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Article de synthèse

La mangue en Afrique de l’Ouest francophone : variétés et composition variétale des vergers

Jean-Yves REYa*, Thierno Mamadou DIALLOb, Henri VANNIÈREa, Christian DIDIERa, Sidiki KÉITAc, Morodjan SANGARÉc

a Cirad, département Flhor, The in French-speaking West Africa: varieties and varietal TA 50/PS4, Bd de la Lironde, composition of the orchards. 34398 Montpellier Cedex 5, Abstract –– Introduction. The mango tree is one of the most widespread fruit trees in West France Africa. A history of its introduction into that area was recently published. To follow upon this [email protected] document, the presented analysis was devoted to the principal varieties that are cultivated there b IER, URG, BP 30, Bamako, today and to the impact of the historical and commercial factors on the varietal composition of Mali the orchards. Some definitions. In precondition to an inventory of the varieties, certain terms making it possible to characterise them were specified (precocity, monoembryony and poly- c Irag, CRA Bordo, BP 352 embryony) and some information on the origin of the Floridian varieties was provided. Principal Kankan, Guinée varieties cultivated in West Africa. Four mango variety categories were distinguished: varieties of local or polyembryonic (mangots and Number One), first monoembryonic varieties propagated by grafting (Amélie, , Sabot, Djibelor and Cuisse Madame), and the Floridian varieties, also monoembryonic and propagated by grafting, introduced later and used either for export (, , , , Valencia, Smith, and ), or for the regional markets (, Davis-Haden, Late, , , and ). Each variety was described, like its farming characteristics and its outlets. The composition of the grafted mango tree orchards. This composition is influenced by the historical evolution and the pur- pose of the fruits that can be eaten, sold on the local, national or subregional market, exported toward the international market or processed in artisanal or industrial units. This orchard com- position was specified for Guinea, Mali, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Senegal and Togo. Francophone Africa / indica / introduced varieties / agronomic characters / precocity / fruits / phenotypes

La mangue en Afrique de l’Ouest francophone : variétés et composition variétale des vergers. Résumé — Introduction. Le manguier est l’un des arbres fruitiers les plus répandus en Afrique de l’Ouest. Un historique de son introduction dans la zone a été publié récemment. Pour faire suite à ce document, l’analyse présentée a été consacrée aux principales variétés qui y sont cul- tivées aujourd’hui et à l’impact des facteurs historiques et commerciaux sur la composition varié- tale des vergers. Quelques définitions. En préalable à un inventaire des variétés, certains termes permettant de les caractériser ont été précisés (précocité, monoembryonie et polyem- bryonie) et quelques informations sur l’origine des variétés floridiennes ont été fournies. Les principales variétés cultivées en Afrique de l’Ouest. Quatre catégories ont été distinguées : les variétés de mangues locales ou polyembryonnées (mangots, mangue du Cameroun), les pre- * Correspondance et tirés à part mières variétés monoembryonnées propagées par greffage (Amélie, Julie, Sabot, Djibelor, Cuisse Madame), les variétés floridiennes, également monoembryonnées et propagées par greffage, introduites plus tardivement et utilisées soit pour l’exportation (Kent, Keitt, Palmer, Zill, Valencia, Reçu le 16 avril 2004 Smith, Irwin, Haden), soit pour les marchés régionaux (Brooks, Davis-Haden, Miami Late, Sprin- Accepté le 24 mai 2004 gfels, Beverly, Eldon, Ruby). Chaque variété a été décrite, de même ses caractéristiques culturales et ses débouchés. La composition des vergers de manguiers greffés. La composition des vergers greffés est influencée par l’évolution historique et la destination des fruits qui peuvent Fruits, 2004, vol. 59, p. 191–208 être autoconsommés, vendus sur le marché local, national ou sous-régional, exportés sur le mar- © 2004 Cirad/EDP Sciences ché international ou transformés dans des unités artisanales ou industrielles. Cette composition All rights reserved a été précisée pour la Guinée, le Mali, le Burkina-Faso, la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Togo. DOI: 10.1051/fruits:2004018 Afrique francophone / / variété introduite / caractère RESUMEN ESPAÑOL, p. 208 agronomique / précocité / fruits / phénotype

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1. Introduction 2. Quelques définitions

Selon l’historique déjà publié retraçant la 2.1. La précocité diffusion des manguiers en Afrique de l’Ouest [1], les premiers manguiers plantés Le terme « précoce », appliqué aux espèces dans cette zone ont été les mangots à fruits fruitières, peut avoir plusieurs sens. Il peut fibreux, polyembryonnés. Introduits au cours qualifier soit un arbre qui fructifie rapide- e du XIX siècle, ils ont connu un fort déve- ment après sa plantation, soit une variété loppement durant la seconde moitié de ce (ou espèce) apte à produire ses fruits avant siècle. Les variétés monoembryonnées gref- les autres, au cours de la saison. Dans notre fées ont été implantées après 1890. Dans un présentation, nous avons utilisé les termes premier temps, seules Amélie et, à un degré « précoce, précocité » (et leurs antonymes bien moindre, Divine et Julie ont été diffu- « tardif, tardiveté ») dans ce dernier sens, en sées de manière notable. Ce n’est qu’à partir réservant l’expression « mise à fruit rapide » de 1960 et plus encore après 1980 que les pour l’arbre qui fructifie jeune. variétés floridiennes, introduites en 1949 sur Dans les zones de savanes sèches, lieu de la station de Foulaya, près de Kindia, en production des mangues d’exportation, il Guinée, ont connu un fort développement existe un gradient des périodes de fructifi- en Afrique de l’Ouest. cation. Les zones les plus précoces sont situées au sud de Korhogo (Dikodougou, L’étude de l’évolution des exportations Tafiré) en Côte d’Ivoire et les plus tardives intercontinentales [1] a montré qu’elles avaient sont localisées plus au nord et, dans une débuté à la fin des années 1960. Dominées moindre mesure, vers l’ouest. Ainsi, les man- de 1970 à 1990 par le Mali alors suivi du Bur- gues des Niayes du Sénégal ou celles des kina Faso, elles ont été ensuite principale- zones les plus septentrionales (basse vallée ment alimentées par la Côte d’Ivoire qui, du Sénégal) sont les plus tardives. Cette évo- avec le développement des expéditions lution est due essentiellement à l’allonge- maritimes, a connu une forte hausse de ses ment de la période froide. exportations pendant la décennie suivante. Plus récemment, le Sénégal a également Par ailleurs, la récolte des premiers fruits beaucoup augmenté ses envois. ne doit pas être confondue avec la pointe de production de la variété au sein d’une Au cours de ces périodes, la variété Amé- même zone. En ville, les arbres plantés dans lie a composé l’essentiel des premières expor- les cours d’habitation subissent de nom- tations. Par la suite, elle a été largement rem- breuses agressions (ligatures par des câbles, placée par les variétés floridiennes (Kent, écorçage, coups de machettes, enfoncement Keitt, Palmer, Valencia, etc.) [1]. de pointes) et sont régulièrement enfumés lors de la préparation des repas sur les feux L’étude présentée fait suite à l’historique de bois. Or, l’enfumage est une technique rapidement évoqué précédemment. Elle utilisée en Asie pour déclencher la floraison s’est intéressée aux principales variétés de des arbres [2]. Cela pourrait expliquer que manguiers cultivées en Afrique de l’Ouest et les vieux manguiers implantés en milieu à l’impact des facteurs historiques et com- urbain portent plus de fruits hors saison que merciaux sur la composition variétale des les arbres jeunes des vergers ruraux et que vergers. Certaines notions comme la préco- de petites productions d’Amélie apparais- cité, la mono et la polyembryonie, et quel- sent à Bamako dès le mois de février alors ques informations sur l’origine des variétés que la pointe de production de cette variété floridiennes, qui, avec Amélie, composent la se situe en avril–mai. Pour plus de cohé- quasi-totalité du verger greffé ouest-africain, rence, dans la suite de notre document, la ont été précisées en préalable pour une date de production de la variété sera définie meilleure compréhension de l’ensemble. en fonction de la pointe de récolte.

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Au sein d’une zone déterminée, la période le pourcentage de noyaux contenant des de production d’une variété dépend des embryons zygotiques est de 20 % pour Tur- conditions particulières de la parcelle : micro- pentine et de 22 % pour la variété 13-1, tan- climat, sol, antécédents de l’arbre, etc. Sur dis qu’il tombe à 13 % pour Turpentine si la station de recherche fruitière du Centre ces deux cultivars sont placés en cage d’iso- national de recherche agronomique (CNRA) lement [3]. Certaines variétés, comme Cara- de Korhogo au nord de la Côte d’Ivoire, bao, et Cambodiana, ne posséderaient étendue sur 40 ha, la production entre par- que des embryons nucellaires [4]. celles d’une même variété peut être décalée Généralement, les variétés polyembryon- de près d’un mois. nées sont plus productives. La persistance des embryons nucellaires favorise la nouai- 2.2. La monoembryonie son [5]. À l’inverse, chez les variétés monoem- et la polyembryonie bryonnées, il est rare que des fruits parthé- nocarpiques se développent à la suite de l’avortement de l’embryon zygotique. Plus Les embryons zygotiques (sexués) provien- les conditions de milieu sont difficiles pen- nent d’une fécondation : le gamète femelle, dant la période de floraison, plus les variétés ou oosphère, à n chromosomes, est fécondé polyembryonnées sont avantagées par rap- par le gamète mâle, ou noyau spermatique port aux variétés monoembryonnées. C’est (n chromosomes). À l’issue de cette fécon- le cas dans les zones de savanes sèches, où dation, l’œuf ou zygote possède 2 × n chro- la basse hygrométrie de la saison d’harmat- mosomes. Chez les plantes hétérozygotes tan ne favorise pas toujours une bonne pol- (non fixées), l’embryon, issu de recombinai- linisation. sons génétiques lors du processus de méiose et de fécondation, a un génome différent de celui de la mère et de ses frères et sœurs. 2.3. L'origine génétique des variétés À l’opposé, les embryons apogamiques floridiennes proviennent de cellules somatiques diploï- des (à 2n chromosomes), le plus souvent Les manguiers considérés comme originai- originaires du nucelle de l’ovule, d’où leur res de la région indo-birmane [1] auraient dénomination d’ « embryons nucellaires ». été diffusés dans deux directions : vers la Étant issus de la multiplication d’une telle Malaisie et l’Asie du Sud-Est, en donnant des cellule somatique n’ayant subi aucun pro- variétés polyembryonnées, et en direction cessus de méiose et de fécondation, ces du golfe du Bengale et de l’Inde en donnant embryons ont le même potentiel génétique les variétés monoembryonnées [4]. De fait, que la plante-mère. Ce mécanisme permet la majorité des mangues indiennes sont d’obtenir, par semis, des arbres identiques monoembryonnées. Les rares variétés poly- au plant mère, même chez des espèces hété- embryonnées présentes sur la côte ouest de rozygotes. À l’exception de rares cas de l’Inde auraient été introduites à Goa par les polyploïdie de l’embryon ou de caractères Portugais, à partir de leurs possessions asia- chimériques chez la mère, les plantes issues tiques, Macao ou Timor [4]. de semis d’embryons somatiques sont donc Sur le continent américain, les manguiers génétiquement équivalentes à celles obte- ont été introduits depuis ses deux origines nues par multiplication végétative. Les phé- e primaires. Au XVIII siècle, les variétés asia- notypes s’en différencient toutefois par une tiques, polyembryonnées, ont été plantées longue phase juvénile, raccourcie par la en Amérique centrale (Mexique et Panamá) multiplication végétative d’organes adultes. puis dans la Caraïbe par les Espagnols qui Chez le manguier, les graines des variétés avaient atteint l’Asie par l’océan Pacifique monoembryonnées contiennent un seul après avoir contourné l’Amérique par le embryon zygotique. Les noyaux de variétés détroit de Magellan [6]. Les noms des varié- polyembryonnées possèdent un (ou aucun) tés mexicaines comme Manila ou Filipino embryon zygotique et un ou plusieurs rappellent cette origine. D’autres manguiers embryons somatiques. En pollinisation libre, seraient venus de l’est, introduits après des

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relais en Afrique ou dans les îles de l’océan 3. Les principales variétés Indien dans un premier temps. Les Portu- cultivées en Afrique de l’Ouest gais auraient planté les premiers manguiers à Bahia, au Brésil, mais « pas avant 1700 » Bien que l’introduction des mangues en selon Popenoe [6]. En 1782, un navire con- Afrique de l’Ouest soit récente, les habitants tenant des plants de manguiers provenant distinguent les « mangues locales » ou man- de l’île de France, l’actuelle île Maurice, des- gots, polyembryonnées, reproduites par tinés à Hispaniola (Haïti, Saint-Domingue) semis, fibreuses pour la plupart, des « man- fut capturé par des pirates anglais et envoyé gues importées », monoembryonnées, mul- à la Jamaïque, où les arbres furent plantés tipliées par greffage. Pour des raisons pra- et prospérèrent. Trente-deux ans plus tard, tiques, nous reprendrons cette différenciation le manguier y était devenu une plante très en classant les variétés de manguiers d’Afri- commune [6]. que de l’Ouest en trois groupes principaux : Aux États-Unis, la première introduction les variétés polyembryonnées, les variétés aurait été réalisée près de Miami en 1833, floridiennes et les autres variétés représen- avec des plants du Mexique. Mais ensuite, tées essentiellement par Amélie. avec les progrès des moyens de transport, les importations de diverses origines se sont amplifiées [6]. À partir de 1889, des plants 3.1. Les mangues locales monoembryonnés indiens greffés ont été ou polyembryonnées systématiquement introduits en Floride par le United States Department of Agriculture 3.1.1. Mangot Nunkourouni, ou Tête (USDA) et, parmi eux, la variété , de Chat dont une graine allait donner naissance à Le mangot Nunkourouni (figure 1), à fibres Haden [6, 7]. De nombreux cultivars flori- et polyembryonné, est répandu dans toute diens, comme Eldon, Smith, , Tommy l’Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Atkins, Zill, , Springfels, Valencia, des- Dans chaque site, il porte un nom différent cendent de Haden. Keitt serait issu directe- qui peut être lié à l’origine de son introduc- ment de Mulgoba tandis que la variété Irwin tion (Sierra Leone au Sénégal, mangot alle- proviendrait de Lippens, et Spirit of 76 de mand dans certaines zones du Cameroun), semis de Zill. Edwards serait un hybride de à la zone où il est cultivé (mangue de Haden et [7]. N’gaoundéré, dans l’Adamaoua au Came- Après Mulgoba, Sandersha [6, 7] fut la roun) ou à la forme du fruit. Dans les lan- seconde variété monoembryonnée indienne gues d’origine mandingue, la forme du fruit utilisée comme géniteur en Floride. Brooks est souvent assimilée aux éléments du et proviennent de semis de San- visage (bouche, nez, etc.). Cette mangue dersha, tandis que Kent serait issu de s’appelle donc Nez Court ou Tête de Chat Brooks et que serait un hybride de (Nunkourouni ou Diakuma Koun ou Man- Haden et de Brooks [7]. L’appellation koron Ba). Elle est appelée également Gref- a été attribuée à un groupe d’arbres prove- feul au Sénégal. nant d’un lot de graines que D. L’arbre est vigoureux, pourvu d’un feuillage avait envoyé à l’USDA à partir de Saigon, vert foncé. Les feuilles sont longues à bords aujourd’hui Hô Chi Minh-Ville au Vietnam. ondulés ; l’inflorescence est teintée de Cambodiana provient d’une sélection effec- rouge. Les arbres adultes sont très produc- tuée au sein de ce groupe d’arbres très hété- tifs. La production est très précoce en sai- rogènes quant à leur taille et leur forme, et son, ce qui en fait les premières mangues la variété serait issue d’un semis de sur le marché. Saigon [6, 7]. Les parents de Palmer et Ruby Le fruit est aplati latéralement, de forme sont inconnus [7]. arrondie et pourvu d’une épaule ventrale Ainsi, la plupart des variétés floridiennes descendant assez bas. Il existe de nombreux que nous avons plus spécifiquement étu- types locaux et la forme des fruits varie diées descendraient de deux variétés indien- selon les zones de production. Leur poids nes monoembryonnées. varie de (150 à 300) g. La peau est rouge,

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Figure 1. Quelques variétés de mangues polyembryonnées consommées localement et présentation de certaines variétés monoembryonnées parmi les premières qui ont été propagées en Afrique de l’Ouest par greffage.

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jaune ou verte à maturité. La pulpe orange 3.1.2. Mangot Dadiani, ou Bouche vif, riche en composés volatils [8], est d’un Longue goût très agréable. Les très nombreuses Tout comme le manguier à mangots Nun- fibres courtes, adhérentes au noyau, ont kourouni, la variété polyembryonnée qui longtemps nuit à son utilisation industrielle. produit le mangot Dadiani (figure 1) est Toutefois, des procédés modernes comme connue sous différentes appellations. L’arbre la technique de « flash-détente » permettent a un port moins érigé que les manguiers pré- d’utiliser la pulpe sans avoir le désagrément cédents. L’inflorescence est jaune blanchâ- des fibres. tre. Le fruit est petit, de (150 à 250) g. Sa Le nombre d’arbres produisant des man- peau est vert clair à jaune avec des marbru- gots Nunkourouni par pays est difficile à res roses à rouges à maturité. L’épaule ven- évaluer car la plupart des enquêtes sur les trale est courte et l’apex long, d’où les noms manguiers ne prennent pas en compte les de Bouche Longue ou Nez Long (Dadiani, arbres de semis considérés comme de faible Nundiani). Dans les publications de Ollé intérêt économique. Les vergers purs de et al. [9, 10], elle est désignée sous le nom cette variété sont rares aujourd’hui, mais elle de Mbengué, ville où elle avait été récoltée est présente dans tous les lieux de vie : pla- pour ces essais. La partie apicale du fruit est ces, cours, marchés, gares routières, bordu- droite ou légèrement recourbée, d’où l’appel- res de routes et de rues, isolés ou en bos- lation « Sabre » qui lui est donnée dans cer- quets dans les champs. Comme elle est taines collections. La chair est jaune à orange utilisée en tant que porte-greffe, il est pos- clair. Les fruits sont sensibles à l’anthracnose. sible d’observer des pieds isolés dans les Les fibres sont nombreuses, la pulpe est vergers quand la greffe échoue ou lorsqu’un moins aromatisée et plus fragile que celle de rejet a pris l’ascendant sur le greffon. Si une Nunkourouni. La productivité des arbres repousse du porte-greffe n’a pas été élimi- adultes est très bonne. La production est née, les branches de la variété greffée coha- précoce en saison et coïncide avec celle de bitent alors avec celles du porte-greffe. Nunkourouni. Bien que largement repré- Dans une ville comme Conakry (Guinée), sentée, cette mangue est toutefois moins il y a au moins un manguier de cette variété répandue que la précédente. par maison. Entre Conakry et Mamou, dis- Pour ces deux mangots, la fragilité de la tantes d’environ 300 km, ces manguiers bor- pulpe, la petite taille des joues et les diffi- dent la route sur plus de la moitié du par- cultés d’utilisation agroalimentaire de la pulpe cours. Le manguier Nunkourouni est présent fibreuse par les techniques classiques font dans toutes les villes de Haute-Guinée, où que ces fruits ont surtout été réservés à il constitue l’arbre d’ombrage des avenues l’autoconsommation et aux marchés locaux. et places publiques. Cette variété est pré- Leur abondance en saison de production sente non seulement dans tous les pays permet à de larges couches de la population d’Afrique de l’Ouest, mais aussi bien dans de les consommer à satiété. En Guinée, les les zones humides proches de l’océan que habitants préfèrent ces variétés à toutes les dans les savanes sèches. autres et les variétés greffées précoces trou- La production de mangots Nunkourouni vent peu de preneurs. est aussi difficile à évaluer que le nombre de ses arbres car les fruits sont autoconsom- 3.1.3. Autres mangots et variétés més ou commercialisés sur les marchés locales locaux. Les enfants récoltent les mangots En dehors des mangots Nunkourouni et situés en haut de la cime des arbres en grim- Dadiani, il existe d’autres mangots fibreux pant dans les branches ou en les faisant tom- comme Mangotine (Fumani), à petit fruits ber en lançant des cailloux. Les évaluations de (80 à 100) g et très parfumés, et Mangot donnent des rendements moyens de (150 à Vert, introduits des Antilles à la station de 200) kg de fruits par arbre et par an. La pro- Foulaya (Guinée). Certaines autres variétés duction pourrait être évaluée au minimum peuvent être abondantes à l’échelle d’une à 50 000 t par pays, mais à beaucoup plus région ou d’un pays, comme le petit mangot pour des pays comme la Guinée ou le Mali. appelé Séwal au Sénégal.

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3.1.4. La mangue du Cameroun [9] ? Elle est actuellement largement répan- due dans toutes les zones de savanes sèches La mangue du Cameroun (figure 1) néces- au nord du 9° de latitude N, même si elle site une présentation particulière. Introduite se trouve parfois en mélange dans des ver- au départ dans la région de Douala (Came- gers situés plus au sud, au Togo, par exem- roun), cette variété polyembryonnée a été ple. Cette répartition géographique est liée propagée par semis le long du littoral avant à sa sensibilité aux maladies cryptogamiques d’être largement diffusée vers l’intérieur du des fleurs et des fruits (oïdium, anthrac- pays, à Yaoundé, en zone forestière, puis nose). Son importance relative en savane lui vers le nord et les pays voisins. Elle est con- a valu le nom de Greffée en de nombreux nue sous différents noms dont « Mangue du lieux où elle fut longtemps la seule variété Littoral », dans la partie francophone, et greffée. Elle est également dénommée Gou- « Number One », en zone anglophone, sont verneur, en particulier au Burkina-Faso. les plus connus. À l’extérieur du Cameroun, elle est appelée Mangue du Cameroun ou L’arbre a un port caractéristique, très dif- Améliorée du Cameroun (à l’origine ce der- férent de celui des variétés floridiennes. De nier terme englobait cinq clones sélection- taille modeste, il présente une frondaison nés par de Laroussilhe, qui les avait nommés dense en boule. Les branches, très ramifiées, Ifac 1 à Ifac 5). portent de petites feuilles vert clair, plates, Dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, à bords réguliers. cette variété a été diffusée essentiellement Le fruit a une peau verte ou jaune à matu- par greffage. Consommée localement, elle rité qui, sur les sols latéritiques, peut pren- n’a jamais eu l’importance relative qu’elle dre une très belle coloration rouge sur la possède en Afrique centrale. partie exposée au soleil. La chair est d’un bel L’arbre peut atteindre un fort développe- orange vif. Les taux de sucre et d’acidité sont ment en conditions favorables. Les feuilles variables selon les conditions de culture sont grandes, à bords ondulés. Les fruits mais généralement inférieurs à ceux des cul- petits, à peau jaune ou verte à maturité, ont tivars floridiens [10]. Le goût et l’odeur sont une pulpe fragile, peu fibreuse, très sensible aisément reconnaissables. Selon Ollé et al. au jelly seed autour du noyau. Selon les [9], les arômes d’Amélie sont particuliers, fruits, la couleur de la pulpe varie d’orange « étant pratiquement carencés en car-3-ène vif à blanchâtre en passant par différentes et possédant (Z)- et (E)-ocimène comme nuances de jaune. Le goût est assez discret, principaux monoterpènes. Ces deux derniers agréablement parfumé, légèrement acidulé. composés volatils ont une odeur chaude, herbacée et florale, tandis que l’odeur du L’arbre et le fruit rappellent certaines car-3-ène est douce, rappelant le limonène variétés du Sud-Est asiatique. Son principal raffiné ». intérêt est de fructifier abondamment dans les zones humides. Mais les caractéristiques Ces arômes auraient aussi été retrouvés du fruit (peau verte, fragilité de la pulpe, dans de la purée et des fruits mûrs ou verts petit format, etc.) nuisent à sa commerciali- de mangues indiennes ou dans sation lointaine. celles du cultivar Jaffna cultivé dans le nord du Sri Lanka [8]. En Afrique de l’Ouest, nous ne connaissons qu’un seul cultivar ayant le 3.2. Les premières variétés même goût qu’Amélie. Il s’agit d’une variété monoembryonnées propagées à épiderme d’un rouge carmin très coloré se par greffage trouvant en collection au CNRA, à Korhogo, mais pratiquement pas diffusée. 3.2.1. Amélie Amélie est la plus précoce des variétés La variété Amélie (figure 1), dont on ne con- commerciales. La conservation au froid du naît pas réellement l’origine, fut introduite fruit vert est satisfaisante malgré une cer- des Antilles à la mission catholique de Kita. taine sensibilité à la frisure qui provoque Est-ce la même variété que la Reine-Amélie une dégradation assez rapide des fruits mûrs. dont parle Sébire dans la collection de Thiès Le manque de coloration rouge de l’épiderme

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Tableau I. Répartition des fleurs femelles et taux de fructification de trois variétés de manguiers à la station de Lataha, Korhogo, nord de la Côte d’Ivoire (d’après Briot [11]).

Variété % de fleurs femelles en Moyenne du % de fleurs Taux de fructification position apicale femelles par panicule (%)

Amélie 22,7 (± 7,9) 11,1 (± 4,1) 10 Keitt 65,5 (± 18,0) 30,1 (± 8,9) 31 Kent 32,5 (± 8,9) 20,5 (± 6,0) 25

de cette variété et sa durée de vie commer- part quelques pieds conservés par les plan- ciale relativement courte incitent les impor- teurs pour leur consommation personnelle, tateurs européens à lui préférer d’autres cul- ces variétés sont en voie d’abandon. tivars, mais, sa précocité permet de l’exporter jusqu’à l’arrivée des variétés rouges. 3.2.3. Djibelor La production d’Amélie, qui peut attein- En Casamance, dans le sud du Sénégal, la dre plusieurs centaines de kilos sur certains mangue de Djibelor également appelée pêche arbres, est très faible en moyenne, du fait (figure 1) est excellente et sans fibres. Elle notamment d’un mauvais taux de féconda- est proche d’une variété indienne appelée tion (tableau I). Dans le nord de la Côte Paheri (synonymes : Peter Passand, Alphonse d’Ivoire, les rendements moyens en fruits Paheri, Païri). d’exportation de cette variété oscillent entre (1 et 2) t·ha–1. 3.2.4. Cuisse Madame

3.2.2. Julie et Sabot Cuisse Madame entrait dans la composition d’un verger établi près de Siguiri, en Haute- La variété Julie1 d’Afrique de l’Ouest est dif- Guinée, en 1931. Elle produit un gros fruit férente de celle des Antilles françaises, mais à épiderme vert. Sa diffusion se limite à la elle est proche de la variété Sabot (figure 1). Haute-Guinée. Le port de l’arbre ressemble à celui d’Amé- lie, mais les feuilles sont ondulées. Le fruit 3.3. Les variétés floridiennes est plat, de forme carrée ou ovale chez Julie, en forme de sabot chez… Sabot. La couleur utilisées pour l’exportation de l’épiderme varie du vert au marron à Les variétés floridiennes monoembryonnées maturité avec parfois des taches rouges. La étant largement répandues dans le monde, chair, très fragile, d’une couleur jaune fon- nous nous sommes attachés à décrire leurs cée à orange, possède un goût musqué très caractéristiques dans les conditions spécifi- prononcé apprécié des consommateurs ques d’Afrique de l’Ouest. locaux, qui ont donné à Julie le nom de Mus- cat. Le fruit est pratiquement intransportable 3.3.1. Kent en raison de sa rapidité de maturation et de la fragilité de sa pulpe. Son aire de réparti- La variété Kent (figure 2), d’origine flori- tion est la même que celle d’Amélie, mais à dienne, a été introduite à la station de Fou- laya, en Guinée, par Py en 1949. Depuis une 1 Il existe une Julie Kasowa présente dans dizaine d’années, elle supplante la variété les collections de l’Irad (Institut de recher- Amélie en tant que principale variété d’expor- che agricole pour le développement) au tation d’Afrique de l’Ouest. Certaines carac- Cameroun, qui est diffusée assez largement téristiques des fruits sont fortement influen- dans les provinces septentrionales de ce cées par les types de sol. Sur la station du pays sous le nom de Julie, mais qui est dif- CNRA de Lataha, près de Korhogo, d’une férente des mangues de la variété Julie superficie de 40 ha, certaines parcelles peu- d’Afrique de l’Ouest. vent fructifier près d’un mois après les

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Figure 2. Présentation de variétés monoembryonnées floridiennes produites en Afrique de l’Ouest et utilisées soit pour l’exportation, soit pour les marchés nationaux ou régionaux.

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bles au développement des exportations Tableau II. ivoiriennes. Matière sèche de la peau et de la pulpe de mangues du nord de la Côte d’Ivoire au cours de la campagne 1989 (d’après Collin et Kent produit entre le 10 avril et le 20 mai dans le sud de la zone d’exportation Dalnic [12]). (Korhogo, Ferké en Côte d’Ivoire), en mai Variété Matière sèche de la pulpe Matière sèche de la peau à Sikasso (Mali) et dans l’ouest du Burkina- (%) (%) Faso, à partir du 15 mai autour de Kankan (Guinée), de mai à juillet à Bamako (Mali) Amélie 14,37 22,15 et de juillet à septembre dans les Niayes Keitt 17,75 23,68 (Sénégal). Certains vergers des environs de Kent 20,47 25,03 Korhogo peuvent être entièrement récoltés Mangot 18,38 23,51 à la mi-avril. Palmer 16,92 19,85 La variété Kent se caractérise par une Ruby 20,15 27,24 teneur en eau de la pulpe relativement fai- ble, qui pourrait expliquer sa bonne durée de vie commerciale (tableau II). La matura- tion du fruit est très progressive. L’extrait sec autres. Les fruits sont précoces, fermes et soluble des mangues Kent prêtes à être con- colorés sur les coteaux latéritiques, alors sommées est élevé et peut atteindre 22 °Brix qu’ils peuvent être vert foncé, tardifs et dans certains fruits, alors que l’acidité, plus atteints de désordres physiologiques sur les faible à la récolte que chez les autres variétés sols de bas-fonds argileux et humides. citées, est plus élevée après maturation (tableau III). Les traditions Sénoufos, ethnie principale du nord de la Côte d’Ivoire, visaient à con- Les analyses de mangues du nord de la server un équilibre entre les cultures annuel- Côte d’Ivoire effectuées par Collin et Dalnic les (cotonniers et plantes vivrières) et les confirment ces résultats [12]. En revanche, productions pérennes (manguiers, anacar- les analyses réalisées par Ramata Diallo sur diers et espèces forestières). Les premiers des fruits de Guinée-Maritime à maturité vergers de manguiers ont souvent été relé- indiquent des extraits secs solubles et des gués sur les collines de graviers latéritiques, acidités inférieurs à ceux de Korhogo pour impropres aux cultures annuelles, mais aptes Kent et Keitt (tableau IV). Ces analyses à produire des fruits précoces et magnifi- effectuées en juillet, soit 1,5 mois après le ques. Ce fait a été l’un des éléments favora- début de la saison des pluies, confirment

Tableau III. Extrait sec soluble (ESS) et acidité de trois variétés de mangues d’exportation cueillies au stade de maturité export à Korhogo, nord de la Côte d’Ivoire (d’après Briot [11], Guépratte [13] et Moulio [14]).

Variété* Analyses à la récolte Analyses après maturation

ESS (°Brix) Acidité ESS (°Brix) Acidité (meq pour 100 g de pulpe) (meq pour 100 g de pulpe)

Amélie 89 j 6,8 ± 0,8 26,8 ± 3,8 13,9 ± 1,9 9,0 ± 3,4 Kent 120 j 9,4 ± 1,5 15,6 ± 5,2 19,9 ± 2,2 11,2 ± 2,3 (floraison de janvier) Kent 120 j 9,4 ± 1,0 18,8 ± 4,8 19,6 ± 1,4 10,6 ± 2,1 (floraison de février) Keitt 132 j 10,5 ± 1,6 19,4 ± 4,3 18,5 ± 1,4 7,9 ± 1,8

* Le nombre de jours correspond à l’écart, choisi arbitrairement, entre la floraison de la fleur terminale de la panicule et la récolte. Janvier ou février sont les mois de floraison des inflorescences ayant donné naissance aux fruits.

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que Kent a les extraits secs solubles les plus élevés parmi les variétés analysées. Un cer- Tableau IV. tain nombre de fruits (Kent et Keitt) étaient Extrait sec soluble (ESS) et acidité de sept variétés de mangues atteints de désordres physiologiques inter- après maturation, Guinée-Maritime (d’après Ramata Diallo, comm. nes. pers.).

La taille des fruits de Kent, qui appar- Variété Extrait sec soluble Acidité tiennent essentiellement aux calibres de 7 à (°Brix) (meq pour 100 g de pulpe) 10 (nombre de fruits par carton de 4 kg), cor- respond tout à fait à la demande du marché Kent 14,6 6,2 européen, français en particulier. Keitt 13,9 3,2 Quand les fruits de savane sèche mûris- Sabot 13,7 7,4 sent, la couleur verte de l’épiderme disparaît Lippens 12,9 2,5 en grande partie pour laisser place à un Beverly 12,5 10,8 beau jaune. Les fruits mûrs sont alors rouges Brooks 11,4 6,6 et jaunes ou rouges, verts et jaunes. Ils sont Irwin 12,1 4,9 beaucoup plus attirants lorsqu’ils sont mûrs qu’à leur stade de récolte. La variété Kent cumule donc beaucoup cours de la maturation. Les fruits de Keitt, de qualités commerciales, ce qui explique qui sont plus colorés que ceux de Kent lors son succès auprès des importateurs euro- du conditionnement, sont moins attractifs à péens : bonne tenue au transport, durée de maturité. conservation élevée du fruit mûr maintenu Le calibre des fruits est aussi variable au froid, extrait sec soluble important, belle selon les conditions de milieu. En coteaux coloration des fruits produits en conditions gravillonnaires, les fruits sont fermes, colo- adéquates, calibres convenables. rés et de calibre satisfaisant pour l’exporta- tion (6 à 10), bien qu’une partie notable de 3.3.2. Keitt la production doive être écartée en raison La variété Keitt (figure 2) a été introduite, d’une taille excessive. En revanche, sur sols comme Kent, par Py à Foulaya, en 1949. Elle riches et humides, leur peau reste verte, est la plus tardive des variétés d’exportation. voire vert foncé (« noir » dans le vocabulaire Bien que certains vergers produisent à partir des récolteurs), et le calibre est trop gros de la mi-avril près de Korhogo, sa période pour l’exportation (6 et moins). Certains de récolte s’étale de fin avril à début juin fruits peuvent dépasser 1,5 kg. Il arrive aussi dans le nord de la Côte d’Ivoire. À Sikasso que l’on observe des désordres physiologi- (Mali) et dans l’ouest du Burkina-Faso (Oro- ques, toutefois moins intenses que sur Kent. dara, Banfora), elle produit en mai–juin, et Les pédoncules fructifères sont très longs jusqu’en juillet et parfois août. À Bamako et les branches peu ramifiées et souples. Les (Mali), la récolte s’étale de juin à août et le fruits sont ainsi exposés à différents aléas : Sénégal en exporte jusqu’à septembre–octo- frottements contre le sol ou les branches, bre. dégâts d’insectes, etc. L’épiderme est beau- La durée de maturation des fruits est très coup plus sensible aux blessures que celui longue. Elle peut atteindre 3 semaines à de Kent. Malgré une bonne fécondation, la température normale pour des fruits évo- production moyenne de fruits d’exportation –1 luant ensuite normalement. En revanche, les reste modérée, de (3 à 5) t·ha dans le nord fruits mûrs ont une durée de vie commer- de la Côte d’Ivoire, ce qui en fait néanmoins ciale inférieure à celle de Kent. L’extrait sec la variété la plus productive en fruits soluble est relativement élevé même si les d’exportation. moyennes sont légèrement inférieures à cel- les de Kent (tableaux III, IV). 3.3.3. Palmer La couleur du fruit à la récolte est variable : L’introduction de la variété Palmer (figure 2) vert, jaune clair avec ou sans plages d’un en Afrique de l’Ouest est identique à celle rouge cuivré. Toutefois, elle évolue peu au des variétés précédentes. C’est une variété

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semi-tardive à tardive selon le lieu. Elle pro- ce qui permet d’exporter quelques fruits rou- duit plutôt après Kent : en mai et début juin ges en période de commercialisation d’Amé- au sud de la zone d’exportation, et de mai lie. à juillet, au nord, dans la région de Bamako. Les arbres sont productifs. C’est l’une des 3.3.5. Valencia variétés les plus colorées. À l’exception des fruits enfouis à l’intérieur de la frondaison, La variété Valencia (figure 2), qui était assez plus de la moitié du fruit est colorée d’un utilisée lors des exportations par avion, a été pourpre sombre. Le reste est vert à la récolte complètement abandonnée en Côte d’Ivoire et devient jaune à maturité. avec le développement des exportations par Le calibre des fruits est variable mais glo- bateau, en raison de sa mauvaise tenue au balement plus petit que celui de Kent, avec transport. Elle a, en revanche, été redécou- une forte proportion de mangues de (300 à verte par les exportateurs de Bamako expé- 450) g. Cette variété est peu sensible aux diant par avion, qui apprécient sa belle colo- désordres physiologiques et se comporte ration. L’arbre a un fort développement bien à la conservation. Son taux de brix est végétatif, mais il n’est pas en rapport avec plus élevé que celui d’Amélie : 17,2 °Brix son volume de production. À Bamako, la pour Palmer contre 13,1 °Brix pour Amélie variété Valencia produit avant Kent. [10]. 3.3.6. Smith La variété Palmer est assez difficile à tra- vailler pour l’exportation. Sa coloration rouge La variété Smith produisant en saison ou apparaît bien avant la maturité du fruit et elle semi-tardive a d’assez bon rendements. Elle est trompeuse pour les récolteurs. La sève est très sensible aux conditions de milieu, abondante et brûlante entraîne des brûlures tant pour les qualités internes qu’externes. de l’épiderme si l’on ne prend pas de pré- Elle montre souvent des problèmes physio- cautions. La mise en cartons des fruits allon- logiques, tels que la surmaturité précoce de gés n’est pas aisée : en dehors des petits cali- la partie apicale ou le développement de bres, il n’est pas possible de disposer les racines dans la pulpe. La coloration rouge fruits verticalement et, quand ils sont mis à est importante, mais elle varie d’un ver- plat, le carton risque de ne pas atteindre le millon éclatant à un rouge vineux terne. Le poids minimal. calibre peut être satisfaisant (7 à 9) ou trop Cette variété est assez appréciée sur les gros avec une majorité de fruits hors nor- marchés de l’Europe du Nord, en Belgique mes. C’est dans la zone de Yagoua, au nord en particulier, où les calibres moyens, infé- du Cameroun, que l’on peut voir les plus rieurs à ceux du marché français, sont appré- beaux spécimens de cette variété : produc- ciés. En France, la mangue Palmer est com- tion abondante, fruits de calibre moyen, mercialisée de façon variable selon les belle couleur, chair ferme, etc. Comme la négociants mais d’une manière générale elle variété Smith produit en même temps que est moins bien vendue que Kent. Kent dans la zone actuelle d’exportation, elle ne présente plus grand intérêt.

3.3.4. Zill 3.3.7. Irwin Après avoir été très appréciée à une certaine Pourvue d’une très belle coloration, la époque, la variété Zill est peu recherchée variété Irwin a une forme variable selon les actuellement malgré sa très belle coloration zones de production. Dans la région de Kin- à maturité. Elle souffre de défauts majeurs, dia, en Guinée, son fruit a une forme géné- en particulier son évolution très rapide à rale ovale alors que, dans le nord de la Côte l’approche de la maturité entraîne une très d’Ivoire, elle prend l’aspect d’un « S » avec courte durée de vie commerciale. Souvent de nombreuses malformations (bosses, peu productive, elle fournit dans l’ensemble excroissances digitées, etc.). Ces anomalies des fruits de petit calibre. Son intérêt est de ne sont pas d’origine clonale puisque des parvenir à maturité quelques jours avant Kent, greffons prélevés sur des arbres de Kindia

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qui donnaient de beaux fruits ont reproduit 3.4.2. Davis-Haden les mêmes anomalies à Korhogo. Long- Le cultivar Davis-Haden est appelé Kent temps principale variété d’exportation de la Rouge au Mali en raison de la belle colora- Guinée-Maritime, le cultivar Irwin a été tion de l’épiderme. Les fruits ont un poids abandonné, au profit de Keitt, par les expor- moyen variant de (500 à 1 200) g et ils peu- tateurs guinéens qui estiment qu’Irwin mûrit vent dépasser 1 500 g. Sur de tels fruits la trop rapidement pour le transport par bateau. maturité de la chair est très irrégulière. La récolte généralement effectuée à partir de 3.3.8. Haden juillet est tardive et les fruits sont très sensi- La variété Haden a des fruits colorés en bles aux piqûres de mouches et aux mala- jaune, vert et rouge vif à maturité, ce qui en dies fongiques, ce qui entraîne beaucoup de fait la plus belle des variétés d’exportation. pertes. La taille des fruits et leur sensibilité Leur chair est sucrée et bonne, malgré la pré- aux maladies et ennemis rendent difficile sence de petites fibres. Selon les conditions l’utilisation de cette variété à l’exportation de milieu, leur taille est moyenne à petite. intercontinentale. La production de l’arbre est faible à moyenne selon le sol et les ressources en eau. Ce cul- 3.4.3. Miami Late tivar, qui aurait pu être largement diffusé, est peu répandu, sans doute pour des raisons La variété Miami Late (figure 2) a une forme historiques — il ne figurait pas dans les pre- rappelant celle de Kent avec toutefois une mières collections — mais aussi du fait de proportion de surface rouge moins dévelop- sa modeste productivité en conditions diffi- pée. Au Mali, elle est appelée « Souroukou ciles et de quelques problèmes physiologi- Koun » (Tête de hyène). Les lenticelles sont ques. Les rares arbres en production sont apparentes et, quand elle est mûre, elle ne difficilement utilisés car les exportateurs ne présente pas la couleur éclatante de Kent. disposent pas de suffisamment de fruits en Les fruits ont une taille régulière et pèsent même temps pour pouvoir confectionner généralement de (400 à 600) g bien que des palettes complètes des différents cali- quelques fruits puissent être exceptionnel- bres. De ce fait, les planteurs ne sont pas lement gros (plus de 1 kg). La période de encouragés à planter davantage. Seuls quel- production est variable selon les conditions ques envois par avion sont réalisés. de milieu, mais globalement elle est semi- tardive à tardive. La production est abon- dante et régulière. C’est, avec Brooks, l’une 3.4. Les variétés floridiennes des variétés les plus productives, mais c’est utilisées pour les marchés nationaux aussi l’une des plus sensibles aux piqûres de mouches. Dans les zones humides, elle est et régionaux attaquée par l’anthracnose. Sa tenue en con- servation n’est pas très bonne. 3.4.1. Brooks 3.4.4. Springfels La variété Brooks (figure 2) à épiderme vert, blanchâtre ou jaune à maturité est souvent Springfels est, avec Davis-Haden, le cultivar appelée « Retard » en raison de sa produc- qui produit les plus gros fruits, ce qui lui a tion tardive, de juin à octobre en Côte valu le surnom de Papaye, donné par com- d’Ivoire. La productivité de l’arbre est très paraison avec les papayes locales à gros élevée et régulière d’une année à l’autre. Les fruits et non par rapport à la variété de fruits ont une chair ferme, sans désordres papaye Solo. L’épiderme est jaune et rouge physiologiques, appréciée des consomma- terne à maturité. La pulpe contenant de teurs locaux. Elle est en revanche très sen- grosses fibres longitudinales, assez douce, sible aux piqûres de mouches des fruits. Le est appréciée localement. La production est calibre est régulier avec une majorité de semi-tardive et peu abondante en général. fruits entre (350 et 450) g, ce qui en fait de bons fruits portions. Il ne lui manque que 3.4.5. Beverly et Glazier la couleur pour être une excellente variété Ces deux variétés, introduites originelle- d’exportation ! ment à Foulaya comme toutes les mangues

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floridiennes, étaient disposées côte à côte autoconsommés, soit vendus sur le marché dans la collection implantée sur la station de local, national ou sous-régional, soit expor- recherche guinéenne et leurs fruits se res- tés sur le marché international ou transfor- semblent, ce qui a pu provoquer des con- més dans des unités artisanales ou indus- fusions par la suite. Si au Mali ou en Guinée trielles. ces cultivars sont bien distingués, il n’en est L’évolution historique permet de distin- pas de même en Côte d’Ivoire, où la variété guer quatre phases de diffusion des man- connue sous le nom de Beverly est en réalité guiers en Afrique de l’Ouest : l’expansion Glazier, beaucoup moins bonne que la pre- des mangots de semis, l’établissement des mière. Glazier a des taches rouges sur les vergers d’Amélie, la diffusion des mangues parties exposées au soleil alors que Beverly colorées à partir des collections multilocales est plus claire, voire blanche dans certaines et la concentration variétale sur Kent et Keitt conditions. Les fruits sont moyens à gros, sous l’influence des exportateurs. Ces éta- peu attrayants à maturité, sensibles aux pes se sont souvent recoupées, ainsi, dans piqûres de mouches et semi-tardifs. certaines zones, la multiplication des varié- tés rouges a eu lieu alors que l’expansion 3.4.6. Eldon des Amélie se poursuivait. La variété Eldon produit abondamment en saison des fruits jaunes avec une coloration cuivrée plutôt discrète. Le calibre est satis- 4.1. La Guinée faisant, de (300 à 450) g, et le goût peu pro- noncé. Ce cultivar à fruits moyens dans tous En Guinée, il existe deux grandes régions les domaines ne présente aucune qualité qui de production. La Guinée-Maritime est la pourrait le distinguer et justifierait des plan- zone exportatrice de mangue d’Afrique de tations importantes pour le marché local ou l’Ouest la plus humide. Elle est plantée l’exportation. Son principal défaut réside essentiellement avec des variétés qui furent dans la sécrétion d’une sève abondante et introduites à la station de Foulaya (Kindia). brûlante qui cause des dégâts au contact de Les exportations, qui ne représentent qu’un l’épiderme. faible pourcentage de la production, n’ont pas eu d’impact significatif sur les choix 3.4.7. Ruby variétaux des producteurs, d’autant que les Surnommée « Mademoiselle » dans le nord choix des exportateurs ont évolué au cours de la Côte d’Ivoire, la variété Ruby est recher- des dernières années (de Irwin à Keitt). chée par les consommateurs qui apprécient La Haute-Guinée possède un climat plus son goût acidulé et parfumé. L’épiderme est chaud et sec que celui de la Guinée- fortement coloré en rouge, mais les fruits Maritime : il rappelle celui des principales sont tout petits et pèsent généralement zones productrices des pays voisins (Côte moins de 150 g. Ces mangues sont saines et d’Ivoire, Mali, Burkina Faso). Les premiers peu attaquées par les mouches. Même manguiers greffés ont surtout été des Amé- lorsqu’elles sont nombreuses sur l’arbre, le lie, plantés dans la zone la plus proche du poids récolté reste modeste en raison de la Mali (Siguiri). L’extension des manguiers faible taille des fruits. Les producteurs con- s’est ensuite opérée après l’implantation, en servent quelques arbres pour l’autoconsom- 1967, d’une usine de transformation qui pro- mation ou la vente locale. duisait de la pulpe de mangue. Cette usine a fonctionné plus ou moins régulièrement jusqu’en 1984 avant d’être fermée officielle- 4. La composition des vergers ment en 1985. Durant son activité, le choix variétal s’était alors porté sur des variétés à de manguiers greffés gros fruits, productives et tardives pour allonger la période d’approvisionnement de La composition des vergers greffés est l’usine. Parmi les variétés disponibles en influencée par l’évolution historique et la Guinée, Keitt et Miami Late correspondaient destination des fruits, qui peuvent être soit alors le mieux à ces critères.

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Après la fermeture de l’usine, les com- l’obtention du titre foncier. Les planteurs merçants du marché national ont pris le cherchaient alors à avoir une production relais pour écouler la production. Mais échelonnée pour étaler au maximum la comme le marché de la mangue est saturé période de récolte. Bien qu’il soit de bon ton en début de saison par l’abondante produc- de posséder quelques variétés à très gros tion de mangots, les variétés précoces ou de fruits, le goût des mangues destinées à l’auto- saison se vendent très mal. La demande est consommation était plus important que leur plus forte pour les gros fruits tardifs et aspect. Cependant, pour satisfaire des goûts sucrés, qui se commercialisent relativement variés et étaler la production, la plupart de bien dans les régions minières et forestières. ces vergers étaient de véritables collections. Keitt et Miami Late continuent donc à être Plus tard, les besoins des marchés ont les variétés les plus plantées. La demande entraîné une réduction de la gamme varié- des exportateurs est très faible dans la zone. tale et, aujourd’hui, les planteurs souhaitent Il s’agit essentiellement d’agents des expor- davantage rentabiliser leurs plantations qu’il tateurs ivoiriens, qui ne viennent pas en y a 30 ans. Cependant, de nombreux ver- Guinée régulièrement chaque année. La gers familiaux continuent à être plantés par variété Keitt est appréciée par le marché des citadins exerçant une activité principale intérieur et non comme variété d’exportation ; non agricole. Aux côtés des vergers paysans, c’est ce qui explique que la production de ces vergers de citadins ont amplement con- Kent reste modeste alors que celle de Keitt tribué à l’approvisionnement en fruits de la est importante. capitale malienne et ils ont fourni une partie La Haute-Guinée est l’une des zones de non négligeable des mangues d’exporta- production qui connaît les plus gros problè- tion. Dans une phase ultérieure, des vergers mes de mévente d’Afrique de l’Ouest. Cela purs constitués de Kent et Keitt ont été est dû en partie à l’éloignement de certaines implantés dans un rayon de moins de 30 km zones de production des grands centres de de la capitale. commercialisation. Dans les autres pays, il Autour de Sikasso, la constitution de cer- est relativement rare de voir des fruits pour- tains vergers témoignent également des trois rissant sur les arbres, faute d’acheteurs. phases de plantation. Les vergers de man- gues floridiennes coexistent aux côtés de 4.2. Le Mali vergers d’Amélie, mais ils sont composés d’une gamme de variétés beaucoup plus Au Mali, les différentes influences histo- étroite que dans la région de Bamako. Ces riques et économiques se superposent pour variétés sont essentiellement celles qui étaient présenter une grande diversité de situations. utilisées pour l’exportation lorsqu’elle se fai- Autour de Bamako et dans la vallée du Niger sait par avion ; cependant, la variété Brooks située entre la frontière guinéenne et Kou- s’ajoute à elles. Par ailleurs, au sud de Sikasso likoro, les premiers vergers greffés avaient notamment, il existe d’importants vergers de été constitués de manguiers Amélie. Cette Kent et Keitt dont les fruits sont destinés à variété est encore maintenant très nettement l’exportation par avion ou par bateau. majoritaire dans un rayon de 70 km autour La zone de Bougouni-Yanfolila a subi de de la capitale malienne. nombreuses influences : celles de la phase À partir du début des années 1970, des d’extension des manguiers Amélie, de la notables de Bamako développèrent des ver- mise en place d’un verger de comportement gers de prestige. Situés à faible distance de à Yanfolila, de la proximité de la Guinée et la ville, ces vergers étaient des lieux de détente de la Côte d’Ivoire. L’influence guinéenne se et de villégiature. Leur production était en traduit par l’abondance des variétés Miami grande partie destinée à la consommation Late et Keitt autour de Yanfolila et entre cette de la famille et des amis et les ventes cou- ville et la frontière. Près de la Côte d’Ivoire, vraient tout ou partie des frais de cultures. de grands vergers de Kent et Keitt ont été Les plantations constituaient une mise en implantés. Ces variétés se retrouvent égale- valeur du terrain permettant d’établir une ment à proximité de Bougouni. Tous les « lettre d’attribution », étape importante vers types de vergers sont présents à Yanfolila.

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Selon une enquête de la délégation régio- traduite par l’implantation de nouveaux ver- nale de l’agence pour la Promotion des filiè- gers constitués exclusivement de ces deux res agricoles (Aprofa Mali) à Sikasso, citée variétés et le surgreffage des anciens vergers par le Centre agro-entreprise (CAE) [15] en Kent et Keitt. En dehors des variétés « L’étude d’évaluation du potentiel agricole d’exportation (Kent, Keitt, Amélie, Palmer et de la filière de la mangue en 3e Région quelques Zill), seuls des manguiers de estime le disponible exportable au niveau Brooks et divers cultivars conservés par les de la région de Sikasso pour les trois prin- planteurs pour la consommation familiale cipales variétés à 48 181 t, dont 22 233 t pour sont présents. Cependant, plus de 95 % des Amélie (46 %) ; 14 076 t pour Kent (29,2 %) ; arbres greffés appartiennent aux variétés 11 872 t pour Keitt (24,6 %). Avec l’hypo- d’exportations. thèse que seulement 30 % sont susceptibles Dans les zones pluvieuses, les fruits ne d’être exploités pour l’exportation en tenant sont pas exportés en raison des risques phy- compte des normes d’exportation et du tosanitaires provoqués par l’humidité. Les degré d’enclavement des zones de produc- fruits destinés au marché local sont assez tion, le potentiel d’exportation du Mali pour diversifiés, mais il n’y a pas de grands ver- la 3e Région peut être estimé à 14 454 t »2. gers comme dans les zones sèches. Les mangues non exportées de la 3e Région sont expédiées à Bamako, dans les villes du nord (Ségou, Mopti, Gao) ou vers les pays 4.5. Le Sénégal voisins (Sénégal, Mauritanie). Au Sénégal, les premières productions de variétés greffées, Amélie et Divine, étaient 4.3. Le Burkina Faso destinées à l’approvisionnement des mar- chés urbains, Dakar notamment. L’exten- Au Burkina Faso, les principaux vergers de sion des manguiers greffés dans les Niayes manguiers sont situés dans le sud-ouest du a tout d’abord été influencée par les collec- pays, à Banfora et Orodara notamment. La tions réduites introduites auprès de divers phase d’extension de la variété Amélie s’y est organismes ou planteurs privés. Cependant, prolongée beaucoup plus longtemps que au cours des dernières années, des surfaces dans les pays voisins. Des vergers de culti- importantes ont été plantées en Kent et Keitt vars floridiens variés ont été plantés de pour satisfaire l’exportation ou le marché façon très modérée. En revanche, les der- national. Les arbres sont arrosés, au moins nières années ont vu une grande extension au cours de leur phase de jeunesse, ce qui des Kent et Keitt par la plantation de nou- entraîne des coûts de production élevés. La veaux vergers ou le surgreffage. demande du grand marché urbain que repré- sente la ville de Dakar contribue à tirer les prix vers le haut. La production de Casa- 4.4. La Côte d'Ivoire mance, composée de diverses variétés, est peu influencée par l’exportation. Dans le nord de la Côte d’Ivoire, les pre- miers vergers ont été constitués d’Amélie. Puis des vergers de diverses variétés flori- 4.6. Le Togo diennes se sont développés et leurs fruits ont été utilisés pour les exportations par Au Togo, la société publique Togofruits avion de 1980 à 1992. La demande de Kent avait implanté une collection réduite à partir et de Keitt, qui a accompagné le dévelop- de greffons venant du Mali. Ce verger com- pement des exportations par bateau, s’est prenait la variété Amélie et divers cultivars floridiens qui ont été diffusés dans le nord 2 Au Mali, la 3e Région comprend les vil- du pays mais aussi dans les zones humides. les de Sikasso, Kadiolo, Bougouni, Yanfolila Ainsi, des vergers de manguiers sont ren- et Koutiala. Elle est bordée au sud par la contrés aux alentours de Kpalimé. Les varié- Côte d’Ivoire, à l’est par le Burkina-Faso et tés les plus fréquentes sont celles issue de à l’ouest par la Guinée (Mandiana). l’essai variétal de Bamako (Zill, Irwin, Smith,

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Kent, Keitt, Palmer, Valencia, Ruby et Amé- [7] Anonymous, Mangos: guide to mangos in lie), auxquelles il faut ajouter quelques autres Florida, Campbell R.J. (Ed.), Fairchild Tropical comme Eldon ou Springfels. Les quantités Garden, Miami, USA, 1992. transformées ou exportées sont faibles et [8] Sébire A., Les plantes utiles du Sénégal, J.B. l’essentiel de la production est destiné au Baillière et fils, Paris, France, 1899, pp. 79–80. marché national ou régional. [9] Ollé D., Baumes R.L., Bayonove C.L., Lozano Dans les autres pays, la production est Y.F., Sznaper C., Brillouet J.M., Comparison essentiellement orientée vers le marché of free and glycosidically linked volatile com- national. ponents from polyembryonnic et monoem- bryonnic mango (Mangifera indica L.) cultivars, J. Agric. Food Chem. 46 (3) (1998) 1094– 1100. Références [10] Ollé D., Lozano Y.F., Brillouet J.M., Isolation and characterisation of soluble polysaccha- [1] Rey J.Y., Diallo T.M., Vannière H., Didier C., rides and insolubles cell wall material of the Kéita S., Sangaré M., La mangue en Afrique pulp from four mango (Mangifera indica L.) de l’Ouest francophone, Synthèse historique, cultivars, J. Agric. Food Chem. 44 (1996) Fruits 59 (2004) 121–129. 2658–2662.

[2] Singh L.B., The mango, Leonard Hill Books [11] Briot E., Étude de la physiologie postrécolte Limited, London, UK, 1960, 439 p. de la mangue : projet de fin d’études, UTC de [3] Degani C., Cohen M., Reuveni O., El-Batsri Compiègne, France, 1999. R., Gazit S., Frequency and characteristics of [12] Collin M.N., Dalnic R., Comparaison de man- zygotic seedlings from polyembryonic mango gues en provenance de Côte d’Ivoire, in: cultivars, determined using isozymes as gene- Journ. agrumes/mangues, Irfa, Inra, Mont- tic markers, in Bruce Schaffer (Ed.), Fourth int. pellier, France, 1991. mango symp., ISHS, Acta Hortic., no. 341, Wageningen, Netherlands, 1993, pp. 78–85. [13] Guépratte M., Physiologie postrécolte de la mangue et conservation sous atmosphère [4] Mukherjee S.K., Introduction: botany and modifiée, Mémoire de fin d’étude, École supé- importance, in: Litz R.E. (Ed.), The mango: rieure d’agriculture d’Angers (ESA), 1998, botany, production and uses, Cab Int., Oxon, 44 p. UK, 1997, pp. 1–19. [14] Bissardon F., Physiologie postrécolte de la [5] Nagasone H.Y., Paull R.E., Mango, in: Tropi- mangue et conservation en froid de la man- cal fruits, Cab Int., Oxon, UK, 1998, pp. 208– gue, Mém. ingénieur Ensia, Montpellier, 238. France, 1999.

[6] Popenoe W., Manual of tropical and subtro- [15] Anonyme, Études pour la promotion des filiè- pical fruits excluding the bananas, coconut, res agro-industrielles. Vol. III. Analyse de l’état pineapple, citrus fruits, olive and fig, Hafner des filières des produits, Centre agro-entre- Press, Div. Macmillan Publ. Co., New York, prise (CAE), Étude Yiriwa Conseil, Bamako, USA, 1920. Mali, février 2001.

Fruits, vol. 59 (3) 207 J.-Y. Rey et al.

El mango en África Occidental francófona: variedades y composición varietal de los huertos. Resumen –– Introducción. El mango es uno de los árboles frutales más extendidos en África Occidental. Recientemente se publicó una reseña histórica de su introducción en la zona. Como continuación de dicho documento, este análisis está dedicado a las principales variedades que se cultivan actualmente y al impacto de los factores históricos y comerciales en la composición varietal de los huertos frutales. Algunas definiciones. Antes de inventa- riar las variedades, se especifican algunos términos que permiten caracterizarlas (precocidad, monoembrionía y poliembrionía) y se proporciona información sobre el origen de las varie- dades floridanas. Las principales variedades cultivadas en África Occidental. Se han dis- tinguido cuatro categorías: las variedades de mangos locales o poliembriónicas (mangots, mango de Camerún), las primeras variedades monoembriónicas multiplicadas por injerto (Amélie, Julie, Sabot, Djibelor, Cuisse Madame), las variedades floridanas, también monoem- briónicas y multiplicadas por injerto, introducidas más tardíamente y utilizadas, bien para la exportación (Kent, Keitt, Palmer, Zill, Valencia, Smith, Irwin, Haden), bien para los mercados regionales (Brooks, Davis-Haden, Miami Late, Springfels, Beverly, Eldon, Ruby). Se describió cada variedad, así como sus características de cultivo y salidas de mercado. Composición de las plantaciones frutales de mangos injertados. La composición de los huertos de man- gos injertados está influida por la evolución histórica y el destino de la fruta que puede servir para autoconsumo, venta en el mercado local, nacional o subregional, exportación al mer- cado internacional o para su transformación en unidades artesanales o industriales. Se detalló dicha composición en Guinea, Malí, Burkina-Faso, Costa de Marfil, Senegal y Togo.

Africa de habla francesa / Mangífera índica / variedades naturalizadas / características agronómicas / precocidad / frutas / fenotipos

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208 Fruits, vol. 59 (3)