Le Facteur Communautaire Dans L'analyse Des Espaces Syrien Et Libanais
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Université Lumière Lyon 2 Année 2013-2014 Diplôme d’habilitation à diriger des recherches Texte de synthèse Le facteur communautaire dans l’analyse des espaces syrien et libanais Soutenance le 15 novembre 2013 Fabrice Balanche Université Lumière Lyon 2 Année 2013-2014 Diplôme d’habilitation à diriger des recherches Texte de synthèse Le facteur communautaire dans l’analyse des espaces syrien et libanais Fabrice Balanche Remerciements Il faudrait un quatrième volume pour remercier tous ceux qui m’ont aidé dans ce parcours. Je pense à toutes les personnes croisées lors de mes nombreuses enquêtes au Levant, qui m’ont offert l’hospitalité, et grâce à qui j’ai pu comprendre la complexité des espaces syriens et libanais. Parmi eux, Jaafar Al Charif, fin connaisseur de l’Orient proche, Ahmad Hanouneh, Oubaï Kinjou, Mustapha Mansour, Mahmoud Azzouri, Natalia Atfee et bien d’autres. Je dois rendre hommage aux maîtres scientifiques qui m’ont accompagné depuis la maîtrise. Ma première pensée va naturellement à Pierre Signoles, mon véritable directeur de thèse, qui m’a sauvé des eaux dans lesquelles je me noyais. Sans son aide et son dévouement, j’aurais sans doute abandonné la recherche. Ensuite, ma gratitude va à Marc Lavergne, grâce à qui j’ai pu faire mes premiers pas au Proche-Orient, et qui depuis m’a toujours soutenu dans mes projets jusqu’à cette HDR. De Besançon, où Jacques Fontaine m’a donné le virus de l’Orient, au GREMMO en passant par URBAMA, j’ai eu la chance de profiter de l’expérience des acteurs de la recherche française sur le Moyen-Orient. Je remercie particulièrement, Thierry et Anne-Marie Bianquis, Jean et France Métral, Jean-Claude David, Jean-François Troin, Georges Mutin, Alain Batteguay, Mohamed Al Dbiyat, Elizabeth Picard, Pierre Beckouche et Hamit Borzaslan dont les conseils me furent précieux. Au Proche-Orient, je dois souligner le rôle de Jacques Langhade, directeur de l’IFEAD, et de Youssef Courbage, directeur scientifique de l’IFPO, tous deux dévoués à l’institution et qui ne faisaient aucune différence entre le jeune novice et le professeur émérite. Enfin, il me faut remercier Michel Seurat, que je n’ai malheureusement pas eu l’occasion de connaître, mais dont les écrits me furent d’un grand secours pour voir clair dans l’apparente confusion. Mes deux ouvrages n’auraient jamais vu le jour sans le travail extraordinaire de Laetitia Desmarais, qui s’est chargé de l’édition de La région alaouite et le pouvoir syrien, et de Florence Bonneaud qui a réalisé les cartes de l’Atlas du Proche-Orient arabe. Il faut aussi ajouter la pugnacité de Brigitte Dumortier et de Philippe Cadène qui m’ont encouragé dans ce projet et introduit dans le monde des éditeurs parisiens. Enfin, un grand merci à Christophe Bourgoin et Nicolas Jacob pour la relecture du manuscrit et la précision de leurs corrections. Une dernière pensée pour Cécile et sa patience depuis deux ans. 1 Introduction Lorsque j’ai commencé à préparer mon HDR, je me suis basé sur l’exemple de collègues de Lyon 2 qui avaient soutenu leur HDR depuis quelques années. Entre temps, les recommandations ont changé, mais puisqu’il est indiqué que l’ancienne formule (en trois volumes) demeure parfaitement recevable, mon travail conserve cette forme en trois volumes : Le volume 1 ou « l’inédit » présente une réflexion sur « Le facteur communautaire dans les espaces syrien et libanais », à partir de mes travaux sur le Proche-Orient. Au fil du texte, je renvoie le lecteur aux planches de l’Atlas du Proche-Orient arabe, pour localiser les lieux et surtout pour illustrer les processus. J’aurais pu réintroduire les cartes dans le corps du texte, mais elles auraient perdus en qualité. Le volume 2 constitue le parcours professionnel et scientifique. Il est assez long, car j’ai tenu à décrire le contexte particulier du Proche-Orient et des conditions de recherche à l’Institut Français du Proche- Orient. Il contient également mes activités pédagogiques, les expertises et l’expérience de directeur de laboratoire. Le volume 3 regroupe les publications : production scientifique, articles de vulgarisation et rapports d’expertises. Je conseillerais au lecteur de commencer la lecture de cette HDR par le volume 2, dans lequel j’ai inscrit mon cheminement scientifique, à travers mes expériences de terrain au Proche-Orient et les multiples difficultés auxquelles j’ai été confronté pour réaliser mes recherches. Le vécu a largement contribué à mettre le communautarisme au centre de mes préoccupations scientifiques, dès les premières années de thèse, pour culminer aujourd’hui avec l’analyse de la crise syrienne. L’entrée par le communautarisme en Syrie et au Liban était systématique pour les géographes de la première moitié du XXème siècle. Ensuite, la géographie française a privilégié d’autres approches. Le communautarisme, en tant que facteur d’organisation de l’espace, a été relégué au rang de forme d’explication passéiste, comparable au déterminisme physique. L’objet de ce travail est donc de réhabiliter cette forme d’organisation sociale en tant que facteur d’organisation de l’espace. Cette réflexion s’inscrit dans le champ de la géographie politique, mais elle concerne toutes les disciplines de la géographie humaine, car c’est dans le cadre d’études de géographie urbaine, d’aménagement du territoire, de démographie et autres, que j’ai mis en évidence le facteur communautaire. Je n’en ai jamais fait mon entrée principale pour comprendre l’espace en Syrie et au Liban, mais il s’est imposé de lui-même. 2 Syrie et Liban La démonstration s’appuie sur l’exemple de la Syrie et du Liban, deux pays sur lesquels portent l’essentiel de mes publications, mais je pourrais l’étendre à l’ensemble du Proche-Orient. Ces deux pays sont nés du partage du Proche-Orient par la France et la Grande-Bretagne en 1920. Les accords Sykes-Picot sont l’aboutissement des impérialismes européens du grand dix-neuvième siècle. Le partage interne des territoires sous mandat français, notamment la dissociation entre l’Etat de Syrie et l’Etat du Grand Liban relève de l’application du principe « diviser pour régner et s’appuyer sur les minorités » et non du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Cette partition coloniale fut entérinée par les indépendances séparées des deux pays en 1945. Les relations entre les deux Etats furent toujours tumultueuses et imbriquées. La Syrie n’a jamais véritablement reconnu l’indépendance du Liban, elle n’a accepté un échange d’ambassadeurs qu’en 2010. Puissance occupante de 1976 à 2005, il a fallu une résolution du conseil de sécurité de l’ONU en septembre 2004 et surtout la menace d’une intervention militaire pour que Bachar el Assad se décide à retirer ses troupes du Liban en avril 2005. Cependant cela ne signifiait pas que la Syrie avait renoncé à jouer un rôle au Liban. Dans les années 1990, Beyrouth était couverte d’affiches d’Hafez el Assad qui proclamait : « Un même peuple, deux Etats », ce qui ressemblait à la formule de Deng Xia Ping à propos de la Chine populaire et de Hong Kong, lors de la réunification : « Un Etat, deux systèmes ». Effectivement, de 1990 à 2005, les deux pays ne constituaient qu’un seul Etat, puisque le Liban était considéré par le régime syrien comme la quinzième province, mais les systèmes économiques et politiques étaient différents, notamment à l’égard des identités communautaires : niées dans la République Arabe Syrienne et institutionnalisées au pays du Cèdre. En pratique, le communautarisme existe des deux côtés de la frontière et l’évolution de la crise syrienne prouve que l’identité arabe syrienne officielle est tout aussi fragile que l’unité « nationale » libanaise. La Syrie et le Liban, comme tous les pays du Proche-Orient se sont construits avec le conflit israélo- arabe qui continue d’influencer l’organisation spatiale de la région. C’est sur ce processus majeur de la production de l’espace au Proche-Orient que j’ai construit la problématique de l’Atlas du Proche- Orient arabe. Cela permet de nuancer l’importance du communautarisme en Syrie et au Liban, car nous sommes dans une région particulièrement marquée par la géopolitique. Dès leur indépendance ces deux Etats furent engagés dans la Guerre froide. Puis, après une période où l’opposition entre l’Iran et l’Arabie Saoudite s’est imposée, ils sont de nouveau rattrapés par une nouvelle confrontation entre les Etats Unis et la Russie. Dans la mondialisation, la Syrie fut longtemps un isolat, tandis que le Liban, malgré la guerre civile, était largement ouvert sur le monde. Depuis les années 1990, les deux pays sont devenus des périphéries économiques des pays du Golfe, le véritable centre du Moyen- Orient, avec ce que cela comporte comme mutations spatiales. 3 Le communautarisme ou le non-dit des rapports sociaux Cette réflexion s’appuie sur une connaissance intime d’un terrain que je pratique depuis plus de vingt ans dont dix années de résidence en Syrie et au Liban. Car pour traiter du communautarisme en tant que facteur d’organisation de l’espace, sans en donner une vision superficielle ou caricaturale, il s’avère indispensable d’avoir vécu plusieurs années sur son terrain de recherche en partageant le quotidien des populations et non celui des expatriés. C’est une différence majeure entre les chercheurs en sciences sociales qui pratiquent le Proche-Orient, qui rejaillit sur leur approche scientifique et leur explication des phénomènes sociaux. Le sociologue palestino-américain, Hisham Sharabi1 démontre que l’autoritarisme patriarcal qui règne au Proche-Orient est le véritable responsable du maintien des systèmes politiques autoritaires.