernières années, des baisses de subvention ? Richard Martin : L’État a peu à peu retiré toutes ses billes. 60000 euros en tout, un peu moins chaque année, puis 15000 euros, puis plus rien. On vous a reproché d’employer un moyen disproportionné, et de partir à la lutte tout seul. Comment répondez-vous ? Croyez vous vraiment que je fasse une grève de la faim pour 15000 euros ? C’est pour le théâtre en général que je me bats, pour la place du théâtre dans notre vie. Y a-t-il un autre moyen ? Cela fait 40 ans que je me bats pour la culture, que je remplis mon théâtre au-delà de tout ce qu’on avait prédit, mais pour certaines personnes je suis «une épine dans le pied» ! C’est malveillant ! Que répondez-vous à ceux qui vous reprochent votre programmation ? On me taxe d’éclectisme… je suis un saltimbanque, mes mises en scène touchent à *Le nombre de spectateurs et de productions sont ceux de la saison 2008/ tout, je reçois les expressions artistiques les plus diverses. Mais j’ai aussi reçu ici Heiner 2009, sauf pour la Criée pour laquelle nous avons retenu les chiffres de la Müller, Claude Régy, Tadeus Kantor, Roberto de Simone, la première chorégraphie de Bagouet, Martha Graham. Et oui, aussi Léo Ferré et Moustaki, ce qu’on me reproche. saison 2007/2008, la dernière saison, hors les murs, étant peu significative. Mais je n’ai pas envie de céder à ces petits barons bonapartistes qui confisquent la Attention : Les chiffres des productions, coproductions, créations et coréa- culture et devant lesquels il faut ramper ou crever pour avoir une audience. Je vois lisations recouvrent des réalités diverses : produire La Nuit des rois à la Criée toutes mes rêveries en grand. Ai-je tort ? Je veux que tout soit possible pour tout le n’a forcément pas le même coût que produire Les Caprices de Marianne au monde. Je donne l’alarme, et c’est glorieux ! Gyptis, et encore moins La Révolte des Fous au Toursky -ce qui ne préjuge pas Et à ceux qui vous reprochent de ne pas faire de créations, de ne pas accueillir les de la qualité de l’un ou de l’autre. bonnes compagnies ? De même coproduire une petite partie d’un spectacle qui tourne partout n’a pas Je crie mensonge ! J’ai toujours fait des créations en mon théâtre. Quant aux bonnes le même sens comptable qu’en être le producteur principal. compagnies, qui en décide ? Me reproche-t-on d’accueillir Quartiers Nord ? Ils sont en Les autres modes d’accueil des spectacles programmés sont la coréalisation ligne directe avec le théâtre populaire. Je crois vraiment qu’on ne comprend rien à l’art (participation à certains frais), l’achat d’un spectacle qui tourne déjà ou, quand on prend la température chez Albanel. rarement, l’accueil à la recette (pourcentage). Ces formules sont nettement Écrivez-le en titre, en gros : moins coûteuses pour les théâtres, voire rentables lorsque les spectacles sont LES SALTIMBANQUES N’ONT PAS À CULTIVER L’ALLÉGEANCE ENVERS CEUX QUI LES MÉPRISENT! peu chers et «remplissent» bien. 06 POLITIQUE CULTURELLE LES THÉÂTRES DE MARSEILLE

Le Gymnase La Criée Zibeline : Avez-vous subi, ces dernières Zibeline : Avez-vous subi, ces dernières années, des baisses de subvention ? années, des baisses de subvention ? Jean-Louis Benoit : L’an dernier l’État a gelé, c’est-à-dire fait disparaître, 50 000 euros sur les subventions qu’il nous Dominique Bluzet : Avant de répondre à avait allouées. Et depuis des années les subventions ne sont pas indexées sur les prix : elles stagnent, c’est-à-dire cela je tenais à dire qu’il ne faut surtout qu’elles baissent. La Ville, elle, a augmenté ses subventions il y a trois ans. Mais les problèmes aujourd’hui à la Criée pas stigmatiser telle ou telle collectivité. sont liés au bâtiment, pas au fonctionnement : il faut investir dans les murs, qui appartiennent à la Ville. Le moment n’est pas à cela, il faut abso- Pouvez-vous expliquer la spécificité de votre statut et de vos missions ? lument qu’elles fassent toutes un effort Nous sommes un centre dramatique national, c’est-à-dire que nous avons, contrairement aux autres théâtres de afin que nous sortions de cette régres- Marseille, une mission de service public. Le Merlan aussi, qui est une scène nationale. Ces missions vont vers la sion. Ce n’est pas en les irritant qu’on création et la diffusion d’œuvres du répertoire, ainsi que d’auteurs contemporains francophones. Nous devons parviendra à les mettre autour d’une table également aider la création des compagnies dramatiques régionales non seulement en les accueillant, mais aussi en avec nous tous, pour prendre le problème les produisant et en les diffusant. Depuis mon arrivée il y a eu deux voire trois créations par saison. au corps. Quel est votre statut personnel ? Quant au Gymnase… l’État nous a retiré À la tête des centres dramatiques nationaux ce sont des metteurs en scène qui sont désignés. Pour trois ans. Ils sont 55000 euros en deux ans, et maintenant reconductibles mais révocables, et doivent rendre compte de leur activité. Contrairement aux scènes nationales, je c’est au tour de la Ville, qui nous enlève dois aussi faire une création personnelle par an, la produire complètement ou presque, et la faire tourner. Et également 30000 euros. Quant à la région, sa sub- accueillir les productions des autres centres dramatiques nationaux. vention n’a pas augmenté depuis 19 ans. Est-ce pour cela que vous avez plus d’argent que les autres ? Ce n’est pas une baisse mais une as- Bien entendu. Les missions sont différentes, et plus onéreuses. phyxie, une mort lente… Et vous programmez également dans deux salles. Que faut-il faire selon vous ? Oui. En temps normal ! La seule réponse à apporter est une Quels sont selon vous les critères qui doivent décider de l’attribution de subventions ? réponse globale, en vue de 2013, en vue La qualité artistique doit primer, même si le nombre de spectateurs, et surtout la qualité de relation avec le public, de notre survie. Globalement, on a retiré a son importance. à tous les théâtres. Il y a d’énormes pro- Comment cette qualité pourrait-elle être jugée ? Par quels critères objectifs ? blèmes à la Criée, nous nous en sentons C’est bien le problème ! Mais à force de dire qu’il n’y en a pas on peut aboutir à faire n’importe quoi. Les décisions très solidaires. La paupérisation globale devraient être prises par un collège de gens éclairés sans doute, d’artistes et de gens du métier. L’appréciation des structures apparaît au grand jour… comptable pratiquée aujourd’hui par les collectivités n’est pas pertinente, les politiques ne vont pas au théâtre, et Que pensez-vous de l’attitude de la on manque terriblement d’interlocuteurs éclairés. C’est cela avant tout qui nous mine, même si nous savons que nos révolte de Richard Martin ? valeurs sont porteuses, et que nous avons ici un public touchant de fidélité… Ce ne doit pas être le paravent du pro- blème général. Le Toursky marche très bien, il réunit un public incroyable, 24% des abonnés du Gymnase le sont aussi au Toursky, il fait un travail formidable dans un quartier difficile... Mais je pense vraiment qu’il ne faut pas stigmatiser Le Merlan l’État ou concentrer le problème sur un Zibeline : Avez-vous subi, ces dernières années, des baisses de théâtre. subvention ? Quels sont selon vous les critères qui Nathalie Marteau : Elles stagnent depuis deux ans, et nous doivent décider de l’attribution de sub- avons subi une baisse importante du budget artistique prévu à ventions ? la réouverture du théâtre, après notre période de vagabondage. La question est de savoir ce qu’est un Quels sont selon vous les critères qui doivent décider de théâtre public. Un théâtre qui a à sa tête l’attribution de subventions ? Le Gyptis un directeur pendant 30 ou 40 ans sans Elles doivent être attribuées par rapport aux missions confiées : il Zibeline : Avez-vous subi, ces dernières années, des que les collectivités qui le subven- faut réactualiser la mission de service public, la légitimité du baisses de subvention ? tionnent soient décisionnaires dans son subventionnement est fondée là-dessus. Mais la nature du contrat Françoise Chatôt : Une suppression de toute subvention conseil d’administration, et sans que entre l’État et les théâtres est devenue très floue. Quelle place de l’État, et une stagnation des autres. Nous avons perdu personne ne puisse vérifier si la dépense doit-on accorder à la création ? Personne ne le sait, ou ne l’envi- 60000 euros en quelques années, dans un contexte où artistique est également répartie, s’il sage de la même façon, chacun défend sa peau alors qu’il est tout coûte plus cher, et où les intermittents en particulier achète les représentations, s’il y a un vrai question de bâtir une éthique commune. Nous sommes en grand se paupérisent terriblement… équilibre de gestion, n’est pas vraiment manque de vision, de réflexion sur la politique culturelle, sur Quels sont selon vous les critères qui doivent décider de un théâtre public. nos missions. l’attribution de subventions ? Y a-t-il d’autres critères ? Le nombre de Y a-t-il d’autres critères ? Le nombre de spectateurs ? Des critères La création avant tout ! Si un théâtre a une mission, c’est spectateurs ? La qualité des spectacles ? esthétiques ? de veiller à sa propre éclosion. Comment une culture Le nombre de spectateurs bien sûr. Le Au-delà du nombre de spectateurs c’est la qualité du lien mis en peut-elle exister si personne ne songe à réunir les condi- contribuable doit avoir accès à la culture. place qui importe. La politique tarifaire et d’ouverture, ce qu’on tions nécessaires à sa naissance puis à sa diffusion? Quant à la qualité de spectacles c’est si propose vraiment au public comme culture, au-delà du spec- Comment peut-on espérer qu’une région reste culturel- subjectif ! Les dés sont pipés à l’avance ; tacle. De même ce n’est pas le nombre de spectacles qu’on lement vivante si on n’accueille pas, un peu dignement, qui décide de ce qui est acceptable ? La accueille qui compte, mais la qualité de l’accueil, sa pertinence, les compagnies régionales ? notoriété ne doit pas être un indice de comment on les accompagne financièrement mais aussi dans L’autre critère est de travailler pour que le public se rejet, et le Toursky par exemple fait très leur diffusion, leur communication. renouvelle. Notre théâtre est rempli de scolaires qui y bien d’inviter Michel Bouquet… Quant aux critères esthétiques… je crois vraiment que c’est la viennent souvent pour la première fois. D’habitants du diversité qui compte sur un territoire. Je n’ai rien à dire au fond quartier aussi, de gens qui ne viennent qu’ici, et à qui si Richard Martin accueille Pietragalla, la pluralité doit être nous donnons de vrais textes à entendre. Pas du représentée, surtout lorsqu’elle a un public, et une qualité. divertissement ! ENTRETIENS RÉALISÉS PAR AGNES FRESCHEL

08 ÉVÉNEMENT LES RENCONTRES D’AVERROÈS Les Rencontres d’Averroès se placent cette année sous le signe de avec l’espace méditerranéen ? Retour sur son origine Naissance du théâtre La Méditerranée est un espace de civilisation la démocratie. Elle introduisit un changement fonda- portent (depuis Eschyle ?) un costume -un ancien où les conflits ont de la mémoire et les mental : le partage de la parole entre toutes les manteau court ou une tunique- et des cothurnes, vieilles haines semblent indépassables, enferrées classes sociales s’exprima au tribunal, à l’Assemblée des sortes de bottines qui les rehaussent. dans des répétitions sans issue. Est-ce la proximité, et au théâtre. Aller au théâtre devint indispensable liée aux mouvements des peuples, dans un horizon pour participer à la vie sociale et politique. Quant à La représentation aux ressources recherchées, qui rend les rancœurs la tragédie, elle replaça au premier plan les diffi- C’est aux fêtes dionysiaques qu’ont lieu les repré- si profondes, qui les poursuit sans relâche dans la cultés de l’homme grec à vivre les contradictions de sentations. Celles-ci se tenaient sur la grande place vengeance, la «vendetta» ? La nécessité de res- son présent. publique d’Athènes, l’Agora. On dressait des écha- serrer le groupe en rejetant l’autre explique que la faudages pour constituer le théâtre autour d’un fusion des peuples est un processus long, hésitant L’invention d’un genre espace dans lequel se tenait le chœur. Une estrade entre soumission et égalité. Le bassin oriental de Tragédie signifie «le chant du bouc» et renvoie à permettait à l’acteur de d’être mis en valeur. la Méditerranée est constitué d’Empires qui ne Dionysos. Ce nouveau genre se constitue progres- À la suite d’un effondrement des gradins, on amé- cessent de s’affronter. Mais insistons sur le drame sivement à partir du dithyrambe, chant en l’honneur nagea les pentes de l’Acropole pour organiser un fratricide que présente, dans le domaine de de ce dieu, étranger à la Grèce, sans doute venu véritable théâtre. Le monument prend alors progres- l’épopée et de l’imaginaire, l’Iliade. d’Asie, symbole de l’excès, de la nature sauvage. sivement sa forme achevée : l’espace quadrangulaire Entouré de son cortège de Bacchantes, il entraine s’arrondit pour former un cercle, l’orchestra. Le chœur Le partage de la parole la troupe dans une fête marquée du sceau de l’ivresse, entrait par des passages sur les côtés, les parodoï, Ce conflit fait le constat d’une rivalité haineuse, de la débauche et de la danse. Pour se soustraire tandis que la skènè, l’estrade d’origine pour l’acteur, d’outrances qui hérissent le monde divin, et, fina- aux excès de la transe destructrice on célébra un était complétée d’un bâtiment en bois (une façade) lement, d’un ensauvagement lié autant à la folie culte : le rite aboutissait à une régulation du sacré. et d’une avancée (le proskénion). Les gradins for- des hommes qu’à la fureur des dieux. Il permet Le dithyrambe honora le dieu par le chant choral et mèrent un demi-cercle parcouru d’allées. d’entrer dans une autre dimension du tragique : sa la danse. Il serait né à Corinthe au VIIe siècle. représentation. Rapporter les exploits et les mal- La forme évolua. Progressivement, le chef de chœur, Un théâtre civique heurs, voilà bien un moyen de prévenir des excès ! le coryphée, se serait lancé dans des improvisations, La cité joue un rôle fondamental dans l’activité À travers les productions intellectuelles, les Grecs devenant le premier acteur (le protagoniste). C’est théâtrale. La fête des Grandes dionysies correspond comme les autres peuples traçaient les contours de Thespis qui aurait ainsi inventé la tragédie. au moment où les alliés d’Athènes viennent apporter leur civilisation mais aussi de leur univers poli- Avec le temps la structure des pièces s’établit : une leur tribut à la cité. Les auteurs, eux, se présentent tique. Mais ils firent alors ce qu’aucun autre peuple entrée du chœur en chantant (un récitatif) accom- à un magistrat et lui soumettent leur texte. Ce n’avait fait : ils inventèrent le théâtre pour mettre pagné d’un aulète (joueur d’aulos, une sorte de dernier en choisit trois, ce qui est bel et bien une en scène toutes ces productions. hautbois) ; ensuite une alternance d’intervention censure indirecte. Ensuite on désigne un chorège En cette fin de VIe siècle, la société grecque était des acteurs (trois au maximum) et du chœur qui, (un citoyen riche) qui, affecté à un auteur, est chargé parcourue de tensions sociales très fortes entre guidé par son chef, le coryphée, entame des chants de financer la représentation : il paye le chœur, les paysans et riches propriétaires. Après la Monarchie, lyriques. Des variantes interviennent : prologue d’ou- acteurs, les costumes… l’Aristocratie incapable de s’autoréguler confia cette verture, dialogues lyriques entre le chœur et les Les représentations effectuées -en continuité !-, tâche à la tyrannie. L’essai ne fut pas concluant : la personnages. Les acteurs sont des hommes qui, un jury impartial de citoyens tirés au sort désigne réforme du système poli- progressivement, sont devenus des professionnels. le vainqueur du concours tragique. Les récompenses tique déboucha alors Ils jouent derrière un masque, percé d’yeux et d’une sont honorifiques et sur un nouveau sys- bouche, qui indique la nature de leur person- financières. tème, à Athènes : nage et sont coiffés d’une perruque. Ils Théâtre de Dionysos sur l’acropole © Zsolt Zatrok Dr./stock.Xchng Zatrok © Zsolt l’acropole sur Dionysos de Théâtre

09 la Tragédie. Née en Grèce, a-t-elle toujours un lien spécifique

Puis l’Assemblée se réunit dans le treuse prise de Milet par les Perses. tissage civique. tragique pose les problèmes politiques théâtre pour faire le bilan : elle Mieux valait traiter indirectement le D’autre part, l’accent mis sur le monde dans un cadre nouveau. Toute tragédie, sanctionne ou adoube les magis- présent. religieux permet de souder la commu- événement inexorable et paroxystique, trats, les juges et les chorèges. nauté : le héros apparaît comme une impose d’esquisser une issue à la crise, Dans cet univers, les dieux ne sont Un théâtre politique victime expiatoire, le pharmakos, dont une solution face à un problème jamais très loin. On n’entame pas une Le théâtre a pu mettre l’accent sur les l’expulsion permet de retrouver la pu- apparemment inextricable. Et néces- représentation sans un sacrifice pour valeurs démocratiques, mais il souli- reté originelle. site, pour s’en extirper, de changer de Dionysos sur l’autel du théâtre. Sa gne surtout au travers des intrigues Dans l’ensemble, le théâtre est l’abou- logique. statue, comme la couronne de lierre que le héros ne peut trouver de solu- tissement d’une révolution politique, RENÉ DIAZ remise au vainqueur, manifestent sa tion convenable au drame qu’il vit : la la démocratie. Dans Antigone de présence. Les puissances divines sont solution appartient en fait à la col- Sophocle deux conceptions de la loi aussi d’omniprésents sujets dans les lectivité, à la cité et à ses nouvelles s’affrontent: une transcendante, in- représentations. valeurs. D’ailleurs le héros tragique flexible -celle du roi- et une privée Les auteurs sont nombreux mais trois est l’acteur face au chœur qui expri- -celle d’Antigone qui veut ensevelir figures seulement ressortent vraiment me les sentiments des citoyens. Il n’est son frère malgré l’interdit royal. Il y a de la période classique : Eschyle (526- pas un archétype imitable mais la là, une vraie réflexion sur la respon- 456) ; Sophocle (496-406) ; Euripide manifestation d’un problème. sabilité humaine des actes dans un (484-406). Leurs compositions repren- Au plan juridique, il hésite entre la cadre politique nouveau. nent les trois grands cycles mythiques: soumission à la cité et celle due aux C’est parce qu’elles possèdent une la guerre de Troie et le sort des Atrides dieux. La solution au problème n’existe dimension politique que la cité (Iphigénie, Oreste, Electre…) ; Thèbes pas pour le héros mais elle apparaît sollicite la production des œuvres et les Labdacides (Œdipe, le Sphinx, au spectateur : le citoyen peut sortir littéraires. Elle paye même l’entrée Antigone…) ; Héraclès et sa descen- ainsi d’un vieux monde juridique tra- pour les plus pauvres (caisse du dance. Les auteurs évitent l’actualité: ditionnel pour se soumettre à la loi théorique). Les citoyens, eux, sont Phyrnicos dut payer une très lourde de la cité. De ce fait la tragédie est profondément impliqués comme cho-

amende pour avoir évoqué la désas- pour le citoyen une école d’appren- reutes ou chorèges. Ainsi le théâtre Savaton © Jean Museum British Dionysos, de Buste Au deuxième temps d’Averroès Le cœur des nov de 10 h à 12h, avec Jean-Christo- turque du saxophoniste Ilhan Ersahin… les générations d’immigrés, les femmes, Rencontres approche ! phe Attias, spécialiste de la pensée Outre ces grands rendez-vous, les ren- la Mémoire, la Terre. Proposés conjoin- Les trois tables rondes, qui réunissent juive médiévale, Michel Guérin, philo- contres proposent également le 26 tement par l’INA et le Centre chaque année près de 4000 person- sophe, et Mahmoud Hussein, deux nov de 17h à 20h un rendez-vous Méditerranéen de la Communication nes, auront lieu cette année pendant philosophes spécialistes du Coran). La autour de Bruno Etienne à l’Hôtel de Audiovisuelle, il donne l’occasion de la fête de l’Aïd. Simple coïncidence : troisième table ronde sera historique, Région (voir p 73). L’exposition photo- «penser la méditerranée en images». rarement les problématiques abordées et contemporaine : elle s’interrogera sur graphique de Pierre Bourdieu se poursuit Un autre rapport à l’histoire, qui joue auront été plus éloignées a priori des Les guerres et le terrorisme, se deman- au Mucem jusqu’au 6 déc (voir p 11). avec les archives, des films plus mondes musulmans. Moins sociolo- dant s’ils représentent en Méditerranée Une programmation très intéressante anciens et des créations projetées en giques ou religieuses, elles ne sont une résurgence, une forme nouvelle, une de 42 documentaires est proposée à exclusivité. pas pour autant plus littéraires : les survivance de la tragédie ancienne (le l’Espaceculture (entrée libre) jusqu’au A.F. Figures du tragique commenceront 28 nov de 14h30 à 16h30, avec Sté- 28 nov : plusieurs cycles sur les guerres, par s’interroger sur la Naissance de la phane Audoin-Rouzeau, historien de Tragédie, à travers l’histoire littéraire, la Premier guerre mondiale, Giulano Ilhan Ersahin de Sophocle à Racine, et à la lumière Da Empoli, sociologue et directeur de et Erik Truffaz de l’opposition nietzschéenne entre la revue italienne Zero, Farhad © X-D.R. apollinien et dionysiaque (le 27 nov de Khoskhkavar, sociologue spécialiste 14h30 à 16h30, avec Barbara Cassin, de l’Iran). philosophe et philologue, Vassilis Le soir du 28 nov à 20h30, un grand Papavassiliou, metteur en scène, Takis concert, au Dock des suds cette année: Théodoropoulos, romancier). Plus phi- dans le cadre de la saison turque en losophique encore, la deuxième table France, Istanbul Sessions est en ronde s’interrogera sur Dieu et le tournée, et les Rencontres en profi- tragique, et plus précisément comment tent pour proposer un concert-création les trois monothéismes pallient le avec le trompettiste Erik Truffaz. Son tragique, réfutent son irrémédiable en jazz cool mâtiné d’électronique ren- y opposant la transcendance (le 28 contre donc ici la musique kurde et 10 ÉVÉNEMENT LES RENCONTRES D’AVERROÈS | L’AÏD DANS LA CITÉ

La Méditerranée vit-elle encore à un âge tragique ? Quelles sont les conditions de l’éclosion du conflit tragique ? Tragidéicide ! «Les dieux sont morts. Oui, mais ils sont morts de rire en entendant l’un d’eux dire qu’il était le seul.» C’est par un immense éclat de rire que Nietzsche annonce dans Ainsi parlait Zarathoustra la fin de la tragédie. Car la condition de la situation tragique est bien son amoralité. C’est-à-dire qu’elle doit pour exister être déroulée à l’aune d’un regard qui ne porte aucun jugement, qui n’est défenseur d’aucune valeur. S’il y a un dieu assez prétentieux pour se croire le seul, il ne peut supporter le tragique, la vie comme seule puissance créatrice sans rien au- dessus d’elle pour la doubler. En effet le héros tragique supporte la surabondance existentielle sans se référer ou se délester sur le ciel. Pour que la situation tragique soit possible, les dieux ne doivent pas résoudre les conflits, mais y assister : «Dieu doit quitter la scène, mais rester néanmoins spectateur… le drame tragique est un jeu, un jeu de l’homme et du destin, un jeu dont dieu est La Mort de Socrate, Jacques-Louis David, 1787, Metropolitan Museum of Art le spectateur» (Lukacs, l’âme et les formes). Les dieux doivent voir mais ils ne peuvent ni résoudre serait née la tragédie shakespearienne. C’est ce Conclusion rapide le conflit tragique, ni être de force à balayer les qu’affirmait Camus dans une conférence sur la Socrate est alors, comme le sera Kant, «le plus grand arguments, les désirs, les passions et les raisons tragédie. Quant à la tragédie racinienne elle repose difforme des estropiés de l’intellect qu’il y ait jamais des humains. sur une réflexion janséniste sur la liberté et la eu !» (Si si, il l’a dit : Le crépuscule des idoles, «le Grâce qui aboutira d’ailleurs, une fois Racine problème de Socrate», 8,9 ; «ce qui manque aux La liberté humaine définitivement converti, à son silence littéraire. Allemands», 7). La représentation est donc une des conditions du Et compte tenu des débordements factuels de mon tragique : une situation aussi terrifiante soit-elle ne Le triomphe de Dieu camarade historien dans les pages précédentes je peut être tragique qu’à la condition que ceux qui la En fait il n’y a eu que deux périodes très resserrées n’ai pas la place suffisante pour m’expliquer de souffrent la vivent comme une comparution devant qui ont permis la tragédie : la période Eschyle- cette évidente conclusion sur Socrate, Kant, Dieu et un tribunal divin. Mais cette comparution-repré- Euripide et Shakespeare-Racine pendant lesquelles la liberté humaine, et ses implications actuelles sentation n’est pas l’unique ingrédient : il faut s’est établie l’alchimie particulière entre le divin et dans le monde méditerranéen. Remarquez, les pouvoir introduire la liberté humaine dans l’ordre l’humain : «entre les deux 2000 ans de mystère Rencontres d’Averroès sont là pour ça. Ce qui ne du cosmos pour que la tragédie ait lieu. chrétien». m’empêchera pas de clamer : À bas dieu et le Pour les Grecs l’humain et le divin se côtoient dans Et c’est ce mystère chrétien qui est en germe dans marché, et vive la tragédie ! un équilibre précaire : il n’y a pas de dieu jaloux qui les solutions socratiques et dialectiques qui mettent RÉGIS VLACHOS requiert un amour exclusif. Dans Iphigénie à Aulis un terme au conflit tragique. Pour Nietzsche, dans le sacrifice est fait pour Artémis ; ce n’est pas une l’œuvre d’art comme dans la morale bourgeoise et subordination d’amour mais un commerce équitable chrétienne, le dionysiaque s’est endormi, au profit entre le profane et le sacré qu’Euripide met en d’un apollinisme brillant pour des idées et chimères scène. Et il suffit d’une simple poignée de terre qui détachent l’homme de la vie. Car avec Socrate d’Antigone sur son frère mort pour que soit établi entre le mortel et l’immortel la relation n’est plus le même commerce avec Hadès frustré qu’on ne lui d’hostilité ni de conflit : le mortel est ce que l’on ait pas livré Polynice. perçoit, c’est-à-dire la face visible d’une réalité plus De la même façon, Shakespeare met en scène la vaste, l’intelligible. Plus de relation tragique, longue tragédie des rois d’Angleterre alors que insoluble, mais des correspondances : le visible prend fin la crise de la Réforme qui a affirmé l’auto- désigne et signifie une autre réalité, il est l’image rité de la personne morale et la toute-puissance de et comme le mythe de l’intelligible ; à la terreur sa volonté autonome ; c’est de cet équilibre entre sacrée de la vérité est substitué l’exercice toujours la liberté de l’homme et l’autorité religieuse que inachevé de la recherche dialectique. 11

Retour sur ses enjeux Le tragique à l’œuvre Comme chaque année les tables rondes sont précédées de manifestations littéraires et artistiques autour de la problématique annuelle Sous le signe d’Averroès a commencé le 31 oct au Centre expliqua son rapport au tragique dans le théâtre : pour Pierre Carles, c’est en photographiant international de Poésie de Marseille par l’absence du lui, «du Ve siècle à maintenant, il est toujours question du l’Algérie que Bourdieu fit ses armes. poète palestinien Ghassan Zaqtan, qui s’est vu refuser vivre ensemble et de vivre le monde». Mais quel monde ? Les 150 clichés exposés sont d’une son visa… Ses Suppléments au passé, recueil traduit de force rare. En «photographe de cir- l’arabe édité par Le refuge (éditions du CiPM), furent lus Historique constance» et non en esthète, il en intégralité par son traducteur Jean-Charles Dépaule D’autres images d’oppression et de fin d’un monde, au s’arrête sur du signifiant. Les dé- et l’on put, grâce à un film projeté, entendre la magnifique MuCEM. Intéressantes à double titre : parce qu’on y dé- placés de Kabylie parqués dans des langue du poète, si balancée et riche en phonèmes inouïs couvre le visage de l’Algérie durant la guerre -de 1958 à baraques parallèles où la cour inté- dans nos langues européennes… La traduction française 1961, juste avant, juste après ; et parce qu’on y apprend rieure, si importante dans ces familles, permet néanmoins d’appréhender cette poésie très beaucoup des motivations de Pierre Bourdieu, jeune n’existe plus ; les toits crevés des mai- imagée, évoquant une enfance, des gestes simples et des professeur de philosophie envoyé en poste à Alger, et qui sons; les rues d’Alger où se côtoient êtres disparus : «Seul le jasmin a poursuivi sa montée s’y transforma en sociologue, jetant là les fondements de femmes voilées et européennes en lucide vers la terrasse du toit». Et tout le poids d’une son œuvre et de sa vie. mini jupes ; les panneaux publicitaires emprise qu’on sent là, quand «Un ennemi descend des La photographie fut pour lui «une façon d’essayer d’affronter qui incitent à fumer français ; une collines» et que «Du fait qu’il n’est pas «nous» et pas «ici» le choc d’une réalité écrasante». De faire œuvre politique Madone voilée ; les symboles de commence la mort». sans se laisser aller à l’humanitarisme de ses collègues l’OAS, ou du GPRA, dessinés sur les bienveillants, sans «fausse sollicitude primitiviste». Si «la murs ; les jeunes éperdus devant les Inextricable sociologie est un sport de combat», titre du portrait de kiosques vendant des comics améri- Invité par le Théâtre des Salins, Robin Renucci est venu cains ; partout, les pauvres, la misère, lire des fragments de textes sur le tragique, choisis par Blida, photo Pierre Bourdieu - Fondation Pierre Bourdieu, Saint Gall, Suisse dans les villes, au fond de la casbah

Thierry Fabre, Michel Guérin, philosophe, et Didier Pralon, ronde et blanche, le long des avenues philologue, amenés à en débattre par la suite. Au menu, napoléoniennes, au cœur des villages ; Antigone de Sophocle, Le monde comme volonté et comme et partout aussi ce regard qui se re- représentation de Schopenhauer, Ainsi parlait Zarathoustra fuse au face à face, les hommes et Le gai savoir de Nietzsche, l’Etranger de Camus, Un roi tournant le dos, les femmes se sans divertissement de Giono, Roberto Zucco de Koltès et cachant sous le voile. Le soleil ni la mort ne peuvent se regarder en face de DOMINIQUE MARÇON ET AGNÈS FRESCHEL Mouawad. Des choix judicieux pour essayer de comprendre le tragique, et appréhender sa réalité aujourd’hui. Images d’Algérie De son origine liée au culte dionysiaque, jusqu’à l’ex- Pierre Bourdieu, un photographe pression du «réel, selon Michel Guérin, qui ne peut s’exprimer de circonstance par la raison» ou d’un état «du désordre du monde et de jusqu’au 6 déc l’expression de la contemplation de ce désordre» pour Didier MuCEM Pralon, le tragique intervient, aujourd’hui encore, sous des 04 96 13 80 90 formes différentes, «tramé, pour Guérin, dans la texture de www.rencontresaverroes.net la conscience moderne». S’appuyant sur Hegel pour dire que la situation tragique est insoluble, le philosophe parle du conflit du Proche Orient comme «du tragique par excellence, inextricable». Pour terminer, Robin Renucci

Venez fêter l’Aïd Depuis six éditions la manifestation L’Aïd dans la Cité, organisée par l’Union directrice, Nassera Benmarnia, rêve d’en finir avec l’image du mouton égorgé, des Familles Musulmanes, fait un travail remarquable pour ouvrir les cultures pour faire connaître les arts vernaculaires du bassin méditerranéen à tous. Aux musulmanes présentes à Marseille aux autres, dans un contexte non religieux. 200000 musulmans marseillais Comoriens, Maghébins ou Africains, et aux non Sans cérémonie, sans prosélytisme, dans un vrai esprit de fête et de partage, musulmans, qui sont les bienvenus ! l’UFM invite à venir découvrir les Derviches tourneurs turcs au Gymnase, du A.F. cinéma algérien au CRDP ou aux Variétés, de la danse traditionnelle algérienne L’Aid dans la Cité à L’Espace Julien, ouvre des ateliers de calligraphie… et organise la grande du 20 au 26 nov 1430/2009 Fête de la Famille et du Partage au Dôme. Ouverte à tous, L’Aïd dans la Cité 04 91 91 99 35 est une occasion d’affirmer qu’il existe une culture musulmane française : la WWW.UFM13.ORG 12 ÉVÉNEMENT RENCONTRE AVEC RENAUD MARIE LEBLANC Les élèves d’Etudes Théâtrales de la classe d’Hypokhâgne du lycée Thiers ont rencontré Renaud Marie Leblanc en septembre, avant qu’il ne commence ses répétitions de Phèdre. Il leur a ouvert son monde avec un dynamisme entraînant

Comment envisagez-vous de traiter les personnages La tragédie classique plus secondaires, autres que Phèdre et Hippolyte ? Je ne crois pas que Phèdre-Hippolyte soit le couple essentiel. S’il fallait trancher, je dirais que Thésée est aujourd’hui plus important qu’Hippolyte, mais tous les personnages n’existent que par rapport aux autres. Même Panope a un rôle qui compte, celui d’être la Les étudiants : Jean-Louis Barrault a écrit : Phèdre comment est ressentie la versification aujourd’hui. messagère du destin. Quant à Oenone, son rôle est c’est «une véritable bibliothèque composée de Est-ce que Racine en vers, ça marche toujours ? Si le énorme. Pour moi elle n’est pas noire. Oenone fait le témoignages, de dissertations, de critiques, de théâtre n’est beau que littérairement, laissons-le mal en voulant le bien -c’est fréquent ! louanges, de jugements, d’opinions…» dormir dans les bibliothèques théâtrales. Mettre en Chaque personnage atteint un paroxysme mental et Renaud Marie Leblanc : La masse de ce qui a été scène c’est entrer dans un processus de traduction. physique, aux prises avec une pulsion première et écrit sur Racine est une chose à laquelle on se On dit que Racine faisait d’abord le plan de ses immédiate. Racine y avoue son goût pour la violence, confronte forcément. Cela rajoute une réelle tragédies, qu’il les rédigeait en prose puis en vers. En le sentiment d’une perdition mentale et physique née difficulté, il faut éviter de se laisser paralyser. Phèdre somme les vers de Racine seraient déjà une du besoin de posséder l’autre, et soi-même au reste une pièce, et nous faisons du théâtre. Il faut traduction de sa prose. travers. passer de la théorie à la pratique : la réflexion peut Lorsqu’il faut choisir entre le son et le sens, entre Ainsi, mettre en scène Racine après Lars Nøren être aussi l’ennemi du «faire». l’alexandrin et son contenu sémantique… s’inscrit dans une continuité. Cependant on ne part pas monter Racine la fleur au … je choisis le sens, évidemment. Le vers c’est du C’est vrai que je retrouve dans Phèdre la soudaineté fusil ! J’ai beaucoup lu, des vies de Racine, des livres musée. L’important c’est raconter l’histoire et et la violence des rapports humains chez Nøren. sur la tragédie, Barthes, bien sûr, Francesco Orlando, traverser ce qui habite les personnages. Le moule du C’est cette modernité qui me touche. philosophe italien qui fait une lecture freudienne de vers est un moule imposé. Je suis contre la pause ENTRETIEN RÉALISÉ PAR LES ÉLÈVES D’ÉTUDES THÉÂTRALES Phèdre, mais aussi des éditions scolaires ou un blog systématique à l’hémistiche, pour l’enjambement… D’HYPOKHÂGNE DU LYCÉE THIERS, ENCADRÉ PAR LEUR sur la querelle entre critique psychanalytique et mais intransigeant sur la prononciation de toutes les PROFESSEUR ANNE-MARIE BONNABEL critique structuraliste… Toute cette masse donne syllabes et sur la question du e muet. Pas de couac ! l’impression d’un texte mythique, au-delà du théâtre. On s’empare de l’alexandrin racinien pour le faire Mais après, on entre dans les énigmes et on les sonner non pour le détruire. Mais ce qu’on joue ce Phèdre de Racine résout avec des moyens techniques. L’acteur est là, sont les affects. Le Sémaphore, Port-de-Bouc il interroge, demande ce qu’il fait à tel endroit, et me Alors pourquoi Racine ? Il y a bien d’autres Phèdre Le 27 nov ramène à des choses concrètes. On ne peut pas faire plus contemporaines… 04 42 06 39 09 du théâtre sans un peu d’inconscience, sans oublier Racine m’intéresse parce qu’il résiste, qu’il présente www.theatre-semaphore-portdebouc.com ce qui nous paralyserait. des problèmes formels de réalisation. L’Amour de La Criée Vous commencez à répéter la semaine prochaine. Phèdre de Sarah Kane serait d’un accès plus facile, du 9 au 19 déc Comment travaillez-vous avec les acteurs ? l’aspect contemporain, «trash» de la pièce est 04 91 54 70 54 Je n’ai qu’un texte annoté, je n’écris plus mot à mot intéressant, mais je veux savoir pourquoi la pièce de www.theatre-lacriee.com la mise en scène. En revanche, j’ai travaillé avec le Racine résiste. scénographe et le créateur lumières. Les acteurs ont besoin d’un espace déterminé pour travailler. Ce n’est pas pareil s’il y a un mur ou pas de mur, une chaise ou pas de chaise. L’espace dessine la Œuvre incontournable dans l’histoire du théâtre français, Phèdre de Racine dépeint son amour contrainte de l’acteur. démesurément passionné et incestueux pour Hippolyte, fils de son époux Thésée. La pièce connaît ces Pour le reste, je me sens libre de ce qui va advenir en dernières années un certain essoufflement : peu de Phèdre depuis la mise en scène de Patrice Chéreau répétition. Les acteurs vont faire vivre l’espace autant en 2003. Le metteur en scène Renaud Marie Leblanc, dont la compagnie Didascalies and Co est installée que je l’ai imaginé de l’intérieur. Parfois, l’acteur me à Marseille, a relevé le défi de faire aujourd’hui du théâtre avec une pièce trop souvent perçue comme un fait entendre quelque chose du texte auquel je n’avais monument littéraire du passé. À nous d’apprécier cette tragédie à la confluence d’un classicisme rigide pas pensé ; j’entends précisément ce que la lecture et d’une modernité pétillante. À l’image de son metteur en scène! MELINA ne m’avait pas permis de percevoir. En somme, pendant les répétitions, il faut laisser advenir. Phèdre résonne comme une œuvre imposante, un classique, un intouchable, un mythe. Cela pourrait en Avez-vous fait des coupes dans le texte ? effrayer plus d’un ; pourtant, Renaud Marie Leblanc s’y attelle avec audace : après avoir réalisé sa première Non, on joue l’intégralité du texte. Je ne coupe jamais mise en scène avec Mélite de Corneille et monté beaucoup de théâtre contemporain, il a choisi ce grand au préalable, cela n’a pas de sens, ce n’est que lors classique. Contradiction ? Certainement pas. Rapprocher les textes du spectateur du XXIe siècle est un défi des répétitions que je m’aperçois des difficultés que au cœur de son expérience, qui l’a conduit à mettre en scène Corneille comme Noëlle Renaude. Le XVIIe peuvent présenter certains endroits résistants, siècle n’est pas si loin nous rappelle Renaud Marie Leblanc, et si Phèdre semblait délaissée ces dernières opaques. années par les metteurs en scène, la voilà ressuscitée. MARIE Quel est votre parti pris de traitement du vers ? Quelle importance donnez-vous à sa musicalité «Ce qui m’y a fait venir, c’est que plus personne ne s’y colle» : voici comment il explique son désir de monter particulière ? Phèdre. C’est faire preuve de courage que de s’atteler à ce chef-d’œuvre que Jacques Morel qualifiait de On parle beaucoup de la musicalité de l’alexandrin, «monument tragique exemplaire», tant de fois expliqué, commenté, analysé, interprété, décrypté. Renaud mais pour moi toute parole proférée est musicale, la Marie Leblanc parviendra-t-il à poser sur cette tragédie un regard neuf et à nous guider dans des tréfonds prose tout autant que les vers. Il faut se demander encore insondés de l’amour furieux de Phèdre ? JULIE BIENNALE DE LA MÉMOIRE POPULAIRE ÉVÉNEMENT 13 Humaine, trop humaine ! Renaud Marie Leblanc revient au répertoire classique en mesurant son talent à la dernière pièce antique de Racine, et à un mythe théâtral : Phèdre, reine solaire et monstre amoureux du fils de son époux, Thésée Enfermée dans le cadre blanc d’un En effet l’interprétation déjoue les décor rendu aux dimensions d’une attentes en explorant tous les registres, chambre d’asile plutôt que d’une cité y compris celui de l’humour. La fré- antique, et incarnée avec énergie par nésie d’une Phèdre rajeunie par ses Roxanne Borgna, Phèdre décline les transgressions, la colère aveugle d’un signes de sa folie amoureuse (éblouis- Thésée au soir de sa vie comme de sements, remords, haine avec une son mythe, l’innocence orgueilleuse du grande hache, jalousie…), autour de jeune Hippolyte, s’incorporent dans la laquelle tous gravitent, tantôt pour langue à la fois familière et étrangère surenchérir, tantôt pour la mettre à de l’alexandrin, et l’expression brutale distance. de la passion est comme contenue par La mise en scène écarte ainsi les options une esthétique télégénique, aux cou- politiques, morales ou métaphysiques leurs électriques, à la fois aseptisée et de la pièce pour se concentrer sur la outrancière. Ainsi la tension propre au vitalité de ce désir cru, d’une humanité théâtre classique, qui enfermait les presque dure. Si cette approche élude excès de la passion dans une forme l’impersonnalité écrasante des dieux, policée et conventionnelle, se renouvel- © Marc Ginot qui fait la démesure et la contradiction le-t-elle de façon tout à fait surprenante Au théâtre des Treize Vents, interne des personnages tragiques, elle et paradoxale : dans les couleurs Montpellier, jusqu’au 21 novembre évite également le pathétique senti- chromo de notre propre modernité ! (04 67 99 25 00), puis à la Criée mental ou hystérique des approches AUDE FANLO et au Sémaphore, à Port-de-Bouc psychologisantes.

acte et une mémoire collective». La mémoire des associations de quartiers qui ont installé leur patri- Mémoire en partage moine sonore et visuel dans des boutiques restaurées par la Ville et des habitants qui ont prêté photographies personnelles et textes. Celle du photographe Seynois Jean Reverdito et du journaliste Jacques Winden- berger, dont le travail à La Seyne-sur-Mer, Toulon, La Ciotat s’est affiché sur les grilles du Parc de la Navale. Celle encore des documentaristes qui ont témoigné de la fermeture des chantiers, en pleine rénovation urbaine, et exploité parfois les rushs des magazines télé : il fut un temps où Thalassa et Saga- cités se préoccupaient des activités du port… Tous ont fait de ce patrimoine collectif, la mémoire, matière à réflexion contemporaine -sociologique, plastique ou politique- avec pour socle commun le travail et ses corollaires: la fracture sociale, la reconversion, les liens entre sphère familiale et sphère professionnelle, le bureau et son lot d’objets symboliques. Des Naufrage © Clorinde Durand thèmes récurrents dans les travaux de Suzanne La Seyne-sur-Mer, figure emblématique de l’histoire miques, et porte de nombreux projets culturels : Hetzel et Ian Simms, David Mozziconacci, Serge industrielle de la région comme La Ciotat, Port-de- Maison du patrimoine, Maison de l’image, Musée Le Squer, Alain Bernardini, France Dubois, Bouc et d’autres, s’est imposée d’elle-même comme d’histoire des chantiers… Pour écrire La Seyne autre- Clorinde Durand, Serge Lhermitte… lieu d’accueil de la 1re Biennale régionale de la ment, entre mémoire et à venir, la biennale a proposé MARIE GODFRIN-GUIDICELLI mémoire populaire, Rien n’est jamais pareil. un concentré d’arts visuels disséminé dans des Contrairement à la tonalité nostalgique de l’affiche, bâtiments ancien et contemporain que les Seynois La 1re Biennale régionale de la mémoire populaire, cette manifestation initiée par la Région Paca s’est ont (re)découvert à l’occasion : Bourse du travail, Rien n’est jamais pareil, s’est déroulée tournée vers l’avenir à travers la présence d’une ancienne Criée aux légumes, Dojo théâtre, centre du 10 au 25 oct jeune génération de plasticiens, photographes et Nelson Mandela à Berthe, théâtre Apollinaire, média- vidéastes. Paradoxal ? Justement non, car La Seyne- thèque du Clos Saint-Louis, école des Beaux-arts, sur-Mer doit aujourd’hui relever de nouveaux défis Parc de la Navale… Un parcours de quinze jours liés aux mutations industrielles et socio-écono- (beaucoup trop court !) qui «restituait une société en 14 THÉÂTRE ENTRETIEN AVEC C. MARNAS | THÉÂTRE NONO La table aux récits Catherine Marnas reprend à Briançon Mais pourquoi vouliez-vous rendre cet hommage à la et à la Friche son Banquet fabulateur. fable ? Parce que cela permet d’aborder différemment le Une pièce festive et conviviale où les problème de la culture. De savoir que ce qui nous histoires circulent à foison, de bouche constitue n’est pas notre fric, notre Rollex, mais notre en bouche, comme les seuls véritables imaginaire. Notre faculté d’inventer. C’est quelque mets de choix… Tout cela porté par sa chose que nous perdons très vite en ce moment, bande de comédiens, comme toujours l’admiration envers ceux qui inventent des histoires. exceptionnels. Aujourd’hui Koltès, qui a presque toujours vécu comme un marginal, serait considéré comme un looser. Zibeline : Comment est née cette idée d’un banquet Mais cette faculté d’inventer des histoires est aussi où l’on se nourrit de textes ? utilisée comme moyen d’oppression. Catherine Marnas : D’une carte blanche offerte par Oui. Nancy Huston aborde longuement le problème Annette Breuil (Directrice des Salins ndlr). C’est une du Story Telling, de ces fictions utilisées quotidien- forme qui laisse place aux coups de cœur, à l’idée de nement pour conditionner les soldats ou convaincre création collective : j’ai demandé aux acteurs d’amener les électeurs, influencer les consommateurs. Nous ce qu’ils avaient dans leurs «malles d’imaginaire». Le Banquet fabulateur © Pierre Grosbois avons choisi de laisser de côté cette partie-là de son Autour du texte de Nancy Huston, L’espèce fabula- essai : cela aurait été trop long, trop complexe, et trice, nous avons bâti un hommage à la fable, avec ce nous voulions une forme festive… que chacun a apporté : Feydeau, Hamlet, une comédie ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AGNES FRESCHEL belge, Nougaro… et Platonov. Pourquoi, puisque l’on n’y mange pas même si l’on y Le Banquet Fabulateur boit, se retrouve-t-on à table ? Du 19 au 21 nov La convivialité aujourd’hui passe presque exclusive- La Cadran, Briançon (05) ment par la gastronomie ! On voulait provoquer le 04 92 25 52 52 partage autour d’autre chose, d’intelligence, de Du 8 au 18 déc fables, tout en gardant ce dispositif amical, qui rap- proche des comédiens. Ils sont assis à table, on les Salle Seïta, La Friche voit prendre leur rôle après vous avoir servi à boire. 04 91 64 41 90 D’ailleurs, quand Franck Manzoni endosse Platonov, www.parnas.fr cela a quelque chose à voir avec la possession, avec le repas de Festen… Fraternels Fratellini On est heureux de retrouver enfin les NoNo à beau, exécuté par un couple amoureux et violent, qui le liant constant de l’ensemble, qui permet d’installer Marseille, pour une création en collaboration avec s’offre et se refuse, se cherche et se fuit ; un numéro une ambiance générale. Autour d’une mélodie à l’Académie Fratellini, mise en scène par Serge de jonglage général dans tous les sens avec assiettes l’accordéon, qui s’élève jusqu’au tango et redescend Noyelle du 12 au 14 nov à Marseille, puis du 19 nov et verres, impressionnant de précision ; du mât en ritournelle. Autour de la thématique simple de la au 12 déc à Paris. Un baiser, GoGo est composé de chinois, du cerceau, un mur, du tissu aérien (monté table qu’on installe, chaises, verres, assiettes. Autour numéros successifs de cirque parfaitement exécutés sur élastique, le numéro le moins réussi sans doute); du motif, plus inquiétant, de l’envahissement. Autour, par de jeunes artistes virtuoses, aux caractères bien du hip hop, des claquettes, des acrobaties… surtout, d’une communauté visible entre des artistes trempés : un duo de portés lents particulièrement Mais le plus étonnant dans ce Petit cabaret cirque est qui forment troupe et chœur, et font ensemble un spectacle fraternel. Un baiser, Gogo © Cordula Treml AGNES FRESCHEL

Les Nono nous offrent un autre spectacle dans la foulée : Serge Noyelle met en scène cinq de ses comédiens pour des Contes érotiques de Noël, écrits par sept écrivains autour de thématiques communes: la ville, le temps présent, l’érotisme et Noël. Il y en aura en revanche pour toutes les humeurs, caressantes, sauvages, amusées, cruelles ou tragiques. Mais rien pour les enfants !

Les Contes érotiques de Noël interdits aux enfants Théâtre NoNo, campagne Pastré Du 10 au 18 déc 04 91 75 64 59 www.theatre-nono.com CRIÉE | MASSALIA | BERNARDINES | GYPTIS | GYMNASE | TOURSKY THÉÂTRE 15 Sine die ? En l’état actuel de l’avancement des expertises amiante, la Criée espère pouvoir continuer à jouer en ses murs. Mais la programmation du Grand Théâtre reste pour l’heure aléatoire, et la Nuit des Rois est de toute façon repoussé… Seules quelques dates seront maintenues dans la petite Leblanc) pourront donner à voir leur travail cette année à salle. On se réjouit vraiment que Phèdre (Petit Théâtre, Marseille… Et après eux Xavier Marchand, Frédéric voir p 12 et 13) vienne voir le soleil pour la dernière fois Flamand, Hubert Colas… Quant au Hamlet Cabaret tous les soirs du 9 au 19 déc. Et que le Macbeth d’Heiner de Mathias Laghoff les spectateurs en sont d’ores et Muller mis en scène par Angela Konrad, prévu lui aussi déjà privés, et le Palais des glaces prévu également en dans le Petit Théâtre de la Criée, y voit surgir ses novembre est reporté sine die… sorcières et ses spectres du 2 au 6 déc : une des D’autres spectacles auront lieu, espérons-le, ces prochains missions majeures des Centres Dramatiques Nationaux jours. Ils viennent d’ailleurs pour s’installer dans la Grande est de (co)produire des compagnies de la région, Salle, si elle est praticable : Nathan le Sage, du 3 au 5 déc Macbeth © Christiane Robin conventionnées ou non. C’est pour cela, entre autres, (voir page 18), et Médée mis en scène par Laurent annuels de ce théâtre valent-ils moins que les 50 000 du qu’ils bénéficient de subventions importantes de l’État, Fréchuret du 8 au 11 déc… Jean-Louis Martinelli de- stade vélodrome frustrés de leur PSG-OM, ou a-t-on pour aider à la naissance de spectacles artistiquement vrait venir ensuite, puis Pippo Delbono. moins peur de leurs exactions ? Sans parler des deux ambitieux, comme sont ces trois productions. Espérons Les pouvoirs publics mesurent-ils bien l’impact qu’aurait techniciens malades, qui ont déposé plainte contre X que ces trois metteurs en scène résidant dans la région sur la vie culturelle de la région une deuxième saison annu- pour mise en danger de la santé d’autrui… (Jean-Louis Benoit, Angela Konrad, Renaud Marie lée peu ou prou à la Criée ? Les 65 000 spectateurs AGNES FRESCHEL Étrange Quintuplé Massalia accueille le Théâtre de la Mezzanine pour une Alain Béhar revient lui aussi aux Bernardines, avec une performance particulière : enfermés dans une installation pièce pour cinq hommes, écrite après une recherche dans le hall de la Cartonnerie les acteurs nous donnent dans un laboratoire marseillais de neurosciences. Une une vision du désastre à travers des meurtrières. On pour- pièce sur la conscience, masculine peut être, intime ra y apercevoir leur univers, une station service déglinguée sûrement. Dans la langue travaillée et poétique qui fait et maculée d’huile de vidange, de machines, d’une radio, la spécificité de son écriture scénique, il représente ici Obsédé d’un tank. Univers crépusculaire où les humains se com- un cerveau déployé et traversé d’influx divers, désirs, Les Trois Sœurs de Youri Pogrebnitchko sont en tournée en portent étrangement… pensées, fantasmes, sollicitations. France et en Suisse, et passent bien sûr par les Côte d’Azur Mô Bernardines. La collaboration entre Alain Fourneau et le Du 19 au 28 nov Du 16 au 19 déc metteur en scène russe n’est pas nouvelle. Tchékhov, La Friche Les Bernardines cette pièce surtout, est une obsession pour 04 95 04 95 70 04 91 24 30 40 Pogrebnitchko qui n’arrête pas de l’explorer, sondant le www.theatremassalia.com www.theatre-bernardines.org sentiment amoureux, rendant la relation toujours plus Mô © Mathieu Lorry-Dupuy actuelle et percutante, loin de la langueur. En russe surtitré, Cagien par une troupe de jeunes comédiens, avec deux musiciens, et de la chair. Le collectif IRMAR (Institut des Recherches Menant À Les Trois Sœurs Rien) présente une création intitulée Du caractère Du 10 au 13 déc relatif de la présence des choses. Tout un programme! Les Bernardines Ils se placent dans la lignée de la musique expérimen- 04 91 24 30 40 tale, de l’installation, du happening et de la performance. www.theatre-bernardines.org C’est aussi sous-titré : un événement qui doit beaucoup à John Cage. Qui peut être un fort bon parrain. Ou pas ! Du caractère relatif de la présence des choses Les 19 et 20 nov Classiques Montévidéo 04 91 37 97 35 Michel Bouquet est l’hypocondriaque Argan dans la mise www.montevideo-marseille.com en scène de Georges Werler du Malade imaginaire. Entouré d’une troupe de comédiens qui tous excellent Comique dans le registre de la comédie, dont la formidable Juliette Romantique Un solo de Paul Dewandre qui fait du bruit et polémique, Carré qui joue une Toinette insoumise à souhait, Michel Françoise Chatôt recommence ses Caprices ! Après le après la sortie d’un hyper best seller de John Gray (40 Bouquet donne à voir et à entendre une interprétation succès de la création de son Musset, dans les murs du millions d’exemplaires vendus), que d’aucuns ont qualifié impressionnante. Gyptis et en tournée, il revient pour quelques jours dans de sexiste. Il épingle en fait les comportements caricatu- Antoine Bourseiller met en scène Lorenzaccio dans une les murs du théâtre marseillais. Écouter Musset est ralement opposés des hommes et des femmes dans le forme épurée, une adaptation rigoureuse et énergique toujours un plaisir extrême, le découvrir un privilège, jeu social de la séduction et la vie de couple. En tant que du chef-d’œuvre de Musset, avec Alexandre Ruby dans surtout pour les adolescents à la découverte des pre- constat d’un état de fait, le spectacle peut être drôle, si le rôle-titre. miers émois amoureux. Ne les en privez pas, d’autant on ne le prend pas pour la description d’un état naturel, Le Malade imaginaire qu’Octave (Guillaume Clausse) brûle ici la scène… mais pour la caricature de comportement trop souvent Du 19 au 21 nov Les Caprices de Marianne répandus… Lorenzaccio Du 1er au 5 déc Les hommes viennent de Mars, les femmes de Vénus Les 11 et 12 déc Le Gyptis du 24 au 28 nov Théâtre Toursky 04 91 11 00 91 Le Gymnase 04 91 02 58 35 www.theatregyptis.com www.sudconcerts.net www.toursky.org 16 THÉÂTRE AVIGNON | MARTIGUES D’île en île Le Conte d’hiver de Shakespeare est une œuvre composite et étonnante, qui fait passer successivement d’un ton de tragédie digne du Roi Lear, à une pastorale aux tons pastel, puis à une grande comédie type La nuit des rois avec reconnaissances successives, et dénouement totalement merveilleux grâce à une statue qui s’anime. Classifiée en «Romance tardive» par les spécialistes de Shakespeare qui ne savaient comment les nommer, ces pièces disparates ont un charme fou, juvénile, et surprennent par leur liberté de ton. Le Conte d’hiver est l’histoire d’un mari jaloux, du désir inexprimé, d’une amitié fraternelle qui se brise, d’une enfant cachée… péripéties qui Rouge decanté © Pan Sok Le conte d'hiver © Mario Del Curto s’étalent sur 17 ans, trois îles, le monde. le thème qu’il aborde, sa plongée pro- actuel, a su ici souligner cette force Shakespearien en diable, créé par Lilo gressive dans un inconscient compulsif avec des effets discrets, une Rouge Décanté Baur à Lausanne, et abordable dès qui se révèle. Il s’agit d’un spectacle composition de l’espace par lignes, Le 27 nov l’âge où l’on tient durant 2h30 de réellement bouleversant. Parce que le transparences et projections qui théâtre magique. texte de Jeroen Browers, autobio- restitue quelque chose de la lecture et Le Conte d’hiver Rouge Décanté est, en revanche, graphique -il raconte cinquante ans de son morcellement. Parce que Dirk Les 1er et 2 déc expressément réservé aux adultes. Par après son enfance dans un camp japo- Roofthooft, seul en scène, incarne Scène Nationale des Salins, Martigues nais en Indonésie durant la seconde avec une émotion sans pudeur, mais 04 42 49 00 00 guerre mondiale- est magnifiquement sans hystérie, cet homme brisé qui se www.theatre-des-salins.fr construit, par étapes, vers une révé- livre pour mieux se délivrer. lation intime. Parce que Guy Cassiers, Rien n’y manque, que votre regard. un des plus grands metteurs en scène AGNES FRESCHEL

personnalité singulière du Che, d’où il Désaliénation ressort qu’il n’est «ni une icône, ni un monstre assoiffé de sang» note Gélas. Des dialogues rapides et concis, loin de tout prosélytisme, qui s’ancrent dans l’imaginaire pour mieux fouiller l’Histoire, et qui reposent sur des préoccupations chères à l’auteur Argentin, celles qui lient violence et pouvoir, sur le plan politique mais aussi privé. Le Che est joué par Olivier Sitruk, «une évidence» pour Gérard Gélas, tandis que le personnage de Cabreira est tenu par Jacques Frantz ; et pour compléter la distribution, Laure Vallès, Guillaume Lanson et Aloïs Bebachir.

Ernesto Che Guevara, la derniere nuit © Manuel Pascual DOMINIQUE MARÇON Parce qu’il s’irritait depuis longtemps de «voir Che réduit à une image pour tee-shit», Gérard Gélas a décidé de le faire Ernesto Che Guevara, la dernière nuit parler. Il met en scène le texte de José Pablo Feinmann, mes Gérard Gélas Cuestiones con Ernesto Che Guevara dont Marion Loran Du 20 au 29 nov assure la traduction et l’adaptation. Théâtre du Chêne Noir Retour donc en octobre 1967, quelques heures avant 04 90 86 58 11 l’exécution de Che Guevara, dans la petite école de la www.chenenoir.fr Higuera en Bolivie. Là vont se rencontrer le révolutionnaire et Andrès Cabreira, un journaliste dont le projet est de À noter : raconter l’arrestation et l’exécution du Che. Une rencontre une représentation exceptionnelle de Guantanamour imaginaire bien sûr, mais qui va petit à petit dévoiler la clôt sept ans de tournée, le 10 déc. AU PROGRAMME THÉÂTRE 17 Réalité Curiosité Stand up Nouara Naghouche est une pure AA, entendez par- La compagnie La Sentinelle s’empare de l’univers Guillaume Gallienne a écrit son histoire. Celle d’un là Alsacienne Algérienne. Le one woman show de burlesque et satirique de l’écrivain, poète et journaliste garçon dans une fratrie où il avait un drôle de rôle. Et cette comédienne énergique, intitulé Sacrifices, est italien Stefano Benni en adaptant Le Bar sous la mer. bien sûr cette histoire il la joue, seul en scène, endos- co-écrit et mis en scène par Pierre Guillois, directeur Mise en scène par Karine Poitevin et Ludovic Laroche, sant tous les personnages, mettant à l’œuvre son talent du Théâtre du Peuple à Bussanq. Avec humour et la pièce rend compte de toutes les histoires contées d’acteur surdoué et survolté de rire. Sous la direction humanité elle dresse un portrait sans concession du par les curieux clients qui peuplent ce bar sous la mer, de Claude Mathieu, sa marraine de théâtre. monde qu’elle côtoie, avec une tendresse particulière et dans lequel atterrit une jeune femme qui essayait Les garçons et Guillaume, à table pour les femmes, ses «sœurs» aux existences de simplement de sauver de la noyade un homme qui du 1er au 5 déc martyres, entre voile et mariages forcés. Et puis les s’enfonçait dans l’eau… Jeu de Paume, Aix autres, dont elle campe des portraits bigarrés, Entre pastiche et parodie, les personnages prennent vie 0 820 000 422 absurdes et drôles qui «dévoilent les mécanismes du au cours de récits extravagants, désopilants, surréalistes! www.lestheatres.net quotidien» qu’elle met en lumière. Le Bar sous la mer le 8 déc Sacrifices Le 8 déc Scène Nationale des Salins, Martigues Le 27 nov Le Méjan, Arles 04 42 49 02 00 Théâtre d’Arles 04 90 49 56 78 www.theatre-des-salins.fr 04 90 52 51 51 www.lemejan.com > Fondement Futuriste Serge Sarkissian adapte le Livre de Job, poème en prose qui L’acteur-metteur en scène Marcial di Fonzo Bo pour- pose la question de la souffrance, sans la justifier mais en la suit son exploration de l’œuvre théâtrale de l’Argentin situant dans le rapport avec Dieu. Richard Martin incarne Rafael Spregelburd et met en scène, avec la comé- Job, homme juste et travailleur, tandis que Michael Lonsdale dienne et auteure Elise Vigier La Paranoïa, inspirée du est Dieu ! Un face à face savoureux soutenu par les sons du tableau de Hieronymus Bosch, Les Sept péchés capi- doudoug (flûte arménienne en bois d’abricotier) de Lévon taux. Naviguant entre théâtre et vidéo (l’artiste associé Minassian et du violoncelle de Fabienne Bafchieri. au Théâtre, Bruno Geslin, crée les images), la pièce Job ou l’errance du juste s’attache à démonter les mécanismes de la fiction. Or Le 17 nov la survie de l’espèce humaine dépend de la création Théâtre Toursky d’une fiction qu’une équipe bigarrée et déjantée de Le 21 nov mathématicien, astronaute, écrivain… est chargée de Le Comœdia (Aubagne) créer en 24h… La fiction comme dernière richesse, 04 42 18 19 88 quelle science-fiction ! www.aubagne.com La Paranoïa © Pacôme Poirier Les 26 et 27 nov Théâtre de Nîmes Colloque 04 66 36 65 10 Rabelaisien La pièce de Frédéric Lenoir et Louis-Michel Colla, Bonté www.theatredenimes.com Ce texte de Valère Novarina est éclatant, jouissif, Divine, aborde le thème du dialogue interreligieux. Un prêtre, orgiaque. De verve, d’invention verbale, de liberté un rabbin, un imam et un moine bouddhiste, enfermés après poétique concrète, qui se mange. Huit personnages une conférence commune dans une pièce d’où ils ne peuvent métaphoriques définis par leur manière de dévorer le communiquer avec l’extérieur, vont rivaliser de considé- Déluge monde se trouvent autour d’une table et parlent, rations théologiques, jusqu’à sonder leur foi et leurs doutes. Jean-Pierre Darroussin en riche céréalier bougon de parlent, cette langue dont l’air est connu et suffit à Bonté Divine la Brie ? Pourquoi pas, il peut tout jouer, cet acteur-là. faire entendre les paroles… Le 2 déc Le Comœdia (Aubagne) Y compris ce texte d’Alain Gautré, mis en scène par Le Repas 04 42 18 19 88 l’auteur, qui le prend au piège de sa propriété familiale Le 1er dec www.aubagne.com durant 40 jours de pluie, et le confronte à des person- Théâtre d’Arles Le 1er déc nages pas toujours bienveillants. Une comédie qui vire 04 90 52 51 51 Pasino (Aix) au grinçant et s’échappe vers le biblique pour mieux www.theatre-arles.com 04 91 80 10 89 causer d’universel… Le 2 déc www.sudconcerts.com La Chapelle en Brie Théâtre Vitez, Aix Le 26 nov du 15 au 19 déc 04 42 59 94 37 Théâtre Armand (Salon) Jeu de Paume, Aix http://theatre-vitez.com 04 90 56 00 82 0 820 000 422 www.salon-de-provence.org www.lestheatres.net

> Bel amateur Bonté Divine © Lot Le théâtre Vitez accueille la 7e édition du festival de Huis clos théâtre amateur en Pays d’Aix. Les compagnies, sélec- Selon le principe des Veilles théâtrales conçues par tionnées, préparées, ménagent chaque année de très l’Atelier, Alain Simon et Alain Reynaud liront dans son belles surprises. Cette année, des textes très divers : intégralité un texte de ce dernier. Sur son enfance, Pasolini, Grumberg, Shakespeare, Benno Besson, son père projectionniste qui raccourcissait les films Labiche, et de créations collectives… Parce que le pour retrouver plus vite les siens le soir… théâtre se pratique ! Voyage sur place Festival de théâtre amateur le 4 déc, 19h du 11 au 16 déc à 19h et 21h15 Théâtre des Ateliers, Aix Théâtre Vitez, Aix 04 42 38 10 45 04 42 59 94 37 www.theatre-des-ateliers-aix.com http://theatre-vitez.com 18 THÉÂTRE AU PROGRAMME Enfer Libération Après des résidences de travail à la Distillerie à Aubagne, à Xavier Gallais adapte et met en scène Les Nuits blanches la Friche et au 3bisf, la cie aubagnaise Lesgensdenface pré- de Dostoïevski. Une relecture moderne, dans laquelle sente sa création des Quatre jumelles de Copi. La mise en Tamara Krcunović et Xavier Gallais offrent une interprétation scène de Christophe Chave s’attachant à rendre réelle troublante de cet amour romantique. Tout en légèreté et l’écriture de Copi, rythme le jeu des comédiennes en se subtilité ils font leurs les mots de l’auteur russe, au cœur basant sur l’énergie et les tensions perpétuelles de leurs d’un décor presque naturel entre bois et herbes hautes. corps. Entre folie et farce macabre, les quatre jumelles se Les Nuits blanches croisent, se droguent, s’entretuent, meurent et ressuscitent Le 14 déc > inlassablement… Théâtre Armand, Salon Les quatre jumelles 04 90 56 00 82 Le 4 déc www.salon-de-provence.org Le Comœdia (Aubagne) Les nuits blanches © BM Palazon 04 42 18 19 88 www.aubagne.com Aimer Confession Cendre Chassanne, qui dirige la compagnie Barbès 35, Au début du XXe siècle, à Monte Carlo, un scandale secoue Revenir met en scène Le Triomphe de l’amour de Marivaux, une les résidents d’un grand hôtel : abandonnant son mari, une Dans La Douleur, mis en scène par Patrice Chéreau et guerre d’amour «qui est aussi une guerre politique, […] une femme respectable s’enfuit avec un jeune homme qu’elle Thierry Thieû Niang, Dominique Blanc est Marguerite Duras. aventure hédoniste.» Au centre de la mise en scène un jardin connaît à peine. À cette occasion, une vieille aristocrate Récit autobiographique, le texte cru de Duras raconte sa vie dans lequel rien ne pousse, jusqu’à ce que «Léonide, par la anglaise revient sur son passé et sur histoire fort similaire… de résistante, la libération, et l’horreur de l’attente, celle du puissance de son projet, ne parvienne à faire bouger tout cela, Marion Bierry adapte la nouvelle de Stefan Zweig, 24 retour de son mari, Robert Antelme, résistant déporté à à réveiller les forces de la nature.» Le pouvoir de l’amour heures de la vie d’une femme, avec Catherine Rich et Robert Dachau. Seule en scène, la comédienne fait sienne l’écriture triomphant en tant que nouvel ordre politique ? Bouvier. Dans une mise en scène sobre, les comédiens durassienne, entre douleur et espoir. Le Triomphe de l’amour prennent la parole à tour de rôle ; un double récit qui permet La Douleur Le 15 déc la lente libération de la parole… Le 21 nov Théâtre de l’Olivier, Istres 24 heures de la vie d’une femme Théâtre de l’Olivier, Istres 04 42 56 48 48 Le 26 nov 04 42 56 48 48 www.scenesetcines.fr Théâtre de La Colonne, Miramas www.scenesetcines.fr 04 90 58 37 86 www.scenesetcines.fr Le 12 déc Résister Carré Léon Gaumont, Sainte Maxime Espérer On ne payera pas l’oxygène d’Aristide Tarnagda, dans une 04 94 56 77 77 Au temps des croisades, en 1187 à Jérusalem, sont réunis les Afrique crépusculaire projetée dans un avenir encore plus www.carreleongaumont.com destins séparés d’un marchand juif, d’un jeune Templier et sombre, raconte l’agonie d’un couple refusant de payer l’air du sultan Saladin. Parabole de la tolérance et de la fraternité, qu’il respire ; Grand écart de Dieudonné Niangouna met Nathan le sage de Gotthold Ephraïm Lessing est mis en en scène l’histoire d’un autre couple, plus universel, violent, scène par Laurent Hatat avec un parti pris actuel, dans une détruit par la dureté du monde et sa propre violence. Deux Soliloques démarche qui place le théâtre au centre de la question du très beaux textes, proposés par Eva Doumbia, par une Jean-Yves Picq s’installe au Théâtre des Halles pour trois vivre ensemble. Transposée dans une ville d’aujourd’hui, «où metteure en scène qui connaît l’Afrique et nous la donne à soirées qui se déclineront en rencontre (le 17 déc, avec les mots permettent encore d’exprimer les conflits, parfois voir sans concession. lectures choisies de ses textes) et spectacle. Le Théâtre de pour les régler, parfois pour les masquer», la pièce fait On ne payera pas l’oxygène/Le grand écart l’Ephémère met en scène Donc, délirant tourbillon verbal à entendre d’étonnants échos… Le 1er déc trois voix. Les mots comme rempart contre le silence et la Nathan le sage Théâtre de La Colonne, Miramas nervosité… Le 28 nov 04 90 58 37 86 Donc Théâtre de l’Olivier, Istres www.scenesetcines.fr Les 18 et 19 déc 04 42 56 48 48 Théâtre des Halles, Avignon www.scenesetcines.fr > 04 90 85 52 57 Nathan le sage © Eric Legrand www.theatredeshalles.com Résistance Germaine Tillion aura traversé le XXe siècle de façon exemplaire, toujours à la recherche du juste et du vrai, à travers ses écrits et ses engagements humanistes. Xavier Marchand met en scène trois de ses textes -Il était une fois l’ethnographie, Ravensbrück et Les Ennemis complé- mentaires- avec des chants et des images d’archives, dans un théâtre documentaire dont il a le secret subtil, qui donne une belle leçon d’humanité. Il était une fois Germaine Tillion Le 17 déc Théâtre de la Passerelle, Gap 04 92 52 52 52 www.theatre-la-passerelle.com LA CITÉ | BANCS PUBLICS | MINOTERIE THÉÂTRE 19 Sortir de l’isolement La Cité, Maison de théâtrepoursuit ses expériences d’écritures du réel ; au programme de novembre, la Créations diverses prison, sujet difficile à traiter sans tomber dans le voyeurisme, le pathos ou la morale à deux sous. La Minoterie comme à son habitude invite et Pourtant le metteur en scène Jean-Michel Van den soutient la création en programmant, en Eeyden et Jean-Marc Mahy, ex-taulard devenu novembre, Grand Magasin, puis le Théâtre de éducateur, et acteur pour l’occasion, ont voulu faire l’Ajmer. Pour des bonheurs divers, à petits prix. du vécu de Mahy un véritable «acte théâtral», et per- Avec presque rien, une table de camping et mettre à cet homme qui a passé 18 ans de sa vie en une quinzaine d’objets cheap, mais beaucoup prison, dont 3 en quartier d’isolement, de «porter sa d’humour et d’ingéniosité Grand Magasin parole différemment» sur le plateau et, par la confron- parvient, entre un chantier à ciel ouvert et un tation au jeu, de prendre la distance nécessaire pour restau en cours d’édification, à broder un rester un homme debout. numéro burlesco-surréaliste, à base de logique Accueillis en résidence de création durant l’été, les à deux termes aristotélicienne : un objet, là ou deux Belges ont présenté le travail en cours durant 3 pas là, déclenche ou non sur un pseudo tableau soirées suivies de projections et de débats. La force numérique un voyant qui s’éteint ou s’allume. du propos et de sa validité dramatique sont frappantes. Une volonté dérisoire de circonscrire le monde Jumel © X-D.R. Mahy possède un vrai tempérament d’acteur, qu’une à du binaire, fort drôle, à la base néanmoins de notre monde numérique… mise en scène dépouillée et pudique transcende. Le Théâtre de l’Ajmer n’a pas cette ingénuité-là. Franck Dimech, comme quand il monte Sarah Kane ou Durant une heure, on est avec le détenu dans sa minus- Maeterlinck, sadise ses acteurs, les met dans des positions humiliantes, cherche notre dégoût (laper son assiette, cule cellule, qu’il arpente presque non stop, tout en recracher, remanger, cracher dans un verre puis boire, enfiler une robe trempée de lait, se nourrir de graines disant un texte encore improvisé mais qui sonne déjà cachées dans sa culotte…). Procédés acceptables quand ils visent à une prise de conscience. Mais entre ces écrit. On suit son parcours de jeune délinquant, puis jumelles chinoises, sur ce texte insipide qui répète à l’envi des situations sans intérêt, quel est l’enjeu ? de prisonnier, les humiliations répétées, les coups et A.F. les fouilles au corps, les étapes d’un procès bâclé, la tentation du suicide jusqu’à sa métamorphose finale. Panorama commenté, de Grand Magasin, On est ému, on rit aussi… et on attend la version défi- a été joué du 19 au 24 nov. Jumel est joué jusqu’au 19 nov. nitive d’un projet prometteur. www.minoterie.org CLARISSE GUICHARD ET FRED ROBERT

Un homme debout a été présenté du 5 au 7 nov à La Cité à Marseille Un homme debout © Olivier Donnet Terra (in)cognita ? Une première semaine bien remplie pour l’arpenteur semoule fondatrice et identitaire ; subtile, pince-sans- des territoires ouverts cette année encore par le rire, la scène dure sans s’user / le rock du colonisé, théâtre des Bancs publics qui propose pour la 4e décalé et hilarant couvre le crépitement des identités édition des Rencontres à l’Echelle un véritable flambées / un dernier tableau énigmatique (d’un festival de propositions en mouvement, de trajectoi- seau rouge de pompier, chaque acteur tire un gobelet res croisées ou de face-à-face fertiles entre Marseille d’eau qu’il jette dans les pieds de son comparse qui et Alger. Grâce à une collaboration élargie avec Aflam traverse la scène en courant, accompagnant son geste (voir p 58), ou les Rencontres d’Averroès et une d’un «pschitt» sonore et quelque peu menaçant) se déambulation heureuse entre Joliette et Belle de Mai, dilate dans le temps et ouvre un espace imaginaire la cohérence du projet se dessine fermement, quoi singulier, bien plus intéressant que les portraits-vidéo qu’il en soit de la fragilité de certaines formes d’explo- qui scandent le reste de la pièce. ration. Le déploiement de désir vers l’autre semble Le même trio d’acteurs (Eric Houzelot, Sharmila être le mot d’ordre général, plus ou moins explicite Naudou et Julie Kretzschmar) a lu le lendemain aux selon l’artiste. La chorégraphe Balkis Moutashar le Archives Départementales la non moins nerveuse et fait savoir sans ambiguïté dans Lautrétranger pièce polyphonique Archéologie du chaos (amoureux) du qui invite trois soirs de manière différente Sliman pop-littérateur (sic) Mustapha Benfodil dont la Habès à investir et à subvertir de son énergie hip hop présence stimulante et modeste n’a sûrement pas les gestes d’une danse contemporaine si codifiée ; à entravé la circulation des idées dans la salle ! La ren- trouver sur un plateau où tout a déjà été joué, la place contre sidérante avec le film de Tariq Teguia Inland qui est due à celui qui vient d’ailleurs. Émouvant y com- (voir p 53) ou les photos «algériennes» de Pierre pris dans la maladresse et l’inachevé. Plus audacieuse, Bourdieu au MuCEM (voir p 11) élève encore la la création de Julie Kretzschmar et Guillaume qualité de l’attention portée à ceux d’en face. À Quiquerrez, première exploration publique de l’hété- suivre... roclite et malicieux Arrêt) (Terra, pose le spectateur MARIE JO DHO face à une quête en miroir qui mêle le burlesque au tragique : sous l’autorité bienveillante de l’acteur Les Rencontres à l’Echelle Samir El Hakim, trois «Français» à une table de ont lieu dans divers lieux de Marseille conférence égrainent avec des bonheurs divers la jusqu’au 6 déc 20 THÉÂTRE GYMNASE | MARIE-JEANNE | LENCHE | DAKI LING Drôle d’Histoire Bon. C’est du théâtre à la papa. Regor- t-il, de l’exercice du pouvoir en France. geant de personnages inauthentiques, Et qui prête à sourire, par les d’intrigues sentimentales à la Cour correspondances éta-blies entre un dignes, par instants, de Barbara système régalien et un autre, toutes Cartland… Mais enfin, ce Diable Rouge ces promesses faites pour être trahies. fait plaisir. D’abord, avant tout, par-des- Et cet impôt en train de naître qui sus tout, parce que Claude Rich est là. protège les plus riches et ménage les Jubilant, coquin, mutin, Mazarin jus- plus pauvres, et ressemble tant au qu’au bout des ongles, il est la malice système fiscal actuel. incarnée. Ses moindres répliques son- Au-delà de cela, on ne peut que se nent comme des mots d’esprit, ses mots réjouir du succès de ce théâtre intel- d’esprit comme du Machiavel. Il a le © Pascal Gély CDDS Bernand ligent et populaire, peu inventif dans la don de tout sublimer, cet homme-là. forme mais très accessible, et misant Mais il serait injuste de lui attribuer sur le plaisir: les scènes marseillaises tout le plaisir qu’on prend à ce spec- sont trop avares de ce type de specta- tacle : si Antoine Rault n’a visiblement cles, qui font le succès des parisiennes. pas de souci de la langue, ni de l’his- À des prix nettement moins abordables. toire du sentiment amoureux, il a un AGNES FRESCHEL sens évident de la progression dramatique, du bon mot, et un vrai intérêt pour d’Autriche qui cède la place, Louis qui devient Soleil, Le diable Rouge a été joué l’histoire du pouvoir. Quelque chose se passe là, dans Colbert qui pointe son nez et Fouquet qui se fait au Gymnase du 13 au 24 oct les antichambres, entre Mazarin qui s’éteint, Anne évincer. Quelque chose qui a posé les bases, semble- Le jeu cabaret Malade à trois Décidément, Tchekhov n’épuise pas le théâtre de Lenche, ni son esprit de troupe. La compagnie Le Souffle a six ans. Le cabaret qui a été proposé durant deux semaines a rempli la petite salle, les Marseillaise, elle a à son actif sept créa- gradins et les tables disposées autour de la scène. Une chaleur indéniable se tions, et une énergie qui la pousse à dégage de cette forme conviviale de théâtre de proximité qui transforme le tourner dans de nombreuses salles comédien en voisin de siège, et permet ainsi d’entrer dans les nouvelles de conviviales, et dans les établissements Tchékhov un peu comme lors d’une rencontre littéraire. Le jeu n’y est pas théâtral, scolaires. Son Malade Imaginaire était les comédiens n’interprètent jamais les personnages : ils s’amusent à dire les ainsi au Daki Ling pour une reprise, et textes, ensemble, à contretemps, en chœur, en chantant, en s’interrompant on le retrouvera au Marie-Jeanne, même… bref en jouant beaucoup mais sans jamais jouer comme au théâtre. Cela autre théâtre marseillais à l’énergie rare, donne une cohésion particulière à la troupe, sans qu’aucun ne soit poussé en aux petits tarifs et à la programmation avant : tout est judicieusement réglé, même les chansons, à plusieurs voix, pas choisie, malgré la crise. faciles, qu’ils chantent juste… ce qui relève généralement de l’exploit chez les Leur Malade ne manque pas de qualités comédiens, et dénote un travail sans doute colossal ! Mais ce cabaret permet non plus : le texte, reconcentré autour surtout d’entendre les récits amers de Tchekhov, la précision de ses personnages de quelques scènes phares, est monté brossés en deux coups de pinceau, et ses désarrois qui surgissent dans cette dans un esprit de tréteaux (masques, sorte d’inopiné prévisible dont ses nouvelles ont le secret. On en ressent comme interversions des rôles, changements une impression contradictoire : l’amertume du constat est rehaussée par le à vue, musique en direct…) qui ne dé- Le Malade imaginaire © Le Souffle bonheur de goûter cette intelligence. Décidément, Tchekhov est inépuisable. nature jamais l’esprit de la pièce, même gnies conventionnées, et sans être le AGNES FRESCHEL quand il en bouscule la lettre. Les fils de personne, est encore plus caractères de la dernière pièce de périlleux… Quant à gérer un lieu asso- Il n’a été heureux qu’une fois, sous un parapluie Molière sont compris dans leur cruauté ciatif et convivial qui accueille ce type a été créé au théâtre de Lenche du 13 au 25 oct et leurs ambiguïtés, et appuyés par des de spectacle, cela relève du miracle ! partis pris piquants qui leur vont bien. Mais cela n’aurait pas de sens, ceci Il n'a ete heureux qu'une fois... Reste que les comédiens auraient étant entendu, de camoufler les défauts © Catherine Rocchi besoin de travailler leur technique : d’un spectacle parce qu’on aimerait le malgré les qualités que possède cha- soutenir : le Malade Imaginaire est cun, en particulier Sylvain Mouly, méritant, intelligent, agréable, drôle, l’articulation reste approximative, les éminemment sympathique… mais un accents inconstants, les déplacements brin amateur. mal maitrisés… Ils jouent de leurs instru- AGNES FRESCHEL ments en amateurs plus ou moins éclairés et décrochent souvent dans le Le Malade Imaginaire a été joué jeu, ce qui brise le rythme. au Daki Ling du 5 au 7 nov. Bien sûr le pari de jouer le Malade à Il sera repris au Marie-Jeanne trois, à toute allure qui plus est, n’est du 5 au 7 déc. pas si simple à honorer. Exister dans le Théâtre Marie Jeanne paysage théâtral actuel, sans être passé 04 96 12 62 94 par des écoles nationales, des compa- www.theatre-mariejeanne.com

22 THÉÂTRE GYPTIS | BEAUCAIRE | TOURSKY | MARTIGUES | CAVAILLON Loin de la Huchette... Cadavres exquis... Jean–Luc Lagarce est où parler ne veut pas dire, Mrs Martin mort, Ionesco aussi… Mais la Cantatrice montre sa culotte, pressée par l’exci- est toujours chauve et Jean-Luc La- tation univoque de son mari ; les écarts garce bien vivant ! Par le miracle par rapport à la mise en scène cano- profane de la mémoire aimante de nique et muséale de Nicolas Bataille François Berreur et de ses témoins sont signalés par Mary-La-Bonne du théâtre de la Roulotte, la mise en jusqu’à l’effondrement du décor… et scène pétulante de la pièce embléma- dans une des fins inédites (à faire) les tique de Ionesco, montée il y a plus de spectateurs prompts à bondir sur scène 15 ans, crève de nouveau l’écran ! Tout à la moindre sollicitation brechtienne y est : la façade plate du cottage calée sont fusillés raides-morts sur ordre du entre haies et pelouse de chez Lego directeur de salle ! (UK) ; les couples d’acteurs-re-acteurs Avez-vous remarqué qu’Hitchcock et jouant de leur symétrique dissymétrie Ionesco avaient la même calvitie ? burlesque (la grande Mireille Herbst- MARIE-JO DHO meyer et le petit Mr Smith / pareil et © Brigitte Enguerand inversé chez les Martin) ; la mécanique impeccable enregistrés chez Benny Hill, les cuts au noir à peine La Cantatrice Chauve, mise en scène de Lagarce des répliques dupliquées est telle que le rire a même perceptibles qui dérèglent le temps comme cette remontée par François Berreur, a été montrée du mal à suivre tant le rythme ne fourche pas : le clin lune là-haut tantôt pleine tantôt vide... à Cavaillon le 19 oct et aux Salins les 22 et 23 oct d’œil frontal aux années acidulées du théâtre à la télé, L’inquiétude pointe et peut-être la terreur, trace cer- les tailleurs Chanel (Channel ?), les rires hors de saison taine du subtil Lagarce : un peu égarée dans un récit La vérité est en bas Le cœur Il est étrange de constater, alors que le Philippe Sejourné, avec une diction qui théâtre de Camus, terriblement didacti- retrouve les accents bourgeois du Paris est un chasseur que, a mal vieilli, combien ses essais et des années soixante, ou s’empâte dans récits passent bien à la scène… la bière des bars d’Amsterdam, incarne solitaire Le pari de Raymond Vinciguerra était toutes les facettes de Clamence, l’épave Deux tables de bar, un juke-box lumi- osé : la confession de Clamence n’est avocat des truands, le don juan mépri- neux dans un coin, des consommateurs pas un monologue, et La Chute, malgré sant et dominateur, le filou philosophe, attablés aux flancs de la scène… Elle ar- les appels à un interlocuteur imagi- jusqu’au lâche qui ne se pardonnera rive dans une inénarrable robe à fleurs: naire, n’est pas adressée. Pas théâtrale jamais d’avoir eu peur du froid… Et la «Je suis bien ?». Complicité immédiate donc. Il s’agissait de ne pas tomber colère, terrible, contre lui-même. avec un public conquis d’avance : on dans le piège d’une dramatisation, et L’occasion de (re)découvrir un très est venu pour elle, sa faconde, ses bons la mise en scène les évite : le seul per- grand texte. mots, sa gouaille, son énergie, sa capa- sonnage présent, possible, autour de A.F. cité extraordinaire à transmettre ses Clamence est bien cette jeune femme émotions, à les faire partager… Margue- qu’il a laissé se noyer dans la Seine, et La Chute rite, enfant mal aimée par une mère qui dont la chute physique a provoqué sa jusqu’au 21 nov ne s’est jamais remise de la mort de sa dégringolade sociale, et sa prise de cons- Théâtre Gyptis première fille, attend au juke-box café cience morale ; les seuls éléments de 04 91 11 00 91 son rendez-vous (rencontré sur Internet, décor possibles sont bien ces images www.theatregyptis.com grâce à sa copine Georgette, une femme mentales projetées sur les écrans et le 27 nov de 75 ans, seule elle aussi, avec laquelle qui suivent le trajet du narrateur, de la Théâtre de Beaucaire elle bavarde et boit son whisky). Sera- débauche à l’introspection, comme le 04 66 59 26 57 t-il le compagnon souhaité ? Ne serait-ce tabouret, le transat puis le lit suivent son www.beaucaire.fr que pour partager un verre, un spec- affaissement. Raymond Vinciguerra repré- Les 11 et 12 déc tacle… S’ensuit une galerie truculente sente ces images intérieures discrètement, Théâtre du Balcon, Avignon de messieurs, du fou d’escalade et de © Max Minniti dans une abstraction très juste. 04 90 85 00 80 rafting au chasseur «sans son chien» en mieux que les êtres dits «humains» Son comédien ne l’est pas moins : www.theatredubalcon.org passant par l’érudit d’égyptologie, le dans cette histoire, où la solitude se vit, masochiste poilu, le radin, le beau Mar- se combat. Les chansons de Cocciante cello (Marcel en fait, «mais en italien, à Marc Lavoine tissent une trame sur c’est plus beau» !) si aimé mais marié, laquelle le spectacle se brode, s’achève qui se réduit progressivement à dos et s’emballe. Un cocktail «coup de foudre» fuyant… Évocations qui tordent de rire réclame Marguerite ! Il n’arrive pas, pas la salle… plus que le prince charmant. Mais Ce sens du détail juste, de l’anecdote, l’espoir est une source intarissable est tout un art ! Rire, autodérision, émo- d’énergie. Est-ce là qu’Edmonde Fran- tion sensible aussi, lorsque son cœur chi puise sa verve ? devient «une écharpe de soie qui se MARYVONNE COLOMBANI déchire» ou que Patouf, le bon chien fidèle aux yeux profonds comme de Coeur @ prendre, d’Edmonde Franchi, © X-D.R grands lacs, meurt. Les animaux valent a été joué au Toursky les 13 et 14 nov NÎMES | OUEST PCE | PORT-DE-BOUC THÉÂTRE 23 Politique spectacle De l’empire napoléonien à l’empire politico médiatique il n’y a qu’un pas… que le collectif Superamas franchit réalité prennent le dessus à tour de allégrement dans Empire (Art & Poli- rôle. Et puis c’est la projection d’un court tics). D’une super production sous documentaire -vrai ou faux ?, là encore forme de reconstitution historique de la perception vacille- dans lequel les la bataille d’Essling/Aspern à une Superamas partent en Afghanistan à la réception mondaine clinquante et recherche de la cinéaste Samira ridicule chez l’ambassadeur de France, Makhmalbaf pour l’interviewer sur son l’analogie illusoire est parfaite. Illusion rôle de conscience politique, jusqu’à d’une réalité qui défile sous nos yeux l’attaque aussi subite que foutraque de et dont la perception est constamment Talibans qu’ils tuent aussi sec. Le méca- brouillée. Si les scènes de reconsti- nisme du spectacle fonctionne chaque tution historique paraissent bizarres et fois, surprenant le spectateur par des surjouées, c’est qu’elles sont en fait insertions brutales de réalité noyées des bouts de film, lequel film, après dans des artifices. projection, servira de support et de Bien sûr que tout est faux, comme pour Empire (Art & Politics © Giannina Urmeneta Ottiker prétexte à la soirée caricaturale de mieux démonter l’image. Pensez-vous Empire (Art & Politics) a été joué l’ambassadeur qui rassemble politiques que tout ce que vous voyez, ce que au théâtre de Nîmes les 21 et 22 oct et artistes. Les discours se mélangent, vous entendez est réel ? on ne s’écoute pas parler, caricature et DOMINIQUE MARÇON Ados en crise Le cri de Murdoch (remarquable interprétation de au fond du fleuve Saint-Laurent, début de l’énigme-, entre Benoit Landry) résonne encore, longtemps après la fiction et réalité. Et raconter sa propre histoire, celle de fin de la pièce. Le cri du cœur d’un adolescent qui la beauté, qu’il avait imaginée virtuelle et qui prend corps. cherche un sens à sa vie, entre des «pourquoi» et des La mise en scène de Benoît Vermeulen, codirecteur «je ne sais pas» répétés comme une litanie lancinante du Théâtre Québécois Le Clou, contribue à créer ce et un brin dérangeante, saupoudrant ses savoureux monde intriguant imaginé par Wajdi Mouawad, mais monologues. se perd de temps en temps dans une scénographie C’est qu’il s’adresse aux adultes, Murdoch, qui ont lourde d’allégories inutiles. Hormis le mur de vidéos, apparemment du mal à lui répondre, et préféreraient qui nous promène ingénieusement d’un monde à Fabulateur le faire taire. Il ne se taira que lorsqu’il disparaîtra, l’autre. avec Norvège, son pendant silencieux, adolescente DO.M. à facettes pétrifiée par la laideur qu’elle découvre au fond de son ventre, pieuvre envahissante, métaphore d’une société Assoiffés 7e collaboration complice de Serge Valletti et Christian qu’ils refusent tous deux. Entre les deux, Boon, anthro- a été joué au Théâtre de l’Olivier, Mazzuchini, Mythomane se présente comme un flori- pologue judiciaire un rien ahuri, va remonter l’histoire Istres, le 10 nov lège de textes brefs. Le comédien en fait son miel, au des ces deux-là -leurs corps ont été retrouvés enlacés milieu d’une scène encombrée de lits de camp qui © X-D.R. servent autant de paravents que de sièges, de cartons vides ou regorgeant de petits riens… avec pour décor sonore une radio facétieuse qui ponctue les saynètes avec de faux horoscopes délirants. Ça n’aurait pu être qu’une succession de situations, une galerie de per- sonnages loufoques ; mais Mazzuchini a une telle facilité à les lier tous, il endosse si simplement ces habits bigarrés que son inventaire recrée une micro société des plus réjouissantes. Mythomanes ils ne le sont pas tous, et certains plus que d’autres : entre un réparateur de cerveaux lents, un tranquillisateur pour gens inquiets ou un paranoïaque (hilarant) lié au suicide de Bérégovoy, la voix de Balkany se glisse, expliquant que les pauvres vivent très bien en France… Mytho- mane ou menteur ? Peut-être que la meilleure place où s’installer c’est dans sa tête, bien au chaud, pour continuer à fabuler… DO.M.

Mythomane a été joué au Sémaphore (Port de Bouc) les 12 et 13 nov. Il est programmé au Comœdia, à Aubagne, le 16 janv, et à la Minoterie du 19 au 23 janv 24 THÉÂTRE AVIGNON

mots. Avec, en «guest», le beatboxer Ezra qui excelle dans la discipline. Une biennale d’énergie Aux Hivernales, la cie 2 Temps 3 Mouvements a réuni avec brio arts du cirque et danse hip hop, en donnant de surcroît un sens à leurs différences. La Stratégie de l’échec aborde la question de l’universel et de la liberté, hors du déterminisme social. Nabil Hémaïzia et Mathieu Desseigne se complètent admirablement, entre équilibre et prouesse physique. Dommage que la bande son parfois prévisible ne pousse pas plus loin le propos. En 2nde partie, l’éton- nant court métrage Trompe l’œil du cinéaste Florent Sauze a sonné comme un coup de poing. Une démonstration intelligente de légende urbaine, ponc- tuée par les apparitions des deux danseurs de Onstap, qui n’en finissent pas de développer leurs talents. À l’Auditorium du Thor, le collectif Jeu de Jambes, réunissant zazous en jaquettes et guêtres, a affirmé son savoir-faire chorégraphique, mélangeant cla- quettes (sans bruit), swing, soul et jazz rock. 45 Collectif 2 temps 3 mouvements © M. Desseigne minutes de belles images, nerveuses et acroba- Temps fort du hip hop en Vaucluse depuis 2002, le il crée du lien au travers d’ateliers et stages à la fré- tiques… un peu «à l’esbroufe», mais énergisantes. festival Drôle(s) d’Hip Hop est une réussite. Pendant quentation galopante. Cette année, beatbox, step, Rendez-vous dans deux ans, seulement ! 15 jours d’automne il décline les mouvements de la danse et graff étaient à l’honneur. La cie des Dalto- DELPHINE MICHELANGELI création hip hop, dans une ville qui peut donner niens avec son spectacle Tag, en direction du jeune l’impression de n’exister culturellement qu’en été. public, a emballé le théâtre des Doms. Autour des Drôle(s) d’Hip Hop a eu lieu en Vaucluse Réussite humaine aussi, il rassemble un laboratoire sentiments d’insécurité et d’intolérance, avec un du 19 au 31 octobre 2009 d’expressions urbaines et des artistes généreux, zeste de cartoon, une touche de burlesque et du visiblement comblés par cette tribune, dans un collectif rythme en rafale, les trois «citadins de l’extrême urbain» partenarial à géométrie variable. Pédagogique enfin, manient la percussion vocale comme d’autres les Ouvriers Des visages, des figures Initiée par la Scène Nationale de Programmé dans le cadre des nuits dépassionnés et pourtant terriblement Cavaillon, le spectacle La Grande Dame d’Amnesty International, J’ai Soif est un profonds de Levi, au cœur des camps s’est monté avec des amateurs issus dialogue, plus qu’un spectacle, entre de concentration, trouvent leur force, du théâtre de la Marmite. Brigitte, deux paroles de suppliciés. Les 7 terrible. L’instinct de survie, la soif Claude, Fanny, Hélène, Jacqueline, dernières paroles du Christ en croix de d’amour et d’humanité rattrapent Jean-Jacques, Nicole et Patrick Haydn, jouées magistralement par le l’œuvre de mort engagée. «Des visa- retranscrivent, sous la houlette de la pianiste Roland Conil, entrent en ges, des figures, dévisagent, défigurent, poétesse Laurence Vielle, les paroles résonance alternée avec le texte de des figurants à effacer...». Un travail de des salarié(e)s, ouvriers et cadres de Primo Levi, Si c’est un homme, inter- mémoire qui évite le pathos et permet l’usine de la SEPR au Pontet. Une prété par l’imposant Serge Barbuscia de réunir des témoignages magistraux. «grande dame» qu’ils portent sur leurs qui évolue fragilement, pieds nus (mais DE. M épaules depuis 60 ans et qui ne se pas anecdotiques), entre les toiles laisse pas déshabiller si facilement. Les évanescentes de Sylvie Kajman, comédiens-chanteurs à la diction projetées sur des rectangles blancs. La J’ai soif s’est créé au Théâtre du Balcon certes perfectible, aux déplacements disposition circulaire de ses figures du 23 au 25 octobre 2009 fragiles et au jeu parfois flottant, nous humaines à l’encre de chine qui rap- © Michel Benoit touchent par leur sincérité pleine de pellent les sculptures filiformes de grâce. Une sensibilité qui, jouée par Giacometti, plonge le spectateur dès des pros, aurait sonné faux, ou trop. Ici, son entrée dans le «trou noir de le réel et l’émotion transpirent à belles © X-D.R. Marmite La - Cie GrandeLa Dame l’humanité». Ces peintures servent de gouttes, avec un vrai travail de chansons polyphoniques, mené et accompagné par ciment universel entre les deux les musiciens Bertrand Binet et Vincent Granger. À l’heure où des salariés se tuent témoignages. «Quiconque oublie son de désolation et d’incompréhension, ce spectacle résonne comme un coup de passé est condamné à le revivre», les poing. Quel meilleur moyen que le théâtre pour exprimer cet attachement sincère, trois artistes sont engagés dans ce sa réalité paradoxale ? Une histoire de transmission générationnelle, de soli-darité, devoir de mémoire collectif. Une trans- de lutte syndicale, d’un amour du travail bien fait et d’adaptation à son temps, dans mission de l’indicible, de la barbarie, de une usine artisanale en pleine tourmente face à la mondialisation. «Au début on l’humiliation, des atrocités commises était 2000, on n’est plus que 700.» Une humanité qui éclate. Un temps qui se délite par l’homme, du passage de l’humanité et une fin qu’on espère pas si prévisible. à la pathologie. La salle est à l’écoute, DELPHINE MICHELANGELI figée et bien que l’œuvre musicale La Grande Dame s’est joué au Théâtre des Doms les 22 et 23 oct occupe beaucoup l’espace, les mots LE MERLAN CIRQUE 25 À charcuter le gore ! En ce début de soirée, un projet, une mise à mort. tente de questionner notre propre animalité mais aussi Celle du cochon, cet animal biologiquement si proche de la célébrer, de questionner notre manière de man- Mélissa au pays de l’homme qu’il le tient expressément à distance. ger, de nous nourrir, de consommer au-delà de la Mathilde Monfreux aime le cochon et choisit au satiété. contraire de l’approcher voire de l’incarner dans une La performance de l’artiste est loin de laisser indiffé- des miroirs schizophrénie où la femme et la truie luttent pour rente. Par la danse, la manipulation d’objet et discours Entrer dans le miroir et voir derrière quel monde mer- émerger de son corps. Dans un décor de bassines, -un peu court-, elle interpelle le public dans sa manière veilleux s’y cache. Au-dessus du piano, sur les notes de draps maculés, de substances rappelant les d’habiter cette nouvelle condition. Elle entre progres- de Stéphan Oliva, le compositeur, la trapéziste Melissa fluides organiques et de formes s’apparentant aux sivement dans une sorte de transe, met à mort le Von Vepy s’introduit à l’intérieur du miroir dont elle boyaux, elle plonge le spectateur dans une ambiance cochon, et va jusqu’à provoquer des sensations déran- a brisé une partie de la surface. Depuis le trou béant de apocalyptique rappelant l’univers de Délicatessen. geantes voire éprouvantes, au point que l’on souhaite ce miroir-trapèze, elle interroge son reflet. Tantôt de- Entre fétichisation du corps et désir cannibale, l’artiste parfois qu’elle s’arrête ! Ce Projet Cochon est donc dans, tantôt dehors, elle évolue dans les airs au rythme une excellente matière d’une musique contemporaine grave et évocatrice, © Elizabeth Saint Jalmes et pose de vraies ques- où les forces des ténèbres semblent livrer bataille tions, mais gagnerait à puis laisser place à la lumière. De ses circonvolutions aller plus loin, au-delà de gracieuses et dramatiques, Melissa crée des figures ces boyaux magnifiques protéiformes, des personnages kaléidoscopiques, et charnels… dans la pro- morcelés, hybrides, d’une esthétique surprenante. fondeur de nos entrailles Pourtant, au long de cette exploration dans les profon- bestiales! deurs de l’âme, à la frange du corps et du mirage, on CLARISSE GUICHARD s’attend à ce que surgisse un halo, une sorte de scintil- lement qui justement parachuterait le public hors du cadre. Mais peut-on passer de l’autre côté du miroir sans y perdre son âme ? Projet cochon C.G. a été créé au Merlan du 12 au 14 nov Miroir Miroir a joué au Merlan du 12 au 14 nov

Merveilleusement catastrophique ! Au commencement le noir, le calme. Viennent des du spectacle. En penchant le regard à 45°, et en lumières, un personnage, deux, puis d’autres, fragiles, imaginant l’immédiat à partir de là. instables qui s’affairent dans un quotidien de bric et CLARISSE GUICHARD de broc. Soudain, c’est la maladresse de trop. Le décor bascule et embarque avec lui le spectateur dans un L’immédiat a été joué au Merlan du 13 au 23 oct tourbillon où s’enchaînent les catastrophes, savam- © Agnès Mellon ment orchestrées, toutes plus impressionnantes les unes que les autres. Cartons, bidons, échelles, tables, armoires, projecteurs, lampe, portes, tout vole, dégrin- gole. La salle éberluée savoure ces moments hilarants qui ne sont pas sans évoquer Tex Avery et Buster Keaton. Car Camille Boitel et ses brillants acolytes bur- lesques nous invitent à reconsidérer notre manière d’appréhender ce qui nous entoure. Nous proposant de nous balancer au gré du désordre, de l’anomalie et de la catastrophe plutôt qu’au gré de la perfection et de la certitude. Ainsi, le décor devenu décharge laisse la place à un espace scénique épuré où entre deux valses de rideaux de scène des corps se relaient, se substituent, se cachent, lévitent, s’agitent, se bouscu- lent, tombent ou s’avachissent, échappant au pouvoir de celui qui l’habite comme à celui qui tend à le normaliser. Se crée alors une danse étrange et poéti- que où d’adroites contorsions s’associent à des mouvements malhabiles pour atteindre des objectifs finalement indéfinis. Enfants et adultes admirent et rient à chacun de ces mouvements faussement impré- visibles qu’ils voient se métamorphoser en gestes stylisés. Car Camille Boitel est en fait un artiste du geste. C’est ainsi qu’il fait vaciller, avec une infinie délicatesse et une infinie poésie, les cloisons des arts 26 ARTS DE LA RUE/CIRQUE OUEST PCE | MERLAN | SIRÈNES | SALINS Vent d’Ouest, carrément Cœur de cible Avis de grand vent sur ce bout du monde en ce Ce qu’il y a d’embêtant avec certaines petites samedi après-midi. Port-Saint-Louis accueille Carré- madeleines, c’est qu’elles ne parlent qu’au cœur de ment à l’Ouest, manifestation co-organisée par cible. En l’occurrence les hommes de trente cinq ans Scènes et Cinés et le Centre national des arts de la qui ont des souvenirs d’adolescence Béruriers noirs, rue le Citron Jaune. Quelques personnes emmitou- doudounes et monaco, souvenirs de lycéens petits flées attendent devant une buvette où le thé chaud bourgeois, de masturbation, de père RPR et de est rapidement épuisé, le bus-expo de la Folle histoire baisers avec les filles. Cela vise à l’universel mais des arts de la rue raconte son périple par les fenêtres c’est sacrément restreint, et surreprésenté, surtout ouvertes… Et voilà que deux étranges silhouettes, dans la littérature française : l’énumération des toutes de noir vêtues, font irruption : Arnaud Cabias souvenirs communs fait vibrer ceux qui les ont vécus, et Nathalie Pernette nous invitent à suivre quatre et laissent sceptiques les autres, les femmes plus miniatures dansées, visibles en quatre lieux différents vieilles, plus jeunes, plus populaires, plus étrangères. de la ville ; Franck Gervais, en maître de cérémonie, Le texte de Ronan Chéneau, en ce sens, n’est pas précède le public en lisant une nouvelle de Poe. Le ce qu’il a fait de mieux. À la lecture il passe assez bien public, nombreux et attentif, s’installe pour suivre les (il sait travailler sa langue), mais dit à toute allure par étonnantes chorégraphies du duo : matière, couleurs Fred Nevchehirlian la confession a peu de saveur. et formes pour une Apparition subtile dansée par Pourtant l’idée de lire un texte au micro, sans le jouer quatre mains virtuoses ; une danse d’offrande stati- ni l’interpréter, en l’agrémentant de sons enregistrés/ que, énergique, presque robotique qui se termine par diffusés en direct (les voix du cœur de cible qui l’apparition d’une rose offerte en douceur à un spec- s’exprime volontiers dans un champ de micros planté tateur ; contre un mur le partage d’une danse tactile sur un carré de pelouse verte) et de quelques rares avec une spectatrice qui, les yeux bandés pourra sons de guitare, avait le mérite de la simplicité, de la ressentir les mouvements, les touchers des deux confiance dans les vertus du texte, justement. danseurs-masseurs ; un effeuillage mutuel enfin, sur Confiance aveugle, qui parfois se prend un mur. le parvis de l’église, comme une conversation silen- Arnaud Cabias et Nathalie Pernette © D.M. A.F. cieuse, gracieuse et sensuelle qui aboutit à la libération Carrément à l’ouest a eu lieu le 17 octobre des deux corps… à Port-Saint-Louis-du-Rhône Après une «pause thé chaud» bienvenue, l’heure est venue de partir en Voyage en bordure du bord du bout L’Appel de la Forêt, sur un texte de Ronan Cheneau du monde avec les frères Grimox de la cie les Trois intitulé Quinze ans, a eu lieu sur le parvis de l’opéra Points de suspension. Leur «théâtre flottant» déjanté le 4 nov, dans le cadre de Sirènes et midi net est des plus réjouissant : spectacle parodique, hom- mage aux films d’horreur des années 50, kitsch et assumé, bourré de trouvailles sonores et visuelles, il plonge les spectateurs dans l’improbable histoire de Humide Sophoclès, philosophe sans corps dont la tête se Après le Toursky l’an dernier, le Cirque canadien balade au gré de cascades hilarantes, de chansons Éloize s’installe aux Salins avec Rain, une création de Vertigineux délirantes, de performances absurdes mais parfaite- Daniele Finzi Pasca. Joliment sous-titré Comme une Le Merlan poursuit sa thématique Cirque (voir p25). ment réalisées. Le vent soufflait toujours, mais pluie dans tes yeux, le spectacle fait référence aux Öper Öpis est un spectacle qui confond les corps et différemment au bord du bout du monde… souvenirs d’enfance de l’auteur et metteur en scène, les objets, dans lequel les deux artistes suisses DOMINIQUE MARÇON «de la douce et belle tristesse que l’on ressent [alors] Martin Zimmermann et Dimitri de Perrot ont fait appel au coucher du soleil», et de la pluie d’été dont il à une danseuse et à deux couples d’acrobates et s’imprégnait. Sur scène se distinguent des artistes contorsionnistes. La scénographie, constituée par une acrobates, jongleurs, trapézistes qui sont aussi scène mouvante, tend à créer un monde en désé- chanteurs, danseurs et acteurs, une joyeuse troupe quilibre, parodie d’une vie quotidienne qui oscille Fortissimo qui fait se succéder les numéros entre rêveries et entre absurde et onirisme… Pour fêter ses 15 ans, l’Ensemble Télémaque répond acrobaties d’une grande prouesse, jusqu’à la pluie Rhizicon est un solo dans lequel Chloé Moglia, sa à l’appel de la sirène de midi sur le parvis de l’Opéra libératrice qui laisse place aux jeux enfantins. conceptrice et interprète, tente de saisir «le sens de en proposant deux pièces d’Edgar Varèse, Density la notion du risque et d’en rendre perceptibles les 21,5 pour flûte et Octandre pour flûte, hautbois, Rain différentes approches». Trapéziste de formation, elle clarinette, cor, trompette, trombone et contrebasse. Cirque Éloize puise dans son expérience pour outrepasser la ligne Sous la direction de Raoul Lay, les musiciens joueront Les 21 et 22 nov de sécurité. ce clin d’œil au compositeur français naturalisé Théâtre des Salins américain qui utilisait lui-même des sirènes dans 04 42 49 02 00 Öper Öpis certaines de ses compositions. Entre les deux appels Rain © Agnès Mellon Zimmermann rituels, les instruments feront entendre d’autres & de Perrot stridences et rivaliseront de leur acoustique volume Du 19 au 24 nov sonore… Rhizicon Sirènes et midi net Cie Moglice – Ensemble Télémaque Von Verx Le 2 déc Du 23 nov au 2 déc Lieux publics Théâtre Le Merlan 04 91 03 81 28 04 91 11 19 20 www.lieuxpublics.fr www.merlan.org AU PROGRAMME DANSE 27 Puissants Assises Avec ou sans enfants (voir cahier jeunesse p XI) ne La programmation de Dansem se poursuit fin novem- ratez pas les adolescents de Bruno Beltraõ, dont le > bre au théâtre de Lenche qui accueille 3 spectacles : if hip hop brésilien est sidérant de maturité you open the 40th room (les 23 et 24 nov à 19h) dans chorégraphique et de force pure. Dans un tout autre le cadre de la saison turque (voir Zib 23), puis un trio, genre mais tout aussi radical, toujours au Merlan, la 6 yeux un visage deux pieds, autour d’une proposition création de Maguy Marin. La chorégraphe n’a de Balkis Moutashar, suivie d’un solo de Chiara jamais appris à faire dans la demi-mesure et sa Frigo : 15 minutes sur une chaise. Description d’un combat a, comme toutes ses pièces, 6 yeux un visage deux pieds/Takeya provoqué incompréhension et admiration à Avignon. les 24 et 25 nov Sous des étendards de sang et d’or, l’histoire tragique Théâtre de Lenche part en pelure comme un oignon à bout de larmes… Description d'un combat © Christophe Raynaud de Lage-Festival d'Avignon 04 91 55 68 06 Description d’un combat www.officina.fr Du 16 au 19 déc Scène Nationale du Merlan 04 91 11 19 20 Féminins En Friche www.merlan.org La Minoterie offre une carte blanche à la Cie Le rêve En décembre Dansem envahit la Friche, avec une de la Soie. Qui en profite, pour montrer quatre formes programmation combinée avec le Massalia (voir courtes singulières portées par Louisa Amouche, cahier Jeunesse p XI), la création de Dokuman de Contraints Patricia Guannel, Fleur Duverney et Marie Mustafa Kaplan à la Cartonnerie (le 5 dec), dans le Les nombreux passionnés du Ballet d’Europe pour- Salemi -qui chante ; quant à Patrick Servius il explore cadre de la saison turque (voir Zib 23) et une création ront retrouver la jeune formation dans ses œuvres leur féminité en construisant son spectacle autour de de Barbara Sarreau au Studio : Tchakéla est un après une tournée au Maroc saluée en termes dithy- leurs dialogues croisés de femmes, qu’il observe, travail au long cours que la chorégraphe a entrepris rambiques dans la presse. Le ballet produit ses extérieur et fasciné… Une Cie dont se dégage, avec des élèves danseurs du conservatoire de Worshops désormais rituels, et toujours d’une très indéniablement, une grande chaleur, une écoute Bamako. Il s’agit de «creuser» et, dans cette étape de belle qualité, dans la petite salle de la Friche ! Des réciproque et un sens particulier du temps, posé. travail qui se donne à voir déjà comme un spectacle, conditions de représentation qui imposent aux gestes Carte blanche au Rêve de la Soie de savoir que Les mots aussi peuvent mourir. des contraintes d’espace, voulues par Jean-Charles Du 3 au 5 déc Tchakéla Gil, qui désire que ses danseurs se confrontent à la La Minoterie Du 8 au 12 déc réalité matérielle de certaines représentations 04 91 90 07 94 04 95 04 96 42 actuelles : sans coulisses, sans élan, toujours à vue, www.minoterie.org La Friche la danse se construit autrement… www.marseille-objectif-danse.org Workshops du Ballet d’Europe 04 91 55 68 06 Du 15 au 19 déc Ouverts www.officina.fr Petit Théâtre, La Friche 04 96 13 01 12 www.balletdeurope.org Gourmand À la Minoterie aussi Dansem prend ses quartiers, en invitant le chorégraphe tunisien Radhouane El Érotique Meddeb pour son solo Quelqu’un va danser (voir p 28), et le lendemain pour une performance plus Le Cabaret de Decouflé n’est pas seulement sexy : particulière intitulée Je danse et je vous en donne à il est érotique. Si le chorégraphe a choisi de découvrir bouffer : il s’agit de chorégraphier la préparation du les corps et de produire un spectacle au croisement couscous… mais aussi d’en faire sentir les épices, les du cabaret, du strip-tease et de la danse, c’est parce odeurs et le goût ! qu’il aime les fesses. Rebondies, fermes, masculines, Radhouane El Meddeb musclées, féminines, rondes, exhibées. Son festival Sextet © Agnès Mellon Les 10 et 11 déc visuel a donc cette fois des relents moins sages et Le Ballet National de Marseille de retour de tournée La Minoterie colorés. Toujours dans le visuel et le mot, mais sans offre à son public, en son Studio, ses premières 04 91 90 07 94 jeu d’illusions… Ouvertures danse de la saison : ces soirées sont www.minoterie.org Cœurs croisés destinées à établir un lien de proximité entre les 04 91 55 68 06 du 11 au 19 déc danseurs du Ballet et le public, mais aussi à ouvrir le www.officina.fr Théâtre du Gymnase studio à d’autres compagnies, d’autres esthétiques. 0820 000 422 Ce sera le cas en décembre, avec l’accueil de Miguel www.lestheatres.net Nosibor (voir p 30) et Caroline Bo. Les danseurs du Attendu Ballet auront leur ouverture une semaine avant, avec La création du duo entre Isabelle Cavoit et Thomas Fourneau Cœurs Croisés © Agathe Poupeney une pièce très japonaise, version contemporain, a été retardée : en répétition, à quelques jours de la pre- plastique et tendu, de Yasuyuki Endo et le très beau mière, la danseuse s’était blessée. Please kill mesera donc Sextet de Malandain que le BNM avait dansés l’an créé en décembre : exploration autour du couple et de dernier à l’Opéra. Avec également une création de la ses représentations, à partir de l’idée d’une Clytemnestre classe d’insertion professionnelle. Des moments qui ne tuerait pas son époux infanticide, et s’accommo- toujours précieux. derait de son retour, dans une violence toujours croissante Sextet, TéToté, Justamant pas et irrésolue. Un meurtre inaccompli… Du 10 au 12 déc Please kill me Caroline Bô et Miguel Nosibor Du 3 au 5 déc Les 17 et 18 déc Les Bernardines 04 91 327 327 04 91 24 30 40 www.ballet-de-marseille.com www.theatre-bernardines.org 28 DANSE AU PROGRAMME Bavardes Féminines À Aix, Dansem pointe sa programmation en colla- Une création de la Zampa à Nîmes ! La compagnie borant avec le 3bisf pour la création de Geneviève a été accueillie en résidence et crée Daisy Cutter, du Sorin et Lulla Chourlin, Sur Paroles. Le duo entre nom de la bombe utilisée au Vietnam, puis en ces deux femmes a été élaboré durant une résidence Afghanistan, jusqu’à la fin des années 80. Explosive, de création dont elles ont présenté des étapes. Un violente, cette «faucheuse de pâquerettes» est une spectacle où elles disent leurs corps de femmes, leur pièce pour cinq femmes plongées dans un dispositif > âge aussi, la relation, la déraison. sonore agressif, et une vidéo onirique représentant leurs états de conscience interrompus par les Sur Paroles explosions extérieures. du 26 au 28 nov Une pièce à ne pas mettre entre les mains des plus 3bisF, Aix jeunes, contrairement à la création de Nathalie Per- 04 42 16 17 75 nette quelques jours plus tôt (voir cahier jeunesse p Daisy Cutter © Christel Olislagers La Zampa www.3bisf.org XIV). 04 91 55 68 06 www.officina.fr Daisy Cutter Argentin Les 17 et 18 déc Tango Metropolis, un spectacle haut en bandonéon, Théâtre de l’Odéon, Nîmes talons qui claquent, moues dédaigneuses et nuques Intimes 04 66 36 65 10 raidies, fait aussi escale à Sainte-Maxime. Malgré le À Arles Dansem retrouve ses quartiers habituels, le www.theatredenimes.com talent des danseurs et des musiciens (Daniel Binelli), Théâtre étant toujours aussi accueillant à la danse Tango Metropolis nous avait paru un peu froid l’an contemporaine. Bouchra Ouizguen, chorégraphe dernier aux Salins. Sur le plateau moins grandiose du contemporaine marocaine, fait un retour au gynécée Décapée Carré peut être sera-t-il plus sensuel, tout en restant en laissant parler la sensualité des femmes entre elles, aussi sublime ? en s’inspirant des gestes et chants des cérémonies de mariage. Côté femmes, bien sûr. Tango Metropolis Le théâtre accueillera ensuite Radhouane El Meddeb le 5 déc pour son solo Quelqu’un va danser. Le comédien Carré Léon Gaumont, Sainte Maxime tunisien a mis longtemps à venir à la danse, restrei- 04 94 56 77 77 gnant son corps à l’art plus consensuel du théâtre… www.carreleongaumont.com C’est ce passage à l’acte qu’il met en scène dans ce solo drôle d’autodérision, et émouvant de sincérité. >

Madame Plaza

Le 20 nov G (Giselle) © Chris Herzfeld Quelqu’un va danser Le 15 décembre Quand Garry Stewart s’attaque à Giselle, il ne reste Théâtre d’Arles plus grand-chose de son univers romantique convenu. 04 90 52 51 51 Seule l’initiale, G, subsiste, et la violence du désir, la www.theatre-arles.com présence effrayante des Willis, les fiancées mortes, et

> une vidéo qui renforce encore l’impression d’une

Madame Plaza © Adil Rabih virtualité envahissante qui détruit le réel, l’amour vrai de la jeune paysanne. Ne le loupez pas : le Ballet Australien qui passe à Nîmes, après le théâtre de la Ville (Paris), et avant de repartir vers le nord sans autre date dans la région…

G (Giselle) Les 9 et 10 déc Théâtre de Nîmes 04 66 36 65 10 www.theatredenimes.com Tango metropolis © Tetsu Maeda Chinois Autre relecture d’un grand ballet : le Casse-Noisettepar Casse-Noisette le Cirque National de Chine ! Leur tradition du cirque les 14 et 15 déc est celle d’un art total, et les artistes sont à la fois des Théâtre de Nîmes danseurs et des acrobates virtuoses. Leur version du 04 66 36 65 10 Casse-Noisette suit l’argument initial qui est, il faut le www.theatredenimes.com dire, un des seuls arguments intéressants du ballet romantique (merci Hoffmann !). Tchaïkovski est dans le 20 déc toutes les oreilles (si, si, même si vous ne le savez plus), Carré Léon Gaumont, Sainte Maxime les circassiens chinois sont toujours éblouissants, et 04 94 56 77 77 leur costumes et leurs décors inimitablement fééri- www.carreleongaumont.com ques. À voir en famille, ou sans, comme une fête!

Jazzy Viril Raphaelle Delaunay, chorégraphe à Treize hommes de la pampa martèlent l’univers contemporain mâtiné de tech- le sol, jouent la virilité, le cuir, le duel. nique classique, se penche sur le jazz Che Malambô ! est une plongée dans la et le swing, les danses afro-améri- tradition argentine, toujours vivace, qui caines, et invite quatre autres danseuses permet d’abord aux hommes de danser, à se laisser prendre dans leurs rythmes. c’est-à-dire à l’origine aux Gauchos de Avec Asha Thomas, garante des styles mesurer leur virtuosité en frappant la des années 30, mais aussi un côté plus terre, et des tambours. funky et hip hop, antillais… apporté par les autres interprètes. Un parallèle Che Malambô entre les années folles et les nôtres ? Le 5 déc Le Cube, Gap Bitter Sugar 04 92 52 52 52 Le 24 nov Théâtre des Salins, Martigues 04 42 49 02 00 Chuchoté www.theatre-des-salins.fr

Parfait Les solistes du ballet de l’Opéra de Paris font partie, sans conteste pos- sible, des meilleurs danseurs du monde. Le funambule © J.-C. Carbonne Onze d’entre eux se sont regroupés Créé cet été à Montpellier Danse le autour de Bruno Bouchez dans en une premier solo d’Angelin Preljocaj est compagnie informelle, nommée Inci- un autoportrait paradoxal, et un véri- dence chorégraphique, et proposent table exercice de funambule. Une voie ça et là un spectacle fondé sur des ouverte entre un texte et un plateau, un extraits virtuoses des répertoires ro- corps admiré et une voix désirante, un mantiques et classiques (Roméo et écrivain et son étoile. Sur le fil Preljocaj Juliette, Giselle…) des chorégraphies joue parfois l’auteur qui créé, parfois le contemporaines et des créations. Pour funambule aimé qui vole. Quelque le plaisir d’une interprétation de haut chose de lui-même se dit, sur ce fil, vol… entre deux êtres, entre deux âges aussi, le corps s’abîmant. Dans les mots et Danseurs de l’Opéra de Paris les pas des autres, son propre trajet. Le 6 déc Théâtre de l’Olivier, Istres Le Funambule www.scenesetcines.fr Du 23 au 28 nov Le Pavillon Noir 0811 020 111 04 42 55 24 77 www.preljocaj.org Naturel Bagouet par les danseurs du CCN de Chinoise Lorraine, c’est la garantie d’un moment Une autre danse qui nous vient de de bonheur. Les Petites Pièces de Chine. Non de sa tradition mais de son Berlin ont vingt ans, et les revoir nous histoire récente. Wen Hui danse son replonge à l’époque d’or de la nouvelle enfance, son pays, sa mère. Un retour danse française, légère, virtuose pour- sur la révolution culturelle et ses op- tant, relâchée, colorée, cherchant à pressions. Pionnière de la danse inventer une gestuelle naturelle mais documentaire, elle dit dans son corps, vraiment dansée, et composée. Une et dans les projections des grands époque et une danse proches et loin- événements dans une petite chambre, taines déjà, dont le Ballet de Lorraine le poids de l’histoire chinoise, lour- s’empare comme d’un répertoire, grâce dement collectiviste, sur les individus à la transmission directe des danseurs isolés. d’origine… Memory Petites pièces de Berlin Les 3 et 4 déc Le 26 nov Le Pavillon Noir La Passerelle, Gap 0811 020 111 04 92 52 52 52 www.preljocaj.org 30 DANSE AVIGNON | DANSEM | PAVILLON NOIR Prolongements Le solo de Ayse Orhon met au jour ce que savent tous les intrumentistes : faire de la musique est un exercice physique qui établit un rapport de plaisir et de souffrance, érotique et masochiste, avec un objet qui a une âme. La harpe, en plus, a presque un corps. La danseuse est en contact per- manent avec le bois, les cordes, les courbes et les arêtes de l’instrument qui, tel un monolithe, s’offre et se refuse, impénétrable, presque muet. Bien sûr l’argument est un mince pour construire une pièce entière, qui souffre de longues langueurs. Mais la danseuse est magnifique, et offre quel- ques images inoubliables : ô quand elle Ayse Orhon © Ekmel Ertan entre dans la colonne et telle une sirène sublime qui rend la souffrance, l’hor- manque de présence dit un texte un concerne tous-, Sans… ressemble se traîne sur le sol avec son appendice ! reur des camps, dans un solo d’un peu vide ; le témoignage du grand-père, pour l’instant à un ressassement ô quand elle soulève et tourne, tourne, intensité rare, tout droit planté, rivé au touchant dans ce qu’il évoque, reste inassumé. jusqu’à ce que la résonnance en l’air sol, lançant son corps dans un mou- banal ; l’image dernière, reconstitution AGNES FRESCHEL se fasse et que la harpe parle, enfin ! vement perpétuel de balancier qui plastique dérisoire de la découverte La création de Manon et Fanny Avram lentement accélère, sa tête dans des des charniers, frise l’indécence. Hars et Sans ont été proposés est elle aussi inégale ; le propos, arrachements expressionnistes qui Faire du théâtre documentaire est aux Bernardines dans le cadre retrouver la mémoire d’aïeuls disparus évoquent Bacon et Munch, ses bras délicat. Quand il touche à l’intime d’aussi de Dansem à Auschwitz, que l’on devine intime et dans des élans sporadiques qui vou- près, mettre le réel à distance est fondateur pour les deux sœurs, est draient l’arracher du sol. Pour le reste, risqué : au lieu d’atteindre à l’universel magnifiquement relayé par un danseur des maladresses : une comédienne qui -cette histoire de l’horreur absolue nous Sans musiciens ? scène ; la dernière, rapide, floue, à C’est sous le signe de la danse et de Hip hop peine visible, nous dévoile des images chorégraphies signées Eric Belaud, d’enfance, comme volées. directeur du Ballet de l’Opéra d’Avi- Le spectacle est là, dans ce dé- gnon, que le public a pu découvrir la intime voilement, accompagné d’une (bonne) trop méconnue Symphonie de Psaumes musique de synthèse qui souligne de Stravinsky : composée pour chœur toujours à point nommé les change- mixte à quatre voix et orchestre (sans ments d’ambiance. Mais le plus violons ni altos mais avec grosse remarquable est dans la danse même : caisse et deux pianos), cette œuvre Miguel Nosibor vient du hip hop, il en datant de 1930 est une commande du possède toutes les techniques, est Boston Symphony orchestra pour le impressionnant dans les tremblements, cinquantenaire de sa naissance. Ce hyper précis dans ses placements et chef-d’œuvre, écrit sur des textes ses arrêts, puissant au sol. Mais il latins et composée «à la gloire de Dieu» conçoit et interprète son solo comme (psaumes 38, 39 et 150), a su capter un danseur contemporain : en cons- l’attention du public, et Eric Belaud et truisant un propos dans l’espace et sa troupe avignonnaise ont fait naître © Christian Varlet non en proposant une suite de nu- un enthousiasme certain en faisant de Le solo de Miguel Nosibor tient toutes ses promesses. méros virtuoses. En allant jusqu’au cette symphonie intime et sombre une Programmé au Pavillon Noir, il sera bientôt au Ballet fond de lui-même, et non en utilisant la force de son corps pièce chorégraphique nouvelle. National de Marseille puis au Comœdia d’Aubagne -le comme une armure impénétrable au regard. En première partie fut dansé l’Oiseau chorégraphe y réside et est soutenu par la Ville. Chacun D’autres du hip hop l’ont fait avant lui, plutôt par la prise de de feu, dans une version proche de pourra ainsi aller à la rencontre d’un artiste singulier qui a su, parole que par le corps, qui reste souvent m’as-tu-vu. Déci- celle qui fut créé à Paris le 25 juin 1910 avec Temps d’Arrêt, mettre à profit l’occasion qui lui était dément, cet art qui vient de la rue continue de bouleverser par les ballets russes sur la choré- donnée par deux centres chorégraphiques de peaufiner ses les scènes ! graphie de Michel Fokine. recherches et présenter un travail abouti. A.F. Les danseurs du ballet de l’Opéra d’Avi- Temps d’arrêt propose un trajet simple et limpide : trois gnon en ont donné une version épurée vidéos ponctuent la pièce et nous emmènent vers l’intimité et intéressante, mais on ne peut que de l’artiste. Une, en ouverture, sert de repoussoir, montrant Temps d’arrêt a été créé regretter que la musique de Stravinsky la ville en accéléré, la consommation hystérique ; l’autre, au au Pavillon Noir du 4 au 9 nov. ait été diffusée par des haut-parleurs… cœur du solo, exhibe le corps du danseur dansant : de près, Il sera repris au BNM les 17 Dans un opéra avec un orchestre à avec des effets de décrochage du regard, comme s’il s’agis- et 18 déc (voir p 27) demeure, c’est un comble ! sait de dépasser la frontière de ce qu’il nous montre sur CHRISTINE REY

32 MUSIQUE CONCERTS Contemporain confessionnal Le solo de Benjamin Dupé est surprenant ! Le sensations. Un sens. Le guitariste s’empare alors de guitariste-compositeur propose un spectacle- son instrument électrique, et fait entendre, enfin concert plein d’autodérision, qui joue des préjugés debout, une longue composition aux timbres inven- liés à la musique contemporaine. Inaudible, agressive, tifs, au trajet limpide, quelque chose entre le rock insensée, c’est du bruit, disent les plus délicats, sans que l’instrument évoque sans y toucher, et une structure, sans émotion, sans discours. Quelque chose Sequenza pour guitare électrique que Berio aurait que jamais on n’écouterait chez soi. Benjamin, seul négligé d’écrire. sur sa chaise avec sa guitare sèche, subit les assauts Une porte est ouverte à tous pour entrer en son des haut-parleurs, leurs vibrations qu’il déclenche, monde : par la musique, l’humour, la performance les paroles qu’il a suscitées autour de sa musique. autobioscénique. Allez-y voir ! Il subit, joue, et dit : sa passion de jouer ça, cette AGNES FRESCHEL musique, depuis toujours ; sa douleur, étonnée puis acceptée, presque amusée, d’être perçu au quotidien Comme je l’entends a été créé aux Salins le 20 oct. comme un zombie extraterrestre ; son envie de Le Merlan partage. les 1er et 2 déc Et puis il joue. Des pièces très différentes. Très struc- 04 91 11 19 20 turée, obstinée même, virtuose aussi, pour répondre www.merlan.org au n’importe quoi reproché par la bande. Lyrique, Le Cadran, Briançon lente, crescendo pour réfuter l’accusation de froideur. les 8 et 9 déc Évocatrice, presque figuraliste, pour donner à voir. 04 92 25 52 52 Alors les commentaires enregistrés semblent lui répondre, évoquent des trajets, des histoires, des Transat Express Lors des Trans’Electroacoustique au GMEM du 11 au 13 nov, le voyage musical sur transat s’est déroulé loin du gros temps… … et dans un confort absolu! Pourquoi ne pas de turbulences à traverser en octophonie, avec au joindre l’utile à l’agréable en étant confortablement poste de pilotage le compositeur lui-même pour installé au fond d’un transat ? Vous l’avez rêvé, le une interprétation vivante à la manière du live GMEM l’a fait. Concept singulier pour une musique electronic. Vide et silencieux, l’espace devient spatialisée, qui vous allonge les yeux fermés. Nul dense, touffu et frénétique, nécessitant une bonne besoin de s’éloigner pour voyager. La musique accroche à son transat ! Secousses et trous d’air électroacoustique est un endroit où l’on se plonge continuent de ponctuer Six doors de Christophe et rien de tel qu’un lieu approprié où, entouré Ruetsch, avant que la Transhumance concoctée par d’enceintes, pour traverser l’œuvre de l’intérieur. Stephan Dunkelman, également aux manettes, ne Bruit blanc de Hugues Germain nous rapproche des clôture ce voyage initiatique sur des images marais salants, de la mer, et permet un décollage oppressantes et haletantes d’Effi & Amir. Un vol immédiat pour atteindre la création de Jean-Luc dégriffé pour une exploration du son ! Gergonne. Commande du GMEM, Tribu est une zone FREDERIC ISOLETTA Cru de 1946 ! Le Fine Arts quartet a acquis avec l’âge un bouquet aux mélodies sans teintes, justifient l’accusation faite et une rondeur inimitables. En cette soirée du 21 au compositeur d’être formaliste et conservateur! L’in- octobre au Jeu de Paume, quatre artistes étaient re- terprétation, toujours excellente, ne put sauver la liés par la grâce de leur archet et leur passion de la sécheresse de l’œuvre. Heureusement, les premières musique. Avec trois œuvres au cépage différencié : notes de l’œuvre de Schumann se chargèrent de le quatuor n°7 de Chostakovitch, le quatuor n°1 de réveiller nos sens. Les trois quatuors du compositeur Saint-Saëns et le splendide quatuor n°1 op.41 de allemand enregistrés en 2007 par le Fine Arts avaient Schumann. L’œuvre du compositeur russe, douce âpre- fait l’unanimité de la critique : on comprend pour- té, rêche à souhait, laissa en bouche une délicieuse quoi. Tout l’univers du compositeur fut sublimé par amertume : les phrases ciselées, erratiques, s’éparpil- une interprétation sans failles : scherzo pétillant, lèrent et laissèrent sur le sol les brisures de l’âme de mélodies sculpturales, harmonies subtiles, adagio Chostakovitch. L’ensemble, à la technique fascinante tout en déséquilibre toujours à la limite de la rup- (le violoncelliste !), sut donner à la pièce tout son ture… superbe. relief avec une émotion contenue et distanciée. Dix En bis le quatuor L’alouette de Haydn, en hommage minutes d’une rare intensité qui laissèrent le public au premier maître du genre, termina cette soirée. Le en émoi. Fine Arts 2009 est un grand millésime, à consom- Le quatuor de Saint-Saëns, qu’il qualifia lui-même mer sans modération ! de «besogne nécessaire», fit l’effet d’un verre d’eau CHRISTOPHE FLOQUET après un grand cru ! Quatre mouvements insipides, 33 Un vent de fraîcheur Au regard de ses multiples expérien- pour qualifier la fraîcheur de son jeu tueuse diaprure, à l’image de l’univers ces professionnelles, avec Itzhak et de l’éclat de sa jeunesse. fertile et fantasque du compositeur Perlman, Pierre Boulez… difficile L’entracte qui marqua la fin de la pre- russe. La grande porte de Kiev, dernier d’imaginer que le pianiste présent sur mière partie surprit tout le monde mouvement de ces Tableaux d’une scène ce 10 nov a seulement 23 ans! tant le concert semblait débuter ! Mis exposition, fut comme le signe d’une Virtuose accompli, David Kadouch en appétit par cette prestation de carrière qui s’annonce majestueuse ! construisit, autour de l’œuvre de Mous- premier ordre, chacun était curieux Les trois bis proposés par David sorgski Les tableaux d’une exposition, de voir comment ce jeune artiste allait Kadouch n’excorièrent en rien l’unité un programme original, composé de gravir la montagne Moussorgski ! La du concert, et finirent de séduire le pièces peu jouées, telles que les va- réponse fut donnée quelques quarante public exigeant du Grand Théâtre… riations en fa mineur de Haydn et le David Kadouch © X-D.R. minutes plus tard, avec un Kadouch CHRISTOPHE FLOQUET Rondo en sol majeur Le sou perdu de arachnéen transformant l’instrument radieux sous les éclats retentissants Beethoven. Il offrit une interpréta- soliste en véritable orchestre. L’inter- des applaudissements drus de l’audi- tion digne des plus grands avec une prétation qu’il fit du Rondo nous aide toire : il avait réussi à faire oublier grâce et une légèreté déconcertantes : à mieux saisir pourquoi Barenboïm le l’orchestration éclatante de Ravel, à les voix circulaient délicatement sous sélectionna à 20 ans pour enregistrer jamais présente dans la mémoire col- ses doigts, s’entremêlaient sans jamais Barenboïm on Beethoven : pétillant, lective, s’appropriant l’œuvre et la se brouiller, pour tisser un univers enjoué, malicieux, autant d’épithètes faisant briller de mille feux, somp- Schubert, naturellement Concept original le 14 nov au GTP, imaginé par la chef passés par l’orchestration du compositeur contempo- Laurence Equilbey : des lieder de Schubert au rain Franck Krawczyk distribuaient judicieusement parfum de Nature, cette alliée du XIXe siècle musical, notes et couleurs au chœur Accentus : le sombre étaient donnés par l’Orchestre Régional de Cannes Das Grab (la tombe) pour voix d’hommes soutenues dans leur version orchestrée. Exercices d’école mais seulement par les cordes graves en fut la démons- véritable travail d’orfèvre, La Truite, Le Roi des tration. Le beau timbre et la grande présence de la Aulnes ou Du bist die Ruh sont passés entre les mains soprano Pauline Courtin ont permis d’exhumer la de Brahms, Reger, Liszt, Berlioz, Offenbach, Richard cantate méconnue, avec chœur et orchestre, Strauss, inspirant même Webern et Britten pour des Mirjams Siegesgesang. Certes aux antipodes de résultats étonnants ! Ils furent remarquablement l’intimité de l’accompagnement piano, ces versions servis par les voix solistes de la mezzo Renata revisitées n’en sont pas moins d’intéressantes dé- Pokupic et du ténor Robert Getchell, même si couvertes, signées par de véritables compositeurs. Laurence Equilbey © Agnes Mellon l’accompagnement instrumental n’a pas été à la FREDERIC ISOLETTA hauteur quant à la netteté des attaques. Les lieder Rester debout ! La garnison de Terezin, près de Prague, bâtie au finale à Auschwitz, 35 000 y disparurent corps et de «rester debout», puisant dans leur art une once temps des guerres napoléoniennes était prévue pour âme. Comble de l’horreur, le IIIe Reich, pour donner d’énergie qui sauve un temps de l’abîme. C’est cette 6000 soldats. Elle fut utilisée par les nazis, comme le change à la Croix-Rouge lors de visites en expression qu’ont fait revire avec beaucoup camp concentrationnaire de transit. Près de 160 1944-45, y créa l’illusion d’un camp «modèle» ! d’émotion la mezzo-soprano Anne Sofie von Otter, 000 juifs y séjournèrent avant leur destination Teresienstadt devint une ville de propagande : lits, le violoniste Daniel Hope, accompagnés par Bengt chambres repeintes à Forsberg au piano et le multi-instrumentiste Bebe Anne Sofie Von Otter © Agnes Mellon neuf, balançoires pour Risenfors. Une berceuse tendre, un chant plaintif, les enfants, cafés, une sérénade ou des airs de cabaret, parado- école fictive… rien ne xalement gais, composés par de jeunes hommes et fut oublié, ni même un femmes exhumés avec justice et justesse, ont orchestre réuni pour côtoyé des opus de véritables compositeurs assas- interpréter le Requiem sinés dans la fleur de la quarantaine : Victor de Verdi ! Il va sans Ullmann et Erwin Schulhoff. dire qu’à la veille des JACQUES FRESCHEL visites, le camp était «vidé» des invalides, et C’était au GTP le 15 oct. qu’au lendemain, tous les acteurs du carnaval macabre rejoignaient les wagons plombés… Dans ce contexte, des musiciens trouvèrent néanmoins le moyen 34 MUSIQUE CONCERTS

Amants disparates Français mineurs Le concert du mois d’octobre de musique de chambre, proposé par l’Opéra de Marseille, fut consacré à des compositeurs français du tout début du XXe siècle, assez méconnus C’est sur un quatuor de Lucien Niverd On entendit pour finir trois œuvres que s’est ouvert ce programme. Le Qua- d’André Caplet, à l’écriture assez dé- tuor du Parvis, avec à sa «tête» (premier pouillée : des extraits de sa Messe aux violon) Sylvie Niverd, a su l’interpréter accents grégoriens, son Septuor pour avec une certaine musicalité, en four- chœur de femmes et quatuor à cordes, nissant de toute évidence un travail ainsi que ses Inscriptions champêtres, abouti sur le phrasé et les nuances, mal- bien interprétées dans leur globalité. Manon Lescaut © Christian Dresse 2009 gré un manque de cohésion et quelques On regrette d’autant plus qu’aucun pro- Yves Coudray, dans sa mise en scène de Manon Lescaut a voulu, comme le pertes de justesse malheureusement gramme, aucune biographie n’aient stipulait Puccini, se démarquer du Manon français de Massenet, de ses audibles. été distribués pour éclairer les audi- références au XVIIIe siècle, en situant l’action aux alentours de sa date de L’Ensemble vocal Hymis a enchaîné sur teurs à propos des compositeurs, ou création en 1893. Les costumes de Katia Duflot y renvoient à l’évidence, quand le Madrigal aux Muses d’Albert Roussel. expliquer ce choix de programmation. les décors stylisés de Michel Hamon n’exploitent peut-être pas la piste Œuvre difficile, de par ses nombreux Car on prit plaisir à découvrir dans ces ébauchée au premier acte d’une architecture géométrique aux couleurs à plat: glissements, ses intervalles peu natu- partitions peu familières des accents les tableaux manquent d’unité et le deuxième d’éclat. rels et son écriture très contrapuntique, ravéliens, debussiens… mais on n’y Côté plateau, si Catherine Naglestad déçoit dans les deux premiers actes, exécutée cependant sans couacs ni retrouva pas toujours l’invention im- dans sa volonté d’alléger l’émission des aigus, et de rendre à la jeune Manon décalages, grâce à la direction claire pressionniste qui fait le génie de la sa verdeur naïve, la soprano l’emporte aux deux derniers grâce au pathos de Bénédicte Pereira. musique française de cette époque, assumé d’un chant plein et généreux. Mais sans un grand Des Grieux, l’opus ne et la pertinence de ces peut triompher ! Zwetan Michailov, certes arrivé à la dernière heure, n’a ni la procédés : ne restent puissance, ni l’expression, ni un timbre suffisamment engageant pour récolter qu’une recherche de autre chose que des applaudissements courtois. Marc Barrard barytone à la simplicité et quelques française avec une couverture vocale élégante et un vibrato facile : son Lescaut accents exotiques, qui séduit, comme le riche barbon de Jacques Calatayud et les nombreux rôles n’ont pas très bien annexes bien campés. vieilli. Dans cette production aux réussites inégales, c’est l’Orchestre de l’Opéra qui SUSAN BEL empoche les véritables lauriers ! La direction de Luciano Acocella tisse finement les couleurs instrumentales et cultive le naturel d’un instinct mélodique dont Puccini avait le secret. Dans ce contexte, l’Intermezzo du 3e acte gagne les faveurs du public, et fait positivement basculer l’ouvrage. JACQUES FRESCHEL Quatuor du parvis © X-D.R. Sturm und Drang Le cycle Musique et Poésie, initié par tout épreuve mais également pétri de grandeur». émotion épurée. On frissonne carré- le Consulat général d’Allemagne et références antiques, de quête d’idéal Mozart, que l’on se figure, souvent à ment, lorsque après avoir entendu la Cité de la Musique, s’était attaché dans la lignée de la modernité des tort, plus mesuré, plus intellectuel que Werther déclarer qu’il ne reverrait plus le mois dernier au couple Robert/Clara Lumières. Winckelmann le qualifiera ses successeurs romantiques, savait jamais sa Charlotte, on (re)découvre Schumann (voir Zib 23). C’est à Mozart d’«art de noble simplicité et calme lui aussi faire la part belle à une la Chanson de la séparation, petit qu’il a consacré son deuxième concert, Christine Kattner © David Olivari bijou d’intensité et de retenue. ainsi qu’à des extraits des Souffrances Dix textes, très bien choisis, suffiront du jeune Werther de Goethe. à faire le tour du roman. Michael Pourquoi rapprocher ces deux auteurs ? Zugowski les récitera avec un plaisir On sait que Goethe vouait à Mozart évident et très communicatif. Côté une admiration sans bornes, qui le musique, on est à nouveau très ému poussa notamment à écrire une suite par les prouesses vocales de Christine de la Flûte enchantée ou à sadiser Kattner. Un peu incertaine dans quel- Eckermann (qui transforma son Faust ques attaques, son interprétation fut en opéra), en lui demandant d’écrire splendide dans la plupart des Lieder. dans le style de Don Giovanni et en On retient également la prestation de lui reprochant, évidemment, de ne pas Ludovic Selmi, qui a su soutenir sa y arriver. Mais on constate également, partenaire avec technique, clarté au fil du concert, un traitement assez mais aussi discrétion. Et on attend semblable de l’émotion ; le Classi- avec impatience le concert du 4 cisme de Weimar, initié par Goethe et décembre, consacré à Wagner… son Werther mais aussi Schiller, Herder, SUSAN BEL Wieland, est empreint d’un lyrisme à 35 Regards croisés Pour le dernier concert de l’Automne Baroque à l’église Saint-Laurent le 25 octobre, le Concerto Soave a cultivé les correspondances artistiques entre Venise et l’Orient. Visitez la Sérénissime et jetez un œil sur l’architecture et l’orne- mentation : le miroir esthétique entre l’orient et la cité des Doges existe également sur le plan musical. Le programme proposé par Jean-Marc Aymes (orgue et clavecin) mettait en lumière ces regards croisés sur deux mondes plus proches que nous le croyons. Le Palestinien Moneim Adwan (chant et oud), sur ses propres textes ou sur ceux du poète Mahmoud Darwich, fut le symbole d’un aller retour pertinent offrant au public enthousiaste une cohérence d’opus d’une parfaite symbiose. Matthias Spaeter à l’archiluth, Christine Plubeau à la viole de gambe mais surtout Maria-Cristina Kiehr au chant surent donner un relief saisissant à ce miroir de mosaïques. Les mélismes ornementaux de Monteverdi prolongeaient naturellement le chromatisme au quart de tons de l’autre rive, donnant un éclat naturel à cette très belle initiative. FRÉDÉRIC ISOLETTA Maria-Cristina Kiehr © X-D.R. Lyrisme sur le fil Une fois de plus, la programmation Bach, auxquels il prêta une virtuosité mélodie/harmonie les œuvres pour du Festival de Saint Victor a su nous exceptionnelle, à la nostalgie fausse- guitare moins connues d’Augustin surprendre. Les occasions d’entendre ment naïve de Schubert, en passant Barrios, Franciscos Tarrega et les un duo violon-harpe sont en effet par un Saint Saens et un Dvorak que variations pour harpe d’Elias Parish assez rares, et c’est avec grand plaisir l’on a eu l’impression de redécouvrir. Alvars. que l’on put apprécier le mariage Certains ont pu tiquer à l’écoute des Un peu plus effacée dans les duos, elle inhabituel mais détonnant de ces Danses Roumaines de Bartók, que le sut cependant soutenir sans le moindre deux instruments, maniés par deux jeune soliste romantisait un peu par faux pli son partenaire. La complicité solistes remarquables. endroits ; il s’avéra cependant inatta- évidente des deux musiciens, qui se La prestation de Nemanja Radulovic quable dans son traitement des produisent régulièrement ensemble au violon, fut brillante de bout en harmoniques, merveilles de tendresse depuis 10 ans, se ressentait dans cha- bout. Son jeu, passionné mais élé- et d’intensité. que dialogue, chaque enchaînement, gant, sut rendre les subtilités de Marielle Nordmann a su interpréter chacune des nombreuses envolées chaque œuvre : du phrasé ingénieux avec une aisance évidente et beau- lyriques … et faisait plaisir à voir ! et des accents polyphoniques de coup de clarté dans les rapports SUSAN BEL Nemanja Radulovic © Caroline Doutre

Entre rêve et réalité Grand succès et nef bondée pour la formule trompette et orgue au 43e Festival de Musique de Saint-Victor le 6 novembre Avec deux stars comme le tout jeune und Isolde. Le timbre suave et velou- trompettiste David Guerrier et l’orga- té de la trompette put alors corroborer Belles trames niste confirmé Olivier Vernet, le public le climat onirique installé par l’orgue, Saluons la programmation musicale de l’équipe du Méjan d’Arles : son directeur ne s’est pas fait prier, démontrant sa laissant de côté les sempiternelles artistique Jean-François Heisser concocte régulièrement un programme qui fidélité au festival. L’association des pages virtuoses. n’hésite pas à s’engager dans le domaine contemporain : Actes Sud et sa ligne deux instruments est de plus un gage FREDERIC ISOLETTA éditoriale ne sont pas loin. de réussite, et fait le bonheur de David Guerrier © Christophe Abra mowitz Témoin l’interprétation par l’Ensemble Les siècles des 3e et 5e Concertos nombreux concerts estivaux. Et le Brandebourgeois encadrant les Trames II & VIII du compositeur Martin Matalon programme dans tout ça ? Il fut hélas et sous la direction de François-Xavier Roth. Rappelons le principe de ces trop axé dans les clichés estampillés interprètes, capables de s’adapter à l’instrumentation originale d’une époque «tubes du classique». La Suite en ré donnée. Dans ce contexte, on peut saisir tout l’intérêt de faire entendre le de Haendel ou Jésus que ma joie procédé contrapuntique, soit le développement conjoint de plusieurs trames demeure de Bach furent tout de même musicales, à deux époques différentes. La sonorité baroque et ouatée des trois concurrencés par les Prières sans chœurs de cordes du 3e Brandebourgeois révélait chez Bach une richesse de paroles de Damase et les Wesendonck timbre renvoyant aux trames de l’ancien pensionnaire de l’Ircam. Ce dernier lieders de Richard Wagner destinés à faisait jongler ses interprètes avec une multitude de modes de jeux l’origine pour voix et piano. Enfin de (bandonéon, steel drum, cuivres, clarinette basse...), pour le plaisir d’une magnifiques couleurs se sont échap- écoute fraîche et renouvelée, sur laquelle pouvait se poser des passages pées de l’orgue, créant une atmosphère concertants faisant écho à la cadence emblématique du 5e Brandebourgeois. propice à ces pages poétiques et P.A.H passionnelles dont certaines se révè- lent être des esquisses du futur Tristan Ce concert a été donné le 15 nov au Méjan (Arles) 36 MUSIQUE CONCERTS Voyage parisien C’est à l’étage du musée des tapis- écrite pour la princesse Palatine, aux series que se donnait le concert le 5 cadences toutes de brillante virtuo- oct. Salle aux plafonds moulurés, sité. Enchâssées entre les deux des scènes champêtres et musicales re- pièces ignorées, la sonate n° III en sol présentées sur les tapisseries qui mineur du Chevalier Saint George : habillent la pièce, reste d’un décor cet éminent violoniste, qui ne put d’opéra, porte ouverte sur l’imagi- obtenir la charge de Directeur de naire… Le public, trop peu nombreux l’Académie Royale de Musique de mais enthousiasmé par le talent des Louis XVI par le simple fait qu’il était artistes, a eu le bonheur d’entendre métis, a donné au violon une superbe Sharman Plesner au violon et Jean- partition ; et la sonate en ré mineur Paul Serra au pianoforte pour un de Johann Schobert, qui par sa programme dédié à Mozart et son densité dramatique se situe en 1762 deuxième voyage à Paris. comme préromantique ! L’ensemble Deux sonates du compositeur autri- de ces œuvres fut interprété magistra- chien : en mi mineur, K 304, dont les lement, un violon d’une puissance et inflexions douloureuses (la mère de d’un velouté admirables, un piano- Mozart venait de mourir) se dissimu- forte qui savait lui répondre avec brio lent sous les voltes de la bienséance ; et ampleur… et la sonate en ré majeur, K 306, MARYVONNE COLOMBANI Ensemble baroques graffiti © X-D.R. Tapisseries jazz Le 18 oct, dans la salle voûtée du musée des tapis- series, un jeune trio se livrait à un périlleux exercice. Cordes d’argent contre la polio Sylvaine Hélary à la flûte, Hugues Mayot au saxo- Le 17 oct à la cathédrale Saint Sauveur, le club d’entendre par un orchestre symphonique, comme phone, Antonin Rayon au piano et au clavier… Notes Rotary proposait un concert qui ménageait de la Pie voleuse de Rossini… Les voix remarquable- perlées, fluidité des traits de la flûte, virtuosité du jolies surprises, comme une charmante ouverture ment placées de la maîtrise Gabriel Fauré se mêlaient saxophone, jeu riche et varié du piano : l’atmosphère avec la jeune violoniste Esther Abrami qui fêtait ce à l’orchestre, mais l’acoustique desservait les cordes est toute de tensions, de ressassements et de magni- jour-là ses 13 ans, avec l’interprétation de la qui étaient alors couvertes par le chant. Ce beau fiques élans, et les trames mélodiques se réconcilient. sonatine n°1 de Schubert, une Mélodie de Glück et plateau était rassemblé pour réunir des fonds des- Mais il manquait sans doute un préambule qui aurait la Cavatine de Raff. Belles notes tenues, un son que tinés à éradiquer la polio. Pour cela, il sera beaucoup dévoilé au public leurs intentions : les auditeurs des multipliait la hauteur de la cathédrale, de jolis pardonné! nuits pianistiques semblaient manquer de clés pour trilles… Mais l’essentiel du spectacle, un peu long, M.C. comprendre leur propos et partager ainsi leur remar- était tenu avec brio par Les Cordes d’Argent de Saint quable travail de création. Petersbourg, sous la vivante direction d’Alexander Ce concert a été donné dans le cadre M.C. Afanasyev. Etrange d’entendre des orchestrations d’une tournée à Gémenos, La Ciotat, Aix, Ce concert a été donné dans le cadre pour balalaïkas de compositions que l’on a l’habitude et Marseille du 15 au 18 oct des Nuits pianistiques La Méditerranée par le chant L’église Saint Michel de Fuveau ac- sa plénitude, joue, module, enchaî- Quatuor Balkanes cueillait le 22 oct, dans le cadre du nant les mélismes, éclate, s’atténue. © Opus 31 18e festival de Chants sacrés en Médi- Il n’est pas nécessaire de comprendre terranée, deux groupes issus des bords les paroles (traduites dans le program- opposés de la méditerranée : voix me) : le timbre chaleureux, l’expressivité par-dessus la mer, qui se répondent, de ce beau visage de tragédienne nous trait d’union de la musique, langage conduisent vers une aube «parée des accessible à tous. Un projet qui cette couleurs du jasmin d’Arabie»… année unissait en particulier l’Albanie Les chanteuses du quatuor Balkanes, et la Corse. Le thème de cette année, laissant le chant les précéder, entraî- jardins de Paradis, inspira aux musi- nent dès leur entrée les spectateurs ciens des métaphores bibliques ou dans leur monde. Une mise en espace pétrarquisantes, Eden ou jardin de dynamique, inventive, elles sont au- Hespérides, jusqu’au trivial jardin de tant comédiennes que chanteuses. légumes !… Passages joyeux ou graves, enjoués La grande chanteuse syrienne Waed ou sereins, endiablés en rondes Bouhassoun ouvrait le concert. La populaires ou charmeurs et suaves… émotion aussi lors du dernier rappel, ligne monodique du oud, aux larges Les voix des quatre chanteuses lorsque se mêlent les voix des cinq sonorités, joué avec une belle virtuo- s’entrelacent, dessinent de nouvelles chanteuses… L’union méditerranéen- sité, s’accorde à la voix passionnée harmoniques (la basse est excep- ne se concrétise dans le creuset de la chanteuse. A capella, celle-ci tionnelle !). Un régal ! Les costumes magique du chant… occupe l’espace, s’enfle, s’élève, comme à la fois contemporains et tradi- MARYVONNE COLOMBANI d’un murmure intérieur pour atteindre tionnels sont aussi de la fête. Quelle

37 Lumineux Le génie de Charlie Chaplin est décidément incon- testable. On garde souvent le souvenir imprécis mais ému de chacun de ses films. Et on redécouvre chaque fois ses talents de conteur sans paroles, d’acteur (quel regard !) et également de musicien ; ses mélodies, facilement retenues, évoquent toujours des moments précis, le comique ou le tragique de la situation : sa musique a toutes les qualités d’une musique de film réussie. L’Orchestre de Toulon nous a livré une prestation irréprochable sous la baguette de Timothy Brock. Chef d’orchestre mais aussi compositeur, familier des partitions de films muets, il n’a que peu modifié le texte original. Il ajoute quelques bruitages: sirè- nes de polices, sifflets, ronronnements du maire… toujours de manière très imagée. On retient le petit glissando vers l’aigu qui accompagnera le mouvement des spaghettis (puis des serpentins) vers la bouche de Chaplin ! Mais le but est ici, avant tout, de servir l’œuvre. De réentendre la musique, de la moderniser un peu, sans © Roy Export sas jamais s’écarter des souhaits du réalisateur. Pari tenu: photo de Charlie Chaplin, sans maquillage ou cos- les spectateurs peinent à retenir leurs larmes lorsqu’arri- tume. La star de la soirée, c’était évidemment lui. vent les retrouvailles, la scène finale, mythique. SUSAN BEL Le ciné-concert s’est conclu par la projection d’une Feu d’artifice vocal En 1825, Rossini composa un opéra en 1 acte pour le sacre de Charles X peu avant Baroque and drôle de mettre fin à sa brillante carrière de musicien. Opéra de circonstance, Le voyage Heureuse surprise que la re-création au début du XXe siècle, et résolument à Reims ressemble plus à un exercice de style qu’à un ouvrage traditionnel d’art de Psyché, collaboration entre Molière, tournée vers l’humour, ne pouvait lyrique. En effet, l’histoire n’est qu’un prétexte au service de la voix, mise en Corneille et Lully adaptée par l’acteur laisser le spectateur de marbre tant valeur par un bel canto sublime riche en fioritures et en volutes endiablées, tech- et metteur en scène Julien Balajas tout y était fait pour que les zygo- niquement éprouvant qui fait de cette œuvre un des sommets du genre. et par la claveciniste et chef d’orches- matiques soient mis à l’épreuve dans La production du 6 novembre à l’opéra de Toulon a tourné à la démonstration tre Claire Bodin, donnée le vendredi une sorte de «commedia dell’arte». tant le plateau vocal frisait l’excellence : trouver des défauts aux 17 chanteurs 23 octobre à l’opéra de Toulon. En effet, le talent des comédiens présents sur scène ce soir-là semble impossible, et n’en citer qu’un serait faire L’adaptation de l’œuvre nécessitait dispensait une bonne humeur com- injure aux autres ! des choix musicaux et scéniques qui municative, contrepoint idéal à L’orchestre et les chœurs, sous la direction légère et précise de R. Fores-Veses, ont mis en lumière une profonde con- l’aspect tragique et sérieux de la pièce étaient à l’avenant tout comme les lumières, les costumes et les décors au service naissance de l’histoire et de l’esthétique originale, dans laquelle s’inscrivaient d’une mise en scène dynamique et humoristique, dont l’anachronisme conférait du baroque. Dans cette prestation à efficacement l’orchestre, les chan- à l’opéra une résonance étrangement contemporaine. mi-chemin entre le théâtre, la danse teurs et la danseuse. E.M. et la tragédie lyrique, la représenta- EMILIEN MOREAU tion du mythe de Psyché transposée Psyché © Khaldoun Belhatem Razzia coréenne Ils étaient dix au bout des phases éli- nombreux Coréens débarqués sur le minatoires, sur 150 candidats au départ, Vieux-Port. à se trouver devant l’orchestre dirigé Au sommet, la puissante soprano Jee- par Dominique Trottein pour la péril- hye Han a fait l’unanimité dans des leuse finale du 11e Concours International airs de bravoure de Puccini et Verdi, d’Opéra de Marseille. Pour départager quand le bel canto de la pétillante Yu ces artistes, en 2009, Rolando Villazon Ree Jang a séduit. Côté ténors, Jaezig a présidé le jury avec tant de bien- Lee a déployé un timbre brillant et de veillance et passion que la direction l’assurance dans les glorieux contre- du concours a annoncé la probable ut de La Fille du Régiment, alors que désignation de la biennale sous le Minseok Kim a fortement ému dans fameux patronyme du Mexicain. E la solita storia del pastore. Si deux chanteurs français n’ont pas Souhaitons que ce concours, formida- démérité -un étonnant ténor de 20 ble tribune lyrique pour Marseille, ans, Kévin Amiel, au timbre large et trouve toujours les soutiens finan- peu ordinaire et une soprano lyrique ex- ciers nécessaires à sa pérennité ! pressive, Clémence Fritier, obtenant JACQUES FRESCHEL de belles récompenses- les palmes ont été raflées, une fois n’est pas cou- La finale du concours a eu lieu tume, par quatre rescapés parmi les le 16 oct. à l’Opéra de Marseille. 38 MUSIQUE CONCERTS Fayence subtile Du 23 au 30 oct, le 21e Festival de Quatuors à flot incessant de notes se baladant sur tous les re- cordes en Pays de Fayence rendait un hommage à gistres. L’Adagio, thème tragique, est d’une grande Mendelssohn, né il y a deux siècles, avec l’intégrale beauté : quelle complicité entre les artistes dans le des ses quatuors. Hommage en miroir avec les tuilage contrapunctique ! Après ces deux monu- prédécesseurs, Haydn, le père fondateur, Beethoven, ments, quatre pièces indépendantes, retrouvées Schubert, et les héritiers, Grieg, Ravel, Bartók, après la mort de Mendelssohn, ébauches certaine- Ligeti, Glass. Programme riche et très éclectique ment de prochains quatuors : un Andante suivi de avec les quatuors Fine Art, Párkányi, Talich, London superbes variations où se détache le velouté aérien Haydn Quartet, Ludwig et Ardeo, si féminin et si du premier violon, Jan Talich. Un Scherzo bondis- ardant, qui fit revivre avec fougue la sœur admirée sant où les sextolets de doubles croches jaillissent de Félix, Fanny Hensel-Mendelssohn, à travers son comme des fusées. Enfin, un Capriccio et Fugue d’une quatuor en mib majeur. audace rythmique et mélodique incroyable où tous Tous les concerts furent d’un très haut niveau, même s’en donnent à cœur joie : attaques sforzando puis si le choix du London Haydn Quartet d’utiliser des relâchées dans un jeu diabolique et très physique, cordes en boyaux, par souci d’authenticité pour Quatuor Talich © X-D.R. un souffle musical qui transpire d’un instrument à Haydn, peut être discuté. Le nombre de festivaliers à 20 ans, alterne une plainte mélancolique (Adagio l’autre. L’accueil est triomphal. dans ces petits villages pittoresques de Fayence va ma non troppo) et une fougue sautillante (Finale). En bis, la Cavatine pour cordes de Beethoven, le croissant, comme à Callian, dominé par un beau Quelle musicalité, quelle expressivité des quatre maître des premiers quatuors romantiques ; des château, qui accueillait le Quatuor Talich le jeudi praguois ! Une harmonie des corps et des cœurs, un cordes, à peine effleurées, une mélodie lyrique et 29 oct dans une église bondée de 350 personnes, legato et des pianissimi à couper le souffle planante : une superbe révérence. soit plus d’un habitant sur six ! (Andante espressivo) suivis de guirlandes triom- YVES BERGÉ Quel régal ! Les deux quatuors mi b majeur de phales de doubles croches (Molto Allegro). L’op 44 Mendelssohn sont au programme. L’opus 12, écrit démarre par un Allegro vivace brillant puis un Scherzo,

Chambre royale En 90 ans, des générations d’adhérents à la Société de Musique de Chambre de Marseille ont vu régulièrement passer les meilleurs artistes de leur temps. Il y a des fidèles qui se plaisent à revenir jouer dans l’auditorium à l’acoustique fine de la Faculté de médecine. Parmi les meilleures formations instrumentales au monde, le Quatuor Prazák se montre particulièrement assidu, pour le bonheur d’un public expert et nombreux qui le lui rend bien. Les quatre cordes tchèques n’ont pas failli à leur réputation notamment dans Jeter le Quatuor «Américain» de Dvorak livré dans sa nécessaire ampleur et son souffle vibrant. Le travail fin, parfaitement synchrone et équilibré réalisé sur la matière sonore, n’a heureusement chez eux rien de machinal ! Vaclav Remes, la musique premier violon de rêve, pris un peu à froid dans l’Allegro du Quatuor op.50 n°3 de Haydn, a redoublé d’expressivité dans les fameuses variations du 2e par la fenêtre mouvement du Quatuor «La jeune fille et la mort» de Schubert. Avec ses trois brillants compères, ils ont rendu au chef-d’œuvre tout son tragique, sa poésie Jean-Francois Heisser © Simone Poltronieri plaintive et sa résignation, son ironie et ses interrogations... On n’a pas perdu une seule note du poignant ballet macabre et de sa course à l’abîme. A priori, l’idée du compositeur et chef dans l’Andalousie profonde, mais s’en JACQUES FRESCHEL d’orchestre Espagnol Gorka Sierra pa- affranchit pour construire un discours Quatuor Prazak © Guy Vivien raît séduisante : la chanteuse Antonia sans lasser. Les jeux de vibratos par- Contreras, accompagnée par Chaparro fois excessifs et les intonations de Malaga à la guitare, devait révéler gutturales, certes variées, de la chan- les accents populaires du flamenco au teuse, sur un accompagnement souvent sein des douze pièces en quatre cahiers répétitif, peinaient à contrepointer ce d’Iberia d’Albeniz interprétées par miracle évocateur concrétisé par le J.-F. Heisser. Éternelle chimère consis- pianiste. Un solo de Chaparro en tant à concilier le brut et le raffiné, le prélude au troisième cahier atténuait dionysiaque et l’apollinien, le popu- ce sentiment. Décidément, Albéniz laire et le savant, l’écrit et le transmis... occupait toute la fenêtre ! Seul «...ce besoin généreux de jeter la P.-A. HOYET musique par les fenêtres...» ainsi que l’a si justement souligné en son Iberia a été joué au Méjan (Arles) temps Monsieur Croche, alias Debussy, le 13 nov pouvait aboutir à cette profusion d’effets de jeu, de nuances et d’har- monies, que contient la musique d’Albéniz. Car elle évoque une mélodie ressassante puisant son inspiration AU PROGRAMME MUSIQUE 39 L’âge mûr ? Télémaque a 15 ans ! Certes, il faut de la patience pour éclore… surtout en son pays ! Néanmoins le temps semble venu pour l’ensemble de Raoul Lay de crever la scène ! Après de formidables créations métissant la musique moderne et les domaines du cirque, du théâtre, de la danse, le dernier spectacle de la compagnie Télé- maque est allé chercher ses lauriers aux Bouffes du Nord lors du Festival d’Île de France. Desperate Singers : Requiem pour Klaus Nomi, sorte d’«oratorio burlesque et tragique» à la mémoire de l’icône New Wave, contre-ténor pop-rock et baroque des années 80, a fait une telle unanimité que la rumeur a vite couru… Si bien qu’à Marseille, le Théâtre de la Minoterie a promptement affiché complet pour le 21 nov. à 20h (04 91 90 07 94 - www.minoterie.org)! Il ne reste plus qu’à réserver aux Salins à Martigues le 20 mars 2010, pour découvrir cette étrange mise en scène associant Purcell (The Cold Song, Mort de Didon) à Berio et des musiques inouïes… L’anniversaire se poursuit à Marseille par un concert- commenté de Créations franco-hollandaises autour Desperate singers © Agnes Mellon du Pierrot Lunaire de Schoenberg, le 26 nov. à dre (1923) et Density 21,5 (1936) qu’on entend lors Jusqu’à fin novembre 20h30 – Bastide de la Magalone (04 91 39 29 13 du traditionnel Appel des sirènes phocéen du premier Aux Salins, une exposition de la photographe - www.citemusique-marseille.com). L’incontournable mercredi du mois sur le parvis de l’Opéra, le 2 déc. à de l’ensemble Agnès Mellon célèbre par l’image chef-d’œuvre de 1912, interprété par Brigitte Peyré, 12h (Gratuit - 04 91 03 81 28 - www.lieuxpublics.fr). 15 ans de productions et d’instants d’émotion. est repris, le lendemain, sur la scène nationale de JACQUES FRESCHEL Installation multimédia (concerts, spectacles, Martigues le 27 nov. à 19h30 (04 42 49 02 00 - diaporama) à l’Arcade PACA. www.theatre-des-salins.fr). 04 91 39 29 13 Et ce sont des opus avant-gardistes de Varèse, Octan- www.ensemble-telemaque.com Cité Pluie d’étoiles En raison de travaux de mise Avec les venues de Nicholas Angelich, du Quatuor Ebène, d’Aldo Ciccolini aux normes, les concerts programmés et Barbara Hendricks, le Grand Théâtre de Provence a mis le paquet à l’auditorium sont présentés en cette fin d’année 2009. De quoi combler les mélomanes à la Villa Magalone à 20h30 autour du Pays d’Aix ! Le pianiste Philippe Gueit donne un récital d’opus Dans la continuité du Cycle Beethoven entamé à la choix, pour le Concerto n°1 de Brahms (le 21 nov.). romantiques de Mendelssohn, Chopin, Schumann et rentrée 2009, Dominique Bluzet et Françoise Jan Le jeune et formidable Quatuor Ebène interprète Liszt, compositeurs majeurs de la Génération 1810 proposent trois concerts prestigieux. L’Orchestre les Quatuors n°1 «Razoumovski» op.59 et n°14 (le 20 nov.). National de Montpellier (dir. Cristian Mandeal) op.131 du «grand sourd» (le 3 déc.), en attendant Clara David (flûte traversière), Mark Drobinsky joue sa fameuse Symphonie Pastorale et s’unit au que le vieux maître octogénaire Aldo Ciccolini (violoncelle) et Gisèle Mouret (piano), jouent des pianiste Nicholas Angelich, en complément de vienne distiller les superbes Sonates n°14 «Au clair pièces de Schumann, Falla, Beethoven, Martinu et de lune» op.27, n°22 op.54, n°31 op.110 et n° 23 Prokofiev (Trio Chiarina, le 27 nov.). Quatuor Ebene © J. Mignot «Appassionata» op.57 (le 8 déc.). Christine Kattner (mezzo colorature), Nina Huari L’éminente soprano Barbara Hendricks viendra à (piano) et Mickaël Zugowski (comédien et mise en trois reprises cette saison au Grand Théâtre de Pro- scène) poursuivent le cycle Musique & poésie avec les vence. Elle Chante Noël en cette fin d’année avec Wesendonk-Lieder de Richard Wagner (le 4 déc.). l’Orchestre Régional de Cannes PACA dirigé par Benoît Salmon (violon) et Élisabeth Guironnet Jan Söderblom et la Maîtrise des Bouches-du- (piano) jouent les sonates K 304 de Mozart et op.96 Rhône. Au programme : des extraits de l’Oratorio de Beethoven (le 11 déc.). de Noël de Bach, l’Ave Maria de Schubert et des L’ensemble Des Équilibres créé par la violoniste chants traditionnels. À voir en famille ! (le 11 Agnès Pyka se présente dans sa formation piano/ déc.). clarinette/violon pour trois opus du XXe siècle de JACQUES FRESCHEL Bartok, Khatchatourian et Berg (le 17 déc.). Musique acousmatique (entrée libre): Le M.I.M. le 11 déc. à la Cave de la Cité. J.F AIX. GTP. Concerts à 20h30 MARSEILLE. 04 42 91 69 69 04 91 39 28 28 www.legrandtheatre.net www.citemusique-marseille.com 40 MUSIQUE AU PROGRAMME

Pianistiques Souffles Le Violoncelle dans tous ses Etats : Patrice Laré La 8e biennale de Quintettes à vent se poursuit (piano), Velitcha Yotcheva (violoncelle) jouent avec un concert associant les Quintette Moraguès Boccherini, Schubert, Franck et Chopin (le 21 nov. et celui de Marseille (le 19 nov. à 20h30 à Aix au à 20h à Aix- Musée des Tapisseries). GTP). C’est ensuite la Société de Musique de Musique de Chambre Germanique : quatuor et Chambre de Marseille qui accueille la manifestation quintettes avec piano (Michel Bourdoncle) de avec le Quintette Aquilon et le pianiste Romain Mahler, Schumann et Brahms (le 28 nov. à 20h à Descharmes (le 24 nov. à 20h30 à la Faculté de Trets – Casino – entrée libre). Médecine). Le festival s’achève avec les filles Des Bougies pour Haydn et Mendelssohn par Robert d’Aquilon (le 25 nov. à 17h30 à Grans – Espace R. Lehrbaumer (orgue) et Paisit Bon-Dansac au Hossein – entrée libre), le Quintette à vent de piano (le 4 déc. à 20h à Aix - Eglise Saint Jean de Marseille et le duo de pianistes Clara Kastler & > Malte). Hubert Woringer (le 26 nov. à 19h à Meyreuil – Soirée Marseillaise : Cyril Huvé (piano), Cyril Salle J.Monnet – entrée libre). Rovery (baryton), l’Ensemble Orchestral Contem- J.F Quintette Moraguès © X-D.R. porain dirigé par Daniel Kawka interprètent Liszt, Institut Français des Instruments à Vent Challulau et Mahler (le 8 déc. à 21h à Marseille – 04 91 39 29 02 Percussions Théâtre Toursky). http://biennaleinternationale L’ensemble de percussions Symblêma (dir.Frédéric Le Romantisme d’Est en Ouest : les Jeunes Talents quintettevent.blogspot.com Daumas) poursuit sa reprise de Playblick, spectacle du Conservatoire Darius Milhaud jouent des tout public et burlesque à la gloire des musiques du compositeurs extrême-orientaux et Chopin, Liszt, monde. Schumann, Mendelssohn…(le 11 déc. à 20h à Aix Golgotha MEYREUIL. Le 21 nov. à 20h30 Salle J.Monnet- – Bibliothèque Méjanes). Entrée libre. J.F Après Le Parlement de Musique (dir. Martin 04 86 31 62 73

04 42 16 11 70 Gester) et la soprano Mariana Flores dans des www.symblema.com > www.lesnuitspianistiques.com > Gloria, Motets et Concertos de Haendel (le 19 nov.), le 43e Festival s’achève par un Concert anniversaire. La Symphonie n°104 «London» et Les Sept Dernières Paroles du Christ sur la Croix célèbrent Haydn avec l’orchestre symphonique Friuli Venezia Giulia, le Chœur Régional Vocal Provence, un excellent quatuor de chanteurs dirigés par André Bernard. MARSEILLE. Le 3 déc. à 20h30 Abbaye de St Victor 04 91 05 84 48 www.chez.com/saintvictor

Symblema Percussions © X-D.R. Jazz Les Concerts d'Aix accueillent les remarquables Schubertiade sœurs brésiliennes du Trio Esperança. Eva, Regina Récital Franz Schubert par les pianistes Michèle et Mariza Correa, repérées par Bernard Lavilliers Scharapan et Emanuela Piemonti avec Thomas après leur arrivée en France, ont été ses choristes, Gautier au violon. puis celles de Patrick Bruel, avant d’enregistrer MARSEILLE. Le 20 nov. à 21h30 leurs propres disques à succès dans les années 1992 Station Alexandre à 2001. Après une pause de cinq ans, elles 04 91 00 90 00 reviennent à la scène. À (re)découvrir ! www.station-alexandre.org AIX. Le 25 nov. à 20h30 au Théâtre du Jeu de Paume 04 42 63 11 78 - www.concertsdaix.com SMCM 90 Velitcha Yotcheva © X-D.R. Après l’accueil traditionnel de la Biennale de Racine Quintettes à vent (le 24 nov. à 20h30), la Société Clavecinet Après une version pour grand chœur avec l’Orches- de Musique de Chambre de Marseille affiche, à Dans le cadre des Petites histoires de claviers de tre de l’Opéra de Marseille au Théâtre Toursky, puis l’occasion de ses 90 ans d’existence, deux soirées Baroques-Graffiti, Pulsabunt instrumentia dulcia est au Château de Mirabeau en collaboration avec la «festives» de pure musique de chambre. Des un programme concocté par Julien Ferrando qui Compagnie Interlude, l’ensemble vocal Ad Fontes quatuors, quintettes et sextuors de Mendelssohn, joue sur un clavicythérium (petit clavecin au coffre (dir. Jan Heiting) reprend Athalie de Mendelssohn Schubert, Haydn, Tchaïkovski par le Quatuor vertical) et fait découvrir des musiques des XIVe et dans sa première mouture composée en français, Modigliani, Lise Berthaud à l’alto et François XVe siècles. d’après Racine, pour chœur de femmes, solistes, Salque au violoncelle. MARSEILLE. Le 12 déc. à 18h récitante (Marie Ange Jannuccillo) et piano. MARSEILLE. Les 15 et 16 déc. à 20h30 à la Faculté Bastide Ranque AIX. Le 24 nov. à 20h30 de Médecine. 09 51 16 69 59 Théâtre du Jeu de Paume Espace culture www.baroquesgraffiti.com 04 42 99 12 12 04 96 11 04 60 41 Symphonique Sa voie Cocteau À trois En attendant Cendrillon pour la fin de La violoncelliste Ophélie Gaillard, Récital poétique et pianistique par Haendel par l’ensemble instrumental l’année, l’Opéra de Marseille affiche joue et dirige l’Orchestre des Pays de Edouard Exerjean dans le cadre de l’expo- des Festes d’Orphée : Jean-Michel deux concerts symphoniques : Jean- Savoie et accompagne le contre- sition Jean Cocteau et la Méditerranée. Hey & Guy Laurent (flûtes), Annick Claude Casadesus dirige L’Arlésienne ténor Christophe Dumaux dans des MARSEILLE. Le 2 déc. à 18h30 Lassalle (viole de gambe) et Corinne de Bizet et la Symphonie fantastique airs d’opéras de Haendel. au Palais des Arts (Cours Julien) Bétirac (clavecin). de Berlioz (le 29 nov. à 17h à l’Opéra). GAP. Le 11 déc. à 20h30 04 91 04 68 32 MARSEILLE. Le 25 nov. à 20h30 Claudio Scimone vient conduire l’Or- au Théâtre de la Passerelle. à l’église Ste Catherine chestre Philharmonique dans un 04 92 52 52 52 AIX. Le 27 nov. à 20h30 programme baroque et classique : des www.theatre-la-passerelle.eu à la Chapelle des Oblats Symphonies de Boccherini, Haydn et 04 42 99 37 11 un Concerto pour mandoline de Vivaldi avec Ugo Orlandi (le 11 déc. à 20h au De pointe Pharo). Avishai Cohen (contrebasse et voix) Légion Côté Foyer : Musiques latines pour voix L’Orchestre de la Légion Etrangère joue et chante en quintette de jazz et quatuor à cordes propose des opus (le 5 déc.). L’inclassable guitariste d’Aubagne donne un concert avec la de Turina, Piazzolla, Granados avec la improvisateur Benjamin Dupé (les 8 participation de la Classe Orchestre soprano Garance Castanié, le ténor et 9 déc.) passe par, là ainsi que de la du collège Versailles à Marseille. Marc Terrazzoni et le Quatuor du Parvis Musique orientalo-balkanique revisi- Edouard Exerjean © X-D.R. MARSEILLE. Le 10 déc. à 15h30 - e (le 21 nov. à 17h) ; un hommage à la tée par Mango Gadzi (le 18 déc.). Gymnase du collège Versailles (3 ) soprano Françoise Garner (le 5 déc. à BRIANÇON. Concerts à 20h30 15h) et à L’heure du thé les récitals du au Théâtre du Cadran Hivernal CNIPAL (les 16,17 et 18 déc. à 17h15). 04 92 25 52 52 Sept ans que le Groupe de Recherche Cistres MARSEILLE. Opéra. www.theatre-le-cadran.eu et d’Improvisation Musicale (GRIM) Henri Agnel et Doc Rossi s’associent 04 91 55 11 10 accueille son festival à l’heure où les pour des répertoires européens du www.marseille.fr nuits sont les plus longues… et les Moyen Âge au XIIIe siècle joués sur Papal plus froides ! Mais pas question de des instruments ancêtres de la Sommet du bel canto, I Capuletti e i s’ankyloser à Montévidéo tant les pro- guitare. Fatal ! Montecchi de Bellini est interprété grammes de musiques improvisées, LES BAUX-DE-PROVENCE. On ne présente plus Carmen de Bizet, par un duo royal de chanteuses : électros ou acoustiques, DJ, perfor- Le 26 nov. à 18h30 sans doute l’opéra le plus populaire Ermonela Jaho joue Juliette et Karine mances, film-documentaires, expos et 04 91 52 90 45 au monde. Gageons que le théâtre Deshayes un Roméo mezzo et travesti conférences s’égrainent au quotidien ! www.ciehenriagnel.com fera salle comble pour «L’amour est (le 22 nov. à 14h30 & le 24 nov. à Une manifestation qui cette année es- enfant de Bohème» par Giuseppina 20h30). saime aussi à Martigues, Miramas ou Piunti, l’air du Toréador par Franco Autres festivité papales : Nemanja au Point de Bascule à Marseille : avec Fou ! Pomponi ou la «Fleur» fatale de Roman Radulovic (violon) et Susan Manoff Jean-Marc Montéra, les percus de Shulackoff ! (le 27 nov. à 20h et le (piano) jouent des Sonates de Symblêma, Yves Robert à la coulisse 29 nov. à 15h – reprise fin déc.). Beethoven (le 21 nov. à 20h30), ou maître sax Louis Sclavis en trio… L’inusable et immense chef Serge quand le Trio Chausson vient pour la et une pléiade d’éclectiques figures re Baudo vient diriger la 1 symphonie première fois en Avignon pour un planchant sur La musique, le mot, la de Beethoven et le Concerto en la programme Haydn, Mendelssohn et voix. mineur de Schumann avec Marie- Beethoven (le 1 déc. à 20h30). Une GRIM. Du 4 au 21 déc. Josèphe Jude au piano (le 3 déc. opérette d’Aznavour, Je m’voyais 04 91 04 69 59 20h30 au Palais Neptune). «Salon déjà, sur un livret de Laurent Ruquier, www.grim-marseille.com baroque» (le 16 déc. à 19h). est mise en scène par Alain Sachs (le TOULON. Opéra. 5 déc. à 20h30 et le 6 déc. à 14h30), Jeunes 04 94 92 70 78 avant un concert symphonique, hors Un après-midi de récital par trois www.operadetoulon.fr les murs (dir. Jonathan Schiffman), jeunes talents, (ex)élèves de Bernard

où l’on entend Pavel Sporcl dans le d’Ascoli : l’aînée Violaine Debever (24 Shani Diluka © Vincent Garnier Concerto pour violon de Dvorak (le 11 ans) joue Rachmaninov, le cadet déc. à 20h30 à l’église des Carmes). Paisit Bon-Dansac Chopin et Liszt (17 Puisque René Martin, créateur de la Méjan Et l’Apér’Opéra du CNIPAL le 12 déc. à ans) et la «caganis» Sarah Zajtmann Folle nuit Nantaise, est le program- Récital du pianiste Jean Louis 20h30 ! (12 ans !) Ravel et Chabrier. mateur musique du théâtre de Nîmes, re Steuerman : 1 Ballade de Chopin, AVIGNON. Opéra-Théâtre AUBAGNE. Le 22 nov. à 17h il y exporte son concept, fort po- Fantasiestücke de Schumann, Sonate 04 90 82 81 40 Théâtre Comœdia pulaire, qui permet d’entendre de n°12 «Marche funèbre» de Beetho- www.mairie-avignon.fr 04 42 18 19 88 grandes œuvres du répertoire par des ven… (le 29 nov. à 11h) et «Week-end Pavel Sporcl © X-D.R. www.aubagne.fr interprètes d’exception. En cinq tchèque» : le Quatuor Kocian et le concerts qui s’enchaînent le 5 déc de pianiste Ivan Klansky joignent leur 15h à 23h30 autour de la «génération talent pour des quatuors et quin- Féminin 1810» (Chopin, Schumann, Mendels- tettes de Dvorak, Smetana, Martinu L’ensemble vocal féminin L’Oiseau Luth sohn et Liszt), on pourra entendre les et Janacek (les 11 déc. à 20h30 & 13 fête ses 20 ans avec Purcell, Schubert, deux pianistes Shani Diluka et déc. à 11h). Verdi, Britten… Brigitte Engerer, et le Quatuor Voce… ARLES. Chapelle du Méjan. MARSEILLE. Le 22 nov. à 16h30 à NÎMES. La Folle nuit 04 90 49 56 78 l’église Notre Dame du Mont Théâtre de Nîmes. www.lemejan.com 06 62 35 09 56 04 66 36 65 00 www.oiseau-luth.org www.theatredenimes.com 42 MUSIQUE CONCERTS Session de clôture de Jazz sur la Ville La Journée du Séminaire d’Apprentissage Artistique de la Compagnie NINE SPIRIT animée par divers acteurs du jazz a permis de poser quelques défis esthétiques dans le vivier local de musiciens. Elle a souligné entre autres points l’urgence du collectage de l’histoire du jazz dans notre région. Fruit d’une résidence hors les murs de la Villa Médicis, Raphaël Imbert nous a présenté un programme musical époustouflant, issu de son dernier CD réalisé à New York (voir Zib 23) avec Joe Martin (contrebasse) et Gerald Cleaver (batterie), remplacé par Mourad Benhammou pour ce concert exceptionnel. New York Project est une création qui explore de nouveaux territoires. Struggle for Manhattan’s life en est un exemple des plus criants : Raphaël Imbert utilise simultanément deux saxophones pour nous surprendre et nous maintenir en tension. Bonne surprise, Christophe Leloil (trompette/bugle) et Marion Rampal sont les guests-musicians dans la 2nde partie du concert avec Ahmad Campaoré (batterie) dans un set très énergique, aérien, avec mélodies empreintes d’Orient. Stéphane Mondésir (claviers), Hervé Samb (guitare), Philippe Le Rabo (basse) et Raphaël Imbert forment le 5tet Musique Rebelle. Les compositions de l’ensemble semblent progresser vers une quête de spiritualité comme une tendance récurrente, qu’Ahmad Campaoré s’empresse de briser régulièrement par des ruptures de rythme qui apportent ainsi un nouveau souffle. Du grand jazz, constamment inventif. DAN WARZY

Ces événements ont eu lieu à La Cité de la Musique les 14 et 19 oct

Raphael Imbert © Jean-Paul Rony Spleen et idéal Captivante, la prestation acoustique de And also the trees a ravi les fans sur la scène du Poste à Galène le 3 novembre Little Giant au féminin Avec leur dernier album en poche When avec contrebasse, dulcimer, mélodica C’est la proximité dans l’espace parisien qui a tout d’abord permis au Time Out the rains come, les austères britan- et bien sûr guitare acoustique, l’am- Trio de se rencontrer autour de Géraldine Laurent en 2006. Le trio a présenté, niques ont livré un concert qui restera biance feutrée déroulée sans artifice durant un concert du Cri du Port, une série de reprises de compositions certainement dans les annales. s’est immédiatement installée. entièrement revisitées de Sonny Rollins, Wayne Shorter, Charles Mingus... La Exercice périlleux et délicat, le Glissant dans cette bulle désenchan- saxophoniste possède une grande culture musicale et technique. Son esprit relooking acoustique d’un medley qui tée, les fidèles ont savouré ce est vif, l’idée est riche : toujours en avance sur le geste, elle fait corps à parts porte sur vingt-cinq ans de carrière moment hors du temps, à l’image du égales avec son instrument. Le son produit, les joues gonflées, est dense et était déjà une réussite en disque sacro saint Virus meadow magnifique- puissant. De longs phrasés se déroulent ou s’emportent, se calment dans une (voir Zib 23), il s’avère être sur scène ment interprété. Un concert loin parfaite maîtrise de l’improvisation. Elle est parfois toute vibrante d’une un moment intimiste génial. Dans d’être glauque et maussade, image émotion qu’elle réussit parfaitement à communiquer, très bien soutenue par la une atmosphère mélancolique et qui colle sempiternellement à ce type contrebasse de Yoni Zelnik et la batterie de Laurent Bataille. La formule du sombre qui a porté Simon Huw Jones de projet acoustique ! trio qui permet une très grande liberté est particulièrement appréciée par et ses acolytes au sein du giron FREDERIC ISOLETTA Géraldine Laurent. Et tous trois nous scotchent littéralement par des ruptures coldwave sans le côté théâtral du de tempo très en place, témoignant d’une longue complicité. gothique, les adeptes de la première DAN WARZY Géraldine Laurent © Armel Bour heure comme les néophytes ont ré- pondu présent. Sans batterie mais And also the trees © X-D.R Ce concert a eu lieu le 5 nov au Cri du Port à Marseille Time Out Trio Géraldine Laurent CD Dreyfus Jazz Records 43 Rock alternatif au Grim Dans une salle comble et festive, le Grim avait 5 notes répétés (guitare ou violon) sur lesquels les invité le groupe , formation autres instruments se greffent en tuilage. Pas de originale de neuf musiciens : guitares, basse, saxs, grandes envolées mais de courtes formules comme trompettes, batteries, clavier, violon. Une soirée des comptines enfantines répétées à l’infini. Dans qui démarrait par les Marseillais Deschamp : de ce groupe à géométrie variable, tous jouent de longues plages sonores, où des motifs répétés se plusieurs instruments : riche interchangeabilité, noient dans un fortissimo étourdissant. En partie mais lorsque les traits sont un peu plus complexes centrale, deux projets solo de deux Do Make, Charles une inégalité se fait sentir, aux trompettes surtout. Spearin et Ohad Benchetrit qui doublent les voix Les fins de phrase en crescendo avec pédale de enregistrées en un jeu de collage en direct : voix distorsion sont cependant impressionnantes : dans grave/saxo, voix aiguë/trompette. C’est ludique et le volume et la durée les sons sonnent sans limite. confirme l’appartenance de ces musiciens venus de Le public est enfin debout pour un final étourdis- Do Make Say Think © Pierre Gondard Toronto à la . sant, avec quelques dissonances bienvenues. Arrive la partie Do Make, rock alternatif mêlant des Pas de day off : une tournée mondiale sans un seul influences diverses : sons planants, cuivres, jazz jour de libre, tel est le parti de ces trentenaires qui fusion, rock progressif. L’écriture est simple, ont déjà six albums à leur actif ! harmoniquement et mélodiquement : motifs de 4 à YVES BERGÉ Beau plateau Le festival Les Inovendables se pour- Barth avec des percussions corpo- truments rares (théremin, structures Anna Prucnal autour de Brecht et de suit jusqu’au 5 décembre, dans les relles et vocales auxquelles se rajoutent sonores Baschet), sur fond de bruits ses compositeurs. locaux de Léda Atomica Musique. des flûtes kamal ngoni (harpe luth du des villes du Caire, d’Alexandrie et de DO.M. Le 20 nov, une des grandes figures de Mali), et les Agnel père et fils, Henri Marseille. Enfin, le dernier soir (5 déc), la musique électronique sera sur et Idriss, dans des répertoires afghans, place aux voix de Jérôme Chartier Les Inovendables scène : Hans Joachim Roedelius, arabes, et du Moyen Âge européen. et de son chant diphonique, et d’Alain Jusqu’au 5 déc cofondateur du groupe Kluster, entre Les 26, 27 et 28 nov, la création LAM Aubin et Marie Démon, rencontre Léda Atomica Musique autres ; le même soir se produira le 2009 : Sauvages Organismes Sonores, des tessitures de contre-ténor et 04 96 12 09 80 Chill Out Consortium. Le lendemain basée sur l’utilisation d’instruments contralto. À noter, le 4 déc, une soirée http://ledatomica.mus.free.fr 2 couples aux commandes : Naomi & issus de la scène électronique et d’ins- de restitution du travail mené par Menu complet de fin d’année Le programme s’annonce serré devant la scène et lourd pour vos finances ! Massive, l’attaque commence au Dôme le 18/11 au Planet Mundo Kfé, Tryo retrouve le Dôme (le avant… Ysaé en Décembre. Si vous avez raté le avec le groupe de Bristol très attendu, un hors 26) et Eiffel le Poste à Galène (avec un nouvel couvert à la fiesta, de savoureux restes de Avishai d’œuvre de 35 euros quand même pour faire atten- album). Le festival Rythm’n funk, avec Monsieur Cohen ou Staff Benda Bilili seront servis dans le dre leur nouveau cd en mars 2010. Pour digérer, Brun et le trio de Sylvain Beuf, se consommera le Var, l’un à l’Espace Malraux de Six-fours (le 3/12), profitez le lendemain de la rencontre à la Villa 29/11 à l’Espace culturel de l’Huveaune, et un peu les autres à Châteauvallon (le 5). Massalia entre Al Benson Family (père et fils) et plus loin, à Aubagne, l’Escale Saint Michel concoc- Dès le 1er/12 avec Sergent Garcia au Planet le slameur Ysae, c’est gratuit et à l’heure de l’apéritif ! te un mix Ysaé avec S.P.O.T, originaire de Brooklyn Mundo Kfé, les affiches annonceront clairement la Tout comme devant des Tapas, le choix sera difficile et dépotant un rap incisif dans la lignée de KRS- tendance de fin d’année : le 2/12 Emilie Simon à le 20/11 entre Ulas Özdemir, Sam Karpienia & One. l’Espace Julien, Superbus au Dôme le 4, Deep Bijan Chemirani à la Cité de la Musique, Richard On le retrouvera à la Méson le lendemain (le 29), Purple le lendemain et au même moment Jack de Bona à l’Usine d’Istres, le maloya de Easy Star All-Stars © Olly Hearsey Marseille au Cabaret Aléatoire et Christine Salem dans la chaude Kéry James au Dock des Suds (un ambiance du Tonkono ou les effets de export l’Affranchi), ou encore les Sandra Nkaké à l’Affranchi. Takana épices de Malavoi et les senteurs de Zion annulé au Poste à Galène sera Rose à l’Espace Julien (10/12 et remplacé au pied levé par Jo Cor- 13/12) : de bons petits plats pour beau, Super Kémia, Gang Jah Mind, oublier une année tendue et le tout préparé par les Sons of Gaïa. indigeste pour beaucoup… Dans le même genre, le Easy Star Si Pascale Picard, Rinocerose, la battle All-Stars reprendra du Beatles à la Hip Hop des soirées Don’t Sleep ou sauce reggae au Cargo de Nuit le la soirée caritative au Dôme avec 21/11 (avant les Dub Pistols le IAM (le 27) sont annulés, Wax Taylor 27/11). Pendant ce temps, le set soul et Mathieu «M» Chedid (tous les funk bien astiqué de Tony S. s’écou- deux programmés le 24) afficheront tera au Bicok (sur le cours Julien, eux complet, tout comme la première entrée libre), un nouveau lieu qui date de l’ensemble Télémaque (le fête bientôt… sa première année! Et 21) qui fête ses quinze ans un peu qui accueillera à nouveau Jo Corbeau partout, et sur le Parvis de l’Opéra dans une autre dimension, ce même avec les sirènes (à défaut de 27/11... cloches), le 2 décembre prochain… Avant cela, le 25/11, les Aixois de X-RAY Chinese Man sont enfin à Marseille 44 MUSIQUE DISQUES

Sirènes et sorcières Quel chemin déjà parcouru par cette jeune dans les pas de la chanteuse: guitare et effets par chanteuse ! Marion Rampal propose un CD Aurélien Arnoux, Michel Perès à la contrebasse, débordant de textes surprenants et de musiques Cédrick Bec à la batterie et Fabien Ottones aux singulières, coproduit avec la Compagnie Nine claviers laissent surgir les viragos et les fées que Spirit. Elle s’inspire des grandes héroïnes mythi- Marion Rampal convoque. ques telles que Perséphone, Didon, Salomé, mais Le groupe est en tournée et sera au Cri du Port à aussi de Wattana et Lucie, deux femelles orang- Marseille le 19 novembre. Souhaitons à Marion outang. Elle chante en anglais et, dès l’écoute des Rampal tout le succès qu’elle mérite ! deux premières pistes, on se laisse accrocher par sa DAN WARZY voix vraiment émouvante. Wattana par exemple contient tous les ingrédients pour s’incruster dans notre mémoire, surtout par son motif au piano. Own Virago Avec ses connotations bluesy, pop-rock, jazz, cette Marion Rampal musique est portée par des instrumentistes qui se Rèf CD : NIN 001 découvrent progressivement, se mettent au diapa- http://www.myspace.com/marionrampal son d’un projet commun et posent tout leur talent http://www.ninespirit.org Ode to Freedom On se souvient de l’effigie apyre de Mstislav Mais on a peut-être oublié un concert mémorable Rostropovitch interprétant une Suite de Bach, au donné le 25 décembre 1989 au Konzerthaus de pied du Mur de Berlin aux premières heures de sa Berlin. Bernstein y faisait rimer Freiheit (Liberté) et chute. En invoquant le Kantor de Leipzig, le musi- Freude (Joie). Pour des raisons symboliques, il avait cien dissident, profondément humaniste, engageait rebaptisé la 9e symphonie de Beethoven : Ode to ses pairs à appréhender, comme lui des années Freedom. Des milliers d’Allemands assistèrent au auparavant, le sens des mots Liberté, Unité et concert, pour la plupart à l’extérieur de l’ancien Universalité. C’est à Leipzig, à l’«Est», que Bach a Spielhaus, mais aussi des millions de téléspectateurs fait carrière, produit une œuvre démesurée qui dans une vingtaine de pays. Leonard Bernstein, à fonde la «Musique Allemande». Mais Bach évoque 71 ans était au sommet de son art. En compagnie davantage que la «germanité». Il s’adresse au de June Anderson (soprano), Sarah Walker (mezzo- Créateur comme aux profondeurs de l’être. On peut soprano), Klaus König (ténor) et Jan-Hendrik l’invoquer, sans risquer le mauvais goût, à toutes Rootering (basse), il nous livrait un événement les sauces musicales, du jazz au rap ou au jingle d’une grande émotion, magnifié par une conjonc- d’un portable… Avec Bach, en novembre 1989, ture extraordinaire : un Hymne qui semble avoir été l’archet de Rostropovitch a fait bourdonner un écrit pour la circonstance. souffle capital sur la culture européenne (Ses Suites JACQUES FRESCHEL DVD Medici Arts 2072039 de Bach sont disponibles en DVD EMI).

Direct d’usine ! Véritable orchestre urbain composé de 17 percus- public après usage ! Après dix ans d’absence, le sionnistes, Les Tambours du Bronx ont tout d’une nouvel album MMIX déboule en force sur la scène formation atypique. C’est près de Nevers, dans un industrielle mêlant afrobeat, rock et électro, tout quartier surnommé le «Bronx» pour son quadrillage en déployant la verve et la puissance qui font la de rues sombres habitées par les ouvriers des réputation de leurs prestations scéniques. Energie ateliers SNCF, que l’orchestre a trouvé ses premiers et sève sont même deux qualificatifs gentillets tant bidons. Le parcours qui devait durer le temps d’un les 17 titres déferlent avec un son nouveau teinté concert a depuis sillonné le monde et rythmé des d’électronique, tournant amorcé par nos guerriers endroits insolites comme la Tour Eiffel, des usines, du son au milieu des années 90. des toits, des forteresses, le Sahara, la neige… et FREDERIC ISOLETTA même votre salon si vous avez en tête le générique de la semaine des Guignols sur Canal +. Véritable entreprise de démolition, les TDB détruisent deux MMIX paires de mailloches par concert pour faire sonner Les Tambours du Bronx les bidons bruts peints par leurs soins et offerts au At(h)ome –Wagram COLLOQUES ARTS VISUELS 45

L’art s’expose et se pense. Entre Aix et Marseille deux récents colloques ont attesté de l’excellence des acteurs de la recherche en histoire de l’art. On en redemande ! Fais joyeusement de l’histoire de l’art *

Avant Xénocrate de Sicyone (IIIè siècle avant JC), penser l’art était imposé par des canons abstraits et d’origine divine excluant la possibilité d’évolution, ou d’appréhen- sion historique. Mais depuis ces lustres combien ont cédé aux spéculations sur l’art ? Aristote et Platon, Léonard, Ghiberti, Roger de Piles, Diderot, Hegel, Kant, Baudelaire, Freud, Levi Strauss, Daniel Arasse, Bernard Stiegler, ainsi que tous les disparus et les vivants qui jusqu’à aujourd’hui se sont emparés du domaine avec ferveur… Que serait donc l’art sans le retour réflexif apporté par les artistes eux-mêmes mais aussi, grâce aux mises en perspectives élaborées souvent à l’ombre des évène- ments, par les spécialistes naturels de l’art, critiques et historiens, les philosophes, sociologues, économistes… Sans compter les scientifiques qui ne sont pas en reste! Deux colloques en ont témoigné récemment avec brio.

Valeurs et évolution Trois jours co-organisés avec le MIM proposaient de passer au crible le fait artistique dans ses rapports avec la théorie darwinienne de l’évolution, et une semaine plus tard l’Aephae, association récemment crée par Jean-Noël Bret, tentait de faire le point sur les enjeux de la mondialisation, de l’art et de l’argent. Colloque Les arts dans le cadre actuel de la theorie darwinienne de l'evolution, rencontre Complexite du geste artistique. De g. a d. E. Verges, Deux initiatives de très haute tenue, tant par les ques- J.-F. Peyret, J.-P. Changeux, P.-M. Menger, C. Tron © C.Lorin tionnements retenus que par la présence de spécialistes est refondé l’enseignement supérieur dans lequel man- de notoriété internationale. Porteuses d’éclairages que toujours une agrégation d’histoire de l’art. On a écouté attentivement particuliers, souvent hors limite du strict champ En région PACA, la discipline est notamment représen- Les arts dans le cadre actuel de la théorie darwinienne historique, ces rencontres privilégiées autorisent le tée au niveau universitaire avec différentes structures de l’évolution renouvellement de nos compréhensions et repré- comme le LESA (Laboratoire d’Etudes en Sciences des les 22, 23, 24 octobre 2009 sentations d’un champ réputé flou. Arts, dirigé par Michel Guérin) ou le CEMERRA (Centre à Marseille et Aix en Provence Ainsi la voix de Nathalie Heinich sut resituer avec clair- Méditerranéen de Recherche sur les Relations entre co-organisé par le MIM, IMèRa, voyance la question de la valeur en art ; Jean-Pierre les Arts) au sein de l’Université de Provence. Une asso- Leonardo/Olats, Alphabetville, Zinc Changeux, inventeur de la neuroesthétique, présenta ciation fédère aussi les étudiants en histoire des arts : cette discipline récente issue de la recherche en Courant d’Art. L’art, l’argent et la mondialisation neurobiologie. De formation littéraire et responsable du Comment ne pas approuver le regretté Daniel Arasse les 29 et 30 octobre 2009, à l’Alcazar-Bmvr, Marseille programme de recherche Art et mondialisation à qui nous enjoignait à «redonner à l’histoire de l’art la proposé par l’Aephae l’INHA, Zahia Rahmani alerta son auditoire sur le force majeure de la joie créatrice, érotique et intem- problème des modèles post-colonialistes inconsciem- pestive des œuvres…» ?! On lira allègrement ment en œuvre dans le regard porté, dans les pays non Alors merci à tous les Xénocrate ! Art et esthétique (voir p 69) occidentaux, sur l’art et les artistes contemporains. CLAUDE LORIN Éditions L’Harmattan Il s’agissait également de rendre accessible et publique * selon le mot de Daniel Arasse l’information et la recherche en art, dans le fructueux Daniel Arasse ou la pensée jubilatoire croisement des domaines. Ces rencontres et colloques, des œuvres d’art comme moments privilégiés d’échange et de con- Figures de l’art N°16, publications frontation, sont essentiels. Tout en rappelant l’importance Colloque Art, argent et mondialisation. De g. a d D. Rykner, C. Bret, de l’université de Pau de la presse et de l’édition traditionnels, les nouveaux A. Quemin, H. Bellet, J.-N. Bret, R. Marek, N. Moureau, (numéro issu du colloque Autour de Daniel Arasse, D. Sagot-Duvauroux, G. Monsaingeon, C. Talon-Hugon © X-D.R média de l’espace numérique furent évoqués. Sur organisé par Jean-Noël Bret l’Internet nombre d’institutions, blogs, journaux et et Art Culture et Connaissance, revues offrent une autre accessibilité à l’histoire de à Marseille en septembre 2008) l’art: ainsi La Tribune de l’art créée par Didier Rykner il y a deux ans. On suivra bientôt d’un œil pénétrant Le photographiable Enseignement et recherche colloque les 26, 27 et 28 novembre Croisements disciplinaires, éclairages singuliers, questionnements féconds rappellent toute la place Aux limites du photographiable nécessaire de la réflexion sur et par l’art. Sa connais- exposition du 26 novembre au 31 décembre sance, sa pratique et son enseignement constituent proposition Michel Guérin, Jean Arrouye des enjeux d’avenir au moment où l’histoire de l’art et l’Université de Provence rejoint les autres disciplines obligatoires à l’école à Alcazar-Bmvr, Marseille primaire comme dans le secondaire. Et au moment où www.bmvr.marseille.fr 46 ARTS VISUELS AU PROGRAMME

Hôtel des arts. Connaissez-vous des entrepreneurs capables de suspendre leur lucratif labeur pendant trois jours et inviter en lieu et place 35 artistes à investir les lieux pour des créations originales ? Laurence et Jean-Baptiste Gurly réitèrent la chose pour la troisième année dans leur hôtel de Vaison-la-Romaine pour une foire d’art contemporain en format de chambre. C.L.

Supervues 11, 12, 13 décembre Hôtel Burrhus 04 90 36 00 11 www.supervues.com

Vue de la chambre d'Emilie Perotto © X-D.R.

Photographie Pierre-Jean Amar Chère maman. Comment la photographie permet-elle d’exorciser une douloureuse partie de sa vie en fixant les objets qui vous entourent, désignant l’enfermement affectif comme le besoin d’en sortir ? Pierre-Jean Amar sera présent aux vernissages les 3, 12 et 19 décembre et pour la signature de son livre paru aux éditions Le temps qu’il fait en juin 2009. C.L.

Le coffre-fort de ma mère Pierre-Jean Amar photographies, 1989 tirages argentiques du 03 au 24 décembre galerie Vincent Bercker 04 42 21 46 84

Noirs dessins. À la fin des années soixante, Jean-Marie Sorgue abandonne la peinture pour se consacrer exclusivement qu’au dessin. En 2000, il fait une donation au musée Granet de quatre-vingt œuvres et la Villa Tamaris lui a organisé une grande exposition en 2008 à la Seyne-sur-Mer. C.L.

Les mondes crépusculaires Jean-Marie Sorgue jusqu’au 10 janvier Abbaye de Silvacane 04 42 50 72 37

Jean-Marie Sorgue, Falaises et emergences 1981 – encre sur papier – 110 x 75 cm

Delights. Pour finir l’année en beauté, vous pourrez vous passer des illuminations publiques de la rue. Neuf designers et artistes marseillais offrent (à votre vue) le fruit de leur illumination intérieure. Des créations uniques pour certaines, conçues pour l’évènement ou montrées pour la première fois. C.L.

Design&Lights du 19 novembre au 10 janvier On stage gallery 04 91 58 30 04 http://onstagegallery.blospot.com

LN BOUL, Lampe Barbouille, composition en fil electrique, piece unique, 2009 © LN Boul 47

Mis à distance. L’œuvre de Sarkis se fonde notamment à partir du célèbre et emblématique Cri d’Edvard Munch (1893). Le projet conçu pour Marseille comprend l’installation De la terrasse de l’homme qui regarde le paysage sous sa forme originelle issue d’une aquarelle de 1992 (une version mise scène est actuellement à la Biennale de Lyon), Munch (quatre aquarelles au format poster) et Le cri du paysage (le néon/lumière pour sa picturalité). Un travail de mis en abîme dans tout l’espace de la galerie. C.L.

Sarkis Le cri du paysage

Sarkis, Le cri du paysage du 21 novembre au 30 janvier 2010 Galerie of Marseille 04 91 90 07 98 www.galerieofmarseille.com

La lumière selon Sieff. «Mes photos sont autant de petits cailloux noirs et blancs que j’aurais semés pour retrouver le chemin qui me ramènerait à l’adolescence» écrivait le photographe Jeanloup Sieff disparu en 2000 à l’âge de 77 ans. Photoreporter à ses débuts, célèbre pendant la Nouvelle Vague, Jeanloup Sieff laisse une œuvre tentaculaire (portraits, paysages, mode, nus, publicités…), reconnaissable par la profondeur de ses noirs et le sens du contraste. Par sa lumière harmonieuse aussi, qui donne à ses clichés une aura cinématographique, unique. M.G.-G.

Hommage à Jeanloup Sieff jusqu’au 3 janvier Maison de la photographie, Toulon (83) 04 94 93 07 59 Jean-Marie Sorgue, Falaises et emergences 1981 – encre sur papier – 110 x 75 cm

Coup double. Depuis la fermeture de sa galerie, Jean-Pierre Alis poursuit son travail en faveur des artistes contemporains grâce à ses partenariats Athanor hors les murs. La collaboration avec la galerie Polysémie offre à Jean-Jacques Ceccarelli d’exposer une série d’aquarelles récentes alors qu’une monographie vient de lui être consacrée aux éditions André Dimanche. Un bonheur ne vient jamais seul. C.L.

Jean-Jacques Ceccarelli jusqu’au 12 décembre Galerie Polysémie 04 91 42 87 51 www.polysemie.com

Jean-Jacques Ceccarelli, Sans titre, aquarelle, 2009

Nicolas Rubinstein, Boucherie boucherie, Que d’os ! Ici on réinvente la vanité la plus crue, la plus sèche, la structure installation, 2009 (détail) profonde des choses, le vide entre les os, la vie la plus vidée de ses © X-D.R oripeaux, horribles os, sans peau ni chair, sans corps-matière, ce qui reste après, que d’autres réassemblent en trophées ou squelettes exemplaires pour des histoires pas très naturelles. Rubinstein marche sur les os. C.L.

Sauvé des eaux Nicolas Rubinstein jusqu’au 19 décembre Centre d’art contemporain intercommunal 04 42 55 17 10 www.ouestprovence.fr 48 ARTS VISUELS GALERIE D’ART DU CG13 | FONTAINE OBSCURE De la mère à l’enfant Un musée n’y suffirait pas pour évoquer la maternité, à la Vierge Marie. Le second à la gestation, quand depuis les déesses préhistoriques de la fécondité la mère et l’enfant font corps, particulièrement jusqu’aux représentations contemporaines. Ce présente dans l’iconographie contemporaine : sujet est à la croisée de nombreuses disciplines : douce et secrète Boîte close d’Agathe Larpent, art, ethnologie, médecine, littérature, sociologie, bio- terre cuite engobée aux formes généreuses de logie… Grâce à Jean-Roch Bouiller, commissaire Loul Combes, Vanitas foetales disgracieuses de de l’exposition Quelques figures de maternités, on Saverio Lucariello qui représente le ventre de la entrevoit la récurrence de la question de la mater- femme comme un coquillage béant… La naissance, nité comme cristallisation de «tous les enjeux liés bien sûr, qui suscite la recrudescence de nombreux à la reproduction humaine à l’échelle individuelle, ex-voto «pour s’assurer des bons auspices du familiale, de la société, de la civilisation voire de destin». Et enfin le thème de la mère à l’enfant avec l’espèce». Certes de manière parcellaire, mais ses scènes d’allaitement (sereine Maternité blanche néan-moins efficace : l’œil est invité à dépasser de Maurice Denis), et les relations mère-fille vues l’illustration pour comprendre le sujet, en effleurer sous un angle plus psychologique aujourd’hui. En sa dimension anthropologique, et inversement, à cela la vidéo de Maria Marshall, Pinocchio, fait l’effet admirer tel bas-relief du XVIe siècle ou telle encre d’une bombe à retardement. sur papier de Frédérique Lucien du XXIe siècle... MARIE GODFRIN-GUIDICELLI Pour circonscrire le sujet, l’exposition favorise quatre approches : la première consacrée à l’amont de la Quelques figures de maternités jusqu’au 3 janvier gestation avec ses témoignages matériels de Galerie d’art du Conseil général, Aix vœux formulés aux divinités de la fécondité et de 04 42 93 03 67 la fertilité, et le thème chrétien de l’Annonciation www.cg13.fr © Katharina Bosse, Berge et Katharina 2 Children, serie A portrait of the Artist as a Young Mother, Paris, Galerie Anne Barrault Aux temps anciens Pour la célébration du jumelage Grenade/Aix-en-Provence, Regards Croisés remonte le passé au Musée des Tapisseries et à la galerie de la Fontaine Obscure Les Regards Croisés nous avaient habitués à verre les avancées de la modernité en son siècle. documentaire historique, ethnographique et sociale travers de nombreux échanges avec des pays Moins concernés par une approche artistique que qui possèdent cependant un charme plastique étrangers à la découverte d’artistes contemporains. par une démarche de reportage et de témoignage, certain, plus d’un siècle après leur réalisation pour Cette édition 2009 propose de se tourner vers une ces photographes ont produit des images à valeur les plus anciennes. Pour les besoins de l’expo- vision nettement plus patrimoniale pour sition, elles ont fait l’objet d’un c Henri Ely célébrer le 30e anniversaire du jumelage retirage digital. entre Aix et Grenade. En une période où la dématé- L’intention est de rendre «hommage à rialisation numérique enfle et des artistes qui ont photographié leur fait polémique, la dimension ville respective en des temps où cette mémorielle de l’information -sa pratique était affaires d’initiés». On ressent valeur d’archive visuelle notam- dans ces deux expositions une certaine ment comme pour cette nostalgie comme lorsqu’on feuillette un exposition avec certains de ses album d’Eugène Atget enregistrant les aspects artistiques- interroge dernières apparences de Paris. Au début les choix qui fondent la trans- du XXe siècle, Arturo Cerdá y Rico semble mission patrimoniale. Quels faire de même avec Grenade et ses en- seront alors les partis pris de la virons, posant son imposant appareillage Fontaine Obscure pour le projet dans les rues, les boutiques ou la cam- dans le cadre du jumelage avec pagne andalouse pour fixer les gestes Tübingen en 2010 ? de ses contemporains. Ancrée à deux CLAUDE LORIN pas du cours Mirabeau, la famille Ely a pu constituer en quatre générations un Regards croisés important fonds documentant les évène- Grenade/Aix-en-Provence ments du pays aixois initié dès les années jusqu’au 30 décembre 1900 par Henry Ely. Un peu par hasard Musée des Tapisseries au milieu du siècle, Tommy Olof Elder, un Suédois en villégiature près de Espagne années 60 Grenade, capte les scènes de la vie Tommy Olof Elder quotidienne des habitants, principale- jusqu’au 16 décembre ment des gitans, dans le petit village Galerie Fontaine Obscure d’Almuñecar. Mais autant les clichés 04 42 27 82 41 modernes sur pellicule d’Elder et les www.fontaine-obscure.com autochromes de Cerdá, avec un traite- ment proche du pictorialisme, fixent ce qui va disparaître, autant Henry Ely enre- gistre et accompagne sur plaques de ESPACE ÉCUREUIL | VILLA NOAILLES ARTS VISUELS 49 Entre ciel et mer Dans les photographies de Cyrille Weiner, le littoral Hyèrois n’est pas «la Côte». Pas de racolage bling-bling, ses photographies révèlent avec simplicité une autre manière d’habiter la presqu’île de Giens, les Îles d’Or. De s’approprier la mer. Pas de gros plans sur des hordes estivales ni de débordements criards : juste quelques rochers émergeant du ressac, deux ou trois parasols ouverts, quelques cabanons de bric et de broc, un joli chemin sans fin. Et toujours un cadrage plein ciel, une ligne d’horizon profonde qui structure la composition : une ligne de fuite idéale pour le regard à perte de mer… Guetteur contemplatif et solitaire, Cyrille Weiner a arpenté durant deux ans la presqu’île et ses terres voisines pour répondre à une commande photographique de la Villa Noailles à Hyères. Il s’est familiarisé avec le paysage jusqu’à s’y fondre, jusqu’à offrir «une déambulation poétique et une réinterprétation de l’île et du rivage». Le fruit de son abandon à la nature fait l’objet d’une exposition et d’une publication produites par la Villa Noailles, qui a déjà offert quatre cartes blan- ches à Joël Tettamanti, Olivier Amsellem, Erwan Frotin et Charles Fréger, heureux bénéficiaires de conditions de travail professionnelles (50000 euros de budget moyen par résidence). «C’est le résultat d’une envie partagée, souligne Jean-Pierre Blanc, Hyeres, L'Almanarre, de la serie Presque ile, 2009. C-print 60 x 70 cm son directeur, d’une volonté de faire prendre cons- La commande photographique est liée à l’histoire ment lauréat du Prix de la Fondation HSBC pour cience aux gens de leur environnement et de leur de la Villa Noailles : si le plus célèbre des artistes la photographie, un nouveau projet in situ qui verra patrimoine». Selon leurs projets, et en résonance en villégiature fut Man Ray, les années 1995/96 le jour en 2011. Les impatients pourront toujours avec les champs d’investigations de la Villa accueillirent Bernard Plossu, Jacqueline Salmon, se consoler en découvrant son travail en novembre Noailles, les résidences comptent parfois de lon- Karl Lagerfeld et Stéphane Couturier. Pour autant, au Musée d’art contemporain de Marseille. gues périodes de gestation. «A priori, remarque la Villa n’a pas vocation à constituer une collection, MARIE GODFRIN-GUIDICELLI Jean-Pierre Blanc, les artistes viennent avant tout faute de moyens financiers et de conditions de pour l’architecture mais ils découvrent l’envi- conservation requises. En qualité de centre d’art, Presque île ronnement, se l’approprient plus largement et elle possède de nombreuses archives sur son his- Cyrille Weiner réagissent au lieu et à ses projets dans les do- toire contemporaine, notamment sur le Festival Exposition prolongée jusqu’au 3 janvier maines de la mode, de l’architecture et du design». international de design et le Festival international 04 98 08 01 98 Souvent le travail évolue en cours de route, comme de mode et de photographie. Mais elle reste réso- www.villanoailles-hyeres.com pour Erwan Frotin qui réalisa ici ses premiers lument tournée vers les talents prometteurs et portraits botaniques. vient de confier à Grégoire Alexandre, fraîche- Le rongeur qui promeut La saison 2009 pour la facture. Dans une esthétique se terminera à l’Espace proche, questionnant aussi le por- De Chair et d’encre trait, suivra l’exposition d’Alix Paj qui Alix Paj, peintures Ecureuil en deux expo- utilise de manière peu convention- sitions triturant le portrait jusqu’au 4 décembre nelle l’encre de chine sur support Le poids de la lumière en peinture, puis de la d’acétate et p.v.c. Pour conclure Linjiao Li, photographies photographie. Et toujours l’année, Linjiao Li suspendra ses jusqu’au 29 décembre des conférences photographies aux cimaises de la rue Montgrand. Linjiao Li - Sans titre (serie Au bord) - 2007 - Espace Ecureuil Malgré un horizon qui se voit tour- tirage argentique - 58 x 40 cm Ne pas se priver aussi des confé- 04 91 57 26 49 menté par la crise financière, la sa première exposition à Jean- rences en histoire de l’art concoctées www.fondation-ecureuil.fr Fondation de la Caisse d’Epargne Philippe Gibergues, formé à l’école toute l’année par Jean-Noël Bret, poursuit son œuvre de mécénat en supérieure des Beaux-arts de Mar- qui invite cette fois-ci Bernard Lafar- faveur de la culture et de la création seille. Ses peintures de bon format, gue, rédacteur en chef de la revue artistique en particulier, sans oublier, qui s’intéressent particulièrement à Figures de l’art pour l’édition des en parallèle à la présentation de la figuration humaine, évoquent actes du colloque consacré en 2008 créateurs de renom, la promotion James Ensor ou Egon Schiele pour à Daniel Arasse, le 30 novembre à 18 des jeunes talents émergents. la dramatique irrévérence, Botero heures. Ainsi l’Espace Ecureuil vient d’offrir pour les rondeurs et Lucian Freud CLAUDE LORIN 50 ARTS VISUELS ENTRETIEN AVEC DOMINIQUE ANGEL 1 pour 4 Développé en quatre expositions plus des interventions scolaires, le projet de Dominique Angel, Pièces supplémentaires, a la côte sur les bords du Rhône. Depuis plusieurs années, Dominique Angel déve- exemple, une des pièces au château de Tarascon, la à la question du patrimoine. Je dois faire avec. Ça loppe une œuvre protéiforme selon le principe du table avec les têtes dessus, je l’ai présentée sous relève du tour de force. réemploi : des pièces antérieures sont réinjectées des formes différentes et là je pense que j’ai dans les propositions nouvelles, le plus souvent trouvé la forme juste. Je pense que maintenant je Tout s’est fait sur place ? des installations conçues en fonction des espaces vais la présenter sous cette forme-là. Non, j’ai fabriqué des pièces dans mon atelier. J’ai d’accueil. Sous le terme de Pièce supplémentaire, travaillé aussi sur le lieu comme un atelier en il constitue au fil des projets un work in progress Qu’est-ce que c’est ce «juste» pour un artiste ? confrontant les questions de proportion, de compo- aux apparences variables et éphémères. Juste c’est un terme qu’utilisent beaucoup les sition, d’échelle tout particulièrement… et en Cette année, à l’initiative du Frac Paca qui possède artistes et on ne sait pas trop ce qu’il veut dire ! modifiant les choses au fur et à mesure. deux sculptures de l’artiste, Pièce Supplémen- Quelqu’un qui écrit sait aussi à un moment que taire s’est développé au pluriel en plusieurs lieux sa phrase est juste. À un moment du travail on a Quelle a été la part des scolaires dans ce projet ? patrimoniaux bordant le Rhône. Au point de départ, un sentiment de justesse, dans un rapport entre J’ai proposé de prendre les étudiants de l’option une résidence de création littéraire art en lycée comme assistants, à Villeneuve-lez-Avignon qui a Dominique Angel, Pièces supplémentaires, 2009, Chartreuse, Villeneuve-lez-Avignon, © X-D.R certains se destinent aux beaux arts. réussi à contaminer Tarascon et J’ai préparé en amont des Avignon, impliquant dans son conférences pour les différentes mouvement plusieurs établissements écoles et lycées comme pour une scolaires. Un livret d’accompa- école d’art. Je leur ai expliqué mon gnement des visites ainsi qu’une travail, j’ai exposé le projet à publication (qu’on aurait appréciée Tarascon et à Villeneuve, c’est-à- plus copieuse quant à sa démarche dire pour deux groupes d’environ et ses choix) éditée par l’Agence une vingtaine d’élèves. Et puis il y Alternative aux éditions Analogues avait les options histoire de l’art, plus documentent le projet. intéressés par l’accrochage, qui sont venues en cours de montage ; là ça Zibeline : Comment est venu ce s’est passé par entretiens. Et à d’autres projet avec le Frac ? classes j’ai donné du travail à faire à Dominique Angel : D’une discus- partir des lettres -un peu loufoques- sion avec Pascal Neveux qui voulait envoyées à mes élèves lorsque faire quelque chose avec les artistes j’enseignais à la Villa Arson. J’ai été qui écrivent. Je lui ai proposé de aussi invité dans des écoles pour travailler à partir de mes récits où il des ateliers d’écriture, et à Tarascon y a des descriptions d’œuvres qui avec le prof d’arts plastiques on a n’existent pas : des photos, des ins- travaillé la vidéo. Ce qui a lancé plein tallations, des sculptures. Je voulais de trucs et l’envie pour eux de faire réaliser ces pièces qui n’existent des choses. Je dois aussi faire une pas, et il m’a proposé des lieux. conférence pour l’école Confrontés à leur présence, leur d’instituteurs… histoire, la réalisation des pièces a évolué. En fonction de l’architec- Avez-vous déjà travaillé sur un projet ture, de leur adaptation. L’idée était aussi important ? aussi de présenter la totalité de Non, c’est la première fois. Ça serait mon dispositif de travail : de la bien de présenter tout cela à la sculpture, de l’écriture, la vidéo, la Chartreuse et à Tarascon ! performance... Il fallait des espaces ENTRETIEN RÉALISÉ PAR CLAUDE LORIN qui permettent de développer cette pluralité de formes d’expression qui participent de l’idée d’une œuvre unique. D’où le le contenu de la pièce et la manière dont elle est Pièces supplémentaires nom de Pièce supplémentaire. Le plus souvent on faite, le sentiment qu’elle est terminée. Dominique Angel ne voit que des morceaux ; quand j’ai l’occasion jusqu’au 20 novembre d’en présenter la totalité ça me permet aussi de Un achèvement ? Cloître des Cordeliers, Tarascon faire le point. Oui, le moment où la pièce dit ce qu’on veut dire, 04 90 91 38 71 y compris avec les éléments qui vous échappent. jusqu’au 30 novembre Ainsi lorsqu’on voit une de vos pièces, une Donc ces quatre expositions je les ai conçues Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon sculpture par exemple, ce n’est qu’un élément du comme une seule, même si elles sont dispersées. 04 90 15 24 24 grand œuvre ? Dans une exposition, on passe d’une œuvre à une Tour Philippe le Bel, Villeneuve-lez-Avignon Oui, mais en même temps qui a son autonomie autre rapidement, mais là l’espace entre est plus 04 90 27 49 28 et que je peux rejouer dans une installation avec grand, le spectateur peut imaginer autre chose, jusqu’au 30 décembre d’autres œuvres plus anciennes, des récentes, ça demande un effort pour faire ces relations avec Château Royal de Provence, Tarascon que je peux modifier jusqu’à ce que je trouve l’ins- ce patrimoine très fort. Je me suis rendu compte 04 90 91 01 93 tallation juste. J’avance par tâtonnements. Par que l’art contemporain était constamment confronté www.fracpaca.org NÎMES | ALLAUCH ARTS VISUELS 51 Troublantes images Au Carré d’Art, Projections donne à voir des œuvres hétérogènes et perturbantes où temps et images mentales se télescopent dans une déambulation austère. Au visiteur de trouver les liens Le titre programmatique laisse à imaginer un ensemble de notamment scientifiques : la scul- films ou vidéos. C’est le cas pour un bon nombre d’œuvres pture en titane Cloud Prototype 2 mais nous avons à faire aussi avec de la peinture, du d’Iñigo Manglano-Ovalle, ou jeux dessin, de la gravure, de la sculpture. Quel que soit le mé- virtuels : la vidéo en 3D Arena 2 de dium utilisé, celui-ci cependant ne se présente pas dans Chris Cornish. L’installation Viewer toute son évidence. Des dessins au crayon sanguine sont Hard Drive de Jean-Pascal Flavien projetés sur grand écran (Jean-Pascal Flavien) ; le pastel laisse voir son dispositif complet : gras évoque les images positif/négatif photographiques et images numériques projetées sur filmiques (Michael Landy) ; technique traditionnelle, la gra- images sur supports papier, l’ap- vure compose des images hybrides constituées d’immeubles pareillage technologique, son espace, de style moderne dans des paysages de genre XVIIIe siècle son temps de perception. (Cyprien Gaillard) ; la peinture réemploie des images gla- Ces enjeux entre réalité et virtualité, nées sur Internet (Gordon Cheung) ; la sculpture matérialise sur l’ambiguïté de la perception, utili- des structures empruntées aux sciences (Tobias Putrih) sant des principes séquentiels et/ou Tobias Putrih, Argos cinema, 2007, structure en contre-plaque et carton ou des données numériques météorologiques (Iñigo répétitifs appliqués au déroulement avec projection du film La Jetee de Chris Marker © C. Lorin Manglano-Ovalle). temporel, jettent le trouble sur l’éviden- tions par l’envers : celles, mentales, que ces œuvres sont La salle consacrée au travail de Laurent Grasso est emblé- ce des choses. L’exposition provoque susceptibles de provoquer en nous-mêmes. Mais de matique de ces emprunts et brouillages des territoires qui une certaine confusion au risque de quelles projections sommes-nous capables ? présente en un même temps/même espace deux impo- l’incompréhension du spectateur, à CLADE LORIN santes projections vidéo, des sérigraphies argent (de grand moins que ce dernier ne prenne le Projections format mais uniquement visibles de près), deux petites temps de la recevoir. C’est là l’effort jusqu’au 3 janvier huiles sur bois éclairées dans l’obscurité comme des photos. nécessaire pour entrer dans ces formes Carré d’Art L’ambivalence est à son comble lorsque Daniel Arsham énigmatiques que tente d’expliciter la Musée d’art contemporain de Nîmes utilise la gouache sur papier calque imitant à première vue commissaire du projet, Françoise Cohen, 04 66 76 35 70 la photographie, pour peindre des scènes improbables dans le catalogue bien documenté et http://carreartmusee.nimes.fr incluant poutres, escaliers et obélisques de béton (?) au le petit livret d’accompagnement à la sein de forêts tropicales. visite. catalogue bilingue français/anglais, 104 pages D’autres sont générées par ordinateur à partir de données Il faut peut-être aborder ces Projec- co-édition Carré d’art/Archibook, 23 euros Sur la colline Alors que son premier volet de l’art grâce à plusieurs initiatives entendues entre Nord/sud se termine, la 3e biennale responsables publics et acteurs de l’art contempo- d’Art Contemporain d’Allauch rain. En témoignent les activités des Ateliers du Logis Neuf, le festival de la photo Phocal, la Biennale rend hommage à André Gence, d’Art Contemporain portée par le peintre Olivier mais l’exposition Alechinsky Bernex et progressivement la programmation du est repoussée à 2010 musée. Malgré les efforts consentis au Vieux Bassin comme Homme mage au musée, un lieu dédié à la création contemporaine Disparu peu de temps avant son inauguration, André apparaît nécessaire. C’est le projet envisagé dans les Gence n’aura pas pu voir l’exposition que lui consa- 2000m2 de l’Usine électrique où est déjà accueilli le cre le musée d’Allauch. Il avait préparé de longue Ballet d’Europe, dont la réhabilitation impose le date cet évènement avec l’enthousiaste conservateur report de l’exposition Alechinsky en juin 2010. Nicolas Bousquet. Son œuvre empreinte d’une pro- On se jette à l’eau ? fonde spiritualité ne pouvait trouver meilleur accueil CLAUDE LORIN dans cet établissement destiné à la compréhension des symboles et du sacré. Sans être une rétro- 3e Biennale d’Art Contemporain d’Allauch spective, les espaces du musée ne le permettant André Gence, Anthologie pas, cette Anthologie offre un parcours commençant jusqu’au 14 février avec des œuvres réalisées dans les années Musée d’Allauch soixante-dix jusqu’à nos jours, dont un très beau 04 91 10 49 00 André Gence, Sans titre, huile sur toile © X-D.R. Sans Titre de 1974 fait de variations rouge carmin, www.musee.allauch.com vermillon et d’un point lumineux jaune, qui inaugure Projet électrique le style qu’on lui connaît aujourd’hui transposé dans Perché sur les hauteurs du Massif de l’Étoile, le des modulations de gris. Au premier étage, on peut village d’Allauch regarde la métropole en contrebas le voir dans deux rares vidéos de France 3 médi- sans trop de complexe. Visité pour son site naturel et terranée, parler de son travail lors d’une de ses son ancrage dans les cultures traditionnelles, il s’est expositions à la galerie Sordini en 1989. ouvert depuis plusieurs années aux formes récentes

52 ARTS VISUELS DE VISU | REGARDS DE PROVENCE | TERRITOIRES PARTAGÉS Photographie orgasmique Cela fait cinq ans qu’Antoine d’Agata est sans domicile graphies est à son comble. Et les fixe. Éxilé volontaire autour du monde, loin du marché de mots de Rafael Garido résonnent, l’art, des galeries et du monde de l’édition il retourne évoquant «les corps incorporants et aux sources, absorbé par son travail photographique et incorporés, le désir incarné, l’écriture. Sauf que des grains de sable viennent parfois désossé.» La correspondance va enrayer les rouages les mieux huilés. La rencontre avec plus loin encore quand le flux de ses le jeune écrivain espagnol Rafael Garido, épris de mots, écrits ou lus par lui-même, Bacon, bouleverse sa «retraite». Une longue corres- file au rythme de l’accrochage des pondance par mail, des belles évocations littéraires photographies, cadre contre cadre, (Burroughs, Blanchot, Artaud), et Antoine d’Agata franchit en un long ruban sans fin. Entre le la ligne, fouille son passé pour écrire un récit photogra- portrait d’Antoine d’Agata à 25 ans phique autobiographique et commence une nouvelle et son autoportrait au corps aventure éditoriale ! Une partition en binôme fertile avec saupoudré d’un nuage de blanc, une une exposition produite par les Rencontres internatio- vie de désirs et d’orgasmes fait nales de la photographie d’Arles, et un ouvrage coédité irruption dans la lumière. Tout par Actes Sud et l’Atelier de visu. Rien de moins ! autour, le noir l’enveloppe. La part Complice depuis 10 ans de la galerie, Antoine d’Agata d’ombre. offre à l’Atelier de visu la primeur de ce roman auto- MARIE GODFRIN-GUIDICELLI biographique. Des images scénarisées à l’extrême, entre sexe et drogue dure, totalement égocentriques : Agonie leur cruauté paraît violente, mais Antoine d’Agata la jusqu’au 4 décembre récuse en se l’appropriant : «la violence de la défonce, Atelier de visu c’est contre moi» argumente-t-il face à cette mise en 04 91 47 60 07 image frontale de son intimité. Overdose, douleur, © Antoine d'Agata jouissance, corps mou, corps dur : l’intensité des photo- - Magnum Photos Souvenir, souvenir… Faute d’exposer des pièces récentes de Marie- tiques. Parfois même, revêtue du Chapeau-vie Ange Guilleminot, la galerie Territoires partagés en jersey cloqué, elle s’imposait d’étranges replonge dans leur passé commun. En 2001, postures au milieu de sculptures inanimées. le Frac l’invitait à l’occasion d’un vaste projet, La vidéo, tel un mode d’emploi, livre ses Cocteau Les Origamis, mêlant pliages de guirlandes secrets. Et les photographies, là encore, de couleur, manipulations et performances. racontent leurs souvenirs : plus d’un an de méditerranéen Au mur, les photographies de Stéphane voyages dans le Queyras à la rencontre des Guglielmet en témoignent. En 2003, Marie- habitants. Car Territoires partagés a toujours Conçue comme un parcours autour de la Méditerranée, Ange Guilleminot, la galerie et le Frac développé son action selon trois principes : la l’exposition de la Fondation Regards de Provence, Jean s’associaient encore autour de l’une de ses rencontre avec un artiste, le prêt d’une œuvre Cocteau et la Méditerranée, se concentre de fait sur la œuvres-phare, le Chapeau-vie, «multiforme par une institution, la sensibilisation des Côte d’Azur, la Grèce, l’Italie et l’Espagne. Autant de et multifonction, indémodable, unisexe et en publics. Un projet qui a séduit le Frac durant haltes dans la vie d’un artiste qui se définissait comme taille unique». À plusieurs reprises, et dans huit ans, avant de convaincre la Villa Arson à «un poète qui emprunte beaucoup de véhicules.» des conditions parfois insolites comme à Nice, son nouveau partenaire. Déclaration à prendre aux sens propre et figuré puisqu’il Venise, l’artiste mettait en scène son propre MARIE GODFRIN-GUIDICELLI fut un infatigable voyageur, et un touche-à-tout de génie : corps, asexué, dans des performances énigma- peinture, dessin, céramique, tapisserie, bijoux, toujours à Installations de Marie-Ange Guilleminot, Galerie Territoires Partages l’affût de collaborations inattendues, musicale avec le Groupe des Cinq, chorégraphique avec Nijinsky… Marie-Ange e Pour célébrer cette figure marquante du XX siècle, la Guilleminot fondation s’est entourée d’amis, de membres de sa jusqu’au 19 famille et de spécialistes Malheureusement, malgré ces décembre multiples éclairages, l’exposition manque de relief : pas galerie Territoires de manuscrits ni de poèmes, pas de correspondances ni partagés, de maquettes d’opéra… Circonscrite à un territoire Marseille géographique, elle ne parvient pas à refléter l’ampleur 09 51 21 61 85 de l’œuvre ni son avant-gardisme, gommant son influence sur la littérature et la création actuelles. Dommage de ne donner à voir qu’une facette de ce personnage multiforme ! MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Fondation Regards de Provence, Marseille jusqu’au 24 janvier 04 91 04 68 32 MONTPELLIER | CINEHORIZONTES | RENCONTRES À L’ÉCHELLE CINÉMA 53 Mouret de Marseille à Montpellier Pourquoi le Festival du cinéma une place de choix. «Pourquoi Mouret méditerranéen de Montpellier dans au Cinemed ? Parce qu’il est de Mar- Zibeline, qui s’arrête en principe à seille !» déclare Jean-François Bourgeot, Nîmes dans ses incursions hors PACA? le directeur du festival qui a tenu du 23 Pour vous donner envie d’y faire un octobre au 1er novembre sa 31e édition. tour un jour : plus de cent-trente longs Car c’est sa ville natale que le cinéaste métrages, fictions et documentaires, filme dans ses tous premiers films une centaine de courts dont une tren- qu’on a pu découvrir ici. C’est la Baie taine de cinéma expérimental, des des Singes, la Grotte Rolland, La focus sur le cinéma italien et politique Madrague de Montredon, Callelongue d’Elio Petri, sur le cinéma fantastique que Clément, gentil jeune homme espagnol, sur le nouveau cinéma turc, charmeur, indécis, fait découvrir à son des tables rondes, des rencontres, des amie, Constance dans Promène-toi expositions, des cinéastes invités dont donc tout nu, son film de fin d’études. Angelopoulos, Amenabar, Rappe- Ce sont les plages sur lesquelles Lucie neau, Allouache et accompagnant vend ses maillots de bain dans son Emmanuel Mouret, ses actrices, premier long, Laissons Lucie faire, un Frédérique Bel et Julie Gayet. «divertissement sentimental». Un baiser s'il vous plait d'Emmanuel Mouret © Pascal Chantier Bref ! Un programme alléchant pour Dès ses premiers films le style est Allen, des gags qui font songer aux Cinemed a donné l’occasion de revoir tous ceux qui aiment le cinéma dans trouvé, son personnage à la diction burlesques américains, des clins d’œil toute son œuvre et de revisiter sa diversité. hésitante, maladroit à la Tati, aérien et à Truffaut, Mouret, qui explore les Marseille. D’autant qu’en proposant un hommage décalé, clownesque et ingénu aussi. innombrables facettes de l’amour et du ANNIE GAVA et une carte blanche à Emmanuel Avec des dialogues qui font parfois désir, a su mettre en place un univers Mouret, Cinemed a offert à Marseille penser à Rohmer, parfois à Woody qui lui est propre, sa Carte du Tendre. À la carte et fi des frontières ! Homme au bord de la crise de nerfs pour l’ouverture de teintes grises, brunes, sombres par José Luis Cuerda dont Cinehorizontes avec l’énergique comédie de Nacho on avait apprécié La lengua de las mariposas. Mais le cinéma Garcia Velilla, Fuera de carta. Maxi, interprété par un espagnol aborde aussi notre commune actualité. Un fait extravagant Javier Cámara, chef cuisinier gay en quête d’hiver dramatique en 2003, les corps de 35 marocains d’une étoile Michelin, se retrouve subitement en charge de retrouvés sur une plage de Cadix, a inspiré à la réalisatrice, deux enfants nés d’un mariage de convenance, tombe Chus Guttiérez. Dans Retorno a Hansala, présenté en Inland amoureux d’un ex-footballeur argentin, devient le rival de son collaboration avec FFM, Leila, sœur d’un défunt, retourne explosive maître d’hôtel (Lola Dueñas)... Situations vaudevi- dans un petit village de l’Atlas, accompagnée de Martin, in Gyptis llesques, jeu sur les clichés homophobes, langage cru, si le l’entrepreneur en pompes funèbres pour qui ce voyage sera film n’évite pas toujours le stéréotype, il annonce avec une véritable prise de conscience. Session de rattrapage le 8 novembre optimisme une des thématiques de l’édition 2009 en Violence d’un monde qui ne cesse de dresser des barrières… au Gyptis dans le cadre des Rencon- partenariat avec le festival Reflets : «Aimer autrement», à la Le jury, présidé par Laura del Sol a attribué : le grand prix tres à l’échelle, pour ceux qui avaient carte donc plutôt qu’au menu. Cinehorizontes à Ander de Roberto Castón ; il a également raté Inland du franco-algérien Tariq Dans la continuité des mutations sociales de l’Espagne à la accordé une mention spéciale à Retorno a Hansala de Chus Teguia projeté en mars dernier (voir fin du XXe siècle, il s’agit de s’accepter et trouver sa place Guttiérez. Zib 17). pour les protagonistes d’Ander de Roberto Castón, un des Le public marseillais s’est pressé chaque soir au cinéma Le D’Oran qu’il quitte pour déterminer le sept films en compétition, présenté en avant-première. Et Prado à Marseille qui a accueilli la manifestation du 6 au 14 tracé d’une ligne électrique dans un de jouer de ses fantasmes pour Jess Franco, réalisateur novembre et les échanges avec les invités ont été très arrière-pays traumatisé par le ter- prolifique de séries B, auquel il est rendu hommage. riches. rorisme, au désert saharien où il À l’œuvre également, une volonté d’échapper aux représen- Bravo à Horizontes del Sur ! rencontre une immigrée clandestine tations nationales : les films sélectionnés font voyager. ELISE PADOVANI ET ANNIE GAVA traquée, le topographe Malek passe Barcelone et Madrid, bien sûr, mais aussi le Pérou (Fausta), d’une observation distancée et désa- l’Argentine (El niño Pez), le Mexique (Una vida mejor), le Maroc busée de la réalité algérienne à une (Metropolis Ferry), Tokyo (Maneki neko), Ander de Roberto Castón adhésion au monde plus essentielle. Marseille (Amateurs). La soirée de Film de trajectoires géographiques et clôture, consacrée en première partie mentales, collectives et personnelles, aux courts métrages des jeunes d’affranchissement des frontières de cinéastes de l’école madrilène ECAM, toutes sortes, de ruptures et de liens, nous transportant à Cuba grâce à la de traces à effacer, à suivre ou à per- musique du groupe Pupy y los que dre, Inland crée avec une grande son son. liberté formelle un parcours plastique Un cinéma entre deux mondes, comme sensible et captivant, une chorégra- l’invité d’honneur Sergi López. Les phie jalonnée de musique électronique, fantômes du franquisme hantent deux de rock, de raï, de poèmes, de dis- films, Barcelona (un mapa) et Los cours et de silences d’une évidence Giralos ciegos, adaptation du livre propre aux grands films. éponyme d’Alberto Méndez, tout en ELISE PADOVANI 54 CINÉMA INSTANTS VIDÉOS | IMAGE DE VILLE | CARPITA | RACHEL Vos Instants durent toujours L’horizon des 22e Instants Vidéo ne sera atteint qu’en fin décembre. Une bonne raison de zigzaguer dans la programmation et de poursuivre avec deux festivals alentour La présentation exceptionnelle de La Peau de partir du 24 nov, la Maison des Jeunes et de la Thierry Kuntzel à la Compagnie donnait le ton de la Culture qui développe depuis plusieurs années un qualité de cette programmation. Comme les travail vidéo et numérique dans son Laboratoire précédentes, celle-ci reste profuse, multiple, éclatée, d’images, programme un panorama éclectique de la questionnante. Entre cycles de projections, dispo- création vidéo pour se clore sur soirée poétique en sitifs vidéo, installations, rencontres et débats rendus partenariat avec Autres et Pareils le 28. possibles grâce à de nombreux partenariats (Zinc-La Dans la même période, le plaisir vibrant des nouvelles Friche, Rencontres d’Averroès…), pièces historiques technologies de l’image est aussi en œuvre avec deux (Jaffrennou, Deleuze, Kuntzel, Pasolini) et créations, festivals : à Arles avec ArtCourtVidéo (films d’artistes, convocation croisée des disciplines (danse, expéri- installations, documentaires, films d’animations, et mentations plastiques, cinéma, littérature, son, poésie, trois prix pour finir en beauté) et la 5e édition de House - plenitudo vacui de Luna Amato (Italie, 2008). fiction, performance…), le moment des Rencontres Gamerz (détournements artistiques des jeux vidéo) Le film est projete a La Compagnie les 22 et 23 nov. Poétroniques… au bout du compte l’iconophage post- à Aix-en-Provence. post-moderne est bien en mal de choisir ! Rançon du CLAUDE LORIN ArtCourtVidéo travail de Marc Mercier et son équipe, cette opulence jusqu’au 22 novembre des propositions et la dispersion des lieux rend 22e édition Instants Vidéo www.artcourtvideo.com parfois douloureux de tourner le dos le bon vent qui Avez-vous vu l’horizon récemment ? mène à l’horizon de la Pologne, Palestine, Syrie ou jusqu’au 19 décembre Gamerz#05 l’Egypte… www.instantsvideo.com jusqu’au 04 décembre Mais les rives de l’étang de Berre, plus proches, www.festival-gamerz.com offrent aussi de belles rencontres à Martigues. À Nuits blanches Flash sur la nuit urbaine à Aix : Vendredi 13, au Pavillon noir, en ouverture, se sont travail avec un des plus grands chefs opérateurs succédé la nuit portuaire de Paul Carpita dans Jésus français, Henri Alekan, auquel Image de ville rend Image de ville a réuni du 13 est mort, les enseignes de New York filmées jusqu’à hommage cette année, pour le centenaire de sa au 17 nov, architectes, plasticiens, l’abstraction par William Klein dans Broadway by naissance. cinéastes, musiciens pour saisir light, et une création son et lumière née de la colla- Les villes éteignent les étoiles, leur jour artificiel défie boration entre le compositeur Nicolas Errera et le les dieux, creuse les ombres où se cachent les tout l’éclat de la nuit plasticien Yann Kersalé. Ce dernier a raconté son crimes, se libèrent les pulsions, s’élaborent les rêves ou les cauchemars ; après le temps diurne social du Falafel de Michel Kammoun travail, elles sont au cinéma les lieux privilégiés des rencontres et des dérives (Les nuits blanches de Visconti), des descentes aux enfers (La rue de Karl Grüne) des vertiges vampiriques (30 jours de Nuit de David Slade), de toutes les violences (King of New York d’Abel Ferrara), écrins des solitudes et des transgressions fatales (The yards de James Gray, Frozen days de Danny Denner). Le géographe Luc Gwiazdzinski a parlé de la nuit comme ultime fron- tière d’un domaine méconnu, l’urbaniste Claude Eveno regretté sa dissipation dans des villes trop éclairées, la disparition des lucioles comme symboles d’une pensée nourrie par l’ombre. Unité de temps, unité de lieu, la ville est un théâtre, les personnages s’y révèlent. Un marchand de falafels de Beyrouth devient oracle et un chauffeur de taxi napolitain nocher philosophe. Michel Kammoun et Toni d’Angelo traduisent les pulsions de leur ville respective dans Falafel et Una notte. En 66 films, fictions ou documentaires en partenariat avec le fidmarseille, en parcours vidéographiques, litté- aires, rencontres (Willy Kurant et Richard Coppans entre autres), Image de ville a fait le tour de la nuit. ELISE PADOVANI

Rachel, l’émotion ! documentaire que les problèmes politi- ques en Israël et Palestine. Le jour de la mort de Rachel Corrie, en mars 2003, Simone Bitton était en repérages à Ramallah pour son film précédent, Mur. Apprenant la mort de deux autres pacifistes, elle annule le tournage prévu à Gaza. Puis consciente qu’il faut que les cinéastes fassent leur travail, par- Simone Bitton et Jean-Michel Perez, le monteur © A.G tout, elle décide de faire un film entier Le 23 octobre, le cinéma Variétés a ac- sur Gaza. Lisant les carnets de notes de cueilli Simone Bitton qui présentait Rachel, elle centre le documentaire sur son dernier film, Rachel. Rachel, c’est la jeune pacifiste. Rachel Corrie, une jeune pacifiste Les questions ont été très nombreuses américaine tuée par un bulldozer aussi bien sur la responsabilité des USA israélien qui s’apprêtait à détruire une que sur l’état de la gauche israélienne, maison palestinienne. sur les rapports entre l’armée et le gou- Le film enquête sur les circonstances vernement. de cette mort à partir de documents Simone Bitton, qui a la double nationa- divers, photos, vidéos, de témoignages lité, a aussi évoqué les difficultés pour et happe le spectateur jusqu’à la fin. tout citoyen israélien de se rendre en Tenace, Simone Bitton ne lâche jamais Palestine -«Pour notre sécurité !»- et ses interlocuteurs pour tenter de faire l’impossibilité d’aller dans la bande de émerger la vérité. Le superbe travail de Gaza ; les scènes sur place ont été montage de Catherine Poitevin et «télécommandées» et tournées par son Jean-Michel Perez contribue à la force équipe. du film. Cela fait prés de quinze ans que Le débat, animé par Films-Femmes- Simone Bitton filme dans cette région Méditerranée qui avait présenté le film et on ne peut que saluer sa ténacité, sa en avant-première lors des 4e Rencon- conviction, son intégrité. Et la remercier. tres, a abordé aussi bien la genèse du ANNIE GAVA Au revoir, Paul Le 24 octobre disparaissait Paul Carpita. de 7000 «lycéens au cinéma» de la C’est à l’Espace Julien que je l’ai croisé région ont vu, l’an dernier, Le Rendez- pour la dernière fois. Il était venu, en vous des quais ! compagnie de Maguy, sa compagne, Né en 1922, instituteur jusqu’en 1968, voir Ken Loach qui présentait son docu- il fonde le groupe Cinepax qui va filmer mentaire, Wich side are you on ? des reportages sur Marseille, sur les Le 29 octobre, tous ses amis se sont manifestations contre la guerre d’Indo- retrouvés à L’Alhambra Cinémarseille chine, sur la grève des dockers de 1950. pour lui rendre hommage. La salle était Tourné en partie clandestinement, avec comble et, avant la projection du film Le des acteurs non professionnels, le Rendez-vous des quais, tous, anciens Rendez-vous des quais est saisi dès sa dockers, compagnons de route, ont té- deuxième diffusion dans un cinéma de moigné de sa modestie, de son humilité, la Belle de Mai pour être détruit. Le film de son extrême bonté, de sa grande restera enfermé pendant 35 ans sur les humanité, de ses précieuses qualités de étagères des Archives du cinéma à Bois pédagogue, aussi. Des lettres d’ensei- d’Arcy jusqu’à la levée de l’interdiction gnants et de lycéens ont été lues : près par le Ministre de la Culture en 1981. Paul gardera longtemps les traces de Paul Carpita © X-D.R. cette blessure… La première projection de la copie neuve, restaurée par la Cinémathèque Française dans le cadre des Écrans de la liberté, a eu lieu à l’Alhambra en 1990. En 1995, Paul Carpita se met à tourner un nouveau long métrage, Les Sables mouvants. En 2002, Marche ou rêve ! Les Homards de l’Utopie. Il était en train de préparer un nouveau film avec Claude Martino… Il nous manquera, il manque déjà. ANNIE GAVA 56 CINÉMA GARDANNE | APT «Parenthèse enchantée» C’est par cette formule que Régine perbe, plans fixes, passions contenues, Juin (qui succède à Bernard Lafon) a un jeu tout de tension des acteurs, un ouvert le 21e Festival Cinématographique thème qui nous pousse à aiguiser notre d’Automnede Gardanneau cinéma les regard sur nous-mêmes, les enjeux de Trois Casinos. Parenthèse enchantée l’éducation. Les spectateurs sortent en effet : dans le contexte difficile des visiblement bouleversés. cinémas d’art et d’essai, il est essentiel La soirée de clôture, très conviviale, a de conserver des lieux d’expression et commencé par la proclamation des d’ouverture sur le monde. Et c’est à palmarès. Deux prix du public ont été cela que s’attache le festival : 70 pays attribués : pour les courts métrages, représentés, des œuvres diffusées en Juste un pitch d’Eric Raynaud, l’histoire avant-première, aux côtés de produc- d’un scénariste indien qui arrive à Orly tions reconnues, un hommage à la pour signer son premier contrat de pro- comédie italienne avec Risi, Scola, duction. Mais le chef de l’immigration, Germi, un gros plan sur le cinéma remarque que son passeport n’est pas anglais, la découverte du monde en règle… d’Isabelle Balducci (qui passe avec Coté longs, c’est le film de Xavier de aisance du documentaire à la fiction, Lausanne, D’une seule voix, qui a eu procédant par touches), rencontres les faveurs du public : un documentaire Eastern plays de Kamen Kalev avec Abya Yala et le cinéma amérin- qui suit la tournée d’une centaine de sombres à Sofia, agressions racistes, malade et qui va, peut-être, réap- dien, ciné junior, une soirée Bollywood musiciens palestiniens et israéliens, deux frères qui ne se connaissent pas prendre à vivre. La fin, en suspens, et une compétition de courts métrages ! mise en place par Jean-Yves Labat de vraiment, histoires d’amour qui s’effi- permet au spectateur d’espérer ou Un avant goût du festival est donné par Rossi, côté scène et côté coulisses. lochent ou naissent, Eastern Plays est de… désespérer. une présentation d’extraits de quelques Et c’est par le très beau film de Kamen avant tout l’évocation d’une jeunesse Un film superbe pour clôturer un œuvres, puis le film de Michael Haneke, Kalev, Eastern plays, présenté en bulgare désillusionnée ; mais aussi le festival de qualité. Le Ruban Blanc, palme d’or du festival avant-première hors compétition, que portrait d’un jeune homme, artiste, MARYVONNE COLOMBANI ET ANNIE GAVA de Cannes 2009. Une photographie su- s’est terminée la manifestation. Nuits alcoolique, qui erre dans un monde Apt, une saison africaine Pour cette septième édition, le Festival des ciné- Raeburn : une chronique caustique d’une famille de mas d’Afrique du pays d’Apt a réservé de bons petits blancs pauvres, à Triomf, banlieue de Johan- moments à un public encore plus nombreux : malgré nesburg. Le réalisateur, qui est aussi documentariste, deux projections en parallèle pour chaque séance, a su rendre l’atmosphère de suffocation qui aboutit à les salles du cinéma César à Apt ont refusé du monde ! une vraie implosion de cette famille, métaphore de l’ex- plosion sociale et politique de l’Afrique du sud à la Hommages… rencontres veille de l’élection de Mandela. Les comédiens sont Deux hommages ont été rendus : à Youssef Chahine, excellents, le film est un choc… dont on a pu voir Gare Centrale ; et à Samba Félix Le Jury «Lycéens» a récompensé Teza de l’Ethiopien Ndiaye (voir ci-dessous) lors d’une table ronde sur les Haile Guerima et a accordé une mention à Shirley ambitions du documentaire en Afrique. Les réalisa- Adams d’Oliver Hermanus. Côté courts, la Femme teurs présents ont parlé tour à tour de la place qu’ils seule de Brahim Fritah et La jeune femme et l’instit accordent au spectateur quand ils «pensent» leurs docu- de Mohamed Nadif, deux films marocains, ont été mentaires, Jean-marie Tenoinsistant sur la nécessaire L’Absence de Mama Keita récompensés. subjectivité et Nadia El Fani pointant la question du tachée de sang, qui vous hanteront sans doute ANNIE GAVA «formatage» par les télés. «Faire un film documentaire longtemps. en Afrique est un geste politique» a-t-on conclu. Autres images persistantes, celles de l’adaptation du roman de Marlene van Niekerk, Triomf, par Michael …et films En ouverture et en avant-première, L’Absencede Mama Keita, l’histoire d’un jeune Sénégalais qui, ayant une brillante situation en France, revient après quinze ans Un cinéaste de la résistance d’absence à Dakar. Tout en tension, le film relate la des- Samba Félix Ndiaye, disparu le 6 novembre. Né à En 2007, à Apt, on avait pu l’entendre dire: «Je témoi- cente aux enfers de sa sœur, muette, véritable allégorie Dakar en 1945, réalise son 1er film à trente ans, gne de ce monde avec une attitude proche de quelqu’un de l’Afrique. portant un regard lucide et humaniste sur le quoti- d’éveillé : tu ne peux avoir reçu une éducation sans Le nouveau film de Raja Amari (Satin Rouge) est un dien. En 1989, c’est Le Trésor des poubelles, sur vouloir bonifier ce que tu as reçu. Nous ne pouvons troublant huit clos dans une ancienne demeure colo- l’habileté des artisans de la «récupération». En 1992, qu’amener des sons discordants avec le libéralisme niale, où vivent trois femmes, dont la plus jeune est Amadou Diallo, un peintre sous verre, ainsi qu’un qui domine le monde. On ne peut pas faire des films jouée par Hafsia Herzi (La Graine et le mulet). La documentaire, consacré à la voie de chemin de fer différents de ce que nous sommes.» maison avec son haut et son bas, métaphore de la Dakar-Bamako. En 1994, Ngor, l’esprit des lieux, sur On ne pourra plus le croiser à Apt mais on peut société, est superbement filmée par Renato Berta. un village menacé par l’urbanisation. En 1998, une toujours voir ses films ou lire l’ouvrage que lui a Il vaut mieux ne pas dévoiler Secrets, intitulé Berceuse évocation lyrique du poète et homme d’état séné- consacré, en 2007, un autre cinéaste, Henri-François pour sa version arabe. Sachez que vous y verrez une galais, Lettre à Senghor ; en 2003, Rwanda pour Imbert : Samba Félix Ndiaye cinéaste documenta- vieille photo de famille, de somptueuses chaussures mémoire et, en 2006, Questions à la terre natale où riste africain aux éditions L’Harmattan. rouges, une mouette naturalisée, une robe blanche il s’interrogeait sur l’avenir de l’Afrique. A.G. DIGNE | PORTRAIT DE BANIA MEDJBAR CINÉMA 57 Histoire(s) du cinéma à Digne Chaque année, en automne, le public Suwa, une histoire d’amitié entre deux dignois est invité à (re)voir des œuvres fillettes que la vie veut séparer et leur qui ont marqué l’histoire du cinéma fugue dans la forêt… Et le lendemain, tout en découvrant des films d’aujour- Hadewijch de Bruno Dumont, un film d’hui ; cette année, au programme, sur la foi aveugle d’une jeune Parisienne. cinéma et philosophie ! Juliette Cerf, auteur de Cinéma et philo- «Le cinéma n’est-il pas l’expression du sophie interviendra après la projection monde et du réel, et sa rencontre avec de History of violence de Cronenberg, la philosophie n’est-elle pas le moyen film qui effectivement remue des inter- de réfléchir et répondre à la question rogations troublantes sur le bon usage, Qu’est-ce que le cinéma ?»demande J.-P. et la jouissance, de la violence. Castagna, Président des Rencontres. Puis pour prendre de la hauteur le 26, C’est ainsi que du 23 au 27 novembre, Robert Pansard-Besson présentera au centre culturel René Char, seront Tours du monde, tours du ciel : où som- proposés une douzaine de films : Morgan mes-nous dans l’univers ? Tout un de Karel Reisz,Vivre sa viede Jean-Luc programme ! Godard, Toute la mémoire du monde ANNIE GAVA d’Alain Resnais, La jetée de Chris Marker, Ma Nuit chez Maud d’Eric Rencontres Cinématographiques Rohmer, 2001 l’Odyssée de l’espace Digne-les-Bains et Alpes de Haute- de Kubrick, Le Désert rouge d’Anto- Provence nioni, Elephant de Gus Van Sant… du 23 au 27 nov Vivre sa vie de Jean-Luc Godard Quant aux avant-premières, dès l’ou- 04 92 32 29 33 verture on pourra voir Yuki et Nina www.unautrecinema.com d’Hyppolite Girardot et Nobuhiro NOM: Bania MEDJBAR Profession: Réalisatrice Signes particuliers: esprit libre et «grande gueule», précise-t-elle. Ce qu’on remarque immédiatement, c’est la grande m’exprimer avec le cinéma.» «je suis exigeante et peut-être difficile dans le travail.» simplicité et la cordialité de cette réalisatrice mar- Son premier court métrage, tourné en VHS pour un Son meilleur souvenir de tournage est la semaine seillaise qui revendique l’idée d’un cinéma populaire, concours d’urbanisme, lui vaut le 1er prix, «remis par passée à Cassis avec Abbas Kiarostami qui l’a vrai- au sens noble du terme, c’est-à-dire qui filme les gens Paul Carpita, j’étais très fière !». Après il y aura Mères ment impressionnée. Le plus marquant ? La mission du peuple. Marseillaise car même si c’est plus difficile amères, Impression de voyage... qu’on lui a confiée, sur le tournage du film d’Alex de travailler ici, «là-haut, (à Paris), je serais malheu- Aujourd’hui Bania dit avoir une vraie équipe de travail, Metayer, Mohamed Bertrand Duval (1990) : faire reuse. Marseille est mon terreau de création.» quatre personnes avec lesquelles elle fait ses films. éteindre les lumières des usines de Fos qui gênaient D’où lui vient cet amour du cinéma ? De la télé qu’elle «Mais, plaisante-t-elle, je n’ai pas encore trouvé le pour un tournage de nuit ! «On n’est pas au cinéma, regardait la nuit, à huit ans, pour soigner ses in- producteur de ma vie !» Et plus sérieuse, elle ajoute, ai-je protesté. Justement on fait du cinéma ! Et j’ai somnies : le Cinéma de minuit, les réussi ! Cela semblait naturel à tous ! films italiens en noir et blanc ; puis les Bania Medjbar © A. G Dans le cinéma, on doit se surpasser !» magazines télé qu’elle ramassait dans Son dernier court métrage, Des En- le quartier de son enfance, la Busse- fants dans les arbres ( voir Zib 23), va rine, dans lesquels elle découpait photos sans doute suivre le même chemin et articles qu’elle collait dans ses cahiers. que le précédent, Quand le vent tisse Elle inventait des histoires aussi, et les fleurs, sélectionné dans de nom- mettait en scène ses amis. «Le cinéma breux festivals dont la Quinzaine des était de l’ordre du rêve pour moi». réalisateurs en 2003 et plusieurs fois Après ses études elle devient éduca- primé. trice, métier qu’elle exercera jusqu’en Elle prépare actuellement un long 1987. Et c’est lors de l’intervention métrage dont elle a peaufiné le scéna- d’un réalisateur que le déclic se fait : rio pendant quatre ans, au titre poétique : elle entreprend des études de cinéma Le Crime des anges. Et de citer et fait un stage sur le film de Jean-Pierre Fernando Pessoa, «Créer, c’est ne pas Thorn, Je t’ai dans la peau (1989). «C’est être satisfait du monde. Le désir de là que j’ai vraiment appris le métier ; création est un phénomène imaginatif, Jean-Pierre est un des mes maîtres, le crime des anges, qui ont cru pouvoir avec les autres, Rossellini, Scola, Capra, avoir un meilleur ciel.» Ken Loach, Scorsese, Renoir, Truffaut... ANNIE GAVA En voyant les 400 Coups, je me suis dit que je pourrais peut-être, un jour, 58 CINÉMA SEVRAPEK CITY | AFLAM | FESTIVAL TOUS COURTS L’Algérie en cinéma La manifestation organisée chaque an- Un hommage sera rendu à Ahmed née par AFLAM a pris cette année une Lallem,disparu récemment, avec Algé- ampleur très importante en présentant riennes 30 ans après, où il retrouve quatre Cinéma(s) d’Algérie et en dévelop- des «lycéennes» qu’il avait filmées en pant des partenariats divers avec des 1966 dans son documentaire Elles. structures locales. Elle aura son temps Les cinéastes de la nouvelle généra- fort au cinéma Variétés à Marseille, du tion ne sont pas oubliés avec Rabah 1er au 6 décembre. Elle se déclinera Ameur-Zaïmeche dont on pourra voir aussi dans d’autres lieux et villes, d’Arles deux films, Bled Number Oneà Marseille à Briançon, de Port-de- Bouc à Apt en et Gardanne et Dernier maquisau CRDP passant par Aix, Gardanne et Salon. et à Apt. Le projet est ambitieux ! Présenter cin- De Malek Bensmailon pourra décou- quante années de cinéma algérien dans vrir, le 6 à 18h, La Chine est encore loin, sa diversité, ses courants, ses thémati- un documentaire sur le village où a ques : le choix a été fait de présenter éclaté la révolution algérienne, ainsi les films qui ont marqué cette histoire, Harragas de Merzak Allouache que Le Grand jeu qui suit la campagne les films-phares, mêlant les films des pionniers à ceux de ses films, La Rose des sables sera projeté le 6 à électorale du rival de Bouteflika, en 2004, à l’Institut de la nouvelle génération. 20h, sans doute en sa présence. de l’Image à Aix, le 27 novembre. En ouverture le 1er décembre, à 18h, Merzak Alloua- Autre cinéaste invité, Farouk Beloufa qui présen- Il y aura aussi des films de Nadir Moknéche, Karim che présentera Harragas, en avant-première, sur un tera, le 4 à 21h, Nahla, tourné à Beyrouth, qui raconte Moussaoui, Brahim Tsaki, Lyes Salem… Toute la sujet grave, l’immigration clandestine ; et un de ses pre- l’histoire d’un jeune journaliste algérien dans la région vibrera au rythme de l’Algérie : une program- miers films, Omar Gatlato(1975) qui évoque, à la manière tourmente qui précède la guerre de 1975. De Moha- mation à suivre de près ! des comédies italiennes, les difficultés de la vie med Lakhdar Hamina on connaît Chronique des ANNIE GAVA quotidienne. années de braise, Palme d’Or à Cannes en 1975 : ce sera Le lendemain, Touchia, le cantique des femmes d’Alger un film moins connu qu’on pourra découvrir, Hassan AFLAM de Rachid Benhadj permet de revisiter l’histoire du Terro, réalisé en 1968, sorte de variation comique de 04 91 47 73 94 pays et d’aborder la condition des femmes. Un autre la Bataille d’Alger. www.aflam.fr L’archipel après la mission Au cœur des Courts Rendez-vous incontournable pour les amateurs de de musique avec le programme Court par Excellence, courts métrages, le festival Tous Courts dont la 27e cinq films venus d’Espagne, d’Irlande, des Pays Bas et édition se déroulera du 30 novembre au 5 décem- de France, suivi d’un ciné-concert, Farenji de la Cie bre à Aix, précédé de quelques projections dans des NuestraCosa. Quant à la clôture ce sera le 5 décembre villes proches du 23 au 27 : près de 180 films venus à 19h30 avec le palmarès et la projection des films des cinq continents, des concerts, des rencontres avec primés. des réalisateurs. ANNIE GAVA La compétition internationale propose 64 courts métra- ges dont 11 venus des pays de l’Est, répartis en dix Festival Tous Courts

Sevrapek city d'Emmanuel Broto programmes. La deuxième édition des Carnets de 04 42 27 08 64 et Fabienne Tzerikiantz © Fabienne Tzerikiantz Voyage permet de découvrir des films choisis par les www.festivaltouscourts.com Ils sont venus, ont pris, sont repartis, laissant derrière Journées Cinématographiques de Carthage, le Festival eux des restes de baraquements, quelques bidons en International de Locarno, le Service Court de Canal plastique, et dans la mémoire des populations locales, Plus et le Festival IndieLisboa. Vous aurez rendez-vous des souvenirs étonnants, des chansons, de l’amer- avec les «Super Héros» toute la nuit du 4 décembre tume. Eux, ce sont les membres de la mission Santo au Ciné Mazarin et si vous préférez la danse, Aixpéri- 2006 chargés d’inventorier la biodiversité dans ce mental vous offrira quatre variations de la «Danse des coin isolé du Vanuatu. L’ethnologue Fabienne Corps». Tzérikiantz, sollicitée pour mesurer l’impact de l’évé- Si vous souhaitez rencontrer certains festivals de nement sur les autochtones, poursuit, deux mois cinéma qui vous proposent des films tout au long de après le départ des scientifiques, ce travail en coréali- l’année, vous avez la soirée Elle Court, Elle court... la sant avec Emmanuel Broto Sevrapek City (Prix Région PACA le 3 décembre à la Salle Armand Lunel Spécial du jury au Festival du Film Documentaire de la Cité du livre. Chacun, parmi ceux qui sont Océanien /FIFO 2009), présenté en avril dernier au invités, vous offrira un court métrage. quai Branly à Paris, et le 20 octobre au Gyptis à Ceux qui aiment bien l’envers du décor du 7e art et Marseille. ses petits secrets de fabrication pourront assister à Les villageois de Penaoru, qui ont travaillé sur le site, un casting avec une directrice de casting et des montrent les traces du camp déserté de Sevrapek, le comédiens. Pour les fous d’Internet, un programme peuplant de leurs témoignages. Une approche juste de 7 films mis en ligne sur la toile en partenariat avec et intelligente de la rencontre difficile des logiques de Dailymotion sans oublier un long métrage, proposé chacun, des marchés de dupes et de la frustration par l’Institut de l’Image, Grease de Randal Kleiser. qu’elle engendre. Cette manifestation débutera le 30 novembre à ELISE PADOVANI 20h au Centre des Congrès, une soirée de cinéma et Shake Off de Hans Beenhakker © Nico van Gog van © Nico Off Beenhakker Hans de Shake CINAMBULE | LES RENDEZ-VOUS D’ANNIE CINÉMA 59 Courts toujours ! Du 26 au 29 nov, à Cabrières d’Avi- familiale de Cheng-Chui Kuo et gnon, se tiendront les 16e Rencontres Next floor de Denis Villeneuve. Court, c’est Court ! organisées par Une quinzaine de pays sont repré- l’association Cinambule. sentés et un est à l’honneur, le Maroc, En ouverture, le 26 novembre à 20h avec six films dont Sellam et Demetan 30, La Terre de la Folie en présence de de Mohamed Amin Benamraoui ou Luc Moullet, qui aura aussi une Carte H’rash d’Ismaël El Mouala El Iraki. Blanche le dimanche 29 à 10 heures. De nombreux réalisateurs invités En tout, plus d’une soixantaine de courts pourront échanger avec le public. Des métrages seront présentés : films séances pour les scolaires, une expo- courts en Méditerranée, dont Racines sition, des films expérimentaux projetés d’Eileen Hofer ; documentaires, parmi sur les murs du village, nul doute !, lesquels Le dernier voyage de Cabrières d’Avignon sera le village des Maryse Lucas d’Artus De La Villéon cinéphiles… et David Ledoux ; films d’animation A.G. comme Le thé de l’oubli de Sandra Cinambule Desmazières ; premiers film et 04 90 74 08 84 panoramas avec l’excellent Séance http://cinambule.free.fr Séance familiale de Cheng-Chui Kuo © Cheng-Chang Kuo Les Rendez-vous d’Annie Le 28 novembre à 19h au Polygone et Je déboule à Kaboul, un carnet vidéo Sous le signe d’Averroès (voir p 10) continue Étoilé, 360 et même plus propose, d’Olivier Azam produit par la coopéra- de faire son cinéma dans le cadre du Mois du documen- tive audiovisuelle, Les mutins de Pangée. Le 19 novembre à 20h à Carry-le- le 21 novembre à 17h30 à l’Alhambra taire, HORS CASES #8 : Zalea TV dans 0491915823 Rouet, Vengo de Tony Gatlif, suivi CinéMarseille, Vengo de Tony Gatlif, le retro, un condensé de sept années www.360etmemeplus.org d’une rencontre avec Jacques Maigne précédé d’un concert de Flamenco d’expérimentation télévisuelle débridée www.polygone-etoile.com qui a collaboré à l’adaptation. Joven. le 20 novembre à 18h30 à la Média- le 22 novembre à 18h au Cinéma Le 28 novembre à partir de 14h30, à ville monde ? Sans doute, mais Mar- thèque et au Meliès, à Port-de-Bouc, Lumière à La Ciotat Le Cantique des l’Alhambra CinéMarseille, reprise de seille est d’abord un monde, ancienne Oedipe roi de Pasolini avec Hervé- pierres de Michel Khleifi et Paradise l’intégrale des films de Denis Gheer- ville ouvrière porteuse de mémoire (...)» Joubert Laurencin auteur de Pasolini, now de Hany Abu-Ass, en présence brant, La République Marseille. «Marseille Le 9 décembre à 20h le dernier film portrait du poète en cinéaste qui a édité du chef opérateur, Antoine Héberlé. Des enfants dans les arbres de Bania Medjbar de Bania Medjbar, Des enfants dans les Écrits sur le cinéma et les Écrits sur les arbres, en sa présence. Deux en- la peinture. www.rencontresaverroes.net fants qui vivent difficilement l’absence Le 25 novembre à 18h30, à la Biblio- Le 28 novembre à 20h30 au cinéma de leur père, emprisonné aux Baumettes, thèque Départementale de Prêt, Renoir à Martigues, dans le cadre du décident d’aller le voir, seuls. La ville projection du documentaire Kawase Mois du Documentaire, «La Ruralité est vaste et le chemin… long. San de Cristián Leighton et interven- dans tous ses états», projection du tion du FID Marseille. film, prix du GNCR au FID 2009, Le Alhambra Cinémarseille À la recherche de Naomi Kawase, un Plein Pays d’Antoine Boutet en sa 04 91 03 84 66 voyage aux multiples détours… présence, suivie d’un débat animé par www.alhambracine.com Nicolas Féodoroff. Un homme, reclus Du 18 au 28 novembre, à Marseille, à Rentrée des classes, Blue Jeans… ; des Bibliothèque départementale Gaston depuis trente ans dans une forêt en l’occasion du 50e anniversaire de la archives et des documentaires en par- Defferre France, creuse en solitaire de profondes Nouvelle Vague, Extérieur Nuit pré- tenariat avec l’INA, des commentaires 04 91 08 61 00 galeries souterraines qu’il orne de gra- sente Pour en finir avec la Nouvelle et des discussions avec le public de www.biblio13.fr vures archaïques… Vague ?, une autre écriture de l’histoire Rozier et Labarthe, auteur et pro- http://cinemajeanrenoir.blogspot.com de la Nouvelle Vague, une rétrospec- ducteur de l’émission Cinéastes de tive croisant les films de Jean-Luc notre temps. Le 20 novembre à 20h30 au cinéma rencontre alors Strella, jeune trans- Godard et de Jacques Rozier : Adieu Les projections auront lieu au Cipm, au Les Variétés, séance spéciale de sexuelle avec qui il noue une relation… Philippine, À bout de souffle, Le Mépris, cinéma Variétés et au Polygone étoilé Strella en présence de son réalisateur La soirée sera animée par Michèle Paparazzi… ; les courts métrages fon- Extérieur Nuit Panos H. Koutras: Yiorgos, qui a passé Philibert, Festival Reflets dateurs de la N.V. : Le coup du berger, Tel : 04 91 33 50 88 quinze ans en prison, veut retrouver www.festival-reflets.org son fils dont il n’a aucune nouvelle. Il Tél. 04 91 64 75 87 Du 20 au 25 novembre, l’Institut Cultu- on pourra voir aussi La Fisicca dell’acqua rel Italien de Marseille présente un de Felice Farina, La Giusta distanza de Le 20 novembre à 18h, à la Maison Le 26 novembre à 20h, l’association panorama de la production cinémato- Carlo Mazzacurati et Tutta colpa di de la Vie Associative, Attac Pays Cinépage propose au Cinéma Prado, à graphique récente en présence de giudia de Davide Ferrario, présentés d’Arles et le Collectif Arlésien pour un Marseille, Mémoires de nos pères de réalisateurs et d’acteurs. par Jean Claude Mirabella, auteur du Service Public de la Poste vous pro- Clint Eastwood, suivi d’un débat. En ouverture, Sbirri de Roberto Bur- livre Le cinéma italien d’aujourd’hui. pose une projection-débat autour du chielli, et en clôture, mercredi 25 à documentaire de Marie-Pierre Jaury, Cinépage 18h00, La Bella Gente d’Ivano de Institut Culturel Italien de Marseille La Poste, un drôle de pli. 04.91.85.07.17 Matteo. Entre ces deux films primés www.iicmarsiglia.esteri.it/ www.local.attac.org/13/arles/ au festival du cinéma italien d’Annecy, IIC_Marsiglia 60 LIVRES RENCONTRES LITTÉRAIRES | SALON ECRIMED Écrivains en chair et en mots La rentrée littéraire se poursuit toute l’année ! Des rencontres régulières, dans des cadres souvent intimistes, donnent à voir et à entendre les auteurs et leurs ouvrages. Elles offrent aux lecteurs l’opportunité d’entrer en contact direct avec les écrivains qu’ils aiment, d’appréhender plus finement ce qui fait leur travail et, parfois, d’aborder les rivages mystérieux de la création Dialogues… …Itinérances… Le cycle d’Ecrivains en dialogue, organisé par Le 23 oct la petite salle de la librairie Maupetit a ras- l’ADAAL en partenariat avec la BDP Gaston Defferre semblé une vingtaine de lecteurs autour de Michèle a repris en octobre, selon un principe désormais Lesbre dans une intimité qui convenait bien à son familier : un auteur en invite un autre de son choix, univers littéraire. Elle a livré quelques aspects de la tous deux échangent durant une heure trente environ, genèse de son onzième roman Sur le sable, sorti en mai dans un «dialogue» ponctué de lectures d’extraits de (voir p 67), que Maya Michalon a présenté avec leurs textes et conclu par les interventions du public. sensibilité. Après avoir été directrice d’école, fait un Le 13 octobre, Claudie Gallay avait donc invité peu de théâtre, Michèle Lesbre est arrivée à l’écriture Philippe Grimbert ; il y avait du monde pour écouter par 4 romans noirs dans la tradition américaine, et ces deux romanciers lus et récompensés (voir p 66). quelques nouvelles. Depuis 2003, elle est publiée par Tous deux se sont connus en 2001, lors de la publi- Sabine Wespieser qui lui a demandé de la suivre cation de leur premier roman. Entre l’ex-prof des quand elle a créé sa propre maison pour aller jusqu’au écoles, aujourd’hui en disponibilité, et le psychana- bout de sa passion du livre. Michèle Lesbre a alors lyste, toujours en activité même si l’écriture de fiction commencé à écrire des romans courts et denses qu’elle occupe beaucoup de son temps, le courant passe, dit lui être indispensables : «Je n’écris que les romans l’admiration est réciproque. Claudie Gallay se déclare que je dois écrire, ils se succèdent comme les maillons d’un «fascinée par La petite robe de Paul» (le1er roman de seul et même livre. Quand je suis en train d’en écrire un, Grimbert) et «impressionnée» par son auteur, qui, à le suivant se met souvent en place, les personnages se partir de presque rien, déroule ses histoires. Philippe dessinent ; mais je ne sais pas encore ce qu’il va se passer.» Grimbert évoque le «souffle romanesque» de sa consœur, En fait les personnages de Michèle Lesbre sont peu qu’il envie. En fait, bien que leurs univers soient très nombreux et tout se joue souvent sur une rencontre, différents -la lecture des incipits de leurs derniers alors qu’ils vivent «des moments de faille, de rupture». Il ouvrages en a rapidement apporté la preuve-, tous s’agit ensuite de voir comment l’intime se conjugue deux ont la même volonté d’écrire pour «creuser au Claudie Gallay © Caroline Chevalier avec l’histoire, ses conflits et ses guerres. Michèle Lesbre même endroit» dit-elle, pour «creuser du côté où ça inter- a également parlé de sa passion pour la littérature et roge», reprend-il. Tous deux veulent aller à l’essentiel, des auteurs avec lesquels elle dit entretenir «un rapport au fond de la douleur, des blessures et des secrets de Michele Lesbre © Jacques Leenhardt sentimental». Quand elle écrit, elle choisit des textes famille, mais sobrement, sans pathos. qu’elle relit et qui la guident, comme une petite Les deux écrivains ont parlé ce soir-là de leur travail, musique intérieure. Musique que le lecteur se plaît de leur rapport avec le livre en train de se faire, mais aussi à retrouver en sa compagnie. aussi avec le texte fini. Ils ont évoqué le plaisir d’écrire : une façon de se sentir «en paix» pour elle ; pour lui, un moyen d’avoir «prise sur la douleur». Ils ont dit leur ...et Escales difficulté à finir un roman, avec, pour elle, le soulage- La librairie l’Odeur du temps, pourtant spacieuse, a ment d’être allée au mieux de ce qu’elle pouvait faire, paru fort exiguë quand il a fallu accueillir l’invité des tandis que pour lui la fin d’un texte signe le début 1res Escales en librairies. Il faut dire que Georges d’une sorte de «dépression post partum». Didi-Huberman n’est pas n’importe qui. Auteur Après les lectures de leurs textes par Raphaël France- d’une trentaine d’ouvrages sur l’histoire et la théorie Kullmann, ils ont exprimé leur trouble d’entendre des images, cet enseignant à l’EHESS de Paris est une leurs phrases dites par un autre ; mais tandis que lui référence dans le domaine de l’histoire de l’art et de la parlait de «dépossession», elle s’est dite agréablement philosophie. La foule a donc envahi la librairie et c’est surprise de ces «retrouvailles avec les mots». Mots et devant une assistance très variée que s’est tenue la rythmes qu’elle peaufine à la Flaubert, relisant tout à conférence-débat animée par Roland Alberto. haute voix, pour la musique de la langue. Avec naturel. La présentation était axée sur le dernier ouvrage de Claudie Gallay a osé avouer la souffrance qu’elle Didi-Huberman, Survivance des Lucioles, dont le titre ressent à parler de ses livres en public, l’effort que lui est repris d’écrits de Pasolini : les lucioles comme image demandent de telles rencontres. Elle se sent bien plus de la vie, de la liberté, du peuple aussi. Didi-Huberman à l’aise dans la création que dans la promotion. Ce qui, reprend cette métaphore à son compte pour y associer pour un auteur, n’est pas un mauvais signe ! la notion de «survivance» (et non de «survie»), qui correspondrait à ce qu’on nomme en anglais «after 61

life». Pour le philosophe, qui s’inscrit en faux contre le discours de la des- La conférence des bourdes truction, il s’agit aujourd’hui de gratter pour mettre au jour les vestiges, qui existent là où on ne les attend pas, juste Le premier Salon des Écritures méditerranéennes s’annonce en dessous, de les faire «apparaître». comme un événement qui veut placer l’écriture au cœur du Pas toujours facile de suivre le dialogue de l’historien d’art avec son interviewer, projet euroméditerranéen. Qu’en est-il ? d’autant que celui-ci pose des questions Depuis le début de cette affaire on est un peu gênés première Région en matière de manifestations pointues, qui nécessiteraient une aux entournures : on ne peut que se réjouir de cette littéraires. Bernard Millet renchérit, rappelant les connaissance très intime de l’œuvre. La idée d’un grand Salon littéraire à Marseille, placé aux Écritures de Manosque, les Écritures Croisées d’Aix, la disposition du lieu renforce le senti- Docks, c’est-à-dire au cœur vibrant d’Euroméditer- traduction à Arles, le nombre de grandes et petites ment que les lucioles volent très haut ce ranée, désiré par l’ensemble des collectivités, soutenu maisons d’édition du département, Toulon, Aubagne… soir : l’invité, installé sur la mezzanine conjointement par Marseille 2013, la Ville, la Région, en oubliant modestement les Escales en Librairies et de la librairie, semble, micro en main, le Département… On ne peut qu’applaudir même à l’activité de la BDP Gaston Defferre, organisée par le délivrer la bonne parole du haut d’une cette ambition généreuse de promouvoir les auteurs Conseil Général. Mais tous deux citent les Rencontres chaire. Visiblement gêné de cette pos- méditerranéens, la traduction, le roman… et on est ravis d’Averroès, ces grandes tables rondes qui pensent la ture, il tente d’y remédier en se tournant que l’idée de dialogue, d’échanges, de tables rondes Méditerranée depuis quinze ans, rassemblent des souvent vers l’auditoire et en illustrant ouvertes au plus grand nombre et médiatisées sur le foules, sont diffusées sur France Culture : elles ne se un discours ardu d’exemples parlants. web, à la télé et sur les radios. disent pas essentiellement littéraires, mais invitent des Des réflexes bienvenus de pédagogue, Mais enfin plusieurs points restent étonnants, même écrivains autour de thématiques tellement proches qui permettent de suivre tant bien que si l’on considère qu’une première édition peut qu’on s’étonne de la concomitance de deux mani- mal un débat où sont convoqués Benja- chercher ses marques. D’abord la conférence de presse, festations, soulignée par la proximité de la date choisie min, Adorno, Freud, Deleuze, Foucault, organisée au Sofitel, ne donnait la parole à aucun par Ecrimed. écrivain ; aucun livre non plus sur les tables, dans les La problématique méditerranéenne même semble peu mais également Baudelaire, Char… Pierre Assouline Didi-Huberman épate par la familiarité dossiers de presse aucun résumé, aucune bio, aucun titre familière à , directeur littéraire du Salon. Il l’avoue d’ailleurs : c’est sollicité pour présider qu’il entretient avec nombre de grands de livre même : simplement le nom des auteurs, et leur nationalité. Le thème même des tables rondes semble la manifestation qu’il a pris conscience de son identité auteurs de disciplines variées. Un véri- peu littéraire : les Cafés autour de Tahar Ben Jelloun de Méditerranéen. Et par ailleurs il lui parait nécessaire table puits de science, humble pourtant, et de son œuvre L’Islam expliqué aux enfants, les Tables de justifier la présence d’un écrivain Portugais, le qui se déclare «très mal à l’aise avec l’idée Rondes qui s’interrogent sur «européens ou méditer- Portugal n’étant pas selon lui un pays méditerranéen… » et dit modestement fonc- d’une expertise ranéens», ou sur la «communauté des valeurs», ne Des historiens, des philosophes ont passé leur vie à tionner dans ses recherches par «rencontres parlent pas d’écriture, d’élaboration d’une fiction, de penser Mare Nostrum, que Braudel définissait, Alain qui (l)e surprennent et (l)e font bifurquer.» narration, des vertus de la fable… ou même de textes. Hayot ne put s’empêcher de le rappeler, non comme Enthousiaste aussi, il revendique le désir, Elles sont sociologiques et tournées vers des problé- un espace géographique mais comme une mer l’admiration et la nécessité de trouver matiques de sciences humaines. Ce qui est étrange intérieure. On souhaite de tout cœur que cette des ressources malgré la marchandisa- pour un salon sur l’écriture. entreprise de popularisation de la littérature réussisse. tion des images. Les partenaires ensuite : recourir à des média grand Mais il faudrait sans doute, avant, songer à repenser Une figure captivante, dont la brillante public pour une manifestation littéraire a du bon, et va les liens avec le monde littéraire marseillais, et avec la simplicité séduit et donne envie d’en dans le sens d’une démocratisation des écritures. pensée qui s’élabore autour et à propos de notre mer. savoir plus, sur lui et aussi sur les auteurs Encore faut-il rester dans le domaine de la littérature, AGNES FRESCHEL qu’il fréquente. Et un beau succès pour justement : or culturebox, de France 3 méditer- cette 1ère d’Escales en librairies, initiée ranée, a pour slogan : le premier guide culturel tout en Ecritures méditerranéennes par Libraires à Marseille et soutenue vidéo ; la Provence n’a pas vraiment de rubriques livres, Les 21 et 22 novembre par le Conseil Général. et ils y sont rarement littéraires ; radio Nostalgie Les Docks CHRIS BOURGUE ET FRED ROBERT brosse rarement des portraits d’écrivains ; quant à www.salonecrimed.fr Cultura, enseigne qui place ambitieusement le livre Escales en librairies en décembre, au cœur des centres commerciaux et le démocratise Gamal Ghitany, avec Jacques Barsac, mercredi 9 ecrivain Egyptien certainement en le reliant aux loisirs, on reste étonné © X-D.R. à Marseille, jeudi 10 à Aubagne. qu’il soit le seul libraire qu’Ecrimed ait associé à son La recontre qui était prévue autour de Salon : on connaît le dynamisme, le professionnalisme, l’anthropologue Françoise Héritier le dévouement et la pertinence des libraires indé- les 19 et 20 novembre est reportée pendants de la région (voir ci contre), et on ne peut aux 21 et 22 janvier. que s’étonner qu’aucun ne soit relié à l’aventure. www.librairie-paca.com Et c’est surtout cela qui étonne : une méconnaissance semble-t-il du terrain, et des problématiques. Tout à Ecrivains en dialogue, Le boxeur son enthousiasme Elsa Charbit, lorsqu’elle présente le et la fée, avec Véronique Ovaldé Salon dont elle est la Commissaire, semble le consi- et son invité Olivier Adam, dérer comme la première et seule manifestation mardi 8 décembre à 18h30 littéraire de la région, et il faudra qu’Alain Hayot sou- à la BDP Gaston Defferre. ligne que PACA est, après l’Île de France bien sûr, la 62 LIVRES ÉCRITURES CROISÉES L’Asie n’existe pas Elle voulait donner envie de les lire : Annie Terrier a réuni à Aix, pour ses Écritures Croisées, 10 écrivains parlant 5 langues différentes, qui ont brossé le portrait kaléidoscopique d’un continent qui serait un vrai roman… Ce roman limpide se raconta pendant quatre jour- une littérature riche, cohérent, forte, originale durant trois dévalorisation des femmes. L’écrivaine s’inscrit dans nées : on a pu écouter ces écrivains Chinois, Coréens, siècles.» Il sait que l’eurocentralisme en littérature est la filiation des féministes et refuse l’idée d’une écriture Vietnamiens, Japonais et Thaïlandais avec l’impres- regrettable, mais affirme que le danger vient de la féminine qui s’épancherait, se tournerait vers l’inti- sion de n’en perdre jamais une miette. Une brochette mondialisation, qui est «une tendance meurtrière». me… Elle constate cependant que les femmes ont d’interprètes rapportait tous les propos, mais traduisait Mizumura renchérit: tout écrivain non occidental tendance actuellement à privilégier une écriture également les écrivains asiatiques entre eux, afin qu’ils lutte contre la globalisation, tout en acceptant spontanée, concrète, et laissent encore le champ du puissent se répondre en s’écoutant par oreillette. La l’influence de la littérature européenne. Mais les politique aux hommes. Thûan (Vietnam), plus jeune, fluidité était parfaite, et laissait simplement entrevoir œuvres doivent évoquer le réel, donc les traditions précise que sa génération profite pleinement du com- que l’Asie littéraire est une construction… même si particulières. Or le Japon a oublié son histoire, sa bat féministe, mais qu’aujourd’hui il n’est plus au les propos, une fois le problème de la langue résolu, se langue classique. «Les Japonais considèrent comme cœur de son écriture, et qu’à son sens la souffrance révélaient étonnamment proches. naturel d’écrire en langue moderne, ils pensent que c’est féminine n’a pas plus de besoin d’expression que la l’expression de leur âme.» Alors que leur histoire est masculine. Diversité trimillénaire ils n’en connaissent rien, et croient que Pourtant Li Ang répond encore à la remarque d’un L’expo photo témoigne de la variété des regards. l’occident leur a permis d’entrer dans la modernité. spectateur, qui avance que l’écriture féminine est Parfaitement éclairée, sans aucun reflet sur les vitres Le rapport à la traduction s’affirme aussi comme animée d’une énergie lente : «Le Yin n’est pas la (quel bonheur !), elle se visite en commençant par le commun : tous sourient à l’allégorie de Kim Young féminité. Nous voulons avoir accès à la violence, ne pas Coréen Gap-Chul Lee qui dans un noir et blanc Ha le Coréen, qui explique qu’un livre traduit est être seulement des forces sous-jacentes, exercer cette force au incroyablement nuancé semble tout occupé à photo- comme un enfant né d’un amour de passage : on sait grand jour. Et pour cela, on se demande s’il faudra tuer graphier la trace des âmes… Au milieu Luo Dan le qu’il est le sien mais on ne le connaît pas… Sauf qu’un nos maris !» Chinois, aux intentions de documentariste, portraitise enfant naturel coûte, alors qu’un livre traduit rap- Le solo de Carlotta Ikeda la Japonaise témoigna de pourtant des êtres isolés et énigmatiques. À l’autre porte! Puis il en revient à la globalisation, inversant le la même volonté libératrice. En quelques tableaux bout de la Galerie Zola, le Thaïlandais Manit Sriwa- propos : plus que d’avoir peur d’occidentaliser l’Asie, empruntant au Butô leur lenteur et leur posture, mais nichpoom et sa photographie théâtrale : son Pink les Européens devraient se méfier de cette Asianisation non leurs rites, elle traça un autoportrait magistral. Man, vêtu d’un costume rose saturé, s’installe avec son en marche, celle qui rend les Chinois, les Coréens, les Celui d’une femme qui assume sa double influence caddie rose dans des situations consuméristes d’une Japonais, complètement dépendants d’écrans porta- culturelle, exhibe sa recherche de plaisir solitaire, la ironie mordante –à Bali, au pied des temples, au bles et de liens virtuels… perte, l’absence, la violence subie, la nostalgie d’une milieu de gratte-ciel sous proportionnés- ou, par des robe en dentelle, la tentation d’endosser un costume photos montages, au cœur de la répression d’émeutes La force des femmes d’homme. Et L’Attente, vide, que la douleur obstinée étudiantes (1970) dont il souligne la violence et Quant aux femmes en littérature… Li Ang (Taïwan) s’estompe. l’horreur. l’affirma d’entrée : s’il y a bien une valeur commune Portrait universel : décidément l’Asie n’existe pas. Des photographies aux moyens plastiques et aux en Extrême-Orient, c’est la séparation des sexes, et la AGNES FRESCHEL registres opposés, mais qui construisent des discours proches, et luttent contre la globalisation en allant respirer des atmosphères moins inauthentiques. L’Asie , un vrai roman s’est déroulée à la Cité du Livre (Aix) Modernité du 15 au 18 oct. Les mêmes problématiques se retrou- vaient lors des débats et rencontres : Regards Croisés, l’Asie existe-t-elle ? Rien n’est moins sûr l’exposition photographique, affirme Minaé Mizumura. Cette idée se teint à la Galerie Zola de continent est née en Europe… et au jusqu’au 28 nov. Japon elle réveille de vieilles conno- tations nationalistes. Il n’y a d’ailleurs qu’en Occident qu’on peut trouver des restaurants asiatiques alliant tant de cuisines différentes ! Pourtant, dès que le sujet d’une Asie s’éloigne, des préoccupations com- munes apparaissent. La plus évidente étant le lien à la littérature occidentale. Manit Sriwanichpoom Xu Xingle reconnaît : «l’Occident a créé © AgenceVu THÉÂTRE DU PETIT MATIN | CRDP LIVRES 63

Sombre Japon Le Théâtre du Petit matin a proposé un perte auditive et se confronte à un monde voyage littéraire au Japon à travers l’écri- qu’elle n’entend et ne comprend plus. ture de trois auteurs. Banquettes, tables Enfin place à l’horreur glacée du très basses, orchidées et sushis contribuaient sombre Ry Murakami l’histoire des à créer l’ambiance. Nicole Yanni ac- jumeaux Hashi et Kiku, Les bébés de la cueille son public comme elle le fait consigne automatique, qui finiront parri- avec acharnement depuis 25 ans et ouvre cide et prostitué... Une vision plus gaie la soirée sur un constat amer : seul un de Tokyo, celle de Jacques Roubaud, français sur deux lit plus d’un livre par termina le voyage, rappelant la soirée an ! D’où la nécessité de poursuivre les d’avril passée avec lui en ce lieu… tournées dans les petites bibliothèques CHRIS BOURGUE du département… Puis Maude Buinoud, Céline Greleau et Geoffrey Coppini commencent à lire plusieurs extraits de Le Kfé littéraire japonais a eu lieu trois romans de Haruki Murakami, le 16 oct. Le prochain Kfé sur les soulignant la précision incisive de cette écritures chinoises aura lieu en janvier. écriture qui mélange le quotidien le plus Le Dire des Femmes Famille banal à un imaginaire fantastique. Les et Violence mots s’animent et prennent corps… du 20 au 22 novembre Vient la lecture des extraits de Yko Ateliers d’écritures à partir Ogawa, écrivaine née en 62, des textes de novembre simples et étranges comme Amour en 04 91 48 98 59 marge, où la narratrice souffre d’une www.theatredupetitmatin.free.fr/ lecture au Theatre du Petit Matin © X-D.R. Joël Jouanneau, une voix rythmée Les Rencontres culturelles du CRDP ont n’est que sorti de l’enfance qu’il a pu se régénérer par personnages reprennent les noms des lieux de commencé avec une lecture de Joël Jouanneau en la lecture et s’y plonger totalement, «arrêt du temps. l’enfance de l’auteur, à l’endroit de la poignée de mains partenariat avec l’OCCE (Coopération à l’École), et le Blanc» comme il le dit. entre Pétain et Hitler. La mère et le fils, eux, sont sans Théâtre Massalia. Des enseignants étaient venus de Joël Jouanneau parle ensuite du livret d’Opéra qu’il a nom ; ils finiront par évoquer le père qu’elle croit mort toute la France pour participer à un stage dans le cadre écrit pour la musique de Jacques Rebotier, L’indien mais qu’il a retrouvé en Patagonie, nom exotique d’un de THÉÂ, action nationale de l’OCCE pour le des neiges. Il rythme avec les doigts et psalmodie le centre d’aliénés... Langue rude, rapeuse, émouvante. développement de l’éducation artistique du théâtre et prologue, et l’on se dit que ces deux-là étaient faits Joël Jouanneau évoque pour finir une pièce qu’il a de la danse, qui s’intéresse à la problématique de pour se rencontrer. «décidé de ne jamais terminer...» : À l’ouest. l’écriture théâtrale pour le jeune public. Donnée Dernier texte, Mère et fils présente les retrouvailles d’un CHRIS BOURGUE essentielle de ce projet : le partenariat enseignant/ fils et sa mère après 7 ans de séparation et l’évocation artiste. Joël Jouanneau est l’artiste associé de cette d’un passé trouble, et le souvenir du «mulot noir», le année scolaire. petit juif caché avec les cochons par des paysans sans Il entre d’emblée dans sa lecture et trouve le rythme de scrupules, et qui fut livré à l’occupant. Les noms de sa voix ample et chaude. Les mots sont Joël Jouanneau © Mario del Curto accompagnés de gestes sobres de la La lecture a eu lieu au CRDP main gauche, index et majeur tendus le 26 octobre comme un V. Très vite il nous entraîne Mère et fils et L’enfant cachée dans l’encrier dans les évocations d’une enfance Joël Jouanneau paysanne, à la fois la sienne et pas la Actes-sud Papiers sienne, mélangeant le moment de www.crdp-aix-marseille.fr l’écriture et le bruit du clavier, au moment de l’enfance dans la cour de la Prochaines rencontres du CRDP : ferme. Ce texte inédit, Le clavier à Le 20 novembre, dans le cadre l’oreille coupée, appartient à la série des des Rencontres d’Averroès, «Tus», textes adressés à la deuxième deux documentaires sur les 1ers essais personne, et tus pendant longtemps. nucléaires en Algérie en 1960 (voir p 9) ; L‘adulte s’y adresse à l’enfant qu’il a été. Le 9 décembre Les représentations du corps Autre texte inédit, Pages tournées d’un dans l’art contemporain par Christian univers sans livres, sauf ceux de l’école, Gattinoni, enseignant à l’école nationale la revue de cinéma de sa mère, puis de photographie d’Arles (entrée gratuite Quatre-vingt treize de Victor Hugo et ouverte à tous.). donné par son grand-père facteur. Ce 64 LIVRES CIPM | EUROPE INTELLECTUELLE Quelques bonnes raisons d’aller au cipM Dans le cadre toujours enchanteur de La Vieille Charité, est fort plaisant de découvrir. fue», qui pourtant doit être menée à bien. L’histoire de le Centre International de Poésie Marseille pour- Le cipM, c’est aussi un lieu de rencontres (voir p 11). ce traducteur qui décide de ne pas rester à sa place et se suit son œuvre de diffusion des pratiques poétiques Le vendredi à 19h, place aux lectures. Mention spéciale met à «fictionnaliser» la traduction, faisant enfler l’espace contemporaines. Expositions, rencontres, lectures, rési- pour le mois d’octobre au célèbre traducteur -200 dédié aux habituelles notes en bas de page jusqu’à dences d’auteurs, de multiples façons d’arpenter les traductions en 30 ans- Brice Matthieussent, venu usurper le haut du feuillet, les mises en abymes et les territoires très divers de la poésie d’aujourd’hui. lire des extraits de son roman très oulipien, et qu’il enchâssements, les péripéties de la fiction, tout illustre Le cipM, c’est un lieu d’expositions. Jusqu’à la fin du espère «assez drôle», Vengeance du traducteur. La rencontre, les complexités de cet étrange métier, qui procure mois, le visiteur pourra ainsi déchiffrer les typogram- animée par Eric Giraud, a permis d’aborder les para- toutefois, aux dires du spécialiste, une jouissance mes, affiches, couvertures de livres ou de revues et doxes et les difficultés de la traduction ; impossible absolue, au même titre, toujours selon lui, que autres «gouttes de poèmes» de Pierre Albert-Birot, translation, «saut de Tarzan au-dessus d’une jungle touf- l’éternuement ou l’orgasme ! Amours, délices et «grand solitaire qui fait imploser tous les traduction… © Jean-Marc de Samie critères de l’avant-garde ou de la FRED ROBERT tradition», selon les mots du concepteur de l’exposition, Frédéric Acquaviva. Prochaines rencontres : Poète et typographe, auteur du monu- vendredi 20 novembre, dans le cadre mental Grabinoulor (une fiction des Belles Etrangères (USA), délirante rédigée avec humour et sans Béatrice Trotignon recevra pour la 1re fois ponctuation), créateur de la revue SIC au cipM Eleni Sikelianos. Vendredi 27, (Son-Idée-Couleurs-Forme), à laquelle Brian Mura viendra présenter le n°5 ont collaboré, entre autres, Apollinaire, de la revue GPU. Tzara, Reverdy et Soupault, PAB reste Prochaine exposition, bien à tort méconnu. À la croisée du à partir du 4 décembre : futurisme, du dadaïsme et du surréa- les livres d’artistes des Editions URDLA. lisme, cet artiste venu des arts plastiques À lire : Brice Matthieussent, a toujours gardé son indépendance… Vengeance du traducteur ; éd. POL. et une fantaisie pleine de fraîcheur qu’il Au Programme AIX MARSEILLE Exposition Visions portuaires : photographies de François Delaage Cité du Livre – 04 42 91 65 20 Librairies du sud – 04 96 12 43 42 et installations de Claire Saltet. Jusqu’au 16 janvier. Colloque organisé par l’Agence Régionale du Livre : Les méta- Librairie Maupetit : rencontre-dédicace avec Jean Ecrivains en dialogues : rencontre entre Olivier Adam & Véronique morphoses numériques du livre sous la direction d’Alain Giffard. Contrucci, le 5 déc à 14h ; rencontre-dédicace avec Ovaldé. Le 8 déc à 18h30, Auditorium de la Bibliothèque Les 30 nov et 1er déc. Amélie Jackowsi et Arno, auteurs-illustrateurs pour la départementale. jeunesse, le 5 déc à 15h ; rencontre avec Raphaële Frier et Nadira Débat autour du livre de Michel Vovel, Les Sans-culottes marseillais. Ecritures Croisées – 04 42 26 16 85 Aouadi, auteurs-illustrateurs pour la jeunesse, le 12 déc à 15h ; Le mouvement sectionnaire du jacobisme au fédéralisme. 1791-1793, Rencontre avec l’écrivaine américaine Hannah Tinti à l’occasion rencontre avec Florence Langlois et Vincent Bourgeau, auteurs- en présence de l’auteur, de Bernard Cousin et de Françoise Brunel, des Belles Etrangères. Présentation et lecture de Pierre-Yves Pétillon. illustrateurs pour la jeunesse, le 19 déc à 15h. historiens. Le 19 nov à 18h30. Le 19 nov à 18h30, amphithéâtre de la verrière. Librairie Le Lièvre de Mars Librairie Histoire de l’œil : rencontre-dédicace avec Raphaël – 04 91 81 12 95 Centre des écrivains du sud – 04 42 21 70 90 Frier à l’occasion de la sortie de Nour a perdu son sourire (éd.Max Exposition Carnets & Abandons de Patrick Sainton organisée par Rencontre avec Lydie Salvayre autour de son livre BW (éd. Le Milo jeunesse),Un baiser à la figue(éd. Mango jeunesse), et Dur dur, l’association Autres et Pareils. Jusqu’au 30 nov. Seuil, 2009). Entretien conduit par Paule Constant, lectures par les mots doux ! (éd.Rouge Safran), le 21 nov à 15h. Librairie Les Arcenaulx Laurent Kiefer. Le 19 nov à 18h, amphithéâtre Zyromski de Rencontre avec Jean-Philippe Toussaint pour son roman La vérité – 04 91 59 80 37 l’IEFEE. sur Marie (éd. de Minuit), animée par Pascal Jourdana. Rencontre avec Jean-Pierre Guéno et Olivier D’Agay pour la paru- Le 10 déc à 19h. tion du livre La mémoire du Petit Princeaux éditions Jacob-Duvernet. AVIGNON Le 4 déc à 18h. CDC Les Hivernales – 04 90 82 33 12 Mairie de Maison Blanche – 04 94 14 63 50 Espace Ecureuil Les lundis au soleil : nouveau rendez-vous bimensuel autour de la Dans le cadre de la semaine israélienne, Maison Blanche, en – 04 91 57 26 49 danse, rencontres informelles, échanges, hommages… Prochain partenariat avec le Consulat Général d’Israël et la Galerie Denise Conférences d’initiation : Art et paysage III : De l’Arcadie aux Pays- e e rendez-vous avec Denise Luccioni qui évoque Merce Cunningham, Roman présente une exposition de photographies de Zvika Bas (XVI , XVII siècles). Le 15 déc à 12h30, le 18 déc à 12h30 et le 23 nov à 19h. Zelikovitch, sculptures de Ruth Lev-Ari et Osnat Belkind Scheps le 18 déc à 18h. et design d’Einav, du studio Mud, Les 100 ans de Tel-Aviv. Jusqu’au Galerie Mourlot Jeu de Paume CARPENTRAS 27 nov, salons de Maison Blanche ; récital de piano d’Einav Yarden – 04 91 90 68 90 Librairies du sud – 04 96 12 43 42 le 19 nov à 20h30. Claire Colin-Collin, peintures. Exposition jusqu’au 5 déc. Librairie de l’Horloge à Carpentras : dans le cadre de la semaine Espace Leclere des droits de l’enfant, rencontre avec Caroline Palayer pour son BMVR Alcazar – 04 91 55 56 34 – 04 91 50 00 00 dernier livre La petite tresseuse kanak (Vents d’ailleurs, 2009), le 21 Rencontre lecture sur le thème Solitude et solidarité : de Hrant Dink Conférences : Approche de l’art sacré par Emmanuel Laugier, nov à 16h ; rencontre avec les éditions Le Bec en l’air pour évoquer aux anonymes avec Dominique Eddé, Betul Tanbay et Gérard historien de l’art, le 24 nov à 18h ; La reconstruction à Marseille le métier d’éditeur et découvrir leur production, le 4 déc à 19h ; Khoury, en partenariat avec les Ecritures Croisées. 1940-1960 / Architecture et projets urbains par Jean-Julien Bonillo, rencontre-dédicace avec Pascale Breysse, auteure et illustratrice Le 26 nov à 18h, salle de conférence. historien de l’architecture, le 15 déc à 18h. jeunesse, le 5 déc à 15h30 ; rencontre avec Jean-Michel Guenassia TOULON pour (Albin Michel), le 18 déc ABD Gaston Defferre – 04 91 08 61 08 Le Club des incorrigibles optimistes Librairie Charlemagne à 19h. Exposition Gaston Castel, les territoires de l’architecte. – 04 94 62 22 88 Jusqu’au 19 déc. Rencontre avec Véronique Ovaldé pour évoquer l’ensemble de son œuvre. Le 9 déc à 19h. Marseille, terre d’exils Le théâtre de Lenche et la BMVR tout. Un drame lumineux, qui relate la Alcazar ont accueilli, du 3 au 17 nov, genèse d’une œuvre car même exténué l’esquisse d’un grand projet qui sera et en fuite Werfel reste romancier… réalisé en 2013 autour de l’Europe intellectuelle en fuite. On sait que Tu parlais de partir… Marseille, mais aussi Sanary et Cassis, Le refrain entêtant de Christiane ont abrité, dans les années 1940-41, un Mouron et la musique de Georges grand nombre de réfugiés venus de Bœuf rythment Transit, téléfilm de toute l’Europe centrale puis de la France René Allio inspiré du roman éponyme occupée. Fuyant l’Allemagne nazie, ils d’Anna Seghers. Au travers des tribu- ont échoué là, sur le rivage méditer- lations de Gerhardt, on prend la mesure ranéen. Ils pensaient y trouver une des situations kafkaïennes (un comble!) fenêtre sur le monde libre, ils sont sou- qu’ont vécues à Marseille tous les can- vent restés pris dans la nasse marseillaise, didats à l’exil durant cette période à attendre un hypothétique «transit», troublée. Files d’attente dans les un passage par les Pyrénées, une place à consulats et les ambassades, formalités bord d’un navire en partance… Ce sont innombrables et souvent inutiles, et ces tristes voyages, cette fuite éperdue et l’attente ! Le film souffre de quelques cette halte forcée dans le Midi que le longueurs mais reste le reflet fidèle de projet entend retracer. cette attente désespérée. Quant au passionnant documentaire La fin d’un monde consacré à Varian Fry, il rend hom- Présentée par la troupe du Golem mage à celui qui est entré dans l’histoire Théâtre (fondée en 1997 à Prague et «à hauteur d’homme». Un portrait installée depuis 2003 en Isère), la courte émouvant de cet éditeur américain pièce de Michal Laznovsky (son longtemps oublié, fondateur à Marseille directeur et metteur en scène) Alma et du CAS (Centre Américain de Secours), Franz ou l’excursion en montagne, malgré qui a sauvé au moins 1500 personnes ce titre léger, n’a rien d’un vaudeville. avant son expulsion en 1941, et a permis Elle se déroule sur une journée, le lende- que Marseille soit dès 1940 la «capitale main du jour où les deux protagonistes de la Résistance en train de se faire». ont pu quitter Marseille grâce à Varian Ces propositions, intéressantes, n’étaient Fry. Alma (Mahler) et Franz (Werfel), que des esquisses. Pour le colloque, les deux figures emblématiques de l’intelli- concerts et autres expositions, rendez- gentsia cosmopolite viennoise, sont en vous en 2013 ! train de passer en Espagne. Dans un FRED ROBERT décor symboliste, sous le regard (et les commentaires) d’un ange, ils vont, et L’Europe intellectuelle en fuite parlent, et se souviennent, dans des (prélude) a été présenté à Marseille scènes alertes où l’humour a sa place, la du 3 au 17 nov méditation aussi. Méditation sur l’apoca- lypse en cours, mais également sur la «sainteté humaine», et l’espoir malgré Alma et Franz © Natacha Boutkevitch 66 LIVRES LITTÉRATURE Mémoires d’un traître Dédié à «mes fantômes», le 3e roman de Philippe sont également les pages consacrées à Nine, la «seconde Grimbert apparaît comme une confession à laquelle maman» du narrateur, que celui-ci traite, fort peu se livre le narrateur Loup, qu’on ne peut manquer originalement, avec désinvolture et ingratitude. Seule d’assimiler à l’auteur lui-même, tant son parcours échappe à la mièvrerie Gaby, la vieille amie flambeuse ressemble à celui qu’a dû suivre Grimbert pour et noctambule, mais c’est sans doute en raison de sa devenir le psychanalyste que l’on sait. Autobiographie personnalité irréductible. La posture du narrateur en La mauvaise rencontre déguisée ? Autofiction ? Peu importe au fond. félon multirécidiviste, puisqu’il aura failli à sa parole Philippe Grimbert Ce qui compte en revanche, c’est que ce récit avec les trois fantômes qu’il fait revivre ici, ressemble Grasset, 16 euros d’apprentissage, bien qu’il se lise d’une traite (et peut- à de la complaisance ; on sent comme un plaisir à se être à cause de cette facilité de lecture) n’accroche ni ne flageller. Mais n’est pas Jean-Jacques qui veut. Quant touche vraiment. Ce retour sur une amitié d’enfance aux théories lacaniennes, en particulier celle de «la qu’on croyait «à la vie à la mort» et qui finira par la mauvaise rencontre», on peut comprendre que l’auteur chute de l’autre aurait pu être émouvant ; sauf qu’ici y ait recours. Mais l’usage de la grande psychanalyse les passages obligés du genre, bagarres avec la bande n’aboutit pas forcément à de la bonne littérature. adverse, jeux, émotions intellectuelles partagées… FRED ROBERT ressemblent à de pieux exercices de style ; comme le Blessures secrètes En épigraphe Laurent Mauvignier cite Jean Genet : événements» d’Algérie. Les «images tellement atroces «Tout homme sait la rejoindre, au point de devenir cette qu’on ne sait pas se les dire à soi-même», en cette nuit blessure elle-même, une sorte de cœur secret et décisive, il les affronte, les met en mots, enfin. douloureux.» Ces secrètes blessures le romancier Mauvignier pousse ses personnages dans leurs s’emploie à les atteindre, sondant par cercles retranchements, traque la parole qu’il arrache aux concentriques de plus en plus serrés la mémoire de forceps, pour hoqueter l’indicible : «parce que, c’est, de Des hommes quelques-uns des hommes qui ont été appelés en faire ce qu’ils ont fait, je crois pas qu’on peut le dire, qu’on Laurent Mauvignier Algérie, en sont revenus avec «la nostalgie de quelque puisse imaginer le dire, c’est tellement loin de tout, faire Minuit, 17,50 euros chose perdu là-bas» et n’ont jamais pu parler de ce qui ça, et pourtant ils ont fait ça, des hommes ont fait ça, sans hante encore leurs nuits 40 ans plus tard. pitié, sans rien d’humain…» Le récit est âpre, à l’image L’intrigue se déroule sur moins de 24h, en 4 parties, des appelés qui se demandent «ce que ce serait pour ceux Après midi, Soir, Nuit et Matin. Et comme dans une de chez (eux) de vivre le même affront, pour un paysan tragédie racinienne, il y a une crise, puis des récits qui être privé de ce qui fait sa raison de vivre.» Et la fiction disent la mort sans la montrer. Car ce que ce roman restitue magistralement le désarroi de ces soldats qui relate, c’est le retour brutal d’un refoulé tragique. Il ont «renoncé à croire aussi que l’Algérie, c’était la guerre, aura suffi de presque rien, d’un geste mal interprété parce que la guerre se fait avec des gars en face alors que lors d’une fête de famille, pour que Bernard, devenu nous, et puis parce que la guerre c’est fait pour être gagné la loque que tout le bourg surnomme Feu-de-Bois, alors que là, et puis parce que la guerre c’est toujours des «pète les plombs». Alors, pour Rabut, son cousin, salauds qui la font à des types bien et que les types bien là narrateur intermittent du récit, commence une longue il n’y en avait pas, c’était des hommes, c’est tout». nuit au cours de laquelle surtout il revivra «leurs FRED ROBERT

Les Éditions Baudelaire de Lyon sont des éditions mixtes à compte d’auteur: celui- Mais les éditions Baudelaire nous envoient régulièrement leurs productions, ce qui ci paie la maquette aux alentours de 3000 euros, et les éditions se chargent des prouve qu’ils font leur boulot de promotion contrairement à d’autres maisons de corrections, de l’impression, la distribution et la promotion du livre. Ce qui souvent ce type. Cependant, étant donnée la pauvreté globale de la production reçue, c’est leur coûte moins que les 3000 euros investis par l’auteur. le premier livre que nous avons décidé de chroniquer. A.F. Parcours insipide Tout amoureux de l’Ecosse ne peut que commencer Licence poétique ? Mais ni poésie, ni mystère dans ce avec un plaisir anticipé la lecture de Parcours livre. Pas même un petit frisson de peur. Ce n’est Parcours fantomatiques fantomatique dans les châteaux écossais. De Ludovic qu’un plat catalogue d’apparitions spectrales, château dans les châteaux écossais Ardoise, d’après la couverture. À moins que ce ne soit par château. Pas même une photo ou une carte qui Ludovic Ardoise de Louis Richepin, selon le service de presse ? viendraient rompre la monotonie de l’ensemble. Éd. Baudelaire, Ce n’est que la première imprécision d’une longue Finalement ce livre ne présente aucun intérêt : ni 13,50 euros série. Même les indications de l’index sont fausses. littéraire, ni historique, ni «spirite», ni même Plus grave, ce livre contient des impropriétés lexicales touristique. Il est fort improbable que quelqu’un et des erreurs historiques. La plus énorme p.14 : puisse le refermer avec le désir d’aller découvrir l’auteur prétend que Cromwell a tenté d’assassiner l’Ecosse… Et pourtant c’est un si beau pays ! Bothwell, l’époux de Marie Stuart. Assez surprenant MADELEINE IMBERT quand on sait que Cromwell est né 12 ans après la mort de Marie Stuart et 21 ans après celle de Bothwell! 67 En devenir «Tu deviendras», telle est la devise de l’institut Le style d’une grande rigueur classique accorde une Alderson, petit château dédié à l’éducation d’enfants palette toute d’épure à ce beau roman polyphonique. de familles fortunées, à 10 km de Lausanne. Rentrée Le récit qui suit une chronologie serrée, à peine quatre 1959, le petit paradis connaît de lourdes difficultés mois, juxtapose les vies, par la reprise des mêmes jour- financières, il faut sans doute vendre, un groupe nées, vécues par les différents personnages, en chapitres américain se propose, mais sous réserve de «restructu- courts, qui par leur brièveté même ajoutent à ration»… Le petit monde des professeurs s’émeut. l’intensité dramatique de ce roman dense, troublant Chacun détient un secret, qui, son homosexualité, qui, et sensible. Un beau sujet de réflexion sur l’être qui ne ses accointances avec le fascisme (la guerre est encore cesse, marqué par les nécessités du temps, de devenir. bien présente), qui, sa lâcheté, qui, une passion MARYVONNE COLOMBANI destructrice pour le jeu, qui, une douleur trop forte, perte d’un fils, d’un mari… Pensées inavouées, Loin des bras inavouables (?), gestes inachevés, silences, tabous, Metin Arditi personnages prisonniers de leurs propres contradic- Éd. Actes Sud, 21,90 euros tions, de leur histoire… Les êtres, acculés à eux-mêmes, se voient contraints de se projeter, d’imaginer leur avenir, et pour cela ils devront aussi assumer ce qu’ils sont. Mémoires Le titre en forme de parabole trouve ses clés dans fresque. Le fil du temps se déroule à «sauts et gam- l’exorde et la péroraison du roman… énigme qui ne bades», épousant les digressions, les retours en arrière, cherche pas à perdre le lecteur, mais l’ouvre aux mythes les anticipations, que Claude Lanzmann baptise premiers qui rétablissent l’unité de l’espèce humaine, «digressions herniaires». Relation avec l’Histoire, mais humus commun dans lequel plongent les racines du surtout avec l’écriture, qu’elle soit celle du journaliste, monde. Dans cet ouvrage, c’est une voix profon- de l’écrivain, du cinéaste, avec l’évocation boulever- dément humaine qui se fait entendre, ton du conteur, sante de la lente maturation puis de la quête (qui vaut anecdotes, grande Histoire, familiarité avec les à elle seule un roman) qui ont permis l’éclosion du intellectuels majeurs du siècle, écrivains, philosophes, film magistral qu’est Shoah. Construction de soi effervescence d’une vie, de la vie… La mémoire malgré tout ce qui aurait pu détruire, lutte, appétit de individuelle tisse ses fils, les mêle à la trame des grands la vie, de la connaissance… Ce superbe livre fait partie remuements du XXe siècle. Sans adulation de soi, de ceux qui réconcilient avec l’humanité. suivant en cela les règles du pacte autobiographique, la M.C. narration s’appuie sur la sincérité, dévoilement d’une âme, des faits, des motivations, même si les actes ne Le lièvre de Patagonie : mémoires sont pas toujours à la gloire du protagoniste… Claude Lanzmann Le récit nous emporte avec passion, par son style Éd. Gallimard (NRF), 25 euros puissant, dépouillé de toute fioriture, dans une superbe Nostalgie de flammes et de sable... Elle : en transit, après une rupture. la ville de Nantes, Bologne et l’attentat de l’extrême Lui : surveille l’incendie qu’il a allumé. droite en 1980, Sandra pour lui, Giorgio pour elle. Lieu : une plage au bord de l’océan. Pas de guillemets, mais un dialogue, long flux musical C’est la nuit. D’immenses flammes sélèvent au-dessus avec des images en noir et blanc qui surgissent de la de la dune. Elle descend de sa voiture, se précipite. nuit. Parfois la fiction se mêle à la réalité : habitée par Une maison brûle. Un homme est là, tranquille, assis, ses lectures de Patrick Modiano, la narratrice s’amusait il regarde : «C’est ma petite guerre, c’est fini.» Quelques à donner les noms des personnages de ses romans aux heures vont s’écouler jusqu’à la fin de la nuit. Le temps clients de l’hôtel où elle travaillait. Cela s’était révélé de la rencontre. C’est surtout lui qui parle, elle pose comme une évidence pour l’auteure, la narratrice de quelques rares questions. Tout est venu de cet accident Sur le sable relisait les romans de Modiano, la nuit, au quand il avait 10 ans, en 1955 : une jeune fille, Brigitte, fond de l’hôtel... Et le lecteur admire l’alchimie de s’est noyée sur cette plage, elle lui a parlé juste avant. cette écriture. Jamais il n’a pu oublier. Maintenant sa mère vient de CHRIS BOURGUE mourir et il efface son passé. Son récit déclenche chaque fois les souvenirs de la narratrice comme si elle Sur le sable mettait ses pas dans les traces des siens. Leurs deux Michèle Lesbre histoires se confondent, s’enlacent : la mort de la mère, éd. Sabine Wespieser, 17 euros 68 LIVRES LITTÉRATURE Un seul être vous manque… Un souffle épique habite le roman de Stéphane Héaume, la sensualité des paysages, par la complexité des senti- La nuit de Fort-Haggar. De la Seine au grand désert de ments, les incroyables rebondissements, les scènes l’Aïr, l’auteur entraîne Julia Schlick dans un tourbillon irréelles, les êtres imaginaires, La nuit de Fort-Haggar d’aventures à la recherche de l’être aimé, Clifton Cliff, aurait pu être un tableau orientaliste de Delacroix, de grand reporter engagé dans la cause des enfants, et pourpre et d’or. Ou un opéra, bien sûr, car Stéphane disparu subitement. Le lecteur marche sur ses traces, Héaume est également l’auteur de textes pour le théâtre l’estomac en vrille face à l’angoisse qui l’étreint : de lyrique. Songe éveillé, La nuit de Fort-Haggar est peu- longues nuits s’ouvrent devant elle, béantes. Peur de plé de références biblique (Salomé), divine (Janus) et l’inconnu, de la vérité, de la solitude. Julia Schlick mythologique (Hérode), chaque séquence introduite traverse les épreuves avec courage et fierté, baignée par par une citation de Mahler (quelques notes), Pierre la lumière du désert que la plume de Stéphane Héaume Loti, Daphné du Maurier, Jean Anouilh ou Verdi. magnifie à chaque page. Si le personnage central est Heureux compagnons d’une nuit douloureuse. une ombre, alors, comment dire l’absence, comment MARIE GODFRIN-GUIDICELLI l’écrire ? Comme une mélopée profonde qui sourd des entrailles de la terre (odeurs et couleurs enivrantes) ; La nuit de Fort-Haggar comme un chœur antique (les amazones guerrières Stéphane Héaume africaines font entendre leurs conques) ; comme une Seuil, 19 euros longue plainte amoureuse (Julia Schlick désespère de Livre sélectionné pour le Prix des lecteurs ne pas être mère). Par l’ampleur de la trame romanesque, du Var à la Fête du livre de Toulon 2009 L’Inferno di Manaccora Un événement, 2 jours, 281 pages : Philippe Jaenada ron…), n’est autre qu’un gigantesque incendie détruisant réussit l’exploit de tenir le lecteur en haleine -en alerte tout sur son passage. Y compris l’équilibre familial… serait plus approprié vu les circonstances- et en émoi, D’un ton vif et léger, dans un style alerte, Philippe inquiet d’un éventuel dénouement tragique : les derniers Jaenada décrit les situations les plus périlleuses sans instants sur terre du narrateur et de sa famille, plage de jamais se départir de son humour, parfois féroce (la Manaccora, un jour d’été, 16h30. Rassurons-nous, la scène de la beuverie «dans un bar à matelots de Toulon» mort leur sera finalement épargnée, mais à quel prix ! est désopilante), brosse de beaux portraits de femmes Tout avait pourtant bien commencé pour Voltaire (le (celui de l’ex-mondaine Ana Upla, pleine d’humanité). père de famille), sa femme Oum (en hommage à la Et, usant de nombreuses circonvolutions digressives chanteuse égyptienne Oum Kalsoum) et leur fils Géo par un jeu de parenthèses en cascades, revient à (du style Trouvetout) en vacances dans une zone pré- l’essentiel : la rédemption après l’épreuve tragique, et servée des Pouilles, en Italie. L’image même du bonheur l’envie d’être vivant. idyllique pour un clan sans nuages, mais avec des MARIE GODFRIN-GUIDICELLI prénoms qui campent bien les personnages et le côté «illuminé» du roman qui, dès les premières flammes, Plage de Manaccora, 16h30 va s’emballer. Car l’événement en question, déclen- Philippe Jaenada cheur du récit, des souvenirs, des anecdotes et des Grasset, 17,90 euros petites remarques assassines sur le genre humain en Livre sélectionné pour le Prix des lecteurs déperdition (envieux, moqueur, fourbe, veule, fanfa- du Var à la Fête du livre de Toulon 2009 L’homme au panama «Ceux qui partent s’imaginent que la force est chez les les embruns. De cette nature luxuriante naît un roman autres, ceux qui restent la portent en eux.» luxuriant, chambre d’écho aux bruits de la ville, aux Cette phrase du roman Le grand exil de Franck Pavloff odeurs de l’hacienda, aux souffles des chevaux et à la résume la complexité des personnages qui s’affrontent. beauté des orchidées. Chacun emprunte des chemins Leurs destins croisés, leurs convictions, d’un côté ou parallèles à l’ombre menaçante du Tungurahua que l’autre du camp qui les sépare : partir ou rester ? Encore seul l’homme au panama décrypte : l’étrange Tchaka, faut-il pouvoir choisir… Échoués à Banos de Agua Santa, conscient d’être le «maillon d’une chaîne de vie» prête au centre de l’Équateur, tout semble les opposer : le à rompre. Au feu des questions existentielles -échapper silencieux Tchaka, «vieux gringo aux cheveux noirs» au au feu volcanique ? à la misère ? à soi-même ?-, Franck passé effacé ; Lucie la Mexicaine, rebelle «en exil d’elle- Pavolff répond par un roman humaniste et récon- même» ; don Rodriguo le patriarche ; l’Afro-équatorien ciliateur. Selmo, «observateur des baleines à bosse» coiffé de dread- MARIE GODFRIN-GUIDICELLI locks. La zone est peuplée de passeurs anonymes, coyotes et chulqueros aux poches bourrées de dollars à Le grand exil force de trafics d’hommes, candidats au départ. Et le Franck Pavloff volcan Tungurahua cristallise tous les sentiments de Albin Michel, 16 euros peur, de fatalisme, d’ignorance. Pièce maîtresse du Livre sélectionné pour le Prix des lecteurs du Var roman, Franck Pavloff le décrit abondamment comme à la Fête du livre de Toulon 2009 le paysage équatorien, le climat, la flore, le ciel, le vent, ARTS LIVRES 69 Le peu que l’on sait d’Elles Qu’a vu Célina, l’arrière-grand-mère, que Laure en Tchécoslovaquie…), leurs derniers lieux de vie : des Maternati ne saura jamais ? Quelle a été sa vie inté- villages du centre et du haut du Var. Des soupçons de rieure ? Un siècle les sépare. Il reste à Laure Maternati vie où l’on remonte le fil du temps et des généalogies un cliché d’identité, et son regard absent. De ce passé incertaines. À l’insue, avec sa couverture dessinée par englouti, l’arrière-petite-fille a écrit un poème dédié à Claire Colin-Collin, est un objet éditorial unique, créé sa mémoire. Puis elle est partie à la rencontre d’autres par des femmes pour des femmes. Un «objet de paro- femmes disparues, éternellement silencieuses, et, avec les, d’écrits et d’images» bouleversant, réalisé par des Bat Sheva Papillon, documentariste son, a recueilli auteures parties à la recherche de mémoires de femmes la parole de leurs filles et petites-filles, faisant affleurer immigrantes, entre désirs et exil. Leurs visages sont les les souvenirs, des éléments de vie, un peu de leur histoire. nôtres, leurs paroles aussi. Quatre-vingt-dix photos plus tard, Marie-Louise dite MARIE GODFRIN-GUIDICELLI Augusta, Zulina dite Blanche, Margherita et toutes les autres ont un visage, de la famille, des moments d’in- A l’insue souciance, des amis. Quelques mots plus tard, chapelet Laure Maternati, Bat Sheva Papillon, Claire Colin-Collin A l'insue, couverture, de noms, de dates et de lieux égrenés, le «je suis née» de peinture de Claire Colin-Collin Célina remplace le «je» poétique de Laure et tous les Edité par l’association Précipité, dans le cadre «je» des mères et grands-mères resurgies du passé. Un du programme «Identités, Parcours & Mémoire» livre-disque sensible, où l’on apprend leur âge (souvent (Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité approximatif), leur lieu de naissance (commune de des chances, Drac Paca, Conseil régional) Bruxelles, Saint-Loup à Marseille, région d’Olomouc et le soutien du Conseil général du Var. Cerveaux disponibles et non formatés C’est l’ambitieux questionnement du cycle de confé- De son côté, Bernard Stiegler rappelle utilement rences Esthétique et société proposé par Alphabetville l’origine du marketing chez le neveu de Freud, Edward et Colette Tron en 2006-2007 à Marseille qui est Bernays, jusqu’à la prise de contrôle industrielle du désir condensé dans cet ouvrage. L’objet était non pas de par le capitalisme, financiarisé et globalisé d’aujourd’hui. commettre une «théorie esthétique générale» mais «d’ob- La société de consommation apparaît comme un véri- server les conditions actuelles de l’expérience sensible, leur table péril pour l’expérience esthétique, qu’il s’agisse de effet sur l’esthétique, et sur la vie culturelle en général». On l’image et du regard pour Marie-José Mondzain, ou ajoutera : en regard de notre société de consommation productrice de brouillage des frontières entre les arts industrielle libérale. par l’avènement de l’appareillage numérique selon Les auteurs démontrent en effet, selon des angles d’ap- Jean-Louis Déotte. Un étrange détour par un récit proche personnels, comment notre société a su piéger du IIe siècle (l’Hercule gaulois de Lucien) ramène l’expérience sensible -individuelle et collective- selon Alain Giffard à l’analyse du neuromarketing et des diverses stratégies consuméristes. Après avoir décons- technologies R, des stratégies de TF1 et Google, pour truit les fondements romantiques de l’art, de l’artiste constater l’abandon par le politique de la culture à et de l’œuvre d’art, et certaines avant-gardes, Elie During l’économie. propose une alternative à travers la notion empruntée Voici donc plusieurs invites à repenser la présence de à l’industrie, le prototype, comme forme d’expérimen- l’art au moment d’une crise présentée comme grave et Esthétique & Société tation accomplie et primitive contenant tous les possibles. globale mais qui n’est pas qu’économique. Éd. L’Harmattan, 15,50 euros Se déduisent alors quatre statuts au moins pour l’artiste : Une bio-bibliographie en fin d’ouvrage situe chacun l’entrepreneur (F. Hyber), l’ingénieur (Panaramenko), des auteurs. l’opérateur (Sol LeWitt), le chercheur (M. Duchamp). CLAUDE LORIN D’Alessandro révélé Musicien natif des Grisons, Raffaele d’Alessandro de partitions, Antonin Scherrer dresse le portrait (1911-1959) est, il faut bien l’avouer, très peu connu d’un musicien à la personnalité contrariée par des au-delà des montagnes suisses. On sait gré aux éditions souffrances à la fois intérieures et pécuniaires. Mort à helvétiques Papillon d’exhumer ce pianiste, organiste 38 ans, Raffaele d’Alessandro est l’auteur d’une et compositeur d’ascendance italienne qui a suscité centaine d’opus essentiellement instrumentaux. Du l’admiration bienveillante de Nadia Boulanger lors de coup, l’ouvrage donne envie de découvrir ses 24 sa formation parisienne avant-guerre. La formidable Préludes, sa Sonate pour flûte et piano, ses Concertos pédagogue lui déclarait : «Vous portez en vous une dont une partie est gravée chez Pan Classics. œuvre». On apprend également que l’étoile filante JACQUES FRESCHEL Dinu Lipati, immense pianiste roumain disparu prématurément à l’âge de 33 ans en 1950, avait Raffaele d’Alessandro ou l’urgence intérieure préfacé ses Etudes. Il les plaçait sur sa table de chevet Antonin Scherrer et estimait : «Je tiens d’Alessandro pour un des musiciens éditions Papillon les plus puissants de sa génération». www.editionspapillon.ch Dans cette biographie illustrée de photos et d’extraits 70 PHILOSOPHIE ENTRETIEN AVEC SPYROS THÉODOROU Le cycle organisé par Échange et diffusion des savoirs reprend à l’Hôtel du département. Avec cette année pour thématique les crises, et neuf conférences de philosophes, historiens, juristes physiciens, économistes et sociologues…

Rencontre avec Spyros aurait pu se retrouver avec une salle de il s’oppose plus précisément à l’auto- et d’hétéronomie il y a une notion qui Théodorou, organisateur 4 personnes comme de 60. En plus je nomie. me travaille beaucoup c’est la notion n’avais pas caché mon ambition : c’était Dans ma technologie ce que je peux d’emprise, dont j’avais fait le titre de de ces cycles depuis 2001, d’une grande prétention parce que cela apporter comme autonomie, et là je la saison dernière. Je ne sais pas où ça qui nous explique son projet reposait finalement simplement sur suis avec prétention dans la philosophie va me mener, mais il y effectivement et les raisons particulières quelques volontés, l’accord des institu- politique, c’est l’autonomie intellectuelle. une emprise de la puissance écono- du choix de ce thème tions… et puis il y avait les invités : Par rapport aux concepts d’aliénation mico-technique, qui au départ s’est j’étais en relation avec deux ou trois Spyros Theodorou © X-D.R. cette année personnes, mais à l’origine Théodorou à Marseille personne ne connaissait ! Zibeline : Quelle est la fonction Les enjeux étaient donc aussi généraux d’échange et diffusion des savoirs ? que ça : mettre à la disposition du grand Spyros Théodorou : C’est de proposer public un savoir de bonne qualité ? des conférences de haut niveau, juste- On vit de plus en plus dans un monde ment parce qu’on s’adresse au grand politique, culturel, esthétique qui, en public ; comme il n’y a pas de pré-acquis particulier par les média et la publicité, supposé chez nos auditeurs, on n’a pas abrutit les gens de manière efficace, le droit de faire trop d’erreurs, ce qui ne techniquement valide. C’est-à-dire que veut pas dire que l’on n’en fasse pas, cela produit des résultats ! Donc je me évidemment. suis dit qu’il fallait des espaces, ici ou Je constate, avec mon expérience main- ailleurs, où on prend a priori les gens tenant, que cette idée de mettre en qui viennent non pas pour des imbé- situation d’apprendre et de savoir touche ciles mais pour des gens intelligents ; des populations que l’on arrive mal à c’est un pari à la fois philosophique et concerner avec le théâtre, ou les autres politique, et je crois que ça marche. À pratiques culturelles, quand elles visent partir du moment où l’on se sent ac- à atteindre des publics très larges. Il y a cueilli et traité comme un titulaire un seuil «sociologique» de 5 à 10 % d’une d’intelligence, on le devient. population que l’on a beaucoup de mal Mais comment définir scientifiquement à dépasser en général avec l’art en en et philosophiquement cette expression France ; seuil dont on s’affranchit très «prendre pour des imbéciles»? Non pas largement, je crois, dans l’activité pour châtier le langage, mais pour la d’Échange et diffusion des savoirs. préciser. Moi j’emploie souvent le terme Mais, bon, quand à l’origine en 2001, d’aliénation, sans doute parce je man- j’ai eu cette idée et que je l’ai proposée que de vocabulaire… aux institutions, je dois dire que j’ai Si vous empruntez ce terme à Castoriadis trouvé le Conseil général très courageux je pense qu’il emploie plus souvent le d’accepter ce projet puisqu’il n’y avait terme d’hétéronomie qui est pour moi pas de critère de comparaison ; on un terme beaucoup plus riche. Et puis Dans les interstices, hors de l’emprise appuyée sur nos vies de producteurs ; c’est-à-dire que des interstices de pensée, de liberté où ils pourront c’est un problème de conception du monde, de la vous allez bosser tous les matins et puis vous avez développer une pensée critique. société, du pouvoir. l’emprise qui vous tombe dessus parce que pendant Entre le monde d’avant et le nôtre quelle différence ? Mais en quoi donc vous démarquez-vous de Marx ? huit ou dix heures vous êtes soumis au chef d’atelier, Et bien moi qui ai connu les deux je peux dire qu’on Parce que je pense, à tort ou à raison, que l’interpré- au patron ; et puis ensuite il y a le formatage des mass est passé d’un capitalisme de besoin, c’est-à-dire on va tation de Marx reste profondément économiste. Je médias et en particulier du media télévisuel ; et là c’est beaucoup travailler et on va satisfaire nos besoins, de respecte énormément Marx mais je reste le deuxième pas d’une emprise qui n’est plus sur le maisons, de chaussures, à un capitalisme de désir. Vous profondément opposé à Marx dans le sens où je pense temps aliéné, sur le temps de soumission ; c’est une voyez toute la perversité de l’emprise puisque le besoin que la superstructure c’est l’économie et l’infrastruc- emprise sur le temps dit libre ; c’est-à-dire que les est satisfaisable, et le désir ne l’est pas. ture c’est l’idéologie. Et là je pense qu’on a une crise de zones de liberté se rétrécissent. Venons-en à la programmation de cette année. Vous l’infrastructure, c’est-à-dire de l’idéologie, et qu’on Cette emprise s’est étendue dans l’intérieur privé, dans avez choisi le concept de crise. Pourquoi ? essaie de nous la faire passer pour une crise de la la vie, la pensée et le désir ; et puis s’est propagée en- Parce qu’on nous prend, là encore, pour des imbéciles. superstructure donc de l’économie. Dans mon langage. suite dans l’espace public. Par exemple on peut penser Les mêmes qui ont adoré, qui nous ont imposé le Et qu’attendez-vous des intervenants ? que ça peut être un pur plaisir d’accompagner sa petite Veau d’or, tout à coup ont découvert qu’il était en Personne n’a dit au peuple ce que c’est qu’une crise. Et fille à l’école le matin, et bien ça devient un lieu de crise. Leurs idoles ont fait flop avec des conséquences bien là nous voulons dire simplement au peuple, confrontation et d’évitation des affiches pour chaus- économiques et sociales terribles. Et toute la presse d’après un physicien, un géographe, un juriste etc., sures, et du kiosque à journaux avec ses affiches de internationale s’est mise à nous expliquer ce que c’était que la crise ça ressemble à ça, et qu’il paraît qu’ils sont porno soft. L’espace public comme l’espace privé su- la crise, quand elle est arrivée, comment, etc., et cela dedans. Ces conférences doivent donc leur donner des bissent une emprise. de la part des mêmes qui ont glorifié pendant une outils pour qu’ils se pensent de façon critique dans ce Spyros Theodorou © X-D.R. Et cette notion d’emprise est ce contre quoi j’ai voulu vingtaine d’années toutes les causes de la crise. qu’on leur dit qu’ils sont, sans nécessairement l’accep- lutter. C’est-à-dire qu’à nouveau on nous a fabriqué un ter pour vrai. De façon à déshabiller ce concept Évidemment il ne s’agit pas de défendre la société concept de crise «ad hoc», pour continuer à penser totalitaire, pour en faire un concept parcellaire. d’avant et son abrutissement au travail… «comme il faut», malgré l’évidence. Et on nous a pris En bref, ce cycle veut lutter contre cette idée qu’avec Bien sûr qu’on ne défend pas ça ; j’ai connu ces gens pour des imbéciles en nous proposant un concept le totalitarisme du concept de crise il n’y a plus qu’un qui s’abrutissaient au travail ; les parents de mon explicatif total, c’est-à-dire quelque chose qui se tout : circulez, y’a rien à voir ! Nous voulons donner meilleur ami gardaient des vaches dans le Berry à 13 rapproche d’un totalitarisme : un concept qui prétend à voir, en détail. ans ; je les ai connus physiquement ; c’est mon père gouverner la totalité de ce qu’on peut comprendre de ENTRETIEN RÉALISÉ PAR RÉGIS VLACHOS pauvre et autodidacte qui m’a fait ; mais on défend la la crise actuelle… possibilité que ces gens-là ont eu, et qu’ils ont pu Alors je me suis dit on va le dépiauter ce concept, il a Et justement on va voir ! Rendez-vous le 10 décembre à donner et transmettre à leurs enfants, la possibilité d’autres explications, d’autres objets, il y a d’autres 18h45 dans le bateau bleu du Conseil Général 13 pour la d’interstices. moyens de l’utiliser. J’ai donc voulu dire qu’il est première conférence, qui sera historique : Avant on avait la possibilité d’interstice, de respiration. plurivoque, qu’il ne se décline pas de la même façon Crise du temps, crise dans le temps La puissance du média n’était pas installée ; il y avait dans les domaines de pensée divers. par François Hartog, professeur à l’École des hautes celle du capitalisme sur le travail mais elle ne savait pas Vous dites que c’est un concept plurivoque ; mais études en sciences sociales (EHESS), auteur de Régime –encore- manier les interstices. Maintenant la puissance quand même c’est une crise du capitalisme qu’on d’historicité, Présentisme et expériences dans le temps (éd. Seuil). est devenue beaucoup moins cruelle, mais elle est cherche à nous masquer ? C’est simple, non ? devenue permanente. Et je prétends que des lieux et Évidemment que c’est une crise du capitalisme. Mais des chantiers comme on en fait ici sont des lieux ce qu’on essaye de masquer c’est que le capitalisme, je d’interstices. Et la plus belle des métaphores que préfère dire la domination, n’est pas qu’un phéno- m’adressent les gens en sortant c’est : «vous nous faites mène économique. C’est là où je dis que c’est totalitaire. respirer», «vous nous donnez de l’air», «de l’oxygène» Mais une crise du capitalisme n’est pas qu’une crise ; métaphore de la respiration très étonnante ! économique, c’est une crise de la représentation du C’est une prétention de la philosophie qui, comme le monde, une crise de l’être au monde, des relations dit Castoriadis, «est une incarnation de notre liberté» internationales, de la domination Nord-Sud. On nous ; mais aussi à la fois une modestie. Car on ne va pas dit que c’est un problème économique et «t’inquiète faire la révolution, là tout de suite, mais on va ouvrir pas coco, on va l’arranger et dans deux ans ça ira des espaces pour que des milliers de personnes aient mieux». Non ce n’est pas un problème économique,

Mensuel gratuit paraissant Secrétaire de rédaction Musique et disques Sciences et techniques Ont également participé à ce numéro : le deuxième jeudi du mois Dominique Marçon Jacques Freschel Yves Berchadsky Emilien Moreau, Dan Warzy, Yves Edité à 28 000 exemplaires [email protected] [email protected] [email protected] Bergé, Susan Bel, Aude Fanlo, imprimés sur papier recyclé 06 23 00 65 42 06 20 42 40 57 Clarisse Guichard, Christine Rey, Histoire et patrimoine Pierre-Alain Hoyet, Christophe Edité par Zibeline SARL Secrétaire de rédaction Frédéric Isoletta René Diaz Floquet 76 avenue de la Panouse | n°11 Jeunesse [email protected] [email protected] 13009 Marseille Marie Godfrin-Guidicelli 06 03 99 40 07 Photographe : Dépôt légal : janvier 2008 [email protected] Polyvolantes Agnès Mellon 06 64 97 51 56 X-Ray Delphine Michelangeli 095 095 61 70 Directrice de publication [email protected] [email protected] photographe- Agnès Freschel Société 06 29 07 76 39 06 65 79 81 10 agnesmellon.blogspot.com Chris Bourgue Imprimé par Rotimpress [email protected] Cinéma Maryvonne Colombani Directrice commerciale 17181 Aiguaviva (Esp.) 06 03 58 65 96 Annie Gava [email protected] Véronique Linais [email protected] 06 62 10 15 75 [email protected] photo couverture Arts Visuels 06 86 94 70 44 06 63 70 64 18 THIERRY FABRE Claude Lorin Marie-Jo Dhô © Agnès Mellon [email protected] Élise Padovani [email protected] 06 25 54 42 22 [email protected] Conception maquette Maquettiste Max Minniti Livres Philosophie Philippe Perotti Fred Robert Régis Vlachos [email protected] Rédactrice en chef [email protected] [email protected] 06 19 62 03 61 Agnès Freschel 06 82 84 88 94 [email protected] 06 09 08 30 34 72 HISTOIRE FABRIQUE SCOLAIRE DE L’HISTOIRE | B. ÉTIENNE Roman National ? L’histoire a une histoire, bien sûr ! Mais la particularité de cet ouvrage est de s’attacher à l’histoire scolaire. Dépendante de sa grande sœur universitaire, celle-ci est de deuxième main. Pourtant, dans un pays où tous les citoyens passent par les bancs de l’école, elle a une diffusion et un impact bien plus importants que son aînée ! nes, il fallait faire le point sur les ressorts de l’histoire à privilégier le débat et la conflictualité l’école. Celle-ci doit-elle, et peut-elle, avoir pour finalité des interprétations. Gageure difficile la réalisation du creuset français, destiné à intégrer le à réaliser sans une re-visitation des citoyen anonyme au destin de la nation ? Par ses choix et sa programmes, sans une volonté d’in- mise en forme des événements, elle est une écriture mé- sister sur le doute et le débat. Gageure morielle : elle crée l’image qu’une société veut laisser dans une institution qui non seule- d’elle-même. Elle est le résultat d’une construction, d’une ment fait descendre la science fabrique où différents acteurs interviennent, de l’éditeur universitaire vers les élèves, mais qui de manuel à l’Inspecteur général, du ministre à l’enseignant. veille à ce que l’autorité administra- Cette édification d’une histoire nationalo-patriotique tive soit bien assise sur les enseignants, s’affirme avec la IIIe République qui magnifie les grands alors même qu’une grande partie de hommes et les grands événements et qui élabore une leurs directions critiques s’appuient vision romancée du passé, un «roman national» ! Mais, sur un savoir académique ! constatent-elles, l’irruption des mémoires piétinées des RENÉ DIAZ catégories de population définies comme mineures, la demande de reconnaissance de communautés issues de Eugene Delacroix, 1830. La Liberte guidant le peuple, l’aventure coloniale ont mis à mal une vision progressiste huile sur toile, 260 x 325 cm, Musee du Louvre, Paris et lénifiante du passé : la nation ne marche pas de pair Or, et c’est l’objet de ce livre, elle possède une logique avec l’effet de civilisation qu’elle revendique. La belle fable bien à elle, inscrite directement dans les volontés du enseignée à l’école ne peut plus faire illusion et l’histoire politique. Elle est l’histoire formatrice du peuple, celle du consensuelle construite autour de la patrimonialisation «roman national». Sous la direction de Laurence de Cock ne peut plus satisfaire les exigences de ceux qui attendent et d’Emmanuelle Picard, un ensemble d’auteurs se sont une version plus juste et plus précise de leur propre attelés à l’étude de sa «fabrication». histoire. Le livre s’ouvre par une préface de Suzanne Citron, par- rainage significatif car il s’agit d’une des personnalités les Réintroduire le doute plus dynamiques de l’étude de l’institution scolaire. Elle Pour parvenir à comprendre la «fabrique scolaire» quatre montre que les sujets et la façon d’enseigner ont permis grands thèmes sont choisis. Le premier s’attarde sur le de construire un véritable «mythe national». Utilisant la cadre réglementaire : la fixation des programmes est chronologie comme un appui pour convaincre les élèves évidemment un enjeu primordial et l’on voit Georges du destin inéluctable de la France, les tenants de l’ins- Pompidou, président, les infléchir dans un sens conser- titution ont écarté tous les contenus nuisibles à la vateur. La prééminence du temps présent est dangereuse croyance en l’homogénéité de la nation, en particulier car elle contrevient à l’étude du passé comme moyen de La Fabrique scolaire de l’histoire dans l’enseignement du fait colonial. Quant à l’enseigne- distanciation du vécu des élèves. Laurence de Cock, ment magistral, il faisait infuser ces vérités à l’intérieur de Le deuxième thème s’intéresse aux acteurs oubliés et Emmanuelle Picard son public. Elle rappelle aussi les prises de positions de maltraités de l’histoire, qu’ils s’agissent des poilus de 14, éd Agone 2009, 16 euros Nicolas Sarkozy et de son maître à écrire, Henri Guaino, dont l’histoire, écrite par d’autres, témoigne mal de leurs contre la «pensée 68» et les repentances du discours. Tous sentiments, ou celle des colonisés qui disparaissent deux se rangent du côté d’une histoire conservatrice, derrière les représentations françaises du monde colonial. faussement identitaire, où la célébration du patrimoine Le troisième thème s’occupe des enjeux mémoriels et des permet d’insister, à l’intérieur de l’espace public, sur les difficultés à construire, par une histoire partagée, un bien continuités et non sur les conflits. commun à toutes les composantes de la société. Le dernier thème passe au crible la construction du «roman national» Construction d’un creuset national au travers de l’étude de la Révolution Française et de celui Dans l’avant-propos, les deux directrices de l’ouvrage d’une autre histoire nationale, celle de la Suisse. explicitent leurs intentions. Parce que les lois mémorielles Au fond, pour parvenir à un compromis satisfaisant dans (voir ci-dessous) ont bouleversé les pratiques historien- l’enseignement de ces histoires plurielles, il faudrait

Le concept de lois mémorielles désigne les lois Gayssot (1990, interdisant Celle-ci prescrivait en 2005 : «Les programmes scolaires reconnaissent en parti- le négationnisme) et Taubira (2001 :«Les programmes scolaires et les program- culier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique mes de recherche en histoire et en sciences humaines accorderont à la traite du Nord». Cet alinéa a été abrogé par le Conseil constitutionnel en 2006, mais négrière et à l’esclavage la place conséquente qu’ils méritent»), ainsi que la l’article 1 subsiste : «La Nation exprime sa reconnaissance aux femmes et aux loi sur la reconnaissance du génocide arménien (2001) et celle sur l’existence hommes qui ont participé à l’œuvre accomplie par la France dans les anciens des «aspects positifs» de la colonisation. départements français d’Algérie, au Maroc, en Tunisie et en Indochine ainsi que dans les territoires placés antérieurement sous la souveraineté française.» Bruno Étienne, un lien entre orient et occident Le 4 mars, à Aix-en-Provence, disparais- sociaux. De même, ses Abd El-Kader révè- sait Bruno Étienne. Pour qui fréquente lent les dimensions de cette personnalité les rivages méditerranéens voilà une exceptionnelle, à la fois guerrier, homme grande perte ! Figure emblématique du d’État, mystique, Franc-maçon… dialogue entre les deux rives, il a tissé, La religion l’intéressait, en tant que autour de sa personnalité et de ses promesse d’une bonification de l’être. travaux, des liens porteurs d’un avenir Agrégé de Sciences Politiques, chercheur meilleur. Surtout, il a été le défenseur au CNRS puis professeur à l’IEP d’Aix, il des minorités et avant tout de celles de a fondé en 1985 l’Observatoire du Reli- la religion, un combat mené avec enga- gieux dont il assumait la direction. gement et discernement. Il permit ainsi Enseignant internationalement reconnu, un autre regard sur les déclassés des pé- écrivain prolixe -25 ouvrages-, il parti- riphéries urbaines, montrant que leur cipe à l’aventure de La Pensée de Midi, présence n’était pas un corps étranger, dont il est cofondateur. Homme de dé- mais bien une composante de la nation bat, homme engagé, il était aussi française. Franc-maçon. On l’aura deviné, c’est la Né en 1937 en Isère, il atterrit, à la suite spiritualité, le goût de l’échange qui des obligations de son père militaire, l’animaient et non l’aspect «plus fra- au lycée Thiers où il fait ses études avant ternel entre soi qu’avec les autres» dans de rejoindre la faculté d’Aix-en-Provence. lequel elle tombe parfois, et qu’il a Le reste de sa formation éclaire -ou abondamment critiqué. réfléchit, c’est selon- ses engagements Un homme qui ne laissait pas indif- futurs. Il fréquente l’institut des langues férent, et contribua à la compréhension à Tunis, y apprend l’arabe avant de reve- entre les peuples. nir à Aix, à l’Institut d’Etudes Politiques. RENÉ DIAZ À Alger, au Caire, à Casablanca, Bruno Hommage à Bruno Etienne le 26 nov Etienne trouve de quoi nourrir sa ré- à 17h à l’Hôtel de Région. Rencontres flexion sur l’islam et la religion. Son organisées avec l’association analyse de L’Islam radical permet une des Amis de Bruno Etienne, l’INA, meilleure compréhension du monde les Rencontres d’Averroès musulman et de ses aspects politico- et la Région PACA. Quelques clés efficientes La revue a décidé de republier, dans un hors-série, les écrits que lui avait confiés son co-fondateur Bruno Etienne. L’initiative est d’abord un hommage, mérité, à une grande figure intellectuelle. Bien sûr les aficionados possèdent déjà ces écrits, mais on aurait tort d’en négliger la lecture : ici leur cohé- rence, leur logique saute aux yeux. Ce personnage aux multiples facettes, aux hété- rogènes préoccupations, apparaît dans son trajet et permet de mesurer le cheminement des idées. On y retrouve ses engagements, ses convictions mais surtout on effectue un bon en arrière salu- taire. Prolixe, Bruno Etienne est à l’origine de pensées qui sont devenues des évidences. On redécouvrira avec plaisir leur source et elles pourront nourrir, de nouveau, des réflexions essentielles sur l’islam, sur les questions mémorielles, sur la politique. La revue a, avec raison, choisi de commencer par les racines du personnage. Les propos semblent anciens, édulcorés par la diffusion. Mais à y bien réfléchir, la spécificité de la culture locale reste certainement une clé d’analyse indispensable, un peu oubliée, pour notre société : vue d’en bas, du Sud. R.D. Bruno Etienne, sur les chemins de la pensée de midi… La Pensée de midi, Actes Sud 74 SCIENCES ASTRONOMIE

Eh oui ! Ça devait être 2009 odyssée de l’espace L’astronomie, une science vieille comme… la science. corps stellaire, s’amouracher de sa danse, la situer écrit ! Nostradamus Les étoiles nous questionnent de mille feux depuis pour mieux la retrouver, en posséder la virginale des milliards d’ères. Elles sont là, immuables et primeur. Connaître le spectre du rayonnement de l’avait-il prédit ? mouvantes, et depuis l’aube des temps rythment l’astre choisi pour estimer son intime nature, s’appe- les activités humaines, les guident fidèlement. santir sur son espace gravitationnel, tel est le 2009 devait être l’année Depuis toujours nous cherchons à comprendre cette fantasme, la quête du Graal de l’astronome. Le désir fidélité qui nous fait les retrouver périodiquement d’immortalité, parfois d’exclusivité, le pousse jusqu’à mondiale de l’astro… à la même place alors qu’autour de nous et en nous donner son nom à l’objet de ses célestes vœux… tout change tellement. Ces piqûres célestes envoû- Parmi ces milliards de milliards d’objets, le scien- nomie. Sans doute tent l’humanité car elles sont des images d’éternité tifique tisse un lien privilégié avec un ou quelques dans l’infini mouvement du monde. Les astroNOMES objets spécifiques, et la connaissance qu’il en donne conjonction de deux rêvent de comprendre les étoiles. Écrire et décrire à la société lui est témoin de cette alliance. Au- le plus rigoureusement possible les positions et delà de sa dimension poétique, l’astronomie interroge zéros tout neufs… mouvements relatifs des astres est la plus belle essentiellement la situation de l’humanité, et plus façon de déclarer sa flamme à cette éternelle et largement du vivant dans l’univers, en son sens philo- numérologie oblige ! lumineuse fidélité. Le rêve du scientifique est de sophique et cognitif. La découverte et l’étude des découvrir dans l’infinité de l’univers un nouveau exoplanètes éclaire d’un jour nouveau notre cons- cience de ce qu’est la planète Terre. Des astres au logis ciel Le premier acte astronomique fut de déterminer certaines «figures» stables de la voûte céleste sous forme de constellations reconnaissables (cum stelle : ensemble d’étoiles). Un système bien commode pour la navigation ou pour rythmer la vie agraire. Il est évident que le nombre des astres que les humains Où va se ont associés arbitrairement en constellations est totalement négligeable au regard de la multitude des corps astraux. L’astroLOGIE consiste à associer à ce premier arbi- traire un deuxième arbitraire, sous forme d’une causalité sociale ou psychologique quelconque. Prenons un exemple trivial. Rien ne m’interdit d’asso- loger l’astre cier des objets familiers. Un balai, la pelle et une multitude de grains de poussière. Il existe un lien © Tonkin prod. pratique de causalité entre eux. Maintenant, que dira-t-on si j’affirme que la conjonction de ces trois objets opère une forte répulsion sur ma psyché ? On dira que je n’aime pas balayer et que je cherche tous les prétextes pour ne pas le faire. Mais si je préconise, en tant que gourou, que cette conjonc- tion, ascendant plumeau, est totalement néfaste à la secte des mâles dominants, un certain nombre de machos fainéants adhéreront à cette croyance et tenteront à toute force de la renforcer en la servant. Car l’humanité est ainsi faite que le désir de puis- sance et de pouvoir l’emporte sur l’amour du libre savoir. Désastre L’astronomie découvre la réalité pour émanciper l’Autre en sa pratique ; tandis que l’astrologie ima- gine un réel pour en posséder le pouvoir occulte, et l’exercer sur la pratique de l’Autre. YVES BERCHADSKY 2009, année de l’astronomie www.astronomy2009.fr Exposition Provence-Alpes-Côte d'Azur, un balcon sous les étoiles organisée par la Région Paca du 13 nov au 3 déc Hôtel de Région 04 91 57 50 57 www.regionpaca.fr zibeln°16_2:Mise en page 1 16/02/09 13:25 Page80 AdhéreZ à Zibeline Collectivités, bibliothèques, galeries, établissements d’enseignement, Comités d’entreprise, Associations, compagnies, artistes et passionnés de Culture, adhéreZ à Zibeline et profiteZ des événements Zibeline, et des avantages offerts par nos partenaires, grâce à votre carte de Membre ! Choisissez votre formule, et envoyez votre chèque Les formules d’adhésion libellé à l’ordre de L’Amicale Zibeline à : Formule A1 : Individuelle, sans abonnement. 1 carte 25€. L’Amicale Zibeline | | Formule A2 : Familiale, sans abonnement. 76 avenue de la panouse n° 11 (autant de cartes de membres que de personnes vivant 13009 Marseille sous le même toit) 40 . € N’oubliez pas d’indiquer lisiblement, sur papier libre ou Formule B1 : Individuelle, abonnement 1 exemplaire. 1 carte 40€. sur le formulaire d’adhésion téléchargeable Formule B2 : Familiale, abonnement 1 exemplaire. sur le site : (www.journalzibeline.fr) (autant de cartes de membres que de personnes vivant Votre nom ou celui de votre association, sous le même toit) 60 . € votre adresse postale, votre adresse électronique, Formule C1 : Collective, abonnement 5 exemplaires. 1 carte 60€. votre numéro de téléphone, la formule que vous choisissez et le nombre de cartes correspondant. Formule C2 : Collective, abonnement 5 exemplaires. 5 cartes 100€. Votre numéro d’abonné s’il s’agit d’un renouvellement Formule C3 : Collective, abonnement 10 exemplaires, 10 cartes 150€. Nous joindre pour toute demande particulière Formule D : Adhésion de soutien, montant au choix. au 06 03 58 65 96 / [email protected] Nos partenaires vous offrent invitations, réductions et avantages… NosPour partenaires les places gratuites, vous offrenttarif réduit invitations, réductionsThéâtre et Vitez avantages… (Aix) PourOMC les Simiane places gratuites, téléphonez-leurL’institut culturel italien rapidementsur tous pour les livres réserver, puis pour toutes les représentations 2 invitations par soir 4 invitations vous offre présenteztéléphonez-leur votre rapidementcarte de membre04 91 37 14(1 04place par carte nominative)pour Personne. Pour ne les voit réductions,la vidéo pour présentez Âmes à grammes, simplement le bal 3 adhésionsvotre carte annuelles(réduction valableLibrairie seulement Arcadia pour (Marseille l’adhérent) pour réserver, puis présentez (Sabine Tamisier) mes de Nanouk Broche perdu d’une valeur de 32 €, cette 12e) Le votreGyptis carte de membre le 18 nov à 20h30 le 3 mars à 20h30Théâtre Vitez (Aix)le 21 mars à 20h30 d’un Ciné concert«carte adhérent» LibrairieCentre commercial Imbernon Saint le 19 nov à 20h30 le 30 nov à 20h e 2 invitations(1 place par par carte soir nominative). Le Toursky le 4 mars à 19h2 invitations 04 42 22 81 51 vous donnera accès à tous les (MarseilleBarnabé 8 )Village pour Les Caprices de Marianne de 4 invitations04 91 04 par 68 soir 41 le 5 mars à 19hpour La farce de Maître Patelin 04 42 27 08 services64 de l’Institut, spécialisée30 rue desen architectureélectriciens Pour les réductions, pour le cycle cinéma du XIVe le 6 mars à 20h30 Le Festival Provence Terre de médiathèque et programme 5% de réduction © Tonkin prod. de Musset mes Agnès Régolo La Cité Radieuse mesprésentez Françoise simplementChatôt votre FestivalCompagnie Russe Parnas le 7 mars à 20h30le 18 nov à 20h30 Cinéma L’institut culturel.culturel italien 280 bdsur Michelet,tous les livres 3e étage le 1carteer déc (réductionà 20h30 valable Le JeuTarif russe réduitde Pavel 4€ Tchoukhraïpour les adhérents2 invitations lepar 19 soir nov à 19h vous offre vous offre Demande par mail : 5% de réduction le 2seulement déc à 19h15 pour l’adhérent) le 10pour mars lesà 20h30 représentations pour Main dansle la20 main nov à 20h30 10 invitations 3 adhésions [email protected] sur tousLibrairie les livres de Provence (Aix) le 3 déc à 19h15 Le Mariagedu Banquet de Vitali fabulateur Melnikov de Sofia Fredén2 invitations pour la soirée d’ouvertured’une valeur oude au32 04 € ,91 cette 48 51 «carte 94 31 cours Mirabeau le 4Théâtre déc à 20h30du Gymnase le 11du mars 8 auà 20h30 18 déc à 20h le 17 mars à 20h30pour Des PaPis dans lela 26 tête mars adhérent» Librairie5% de réduction Arcadia (Marseille 12e) le 510 déc invitations à 20h30 par soir Les Oiseauxà la Friche du paradis la Bellede de Mai le 18 mars à 20h30mes Danielle Bré dans5 invitations le cadre vous donneraLibrairie accès à Maupetit tous les Centresur commercial tous les livres Saint Barnabé pour Otto Witte par la cie du Roman04 Balayan 91 64 41 90 au-delà de ce quota pour l’hommage à Abdelatifservices de l’Institut,(Marseille 1er) tarif réduit B (15€ au lieu de 24) le 12 mars à 20h30 d’invitations,du Momaix Kechiche La Canebière VillageLibrairie Au poivre d’Âne à toutesCentaure les représentations le 24 nov à 19h médiathèque et programme culturel. 30 rue des électriciens mes de Michel Didym Un nid de gentilshommes de tarif à 8 € pour tous ces le 27 mars à partir de 14h 5% de réduction (La Ciotat) 04 91 11 00 91 AndreïLa Kontchalovski Minoterie spectacles 2 invitations 5 invitations Demande par mail : 5% de12 réductionrue des frères Blanchard le 20 fév à 20h30 tarif réduit pour toutes les [email protected] tous les livres le 21 fév à 20h30 le 13 mars à 20h30 04 42 59 94 37pour Le Repas de Valèrepour Novarinala soirée compétition de sur tous5% deles réduction livres L’Ensemblerésa par mail àTélémaque VIY dereprésentations Konstantin Erchov mes Thomas Quillardetcourts métrages ou au 04 91 Librairie48 51 94 L’écailler sur tous les livres 4 invitations Le 148 mars€ au à lieu 20h30 de 12€ Pavillon Noirle (Aix) 2 déc à 20h30 le 28 mars (Marseille 1er) Librairie de Provence (Aix) [email protected] er pour Créations franco-hollandaises 4 invitations 4 invitations 2 invitations 5 invitations Librairie Maupetit2 rue Barbaroux (Marseille 1 ) 31 coursLa Pensée Mirabeau de Midi le 26 nov à 20h30 pour ThéâtreLe Journal d’unde fouLenche pour Ulysse pour À demain ou lapour route la desjournée six ProvenceLa CanebièreTerre 5% de réduction 5% devous réduction offre à laLe Bastide Gyptis de la Magalone de GogolTarif réduit de Josette Baïzciels Romaine 5% de réductionsur tous les livres sur tous3 exemplaires les livres de la revue 04 1491 invitations39 29 13 le 22pour mars toutesà 15h les représentationsle 1er mars à 17hde Jean Cagnard le 29 mars à partir de sur11h tous les livres L’Iran derrière le miroir pour Gloria d’après Sunset 0 82004 300 91 033 91 52 22 04 42 93 48 00mes Sylvie Osman dansSalle le Emilien cadre Ventre (Rousset) Le Greffier de Saint-Yves Librairiepar mail Au: poivre d’Âne EspacecultureBoulevard de Momaix 04 42 53 36 39 Librairie L’écailler(Marseille 1er )(Marseille 1er) (La Ciotat)[email protected] 20 mesinvitations de Jacques Hansen Le BalletLes NationalBancs dePublics 3bisf (Aix) le 8 déc à 19h 2 rue Barbarouxlibrairie générale et juridique 12 rue des frères Blanchard le 10 mars à 20h30 Marseille1 place offerte pour 1 placeEntrées achetée et visitese gratuites sur GRIM 5% de réduction10 rue Venture Le Comité régional pour le concert d’Istanbul Sessions 8 invitations par soir réservations 7 Festival de théâtretarif amateur réduit 5% de réduction 5% dede réductionTourisme & Erik6 invitations Truffaz pour toutes les pour tous les spectacles du Pays d’Aix : sur tous les livres sur tous les livres représentations suivantes pour 04Ouvertures 91 64 60#12 00 04 42 16 17 75 pour tous les concerts sur tous les livres vous offre le 28le 11nov mars à 20h30 à 19h15 Cartes blanches aux stagiaires 2 invitations par représentations(10€ au lieu de 12€) 2 marinières «Picasso en au Dock des Suds de DANCE Les Salins (Martigues)du 11 au 16 déc 04 91 04 69 59 Le GreffierLibrairie de Saint-Yves Regards (Marseille 2Lae) PenséeProvence côtede d’azur»Midi le 14 mars à 20h30 (Marseille 1er) 04 le96 17 11 mars 04 84à 20h30 le 27Léda fév à 20h30 Atomica Musique10 invitationsau-delà de ce quota d’invitations, Centre de la Vieille Charité Vous paroffre mail : (Auréliele 18 marsPampana) à 19h15 le 284 fév invitations à 20h30 par soir de concertpour le concerttarif de réduitYom pour tousLe les Balthazar spectacles librairie générale5% de et réduction juridique 3 [email protected] de Istanbul, ville et pour tous les spectacles de la résa parle 20 mail nov à à 20h30 le 17 mars à 20h30 entrée gratuite 10 rue Venturesur tous les livres monde Grimsaison [email protected] 21 nov à 20h30 réservation indispensableLe Pavillon avant Noirpour(Aix) tous les concerts5% du jeudide réduction 3 exemplaires du hors-série Bruno 4 invitationstarif réduit le 26 nov à 20h30 le 6 mars 4 invitations 04 91 42 59 57 sur tous les livresL’histoire de l’œil Etienne, pourà toutesMeeting les Sonic représentations Théâtrele 27 de novLenche à 20h30 04 42 49 02 00pour Memory (Marseille 6e) sur les chemins de la pensée de midi le 2704 nov91 11 à 20h00 91 Tarif leréduit 28 nov à 20h30 chorégraphie Wen HuiLe cargo de Nuit (Arles)Librairie Regards25 rue Fontange (Marseille 2e) par mail : au-delà de ce quota d’invitations, pour 04toutes 96 12les 09représentations 80 Festival Les Élancéesle 3 déc à 20h30 2 invitations Centre de la 5%Vieille de réductionCharité [email protected] tarifMontévidéo réduit pour les adhérents 04 91 91 52 22 (Ouest Provence)04 42 93 48 00 pour le concert de Peter5% Von de réductionsur tous les livres 04 391 invitations 04 69 59 par soir 3bisf (Aix) 4 invitations Poehl + Marie Modianosur tous les livres pour Vice-Versa de Will Self Les Bancs Publics pour Correspondances le 14 mars à 21h30 Librairie Imbernon Entrées et visites gratuites sur Festival Tous Courts (Aix) e le 17 fév à 20h30 1 placeréservations offerte pour 1 place par la cie Georges Momboye résa par mail à L’histoire(Marseille de l’œil 8 )(Marseille 6e) Montévidéole 18 fév à 20h30 achetée le 21 fév à 18h302 invitations à l’Espace G. [email protected] spécialisée en architecture 5 invitations pour 04tous 42 les 16 spectacles 17 75 Philippe (Port-St-Louis)pour la soirée d’ouvertureavant leCourts 12 mars par 25 rue FontangeLa Cité Radieuse le 23 fév à 20h30 5% de réduction pourle Du24 févcaractère à 20h30 relatif de la 04 91 64 60 00 Réservations auexcellence, théâtre de 280 bd Michelet, 3ème étage présencele 25 fév des à choses20h30 l’Olivier, 04 42programme 56 48 48 de courts métrages suivi sur tous les livres5% de réduction GASTON CASTEL du 19/11/09 au 17/12/09 | un gratuit qui se lit N°1

20 ans de droits de l’enfant

[ ° N UN ]

LA CONVENTION DES DROITS DE L’ENFANT ÉVÉNEMENT III La convention des Droits de l’enfant : 20 ans après où en est-on ? Mortalité infantile en en hausse… Les conséquences sur la scolarité et la santé sont dramatiques hausse, malnutrition, et l’Unicef souligne la discrimination dont épidémies, travail des souffrent toujours les jeunes des enfants, exploitation banlieues, la situation alarmante des mineurs étrangers et le recours exces- sexuelle, enrôlement sif aux mesures de répression ! Pourtant dans les conflits une loi sur la protection de l’enfance a été signée en mars 2007 et un poste armés… En France de Défenseure du Droit des enfants, où en est-on ? créé en 2000, est actuellement oc- cupé par Dominique Versini. Or le 15 En 1989, 30 ans après la 1re Décla- septembre, on apprenait qu’un projet ration de leurs Droits, était signée la de loi avait été déposé pour supprimer Convention Internationale des ce poste et le remplacer par un poste droits de l’enfant, la CIDE qui reven- plus général sur les Droits tout court. dique les droits à la santé, l’éducation, Cette décision va à l’encontre du projet Couleurs Cactus-Muriel Giambino l’identité, la protection contre l’exploi- initial. En effet, il a été constaté que à récolter des fonds le 20 novembre tation sexuelle et armée. Le tout sans 10% des saisines étaient adressées di- lors de la Fête de la Couleur. Les fonds discrimination de race, de couleur, de rectement par les adolescents en recueillis seront cette année destinés à sexe, de langue ou de religion. Où en difficulté parce qu’ils se sentent la scolarisation au Bangladesh. est-on aujourd’hui ? concernés par l’appelation «Droit des À Marseille l’association Couleurs 9 millions d’enfants meurent encore enfants». Espérons que l’État révisera Cactus a lancé la 3e édition de 1, 2, Fête tes droits chaque année avant l’âge de 5 ans. De sa copie d’ici 2012, date à laquelle la 3... soleil ! qui se déroule jusqu’au 22 Déambulations, ateliers, spectacles, faim, de maladies, de violences. La France repassera devant le Comité décembre : photos et films, peintures, jeux et animations au menu de la 8e mortalité maternelle est de 210 décès spécial qui juge des progrès des États expositions réparties dans le centre- Fête tes droits marquée cette année pour 100000 naissances dans certains dans le respect des Droits des enfants. ville, pour les enfants, leurs parents, par le 20e anniversaire de la Conven- pays, le taux global est de 84 en Asie leurs éducateurs. Avec en particulier tion Internationale des droits de l’enfant. du sud-est et en Afrique subsaha- Fête et culture les expositions de Pierre Gondard et Mercredi 25 novembre de 9h à 17h à rienne, alors qu’il est de 9 en Europe. Pour fêter néanmoins les 20 ans de la André Parra au restaurant Un Tout l’Hôtel du Département à Marseille. Sans leur mère les enfants sont encore CIDE l’Unicef, associé à la fondation Petit Monde, des films sur la condi- plus en danger, et la réduction de ce Hermès, a lancé une vaste opération tion des enfants du 18 au 20 novembre www.cg13.fr/solidarites/petite- taux est l’un des objectifs primordiaux destinée à promouvoir les droits de à la Cité des associations, et un enfance/actualites de l’Unicef. l’enfant chez les 2 millions d’écoliers lâcher de ballons le 21 novembre au En France les enfants sont nettement français : les élèves de primaire sont Parc Borély. mieux protégés, mais la situation ne va invités à travailler autour de thèmes à CHRIS BOURGUE Afrique, pas en s’améliorant. On déplore plus l’aide de mallettes pédagogiques, puis de 2 millions d’enfants pauvres, chiffre à fabriquer des figurines de couleur, et www.unicef.fr le droit à l’enfance Malgré l’existence de la Charte afri- Cécile Silvestri a créé Couleurs Cactus avec quelques bénévoles aussi soucieux qu’elle caine des droits et du bien-être de l’enfant, de l’accès des enfants défavorisés à la culture. Elle travaille avec L’Unicef et le collectif la situation de nombreux jeunes afri- d’artistes Les Têtes de l’Art. cains est préoccupante. À l’occasion de la parution aux éditions Le Sablier Zibeline : Comment est venue l’idée femmes, et de quelques hommes... des publics en très grande difficulté. du livre-disque documentaire Afrique, de cette association ? Pourquoi le nom de Couleurs Cactus ? Nous travaillons avec les centres de le droit de l’enfance, la Fondation Cécile Silvestri : J’étais dans le Parce que le cactus, ça pique, ça loisirs autour du livre, de la lecture, de Blachère propose à Apt, vendredi 20 domaine de l’éducation populaire, je résiste dans un désert, et couleurs, la vidéo. novembre à 18h, une rencontre avec pratiquais la photo et j’étais au pluriel, pour mélanger les genres, C.B. les auteurs Jessica Nliba et Didier amoureuse de l’Afrique. Je me suis dit les cultures. Reuss, l’illustratrice Emily Nudd-Mitchell que je devais réunir ces pôles Vos actions durant l’année ? 1,2,3...soleil ! et la comédienne Catherine Alias. 1 euro d’intérêt et je me suis lancée ! Mon Nous sommes prestataires de service jusqu’au 22 décembre sera reversé à l’Unicef sur chaque but : accompagner tous les publics pour des projets autour du cinéma 06 60 39 65 54 vente. vers la culture avec l’aide d’autres africain, des réalisations de clips avec Couleurs Cactus www.lesablier-editions.com IV ÉDUCATION LATERNA MAGICA | DESSIN POUR LA PAIX Magie du bricolage

Du 2 au 24 décembre se déroulera la Bardine. Et en avant- première Kérity, 6e édition de Laterna Magica imaginée la maison des contes de Rebecca par Fotokino. L’invité d’honneur, Isidro Dautremer. Ferrer, dont le travail rend hommage Dans le cadre de Cinéma(s) d’Algérie aux mouvements Surréaliste, Dada et en partenariat avec Aflam, Brahim Bauhaus, donnera le ton d’une édition Tsaki présentera deux de ses films : vantant les vertus du bricolage. Dans Les Enfants du vent, trois volets sur de nombreux ateliers disséminés dans l’enfance algérienne contemporaine la ville, les enfants pourront découper, et Histoire d’une rencontre, celle coller, assembler, et faire naître des d’une fille et d’un garçon, sourds- images par transparence… redécou- muets, que tout séparait… Enfin un vrant ainsi le principe du cinéma, qui hommage sera rendu à Paul Carpita, reste l’essentiel de la programmation avec la projection de trois de ses de Fotokino, entre expos et rencontres courts-métrages, Des Lapins dans la professionnelles. tête, La Grenouille et Graines au vent. Plus de 40 films, courts et longs, dans Une programmation qui ne sent pas cinq salles : des historiques comme La le bricolé ! Lanterne magique de Georges Méliès ANNIE GAVA (1903) et Le Dirigeable volé du Méliès Tchèque, Karel Zeman ; d’un autre Drôle de grenier de Jiri Barta Tchèque, Jiri Barta, une avant-première : Drôle de un film inédit en France réalisé en papier japonais de grenier où des objets oubliés dans un grenier se Tomoko Ogushi, où un bûcheron curieux fait de Laterna Magica réinventent une nouvelle vie. Autre avant-première, drôles de rencontres dans les bois. Fotokino Kerity la maison des contes de Rebecca Dautremer, Le 13 décembre, de 10h à 19h, petits et grands 09 50 38 41 68 un film autour de la magie de la lecture. pourront passer une journée entière à l’Alhambra http://fotokino.org De la musique également avec un ciné concert, et CinéMarseille entre jeux, ateliers, lectures et Pulcinella qui propose l’intégrale des adaptations en projections, plongés dans une magie de chiffon : trois papiers découpés d’Emmanuele Luzzati et Giano films d’animation où boutons, fil à coudre prennent Gianini, consacrées aux opéras de Rossini ; magie vie, Le Nœud au mouchoir et Deux pelotes de laine du papier que l’on retrouvera avec Folklore restaurant, de Hermina Tyrlova suivi de La Nounou de Garri Images de Paix en liberté

Dans le cadre des actions en direction des jeunes, la Région a invité plus de 300 lycéens et apprentis de PACA à découvrir l’exposition Dessine-moi la paix en Méditerranée (voir Zib’23) et à participer à une ren- contre-débat sur la liberté d’expression réunissant plusieurs dessinateurs méditerranéens : Jean Plantu (France), Dilem (Algérie), Boukhari (Palestine), Kichka(Israël), Ramize Erer(Turquie), Stavro(Liban), Bahgory (Egypte), Caro, une femme!, (Suisse) et Red (France). Rappelant qu’il y a «une manière de contourner les interdits», Plantu insiste sur l’importance du media Prix de la Tolérance-Cheze Philémon du Lycée Golf Hotel à Hyéres Prix de la créativité-Quentin Desideri du lycée Alexandra David-Neel à Digne comme porteur du message, et du lectorat, en fonction duquel on le module. Kichka affirme que «la liberté d’expression n’est pas acquise» et que «ce qui nous menace c’est autant l’intolérance que le politiquement correct» ; ainsi faut-il lire la presse internationale et ne pas se contenter de certains sites qui «digèrent» l’information en amont. Le concours de dessins s’est déroulé après le déjeuner offert par la Région. Chaque élève a disposé de feuilles de papier machine format A4, d’un crayon, de marqueurs pointes fines et pointes épaisses dans 4 couleurs (noir, bleu, vert et rouge). Réalisation du dessin en 1h30 ! Lise et Quentin, élèves de terminale littéraire option arts plastiques du Lycée Alexandra-David Niel de Digne ont obtenu le Prix du message et de la créativité. Le Lycée professionnel Golf Hôtel de Hyères a vu 4 de ses élèves en graphisme récompensés, Leslie, Philémon et Arthur (graphisme, tolérance et humour) ; et le Grand Prix a été décerné à Luc Jorda qui nous a confié : «Je ne m’y attendais absolument pas. Je m’y suis mis 10 mn avant la fin et je n’ai pas fait un dessin sur la Paix. C’est vrai que je dessine depuis que je suis tout petit. Je voudrais rentrer à l’école d’Angoulème.» Gageons qu’il a toutes ses chances ! CHRIS BOURGUE Le Grand Prix- Luc Jorda du Lycée Golf Hotel Conférence, débat et concours se sont déroulés le 15 octobre à l’Hôtel de Région. à Hyères www.cartooningforpeace.org ORCHESTRE RÉGIONAL DE CANNES | BALLET D’EUROPE ÉDUCATION V

Sensibles à la musique L’Orchestre régional de Cannes, en résidence à Le corps et la langue Marseille, a proposé des répétitions publiques suivies En 2003 Jean-Charles Gil a fondé le Ballet d’Europe, compagnie permanente de de concerts dans des quartiers et des établis- 12 danseurs, installée à Marseille puis à Allauch, dans une ancienne usine EDF. sements scolaires dits sensibles… Depuis il a créé une dizaine de chorégraphies : il recherche une esthétique sensible mêlant expression classique et contemporaine. Parallèlement il s’intéresse à l’insertion des jeunes danseurs et à leur reconversion professionnelle à l’intérieur d’un projet européen qu’il a initié. Mais son souci permanent de communiquer aux autres sa passion va plus loin. Il ouvre les répétitions au public et tisse des liens avec les scolaires. Le projet Les mots dansés s’est mis en place suite à la demande de Cécile Vona, enseignante en classe ENAF (Enfants Nouvellement Arrivés en France) du collège Jules Ferry à Marseille (13005). Avec Bénédicte Raffin, chorégraphe et enseignante, elles ont cherché comment la danse pouvait permettre l’intégration des enfants étrangers et leur apprentissage de la langue. Bâti sur deux ans le projet doit déboucher sur une création présentant des fragments d’histoires, un univers sonore dû à Philippe Deschepper et à la collaboration des parents porteurs de leurs cultures, tout cela avec 20 heures d’ateliers hors-temps scolaire. Autres projets : Danse avec moi s’adresse aux jeunes déficients intellectuels de l’IME La Parade pour développer le sens du partage et apprivoiser les regards ; les sections arts danse du Lycée Saint-Charles de Marseille profitent de l’intervention du danseur-tuteur, Christophe Roméro, qui se dit «confiant et optimiste». Transformer la danse à technique classique, art élitiste venu de la Cour et de la contrainte, en vecteur de parole et de partage n’est pas le dernier paradoxe d’un Diderot ORC répétition avec Robin Marzouk à la batterie © Yves Bergé Ballet extrêmement populaire ! À l’initiative de la Région Provence- Le plaisir est là CHRIS BOURGUE Alpes-Côte d’Azur et du Rectorat de Dans des gymnases transformés en l’Académie d’Aix Marseille, ce projet salles de concert grâce au soutien de Points de jonction ambitieux permet aux élèves, depuis la Régie culturelle régionale, des plusieurs années, de découvrir la jeunes ont écouté de la musique Jean-Charles Gil a dansé sur les plus grandes scènes musique symphonique au travers de classique avec émerveillement, entre internationales les grands rôles du répertoire, avant de créer l’expérience irremplaçable de l’écoute des parents étonnés par la qualité du son ballet et sa danse d’un orchestre. spectacle, des élus enchantés, des Zibeline : Quel est le projet qui vous tient le plus à coeur ? Ils sont préparés aux concerts par proviseurs et enseignants fiers de leur Jean-Charles Gil : La rencontre de tous les publics, faire que la danse ne soit pas leurs professeurs d’éducation musicale établissement. Entre le final fugué, réservée aux seuls initiés, que les garçons dans les collèges ne disent plus : «La lors de séances pédagogiques, d’écou- magnifique, de la 41e symphonie de danse c’est pas pour nous !». Choisir le bon geste pour être compris de tous et tes, d’analyse de partitions, et cette Mozart, dirigé avec fougue par Peter rester modeste. année un dvd sur Mozart et Copland : Madan, et le lyrisme d’Appalachian Vous revenez d’une tournée au Maroc. Quels souvenirs en ramenez-vous ? des clés pour une perception active, Spring de Copland, un élève batteur Les jeunes marocains sont très demandeurs et nous avons proposé des qui pose pour chacun des jalons de s’est mêlé avec joie au swing du répétitions publiques, des ateliers à des danseurs de hip hop. Il y a eu de vraies reconnaissance. Les élèves se sont concerto brandebourgeois n°3 de Bach rencontres dans 4 villes : Meknes, Agadir, Marrakech et Tanger. ensuite retrouvés à Cannes, pour une alors que d’autres, engagés dans un Un élan pour 2013 ? visite du Palais des Festivals, une projet d’écriture slam, étaient très Je voudrais apporter encore plus à ce public que j’aime, joindre les rives, de rencontre avec l’Orchestre régional et émus de pouvoir déclamer leurs textes, Marseille au Maroc et au Liban, et explorer plus avant les thèmes de la femme, Peter Madan, chef invité : des répéti- accompagnés par la mélancolique l’eau, la Méditerranée. C’est Éric Orsenna qui écrira l’argument du ballet : il a tions émouvantes, qui permettent elles Sérénade d’Elgar et l’Aria de Bach, si travaillé sur l’eau, et la ponctuation fait déjà danser son discours… aussi de comprendre comment la mu- planante : des lectures posées et très C.B. sique se fait, avant les concerts dans touchantes. Jean-Charles Gil © X-D.R les établissements. Tous ces jeunes, encadrés par leurs Car au cinéma L’Alhambra à Saint- professeurs, ont montré beaucoup de Henri, des enfants de centres aérés ont talent et de sensibilité, loin des assisté à un très beau concert Mozart caricatures de groupes qu’ils propo- et Rossini par les élèves du CNIPAL sent souvent au regard des adultes ou (Centre National d’Insertion Profes- des étrangers à ces quartiers sen- sionnelle des Artistes Lyriques). Puis au sibles… Chacun, partenaire, élève, Lycée Diderot, à la Rose, et Saint -Exu- enseignant sort grandi d’une telle aventure de démocratisation, qui prône péry, à Saint Louis, deux concerts symphoniques remarquables ont été une culture sans frontières, mais sans offerts aux élèves. démagogie, exigeant un réel travail d’appropriation des élèves. YVES BERGÉ VI SCIENCES FÊTE DE LA SCIENCE

Tournicompti, fulmicoton ! Zdoiiing ! Votre Zibulon techno-scient fait un saut dans le cahier jeunesse pour vous enchanter du grand manège festif 2009 de la science Hep ! hep ! hep ! La jeunesse !

À la tête de l’ensemble The Evolution Orchestra, l’in- Astronomes cinéscience Papillons (& autres petites bêtes…) en comparable Charly Darwin mènera grand bal aux L’exposition sur l’astronomie Provence-Alpes-Côte partenariat avec le cinéma Les Lumières. Le 21 étoiles. Le brillant Galileo Galileidu groupe Astronomic’s d’Azur, un balcon sur les étoiles, organisée par la novembre à 16h et 17h30 à la médiathèque de Years portera aux nues les plus riches rythmes spatio- Région PACA en collaboration avec l’Observatoire l’Alcazar/BMVR Marseille, un cinéscience Astrociné temporels de la fête. Ça va donner dans la rock’n’roll Astronomique de Marseille-Provence (OAMP), ouvre dans le cadre de l’année mondiale de l’astronomie evolution au Galaxy club dans la semaine du 16 au 22 les portes du ciel de Provence en même temps que 2009. novembre ! celles de l’Hôtel de Région. Dans ce cadre, la conférence Impossible de rendre compte de toutes les mani- Les premières galaxies, présentée le 20 novembre Explorateurs festations qui graviteront au ciel de cette fête. à 18h30 par Olivier Le Fèvre, directeur du Laboratoire Et pour les aventuriers et les conquérants de l’inutile: Vous trouverez le programme exhaustif sur : www.drrt- d’astrophysique de Marseille, apportera ses lumières avis à tous les chasseurs de trésor ! Partez à la paca.com et www.fetedelascience.fr sur la manière dont les galaxies de plusieurs milliards recherche du parchemin disparu et découvrez le Moi, au carrousel des étoiles, je vous invite à cueillir d’étoiles comme la nôtre, la Voie Lactée, se sont for- mystère de la Spirale ! Il s’agit de la première grande quelques jolis flirts. mées. Grande question de l’astrophysique moderne, chasse au trésor organisée par les Observatoires liée à la question de nos origines ! Les simulations de Provence et de Côte d’Azur. Elle est destinée à Physiciennes numériques sur ordinateur donnent des indices sur tous les habitants de PACA. Du 17 au 19 novembre au CRDP (31 bd d’Athènes - des scénarii possibles, mais la compréhension de C’est une aventure inédite, offrant la possibilité de Marseille 13001), de 10h à 18h. Exposition Physique cette phase critique dans la vie de l’univers passe découvrir ou re-découvrir la ville et le patrimoine de femmes, dans laquelle 15 physiciennes témoi- nécessairement par des observations concrètes. Des naturel sous un nouveau jour. Un carnet de route à la gnent de leurs travaux de recherche et de leurs moyens considérables sont déployés pour voir directe- main, en famille ou entre amis, les participants parcours professionnels. Laurence, Valérie, Vanina et ment l’assemblage de ces premières galaxies et de passeront deux heures inoubliables à explorer les Louisa, entre autres, évoquent leurs métiers, leurs nouveaux télescopes vont bientôt être mis en service. espaces lointains et les temps reculés par des ani- choix en matière d’orientation scolaire et, parfois, les mations originales mêlant patrimoine, astuces et stratégies de conciliations entre impératifs profes- Cinéphiles étonnement. Ils récolteront des indices leur per- sionnels et personnels. On y découvre des métiers Dans les cadres conjugués de la Fête de la Science mettant de résoudre l’énigme finale et accéder au scientifiques accessibles après des filières d’études et du Mois du Film Documentaire, l’association Polly trésor. Dans l’hyper centre de Marseille, tout autour courtes, la place des savoir-faire techniques et de Maggoo programme diverses séances de films en de La Canebière, du Palais Longchamp jusqu’au leurs transmissions, «des travaux de paillasse» ou de région PACA, en présence des cinéastes et de cher- Vieux Port, à pied ou en métro, les joueurs partiront terrain. cheurs. Le 19 novembre à 20h à Vitrolles, un en quête d’indices sur les traces de Galilée et Darwin. Les rencontres en cours de route seront nombreuses, parfois insolites, et dans chaque lieu La tempete © Cie Karnavires d’étape, les joueurs pourront suivre le fil de leur imagination, tester leur sens de l’observation, déclencher des voix étranges, et décrypter des messages cachés. En suivant leur carnet de route, ils récolteront ainsi des indices leur permettant de résoudre l’énigme et d’accéder au trésor. Le 21 novembre. Départs de 13h30 à 15h30 au rez-de-chaussée du Centre Bourse Inscription gratuite, au préalable, sur le site www.tresorpaca.fr, ou sur place le jour même. Remise des prix à 17h30 Espace Bargemont – Mairie centrale. Spectacle Nuit de Lumière à 18h30 par la compagnie Karnavires place Bargemont. Alors Zibeljeun’S, sois sympa et amène tes parents faire la bringue scientifi- que! Faut un peu les sortir et tu verras au rock des savoirs, ils peuvent sûre- ment t’apprendre des passes encore assez acrobatiques. YVES BERCHADSKY PATRICE LAISNEY RENCONTRE VII Vent debout pour le PôleJeunePublic Début 2010, le PôleJeunePublic du Revest, dans le Var, soufflera ses cinq bougies : l’âge de lever la grand-voile vers Marseille Provence 2013. Rencontre avec son directeur Patrice Laisney à l’aube de cet anniversaire

Depuis sa création en 2005, la météo est favorable au PôleJeunePublic qui a accueilli 112 compagnies, programmé 177 spectacles, reçu 100000 specta- teurs dont 30900 l’an passé. Un succès qui n’est pas monté à la tête de Patrice Laisney, directeur adjoint de l’association Massalia à qui Toulon Provence Méditerranée a confié la gestion du Pôle : «Je peau- fine simplement une programmation à voir en famille et ouverte à toutes les disciplines : théâtre, marion- nettes, arts visuels, multimédia, danse, concerts, ciné-concerts avec l’Opéra et Filmharmonia. Et je porte une attention particulière aux écritures spécifiques pour les crèches et les maternelles». Pinocchio © X-D.R. Si les spectacles sont pour la plupart accessibles à du meilleur spectacle jeune public pour sa création IN encore la compagnie italienne Rodisio qui présen- tous, Patrice Laisney demande à toutes les compa- 1et 2. «Un spectacle pour la toute petite enfance qui tera en janvier Storia di una famiglia en V.O. gnies de faire le pari d’une séance scolaire minimum s’est construit ici, explique-t-il, qui a été écrit au Pôle Au-delà de la programmation in situ et hors les murs, car, ainsi accompagnés, «les jeunes sont étonnés par et a tourné dans les crèches de la communauté le Pôle a entamé une réflexion sur l’accompa- les formes artistiques et la parole qui les interroge». d’agglomération Toulon Provence Méditerranée en gnement des jeunes qui, après les spectacles, leur Des jeunes et leurs familles qui viennent des douze 2008». Mais cette résidence est plus vaste encore donnerait envie de poursuivre. La constitution de communes que compte le vaste territoire de TPM. car Skappa ! s’est vu confier l’aménagement du hall classes Label 2013 à l’occasion de la future biennale, D’où la nécessité d’être sur le terrain et de partir à la du théâtre, et a initié une rencontre professionnelle en partenariat avec l’Éducation nationale, est à rencontre du public, la clef de la réussite étant dans avec le célèbre paysagiste Gilles Clément. Quant à l’étude : les élèves pourraient intégrer à leur cursus «les petites pierres apportées chaque saison et la sa création 2010, 10 millions de Km2, elle se prépare scolaire, pendant trois ans, leurs parcours artistiques multiplication des projets». actuellement sur les hauteurs de Toulon… et leurs pratiques culturelles… Un nouveau pari pour Ainsi, en partenariat avec le Forum des musiques Autres complicités avec Jean-Pierre Lescot, «l’un le Pôle qui a réussi un parcours sans fautes. actuelles organisé par Tandem, il propose au jeune des pionniers du théâtre d’ombres», et la compagnie MARIE GODFRIN-GUIDICELLI public de se familiariser aux nouvelles technologies Clandestine qui bénéficie d’une mise en réseau pour appliquées à la musique. Il participe également aux tourner à La Valette, La Garde et au Revest. Ou res 1 Rencontres de la jeunesse de Toulon et aux Le Petit chaperon rouge © X-D.R Rencontres artistiques méditerranéennes du Var À venir au PôleJeunePublic en qualité de programmateur. Pour la première fois, Chocobelou Abel (concert) il sera présent à la Fête du livre de Toulon autour 17, 18 et 21 novembre d’un vaste projet couleur slam (spectacles, show- Le Petit chaperon rouge (La Troupe de M. Tchoum) cases, contes, scènes ouvertes slam amateurs et 25 novembre professionnels, ateliers d’écriture sur place), temps Mon Pinocchio (Cie Phosphène / Jean-Pierre Lescot) fort de la saison 2009-2010 et préfiguration de la 1er, 2, 5 et 6 décembre Biennale 2011 baptisée «Qui sont les enfants du 21e Père U à la plage (Cie Loreleï) siècle ?». Manifestation qui alimentera à son tour 15 et 16 décembre l’édition 2013… En attendant, l’équipe vient de mettre C’est pas pareil ! (Cie Clandestine) la touche finale à son site Internet, «véritable vitrine du 19 au 22 décembre Pôle», conçu comme un lien permanent avec le 04 94 98 12 10 public, les artistes, les compagnies et les www.polejeunepublic.com professionnels. Compagnons et nouveau chantier La compagnie Skappa ! est associée au Pôle depuis ses premiers pas. «Une vraie fidélité» dont se réjouit Patrice Laisney, «heureux et fier» de son Molière 2009 VIII SPECTACLES CHÂTEAU-ARNOUX | STE-MAXIME | MÔMAIX Trop t’aimes et t’abuses

NOs LIMITes. Spectacle chorégraphique entre danse contemporaine, hip hop et capoeira. Une heure d’alchimie composant, au creuset des souffrances, sensualité et poésie. Aux limites des possibilités humaines, les gestes extrêmes cherchent à discipliner le mouvement d’un monde que l’injustice et la discrimination envahissent. Une danse de résistance de l’amour contre toutes les violences. Un décor planté comme stalag, QHS, banlieue ou psychose. Deux grilles parallèles barrent la scène comme séparation des consciences. Une rampe aux lumières scialytiques. Un tissu sonore croisé de lignes mélodiques contemporaines, de pulsations sérielles… un long cri. Des corps qui s’écorchent au pilori d’une humanité malmenée, maltraitée, méprisée. Au détour de l’écartèlement, de l’affrontement des peurs réciproques, refleurissent les instants d’une infinie tendresse. Renaissance de solidarités. La chorégraphie de Martine Jaussen et Abdena- mour Belalit met au service du sens de nos limites les capacités extraordinaires des danseurs de la Nos limites © Y. B. compagnie Alexandra N’Possee. Il ne s’agit à aucun public du Théâtre Durance de Château-Arnoux le 23 moment d’une exhibition triviale de perfor-mances. octobre. Soulignons d’ailleurs la qualité de l’accueil et Les exploits physiques époustouflants s’ordonnent des conditions de représentation de ce théâtre. comme des notes sur cette grille, qui fait portée NOs LIMITes non plus le lendemain au Carré Sainte - gestuelle à la symphonie des corps. Maxime, avec le même compliment. Il n’y a pas de limite non plus à l’enthousiasme du YVES BERCHADSKY

Livre d’images L’essentiel est invisible Bien sûr que le spectacle d’Alwin Nikolais réjouit les enfants : c’est coloré, vif, Victoria Chaplin nous entraîne dans un monde qui semble ne connaître que les bien dansé, bourré d’animaux et de formes étranges, de couleurs primaires, limites infinies des songes. Animaux marins aux mouvements souples, comme d’instants magiques. Sans narration, avec une simple alternance de tableaux agités par la houle, formes étranges, surgies de nulle part, objets qui se thématiques les danseurs, ou plutôt les effets visuels, parviennent à captiver transforment en chevaux extraordinaires… poésie, lenteur, ombres qui s’animent… l’attention de tous et à tirer des cris de plaisir et d’admiration. Ce qui est toujours le corps de l’artiste se contorsionne, se coule dans les formes les plus bon à prendre pour la danse, surtout lorsque cela concerne neuf salles pleines au improbables. Un coquillage se déploie en éventail, devient autre. Finesse, légèreté, Pavillon Noir ! Même si l’on regrette un peu, au bout du compte sans conte, que puissance aérienne du rêve… bestiaire onirique, chatoiement des formes et des rien ne soit raconté. Non qu’on ait forcément besoin d’histoire, mais parce qu’il couleurs… n’y a pas non plus beaucoup de danse, et encore moins de propos…. The Crystal En contrepoint, d’un regard plus ironique, mutin, Jean-Baptiste Thierrée se joue and the sphere est un peu comme des bulles de savon colorées qui passent : des codes, détourne les numéros convenus (la séquence jonglage est inénarrable!), jolies, très jolies même, mais il n’en reste rien lorsqu’elles ont éclaté. Dans les yeux les effets attendus (bruitages incon- des enfants peut-être ? grus ou décalés à l’extrême pour Le Cirque invisible © Brigitte Enguerand AGNES FRESCHEL évoquer la chute d’objets farfelus), s’attache au pastiche de tableaux The Crystal and the Sphere a été joué du 15 au 17 oct dans le cadre de Mômaix célèbres, brise les perspectives en des retournements cocasses. Sa crinière © Fred Hayes blanche échevelée s’anime. Étonné de ses propres farces, il multiplie lapins et canards sur scène. Et hop ! Les voici tous qui viennent saluer… lesquels sont vrais ? Bonheur de l’illusion… déjà la fin? Le temps s’était suspendu, pour notre émerveillement. MARYVONNE COLOMBANI

Le Cirque invisible s’est produit au Grand théâtre de Provence du 22 au 25 oct dans le cadre de Mômaix LE REVEST | MÔMAIX | LE GYMNASE SPECTACLES IX Les tribulations des Têtes en l’air Le Palais Nibo n’est pas un palais tout à fait comme les autres, et ses pensionnaires non plus. Faut dire qu’à défaut d’or et de vermeil, on y trouve de drôles de zèbres ! Il y a bien sûr Monsieur Loyal qui tente de contenir l’exubérance de sa troupe d’énergumènes et la classique alternance de numéros de cirque et de saynètes ubuesques. Tout cela mené sur un train d’enfer car au Palais Nibo, parole de Monsieur Loyal, «les numéros s’enchaînent comme des bêtes !». On démarre avec un clin d’œil dans le rétroviseur de La Piste aux Étoiles (que les moins 20 ans ne peuvent pas connaître…) et l’on termine par un défilé de mode bestial, toutes griffes dehors. Entre les deux, les artistes jonglent de jeux de mots en jeux de malin, de prouesses techniques en figures décalées. Il y a même un acrobate qui fait le coup du striptease devant un public médusé, mi-figue mi-raisin pour cause de chères têtes blondes ! Heureusement, Blanche-neige est là qui vient le rassurer, sauf qu’elle se transforme en cracheuse de pomme déjantée sur fond de riff rock’n roll. Le public n’est pas au bout de ses surprises avec un mécanicien en salopette jaune qui fait le tour de la terre sur son pneu, un escargot © Klair&Sebastien goguenard qui n’a pas froid aux antennes malgré le gracieuse qu’une plume… Pas étonnant quand on Le Palais Nibo et ses pensionnaires balancement de sa planche en bois. Deux Pierrots s’appelle Les Têtes en l’air et que la folie douce vous a été joué sous chapiteau à Toulon lunaires qui défient les articulations de leurs corps donne des ailes dans le dos… du 20 oct au 3 nov avec une souplesse toute féline tandis qu’une MARIE GODFRIN-GUIDICELLI «libellule» danse sur sa corde volante, aussi légère et

Peau d’Âne désenchantée La nouvelle mise en scène de Caroline Ruiz, de Charles Perrault, la musique de Michel Legrand, fondatrice de l’école de théâtre Un Pied en coulisses, l’ajout de scènes chorégraphiées, d’effets vidéo et de Un Cardinal Rich n’a malheureusement pas tenu toutes ses pro- tours de magie. Mais à trop prendre de liberté avec Le Diable Rouge, c’est le Cardinal Mazarin, magistra- messes. Créée au Jeu de Paume à Aix, Peau d’âne l’histoire originelle et le texte, le spectacle traîne en lement interprété par le généreux Claude Rich. La avait pourtant tous les atouts pour séduire : le conte longueur (1h20 pour le jeune public, c’est long) et pièce évoque, souvent avec humour, les affaires vacille : faiblesse des voix chantées, comique de publiques et privées de Mazarin durant les dernières Peau d'Ane © X-D.R situation outrancier, rythme en accordéon. Si l’idée années de la Régence, renvoyant aussi à l’actualité : d’actualiser ce texte publié en 1694 pouvait faire «Es-tu naïf, Colbert ? Crois-tu vraiment qu’on pourrait mouche, les ajouts de Basile Giambattista, Caroline gouverner avec des honnêtes gens ? Hélas ! Pour tenir Ruiz et Julien Asselin n’évitent pas la familiarité : pas un pays, il faut aussi des fripons !». Même si certains besoin de s’exclamer «Mamzelle l’ânesse qui pue des jeux de mots nous échappent, le texte d’Antoine fesses!» pour s’attirer la sympathie des enfants… Rault nous aide à comprendre les enjeux du Quant au deuxième acte qui entraîne Peau d’Âne - pouvoir… Pour mettre fin à la guerre contre l’Espagne, devenue souillon- dans «un cabaret haut en couleur, Louis XIV (Adrien Melin) doit épouser l’Infante où les tours de magie sont fameux» plutôt que dans Marie-Thérèse, mais il est fou amoureux de la nièce une ferme, le résultat frise le ridicule, et la scène du de son parrain, Marie Mancini (la pétillante Alexan- music-hall est interminable. On retiendra néanmoins dra Ansidei). On aurait préféré un jeu moins appuyé la justesse avec laquelle Caroline Ruiz évoque pour montrer leur amour. En revanche Anne d’Autriche, l’hyménée incestueux, subtilement écrit par Perrault, tantôt cruelle, tantôt émouvante, est élégamment et les images poétiques projetées sur la longue robe interprétée par Béatrice Agenin. On peut regretter blanche de cette jeune vierge déchue sauvée par que les spectateurs du balcon n’aient pu pleinement l’amour d’un prince. profiter de la mise en scène superbe de Christophe MARIE GODFRIN-GUIDICELLI Lidon, et surtout des jeux de miroir… Après cette soirée réussie au théâtre du Gymnase, la rencontre Peau d’Âne a été créé les 6 et 7 nov improvisée avec les comédiens fut un moment fort au Jeu de Paume à Aix dans le cadre de Mômaix pour tous. À voir au théâtre de l’Eden à Sénas LEA CHATEL-DESHAYES, MARIEM DIANE, CELIA GBEKAN les 26 et 27 nov (04 90 57 79 36) ET REBECCA MARTIN élèves en 3e option découverte et au théâtre Armand à Salon-de-Provence professionnelle des métiers du spectacle du 1er au 11 déc (04 90 56 00 82). au Collège Thiers X SPECTACLES MASSALIA Effroi boréal Arty Show En apprenant que le Buchinger’s Boot Avant l’ingénieux Wouaf ! art, personne n’aurait pu vers d’étranges rivages parsemés de gags, d’inven- Marionettes fomentait un spectacle imaginer que la gent canine pouvait conduire à la tions visuelles et de bruitages, d’effets illusoires. Le pour le jeune public, on aurait dû peinture ! Exceptée Jeannette (irrésistible Guanda- tempo est enlevé, millimétré même, pour que les se méfier. Un peu comme quand line Sagliocco), grande amatrice d’art et amie des images, les objets et les mouvements composent un on vous dit que Tim Burton bêtes, scotchée à sa petite Fiona comme un fil à la «beau» tableau. Surréaliste quand les figures des Mé- fait un film sur Noël… Leur patte. D’ailleurs, ça tombe bien, cette douce folle nines disparaissent l’une après l’autre de l’écran, fau- travail pour les enfants res- dingue érudite s’est lancée dans une conférence sur viste quand les félins sortent leurs crocs. Pas sûr que semble trait pour trait à ce l’histoire de l’art à travers… la place du chien ! Une les musées se l’arrachent car Wouaf ! art est difficile qu’ils proposent aux idée délirante venue du grand nord (le Sagliocco En- à classer dans les réserves, sans projecteur et loin adultes : un univers semble est installé en Norvège) qui permet d’initier de sa niche (euh, de la scène), au risque de japper onirique, plutôt côté le jeune public à quelques chefs-d’œuvre avec légè- indéfiniment. cauchemars, reté. Et drôlerie. On pouvait craindre le pire : mono- MARIE GODFRIN-GUIDICELLI dans un décor logue rasant, diaporamas poussiéreux, jargon d’où universitaire… Bien au contraire, Wouaf ! art est Wouaf ! art a été joué du 10 au 13 novembre surgissent rythmé, inventif et poétique, servi par une comé- au Massalia sans cesse, dienne généreuse, un langage imagé, un fil sonore et des endroits musical qui tombe à pic. De Vélasquez à Picasso, en les plus inat- passant par Renoir, Seurat, Warhol ou Jeff Koons, la tendus, conférence va très vite déborder du cadre et dériver dessus, dessous, Wouaf ! Art © Jorn Steen des murs et des trap- pes, toutes sortes de © Mafalda da Camara créatures jamais totalement bénéfiques ; de très belles marionnettes fantastiques, articulées ou non, de bois, de chiffon et de fer, de toutes tailles, manipulées à vue par des êtres dissimulés de blanc… Il faut dire que La Puce de neige est un conte du pôle, tout y est neigeux, même l’effroi. Peu importe qu’on comprenne mal l’histoire ; que le montage sonore habile soit parfois relayé par un pauvre synthé ; ou que la manipulation, extrêmement complexe, ne soit pas parfaitement au point : le spectacle, vu à la création, a de quoi se bonifier comme un grand cru. Car lorsque le décor se transforme en costume, la paroi neigeuse en corps vivant qui s’en-fonce dans la glace, les gorges se ser- rent, l’effroi est là. Comme face à cet homme morse qui se fabrique des glaces aux insectes, des cornets à pattes. Les enfants n’en reviennent pas, et nourris- sent leur imaginaire. Jusqu’au bal final des moustiques, joyeux… AGNES FRESCHEL

La Puce de neige a été créé au Massalia du 3 au 6 novembre Machine à tambour Pour Camille et Lucie, la figlia et la madre, c’est dans machine à laver, entrée du labyrinthe où dort le sortis tout droit des dessins animés japonais... ou la salle de bains que ça palpite, le matin entre 7 et 8 monstre, bocca de la verità. Parfaits, le décor aux s’effeuillent comme un carnet de croquis. Plus ou le soir à la même heure. En sortir ou s’en sortir, couleurs apaisées des années passées, les murs convenus, les dialogues, comme si l’universel ne c’est le même problème à 15 ans ou à 40 en Italie ou seconde peau tatoués de visages aux grands yeux pouvait être atteint que par ce que chacun dit, fait et ailleurs ! La baignoire est si accueillante, protectrice Mère fille © X-D.R sait déjà… Rôde le spectre de la «mauvaise mère» qui pour l’une ; inaccessible pour l’autre et justement percute le démon familier de la préadolescente ! Trop objet du désir légitime de s’y plonger un peu, pour fade, trop «en creux» le jeu des actrices au tempo oublier peut-être que la vie est dure pour une femme hésitant qui s’attire néanmoins toute la sympathie du à mi-parcours. Lieu clos où l’on se met à nu, où le spectateur, juste un peu déçu de s’être vu si pâle en miroir est un interlocuteur implacable, où le linge sale ce miroir. peut se laver en famille. Bien trouvé, bravo Laura MARIE-JO DHO (Forti / auteur), bravo Antonella (Amirante / metteur en scène) ; transparent comme cette baignoire- La compagnie Anteprima utérus et malin comme ce tuyau de douche avec a présenté Mère fille lequel on communique avec les disparus «pronto au Massalia mamma» ; pas innocente non plus la béance de la du 20 au 24 octobre MASSALIA | LE MERLAN | THÉÂTRE DU TÉTARD SPECTACLES XI

Les riches heures de Massalia Le Cercle éclaté Compagnie Tardito Rendina à partir de 12 ans mardi 1er et mercredi 2 décembre 20h OHM 1.2 Compagnie 2b2b à partir de 10 ans mardi 8 décembre et mercredi 9 décembre 20h Mon Pinocchio Compagnie Les Phosphènes à partir de 5 ans samedi 12 décembre 15h et 20h, dimanche 13 et mercredi 16 décembre 15h

Mon Pinocchio © Pascal Deboffle Spectacles présentés En connivence avec l’Officina-atelier éclaté est une chorégraphie «où s’entre- d’ombres, Jean-Pierre Lescot (égale- à la Friche Belle de Mai de production qui organise le festival choquent cirque, théâtre et danse pour ment à l’affiche du PôleJeunePulic au www.theatremassalia.com Dansem, le Théâtre Massalia invite dire sim-plement avec beaucoup de Revest, voir page VII) dans une inter- le jeune public à la découverte de deux poésie toutes nos difficultés à être et à prétation toute personnelle de l’œuvre univers chorégraphiques. Celui des vivre ensemble.» Et celui du duo dansé de Carlo Collodi, Pinocchio. Grand italiens Federico Tardito et Aldo Ren- OHM 1.2 de la compagnie 2b2b, invi- classique de la littérature, personnage dina qui ont en commun d’avoir tation ludique, exploration étrange et incontournable pour un marionnettiste, travaillé avec Anna Sagna et Raffaella sonore signée Laurence Giner, metteur monter Pinocchio a été pour Jean-Pierre Giordano -artistes régulièrement en scène et en espace de corps, de Lescot l’occasion de raconter l’histoire invités à Dansem- avant de fonder leur textes et de musiques. Le tout dans un d’un enfant pas comme les autres, un propre compagnie Tardito Rendina, et mobilier scénographique qui déclen- enfant «sauvage» qui doit découvrir le de créer le spectacle Cercle éclaté en che les samples… Puis le Théâtre monde. Et de passer de l’ombre à la 2004. Empruntant au cinéma muet Massalia tire le rideau sur la danse pour lumière… son voca-bulaire humoristique, Cercle accueillir l’un des maîtres du théâtre MARIE GODFRIN-GUIDICELLI Hip-hop, la rage au corps Avec sa compagnie Grupo de Rua, par ses neuf interprètes, parions que le Bruno Beltrão séduit par sa curiosité public aussi, tout âge confondu. chorégraphique pour des zones non M.G.-G. Dans la roulotte répertoriées, entre hip-hop et danse contemporaine, et par la rage des H3 de Liouba… corps à l’énergie électrique. Dans H3, Bruno Beltrão P'tites formes pour p'tits bouts © X-D.R il multiplie les zones de contact, de à partir de 12 ans De sa roulotte sort un p’tit bout de frottement et de crissement entre duos vendredi 4 décembre 20h30 femme venue d’ailleurs, Liouba, pétil- et trios, et compose un spectacle sans Le Merlan lante et colorée, grande voyageuse et cesse recomposé, en mouvement 04 91 11 19 20 rêveuse. De ses découvertes, elle garde perpétuel. Si Le Merlan a succombé à www.merlan.org quelques traces : poussière d’étoile, cette force venue du Brésil, amplifiée bout d’arc-en-ciel ou grains de sable... H3 Bruno Beltrao © Lucie Vangerven Quand la roulotte tourne et retourne en tout sens, des univers poétiques jail- lissent où se bousculent danse, objets, tissus, musique. Des p’tites cartes postales en mouvement créées par la comédienne-danseuse Charlotte Smither, des p’tites aventures parta- gées, des p’tites comptines racontées. Et les bouts d’hommes en raffolent. M.G.-G.

P’tites formes pour P’tits bouts Compagnie Bout d’Ôm de 18 mois à 5 ans mercredi 2, samedi 5 et dimanche 6 décembre 15h Théâtre du Tétard 04 91 47 39 93 XII SPECTACLES LE LENCHE | MÔMAIX Menu de Noël Les minots et marmaille du Panier, et d’ailleurs, seront les bienvenus au théâtre car Le Lenche leur a mitonné un menu de Noël pour cette fin d’année : spectacles de théâtre, danse, musique et séances de cinéma. C’est la fête donc, grâce au Théâtre du Maquis qui présente Une Opérette de salle de bain, petit voyage initiatique dans une baignoire d’un canard en plastique prénommé Archimède. Le hic, c’est qu’il déteste l’eau : alors, comment fera-t-il pour échapper à son destin ? Avec la complicité de Fotokino, le jeune public et leurs familles pourront prendre part à la manifestation Laterna Magica (voir page VI) qui, cette année, évoque le bricolage, le détournement d’objets, le recyclage et autres bidouillages de créateurs… Pour les tout petits, dès 11 mois, la plasticienne et auteur Caroline Tricard raconte comment J’ai marché sur le ciel à partir d’un jeu d’ombres et de transparences : un spectacle sans paroles à découvrir allongé pour mieux perdre pied dans des mondes inversés. Les petits comme les grands retirent leurs chaussures, se lovent par terre, un oreiller au creux de la nuque… Entre ciel et terre, c’est parti ! MARIE GODFRIN-GUIDICELLI

Minots, marmaille & compagnie Une Operette de salle de bain © X-D.R. du 9 décembre au 23 janvier J’ai marché sur le ciel, Cie Anamorphose Une Opérette de salle de bain, Théâtre du Maquis à partir de 11 mois à partir de 6 ans samedi 19 décembre 14h30 et 16h30 au Lenche mercredi 9 et samedi 12 décembre 15h au Lenche Théâtre Le Lenche Laterna Magica 04 91 91 52 22 projection mardi 15 décembre 18h30 au Lacydon www.theatredelenche.info

Zut pour de vrai Quel affreux Jojo ! L’auteur et metteur en scène Joël Jouanneau (voir page 63) n’a pas son pareil pour se mettre dans la peau de ses jeunes héros ! Du coup, il n’a eu aucun mal à se reconnaître dans Jojo, tête à claques imaginée par Joseph Danan qui donne du fil à retordre à sa mère au point de devenir une machine à distribuer torgnoles

et gifles. Tantôt démonteur d’aspira- © Julien Piffaut teur, tantôt fossoyeur d’ours en peluche, Jojo n’en est pas à son premier galop d’essai côté sottises… D’un ton intrépide et burlesque, entre bande dessinée, film muet et cascade de gags, ses petites mésaventures sonnent vrai aux oreilles des petits et En quatre albums seulement (Chan- ger leur credo dans la bonne humeur. des grands. sons pour faire la fête, Zut Zut Zut, Mon Énergie sur vitaminée garantie! M.G.-G. œil ! et Blablabus le tout dernier), Zut a M.G.-G. su conquérir le jeune public friand de Jojo le récidiviste «vrais concerts sur scène». Et de vraies Zut en concert Joël Jouanneau chansons, tendres, drôles ou poétiques à partir de 5 ans à partir de 7 ans qui parlent d’eux et de leur quotidien samedi 28 novembre 17h mardi 8 décembre 19h sur des musiques d’aujourd’hui. Les Théâtre du Jeu de Paume Théâtre du Jeu de Paume Concerts d’Aix, variant le tempo de à l’occasion de Mômaix à l’occasion de Mômaix leurs samedis musicaux, invitent donc 04 42 99 12 00 04 42 99 12 00 les cinq musiciens complices à parta- www.lestheatres.net www.lestheatres.net TOULON | BEAUCAIRE | GYPTIS | MARTIGUES SPECTACLES XIII Week-end festif dans le Var On ne le sait peut-être pas assez, mais les 3e Rencontres artistiques méditerranéennes du Var accueilleront à bras ouverts le jeune public dimanche 29 novembre. En effet, s’appuyant sur le PôleJeunePublic du Revest (voir page VII), le Conseil général du Var lui offre l’occasion de se familiariser avec les nouvelles écritures du spectacle vivant. À l’Hôtel du Département, la compagnie Skappa ! s’adresse aux tout jeunes dès 9 mois avec sa pièce de théâtre Uccelini qui, en 30 minutes chrono, raconte comment l’art est «force vitale et mode de vie». Place ensuite à La Petite Compagnie et son spectacle de cirque contemporain, L’œil du voisin, créé et interprété par Michaël Vessereau : l’histoire de Pelo, perdu dans la ville, qui rêve d’un monde où il serait dresseur d’un caniche mégalomane ou danseur de claquettes génial… Changement de tempo avec Les voilà voilà, duo swinguant formé par Cédric Levaire et Marc Brébion qui «sont à la chanson pour enfants ce que les bougies sont au gâteau». Et changement de décor au Crep des Lices pour terminer la journée en compagnie du jongleur à la pointe de la balle, Jérôme Thomas, et du percus- sionniste Roland Auzet. Une rencontre virtuose en Uccelini © Cie Skappa ! perspective, et d’autres surprises encore dans les 3e Rencontres artistiques rues de Toulon, la veille, animées par une farandole méditerranéennes du Var d’artistes. du 26 novembre au 2 décembre à Toulon MARIE GODFRIN-GUIDICELLI www.var.fr Molière époustouflant

L’amour impossible Bête pour la Belle, le conte traite de la différence, des apparences, de l’amour impossible et des préjugés. Une histoire où s’affrontent la richesse malheureuse Moliere © Carla Kogelman de la Bête et la pauvreté vertueuse de la Belle. Un Dans chacun de ses spectacles, Neville Tranter conte de fées sans fée, surnaturel. manipule des poupées à taille humaine avec un réel M.G.-G. talent d’illusionniste, offrant un théâtre très visuel. Molière ne pouvait que l’inspirer et provoquer chez La Belle et la Bête lui l’envie d’inventer son destin, faisant de la mort de William Mesguich et Charlotte Escamez l’acteur le début de son histoire : par la magie de ses à partir de 6 ans extravagantes poupées, il le rappelle à la vie, évoque le travail de Jean-Baptiste Poquelin, sa course vers Théâtre Gyptis, Marseille l’amour… Pas d’inquiétude, nul besoin de maîtriser la mardi 8 décembre 20h30, langue de Shakespeare pour se laisser porter par le mercredi 9 décembre 14h et 14h15 Stuffed Puppet Theatre. 04 91 11 00 91 M.G.-G

La Belle et la bete © Theatre de l'Etreinte Théâtre du Casino, Beaucaire Molière Pour William Mesguich et Charlotte Escamez, vendredi 11 décembre 20h30 Stuffed Puppet Theatre adapter La Belle et la Bête était comme un rêve à 04 66 59 26 57 spectacle en anglais surtitré en français réaliser. À la lumière du film de Jean Cocteau et de la jeudi 10 décembre 19h30 voix de Jean Marais… Ce rêve, le voici, qui met à Les Salins, Martigues l’honneur la magie et la beauté du conte, et sa 04 42 49 02 000 cruauté aussi. Car derrière l’amour vertigineux de la www.theatre-des-salins.fr XIV SPECTACLES OUEST PROVENCE | NÎMES | ARLES Pas de répit dans l’Ouest-Provence Il n’y a pas une minute à perdre pour faire son choix quand Comment Wang-Fô fut sauvé on habite dans l’Ouest-Provence. Le coup de cœur de Compagnie Mungo l’Espace 233 NN à Istres est un duo pour une comédienne à partir de 8 ans et un dessinateur inspiré d’une nouvelle de Marguerite vendredi 20 novembre 18h30 Duras, Comment Wang-Fô fut sauvé. Sur le plateau, le Espace 233 NN, Istres texte se mêle habilement aux dessins réalisés en direct par Benoît Souverbie et aux marionnettes manipulées avec Avaar (l’Avare) tendresse et légèreté par Isabelle Bach. À Istres toujours, le Théâtre des 4 mains & Théâtre Théâtre de l’Olivier réunit deux musiciens et deux Froe comédiens-bruiteurs pour accompagner la projection du mardi 24 novembre 20h30 célèbre film muet Ali Baba et les quarante voleurs. Une Théâtre de la Colonne, Miramas séance de ciné-concert qui fait revivre la magie du cinéma comme au «bon vieux temps» ! Abeilles, habillez-moi de vous ! Au Théâtre de la Colonne, à Miramas, le Théâtre des 4 Compagnie Pour Ainsi dire mains & Théâtre Froe revisitent l’Avare de Molière avec des à partir de 7 ans marionnettes hideuses et difformes, des musiciens et des mardi 24 novembre 18h30 acteurs manipulateurs. Déluge de gags et énergie assurés… C’est pas pareil ! Mise en scène par Sylviane Fortuny, Abeilles, habillez-moi Compagnie Clandestine de vous ! est la nouvelle création de la compagnie Pour mercredi 9 décembre 10h et 15h ainsi dire. Un texte écrit par Philippe Dorin à la manière d’un Centre culturel Marcel Pagnol, Fos-sur- vieux conte pour parler de pudeur aux enfants, où les fleurs Mer sont cultivées par les fées et où chaque fleur représente la future robe de bal d’une fée. Une création théâtrale à Ali Baba et les quarante voleurs découvrir au Centre culturel Marcel Pagnol à Fos qui Ciné-concert accueillera ensuite le dernier spectacle de la compagnie à partir de 6 ans Clandestine, C’est pas pareil !, dans lequel Ester Bichucher Théâtre de l’Olivier, Istres et Denis Fayollat retrouvent leur matériau de prédilection : le papier découpé. www.scenesetcines.fr MARIE GODFRIN-GUIDICELLI Avaar © Francois De Myttenaere

La maison de Pernette Mélimélodrame Le potager d’Agnès Limbos n’a pas une seule fleur fanée depuis qu’elle l’a bêché en 1987 ! C’est vrai qu’elle en prend soin : sous les traits d’une magicienne farfelue, la comédienne, acrobate, mime et clown aime ouvrir aux enfants Petit pois © Luc d'Haegeleer les grilles de son monde miniature, habité par un petit pois égaré dans les volutes d’un chou-fleur. Petit pois, conçu comme un mélimélodrame en cinq tableaux plus inventifs les uns que les autres, déborde d’imagination et de La Maison © Laurent Abecassis féerie. Il suffit de se laisser envelopper Deux danseurs et un poste de radio des situations pour construire un par la rosée du matin pour y croire. habitent la maison de Pernette (voir «intérieur» étonnant. M.G.-G. page 26). Jusque là, rien d’étrange. M.G.-G. Sauf que les grésillements de la radio Petit pois et ses multiples changements de La Maison Agnès Limbos, compagnie Gare fréquence se répercutent immédia- Compagnie Pernette centrale tement sur les gestes des interprètes, à partir de 5 ans à partir de 5 ans et réciproquement ! Même leurs mercredi 2 décembre 18h30 mercredi 9 décembre 19h gestes les plus élémentaires prennent Théâtre de Nîmes Théâtre d’Arles une dimension surréaliste. Burlesque 04 66 36 65 10 04 90 52 51 51 et rêveur, le ballet chorégraphié par www.theatredenimes.com www.theatre-arles.com Nathalie Pernette joue de la mala- dresse des corps et de l’incongruité MÔMAIX | FOTOKINO | GAP | BRIANÇON | AVIGNON SPECTACLES XV Les bleus à l’âme d’Oliver Twist Sensible au thème de l’enfance maltraitée récurrent dans ses pièces, Josette Baïz a eu envie de recréer avec dix-sept danseurs du Groupe Grenade, âgés de 8 à 13 ans, le parcours d’Oliver Twist. Ce jeune héros du célèbre roman naturaliste de Charles Dickens dont la vie fut jalonnée de petits bonheurs, de drames et de grandes souffrances… Un parcours initiatique qui, pour Josette Baïz, «révèle de manière grandiose tous les bleus de l’âme qui subsistent en chacun de nous»… Cette fable du XIXe siècle, universelle et tou- jours actuelle, devrait toucher le cœur des jeunes d’aujourd’hui grâce au regard de la chorégraphe et à l’enthousiasme de ses jeunes interprètes. La première de cette création de Josette Baïz et du Groupe Grenade sera donnée sur la scène du Grand Théâtre de Pro- vence particulièrement propice au décor épuré d’Oliver Twist et à sa tension dramatique. Un événement. M.G.-G.

Oliver Twist Groupe Grenade à partir de 7 ans vendredi 27 novembre 20h30 Grand Théâtre de Provence à l’occasion de Mômaix 04 42 91 69 69 Oliver Twist © Dominique Drillot www.legrandtheatre.net Promenons-nous ! Et patati et papotage La balade du Petit Chaperon rouge âmes sensibles. Y compris celle de Joël Papotages est une leçon d’anatomie dansée, une invitation à découvrir son corps s’avérant plus dangereuse que prévue, Pommerat qui a décidé d’écrire sa à travers le mouvement et la musique. Tiens, des gazouillis d’oiseaux, un roucou- sa rencontre avec le loup a traumatisé propre version du conte rendant aux lement nocturne, le bruit des vagues ! Étrange ? Non, pas plus que cet air de tango plus d’un jeune lecteur. Heureusement, personnages leur simplicité et leur ou cette chanson de Bob Marley qui font danser Frédérike Unger et Jérôme sa candeur et sa fraîcheur l’ont protégé vérité. Celle du conte, qui parle bien du Ferron. L’un l’autre papotent ensemble naturellement, une jambe par-ci un buste de tous les dangers, et son amour pour danger et du plaisir qu’il y a, pour les par-là. Pas de quoi s’agiter, leurs corps bavards dévoilent toutes les folles histoires sa grand-mère a attendri toutes les filles, à croiser le désir des loups. du monde. Même que parfois ils s’amusent et gigotent en tout sens et qu’ils sont Le Petit Chaperon rouge © X-D.R. M.G.-G. amoureux… M.G.-G. Le Petit Chaperon rouge Joël Pommerat, mes Tiphaine Papotages Anne Piffault Compagnie Étant donné à partir de 8 ans à partir de 7 ans mercredi 16 décembre 14h30 mercredi 9 décembre 19h Théâtre du Chêne noir, Avignon La Passerelle, Gap 04 90 82 40 57 04 92 52 52 52 www.chenenoir.fr samedi 12 décembre 19h Le Cadran, Briançon 04 92 25 52 52 Chine animée Papotages © Cie Etant donne Proposé par Fotokino, le Petit cinéma Cette séance, proposée dans le cadre est le rendez-vous des cinéphiles en de Laterna Magica, sera précédée d’un herbe chaque premier mercredi du mois atelier «Singes de papier» et suivie d’un à 10h au cinéma les Variétés. Le 2 dé- apéro-sirop chinois. cembre, trois courts métrages venus Le film sera rediffusé l’après-midi du 5 de Chine, Attendons demain de Hu décembre et le dimanche 6 en matinée. Xiaonghua, Les Singes vont à la pêche A. G. de Shen Zuwei et Le Petit singe turbu- lent de Hu Jingqing. Trois histoires issues Le Petit cinéma des studios de Shanghai, imaginées à partir de 3 ans dans la tradition de la peinture chinoise 09 50 38 41 68 et du théâtre d’ombres. http://fotokino.org XVI REGARDS CRDP | ENTRE TRADITION ET MODERNITÉ | ALCAZAR Un festival en partage ateliers pour cinq continents» encadrés par les enseignants et assistants de l’école primaire Parc La littérature Bellevue (contes des cinq continents, maquillage al dente Maori, coiffe indienne et coloriage Sioux Lakotas), suivis d’une visite guidée de l’exposition photo- Collodi, Rodari, Calvino…, mais graphique Enfants des cinq continents de Véra Tür. encore ? Pour mieux connaître le Chaque série se concluant par la projection du court paysage de la littérature jeunesse métrage Si le monde était un village de 100 personnes en Italie, rendez-vous jeudi 3 réalisé par Justine Simon avec les enfants du centre décembre à l’Alcazar-BMVR de social Val Plan Bégudes. Samedi 21 novembre, les Marseille pour une journée de ren- enfants découvriront la création théâtrale collective contre, d’information et d’échange. de la compagnie Pachamama, Paroles de jeunes ou le Avec Anselmo Roveda, rédacteur rêve des anciens, puis écouteront Irénée Karfazo de la revue Andersen, qui dressera Domboue et ses Contes du pays des hommes un panorama de la littérature de intègres. Les adolescents ne sont pas en reste avec jeunesse en Italie, Marcia Corraini le documentaire Nikiéma, d’une Rive à l’Autre, projeté et Paolo Cesari qui donneront leurs en présence des enseignants et des élèves du lycée points de vue d’éditeurs, l’auteur René Gosse qui retracent leur voyage au cœur de Silvana Gandolfi et l’illustrateur © M-Line l’Afrique et de la vieillesse… Autant de rencontres Roberto Innocenti qui témoigne- Échanger, questionner, comprendre et s’ouvrir à fertiles en perspective. ront de leur art. l’autre, tel est l’objectif du festival Entre tradition et MARIE GODFRIN-GUIDICELLI M.G.-G. modernité que l’Alternative Positive organise à 04 91 55 91 17 Marseille durant la Semaine de la solidarité interna- Festival Entre tradition et modernité tionale. Un temps de pause -comme une respiration- Association Alternative Positive à vivre en famille car les jeunes citoyens ont leur Collège Izzo et Théâtre la Baleine Qui Dit «Vagues» programme spécifique. D’un côté «Le coin des jusqu’au 22 novembre enfants», mercredi 18 novembre, avec «Quatre www.alternative-positive.org Ressourcez-les ! Le Centre Régional de Documentation éditant 26 de ces 91 publications Pédagogique de Marseille est bien connu nationales, nombre des pièces que l’on des enseignants. Mais ses ressources, peut voir dans la région font l’objet de ouvertes à tous, devraient également dossiers pédagogiques : La Nuit des intéresser les lycéens, et les parents ! rois, Médée, Philoctète, Yaacoubi et La Librairie d’Athènes contient des Leidental, Questo Buio feroce qui ouvrages pédagogiques, mais aussi passent cette saison à La Criée, mais des livres disques, des livres d’art, d’archi, aussi Un tramway nommé désir, ou les des documentaires, des pièces so- Brèves de comptoir qui seront au nores, des dvd de théâtre, des cd Gymnase, Casimir et Caroline aux historiques… un trésor pour qui veut Salins et pour les plus jeunes le Peter offrir, à tous les enfants et ados de son Pan d’Alexis Moati (Gymnase et entourage, un peu d’intelligence et de Istres), Le Bourgeois gentilhomme de culture. À Digne, Gap et Avignon, les Philippe Car (Le Revest, Port-de- librairies des CRDP accueillent égale- Bouc, Aubagne), Abeilles habillez-moi ment le public, et tous les ouvrages de vous de Dorin (Fos, Le Revest, le édités par le réseau des centres péda- Massalia), les Contes de Grimm gogiques (Scérén) y sont disponibles d’Olivier Py (le Gymnase, Les Salins). directement ou sur commande. Pour leur donner des clefs, quand vous Précieux également, pour ceux qui veu- aurez ouvert la porte… lent préparer leurs ados au théâtre : les A.F. dossiers pédagogiques, téléchargea- Pièce (dé)montée bles en totalité ou par parties, aérés, Dossiers pédagogiques illustrés, précis, donnent les infor- www.crdp-aix-marseille.fr mations culturelles nécessaires pour comprendre les spectacles, et bien au- delà : tout ce qui peut être appris d’une œuvre, de son auteur, de ses person- nages, de l’histoire et de l’Histoire qui l’a vu naître est exposé en un dossier épais, érudit, pas toujours franchement attrayant mais à tous les coups abordable. Le CRDP de l’Académie d’Aix Marseille LIVRES XVII Adolescence entravée Le rapport Stein est un étrange livre qui nous plonge le mystère règne et les autres élèves enquêtent. On dans l’Espagne franquiste des années 60. Le nar- découvrira les dessous sombres de la guerre civile rateur, un adolescent d’une quinzaine d’années, d’Espagne et les raisons des voyages du père. Espion- fréquente un collège jésuite à la discipline de fer. Il vit nage, trahison, turpitudes fascistes. depuis 3 ans avec ses grands-parents et reçoit Les phrases très longues, les répétitions et une régulièrement des cartes postales de ses parents, abondance de coordinations font parfois entendre le perpétuellement en voyage. Pas de sorties, peu de texte comme une sorte de litanie : malgré l’âge du distractions, à part les visites hebdomadaires de narrateur, de jeunes lecteurs peuvent avoir des quelques relations et du frère de sa grand-mère. La difficultés pour comprendre les rouages, mais vie est aussi triste que la couleur «plumes de perdrix» l’atmosphère de ces années de plomb nous étreint. des vêtements tricotés main dans les familles, CHRIS BOURGUE l’enseignement des jésuites est insipide et le cours de philosophie consiste surtout à mettre les élèves en Le rapport Stein garde contre les idées de Hegel, le diable ! Et voilà Jose Carlo Llop que survient sur sa belle bicyclette armoiriée le blond Ed. Jacqueline Chambon, 13,80 euros Guillermo Stein aux vêtements colorés. Déchaîne- sélectionné pour le Prix littéraire des lycéens ment de convoitise, de jalousie ! Notre narrateur et des apprentis de PACA ébloui va devenir son ami, rencontrer sa soeur... Mais La vie est un roman La série fantastique de Le Tendre et Biancarelli, Le rêveur dans une réalité encore plus rocambolesque livre des destins, illustre cette formule dans un récit que celle que vivent ses héros de papier. haut en couleurs et en péripéties. Le scénariste Le Le 3e tome, Silverman, complique encore la donne Tendre à qui on doit, entre autres, La Quête de avec la mise en abyme du scénario : 2 histoires l’Oiseau du Temps, dessinée par Loisel, est coutumier menées en parallèle et qui se font écho. De Berlin, de ces histoires à rebondissements multiples et à où Roman, désormais doté de super pouvoirs grâce sauts stupéfiants dans un espace-temps distordu. à sa métamorphose mais cerné d’affreux nazis, Quant à Franck Biancarelli, le dessinateur, qui vit à cherche à récupérer le livre, à New York où 2 jeunes Marseille, il s’est aisément coulé dans son univers auteurs de BD courent après le succès en dessinant pour ce Livre des destins, dont le 3e épisode est paru ses aventures… L’épisode se conclut sur la réplique il y a quelques semaines. sagace de 2 comparses : «la vie de notre petit La BD met en scène un jeune homme au prénom Français est en train de devenir un véritable feuilleton.» prédestiné, fou de récits d’aventures et de person- C’est sans doute ce qui peut arriver de mieux au nages fictifs. Roman Guénodon préfère largement jeune homme, se muer en héros de fiction. Et pas passer sa vie dans les romans d’action que dans une n’importe lequel… mais, chut ! À suivre… réalité qui a de quoi effrayer : l’action débute dans La bande dessinée, artistement mise en scène et Le Livre des Destins les années 30 ; l’élection d’Hitler à la chancellerie du colorisée, est une ode à la littérature d’évasion, aux scénario Le Tendre, dessin Biancarelli Reich est imminente. Dans ce contexte troublé, super héros américains et aux délices de la lecture. t.1 : Le premier pas, t.2 : La métamorphose, Roman se voit proposer un livre magique, qui révèle À conseiller toutefois à de bons lecteurs adolescents, t.3 : Silverman. son futur à celui qui le lit. Cet ouvrage extraordinaire la complexité de l’intrigue risquant de rebuter les plus Ed. Soleil attise les convoitises et c’est le premier pas, point jeunes. de départ d’une série de courses-poursuites et FRED ROBERT d’aventures haletantes qui vont propulser le doux L’apprentissage Il a 45 ans, pour 110 kilos de muscles, et il fait partie plaisir de la lecture, changeant radicalement son de ceux qui sont passés à côté de l’école. Il a, dit-il appréhension du monde ? Humour et poésie se mêlent avec lucidité, «la tête en friche». Germain Chazes se dans un récit vivant et attachant qui s’ancre tota- raconte à la première personne. Pourquoi a-t-il décidé lement dans le quotidien. Un ton d’une remarquable «d’adopter Marguerite» ? Qui est-elle d’ailleurs ? justesse, et une quatrième de couverture qui Comment a-t-il découvert ce «truc nouveau», les dénonce avec humour les «mots à coucher dehors» «obligations familiales» ? C’est ce qu’il explique peu de la critique littéraire. Cette histoire d’une ren- à peu. Car le personnage dont chacun se moque contre avec les mots est si belle qu’elle deviendra un recèle des trésors de sensibilité. En jachère, son film en 2010, réalisé par Jean Becker ! esprit s’éveille progressivement, et ce n’est pas si MARYVONNE COLOMBANI simple : la volonté ne sert pas à grand-chose si les clés ne sont pas données ! La tête en friche La découverte du dictionnaire est magnifique. À quoi Marie-Sabine Roger sert un dictionnaire, par exemple, si l’on ne connaît Ed. du Rouergue (collection La Brune) 16,50 euros pas l’orthographe des mots que l’on cherche ? Qu’est-ce qui va pousser notre illettré à découvrir le XVIII LIVRES COLLECTION TOTHÈME | LIRE ENSEMBLE | TOULON

L’environnement De Shrek Jean-Baptiste de Panafieu 13,90 euros à Hugues Capet Gallimard Jeunesse

Gallimard Jeunesse lance une nouvelle collection industrielle, le Taylorisme, la Ford T, les conséquences de livres documentaires pour jeunes adolescents : dans nos vies de ce véhicule somme toute récent. Il les 9/12 ans sont le cœur de cible, mais étant démonte aussi le marketing, la publicité liés à cette donnée la facture des ouvrages, ils pourront être activité devenue essentielle, donne quelques leçons feuilletés jusqu’à 15 ans… Les quatre premiers de mécanique théorique et appliquée… Et il pourra volumes (L’Environnement, Le Moyen-âge, L’Auto- intéresser les filles comme les garçons, à l’âge de mobile, Les Religions) choisissent des thèmes qui leur cloisonnement selon des centres d’intérêt qui parlent aux ados, pour les séduire, puis les amener à sont censés définir leur identité sexuelle. Les religions changer leur approche de ces domaines familiers. Le volume sur les religions, même s’il s’en tient aux Sandrine Mirza Cela s’appelle donc Tothème, jeu de mots qui dit monothéismes (dommage pour les 800 000 boud- 13,90 euros bien l’esprit de la collection, ludique et transversale : dhistes français) donnera également à tous les ados Gallimard Jeunesse il s’agit de partir des représentations des jeunes, une vision globale de ce qui les lie et les différencie glanées ça et là sur les écrans et dans les fictions, dans leurs pratiques et leurs croyances. En s’atta- pour les amener vers une connaissance réelle, qui chant à des personnages clefs, des événements fasse le lien entre leur culture, le livre et l’école. historiques, mais aussi des rites, des traditions et Attractifs sans être racoleurs, les livres sont rec- interdits alimentaires, des lieux de culte, ce volume tomber dans les caricatures rose et bleue sur les tangulaires mais arrondis aux angles, ajourés, aérés, permet à tous les ados, y compris les athées, d’entrer poneys, les tutus, le maquillage, les super héros ou le équipés de rabats pratiques, et illustrés d’une icono- dans la culture de l’autre, et de mieux connaître la sport. Même si le prochain volume sera consacré au graphie parfois savante et documentaire, parfois leur, en empruntant la voie qu’ils ont choisie : les football, il y a peu de chances que l’approche en soit fantaisiste et créative : de Shrek aux enluminures mé- renvois d’une rubrique à l’autre sont constants, et simplificatrice ! diévales, avec juste ce qu’il faut pour faire comprendre chacun peut y construire un parcours de lecture AGNES FRESCHEL le Moyen Âge à des enfants curieux. actif… Le livre sur l’automobile, par exemple, décline en 60 Cette collection vient donc à point nommé permettre Collection Tothème parties le nom des champions, des marques et des d’offrir à tous les enfants qui n’aiment lire que sur Gallimard Jeunesse circuits, mais s’attache surtout à aborder l’histoire Internet le moyen d’entrer dans des livres… sans Lire gourmand À la Fête du Livre de Toulon, les (Gallimard jeunesse), Chasseur d’orages l’Hôtel des arts organise des «ateliers «Soif de lire», jeunes eux aussi ont «soif de lire !». Pour d’Elise Fontenaille (Le Rouergue jeunes- enfants et familles» autour des arts de 13e Fête du Livre de Toulon preu-ves les nombreux rendez-vous qui se) et À la poursuite de l’Olgoî-Khorkhoï la table (le potager idéal, le repas de 20, 21 et 22 novembre ponctuent le week-end, entre dédica- d’Alexandre Moix (Plon jeunesse). familial…) tandis que les associations www.var.fr ces-rencontres, contes, marionnettes Samedi 21 et dimanche 22 novembre, Équinoxe et Écrit Plume proposent des et animations ludiques. Démarrage en le jeune public pourra assister aux ateliers d’écriture sur le thème «La sen- fanfare vendredi 20 novembre à 14h30 concerts de Robinson et Abel, aux sibilité culinaire au service d’autres avec la remise du Prix des collégiens spectacles Les secrets de la B.D. par nourritures». attribué à l’un des romans de littéra- Alain Ayme, écouter le conte Taptap le MARIE GODFRIN-GUIDICELLI ture jeunesse sélectionnés : Le chagrin loup par Leila Derwiche et les Contes du roi mort de Jean-Claude Mourlevat dits du bout des doigts. À quelques pas,

Le masque et les plumes ! Une bouteille à la mer est le thème du nouveau concours de nouvelles Lire adultes sont aussi concernés par cet espace d’expression libre à condition qu’ils Ensemble 2010 organisé pour les jeunes par Agglopole Provence et les laissent courir leur imagination autour du thème Voyageurs en Méditerranée. bibliothécaires des dix-sept communes concernées. Cette cinquième édition Enfin, pour la première fois, Lire Ensemble propose aux enseignants des écoles se déroulera du 16 au 30 avril 2010, mais les écrivains en herbe peuvent d’ores primaires et des grandes sections de maternelles qui le souhaitent d’écrire avec et déjà plancher sur leurs manuscrits, peaufiner leur prose avant la dernière leurs élèves un texte court sur des cartes postales réalisées à partir de matériau ligne droite. Ou plutôt la dernière vague car les collégiens et les lycéens sont de récupération. Cartes postales, bouteilles à la mer, Grande Bleue : quoi de plus invités à envoyer leur texte dans une bouteille en plastique «customisée» à leur romanesque ? goût ! Une manière de faire d’une pierre trois ricochets : plaisir de la lecture, MARIE GODFRIN-GUIDICELLI découverte des «affres» de l’écriture et éducation citoyenne. En effet, Agglopole Provence lance simultanément une grande campagne de sensibilisation sur le Lire Ensemble 2010 recyclage des déchets et, notamment, des bouteilles et flacons en plastique… Date limite d’envoi des textes : 15 mars 2010 Lire Ensemble ayant pour objectif «d’encourager la pratique de la lecture et de www.agglopole-provence.fr l’écriture et la fréquentation des bibliothèques, librairies, lieux culturels divers», les