Abbé Laurent ZIND Curé de de 1956 à 1983

HISTOIRE DE LA COMMUNE ET DE LA PAROISSE DE GUEBERSCHWIHR

Avec la collaboration de Bernadette BURN, Jacques EHRHART, Francis GUETH et Gilles SCHMIDT

EDITIONS ALSATIA @ 1989 by EDITIONS ALSATIA COLMAR Tous droits de reproduction et de traductions réservés pour tous pays, y compris l'URSS. AVERTISSEMENT

M. l'Abbé Laurent ZIND, curé de Gueberschwihr de 1956 à 1983, date de sa retraite, a travaillé pendant plus d'un quart de siècle à rassembler patiemment les matériaux de son « Histoire de la commune et de la paroisse de Gueberschwihr », suivant en cela les conseils de Mgr Médard BARTH, qui lui écrivit un jour que cette « histoire » serait le plus beau monument qu'il puisse laisser à ses ouailles. L'essentiel du travail était achevé au moment du départ du Curé ZIND, et une première version dactylographiée de son manuscrit avait été établie. Malheureusement, un grave accident de santé empêcha l'auteur d'établir la ver- sion définitive du texte à confier à l'imprimeur, d'en corriger les épreuves et d'en choi- sir le format, la reliure, les illustrations, etc. Ce travail de mise en forme fut assuré par M. Francis GUETH, conservateur de la Bibliothèque de la Ville de COLMAR, et par Mme Bernadette SCHMIDT-BURN, professeur à Paris et son mari, M. Gilles SCHMIDT. Qu'ils soient vivement remerciés de cette aide précieuse, qui a permis de mener le livre jusqu'à sa parution. M. le Curé ZIND a consacré plus de la moitié de sa vie sacerdotale, soit 27 années, à notre paroisse et l'a marquée pendant cette période de sa forte personnalité. Il nous laisse son « Histoire » comme couronnement de son œuvre au service de notre communauté. Qu'il trouve une nouvelle fois dans ces lignes l'expression de notre vive grati- tude et de notre respectueux souvenir. Gérard HERTZOG Maire de Gueberschwihr

AVANT-PROPOS

Le touriste qui descend le vallon de Saint-Marc s'arrête volontiers au dernier lacet de la route, au lieu-dit « Gügger ». Le panorama, en effet, est magnifique. Devant ses regards s'étale la vaste plaine d'Alsace et, tout à ses pieds, ceinturés du tapis verdoyant des vignes, se serrent les toits pointus d'un village autour d'un superbe clocher roman : c'est GUEBERSCHWIHR. L'impression qui se dégage de cette vision est celle d'une bourgade émergeant du fond des âges, encore toute parée de son charme médiéval. C'est ce qui lui valut d'être classée « Site historique », le 14 octobre 1970, par le Ministère des affaires culturelles. Manquait cependant une vue d'ensemble de son passé. Il y a bien eu, au début de ce siècle, maints détails de son histoire, relatés par le professeur Auguste HERTZOG, natif de Gueberschwihr, en de nombreuses mono- graphies, publiées dans divers journaux, revues, almanachs, etc. Une notice biographique lui sera dédiée plus loin avec une nomenclature de ses principales publications. Spécialisé dans l'enseignement de l'agronomie, mais aussi archiviste et historien, Auguste HERTZOG aimait à évoquer le passé de son village natal ; mais son éloignement et ses occupations ne lui permirent pas de faire un travail d'ensemble. L'Abbé Louis FROEHLICH, curé de Gueberschwihr de 1878 à 1881, avait com- mencé à rassembler les éléments d'une chronique qu'il a consignés dans son cahier inti- tulé « Histoire de Gueberschwihr ». Si Dieu lui avait prêté vie, il aurait sans doute mené à bonne fin son projet. Il nous a laissé l'inventaire d'un grand nombre de documents des archives paroissiales et communales et surtout, une relation détaillée de l'agrandis- sement malheureux de l'ancienne église romane de 1835 à 1836 et de la construction de l'église actuelle entre 1874 et 1878. En 1960, l'éminent historien Mgr Médard BARTH m'écrivit : « Mettez-vous donc à l'étude de l'histoire de votre paroisse et de votre commune, c'est le plus beau monument que vous puissiez leur laisser ! » Je me suis donc mis au travail, sollicité déjà par l'importante documentation trouvée sur place. Bien entendu, il a fallu la com- pléter par des recherches faites aux Archives de l'ancien évêché de Bâle, à Berne, puis à Porrentruy, aux Archives départementales du Haut-Rhin et à celles, très importantes, de , sans oublier la Bibliothèque municipale de Colmar. Je remercie spécialement M. Christian WILSDORF, conservateur des Archi- ves départementales du Haut-Rhin, et M. Paul FAUST, archiviste de la ville de Rouf- fach, qui m'ont souvent guidé dans mes recherches. J'ai également trouvé une aide bienveillante auprès de Messieurs les conserva- teurs de la Bibliothèque municipale de Colmar, M. Pierre SCHMITT, puis M. Francis GUETH. La municipalité de Gueberschwihr n'a jamais cessé de mettre très amicalement à ma disposition les archives de la commune. Je remercie spécialement M. le Maire Gérard HERTZOG qui m'a souvent encouragé, et tous les employés de la mairie qui m'ont apporté toute l'aide désirable. Au cours de ces derniers mois, plusieurs demoiselles se sont attelées bénévole- ment à la tâche souvent ingrate de déchiffrer et de dactylographier mes brouillons. Qu'elles soient remerciées pour toutes ces soirées offertes à la réalisation de ce travail.

Laurent ZIND, 1982

AVIS AUX LECTEURS

Le 1er août 1982, surpris par une attaque cérébrale, atteint d'une aphasie et d'une perte de mémoire, je me suis trouvé dans l'incapacité de procéder aux nécessaires correc- tions de mon manuscrit. Dans cette circonstance, M. Francis GUETH, Conservateur de la Bibliothèque de Colmar, m'aida beaucoup et m'a fourni certains documents historiques. Par la suite, Mme Bernadette SCHMIDT, née BURN, originaire de Guebersch- wihr, et son mari se préoccupèrent également de la mise au point de mon texte. M. Gérard HERTZOG, maire et l'ensemble de la municipalité, n'ont cessé de soutenir le projet de faire paraître ce livre. A tous, j'adresse mes vifs remerciements. Laurent ZIND, juin 1989 ABREVIATIONS

A.A.E.B : Archives de l'ancien évêché de Bâle, à Porrentruy A.C. : Annuaire, de la société d'histoire et d'archéologie de Colmar A.C.H.R. : Armorial des communes du Haut-Rhin. T. III, Arrondissements de Colmar et de A.D.B.R. : Archives départementales du Bas-Rhin A.D.H.R. : Archives départementales du Haut-Rhin A.E.A. : Archives de l'Eglise d'Alsace (Annuaire) A.M. : Annuaire de la société d'histoire du Val et de la Ville de Munster A.M.G. : Archives municipales de Gueberschwihr A.M.R. : Archives municipales de Rouffach A.P.G. : Archives paroissiales de Gueberschwihr A.P.P. : Archives paroissiales de A.D.B.O. : Annuaire de la société d'histoire et d'archéologie de Dambach-la-Ville, Barr, Obernai A. T.G. : Annuaire de la société d'histoire des régions de Thann-Guebwiller B.H.A. : Baseler Hattstattisches Archiv B.M.C. : Bibliothèque municipale de Colmar B.M.H.A. : Bulletin de la société pour la conservation des monuments historiques d'Alsace J.G.S.L. : Jahrbuch fur Geschichte, Sprache und Literatur Elsass-Lothringen (Vogesen-Club) R.B.S. : Regesten der Bischôffe von Strassburg U. B. S. B. : Urkundenbuch der Stadt Basel U. B. P. R. : Walter (Theobald) - Urkundenbuch der Pfarrei Rufach U.R.S.R. (1) : Walter (Théobald) - Urkunden u. Regesten der Stadt Rufach (662-1350) U.R.S.R. (2) : Walter (Théobald) - Urkunden u. Regesten der Stadt Rufach (1350-1500)

ORIGINE DES ILLUSTRATIONS

- Département du Haut-Rhin (Commission d'héraldique) - Ville de Gueberschwihr - Bibliothèque de la Ville de Colmar - Henri Boll, photographe à Colmar - Famille Ernest Burn, Gueberschwihr - Richard Decker, photographe à Strasbourg - Famille Benoît Lichtlé, Gueberschwihr - Mme Meyer-Hertzog, Colmar

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La localité eut la chance de sortir du XVIIe siècle, sans avoir subi trop de dégâts maté- riels. Elle se présentait au début du XVIIIe siècle, à peu près dans l'état où nous la voyons actuellement. Mais jamais plus, ses habitants appauvris par tant de guerres n'arriveront par la suite à réaliser des maisons comme celles que nous ont léguées le XVIe et le début du XVIIe siècle, époque qui fut l'apogée de la Renaissance. La plupart de ses anciens habitants, s'ils revenaient, ne seraient pas trop dépay- sés par l'aspect du village d'aujourd'hui. Sans doute, seraient-ils surpris de voir leur antique clocher familier, desserti de son ancienne église qu'il dominait sur la croisée du transept. Ils le verraient maintenant flanqué d'une nouvelle nef de style « néo-roman ». Par contre, ils se retrouveraient aisément sur la place du village - l'ancien « Anger » de leurs aïeux. Cette place est le plus bel ornement de Gueberschwihr. De nos jours encore, le visiteur en admire la belle ordonnance.

LA PLACE DU VILLAGE

Certes, les maisons et les monuments qui l'encadrent ne sont pas aussi riches en « fiori- tures », que ceux des anciennes cités impériales jadis plus importantes, mais l'ensem- ble ne manque pas d'allure dans sa sobriété. Délibérément, nous laissons de côté pour le moment, l'église, dont l'historique fera l'objet d'un chapitre spécial. C'est l'ancienne mairie, l'actuelle école maternelle, qui frappe immédiatement les regards du visiteur débouchant sur la place par la rue des Forgerons ! Il reconnaîtra cette maison grâce à la fontaine de Saint-Pantaléon, qui décore sa façade. Cette maison a été construite à partir de 1732, sur les fondations de l'ancienne maison communale. Dans une supplique adressée à l'intendant Faydeau, le prévôt Claude Donat expli- que l'urgence de cette nouvelle construction. « L'ancienne maison communale est à ce point délabrée que le Bailli de Rouffach n'ose plus y venir pour y rendre la justice ». A cette supplique, Donat n'oublie pas de joindre un devis détaillé, daté du 5 novembre 1731 1. D'après les estimations de ce devis, les frais de construction étaient évalués à 1 694 livres, 14 sols tournois. C'est d'après ce devis que fut effectivement construit le nouveau bâtiment dans le style du XVIIIe siècle. En 1793, le Conseil Municipal en fera une « maison de l'instruction » bien en vue sur la place.

1 A.M.G. DD 72. Le lavoir-aux-chevaux, "Rosswasche" ou "Rosschwemme", construit en 1538. Vestige des fortifications de l'ancien cimetière. LE LAVOIR DES CHEVAUX « ROSSW ÁSCHE » Tout le côté sud de l'ancienne maison communale est bordé par le pittoresque lavoir des chevaux, qu'ombragent deux magnifiques tilleuls séculaires. A l'époque où l'évêque de Strasbourg Guillaume de Honstein venait de cons- truire une nouvelle maison de bains, l'actuelle résidence de la famille Brunck, le prévôt et ses conseillers songèrent pareillement à l'hygiène des animaux. Comme nous le ver- rons, beaucoup de pierres du manoir de Hertenberg furent réutilisées pour cette cons- truction en 1538. L'extrémité du lavoir s'engage en cul-de-sac sous un massif pont voûté. Ce pont enjambe le dernier vestige du fossé qui interdisait jadis l'accès du cimetière fortifié de Gueberschwihr, du côté de la place. L'arc en plein cintre qui soutient ce pont est orné du plus ancien blason de la commune : un pignon de maison dentelé. Au-dessus est inscrit, en chiffres romains et en-dessous, en chiffres arabes, le millésime 1538. LA MAISON CURIALE Le grand bâtiment qui encadre le côté nord de la place, est le presbytère. Il est prolongé jusqu'à l'angle de la rue du Nord par une petite maison que l'on vient de restaurer. C'est l'ancienne maison du sacristain à la fin du XVIIIe s., qui devint plus tard « corps de garde et prison municipale ». Cette « maison curiale », telle qu'elle se présente de nos jours, a également une histoire mouvementée. Elle a été reconstruite dans sa forme actuelle au cours de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, par le curé François Ignace Cetti. Déjà vers le milieu du XVIIe siècle, le presbytère était dans un état délabré. Le procès-verbal de la visite canonique de 1685 le décrit comme étant dans un état assez misérable. Cetti obtint le 9 mars 1768 du Conseil Souverain d'Alsace que soit faite une visite en règle du bâtiment par un expert 1. Les travaux furent autorisés. Mais comme le curé était décimateur pour un quart de la dîme principale (en vin), il dut prendre à son compte un quart des frais de construction. Cetti était constamment brouillé avec la municipalité de Gueberschwihr. Aussi, quand en 1769 il demanda un lot de bois de construction, on fit la sourde oreille. Malgré ces difficultés, Cetti réalisa quand même sa reconstruction. Il ajouta très probablement l'aile du bâtiment qui longe la place vers la rue du Nord. Ces travaux coûtèrent la coquette somme de 5 036 livres et 6 sols, 91/2 deniers dont Cetti dut payer un quart. Mais comme il mourut subitement en 1774, ce furent ses héritiers qui durent payer le quart en question, sur ordre de la Régence de Saverne confirmé par le Conseil Souverain d'Alsace, le 13 février 1777. Thomas Haener avait succédé à Cetti. Les héritiers de ce dernier voulurent obtenir que Haener payât 954 livres pour un lot de bois de construction. Haener refusa, et les héritiers de Cetti furent déboutés, par décision de la Régence de Saverne, le 28 février 1778. 1 A.A.E.B. A 20/3 L. n° 53. « LE FURSTENKELLER »

On admire les vastes caves du presbytère, d'autant plus vastes qu'elles sont actuelle- ment vides ; mais jadis la grande cave abritait les vins de la dîme du Prince-évêque de Bâle, d'où le nom de Fürstenkeller, dans la tradition populaire. Dans la cave plus petite de l'aile longeant la place, il y avait le pressoir et les vins de la cure, il en sera question plus loin. En 1798, le presbytère fut vendu comme bien national. Estimé l'an IV à 5 130 livres, il fut acquis par un maquignon J. Jacques Roux de Neuf-Brisach, puis vendu à Michel Cronenberger, du Conseil Municipal de Gueberschwihr, pour 16 000 livres. En 1811, il fut revendu pour 19 000 F à la famille Brunck qui le céda à la commune en 1824 pour 22 000 F. A cette époque, le presbytère fut mis à la disposition de la cure. Du temps de Cronenberger, plusieurs familles étaient domicilées au presbytère, entre autres Xavier Deybach, beau-fils de Cronenberger. C'est ainsi que le 15 juin 1806 y naquit le futur Mgr Deybach, le fondateur des écoles de Lautrach et de Memmingen, en Bavière (Une notice biographique lui est consacrée). Le presbytère comprend également des dépendances. C'est que le curé, non seu- lement avait de grands biens à administrer, les vignes, les champs et les prés de la cure et de la fabrique de l'église, mais il avait aussi à loger les produits de la dîme et l'un des taureaux de la commune, sans compter le verrat, cochon mâle de la commune. Il lui fallait aussi des étables pour ses vaches, des écuries pour les chevaux, de la place pour les voitures et les instruments de travail. Il lui fallait en outre entretenir un certain nombre de domestiques et de servantes, comme le montrent les visites canoniques du XVIIe siècle.

LES MAISONS ANCIENNES 1 Ce qui fait le charme de Gueberschwihr, c'est l'ensemble de ses maisons anciennes qui encadrent des rues et des ruelles tortueuses, jamais monotones. Quelques-unes ont conservé des vestiges d'architecture et de décorations qui remontent à l'époque romane ; mais la plupart de ces demeures ont été construites du XVIe au XVIIe siècle, après le passage désastreux des Armagnacs au milieu du XVe siècle Les plus belles maisons ont façade sur les rues principales. Ce sont les maisons dites « patriciennes », demeures des vignerons aisés, tandis que les maisons plus modes- tes, souvent plus anciennes, occupent la périphérie. Les façades sont d'aspect plutôt sobre, mais elles sont agrémentées par des fenê- tres aux chambranles souvent finement taillés et par des portes cochères spacieuses de style Renaissance. La plupart de ces portes sont ornées du blason du maître de céans et portent un millésime.

1 A. GARDNER - Gueberschwihr. A la Révolution de 1789, on fit marteler tout ce qui avait un « relent » d'aristo- cratie. C'est ainsi que l'on remarque plusieurs de ces blasons plus ou moins abîmés, surtout le long des rues où passaient les argousins, mais on les retrouve souvent intacts dans les cours intérieures. Ne furent généralement épargnés que ceux présentant un caractère artisanal ; les instruments du tonnelier, les équerres des charpentiers, les bretzels des boulangers, les ciseaux des tailleurs et les serpettes des vignerons, notamment celle en usage au XVIe siècle, à double tranchant : l'un horizontal, l'autre vertical ou frontal. Entrons dans ces maisons : c'est déjà dans la cour intérieure que se révèle le charme de ces maisons. On accède souvent à cette cour par un large passage couvert, au rez-de-chaussée, permettant le passage de chariots chargés. Sur ces couloirs cou- verts, s'ouvre la large porte cintrée de la cave. Celle-ci est toujours de plain-pied avec la cour à Gueberschwihr, la présence de l'eau à peu de profondeur au pied de la monta- gne, ne permet pas de creuser des caves profondes. Quelques-unes de ces portes en plein cintre, sont encore munies de leurs battants d'origine portant quelquefois le millé- sime de la maison : 1597 - 1599 - 1609 - 1620. Les portes sont en chêne massif artistiquement sculptées. On accède aux pièces d'habitation par un escalier souvent enfermé dans une tourelle. Il y a encore une douzaine de ces escaliers en colimaçon à Gueberschwihr, dont quelques-uns bien conservés, datent du XVIe au début du XVIIe siècle. Ces escaliers sont parfois de pures merveilles ; des marches superposées mon- tent en spirale de telle façon que leur centre reste creux et forme une hélicoïdale comme les rayures d'un canon. La porte d'entrée est toujours joliment ornée de colonnettes, de pilastres ou de sculptures à même le jambage. Un linteau ornementé encadre le blason de la maison et le millésime. La cour intérieure donne accès aux dépendances diverses. Dans beaucoup de maisons, une galerie couverte, garnie de balustres en bois, les couronne à l'étage supé- rieur et les relie à la maison d'habitation. Les maîtresses de maison savent en faire de superbes balcons fleuris. La cave est le sanctuaire, la salle du trésor du vigneron. Aussi est-elle particu- lièrement soignée. Les caves voûtées sont rares, on n'en compte que trois, mais la plu- part des autres sont remarquables. On y admire souvent de belles colonnes artistique- ment taillées, en bois de chêne, soutenant le centre de la maison. On y rencontre aussi des colonnes en pierre, soutenant les poutres du plafond sur des architraves sculptées. Des fûts, cirés comme des meubles précieux et parfois décorés de motifs sculptés, s'ali- gnent le long des murs. Ce qui fait le charme particulier de ces celliers de Gueberschwihr, c'est qu'ils s'ouvrent de plain-pied sur la cour et leur ambiance rayonne les jours de fête, telle la fête de l'amitié - sur les centaines de visiteurs qui viennent en goûter les crus divers. Remarquons en passant une caractéristique particulière aux anciennes maisons de vignerons : les grandes cheminées à feu ouvert sont pratiquement inexistantes. On se chauffait jadis à un bon feu de bois avec un magnifique poêle en faïence (Kachel- ofen) souvent richement décoré. Quelques-uns de ces grands poêles capables de chauf- fer tout le logis, subsistent encore à titre de pièces de musée... Armes bourgeoises, millésimes et inscriptions lapidaires relevés par Théobald Walter. (Aus Geberschweiers alten Tagen, Elsassland, 1926) EN FLANANT PAR LES RUES : VESTIGES DE L'EPOQUE ROMANE DE GUEBERSCHWIHR ET AUTRES CURIOSITES

A part le clocher du début du XIIe siècle, et les restes de la chapelle Saint-Michel (l'ancien Ossuaire) de l'époque romane, il ne subsiste que des vestiges englobés ou réutilisés dans des constructions ultérieures. Ainsi, dans la rue des Forgerons, la maison n° 27 a conservé dans ses substruc- tures les restes d'une riche demeure, de l'époque romane. On y trouve en bon état, une belle porte romane de plein cintre, dont l'arc repose sur de beaux chapiteaux ornés de dés. Des colonnettes romanes à chapiteaux cubiques ont été récemment déterrées dans la cour de cette maison. Il semble bien que des sculptures romanes provenant de cette maison, aient été réutilisées dans des maisons voisines. Ainsi la maison n° 30, rue des Forgerons, possède des soubassements de fenê- tres décorés de motifs à dés ou une guirlande de lierre. La tour d'escalier de cette maison est ornée de deux quatre-feuilles qui provien- nent du damier qui décorait jadis l'abside de l'ancienne église romane, à l'extérieur. En face, dans la même rue, la maison n° 1 porte une gargouille romane, prove- nant également de l'ancienne église. Cette maison, de construction récente, est ornée sur sa façade, de très beaux panneaux de grès de Rouffach présentant une hilare face de Bacchus, une tête de faune et une sirène à double queue, d'époque Renaissance. Quatre autres panneaux du même style se trouvent insérés dans le mur de la maison n° 27 qui fait suite à la Caisse mutuelle de dépôts et de prêts, à l'angle de la rue du Nord. Ils représentent un aigle autrichien bicéphale, un saint Christophe, un buste de femme du XVIe s. et une tête d'angelot. Ces panneaux proviennent sans doute de l'oriel d'une maison disparue. Dans la rue du Nord, au n° 3, on remarque un portail roman bien conservé dont le cintre est orné d'une croix munie d'une hampe. Plus loin, la maison n° 15 se fait remarquer par le contour polygonal de ses fondations qui sont probablement celles du manoir des chevaliers de Norgassen de la fin du XIIIe siècle 1. Sur le haut de la place du village, on remarque une terrasse fleurie au-dessus d'une porte de cellier. C'est l'ancienne cave dîmière des chanoines du chapitre de Bâle. La maison n° 10, construite dessus avec des colombages, date de 1740. Toujours sur la place, la maison n° 9 est un remarquable spécimen de maison patricienne. Elle possède une belle tour d'escalier de 64 marches et le fronton de la porte d'entrée de style Renaissance porte le millésime 1609. C'est la maison natale de Mgr Louis Humbrecht qui mourut en 1927, archevêque de Besançon. Cette belle mai-

1 SALCH, Châteaux, p. 118. son a été construite au début du XVIIe s. par Imer Dornstetter. Dans la rue Haute, la maison n° 11 se fait remarquer par ses deux portails cintrés superposés, datés respecti- vement de 1576 et de 1604. A la suite d'un incendie, la maison fut reconstruite. On conserva le portail existant en le renforçant par un second. Ce portail a ceci de remarquable, qu'un de ses montants repose sur un énorme bloc de pierre. Cette pierre n'est autre chose qu'une ancienne pierre de pressoir : « Trott- stein » servant de contre-poids à la vis de pression, à l'extrémité du pressoir. Cette grande vis en bois permettait de régler la pression du pressoir à barre hori- zontale, en usage avant l'apparition au XVe s., du pressoir à vis centrale Les anciens pressoirs appelés « Baumtrotte » étaient en usage à travers tout le Moyen Age. On en trouve la représentation parmi les illustrations de « l'Hortus Deli- ciarum » d'Herrade de Landsberg. Un magnifique exemplaire de ces pressoirs antiques ayant jadis appartenu à l'abbaye d'Eschau, se trouve en possession de la famille Muré, au Clos Saint-Landelin à . Il existe encore plusieurs de ces pierres de pressoir à Gueberschwihr et dans les environs. L'une d'elles se trouve devant la salle des fêtes. Elle avait servi de socle à une croix champêtre renversée en 1945 par un char américain, lors de la Libération. La maison n° 11 de la rue Haute porte au cintre du porche, un cartouche Renais- sance daté de 1604. Actuellement on peut y lire, grossièrement gravé, le nom de « Peter Remmelt ». A la Révolution ce cartouche avait été martelé. Une main inhabile voulut resti- tuer le nom d'origine, qui était en réalité celui du constructeur de cette maison de 1604, « Peter Reimbolt ». A cette époque, ce dernier faisait partie des échevins de la commune. Au n° 15, rue Haute, on remarque un très beau soubassement - appui de fenê- tre, représentant une frise romane : un bélier, au centre, conduisant son troupeau. Un soubassement identique a été trouvé, encastré dans le mur de la maison 17, rue Haute. Mais les maçons ont eu soin de marquer son emplacement par deux repères, en atten- dant son dégagement. La maison n° 16 est une belle maison vigneronne du XVIe siècle La porte sculp- tée de la cave est gravée du millésime 1599. La rue Haute aboutit au parc de la résidence Brunck - de Weck, l'ancienne mai- son des bains. De là elle tourne à angle droit vers la charmante fontaine du haut, où elle rejoint la rue de la Source. Ce tronçon de rue est particulièrement pittoresque avec ses vieilles maisons à colombages des XVIe et XVIIe siècles. Derrière ces maisons grondent les eaux du « Stein- bach » qui faisaient tourner le moulin de Gueberschwihr, encore à la fin du XVe siècle. La rue qui y conduisait, s'appelait « rue du Moulin », « Millengasse » dans les anciens documents. En descendant la rue de la Source depuis la fontaine du haut, nous rejoignons la rue Basse près de la porte de Pfaffenheim. En passant, on longe à main droite l'ancienne cour dîmière des chanoines du chapitre de Bâle, d'Arlesheim. Elle est actuellement par- tagée entre les n° 1 et 2 de la rue de la Source.

1 BARTH, Rebbau, « Baumtrotte ». NOUS ENTRONS DANS LA RUE BASSE

Au fond d'une cour, la maison n° 27 présente une élégante tour d'escalier. Le linteau de la porte d'entrée est orné d'un blason : une tête d'oiseau, avec le millésime 1612 et les initiales I.W. qui l'encadrent. Le même blason, avec le même millésime et I.W., se trouve sur le linteau d'un très beau puits qui jadis se dressait devant la tour d'escalier. Il a été malheureusement aliéné à la ville d' où il décore maintenant la place publique. Cette maison a été construite par Jacob Werlin, au début du XVIIe siècle, sur les murs d'une maison plus ancienne, détruite par le feu. Les encadrements en bois des soupiraux de la cave portent encore les traces de l'incendie. En creusant dans la cave on découvrit vers 1970 un bloc de plâtre. En le brisant on libéra un beau crucifix en bois doré, en très bon état. C'est sans doute au cours de la Révolution que ce crucifix a été caché. Une vieille tradition raconte que pendant les années troubles, des prêtres réfractaires venaient de temps en temps célébrer la messe dans cette maison. De par sa position en périphérie du village, on pouvait plus facilement s'y glisser à travers les vignes et les vergers et surveiller les alentours. En face, toute la rue Basse est bordée par la résidence de la famille Brunck - de Weck, dont les armoiries figurent sur la porte d'entrée ombragée de magnifiques marronniers.

La Famille Brunck de Freundeck 1

D'après la tradition familiale, les Brunck sont issus de nobles écuyers d'origine sué- doise, du temps des croisades. Au XVIe siècle, la famille vint s'installer à Fribourg en Brisgau, où Jean- Christophe Brunck, 1603-1688 fut élu recteur de l'Université. Ils vinrent ensuite à Bri- sach, où Louis XIV avait transféré le Conseil Provincial d'Alsace, en 1674. De là, la famille rayonna bientôt sur toute l'Alsace. Il n'est pas possible de donner ici un aperçu généalogique sur cette importante famille. Elle a fourni nombre de juristes, de médecins, de magistrats, d'hommes d'église, d'officiers supérieurs ; un homme de renom, l'helléniste Richard François Brunck de Freundeck (1723-1803) et, au cours de la première moitié de ce XXe siècle, l'artiste graveur Richard Brunck, connu pour ses « Sept Péchés Capitaux ». Il venait souvent à Gueberschwihr, dont il a laissé une vue fantaisiste, représentant le village au XVIe s., avec son église et son « Mittelburg » au centre 2.

1 Notices sur la famille Brunck de Freundeck : SITZMANN : Dictionnaire, T.I. p. 245. DOLLINGER (Ferdinand) : Sites d'Alsace. Dans : Revue alsacienne illustrée, 1914. SCHMITT (Jean-Marie) : Antoine Richard Brunck (1671-1753), Chancelier de la Principauté de Murbach. Dans : A.T.G., 1975-76. Notices sur la Famille Brunck, par Madame Pierre SCHNYDER de Wartensee, née Cécile de Weck-Brunck. 2 Richard Brunck de Freundeck né à Paris en 1898. Une reproduction de cette gravure se trouve dans l'Atlas des villes et villages fortifiés de France, de Charles-Laurent SALCH p. 395 (Editions Publitotal, Strasbourg, 1978). Au premier plan chevauchent deux cavaliers, dont l'un semble être le célèbre humaniste Erasme de Rotterdam se promenant avec son ami Materne Berler, curé de Gueberschwihr. Avant la Révolution de 1789, la famille Brunck possédait à Gueberschwihr des biens et une maison : le n° 14 dans la rue Basse, appartenant actuellement à la famille Ernest Burn 1. La maison servait d'auberge avec une magnifique enseigne « Au Dauphin ». Antoine Richard Brunck vint s'y installer d'une façon définitive, au début de la Révo- lution, avec son épouse Richarde Geiger. La tradition familiale raconte qu'il était venu à Gueberschwihr pour échapper à des brimades qu'on lui réservait, en sa qualité de bailli de Brumath et d'avocat au Conseil Souverain d'Alsace. Mais à Gueberschwihr, il tomba sur des « Sans Culottes » non moins fanatiques qui voulurent lui jouer un mauvais coup. La tradition raconte qu'ils lui mirent un mors de mulet ou d'âne dans la bouche, tandis qu'un mauvais plaisantin tenait les rênes et le fouet. Un autre le tirait par le nez avec une pince plate de forgeron. C'est dans cet attirail qu'on le força à faire un tour par les rues du village (um den Stock). De retour devant la maison, quelqu'un lui demanda s'il voulait encore faire un petit tour. Richard aurait répondu, non sans humour : « Chaque bourrin se réjouit en flairant l'écurie », ce qui désarma ces plaisantins. Le 3 ventose de l'an II (21 février 1794), Richard Brunck reçut avec son épouse, inscrite sous le nom de « Marie Catherine Geiger » un certificat de civisme, dont men- tion est faite dans le registre des délibérations du Conseil Municipal. La famille Brunck acquit en 1811 la maison curiale, vendue comme bien natio- nal en 1798, à Michel Cronenberger. Puis en 1824, le presbytère ayant été racheté par la commune pour sa destination première, la famille Brunck acquit l'ancienne maison des bains qui fut aménagée et agrandie dans sa forme actuelle au cours du XIXe siècle. La famille Brunck n'a cessé de prendre une part très active à la vie communale, tant sur le plan administratif que caritatif.

De la Fontaine à la place En passant devant la fontaine de la Vierge, en remontant par la rue Basse vers la place, saluons la remise en valeur de la vieille maison n° 28 que l'on vient de trans- former en « Auberge de Gueberschwihr » avec caveau et chambres pour touristes. La maison n° 18 est une de ces belles maisons patriciennes de la rue Basse. Elle se fait remarquer par ses deux belles portes sculptées, dont une piétonne, la seule à Gueberschwihr, donnant sur la rue, à côté de la porte cochère. En entrant dans la cour ouverte on découvre une de ces massives portes de cave qui porte le millésime de la maison : 1597. Le n° 14 vis-à-vis, est la seule maison à Gueberschwihr encore ornée d'un oriel. Grâce à cet appendice, qui est ici triangulaire, il est possible de remonter la série de

1 A.M.G. : Urbaire de 1787 série DD n° 57. La maison d'habitation appartenait à Madame Richarde Brunck, née Geiger. La famille possédait en outre, en 1787 : 22 Schatz de vignes, 15 Ruthen de prés. quelques-uns de ses propriétaires successifs, car à Gueberschwihr, on devait payer une taxe spéciale pour tout ce qui dépassait le mur du côté de la rue. On retrouve les rede- vances inscrites aux comptes de la commune. Au début du XVIIe siècle, elle appartenait à Michel Bopp puis au XVIIIe siècle, comme nous l'avons vu plus haut, à la famille Brunck, qui n'y venait qu'occasionnelle- ment. A cette époque, elle était l'auberge « Au Dauphin » avec sa magnifique enseigne qui se trouve actuellement au Musée de Colmar. Une copie vient d'en être faite récemment qui donne du cachet à toute la rue. C'est une des plus belles, des plus spacieuses maisons de Gueberschwihr. On entre dans la cour par une porte cochère portant blason et le millésime 1569. Une très belle tour d'escalier style Renaissance et datée de 1623, conduit aux différents étages. Elle possède également une des plus belles caves de la localité. En son centre, une colonne monolithique, ornée du blason du lieu, soutient un plafond aux poutres finement sculptées. La grande maison n° 10 de la rue Basse est l'ancienne cour dîmière des Cheva- liers teutoniques qui dépendaient de la Commanderie de Beuggen ou Bucken près de Bâle. Ils étaient présents à Gueberschwihr, au XIIe siècle déjà, et ont souvent donné leur nom à la rue Basse qui s'appelle parfois dans les documents : « Buckengasse ». Faisant face à la maison portant l'enseigne « Au Dauphin », nous découvrons au n° 15 une de ces maisons typiques de vignerons aisés du XVIe siècle. Sa façade plu- tôt sobre ne permet pas de deviner la disposition harmonieuse et la richesse architectu- rale de son ensemble. On y entre par un passage couvert sur lequel s'ouvre la porte de la cave. Elle est en chêne massif richement sculptée et datée de 1609. La cave est entièrement voûtée sur de très belles colonnes monolithiques. De la cour intérieure on monte aux étages par une de ces belles tours d'escalier, au portail très harmonieux de style Renaissance. En retrouvant la place du village on remarque, au n° 2, une maison récente dont la façade est ornée d'un beau fronton de porte, daté de 1523. C'est une relique de la fameuse maison dite : Storkenhaus « A la Cigogne », qui fut détruite par un incendie en 1899. Elle sera décrite plus loin, à propos de la Mittelburg à l'époque des Armagnacs.

LA FLEUR D'OR

Tout le côté est de la place est bordé par le Restaurant « A la Fleur d'Or », « Zur Blume » reconnaissable à sa magnifique enseigne. C'est la plus ancienne auberge de la localité. Elle a conservé son appellation, déjà reçue avant la Guerre de Trente Ans et a vu se succéder de 1632 à 1634 les garni- sons suédoises et, de 1634 à 1647, les françaises logées à son enseigne. Jusqu'à la fin du XVIIe siècle, elle avait appartenu à la commune en tant que « Weinsticherhaus », « Maison du Gourmet ». En 1690, la commune, alors écrasée de dettes à cause de lourdes contributions de guerre sous Louis XIV. dut se résoudre à la vendre pour 900 livres à Engelhart Scherb. Ce dernier, venu d', occu- pait déjà à ce moment la maison en qualité de gourmet assermenté de la commune. Il est à l'origine de toutes les familles de ce nom à Gueberschwihr. En même temps fut concédé à ce dernier, le droit d'entretenir des poissons frais dans la petite fontaine à côté. Derrière l'auberge, est encore conservé l'ancien four à chaux (Kalkofen) actuel- lement englobé dans le bâtiment. A cette maison se rattache un épisode de la guerre de 1870 dont il sera question plus loin. LES ORIGINES, LE NOM ET LES ARMES DE GUEBERSCHWIHR GUEBERSCHWIHR

D'azur à la façade de maison pignonnée de trois montants d'argent, ajourée de trois fenêtres, une et deux, ouverte d'une porte cintrée, le tout de sable bordé de gueules. Gueberschwihr portait dès le XVe siècle ces armoiries qui étaient parlantes : l'éty- mologie populaire reconnaissait dans le nom du village - il apparaît en 1201 sous la dénomination « Gebelischeswilre » - le mot Gebel, aujourd'hui Giebel, qui en allemand du Moyen Âge signifiait « pignon ». Gueberschwihr a fait partie jusqu'à la Révolution du Mundat (seigneurie de Rouf- fach) qui était une possession de l'évêché de Strasbourg. L'église paroissiale est dédiée à saint Pantaléon et à saint Imier. SOURCES : Représentation en noir et blanc, du milieu du XVe siècle, dans l'inventaire des revenus fonciers de Hans Schaedelin, Bibliothèque du Consistoire de Colmar déposée à la Bibliothèque municipale, ms 280, fol. 6 r° ; sculpture de 1538 à la « Rosschwamm » de Gueberschwihr ; Ann. gén., p.337, n° 29. Bornes banales de 1723, 1780.

Extrait de l'Armoriai des communes du Haut-Rhin", Tome m, Arrondissements de Colmar et Guebwiller (Colmar, 1978) Reproduit avec l'autorisation de la Commission d'héraldique du Haut-Rhin. PREHISTOIRE ET EPOQUE ROMAINE Il n'est pas douteux que toute la région ait été habitée dès les temps préhistoriques, comme le démontrent les nombreuses trouvailles faites dans les environs, notamment deux pointes de flèches en silex, sur la côte du Haulen, au-dessus de Gueberschwihr. De l'époque romaine - du milieu du 1er siècle avant J.-C. à la fin IVe siècle après J.-C. - n'a été signalée que la découverte d'une monnaie de l'empereur Licinius (321/22) au lieu-dit « Badacker », au-dessus du village, en 1975. Mais dès le début, l'occupation avait été plutôt dense dans la région, comme en témoignent les importants vestiges mis à jour au cours des dernières décennies. Lors des fouilles des châteaux d'Eguisheim 1 en 1964/65, fut dégagée une tour d'observation ou de vigie romaine, un « spécula », dans l'angle nord-ouest de l'enceinte du château de Dagsbourg. Entre et , on découvrit les fondations d'une opulente villa romaine, dans le canton dit « Saetle » 2 , en 1970. Notons encore le trésor de monnaies romaines de Wettolsheim - trouvé le 26 août 1921 - comprenant plus de 1140 pièces 3, et surtout les considérables découver- tes faites à Rouffach - au cours de l'automne 1977 et du printemps 1978 - qui témoi- gnent de l'ancien « Rubiacum » des Romains. Une magnifique pierre de métope, déga- gée dans l'ancien cimetière de Rouffach, près de l'église Notre-Dame et qui est orne- mentée de palmettes et de guirlandes de vignes, évoque la viticulture, introduite dans nos régions bien avant l'empereur Probus, au IIIe siècle. A l'époque alamane déjà, ce cimetière fut établi sur les ruines d'antiques habi- tations romaines fort bien aménagées et chauffées par des hypocaustes. Dans les décom- bres de l'une d'elles, on trouva un petit stylet de bronze de 12 cm environ, qui servait à écrire sur des tablettes de cire. Il porte, répartie sur ses quatre facettes, cette inscrip- tion fort galante : « Amori ars mea cum studio procedet » que l'on peut traduire ainsi : « Mon art s'applique avec zèle à l'amour ». Une monnaie de Constantin fut aussi trouvée en juin 1979. Il est fort probable qu'à l'époque gallo-romaine ce qui allait devenir le village de Gueberschwihr était formé de quelques fermes disséminées, comme il s'en trouvait encore, au Moyen Age, sur les collines avoisinantes, par exemple au canton dit . LES ALAMANS EN ALSACE Tout au long du IVe siècle, les légions romaines parvinrent péniblement à contenir les incursions des peuples germaniques installés le long du Rhin : les Francs au Nord, les Alamans au Sud. En 357 et en 368 eurent lieu de rudes batailles près d'Argentoratum, le futur Strasbourg. En 378, ce fut la région de Colmar-Horbourg qui fut envahie. Les Alamans purent être repoussés. 1 SALCH, Châteaux, p. 76. 2 BAQUOL, Dictionnaire, p. 453. 3 B.M.H.A., 1926, p. 93. Mais déjà à cette époque, de nombreuses familles franques ou alémaniques s'étaient établies sur la rive gauche du Rhin, avec l'autorisation du gouvernement romain. Beaucoup de leurs membres servaient dans les légions romaines et y occupaient même des rangs élevés dans la hiérarchie militaire. En 405, le général romain Stilicon - un Germain - fut rappelé avec ses légions des rives du Rhin, pour faire face, en Italie du Nord, à une invasion des Ostrogoths. Alors, le front du Rhin s'écroula ! Toutes les villes le long de ce fleuve furent occupées ; au nord, par les Francs, au sud, par les Alamans. « Argentoratum » va devenir « Strasbourg ». Notre région fut peuplée d'Alamans, comme le montrent les nombreux cimetières trouvés à peu près partout entre Wintzenheim et Wettolsheim, sur la côte de Pfaffenheim, où la RN 83 en traverse un et, tout récemment, à Rouffach. La population gallo-romaine fut réduite en servitude, ses villes et villas pillées et incendiées. A leur place, l'on créa des localités dont les dénominations se terminent souvent par « Heim » ou par « Ingen ». Quant aux localités se terminant par « Wihr, Willer, Weiler ou Weier », les his- toriens estiment qu'il s'agirait de réminiscences gallo-romaines. « Willer » proviendrait du bas-latin « Villaris » (de Villa, -ae) c'est-à-dire ferme, maison de campagne. Ces localités représenteraient donc d'anciens sites habités par des Gallos-Romains.

L'EPOQUE MEROVINGIENNE Le Ve siècle fut marqué vers 451 par le passage des Huns ; sous la conduite d'Attila, ils franchirent le Rhin et se rendirent fameux par leurs pillages. Devant le danger commun, Gallo-Romains et peuplades germaniques établies en Gaulle unirent leurs forces, sous le commandement du général romain Aetius et vain- quirent dans les « Camps Catalauniques » les hordes d'Attila qui durent repasser le Rhin. Entre-temps, le royaume des Alamans avait pris une grande extension. TI s'étendait du Nord des Alpes jusqu'au Main et du Würtemberg jusqu'aux Vosges. Plus au Nord et en Belgique s'étaient implantés les Francs. Dans leur désir d'agrandir leur territoire, Alamans et Francs se heurtèrent en des rencontres sanglantes, dont la plus fameuse fut la bataille de Tolbiac, en 496. Les Alamans, battus, durent accepter les conditions des Francs. Ces derniers respectèrent les us et coutumes des Alamans, mais leur imposèrent leurs cadres administratifs. Il y eut d'abord le partage du pays en « Gaue » c'est-à-dire en districts adminis- trés par des comtes « Gaugrafen », puis, vers 640, l'Alsace devint un duché. Son pre- mier duc, « Herzog », fut Gondoin, de 640 à 650. Son successeur, Boniface (650-660) fonda l'abbaye « Saint-Grégoire » à Munster, dans la vallée de la Fecht. Le troisième fut, vers 660, Eticho ou Attich, le père de sainte Odile. Il fonda le monastère de Sainte- Odile, sur le Hohenburg, le « Mont Sainte-Odile ». C'est lui qui établit la dynastie des Ettichons qui règnèrent pendant plus de cent ans sur l'Alsace ; d'ailleurs, à cette époque- là, apparaît pour la première fois la dénomation « Alsace », dans les documents de l'admi- nistration mérovingienne. CREATION DU MUNDAT SUPERIEUR OU « HAUT MUNDAT » DE ROUFFACH Le territoire épiscopal groupé autour de Rouffach, comme centre administratif, s'appelle « Haut Mundat », en opposition avec les terres épiscopales de la Basse Alsace. La tradition attribue sa création à une donation du roi Dagobert II. Dans une Charte du 2 avril 662, le roi aurait fait don à l'évêché de Strasbourg d'une métairie (« villa ») et d'autres biens sis à Rubiacum. Les historiens reconnaissent dans cette charte un faux. Ils admettent cependant qu'elle exprime un fait inconstestable : c'est que, dès le VIle siècle, l'évêché de Stras- bourg possédait effectivement des droits sur Rouffach et ses environs 1. Le territoire épiscopal autour de Rouffach s'étendit bientôt sur une surface de plus de 220 km carrés, allant, aux Xe et XIe siècles, de Soultz à Gueberschwihr. A partir de 1223, il s'agrandit par l'acquisition d'Eguisheim et de ses dépen- dances. A cette époque, les comtes de étaient entrés en conflit avec l'évêque de Strasbourg Berthold, au sujet de la succession de la maison d'Eguisheim qui s'était éteinte. Les seigneurs de Ferrette, en effet, pensaient avoir des droits sur Eguisheim, en raison de leurs liens de parenté avec la famille éteinte. La question fut tranchée par les armes, au combat de , en 1223. Le seigneur de Ferrette dut résigner ses droits en faveur de l'évêque. En compensation, ce dernier lui légua le château de Thann. Les séquelles de ce conflit furent finalement réglées par l'accord de 1251. Le Haut Mundat s'était donc agrandi de la ville d'Eguisheim et de ses dépendances : les châteaux d'Eguisheim, les localités de Voegtlinshoffen, Husseren, Wettolsheim, . Les anciens territoires, avec Rouffach comme centre administratif, comprenaient Gueberschwihr, Pfaffenheim, , Wintzfelden, Souhzmatt, Westhalten, Gun- dolsheim, , Bergholtz-Zell, Thierenbach et Soultz. En outre, les villa- ges maintenant disparus : Woffenheim et Blienswiller. De plus : les fiefs des seigneurs de Hattstatt-Herrlisheim, le château et les biens allodiaux des chevaliers de Nortgassen à Gueberschwihr. Toutes ces localités dépendront de l'administration temporelle de l'évê- ché ou du chapitre de la cathédrale de Strasbourg. Pour la juridiction spirituelle, cepen- dant, elles dépendront de l'évêché de Bâle, dont les limites septentrionales s'étendront, à partir de 740, jusqu'à Eckenbach près de Saint-Hippolyte 2. SIGISMUND-ZELL - SAINT-MARC A Dagobert II est également attribuée la fondation de l'abbaye bénédictine de Sigismund- Zell, le futur Saint-Marc. Le monastère fut fondé en 676 sous le vocable de saint Sigismond, le roi bour- guignon martyr du VIe siècle. (524).

1 GATRIO, Abtei Murbach, p. 45. 2 STRICKER : Elsass u. Burgund, p. 86. Armoiries de Gueberschwihr, sculptées dans la pierre à la "Rosschwemme", avec la double date de 1538, en chiffres romains et chiffres arabes. Dagobert avait fait don d'une relique insigne à la nouvelle abbaye : la partie supérieure du crâne de Saint Sigismond. Cette relique a pu être sauvée à travers toutes les vicissitudes des siècles passés. Pendant la Révolution française, elle fut conservée à Gueberschwihr. En 1813, elle fut transférée à l'église paroissiale Saint-Sigismond de Matzenheim. Le 9 décembre 1051, un voyageur illustre, saint Léon IX, venant du Haut- Eguisheim, où il avait consacré la chapelle de Saint-Pancrace, vint à Sigismund-Zell, passant par Gueberschwihr, pour consacrer la nouvelle église de ce monastère dévasté par un incendie. Le pape consacra cette nouvelle église sous le vocable de saint Marc. Le lieu a gardé ce nom jusqu'à nos jours. LE NOM DE GUEBERSCHWIHR Par une charte datée de 735 1 le comte Eberhard d'Eguisheim fait don à la jeune abbaye de Murbach d'une grande partie de ses biens situés dans différentes localités alsacien- nes, entre autres à « Waranangus, qui dicitur Villare Eberhardo », c'est-à-dire à Wara- nangus, qu'on appelle la métairie d'Eberhard.

1 BRUCKNER (A.) - Regesta... (496-918) I, p. 68, n° 127, Remiremont, 737-737, cité par BARTH, Handbuch, col. 406 (Geberschweier) et 888 (Murbach). GATRIO, Abtei Murbach, I, p. 52. TROUILLAT, Monuments, I, p. 71. Baquol1 fait dériver « Waranangus » du celtique « Fearan » : champ, et « Ang »: grand. Schoepflin 2 et à sa suite d'autres historiens, estiment que de « Waranangus, Villare Eberhardo », on peut déduire le nom de Gueberschwihr. Cependant, dans le même texte, Schoepflin mentionne un lieu-dit « Warunga Curtis », que Fulrade, l'abbé de Saint-Denis, un noble d'origine alsacienne, légua par testament à un monastère du Val de Liepvre, vers la fin du VIlle siècle. L'historien Th. Walter, dans un article sur Gueberschwihr paru en 1926 3, fait remarquer, d'une part que l'abbaye de Murbach n'a jamais été possessionnée à Gue- berschwihr et d'autre part que l'on voit mal, selon les lois de la phonétique, comment « Villare Eberhardo » pourrait se transformer en « Gueberschwihr ». Il estime que Wara- nangus pourrait bien être identique à Warunga Curtis et se situer donc dans le Val de Liepvre. Dans une étude récente et très documentée, M. Ch. Wilsdorf 4 reprenant en détail la charte de donation d'Eberhardt, et constatant que l'énumération des biens don- nés suit un ordre géographique, localise approximativement Waranangus entre Gun- dolsheim et .

Première représentation connue des armoiries de Gueberschwihr, vers 1430, dans l'inventaire des reve- nues fonciers de Hans Schedelin. (Manuscrit 280 de la Bibliothèque du Consistoire protestant de Colmar) Dans ce dessin, on remarque que les trois fenêtres rectangulaires sont remplacées par une seule ouverture, ronde. (Bibliothèque de la Ville de Colmar)

1 BAQUOL, Dictionnaire, p. 453. 2 SCHOEPFLIN, Alsace illustrée, III, p. 509. 3 WALTER (Theobald) - Aus Geberschweiers alten Tagen. Dans : Elsassland, 1926, p. 373-377. 4 WILSDORF (Christian) - Monasterium scottorum de Honau. Sans qu'une certitude définitive soit acquise sur la localisation de Waranangus, il semble en tout cas qu'il faille abandonner son identification avec Gueberschwihr. Une autre hypothèse peut être examinée. Dans un passage de sa chronique, Materne Berler1 , rappelant que Guebersch- wihr était autrefois le siège de plusieurs familles nobles, évoque le nom ancien du vil- lage : « Nobilis vicus Gebhardwillaris, Gebliszweyler adapellatus... », c'est-à-dire « ce noble village Gebhardwillaris, à présent appelé Gebliszweyler ». Il ne fait d'autre part aucune mention du toponyme « Waranangus ». « Gebhardwillaris devait se transformer, au fil des siècles, en Gebliswihr (en 1251), Geblinswihre (1314), Gebelswihr (1446), Geberswihr aux XVIe et XVIIe siè- cles, Geberschweier et Gueberschwihr actuellement. LES ARMOIRIES DE GUEBERSCHWIHR De nombreux documents de nos archives prouvent que, jusque vers la fin du XVIe siè- cle, on employait le L pour le R dans le langage courant, comme c'est encore le cas dans le dialecte sundgauvien : Kilch, au lieu de Kirch. Gebelswilr, au lieu de Geberswilr. Il n'est donc pas étonnant que le mot Gebel = Giebel, qui signifie « pignon de maison », ait pu inspirer la figuration des armoiries de la commune, comme celles sculp- tées sur le cintre du pont qui enjambe le fond du lavoir des chevaux, près de la fontaine de saint Pantaléon et qui est daté de 1538. A cette époque, s'élevait, au bas de la place du village, une haute maison dite « Storckenhaus », dont le pignon était à redans. Cette maison à gradins constituait sans doute le corps d'habitation principale du manoir fortifié dit le « Mittelburg ». Elle existait déjà au XVe siècle et, dès cette époque, était devenue l'enseigne, le blason de la localité : fait démontré par un dessin de 1434, dans un manuscrit de Hans Schedelin, de Colmar. Ce Hans Schedelin était peut-être un parent de la famille des Schedelin de Gueberschwihr, qui a donné deux prévôts à la localité : Hans Schede- lin, cité en 1438-1441-1447 et Peter Schedelin, cité de 1481 à 1496. Hans Schedelin, de Colmar, possédait un manuscrit 2 allemand fort bien écrit, contenant la « Légende de saint Vincent Ferrier », 1355-1419, canonisé par le pape Calixte III, en 1455. Mais sur les premières pages libres qui précèdent le récit et sur celles qui le suivent, Hans Schedelin a consigné, entre 1416 et 1457, les revenus prove- nant de ses biens à Colmar, à Rouffach et environs. Il désignait les localités par leur blason. Ainsi, Gebelswilre, qui lui payait annuel- lement 5 florins, y est représenté pour l'année 1434, par la fameuse maison à pignon gradué, servant par conséquent à cette époque déjà d'emblème pour le village. Les armoiries des communes, supprimées lors de la Révolution de 1789, furent reprises sous la Restauration, en 1822.

1 BERLER, Fragments, p. 141, 3846. 2 « Die leigende sant Vincentius, brediger ordes », manuscrit n° 280 de la Bibliothèque du Consistoire de l'Eglise de la Confession d'Augsbourg à Colmar, conservé à la Bibliothèque municipale de Colmar. Cf. BOLCHERT P., Catalogue de la Bibliothèque du Consistoire.... première partie, Manuscrits, notice n° 32. GUEBERSCHWIHR AU MOYEN AGE ET AU XVI SIECLE

NOBLES ET CHATEAUX

Le chroniqueur Materne Berler (1487-1573), ancien curé de Gueberschwihr, écrit dans sa chronique 1 : « Gueberschwihr était jadis la résidence de plusieurs familles nobles. Elles étaient attirées par la grande fertilité du terroir, l'abondance de ses eaux vives et fraîches, la variété des cultures et la douceur du climat. Ces familles présidaient à la vie tant publique que privée des manants. Ces der- niers ne détenaient aucun pouvoir, ils étaient les serfs des nobles, obligés de cultiver les terres et les vignes de ceux-ci. La situation resta telle jusqu'au moment où ces familles nobles s'éteignirent. Les habitants purent ainsi peu à peu acquérir leurs terres. Parmi ces nobles, il faut mentionner les chevaliers de Norgassen, dont ne sur- vécurent que trois frères : Wernher, Conrad et Syfermann de Norgassen, hommes qui moururent sans postérité ; Syfermann fut le dernier. Leur héritage revint aux nobles chevaliers de Hattstatt, les deux frères Wernher et Conrad, dont les biens passèrent à leurs enfants, en 1346 ». La situation que Berler résume en ces quelques lignes correspond à ce que l'his- toire générale nous apprend sur la vie sociale de l'époque.

LA HIERARCHIE SOCIALE Après l'occupation du pays par les Alamans, les terres furent réparties entre les mem- bres des clans familiaux des hommes libres. Forêts et pâturages plus étendus restaient à la disposition de tous : c'étaient les biens communaux (Allmenden). En faisaient également partie les chemins, les rivières, les carrières, les sabliè- res, etc. Chaque homme libre recevait une parcelle tirée au sort, de la valeur d'un arpent ou « Morgen », c'est-à-dire d'une surface de terre labourable avec un attelage en une matinée. A la tête des guerriers et des paysans libres se trouvaient les « nobles », c'est-à- dire les compagnons d'armes et plus tard aussi les ministériaux des grands seigneurs. Suivant l'importance de leur rang, ils furent dotés de parts plus étendues. Ils formèrent ainsi la caste des seigneurs fonciers. Venait ensuite le menu peuple, les manants, ceux dont Berler dit qu'ils n'avaient aucun droit. C'étaient les hommes non libres (Unfreie) qui se divisaient en deux catégories : les serfs - « Hôrige » - et les esclaves - « Leibeigene ». Les serfs étaient attachés à la terre de leur seigneur. En cas de vente de celle-ci, ils passaient en même temps sous la tutelle de l'acquéreur. Ils ne pouvaient pas se marier hors du territoire de leur maître, sans son autorisation. Ils pouvaient cependant rece- voir en bail héréditaire des champs pour lesquels ils payaient une redevance.

1 BERLER, Fragments, p. 141, n° 3846. Cet ouvrage est une production des Editions ALSATIA, Colmar Il a été achevé d'imprimer en Juillet 1989 par l'Imprimerie Art'Réal à Guebwiller Imprimé en France - Dépôt Légal 3e trimestre 1989 Edition n° 2129 - Imprimeur n° 740

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