Histoire De La Radio Et De La Télévision Plan Du Cours
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Histoire de la radio et de la télévision Benoit Lafon Plan du cours Chap. 1 - La suprématie de la radio (début 20ème s. - années 1950) I. La mise au point de la TSF (1865-1922) II. L'essor des stations (années 20 et 30) III. La guerre des ondes (années 1940) IV. Radio privées et radiodiffusion d'Etat (années 1950) Chap. 2 - L'hégémonie de la télévision (années 1960 - début 21ème s.) I. La naissance de la télévision (années 1960) II. La consolidation de la télévision sous de Gaulle (années 1960) III. Les prémices d'une libéralisation (années 1970) IV. Les bases d'un système mixte de radio-télévision (années 1980) V. Recompositions et consolidations (années 1990-2000) II. La consolidation de la télévision sous de Gaulle (années 1960) 1. Le statut de la télévision gaullienne : l’ORTF 2. Le contrôle politique dans les faits 3. La diversification des genres et le recul progressif de l’emprise politique 4. La question de la publicité 5. La radio : le rôle clef de la SOFIRAD 1. Le statut de la télévision gaullienne : l’ORTF Période de la présidence de Charles de Gaulle (1958- 1969), marquée par un contrôle étroit sur la radio- télévision. Période où le ministre de l’Information joue un rôle central, et durant laquelle la TV devient le principal média Dès les débuts de la présidence de Charles de Gaulle (1958), nouveau statut de la RTF, élaboré par Roger Frey, ministre de l’Information du gouvernement Debré. Deux textes : Ordonnance de 1959 : – La RTF devient un établissement public et commercial (EPIC). – Le budget de la télévision n’est plus voté par le Parlement, Décret sur le statut des personnels du 2 février 1960 : – Le personnel a un statut particulier, différent de celui des journalistes de presse ou de radio ; – Le monopole de production est réaffirmé. Un nouveau statut est voté en 1964 : • Il instaure l’ORTF : Office de Radiodiffusion Télévision Française. • Le conseil d'administration, dépendant du gouvernement, n'a que peu de pouvoirs ; • La vraie nouveauté porte sur le statut des personnels, où ne figure plus un monopole de production pour la première fois énoncé par le Parlement en 1953, et réaffirmé en 1960. Monopole commence à être remis en cause : la mission de service public ne va plus tout à fait de soi. Produire des programmes hors de l’ORTF n’est plus interdit. Logo et horloge (écran diffusé en interlude) de l’ORTF 2. Le contrôle politique dans les faits • Années 1960 : indépendance grandissante de l'information, avec de fréquents retours en arrière. Durant la période gaullienne la TV devient un enjeu politique. • Les ministres de l'Information André Malraux, Roger Frey, Alain Peyrefitte, sont dans les faits les véritables dirigeants de la RTF. • La justification n'est pas dissimulée : les adversaires influençant toute la presse écrite, le gouvernement, pour compenser, doit disposer de la télévision. • Le Président de la République Charles de Gaulle s’intéresse à la TV et en fait part à son ministre de l’information Alain Peyrefitte à de nombreuses reprises. Exemples : • En décembre 1962 : « Vous savez, vos journalistes de la presse écrite, vous pouvez toujours essayer de leur expliquer les choses, vous n'y arriverez pas. Ce sont des adversaires et ils sont bien décidés à le rester. Alors, servez-vous au moins de l'instrument que vous avez entre les mains, la télévision; mais servez-vous-en à bon escient. N'essayez pas de persuader les responsables, donnez-leur des instructions. La presse est contre moi, la télévision est à moi » (A. Peyrefitte dans « C'était de Gaulle », p. 500). Autre exemple, tiré des « Lettres, Notes et Carnets » du Général de Gaulle : « Note pour M. Peyrefitte, 2 février 1963. Je ne puis comprendre comment et pourquoi la RTF a donné hier soir le spectacle vraiment odieux d'une opération sans anesthésie. C'est une vile réclame tant pour les gens de « Cinq Colonnes à la Une », pour qui ne vaut que l'horreur et le sang, que pour tel médecin m'as-tu-vu, que pour une certaine équipe effrénée de la télévision elle-même. Plus que jamais, il apparaît que la TV placée sous la tutelle directe de l'Etat et payée par lui, est une espèce de fief livré aux lobbies et incontrôlé. » L'époque est bien décrite par Jérôme Bourdon, dans son « Histoire de la télévision sous de Gaulle », qui évoque l'existence du SLI, (Service de liaisons interministérielles), par lequel est supposé passer l'ensemble des communications entre le gouvernement et la télévision : • Peut-être l'influence de cette institution a-t-elle été exagérée et mythifiée, mais cette pratique est significative d'un climat et d'une attitude. • Néanmoins, les magazines jouissent de plus de liberté que le journal télévisé (cf. partie suivante). La télévision régionale : entre 1963 et 1967, inauguration de 23 centres d’actualité télévisée et des journaux télévisés régionaux de l’ORTF. Ex. de Toulouse, inauguration par le ministre de l’information Alain Peyrefitte https://www.youtube.com/watch?v=AQvhw04Aq4I 3. La diversification des genres et le recul progressif de l’emprise politique • De 1958 à 1968, le taux d'équipement des ménages en TV passe de 5 % à 62 %, – On inaugure la seconde chaîne (1964), – Puis la couleur (1967). • Progressivement, la télévision devient la source d'information et de divertissement dominante. • Le volume croit : 2 341 heures diffusées en 1958 (près de 6 h 30 par jour), 3 000 en 1963, 6 000 heures en 1969. https://www.youtube.com/watch?v=BzkryggCwuU Albert Ollivier (Directeur des programmes de l’ORTF de 1959 à 1964) donne une impulsion au développement des programmes télévisuels. Les genres évoluent, naissance d’une culture télévisuelle populaire : • La dramatique en direct s'efface, la télévision s’éloigne du théâtre et du music hall pour devenir une industrie culturelle à part entière. • Les réalisateurs cherchent à innover en créant des fictions inspirées de situations vécues et tournées en décors réels, que l'on dénomme d'abord "télévision-vérité" • Les premiers feuilletons ou séries connaissent un grand succès : – Vidocq (1963) ou encore La Demoiselle dAvignon (1972), Belphégor, Saintes chéries, Rois maudits. • Emissions jeunesse : Thierry La Fronde, Bonne Nuit les Petits… • Parallèlement la diffusion de films de cinéma s'accroît considérablement. • Enfin, l'essor des variétés et surtout des jeux constitue l'autre bouleversement essentiel. – La tête et les jambes, Intervilles, la Grande Farandole, ou encore Les raisins verts. Le Journal Télévisé Présentateurs : C. Darget, R. Marcillac, J. Sallebert et M. Droit. Avec la réforme de 1963, le journal télévisé évolue : • La nouvelle formule est fondée sur la priorité à l'image, jugée garante d'objectivité. • Le rôle du meneur de jeu se modifie. • L'introduction du «prompteur» (1963) permet au présentateur de lire le texte du journal en donnant au spectateur l'impression qu'il le regarde « dans les yeux ». Cette humanisation participe au succès de la télévision. Deux journalistes essentiels du JT, très différents : le fondateur Pierre Sabbagh et le présentateur Léon Zitrone La technique évolue : • Jusque-là, la télévision n’utilisait que ses propres archives et de celles des agences de la presse filmée. Dorénavant, elle dispose de celles des télévisions étrangères. • Inauguré avec Telstar (liaison Europe-États-Unis, 1962), l'usage du satellite relais des images et des sons devient courant dans les années 1970. • Un réseau permanent d'échanges d'images coordonné par l'UER (Union européenne de radiodiffusion) relie des rédactions européennes Un certain recul de l'emprise politique : • Quelques signes annoncent un assouplissement de l'emprise politique, en particulier la campagne présidentielle de 1965. Pour la première fois, un temps d'antenne égal est attribué à chaque candidat. succès de Lecanuet, ballottage de Gaulle/Mitterrand. Cf. Site web d’Aude Vassallo : https://audevassallo.wordpress.com/2012/04/01/election-television- la-campagne-presidentielle-de-1965-acte-1-premier-tour/ Affiches des principaux candidats Une de Paris Match https://audevassallo.files.wordpress.com/2012/04/parismatch-27nov1965.jpg • Campagne officielle démarre le 19 novembre 1965. • De Gaulle refuse de participer aux spots officiels : 2 heures d’émissions télévisées divisées en 7 interventions (phrase prêtée à De Gaulle: « Je n’ai rien à ajouter à ce que j’ai dit aux Français. Vous me voyez parlant avant ou après M. Barbu ? »). https://audevassallo.wordpress.com/2012/04/01/election-television-la-campagne-presidentielle-de- 1965-acte-1-premier-tour/ • Dès 1966, Face à Face (inspiré de l’émission américaine Meet the Press) inaugure le pluralisme télévisuel. Un pas est franchi. – De plus, le rôle des journalistes évolue. – De faire-valoir, ils deviennent « interrogateurs ». • Emissions de société se développent : A armes égales, Dossiers de l’écran. • Mais ces magazines continuent d'éviter la politique intérieure avec soin, s'en tenant à leur secteur de liberté : étranger, économie, sciences, phénomènes de société. Malgré tout, les tensions politiques persistent. • Les responsables des journaux parlés et télévisés assistent quotidiennement aux réunions du SLII • Lors de la grève de mai 1968, le journal national est un enjeu majeur : mesures répressives à l’encontre des grévistes. 4. La question de la publicité • Contexte : Le parc de téléviseurs s'élargit la publicité devient inévitable • Janvier 1973 : lancement de la 3ème chaîne en couleur • Le volume d'émissions diffusées croît fortement : de 4 000 heures en 1964 à 7 400 heures en 1974. • Une attention particulière est portée à l'audience : pour les directeurs, battre « l'autre » chaîne devient un souci majeur. • La publicité va s’imposer d’elle-même dans ce contexte de plus en plus concurrentiel. A partir de 1960, débats pour autoriser la publicité comme moyen de financer la télévision.