Une Exploration Du Processus De Formation De L'état Et De La Politique
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Le Culte de l’égalité : Une Exploration du processus de formation de l’État et de la politique populaire en Haïti au cours de la première moitié du dix-neuvième siècle (1804-1846) Jean Alix René Thèse présentée au Département d’histoire comme exigence partielle au grade de philosophae doctor (Ph.D.) Université Concordia Montréal, Québec, Canada avril, 2014 © Jean Alix René, 2014 CONCORDIA UNIVERSITY SCHOOL OF GRADUATE STUDIES This is to certify that the thesis prepared By: Jean-Alix René Entitled: Le Culte de l'égalité : une exploration du processus de formation de l'État et de la politique populaire en Haiti au cours de la première moitié du dix- neuvième siècle (1804-1846) and submitted in partial fulfillment of the requirements for the degree of Doctor of Philosophy (History) complies with the regulations of the University and meets the accepted standards with respect to originality and quality. Signed by the final examining committee: Chair Dr. E. O'Toole External Examiner Dr. J. Casimir External to Program Dr. A. Gimenez Mico Examiner Dr. N. Jaffary Examiner Dr. W. Jacob Thesis Supervisor Dr. C. Fick Approved by: Dr. T. McCormack , Graduate Program Director April 10, 2014 Interim Dean J. Locke, Faculty of Arts and Science Résumé Le Culte de l’égalité : une exploration du processus de formation de l’État et de la politique populaire en Haïti au cours de la première moitié du dix-neuvième siècle (1804- 1846) Jean Alix René, Ph.D. Université Concordia, 2014 Cette thèse entreprend l’exploration du processus de formation de l’État en Haïti au cours de la première moitié du dix-neuvième siècle à travers l’examen des rapports entre le pouvoir d’État et les citoyens et démontre que la citoyenneté était définie dans deux domaines distincts mais complémentaires. Le premier, où étaient admis seulement les officiers de l’armée et les propriétaires, était basé sur la consécration des droits individuels dans les lois. Le second, auquel tous participaient, était fondé sur le principe d’une obligation éthique de protection des Noirs comme race en danger. Le pouvoir d’État, prenant forme et consistance à travers la relation complexe et dynamique entre le cadre institutionnel ainsi élaboré et les pratiques quotidiennes d’assujettissement des individus, récupérait, modifiait et réintégrait les pratiques de résistance populaire pour se déployer et se renforcer. La première partie examine tout d’abord l’élaboration et la diffusion par les dirigeants d’un projet d’identité commune basée sur un imaginaire de souffrance généré par l’expérience de brutalité et d’humiliation vécue sous la domination esclavagiste et iii raciale. Elle étudie ensuite les difficultés rencontrées dans la formation de l’État au cours du gouvernement du fondateur Jean Jacques Dessalines. La seconde partie explore une tentative de construction d’un compromis social par l’initiative d’une réforme agraire, par la construction d’une nouvelle subjectivité et finalement par l’admission de ceux nés en Afrique dans le domaine de la citoyenneté contractuelle. Cette partie analyse aussi les raisons de l’échec de ce projet national en montrant comment, avec l’arrivée au pouvoir des secteurs ultra-conservateurs au début des années 1820, une redéfinition de la citoyenneté était opérée dans une nouvelle tentative de restauration des plantations. La dernière partie étudie la politique populaire et révèle que le combat pour l’égalité, exprimé à travers la quête de la petite propriété, le petit commerce et la défense de la dignité, se retrouvait au centre des luttes quotidiennes du populaire. Enfin, cette partie explore la révolte des paysans en 1844 qui, en réclamant, à côté des réformes politiques, l’instruction de leurs enfants, s’étaient attaqués à l’argument de la supériorité culturelle des élites comme justification de la domination de classe. iv Remerciements Je veux commencer par offrir ma profonde gratitude à mes professeurs à l’Université Concordia, tout d’abord, ma directrice de thèse, Dr. Carolyn Fick pour sa disponibilité, sa patience, ses conseils et ses encouragements. Sa lecture soigneuse de mes brouillons, ses critiques et ses suggestions m’ont permis d’améliorer et de finaliser cette étude. Je remercie aussi les deux autres membres de mon comité, les docteurs Nora Jaffary et Wilson Jacob qui m’ont patiemment guidé à travers leur champ respectif et ont généreusement partagé leurs connaissances avec moi. Je n’oublierai jamais la chaleureuse sympathie de l’ensemble du département d’histoire en janvier 2010 alors que j’étais à Port-au-Prince pour mes recherches pendant l’expérience douloureuse du tremblement de terre. J’ai été chanceux de trouver aux Archives Nationales d’Haïti le support du personnel. Sans son professionnalisme, je n’aurais jamais pu entreprendre des recherches dans les conditions difficiles de l’institution. Je remercie aussi les archivistes de la Smathers Library à l’Université de Floride et ceux du Schomburg Center for Black Culture de la New York Public Library. J’exprime aussi ma gratitude au personnel de la Interlibrary Loan Services de Concordia University. Mes remerciements s’étendent à Patrick Tardieu, de la Bibliothèque du collège Petit Séminaire Saint-Martial (Pères du Saint-Esprit) à Port-au-Prince, qui m’a fait trouver dans un court délai les copies digitalisées des collections de journaux officiels, le Télégraphe et le Moniteur haïtien. Ma gratitude va aussi à Diquy Lapointe pour son aide à la Bibliothèque Nationale de France. Cette thèse n’aurait probablement pas vu le jour sans le support financier du Centre de Recherche en Sciences Humaines (CRSH) du Canada, et au Fonds Québécois de la Recherche sur la Société et la Culture (FQRSC). Leurs bourses m’ont aidé à défrayer les frais de mes différents voyages entre Montréal, New York, Floride et Haïti à la recherche de documentation. Ma gratitude va aussi au Groupe d’Histoire de l’Atlantique Français qui m’a octroyé une bourse au cours de la rédaction de la thèse. Je veux aussi exprimer ma gratitude à mes amis de Montréal, anciens et nouveaux, dont l’amitié et la chaleur m’ont aidé à survivre les sombres hivers de cette partie du monde. Je pense particulièrement aux Clervil, à Jean Pierre Béjin, Antoine Guillemette, Kate Fitzpatrick et Michel Brunet. Quand j’étais en Haïti, ce furent surtout Yvrose Moïse, Alex Duquella, Kesler Bien-Aimé et Eric Hypolite qui ont été là. Leur support et encouragement ont été simplement inestimables. Ma famille, qui cultive la solidarité dans la bonne tradition haïtienne, a été une fois de plus là pour moi sur tout le parcours, que ce soient ceux qui résident en Haïti ou ceux dispersés dans les villes nord- américaines. Je remercie spécialement Gerda René, mon frère Gérald et ma sœur Magna. Je ne pourrai jamais remercier assez mon cousin Yves Sanon qui a lu et relu avec grand soin chacune de mes versions et discuté avec moi pendant des heures interminables, me v faisant généreusement part de ses opinions et désaccords et m’aidant à mieux saisir l’intérêt du côté merveilleux de la perception de la réalité en Haïti. Finalement et tout particulièrement, mes remerciements vont à mon fils Biko pour m’avoir constamment rappelé la pertinence de la rébellion comme dispositif d’épanouissement. C’est à lui que je dédie cette étude. vi Table des matières Liste des abréviations viii Introduction : Le Culte de l’égalité 1 Première partie : Imaginer Haïti 1- La Promesse d’une confraternité de souffrance 42 2- Déchiffrer, ordonner et surveiller : la formation de l’État en Haïti au lendemain de l’indépendance 84 Deuxième partie : L’Intenable compromis 3- Le Compromis vivres-denrées : la réforme agraire de Alexandre Pétion et la paysannerie haïtienne 139 4- « Former et civiliser » pour une citoyenneté contractuelle 180 5- L’Abandon du projet de compromis 220 Troisième partie : La Politique populaire 6- Dignité, honneur et respect : quelques dimensions de la politique populaire en Haïti 266 7- Le « Peuple souffrant » et le projet révolutionnaire de 1843 306 Épilogue : La Déroute de « l’Armée souffrante » 373 Bibliographie 399 Annexes 413 vii Liste des abréviations ANH Archives Nationales d’Haïti BNF Bibliothèque Nationale de France CEM Collection Edmond Mangonès CLGC Copies de Lettres du général Henry Christophe HC Hatiana Collection HRP Haitian Registries Papers JP/PG Jérémie Papers/Papers of the Greffe KFC Kurt Fisher Collection LC Library of Congress NYPL New York Public Library RLGB Registre des lettres du général Jérôme Borgella SC Schomburg Center for Research in Black Culture SDCD State Department Consular Despaches UFL University of Florida Libraries viii Introduction : Le Culte de l’égalité Les idées de liberté et d’égalité avaient occupé, après l’indépendance d’Haïti, une place prééminente dans la formation de l’identité des Haïtiens et dans la définition de leurs relations avec le pouvoir d’État. La centralité de ces notions dans la vie politique et sociale d’Haïti au cours de la première moitié du dix-neuvième siècle, n’avait échappé ni aux observateurs locaux, ni aux voyageurs étrangers de passage dans le pays, comme l’indiquent la plupart des témoignages sur cette période. Par exemple, Hérard Dumesle, l’un des membres les plus influents de la Chambre des représentants au cours du second quart du dix-neuvième siècle, voulant mettre en garde, ses collègues du parlement ainsi que le pouvoir exécutif, contre les projets de restriction des droits de vote, n’avait pas hésité à déclarer, lors d’un débat sur une loi électorale proposée par le gouvernement en 1832, que la liberté et l’égalité recevaient en Haïti un « culte populaire1. » Du côté des voyageurs étrangers, c’était l’abolitionniste français Victor Schœlcher qui, constatant cette passion de toutes les couches de la population pour la liberté et l’égalité, écrivait après une visite à la fin des années 1830 que « même ceux de la plus basse classe se mettent naturellement de niveau avec tout le monde2.