Pratiques, Acteurs, Enjeux (Corridor Betsileo, Madagascar)
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FONCIER ET TERRITOIRES entre pouvoirs locaux et politiques publiques environnementales Pratiques, acteurs, enjeux (corridor betsileo, Madagascar) Chantal BLANC-PAMARD Hervé RAKOTO RAMIARANTSOA Dolys AJ~DRIANTSEHENO 2005 GEREM IRD-CNRE CNRS-EHESS CEAf Centre d'Études Africaines ICoTEM Université de Poitiers UR 168 FONCIER ET TERRITOIRES à l'est du Lalangina (Ambendrana et Amindrabe) entre pouvoirs locaux et politiques publiques environnementales Pratiques, acteurs, enjeux (corridor betsileo, Madagascar) Cartes et croquis de terrain: Arsène Rajaonarivelo et Bruno Ramarorazana Cartographie: Christophe Teche Photographies et planches photographiques: Chantal Blanc-Pamard et Hervé Rakoto Ramiarantsoa Couverture: Patrick Dieudonné Les planches photographiques ont été tirées par le service de reprographie de la MSHS de Poitiers. PAYSAGES ET UNITES Ampatrana (village d'Andohany Sahambavy au Amboditanàna au premier plan (Ambohimandroso second plan) Au second plan,Ampatrana En an 'ala, un paysage aménagé (Analapatsy amont) Un écart en an 'ala. Au fond, le Parc National de Ranomafana 1 Introduction La géographie est l'étude simultanée desfonnes de socialisation de ['espace et de spatialisation des sociétés. Gilles Sautter, 1975 Contexte de la recherche et problématique La recherche sur le foncier local menée dans la partie est du massif forestier, en pays betsiléo', s'inscrit dans le cadre du programme GEREM Fianarantsoa-. Elle a pour ambition de contribuer à une compréhension des questions foncières dans un contexte particulier de transfert de gestion (Gestion Contractualisée des Forêts ou GCF) et de voisinage avec le Parc National de Ranomafana. Elle s'inscrit à la suite d'une première étude sur le village d'Ambendrana, un terroir de lisière du corridor betsileo (Blanc-Pamard et Ralaivita, 2004). Rappelons en introduction la problématique de Chantal Blanc-Pamard qui est à l'origine de cette recherche : "Pour nous géographes, à partir du choix de construire l'interrogation des rapports société/nature autour d'un problème d'environnement, en l'occurrence la déforestation, il s'agit de débrouiller, dans l'intimité des terroirs, le système complexe des causalités en jeu, dans le temps et dans l'espace, interactions entre usages de la forêt, systèmes techniques et logiques sociales, mais aussi recompositions territoriales et rôle des nouveaux acteurs des politiques environnementales" (idem, 2004). L'équipe qui a mené ce travail d'étude et de recherche spécifique est composée de géographes: Chantal Blanc-Pamard chercheure CNRS, Hervé Rakoto Ramiarantsoa enseignant chercheur de l'université de Poitiers, Bruno Ramarorazana technicien FüFIFA, Dolys Andriantsehenoê, professeur certifié ENS-Tananarive et Mbinintsoa Ralaivita, doctorante. 1Le pays betsileo se situe au centre-sud de Madagascar, sur les Hautes Terres. Au nord, le fleuve Mania sépare le pays merina du pays betsileo et le fleuve Zomandao du pays bara. A l'est, la région betsileo est séparée de celle des Tanala par la forêt de la "falaise" orientale et, à l'ouest, du pays sakalava par les plateaux et les plaines du Moyen-Ouest. La région centrale de la Haute Matsiatra est formée de 5 fivondronana (ex sous-préfectures) : Fianarantsoa I, Fianarantsoa II, Ambalavao, Ambohimahasoa et Ikalamavony. 2 Le programme GEREM (Gestion des Espaces Ruraux et Environnement à Madagascar) a été mis en place, dès juin 2003, en pays betsileo, dans la région de Fianarantsoa. Il est conduit en partenariat entre l'IRD et le CNRE (Centre National de Recherches sur l'Environnement)· Ce programme a établi des liens avec les universités de Tananarive et de Fianarantsoa, des institutions (FOFIFA, SAGE, ANGAP) et des ONG internationales (LOI devenu ERI, MBG - Missouri Botanical Garden -, WWF, CI, PACT) ou nationales (FCE, Programme Ramanavy). Ce programme qui réunit agronomes, écologues et géographes porte sur la connaissance des interrelations entre sociétés paysannes, systèmes de production et systèmes écologiques, afin de contribuer à l'évaluation des bases et modalités d'une gestion durable de l'espace rural. Son objectif est "d'analyser, comprendre et modéliser à différentes échelles d'espace et de temps, les interactions hommes-milieux dans des espaces ruraux où sont stigmatisées des pertes des ressources naturelles" Programme de recherche GEREM-Fianarantsoa, 2004. 3 Dolys Andriantseheno est un spécialiste des transferts de gestion et de l'approche organisationnelle par l'étude des rapports de parenté et par les rapports de voisinage inter et intra villageois (Atelier de Mantasoa, GCF, Merikanjaka, 2(01). 2 La forêt tropicale de moyenne altitude (ligne faîtière vers 1400 m dans la région) occupe le rebord oriental des hautes terres. C'est une forêt dense ombrophile à Weinmannia et Tambourissa (Humbert, 1927; Humbert et Cours-Dame, 1965; Cornet et Guillaumet, 1976). Voici la description par Hildebert Isnard (1964) de la partie orientale du Betsileo. "A l'est d'Ambositra et de Fianarantsoa, le socle cristallin compact porte de longues échines subméridiennes de granite atteignant de 1500 à 1800 m d'altitude. Les fortes chutes de pluies y favorisent la grande forêt ombrophile : attaquée sur sa lisière occidentale par les feux périodiques, celle-ci recule; elle conserve cependant toute son épaisseur originelle dans la région faîtière: ici, les vallées encaissées, peu ensoleillées, arrosées par des eaux froides qui dévalent des pentes boisées, sont des milieux naturels répulsifs souvent déserts". La déforestation catastrophique de Madagascar est relativisée par des travaux de diverses natures (Battistini et Vérin, 1967; Bourgeat, 1972). Les études plus récentes de paléo-écologie (Dewar et Burney, 1994; Burney, 1997) établissent que la couverture végétale, loin d'être continue et dense, était un "patchwork" de différents types de formations. Le vestige du massif forestier est désormais appelé "corridor". Le concept de corridor, un terme imagé, est apparu en écologie du paysage" dès le début des années 1980 (Forman et Godron, 1981; Noss, 1993; Burel et Baudry, 1999; Da Lage et Métailié>, 2000; Turner et al., 2001) puis la décennie 1990 a vu le développement de l'approche corridor forestier (corridor biologique ou écologique) lors de réunions internationales sur les questions d'environnement, en raison du constat du morcellement ou de la fragmentation qui menace les écosystèmes forestiers. Un nouveau concept de gestion, le "corridor", a ainsi été créé en vue d'une meilleure conservation de la biodiversité. Il a été mis en place à différentes échelles dans les pays du nord et les pays du sudv. Le concept de corridor dans le contexte de Madagascar a été proposé en avril 1995 pendant l'Atelier Scientifique sur la Définition des Priorités de Conservation de la Diversité Biologique à 4 L'écologie du paysage est la branche de l'écologie qui étudie les causes et conséquences de l'hétérogénéité spatiale à diverses échelles de perception. Elle montre combien l'organisation de la mosaïque paysagère interagit avec les processus écologiques. 5 Rubrique "corridor" in Dictionnaire de biogéographie végétale: "Unité paysagique qui tranche dans l'espace environnant en raison de sa configuration linéaire relativement étroite, de caractère végétal (haie, ripisylve, trouée ...) ou topographique (vallon, cours d'eau...) et qui relie d'autres unités plus massives mais de nature analogue, en créant une continuité qui permet aux espèces animales de circuler ou aux végétaux de se propager de l'une à l'autre sans devoir s'exposer à un milieu plus hostile". 6Au Canada notamment, les corridors forestiers constituent une nouvelle approche pour conserver la biodiversité d'un paysage agricole. Un corridor forestier en milieu agricole est un lien entre des habitats forestiers de grande valeur écologique dans un territoire, où la faune et la flore y vivent et se dispersent, assurant ainsi le maintien de la biodiversité. A l'échelle d'un continent, il s'agit également d'assurer une continuité entre les différents habitats forestiers et de faciliter les échanges (corridor appalachien). L'entreprise la plus ambitieuse est celle du Corridor biologique mésoaméricain (CMB), une initiative d'échelle régionale concernant les sept pays d'Amérique centrale (Guatemala, Belize, Honduras, Salvador, Nicaragua, Costa Rica, Panama) et le Mexique. Le principe consiste à relier les aires protégées par des corridors d'habitats naturels et restaurés sur une superficie de 768 000 km2 avec pour objectif d'assurer une continuité régionale des écosystèmes. 3 Madagascar", Cet atelier est à l'origine de l'approche éco-régionale pour le développement durable et la conservation de la biodiversité à l'intérieur des aires protégées et des zones naturelles ou peu dégradées en dehors des parcs et des réserves. "Cette approche pourrait maintenir les écosystèmes et leur biodiversité sur une surface plus importante qu'une aire protégée classique et en même temps assurer la disponibilité des ressources vitales pour la population locale" (Rakotosamimanana et Ganzhorn, 1995). Lors de cet atelier, le corridor forestier entre le Parc National de Ranomafana au nord et la Réserve Spéciale du Pic d'Ivohibe en passant par le Parc National d'Andringitra fut identifié comme ayant un intérêt biologique exceptionnel et reconnu comme prioritaire en terme de préservation. Les couloirs réunissant les aires protégées et ce qui reste des blocs forestiers sont jugés indispensables à la préservation des flux génétiques et aux échanges entre espèces''. Ce sont par exemple, au nord-est le corridor