Les Chroniques D'amale Samie Pour L'boulevard
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LES CHRONIQUES D'AMALE SAMIE POUR L'BOULEVARD Avec eux, il s’ouvre sur le metal extrême. Mellal, où il a encore de la famille. Avec lui, ils apprennent à penser Cette année-là, une piste praticable AVANT-PROPOS le local comme lieu de l’universel. reliant Beni Mellal à Tassemit voit Il offre à la petite scène qui se le jour. Tonton et Khalti, Latifa, forme ses premiers articles. Il l’empruntent pour la première fois instaure même une rubrique rock et rêvent, sur la route, d’une petite dans Maroc Hebdo, le journal maison sur ce flanc de la falaise. 1999. Amale Samie a 45 ans. compagnie de ce gaillard grisonnant, pour lequel il travaille. Pour des Ils arrêtent la Renault Express et Il a traversé les seventies du rock qui manie les grands et les gros formations qui démarrent et qui croisent un petit garçon. Il s’appelle et les écueils du Maroc. Il est mots avec désinvolture et talent, galèrent, ces chroniques ont valeur Hassan, doit avoir 8 ans et n’est marié et a deux beaux enfants. et qui non seulement écoute la de trophée. Elles mettaient leurs jamais allé à l’école, parce qu’il n’y Ancien professeur, il est désormais même musique qu’eux, mais sait la talents en lumière quand même eux en a pas. Enclavé, à 11 kilomètres journaliste et écrivain. Il a écrit des remettre dans son contexte et relier n’étaient pas sûrs d’en avoir, et des et 20 minutes de la ville. Qu’à cela centaines d’articles et tout autant les générations. Rocker Amazigh, mots sur une scène confidentielle ne tienne : tonton se met en tête de succulentes chroniques, a publié enquêteur trublion, anarchiste trait qui criait son génie. de créer une association et de la trois romans et obtenu un Prix d’union. Une sacrée comète. construire, cette école. Ça ne doit Grand Atlas. Et puis un jour, on ne sait plus qui pas être si compliqué. Premier tremplin, premier succès. ni quand, quelqu’un l’a surnommé Depuis quelques temps, peut-être L’année qui suit, l’ACAL organise des tonton. Peut-être parce qu’il était Retour à Casablanca. Les jams quatre ou cinq ans, il observe les concerts. Total Eclypse, Carpe Diem, plus âgé que tous les jeunes nocturnes à la FOL se poursuivent jeunes groupes de rock et de metal Orient, Saturne, Dust’n’Bones… hirsutes qu’il fréquentait, ou parce en discussions au bord de Oued qui germent à Casablanca, en Tout ce petit monde joue, gratte, qu’il avait l’aura de l’homme qui a El Maleh jusqu’au petit matin. La fréquente quelques-uns. Quelques revient. Momo met en place tout vécu sans la posture autoritaire montagne, la culture d’origine, mois avant la première édition du des bœufs, les musiciens ont un du père. Le fait est que tonton est le retour à la terre, les valeurs de “Boulevard des Jeunes Musiciens”, espace d’expérimentation et de devenu le premier membre identifié justice sociale, l’idéal d’anarchisme il rencontre à travers eux Hicham liberté. Il y a des tapis sur scène, d’une famille qui se constituait loin libertaire et égalitaire… Tonton disait Bahou et Mohammed “Momo” sur lesquels se prélassent quelques des affections filiales, et dont les qu’il finirait sa vie à la montagne, Merhari. Le premier est étudiant en happy few. Parmi eux, Amale liens se mesuraient aux affinités loin du marasme et du goudron. dernière année à l’école Com’Sup, Samie, qui devient un habitué. musicales. Le tout accompagné de musique, le second, animateur à l’ACAL Sa tendresse pour ces petits gars évidemment, qu’elle sorte de la (association culturelle et artistique qui lui rappellent sa jeunesse se 2000. Tonton a 46 ans. Il a traversé voiture ou d’ailleurs. La musique laïque), affiliée à la FOL (fédération métamorphose. Dans ce magma de les nineties dans une Renault Express. toujours, du metal au raï, sur la des œuvres laïques), salle de disto, de fumée et de solos, le ciel Il a grandi à Riviera, Casablanca, et route ou dans les écouteurs. spectacle dont il est également le s’est ouvert. Il l’avait déjà senti en s’est toujours cherché du côté de ses régisseur. 1996, lorsqu’il a vu Immortal Spirit ancêtres, à Zaouiat Ahançal, petit 2002. Tonton crée Asidd, l’Association jouer pour la première fois, mais là, il village adossé aux montagnes du pour l’Intégration et le Développement Leur amitié leur ressemble. Elle en est sûr : il est témoin d’un miracle. Haut Atlas. Tonton aime prendre de Durable. La charité et les opérations s’installe de manière simple, naturelle, Ceux qui le font n’en ont peut-être la hauteur. Il connaît bien El Ksiba, pour se donner bonne conscience, évidente. Hicham et Momo, qui pas conscience, et c’est peut-être dans les terres du Moyen Atlas, où ce n’est pas pour lui. Son monde ne sont pas encore le duo que l’on tant mieux : ils ont mieux à faire que ses parents ont vécu et où il passe ne se divise pas en monde urbain connaît aujourd’hui, apprécient la de se regarder le nombril. tous ses étés, et va souvent à Beni et monde rural, il appartient aux deux et conspue les dédaigneux. 2003. A Casablanca, 14 musiciens *** Tonton a toujours fait ce qu’il voulait. A Beni Mellal, il se heurte à un sont arrêtés et jetés en prison, accusés L’école de Tassemit finit par voir le N’en déplaise à ses ennemis, et fonctionnement féodal. Une école de satanisme. jour. Comme elle a pu compter sur lui, même à ceux qui l’aimaient. Il a n’est pas la priorité des décideurs. Branle-bas de combat. tonton a su trouver dans sa grande toujours dit qu’il laisserait la ville et Ces messieurs ont d’autres chats Tonton fédère, famille de musiciens, le soutien et sa gangrène pour renouer avec ses à fouetter et du gibier à chasser. tonton crie, l’argent nécessaires. Cela n’a pas racines. Il l’a fait et a vécu la dernière D’ailleurs, ces hameaux leur tonton écrit. arrêté les passe-droits, la persécution, année de sa vie à Amezrar, un gâchent la vue, et ces villageois Il dénonce l’injustice et invective les les bâtons dans les roues. Une réserve village attenant à Zaouiat Ahançal, leur gâchent la vie, du moins leur responsables. La société civile se à mouflons a été placée de telle sorte où est enterré son ancêtre. vie sociale, dans l’impunité la plus joint à la cause du Boulevard. Ceux à ce que ni l’école, ni l’eau ne soient totale. Ils ne l’annoncent pas haut qui font le festival bouillonnent, accessibles aux villageois. Tonton *** et fort, mais ils espèrent les faire mais tonton est le plus énervé des n’a cessé de dénoncer, mobiliser, La vie d’Amale Samie ne peut être partir. chaudrons. Il ose là où d’autres alerter les médias, porter plainte, résumée à ce que nous vous donnons Bref, ASIDD n’obtient pas son prennent des pincettes, et hurle de écrire, revenir, recommencer. Il a à lire. Mais à travers ces quelques récépissé. Tonton exècre la hogra tout son bon sens l’absurdité de la même lancé son hebdomadaire, l’Espoir textes, écrits de sa plume hyperbolique plus que les années disco. situation. Lorsque les copains sont Citoyen, distribué dans la région de Beni et pleine d’esprit pour L’Kounache, le Il méprise ses légataires, conchie remis en liberté, il n’y a plus de doute. Mellal pendant près de deux ans. Il y eut magazine de L’Boulevard consacré leurs méthodes et leur plouquerie, Cette famille est la sienne, il est fier ensuite des temps de paix, mais jamais la à la création alternative, c’est une dénonce leur corruption et leur d’y appartenir. Pour qu’elle ne soit guerre ne s’est arrêtée. Des victoires ont partie de son histoire et de la nôtre mesquinerie, mord et ne lâche plus jamais fragilisée et marginalisée, été fêtées et des trahisons ont creusé des que nous vous proposons. Tonton, pas. Entre-temps, un peu plus il faut la faire grandir. plaies et des sillons d’incompréhension son discours intemporel, son amour bas, une autre lutte se profile. dans le cœur d’un homme juste et borné. de la musique, son amazighité Tonton a commencé à passer plus de sublime et revendiquée, son dédain temps, beaucoup plus de temps à la pour l’imposture et le culte de montagne. Il a destitué ses ennemis l’apparence, sa haine de la hogra et en a vu d’autres se former. et de l’injustice sociale, son rêve de Redresseur de torts jusqu’au bout, voir les frontières maroco-algériennes il n’a jamais voulu lâcher prise, s’ouvrir à nouveau, et tout l’espoir même au péril de sa santé. David qu’il a mis en nous, comme un souffle contre Goliath, tonton, tête en d’éternité. avant contre cette montagne qu’il aime tant et qui finit par lui briser le cœur. Malgré tout cela, tous les ans, tonton est là, fel Boulevard. Au fil des éditions, debout sur le côté de Ayla la scène, dans le public ou assis sur une chaise dans un coin, ses yeux brillaient de fierté jusqu’au bout, même quand les gestes se faisaient de plus en plus lents. absolument pas besoin puisque le Jeunes Musiciens, festival de rock son qui sort de la guitare, suinte des digne de figurer aux programmes SAUVEZ LES claviers, dégouline de la basse, et dans n’importe quelle capitale occi- claque entre les cymbales a atteint dentale.