Janvier 2011 Numéro 18 Langues et cité Le francoprovençal

Le francoprovençal concentre plusieurs problématiques de la sociolinguistique actuelle : les enjeux de la délimitation et de l'appellation d'une aire linguistique, le rapport des langues

Langues et cité Bulletin de l’observatoire des pratiques linguistiques

minoritaires aux langues offi cielles, la mise à l'épreuve de Le francoprovençal p. 2 l'impératif de diversité culturelle, l'eff et de l'intervention politique sur les langues… La littérature p. 4 Identifi é et dénommé par le monde savant au 19e siècle seulement, Étude FORA p. 5 le francoprovençal est sans doute la plus méconnue des langues historiques de l'Hexagone, largement absente de l'idée que nous Quel nom pour nous faisons du paysage linguistique de notre pays. En même une langue ? p. 6 temps, par l'intérêt nouveau qui se porte sur la pluralité des langues et sur leur importance dans la vie sociale, elle devient L'enseignement objet de réfl exion collective et d'action publique. Elle illustre ainsi scolaire p. 7 la situation des langues en .

Politique de la Au moment où la région Rhône-Alpes lance une politique de Région Rhône-Alpes p. 8 valorisation du francoprovençal, il est apparu souhaitable de faire état des travaux qui, au fi l des décennies, ont rendu possible Les régionalismes p. 9 cet heureux développement, car « toute politique se fonde sur des savoirs ». À côté de celui de Pierre Gardette, on évoquera En Vallée d'Aoste p.10 parmi les précurseurs le nom d'André Martinet, qui a appliqué sa méthode de description phonologique au parler francoprovençal d'Hauteville en .

En alternance avec des livraisons sur d'autres sujets, Langues et Cité poursuit avec le présent numéro la publication de monographies sur les langues de France. 2 e francoprovençal, qui est la plus Le fait que le francoprovençal partage partie du domaine francoprovençal sont petite des trois familles gallo- des traits communs avec la langue d’oïl les témoins de cette caractéristique, car Lromanes, est parlé dans trois pays : la ou avec l’occitan a empêché pendant le z fi nal a été ajouté à partir du 16e siècle France, la Suisse et l’Italie. En France, il est longtemps d’en saisir toute l’originalité. Sa pour indiquer que le a (voyelle du féminin) utilisé dans le centre-est, depuis les monts reconnaissance comme entité particulière ou le o (voyelle du masculin) devait être du Forez à l’ouest jusqu’aux frontières de ne remonte qu’à la fi n du 19e siècle. C’est prononcé plus faiblement que la voyelle la Suisse et de l’Italie à l’est. En Suisse, en eff et à cette époque que le linguiste tonique précédente parce qu’il était l’aire francoprovençale correspond à la italien Graziadio Isaia Ascoli démontra atone. Il faut cependant préciser qu’entre Suisse romande, à l’exception du canton l’originalité des parlers de cet ensemble Roanne et Mâcon la distinction entre du Jura dont les parlers se rattachent à la auquel il donna le nom de francoprovençal. le francoprovençal et la langue d’oïl est langue d’oïl. En Italie, le francoprovençal Cette dénomination est restée malgré moins claire et la délimitation moins nette. est parlé dans la vallée d’Aoste, dans les les handicaps qu’elle présentait, le plus En eff et, dans le nord du Lyonnais, sous vallées situées au sud du massif du Grand important étant le fait de laisser penser l’infl uence conjuguée des parlers d’oïl Paradis et dans quatre communes de la que cette langue était un simple mélange voisins et du français standard, les voyelles vallée de la Cenischia (entre le mont Cenis de français et d’occitan qu’on appelait à atones fi nales (y compris le a) se sont et Suse). Pour l’Italie, il faut ajouter les deux l’époque provençal. D’autres propositions amuïes très récemment dans la plupart des communautés de et de Celle di San de dénomination ont, par la suite, été mots. Mais, comme en rencontre encore Vito dans la province de Foggia (Pouilles) avancées par les dialectologues (moyen- des traces de paroxytonisme (à la 3e où le francoprovençal fut introduit au rhodanien, français du sud-est par exemple). personne du pluriel des verbes notamment) 13e et au 14e siècles par des immigrés Il est diffi cile de savoir si arpitan, le dernier et des formes /vja/ (< VITA) et rwa (< provenant d’une zone francoprovençale substitut qu’utilisent actuellement certains ROTA) qui sont d’anciennes formes /’via/ que les spécialistes (en particulier militants, connaitra plus de longévité que et /’rua/, on peut, à la suite de Gaston Michelle Melillo) situent à la jonction des les autres (cf. l’article de James Costa). Tuaillon, considérer cette aire comme du actuels départements français de l’ et francoprovençal dégradé ou francisé. de l’Isère. LE FRANCOP

DDL, UMR

L’origine du francoprovençal remonte à Il existe de nombreux traits qui La délimitation entre le francoprovençal la conquête romaine, plus précisément individualisent le francoprovençal à l’inté- et l’occitan s’opère à partir du double à la fondation de Lugdunum en 43 avant rieur du gallo-roman. La délimitation préci- traitement du A qui caractérise le franco- J.-C. C’est en eff et à partir de cette ville qui se de cette langue se fait à partir de deux provençal et qu’ignore l’occitan. En franco- devint très vite la capitale des Gaules que critères phonétiques. Il faut cependant provençal, le A tonique ou atone a connu s’est faite la latinisation de la plus grande signaler que les isoglosses tracées à partir deux évolutions diff érentes, car derrière partie de l’aire francoprovençale, d’abord de ces critères correspondent assez bien une consonne de type palatal il a évolué avec un latin assez pur, puis avec un latin à celles de plusieurs traits phonétiques en i ou e. Ainsi l’on a deux séries de tardif et populaire lorsque, à partir de ou morphosyntaxiques importants qui désinences pour les verbes du premier Lugdunum, fut entreprise la conquête de caractérisent cette langue. groupe : par exemple, le latin PORTARE la Gaule du nord. Dès le 3e siècle, il y eut a donné porta(r) (le a tonique a pu dans une orientation de plus en plus marquée La limite entre le francoprovençal et la certains parlers évoluer en o) alors que le vers le Nord où se déplaça le centre de langue d’oïl correspond à l’isoglosse latin MANDUCARE a évolué en mengie(r) gravité de l’Empire. C’est ce qui explique qui sépare le paroxytonisme possible (-ier ayant pu devenir i ou e). La limite que le francoprovençal est plus proche qu’on observe en francoprovençal et ouest et sud correspond donc à la fi n du de la langue d’oïl (donc du français) que l’oxytonisme généralisé qui caractérise double traitement du A (l’occitan dit portar de l’occitan. Gaston Tuaillon considère la langue d’oïl (et donc le français). La et manjar). d’ailleurs le francoprovençal comme du limite septentrionale du francoprovençal proto-français n’ayant pas connu certaines correspond donc à la fi n du maintien Le francoprovençal se caractérise par une évolutions septentrionales, en particulier des voyelles atones fi nales : le latin importante fragmentation (en particulier celles qui sont nées du bilinguisme roman ROSA a donné rose (en une seule syllabe sur le plan phonétique) qui s’explique, –germanique qui dura plusieurs siècles et puisque le e fi nal ne se prononce pas) en en grande partie, par le fait que Lyon qui modifi a profondément la langue romane français, mais rosa (en deux syllabes) en en était le centre directeur a abandonné qui fi nit par s’imposer. francoprovençal. Les nombreux toponymes dès la fi n du Moyen Age sa langue pour en -az et -oz (par ex. La Clusaz, Saint- prendre celle du roi (Lyon est alors devenu Jorioz) que l’on trouve dans la majeure un centre important de diff usion du français). Comme aucune ville ne prit alors nasale remonte probablement au latin locuteurs est faible et que la transmission 3 le relais, les parlers francoprovençaux INDE ; familiale de la langue a cessé depuis ont connu des évolutions foisonnantes > la création des formes de possessif plusieurs décennies. L’enseignement ne et assez souvent autonomes, empêchant notron ou votron par analogie de mon, ton, permet pas de compenser ce handicap, le regroupement en familles dialectales son ; car il reste très limité, le ministère de comparables à celles que l’on observe > le maintien de très nombreuses formes l’Éducation nationale ne reconnaissant dans les langues gallo-romanes voisines. fortes à la 2e personne du pluriel de l’indi- pas le francoprovençal comme langue La distinction proposée par Oscar et Hans- catif présent ou de l’impératif (par ex. optionnelle au baccalauréat. Erich Keller entre un francoprovençal ventes ou vendes « vendez », sates ou du nord et un francoprovençal du sud sades « savez ») ; Le pessimisme doit cependant être n’a pas été retenue. On ne peut pas non > les formes de l’indicatif imparfait des tempéré, car actuellement de nombreuses plus considérer comme pertinentes d’un groupes II et III comportant le morphème v initiatives au niveau associatif voient le point de vue linguistique les appellations et refaites sur les formes du groupe I (par jour un peu partout afi n de remettre en de francoprovençal de l’ouest, du centre ex. venive « venait », vendave « vendait ») ; honneur et tenter de revitaliser l’héritage ou de l’est parfois utilisées, car on > Les formes verbales en -ess- (et non linguistique transmis par plus de soixante n’observe pas d’évolutions importantes en -iss-) remontant aux formes latines en générations. Il faut aussi noter que le correspondant aux aires délimitées par -ESCO (par ex. finèssont « fi nissent »). substrat francoprovençal a laissé des l’axe Saône – Rhône ou les frontières traces importantes et bien vivantes dans entre la France et la Suisse ou l’Italie. Ces quelques exemples démontrent que le français qui lui a succédé. De même les appellations savoyard, le francoprovençal se caractérise par le bressan, dauphinois, lyonnais, forézien maintien de traitements originaux anciens La Région Rhône-Alpes a décidé en 2009 souvent utilisées reposent plus sur des et par des innovations importantes. d’apporter un soutien important à ses deux fondements historiques ou géographiques Son étude est précieuse pour illustrer la langues régionales : le francoprovençal que linguistiques. dynamique du langage. et l’occitan (qui est parlé dans le sud

PROVENÇAL Jean-Baptiste Martin R 5596 (CNRS-université Lyon2/université de Lyon)

Malgré leur diversité, les parlers Le francoprovençal a été écrit dès le Moyen de la région). Comme le montre l’article francoprovençaux présentent un grand Age et les documents d’archives sont d’Abraham Bengio, de nombreuses nombre de traits communs qui les nombreux. Il a véritablement commencé actions sont mises en place. Ces mesures individualisent à l’intérieur du gallo-roman. à être utilisé comme langue littéraire conforteront l’action des militants et des Parmi les plus importants ou les plus au 13e siècle. Même si la littérature en locuteurs. La contribution de Saverio Favre originaux, on peut citer : francoprovençal n’est pas comparable à prouve qu’une volonté politique forte et un > le maintien, dans certaines conditions, du la littérature française ou occitane, elle appui important des autorités sont des U latin atone fi nal (par ex. codo « coude ») ; mérite d’être connue et est loin d’être éléments déterminants pour la survie des > l’évolution en θ et δ du C et G latins négligeable (voir p. 4). langues régionales puisque, dans la Vallée devant A (par ex. /θãto/ « chanter ») ; d’Aoste, le francoprovençal a une vitalité > le déplacement de l’accent tonique sur la Les parlers francoprovençaux sont de bien plus grande que dans le reste du voyelle fi nale primitivement atone que l’on moins en moins employés en France et domaine. observe dans des aires importantes (par en Suisse. Au Val d’Aoste, grâce à l’appui ex. FARINA devenant fa’rina ou far’na) ; fort et ancien des autorités, il bénéfi cie Nos langues régionales expriment mieux > les quatre formes diff érentes de l’article d’une vitalité bien supérieure, comme que les autres les couleurs et les saveurs défi ni, malgré l’absence du s du pluriel le souligne l’article de Saverio Favre des terroirs sur lesquels elles se sont (par ex. /lo/,/la/ /lu/,/le/) ; (p. 10), directeur du Bureau régional formées. Elles sont un patrimoine régional > la distinction entre le neutre et le pour l’ethnologie et la linguistique. Le mais aussi le patrimoine de l’humanité, masculin pour le pronom personnel sujet et francoprovençal est globalement une car chaque langue représente une façon complément à la 3e personne (en français langue en danger. La présentation de la particulière de dire le monde et d’exprimer régional, on retrouve la permanence du situation sociolinguistique dans la partie la pensée. Nous devons faire le maximum neutre avec l’emploi du pronom personnel rhônalpine qui est faite par Michel Bert et pour les documenter et favoriser leur complément d’objet direct y : ex. « T’as qui reprend les données de l’étude FORA emploi. pas besoin de m’y dire, j’y sais déjà ») ; conduite en 2009 dans le cadre de l’Institut > la forme accentuée du pronom Pierre Gardette (université catholique démonstratif neutre cen dont la voyelle de Lyon) montre que le nombre des 4 LA LITTÉRATURE FRANCOPROVENÇALE

Jean-Baptiste MARTIN DDL, UMR 5596 (CNRS-université Lyon2/université de Lyon)

ême si elle n’est pas comparable La littérature de l’époque médiévale est comme la Descripsion de la misera de à la littérature écrite en français assez pauvre puisque, si l’on ne prend Santetieve l’an 1693 et 1694 où Jean Mou en occitan, la littérature pas en compte les textes d’archives (par Chapelon décrit la misère et les épidémies en francoprovençal présente un intérêt ailleurs abondants), nous ne connaissons de cette ville victime d’une grave crise certain. Elle a été rédigée principalement que trois œuvres : Les légendes en prose et économique et sociale en prenant le parti en vers (les principaux genres représentés La somme du code qui sont des traductions de ses compatriotes accablés par tant de sont le théâtre, la poésie, les noëls, les d’œuvres latines, les récits édifi ants de la malheurs. fables, les satires, les pièces d’actualité, moniale Marguerite d’Oingt qui a décrit les complaintes, les chansons). Les ses expériences mystiques, ses visions Parmi les genres illustrés par les auteurs productions en prose sont peu nombreuses et celles de sa sœur en religion Béatrice du 18e siècle, on trouve la satire, la (romans, contes, légendes, récits de vie). d’Ornacieux. complainte, le noël, la chanson politique et les pièces d’actualité. L’œuvre la plus Il est impossible de présenter ici un Le 16e siècle marque véritablement le intéressante de cette époque est Grenoblo panorama complet et les lignes suivantes début de la littérature francoprovençale, malhérou où le Grenoblois Blanc-la-Goutte ne constituent qu’un résumé fort car treize œuvres nous sont parvenues. décrit de façon poignante la terrible succinct, suivi de quelques indications Les deux principaux auteurs sont le inondation dont sa ville fut victime en bibliographiques sur certains auteurs ou Savoyard Nicolas Martin, auteur de noëls 1733 (elle montre que, dans notre région, œuvres cités. On trouvera des informations et de chansons, et le Grenoblois Laurent de les inondations catastrophiques ne sont beaucoup plus complètes dans l’ouvrage Briançon, auteur de trois longs poèmes. pas un phénomène récent). La littérature en francoprovençal avant La période entourant le règne d’Henri IV a 1700 qui a été publié en 2001 par Gaston été particulièrement féconde. Les rivalités Au 19e siècle, les auteurs principaux Tuaillon et qui présente de façon beaucoup entre la Savoie et Genève sont à l’origine sont des poètes. Les plus connus sont plus complète la littérature écrite depuis le d’une douzaine de textes historiques. le Ripagérien Guillaume Roquille et le Moyen Age jusqu’à la fi n du 17e siècle. Pour Deux méritent une attention particulière. Stéphanois Jacques Vacher qui étaient la Suisse romande une recension complète Le Cé qu’é laino célèbre l’échec de des poètes engagés aux côtés de la de la littérature patoise a été faite en 1912 l’escalade de Genève par les Savoyards classe ouvrière, les Savoyards Joseph par Louis Gauchat et Jules Jeanjaquet en décembre 1602 et est devenu l’hymne Béard et Amélie Gex et le Valdôtain Jean- dans la Bibliographie linguistique de la national genevois. La moquerie savoyarde Baptiste Cerlogne qui est le fondateur de Suisse romande (pages 71-243 du tome I). publiée en 1603 par un auteur qui a voulu la littérature valdôtaine. Des échantillons de cette littérature sont garder l’anonymat (il s’agit probablement proposés dans trois autres ouvrages de l’imprimeur lyonnais Louis Garon, Au 20e siècle la littérature a décliné. portant sur l’ensemble ou une partie originaire de Genève) illustre, un demi- Deux auteurs méritent cependant une importante du domaine. Le premier, qui siècle avant La Fontaine, la célèbre fable attention particulière : le Roannais Louis est intitulé Chrestomatie franco-provençale « Le meunier, son fi ls et l’âne » (l’Italien Mercier dont Les contes de Jean-Pierre et qui a été publié en 1950 par Paul Poggio Bracciolini l’avait d’ailleurs lui publiés en édition bilingue en 1928 ont Aebischer, contient des textes antérieurs aussi racontée un siècle et demi plus tôt) ; connu un rayonnement dans toute la à 1630 (dont un certain nombre de textes l’auteur a utilisé cette fable pour signifi er région lyonnaise et le Savoyard Pierre non littéraires). Le deuxième, qui s’intitule qu’il convenait désormais de mettre un Grasset qui écrit actuellement des romans Textes littéraires en dialecte lyonnais et qui terme aux moqueries contre le Duc de ethnographiques. a été publié en 1981 par Simone Escoffi er et Savoie. Anne-Marie Vurpas, fournit l’ensemble des textes écrits à Lyon et dans le Lyonnais. Le La littérature est assez abondante au troisième, qui est intitulé Francoprovençal 17 e siècle. Les principaux auteurs sont les et occitan, huit siècles de littérature en Bressans Bernardin Uchard et Brossard de Rhône-Alpes : morceaux choisis et qui Montaney, le Grenoblois Jean Millet et le a été publié en 2010 par Jean-Baptiste Stéphanois Jean Chapelon qui sera une Martin et Jean-Claude Rixte dans le cadre source d’inspiration pour de nombreux des actions de valorisation entreprises par auteurs de la région stéphanoise au siècle la Région Rhône-Alpes, fournit des extraits suivant. Le genre dominant est le théâtre, de la littérature francoprovençale depuis mais on trouve aussi des noëls, des épitres, le 13e siècle jusqu’à aujourd’hui. des chansons ou des poèmes d’actualité Situation sociolinguistique du francoprovençal : l’étude FORA 5 Michel Bert, CNRS – université Lyon2/université de Lyon

usqu’à récemment, la Ré- enquêtes qualitatives réalisées aujourd’hui très faible. L’usage associations sont toutes appa- gion Rhône-Alpes ne s’était dans au moins deux aires par de la langue régionale diminue, rues après la Seconde Guerre Jpas dotée d’une politique de département, et conduites par et dans la plupart des cas, il se mondiale. Depuis, leur nombre valorisation des langues régio- des personnes connaissant ces limite à la sphère privée. Mais s’est accru, et ce mouvement nales parlées sur son territoire. régions et la langue qui y est par- on peut noter qu’une certaine s’est encore amplifi é durant la Mais en 2007, un appel à pro- lée. Ces enquêtes, basées sur transmission perdure, au sein dernière décennie, jusqu’à tis- jets a été lancé en vue de la des observations, des entre- de la famille ou dans certains ser un maillage très étroit dans « réalisation d’une étude sur les tiens ou des conversations infor- contextes particuliers : associa- certaines régions. Ainsi, dans langues régionales (occitan et melles, visaient à évaluer loca- tions, activités professionnelles, l’Ain par exemple, il existe plus francoprovençal/savoyard) en lement la vitalité de la langue. chasse… d’une centaine de groupes œu- Rhône-Alpes ». Cette étude de- À partir de ces matériaux, l’étu- Les enquêtes ont également vrant autour du francoproven- vait se dérouler en deux phases : de FORA dresse un tableau de montré qu’il existait une deman- çal aujourd’hui. > phase 1 : établir un état des la situation sociolinguistique de de importante des Rhônalpins Ces groupes sont en général lieux des pratiques sociolinguis- l’occitan et du francoprovençal (locuteurs ou non d’une langue composés de locuteurs « ordi- tiques en Rhône-Alpes, rendre en Rhône-Alpes. Plutôt que de régionale) de mesures en faveur naires », de diff érents niveaux compte des attentes et des es- tenter de dénombrer les locu- de l’occitan et du francoproven- de compétence dans la langue, poirs des habitants de Rhône- teurs de ces langues, tâche çal en Rhône-Alpes. et les néo-locuteurs sont peu Alpes en la matière ; périlleuse aux résultats sujets nombreux. L’objectif de ces > phase 2 : préconiser les termes à caution comme dans toute Des particularités régionales groupes n’est que rarement d’une politique pour la Région situation de langues en danger, l’enseignement, mais on peut Rhône-Alpes. l’étude s’est attachée à décrire Au sein de Rhône-Alpes, la si- observer au cours du temps L’équipe universitaire qui a été la composition de la population tuation du francoprovençal et une certaine transmission en- chargée de cette étude était des locuteurs, en prenant en celle de l’occitan se distinguent tre locuteurs natifs et semi-lo- composée de deux centres de compte l’usage de la langue, principalement dans deux do- cuteurs. La convivialité est la dialectologie, l’Institut P. Gardet- le niveau de compétence/mai- maines, l’enseignement et le fi nalité principale des rassem- te, organisme porteur du projet, trise des diff érents profi ls de tissu associatif. blements. Les activités s’orga- et le Centre de dialectologie de locuteurs, le type de transmis- L’occitan est enseigné depuis nisent autour de projets locaux Grenoble, et de deux laboratoi- sion dont ils ont bénéfi cié ou déjà longtemps dans le sud de (collectes, monographies, dic- res lyonnais, ICAR et DDL1, spé- leurs représentations de la lan- Rhône-Alpes (Drôme et Ardè- tionnaires) et de la préparation cialisés respectivement dans gue. Ce tableau est complété che), et l’eff et de cet investis- de fêtes ou de veillées (chants, les domaines de l’enseigne- par des indications sur la date sement, pourtant relativement saynètes, histoires). Beaucoup ment des langues minoritaires de l’abandon de la transmis- limité, car le nombre d’éta- de ces groupes ne sont pas et du travail sur les langues en sion de la langue aux enfants, blissements dispensant un tel constitués en associations, et danger. Ce réseau de recher- l’évolution de son usage, son enseignement a toujours été leurs revendications sont très che, piloté par M. Bert (co-- enseignement éventuel, sa visi- assez faible et tend de plus à timides. De plus, les contacts ponsable avec J. Costa de bilité et son « audibilité », ou les diminuer, est cependant mesu- entre groupes ou associations l’étude, J.-B. Martin étant activités culturelles qui lui sont rable dans certaines tranches sont assez limités et il n’existe conseiller scientifi que), asso- associées. d’âge. Le francoprovençal est pas de fédération au niveau ciait également des associations Les résultats de ce travail de dans une situation plus fragile, régional, même si de telles en- locales de promotion du franco- terrain montrent que la grande car l’enseignement de cette lan- tités existent déjà depuis long- provençal ou de l’occitan. majorité des Rhônalpins capa- gue ne touche qu’une très faible temps en Savoie (Lou R’biolon) bles de s’exprimer en occitan population d’enfants (voir p. 8). et depuis peu, à une échelle L’étude FORA ou en francoprovençal sont Le réseau associatif de promo- plus restreinte, dans les Monts âgés d’au moins 60 ans, ce tion de la langue est également du Lyonnais. La première partie de l’étude qui signifi e que la transmis- très diff érent en domaine fran- À partir de l’état des lieux FORA (Francoprovençal – Occi- sion maternelle de la langue a coprovençal et en domaine oc- dressé dans le premier volet de tan – Rhône-Alpes2) s’appuie cessé. De plus, le nombre de citan. Dans ce dernier, il existe l’étude, une série de sugges- sur une série de sondages personnes pour qui une de ces depuis longtemps une tradition tions à destination de la Région eff ectués auprès d’adultes et deux langues est langue ma- de soutien à la langue, organi- Rhône-Alpes a ensuite été émi- d’enfants, mais surtout sur des ternelle ou co-maternelle est sée dans des réseaux fédérés se dans des domaines comme d’associations, comme l’Institut l’enseignement, la culture, les 1 www.univ-catholyon.fr/acces-direct/fac- 2 Pour consulter l’étude : d’Estudis Occitans ou le Félibri- médias ou la recherche. Une ecoles-instituts/institut-pierre-gardette ; www.rhonealpes.fr ou ge. Une telle tradition n’existe partie de ces préconisations a w3.u-grenoble3.fr/dialecto, http://icar. www.ddl.ish-lyon.cnrs.fr/led-tdr, pas pour le francoprovençal. été reprise par la Région Rhô- univ-lyon2.fr, www.ddl.ish-lyon.cnrs.fr menu « Profi ls sociolinguistiques ». En France, les plus anciennes ne-Alpes en 2009 (cf. p. 7). 6 PATOIS, GAGA, SAVOYARD, FRANCOPROVENÇAL, ARPITAN… Quel nom pour une langue ?

James COSTA ICAR (CNRS UMR 5191)

Une hétérogénéité de désignants Nommer les langues, il y a la volonté d’imposer une manière quelles implications ? particulière de faire exister une langue. Au cours de l’étude FORA (voir l’article Le passage du terme francoprovençal vers précédent), en particulier dans son volet Cette multiplicité de désignants permet celui d’arpitan refl ète en ce sens la volonté quantitatif (près de 1 000 questionnaires de s’intéresser au sens que l’on peut de certains militants de cette langue en provenance de toute la région Rhône- donner à l’activité même de nomination d’imposer une auto-catégorisation de leur Alpes), il est apparu que plusieurs termes des langues. C. Canut (2000) rappelle réalité linguistique qui surtout ne soit plus étaient utilisés par les acteurs sociaux que nommer, c’est à la fois faire exister, tributaire du nom d’autres langues (en sur le terrain pour désigner ce que les instituer socialement et catégoriser. En l’occurrence, le français et le provençal). linguistes ont appelé depuis le 19e siècle cela, c’est également tenter d’imposer un Cette nouvelle désignation promeut une franco-provençal puis francoprovençal. classement particulier du réel qui refl ète image de la langue plus conforme à leur Le désignant « patois » reste le terme le des positions sociales et divers intérêts propre manière de concevoir le monde plus employé par les locuteurs comme idéologiquement marqués. Chaque nom linguistique. par les non-locuteurs, éventuellement renvoie de fait non seulement à des accompagné d’une caractérisation géo- réalités diff érentes partagées au sein La question du francoprovençal permet ainsi graphique : patois bressan, patois savoyard, de réseaux diff érents, mais aussi à des de réfl échir brièvement sur la signifi cation etc. D’autres désignations locales ont conceptions particulières d’un espace sociale de l’activité de nomination des également été relevées, comme « gaga » linguistique et éventuellement politique, langues, activité profondément ancrée à Saint-Étienne, qui peut qualifi er à la fois et, par-delà ces considérations, à des dans les idéologies européennes de l’État- le français régional local ou la variété de références mythiques particulières. nation ; dans d’autres régions du monde, francoprovençal utilisée sur place. En on considère les langues bien autrement, Savoie, le terme « savoyard » est également Ainsi, si le terme francoprovençal renvoie et la question de leur nomination renvoie à largement connu. à un espace linguistique, en l’occurrence d’autres enjeux parfois très diff érents de à une mosaïque de parlers regroupés au ce que nous connaissons en Europe. L’appellation francoprovençal tend quant à 19e siècle par un linguiste italien, G. I. elle à se diff user graduellement dans les Ascoli, le terme d’arpitan renvoie quant à lui réseaux associatifs, sans doute du fait d’un à un espace politique potentiel, l’Arpitanie, travail accru avec des linguistes. Avec la au sein duquel l’arpitan serait la langue diff usion de ce terme, c’est l’inscription de héritée et en voie de disparition. Le terme pratiques locales dans un cadre linguistique d’arpitan facilite ainsi une identifi cation plus large qui est à l’œuvre. Les locuteurs entre langue, territoire et peuple, selon le s’inscrivent ainsi dans un espace qui triptyque classique dans la construction englobe la Savoie, la Bresse, le Lyonnais, des États-nations européens depuis le le Dauphiné, mais aussi la plus grande 18e siècle. partie de la Suisse Romande, et surtout le Val d’Aoste, véritable conservatoire de Les langues sont des constructions pratiques langagières francoprovençales humaines, des segmentations du social Références actuelles. Nous avons, enfi n, été surpris à partir de critères qu’un groupe se > CANUT Cécile 2000, « Le nom des langues ou par l’absence du terme « arpitan » dans donne. Elles n’ont aucune existence en les métaphores de la frontière », Ethnologies les questionnaires recueillis, absence soi (Sinfree & Makoni, 2007), mais en Comparées, 1, pp. 1-18. d’autant plus remarquable que le terme tant que modalités de catégorisation > MAKONI Sinfree & PENNYCOOK Alastair 2007, est en concurrence sérieuse avec du réel, elles condensent des intérêts, Disinventing and reconstituting languages, in francoprovençal sur internet. Arpitan des idéaux, des ambitions collectives. S. Makoni & A. Pennycook (Eds.), Disinventing semble en usage principalement au sein Derrière chaque manière de nommer and reconstituting languages (pp. 1-41), de réseaux plus jeunes et plus militants. un ensemble de pratiques linguistiques, Multilingual Matters, Clevedon. L’enseignement scolaire du francoprovençal : 7 l’exemple du savoyard en Savoie Marc BRON Président de l'AES1

Mise en place de 2000 – 2010 : l’enseignement de l’Académie de Grenoble. Sur nale. Elles travaillent en par- l’enseignement du francoprovençal se la période 2004 – 2010, il y a tenariat avec l’AES qui vient développe un nombre moyen d’élèves de d’organiser, à Habère-Poche L’enseignement du franco- 275 par année, répartis sur huit (Haute-Savoie), du 23 au 25 oc- provençal se développe de fa- Un concours annuel similaire établissements. tobre 2010, le 24e colloque de la çon sporadique, en Savoie et au concours valdôtain est créé Il est à noter que, si l’enseigne- FLAREP, (Fédération des lan- en Haute-Savoie2, à partir de en 2000 en Haute-Savoie et ment est stable en collège et gues régionales dans l’ensei- 1970. Des instituteurs y initient Savoie : le Concours scolaire lycée, il est relativement fl uc- gnement public). Ce colloque leurs élèves au savoyard, dé- de savoyard Constantin et tuant sur les écoles primaires. avait pour titre « Enseignement passant le cadre des enquêtes Désormaux, du nom des au- Cela vient du fait que la langue bilingue français / langue régio- toponymiques et des quelques teurs du fameux Dictionnaire est une option dans le premier nale de Savoie : une clé de réus- chansons qui se chantaient (la Savoyard édité en 1902. Cela cas, alors qu’elle n’est liée qu’à site pour les élèves ». Mayon su on pomi…) pour leur se réalise en accord avec les des projets éducatifs revus an- apprendre des saynètes3. Les inspections académiques et nuellement dans le second cas. La non-reconnaissance du élèves les produiront souvent les conseils généraux. De 200 Dans toutes les situations, la francoprovençal par le lors de la fête de fi n d’année. à 300 élèves y participent cha- présence de cet enseignement ministère de l’Éducation Dans les années 1980, quel- que année. est d’abord due à la personna- nationale ques cours débutent en collège Entre 2000 et 2010, l’ensei- lité des enseignants. (La Roche-sur-Foron, Boëge, gnement progresse encore : Depuis des dizaines d’années, Bons-en-Chablais, Saint-Jeoire- à l’école d’Habère-Lullin, l’en- Un enseignement des demandes sont adressées en-Faucigny, Abondance…). Ils semble de l’établissement a accompagné par la société au ministère de l’Éducation sont en général d’une heure par bénéfi cié pendant l’année sco- nationale pour que le franco- semaine et l’on passe du stade laire d’une séance par semaine Contrairement à la plupart des provençal puisse être choisi de la sensibilisation à celui de et une pratique proche s’est dé- autres enseignements qui bé- par les élèves comme option l’initiation. Ils sont fi nancés veloppée dans des écoles voisi- néfi cient de programmes et aux examens comme le Di- par le Rectorat de l’Académie nes. La disparition des cours le de formateurs, l’enseignement plôme national du brevet ou le de Grenoble qui a toujours été samedi matin a remis en cause du francoprovençal repose sur Baccalauréat. Lettres, entre- ouvert à cet enseignement. cette pratique, qui a redémarré une démarche volontariste des vues au ministère, demandes Par ailleurs, les contacts avec sous une forme plus légère. enseignants. C’est pourquoi les des parlementaires, pétitions la « Fédération des groupes de Au collège de Boëge, les élèves locuteurs naturels tout comme avec des milliers de signatu- langue savoyarde Lou Rbiolon » volontaires suivent une option le milieu associatif essaient de res, délibération de conseils se font plus réguliers ce qui de deux heures par semaine, pallier le manque de moyens municipaux, les Savoyards ne permet aux jeunes de s’expri- de la 6e à la 3e, et l’on peut par- internes de l’Éducation natio- sont pas entendus. Les répon- mer non plus seulement devant ler désormais d’un réel appren- nale. Au-delà de la Fédération ses faites par le ministère de un public de parents d’élèves, tissage de la langue. des Rbiolons évoquée précé- l’Éducation nationale fondent mais devant le grand public. D’autre part, un cours a débuté demment, il convient de citer leur refus parfois en classant Des relations s’établissent avec dans un lycée d’Annemasse l’ILS (Institut de la langue sa- le francoprovençal dans l’occi- le Val d’Aoste où l’on parle aus- en 2006, où l’on recense des voyarde le francoprovençal de tan, parfois en le situant dans si francoprovençal : échanges élèves de la seconde à la ter- Savoie) centre de ressources et les langues d’oïl, alors que le dans les familles, participations minale. de diff usions d’écrits et CD en ministère de la Culture et de la au concours scolaire de franco- Enfi n, dans les IUFM, plusieurs savoyard. L’ILS bénéfi cie d’un Communication, tout comme provençal « Jean-Baptiste Cer- séances de formation ont été soutien de la Région Rhône- l’État italien dans sa loi de 1999 logne », le premier grand poète suivies par les futurs profes- Alpes. et l’Unesco ont parfaitement valdôtain… seurs des écoles sur les sites Les parents d’élèves se sont identifi é et reconnu le franco- de Bonneville, Chambéry et également organisés avec la provençal comme une langue 1 Association des enseignants de Grenoble. création en 2006 des « asso- à part entière. D’autres fois, ce savoyard / francoprovençal. ciations pour le bilinguisme sont les œuvres littéraires qui 2 Dans ces départements, le franco- Depuis 2000, l’AES recense français/savoyard en milieu sont minimisées. Cet état de provençal est aussi appelé de façon les cours qui sont donnés en scolaire » « Vallâ Verda Ecula 2 » fait nuit grandement à l’ensei- traditionnelle « savoyard ». milieu scolaire dans les deux et « San-Zhoure Ecula 2 ». Ces gnement du francoprovençal en 3 Parallèlement des projets éducatifs départements savoyards. L’AES associations organisent des Savoie, car les élèves ne conti- sont également menés en Isère ou est membre du Conseil acadé- spectacles et des fêtes où les nuent pas une option qui n’est dans le Lyonnais. mique des langues régionales élèves jouent en langue régio- pas valorisée aux examens. 8 La politique de la Région Rhône-Alpes en faveur de ses langues régionales

Abraham BENGIO Directeur général adjoint de la Région Rhône-Alpes

ngagée depuis longtemps ensemble cohérent de préconi- Notre conviction est qu’en appelés à s’ouvrir à cette pro- dans le combat pour la sations adressées aux pouvoirs Rhône-Alpes, la bataille se blématique nouvelle. Ediversité culturelle, la publics, aux institutions, au mou- gagnera d’abord sur le terrain Région Rhône-Alpes ne pouvait vement associatif, etc. de la sensibilisation. Nombre En matière d’aménagement manquer de rencontrer sur de Rhônalpins ignorent en du territoire et de tourisme, son chemin la question de Cette étude a largement inspiré eff et jusqu’à l’existence de ces nous souhaitons favoriser la la diversité linguistique, car le rapport adopté par l’Assem- langues, ou ne considèrent signalétique bilingue, la valorisa- les langues ne permettent blée plénière le 9 juillet 2009. pas que leur transmission tion des produits du terroir et pas seulement d’échanger La délibération du Conseil ré- constitue un objectif pour les plus généralement l’attractivité de l’information, mais sont gional, que l’on peut également politiques publiques. C’est des territoires par le recours porteuses de valeurs et de trouver en ligne, sur le site de la pourquoi, dès l’adoption de la à la langue locale, ainsi que visions du monde originales. Or, Région, s’intitule « Reconnaitre, délibération, nous avons choisi le maintien du lien social défendre la diversité linguistique, valoriser, promouvoir l’occitan et de mobiliser nos outils habituels intergénérationnel et proposons c’est sans doute défendre la le francoprovençal, langues ré- de communication afi n de de recourir pour cela aux place du français en Europe gionales de Rhône-Alpes » ; elle valoriser l’étude de l’Institut contrats de développement et dans le monde, mais c’est est fondée sur la sensibilisation, Pierre-Gardette, sous forme de durable Rhône-Alpes (CDDRA), aussi favoriser le plurilinguisme l’incitation, la facilitation et en plaquettes, d’une publication aux parcs naturels régionaux de nos propres concitoyens, aucun cas sur la contrainte. « grand public », de conférences (PNR), ou aux projets straté- c’est-à-dire l’apprentissage des et autres manifestations évène- giques agricoles et de dévelop- langues étrangères, mais aussi La première mesure adoptée mentielles. De même, nous pement rural (PSADER), etc. la conservation et la promotion est d’ordre symbolique (on avons entrepris de sensibiliser de nos langues régionales, sait que ce ne sont pas les les jeunes et le milieu associatif Une concertation doit prochai- désormais inscrites dans la moins importantes !) : pour la aux bienfaits du plurilinguisme nement s’ouvrir avec les deux Constitution comme élément première fois dans l’histoire de (c’était l’un des thèmes de rectorats de la région autour du patrimoine commun de la l’institution régionale, Rhône- l’édition 2010 de l’appel à projets des comités académiques des Nation. Alpes reconnait « l’intérêt social, en faveur de la vie associative). langues régionales. Une étude culturel et patrimonial du franco- a été confi ée à la Confederacion Dans son programme pour le provençal et de l’occitan, langues Nombre de dispositifs régionaux Occitana de las Escòlas Laïcas mandat 2004-2010, la majo- régionales de Rhône-Alpes » commencent également à être Calandretas pour la création rité régionale annonçait qu’elle et décide d’adhérer à la Plate- mobilisés : dans le domaine d’une calandreta en Rhône- jetterait les bases d’une forme des langues régionales artistique et culturel, le Fonds Alpes. Enfi n, des actions sont en politique en faveur des langues proposée par l’Association des pour l’innovation artistique et cours de défi nition à l’échelon et des cultures régionales. régions de France. culturelle régionale (FIACRE), interrégional, dans le cadre de À cet eff et, une étude sur la l’appel à projets « mémoires » l’Association des régions de situation de ces langues en Un « élu référent pour les lan- ou le fonds d’aide à l’édition ont France. Rhône-Alpes, assortie de pro- gues régionales » a ensuite été ainsi été adaptés pour répondre positions concrètes, fut confi ée désigné (après les récentes à ce nouvel objectif, de même On disait les langues régionales après appel d’off res, à l’Institut élections régionales, Michel que les aides directes aux moribondes en Rhône-Alpes… Pierre-Gardette de l’université Grégoire a succédé dans ces écrivains, éditeurs et libraires, Ces eff orts seront-ils suffi sants catholique de Lyon, associé à fonctions à Gérard Bertrand). La aux compagnies et ensembles pour inverser le cours des plusieurs laboratoires spécia- Région a recruté un conseiller théâtraux et musicaux, à la fi lière choses ? Nous espérons en tout lisés. L’étude a été conduite par scientifi que, en la personne de phonographique et à la création cas contribuer ainsi à la prise Michel Bert en collaboration Jean-Baptiste Martin, profes- audiovisuelle. Dans le secteur du de conscience qui permettra avec James Costa ; Jean-Bap- seur émérite de cultures et lan- patrimoine, l’Inventaire général de déjouer les pronostics tiste Martin en était le conseiller gues régionales et ancien doyen du patrimoine culturel, le fonds et d’enrayer leur disparition scientifi que. On trouvera sur de la faculté d’anthropologie et régional pour les acquisitions programmée. le site internet de la Région de sociologie de Lyon 2. Nous des musées, le fonds régional (www.rhonealpes.fr) le texte de avons également constitué un pour les acquisitions des cette passionnante étude, qui comité de suivi de la politique bibliothèques, le dispositif de propose d’abord un état des en faveur des langues régiona- soutien à la recherche dans le lieux très précis de l’occitan et les, composé d’élus et de pro- cadre du Schéma régional de du francoprovençal en Rhône- fessionnels. l’enseignement supérieur et de Alpes, et formule ensuite un la recherche, sont également i le français parlé dans Lyon, qui a été un important naturellement originaire des 9 les grandes aggloméra- centre de diff usion du français Alpes (par ex. avalanche qui Stions comme Lyon ou dès la fi n du Moyen Age, a est une déformation du mot Grenoble est aujourd’hui peu diff usé la langue du roi mais régional lavanche, alpage, chalet marqué régionalement, il en va aussi des mots qui étaient – popularisé par Rousseau–, diff éremment en milieu rural employés dans cette région luge…). Grâce aux médias ou à et dans les villes dont le tissu (c’est le cas de fayard qui est des écrivains de grand renom, social est resté plus stable. Les utilisé dans l’est de la France d’autres mots sont en train de nombreuses enquêtes réalisées pour désigner le hêtre, com- passer du registre régional dans dans les vingt-cinq dernières me le montre le Dictionnaire le français commun (par ex. années (une grande partie a des régionalismes de France, bouchon, mâchon, beaucoup été eff ectuée dans le cadre p. 448-454, en particulier la de noms de spécialités culi- de l’Institut Pierre Gardette carte de la p. 454). naires). Frédéric Dard a fait de l’université catholique de passer dans le français popu- Lyon qui dispose d’une base On trouve dans l’ensemble ou laire ou argotique des mots du de données comportant près dans une partie importante Nord-Dauphiné ou de Lyon où de 100 000 attestations) ont de l’aire francoprovençale il a passé sa jeunesse (par ex. permis de relever plus d’un des régionalismes que les agacin, trivaste, envoyer aux millier de régionalismes dans grands dictionnaires français pelosses). chacun des terrains étudiés et ont présenté ou présentent les tests de vitalité pratiqués encore comme uniquement On assiste à l’heure actuelle ont montré qu’un quart était ou essentiellement des helvé- à un double mouvement. encore bien vivant. tismes (par ex. appondre déjà Les mutations sociologiques, cité, être en balan « être dans économiques, technologiques La variation régionale s’observe, l’incertitude », dédite « dédit, et culturelles font disparaitre comme dans les autres régions, congé (en parlant d’un loge- beaucoup de régionalismes, au niveau de l’intonation, de la ment) », panosse « serpillière », en particulier ceux qui sont grammaire et du vocabulaire. galetas « grenier servant de liés à la vie traditionnelle (on Parmi les traits phonétiques, débarras »). Cela s’explique par observe le même phénomène on peut citer la vélarisation le fait que nos lexicographes se pour le vocabulaire non régio- du a tonique (par ex. avocat sont intéressés à la variation nal). La mobilité qui caracté- prononcé avocât), la fermeture du français parlé dans les pays rise la société actuelle et les du eu ouvert (jeune prononcé francophones voisins (Suisse nouveaux moyens de commu- comme jeûne). Le régionalisme et Belgique) beaucoup plus tôt nication permettent à d’autres grammatical le plus vivant est qu’à la variation du français de franchir les limites de l’aire l’emploi de y comme pronom à l’intérieur de l’Hexagone. où ils sont nés (on observe personnel complément d’objet En fait, beaucoup de traits souvent des décalages entre direct neutre (par ex. « Ne m’y du français parlé en Suisse l’aire d’emploi d’un régionalisme répète pas, j’y sais bien »). Les romande sont utilisés aussi et l’aire d’emploi du terme adjectifs verbaux indiquant dans une partie contigüe dialectal dont il est le conti- l’état jouissent, eux aussi, de la France (le Dictionnaire nuateur) et même, à certains, d’une belle vitalité (par ex. « J’ai suisse romand rédigé par de passer du stade régional trop mangé, je suis gonfle », André Thibault qui donne pour dans le français commun. « J’ai pris une bonne radée, je chaque mot les attestations suis trempe ». relevées de part et d’autre de la frontière le prouve nettement). Le vocabulaire régional est très Cette situation s’explique par riche et il constitue, de loin, la une longue histoire linguistique part la plus importante des commune qui a commencé régionalismes. Certains mots avec la romanisation de cette Références ou certains sens sont propres aire. > THIBAUL André (rédacteur) & au domaine francoprovençal KNECHT Pierre (dir.) 2004, Diction- (c’est le cas de boutasse Beaucoup de traits régionaux naire suisse romand, particularités « mare », gabouille « boue ont été incorporés dans le lexicales du français contemporain, ARTIN liquide », appondre « ajouter », français commun. Des mots Carouge-Genève, Éditions Zoé, vogue « fête patronale, fête comme flapi, guignol, jacasser, 2004. foraine »). D’autres dépassent ronchonner sont d’origine > RÉZEAU Pierre (éd.) 2001, Diction- largement le cadre de cette ré- lyonnaise. Le vocabulaire de naire des régionalismes de France,

Jean-Baptiste M Jean-Baptiste de Lyon) Lyon2/université DDL, UMR 5596 (CNRS-université Région Rhône-Alpes gion (par ex. patte « chiff on »). l’alpage et de l’alpinisme est Bruxelles, De Boeck-Duculot. Les régionalismes du français sur substrat francoprovençal Les régionalismes 10 La Vallée d'Aoste : citadelle du francoprovençal

Saverio FAVRE Bureau régional pour l’ethnologie et la linguistique (Aoste)

« La Vallée d’Aoste constitue la seule grande la Fondation Chanoux en 2003, en Vallée > l’Association valdôtaine des archives région du domaine francoprovençal dont le d’Aoste, 67,4 % de la population connait le sonores, fondée en 1980 pour constituer dialecte pourra survivre longtemps encore, francoprovençal sous une forme ou une les archives sonores valdôtaines en malgré la rage de détruire le passé qui a autre, 30,2 % déclare ne pas le connaitre, recueillant tout le matériel sonore ayant accompagné la modernisation galopante 81,8 % le comprend, 45,8 % le parle. Sur trait à la réalité de la Vallée d’Aoste. du 20e siècle. » la base des critères établis par l’Unesco, le francoprovençal valdôtain manifesterait, L’engagement de l’Assessorat de l’édu- insi écrivait Gaston Tuaillon à la compte tenu de ces données, une assez cation et de la culture pour faire vivre le fi n des années soixante-dix. Cette bonne vitalité. patois, lui conférer un nouveau prestige et Aaffi rmation est encore actuelle, bien lui imprimer un nouvel élan, se traduit par que, au cours des trente dernières années, À partir des années où le sentiment que de nombreuses initiatives qui, au fi l des beaucoup de choses aient changé. Le le patois était en danger commençait à années, ont déjà porté leurs fruits, même francoprovençal, dans sa globalité, est une se diff user, l’Administration régionale a s’il ne faut jamais lâcher prise. En voici les langue menacée : en dehors de la Vallée déployé une intense activité en faveur de principales : d’Aoste, il a été complètement abandonné, la langue du cœur des Valdôtains, lançant dans la plupart des cas, ou bien il survit ses propres initiatives et soutenant > le Concours Cerlogne, organisé en de façon sporadique. Dans notre région, les associations qui partageaient les collaboration avec le Centre d’études au contraire, il jouit encore de conditions mêmes préoccupations et poursuivaient francoprovençales et dédié à la mémoire particulièrement favorables et est pratiqué les mêmes buts. Aujourd’hui, même si de ce grand félibre valdôtain ; il est né en un peu partout, même au niveau politique elles sont fondées sur le bénévolat, ces 1963 pour sauvegarder et promouvoir le et administratif : l’on remarque cependant associations poursuivent leur action grâce francoprovençal et la civilisation alpestre un recul progressif dans son emploi, aux aides et aux fi nancements assurés par en Vallée d’Aoste, par le biais de l’école, surtout chez les jeunes générations. la Région. en sensibilisant élèves et enseignants ; Au fi l du temps, il a vécu des phases de > l’École populaire de patois, initiative marginalisation dues à diff érentes causes, Les principales associations culturelles qui remonte à 1995 et vise à diff user la de la dénatalité à l’exogamie, en passant par œuvrant pour la cause du patois, connaissance du francoprovençal ; l’industrialisation, le tourisme, l’abandon reconnues par la loi régionale n° 79 > le Festival des peuples minoritaires, moment des campagnes, le dépeuplement de la de 1981 et pouvant donc bénéfi cier de de rencontre et d’échange entre identités montagne et la priorité de l’italien sur les conditions particulièrement favorables, diff érentes, alliant musique et approfon- autres codes linguistiques, dans la presse, sont les suivantes : dissements sur les diversités culturelles ; à la télévision, ainsi que dans une bonne > la Fête internationale des patois, dont partie des situations communicatives > le Comité des traditions valdôtaines, l’organisation revient tous les quatre ans à de tous les jours. De plus, dans les fondé en 1948, dont les objectifs sont, la Vallée d’Aoste ; années 60-70, l’école a, elle aussi, été entre autres, de maintenir les traditions > le Guichet linguistique, fi nancé par la un formidable élément de dissuasion à en usage et de faire revivre celles qui sont loi nationale n° 482/1999 ; en réseau l’égard du patois, en désignant ce dernier tombées dans l’oubli ; avec les 71 communes valdôtaines comme l’un des principaux responsables > le Charaban – Théâtre populaire en francoprovençales ; outre son rôle insti- de l’échec scolaire, ce qui a poussé bien patois, fondé en 1958, dans le but, entre tutionnel, il eff ectue des traductions, des parents à parler italien à leurs enfants. autres, de promouvoir et de faire revivre rédige des textes et s’emploie à créer Aujourd’hui, nous assistons à un retour du toutes les manifestations de la culture un glossaire, sur support électronique, patois, à un désir de l’apprendre même populaire traditionnelle valdôtaine, notam- concernant toutes les variantes de patois chez des Valdôtains qui ne sont pas de ment le théâtre ; du territoire régional ; souche, ce qui a donné lieu à la naissance > le Centre d’études francoprovençales > le projet Théâtre populaire : publication d’une nouvelle catégorie de patoisants. « René Willien » de Saint-Nicolas, fondé illustrant l’histoire du théâtre en Vallée L’action de l’Administration régionale et, en 1967 par René Willien, dont l’objectif d’Aoste complétée par une collection de notamment, de l’Assessorat de l’édu- prioritaire est de promouvoir les études et DVD décrivant l’activité de la Fédérachon cation et de la culture, joue dans ce les recherches dans le domaine des patois valdoténa di téatro populéro ; contexte un rôle central, en contribuant à valdôtains et de l’ethnologie de toute la > Des visages et des mots : une collection sauvegarder, à valoriser et à diff user cette Vallée ; de films documentaires sur les minorités langue qui a été aff ublée de l’appellation > la Fédérachon valdoténa di téatro linguistiques ; de minoritaire. Même s’il faut considérer populéro, fondée en 1979, qui regroupe > Les nouveaux patoisants : étude scienti- les statistiques avec prudence, d’après 22 compagnies dispersées sur le territoire fique sur le système plurilingue valdôtain une enquête socio-linguistique menée par régional ; et, notamment, sur la naissance d’une nouvelle catégorie de locuteurs francopro- > l’Enquête toponymique en Vallée qui auront envie de le parler et surtout de 11 vençaux, présentée dans une publication d’Aoste : projet lancé en 1986 dans le but le transmettre à la génération suivante. et un DVD ; d’eff ectuer un recensement systématique > l’exposition Les lieux du patois : parcours de tous les noms de lieu du territoire Pour ce faire, il faut miser sur la famille à la découverte des contextes où le patois régional qui découlent de la tradition orale. avant tout, qui est la citadelle du patois est protagoniste ; Les enquêtes sont presque achevées par excellence : si le cercle familial ne > La voix des peuples minoritaires : revue et, à l’heure actuelle, plus de 70 000 transmet plus l’amour pour notre langue du semestrielle conçue pour créer ou renfor- toponymes, qui ont été recueillis, localisés cœur, l’orgueil de la parler, la conscience cer un réseau d’échanges et d’informations sur la carte et accompagnés d’une fi che de l’importance de ce patrimoine culturel entre les différentes minorités linguistiques. descriptive détaillée, sont disponibles sur qui est l’un des piliers de notre civilisation, support informatique. il devient alors diffi cile de récupérer ces Dans les diverses publications réalisées valeurs dans d’autres milieux. La famille ou parrainées par l’Assessorat, le patois Malgré l’intérêt renouvelé dont il bénéfi cie peut devenir un centre de rayonnement occupe souvent une place importante. et malgré les eff orts des institutions et linguistique privilégié, à même de créer, Sur le plan scientifi que, deux projets de de diverses personnes de bonne volonté, avec le support des organes offi ciels grande envergure sont en cours : la régression du patois semble être un et de la communauté tout entière, un phénomène irrépressible et irréversible. terrain fertile et réceptif. Disons, en guise > l’Atlas des patois valdôtains : né au début Quoique effi caces, les mesures adoptées de conclusion, qu’il faut parler le patois, des années soixante-dix à l’initiative du pour contrecarrer cette tendance ne sont le parler davantage et le faire vivre en le Centre d’études francoprovençales, il pas toujours suffi santes pour résoudre le parlant. comprend 16 points d’enquête valdôtains problème à la racine. Le destin du patois plus six points externes. Le premier est dans les mains de ses locuteurs, c’est- volume, consacré au lait et à ses dérivés, à-dire des patoisants : le patois aura une est en phase d’achèvement ; chance de survie tant qu’il y aura des gens

PARUTIONS

MARTIN Jean-Baptiste & RIXTE Jean-Claude GARDY Philippe & MARTEL Philippe (dirs) AKEHURST Ron 2010, The "Costuma (dirs) 2010, Huit siècles de littérature 2010, Mémoires de pauvres. Autobiographies d’Agen" A Thirteenth-Century Customary francoprovençale et occitane en Rhône-Alpes. occitanes en vers au XIXe siècle, Garae Compilation in Old Occitan. Transcribed from Morceaux choisis, édition bilingue, EMCC, Lyon, Hésiode, Carcassonne, 576 p. The "Livre Juratoire", Brepols, Turnhout (B), 2010. 224 p. Ils sont nés entre Rhône et Garonne, entre le XXIX + 114 p. Qu’y a-t-il de commun entre les « chansons » temps du premier Napoléon et celui du troisiè- Compilées en occitan au 13e siècle, les de Béatrice de Die, l’énigmatique comtesse- me. Ils sont partis de rien et, à part l’Agenais coutumes d’Agen ont été conservées dans le troubadour (12e siècle) et la prose de Jean- Jasmin, consacré grand poète par Paris quoique « Livre juratoire » (Archives départementales Claude Forêt (né en 1950) ? Entre les exercices écrivant en « patois », ils ne sont pas arrivés bien du Tarn-et-Garonne, MS 42). L’ouvrage propose spirituels de Marguerite d’Oingt, prieure de haut. Petit séminariste, petit paysan, de petit une édition du texte occitan accompagné d’une la chartreuse de Poleteins (13e siècle), et les métier en petite combine, ces pauvres ont introduction, d’une traduction et de notes en contes de Pierre Grasset (né en 1938) ? Dans raconté leur vie, en vers occitans qui plus est. anglais. la diversité de leurs genres et de leurs dates Comme une sorte de revanche : ce sont des vies de composition, tous ces textes ont été écrits de pauvres, accompagnées de traductions et de ANSALDI Jean 2010, Gramàtica dou dans l’une des deux « langues régionales » de notes, comme un document sur la vie, les enfan- mentounasc, SAHM, Menton, 56 p. Rhône-Alpes, le francoprovençal ou l’occitan. ces, la langue et l’écriture des langues populai- Aux confi ns de la zone linguistique d’oc, le Proposés dans leur version originale et dans une res, au 19e siècle, en pays d’oc. parler occitan de Menton ou mentounasc (en traduction française, accompagnés de notices français mentonasque), présente un certain de présentation des écrivains et des œuvres, DERIANO Patrik 2010, Moutier de pouchette nombre d’affi nités avec les parlers liguriens de les trente-huit textes réunis attestent la richesse Galo-Françaez, Françaez-Galo / Dictionnaire la vallée de la Roia et des environs de Vintimille, patrimoniale comme la vitalité contemporaine de poche Gallo-Français, Français Gallo, qui en font un parler de transition entre langue de cette littérature rhônalpine en langues Éditions Laben LN, Ploudalmézeau (29), 750 p. d’oc et idiomes gallo-italiques. Cette petite régionales. L’ouvrage est vendu au prix modique Ce dictionnaire comprend 14 000 entrées grammaire vient opportunément combler de 10 €, grâce à l’aide du Conseil régional qui a dans le sens gallo-français et 10 800 entrées une lacune : en eff et la seule grammaire du mis en place, en 2010, un programme de soutien dans le sens français-gallo. L’auteur, gallésant mentonasque existant auparavant, celle de des langues régionales. de naissance, a collecté des sources orales et l’Anglais James-Bruyn Andews, publiée en 1877, compulsé les sources écrites. De nombreux a considérablement vieilli. exemples d’emplois ponctuent les deux parties du dictionnaire. 12 Orientation bibliographique . Escoffier Simone & Vurpas Anne- . Martin Jean-Baptiste , Le franco- . Tuaillon Gaston , La littérature Marie , Textes littéraires en dialecte provençal de poche, Assimil 2002. en francoprovençal avant 1700, Grenoble, lyonnais : poèmes, théâtre, noëls et chan- Ellug. sons (XVIe-XIXe siècle), Paris, CNRS. . Stich Dominique , Parlons fran- coprovençal, une langue méconnue, L’Har- . Tuaillon Gaston , Le francopro- . Martin Jean-Baptiste et Rixte Jean- mattan, Paris. vençal, Musumeci éditeur, Quart (Vallée Claude , Huit siècles de littérature d’Aoste). francoprovençale et occitane en Rhône-Al- . Stich Dominique , Dictionnaire pes, Morceaux choisis – édition bilingue, francoprovençal-français, français-franco- Lyon, EMCC. provençal. Sitographie . http://nontra.lingua.free.fr . www.francoprovencal.com . www.arpitania.eu . www.fr.wikipedia.org/wiki/Francoproven%C3%A7al . www.corpusdelaparole.culture.fr . www.languesdefranceenchansons.com . www.francoprovencal.ch . www.tlfq.ulaval.ca/axl/monde/franco-provencal.htm

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