note n°01/2014 20 janvier 2014

Dr. Juvence F. Ramasy Maître de conférences en science politique à l’université de Toamasina (Madagascar) Dr. Olivier Vallée Docteur en science politique

Transion électorale à Madagascar

et enjeux sécuritaires

Résumé tamment des élections communales compéti- Après l’instauration à Madagascar d’un régime tives en 2003 et 2007, commençait à s’enraci- militaire en mai 1972, l’amiral Ratsiraka ner. Le coup d’État de mars 2009 met alors un amorce une mutation vers une « démo- terme à cette évolution. Le pouvoir qui appar- crature » qui durera jusqu’en 1993, date de la tenait aux hommes et partis politiques domi- première alternance issue du vote. Cependant, nants pendant la période de la présidence de celle-ci n’intervient qu’après des manifesta- glisse vers les soldiers in tions pacifiques et leur violente répression par mufti . Ce déplacement se réalise alors avec le la garde présidentielle. Par la suite, les élec- concours des élites politiques marginalisées tions de 1996 et 2001 pouvaient laisser croire par le Président ainsi déposé et des élites éco- que Madagascar avait réussi sa transition dé- nomiques victimes du monopole du groupe mocratique, en dépit de nouvelles interfé- économique de ce dernier (Tiko). Malgré l’ins- rences militaires, et se dirigeait vers la consoli- tabilité politico-militaire et la dégradation de dation d’un système politique modernisé. En l’État depuis sa prise du pouvoir en 2009, le effet, ces élections ont alors permis l’accès au président auto-proclamé a pouvoir d’une élite plus libérale et politicienne systématiquement repoussé les élections, ins- que l’élite postcoloniale où la hiérarchie sécu- crivant Madagascar dans la catégorie des pro- ritaire, alliée à la bureaucratie et aux églises tracted transition . Dans ce contexte, le pro- historiques était bien représentée. Enfin, une cessus de sortie de crise va prendre plus de certaine « routinisation électorale », avec no- quatre ans à aboutir avec l’organisation du

premier tour de l’élection présidentielle le agascar in the category of protracted transi- 25 octobre 2013. Ce processus s’est achevé tion. In this context, the process to end the avec le deuxième tour de l’élection présiden- crisis took more than four years to complete tielle le 20 décembre 2013, élection jumelée the organization of the first round of the pres- avec le scrutin législatif. Si l’acceptation du idential election on the 25th October 2013. processus démocratique par l’ensemble des This process is still ongoing with the second acteurs semble acquis, une partie des « forces round of the presidential election on the 20th de l’ordre » pouvaient cependant être tentée December 2013, coupled with the legislative de jouer leur partition : pour certains, en elections. If the acceptance of the democratic jouant les arbitres du scrutin et les légalistes, process by all stakeholders seems certain, pour d’autres en prolongeant leurs avantages part of the "security forces" however could be actuels en relation avec l’équipe du Coup tempted to play their part: acting as arbitra- d’État de 2009, tout en laissant le processus tors of the electoral process and the legalists électoral s’acheminer vers un second tour pré- for some of them, by extending their ad- sidentiel. Surtout que les jeux de pouvoir, les vantages in relation to the team of the 2009 alliances et les contradictions des différents Coup, while leaving the electoral process to acteurs politiques et électoraux restent com- move towards a second presidential run for plexes, réversibles et peu transparents. Dans the other. The games of power, alliances and ce puzzle politique, les hommes en armes ont contradictions of various political and elec- donc une influence et une capacité de nui- toral stakeholders remain especially complex, sance qui ont été gonflées par la prolifération reversible and non-transparent. In this politi- d’une gouvernance criminelle depuis ces cinq cal puzzle, the influence and the capacity of dernières années. armed forces have been swollen by the prolif- eration of criminal governance over the past five years. Abstract

After setting up a military regime in Mada- gascar in May 1972, Admiral Ratsiraka be- gan a shift towards a "démocrature" which ~ ~ ~ ~ lasted until 1993, the year that saw the first political alternation after the vote. However, this political change has been possible only after peaceful protests and violent repression Avant-propos : le long processus by the presidential guard. Subsequently, in de démocratisation à Madagascar 1996 and 2001, the new elections could sug- Madagascar s’est engagé dans un processus de gest that Madagascar had managed its tran- démocratisation au début des années 1990 à sition to democracy, despite new military in- l’instar de ses pairs africains. En effet, des terference, and headed towards the consoli- mouvements de contestation se sont déclen- dation of a modernized political system. In- chés à la suite de l’élection présidentielle de deed, these elections allowed access to a more 1989 1. Cela débouche sur une nouvelle crise liberal elite than the postcolonial one where politique amenant une période de transition the security hierarchy combined with bureau- entre 1991 et 1993 2. Une nouvelle constitution cracy and historic churches was well repre- est alors adoptée le 19 août 1992. Des élections sented. Finally, some "election routinization", démocratiques, avec pour la première fois la including competitive local elections (2003 participation de l’ensemble des partis poli- and 2007) began to take root. The coup d’état tiques, sont organisées au cours de l’année of March 2009 interrupted this process. The 1992, permettant la victoire de l’opposition et power that belonged to dominant politicians l’accession d’, candidat des Forces and political parties during the period of vives et de l’UNDD (Union Nationale pour la President Ravalomanana slid to soldiers in 1. Ces mouvements de contestations sont perceptibles à mufti. This movement was carried out with l’échelle du continent africain. Voir Anyang’ Nyong'o the support of political elites marginalized by P., Popular Struggles for Democracy in Africa , Studies Marc Ravalomanana and economic elites vic- in African Political Economy, United Nations tim of the economic monopoly of the latter University, 1987, 288 p. 2. Voir Raison-Jourde F.,« Une transition achevée ou (Tiko). Despite the political and military in- amorcée ? », Politique Africaine , n° 52, Paris, stability and degradation of the state since décembre, 1993, pp. 6-18. Voir aussi Ravaloson J., taking power in 2009, the self-proclaimed Transition démocratique à Madagascar . Collection president Andry Rajoelina has consistently Repère pour Madagascar et l’océan Indien, L’Harmattan, Paris, 1994, 175 p. pushed the holding of elections, scoring Mad- 2

Démocratie et le Développement) à la prési- l’économie malgache à travers son entreprise dence de la République. Des élections législa- agro-alimentaire Tiko et le bradage aux inté- tives prennent également place en 1993 éta- rêts étrangers de pans entiers de l’économie blissant un régime parlementaire. Ce régime nationale. À la tête de ce mouvement de con- se caractérisa toutefois par une instabilité gou- testation se trouve ainsi le maire de la capitale, vernementale et Albert Zafy procédera en 1995 Andry Rajoelina, élu en 2007 sous les couleurs à une révision constitutionnelle par voie réfé- du TGV 5 face au candidat du TIM. Andry Ra- rendaire afin de pouvoir nommer le Premier joelina est entouré de diverses figures liées ministre dont le choix était auparavant une aux régimes précédents. Ces manifestations se prérogative du Parlement. À la suite de l’em- durcissent et aboutissent à une marche sur le pêchement définitif du président Albert Zafy, palais présidentiel le 7 février 2009 qui se le 5 septembre 1996, une élection est convo- solde par la mort d’une centaine de personne. quée, voyant le retour de de Affaibli, le Président Marc Ravalomanana con- l’AREMA (Avant-garde pour la Rénovation de fie le pouvoir à un Directoire militaire qui le Madagascar). Un référendum constitutionnel transmet à Andry Rajoelina. La HCC confirme, est rapidement organisé en 1998 qui, à l’instar le 18 mars 2009, les deux ordonnances de du référendum de 1995, déconstruit le carac- transfert de pouvoir. De plus, la HCC déclare tère parlementaire de la Constitution et parti- qu’Andry Rajoelina exerce les attributions du cipe à sa présidentialisation. président de la République selon les termes de À la suite de l’élection présidentielle du la Constitution de 2007 et procède à son ins- 16 décembre 2001, une crise post-électorale tallation en tant que Président de la Haute éclate entre les partisans de Didier Ratsiraka, Autorité de la Transition (HAT), le 21 mars président en exercice et son opposant Marc 2009. Andry Rajoelina fait ensuite approuver Ravalomanana du TIM (Tiako Madagasi- par référendum (contesté et non reconnu par kara 3), alors maire de la capitale Antananari- la Communauté Internationale), une nouvelle ème vo. Une contestation des résultats s’ensuit. Constitution, celle de la IV République, en Marc Ravalomanana, se déclare vainqueur à novembre 2010. l’issue du premier tour (1 er tour Dia Vita 4) alors qu’un second tour est annoncé par la cour constitutionnelle, institution réputée Introduction proche du président Didier Ratsiraka. Des af- Au lendemain de cette « troisième vague de frontements armés entre les deux protago- démocratisation », Madagascar a connu plu- nistes ont lieu, amenant alors la Communauté sieurs élections multipartites et constitue l’un internationale à intervenir, notamment des rares pays subsaharien à connaître une l’Union Africaine (UA). Cette dernière ne par- triple transition électorale (1993, 1996, 2006). vient pas à la conclusion et au respect d’un Ces élections tendent à une relative démocra- accord entre les deux parties malgré deux tisation en permettant l’accès au pouvoir phases de discussions (Accord de Dakar 1 et d’une nouvelle élite, beaucoup plus Dakar 2). La crise trouve son terme lorsqu’en « libérale » et partisane d’une démocratie pro- mai 2002, la Haute Cour Constitutionnelle cédurale face à l’élite postcoloniale. Cepen- (HCC) déclare vainqueur Marc Ravalomana- dant, ces élections de la troisième vague se na, victoire reconnue par la Communauté In- caractérisent aussi par des pratiques hégémo- ternationale l’année suivante. niques et autoritaires ainsi que la confiscation du pouvoir par des partis politiques domi- L’élection présidentielle suivante, de dé- nants, ramenant le pays parmi les autocraties cembre 2006, entérine la réélection du Prési- électorales. Les élections ne militent alors plus dent sortant Marc Ravalomanana dès le pre- en faveur de l’alternance et de l’enracinement mier tour. Ce dernier renforce alors par voie de la démocratie. Le coup d’État de mars 2009 référendaire ses pouvoirs présidentiels, le en est l’illustration au point d’inscrire le pays 4 avril 2007. Son parti, le TIM remporte l’en- dans une transition prolongée (« protracted semble des élections communales, législatives, transition 6 ») où les élections n’ont pas voix sénatoriales. Toutefois, le Président se trouve au chapitre. En effet, les transitologues tels confronté, fin 2008, à un vaste mouvement de 5. Tanora Malagasy Vonona / « Les jeunes Malgaches contestation lui reprochant sa mainmise sur décidés ». Cette association deviendra un parti 3. J ’aime Madagascar. politique après l’accession de Andry Rajoelina à la tête de l’État. 4. Il s’agit d’une campagne de communication et d’un slogan d’après lequel un seul suffit pour assurer la 6. Barkan J. D.,“Protracted transitions among Africa's victoire. Cela sera repris pour la présidentielle de 2006 new democracies”, Democratization , vol. 7, n° 3, 2000, et par Robinson en 2013. pp. 227-243.

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que O’Donnell définissent la transition comme sécuritaires d’autre part (2). Ces élections qua- « the interval between one political system lifiées de sortie de crise devraient permettre le and another 7 », intervalle où le début et la fin retour à l’ordre constitutionnel et politique. La du processus de transition sont facilement stabilité politique est également attendue afin identifiables. Dans le cas de Madagascar, le que le pays puisse mettre en œuvre une poli- début peut être identifié à la fin du régime tique de développement avec le concours no- autoritaire, moment où les élites au pouvoir tamment des bailleurs de fonds. négocient avec les élites « modérées » de l’op- position pour la mise en place d’élections « Protracted transitions » : militaires et libres et transparentes. La transition prend élections alors fin lorsque de nouvelles élites accèdent L’accès d’Andry Rajoelina au pouvoir s’est réa- au pouvoir après des élections ou lorsque les lisé à la suite d’un changement inconstitution- anciennes élites au pouvoir y reviennent aussi nel du pouvoir en mars 2009. L’armée, par à la suite d’élections qui leur confèrent une l’intermédiaire du Corps d’Armée des Person- légitimité électorale. Or cela ne s’applique pas nels et des Services Administratifs et Tech- au cas malgache comme l’illustre la transition niques (CAPSAT 9), a permis à ce dernier de qui dure depuis l’année 2009, notamment perpétrer un coup d’État à l’encontre du prési- grâce au concours des forces de sécurité et des dent sortant, Marc Ravalomanana. Il ressort élites politiques au pouvoir. que l’institution militaire, notamment ses Néanmoins la situation politique a récemment élites ainsi que la situation sécuritaire, est un évolué. Les médiations nationales et interna- acteur clef pour la prise du pouvoir 10 , que ce tionales ont en effet permis d’aboutir à un ac- soit hors (1.1) ou bien dans le processus électo- cord de sortie de crise. Une « Feuille de ral (1.2). route » a été ratifiée le 16 septembre 2011 par 11 entités politiques, dont les mouvances des La permanence des « soldiers in mufti » anciens présidents Albert Zafy et Marc Rava- à travers le coup de mars de 2009 lomanana ainsi que celle du Président de la Haute Autorité de la Transition (HAT) Andry Madagascar a connu une période d’instabilité Rajoelina, à l’exception de celle de l’ancien sans précédent à la suite du coup d’État de président Didier Ratsiraka 8. mars 2009. Au-delà des précédents épisodes de crise de 1972, 1990 et 2001, celui de 2009 Par ailleurs, le régime de transition n’a eu de constitue la plus longue phase de perturba- cesse d’instrumentaliser le processus électoral tions politiques, économiques et sociales qu’a afin de se maintenir au pouvoir. La pression connues le pays depuis l’indépendance de la Communauté internationale a permis (acquise le 26 juin 1960). Au cours de cette cependant l’élaboration d’un calendrier électo- période, le système politique a de nouveau été ral prévoyant un premier tour de l’élection « prétorianisé » et s’est caractérisé par une présidentielle le 25 octobre 2013 et un éven- difficile relation entre le pouvoir, en principe tuel second tour le 20 décembre, élection ju- civil, et les forces armées. Cette période a aussi melée avec le scrutin législatif. L’objet de cette été marquée une forte transhumance politique note est ici de réfléchir d’une part, sur la des élites martiales 11 . « protracted transition » et les enjeux poli- tiques du processus électoral (1) et les enjeux Andry Rajoelina s’est ainsi appuyé sur des élé- ments militaires, dont le CAPSAT, afin d’accé- 7. O’Donnell G., Schmitter P., et Whitehead L., der au pouvoir. Il a surfé sur les divisions et Transitions from Authoritarian Rule: Tentative Conclusions about Uncertain Democracies , Baltimore mécontentements (non-respect de la hiérar- and London, John Hopkins University Press, Part IV, 1986, p. 6. Réconciliation Malgache (CRM, Filankevitry ny Fampihavanana Malagasy - FFM). 8. La Feuille de route a comme objectif : la reconnaissance d’Andry Rajoelina en tant que 9. Le CAPSAT, créé par l’arrêté n° 2273 le 2 juillet 1976, Président de la Transition, la nomination d’un Premier est installé à Soanierana à la sortie Sud d’Antananarivo. ministre de consensus (Jean Omer Beriziky depuis le Ce camp comprend un dépôt d’armes assez important. 28 octobre 2011) ainsi que d’un gouvernement de Les éléments du CAPSAT se sont chargés de la Transition d’Union Nationale (mis en place le 21 protection d’Andry Rajoelina au moment fort de la novembre 2011), l’élargissement de la composition du crise et ces derniers en ont toujours la charge. Congrès de Transition (CT), du Conseil Supérieur de la 10. Ramasy J. F., « Madagascar : les forces armées Transition (CST) et la mise en place d’une Commission garantes de la stabilité politique et démocratique ? », Électorale Nationale Indépendante pour la Transition Identity, Culture and Politics , International Centre for (CENI-T, le 28 mars 2012, cf. la loi n° 2012-004), d’une Ethnic Studies, Colombo, Sri Lanka, the Council for the Cour Électorale Spéciale (CES, chargée de la Development of Social Science Research in Africa, proclamation définitive des résultats ainsi que du Dakar, Sénégal, décembre 2010, vol. 11, n° 2, pp. 1-41. contentieux électoral), de la Commission de

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Décompte des voix dans un bureau de vote lors du premier tour de l'élection présidentielle à Madagascar

Source : Antananarivo, 25/10/2013. © Mathieu Mérino. chie, de grade et d’ancienneté dans l’octroi des peu à peu le contrôle de la situation et l’adhé- postes de commandement) nés durant la pré- sion des officiers 15 . sidence de Marc Ravalomanana, où la Gendar- En fait, une partie des forces armées, dont le merie et la Police avaient les faveurs du ré- CAPSAT et des éléments de la Force d'Inter- 12 gime contrairement à l’armée . Par ailleurs, à vention de la Gendarmerie Nationale (FIGN), la suite de différentes manifestations et de la ont déjà fait allégeance à Andry Rajoelina. 13 tuerie du 7 février 2009 , des repositionne- Dans une tentative de récupération, Marc Ra- ments au sein de l’institution militaire avaient valomanana tente alors de mettre en place un 14 été réalisés et Marc Ravalomanana perdit Directoire militaire 16 mais ce dernier transfère

11. Ramasy J. F.,« Militaires et système politique », in Dominique Manorohanta, démissionna en février 2009 Randrianja S. (dir.), Madagascar, le coup d’État de et fut remplacé par le vice-amiral Mamy Solofoniaina mars 2009 , Karthala, 2012, pp. 67-96. Ranaivoniarivo, ancien directeur du cabinet militaire 12. Ramasy J. F., « Les élites martiales malgaches et la de Marc Ravalomanana ; un nouveau chef d’État-major démocratie », in Richard B. N., Lesourd M., Letellier S. fut nommé, le général de brigade Edmond Arsène et Fenotsara R. M. (dir), Éthique, démocratie et Rasolomahandry ; le deuxième adjoint du chef d’État- développement , Acte du Colloque International major, Claris Rodolphe Andriamaharo fut aussi démis Pluridisciplinaire, Université de Toamasina, de ses fonctions et remplacé par le colonel Emilien Madagascar, Université de Rouen, France, Tsipika, Ramboasalama. Ramasy J. F., 2010, op. cit. , p. 84. 2012, pp. 164-174 15. Refus par Andry Rajoelina du plan de sortie de crise 13. « […] des forces de sécurité tirent sur la foule des initié à la suite de la réunion entre Marc Ravalomanana partisans de Rajoelina qui, répondant à l’appel de et les généraux Claude Ramananarivo et Lucien celui-ci ainsi qu’à celui de son « Premier ministre », Raharijaona (gendarmerie), Ranto Rabarisoa, Rivo Monja Roindefo, marchent jusqu’au palais présidentiel Razafindralambo (armée), le médecin général Fred pour le prendre ». Cette fusillade se serait déroulée de Rakotovao et le vice-amiral Hyppolite Rarison la manière suivante d’après le témoignage d’un Ramaroson. Voir Maka A., « Des officiers généraux membre de la garde présidentielle : « Il n’y aurait eu chez Marc Ravalomanana-Propositions de sortie de aucun tir de sommation selon de nombreux témoins crise », La Vérité , 17 février 2009. Cent membres sur lorsque la foule s’est approchée d’une « zone rouge », six cent au sein du CAPSAT décidèrent le 8 mars de ne normalement formellement interdite. Le mécanisme plus suivre les directives du chef d’état-major. La de sécurisation à trois niveaux n’aurait pas été efficace présence au sein de l’EMMONAT de milices voire de pour contenir les manifestants, qui sont arrivés aux « mercenaires », la diminution des primes sont portes du palais sans obstruction. Les responsables l’origine de ce refus de suivre les ordres. Voir Iloniaina des barrages avaient d’abord laissé passer une A., « Le Capsat Soanierana. Des militaires en délégation de manifestants qui voulait négocier leur mutinerie », L’Express de Madagascar , 9 mars 2009. passage, avant de laisser passer la foule, en partie car Voir aussi Brümmer S., « Mercenaries plan ils n’étaient pas suffisamment équipés pour faire face Madagascar ‘coup’ », Mail & Guardian , 3 juillet 2009, à un nombre si important de personnes ». Voir www.mg.co.za. Voir aussi « Destitué en mars, International Crisis Group, « Madagascar : sortir du Ravalomanana recruterait des mercenaires en Afrique cycle de crises », Rapport Afrique n° 156, 18 mars 2010, du Sud », Ouest France , 3 juillet 2009, www.ouest- p. 5. france.fr 14. Le ministre de la Défense, Cécile Marie Ange 16. Composé des trois plus hauts gradés de l’armée, le 5

finalement ses pouvoirs à Andry Rajoelina 17 . pleinement leur rôle notamment en matière Le Président de la Haute Transition se re- d’alternance. Ainsi un Big Man est remplacé trouve donc redevable envers l’institution mi- par un autre qui sera plus prompt à la redistri- litaire. Nous assistons également au retourne- bution de la rente. En effet, la problématique ment des « soldiers in mufti 18 » en fonction des ressources s’avère importante pour les des changements de régime. élites politiques (entrepreneurs) car cela leur Au sein de cette alliance, la force et la violence confère une crédibilité par rapport aux autres politique deviennent des ressources banalisées entrepreneurs (économiques et militaires) ins- pour des élites politiques qui développent une crivant le système politique dans une logique stratégie clientéliste envers les militaires. Tou- patrimoniale où un système de patronage tefois, l’existence de la violence politique ne s’opère. Ainsi lorsque ce système n’est plus à doit pas être considérée comme un indicateur même de « rétribuer suffisamment les princi- de la faillite de l’État, bien au contraire. En paux représentants intermédiaires qui garan- effet, elle devrait supposer l’effondrement de tissent les soutiens à la base, il s’expose à une l’État, or les États dits « faillis » s’illustrent délégitimation rapide. Mais ces crises liées au par leur résilience. C’est le cas notamment du tarissement de possibilités de rotation ne si- Nigéria en 1966 ou du Tchad durant des dé- gnifient nullement que l’on va passer à de 22 cennies, ainsi que de Madagascar qui ne doi- nouvelles règles du jeu ». Nous assisterons vent en aucun cas être considérés comme des dans bien des cas à un remplacement du prési- États « faibles » ou « fragiles ». Leur résilience dent ou Big Man par un autre qui assurera s’explique par la présence de puissants ré- une meilleure redistribution à moins que ce seaux politiques informels qui chevauche la dernier après un re-lifting idéologique re- bureaucratie étatique qui est par contre vienne sur le devant de la scène politique, fut- « faible ». Nous nous retrouvons ici face à une ce par les urnes. Cela pourrait expliquer le re- structure étatique double où un État officiel tour au pouvoir de Didier Ratsiraka en 1996 côtoie un État officieux à l’image du deep qui se voulait être le défenseur d’une Répu- State turque 19 (État profond ou derin develt ) blique humaniste et écologique après avoir été ou alors du Shadow State de William Reno 20 un marxiste-léniniste. Marc Ravalomanana (Sierra Leone). Ces deux structures se nourris- rêverait du même scénario, son retour au pou- sent l’une de l’autre, le renforcement de l’un voir se ferait par le biais de l’élection du candi- n’implique pas l’affaiblissement de l’autre 21 . dat de sa mouvance, le Dr. Jean-Louis Robin- son. Au regard de ce système de redistribu- À l’image de certains régimes latino- tion, nous pouvons reprendre la maxime de américains et africains, la violence politique Marielle Debos selon laquelle : « l’État, c’est ou la gouvernance criminelle permettrait d’ex- du commerce 23 ». pliquer le cycle de crises qui se produit au sein de l’État malgache. Les élections ne jouent pas L’utilisation de la violence politique se double d’une criminalisation de l’État, notamment de vice-amiral Hippolyte Rarison Ramaroson en tant que sa gouvernance ainsi que de son économie. Président, le général Ranto Rabarisoa et le général Rivo L’État apparaît en ce sens comme « un conglo- Hanitra Razafindralambo. Il eut pour mission l’organisation d’assises nationales afin de discuter et mérat de positions de pouvoir dont les occu- d’élaborer les modifications éventuelles de la pants sont en mesure à la fois de s’assurer à Constitution, la préparation de la révision du code eux-mêmes de substantiels revenus et de ré- électoral, d’une loi sur les partis politiques et enfin l’organisation des élections dans un délai n’excédant pandre autour d’eux places, prébendes, grati- pas 24 mois. Voir ordonnance n° 2009-001 du 17 mars fications et services 24 ». Au sein de cette gou- 2009. vernance criminelle, une alliance entre les en- 17. Ordonnance n° 2009-002 du 17 mars 2009. trepreneurs (politiques, économiques, mili- 18. Il s’agit de « militaires en civil » ou militaires taires) se met en place où chacun exerce une politiques qui à la différence des militaires fonction qui lui est propre 25 . Nous sommes en professionnels passent plus de temps dans le monde politique. Toutefois, les « militaires en civil » 20. Reno W.,« Warlord Politics and African States », malgaches ne se rapprochent pas des politico-militaires Boulder, Lynne Rienner, 1995, p. 2 Voir aussi Reno W., tchadiens qui sont le fruit de la guerre. Corruption and State Politics in Sierra Leone , 19. Voir Gunter M. M., « Proposals for a solution: Cambridge, Cambridge University Press, 1995. taming Turkey’s Deep State », Paper prepared for the 21. Debos M., Le métier des armes au Tchad. Le Conference on “Kurds in Turkey: Main Requirements gouvernement de l’entre-guerres , les Afriques, for a Peace Process,” Sponsored by the Heinrich Boll Karthala, 2013, pp. 229-236. Foundation, Diyarbakir, Turkey, 2007. Voir aussi Kaya 22. Daloz J-P. (Ed.), Le (Non-)Renouvellement des S., “The rise and the decline of the Turkish “Deep Élites en Afrique Subsaharienne, Bordeaux, Centre State”: the Ergenekon Case”, Insight Turkey , vol. 11, n° d'Étude d'Afrique Noire, 1999, p. 20. 4, 2009, pp. 99-113. 23. Debos M., op. cit ., 2013, p. 196.

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présence d’une violence rationnelle mise en tème politique 28 . Elles participent plus ou œuvre par des entrepreneurs de l’insécurité où moins directement aux activités illicites (bois l’argent sale permet la consolidation de la de rose 29 , prêts d’armes, libération de détenus, puissance publique par le financement des meurtre d’un magistrat 30 , intrusion au sein mécanismes de la représentation politique. d’un tribunal, convois des marchandises illi- L’apparition de foyers de tensions permet de cites 31 , exportations de tortues, etc.). En effet, développer des affaires illicites générées par les difficiles conditions professionnelles dans l’insertion dépendante de Madagascar au sein lesquelles se trouvent les élites martiales con- de l’économie internationale 26 . Cette écono- juguées à leur politisation depuis 1972, con- mie politique de la dépendance est entretenue duisent certains d’entre eux à devenir des en- par des élites criminelles (entrepreneurs na- trepreneurs. tionaux et étrangers) qui en tirent profit, ins- Dans la perspective d’une sortie de crise pas- crivant ainsi Madagascar au sein d’un hub de sant, soit par des accords, soit par la voix des trafics autant régional qu’international. urnes, les élites martiales doivent pouvoir En effet, ces derniers opèrent tant à l’échelle jouer un rôle qui leur permettra de garantir locale que nationale (bois de rose aux Co- leurs acquis et de ne pas être laissées sur le mores, Maurice, Chine, Allemagne et États- bas-côté. La « protracted transition » a mani- Unis ; pierres précieuse au Sri Lanka, pulé le processus électoral à plusieurs reprises Thaïlande, République Démocratique du Con- (la date des élections a été repoussée à go et Dubaï (zébu et trafic d’ossement, etc.). maintes occasions). La pression de la Commu- En fait, Madagascar constitue un terrain pro- nauté internationale à travers la menace de pice au développement d’activités illicites en sanctions ciblées à l’encontre des auteurs du raison de la faiblesse de ses forces de sécurité blocage a permis l’élaboration d’un calendrier (manque d’équipement, volonté des gouver- électoral prévoyant le premier tour de l’élec- nants) et par la porosité des accès à l’île. Nous tion présidentielle le 25 octobre 2013 et un sommes face à un système économique « non second tour le 20 décembre, conjugué avec les régulé » où les activités économiques contour- élections législatives. nent la régulation économique de l’État et n’appartiennent pas à un domaine distinct de l’économie dite formelle 27 . Les forces de sécurité et la mise en œuvre du processus électoral Les militaires ou entrepreneurs de l’insécurité ayant contribué à la mise en place du régime La réussite d’une élection dans le sens de sa actuel ont été récompensés en termes d’avan- sécurisation dépend dans une large mesure de cement de grade. Ainsi, on compte aujourd’hui l’action des forces de sécurité. Les politiques plus de 150 généraux (pour une vingtaine de qui présentent des candidats jouent également départ à la retraite, nous sommes face à une un rôle majeur dans l’attitude de leurs mili- pyramide inversée). Ces mesures favorables se tants ou supporters. Les violences liées à des sont traduites par une augmentation de sa- activités/événements politiques sont fré- laire, le recul de l’âge de la retraite (décidé lors quentes dans l’histoire électorale post- des assises militaires de 2011), des acquisi- considérées comme criminelles tant par le droit tions de divers matériels (achats surfacturés international que les législations nationales (cf. les d’hélicoptères belges de type Alouette), des divers décrets contradictoires sur le bois de rose, exonérations d’impôts sur les soldes et enfin manque de transparence des permis miniers, etc.). des nominations à des postes politiques ou au 27. Rotman J., Fiscal Disobedience. An Anthropology sein du conseil d’administration d’entreprises of Economic Regulation in Central Africa , Princeton, étatiques. D’ailleurs, le budget qui leur est al- Princeton University Press, 2005. loué est en constante augmentation. Enfin, 28. Il s’agit du Comité Militaire pour la Défense Nationale (CMDN) créé le 20 mai 2009 et composé de diverses institutions sécuritaires ont été mises militaires nommés par le président de la HAT ; la en place, accentuant la militarisation du sys- Force d’Intervention Spécialisée (FIS, instrument politique de la HAT créé en juin 2009 et ancêtre de la 24. Terray E.,« Le climatiseur et la véranda », in Commission Nationale Mixte d’Enquête) ; la Direction Afrique Plurielle, Afrique actuelle. Hommage à G. de la Sécurité du Territoire (principale institution en Balandier , Paris, Karthala, 1986, pp. 38-39. charge de la sécurité sur l’ensemble du territoire, elle est rattachée à la présidence, elle est sous l’autorité de 25. Les élites politiques sont là pour adopter une Haja Resampa, secrétaire général de la Présidence qui législation adéquate, les élites économiques trouver les est l’élément central dans le domaine sécuritaire.). Voir débouchés et les élites militaires donner l’ordre Ramasy J. F., op. cit. , 2012, pp. 90-91. d’accompagner les convois/marchandises. 29. Randriamalala H., Liu Z.,« Bois de rose de 26. La frontière entre le licite et l’illicite des activités Madagascar : entre démocratie et protection de la devient difficile bien que ces activités soient nature », Madagascar Conservation and

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troisième vague. Il y a eu l’épisode de l’affron- amènent à être vigilant. De plus, la Grande- tement entre les Forces vives et les fédéralistes Bretagne a vendu au Gouvernement plus de à Diégo Suarez en 1993. L’élection présiden- 3 000 armes entre août 2011 et juin 2012 sans tielle de 2001 fut suivie d’une crise socio- que leur destination ne soit connue 35 . La fragi- politique de six mois. Les candidats sortis en lité du processus s’en trouvait aggravée no- tête des urnes (Didier Ratsiraka et Marc Rava- tamment dans une perspective de contestation lomanana) à l’issue du premier tour clamèrent des résultats à l’issue du second tour. Les ma- tous deux leur victoire et s’accusèrent mutuel- nifestations de violences politiques voire de lement de fraudes électorales. Le camp de Di- violences liées aux élections ont connu une dier Ratsiraka procéda à la mise en place de courbe ascendante (exception faite de l’élec- barrages économiques ou anti-économiques 32 tion présidentielle de 2006). Une tension la- afin d’isoler la capitale Antananarivo. Les deux tente, fruit du développement de foyers de dé- camps firent appel à des réservistes, des mi- sordres dans différentes parties du pays (dans lices ainsi qu’à des civils afin de défendre leur le Sud, à Nosy Be, à Antsohihy, à Manakara, position. Une certaine « milicianisation » etc.), est palpable. De plus, la question du re- voire une « factionnalisation » des forces de tour de Marc Ravalomanana dans le cas d’une sécurité malgaches, fut mise en place 33 . Une victoire de son « candidat », le Dr Jean-Louis démobilisation des réservistes eut certes lieu Robinson, demeura une question sensible qui en 2004 mais elle n’a pas permis de récupérer préoccupa aussi bien les élites politiques au les armes qui avaient été mises en circulation. pouvoir que leurs pendants militaires. L’affrontement armé entre les deux camps se Afin de sécuriser un processus électoral fra- solda par plusieurs centaines de morts en gile, une Commission interministérielle, co- amont du scrutin. L’année 2009 fut également présidée par la CENI-T et la Primature, visant entachée de violences à la suite de manifesta- à coordonner l’ensemble des activités de sécu- tions menées par le maire de la capitale Andry risation, a été mise en place. Un budget de Rajoelina ayant pour objet la démission du 7,5 milliards d’Ariary (environ 2,4 millions président Marc Ravalomanana. Les bâtiments d’Euros) a été alloué aux forces de l’ordre et de de la télévision et de la radio nationales furent sécurité en septembre 2013 afin qu’elles puis- incendiés ainsi que divers magasins sent s’acquitter convenablement de leur mis- (notamment ceux du groupe Tiko appartenant sion. Ce budget est géré par l’État-major mixte à Marc Ravalomanana). Par ailleurs lors d’une opérationnel (EMMO) mais a été versé sur le marche sur le palais présidentiel le 7 février compte de la Gendarmerie, commandée par le 2009, la Garde présidentielle tira sur la foule, général de brigade, Richard Ravalomanana, causant la mort d’une trentaine de personnes un fidèle de Rajoelina 36 . À l’échelle opération- et environ 200 blessés. nelle : Ces épisodes de violence s’expliquent en des barrages routiers (Madagascar, février-mai grande partie par le climat électoral. L’élection 2002) », in Politique Africaine , n° 86, Madagascar, les présidentielle du 16 décembre 2001 en est ici urnes et la rue , Karthala, Paris, juin, 2002, pp. 120-137. l’illustration parfaite. Cette stratégie de vio- 33. Rabenirainy J., « Les forces armées et les crises lence est alors mise en œuvre dans une pers- politiques (1972-2002) », Politique Africaine , n ° 86, pective de maintien au pouvoir ou bien de Madagascar, les urnes et la rue , Karthala, Paris, juin 2002, pp. 86-102. conquête de celui-ci. Par contre, les élections 34. Jütersonke O., Kartas M., “Insecurity and Predation qui se sont tenues par la suite n’ont pas été in Madagascar”, Small Armed Survey 2011, The caractérisées par des phénomènes de vio- Graduate Institute, Center on Conflict, Development lences systématiques. Cela n’ôtait en aucun and Peacebuilding, 2010, pp. 166-190. cas la possibilité que de tels phénomènes puis- 35. « The UK authorized the export of over 3174 sent apparaître au cours du processus électo- weapons to Madagascar in 2011 and the first half of 2012, including 1050 assault rifles, 600 combat ral de 2013. En effet, le climat d’insécurité qui shotguns, 600 rifles, 790 sporting guns and 4 sniper s’est aggravé depuis 2008, ainsi que la prolifé- rifles (Table 1). Numbers are unavailable for ration d’armes de petits calibres 34 et de chasse additional weapons in all of these categories. In addition, the UK authorized export of other military Development , vol. 5, n° 1, 2010, pp. 11-22. equipment including ammunition, components for 30. « Toliara : des policiers agressent un magistrat », weapons, weapon sights, body armour, devices for L’Express de Madagascar, 10 décembre 2011, http:// riot control, and military communications equipment. Information about the identities of the importing www.lexpressmada.com/toliara-madagascar/29944- companies, where the weapons are now and who has des-policiers-agressent-a-mort-un-magistrat.html. control over the weapons has not been made public ». 31. « Un camion militaire pris avec une montagne de Voir http://www.tananews.com/2013/01/concerns- drogue », L’Express de Madagascar , 1 er août 2013. about-uk-arms-exports-to-madagascar/ 32. Raison J-P,« Économie politique et géopolitique 36. Il a connu une ascension fulgurante durant la

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• pour chacune des régions, les forces de texte de préparation électorale, où chacun des sécurité et de défense (Armée, Police et leaders politiques tentent de « séduire » les Gendarmerie) ont mis en place des Cel- élites militaires. Si les principaux chefs, mi- lules de veille et des états-majors mixtes. nistre des Forces armées, le général Lucien Alors que la Cellule de veille prend en Rakotoarimasy, le secrétaire d'État à la Gen- charge la sécurité de la période préélec- darmerie, le général Randrianazary, le chef torale et le jour du scrutin, l’état-major d'État-major, André Ndriarijaona et le com- mixte est lui chargé du suivi de la pé- mandant de la Gendarmerie, le général Ri- riode post-électorale considérée comme chard Ravalomanana, demeurent des alliés une période très sensible. d’Andry Rajoelina, un certain malaise couve • au sein de l’institution militaire. Ainsi, des dans les districts, la sécurité est assurée sous-officiers n’ayant pas les faveurs du ré- en règle générale par les Organes mixtes gime ont signé un tract en juillet 2013 faisant de conception (OCM). état d’actes de népotisme, de clientélisme et de Malgré ce plan à grande échelle, plusieurs dy- corruption. Afin de resserrer les rangs autour namiques inquiètent : des militaires (officiers) qui lui sont proches voire au-delà, Andry Rajoelina a accordé • L’insécurité prévalait toujours dans les 35 tonnes de riz au CAPSAT. Dans la foulée, a régions du Nord en raison de la présence été diligentée une réunion visant à ressouder de bandes armées, les « Foroches 37 », et l’institution militaire, qui rassemblait notam- dans le Sud avec la présence des ment le ministre des Forces armées, le général « Dahalo 38 » dont les accointances avec Rakotoarimasy André Lucien, le secrétaire les élites politiques et martiales seraient d’État à la Gendarmerie, le général Randriana- avérées. Cette situation a poussé les po- zary, le ministre de la Sécurité intérieure, le pulations à mettre en place des groupes contrôleur général de Police Arsène Rakoton- d’autodéfense. Ces dynamiques consti- drazaka, le chef d’État-major général de l’ar- tuent un risque avéré pour la sécurité du mée Malagasy (CEMGAM), le général Ndria- scrutin. rijaona André, le commandant de la Gendar- • Une des craintes portait alors sur la ca- merie nationale (COMGN), le général Richard pacité de l’institution militaire à répartir Ravalomanana, ainsi que le directeur général de manière adéquate le budget entre les de la Police nationale (DGPN), et le contrôleur régions militaires. Or des éléments de la général de Police, Désiré Johnson Rakoton- gendarmerie de la région de Tamatave dratsima 40 . ainsi que celle de Diégo-Suarez ont indi- De plus, Andry Rajoelina parraina la cérémo- qué l’insuffisance de la dotation pour les nie de sortie officielle de la 34 ème promotion de régions périphériques. 59 élèves officiers baptisée « Andrin’ny FI- • Enfin, bien que la Police nationale soit RENENA », et de la promotion forte de 20 présente dans les villes, et que la Gen- membres « FENO » ou « Fraternité Eternelle darmerie et les militaires le soient au Nouée dans les Objectifs », du 19 ème PFMCS niveau des districts, la présence des (Peloton de Formation Militaire des Cadres forces de sécurité pour l’ensemble des Spécialistes) qui se tenait le 26 juillet à l’Aca- zones rurales et des zones rouges telles démie militaire d’Anstirabe (ACMIL). Il s’agit que Benenitra, Befotoka et Amboasary ici pour Andry Rajoelina d’affirmer son autori- (situées dans le sud où les chefs de ré- té et de confirmer son statut de Chef des Ar- gions ont été remplacé par des mili- mées dans la perspective d’un retour de Marc taires) n’est pas assurée. Ravalomanana mais également de la défiance Cette problématique de la sécurité semble Richard Rakotonirina est quant à lui directeur de d’autant plus prégnante que les forces de sécu- l'Acmil (c’est un proche du ministre des Forces armées, rité sont caractérisées par des divisions in- le général de corps d’armée Lucien Rakotoarimasy). ternes (des officiers réputés proches de Marc 37. Des jeunes délinquants et voyous. Ravalomanana ont d’ailleurs été mis en pri- 38. Il s’agit de bandits qui excellent dans le vol des son 39 ). Ces divisions sont attisées dans le con- zébus. Les entrepreneurs politiques sont partie prenante dans ces activités économiques non régulées. transition passant du grade de colonel à celui de 39. Huit militaires proches de Marc Ravalomanana ont général. Il est issu de la 13 ème promotion de l’Acmil. été condamnés à la prison à perpétuité en août 2010 à Deux autres membres de cette promotion occupent des l’issue du procès sur la fusillade du 7 février 2009. Voir postes stratégiques au sein des institutions : Julien « Procès de l’affaire du 7 février 2009. Le verdict est Ravelomihary occupe le poste de directeur de la tombé, Ravalomanana condamné à perpétuité », sécurité présidentielle, Léon Jean Madagascar Tribune , 30 août 2010, http://

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que lui témoigne la communauté internatio- Enjeux et aspect sécuritaire de la transi- nale. Cette dernière a en effet manifesté son tion et du processus électoral de 2013 refus de principe des candidatures d’Andry Une « rente sécuritaire » favorisant les Rajoelina, Lalao Ravalomanana et Didier Rat- rapports pernicieux entre les forces politiques siraka. À la fin du mois d’août, la nouvelle liste et l’appareil de sécurité électorale produite par la Cour Électorale Spé- Depuis la prise de pouvoir par Andry Ra- ciale ne comprenant plus les candidatures sus- joelina en 2009, et la mise en place de la mentionnées et un nouveau calendrier établi Haute Autorité de la Transition, Madagascar par la CENI-T (premier tour de la présiden- possède beaucoup des caractères d’un régime tielle le 25 octobre et le second tour de la pré- non-démocratique qui se sert des militaires sidentielle jumelé avec les législatives le plus que l’armée ne le contrôle. Ce type de si- 20 décembre) semblent obtenir l’adhésion des tuation incline le pouvoir civil à user de la vio- forces de sécurité. Le soutien de ces dernières lence pour se maintenir. Cela implique conces- au scrutin pourrait s’expliquer par le fait que sions et rémunérations en faveur de l’appareil Marc Ravalomanana ne puisse pas se rendre à sécuritaire qui reste cependant tenté de se Madagascar. L’élection de Lalao en tant que ranger auprès d’autres forces politiques en présidente aurait pu autoriser ce dernier à re- compétition. L’armée et les forces de répres- venir à Madagascar. sion peuvent s’en prendre directement au ré- Au final, les tentatives de remises en cause du gime en place si les faveurs et prébendes at- processus électoral se sont multipliées. Les tendues ne sont pas jugées adéquates. D’ail- forces de sécurité ont dû faire face à des at- leurs l’histoire brève de la Transition a été tra- taques à la bombe 41 au cours du mois d’août versée de ce type d’épisodes avec des 2013 (4-5) dans la capitale 42 . Un groupe dé- « mutineries du ventre », comme l’écrit Nian- nommé « les défenseurs de la souveraineté dou Souley 43 , celles-ci étant souvent couplées nationale » prétend être à l’origine de ces à des révoltes contre la hiérarchie et l’ordre actes, indiquant à travers un communiqué que militaire. Dans ce registre, la venue d’élections « le peuple malgache n’acceptera jamais : les en octobre 2013 encourage les jeunes officiers manœuvres de certaines nations, visant à ôter à dénoncer celui qui est pourtant présenté leur droit à la souveraineté et au choix de leur comme le responsable de la sécurité du pro- destin ; le processus électoral actuel, qui ne cessus électoral, le général Richard Ravaloma- reflète pas leur véritable volonté ; qu’un put- nana, commandant de la Gendarmerie natio- schiste demeure à la tête de l’État tout en pré- nale. Les contestataires 44 de l’armée dénon- parant des fraudes massives aux prochaines cent, entre autres, « les avantages personnels élections ». Ces actes peuvent être interprétés obtenus par certains résultants des accoin- comme un refus des élections où la main de la tances politiques douteuses tels que le passage Communauté internationale est plus que pres- du grade de colonel à celui de général de divi- sante. sion en l’espace de quatre années seulement ». Ainsi, la fragilité de la situation sécuritaire est Au contexte politique instable, s’ajoute à Ma- palpable (les événements de Nosy Be, Mana- dagascar une profonde inégalité entre les kara, Ambilobe), les épisodes des bombes à classes sociales ou du moins qui est perçue Antananarivo ainsi que le phénomène de da- comme telle (voir Afrobaromètre 2013). L’ac- halo (Remenabila et l’opération Tandroka). cumulation de richesse par l’oligarchie au pou- Une récupération politique de ces événements voir à partir des rentes naturelles a demandé pourrait servir à la déstabilisation de ce pro- l’appui de la force militaire et policière. La dé- cessus. intérieure. Il remplace alors Antonin Talbot. 41. La presse malgache parle plutôt de « bobinette ». C’est un phénomène qui apparaitt lorsqu’une période d’accalmie et d’éventuelle sortie de crise se profilent à l’horizon. 42. Une a explosé au Tana Plaza à Analakely (mercredi 4 septembre) et une autre a été déposée à l’Institut Français de Madagascar (jeudi 5 septembre) sans pour www.madagascar-tribune.com/Le-verdict-est-tombe- autant exploser. Ravalomanana,14625.html. Voir aussi « Affaire du 7 février 2009. Perpétuité pour le général Raoelina et 43 Souley N., « Mutineries militaires en période de deux colonels », Madagascar Tribune , 8 juillet 2011, démocratisation », in Armée et politique au Niger , http://www.madagascar-tribune.com/Perpetuite-pour- Idrissa K. (dir.), Codesria, pp. 233-254. le-general,16130.html 44. « À en déduire que le coup d’État de 2009 ainsi que 40. Il est nommé à ce poste en avril 2009 par Organes la prolongation de la transition actuelle rapporte Rakotomihantarizaka, secrétaire d’État à la sécurité énormément à cette minorité nantie mais pourrie ‘‘éthiquement et déontologiquement’’ de l’Armée. Il 10

pendance de la Transition vis-à-vis de la force tionne d’abord comme le gardien du scrutin 45 . dans sa politique d’appropriation des rentes Après le scrutin, en réunion avec le ministre naturelles suscite aussi des tentations chez les de l’Intérieur, le 28 octobre, les forces de hommes en armes de gérer directement ces l’ordre ont lancé un avertissement « aux indi- richesses. vidus qui sont en train de concocter d’éven- Ainsi, le processus électoral qui s’est engagé tuels troubles par rapport à la publication des dans une phase en principe décisive depuis le résultats de vote ». Il s’agit pour elles de ne 25 septembre 2013 a pu être considéré par la pas se trouver en porte-à-faux avec la mission HAT comme un mode de sortie d’une relation de stabilisateur d’un climat politique tendu et délicate avec l’appareil sécuritaire qui faisait conflictuel, animé par tous les déçus de leurs monter les enchères. Il est demandé à ses résultats. membres qui ont été associés à l’exercice du L’énonciation sécuritaire de la situation pouvoir de prendre leurs responsabilités dans s’infléchit. Après les dangers de la contestation le bilan comme dans la gestion du processus postélectorale, il est fait appel au répertoire de électoral. On voit ainsi le ministre de la Dé- la violence électorale intrinsèque. Celle-ci a de fense chargé de répondre au nom du gouver- nombreuses dimensions en Afrique et des nement aux interrogations sur l’exercice 2013 chercheurs du Nordic Africa Institute les ont des instances qui servent de Parlement, en at- indiquées 46 . Par exemple, lorsque la police et tendant la tenue des élections législatives de les forces de sécurité n’ont pas été réformées, décembre 2013. La présidence pouvait espérer leur capacité de coercition peut être utilisée à également que la menace d’un coup d’État sal- des fins politiques. Mais cet angle d’approche vateur, qui aurait balayé entre les deux tours n’est pas celui que vont utiliser les respon- du scrutin une partie des officiers supérieurs sables malgaches de l’armée et de la police. jugés trop liés à Andry Rajoelina, s’atténuerait. Leur conception de la paix repose sur le main- Elle compte avec le désir de la population de tien du statu quo de l’exclusion du président sortir de la transition par des élections et non renversé. En effet, depuis 2010, les hauts res- par un nouvel épisode soldatesque. Mais si les ponsables de la sécurité ont argué que le re- politiciens civils peuvent ainsi tenter de jouer tour dans son pays du président renversé me- une partition où ils sont plus à l’aise que les naçait l’ordre et la paix. De ce fait, en partie, militaires, tenus d’une certaine façon en lisière les élections ont été différées, puis ensuite al- par les observateurs de la communauté inter- térées avec le refus de la candidature de l’ex- nationale, ils ne sont pas complètement af- président. En 2013, au-delà du premier tour, franchis des prétoriens qu’ils ont laissé s’en- qui voit l’avance indéniable du candidat châsser dans l’État et le débat politique. proche de Marc Ravalomanana, son retour Il semble d’ailleurs qu’il existe une contradic- semble continuer à en préoccuper plus d’un. tion entre une partie de l’appareil sécuritaire, Responsables militaires et magistrats se sont disposée à se réinsérer dans un nouvel ordre réunis à plusieurs reprises afin d’étudier politique signant la fin de la transition, et l’éventuel retour de l’ancien Président. « En d’autres groupes militaires et policiers cons- somme, ils ne sont pas encore d’accord sur cients de leur marginalisation et soucieux de l’éventuel rapatriement de ce dernier. Ils se se protéger. La réforme du secteur de la sécu- basent sur le fait qu’il risquerait de régler ses rité qui se dessine à Madagascar peut être aus- comptes avec ses rivaux une fois au pays. Pour si une incitation pour certains de ses acteurs à l’instant, ces responsables se limitent au stade 47 anticiper leur restructuration sous l’égide du de l’analyse de la situation ». Marc Ravalo- pouvoir élu et de la communauté internatio- manana devient alors un potentiel fauteur de nale. De même, la question de la doctrine de violence post-électorale, magistrats et officiers défense de l’armée malgache n’a jamais vrai- se posant en protecteurs de futures victimes. ment été discutée et reste absente des con- n’est plus étonnant dans ce cas si le conclave perpétré frontations électorales. La possibilité de con- par ces chefs militaires au CCI Ivato et visant à sortir le flits entre militaires eux-mêmes et l’opposition pays de cette crise n’a rien accouché. Comment entre militaires et civils sur l’organisation du pourrait-il en être autrement alors que ces soi-disant chefs militaires n’ont eu comme seule intelligence que pouvoir civil postélectoral et la refonte du sec- de boire du whisky entre eux tout au long de ce teur sécuritaire, dont ses avantages indus, re- conclave et de discuter des petits calculs leurs cèlent bel et bien des enjeux spécifiques. Les permettant d’obtenir des postes mirobolants si les résultats du premier tour, avec une certaine politiciens parvenaient à s’entendre ». Lettre ouverte des Jeunes Officiers de Madagascar . bipolarisation qui oppose le précédent régime 45. Les forces de l’ordre ont intensifié les dispositifs de et les candidats impliqués dans la transition, sécurité durant le jour du scrutin et surtout dans la préoccupent le système sécuritaire. Il se posi- soirée du dépouillement. Les bureaux de vote de l’EPP 11

En fait la mobilisation de l’appareil sécuritaire neutralité de la Grande Muette face à la situa- pour éviter les troubles politiques et sociaux tion politique du pays. Le message s’est basé apparait bien vite comme une répétition de sur l’unité de l’armée 50 ». Les candidats aussi plus des intimidations de la transition à s’efforcent de jouer sur la sécurité en faisant chaque fois que le spectre du retour du prési- de la lutte contre l’insécurité l’essentiel de leur dent renversé réapparait. Parmi les précau- programme, comme cela est le cas de Camille tions prises après les résultats du premier Vital. Tandis que d’autres font miroiter leur tour, figure l’interdiction faite aux éléments de engagement à aider la gendarmerie à éradi- l’Armée, de la Gendarmerie et de la Police na- quer le fléau de l’insécurité . La quasi-totalité tionale de prendre des congés à compter du des participants à l’élection présidentielle « a début de la campagne électorale du second juré de prendre les mesures idoines pour éra- tour. « Cette consigne est aussi valable lors des diquer le fléau 51 ». jours de fêtes et pourrait toutefois coïncider Mais au fur et à mesure que l’on se rapproche avec l’annonce par la mouvance Ravalomana- du résultat définitif et officiel du premier tour na d’un retour imminent de l’ancien président, de l’élection présidentielle, c’est le pouvoir de Marc Ravalomanana, selon les suppositions de la transition qui semble mobiliser la hiérarchie 48 Midi Madagasikara ». militaire en la substituant aux Chefs de région Andry Rajoelina ne cache d’ailleurs pas qu’il qui ont des responsabilités décisives dans s’appuie sur l’armée pour contrer la montée en cette période électorale. Il faut d’abord procé- puissance du candidat Jean Louis Robinson. der au limogeage des Chefs de région . « Ces Par glissements sémantiques successifs, les licenciements concerneraient des respon- discours de la sécurité se recomposent. L’ar- sables régionaux qui ont refusé de se sou- mée et les autres composantes du secteur de la mettre aux ordres de leurs chefs hiérarchiques sécurité se positionnent du côté de l’ordre lors du premier tour de l’élection présiden- dans un temps électoral porteur de menaces et tielle et par respect du principe de neutralité de désordres. Lors de la cérémonie du 26 juil- politique de l’administration 52 ». Cela semble, let 2013 à l’Acmil, le président de la transition soit déplacé, soit tardif, quand le challenger de insiste sur sa mission de conseil aux jeunes Robinson présent au second tour a été accusé officiers qui pourront toujours compter sur devant la CES d’avoir usé des ressources de lui. C’est pour l’avenir, et sans doute dans le l’État durant sa campagne. Mais au-delà d’un fantasme de l’unité nationale incarnée par l’ar- retour à la neutralité, cette rotation des postes mée, que le président se positionne avec les fait craindre une mise sous tutelle des élec- promotions d’officiers. Plus directement, à la tions législatives du 20 décembre, en même manœuvre du contrôle des élections et comme temps que la finale présidentielle. Or, l’éche- chien de garde de la Cour électorale spéciale lon régional sera déterminant dans le proces- (CES), se trouve la Gendarmerie qui gère le sus électoral, particulièrement pour l’achemi- budget de sécurisation du processus électoral. nement des résultats en pleine saison des Aussi quand le candidat aux législatives de pluies. Fianarantsoa, Raharison Hilarion, critique la D’ailleurs, à la veille de la proclamation des CES, il est appréhendé par les éléments de la résultats par la CES, le 21 novembre, l’ Express Gendarmerie nationale. Ce conseiller de la de Madagascar consacre sa une à « la prise de Transition, membre de la mouvance Ravalo- pouvoir de la « junte militaire » au niveau des manana, a été arrêté au Magro (lieu de ren- régions. Le Conseil des ministres a en effet contres des supporters de Marc Ravalomana- décidé la nomination de trois généraux et de na) et maintenu en garde à vue au camp de la cinq colonels en tant que Chefs de région. « La 49 gendarmerie de Fiadanana . candidature aux législatives de certains Chefs En contrepoint, quand le président n’est pas de région, les divers événements en matière présent dans les cénacles militaires, la sécurité d’insécurité ainsi que le contexte politique na- l’emporte sur l’ordre, et la neutralité semble tional ont amené à l’adoption du présent dé- présider au destin des forces de sécurité : cret portant limogeage de certains chefs de « Les forces de sécurité se sont réunies cette région, et la nomination de leurs succes- semaine. Elles ont fait une déclaration con- seurs », soutient le communiqué du Conseil jointe à son issue. Les différents corps d’armée des ministres qui se tient le lendemain du en ont profité pour renforcer le principe de Conseil de gouvernement, sous la présidence

octobre 2013. Ambodinisotry ont été fermés à 17h30, ce qui a provoqué la colère du public mais les forces de l’ordre 46. Vigil Adolfo E., Söderberg Kovacs M., Nyström D., ont maîtrisé la situation. Madagascar Matin , 26 Utas M., « Electoral Violence in Africa », The Nordic

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de Rajoelina. Il y a bien sûr des raisons poli- prétend « éradiquer le phénomène Fo- tiques à cette décision précipitée ou tardive roches ». quand on sait que l’insécurité avait atteint son Ces nominations, comme la position hostile de 53 point culminant en septembre 2012 . Les l’armée au retour de l’ancien chef de l’État Chefs de région ont, en sourdine, influencé sont interprétées comme une politisation par dans la majorité des cas le choix des électeurs les chefs d’églises du FFKM. « Les quatre en faveur du candidat qui était leur ancien pa- chefs d’églises du Conseil œcuménique des tron de fait, le Vice-Premier ministre en Églises Chrétiennes de Madagascar tirent la charge de l’aménagement du territoire. Pour sonnette d’alarme en ce début de la campagne d’autres commentateurs, l’arrivée des élé- électorale 55 ». Dans leurs messages, les diri- ments de l’armée à ces postes ne fait que ren- geants religieux encouragent « les fidèles à forcer les doutes sur les réelles intentions du continuer à prier ». S’adressant aux actuels et pouvoir en place à l’approche de la prochaine aux futurs dirigeants du pays, les échéance électorale du 20 décembre. « raiamandreny am-panahy » mettent l’accent De surcroît, les officiers supérieurs qui sont sur la priorisation de la dépolitisation de l’Ar- placés à la tête de 10 régions sur 22 sont étroi- mée et de l’Administration 56 ». Les élections tement liés au coup d’État de 2009. En effet, sont l’occasion pour le Conseil des églises est désigné à la tête de la région Atsimo Atsi- d’exprimer ce qu’il a toujours dissimulé, à sa- nanana, le général David Ranaivoson , voir que le pouvoir de la Transition a accéléré membre du CMDN (Conseil Militaire pour la la décomposition d’un État visant l’intérêt gé- Défense Nationale) depuis le 20 mai 2009. En néral. C’est aussi une manière d’aveu selon Ihorombe, le colonel Jeannot Reribake a été lequel malgré ses prétentions et ses efforts, le promu pendant la Transition et nommé com- FFKM a failli à sa mission de réconciliation mandant du groupement de la gendarmerie des protagonistes politiques de la crise de dans l’Androy, également dans le sud du pays. 2009. Le Melaky reçoit le colonel Vohason Mitovisoa qui était chef du bataillon de sécurité de la Pri- mature sous le général Camille Vital. Dans la Quelles trajectoires et quelles missions Sofia se retrouve le colonel Serge Elliot, placé pour un appareil de sécurité aux compo- à la direction de la controversée Task Force de santes éclatées ? l’Analanjirofo en 2009. Pour le Vatovavy Fi- La dernière phase du processus électoral, qui tovinany, est nommé le général Jean Félix s’est déroulée le 20 décembre, fait également Randriamarolo, ancien allié du général Noël interférer les composantes de l’appareil sécu- Rakotonandrasana, un homme clé du coup ritaire. Dans la capitale, à la différence des ré- d’État de 2009. Il a d’ailleurs été nommé chef gions, il semble difficile de passer la main à de corps à Toliara en 2009, puis promu géné- l’armée. Ce sont donc le ministère de l’Inté- ral de brigade de l’armée de Terre Malagasy en rieur et la Préfecture de Police d’Antananarivo 2011. Leur ministre est le général Lucien Ra- qui sont dotés de la capacité d’annuler et in- kotoarimasy, qui était le CEMGAM lors des terdire une manifestation de propagande élec- événements du 26 janvier 2009 qui ont ravagé torale afin de préserver l’ordre public. Le pré- la capitale sans que l’armée n’y remette de fet de Police d’Antananarivo reçoit d’ailleurs l’ordre ou se préoccupe de la sécurité des biens les demandes d’autorisation de manifestation et des personnes. Le colonel Maevazala prend pour la campagne du second tour de la prési- la direction de la région Diana, avec pour ob- dentielle. Par contre les demandes d’autorisa- jectif non pas la sécurité électorale mais « la tion de tenir meeting pour les élections législa- sécurisation des touristes et des sites touris- tives doivent être adressées au chef d’arron- tiques, suite à une série d’agressions et de vols dissement concerné. « C’est dans ce contexte au cours de ces douze derniers mois 54 ». Il que les forces de l’ordre interviennent pour semble qu’il y ait une certaine gêne pour le dire qu’elles sont prêtes à préserver l’ordre et à nouveau chef de région à être le premier mili- faire face à tout acte de déstabilisation ». Ce taire à diriger une zone gouvernée par des no- n’est alors plus de police électorale qu’il s’agit, tables locaux. Ceux-ci sont d’ailleurs implicite- mais quasiment d’une mission de combat ment disqualifiés par le colonel Maevazala qui d’ailleurs confiée aux éléments mixtes, compo- sés de gendarmes et de militaires. Le directeur Africa Institute, Policy note n°2012/3 , septembre 2012, de la Sécurité au sein du Commandement de 4 p. 47. Madagascar Laza , 5 novembre 2013, p. 2. 49. Taratra , 8 novembre 2013, p. 3 ; Tia Tanindrazana, 8 novembre 2013, p. 3. 48. Midi Madagasikara, 7 novembre 2013, p. 3.

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la Gendarmerie nationale annonce que « ces réitéré être « dans l’obligation d’appliquer le éléments mixtes sont déployés notamment mandat d’arrêt à son encontre, émis par la dans les zones dites rouges pour enrayer les justice 61 ». Le commandant de la Gendarmerie manœuvres visant à dissuader les électeurs ou nationale a tempéré ses propos en indiquant à les empêcher d’aller aux urnes 57 ». Ce dispo- que « étant donné que le président de la Répu- sitif martial de protection des citoyens se justi- blique est le Chef suprême de l’armée, nous fie dans cette logique car « les actes de bandi- sommes obligés de suivre ses ordres 62 ». Après tismes et de circulations d’armes de guerre de des années de déni, le général Randrianazary, ces derniers jours seraient des pièces d’une secrétaire d’État à la Gendarmerie nationale grande manœuvre de déstabilisation ». semble lui aussi saisi par un sursaut constitu- Les maîtres d’œuvre de la sécurité articulent tionnel : « les Forces de l’ordre sont exécu- les mesures pour le déroulement d’un scrutin tives, au sens propre du terme. Elles n’agissent à l’abri de perturbations. Mais le tout s’inscrit que sous l’ordre d’une autorité légitime et con- dans une théorie du complot qui énonce le formément à la loi 63 ». banditisme, hélas ordinaire, comme une ac- La Gendarmerie se positionne comme un allié tion politique destinée à mettre à mal les élec- potentiel du candidat de l’ex-président en se tions. Plus encore, c’est l’État qui serait mena- réclamant en priorité de l’ordre et non pas de cé au moment même où il se réclame de la la sécurité. Si ce registre de la sécurité de- posture du gardien de la procédure démocra- meure, il se trouve strictement limité au pro- tique, à travers les vigilantes et valeureuses cessus électoral. Le général Richard Ravalo- forces de l’ordre… manana se permettra ainsi de rappeler que les D’ailleurs « un colonel est dans le collimateur forces armées observeront une totale neutrali- des forces de l’ordre » car, paradoxe, la véri- té mais également que des éléments de ces table menace planant sur les élections reste dites forces assurent la sécurité des deux can- toujours celle du soldat, défenseur pourtant de didats à la présidentielle. « Il y a eu en effet l’unité nationale. Mais d’après le journal Midi une réunion entre la présidente de la CENIT, Madagasikara 58 « le colonel est connu comme les deux candidats à la présidentielle et les étant proche d’un politicien figurant parmi les forces armées à Alarobia. De cette réunion, il a candidats malheureux de l’élection du été décidé que ces candidats seront escortés 25 octobre dernier, et ayant occupé un poste à quotidiennement chacun de quinze éléments responsabilité au niveau du CAPSAT Soanie- des forces de l’ordre, dont cinq militaires, cinq 64 rana auparavant ». Les hommes politiques policiers et cinq gendarmes ». Les militaires sont incriminés cependant car ce sont eux qui s’insinuent directement dans une relation avec soudoient les officiers « pour provoquer des les deux candidats, avec une forme de béné- situations de troubles le jour du scrutin du diction de la commission électorale. Par un 20 décembre prochain 59 ». Quand il s’agit d’un remarquable transfert des rôles, la Gendarme- officier supérieur, la presse est utilisée pour rie se retrouve à l’avant-garde de l’accomplis- distiller des messages qui ne sont pas nomina- sement du scénario démocratique de la fin de tifs mais doivent servir d’avertissement, tout la transition. Plus, il semble que c’est davan- en mettant en scène l’efficacité du renseigne- tage la tête même de l’armée qui est menacée ment de la gendarmerie et ses activités de pré- par les éléments hostiles, car l’État-major des vention. Par une série d’ajustements des énon- forces armées à Andohalo doit souligner, par cés, la sécurité devient détection des risques et l’intermédiaire de son chef de service de diffusion de rumeurs, au lieu de l’établisse- l’information et de la communication, ment d’enquêtes de police judiciaire s’il y a des « qu’aucune manœuvre ni tentative de prise indices de complots. Le légalisme revient de l’État-major n’ont eu lieu à la date du mardi 65 pourtant dans le répertoire du général Richard 3 décembre 2013 ». Ravalomanana, commandant de la Gendarme- Depuis sa formation, l’appareil sécuritaire su- rie nationale, interviewé 60 sur la question du bit en interne les actions corporatistes. Celles- retour de l’ex-Président. L’officier général a ci ont souvent animé la contestation du pou- voir civil et les combats entre « hommes en 50. L’Observateur , 8 novembre 2013, p. 3. 51. Courrier de Madagascar , 8 novembre 2013, p. 3. 55. Midi Madagasikara , 28 novembre 2013, p. 2. 52. Midi Madagasikara , 20 novembre 2013, p. 19. 56. Ibid . 53. « Insécurité, les forces armées appellent au secours », Midi Madagasikara , 6 septembre 2012, p. 1. 57. « Les forces de l’ordre “prêtes à toutes les éventualités” », Madagascar-Tribune.com , 29 54. L’Express de Madagascar , 30 novembre 2013, novembre 2013, http://www.madagascar-tribune.com/ p. 20. Les-forces-de-l-ordre-pretes-a,19385.html

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armes et uniformes ». Avec la Transition, la la gendarmerie ayant déjà travaillé au sein de hiérarchie sécuritaire s’est enkystée dans la Primature, plusieurs personnalités poli- l’État, noyautant l’administration et décidant tiques dont un membre du Conseil supérieur des échéances politiques. Elle participe aussi de la Transition qui aurait déjà dirigé une réu- de la gouvernance criminelle qui produit nion de gros bras du côté de 67 Ha la semaine l’insécurité qui permet l’accumulation de pré- dernière ainsi que des membres de l’Alliance bendes et de rentes. Globalement, la remise en pour la Paix et la Refondation de la Nation cause, peu probable, de ces positions ne peut (Aprn) dirigée par Pety Rakotoniaina, PDS qu’inquiéter les sous-ensembles du corps sé- (Président de Délégation Spéciale 71 ) de Fiana- curitaire. Ces inquiétudes pourraient amener rantsoa 72 ». soit à une opération générale d’intimidation Le rétablissement tel quel par la force de la de toute la classe politique, soit à une crise po- HAT paraissait difficile par la voix des urnes sant au nouveau pouvoir civil les limites à ne qui manifeste son discrédit dès le premier pas franchir. Ainsi « Cyril Rasambozafy et tour. Mais alors est-ce qu’une dictature mili- quatre autres politiciens se trouvent dans le taire mixte aurait pu concilier le maintien d’un 66 collimateur des Forces de l’ordre ». Ces der- statu quo et une apparente rupture avec la nières se coalisent et décident d’une stratégie Transition ? En effet, il n’existe pas de mili- de prévention. Il est fait appel simultanément taires politiciens comme au Niger qui lors de à la capacité naturelle d’augures des hommes la première phase démocratique et électorale en tenue : « Nos renseignements ont fait sa- ont réussi à s’imposer comme leaders de partis voir que des politiciens manœuvreraient en puissants 73 . « Parmi les officiers identifiables coulisse pour tenter de perturber le processus dans la première génération, deux cas de re- électoral en agissant avant, pendant ou après conversion méritent d’être cités, ceux de le jour de scrutin 67 ». Tandja Mamadou et Moumouni Djermakoye. Le pouvoir sécuritaire installe ainsi une tem- Le premier est devenu président du MNSD poralité négative autour de la date du Nassara et le second quitte le parti pour en 20 décembre 2013. Au calendrier démocra- fonder un autre qu’il dirige toujours 74 ». Lors tique, il substitue un agenda de la surveillance de la deuxième vague électorale (1996), les et de la répression : « l’individu en question prétoriens nigériens ont directement fraudé organise des réunions secrètes pour préparer pour imposer leurs candidats tout en gardant son coup. Au moment opportun, il sera convo- le pouvoir conquis par un coup d’État. Ce scé- qué aux fins d’interrogatoire. Pour le moment, nario n’est pas jouable à Madagascar car l’ar- nous nous contentons de le surveiller 68 » Il mée nigérienne était relativement homogène, faut rappeler que Cyril Rasambozafy 69 affronte ne mettant qu’un homme de paille au pouvoir, directement et très tôt la dérive militaire de la Ibrahim Mainassara Baré 75 . Ce dernier avait vie publique malgache et l’intrusion des offi- besoin des élections pour se légitimer et on ciers dans l’appareil d’État depuis des années. assiste à un hold-up électoral en 1996 : « les L’appareil sécuritaire qui n’entend pas ainsi militaires confisquent les urnes et les regrou- uniquement les critiques radicales, se méfie de pent dans des lieux autres que ceux du leur influence sur un président élu tenté de se vote 76 ». Mal lui en prit car il fut tué par ses débarrasser d’une caste d’officiers politiciens pairs qui organisèrent une brève transition et bureaucrates appartenant à la galaxie de la pour laisser un militaire politicien, Tandja transition. « Menaces de troubles avant le Mamadou, gagner les élections. Il s’agit là d’un 15 décembre 70 » : C’est le titre d’un article troisième type d’action des officiers nigériens, dans Midi Madagascar qui dénonce l’exis- « ceux dont la première vocation était de créer tence de fauteurs de troubles qui visent à dé- les conditions de leur retour dans les ca- stabiliser le scrutin du 20 décembre. « Plu- sernes 77 ». Ces comportements nigériens en sieurs personnes soupçonnées font actuelle- 64. Ibid . ment l’objet de surveillance pour ne citer 65. Ma-Laza , 5 décembre 2013, p. 3. qu’un colonel de l’armée, un adjudant-chef de 66. Ma-Laza , 7 décembre 2013, p. 3. 58. Midi Madagasikara , 4 décembre 2013, p. 20. 67. Ibid . 59. Midi Madagasikara , 4 décembre 2013, p. 20. 68. Ibid . 60. Journal télévisé de TV plus Madagascar, 6 69. « Que les militaires retournent dans les casernes et décembre 2013. y restent au lieu de s’immiscer dans les affaires politiques et compromettre les recherches de solutions 61. Ibid . entre civils ». Tananews , 14 août 2010. 62. Ibid . 70. Midi Madagascar, 9 décembre 2013, p. 1. 63. Midi Madagasikara , 6 décembre 2013, p. 2. 71. Ce dernier remplace le maire élu.

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trois grandes catégories, les officiers de coup tions dans l’État que de l’alternance démocra- d’État qui deviennent chefs de parti et sont tique qui permettrait une véritable renais- élus, les militaires qui interviennent directe- sance de la société civile. ment dans la manipulation des résultats et ceux qui arbitrent et retournent à leur métier Les élections voient certains pans de l’appareil ne semblent pas appartenir au paysage mal- sécuritaire se mettre en avant tandis que les gache. C’est bien pourquoi un mode hybride chefs militaires et leurs pairs, entrés en admi- de dérive sécuritaire en liaison avec les politi- nistration, négocient déjà leur transition dans ciens est possible. Et cela ne concernerait pas une tradition malgache de coopération poli- seulement les tenants de la transition. tique des généraux avec l’ establishment quel qu’il soit. Des tentatives afin de reporter les Conclusion élections dans certaines régions en raison de Dans le contexte des élections, le secteur de la menaces climatiques se multiplient. Il s’agit de sécurité à Madagascar révèle une bonne partie régions où des officiers proches du régime de ses particularités. Les élites prétoriennes, viennent d’être placés. Un tel scénario risque- certes, ont marqué de leurs empreintes les an- rait que des doutes soient portés sur la crédi- nées de la Transition en oscillant entre acti- bilité du scrutin et n’est pas propice à un cli- visme au sommet, manœuvres politiciennes mat d’apaisement. dans l’ombre et mutineries du ventre. Malgré On assiste donc à une oscillation entre des les dérives de certains organes comme la FIS forces de sécurité sur le terrain électoral (des ou l’emprise sur le débat politique et social de chefs de régions aux EMMOREG) qui ont inté- l’EMMONAT, se dessine cependant une pro- rêt à la reconduction du régime de 2009 et des fonde mutation des élites martiales en élites élites martiales engagées dans la politique et techno-bureaucratiques. Ces élites participent l’appareil d’État qui peuvent décider de bascu- désormais de l’État profond, déjà en gestation ler vers les forces politiques qui émergent à l’époque de Ratsiraka, mais qui s’est épanoui comme renouveau ou offrent à Marc Ravalo- pendant la suspension de la démocratie suite manana une possibilité de retour. au coup d’État de 2009. Mais comme nous l’avons écrit, ces deux com- Cette configuration est bien originale dans les posantes majeures de l’appareil sécuritaire pays du Sud. Les hommes en armes à Mada- sont intersectées (pour beaucoup, mais pas gascar ne sont pas des militaires mais plutôt toutes) dans la gouvernance criminelle. Ce des gendarmes et des policiers dévolus à des fondamental de l’économie politique malgache missions de sécurité politique. Les officiers de la Transition a donc pesé sur les élections généraux ne sont pas des réformateurs, ni, qui viennent de porter au pouvoir l’ex- comme dans certaines occasions, le Niger par ministre des Finances de la Transition et ont exemple, des passeurs de démocratie. Ils sont vu la légitimation politique d’Andry Rajoelina au cœur de la technobureaucratie et donc plus avec le plus grand parti (le MAPAR) de préoccupés de la permanence de leurs posi- l’Assemblée nationale. ◊

Auteurs Juvence Ramasy est Maître de Conférences en science Olivier Vallée, économiste et financier, docteur en science politique à l’Université de Toamasina (Madagascar). politique, travaille depuis une vingtaine d’années en tant que [email protected] consultant en Afrique. [email protected]

Les opinions exprimées ici n’engagent que la responsabilité de leurs auteurs .

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