Bori, R(R)Omni Et Faraoance Genre Et Ethnicité Chez Les Roms Dans Trois Villages De Roumanie
Total Page:16
File Type:pdf, Size:1020Kb
Bori, r(R)omni et Faraoance Genre et ethnicité chez les Roms dans trois villages de Roumanie Thèse présentée à la Faculté des lettres et sciences humaines, Institut d'ethnologie Université de Neuchâtel Pour l’obtention du grade de docteur ès lettres Par Iulia Ha şdeu Acceptée sur proposition du jury : Prof. Ellen Hertz, Université de Neuchâtel, directrice de thèse Dr. Rose-Marie Lagrave, EHESS Paris, rapportrice Prof. Vintil ă Mih ăilescu, SNSPA Bucarest, rapporteur Prof. Alain Reyniers, Université Catholique de Louvain, rapporteuur Dr. Michael Stewart, University College London, rapporteur Soutenue le 22 juin 2007 Université de Neuchâtel 2007 Mots clés en français : conjugalité, complémentarité des tâches masculines et féminines, souillure, vêtements (costume), représentations de l'Autre, processus de catégorisation ethnique. Mots clés en anglais : conjugality, sexual division of labor, pollution, clothing, representation of the Other, ethnical categorisation. Résumé: Cette thèse explore l’interrogation suivante : qu’est-ce que le genre dans le terrain anthropologique circonscrit ici, à savoir celui des Roms/Tsiganes dans trois villages de Roumanie ? L’auteure y adopte une définition constructiviste du genre, entendu comme un rapport de forces relationnelles. Elle décrit la manière dont la frontière interethnique et le système de genre chez ces Roms créent "les Roms" comme groupe distinct, comme communauté, tout en concevant les hommes et les femmes comme membres ayant des statuts différents. L’ethnographie des institutions montre d’emblée une relation complexe et instrumentalisée politiquement par les Gadje (non-Roms) dominant-e-s dans le sens d’une stigmatisation des Roms/Tsiganes. De leur côté, les Roms/Tsiganes tentent d’échapper au contrôle gadje par des stratégies spécifiques. Ce tandem est constitutif de la vision rom du monde. Les Roms et les Gadje sont proches spatialement, mais éloigné-e-s les un-e-s des autres par toute une série de pratiques institutionnalisées et performées avec une inépuisable conviction quant à l’existence d’une différence objective entre les un-e-s et les autres. En même temps, dans le contexte postcommuniste de la Roumanie, les un-e-s et les autres adoptent un même modèle de réussite sociale qui est celui du patron. Pour certain-e-s Roms enrichi-e-s grâce à l’essor du commerce de l’aluminium de récupération, devenir effectivement patron est une modalité de renversement de la domination des Gadje. La thèse met l’accent sur la façon particulière dont les Roms/Tsiganes placent la conjugalité et l’hétérosexualité au cœur de leur pensée et de leurs actions. C’est principalement dans la dynamique et la dialectique de la bori (épouse, bru) et de la romni (femme mariée) que se joue, parfois de manière très violente, le contrôle et/ou l’autonomie des femmes : chez les Roms, on se bat pour avoir une bori et pour être une romni. En même temps, Rom et Romni , homme et respectivement femme marié-e, sont des appellatifs ethniques : nous avons affaire à une communauté d’individus mariés car on ne naît pas Rom, on le devient une fois marié-e, à savoir au premier rapport sexuel. La dualité homme-femme recoupe celle du pur-impur, que ce soit dans l’importance accordée au mariage et à sa défaite (un trafic généralisé des femmes), ou dans les pratiques concernant la pollution où l’on performe une séparation symbolique du haut (bouche) et du bas (sexe) du corps, renvoyant systématiquement, comme dans un système de fractales, à la dualité du monde : rom et gadje. La jupe, vêtement ouvert porté obligatoirement par les femmes mariées et revêtu rituellement lors de la cérémonie de mariage, est un élément matériel crucial qui structure les relations sociales dans le village, dans la famille, entre femmes, entre femmes et hommes. Les jupes propagent la pollution sexuelle contenue dans le sexe ouvert des femmes, tout en protégeant de cette même pollution. Les Faraoance sont des sirènes peintes sur les mûrs, les charrettes, les portes. Ces représentations rappellent les femmes habillées en jupes avec un bas du corps caché car impur. Les femmes et la féminité sont alors centrales pour se représenter le monde divisé en deux. Les Gadje, à leur tour, utilisent l’image de la féminité tsigane pour se représenter cet Autre, "étranger de l’intérieur", comme on le voit dans les expositions ethnographiques, dans la littérature et le cinéma. La représentation gadje de la féminité rom fait également une place centrale aux jupes. Les conditions de la production des données anthropologiques sont amplement décrites par l’auteure. Elle leur accorde de l’importance dans une réflexion qui porte sur la rencontre non seulement cognitive, mais aussi émotionnelle avec l’Autre, rencontre faite de peurs, de gaffes, de renoncements, de frustrations. Au niveau théorique, la thèse explore les débats contemporains concernant l’ethnicité et la culture, en montrant la nécessité de considérer le genre dans ce cadre. À ma mère Remerciements Je tiens à exprimer ma gratitude à Ellen Hertz pour l’accomplissement de ce travail. Elle a accepté de le diriger avant même d’en avoir la direction officielle, elle m’a soutenue et encouragée quand j’étais sur le terrain et elle a su m’accompagner lors de son écriture. Son apport intellectuel est inestimable. Je souhaite remercier Rose-Marie Lagrave, Vintil ă Mih ăilescu, Alain Reyniers et Michael Stewart pour leurs précieux conseils et critiques apportés lors du "petit colloque" qui a précédé l’élaboration de cette version du texte. Je les remercie d’avoir accepté d’être membres du jury de cette thèse. Je remercie tout particulièrement Vintil ă Mih ăilescu, qui m’a donné le goût de l’anthropologie et qui m’a initié à la pratique du terrain. Sans la rencontre avec lui il y a quinze ans, mon parcours aurait été radicalement différent. Je suis reconnaissante à Michael Stewart de l’apport qu’a constitué le livre qu’il a écrit sur les Roms. Je lui suis également reconnaissante de m’avoir offert en 1999 et 2003 l’opportunité de connaître la littérature et les problématiques de ce sujet lors des programmes d’Université d’été de la CEU de Budapest qu’il a dirigé. Je remercie Henriette Asséo de m’avoir accueillie avec intérêt et plein de bons conseils au séminaire sur l’histoire des minorités migrantes en Europe qu’elle animait à l’EHESS - Paris en 2004-2005. Ce travail n’aurait pas touché à sa fin sans le support logistique, financier et moral des Etudes genre de l’Université de Genève où j’ai travaillé comme assistante. Josette Coenen-Huther est l’actrice principale de ce support et je l’en remercie vivement. Je remercie Lorena Parini, Anne Françoise Praz et Gabriela Coman pour leurs lectures et parfois relectures assidues de différentes parties du texte. Leurs critiques et leurs encouragements m’ont aidé à avancer même quand cela paraissait difficile. 2 Je tiens à remercier celles qui ont déployé du temps et de l’énergie pour corriger mes maladresses linguistiques en tant que non-francophone : Caroline Hirt, Stéphanie Mahieu et Rodica Negre. En anthropologues, elles ont fait également des lectures de contenu très pertinentes et utiles pour l’amélioration du texte. Je remercie Open Society Institute de Budapest pour son soutien financier en 2001. Je remercie mes ami-e-s suisses et roumain-e-s qui ont été à mes côtés et m’ont apporté une aide morale mais aussi très concrète et pragmatique parfois: Christiane Antoniades, Agnes Földhàzi, Thierry Sartoretti, Miroslav Ta şcu-Stavre, Adriana Oprescu, Didier Baudewyns, Sylvain Thévoz, Anne Lavanchy, Elvita Alvarez, Christian Schiess, Jacques Nicola, Denise Wenger, Alex Groza, Liviu Poenaru. Je tiens à remercier Silvia ainsi que tous et toutes les Roms et Gadje qui ont accepté d’être ethnographié-e-s dans ce travail. Je remercie Saša, mon mari, pour m’avoir toujours envoyé des messages clairs et positifs quand j’avais des doutes, mais aussi pour avoir supporté mes états d’esprit changeants pendant l’écriture de cette thèse. Enfin, et surtout, je remercie Dušan Simion, d’avoir été un fœtus patient et calme tout en me poussant à me dépêcher dans mon travail intellectuel pour pouvoir l’accueillir au monde. A toutes et à tous nais tuke, t’aven bahtale ! 3 Table des matières Introduction : 7 1. Les Tsiganes "bon-ne-s à penser"? 7 2. Genèse de la recherche 9 3. Objet de la recherche, concepts et problématique 11 Le genre 11 L’ethnicité 19 Problématique 24 4. Organisation du texte 26 5. Objectifs et limites de la recherche 27 6. Précisions formelles: vocabulaire, style, orthographe 28 Chapitre 1 : Aspects méthodologiques et cadrage du terrain 31 1.1. L'arrivée chez les Roms et les premières interactions 31 1.2. Le déroulement du travail de terrain 34 1.3. Une herméneutique selon le paradigme "indiciaire". Recherche de la 47 "bonne" interprétation 1.4. Si près et si loin. Roms et Gadje dans une petite région de plaine 49 Chapitre 2 : Tsiganes, Roms, Kăld ărari , Zl ătari . Sens et enjeux des catégorisations 59 2.1. Unité dans la diversité 60 2.2. Tsiganes, Roms et le critère de la langue 64 2.3. Histoire européenne des groupes tsiganes 66 2.4. Les Roms/Tsiganes en Roumanie 72 4 2.5. Roms nomades, K ăld ărari, Corturari 85 2.6. Comment les catégories sont pensées et utilisées au niveau local 87 2.6.1. Zl ătari . Une étiquette mystérieuse 87 2.6.2. Les données sur les Roms d'une mairie 90 2.6.3. Le dispensaire médical et l’école 98 2.6.4. Catégorisation et identification dans le travail de la police 99 2 7.