L'Incompris

Titre original : Incompreso Réalisation : Scénario : Leonardo Benvenuti, Piero De Bernardi, Lucia Drudi Demby, Giuseppe Mangione d'après le roman de Florence Montgomery Musique originale :Fiorenzo Carpi Durée : 105 minutes

Dates de sortie: 19 décembre 1966 (Italie); mai 1967 (Cannes) Présentation :

. Résumé :

Consul de Grande-Bretagne à Florence, Sir Duncombe vient de perdre sa femme. Il apprend la triste nouvelle à son fils aîné, Andrea, gamin d'une dizaine d'années ; par contre, le cadet, Milo, cinq ans, doit continuer à croire sa mère en vacances et en bonne santé. Les deux enfants, très liés l'un à l'autre, passent leurs journées à s'amuser comme des fous, usant la patience de gouvernantes dépassées par leur turbulence. Le père, toujours retenu par ses fonctions, juge hâtivement la conduite d'Andrea comme celle d'un garçon insensible et irresponsable. Celui-ci souffre en silence de la préférence marquée de son père pour Milo, bambin capricieux et charmeur comme on l'est à son âge.

Milo est jaloux et s'ingénie à conserver l'exclusivité de l'affection paternelle. Il y réussit pleinement car il a pris froid et doit se faire opérer des amygdales. Duncombe est à nouveau fâché car il pense qu'Andrea est responsable de cet incident. A son retour, Andrea, pour se prouver qu'il est un homme, va jusqu'au bout de son " audaciomètre ", cette branche d'arbre vermoulue qui surplombe la mare. La branche casse et, la colonne vertébrale brisée, Andrea meurt sous le portrait de sa mère après que Duncombe, bouleversé, lui ait dit enfin : "Tu es vraiment le fils que tout père voudrait avoir. "

. Histoire détaillée :

L’annonce de la mort de la mère : Une voiture roule vers une propriété. Le chauffeur en descend et on découvre deux hommes qui discutent à l’arrière. Sir Duncombe explique qu’il dira ce qui s’est passé à son fils aîné, Andrea, mais rien à son jeune fils Milo car il est si fragile (comme elle). Il pleure. On découvre ensuite les deux enfants jouant, le plus jeune sur les épaules de l’aîné et défiant un chien. Une jeune femme vient les chercher pour les raccompagner chez eux. Le père accueille ses enfants : il prend dans ses bras le petit et regarde à peine l’aîné. La gouvernante arrive et Milo dit : “non, pas la piqûre”. Il voudrait qu’elle soit comme Mary Poppins et qu’elle ait un sac magique. Le père garde Andrea avec lui pour lui parler. Andrea a l’air distant et joue avec le support des partitions de sa mère. Il dit qu’il sait, avant même que son père lui ait dit que sa mère est morte. Le père croit qu’il est fort car il ne s’effondre pas en pleurs. Il lui fait promettre de ne rien dire à Milo. Andrea va faire sa douche et, en sortant il crie : “Maman, mon peigne ! », puis s’arrête, comprenant qu’il est seul à présent.

La vie quotidienne sans la mère : Andrea sort de l’école et se dispute avec un autre enfant qui le traite d’anglais. Le chauffeur le ramène. Andrea lui demande de lui prêter 180 lires.

1 Pendant ce temps, la gouvernante a du mal à donner à manger à Milo. Andrea avale le contenu de l’assiette et la gouvernante s’en aperçoit. Pendant que Milo doit contrôler sa température, Andrea installe une fusée (achetée avec les 180 lires) devant la fenêtre et il allume pour qu’elle décolle. Lorsque la gouvernante revient, elle gronde Andrea en disant que Milo va avoir une pneumonie. Au dîner, le père n’est pas là. Andrea regarde la chaise vide de sa mère. Il ne veut pas dîner seul et voudrait rejoindre Milo, mais la gouvernante refuse. Andrea va dans le jardin. Il se dirige vers la rivière où il se suspend à une branche, au-dessus de l’eau.

Le soir, les enfants couchés, le père lit une histoire : Milo dort et Andrea est attentif. Le père reproche à Andrea d’avoir excité son frère. Andrea demande à son père d’assister à son tournoi de judo le lendemain. Pendant le tournoi, Andrea est déconcentré par l’absence de son père et lorsque celui-ci arrive enfin, il perd contre Franzini (celui qui le traite toujours d’anglais). Le soir, il veut se justifier auprès de son père et le trouve dans le salon en train d’écouter quelque chose sur un magnétophone. Après le départ d’Andrea, il le remet en marche et on entend une conversation avec sa femme, qu’il avait enregistrée.

Il y a de l’orage, Milo pleure dans son lit parce qu’il a peur et réclame sa maman. Andrea lui répond qu’elle est dans une grande villa, avec un parc vert, un lac avec des cygnes et une écurie avec beaucoup de chevaux, que le dimanche, ils vont tous à la chasse au renard dans les bois (tableau qui est dans leur entrée). Le père vient et Milo lui dit que sa maman est morte et le père croit qu’Andrea lui a dit. Andrea va dans le salon regarder le portrait de sa mère. Le lendemain, Milo, assis sur le toit de la tonnelle compte pendant qu’Andrea fait du vélo. La gouvernante les gronde, elle se fait traiter de crétine, gifle Andrea et décide de démissionner. Andrea emmène Milo sur le lac : ils parlent de leur maman car Milo dit qu’il ne se souvient pas d’elle. Il demande ce que veut dire être mort. Andrea lui montre la branche penchée au-dessus de l’eau et explique que c’est son « audaciomètre» (il teste la limite de la résistance de la branche).

Ils cassent leur tire-lire et Milo prend de l’argent dans la poche de la gouvernante. Ils ont 5800 lires. Ils partent tous les deux sur le vélo d’Andrea. Ils vont à Florence chercher un cadeau pour leur père. Au retour, comme c’est dur de pédaler, Andrea se tient sur le côté d’un autocar, au moment où arrive son père. Le père gronde Andrea et Milo essaie de faire diversion avec le cadeau d’anniversaire acheté. Le père pense qu’Andrea est insensible.

La situation se dégrade pour Andrea :

Il pleut : les deux frères jouent aux espions alors que la nouvelle gouvernante cherche partout sa pantoufle qu’ils ont cachée. Andrea voit le magnétophone : il écoute la conversation enregistrée de sa mère et de son père et pleure. L’oncle Will arrive et dit à Andrea que les études et l’intelligence sont dangereuses. Il ajoute qu’il n’aime pas les enfants et Andrea répond qu’il n’aime pas les vieux. Le soir, en pyjama, Andrea veut réécouter l’enregistrement, mais par une fausse manœuvre, efface la bande. Le lendemain, le père demande qui a touché au magnétophone et Andrea répond que ce n’est pas lui : en fait, il a pris la bande pour essayer de récupérer l’enregistrement en allant chez un réparateur. Comme il pleure en disant que c’était la voix de sa maman qui est morte, l’homme lui fait boire du cognac. L’oncle Will récupère Andrea au moment où il est malade et fait ainsi en sorte que le père ne s’aperçoive de rien.

Ils vont tous au cimetière et le père jette les bleuets qui se trouvaient sur la tombe de sa femme, sans savoir que c’était Andrea qui les avait apportées. Will essaie d’expliquer qu’Andrea a besoin d’un maître. En allant à l’ambassade, Andrea est invité par son père à venir l’aider dans son bureau, le père

2 dicte une lettre importante à l’ambassadeur de et propose à Andrea de l’emmener à Rome avec lui le week-end. Pendant ce temps, oncle Will promène Milo. A table, avec des africains, Milo répète ce que son oncle lui a dit à propos de noirs cannibales, mais dans la voiture Will rit de sa blague et tout le monde rit.

Le soir, Andrea veut faire une surprise à son père en lavant la voiture. Milo l’a rejoint et, jaloux de savoir qu’Andrea doit aller à Rome, il s’asperge avec l’eau froide du jet. Au retour de l’école, Andrea voit la voiture de son père partir et sa valise sur la terrasse. Milo explique que son père n’a pas emmené Andrea parce qu’il n’a pas dit qu’il s’était arrosé lui-même ; depuis il a de la fièvre. On doit l’opérer des amygdales. Son père part avec lui. Andrea est livré à lui-même, il va au cinéma, boit du coca-cola. Il raconte des histoires à deux fillettes rencontrées au cinéma.

L’accident mortel :

On entend le thème musical de la mère, Andrea est sur l’arbre. Milo le rejoint, Andrea lui demande de ne pas monter. La branche casse. L’ambassadeur est appelé, il croit qu’il est arrivé quelque chose à Milo et revient précipitamment. La gouvernante explique que c’est Andrea : il est allongé dans le salon, en face du portrait de sa mère. Le médecin dit qu’il a un problème de colonne vertébrale. Les meilleurs spécialistes sont appelés. Andrea est placé sous une tente à oxygène, il dit qu’il a compris qu’il ne marcherait plus, qu’il veut rejoindre sa mère morte, que son père n’aime que Milo. Le père téléphone à Will en disant qu’il pensait qu’Andrea était invulnérable, qu’il était le plus faible, qu’à présent c’est Andrea qui le juge. Dans ses périodes de délire à cause de la fièvre, Andrea parle d’un cahier et d’une rédaction à finir : “Parlez de votre meilleur ami” Le père lit le cahier et pleure : “mon meilleur ami est mon père, il joue souvent avec moi, il n’y a pas de secret entre nous…” Le père demande pardon à son fils en disant qu’il était aveuglé par son chagrin et ne voyait pas que son fils souffrait plus que lui. « Tu es vraiment le fils que tout père voudrait avoir » dit-il à Andrea. Andrea dit qu’il se sent faible, que si sa maman le réclame, il la rejoindra. Il meurt. Milo l’embrasse et retourne jouer.

A propos du film

Le réalisateur : Luigi Comencini, cinéaste italien né en 1916. Il poursuit des études d’architecture à . Il s’intéresse très tôt au cinéma et recueille de vieux films qui constitueront une collection privée à l’origine de la Cinémathèque italienne. Il donne aussi des critiques de cinéma dans la revue Corrente (de 1938 à1940) et dans l’hebdomadaire Tempo illustrato (de 1939 à 1940). Après la guerre, il commence à réaliser des courts-métrages (dont Bambini in citta, en 1946 qui obtient le prix du meilleur film de l’année). En 1947, il fait son premier long métrage : De nouveaux hommes sont nés (Proibito rubare) sur l’enfance délinquante à Naples. Ce n’est que vers les années 70 que l’on a commencé à reconnaître l’importance de son œuvre cinématographique, en particulier des quatre films où il analyse la société italienne à divers moments de son évolution historique (La grande pagaille, A cheval sur le tigre, Il commissario, la Ragazza).

En tant que réalisateur, Comencini dit : La chose qui me passionne le plus est le rapport affectif, qui laisse de côté le raisonnement. Le miracle de la vie est le fait d’avoir des sensations, une compréhension inconsciente pour l’autre dont nul ne peut expliquer les raisons. »

“Jamais Comencini ne transforme le jeune héros en guimauve geignarde. Au contraire il encense sa force intuitive. Andrea sait que sa mère est morte, avant de l'entendre de la bouche de son père. En témoignent, ces fleurs éparses sur un escalier mortuaire. Ce fluide sensoriel irrite le père, qui voit sa

3 supériorité bafouée. L'adulte est réduit ici à une ridicule marionnette, fière de son costume et de son statut social.

Le cinéaste y explore un thème récurrent de son œuvre : l’enfance. Alors que dans ses films précédents, il peint la jeunesse la plus misérable dans une vision optimiste, le cinéaste fait de l’Incompris son film le plus noir avec la tragique histoire d’un enfant pourtant issu d’une famille aisée. Avec une grande sûreté, Comencini détourne ici le thème alors en vogue de « l’incommunicabilité » entre adultes, typiquement homme et femme, pour s’interroger sur la relation parents-enfants. Pour rendre plus pesante l’incompréhension du père, le metteur en scène accumule les scènes de vie quotidienne qui établissent dans le détail le constat d’échec des deux personnages : ceux-ci ne parviennent plus à s’atteindre ni à s’entendre de quelque manière que ce soit.

Comencini renforce le sentiment de solitude et l’angoisse que suggère le personnage d’Andrea en brossant en contrepoint le portrait de Milo, inconscient, jaloux et à la limite de la perversité. L’Incompris évite toute dramatisation mélodramatique emphatique : tout ici relève de l’observation attentive et minutieuse du moindre petit fait et du moindre geste susceptible de mettre en lumière le creusement du fossé qui sépare deux êtres proches devenus définitivement étrangers l’un à l’autre.

Ce film, l'un des plus grands mélodrames du cinéma, fut très mal reçu par la critique au festival de Cannes 1967, puis à sa sortie en France en 1968. La presse française se montra plus enthousiaste lors de la ressortie en 1978. Quelque temps après l'avoir réalisé, Comencini lui-même qualifia son film de "machine à faire pleurer".”

Ce qu’ils en disent :

« Comencini est un moraliste amer qui pose sur la condition humaine un regard profondément désenchanté ; peu de cinéastes ont aussi fortement souligné le profond désarroi de la société contemporaine ; Dans uen œuvre d’une lucidité exemplaire, les films sur l’enfance reviennent comme un leitmotiv. Ils marquent parfois la volonté de ne pas perdre tout espoir… » Jean-A ; Gili (Dictionnaire du cinéma).

« Toujours l’enfance, et la disparition de l’enfance. Mais ce n’est plus la jeunesse de Casanova, demi- orphelin, que peint Comencini: ce qu’il met en scène, c’est le huis-clos de deux gosses dans une maison trop grande et trop vide. En adaptant un roman assez pleurnichard de la romancière anglaise Florence Montgomery, il a resserré les données sentimentales, écarté l’inutile et oiseux bavardage de la dame du siècle dernier, en privilégiant ce qui seul compte et qui est une solitude vécue par un enfant de douze ans, Andrea, face à son père, et près de son plus jeune frère, égoïste, malin, charmant, dont il devient en quelque sorte le malheureux responsable. Pris par ses obligations, le consul de Grande- Bretagne à Florence délègue d’abord à Andrea une part de sa confiance, mais les enfants ne comprennent pas que la confiance se morcelle, et qu’on leur mente ou qu’on ne les croie pas quand ils sont sincères. De petites erreurs (de la part du père) en quiproquos provoqués par la malice de Milo, qui sait que son frère sera puni à sa place s’il commet assez astucieusement des sottises d’enfant gâté, le récit est l’analyse merveilleusement subtile et tendre d’une lente et capricieuse dégradation : Andrea, qui a su dominer la solitude où le plonge l’absence de sa mère (ce qui déconcerte le père et lui laisse à penser que son aîné est déjà mûr, insensible, solide), Andrea ne supporte pas l’autre solitude, créée par l’attitude de son père. Leurs moments de confiance seront systématiquement abîmés par la jalousie de Milo. L’enfance, dit Comencini, n’est jamais perverse: simplement elle est égoïste, animale, elle n’a pas encore appréhendé la totalité dans laquelle elle doit se fondre pour accéder au monde de l’adolescent et de l’adulte. Peut-être. Les enfants, tout en témoigne, sont pourtant naturellement agressifs, retors, se défendant mieux que l’adolescent qui, lui, sait qu’il n’est plus le centre du monde, et qui sent lui échapper l’insouciance d’hier, et le menacer le monde fascinant et révoltant des adultes. Andrea est un des plus beaux portraits d’enfant de l’histoire du cinéma, saisi à ce moment où tout change ou va changer— son affectivité, ses jeux, sa défense, sa sexualité, sa vision des

4 autres. Et tout cela est suggéré sans phrases, dans le rapport d’Andrea à Milo, d’Andrea au père; dans le cri du garçon sous la douche qui appelle sa mère disparue—et qui comprend soudain qu’il doit assumer seul son chagrin et taire ce que personne autour de lui ne peut écouter. «Je le croyais invulnérable et c’était lui le plus fragile». Il vit mal dans son chagrin renforcé un rôle que son père tour à tour lui confie et lui retire, avec cette brutale méconnaissance qu’ont les adultes de l’enfant qu’ils ne sont plus. La difficulté majeure d’un tel film est la direction d’acteurs qui ne doivent surtout pas être des acteurs. En accentuant l’isolement des orphelins dans une propriété à l’écart de la ville, Comencini rendait à leur rôle (surtout celui de Milo, six ans) une prééminence vécue comme naturelle par des garçons à qui on offrait soudain de rester les maîtres du jeu, et pour Milo, la vedette du jeu. La mise en scène repose sur l’intégration des garçons à un décor qui n’est pas le leur, et sur leur prise de possession d’un espace dont ils ne perçoivent qu’une dimension, celle saisie par la séquence, et d’un rapport entre eux qui est toujours, pour Milo que son frère adore, un duel où il compte bien avoir le dessus: la nuit d’orage, pour faire prendre sa peur en charge; la course en vélo à Florence, pour ne pas rester seul; le matin du départ de son père et de son frère pour Rome, quand il gâche tout, sciemment, par égoïsme; la dernière scène avec l’arbre mort («L’audaciomètre» d’Andrea), où, de fait, il tue son frère. Mais au-delà de la séquence, dans le rapport des êtres et la symbolique des décors et des lieux choisis, le film multiplie la fragmentation du tout, morcelle l’espace sans jamais rompre le huis-clos, isole Andrea, le sépare du passé (la voix enregistrée de sa mère qu’une maladresse efface), de son frère, de son père—dont il tentera de conjurer ou de dépasser l’éloignement dans la relation idéale de leur confiance (le devoir découvert par le père au chevet d’Andrea mourant, et séparé de la vie, déjà, par la tente à oxygène). Film sur le regard, dès qu’Andrea voit les fleurs tombées des couronnes ou des gerbes sur le perron de la villa; sur la suspension du temps, du cri, de la souffrance — cette musique qu’un jeune garçon découvre dans la solitude. Film émouvant, avec des stries d’humour à la surface, sinon trop polie, des apparences; émouvant parce qu’il n’est pas sentimental, mais rigoureux. » (Claude Michel Cluny, Cinéma 78 n°232)

“On pleure à ce film, on ne peut pas faire autrement. On pleure de voir si justement exprimés les états successifs de l'enfance, l'incompréhension dont peut-être victime un pré-adolescent, l'incompréhension dont peut faire preuve un père - pourtant aimant - à l'égard de son fils. La faillite de l'éducation et de la famille traditionnelle est toujours au cœur des grandes œuvres de Comencini. Après "L'Incompris", il a replacé l'enfant, l'adolescent dans la société et c'est Pinocchio, le pantin de bois, qui par un renversement total des valeurs familiales et sociales, est devenu un jeune garçon libre et heureux. » (Le Monde 3.3.78 J. Siclier)

« Ce classique du cinéma italien a ému aux larmes plusieurs générations de spectateurs : récit de l’incompréhension entre un père et son fils, que seule la mort parviendra à réunir, le film oppose le bonheur superficiel d’un cadre de vie idyllique, à la dureté et à la noirceur des sentiments. Un mélodrame de l’enfance délicat et bouleversant. Présenté à Cannes en compétition officielle en 1967 et sorti à Paris en 1968, L’incompris reçoit un accueil critique mitigé, mais sera réhabilité par la presse en 1978, lors de sa ressortie. L’incompris est l’un des premiers films de Comencini sur l’enfance, ce qu’il poursuivra avec le célèbre Les aventures de Pinocchio en 1971,ou encore, Un enfant de Calabre en 1987. Mêlés de gravité et d’émotion, ses films mettant en scène des enfants portent un regard nostalgique sur cet âge souvent oublié, les enfants acquérant une importance dramatique prépondérante et une autonomie qui nous ouvre les portes d’un autre monde. » (Comme au Cinéma)

Des pistes d’exploitation :

1. Le genre et les thèmes du film : mélodrame racontant des relations entre parent et enfants, des problèmes d’enfance, une histoire d’orphelins de mère, la mort…

2. Les sentiments évoqués : l’affection et la complicité entre les frères, le chagrin, la confiance, l’incompréhension, la jalousie…

5 3. Raconter l’histoire et justifier le titre : L’histoire peut être racontée de différents points de vue : celui du père, désespéré par la mort de sa femme, celui du fils aîné Andréa injustement traité par son père et celui du jeune fils Milo, enfant gâté.

C’est une histoire liée à l’enfance et au deuil.

- On peut comparer avec d’autres histoires d’orphelins ou autres (Les désastreuses aventures des Orphelins Baudelaire, Pinocchio, Un enfant de Calabre). On y retrouve l’opposition entre le monde des enfants et des adultes : les adultes n’écoutent jamais ce que disent les enfants ou ne les croient pas. - Milo souhaite que sa gouvernante soit comme Mary Poppins, on peut en parler avec les enfants.

4. Retrouver les différents personnages et décrire leurs relations :

. Décrire les relations entre le père et les fils :

Le père traite injustement Andréa et ne soupçonne ni sa sensibilité ni sa souffrance de l’absence de la mère. Lorsqu’il découvrira qui est vraiment Andréa, il sera trop tard. Par contre, avec Milo, il est indulgent et excuse toutes ses erreurs, qu’il impute souvent à Andréa. On constate l’incompréhension entre le père et Andréa.

Dès le début du film, on sent que le père surprotège Milo qui a l’air fragile (il est souvent enrhumé, il ne doit pas courir pour ne pas transpirer, il ne veut pas de piqûre, il doit prendre sa température, se faire opérer des amygdales…)

Andréa ne comprend pas les revirements de son père : au début, il se consacre entièrement à Milo qu’il surprotège. Puis, quand Will lui dit qu’André a besoin d’un maître, il se rapproche d’Andréa et lui propose de venir à Rome avec lui. Mais ensuite, il doute de lui et pense qu’il a dit à Milo que leur mère est morte alors qu’il avait promis de ne pas le faire ; il pense que c’est Andréa qui a aspergé Milo la nuit où il voulait laver la voiture…

Au début, il a commis des erreurs vis à vis d’Andréa, puis il ne lui fait pas confiance et ne le croit pas. Lorsqu’il comprendra enfin Andréa, ce sera trop tard.

. Décrire les relations entre les frères :

Ils sont très liés au début et solidaires lorsqu’ils ne veulent pas garder la première gouvernante. Mais peu à peu Milo veut avoir l’exclusivité de l’amour paternel. Il arrive toujours à faire retomber sur Andréa la responsabilité de ses erreurs. Andréa se sent de plus en plus exclu, isolé, désespéré. Milo continue à se comporter comme un enfant gâté. Il utilise souvent les larmes pour obtenir quelque chose

6 de son frère : aller dans son lit quand il a peur, monter sur le vélo pour aller à Florence… A la fin, c’est son inconscience qui provoquera l’accident mortel. Même quand Andréa est mort, il pense qu’il dort et repart jouer. - On peut reparler de l’ « audaciomètre » et montrer ce qu’il représente pour Andrea. - On peut comparer le caractère de Milo et d’Andréa en cherchant des qualificatifs pour chacun ou comparer leurs comportements (faire un tableau de comparaison)

. La mère : on ne la voit qu’en portrait, on entend sa voix sur le magnétophone, mais elle est présente partout et Andréa y pense tout le temps : elle lui apportait son peigne après la douche, il retrouve un petit mot dans l’armoire à pharmacie, il voit la chaise vide lors des repas, il regarde son portrait, écoute sa voix…

Le père aussi y pense tout le temps, il s’enferme dans son chagrin. Dans le film on peut repérer tous les moments qui évoquent la mère absente grâce au thème musical : concerto en La majeur, K 488, de W.A. Mozart.

. L’oncle Will : il montre un comportement original et moins strict que celui du père. Il déclare qu’il n’aime pas les enfants, mais il se montre attentif à Andréa : il l’aide lorsqu’il est saoul, il conseille à son père de s’occuper plus de lui. Il profite de la crédulité de Milo pour lui raconter une histoire de noirs cannibales, alors qu’il sait qu’ils vont déjeuner avec une délégation africaine.

. Les gouvernantes : On peut comparer leur comportement avec les enfants et leur apparence. La première essaie d’être très stricte, mais elle est débordée par les enfants. Comme elle se fait traiter de crétine, elle donne sa démission. La seconde, plus jeune et plus avenante, est plus compréhensive avec les enfants.

5. Analyse filmique :

Le rôle de la musique : la mère est représentée par un thème musical.

Le jeu des acteurs…

7 Comparer avec le roman pour voir comme passer d’un texte à un film (fidélité au texte, traduction des sentiments ou émotions, passage du temps…)

- Documents :

Roman de Florence Montgomery, Misunderstood, traduit aux Nouvelles Editions Latines sous le titre : Un cœur méconnu

Blog : http://lecinedeneil.over-blog.com

Article de Daniel Pastor Lloret : http://revel.unice.fr/loxias

Dossier préparé par Nicole Montaron, Association Atmosphères 53. Février 2008.

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