Alessandro Blasetti, 1956
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Université Inter-âge | Cycle Cinéma italien | Séance du 05/11/2018 / Cyrielle VINCENT ([email protected]) La Chance d’être femme, Alessandro Blasetti, 1956 Générique technique Générique artistique Réalisation : Alessandro Blasetti Sophia Loren : Antonietta Fallari Scénario : Alessandro Blasetti, Suso Cecchi Marcello Mastroianni : Corrado Betti D’Amico, Ennio Flaiano Charles Boyer : Conte Gregorio Sennetti Production : Gianni Hecht Lucari (producteur Elisa Cegani : Elena Sennetti exécutif), Documento Film (Rome), Le Louvre film (Paris) Nino Besozzi : Paolo Magnano Distribution : Lux Film Titina De Filippo : La mère d’Antonietta Musique : Alessandro Cicognini Giustino Durano : Federico Frotta Photographie : Otello Martelli Margherita Bagni : Mirella Fontanisi, la styliste Montage : Mario Serandrei Memmo Carotenuto : Gustavo Ippoliti, le boucher Direction artistique : Dario Cecchi Autres acteurs : Anna Carena, Piero Carnabu- Costume : Orietta Nasali Rocca ci, Nino Dal Fabbro et Guido Riccioli Pays de production : Italie / France Sortie le 2 février 1956 Noir et Blanc / Durée : 100 minutes Genre : Comédie Dans ce dossier, les images n’ayant pas de légende sont extraites du film La Chance d’être femme d’Alessandro Blasetti. 1 Université Inter-âge | Cycle Cinéma italien | Séance du 05/11/2018 / Cyrielle VINCENT ([email protected]) Alessandro Blasetti (Rome 1900-1987) Dans les ouvrages spécialisés, Alessan- Alessandro Blasetti est né dans une famille dro Blasetti est souvent décrit comme le « pa- favorisant sa vocation artistique. Son père était tron » du cinéma italien. Pendant trente ans, il a musicien, son grand-père sculpteur. Il bénéficie dominé le cinéma italien des débuts du parlant d’une éducation rigoureuse en passant sa sco- jusqu’à l’aube des années soixante. Acteur es- larité à l’institut religieux des pères Somasques. sentiel de cette industrie, il a innové à plusieurs Il effectue son école militaire à Rome puis étudie reprises. en droit à l’université de Rome sous l’impulsion C’est à lui que l’on doit le premier film sonore de sa mère, héritière d’une famille rejoignant italien avec Resurrectio (ce ne fut cependant traditionnellement les avocats de la Curie. Un pas le premier film sonore distribué en Italie. Ce temps employé de banque, il découvre avec fut La Canzone dell amore de Righelli, produit lui beaucoup plus de passion le journalisme en aussi par la Cinès qui fit probablement ce choix collaborant avec le quotidien L’Impero. Il y in- dans un but commercial). On lui doit également augure en 1925 la première rubrique cinémato- le premier film en couleur italien avec son court graphique d’un journal italien. En 1926, il fonde métrage Caccia alla volpe nella campagna rosa Lo Schermo qui deviendra, deux ans plus tard, (1938) et le premier film à sketches italien avec la revue Cinematografo. Il crée également Lo Heureuse époque (1952). En plus de ces inno- Spettacolo d’Italia, un hebdomadaire sur le ciné- vations techniques, Blasetti est un acteur impor- ma à plus large diffusion. Aux cotés de ses com- tant du septième art avec ses audaces néoréal- parses, il se bat pour assurer la renaissance du istes avant l’heure (Sole, 1929 ; 1860, 1934) et cinéma italien qui, dans les années vingt, est son filmQuatre pas dans les nuages (1942) qui au plus mal, étouffé par ses quelques drames l’impose comme l’un des précurseurs de cette mondains convenus et ses divas trop chères. mouvance. Afin de relever le cinéma national, Alessan- Au fil des années, Alessandro Blasetti a su dro Blasetti lance un appel auprès des lecteurs développer une technique sûre, raffinée, spec- du Cinematografo afin d’obtenir un soutien fi- taculaire tout en s’adaptant à différents registres. nancier. La technique fonctionne et Blasetti Son efficacité lui vaut souvent d’être comparé bénéficie également d’un fort soutien politique aux professionnels des studios hollywoodiens. (Bottai, alors ministre de la corporation, prend Néanmoins, sa notoriété s’est quelque peu à titre personnel des actions pour une valeur estompée au fil des ans, il fut masqué par les de cent lires), cet appel étant lancé au nom chefs d’œuvres néoréalistes d’après-guerre et de « l’esprit italien fasciste ». Avec ces fonds, sûrement un peu mis de coté de par sa com- il fonde L’Augustus, une société de production plaisance avec le régime fasciste des années qui lui permettra de réaliser son premier long trente. métrage Sole (1929). Alessandro Blasetti derrière la caméra sur le tournage D’une Aventure de Salvator Rosa (1939) 2 Université Inter-âge | Cycle Cinéma italien | Séance du 05/11/2018 / Cyrielle VINCENT ([email protected]) Sole (1929) Le traitement détonne pour l’époque avec Film estropié, il ne reste de Sole que la son style parfois documentaire. L’influence du première bobine et les négatifs des photogra- cinéma russe y est évidente. Blasetti relate avec phies de tournage. Perdu après la vente de L’Au- réalisme le labeur des hommes face à une terre gustus, certains bouts du film furent récupérés ingrate. L’avant première a lieu le 16 juin 1929 au fil des années. Le peu d’image accessible au cinéma Corso de Rome. Les critiques sont pour le moment nous permet tout de même de élogieuses : « Le cinéma italien ressuscité », nous rendre compte de la force de ce film, à « digne des américains », « Véritable renais- dix milles lieux du maniérisme qui avait coulé le sance du cinéma italien ». cinéma italien dans les années vingt. Guido Aristarco, auteur en 1970 d’une étude Afin de mener à bien ce projet de film, Ales- sur le cinéma fasciste, n’est pas tendre avec sandro Blasetti s’entoure de jeunes collabora- cette première veine de Blasetti qui s’exprime teurs comme Aldo Vergano pour le sujet/scénar- également dans Le Rappel de la terre et Resur- io et Goffredo Alessandrini en tant qu’assistant rectio sortis tous deux en 1931. Il y voit égale- réalisateur. Blasetti, qui souhaitait d’abord faire ment les manières du cinéma soviétique avec un film spectaculaire, s’est finalement orienté ses acteurs non-professionnels, ses gros plans vers un sujet plus minimaliste. L’histoire est sur les visages et ses montages des attrac- dans la ligne droite de la politique agricole de tions. Seulement, pour lui, cela sonne creux. Il Mussolini à l’époque mais s’en détache grâce à n’y perçoit qu’un régime politique mimant le dis- son lyrisme et son traitement épique novateur. cours de la révolution pour mieux maintenir un On y relate l’asséchement des marais Pontins, statut quo économique, politique et social (on la lutte contre la malaria, la mise en culture de se souvient de la célèbre phrase du Guépard de nouvelles terres. Les conditions de tournage Lampedusa « Pour que tout reste comme avant sont rudes, l’équipe tourne en extérieur dans il faut que tout change ». les marais. Le tournage s’effectue aussi dans Malgré un échec commercial, Blasetti reçoit un petit studio équipé d’éclairages importés la reconnaissance des professionnels. Alors d’Allemagne. que la Cinès amorce son redressement, Ales- sandro Blasetti devient l’un des cinéastes les plus prolifiques de cette époque. Photogramme de Sole (1929) 3 Université Inter-âge | Cycle Cinéma italien | Séance du 05/11/2018 / Cyrielle VINCENT ([email protected]) Vieille Garde (1935) et 1860 (1934) la seule et meilleure alternative possible pour Dans les années trente, Alessandro Blaset- l’Italie. La tonalité du film oscille entre la farce ti ne cache pas son enthousiasme pour le fas- et l’effroi. L’un des personnages, un gros fort à cisme et il est même l’un des rares cinéastes à bras, nous rappelle Maciste de Maciste Alpino tourner ouvertement des films propagandistes. (1918). Malgré l’enthousiasme de la presse ce Proche du scénario du film allemand d’Hans film est loin d’être le meilleur de Blasetti. Il est Steinhoff,Le jeune hitlérien Quex (1933), Vieille principalement évoqué aujourd’hui par les histo- garde dépeint l’agitation régnant en Italie une riens du fascisme qui peinent à trouver, dans le semaine avant la prise de pouvoir de Musso- septième art, des traces de propagande. lini en 1922. Film fasciste commémoratif, Vie- Avec le temps, Blasetti s’est défendu d’avoir ille garde suit les tourments d’un chef de famille réalisé un film propagandiste. Il dira d’ailleurs médecin en hôpital psychiatrique, de son fils avoir quitté le parti fasciste lorsque Musso- aîné qui rejoint les squadristes ainsi que de son lini déclara la guerre à l’Éthiopie. Blasetti s’est fils cadet, encore enfant mais totalement inves- toujours dépeint comme un pacifiste opposé à ti dans cette lutte politique. Ce dernier recevra la violence et à la guerre. C’est, selon lui, le fil une balle lors d’une lutte entre des ouvriers et conducteur de tous ses films. Il voit dans Vieille les chemises noires. Érigé en martyr, son triste Garde un « film bourgeois, pacifiste et crépus- sort finira de convaincre les indécis qui, tous en- culaire fait pour favoriser le rapprochement en- semble, marcheront vers Rome. tre les classes et qui se clôt sur la réconciliation Ce film frappe aujourd’hui par sa franchise. des adversaires. ». Le réalisateur dément aussi On y voit les expéditions punitives des squad- toute critique du socialisme, il explique critiquer ristes, leur gourdin et l’utilisation de l’huile de la démagogie syndicale et l’impossibilité de ricin afin d’humilier l’ennemi. Néanmoins ces vi- faire cesser les grèves endommageant le corps olences sont excusées par le film qui tourne ça national. Malgré ses explications, on peut lire à en légitime défense. Le pays part à vau l’eau, ni la fin du générique de Vieille garde « Ce film la police ni l’état n’interviennent pour faire cess- entend exalter tout le squadrisme d’Italie ».