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N°43 JANVIER 2015 - REVUE POLITIQUE MENSUELLE DU PCF - 6 EUROS

P. 5 LE GRAND ENTRETIEN P. 52 LIRE P. 58 DANS LE TEXTE NOTRE GÉNÉRATION ENTRETIEN AVEC LA COMMUNE DE PARIS : EST RÉVOLUTIONNAIRE MAXIMILIEN LE ROY LE TRÈS POSSIBLE Nordine Idir COMMUNISME Jean Quétier, Florian Gulli

DOSSIER LIBERTÉ ! Les tragiques événements du début du mois de janvier placent la question de la liberté sous une lumière nouvelle. Ce dossier, rédigé avant l'attentat contre Charlie Hebdo , entend (r)ouvrir, dans une perspective communiste, un chantier à la fois vaste et central. Nous espérons que ce numéro pourra notamment contribuer à éclairer une lutte plus que jamais d'actualité : le combat pour la liberté d'expression.

Parti communiste français RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:34Page2 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 2 Sommaire -eric Zemmour, l’incarnation de la pensée raciste et xénophobe communistejaponais -législatives au Japon : le PcF salue les progrès du Parti urgence» -Marée noire au bangladesh rompre: « le silence et agir avec desecteur brêVes NordineIdir legrand entretien 36 FrancisVelain 34 MarieLeca-Tsiomis PierreCrépel et Nicolas Dutent libertÉ! 6 ÉlodieLaseille 5 VictorBlanc 4 PierreLaurent 3 SylvieMayer et Yann Le Pollotec MoraneChavanon européennes Marie-ChristineVergiat ArletteCavillon et Danielle Lebail BrigitteGonthier-Maurin ClaraGrande GabrielMontrieux BernardThibault Jean-PierrePotier et Rima Hawi NadègeCresson et Brieuc Guinard FrancetteLazard Henri- Malberg ChantalJaquet MichelVadée EmmanuelBarot marxisme StéphanieRoza Florian Gulli, Jean Quétier, Séverine Charret, Vincent Bordas, Anthony Maranghi, Franck Delorieux, Francis Combes, Camille Combes, • Francis Delorieux, Bessac Stève Franck Ducrot, Maranghi, Anthony Bordas, Vincent Charret, Séverine Quétier, Jean Gulli, Florian tionPaul-Langevin (6, avenue Mathurin-Moreau 75 167 Paris Cedex 19) Crépel, Pierre Orand, Michaël Purguette, Léo Luxembourg, Corinne Vermeersch, Alain Chosson, Étienne Roussillon, Marine : chef en Rédacteur Bardot, Hélène Bidard, Davy Castel, Igor Martinache, Nicolas Dutent, Clément Garcia, Maxime Cochard, Alexandre Fleuret, Alexandre Cochard, Maxime Garcia, Clément Dutent, Nicolas Martinache, Igor Castel, Davy Bidard, Hélène Bardot, 69 637 •Vénissieux Cedex) u Édito regard PoÉsies u 33 lectrices & lecteurs & lectrices 39 notregénération est révolutionnaire VladimirMaïakovski : la voix de la révolution le dossier le libertéet répression lerègne de la liberté leprojet communiste au défi des traVailsecteurs de garryWinogrand lechantier des libertés le laliberté des anciens, la liberté des Modernes et le Marxismeet liberté : sartre et nous aujourd’hui laliberté et l’entreprise exPression Communiste exPression libertéet migrations Quelusage politique de la liberté de consommer ? self-made-man laliberté et l’ libertéde circulation et frontières laliberté est-elle « sexiste » ? Guillaume Roubaud-Quashie • • Roubaud-Quashie Guillaume Direction artistique et illustrations : La Revue duProjet lespectre de la liberté libertéet économie éô éa : légal Dépôt deslibertés nouvelles ? laliberté dans l’histoire du PcF Encyclopédie liberté :pays pauvres/pays riches liberté,engagement et foi àl’épreuve de la complexion Janvier 2015 - N°43. - 2015 Janvier fab-labs é.:01401234-Directeur depublication: : - Tél. Secrétariat de rédaction : rédaction de Secrétariat Frédo Coyère • ISSN 2265-4585-Numéro decommission paritaire : 1019G91533. républicaine communisme» 48 usagesféminins des espaces publics CorinneLuxembourg et Dalila Messaoudi 46 FabienArchambault 44 AndréTosel 42 GérardStreiff 40 63 61 FlorianGulli 58 • •lire : 54 AnthonyMaranghi 52 deplus en plus qualifiés MichaëlOrand 51 manipulation GérardStreiff 50 MarionCousin • rebiffe • résiliencedes femmes • etCraig Calhoun • YvesVargas Recherchesinternationales, RogerMartelli Nicole-ClaudeMathieu ImmanuelWallerstein, Randall Collins, Michael Mann, Georgi Derluguian mrmre: Imprimerie Production de territoiresde Production notes statistiQues sondages MOUVEMENTRÉEL d’idÉes coMbat bulletin d’abonneMent bulletin critiQues sciences histoire dans le texte dansle MÉdia des reVue Mise en page : CamilleDucrot libertéet nécessité selon gramsci et Jean-JacquesRousseau, l’avortement du capitalisme Noëlle Mansoux • • Mansoux Noëlle extrêmedroite. la ronde des boucs émissaires lesFrançais et l’entreprise. information et lesmathématiques japonaises lesnouveaux immigrés : de plus en plus d’européens, JeanQuétier L’Occasionmanquée. Été 1984 quand le PCF se Lecapitalisme a-t-il un avenir ? Média, Féminisme,nation... contacter : dossiers n’hésitez pasànous Vous avez desidéessurces PROJET DU REVUE LA NUMÉROS DE THÈMES DES PROCHAINS [email protected] (dés)informationet (dis)crédit PublicImprim (12, ruePierre-Timbaud BP553 Calcio entretienavec Maximilien le roy, auteur de bd. L’anatomiepolitique 2. Usage, déréliction et Sébastien Thomassey • (football)et politique dans l’italie lacommune de Paris : « le très possible Patrice Bessac n°99 Écrivez à oiéd éato : rédaction de Comité laville côté femmes : les Édité par : l’associa- Caroline RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page3

Édito

Le chantier des libertés elon les époques, les pays, les enjeux de leur com- que le Parti communiste et ses partenaires du Front de gauche bat, les hommes et les femmes qui se sont enga- proposent d’écrire une nouvelle constitution, la Vie république gés et qui s’engagent aujourd’hui dans des com- citoyenne, qui garantit les libertés démocratiques dans la bats libérateurs se sont fait et se font des idées société et dans l’entreprise. nous pouvons créer une société différentes de ce qu’ils nommaient dans le passé où les « rejetés » et les « maintenus » se retrouveraient comme et de ce qu’ils nomment à notre époque « liberté ». « individus de l’histoire du monde », conscients qu’ils font Set nous inscrivons les luttes, petites et grandes, dont nous partie d’une « même communauté », auraient une « citoyen- sommes partie prenante dans une perspective d’émancipa- neté sociale » permettant à chacune et à chacun de sortir de tion humaine. cette perspective était en son temps celle de la délégation passive, de ne plus se dévaloriser, de prendre la Marx tout au long de ses combats. ceux qui vivent des rap- parole, de promouvoir de nouveaux droits et une nouvelle ports d’exploitation et de domination sur d’autres humains logique sociale dans une nouvelle vie publique. soyons lucides. ont aussi leurs idées sur la liberté. elles se déclinent en « liberté ce serait un énorme progrès, si plus personne dans le monde d’entreprise », « libre circulation des capitaux », « liberté des ne souffrait de malnutrition, d’absence d’accès aux soins marchés financiers » quand ce n’est pas, par antiphrase, médicaux ou à la scolarisation. Pour des milliards d’êtres « liberté du travail ». au temps de la guerre froide, ceux-là humains, ce serait une immense libération. Mais nous serions mêmes qui menaient des guerres contre des peuples en lutte encore très loin du compte quant aux libertés nécessaires pour leur libération se posaient en défenseurs du « monde aujourd’hui. nous serions très loin du compte en effet si une libre ». minorité de l’humanité continuait seule à avoir voix au cha- pitre quand il s’agit de prendre des décisions concernant les Je ne crois pas sortir du sujet en écrivant que la guerre est autres humains, voire toute l’humanité. nous serions encore aujourd’hui la première atteinte à la liberté des peuples et des loin du compte même si cette minorité était élargie par des individus. c’est une tragique vérité que dénonçait récem- conquêtes démocratiques dans certains pays, mais demeu- ment le pape : « pour survivre » le système « doit faire la guerre rait une minorité. comme l’ont toujours fait les grands empires » mais, « étant donné qu’on ne peut pas faire la troisième guerre mondiale, nous vivons en effet une révolution dans les moyens d’ac- alors on fait des guerres locales. » où est la liberté quand on tion des hommes sur la nature et sur eux-mêmes, une révo- est sous les bombes, quand on est exposé à la barbarie ? et lution dans les conditions de progression de la productivité, on s’habitue un peu trop vite aux atteintes à la liberté comme de l’efficacité du travail humain. cette révolution, que l’on celle du Patriot Act des États-unis, qui est une intrusion into- appelle souvent révolution informationnelle pour dire l’enjeu lérable dans la vie la plus personnelle de chacun et sur toute que représente maintenant dans les activités humaines la la planète. elle porte gravement atteinte à l’indépendance, la maîtrise des données sur la réalité, autrement dit des infor- souveraineté des nations. mations, permet de considérables réductions du temps de travail pour un même effet utile. Va-t-on continuer à utiliser dans notre pays, le chantier des libertés non seulement à cette diminution pour faire pression sur les salariés par le chô- défendre ou à reconquérir mais à conquérir est vaste et divers. mage, la précarité ? la pression est énorme. les remises en nous ne voulons pas d’une société où l’on décide à la place cause sont légion. Je ne prendrai qu’un exemple : le projet de des gens ce qui est bon pour eux. nous ne voulons pas d’une loi Macron qui contribue à l’explosion des conventions col- société où ceux qui ne manquent de rien disent à ceux qui lectives. ou bien va-t-on se saisir de cette révolution pour manquent, si ce n’est de tout du moins de beaucoup de choses, que chacun et chacune puissent se construire une vie plus quels sont leurs « vrais » besoins et quels sont leurs « faux » riche, épanouissante y compris dans le travail ? besoins. il est des besoins qui n’ont d’existence qu’à cause de la diversité de la vie actuelle. Mais le besoin d’être dégagé réinterroger l’idée de liberté c’est donc aussi s’interroger sur de l’incertitude du lendemain dans sa vie professionnelle, la possibilité d’avoir du pouvoir sur sa propre vie et celle de la d’être respecté, d’être entendu dans la vie de la cité comme collectivité. le communisme de nouvelle génération que nous de celle de son entreprise, autant de besoins – et je pourrais cherchons à construire et qui fut un des fils conducteurs de sans peine allonger la liste – dont la satisfaction ne peut être notre dernière conférence nationale est la mise en partage, que libératrice. dans une perspective d’émancipation humaine, la mise en commun des avoirs et des savoirs, des pouvoirs. n il incombe à la société de décider démocratiquement quels sont les besoins qu’elle entend prioritairement satisfaire, quels sont ceux dont elle se propose d’encourager le développe- ment pour permettre aux individus de se construire une vie plus pleine, plus riche, en un mot, plus libre.

et pour cela il y a besoin de démocratie, et de plus en plus de gens le disent, notre démocratie est en panne. la Ve république avec son quinquennat, son président monarque, son sys- PIERRE LAURENT, La revue tème représentatif sont à changer. c’est d’ailleurs pour cela Secrétaire national du projet du Parti communiste français janvier 2015 3 RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:34Page4 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 4 POÉSIES relâche le meilleur de nos forces. nos de meilleur le relâche ce ce mot de cans, le défunt avait ça en horreur. » la vie courante. encore courante ». il prévient toute autre explication : « pas de can- vie la contre brisée s’est l’amour de barque « la s’explique : il lettre, une dans suicide. se Maïakovski Vladimir 1930, en yeux ? le socialisme ? non, juste l’encrier et le presse-papier. » tie de la vie quotidienne. « Que peut-on voir avec de tels de avec voir peut-on « Que quotidienne. vie la de tie le bout de la lorgnette. il pourfend l’ennemi intérieur : l’ennemi intérieur : pourfend il lorgnette. la de bout le par révolution la voient qui ceux bureaucrates, les pour et l vatel que sociales ou politiques, un mépris pour les demi-victoires,poétiques tant compromissions, des refus un Maïakovski : son élan l’amène à pousser toujours plus loin. c’est cela aussi, reprendre. à idée c’estune affiches sur l’actualité, en vers, toujours drôles et perçantes… des constructiviste jours les tous signe Maïakovski peintre rodtchenko, alexandre le avec rosta, l’agence À réelle. vie la dans l’ancre Maïakovski d’apollinaire), calligrammes les par France en (porté poème-affiche le modernité, la de intuitions des l’une reprenant mots… les et rimes les verse boule- slogans, des merveilleux, du journalisme, du dote, l’anec- de lyrique, poésie la de épique, souffle du s’empare autre poésie fut à ce point à la mesure de l’histoire ?que les ouvriersMaïakovski eux-mêmes ce dont ils avaient besoin. Quelle sant, exigeant, méprisant ceux qui prétendaientpuis- savoirart mieuxun d’avant-garde, art un prolétariat au donner de n’aura cesse de Maïakovski et ventre. ». mon sous-estimé a les yeux plus gros que le ventre.’’ Je crois tout de même qu’il ’’t’as ri : longuement a serioja socialiste.’’ art un faire veux ’’Je Medvédiev : Parti, du camarade un moi pour alors était sera celle de toute sa vie : « Je suis allé voir un camarade, qui qui posée est l’ambition début, le son dès amour... son orgueil, talent, son silhouette, sa démesure, se lui chez tout amoureux, permettent desituerladémarche dupoète. l’anthologie d’elsa triolet, ses traductions, ses souvenirs très rette au bec, un regard de voyou, ciga- Maïakovskila jaune, blouse en géant modernité. la dans russe sie marque les esprits. génération de poètes qui a fait entrer à grands fracas la poé- jeune cette de lance de fer le Khlebnikov, et essenine avec vement futuriste russe au début des années 1910 et devient, cause pour la révolution d’octobre. Maïakovski fonde le mou- et fait1930, prend Maïakovskien mort sa jusqu’à chéviques Vladimir Maïakovski est né en russie en 1893. Proche des bol- intime. ami son à consacrée avait , , le médiocre petit-bourgeois, plongé dans le épuisée depuis de nombreuses années qu’elsa triolet françaises e temps des cerises republie, dans la collection lettres byt la voix delaRévolution . . À nous de reprendre son combat. exiger sans , Vers et proses et Vers , Vladimir Maïakovski : de Maïakovski, l’anthologie Maïakovski, de V ICTOR byt , , l’iner- B l’oby- LANC « nous venons, et par sors, faire prière àdieu. avec ferveur nous ferons sous lesyeux detous, À présent […] dieu dechair– dieu, nimars dieu defer, des millions le front, non d’unedouce dieu homme ! ni neptune, nivéga, dieu defeu nous-mêmes de sans-dieu, le fer rouillé, couche étoilée, de païens les champs– nos et d’athées – tous miracles. » RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page5

RegaRd

Los angeles, 1980–1983, Garry Winogrand - Épreuve gélatino-argentique. Garry Winogrand archive, Center for Creative photography, the university of arizona. © the estate of Garry Winogrand, courtesy Fraenkel Gallery, San Francisco

garry Winogrand

et automne, le musée du Jeu de Paume nous permet quitté les studios comme les paysages naturels pour rame- de voir une amérique différente de celle d’hollywood. ner des images de la rue et du petit peuple américain qui la c c’est celle de Ferguson comme d’Occupy Wall Street parcourt. que garry Winogrand a photographié toute sa vie durant. en ÉLODIE LASEILLE effet, il fut le fondateur de la street photography, celle qui a

La revue du projet janvier 2015 5 RdP-43_V07_RDP 15/01/15 14:05 Page6

LIBERTÉ !

Tout le monde brandit le drapeau de la liberté, même ses adver - saires. À l'heure où les confusions vont bon train, il est urgent que

R les communistes fassent valoir une conception ambitieuse de la liberté et placent cet enjeu central au cœur du débat public. E

I PRÉSENTATION

S Le spectre de la liberté

contraire. Rarement un mot aura été que « l’existence précède l’essence »), PAR PIERRE CRÉPEL ET le prétexte à un tel pillage, à un tel gal - la praxis gramscienne, le spinozisme

S NICOLAS DUTENT * vaudage et le signe d’un si profond jugeant « que les hommes se croient malaise dans la tumultueuse vie des libres parce qu’ils sont conscients idées ! de leurs désirs mais ignorants des Face à l’insuffisance de lieux pour causes qui le déterminent », ou encore out le monde se targue de renouveler cette problématique, tout la liberté des Anciens et celle des « défendre la liberté ». un chacun semble se forger, dans son Modernes ? « Choisir c’est renoncer » O Parodions qui vous savez : coin, une vague idée de la liberté, intimait Platon. Alors que choisir : le Un spectre hante le monde : convaincu que cette aspiration à la marché ou l’État ? Dans une certaine le spectre de la liberté. Tous liberté est le but vers lequel nous ten - acception contemporaine, à la fois cari - les hommes politiques du dons tous. Si tant est que nous soyons caturale et brutale, le marché (« lais - Tmonde se sont unis en une Sainte- libres, que cette liberté soit immanente ser-faire, laissez-passer ») procéderait

D Alliance pour l’exalter : le pape et le ou à réaliser, quelles sont les fins qui du naturel et exprimerait le régime de tsar, Metternich et Guizot, les radicaux gouvernent cette recherche ? Force est la liberté. Tandis que l’État imposerait de France et les policiers d’Allemagne, de constater qu’en fonction de notre le régime artificiel de la contrainte. On Hugo et Napoléon III, Jaurès et héritage, de nos expériences concrètes, a longtemps envisagé une sorte de Clemenceau, Churchill et Staline, théoriques voire sensibles – incluant compromis, de moyen terme, qui s’est Marchais et Giscard, Allende et les motifs politiques qui nous pous - révélé caduc. Cette variante insatisfai - Pinochet, Benoît XVI et Mgr Gaillot, sent, consciemment ou non, à agir – sante et trouble du marché « régulé » a Hollande et Sarkozy. une grande diversité de conceptions bouché l’horizon : les gouvernements de la liberté semble cohabiter. Cette Blair, Schröder, Hollande-Valls en UN TERME AMBIGU cohabitation du divers n’a rien d’har - constituent des exemples caractéris - Il existe une équivocité de la liberté monieuse : elle relève plus de l’affron - tiques. bien actuelle. Parmi une longue série, tement que d’un dialogue serein à ce mot « piégé » est à la source de armes égales. Et pour cause ! Sans for - UNE QUESTION ÉMINEMMENT conflits et de confusions innombra - cément mesurer leur portée et les loin - POLITIQUE bles, tant ses emprunts sont biaisés ou taines querelles dont ils sont issus, les La question de la liberté, de ses usages l’occasion de diverses manipulations, discours sur la liberté maintiennent et de ses manifestations possibles, est politiques comme sémantiques. vivante une tension, une rivalité, entre donc éminemment politique. Pour le Leibniz ne prévenait-il pas d’ailleurs, différents présupposés et les projets en Parti communiste français elle a été dans ses Nouveaux Essais sur l’enten - présence plus ou moins compatibles l’objet de fortes ambivalences. S’il fut dement humain , que « le terme de entre eux. bien seul lorsqu’il s’est agi de prendre liberté est fort ambigu. Il y a liberté de Quel rapport en effet entre la liberté position contre le colonialisme et pour droit, et liberté de fait » . Ce thème est d’entreprendre martelée par les capi - la liberté des peuples à disposer d’eux- un air lancinant de la bataille rhéto - talistes sous le visage de « la main invi - mêmes, son soutien, d’abord indéfec - rique et idéologique : on agite la liberté sible », l’existentialisme sartrien à la tible, puis distant, à l’URSS, l’a fait comme un étendard bien commode. fois angoissant et responsabilisant qui considérer comme suspect. À propos Dans cette logique opportuniste, on « nous condamne à être libre » tout en du couple liberté/égalité, on disait dégaine ce refrain pour servir les inté - ouvrant la perspective de défaire posi - autrefois aux communistes : à l’Ouest, rêts particuliers du moment, au mépris tivement « ce qu’on a fait de nous » on a choisi la liberté, quitte à tolérer LA REVUE de l’histoire, des polémiques et de la (conception charnière d’une liberté- des inégalités ; à l’Est, au nom de l’éga - DU PROJET complexité inhérente à ce concept. Si fardeau qui, sans nier les détermi - lité, vous avez choisi la dictature ! Le JANVIER 2015 bien qu’on y fait entrer tout et son nismes qui nous oppressent, déclare PCF y a apporté des réponses diverses, 6 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page7

plus ou moins nuancées, insistant sou- selle de la liberté. Comme le dit Dans un passage fameux, le puissant vent sur la différence entre les libertés Maurice Lachâtre, dans son Nouveau tribun scandait : « L’histoire humaine dites « formelles » et les moyens de dictionnaire universel, en 1873: « Le n’est qu’un effort incessant d’invention, l’exercer concrètement. Il a progressi- libéralisme a fait place au républica- et la perpétuelle évolution est une per- vement pris conscience, notamment nisme ; ensuite le républicanisme a fait pétuelle création » dans les années 1970, de la nécessité place à la démocratie ». Il n’y a donc « Le monde libre » a manifesté son de brandir le drapeau de la liberté en pas pour eux rupture mais continuité, impuissance structurelle à offrir un ave- toutes circonstances et de le charger entre la liberté et la république sociale. nir collectif acceptable pour tous. Il est de connotations nouvelles. Où en est- Le Grand Larousse du XIXe siècle (1872) temps, en pensant avec – et parfois on maintenant ? n’opposait pas les différentes formes contre – tous les spectres qui nous L’histoire nous a, au contraire, appris de la liberté : « Être libre, c’est être habitent, et ce diffus composé par qu’au-delà du capitalisme sauvage et affranchi de toutes les servitudes ; or, les troupes progressistes, de rallumer du stalinisme, de nombreuses voies se y a-t-il servitude pire que l’ignorance dans le ciel obscur les étoiles éteintes. sont ouvertes et à de multiples reprises. et la misère ? [...] La vraie liberté, la La flamme de l’émancipation pour Des luttes naissent ou rejaillissent. Elles liberté puissance n’est pas seulement, ainsi se frayer un chemin, et, osons-le, ne s’opposent pas, pas plus qu’elles ne comme le prétend l’école libérale du constituer le nouvel « horizon indépas- se confondent. Ces mouvements laisser-faire, le droit, mais bien le pou- sable » de notre temps ? Nombre de aujourd’hui s’entassent et répondent voir de développer ses facultés sous détours seront nécessaires. Qu’est-ce à plusieurs types d’exigences : démo- l’empire de la justice et la sauvegarde qui distingue la liberté de la démocra- cratiques, civiques, égalitaires qu’on de la loi. Qu’est-ce qu’un droit abstrait tie ? Quels droits la majorité a-t-elle sur sans les moyens de l’exercer ? À quoi les minorités ? Une révolution est-elle doSSier > LibertÉ ! servent aux aveugles les réverbères, et infailliblement privative de libertés ? la défense des suffit-il pour les paralytiques de décré- La liberté diffère-t-elle en fonction du « ter le droit de marcher ? » Marx a mon- sexe et du poids économique des pays ? libertés est en prise tré, quant à lui, que le dépassement Peut-on traiter la délinquance autre- à des vents mauvais des conceptions réductrices ou bor- ment que par la privation de liberté ? nées de la liberté passait par l’annula- La liberté de consommer conduit-elle en dépit de ses tion de toutes les formes d’aliénations, à la catastrophe écologique ? La révo- défi inextricablement pratique et théo- lution numérique, la redistribution des succès fragiles » rique. classes sociales, les solidarités nou- velles et l’émergence « d’autres façons » aurait de la peine à hiérarchiser, tant Comment Le marxisme Peut- de faire de la politique bouleversent- tous s’imposent avec un caractère d’ur- iL aCtuaLiser La Liberté ? elles nos conceptions classiques de la gence, impérieux, qu’ils soient imbri- Il nous faut à présent trouver les moyens liberté ? Une préservation de la liberté qués ou irréductibles entre eux. Car la par lesquelles concilier possibilité his- est-elle possible au sein d’un « tout » défense des libertés est en prise à des torique et nécessité historique. fortement déterminé par la vie et les vents mauvais en dépit de ses succès Autrement dit, répondre à la question : conditions matérielles, mais aussi, les fragiles, fluctuant selon la nature des comment le marxisme peut-il actuali- affects ? Le libre arbitre est-il une illu- régimes politiques, l’évolution des ser la liberté sur le sol de détermina- sion rétrospective ? Avec l’humilité que mœurs et du droit, la géographie et la tions héritées, ce nécessaire historique commande une telle entreprise, ce dos- capacité des aspirations sociales à se que les conservateurs nous présentent sier de La Revue du projet esquisse des faire entendre, ou pas. comme invariable ?Le capitalisme a pu réponses à ces questions à la fois graves donner l’illusion de défendre la liberté, et brûlantes. Au-delà de la diversité de leurs points Staline l’a d’ailleurs aidé à cacher ses de vue, les hommes des Lumières crimes, en en perpétrant d’autres. Il Pour y parvenir, Michel Vadée, dont la (Montesquieu, Voltaire, Rousseau, nous revient de substituer au « libre jeu philosophie est charnière dans le dia- Diderot et bien d’autres), ceux la des intérêts, des besoins et des pas- logue contemporain entre marxisme Révolution française (Condorcet, Paine, sions » supposant que « chacun vou- et liberté, nous ouvre la voie. S’agissant Robespierre, etc.) ont eu des concep- lant son bien particulier concourt par de la liberté, il indique dans un pas- tions larges et prometteuses de la là, sans le vouloir, au bien de tous » sage lumineux de Marx Penseur du liberté politique, bien que toujours (Fable des Abeilles, Mandeville), une Possible (L’Harmattan) qu’il : « s’agit « dans leur époque ». Progressivement, conception de l’histoire dynamique, en d’une liberté concrète, d’une liberté le courant « libéral » des années 1820 train de se faire, à la fois imprévisible réalisée dans l’action, par l’interven- (qui luttait certes contre la monarchie mais disponible à l’invention comme tion pratique des hommes dans l’his- décomplexée) s’est rabougri sur une le rappelait Isabelle Garo dans un essai toire. Cette liberté est une fin liberté des possédants, mais, au sein récent. Souvenons-nous du Discours à consciente et conquise, non un attri- de la société, a monté une vision plus la Jeunesse prononcé à Albi en 1903 par but, une propriété ou une “chose”, qui audacieuse, plus ouverte, plus univer- le journaliste et philosophe Jean Jaurès. seraient déjà là chez l’homme au point de départ. C’est une liberté à conqué- rir, plutôt qu’à reconnaître ou à retrou- ver. C’est un résultat, non un présup- posé ». Faisons de ces mots un fécond « il n’y a point de sentiment usage ! n plus inséparable de notre être, *Nicolas Dutent est coresponsable que celui de la liberté. » de la rubrique Mouvement réel. Pierre Crépel est responsable de la La revue Frédéric ii, Anti-Machiavel, 1740. rubrique Sciences. Ils sont les du projet coordonnateurs de ce dossier. janvier 2015 7 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page8

La Liberté et L’ENCYCLOPÉDIE 1789, an i de la liberté. de l’ancien régime, on retient souvent la censure, l’arbi- traire, les lettres de cachet, les corvées, le corsetage de la production et du commerce, la monarchie absolue. alors qu’en était-il de la liberté ? Comment l’Encyclopédie diderot-d’alembert a-t-elle rendu compte de cet univers ?

ENTRETIEN AVEC un plaidoyer contre la peine de mort on accuse souvent les hommes des MARIE LECA-TSIOMIS* infligée aux fugitifs : « Ce sont ces Lumières d’être déterministes et de hommes plutôt enchaînés qu’enga- nier la liberté. gés, qu’on punit de mort lorsqu’ils Pour comprendre cela, il faut d’abord uelles sont les aspirations du veulent rompre des chaînes qui leur se souvenir que le christianisme sup- peuple à la liberté au milieu pèsent ». Les encyclopédistes plai- pose toujours une forme de liberté q du xviiie siècle ? dent en général pour la liberté reli- humaine : en effet, si on ne suppose Les petits paysans, les ouvriers, les arti- gieuse, à l’exception du conservateur pas une telle liberté, il ne peut y avoir sans sont sous le joug des seigneurs et abbé Mallet, ce sont soit des chrétiens ni péché originel, ni donc rachat de l’Église catholique. Même si cette éclairés comme le protestant christique, etc. Diderot, athée et maté- dernière est divisée, par exemple entre Jaucourt, ou J.J. Rousseau, soit des rialiste, conçoit pour sa part une jésuites et jansénistes, gallicans et déistes comme Voltaire, soit des forme de déterminisme (bien que le ultramontains papistes, elle est unie athées comme Diderot ou d’Holbach. mot n’existe pas encore), exprimée dans des articles comme Involontaire, Les encyclopédistes sont-ils libres Volonté, Spontanéité, Fortuit, etc… de dire ce qu’ils veulent dans leur Mais les encyclopédistes sont divers Les ouvrage ? et un second article Fortuit, signé « Pas du tout. On est en régime de cen- cette fois par d’Alembert, tout en encyclopédistes sure. Pour ses sept premiers tomes reconnaissant « les lois immuables (1751-1757), l’ paraît auxquelles tous les êtres sont sou- doSSier Encyclopédie plaident en général avec « approbation et privilège du mis », soutient l’existence de la liberté pour la liberté roi ». Sa parution est d’abord inter- fondée, il est vrai, sur le seul « senti- rompue après le tome II, suite à une ment intérieur » que nous en avons. religieuse. » campagne jésuite, mais elle est sou- Le combat principal des Lumières est tenue, parfois de façon obstinée celui de la raison contre les préjugés, et ingénieuse, par de nombreux aris- pour le droit de penser par soi-même. pour contraindre les petites gens à tocrates et jusqu’à la Cour, par obéir, à accepter leur sort, à admettre Malesherbes, voire Madame de qu’ils sont dans le péché, etc. Pompadour. L’Église, cependant, les Rappelons-nous que tout ce qui fait parlements, le gouvernement la sur- partie des contours actuels de la liberté veillent de près, et, suite à l’attentat « n’oublions pas politique (suffrage universel, droit d’as- de Damiens contre le roi (5 janvier que diderot a été sociation, expression de partis poli- 1757) et aux nombreuses attaques de tiques, etc.) est alors totalement hors- ses adversaires jésuites, jansénistes enfermé au donjon épure. Outre les famines, le peuple est et autres, la répression contre l’Ency - de vincennes en toujours soumis aux corvées (journées clopédie s’amplifie jusqu’à son inter- de travail obligatoire sans salaire), à la diction définitive en 1759. Pour les 1749 pour ses écrits conscription forcée (tirage au sort des dix derniers tomes, l’ouvrage sera hommes qu’on envoie aux champs de imprimé clandestinement et diffusé déclarés “contraires bataille), deux des servitudes les plus en 1765 sous le régime de la « per- à la religion, à l’État pesantes. Dans les régions de tradition mission tacite ». Ainsi, dans tous les protestante, on voudrait pouvoir choi- cas, les auteurs et éditeurs doivent- et aux bonnes sir sa religion, mais, depuis 1685 ils utiliser des ruses. N’oublions pas (Révocation de l’Édit de Nantes), seul que Diderot a été enfermé au donjon mœurs”. » règne le catholicisme, l’Édit de tolé- de Vincennes en 1749 pour ses écrits rance ne viendra qu’en 1787. déclarés « contraires à la Religion, à l’État et aux bonnes mœurs ». Des et les combats contre l’esclavage ? L’Encyclopédie rend-elle compte de articles comme Dieu, Religion, etc. L’Église, complaisante avec les puis- ces attentes ? sont donc traditionnels et inoffen- sants, ne condamnait quasiment En partie, car ce n’est pas le peuple sifs. Et c’est ailleurs, via les renvois jamais l’esclavage, bien au contraire. qui y parle directement, bien sûr, mais ou dans des entrées apparemment Dans l’Encyclopédie, en revanche, on des élites éclairées, des magistrats, anodines, qu’il faut chercher les idées lit, sous la plume de Jaucourt, un des des nobles, des savants. La plupart subversives. Les doutes sur le culte principaux rédacteurs de l’ouvrage, des encyclopédistes sont contre les de Marie sont exposés à l’article West- que « l’esclavage n’est pas seulement corvées imposées aux paysans, syno- Morland (dans une notice consacrée un état humiliant pour celui qui le La revue nymes à leurs yeux de servitude et à Mill, qui y est né), la critique du subit, mais pour l’humanité même du projet d’inefficacité. Quant aux « soldats dogme de la survie post-mortem à qui est dégradée » (art. Esclavage) ; janvier 2015 malgré eux », l’article Transfuge est l’article… Revenant ! quant à Traite des Nègres, c’est un des 8 RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:34Page9 modernes et Le marxisme modernes et Liberté des Liberté desanCiens,La La treprise. La liberté moderne est donc tisse leur sécurité dans ce genre d’en- prioritairement de l’État qu’il garan- attendent et privées affaires leurs à tout consacrentavant se individus Ces antiques. cités aux rapport par cours, étendues et fortement peuplées dis- son de contemporaines nations Modernes », propre aux membres des des liberté « la côté, d’un : politique cours de1819. qui formalise les choses dans un dis- Benjamin premier courant politique « libéral C’est », suivi. Constant, un des pères fondateurs ont du la qui à années aux et remontent française Révolution qui position de l ari ani sln u, deux lui, liberté la de selon possibles conceptions ainsi, aurait y Il anCiens des et modernes des Liberté L P ue sn onpéets dans l’ omniprésentes sont quieu mais les idées politiques de Montes - sans nom d’auteur puis mis à l’index, 1791. en L’Esprit ou lois des 1788 en pas 1750, en rent le régime anglais ; nous sommes admi- sens, ce en et, tempérée chie pédistes sont partisans d’une monar- monarchie absolue et de de droit divin, les encyclo- France cette Dans liberté la politique ? de vis-à-vis se situent-ils encyclopédistes les Comment ont préparél’abolition. l’ de d’articles nombre geaient pas un tel point de vue,parta- mais ne tous Certes, ». ! heureux mal- de plutôt tant faire de que donc détruites, soient européennes colonies les Que « : abolitionnistes premiers textes français ouvertement revendicationdes affairistes pour s’enrichir ? La question reste actuelle. forteuneinfluence. défenselibertés descontrepouvoir un autoritaire ou/et restauration,Sousla faceCharlesultrasauxcourant àun etX, eut « libéral » clopédistes ne réclament pas la répu- Ency Ency clopédie. AR S pour l’essentiel dans des prises la notion de liberté s’enracinent es débats politiques actuels sur TÉPHANIE R a été publié en 1749, en publié été a Bien sûr, les Ency - Ency les sûr, Bien OZA * Encyclopédie C’est cette part prise à l’exercice de l’exercice à prise part cette C’est etc.). justiciés, des condamnation la dans chapitre au voix publiques, ment des grains (matière première (matière grains des ment pour la liberté du commerce, notam- sont encyclopédistes des plupart La économique ? liberté la et (art. parole sociale nouvelle quiapparaît. la à Représentans). C’est une dynamique droit d’avoir - Noblesse et Clergé seuls aux plus non et – société la de classe chaque à permettant choisis, citoyens des nation, saire représentation de la nation par la représenter d’Holbach défend l’idée de la néces- à seul le être prétendait XV Louis roi le que alors Et,Citoyen). (art. Diderot écrit lité des membres & la liberté de tous citoyen] » [le embrassera celui qui cité, sera pour l’éga- la pour dans division neuve fait à l’époque, de la citoyenneté : « S’il y a tout notion, en commun, exercice des charges des exercice commun, en (délibérations cité la de affaires aux active participation la en tout avant consistait elle toujours, Constant selon : l’Antiquité de des Romains des liberté et « Grecs des c’est-à-dire », la Anciens côté, l’autre De dontils’agitliberté, deseprotéger. tout comme des obstacles avant possibles à ma vus sont l’État, autres, (sous-entendu des propriétaires)personnels : les désirs aux rapport par conçue comme « absence d’entraves » exemple, il y a dans l’ revendications plus audacieuses. Par blique, mais ils rendent possibles des soumission volontaire à une loi que nous que loi volontaireune soumission à satisfaction pulsionnelle et irréfléchie de irréfléchie et satisfactionpulsionnelle nos désirs, mais bien plutôt, dans notre dans plutôt, bien mais désirs, nos « considérons juste et bonne. et juste considérons La liberté ne réside pas dans la dans pas réside ne Laliberté Encyclopédie une comme pacte passé entre l’individu entre passé pacte comme d’une réelle part du pouvoir collectif, échange en l’indépendanceprivée à blâme public. Ce large renoncement saient à tout moment à prononcer un autori- usages les et loi la que pairs, ses de jugement au citoyen chaque de vie la permanence en livraient et la liberté de mouvement individuelle limitaient antiques lois les combien dance privée : ainsi Constant souligne indépen- leur sacrifier lui à Anciens les amené aurait qui étendus, peu territoires des sur et communautés seulement, d’après lui, dansréalisable de petitessouveraine, puissance la mencée enFrance. révolution industrielle n’est pas com- La tard. plus ans quatre-vingts etc., Say,Guizot, de Constant, cas le sera bourgeois, des banquiers, comme ce des celle à libertés des conceptions ristes et il serait faux de réduire leurs affai- des pas sont ne ce mais gent, comme Voltaire, savent gagner de l’ar- corporations, les privilèges. Certains, sont manifestes, avec les corvées, les les entraves à la liberté de production bloquées, étaient initiatives les son, avec restrictions (Diderot). Ils ont rai- internationale (Turgot, Quesnay), soit et nationale totale, soit essentielle), XVIII du littératurefrançaise de émérite *Marie-Leca-Tsiomis Propos recueillis par Pierre CrépelPierre par recueillisPropos Nanterre-LaOuest Défense. e siècle à l’université Paris-l’université à siècle n

»

est professeur est s janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 9 doSSier > LibertÉ ! est docteure en n : en chacun, l’homme chacun, en : civiques philosophie de l’université Paris-I Panthéon-Sorbone. Stéphanie Roza Roza *Stéphanie la répression, ont révélé, par-delà les par-delà révélé, ont répression, la méandres de ses relations avec les trotskistes, le PCF période 1952-1956, sur continuité puis la les la 1968, jeunes de autour courte maoïstes consciem- liant positionnement d’un ment théorie et pratique politique pour la défendre liberté des peuples et celle à des s’autodéterminer, pro- létaires à se constituer en une force perspec- propre sa d’opposer capable démocra- de matière en classe de tive par- en – politique et économique tie ticulier les contre « élections piège à cons » dont il régulière- s’employait ment à briser les illusions. droits qu’elle décrète « naturels », sans », naturels « décrète qu’elle droits parvenir vraiment à s’incarner dans cri- Sa sociaux. rapports des réalité la tique de fond est la suivanteprivée propriété la : pas tant n’abolit qu’on (et production de moyens grands des conti- l’homme limite), la on si même personnage un tout avant d’être nue per- intérêts ses de préoccupé privé, sonnels comme opposés à ceux des autres : conforme à la description qu’en fait donc unConstant. Il est illusoire de juxtapo- personnagequi préoccupations ces de côté à ser, le coupent des autres, et des droits afférents, des préoccupations et des droits privé l’emportera l’homme public, le bien privé sur étroit le sens au toujours politique La public. bien sur du terme doncn’est pas émancipa- trice : au contraire, l’émancipation individuelle et collective passe par pro- de droit du définitive l’abolition produc- de moyens grands des priété tion et le passage à une gestion col- matérielles de des lective ressources planète. notre » , c’est-à-dire de victoires, à théoriser et politiser son concept de concept son politiser et théoriser à liberté, en mettant l’accent sur les de collectifs et individuels processus libération fussent-elles toujours partielles et à l’ensem- contre trêve, sans prolonger ble des facteurs combinés d’exploi- caractéristiques d’oppression et tation de la dictature du . Ses posi- tions sur la guerre d’indépendance du FLN, Mai 1968, pour évoquer les plus connues, l’usage de sa position clé dans l’espace intellectuel pour mener sans relâche toutes les cam- pagnes de dénonciation nécessaires contre l’impérialisme, l’oppression, La Liberté et marx se qui liberté cette de moque se Marx ou d’Aristote oripeaux les dans drape de Cicéron, qui s’autoproclame coups de grandes déclarations à et de tion nécessairetous entre n’est légitimeréciproque qu’à d’être condition les membres dude débat un corps reprendre pour social.exemple, Par l’époque révolutionnaire,limite le qu’on droit à justifie tous de l’existence d’enrichisse- appétits les sévèrement ment de certains, et, plus générale- ment, le droit à la propriété. Par ail- leurs, c’est vrai, les Jacobins étaient concep- d’une héritiers globalement tion aristotélicienne de la dignité de participation la par passant l’homme au débat public et à la prise de déci- ani- « un est l’homme : collective sions mal politique ». * AROT B , son passage progres- passage son ,

L’émancipation individuelle et collective L’émancipation a philosophie de Sartre a tou- MMANUEL jours été centrée sur la question la sur centrée été jours de la liberté, y compris quand E passe par l’abolition passe définitive du par droit de l’abolition et le passage à une gestion collective des ressources ressources matérielles de notre planète. « AR propriété propriété des grands de moyens production doSSier dans les l’après-guerre, débats entre de Sartre philosophie la et tard, plus le demi-siècle un âpres. parti furent communiste liberté sur la de question la liberté sa de usage faire dire veut que ce sur éclairer nous encore peut Sartre situation. en cette présentation de Robespierre est Robespierre de présentation cette évidemment partiale. En fait, celui- ci pensait, après Rousseau, quesatisfac- la dans lapas réside ne liberté nos de irréfléchie et pulsionnelle tion désirs, mais bien plutôt, dans notre soumission volontaire à une loi que En bonne. et juste considérons nous ce sens, 1/ la frustration de certains pro- est oppressive, d’être loin désirs, ductrice de liberté, 2/ cette frustra- et le collectif, ne pourrait plus être contracté par l’homme des grandes nations modernes. Dans sa critique, révolution- les fait, en vise, Constant naires de l’An II (Robespierre et les d’avoir lui selon coupables Jacobins), une artificiellement ressusciter voulu pro- obsolète, définitivement liberté voquant un déchaînement de Terreur. vio- la : social corps le dans lence Comme prise de position politique, L P c’était pour montrer contrecarrer, qui facteurs peut objectifs la de domination, de condition de classe, des prégnance subjectifs, facteurs ou république la de formels idéologèmes éli- éléments les Par-delà bourgeoise. tistes (à ses propres yeux d’ailleurs) marxisme et Liberté : etsartre aujourd’hui nous de son œuvre d’avant-guerre jusqu’à d’avant-guerre œuvre son de néant le et L’Être amené l’a 1945 après marxisme au sif s 10 La revue du projet janvier 2015 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page10 14:34 27/12/14 RdP-43_V07_RDP RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:34Page11 os dsi-l e ova dans nouveau de disait-il tous, ble, mais « Aussitôt qu’il existera pour talisme), le marxisme est indépassa- anarchique de la misère dans le capi- sité » (entretenu par la production la par (entretenu » sité néces- la de règne serons « le par du dominés nous sein que Tant au marxisme. place sa niquement orga- la avait qu’il estimant nécessité, maintenu simultanément a en il possible, du limites les repousser contre-révolutionnaires déviations les du XX Critiquer ». ticulier conjoncture mondiale d’un type par- sement normal », « produite par une vieillis- un à correspondpas ne rose rappelait cependant que « cette sclé- dans rose stalinienne du marxisme, en 1957 de le conquérir. Revenant sur la sclé- « fraternité appelait », avec Sartre les moyens que concrets communisme ce État, sans et classes sans société coordonnées les contemporaines la perspective d’une dans de déployer capacité la c’est stratégie, telle d’ensemble renouvelée. Le défi d’une s’intégrer dans une vision stratégique phie vivante, méritent aujourd’hui de philoso- seule la comme marxisme de la raison dialectique Ses élaborations autour de la état sans et CLasses sans soCiété d’une PersPeCtive La les fers, de refuser l’existant et de et l’existant refuser de fers, les jet renoncement, que l’homme est quée pour justifier l’attentisme ou le invo- être peut ne divine ni ni sociale, humaine, ni nature qu’aucune l’idée sur tout avant fondé », lisme encore dépassées ». Son « existentia- tances qui l’ont engendré ne sont pas circons- les que parce indépassable est il : temps notre de philosophie la donc reste « marxisme le : appel sans verdict son D’où ». développer c’est« s’ilpeine à se de commencé a que », enfance en presque d’être épuisé, loin « ce est qu’il dans texte, même disait, il ce dont de marxisme reniement d’un l’occasion Sartre pour jamais fut ne munisme qui se sont produites au nom du com- et toujours capable, même dans même capable, toujours et Questions de méthode de Questions , sa défense du Critique , Sartre , e siècle pro- par un socialisme de pouvoir qui cri- servie , la de totale sive d’uneactuel contexte Dansle offen- aux agressions qu’elles subissent. répondre pour désemparées restent radicales, stratégiques et matiques program- perspectives de faute qui, étudiante), ou (lycéenne jeunesse la lisées, qu’elles soient ouvrières ou de force aux jeunes générations radica- et en l’occurrence, de s’adresser avec ment ouvrier en crise de longue date, truire les organisations d’un mouve- aujourd’hui à la nécessité de recons- confrontée est tâche Cette ». actuel l’état abolit qui réel mouvement le « de formule la « idéal à réaliser », est avant tout, selon un d’êtreIdéeou nisme,loin « » une commu- le laquelle selon tionnaire, de la dialectique matérialiste révolu- maîtresse l’idée sienne fait nement plei- avait Sartre que preuve : établi l’ordre par-delà poursuivre doivent des fins que les exploités et opprimés conscience mais l’utopie, de Refus L’étataboLit qui aCtueL réeL mouvement Le cette philosophie». ni liberté cette concevoir de mette tuel, aucune expérience qui nous aucun per-intellec- instrument aucun n’avons moyen, nous Mais place. sa prendra liberté la de philosophie de la vie, le marxisme aura vécu ; une liberté réelle au-delà de la production Questions de méthode, une marge de L’idéologieallemande, ment entrain degronder. juste- est minoritaire, ou souterrain ment réel » qui, même s’il est encore la lutte des classes, avec ce « mouve- et s’organiser avec les agents actifs de révolutionnaires, doivent faire corps toute pratique de la liberté, pour être et pensée toute : limites ses trouve vision cette Aujourd’hui, partis. des toujours cru qu’il lui fallait rester hors parti révolutionnaire,du Sartremédiation la a presquepar explicitement mais classe la à lié organiquement tellectuel qu’on qualifiera de l’in- léniniste, ou Gramsci, par théorisé tariat prolé- du » organiquel’intellectuel « Contre incarnée. a qu’il » route de compagnon « ou » engagé tellectuel principale limite de la la l’in-figure de « dépasser yeux, nos à aussi, sans mistes. Mais on ne peut être sartrien particulier par les organisations réfor- faiblesse des réponses apportées, en toute la gravité, autant que pointer la prendre les « situations », en mesurer peler que pour combattre, il faut com- gendarmerie – être sartrien, c’est rap- la par tué été a Fraisse Rémi si faute gande pour expliquer que c’est de sa lant au passage mensonges et propa- les révoltes de la jeunesse – accumu- et sociaux mouvements les minalise l’université de l’universitéToulouse- Jean-Jaurès. de conférences de maître est Barot*Emmanuel est philosophe. Ilphilosophe. est n janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 11 doSSier > LibertÉ ! RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page12

Le règne de La Liberté* on a souvent accusé le marxisme d’être un déterminisme brutal, qui ferait des idées, des actions, un simple reflet de la base économique et sociale, bref qui nierait la liberté de l’homme. voici, à l’encontre de ces affirmations, des extraits de Marx penseur du possible de michel vadée.

histoire est, au sens strict, le règne de liberté véritable est lui-même contrat soi-disant « libre » entre l’ou- processus de création de réellement possible. vrier individuel et le capitaliste, était l’homme par lui-même. Engels Selon Marx, le développement des donc le but de « la » révolution sociale. L’ e le fait bien ressortir [...] : « L’homme est forces productives remplit cette Dans les sociétés du XIX siècle, la le seul animal qui puisse sortir par le deuxième condition. Il est la condition liberté « réelle » n’existait que pour travail de l’état purement animal ; son de possibilité de la liberté. Marx esti- certaines classes et certains hommes. état normal est celui qui correspond à mait que les conditions objectives et Pour l’ouvrier de cette époque bruta- la conscience et qu’il doit lui-même subjectives de réalisation de la liberté lement mis au chômage sans aucun créer. » pour tous les hommes commençaient recours, comme pour celui d’au- à être réunies. D’une part, les condi- jourd’hui qui arrive « en fin de droits », La Pensée de marx tions objectives du fait de la première la « liberté » est dérisoire ; proclamée une Pensée de La Liberté révolution industrielle qui accroissait en droit, elle est niée en fait. Pour que Nous avons vu Marx développer cette la maîtrise de la nature d’une manière la liberté acquière quelque réalité idée, qui est fondamentale aussi pour spectaculaire ; d’autre part, les condi- pour eux, il est nécessaire d’utiliser à lui. C’est en créant les conditions de tions subjectives du fait que la crois- plein les forces productives existantes, leur existence, c’est-à-dire, avant tout, sance rapide de la classe ouvrière et de ce qui n’est pas le cas avec les crises les moyens de production eux-mêmes, son importance décisive dans le pro- et dépréciations ou destructions par leur activité productive ou travail, cessus de production moderne, la coo- périodiques de biens ou de valeurs. que les hommes « font » leur propre pération réunissant les ouvriers sala- Il est nécessaire de transformer les histoire qui n’est autre chose qu’une riés en grand nombre sur les lieux de rapports sociaux dominants, d’abo- auto-transformation, et donc un auto- production, d’où leur force et la possi- lir le rapport social inégal entre les doSSier engendrement de l’homme. bilité de leur action. Ces deux proces- détenteurs du capital ou de la terre et Pourtant, cela ne serait pas suffisant sus s’engendrant l’un l’autre, Marx en les détenteurs de la force de travail. Il pour faire de la pensée de Marx : une concluait que seules deux classes prin- faut supprimer l’appropriation capi- pensée de la liberté. En effet, il faut cipales resteraient en présence. À la taliste privée. Sans ce changement révolutionnaire, le travailleur « libre » restera privé de liberté réelle, parce que privé des moyens matériels de « il faut supprimer l’appropriation cette liberté. [...] capitaliste privée. Sans ce changement L’abolition de l’asservissement écono- mique (exploitation de la force de tra- révolutionnaire, le travailleur "libre" restera vail) ne peut se réaliser que par l’éman- cipation de la classe ouvrière qui est à privé de liberté réelle, parce que privé des la fois possible et nécessaire, ce que moyens matériels de cette liberté. » montrent les luttes politiques du XIXe siècle en Europe.[...]

ajouter à l’idée d’une auto-création de suite des socialistes de son temps, il Le domaine de La néCessité l’homme par le travail, l’idée d’une libé- dénonça la division de la société en Les conditions de la réalisation de ce ration des contraintes de la nature classes opposées, en dominants et que Marx appelle le règne de la grâce à cette activité elle-même. Si le dominés, comme ce qui entrave l’ac- « liberté » sont décrites d’une manière travail, quels qu’en fussent les formes cès à la liberté pour la masse des condensée dans une page célèbre du et les moyens, devait toujours absor- hommes exploités. troisième livre du Capital, où domine ber la majeure partie du temps pour la Nombreux sont ceux qui le constatè- son souci de fonder son propos sur une plupart des hommes sans aucune pos- rent : le mode de production capita- base économique réaliste. Rapportons sibilité de dépasser cet état de choses, liste et la société civile moderne cette page pour l’analyser : la liberté resterait l’apanage du petit n’avaient pas supprimé les inégalités « En fait, le royaume de la liberté com- nombre, et le « règne de la liberté » et les antagonismes de classes, malgré mence seulement là où l’on cesse de serait utopique et illusoire. La liberté les idéaux proclamés et poursuivis par travailler par nécessité et opportunité comme possibilité réelle pour tous les les Révolutions bourgeoises anglaise, imposée de l’extérieur ; il se situe donc, hommes implique quelque chose de américaine et française. Le nouveau par nature, au-delà de la sphère de la plus que l’auto-création humaine, à régime restait économiquement fondé production matérielle proprement dite. savoir un accroissement de la maîtrise sur l’exploitation de l’homme par De même que le sauvage doit lutter de la nature tel que la diminution l’homme. Sous la forme nouvelle du contre la nature pour pourvoir à ses consécutive du travail « nécessaire » salariat ouvrier, il perpétuait les alié- besoins, se maintenir en vie et se repro- bouleverse le caractère et le contenu nations, les oppressions de toute sorte duire, l’homme civilisé est forcé, lui La revue des activités humaines. C’est seule- et la répression politique. L’abolition aussi, de le faire quels que soient la du projet ment si cette deuxième possibilité est du salariat, c’est-à-dire de l’achat et de structure de la société et le mode de la janvier 2015 une possibilité réelle que l’accès à un la vente de la force de travail selon un production. Avec son développement 12 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page13

connaissance « aussi bien des lois de soir, de faire de la critique après le repas, il y a quelques mois, le 5 septem- la nature extérieure que de celles qui selon mon bon plaisir, sans jamais bre 2014, disparaissait le philo- régissent l’existence physique et psy- devenir chasseur, pêcheur, berger ou chique de l’homme lui-même », critique. » [...] sophe michel vadée. Longtemps comme l’explique Engels quand il dit Ce qui est sûr, c’est que, lorsqu’il est enseignant à l’université de se placer dans le cadre de la concep- question de liberté chez Marx, ce n’est Poitiers, michel vadée a été mem- tion hégélienne « des rapports entre pas d’une liberté absolue de vouloir, bre du Centre de recherches et de nécessité et liberté ». au sens du libre arbitre des métaphy- documentation sur hegel et marx La manière dont Marx pose la liberté siciens ou de la raison des moralistes fondé par jacques d’hondt. il a dans la société communiste, en l’op- rigoristes, mais de celle de l’activité écrit plusieurs ouvrages, parmi les- posant au « domaine de la nécessité » rationnelle délibérée que couronne le quels Marx, penseur du possible implique davantage : dans une société plaisir de l’acte au sens d’Aristote, voire (1992). un livre important théori- sans classes, la liberté se présente plu- au sens des matérialistes et des hédo- quement parce qu’il restitue la tôt comme ouverture d’un champ de nistes. Marx rappelle que deux concep- complexité de la pensée marxienne possibilités pour toutes sortes d’acti- tions philosophiques de la liberté s’af- vités inédites, affranchies de toute frontent : « Jusqu’ici la liberté a été de la liberté. un livre courageux nécessité, que ce soit l’inévitable ou définie par les philosophes sous un dans un contexte difficile où, après l’indispensable. double aspect : d’un côté par tous les l’effondrement des pays socialistes Toutefois, parvenir à cette forme de matérialistes, comme puissance, com - européens, on faisait de marx un société est impossible sans la connais- me maîtrise des circonstances de la vie auteur dépassé, voire dangereux. sance de la nécessité des lois naturelles d’un individu, d’autre part, par tous les doSSier > LibertÉ ! La Revue du Projetsouhaite lui ren- impliquées dans les techniques, et sans idéalistes, les Allemands en particulier, dre hommage en en publiant un celle de la nécessité des processus comme autodétermination, détache- extrait. socio-économiques impliqués dans la ment du monde réel, comme liberté transformation révolutionnaire de la purement imaginaire de l’esprit. » société de classes actuelle en une Tout en adoptant la conception maté- société sans classes. rialiste, lorsqu’il décrit « le règne de la s’étend également le domaine de la C’est ici que se pose la question de liberté », Marx semble dépasser cette nécessité naturelle, parce que les savoir quel est le contenu de la liberté opposition, quoique la possibilité de besoins s’élargissent ; mais en même pour Marx. Selon les textes, ce contenu cette « liberté » repose sur la maîtrise temps s’élargissent les forces produc- semble entendu de deux manières des « circonstances », celles de la pro- tives pour les satisfaire. En ce domaine, notablement différentes : tantôt, duction matérielle (rapport à la nature) la seule liberté possible est que comme dans la page du Capital citée et celle des rapports sociaux dans une l’homme social, les producteurs asso- à l’instant, la liberté est la sphère des société communiste. La liberté est tou- ciés règlent rationnellement leurs échanges avec la nature, qu’ils la contrôlent ensemble au lieu d’être dominés par sa puissance aveugle et qu’ils accomplissent ces échanges en « entre le fort et le faible, entre dépensant le minimum de forces et le riche et le pauvre, entre le maître dans les conditions les plus dignes, les plus conformes à leur nature humaine. et le serviteur, c’est la liberté Mais cette activité constituera toujours le royaume de la nécessité. C’est au- qui opprime et la loi qui affranchit. » e delà que commence le développement Lacordaire, 52 conférence de Notre-Dame, 1840. des forces humaines comme fin en soi, le véritable royaume de la liberté qui ne peut s’épanouir qu’en se fondant activités individuelles laissées à l’arbi- jours liée à des moyens objectifs, sans sur l’autre royaume, sur l’autre base, traire et aux choix individuels au-delà lesquels elle n’est qu’illusoire. Elle celle de la nécessité. du travail nécessaire, tantôt Marx la fait s’étend autant que ces moyens le per- La condition essentielle de cet épa- consister dans le travail lui-même, mais mettent, sans s’identifier à eux. Les nouissement est la réduction de la jour- d’un travail tel que l’homme s’y réalise hommes sont libres à proportion des née de travail. » pleinement, ce qui suppose un dépas- moyens matériels dont ils disposent : sement – que l’on entend parfois « Il n’est pas possible de réaliser une Ainsi, le possible par excellence, c’est comme une disparition totale – de la libération réelle, ailleurs que dans le cette liberté se développant dans une division du travail. C’est ce qui ressort monde réel et autrement que par des forme de société où la production des- d’une autre page célèbre, écrite en moyens réels ; [...] l’on ne peut abolir tinée à satisfaire les besoins nécessaires 1845-1846, qui illustre concrètement l’esclavage sans la machine à vapeur est socialement organisée, où la ce à quoi Marx peut penser aussi à la et la mule-jenny, ni abolir le servage concurrence et la volonté arbitraire des fin du Capital : sans améliorer l’agriculture.» n individus ne font plus loi en ce qui « Dans la société communiste, où cha- concerne ce domaine de la nécessité, cun n’a pas une sphère d’activité exclu- mais où s’exercent « librement» les acti- sive, mais peut se perfectionner dans vités « individuelles » en dehors du la branche qui lui plaît, la société régle- temps de travail nécessaire. La liberté mente la production générale, ce qui dont il est question ici ne peut se rame- crée pour moi la possibilité de faire *Extraits de Michel Vadée, Marx penseur du possible, Paris, ner à « l’intellection de la nécessité », à aujourd’hui telle chose, demain telle L’Harmattan, 1998, pp. 456-464, La revue la « nécessité comprise », et à la déter- autre, de chasser le matin, de pêcher reproduits avec l’aimable du projet mination du choix fondée sur la l’après-midi, de pratiquer l’élevage le autorisation de l’éditeur. janvier 2015 13 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page14

Le SELF-MADE-MAN À L’éPreuve de La ComPLexion un individu est toujours un nœud de relations, son parcours n’est pas solitaire mais solidaire d’une configuration sociale historique et géographique.

PAR CHANTAL JAQUET* yeux ouverts. Il imagine en effet sa made-man ne naît pas par génération trajectoire sociale sur le modèle spontanée, il est le fruit d’un désir, a métaphore classique de l’as- biblique d’une création ex nihilo, jail- l’héritier d’une histoire familiale et cension sociale décrit le chan- lie de la volonté toute-puissante d’un sociale qui l’a précédé et il en porte L gement de classe ou de situa- Dieu qui tire l’être du néant. Il est parti les marques de fabrique malgré sa tion des individus sous la forme d’une de rien, dit-on communément, mais volonté d’en effacer les traces. Naître, élévation et d’une promotion de soi c’est parler pour ne rien dire car le c’est toujours entrer dans une com- trouvant leur acmé dans la figure du self-made-man ne surgit pas du néant munauté et y prendre place à travers self-made-man, fils de ses œuvres, qui par je ne sais quel fait divin. des chemins singuliers que l’on se ne doit sa fortune et sa réussite qu’à Si la statue éponyme de Bobbie fraie avec ou malgré les autres, mais ses propres mérites. Carlyle peut nourrir l’imaginaire en jamais sans eux.

Le fruit d’une iLLusion La croyance en l’existence de self- « Le prétendu self-made-men ne naît pas made-men est le fruit de l’illusion par génération spontanée, il est le fruit d’un rétrospective qui consiste à considé- rer une vie à la manière d’une œuvre désir, l’héritier d’une histoire familiale et achevée, en oubliant les échafaudages qui ont permis de l’édifier et d’esca- sociale qui l’a précédé. » lader échelon par échelon les plus doSSier hauts sommets. Renforcée par le goût Ce n’est sans doute pas un hasard si représentant le self-made-man du merveilleux, le désir éperdu d’ad- le mythe du self-made-man apparaît comme un homme qui se sculpte lui- mirer et le besoin de rêver pour fuir d’abord aux États-Unis avant de même, le marteau et le burin à la la réalité, cette croyance repose sur répandre dans tous les pays, au point main, elle révèle aussi que, contrai- une connaissance mutilée, parce que le syntagme sera le plus souvent rement aux apparences, le fils de ses qu’elle contemple un effet en igno- repris sans être traduit, car il va de œuvres ne se crée pas à partir de rien, rant ses causes. La mise en scène pair avec l’American Dream, ce il possède un socle sur lequel il s’ap- finale du parcours spectaculaire fameux rêve américain qui hante puie, une matière première qu’il éclipse les conditions de possibilité l’imaginaire et invite à croire que tout transforme, à savoir un précieux bloc et les laisse en coulisses. En séparant homme peut faire fortune grâce à son de pierre, sans lequel il ne peut façon- l’effet de la cause, elle le fait apparaî- travail et son courage, à l’instar de ces ner son corps. Ainsi, le prétendu self- tre comme miraculeux ou comme pionniers immigrés, bâtisseurs d’em- pire à la force du poignet. Ce n’est pas non plus un hasard si l’on parle de rêve américain, puisque, si « on a dit que la terreur était le ressort du l’on en croit R. Wilkinson et K. Pickett, il est loin de se réaliser dans la réalité gouvernement despotique. Le vôtre vu que les États-Unis sont le pays ressemble-t-il donc au despotisme ? oui, occidental où en raison des inégali- comme le glaive qui brille dans les mains tés la mobilité sociale est la plus fai- ble, tandis qu’elle est la plus forte au des héros de la liberté ressemble à celui Danemark et dans les pays scandi- dont les satellites de la tyrannie sont armés. naves. que le despote gouverne par la terreur ses sujets abrutis, il a raison comme despote : un songe Creux L’idée d’un homme qui se serait fait domptez par la terreur les ennemis de la tout seul s’apparente de toute façon liberté, et vous aurez raison comme à un songe creux et sert bien souvent fondateurs de la république. Le d’alibi pour justifier l’immobilisme gouvernement de la révolution est le des sociétés, en le mettant au compte de la paresse, du manque d’initiative despotisme de la liberté contre la tyrannie. et de détermination des individus, La force n’est-elle faite que pour protéger le responsables en dernière instance de crime, et n’est-ce pas pour frapper les têtes leur sort par leur absence de volonté La revue de s’en sortir. Le self-made-man auto- orgueilleuses que la foudre est destinée ? » du projet proclamé est le prototype de l’homme robespierre, discours du 17 pluviôse an ii. janvier 2015 qui se prend pour Dieu et qui rêve les 14 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page15

surgi de lui-même. Ainsi la fascina- reuses qui lui font la courte échelle ou jours se défaire d’un héritage donné, tion tient lieu de raison, la pensée bouleversent des trajectoires qui d’habitudes sédimentées, de repré- magique de logique. Expliquer en effet paraissaient jouées d’avance, pour ne sentations ancrées et se refaire sous que le self-made-man s’est fait de lui- rien dire des institutions et des condi- l’effet de ce que Spinoza appelle les même, c’est tomber dans un cercle tions politiques et économiques, pro- affects, à savoir l’ensemble des modi- vicieux en se donnant par avance ce pices à la mobilité. fications et des changements phy- lui-même dont il s’agit précisément siques et mentaux qui ont une inci- de comprendre la formation et la des ProduCtions Croisées dence sur la puissance d’agir de constitution. Évoquer le génie, l’am- de L’histoire intime et de chacun en l’augmentant ou en la bition, la volonté, c’est toujours recou- L’histoire CoLLeCtive diminuant. En somme, une pensée rir à un deus ex machina, et s’appuyer C’est pourquoi il s’agit de compren- de la complexion récuse toute pos- sur des principes incompréhensibles dre les parcours singuliers, non pas ture héroïque en décentrant le self- pour rendre un parcours compréhen- comme des exceptions isolées mais made-man de lui-même pour resti- sible. Car d’où viennent le génie, l’am- comme des productions croisées de tuer le concours de causes intérieures bition et la volonté, évoqués comme l’histoire intime et de l’histoire col- et extérieures qui se combinent pour de mystérieux dons du ciel à l’appui lective. Autrement dit, il s’agit de les le produire en corps, comme tout un des trajectoires sociales fulgurantes ? ressaisir sous la forme d’une com- chacun, à la manière du cortège apol- L’appel au génie, à l’ambition ou la plexion, entendu comme un ensem- linien : volonté comme autant de qualités ble complexe de déterminations éco- « Le cortège passait et j’y cherchais innées n’est bien souvent que le nomiques, sociales, familiales et mon corps. masque glorieux sous lequel se dissi- affectives, qui se nouent dans un indi- Tous ceux qui survenaient et n’étaient doSSier > LibertÉ ! mule l’ignorance. Toute ambition, vidu en relation avec un milieu donné. pas moi-même, comme toute volonté, est ambition de Forgée à partir du préfixe con- et de Amenaient un à un les morceaux de quelque chose et présuppose donc ce la racine plexus tirée du verbe plec- moi-même. quelque chose à partir de quoi elle se tere (nouer, tisser) la complexion On me bâtit peu à peu, comme on constitue : un objet à posséder, un désigne l’assemblage des fils qui se élève une tour, modèle à imiter, un idéal à réaliser. Elle nouent et se dénouent pour consti- Les peuples s’entassaient et je parus n’est donc pas constituante, mais tuer le tissu d’une existence. moi-même constituée et ne saurait donc être invo- Que les liens avec son milieu soient Qu’ont formé tous les corps et les quée comme cause première explica- plus ou moins lâches ou resserrés, il choses humaines.» tive. Ainsi il est clair que le prétendu n’empêche qu’un individu est tou- Apollinaire, « Le cortège », Alcools n self-made-man ne s’est pas fait de rien jours un nœud de relations et que son mais présuppose autre chose que lui- parcours de transclasse n’est pas soli- même, une série d’antécédents dont taire mais solidaire d’une configura- il procède : une misère première, l’as- tion sociale historique et géogra- piration à une vie meilleure, des phique. S’il s’en détache, il n’en rompt *Chantal Jaquet est philosophe. Elle modèles alternatifs, des rencontres jamais totalement les fils, aussi dissi- est professeure à l’université Paris-1 professionnelles, amicales et amou- mulés soient-ils. Se faire, c’est tou- Panthéon-Sorbonne. (1953), Photo : Jos Uljee/Koninklijke Bibliotheek. Liberté, j’écris ton nom

La revue du projet

Fernand Léger, Fernand Paul Léger, Éluard, janvier 2015 15 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page16 s La Liberté dans L’histoire du PCf deux anciens dirigeants communistes proposent leur vision des rapports his- toriques entre pCF et liberté.

Révolution française, de la Commune, Après la signature du programme com- FRANCETTE LAZARD* de la République. La réunion du dra- mun, le PCF s’attend à un grand élan peau rouge et du drapeau tricolore va populaire. Surprise : c’est l’attentisme est toute une histoire ! donner ses couleurs originales à la qui prévaut. Le PCF stagne aux légis- L’histoire d’une ambition Résistance antinazie. latives de 1973. Georges Marchais pro- C’pour la libération humaine pose de faire sauter « les butoirs » et qui, à travers le temps, motive et Devenu en 1944/45 le premier parti de lance de grands débats politiques avec mobilise l’engagement communiste. France, le PCF va promouvoir une Le Défi démocratique, son livre-mani- L’histoire des structures qui la porte, conception innovante des libertés poli- feste. Cela ne va pas de soi. Nombre de de leurs contradictions et de leurs tiques en les conjuguant avec la communistes considèrent encore le errements, de leurs conquêtes, de conquête de solidarités sociales et de modèle soviétique comme la carte leurs effets dans la vie des individus droits nouveaux dans les entreprises. d’identité de l’avenir. La direction com- et des peuples. Il va, en même temps, continuer à se muniste décide de marquer les esprits référer au modèle soviétique qui fixe en affirmant une conception novatrice : Le milieu des années 70 est un bon son identité, son projet et son mode de la « charte des libertés » en 1975. Le PCF observatoire de cette histoire. Après fonctionnement. L’esquisse de se distancie – enfin ! – des atteintes per- 1968, deux ondes de choc vont cumu- réflexions nouvelles à la Libération sistantes aux libertés en URSS et ler leurs effets. En mai/juin 68 à Paris, l’espérance d’une société émancipée se manifeste avec une force inatten- À l’évidence vient le temps de la due dans la diversité de ses expressions. « En août à Prague, les tanks soviétiques conquête de libertés et de pouvoirs inédits brisent l’espoir d’un « socialisme à visage humain ». Le PCF condamne dans toutes les sphères de l’activité doSSier Moscou et prend conscience de l’im- humaine. » pératif d’une réflexion nouvelle sur la question des libertés. Son système de référence est ébranlé. demeure sans lendemain. La guerre condamne de façon claire et nette le Ni le modèle fondateur de la IIIe froide va tout figer. Le PCF se ferme aux stalinisme. En 1976, à la veille du XXIIe Internationale ni l’évocation du « Front changements de société qui s’accélè- congrès, Georges Marchais crée le choc populaire » ne vont lui donner les clés rent. Certes, son influence se maintient qu’il recherche. Il annonce en direct au de la période qui s’ouvre. élevée à travers l’engagement militant, journal télévisé l’abandon de la notion les luttes sociales ou anticoloniales. de « dictature du prolétariat ». À relire 1920, 1936 Mais il va être pris au dépourvu par le les textes d’alors, leur souffle nous par- Le retour sur ces deux moments essen- renouveau des aspirations libératrices vient encore. La vision proposée met tiels du parcours du PCF permet de des années 60. en relation les grands acquis des droits saisir la complexité de son rapport à et libertés existants et les nouvelles la question des libertés. Son élan Le ChoC de 1968 d’autant conquêtes qu’appelle le combat contre d’adhésion à l’Internationale propo- PLus rude l’exploitation et la domination. sée par Lénine trouve sa « force pro- Dans la jeune génération étudiante, pulsive » dans la révolution d’Octobre. comme dans un monde du travail en L’opposition stérile entre démocratie Tous les partis communistes vont pleine mutation, les débats d’idées se « formelle » et démocratie « réelle » sem- ensuite devoir se structurer dans le passionnent sur le type de société à ble bien dépassée. Le PCF se veut à l’of- moule unique des « principes du léni- construire. Le PCF définit et soutient fensive et ses initiatives sont perçues nisme » codifiés dès 1924 par Staline. les « justes » revendications, contri- comme telles. Déception : leurs effets L’efficacité révolutionnaire prime, les bue à nombre d’avancées sociales. Il politiques sont demeurés très limités. droits et libertés devront s’y subordon- trace la voie du seul débouché poli- En une période de bouleversements ner. Tragédie de l’histoire… Le jeune tique à ses yeux possible : la signature historiques majeurs, il serait bien sim- PCF va rapidement subir les effets de d’un programme commun de gou- pliste d’opposer les novations des la dérive stalinienne. Ce sera l’autori- vernement avec le PS. Son projet de années 70 et les crispations des années tarisme, l’esprit de secte, la stratégie « parti « communiste » est intemporel, 80 sur la pente du déclin. Il va falloir classe contre classe » qui va renvoyer déconnecté de la « perspective démo- encore près de 20 ans, de 1979 à 1994, dos à dos le fascisme et la social-démo- cratique ». Il se résume dans l’énoncé pour abandonner, une à une, les pierres cratie. Après la dramatique arrivée de des étapes et de leurs « lois », démo- angulaires du modèle « marxiste-léni- Hitler en 1933, l’Internationale com- cratie avancée, socialisme. Mais le niste » : socialisme scientifique, rôle muniste va chercher une stratégie d’al- modèle soviétique est défiguré à d’avant-garde de la classe ouvrière, cen- liances antifascistes. La toute jeune Prague et va bientôt, se glacer puis se tralisme démocratique. Il ne suffit pas direction du PCF, avec Maurice Thorez, décomposer. L’affrontement politique de se dégager d’un système doctrinaire va y contribuer avec audace et créati- sur la question des libertés devient pour disposer d’une visée révolution- La revue vité. Sa conception du « Front popu- crucial, au cœur d’une intense bataille naire ancrée dans la créativité démo- du projet laire » plonge ses racines dans le riche d’idées que cristallise la publication cratique du peuple… Le chantier est janvier 2015 terreau national des Lumières, de la de L’Archipel du goulag. encore devant nous ! 16 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:34 Page17

hors des Chemins baLisés toutes les fragilités. L’humanité risque À l’évidence vient le temps de la Dans ces décennies de turbulences d’y sombrer si de nouvelles frontières conquête de libertés et de pouvoirs et d’échecs, le PCF réussit à éviter un d’émancipation ne parviennent pas inédits dans toutes les sphères de l’ac- piège fatal à tant d’autres forces révo- à s’ouvrir. Aucun groupe humain, tivité humaine. La politique saura-t- lutionnaires : le repli de secte ou le aucun cercle d’experts, aucun parti elle se ressourcer en contribuant à renoncement social-démocrate. Il ni aucun prophète n’ont les clés de façonner les nouveaux leviers de perçoit les nouveaux défis de l’avenir. L’idée qu’il faut, dans l’ur- l’émancipation humaine ? Belle rai- l’époque sans cesser de contester la gence de la conjoncture politique, son de s’y engager ! n prétention hégémonique du capita- construire de nouveaux rapports des lisme. Il tente, en tâtonnant, à bas hommes entre eux et avec la nature bruit, de poursuivre la recherche commence à prendre vie partout. d’une alternative. L’enjeu est existen- Nous le savons, aucun grand mou- tiel. La question des libertés se pose vement historique n’a jamais été pré- *Francette Lazard a été membre du Comité central, à partir de 1969, désormais comme jamais. Les civili- conçu. Des pratiques politiques et puis du Bureau politique du PCF sations ont basculé dans l’ère de sociales sont à inventer, s’inventent. jusqu’en 1997. doSSier > LibertÉ !

HENRI MALBERG* capitalistes dominants, c’était clair. cutés sur une chaise électrique aux L’ennemi était là. Pour la France, ce États-Unis, Angela Davis… mais aussi que je dis est indiscutable. Le Parti Sacco et Vanzetti, Gabriel Péri, Henri istoriquement, le commu- communiste, en rapport avec ce qu’il Alleg, Maurice Audin, Henri Martin, nisme semble avoir un pro- y a de meilleur dans la tradition Georges Séguy et Henri Krasucki, qui h blème avec les libertés, la ouvrière et socialiste – je n’oublie pas m’a honoré de son amitié, jeunes démocratie, les droits de l’homme. Jaurès –, a tenu un très grand rôle dans résistants à seize ans, déportés, diri- en convenez-vous ? et comment l’ex- toutes les luttes pour la liberté. Un geants du Parti communiste et de la pliquez-vous ? rôle souvent moteur. Je pense à 1934, CGT. Et les milliers de militantes et Oui, j’en conviens. L’histoire est pleine au Front populaire, à la Résistance, à militants dont les noms figurent sur de contradictions. Nous aussi. Il y a la solidarité avec les peuples colo- les plaques des rues dans les villes de dans ces reproches une part de pro- niaux. Et souvent au prix du sang des France. Et les femmes héroïques, cès d’intention. C’est injuste et cela militants, de la guerre d’Espagne à la comme Marie-Claude Vaillant-Coutu - relève d’une guerre idéologique Résistance et au massacre de rier, Danielle Casanova, Olga Bancic, obsessionnelle. Mais il y a aussi dans Charonne. À Charonne, où je me trou- décapitée à Hambourg par les nazis. ce questionnement une part légitime vais en février 1962 lors du martyre Et tant d’autres. […] Quelles vies, qui correspond à une contradiction des personnes assassinées par la quels destins ! de l’histoire au XXe siècle. Et elle ne police de Papon, le sort de la guerre Des générations de jeunes sont concerne pas uniquement les com- d’Algérie a été scellé. Charonne fut venues au communisme dans ces munistes. pour le général de Gaulle le signal qu’il luttes pour la liberté. fallait arrêter la guerre, signer avec le On peut ajouter les rudes combats C’est-à-dire ? Nous combattions pour les libertés et un socialisme démocratique et avions du mal à répondre à la ques- Le parti communiste, en rapport avec ce tion « Pourquoi pas en Russie et à « l’Est ? » Nous le pensions aussi, et qu’il y a de meilleur dans la tradition ouvrière l’avons parfois dit. Notre espoir était que ces sociétés débouchent sur un et socialiste – je n’oublie pas jaurès –, a tenu socialisme démocratique. Cela n’a pas un très grand rôle dans toutes les luttes été le cas. C’est malheureux pour l’avenir du monde. pour la liberté. un rôle souvent moteur. » Mais qui peut nier que le commu- nisme a été tout au long du XXe siècle un formidable levier des peuples dans FLN et affronter définitivement les quo ti diens dans les entreprises, les leur lutte pour la liberté ? ultras d’Alger. J’ai le souvenir brûlant grèves étouffées, les militants syndi- Il suffit de citer l’antifascisme, les de cette manif, de l’entrée du métro caux sanctionnés. Et les manifesta- luttes de libération nationale et en et de mes sept camarades assassinés tions, les tracts, les affiches. Chaque général les luttes progressistes dans par la police, tous membres de la CGT fois qu’un risque pour la liberté s’est le monde. Sans l’apport direct des et presque tous militants du Parti présenté pour le pays, pour le monde idées communistes, sans la révolu- communiste. du travail, pour les libertés intellec- tion d’Octobre, sans la puissance de Si je regarde ma vie, de dix-sept ans à tuelles, le Parti communiste a l’Union soviétique, qu’on l’aime ou plus de trente, une bonne partie de répondu présent. Est-ce que cela a non, et sans le militantisme de mil- mon activité militante a été consacrée été linéaire, sans contradiction ? Non, lions de personnes encouragées par à soutenir les combats des peuples j’y viendrai. […] le communisme, rien de ce qui a vietnamiens et algériens. Et me revien- Des événements fondateurs de la pen- La revue bougé dans le monde n’aurait été pos- nent des noms qui résonnent, comme sée communiste sur les libertés et la du projet sible. Pour les dirigeants des pays Nelson Mandela, les Rosenberg exé- démocratie se sont produits au sortir s janvier 2015 17 e PCF, PCF, a été membre du n Paris, PCF, 1987. Paris, PCF, Henri Malberg *Henri Comité central à partir de 1972 et secrétaire de la fédération de Paris 1995. jusqu’en La liberté guide nos pas, Le parti de la liberté pour les République. République. Le monde impérialiste, oppresseur et oppresseur impérialiste, monde Le agressif, se prévalait de défendre les ». « En le monde libre libertés, d’être historique- socialiste, monde le face, humaine, libération de porteur ment d’un défi le relever à pas parvenait ne démocratique. socialisme Nous tentionsles entre distinguant de en contradiction résoudre cette libertés formelles de la démocratie sous le capitalisme et sous sociales et les économiques réelles libertés perdre fait a nous Cela socialisme. le de vue que les », libertés réelles « dites diteslibertés les et » « melles for- for- sociales, et économiques libertés ment la même question. En vérité, cette séparation était artificielle et […] sans portée réelle. L’histoire a tranché. Il n’y a pas de société nouvelle sans avancée de la D’ailleurs, démocratie. la de et liberté la conquête de nouvelles libertés et d’une démocratie plus réelle est au cœur de la construction d’une nou- velle société. […]également Les communistessavent et cela comprennent les démocratie, la libertés, les combien droits de la personne, le pluralisme, liberté la médias, des l’indépendance et l’information à droit le presse, la de travailleurs des droits les culture, la à dans sont les un entreprises combat l’épanouisse- pour objectif un et vital d’exception pas a n’y Il humain. ment possible qui tienne durablement au fait, de qui, heureux avenir d’un nom société d’une force La jamais. vient ne vie une à durée, la dans tient, nouvelle contradic- débats aux libre, politique l’intervention de recherche la à toires, ville la dans citoyens des permanente entreprises. les dans travailleurs des et inventer. à et faire à beaucoup reste Il VI une pour du combat le sens C’est Liberté, justice, paix, Conférence Les communistes et la liberté, Liberté, Grasset, 1975. PCF, 1975 (Discours à PCF, l’occasion de Étienne Fajon, Georges Marchais, André Lajoinie, Déclaration des libertés, Georges Marchais, Pierre Juquin, 1976. nationale, 1987. femmes, l’année internationale des femmes). 1977. • • • • • • jean-jacques rousseau, Lettres écrites de la , montagne 1763-1764. « un simulacre de liberté endurer fait plus patiemment la servitude. » rendu à Moscou dans l’affaire Siniavski l’affaire dans Moscou à rendu ainsi balaie je Lorsque […] » Daniel. et des idées, et le mouvement l’histoire je me ce disque qu’uneEst-ce terriblecommunistes. les injustice frappe hésita- sans linéaire, est mouvement tion, débats internes avons ou errementsNous non. que sûr Bien ? divers poli- tâtonné, parfois renoncé, puis parti nous Aucun […] repartis. sommes la poussé autant n’a à tique, gauche, l’his- sur critique historique réflexion que l’avenir, sur et débat histoire, son ce toire, J’accepte communiste. Parti le comme socialistes camarades des avec Chiche. droite. de personnes des avec mais si regard sur votre l’histoire est exact, pourquoi ce doute sur le rap- port du Parti communiste avec liberté la ? Pourquoi cette méfiance qui vous poursuit ? D’abord, réponse facile, on ne nous regards de peu et cadeau, de pas fait objectifs sont portés sur nous. […] Le insuffisante. est réponse ma Mais liberté, la à communistes des rapport à la démocratie et a pendant été des traversé l’Homme aux droits de dizaines d’années par la contradic- tion entre notre combat déterminé capita- monde le dans liberté la pour liste et ce qui se passait à et Moscou […] de l’Est. en Europe . octobre 1934. Le Défi congrès de 1968 e » s, qui anti- qui s, l’Humanité « Le socialisme et la liberté », Liberté capitaliste et liberté Le défi démocratique, Grasset, Le marxisme et la liberté, Paris, Vivre libre Vivre Projet de déclaration des libertés

La brochure populaire, . En 1976, le XXII le 1976, En . il n’y a pas de

démocratie. liberté et de la « société nouvelle Charles Rappoport, Charles Rappoport, René Maublanc, Vivre libres ! Georges Marchais, La brochure populaire, septembre 1934 ouvrière, Éditions sociales, 1945. soumis à la discussion des Français, L ’Humanité, 1973. 1975. Le pCF et LeS LibertÉS À traverS queLqueS pubLiCationS queLqueS traverS À etpCF LibertÉS Le LeS • • • • • sans avancée de la de la guerre froide dans les années 1960 années les dans froide guerre la de événements les furent Ce […] 1970. et aspi- les et France en 1968 Mai-Juin de étu- les chez traduisaient qu’ils rations ouvrière. classe la de sein au et diants l’Union par l’écrasement ensuite Vint en Prague de Printemps du soviétique même la de août en Tchécoslovaquie français communiste Le Parti année. mouve- profond un lors dès entreprit ment de à remise jour Ce théorique. le Ainsi, créativité. de bouffée une fut Manifeste de Champigny du idéologique le tournant confirma En 1973 parut un communiste. Parti livre de Georges Marchais, démocratique doSSier Elle publiait un texte de Louis Aragon Louis de texte un publiait Elle ne Je « : déclarait Il événement. fit qui puis imaginer qu’un verdict le indifférence communiste avec considère progressistes de la gauche en France. en gauche la de progressistes l’abo- de revendication la bien exemple, Par figurait y mort de peine la de lition et Mitterrand par abolition son avant d’ob- minimum un […] Avec Badinter. noter de convient il politique, jectivité un défriché ont années vingt ces que pour projet communiste nouveau la en rappelle me Je France. la et gauche février 1966 une une de du Parti communiste se couleurs tint sous aux le socialisme un Pour « titre excep- livre petit un et », France la de publié, fut tionnel positions les ans vingt de plus de cipait s 18 La revue du projet janvier 2015 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page18 14:35 27/12/14 RdP-43_V07_RDP RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page19

Liberté, engagement et foi L’expression de la liberté, l’engagement qui permet de s’épanouir passent par des voies diverses. nous en avons discuté avec deux jeunes engagés à la jeunesse ouvrière chrétienne (joC) et au mouvement rural de jeunesse chrétienne (mrjC). ENTRETIEN AVEC NADÈGE CRESSON ET tion papale qui va à l’encontre de ce pour faire écho à nos vies, et libre à cha- BRIEUC GUINARD* qu’on pense ? Vivre en société, c’est for- cun, d’y entendre et d’y voir ce qu’il cément perdre un peu de ta liberté, mais veut. Après l’accueil de la vie de cha- il est illusoire de croire qu’on serait libre cun (le « voir »), le « juger » doit nous Les jeunes ont-ils une liberté de en dehors ! L’engagement personnel permettre de prendre de la hauteur, du choix ? rejoint l’engagement collectif. Tu ne recul par rapport aux événements ou b.g. : Oui et non, il ne doit pas s’agir seu- peux pas être libre, si les personnes à partages. Ensuite, nous sommes invi- lement de choisir ses chefs et ses côté de toi ne le sont pas. Dans l’enga- tés à agir, non pas aveuglément, mais chaînes. Il n’y a pas de liberté absolue, gement, il y a un choix, un pari : c’est la en connaissance de cause, selon nos la question doit être posée concrète- manière concrète d’exprimer sa liberté. propres choix. Cependant, certaines ment. L’engagement suppose une attitude pratiques religieuses peuvent profiter n.C. : Il nous faut faire prendre d’humilité, celle de reconnaître qu’il y de la faiblesse des personnes pour les doSSier > LibertÉ ! conscience aux jeunes des possibilités, a d’autres projets pour l’humanité que endoctriner et, dans ce cas, les priver c’est la pratique de la JOC et de ce que le sien. Le MRJC est sensible au de leur liberté de choix, c’est le cas des nous appelons la « révision de vie » : « doute », on n’est pas le seul à détenir évangélistes. montrer qu’on peut agir sur le monde, la vérité, il faut savoir gérer les désac- b.g. : Le lien entre liberté et religion s’ap- dans nos différents lieux de vie, la cords et les divergences, savoir donner pelle la laïcité. Il ne doit pas y avoir de famille, les amis, le quartier, l’école, le le temps à la discussion, sans passer loi catholique avant celle de la société boulot… Parce que pour choisir, il faut tout de suite par un vote. Il s’agit de faire démocratiquement établie, pas de cha- connaître, comprendre. Si on ne prend le meilleur choix, en fonction des infor- ria. Séparer le temporel du spirituel et pas du recul, on aura tendance à bais- mations que tu as, et ainsi de ne pas le laisser la liberté de conscience. Le pro- ser les bras, à se dire que c’est cuit. La regretter. L’éducation populaire est fon- blème délicat, c’est de bien délimiter liberté de choix est liée à la possibilité damentale pour cela et elle invite for- l’expression dans la sphère publique. d’agir. Donc choisir c’est s’engager, c’est tement à une action collective, à du par- Les dérives actuelles de certains mou- aussi renoncer à quelque chose d’au- tage. Plus on en sait, plus on est libre. vements politiques, qui se servent des tre. Selon d’où l’on vient, nous n’avons Le mandat, délégué par le collectif à des religions, provoquent une renaissance pas la même liberté, en réalité ou dans individus, à condition que la déléga- passagère de l’anticléricalisme. Il s’agit notre esprit, certaines portes ou choix tion soit contrôlée, concilie la liberté et des deux côtés, dans une société glo- sont ou nous semblent fermés. La révi- le collectif. balement de défiance, de diviser pour sion de vie va ouvrir le choix des possi- mieux régner par un renfermement bles, nous questionner, sur des choses sécurisant sur des gens « purs ». non envisagées. Par l’interaction avec « dans Pourtant, les questions de classe tra- les copains, nous allons être question- versent toutes les religions, comme elles nés, encouragés, conseillés. Là existe l’engagement, il y a traversent l’école, la prison, etc. La reli- une vraie liberté de choix (d’orienta- un choix, un pari : gion porte en elle les valeurs d’éman- tion, d’engagement, de métier, de vie…) cipation et d’aliénation, comme le reste, c’est la manière comme la vie politique ou économique. Liberté et engagement sont-ils com- S’agit-il de te rendre libre ou de te met- patibles, contradictoires ? concrète tre un chef qui pense à ta place ? La n.C. : Les deux. Pour exercer sa liberté d’exprimer sa théologie de la libération montre qu’on d’agir, de penser, il faut bien trouver un peut changer les rapports entre êtres lieu, et l’engagement est ce lieu, on liberté. » humains, aussi avec la Bible, et de façon n’exerce pas notre liberté, la majorité collective. Il y a donc plusieurs inter- du temps, seul. Cependant, des enga- prétations d’un même écrit. Il ne faut gements (politiques, associatifs, syndi- Peut-on, doit-on associer liberté et tomber ni dans le relativisme pur, ni caux) peuvent nous conduire à une cer- religion ? dans la certitude qu’on a la vérité. On taine rigidité, nous enfermer dans une n.C. : À la JOC, il y a des jeunes qui arri- essaie de se rapprocher le plus possi- manière de penser, ou d’agir, par les vent avec des niveaux de croyance très ble de la vérité, c’est une conviction, pratiques accumulées au fil du temps. différents, certains sont athées, d’au- non une certitude. Les religions peu- D’où l’importance de la relecture de ses tres envisagent d’entrer dans les ordres, vent aider à dire le sens. Il y a le besoin engagements, d’avoir un lieu et un on a tous les intermédiaires, il faut donc de croire et le besoin de répondre à la moment pour en parler, se faire inter- accueillir tous les jeunes avec leurs question : pourquoi je suis là et quel peller, là encore, la révision de vie, que croyances, la liberté religieuse est donc sens cela a-t-il ? n ce soit à la JOC ou en Action catholique nécessaire à la base. La religion catho- ouvrière (ACO), nous y aide par ses pra- lique laisse place à l’interprétation des *Nadège Cresson est ancienne tiques et son respect des convictions Écritures, au questionnement, celles- responsable de la JOC. de chacun. ci ne sont pas prises comme telles, à la Brieuc Guinard est membre du conseil d’administration national du b.g. : La question se pose pour tous. Par lettre. Là encore, à la JOC, la religion MRJC. La revue exemple, avec le baptême : si on est sert de levier pour être encore plus libre, du projet baptisé, que faire face à une déclara- les textes d’Évangiles sont interrogés Propos recueillis par Pierre Crépel janvier 2015 19 s RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page20

Liberté et éConomie Les capitalistes les plus durs se disent libéraux, il y aurait alors deux camps : le leur défendrait la liberté économique et politique ; l’autre serait étatique, diri- giste et ennemi de la liberté. il est temps de mettre un terme à cet enfumage et de cesser d’opposer liberté et égalité.

ENTRETIEN AVEC JEAN-PIERRE POTIER seconde guerre mondiale que ces esquivée ou contournée. L’égalité réelle ET RIMA HAWI* transferts État-industrie ont explosé : est abandonnée au profit d’une vague les « libéraux » ont un double langage égalité des chances ; l’opposition effi- incohérent, ils demandent « moins cacité/équité devient le point central que signifie donc « libéral » et « libé- d’État » (pour les pauvres) et exigent de l’analyse « libérale » ; chaque indi- ralisme » en économie selon les pays, des subventions d’État pour eux, mul- vidu se comporte comme un homo les traditions ? tipliant les organismes de contrainte œconomicus et juge les inégalités du j.P.P. : On peut distinguer une dizaine (UE, FMI, OMC, etc.). Ils sont milita- point de vue de sa situation sociale. de « libéralismes » différents, dont les ristes, alors que ceux du XIXe siècle vic- j.P.P. : Hayek s’adressait aux intellec- relations à la liberté, au sens usuel du torien étaient en général pacifistes. En tuels, pas au peuple ; il y avait un sou- mot, sont parfois à l’opposé les unes raison des dépenses militaires et de la bassement philosophique à ses théo- des autres. Pour Jean-Baptiste Say, recherche publique, les pays capita- ries. Friedman, lui, passait à la sorte de libéral pur à son époque (il listes occidentaux ne sauraient réduire télévision, visait les masses populaires, meurt en 1832), la question sociale l’État au « minimum », contrairement conseillait les gouvernements. Sur n’existe pas. Au contraire, pour son dis- à leur propagande. le plan économique, il y a des conver- ciple, Adolphe Blanqui (le frère du gences et des divergences. révolutionnaire Auguste, aux idées très on parle beaucoup de friedrich von Conver gence sur l’impôt négatif, pour différentes), il faut la prendre en hayek (1899-1992) et de milton supprimer les aides, contre « l’État- compte, ce qui ne l’empêche pas d’être friedman (1912-2006)... Providence », c’est-à-dire l’État social. très anti-étatique, de condamner j.P.P. : Hayek est « libéral » en écono- Il y a des différences entre eux notam- « l’État-ulcère » : c’est un libéral plus mie, mais non en politique ; il a cau- ment sur la monnaie : Friedman veut doSSier « social ». Dans le dernier quart du XIXe tionné des régimes autoritaires, du supprimer les banques centrales et les siècle et avant 1914, des Britanniques moment que ceux-ci soutenaient la remplacer par des petits comités avec comme Alfred Marshall ou Léonard liberté économique telle qu’il l’enten- régulation bancaire ; Hayek plaide Hobhouse se sont réclamés d’un dait. Son système idéal, alternatif à la pour des monnaies privées en concur- « nouveau libéralisme » : pour eux, la démocratie, est la « démarchie », avec rence, pour la « dénationalisation de propriété ne doit pas être sacralisée ; des grands électeurs, les partis poli- la monnaie ». D’ailleurs, ils se détes- taient : à Chicago, ils n’ont jamais été dans le même département de l’uni- on peut distinguer une dizaine de versité, certes, ils se retrouvaient à la « Société du Mont Pèlerin. “libéralismes” différents, dont les relations à on nous dit que john rawls (1921- la liberté, au sens usuel du mot, sont parfois 2002), philosophe américain, dans sa à l’opposé les unes des autres. » Théorie de la Justice, aurait réussi à réconcilier liberté et égalité. r.h. : Rawls pense qu’il y a consensus celui qui réussit est aussi redevable à tiques n’étant pas autorisés pour toutes sur la primauté de la liberté politique. la société, donc on ne doit pas pro- les instances politiques. Mais il est vrai Mais, en particulier dans son dernier mouvoir la loi de la jungle ; mais ils qu’il a une certaine réflexion sur la ouvrage, il reconnaît que le capitalisme sont anti-égalitaristes, pour la liberté liberté, purement « individuelle » et autorise des inégalités très importantes d’entreprendre, contre le socialisme. non collective chez lui. Margaret en matière de propriété réelle (celle Sur la fiscalité, Adam Smith et Jean- Thatcher et Pinochet se disaient « libé- des moyens de production et des res- Baptiste Say se prononçaient tous deux raux », d’autres aussi, au milieu du XXe sources naturelles), si bien que le pour un impôt progressif sur le revenu. siècle en Europe continentale, qui ont contrôle de l’économie et de l’essen- Les ultra-libéraux d’aujourd’hui ne accepté des régimes sans liberté poli- tiel de la vie politique reste entre veulent pas le croire et préconisent tique. quelques mains. La liberté politique l’impôt proportionnel et non progres- r.h. : Les capitalistes associent, quand est donc impossible sans une réduc- sif. La plupart des libéraux, au XVIIIe ça les arrange, libertés économique et tion des inégalités. siècle et dans la première moitié du politique, mais, la plupart du temps, Cependant, l’interprétation de ces XIXe, étaient hostiles aux impôts indi- c’est l’inverse : la pensée dite libérale principes diffère suivant les commen- rects, ou au moins réservés, parce que – contractualistes et utilitaristes – sur tateurs. Certains les voient coïncider ceux-ci sont anti-redistributifs ; les questions de justice montre une avec le capitalisme de « l’État-provi- aujourd’hui, leurs soi-disant disciples évolution vers la séparation entre dence », tandis que, pour d’autres, ils augmentent la part des impôts indi- sphères économique, politique et s’accordent avec le capitalisme du rects. Au XIXe siècle, les libéraux étaient sociale. Comme la démocratie poli- « laissez-faire ». Les différences por- La revue à peu près cohérents et revendiquaient tique pose de sérieux problèmes d’in- tent sur son « principe de différence » : du projet peu l’aide de l’État aux entreprises pri- compatibilité avec le système capita- les inégalités économiques et sociales janvier 2015 vées. C’est surtout à partir de la liste, cette tension est en général ne sont acceptables que si elles amé- 20 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page21

liorent la situation des plus défavori- sés de la société. C’est ambigu : d’un point de vue pratique, ce principe pourrait servir de justification à des « La liberté sans ordre politiques aussi bien social-démo- est un libertinage qui attire crates que « néolibérales ». Car, d’un côté, le principe de différence peut être le despotisme. » interprété comme la théorisation des Fénelon, Examen de la conscience d’un roi, Supplément. mesures sociales des gouvernements démocratiques, telle l’assurance d’un revenu minimum garanti. D’un autre côté, un Hayek se dit en accord avec pris sur le plan économique. Les réfor- qu’économiques. Il n’est pas du tout Rawls : pour lui, le marché peut davan- mateurs croyaient là-bas à une évolu- démontré que les réformes envisagées tage satisfaire ce principe que n’im- tion graduelle. On peut citer le cas d’Ota étaient inefficaces. porte quelle intervention délibérée de Sik (1919-2004), en Tchécoslovaquie ; l’État, les inégalités économiques ont il se passait aussi des choses intéres- Comment, sur le moyen et le long des conséquences sociales et écono- santes en Yougoslavie dans les années terme, promouvoir la liberté de tous miques positives sur les plus défavo- 1970, avec le développement de l’au- et être opérationnel en économie ? doSSier > LibertÉ ! risés, elles sont productives. togestion, avec les « unités de base du j.P.P. : Les économies sont de plus en travail associé », etc. L’idée qu’on pou- plus imbriquées et les solutions L’idée (l’illusion ?) que l’économie de vait associer intelligemment plan et « nationales » peu convaincantes. Il marché et de concurrence, c’était le marché dans le cadre d’une vie poli- va apparaître de plus en plus que la « monde libre », n’a-t-elle pas été tique plus démocratique n’était pas du vision actuelle au jour le jour est dérai- entretenue par les atteintes aux tout absente dans les pays de l’Est, y sonnable. Pensons qu’on a disquali- libertés dans les pays de l’est ? compris chez certains de leurs plus fié toute idée de planification, de pro- j.P.P. : Certes, mais il ne faut pas en res- hauts dirigeants. Malheureusement, jection dans l’avenir, que le ter là. En 1962, on pouvait espérer avec les évolutions ont été freinées vers Commissariat général au Plan a été Khrouchtchev que la situation évolue- 1964-65, puis avec la répression contre supprimé en France ! Quelle vision à rait dans le bon sens à l’Est. Il y a eu le Printemps de Prague et l’invasion de 20-30 ans reste-t-il ? Même dans le alors des réformes intéressantes en la Tchécoslovaquie en 1968. L’échec monde anglo-saxon, ces préoccupa- URSS et dans les pays liés à elle, y com- tient à des raisons plus politiques tions apparaissent. Le bouillonnement qui a lieu chez les hétérodoxes de toutes sortes, en général non marxistes, est peut-être brouillon, mais il apporte des idées intéressantes dans lesquelles il faut faire le tri. C’est le cas de la réflexion sur « les com- muns », il faudrait insérer cela dans un projet politique, en cette période de crise des partis. Le prix Nobel d’éco- nomie attribué à Elinor Ostrom en 2009 en témoigne (voir son livre, Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle approche des ressources naturelles, De Boeck, 2014). Donc, liberté réelle et économie efficace ne sont pas contradictoires. r.h. : Il faut d’abord cesser d’opposer continuellement liberté et égalité. Celle-ci n’est pas un fantasme, mais d’abord une volonté politique. Et, dans ce sens, la question des communs est essentielle car la promotion de l’éga- lité passe par la question de l’appro- priation sociale, économique, poli- tique, culturelle… n

*Jean-Pierre Potier est professeur à l’université Lyon-2. Rima Hawi est maître de conférences à l’université de Versailles St-Quentin-en-Yvelines. La revue Ils sont historiens de la pensée du projet économique. janvier 2015 21 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page22

La Liberté et L’entrePrise développer la démocratie à tous les niveaux dans l’entreprise est un gage de développement des libertés.

ENTRETIEN AVEC BERNARD THIBAULT* pour des perspectives de long terme, nité de son contrat de travail, cela rend ce qui contrarie la recherche d’une ren- légitime d’intervenir sur tout ce qui e patronat et les gouvernements tabilité financière immédiate pour le représente une menace potentielle sur nous disent : faire tourner une seul propriétaire de l’entreprise. Plutôt lui. Il y a encore du chemin à faire pour L entreprise, c’est compliqué, le que d’accepter la pluralité des salarié « lambda » n’a pas les capaci- réponses pour intervenir sur les élé- tés pour en mesurer les enjeux ; donc ments à l’origine de la crise, on nous l’associer à la gestion et aux décisions, oppose une soi-disant incompétence. c’est inefficacité et perte de temps. C’est savoureux lorsqu’on constate les Les libertés qu’en penses-tu ? résultats des gestions conduites par « L’affirmation selon laquelle les travail- ceux qu’on nous présente comme « les de quelques-uns leurs seraient désintéressés, voire igno- élites » ! rants des principaux facteurs qui doivent être influent positivement ou négativement d’après eux, les syndicats et, plus limitées lorsque sur l’avenir de l’entreprise, et donc sur généralement, de nombreux salariés leur propre avenir, est bien sûr falla- veulent se mêler de ce qui ne les celles du plus grand cieuse. Il faut avoir à l’esprit que la regarde pas et entravent le bon fonc- nombre s’en notion d’entreprise recouvre des réa- tionnement de l’entreprise, il faut lités multiples. De la PME artisanale à donc restreindre leurs droits et liber- trouvent la multinationale on peut relever tés, « simplifier » le code du travail, autant d’attitudes variées sur la place « encadrer » le droit de grève, etc. La menacées. » qu’occupent les salariés dans l’élabo- liberté devrait donc s’arrêter à la ration des choix économiques et stra- doSSier porte de l’entreprise ? tégiques qui sont retenus. Très sou- Il n’y a pas d’usines sans ouvriers, de vent les vrais producteurs ont une magasins sans vendeurs, de cabinets garantir l’un des principes du préam- expertise bien supérieure du fait de d’architectes sans dessinateurs... ; le bule de la constitution de 1946 : « Tout leur savoir-faire et de leur expérience syndicat est là pour assurer la défense travailleur participe, par l’intermé- dans l’entreprise, comparée à celle de de leurs intérêts matériels, affirmer diaire de ses délégués, à la détermina- manageur « de passage ». Ce qui est que l’entreprise c’est aussi ceux qui y tion collective des conditions de tra- dérangeant pour nos décideurs, c’est travaillent. L’actionnaire sans ses sala- vail ainsi qu’à la gestion des que justement les travailleurs aspirent riés détient des actions de valeur nulle. entreprises ». Le syndicat a aussi pour à participer à la décision avec leur pro- Dès lors que son propre avenir et celui vocation d’intervenir dans les débats pre patrimoine de connaissances et de sa famille dépendent de la péren- qui dessinent la société à partir de ses

d’où vient l’expression « Le renard libre dans le poulailler libre » ? La première attestation connue semble être due à un penseur autrichien, acteur ardent des révolutions de 1848, Ferdinand Kürnberger (1821-1879). dans l’article « Freiheit, die ich meine » [La liberté, telle que je l’entends] qu’il publie dans Neues Wiener Tagblatt le 3 mars 1870, il répond au programme du Hongrois modéré józsef eötvös (1813-1871) « une Église libre dans un État libre ». À ses yeux, cette Église libre dans un État libre, c’est « der freie Fuchs im freien Hühnerhof » [le renard libre dans le poulailler libre] et « der freie Hecht im freien Karpfenteich » [le brochet libre dans l’étang aux carpes libre]. ensuite, l’expression a été reprise dans le champ économique par de nombreux auteurs puis, dans le monde entier, par les révolutionnaires pour La revue désigner le capitalisme. du projet janvier 2015 22 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page23

propres valeurs et de ses revendica- tout simplement antidémocratique ! La liberté des producteurs (salariés tions. Il n’y a rien qui a priori ne La démocratie ça ne peut pas être les ou non) s’oppose-t-elle à celle des « regarde pas » le syndicat. libertés pour « l’exploiteur » et les consommateurs ? devoirs pour « l’exploité » ! C’est les Acceptons l’évidence : les producteurs La liberté, est-ce aussi celle de se droits et les devoirs pour tous. sont aussi des consommateurs et mettre à son compte, de créer sa beaucoup de consommateurs sont à petite entreprise ? est-ce poser les depuis trente ans que les capitalistes leur tour producteurs, même s’ils le conditions pour qu’une grande partie clament « moins d’état ! » et se pro- sont sous différents statuts. C’est donc du travail se passe dans l’économie clament « libéraux », y a-t-il, dans une division largement artificielle que sociale et solidaire (coopératives, l’entreprise, plus ou moins d’état, de vouloir découper le citoyen en mutuelles, etc.) ? Y a-t-il là une place plus ou moins de liberté ? tranches distinctes, voire d’opposer nouvelle pour la liberté, alternative à Il me semble que, plus qu’elles ne les deux facettes d’un même individu. l’étatisme ? contestent de la présence de « l’État », Il n’y a jamais eu et il n’y aura sans les entreprises s’efforcent d’en déna- on a surtout l’impression qu’on ne doute jamais un seul et unique profil turer la fonction, voire d’en affaiblir fait que se défendre. Peut-on du « producteur ». On sème parfois des les capacités. Il s’agit pour elles, d’une conquérir de nouvelles libertés dans illusions en laissant entendre qu’on part de mettre l’État, autant que faire l’entreprise ? peut s’extraire du contexte et du sys- se peut, au service des intérêts de La capacité de se défendre est une pre- tème économique général. Je pense leurs propriétaires. Politique fiscale, mière condition pour envisager l’of- doSSier > LibertÉ ! entre autres aux « auto-entrepreneurs » d’éducation, d’aménagement du ter- fensive et la conquête de droits nou- qui souvent deviennent des « salariés déguisés ». Dans le même temps il y a en permanence l’aspiration à se pré- munir de la gestion exclusivement capitaliste où la recherche de profit est « La démocratie ça ne peut pas être le moteur de l’activité. Les coopéra- les libertés pour “l’exploiteur” et les devoirs tives, les mutuelles ou les réseaux « d’économie solidaire » témoignent pour “l’exploité” ! C’est les droits de cette volonté. Ils rencontrent de et les devoirs pour tous. » nombreux obstacles et sont l’objet de convoitises. Ils contrarient la pensée dominante. ritoire… tout doit alors être orienté veaux. Sans résistance, pas d’espoir de délocalisations, déplacements de en fonction des besoins de l’entre- jours meilleurs. Les droits sociaux et capitaux vers les paradis fiscaux, prise, puisque c’est « le centre de la les libertés évoluent d’un même pas. sous-traitances déloyales, corrup- société », d’autre part, pour eux, il faut En bien ou en mal, leurs mouvements tions, traités internationaux dés- confiner l’État dans un rôle de « pom- sont parallèles et complémentaires. Les équilibrés : cela doit-il être considéré pier social » : à lui d’assumer les reculs sociaux affaiblissent la démo- comme des « libertés » ou comme du conséquences sociales en organisant cratie. Le développement de la démo- « libertinage » pour le Capital ? la solidarité entre les individus. Cela cratie est susceptible de générer du pro- Les libertés de quelques-uns doivent n’est pas sans répercussion sur la grès social. Aux défis complexes et être limitées lorsque celles du plus représentation politique qui laisse nombreux doivent répondre de nou- velles libertés, de nouveaux droits per- mettant aux individus et aux collectifs de construire des réponses alternatives. « très souvent les vrais producteurs Il n’y aura pas de sauveur suprême ! ont une expertise bien supérieure du fait que proposes-tu à moyen et long de leur savoir-faire et de leur expérience terme pour allier communisme et liberté dans le monde du travail, afin dans l’entreprise, comparée à celle notamment de ne pas faire comme dans les pays de l’est d’autrefois ? de manageur “de passage”. » Tel qu’il a été longtemps pratiqué, le communisme a pâti des atteintes aux libertés. Être capable de défendre une nouvelle articulation dans la conju- grand nombre s’en trouvent mena- entendre, dans sa majorité, une cer- gaison de la recherche de l’intérêt cées. Les libertés accrues octroyées au taine acceptation d’un « État pom- général, par le développement de la capital et à ses capacités de mouve- pier » pour réparer les plaies multi- démocratie à tous les niveaux, me ment sans contrôle ont comme consé- ples provoquées par la gestion des paraît le défi le plus essentiel. n quence de menacer la vie et l’environ- entreprises. Lieu de création de nement de millions de personnes. La richesse, producteur de biens et de richesse de quelques dizaines de mil- services, il est inacceptable de priver *Bernard Thibault est ancien liers s’accroît pendant que les droits le citoyen de toute approche critique secrétaire général de la CGT. Il est administrateur du Bureau humains les plus fondamentaux sont sur ce qui se décide dans ces lieux qui international du travail (BIT). La revue bafoués pour des centaines de millions façonnent la société. En ce sens l’État du projet d’autres individus et leur famille. C’est ne respecte pas le citoyen. Propos recueillis par Pierre Crépel janvier 2015 23 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page24

queL usage PoLitique de La Liberté de Consommer ? Le contre-projet d’une liberté de consommer soucieuse du bien commun ne peut se substituer entièrement au débat politique général et ouvert sur l’orga- nisation de la société et sur le pouvoir.

PAR GABRIEL MONTRIEUX* citoyen est ainsi pensé comme acteur ment même de la politique, à savoir principal des formes de résistances la confrontation et la délibération, ordinaires, où l’objectif n’est pas de dévoilant une manière de penser la lors que les modèles dits com- lutter pour le pouvoir, mais contre le construction du politique, confinée munistes ont été critiqués pouvoir du capitalisme marchand et à la sphère privée et affranchie de tout a pour leurs restrictions en de son arsenal de marketing. La ques- débat d’idées. Dès lors, de quelle poli- matière de consommation, que les tion ne serait plus de changer le tisation parle-t-on ? Ces espaces de régimes à visée socialiste actuels, par monde par le haut et d’imposer règles mise en débat et de discussion exis- exemple en Amérique latine, sont et restrictions, mais bien de donner accusés (à tort ou à raison) d’impo- aux peuples les outils pour construire, ser à leurs populations un régime éco- librement, les fondements de la résis- il existe une nomique contraignant, la liberté indi- tance politique. L’acte d’achat servi- « viduelle de consommer est souvent rait de bulletin de vote amélioré, à formidable présentée comme une des plus effet direct sur l’organisation écono- grandes forces de légitimation et d’ex- mique. C’est une formulation ambi- opportunité, pour tension du capitalisme néolibéral. tieuse d’un usage politique de la liberté un capitalisme de consommer : pénétrer le champ de un modèLe de Changement l’économie conventionnelle pour toujours plus de soCiété « Par Le bas » convertir une liberté individuelle Cependant, se développe aussi un consumériste (individualiste) en une vorace, d’étendre la doSSier modèle de changement de société liberté individuelle soucieuse du bien marchandisation « par le bas », reprenant à son compte commun. Cette conception de l’ac- la liberté de consommer comme arme tion politique, proposant ainsi un des biens et et force de proposition d’un contre- retournement par une fusion entre services par la projet. Prenant acte de l’apparente intérêts individuels et intérêts collec- incapacité actuelle des pouvoirs poli- tifs, a de quoi séduire. marchandisation de tiques à imposer des règles de fonc- tionnement aux marchés, cette Les risques du “l’éthique”. » approche célèbre la figure du Consom’aCteur « consom’acteur », responsable, dont Pour autant, trois principales critiques tent néanmoins, mais à l’échelle peuvent être adressées à cet usage locale : cafés ou projections débats, politique – se voulant subversif – de réunions publiques, etc. Ils sont orga- la liberté de consommer. nisés par et pour certains groupes « atomisé et Premièrement – liberté individuelle « initiés », plutôt dans de micro- individualisé, l’acte oblige – les consommations éthiques espaces sociaux. Les notions de biens s’apparentent à un ensemble dispa- communs ou de responsabilités indi- de consommation rate où chacun compose en fonction viduelles envers le collectif risquent de ses habitudes et préoccupations. de se convertir en une norme morale est bien souvent De l’écologie au social en passant par floue et parfois contradictoire. La for- privé du fondement le patriotisme économique ou les mulation par certains groupes sociaux enjeux sanitaires, il est parfaitement d’un ensemble d’intérêt collectif même de la possible de voir dans cette pluralité devant s’imposer à tous, sans qu’une politique, à savoir la non coordonnée une richesse intrin- mise en débat soit opérée, pose alors sèque, ou au contraire un risque de un très sévère problème de légitimité. confrontation et la brouillage des directions prises. Rien n’est peut-être aussi destructeur Deuxièmement, le sociologue Franck pour les principes de la consomma- délibération. » Cochoy, dans un article intitulé « Faut- tion éthique que l’image du « bobo il abandonner la politique au mar- moralisant ». les choix de consommation sont gui- ché ? » revient de manière critique sur Troisièmement, peser sur l’économie dés par des considérations éthiques. les principes du consom’acteur en par une consommation politique ne Toute liberté n’est effective qu’à par- estimant que « le marché a certes devient effectif qu’avec la force du tir du moment où l’on peut en user. l’avantage de l’exploration, de la sou- nombre. L’idée même du consom’ac- Une série d’outils et de repères per- plesse, de l’invention, mais la poli- teur repose sur « le secret espoir que mettrait alors de construire des choix tique publique a pour sa part la vertu le mécanisme concurrentiel permette individuels « éthiques » de consom- de faire précéder les choix individuels de faire avancer les causes ainsi por- La revue mation « engagée » (écolabels, com- par des débats ouverts ». Atomisé et tées plus efficacement que les lois et du projet merce équitable, structures de l’éco- individualisé, l’acte de consomma- les autres formes de régulation janvier 2015 nomie sociale et solidaire…). Le tion est bien souvent privé du fonde- publique » : c’est « politiser » la 24 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page25 doSSier > LibertÉ !

consommation par la mise en concur- ter politiquement ; de l’autre, conser- time qu’une organisation écono- rence, dans le champ économique, ver intacte la substance politique ini- mique ou que de simples groupes de différents modes d’achats diver- tialement formulée sous peine de voir sociaux. Deux directions peuvent être sement « responsables » ou « politi- celle-ci se dissoudre et se transformer évoquées. La première, sous forme sés » (mais sans débat politique géné- en un simple argument commercial d’utopie, consiste à se demander ral et ouvert). Or, la capacité du de vente. quelle place pourraient occuper des capitalisme à s’adapter et à se nour- formes de consommation hors mar- rir des critiques qui lui sont adressées reConquérir L’éCheLLe de ché (troc, autoconsommation, gla- pour renforcer son influence (par la La réguLation et de La nages, systèmes d’échanges locaux marchandisation de l’humanitaire, Coordination PoLitique ou SEL, bénévolat) visant à prévenir par exemple) ne fait plus mystère. Est- Au final, l’usage politique de la liberté les récupérations marchandes ; la il alors possible d’introduire, sur un de consommer n’est pas qu’une solu- seconde à dire que la politique n’a tel marché concurrentiel, de vrais tion mais aussi un symptôme, celui jamais quitté le marché, qu’elle est espaces de consommations éthiques de la perte de légitimité de la régula- inhérente au libéralisme en endos- (principalement dans le domaine de tion politique. Cette approche « par sant le rôle d’organisateur contrai- gnant et de garant de la « libre concur- rence ». Il faut donc reconquérir L’usage politique de la liberté de l’échelle de la régulation et de la coor- « dination politique et non pas seule- consommer n’est pas qu’une solution mais ment convertir une liberté individua- liste en une liberté altruiste. La voie aussi un symptôme, celui de la perte de très classique, qui rappelle que l’in- légitimité de la régulation politique. » térêt collectif prime sur l’intérêt indi- viduel, tant que cet intérêt collectif est légitimé par le débat public, reste l’économie sociale et solidaire), ou le bas », certes intéressante, peut être porteuse, et pas moins ambitieuse. des produits dits « citoyens » (du BTP porteuse d’une impuissance : celle de S’il est utile de reformuler une régu- à l’automobile en passant par l’ali- se priver de l’outil régulateur que lation « par le bas », il l’est aussi de mentation ou les loisirs) ? Or, il existe serait un État, à transformer. N’est- recouvrer la légitimité de l’organisa- une formidable opportunité, pour un ce pas jouer à armes très inégales avec tion collective et du pouvoir poli- capitalisme toujours plus vorace, les grandes puissances économiques tique. n d’étendre la marchandisation des organisatrices du marché de la biens et services par la marchandisa- consommation, possédant une force tion de « l’éthique ». On est pris, bien de frappe communicationnelle iné- malgré soi, entre deux feux : d’un côté, galable ? L’État (qui est certes un *Gabriel Montrieux, est politiste. Il La revue étendre un maximum le champ de enjeu), en tant qu’organisation légale, est doctorant en sciences politiques du projet consommateurs concernés pour exis- rationnelle du pouvoir, reste plus légi- à l’université Lyon-2. janvier 2015 25 » contraindra les juges à faire sortir cer- sortir faire à juges les contraindra tains détenus s’ils veulent en incar- », sèche sortie « de Pas d’autres. cérer ! suivi sans projet, sans logement, sans Elle doit être préparée, la détention doit donc être réservée à des délin- assez faits des commis ont qui quants surveillants les Allemagne, En graves. pénitentiaires sont aussi des éduca- teurs. Le travail en prison doit être favorisé et bien encadré, les salaires déri- sont ils (actuellement revalorisés éhontée, l’exploitation de c’est soires, qui ceux sortie, la À ?). profite en qui y ont travaillé doivent bénéficier du chômage, d’une couverture sociale efficiente. que des faire grands criminels ? Les conditions dans les « maisons centrales », pour les longues peines, néan- faut il ; satisfaisantes plus sont liens de maintien le améliorer moins structures de plus créant en familiaux, familiaux. parloirs des pour d’accueil Pour la beau- criminalitésouvent sont organisée,financières peines les coup plus efficaces : la prison est un risque calculé, les criminelsqui d’or savent tapis des ont ils sortant qu’en jus- la à donner faut il ; attendent les tice les moyens d’opérer des saisies de patrimoines plus efficacement et d’enrayer aussi criminels les les stup…Pour de d’armes, financementspsy- pathologies de atteints ou sexuels met- naturellement faut il chiatriques, tre le paquet sur les soins. Comme jour, un sortir à vocation ont certains soins, des continuité la à veiller faut il donc avoir plus de psychiatres, de médecins coordonnateurs… on en et pauvreté cruellementla manque ; la désaffection de la psychiatrie en prise la sur direct effet un ont France détenus. de nombreux en charge La prison n’a pas toujourspeut-on existé, penser qu’elle n’existerapas toujours ? qui depuis vingt ans. numerus clausus numerus les plus audacieux d’europe et on le démantèle consciencieusement nous avions un droit des mineurs parmi « aggravantes pour les faits commis aux commun, en transports les dans abords d’un établissement d’ensei- : sportive enceinte d’une ou gnement il n’y a plus aucun vol simple, tous ! aggravés sont devenus causes ?Y a-t-il d’autres Oui, la multiplication des contrôles d’identité ne peut forces qu’entraîner des des l’égard à violentes réactions car ceux qui de les l’ordre, subissent impul- leur contrôler à aptes peu sont sivité. La pénalisation croissante de la consommation de cannabis n’ar- range rien, alors que, pour certains, de « parve- le moyen c’est disent-ils, nir à dormir le soir plan- » (l’anxiolytique peines fameuses Les pauvre). du cher ne font qu’accroître le phéno- mène. Les détenus ressortent pires qu’avant et on leur demande d’être meilleurs existe ensuite ! qu’elle Pure illusiontelle de prison la que penser est à même en de France prévenir la ! récidive que des faire petits délinquants ? Outre la prévention, il faut favoriser les mesures de suivi et d’accompa- gnement social hors les murs de la prison, en mettant moyens dans les services vraimentde proba- les tion, les soins gratuits (psycholo-giques, psychiatriques, médicaux – plus recruter faut Il addictologie). en décentraliser sociaux, travailleurs de facile- rendre les suivi, de centres les chan- surtout faut Il accessibles. ment peine, la de sens le profondément ger qu’elle ne soit plus unemal le symboliquement exclusion compensant condi- causé (ce qui justifie les pires vise qu’elle mais détention), de tions réellement la réinsertion sociale, la modification des conditions qui ont La l’acte. à passage un possible rendu tra- tout rend carcérale surpopulation il détention, en impossible social vail un instaurer faut » *

RANDE G des des prisons passent… corriger les

respecter respecter et ormis les vrais bandits, qui est qui bandits, vrais les ormis en prison et pourquoi ? des récalcitrants ? LARA ouvertes, sans « C faut garder, voire garder, faut la reconnaissance, inégalités, créer de valoriser valoriser ceux qui y créer du lien social, stigmatiser stigmatiser ceux qui AR purgent purgent une peine, il il il n’y a pas de liberté possible sans égalité. plus les moins il de conditions de est sont un dégradées, possible tenir travail des et travailleurs d’existence délinquance. la et prison la sur progressiste discours doSSier h P quages toujours dérisoires liés aux diri- actes des encore ou stupéfiants, rébel- (outrages, l’autorité contre gés d’exis- conditions aux lié C’est lions). tence : carences affectives, précarité et pauvreté, dif- prise de éducativesabsence logement, de ficultés ou en charge médicale droit a Notre dépressifs. récemment de troublesdélinquants de catégorie cette nourri par la création de circonstances La population carcérale est jeune, sans travail ou précaire, étrangère, classes des ou l’immigration de issue les plus défavorisées de la société(banlieues au premierpermet- ne courtes, peines chef). des purge Elle car réinsertion, une cas aucun en tant place en mettre se de temps le n’a rien logement, ni travail, ni formation, (ni ni soins, ni même restauration de liens familiaux). Les maisons d’arrêt de génèrent et craquer à pleines sont la Ces délinquance. détenus sont en général condamnésfrus- pour la inadapta- à intolérance et norme la à tion (pour vols des commis ont Ils tration. des butins souvent dérisoires), des violences (souvent en lien avec des vols), des petits trafics ou des bra- Liberté et Liberté réPression 26 La revue du projet janvier 2015 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page26 14:35 27/12/14 RdP-43_V07_RDP

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Certes, mais il a existé pire : la peine moyens d’assurer sa défense (face au majeurs, appauvrissement des struc- de mort, le bannissement… Je doute ministère public et aux parties civiles tures institutionnelles ou associatives que la prison disparaisse un jour, mais dans le domaine pénal ; face aux partenaires (conseil général, protec- j’espère qu’elle existera sous d’autres sociétés de crédits à la consomma- tion judiciaire de la jeunesse, asso- formes : des prisons ouvertes, sans tion dans le domaine civil) et dans ciations d’action éducative en milieu stigmatiser ceux qui purgent une ceux dont on dispose pour se sous- ouvert). Il faut dépénaliser certains peine, il faut garder, voire créer du lien traire à la justice ou non, pour adou- faits, soit totalement, soit en les ren- social, corriger les inégalités, créer de cir la peine ou non. Il faut agir à la dant contraventionnels (usage de pro- la reconnaissance, respecter et valo- fois sur les causes de fond et sur le duits stupéfiants, outrages…), facili- riser ceux qui y passent… D’autres traitement immédiat des dégâts. La ter l’accès au droit des plus démunis, pays, l’Allemagne notamment, extrê- justice des mineurs devrait être une revaloriser l’aide juridictionnelle (qui mement vigilante à la question des priorité absolue. Il faut rétablir correspond à ce que sont payés les libertés et de la dignité humaine, en (comme il y a dix ans) un suivi pour avocats commis d’office). Il faut une raison de son histoire, sont bien plus les jeunes majeurs jusqu’à 21 ans, au police de proximité, qui fasse du lien en avance que nous. lieu de 18 aujourd’hui. C’est aberrant avec les populations et de la préven- qu’on demande à cette jeunesse la tion. Il faut rendre le permis de et la place de l’argent dans la « jus- plus défavorisée d’être autonome et conduire gratuit, pour mettre le holà tice » ? s’il y a « justice de classe », insérée socialement à 18 ans, alors à la répression de la conduite sans comment la dépasser ? que l’entrée dans la vie active se fait permis. Les petites amendes n’ont pas beau- bien plus tard. Nous avions un droit coup de sens, elles n’ont un effet dis- des mineurs parmi les plus audacieux et avec un régime politique harmo- doSSier > LibertÉ ! suasif que pour de la toute petite d’Europe et on le démantèle nieux et sans exploitation, y aurait-il délinquance, ou du routier. La justice consciencieusement depuis vingt toujours des bandits ? des tribu- de classe se loge davantage dans les ans : alignement sur le droit des naux ? de la répression ? s

Parallèlement, un véritable conseil d’administration a été constitué, comprenant aussi des jeunes de plus de 16 ans. nous temoiGnaGe avons recruté des animateurs (bafa, bafd), des emplois Ce témoignage s’est exprimé lors d’une dis- jeunes (à parité un du quartier et un d’ailleurs). des activités cussion préparatoire à ce dossier qui a eu lieu ont été mises en place selon les tranches d’âge. nous avons intéressé les familles à y participer (sorties, repas…). nous à la fédération du rhône du pCF. avons systématiquement fait passer le bafa au maximum de jeunes, comme premier diplôme pour certains, leur mettant j’ai été responsable d’une petite « association culturelle des ainsi un pied à l’étrier et les employant durant les vacances, jeunes de f. », commune de 7 000 habitants au nord de Lyon, les encourageant à aller plus loin. notre association a même avec un taux de 27 % de logements sociaux regroupés essen- eu un prix national pour notre action en matière de formation. tiellement en deux pôles. Celle-ci s’adressait aux enfants et élément de valorisation parmi d’autres : un animateur est jeunes de 5 à 20 ans et à leurs parents. La municipalité, à devenu éducateur spécialisé de la Protection judiciaire de la l’époque, n’était pas intéressée par ces problèmes des jeunes… jeunesse (Pjj), un autre conducteur de transports en Commun sauf lorsque cela se traduisait par des voitures brûlées, des Lyonnais (tCL), ce qu’il désirait ; deux enfants ont eu des prix bris de vitres, des provocations vis-à-vis d’habitants, etc. de poésie au niveau départemental… L’association a vécu cahin-caha, jusqu’à l’obtention de sub- ventions dites de « politique de la ville ». j’ai décidé de m’y dans le quartier, la petite délinquance a pratiquement dis- investir. j’ai été étonnée de la rapidité avec laquelle les choses paru et le regard d’une partie de la population a changé (pas se sont améliorées. vis-à-vis des jeunes, il fallait de la consi- toute malheureusement). Certes, pas de miracle : il y a aussi dération, faire appel à leur raisonnement, leur cœur parfois, des problèmes de drogue et ça, c’est autre chose. quand la comme on l’aurait fait avec des adultes, surtout ne pas mon- petite délinquance est répandue, le passage à la grande est trer qu’on aurait peur d’eux : répondre à leur provocation, soit largement facilité, et tout ce qui permet à des jeunes d’éviter par la plaisanterie, soit par la fermeté, mais toujours avec une cet engrenage (où de fait ils sont exploités) est bon. Pour ce grande cohérence dans son attitude, dans ses exigences, dans que j’en ai vu, ceux qui ont terminé en prison, venaient de ses interdits éventuellement. Par exemple, il a fallu deux mois familles à gros problèmes et là aussi il y faudrait agir. bien sûr, pour qu’ils ne fument plus dans les locaux. ici, il n’y a pas la concentration de pauvreté et de rejet comme dans certaines cités. mais cela coûterait déjà moins cher à la Les jeunes ont besoin de sentir un cadre, raisonnable, établi société de mettre en place des petites structures de ce genre avec eux, si possible, respecté. en cas de gros accroc, nous avec des personnels bien formés ! Cela diminuerait un peu le avions décidé de nous adresser à la police si nous l’estimions chômage, ce qui vaut mieux que d’aider des familles de chô- nécessaire. Cela s’est produit aux premières vacances où, sous meurs à difficilement survivre. un futile prétexte, trois jeunes ont cassé la figure à un anima- teur. nous avons demandé à la mairie de les convoquer avec nous. une plainte a été déposée. Cela a fait beaucoup de bruit mado jorrand est secrétaire de la section PCF de Neuville-sur- parmi les jeunes du quartier mais, au fond, la plupart ont com- Saône (Rhône). La revue pris que ces trois-là avaient dépassé les limites du tolérable du projet et cela a éclairci l’atmosphère. janvier 2015 27 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page28

s Il y aurait des normes, donc des trans- pour une restauration de l’image de tenir un discours progressiste sur la gressions, et aussi des malades psy- soi à travers du collectif… Donc prison et la délinquance. La lutte chiatriques, des mineurs en recherche moins de répression, c’est bien le contre les inégalités rejoint celle pour de transgression. En revanche, si on législateur qui crée le premier de la la liberté. Les restrictions à la liberté parvenait à réduire les inégalités délinquance en créant de nouvelles doivent dès lors venir sanctionner sociales, à améliorer les dispositifs infractions, de nouvelles circons- principalement les passages à l’acte éducatifs, et à changer le regard posé tances, etc. il faut donc dépénaliser qui ne sont pas la résultante directe sur la délinquance (c’est la question certains comportements ! ou indirecte d’une inégalité… Mais du vivre-ensemble plus que de la là, on est vraiment dans l’utopie (ce sécurité), on limiterait beaucoup la bref, quelle place pour la liberté (et qui aide à penser et guide nos actions casse. Il faut bien des outils de régu- pour ses restrictions) dans un pro- néanmoins). n lation sociale, donc des tribunaux, jet porté par les communistes ? mais on pourrait penser à d’autres Il n’y a pas de liberté possible sans *Clara Grande est membre du formes de justice, plus réparatrices, égalité. Plus les conditions de travail Syndicat de la Magistrature. mettant plus en lien les auteurs et les et d’existence des travailleurs sont victimes lorsque cela est possible, dégradées, moins il est possible de Propos recueillis par Pierre Crépel

La Liberté est-eLLe « sexiste » ? Si la « liberté » en tant que telle n’est pas sexiste, le sexisme, lui, est bien une entrave à la liberté. Le combattre par des politiques volontaristes dans la Cité

doSSier et en particulier, en matière d’éducation c’est agir pour une société plus libre.

PAR BRIGITTE GONTHIER-MAURIN* mâle », écrit Simone Beauvoir dans cœur de l’appréhension de l’action et Le Deuxième Sexe, « c’est le travail qui de l’intervention politiques. Permettre peut seul lui garantir une liberté l’exercice du pouvoir par tous et i l’on considère la « liberté » concrète. Dès qu’elle a cessé d’être toutes implique notamment une rota- comme le fait de ne pas être un parasite, le système fondé sur sa tion dans les responsabilités aux s empêché d’agir, sens le plus dépendance s’écroule ». moyens de la parité, du non-cumul communément envisagé, et que l’on Parce qu’il est la condition de l’auto- des mandats exécutifs et du non- passe cette notion au tamis de l’éga- nomie économique des femmes, le cumul dans la durée, de la mise en lité femmes/hommes, les choses ne travail est au cœur de leur émancipa- place d’un réel statut de l’élu. Ces semblent plus aussi évidentes. Car si tion. C’est la raison pour laquelle conditions donneront à chacune et la « liberté » en tant que telle n’est pas j’avais décidé de consacrer le premier chacun les moyens de s’impliquer sexiste, le sexisme, lui, est bien une rapport thématique de ma présidence dans la vie de la Cité. entrave à la liberté. Cette liberté se de la Délégation aux droits des trouve organisée dans un cadre et une femmes du Sénat, il y a trois ans, au construction sociale pensés d’abord thème « Femmes et travail ». Partant par et pour les hommes. Les nom- du constat d’un « statu quo inégali- agir pour breuses études de genre ont bien taire », témoignant de l’épuisement « montré que cette réalité apparaissait d’une dynamique face à la perpétua- déconstruire ces aussi bien dans la sphère politique, tion d’un ordre sexué inégalitaire, j’ai économique, professionnelle, sociale, voulu, avec ce rapport, avancer un stéréotypes éducative, démocratique et même certain nombre de pistes, selon une [femmes/hommes], jusque dans l’organisation spatiale et approche systémique qui replace le architecturale de nos territoires. travail, son organisation et sa concep- dès le plus jeune tion au cœur d’un ordre social éman- Le travaiL au Cœur de cipateur. Car l’enjeu est bien d’agir âge, c’est agir en L’émanCiPation des femmes pour un nouvel âge de l’émancipa- faveur de la L’entrave à la liberté prend alors des tion. formes multiples qui sont désormais “liberté” » largement identifiées, qu’il s’agisse Les PoLitiques de l’invisibilité des femmes dans des voLontaristes À engager domaines comme la culture et les arts, C’est cet enjeu qui se pose à nous Cela passe aussi bien évidemment du plafond et des parois de verre aujourd’hui et que tout projet poli- par la conduite de politiques encore si prégnants dans la sphère tique doit relever. Un impératif à cela : publiques volontaristes transversales. La revue professionnelle. « C’est par le travail engager la refonte de nos institutions La loi égalité adoptée par le Parlement du projet que la femme a en grande partie fran- pour construire une République qui en août dernier a incontestablement janvier 2015 chi la distance qui la séparait du place les citoyennes et citoyens au impulsé une dynamique. Mais il ne 28 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page29

nous consacrons en ce moment aux stéréotypes dans les jeux et les jouets. Travaux qui rappellent que « L’histoire (c’est ma définition nous sommes face à des construc- tions sociales et commerciales dont de 1830, et j’y tiens), est la victoire les enjeux sont colossaux. Or agir progressive de la liberté. » pour déconstruire ces stéréotypes, michelet, Des jésuites, 1843. dès le plus jeune âge, c’est agir en faveur de la « liberté ». Car si les femmes ont évidemment tout à y gagner, l’humanité tout entière en s’agit que d’un premier jalon qui doit les comportements pour décons- sortira plus libre. n en appeler d’autres et qui, face à la truire les stéréotypes de genre. Ce doxa « austéritaire », risque de se qui pose clairement la question de consumer très rapidement. Prenons l’éducation. Cette éducation à l’éga- un exemple : quid du droit à l’IVG, lité, attaquée frontalement par les aujourd’hui quarantenaire, si dans le réactionnaires de tous poils, est fon- même temps l’accès à ce droit, libé- damentale. J’ai encore pu le consta- *Brigitte Gonthier-Maurin est rateur pour les femmes, se réduit ter dans les travaux que nous avons sénatrice (PCF) des Hauts-de-Seine, comme peau de chagrin ? menés avec la Délégation sur les sté- vice-présidente de la commission de

la culture, de l’éducation et de la doSSier > LibertÉ ! Parallèlement, doit se conduire un réotypes femmes/hommes dans les communication, vice-présidente de travail de fond sur les mentalités et manuels scolaires et dans ceux que la délégation aux droits des femmes.

Liberté : PaYs Pauvres/PaYs riChes À la fête de l’Humanité rhône, le 29 novembre, nous avons posé à des mili- tants divers, originaires de France, d’afrique, d’asie ou d’amérique latine la question suivante : la liberté, l’aspiration à la liberté, est-ce la même chose dans un pays comme le nôtre et dans un pays comme le niger, le mexique ou l’indonésie ?

VOICI QUELQUES RÉPONSES ET LES et, si on le faisait, on se suiciderait. g. : C’est différent. Je prends un sim- TÉMOIGNAGES D’ARLETTE CAVILLON J’ai remarqué que, là-bas chez les ple exemple. Des copains en Afrique ET DANIELLE LEBAIL* populations les plus modestes, dans voulaient monter un équipement les rapports sociaux, il y a moins d’ex- social, mais ils n’avaient même pas clusion, que les gens souffrent moins les codes d’entrée administratifs leur a. : Oui, évidemment. L’aspiration à du regard des autres, alors qu’ici c’est permettant de mettre leur projet en la liberté, c’est universel, ce sont seu- la guerre à l’intérieur de la même place, il a fallu que ce soit des gens lement les conditions qui font qu’elle classe. « du Nord » qui débloquent les accès. s’exprime de différentes façons et que les urgences ne sont pas les mêmes. e. : Déjà en France, la liberté ça ne se h. : Dans un pays pauvre, c’est la pense pas de la même façon pour tout liberté d’être, de penser. Chez nous, b. : Non, bien sûr. Quand tu rêves sim- le monde. Pour certains, c’est la liberté c’est la liberté d’acheter ; finalement, plement de survivre, comme au Niger, d’entreprise ; pour d’autres, c’est « je notre liberté, elle n’est pas bien belle. et quand tu rêves d’avoir une vie meil- fais ce que je veux, quand je veux », leure, comme en France, ça n’a rien etc. Alors, ailleurs, c’est encore plus i. : Mon idéal serait de dire oui, mais à voir. Certes, chez nous, il y a aussi divers. Et en outre, ça change avec les les mouvements de création de le quart-monde… époques. Souvent, on est surpris de liberté, comme la décolonisation, ce que les gens entendent par liberté. c’est venu en général des élites locales, C. : Pour moi, les aspirations à la formées chez nous, alors... ? liberté et même à la démocratie sont f. : La pauvreté là-bas, l’austérité ici, les mêmes partout, quelle que soit la c’est le même processus, c’est priver j. : Dire que la liberté est universelle, situation. Quand on dit « liberté, éga- d’imaginaire. Partout, il faut la liberté c’est un point de vue très européo- lité, fraternité », je crois que c’est dans de se projeter, d’imaginer d’autres centré. le bon ordre : la liberté est la première horizons possibles. Le PCF s’est sou- aspiration humaine. vent centré sur les grands combats K. : Dans les pays pauvres, la liberté économiques et sociaux, mais il ne peut s’inspirer de notre modèle, mais d. : J’ai posé une question de ce genre faut pas assécher celui sur les liber- elle est de plus en plus conditionnée La revue à une Mexicaine, elle m’a répondu : tés, au sens où les gens l’entendent par des extrémismes religieux. Chez du projet on n’a pas le temps de réfléchir à ça eux-mêmes. nous la liberté, c’est les mœurs, la janvier 2015 29 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page30

donc tout est lié ? d.L. : Oui. Plus le droit à la liberté recu- « nous criions Liberté ! mais en lera dans les pays dits démocratiques comme le nôtre, plus la liberté recu- prononçant ce mot, nous lui donnions lera aussi dans les dictatures. Les des sens différents. Pour les uns, c’était Kurdes sont aussi réprimés en France. Trois militantes ont été assassinées la liberté de disposer à son gré de sa en plein Paris ; un adhérent d’un cen- personne et du produit de son travail. tre culturel kurde est passé « en jus- tice » sous prétexte que son action Pour les autres, c’était le droit de était compatible avec le PKK, parti disposer des hommes et du produit de que l’Union européenne classe (de façon scandaleuse) dans les organi- leur travail. » sations terroristes. abraham Lincoln, cité par G. marchais, dans Le Défi a.C. : Quand, dans un pays d’Afrique, démocratique, 1973. la France envoie des bombes, des mili- taires ou des « conseillers », le gouver- nement local et le nôtre bafouent sexualité, etc., c’est plus ou moins Ukraine, ce soit moins évident). Mais, ensemble les libertés. Bien entendu, acceptable par le courant dominant, dans le reste du monde, ce n’est pas c’est toujours « au nom de la liberté » c’est un peu boboïsant, mais la liberté le cas, en peu de temps, une guerre qu’ils interviennent et ce prétexte s’ap- dans l’entreprise est interdite. démarre ici ou là et le droit d’exister puie souvent sur des réalités, au moins peut disparaître du jour au lende- au début, comme au Mali, mais on voit L. : Je n’ai jamais vécu dans des pays main. bien que le fond de l’affaire est ailleurs. pauvres, alors franchement, je ne sais danielle Lebail : Je vais parler de ce Quand quelques pays « libres » dispo- pas. que je connais, c’est-à-dire de la sent de l’arme nucléaire, ce n’est pas France et du Kurdistan. L’aspiration pour propager la liberté. La liberté ne m. : C’est le même concept, mais à la liberté individuelle et collective, se divise pas. Je ne crois pas que la concrètement c’est différent. Je suis c’est un besoin qui est le même par- liberté d’un peuple doive écraser la Sahraouie, ici je peux le dire, là-bas je tout, la différence, c’est seulement solidarité, que la Catalogne ou l’Italie prends vingt ans de prison. une question de degré. Bien sûr, là- du Nord puissent « librement » se déta- bas, ils ne sont même pas libres de cher, parce qu’elles sont riches et n. : Je suis Malien. Il y a une matrice vivre leur histoire, leur culture. C’est qu’elles auraient le droit de laisser tom- commune, mais ce n’est pas la même un peuple entier qui est opprimé. ber les régions moins chanceuses de chose. Ici c’est un idéal, là-bas, tu n’as Mais la répression en Turquie touche leurs pays. n

rdoSSier même pas la démocratie de base, la tous les opposants quels qu’ils soient : pluralité. journalistes, étudiants, avocats. Ici, on n’a qu’une impression de liberté, *Arlette Cavillon est membre du arlette Cavillon : La première des il faut voir le nombre de militants bureau national du Mouvement de la libertés, c’est la paix. En Europe et en syndicaux qui sont traînés devant les Paix. Danielle Lebail est membre du Amérique du Nord, on a à peu près la tribunaux. On n’a pas la liberté d’in- Comité exécutif national du PCF. Elle paix militaire (encore qu’en Irlande, formation, il n’y a aucun débat con - revient d’une délégation au en ex-Yougoslavie, aujourd’hui en tra dictoire sur le fond. Kurdistan.

La revue du projet janvier 2015 30 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page31

Liberté de CirCuLation et frontières euroPéennes Si la liberté de circulation existe dans l’union européenne pour les marchan- dises et les capitaux c’est loin d’être le cas pour les êtres humains.

PAR MARIE-CHRISTINE VERGIAT* Canada ou l’Australie, dont les res- mortes en Méditerranée au cours des sortissants sont dispensés de visas. Il 20 dernières années dans une certaine va sans dire que les accords avec les indifférence, au-delà de quelques our ce qui concerne la liberté pays dits du Sud sont quasiment larmes de crocodile. Peu importe que de circulation des marchan- inexistants. Nous constatons égale- ces femmes et ces hommes soient, P dises, des services et des capi- ment la démultiplication de statuts pour l’essentiel, au regard des natio- taux, les choses ont bien avancé liant titre de séjour et emploi et nalités concernées (Erythréens, depuis les débuts de la construction variant en fonction de la nature de Soudanais, Somaliens, Syriens, Afghans européenne et surtout depuis la mise l’emploi occupé ; le pire étant le sta- ou Palestiniens…) de potentiels en œuvre du Marché unique tant sur tut des travailleurs saisonniers faisant demandeurs d’asile qui ne peuvent le plan intracommunautaire que vis- des migrants de véritables « travail- exercer leurs droits. à-vis des pays tiers puisque l’Union leurs jetables » en fonction des doSSier > LibertÉ ! européenne (UE) démultiplie les besoins des employeurs, pouvant être Les Centres de rétention accords de libre-échange pour faire expulsés dès que l’on n’a plus besoin Et quand ils arrivent néanmoins à tomber les barrières douanières et de leurs bras. franchir les frontières de l’Europe « éliminer les obstacles à la liberté de forteresse, ils (elles) sont de plus en circulation ». Les enjeux autour de plus enfermé(e)s, durant des pér - l’accord UE/USA sont suffisamment Le pire étant iodes de plus en plus longues, dans prégnants dans les esprits pour que « des centres de rétention au sein des- l’on voie ce dont il est question. le statut des quels les conditions de vie sont assi- travailleurs milables à celles des prisons, voire une euroPe forteressse pires, notamment dans les pays du S’agissant des personnes, nous saisonniers faisant sud de l’Europe, alors qu’ils n’ont sommes loin du compte et cela vaut commis aucune infraction pénale. tant au sein de l’UE qu’à l’extérieur. des migrants Ils sont majoritairement expulsés Dans l’Union, les contrôles aux fron- de véritables vers leur pays d’origine ou les pays tières ont, certes, été largement sup- par lesquels ils ont transité, et ceux primés du moins pour les ressortis- “travailleurs qui restent dans nos pays vivent le sants des pays qui ont intégré l’espace plus souvent dans des conditions de Schengen et dès lors que l’on veut se jetables” en misère extrême puisqu’ils n’ont la déplacer à l’intérieur dudit espace fonction des plupart du temps droit à aucune pour une courte durée. Un récent prestation sociale. arrêt de la Cour de Justice de l’Union, besoins des La réalité est donc assez loin des vient de le rappeler, la libre circula- visions fantasmées de l’extrême- tion et même d’installation ne vaut, employeurs. » droite, relayées par un nombre crois- au-delà de trois mois de séjour, que sant d’acteurs politiques. L’enjeu pour pour ceux qui ont un emploi ou dis- Il y a aussi les migrants qui arrivent la Gauche européenne est donc de posent de revenus suffisants. Loin des en situation régulière et qui se retrou- repartir à l’offensive pour décons- fantasmes du tourisme social mis en vent sans statut du fait du durcisse- truire les idées reçues, décrypter les avant par l’extrême droite et malheu- ment permanent des conditions de faits, nourrir un débat argumenté et reusement relayés par de nombreux séjour régulier. Ils sont désormais la construire des propositions alterna- commentateurs, la liberté de circula- grande majorité des migrants dits tives permettant de renouer avec les tion continue à obéir à des règles « irréguliers » vivant sur le sol de l’UE valeurs de la République ou plus sim- strictes y compris à l’intérieur de l’UE. (jeunes majeurs, étudiants en fin plement celles de l’Humanité si bien Les Roms ne sont que la triste illus- d’études, bénéficiaires de visas de décrites dans la Déclaration univer- tration de ce phénomène d’autant santé non renouvelés...) selle des droits de l’Homme. n plus qu’ils sont, pour ceux et celles Il y a enfin ceux (et de plus en plus qui viennent en France, majoritaire- celles) qui arrivent dans des condi- ment ressortissants d’un pays, la tions irrégulières, le plus souvent, en *Marie-Christine Vergiat est députée Roumanie, qui n’est même pas encore traversant la Méditerranée dans des européenne (Front de gauche). dans l’espace Schengen. conditions de plus en plus dange- reuses comme le souligne un nom- une muLtiPLiCité de bre croissant de rapports émanant statuts tant des ONG que des organisations Mais pour les migrants hors UE, c’est internationales et qui vient de faire pire encore. Nous avons vu ces der- dire à l’Organisation internationale Réagissez aux articles, nières années se démultiplier les sta- pour les migrations (OMI) que exposez votre point de vue. tuts. D’abord pour les pays avec les- l’Europe était désormais le continent La revue quels sont signés des accords de le plus dangereux pour les migrants. Écrivez à [email protected] du projet réciprocité comme les États-Unis, le Au moins 25 000 personnes sont janvier 2015 31 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page32

Liberté et migrations La migration est présentée à tort comme relevant de la responsabilité indivi- duelle, quand elle est un enjeu collectif, à la fois ressort et produit de l’écono- mie capitaliste mondialisée.

PAR MORANE CHAVANON* sous l’angle du danger et du coût Agence européenne pour la gestion qu’ils représenteraient pour les socié- de la coopération opérationnelle aux tés dites d’accueil : « on ne peut pas frontières extérieures, plus connue l’heure où l’on ne cesse de accueillir toute la misère du monde ! », sous le nom de FRONTEX, via ses valoriser la libre circulation dit-on. conséquences meurtrières en Médi - À des capitaux et la mobilité des Comme le soulignait Catherine Withol terranée, pose alors un paradoxe. étudiants et travailleurs des pays occi- de Wenden dans Les Immigrés et la L’invocation d’une libéralisation tou- dentaux, les migrants provenant des politique (1988), en Europe, jusque jours plus importante du marché, pays du Sud font l’objet d’un contrôle dans les années 1970, les flux migra- s’incarnant dans des délocalisations, accru et d’une véritable criminalisa- toires étaient considérés par les pou- une exploitation intensive des res- tion. Les corps migrants ne bénéfi- voirs publics comme une question sources naturelles, des ingérences cient pas des mêmes droits, à com- d’ordre purement technique et éco- politiques, s’accompagne d’une assi- mencer par celui à la libre circulation, nomique. Il était laissé au patronat le gnation à résidence pour ceux et celles ni de la même image sociale en fonc- soin de gérer comme il l’entendait qui ont eu la malchance de naître du tion de leur provenance. l’arrivée d’une main-d’œuvre avan- mauvais côté de la planète. La migra- tageuse et peu coûteuse. Ce n’est que tion est présentée à tort comme rele- Le ContrôLe des migrants, récemment que le contrôle des vant de la responsabilité individuelle, une oPPortunité migrants est apparu, pour les États, quand elle est un enjeu collectif, à la PoLitique Pour Les états comme une opportunité politique de fois ressort et produit de l’économie Au sein de l’Union européenne et de mettre en scène leur propre puis- capitaliste mondialisée. la zone Schengen, les déplacements sance. Un projet de transformation sociale de citoyens communautaires sont supposerait de repenser la question doSSier présentés comme les symboles d’un une CréoLisation du migratoire et le droit à la libre circu- monde moderne et « connecté ». À monde, une dYnamique lation des individus, à l’aune d’une l’inverse, les migrants originaires des La politique européenne de ferme- « créolisation du monde », pour continents africain ou asiatique, émi- ture des frontières, commencée après reprendre l’expression de Patrick grant pour des raisons politiques, éco- le choc pétrolier de 1973 et qui ne Chamoiseau. Pour l’écrivain, nous nomiques voire écologiques vers cesse de se durcir depuis, allant même allons vers une composition des l’Europe sont immédiatement perçus jusqu’à la création en 2004 d’une sociétés de plus en plus plurielle, ce qui ne doit pas être vu comme une succession de greffes mais comme une vraie dynamique. Dépasser le « nous » fictif d’une identité euro- « Le “libéralisme” c’est la péenne fantasmée dressée contre un “concurrence effrénée” : les « eux » stigmatisé, pour réappréhen- der l’expérience sociale collective et travailleurs, isolés et sans défense, inventer de nouvelles formes de soli- livrés à la merci de maîtres darités. n inhumains ». Léon Xiii, Rerum Novarum, 1891. *Morane Chavanon est politiste. Elle est doctorante en sciences politiques à l’université Lyon-2.

La revue du projet janvier 2015 32 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page33

des Libertés nouveLLes ? Les nouvelles formes d’organisation, économie solidaire, fab-lab... peuvent ouvrir des espaces de liberté si les rapports de force sont en faveur de l’inté- rêt général, ce qui nécessite des luttes politiques intenses.

ENTRETIEN AVEC SYLVIE MAYER classe. Certains parlent de « neutra- qu’on paie ; il y a alors le risque de se ET YANN LE POLLOTEC* lité du net », c’est vite dit, ce serait à substituer à la puissance publique, creuser (voir le dossier « Fab-lab » du de décharger le pouvoir de ses devoirs. n° 40, octobre 2014). Y.L.P. : Oui, voici un autre exemple, les L’économie sociale et solidaire, est- gens qui ont des projets culturels en ce de nouvelles libertés ? quels sont alors les enjeux poli- vue se disent souvent : obtenir l’ar- s.m. : Je dirais plutôt des potentialités tiques ? gent public (pourtant naturel en ce de libertés. Par certains côtés, les s.m. : Il y a des contradictions. Au domaine) c’est de plus en plus diffi- fameux nouveaux droits pour les sala- moment où Nice-Matin se constitue cile et puis souvent, c’est sous des riés sont déjà là dans les coopératives. en Société coopérative d’intérêt col- conditions de dépendance inaccep- Les travailleurs peuvent participer lectif (SCIC), ce qui est intéressant, tables ; les banques diront non ; donc collectivement aux stratégies de l’en- Macron veut modifier la loi anti- on essaie le crowd-funding. Ainsi c’est doSSier > LibertÉ ! treprise, ce qui leur est interdit ail- concentration de la presse, soi-disant souvent un choix par défaut. leurs. Mais ces potentialités ne se pour tenir compte de la presse sur transforment en réalité que dans cer- Internet, c’est-à-dire de fait pour un vrai espace de liberté, ne serait- tains cas. Par exemple, les sociétaires contourner les règles au profit des ce pas du « ni marché, ni état » ? du Crédit mutuel ou du Crédit agri- groupes financiers. Y.L.P. : C’est effectivement une idée cole (en principes mutuelles) ont de Y.L.P. : Effectivement. Le fait de chan- qui monte en force. fait beaucoup moins de droits que les ger la donne ne doit pas signifier, au s.m. : Il y a de nouvelles façons de faire actionnaires de la BNP, car tout est nom du « changement », le retour à dans le sens de l’intérêt public. Oui, bouclé à l’avance. Donc c’est à voir avant 1945. Le logiciel libre, c’est aussi le secteur « public » classique n’est sur chaque cas. du travail gratuit qui est ensuite quelquefois que de l’étatique, n’allant exploité par les grandes firmes. Pour pas dans le sens de l’intérêt public, il et dans la révolution numérique ? y échapper, il faut un autre fonction- n’y a qu’à voir ce qui s’est passé pour Y.L.P. : Le numérique a une puissance nement de l’économie : si on se dirige le barrage de Sivens dans le Tarn, où gigantesque qui peut jouer dans les vers une économie de la contribution, les populations n’ont pas été consul- deux sens, celui des possibles pour c’est bon ; si c’est une économie de tées, les enjeux écologiques pas pris les gens, celui d’aliénations et de la prédation, alors les biens communs en compte, les intérêts de tous les pay- contraintes nouvelles. Prenons les big sont l’objet d’une espèce de pillage et sans partiellement oubliés au profit data, c’est-à-dire les immenses le numérique exacerbe les contradic- de quelques-uns. Une régie locale de masses de données, souvent brutes, tions. l’eau n’est pas toujours un espace de non structurées, variées, arrivant et décision collectif. La proposition de changeant rapidement. Autrefois, ces Peut-on parler d’une liberté d’en- loi du PCF sur l’eau tente de dépas- données étaient à la discrétion de très treprendre au bon sens du terme ? ser ces obstacles : peu de monde. Aujourd’hui, elles sont s.m. : Un exemple, apparemment, c’est http://www.pcf.fr/sites/default/files/ souvent largement accessibles, sans le crowd-funding, c’est-à-dire le finan- exe_brochure_eau_web.pdf n restriction juridique, financière ou cement participatif. Par un appel au technique, c’est l’open data, il y a donc peuple, les salariés de Nice-Matin ont des possibilités de maîtrise et d’inter- obtenu 500 000 euros, les ouvrières vention pour tout le monde, en prin- de Lejaby 375 000. Ce n’était pas suf- cipe. Mais si le rapport de forces n’est fisant, mais, du coup, la Banque pas en faveur de l’intérêt général, alors publique d’investissement (BPI) a dû ça peut déboucher sur des coercitions accepter de participer à la relance. *Sylvie Mayer et Yann Le Pollotec et un contrôle social terribles. C’est Cela dit, les gens ont donné sans sont respectivement responsable du secteur Économie sociale et solidaire pourquoi est illusoire cette idéologie retour prévu ; mais ces sommes et Révolution numérique du Conseil du « solutionnisme », qui prétend ou auraient dû être prises sur les impôts national du PCF. fait croire qu’il suffirait de laisser agir la « révolution numérique » en cours pour faire disparaître les sociétés de classe. Ces potentialités ne dispen- sent pas de faire de la politique. Il ne « Le peuple de genève, en s’agit pas que du respect de la vie pri- vée (question certes importante), consacrant cet édifice aux études mais aussi de savoir qui a la maîtrise supérieures, rend hommage aux des processus. Par exemple, les don- nées et méthodes produites librement bienfaits de l’instruction, garantie par les usagers représentent aussi du travail (non rétribué), d’où une source fondamentale de ses libertés. » La revue de profits potentiels pour ceux qui les Fronton de l’université de Genève, loi du 26 juin 1877. du projet accapareront. C’est une question de janvier 2015 33 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page34

la rubriQue «lectrices et lecteurs» Fait aPPel À Vous ! La Revue du projet est un outil au service de l’élaboration du projet communiste du xxie siècle. Ce travail ne peut se faire qu’en associant le plus grand nombre à notre réflexion collective. La rubrique « Lectrices et lecteurs » vous ouvre ses colonnes tous les mois : n’hésitez pas à réagir, à donner votre avis, à nous envoyer vos remarques sur les dossiers thématiques que nous réalisons ! Écrivez à [email protected] !

Toute l’équipe de La Revue du projet vous souhaite une belle année 2015

il y a 150 ans, le 28 septembre 1864, était fondée l'association internationale des travailleurs, également connue sous le nom de première internationale. tentative inédite visant à donner au mouvement ouvrier une forme institu- tionnelle dépassant les frontières, l'association internationale des travail- leurs connaîtra une postérité bien au-delà de sa dissolution en 1872. elle LECTRICES & LECTEURS inspirera notamment l'internationale ouvrière de 1889 et l'internationale communiste de 1919. Le manifeste inaugural et le règlement provisoire de l'ait ont été rédigés par à l'automne 1864. Ces textes constituent La revue le cadeau de nouvelle année de La Revue du projet à ses lecteurs. du projet janvier 2015 34 RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page35 pour de la production de masse ». nementdesmachines. deplus, ceslieux nesont paspensés eMr ; qu’ilde Marx suffira d’y échanger « marques » et « appellations Le projet communiste audéfi desfab-labs l’état actuel, je n’y crois pas. Pour cela, il faudrait un perfection- contrôlées »plutôt queproduits oubrevets. Par contre, j’en- futureéchappera au besoin de produire et répartir le et moyens de subsistance des uns et des autres restent un pro- tendsFabien eychenne. le J’ai beau relire l’interview de Y. Moulier-boutang ( lm ! À la créationblème du cnaM en 1794, grégoire : « Je déclara J’ai aussi du mal à concevoir que lesLe finanCementsavoirs desne fassent pas usage peut faire un prototype. de là à devenir de véritables usines, en la démarche « Les les étaient mis à disposition du particulier vraient des garages de réparation automobile où tous lesment outilseux-mêmes leur habitation. il y a quelques années, s’ou- dansles années 50, « les castors », construisaient collective- jet ou vivront leurs usagers ? ou clients budget de fonctionnement de ces ?structures et dede quoiquoi vivent vivent les hommes qui animent ? d’oùces lieux vient lenales louent des outillages qu’ils n’ont aucune utilité à acheter. fab-labs anciennesoù progressistes et bourgeoisie ont déjà puisé. les gie mais comme prise en compte renouveléerepérables, de considérationsnon comme nouveautés devant tout à la sancestechnolo- et formation aux qualifications nécessaires deux– sont aspects donc positifs dans la démarcheter à– l’environnement » diffusion des (Piaget connais- 1972, le Moigne 1984). car les nouvelles connaissancesprentissage sont est indispensablesnécessaire à l’émergence pourde toute s’adap-intelligence,surson environnement dans l’acte d’apprendre. en effet, l’ap- tissageexpérientiel […] soulignent lerôle proactif del’individu elle rejoint les analyses de Piaget dont les sestravauxeffets sur [l’intelligence sur « l’appren-de] l’individu et le collectif. en cela mique de l’apprentissage par la pratique et le travail collectifpersonnelle etqu’économique. ellecherche intégrerà dyna-la leur des avancées scientifiqueseffectivement et techniques,concourir àune appropriation sociale du meil- tant dans la affairesphère privée et non une responsabilité publique. gementMaiscesdeconsidérations. ellecertains veulent faireen peutune société, chacun profite de l’expérience ».de tous jamais que ce qui lui aurait appris sa propre expérience.conserventse s’accroissent.et dans[…]l’homme isolésauraitne la des hommes [est] nécessaire pour que lesPour connaissancesJ.b. say (1767-1832) utiles économiste : «l’agglomération libéral matière de production matérielle. pourformer des étudiants aux potentialités du numérique en dollars, 000 l’équipementfutmodifié, sonprixramené 20 à dedollars pour révéler les promesses du « numérique ». Puis, utiles. le concept est né au Mit. le premier a coûté 20 millionstoriquel’examenet positionnementdu capitaldu sont aussi une base de départ pour l’analyse. la mise en perspective his- estfortement présente. les travaux de Michel clouscard sont touchent à l’évolution du travail. l’idéologie libérale-libertaire y mais seulement pratique. Pour moi, « financement » du travail , octobre, 2014), j’ai toujours croiremalà du société quela fab-labs FAB-LABS francis« dossier velain*au réagit sont aussi des lieux où particuliers, PMe ou multinatio- ne s’inscrivent pas dans cette seule dynamique. ils fab-labs , une resPonsabiLité PubLique » s’inscrit pour une part dans le prolon- fab-lab FAB-LABS paru dans paru , « c’est, endroitun l’onoù . La revue du pro- , n° 40,octobre2014 n° projet, du RevueLa , du bidouillage informatique à l’inventioninformatiqueà sociale » bidouillage Fab-lab du , pudding de la création du neil gershenfeld, initiateur du concept, ne cache pas les raisons une telle lucidité reste ! d’actualité que peut-être jamais il ne fut d’argent placéd’éclairer à plus l’industrie, haut intérêt ». de porter partout son 000flambeau, liv.16 annuelles,on sentira […] si l’on considère d’ailleurs qu’il s’agitde cet ; iciétablissement nous les avons calculées à la somme de n’aipoint encore parlé des dépenses, soit fixes, soit variables, créent leurs aujourd’huilarecherche publique, les universités françaises, je donne aux gens l’accès aux machines ». programmequi me finance :plutôt du que de parler directeur le du système, avec d’accord mis suis me je donc nantes. sines, un ; tout site un internet tas d’activités pas très passion- mité,cequi veut souvent dire des cours dans des écoles voi- gouvernementdemande que vous fassiez du travail de proxi- :« aujourd’hui, quand lions vous dépensez autant d’argent, le pothèque. la charte du mouvement associatifles priétédes moyens de production et de ! l’échange marchand Voilàqui ne fera pas disparaître les problématiques de la pro- l’équilibre ». millionsd’euros 1,5et2 dechiffre d’affaires par anpour être à ment, il va falloir, essentiellement avec les abonnements, entre TechShop octobre2014, le9 faire profit de ce besoin social et économique stratégique. ! de « jeunes entrepreneurster créatifs » y voient le moyen de sciences et techniques coûte toujours avantchandes pour deassurer pouvoirleur budget. l’appropriationrappor- sociale des ventions,aumécénat etparfois développent des offres mar- la révolution industrielle. travail même si leurs aspirations et besoins lesdiffèrent salariés de deceux la derévolution numérique y vendronttechniques leurnumériques forceet investir depolitiquement l’entreprise. il faut gagner une formation républicaine aux enjeux, usages et vaste projet. moyens en formant les nouvelles générations de salariés à ce (Pascal lamy - lcP avril - 2 2014). le capital » s’encervelle de jus donnedu « produire faut il commerce, d’un et déjàtrie les sance. Produire de la connaissance devenantlifications objetau concept d’unede société indus- et d’économie de la connais- réponse organisationnelle du travail numérique et de ses qua- Plus que le que Plus elle ne promet pas la révolution des rapports sociaux. le pétrole du xxi du pétrole le attention. il « va animer la prochaine révolution industrielle, c’est t80000euros de matériel, etle800 loyer dans le 13 antoine granjon, arnaud de grange...) maisd’investissement avec entre connus (xavier500000 niel, henri seydoux, Jacques parisien« usine io », *Francis Velain fab-labs sciences et techniques coûte techniques et sciences « L’appropriation« des sociale toujours avant de pouvoiravantde toujours , le fab-lab fab-labs de renault, airbus, air liquide, ne lèveront pas l’hy- fab-lab fab-lab e est ingénieur informaticien. ingénieur est siècle ». Pour le capital, le le capital, le Pour siècle ». , c’est le numérique qui doit retenirnotrec’estdoit ,qui numérique le L’usinedigitale rapporter ! » rapporter ! . les qui fait du LaTribune 000dollars 000 après celui mil-à 20 à 20 fab-labs business a retrouvéa « quelques fonds associatifs courent aux sub- titrait : « connaissez-vous : titrait ? ». derrière le fab-lab fab-lab e arrondisse- non plus. est une est fab-lab janvier 2015 janvier du projetdu La revue La

35 LECTRICES & LECTEURS RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page36 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 36 travaiL de SeCteurS E D TEINRAIÉPAR RÉALISÉ NTRETIEN cette dynamique et les formidables les et dynamique cette informationnelle symbolise à cet égard pensons qu’il existe les germes d’un germes les existe qu’il pensons tion comme étant révolutionnaire. nous les grandes mobilisations des dernières potentiels delutte. l’idée d’une alternative. la révolution la alternative. d’une l’idée changement de société radical qui met généra- notre caractérisons nous quoi années en sont l’illustration. Voilà pour- aspirations populaires et remet en selle ments humains se confrontent à des lois époque où les formidables développe- contradiction fait émerger de nouvelles de l’argent toujours plus violentes. cette sociaux considérables. nous vivons une changements de fruit le sont et diale figurations sont à l’œuvre à l’échelle mon-ouvre une nouvelle séquence.2008, desde financière recon-bulle la de plosion moins dans sa dernière phase avec l’im- bouleversements intenses. la crise, du de période une vivons nous car tion » révolu- « génération de parlons nous ? lutionnairede la société nouvelle génération.nouvelle de communiste projet au apport leur et jC de communiste mouvement le les dans jeunesse jouer qu’entendent la rôle le de également situation évoque idir la nordine France. de font qu’ils l’analyse expose munistes, com- jeunes les par menées batailles les sur revient il projet, du Revue La (mjCF), France de communistes jeunes mouvement du congrès du lendemain au est révolutionnaire notre génération une transformationunerévo- à intérêt de a-t-elle france jeunesse la quoi en révolution ».« génération deparlecongrès du mjCf ans le marasme général, le , son secrétaire général, en résume l’orientation.pour résume en général, secrétaire son idir, nordine L ÉO P URGUETTE Le grand entretien grand Le ment pour le président actuel en 2012 en actuel président le pour ment les jeunes ont porté leur suffrage large- ? jeunesse la de la de politique du gouvernement à l’égard faites-vous analyse quelle les potentiels derévolte. montre fleurissent, d’ampleur sociales pour mobilisations les où politique période voie la maîtriser.lale c’est et avenir son construire car lutionnaire pays a intérêt àce unede transformationjeunesse la révo- précaires. et sants tant brimée par des dispositifs infantili- pour- est elle demain. de sociaux défis génération est en capacité de relever les du travail, l’accès à la citoyenneté. notre des et oppressions relégations dans la formation, le monde des semble ment de société parce qu’elle subit l’en- change- au intérêt a pays ce de nesse jeu- la cœur. au humains besoins les transformationc’estrévolutionnairecar la « voie pour construire son avenir et le et avenir son construire pour voie La jeunesse de ce pays a intérêt à une à intérêt a pays ce de La jeunesse maîtriser. effets de la crise pour les plus jeunes. nos par le dernier rapport de l’uniceF sur les dans une situation alarmante, confirmée de chômage et de pauvreté nous placent séscomme jamais. les chiffres records infernale du coût du travail et sont mépri- jeunes sont en effet au cœur de la spirale tiques de précarisation précédentes. les s’inscriventcontinuitépoli-lades dans dispositifs mis en place depuis deux ans commun. Force est de constater que les remettre les jeunes dans la sphèreorganisations du droitde jeunesse pour exiger de nous avons menée avec plus de soixante celas’expliquait parmobilisationla que la justiceetjeunesse. notamment déclaré vouloir être jugé sur a hollande François animés. a les qui des quinquennats de droite précédents mobilisations les durant portées tions que des promesses, ce sont des aspira- sarkozy.nicolas avecPlus finir en pour » RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page37

formations sont attaquées par l’austérité comme jamais et soumises aux deside- TAUX DE CHOMAGE EN FIN DE TROISIÈME ANNÉE DE VIE ACTIVE rata des actionnaires. DES JEUNES ISSUS DE L’ENSEIGNEMENT SECONDAIRE notre génération connaît un bascule- ment : celui de se construire sans les solidarités d’institutions sociales conquises de haute lutte. nous sommes structurés par la débrouille et les priva- tions.

Force est de

« travaiL de SeCteurS constater que les dispositifs mis en place depuis deux ans s’inscrivent dans la continuité des politiques de précarisation précédentes. » Champ : jeunes issus du secondaire dont la région de formation se situe en France métropolitaine. Source : Enquête Génération 2004 (CEREQ).

le pire, c’est que les mobilisations sociales de notre part sont méprisées ou sévèrement réprimées. de la lutte pour nos camarades sans-papiers aux luttes contre les restrictions budgétaires dans le monde éducatif en passant par TAUX DE CHOMAGE EN FIN DE TROISIÈME ANNÉE DE VIE ACTIVE les luttes d’entreprises ou les manifes- DES DIPLÔMÉS DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR tations de cet été pour la liberté du peu- ple palestinien, nos actions sont discré- ditées en permanence. on nous refuse le droit à exprimer une dénonciation sur nos conditions de vie, nos aspirations qui sont malgré tout structurées par un discours de solidarité.

votre congrès a été l’occasion de faire le point sur les campagnes menées par le mouvement jeunes communistes. quelles sont-elles ? quelles nouvelles batailles ont été lancées ? nous pensons qu’il faut tracer des conti- nuités dans nos campagnes pour mar- quer notre génération. nous construi- sons des campagnes autour de deux grands axes de bataille. la lutte pour la conquête de nouveaux droits et la sécurisation de nos parcours de formation et d’emploi constitue notre Champ : jeunes diplômés issus du supérieur dont la région de formation se situe en France La revue première intervention. nous voulons métropolitaine. du projet faire en sorte que chaque jeune puisse s Source : Enquête Génération 2004 (CEREQ). janvier 2015 37 RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page38 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La

38 travaiL de SeCteurS s autant, l’urgence est bien présente tant manence par un gouvernement israé- gouvernement un par manence le peuple palestinien est agressé en per- Pour dernier. novembre 28 le tinien France et de l’union européenne est européenne l’union de et France les autorités françaises devant leur res- mettre voulons nous impunité. toute et colonisation les en bombardements la poursuit qui d’extrême-droite lien de pour l’État la pales- reconnaissance rne l rcnasac n doit ne reconnaissance la grande. la de responsabilité la tant ponsabilité 000 pétitions nousde jeunesavons 30 de terrain attestent de cette dynamique. pris pris une place motrice et nos initiatives lisations. notons que les jeunes y ont y jeunes les que notons lisations. au vu des derniers événements et mobi- réalisable est perspective cette teurs. specta- rester pouvons ne nous lisme, colonia- du affres aux de Face France. la l’État de Palestine dans les frontières reconnaissance de 1967 par la rir Palestine. nous bataillons pour conqué- la sur porte campagne seconde notre défis sociaux dedemain. les relever et travail au réaliser se pour marché du méandres des vies nos retirer voulons nous droits. nos de simple la à dénonciation rester d’un en cycle pas infernal ne de perte de tion ambi- pour a qui social statut un c’est véritables injustices. autour du coût du travail et montrer les dominant discours les déconstruire nous mènerons la bataille acharnée pour par une reprise en main sur nos richesses.de droits sociaux qui ne sera viable que : voilà les piliers d’un socle la recherche sociale des finalités de la production et appropriation stagiaires), (apprentis, professionnelle formation de situation en jeunes les pour digne emploi un à ble du territoire, réglementations et accès accèségal aux formations sur l’ensem- les politiquesderelégation actuelle. jeunesse. en clair, il de s’agit depolitique rompretoute de avec cœur au jeunes des besoins les mettre de permettent Pour cela, il faut actionner les leviers qui être en maîtrise de son parcours de vie. interventionnistes « et belliqueux au belliqueux et culture de paix de culture nom d’intérêts nom face aux périls faceaux contrairesaux économiques Construire une Construire peuples. peuples. » uine urs e jue. notre jeunes. des auprès audience nous voulons simplement amplifier notre tidiennes. nous restons actifs dans les luttes quo- notre utilité concrète. bien évidemment, l’accès aux vacances, il s’agit de montrerscolaire, soutien du sportifs, tournois des comme actions des Par pression. d’ex- cadre un donner leur jeunes, des darité concrète pour politiser les besoins pratiques d’éducation populaire, de soli- des déployons nous aspirations. leurs réaliser pour l’espace politique donner vement aux réalités des jeunes pour leur cela, nousvoulons adapter notre mou- Pour enjeux. des hauteur la à réponse une nécessite crise la de violence la nous sommes à une période charnière. que constat du partis sommes nous ? buts quels dans statuts, ses modifié a mjCf Le bien. assez démontre le ukraine, en Moyen-orient, au situation la ples. térêts économiques contraires aux peu- ventionnistes et belliqueux au nom d’in- une culture de paix face aux périls inter- construire et internationales relations les évoquer pour politique enjeu d’un il s’agit sa sur terre. à vivre aussi peuple d’un l’aspiration relayer de mettraient per- qui d’action perspectives réelles les donner pour et entretenus ment nous déconstruisons des clichésvoyages, nos savam- de récit le Par française. le monde et particulièrement la société sur ethno-religieuses lecture de grilles de forces fond du réactionnaires de pour apposer des travail un importation révèle « conflit » prétendue la : tir d’autres que sujets nous devons inves- leurs, la situation en Palestine cristallise ail- Par internationales. répercussions des avoir peut action notre que trant cieux pour dérouler d’autres fils en mon- cette campagne constitue un outil pré- pleinement. investir y nous comptons nous et an un depuis lancée est tion libéra- leur pour internationale pagne nien, dont Marwan barghouti. une cam- palesti- peuple du élus) (et légitimes représentants de nombre certain un à résoudre pour œuvrer à rendre la parole constituent une autre problématique à prisonniers les enfin, occupés. ritoires pour entamer la décolonisation des ter- plication des résolutions internationales viable et souverain. cela passe par l’ap- palestinien État d’un réalisation la vers avancer pour pas premier un qu’être « politique pour réaliser leurs aspirations.leurs réaliser pour politique des jeunes pour leur donner l’espacedonner leur pour jeunes des adapter notre mouvement aux réalités mouvementaux notreadapter service desjeunesetdenotre idéal. ment dans une dynamique collective au mouve- notre concevons nous nesse, qu’un affairesjeu- aux de délégué appendice Plus partage. de solutions les dre pleinement place pour y faire valoir pren- pas y doit génération notre ! sont minces ne qui chantiers des Voilà ? formations pourdemain mènent à ?la Quelle guerre école, quelles tir des logiques d’affrontement qui nous énergétiques ?et comment sociaux sor- besoins aux répondre pour industrie Quelle ? planète la nourrir culturepour attendent notre génération. Quelle agri- cette ainsi démarche à travers les concevons défis d’avenir qui nous ciper. parti- y voulons nous formeet reprend avenir. la perspective d’un autre monde destructeur qui empêche de bâtir notre aux voies pour dépasser ce capitalisme quotidiennement réfléchissons nous résolument révolutionnaire. ne cachons pas évidemment notre visée,du nous collectivement. agir pour monde compréhension de outils les ner don- leur et pays ce de jeunes les pour politique en d’entrée porte une d’être tions complémentaires. et il s’agit pour fraternelle nous constructive. nous avons des interven- manière de PcF le et nous concevons le rapport entre le MJcF ? jeunesse de tions nouvelle ques- aux limite-t-il se ? de génération communiste projet du construction la à communistes jeunes les l’apport peut- vous quel selon être ? PCf le avec mjCf du concevez-vousComment rapport le permanence. temps qu’une démarche à alimenter en même en condition une fois la à c’est société. la radicalement transformer pour qu’essentielles plus sont lectives forces de l’argent. les dynamiques col- aux face forces de rapport un mener pas tout mais il permet quand même de fait ne nombre le politiques. objectifs démarche essentielle pour réaliser nos d’une relève jeunes de maximum un à un cadre pour les réaliser. Faire sa place changement de nombreux jeunes avec quantitatif que de lier les aspirations de but d’un moins s’agit il ambition. cette à correspond ans trois dans adhérents 000 20 des cap le passer de objectif » n RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page39

BRÈVES DE SECTEUR

Marée noire au Bangladesh : des « abenomics » et de rogner encore sur le pouvoir « rompre le silence d’achat des Japonais. et agir avec urgence » Dans ce contexte difficile, le PCJ est la formation qui progresse le plus, remportant 21 sièges contre 8 en Nous apprenons qu’une catastrophe environnemen- 2012. Alors que Shinzo Abe a d’ores et déjà promis une tale et humaine se déroule actuellement au nouvelle hausse de la TVA en 2017 et qu’il prépare un Bangladesh : une marée noire est en train de détruire recul historique de la constitution pacifique du Japon, la plus grande forêt de mangroves du monde dont le PCJ apparaît aujourd’hui comme la force d’opposi- 200 000 personnes, souvent très pauvres, dépendent tion déterminée à résister au côté du peuple japonais, pour leur nourriture. Située dans le Sundarbans, dans mais également en mesure de proposer des mesures le delta du Gange, ce sont déjà près de 50 km2 qui sont alternatives, comme la proposition d’une fiscalité pro- recouverts par les 350 000 litres de pétrole qui se sont gressive que le PCJ oppose à la hausse de la TVA. échappés lors d’une collision entre deux bateaux. Sur place, on assiste à des scènes irréelles où, livrés à eux- Le PCF félicite chaleureusement le Parti communiste mêmes, les Bangladais tentent seuls de lutter contre japonais et son président, Shii Kazuo, pour ce résultat la marée noire, armés de pelles et de filets de pêche. qui confirme et amplifie les progrès des dernières élec- Le pétrolier quant à lui se contente de racheter aux tions municipales et sénatoriales. Bangladais le pétrole qu’ils ramassent : le cynisme et SECTEUR INTERNATIONAL la cupidité atteignent ici leur paroxysme. Aussi, au- delà du drame humain ce sont aussi près de 260 espèces d’oiseaux, des espèces déjà menacées, comme le tigre du Bengale, le crocodile marin ou le python indien qui Éric Zemmour, l’incarnation sont directement mis en danger dans une forêt clas- de la pensée raciste et xénophobe sée au Patrimoine mondial de l’UNESCO. Éric Zemmour s’est encore répandu dans les média. Le PCF déplore que cette catastrophe, touchant un Le quotidien est cette fois-ci italien, Corriere della serra, pays pauvre, ne provoque pas de réactions à la hau- certainement pour échapper aux poursuites judiciaires teur du drame. Trente ans après la catastrophe de pour incitation à la haine raciale. Bhopal presque jour pour jour, c’est encore la préser- vation des profits qui passe avant la protection de l’en- Invité sur toutes les ondes, Éric Zemmour est le plus vironnement et des populations qui y vivent. Ces popu- grand propagandiste de la théorie d’extrême droite du lations sont victimes d’une double injustice : la pauvreté grand remplacement. Islamophobe confirmé, il théo- qui les rend très vulnérables pour faire face à de tels rise l’impossible mélange entre Français et Arabes, événements et l’indifférence générale de la commu- compare l’immigration à l’invasion allemande pen- nauté internationale. Au contraire, des moyens d’ur- dant la guerre, et affirme, pour justifier la déportation gence pour enrayer cette pollution devraient être déblo- de musulmans que la « situation d’un peuple dans le qués dès maintenant, et, à plus long terme, devrait être peuple, des musulmans dans le peuple français, nous instaurée une solidarité internationale pour permet- conduira au chaos et à la guerre civile ». tre à ces pays de sécuriser leurs moyens de transport de combustibles et pouvoir se doter d’une législation Le racisme n’est pas une opinion mais un délit. Quelle environnementale du même niveau que celle des pays différence entre Éric Zemmour et le sulfureux Bloc riches. Identitaire avec lequel même Marine Le Pen refuse de s’afficher officiellement ? Quelle différence entre Éric SECTEUR ÉCOLOGIE Zemmour qui veut déporter les musulmans et le député-maire d’extrême droite Jacques Bompard qui déclarait récemment aux assises de la remigration du Législatives au Japon : Bloc Identitaire, militer pour « encourager le départ de Le PCF salue les progrès ceux qui polluent notre société ». du Parti communiste japonais Il semble malheureusement qu’il n’y ait guère de dif- En provoquant des élections législatives décidées le férences entre ces idéologues de l’extrême droite dure 18 novembre pour le 14 décembre, le premier minis- interdits d’antenne et Éric Zemmour dont les média tre conservateur Shinzo Abe espérait couper court au ont assuré la promotion du livre Le suicide français. débat sur sa politique. Il a réussi son coup de force, fai- Face à cette normalisation, aussi inquiétante que scan- sant passer l’abstention de 40 à 47 %. Il ressort ren- daleuse, de la pensée raciste et xénophobe incarnée forcé de cette élection et remporte avec son allié cen- par Éric Zemmour, le PCF appelle au sursaut. triste « Le Komeito », 325 sièges sur les 475 de la chambre SECTEUR LUTTE CONTRE LE RACISME basse, avec le projet d’aller plus loin dans sa politique La revue du projet janvier 2015 39 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page40

extrême droite La ronde des boucs émissaires du juif ou de l’arabe, qui sera le bouc émissaire de la droite ultra ? L’idéologue , qui tente de rabattre les jeunes de banlieue, opte pour l’antisémitisme. mais d’autres, au Fn, prônent le rapprochement avec israël et voient plutôt dans la communauté musulmane le nouvel ennemi de l’intérieur. ou comment l’extrême droite louvoie, infiltre, teste et s’adapte ? Combat d’idÉeS

(groupe étudiant d’extrême droite), il lage des repères gauche/droite, la trahi- PAR GÉRARD STREIFF fonde l’association « Égalité et réconci- son récurrente d’élites socialistes, le trai- liation » (transformé récemment en parti tement méprisant des pays du sud, l’in- politique). gérence sans vergogne de puissances sa philosophie ? le « nationalisme de telles que les États-unis, pour caricatu- gauche ». Étrange oximoron, typique de rer ces enjeux, transformer la critique cette confusion entretenue par le per- en sentiment haineux, détourner les sonnage. la page de garde de son site colères, trouver des boucs émissaires est symptomatique de cette volonté faciles, glisser de l’argument de classe a campagne de solidarité avec d’embrouille. un mot d’ordre s’affiche : vers des délires de races et de gaza, l’été dernier, a permis aux « gauche du travail et droite des « souches ». À sa manière, il a apporté militants communistes, de tis- valeurs » ; le propos est agrémenté sa petite pierre à l’entreprise de dédia- ser des liens nouveaux, dans d’images. À gauche du bandeau d’ou- bolisation du Front national. Formation certains quartiers, avec des secteurs de la jeunesse popu- Llaire réticente jusque-là à la chose poli- un personnage qui, ces derniers temps, tique. elle a permis aussi de constater « que de drôles d’idées pouvaient circu- s’est senti investi d’une mission : amener ler dans ces cités, véhiculées par d’étranges apôtres. Pas le genre barbu- dans la hotte du Front national les jeunes des djellaba, plutôt celui de bonimenteurs banlieues. » branchés qui la jouent « anti-empire » pour vendre leurs vieilles lunes antisé- verture, on distingue une assemblée de dont il fut membre du comité central mites. c’est notamment le travail de gens personnalités, Fidel castro, che guevara, (2007). en 2009, soral se présente aux comme alain soral, qui ciblent les popu- des leaders du tiers-monde, lesquels élections régionales en Île-de-France lations jeunes et musulmanes des quar- semblent s’adresser à deux personnages sur la liste « antisioniste » du comédien tiers populaires. à droite de l’écran, un couple insolite dieudonné dont il est, dit-on, le gourou soral n’est pas un inconnu. Venu du formé par Jeanne d’arc et alain soral lui- et l’idéologue. monde du spectacle, et après, paraît-il, même ! c’est donc ce personnage qui, ces der- un bref passage au PcF au début des ce bricolage mégalo pourrait prêter à niers temps, s’est senti investi d’une mis- années 1990, il incarne, un temps, ce sourire ; n’empêche qu’en ces temps de sion : amener dans la hotte du Front qu’on appela les « bruns-rouges », autour méli-mélo idéologique et de grand n’im- national les jeunes des banlieues. de la revue L’Idiot International: une phra- porte quoi, il rencontre quelques échos. objectif compliqué quand on sait en séologie néogauchiste au service d’un quelle considération la droite extrême projet autoritaire, un propos prétendu- La banLieue dans La hotte tient l’étranger, de surcroît venu du sud. La revue ment anticapitaliste et une haine de la de marine Le Pen ? Mais soral a cherché de nouvelles portes du projet démocratie. soral part, entre autres, de réalités, l’ex- d’entrée. dieudonné et son théâtre de janvier 2015 en 2007, avec des membres du gud plosion des inégalités de classe, le brouil- la Main d’or en est une, la plus média- 40 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page41

tique. soral, homme de spectacle, ne analyse marxiste de la condition de la d’une mission que personne ne lui a craint pas, pour la cause, de jouer par femme… c’est ce genre de charabia gau- confiée. si sa mission est de ramener les exemple les « bons » courants du rap cho-facho ou facho-gaucho, comme on musulmans en leur expliquant que le Fn contre les mauvais, jugés lubriques ou voudra, qui attire certains. est un parti antisémite ou antisioniste – « cosmopolites ». signe de ces relations le projet était donc d’amener dans la parce que j’ai l’impression que ça devient Combat d’idÉeS (tendues), la chanson du rappeur Médine corbeille de Marine le Pen l’électorat un peu la même chose — il s’est trompé intitulée Mc soraaaal... musulman, à commencer par la jeunesse d’adresse. » des cités. notons, au passage, que d’au- c’est un peu comme si, dans ces milieux tres, à droite, ont nourri cet espoir, et extrémistes, soral avait, aujourd’hui, fina- marqué malheureusement des points. lement moins la cote, qu’un serge Moati, Soral propage exemples : l’udi lagarde, en seine-st- « juif et socialiste » comme l’écrit com- « denis, qui a su séduire ces mêmes plaisamment Le Monde, lequel Moati, pareillement milieux par un clientélisme forcené. dans son Le Pen, vous et moi, a bien Problème pour soral : le Fn s’est divisé œuvré à la normalisation de ce parti de un conservatisme sur l’enjeu ; on s’y dispute l’oreille de la fachos-bobos qu’est le Fn. moral, présidente et ce parti ferait, depuis peu, il n’en demeure pas moins qu’une les yeux doux à israël (voir l’extrait joint), récente enquête iFoP, pour la Fondation anti-homosexuels, sous l’influence d’un certain aymeric pour l’innovation politique (FondaPol), anti-féministe, chauprade, « géopolitologue discret de dominique reynié, montre que c’est passé par l’École de guerre », nous signale chez les électeurs de Marine le Pen que anti-mariage-pour- Marianne. « soral n’a pas d’influence sur se situe le plus haut niveau d’antisémi- tous » Marine, dit ce dernier, il s’est auto-investi tisme. n

comment peut s’établir une complicité entre un dandy de la droite radicale et des jeunes de milieux populaires ? entretenant extraits une obsession anti-israelienne au nom d’un « anti-sionisme », il nourrit un dis- Le Fn, LeS juiFS, LeS muSuLmanS cours antisémite discret. soral connaît le « Le fn aurait-il fini par choisir son camp entre israréliens et Palestiniens, entre poids des mots et le coût des lois, il se juifs et musulmans puisque dans ce parti on mélange allégrement les deux sujets. garde bien d’user de mots qui fâchent et Car le front est toujours tiraillé entre, pour être un peu caricatural, la ligne « que- de rhétoriques prohibées mais sa prose nelle » du nom du geste popularisé par dieudonné et reprise par alain soral, jean- est à lire entre les lignes. il y a dans sa lit- marie Le Pen et bruno gollnisch et la seconde, celle de Louis aliot qui n’hésite pas térature un antisémitisme implicite, allant à mettre en avant ses origines juives et s’était rendu en israël pendant la cam- de soi, convenu, sous-entendu, tacite. pagne présidentielle de marine Le Pen. [...] Les toutes dernières déclarations de « Pas la peine d’insister, vous m’avez com- pris ! » répète-t-il à ses adeptes. lesquels, marine Le Pen sur le fn, « meilleur rempart pour les juifs de france » ou celles dans les tribunes de discussion de son encore justifiant les actions de la Ligue de défense juive et son existence au moment site, se montrent beaucoup moins pré- où il était question de sa dissolution, laissaient à penser qu’entre le père et le com- cautionneux que lui. et disent tout haut pagnon, entre jean-marie Le Pen et Louis aliot, la présidente frontiste avait fait ce que le clan pense tout bas. son choix. Le manifeste d’aymeric Chauprade (publié mi-août sur son blog et inti- soral propage pareillement un conser- tulé « La france face à la question islamique ») vient-il confirmer ce virage ? [...] vatisme moral, anti-homosexuels, anti- Chauprade n’est pas n’importe qui. il reprend l’image d’un fn « rempart pour les féministe, anti-mariage-pour-tous, il la juifs de france ». mais il va plus loin. finie l’époque d’une bande de gaza assimi- joue machiste, autant de « valeurs » cen- lée à un camp de concentration par bruno gollnisch et jean-marie Le Pen. finie sées rencontrer les expressions les plus l’époque aussi où Chauprade lui-même déclarait que « la france vit une épura- moralistes d’une certaine lecture réac tion sourde de ceux qui ne vont pas dans le sens des intérêts américains et israé- de l’islam. là encore, le propos est plutôt pervers, liens » et qu’il connaît « la souffrance cruelle et humiliante infligée par israël aux et biaisé. Quand soral (qui aime s’affi- arabes, Libanais ou Palestiniens ». on était alors au tournant des années 2010. cher dans la posture du dragueur, il en un revirement idéologique à 180 degrés et une défense nouvelle de la politique fit des romans, des essais, des specta- de l’état israélien : « il faut faire preuve de réalisme et ne plus adopter de position cles) part en guerre contre le féminisme, systématique mais s’adapter ». La revue c’est parce que, dit-il, il y voit une manie romain massa/marianne. net du projet de la bourgeoisie pour détourner d’une janvier 2015 41 RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page42 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La os peos omnse e ovmn re qi blt ’tt cul Ls odtos e e mouvement ce de conditions Les actuel.résultent l’étatdes prémisses abolitactuellement quiexistantes. » réel mouvement le communisme appelons nous 42 mouvement rÉeL Lecommunisme n’est pourétatnousunni qui doit être créé,idéal unni surlequel réalité la devra régler.se seLon gramsCi néCessitéLiberté et création de l’ensemble des rapports des l’ensemble de création gie, sens commun, religion, philosophie, idéolo- – manifestations ses de nuum concrète qui inclut la pensée et le conti- sociaux qui sont à la fois en perpétuelle nature humaine qui est production, voire la liberté est la dimension propre à une jectivité de plus en plus universalisable. la connaissance renvoie à une intersub- résultat de son activité. l’objectivité de conceptionla idéalistereformuler de l’actionentend il ; humaine déterministe matérialiste un pas n’est gramsci née. situationla dantde don- conditions les transcen- choix de absolu principe fait se qui arbitre libre comme liberté la de spiritualiste conception toute critique de penser une fonction cruciale, mais il libre définie comme puissance d’agir et volonté la à donné toujours a gramsci humaine natureune À ProPre dimension Liberté, La P subalternes. masses des l’hégémonie pour lutte la dans décisif qu’ellede a ce montre et liberté la de gramscienne conception la tosel analyse andré antonio praxis, la de Gramsci développe une dialectique originale de la nécessité et de la liberté. philosophie une comme marxisme le interprétant toujours déjà le donné en en faisant le faisant en en donné le déjà toujours élabore elle mais pure, matière une à l’acti- de produit le est sociale et rique conception du monde. la réalité histo- volitive. la connaissance n’a jamaiset foismatérielle la à tout humaine vité affaire AR A NDRÉ T OSEL * guration relativement stables. transformation et posés comme confi- les sociétés et la civilisation en se faisant les que groupes ce dominants réussissent en à diriger dissymétrique et gale iné- est liberté la capitaliste modernité la dans élargie. reproduction propre au niveau de subalternité requis pour sa subalternitéla desmasses productives luifautcaril maintenir subordination,la peut porter à son terme cette promesse mode de vie plus actif. le capitalismeun nedans nombreuses plus les masses monde moderne qui est l’assimilationdu promesse la à liée « histoire » desdonc est pratiques spécifiques.laliberté de pour l’hégémonie au sein d’institutions et declasses etgroupes collectifs enlutte duelle se constituant dans l’affrontement pense comme liberté collective et indivi- tance immobile et invariable. gramsci la naturehumaine quin’est pasunesubs- formation indéfiniment plastique de lacetteliberté est processus de l’auto-trans- L’auto-transformation de ProCessus Liberté, La collective et individuelle se constituant dans constituant se individuelle et collective d’institutions et de pratiquesspécifiques. de et d’institutions collectifs en lutte pout l’hégémonie au sein au l’hégémonie pout lutte en collectifs Karlmarx, Friedrich engels - l’affrontementgroupes et classes de « Gramsci la pense comme liberté comme pense la Gramsci L’Idéologieallemande. sentir et de penser des subalternes. d’agir,multiforme puissance ou cité de une limitation structurale de cette capa- civile. la liberté au senssociété la de d’hégémonie capitaliste appareils et implique des formes politiques transforméesniques – deÉtat la production et organisateurs comme dirigeants d’action démocratiques orga- capacités leurs libèrent s’ils les activités sociales. ils ne le peuvent que d’être assimilés en tant qu’acteurscependantlapossibilité derevendiquer à toutes nent. ces groupes dominés et dirigés ont nimentplus libres que ceux qu’ils domi- des groupes qui cherchent à se faire infi- nie. la liberté est lutte d’hégémoniescivilepar les appareils entreprivés d’hégémo- de l’État et s’élargissent à toute la société politiques, culturelles quiéthiques, vie et se conscience de nouent formes autour les subalternes, en les incluant dans des désirer ou supporter dans la passivité par blématique classique, issue d’engels issue classique, blématique pro- la renouvelle gramsci point ce en Liberté La de et néCessité La de diaLeCtique une » RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page43

dans le marxisme des deux inter - un autre : la structure cesse d’être une « la structure de force extérieure qui nationales, relative aux rapports entre nature qui écrase les capacités et les écrase l’homme, l’assimile à soi et le rend nécessité et liberté. il ne s’agit plus de prédétermine pour devenir milieu et passif, se transforme en moyen de liberté faire de la nécessité des conditions don- occasion pour une production de formes en instrument d’une nouvelle forme nées dans les structures économiques de vie et de pensée faisant une société éthique-politique, et génératrice de nou- une nécessité comprise qui permet plus civilisée et inclusive. ce passage velles initiatives » d’identifier (dans les contradictions) des révèle rétroactivement que la nécessité possibles pour une transformation. il représentée par la structure peut être La Liberté, PuissanCe s’agit de nourrir la liberté de la compré- modifiée et cesser d’être une nature non d’un monde qui est mouvement rÉeL hension modificatrice d’un ensemble modifiable définie par les lois d’un déter- un drame en aCte de rapports de forces où se concentre minisme. il devient possible aux forces la liberté se réalise ainsi en un processus l’agir historique et de faire apparaître ce collectives ainsi formées par leur action de libération des subalternes qui peuvent qu’il faut nommer une dialectique de la dans ce passage tout à la fois de trans- produire un nouveau conformisme actif nécessité et de la liberté. À première vue, former l’État et les appareils d’hégémo- de masse ; il s’agit d’en finir avec l’homo cette dialectique prend la forme d’une nie, et, dans le cas des forces subalternes oeconomicus et sa liberté abstraite de mise en tension des trois niveaux de rap- de transformer la structure. comme le choix. Mais cette libération présuppose ports de forces définissant une situa- montre le marché capitaliste, déterminé, deux conditions liées : il faut que les tion donnée. le premier niveau est celui la structure n’est pas extérieure à l’agir masses puissent sélectionner à partir des rapports définissant la structure des volontés associées. elle est le résul- d’elles-mêmes un appareil de direction comme un système d’éléments consis- politique, un parti nouveau qui demeure tants qui imposent leur contrainte avec en relation organique avec elles et soit la rigueur d’une nature apparemment La liberté est capable d’interpréter le senti de leur vécu régie par des lois naturelles détermi- « et de le traduire en propositions d’initia- nistes. le second niveau est celui des bien lutte tives. inversement, d’autre part, pour ne rapports de forces politiques. il s’arti- pas subir l’imposition d’une théorie venue cule en plusieurs moments. le premier d’hégémonies entre du haut du parti et de l’État, ces masses est le moment économico-corporatif forces doivent transformer leur sens commun, où les forces sociales fondamentales se faire acteurs d’une réforme intellec- inscrites dans la structure usent de la fondamentales et tuelle et morale. la liberté se condense marge d’action liée à leur position en pre- alors en la formation d’une conception nant conscience de leurs intérêts face elle se configure du monde, d’une philosophie qui est art aux autres, s’unissent plus ou moins en comme formation politique, qui est à la fois théorique et pra- leur propre sein et dans le conflit pour tique ; car il s’agit bien non seulement de se donner une existence quasi politique. d’une volonté penser un monde à faire, mais de faire le second moment est proprement poli- collective plus ou monde avec les activités humaines trans- tique ou plutôt éthico-politique : ces formées. la liberté est puissance socio- forces luttent pour occuper et exercer moins unifiée. » historique de monde sans rien de garanti. le pouvoir de l’État qui est appareil de on ne peut pas prévoir le cours de l’ac- contrainte mais elles doivent pour cela tat durable qui fait automatisme et sys- tion, du passage de la nécessité à la liberté l’élargir en direction permanente, en tème de régularités, issu d’une infinité ou inversement ; on ne peut prévoir que l’élargissant en État éthico-politique d’actes volontaires individuels qui s’ob- dans la mesure où l’on se constitue en pénétrant les formes de l’activité sociale. jectivent et se pétrifient dans le méca- force agissante, où on agit. la liberté est le troisième moment est à la fois mili- nisme automatique du marché. la liberté puissance d’un monde qui est un drame taire et politico-militaire, car le recours est ainsi présente en cette structure qui en acte. l’histoire de la liberté est une dra- à la guerre est inclus dans la politique. se fait nécessité. inversement, les insti- matique du monde et des individus. la liberté est bien lutte d’hégémonies tutions éthico-politiques chargées d’ob- entre forces fondamentales et elle se jectiver la liberté des classes en lutte la liberté personnelle s’éclaire en ce configure comme formation d’une hégémonique doivent d’une certaine même sens : « si l’individualité est l’en- volonté collective plus ou moins unifiée. manière imposer leur puissance en semble des rapports auxquels chaque nécessité relative, en obtenant le consen- homme s’intègre, nous créer une per- La Liberté est Passage sus des forces alliées et en remplaçant sonnalité signifie acquérir la conscience gramsci affirme que la liberté est pas- le marché déterminé par une structure de ces rapports ; modifier notre propre sage, passage de la nécessité réalisée nouvelle où prévaut le principe de la pla- personnalité signifie modifier l’ensem- dans la structure à la liberté incarnée nification sous une volonté collective. ble de ces rapports ». n dans les niveaux du politique, de l’éthique ce ne peut être seulement celle du nou- et du juridique. il nomme catharsis ce vel État éthico-politique mais celle des passage. c’est tout à la fois la purifica- masses des subalternes mises en situa- *André Tosel est philosophe. Il est La revue tion et la traduction d’un complexe de tion d’être actives dans la production et professeur émérite de philosophie à du projet formes et de puissances distinctes en la culture en sortant de la subalternité. l’université de Nice Sophia-Antipolis. janvier 2015 43 RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page44 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La justifiel’invincible espoir. » L’histoire« enseigne auxhommes ladifficulté desgrandes tâches etlalenteur desaccomplissements, mais elle 44 HiStoire S républicaine politique dansl’italie Calcio Le football en italie dans la seconde moitié du XX du moitié seconde la Ledans footballitalie en pour le mouvement catholique. modèle du parles mouvements politiques, selon le tique de masse du football est encadrée muneàtous les groupes sociaux, la pra- laconstructionà decette culture com- bilité originale, mais évolutive.sant, qui constitue Parallèlement une instance de socia- également un mouvement associatifdivergents, puis-voire opposés. elle engendre d’appartenance sentiments des tallise naires sociaux à l’échelle nationale et cris-1982.la culture du dantfinalelacoupemondeladu deen dent de la république sandro Pertini pen- festationsdejoie exubérantes duprési- qu’illustrentsymboliquement lesmani- qu’ondésigne par un néologisme, le taireet affectif àune équipe de football, culturelnouveau, l’attachement identi- guerre voit l’émergence d’un phénomène chutedu fascisme. or l’immédiat après- l’étudenégligédu P taient chez les italiens. les taientchez politisation des masses, il est un élément de cristallisateur d’identités multiples qui vecteurcoexis- italienne. société la de culturelle et politique toire liste italiens, et le pour le Parti communiste et le Parti socia-l’ Enti di promozione sportiva Unione Italiana Sport Popolare Sport Italiana Unione AR F ABIEN collateralismo ou italienne, a quelque peu quelque a italienne, ou torique, qu’elle soit française historiens,la production his- terrain d’investigation pour lesnées le trentained’an-une depuis i A RCHAMBAULT jeanjaurès Centro Sportivo Italiano calcio football tifo investitles imagi- , par le biais des italienla après est devenu un , notamment * ( (uisP) football tifo , polysémique. tion par les acteurs sociauxration d’une etmémoire cernant les enjeux de cessusla deconstruc- mutation sociale et d’accultu- culturelle, mettant en perspective lestoire pro- politique et le temps long de l’histoire italienne, articulant le temps court immergéededans une étude l’his-delasociété du l’histoire italiens. les chez xis emboîtées, taient, tallisateurd’identités multiples qui coe - politisation des masses et un élémentantonomase »,constitue unvecteur de cris- desergio giuntini, le « sport national par guerre,quanddevint,il selonformulela le football, dans les décennies de l’après- riences individuelles. le football n’est pas reflet de cette complexité dans les expé- tiques) et étudiant leurs connexions et le (culturels, juridiques, économiques, poli- observations une multiplicité d’éléments celui de fait social total, intégrant dansFranceen statutdu marginalsportde à ses montrécomment le football était passé tionnelles histoires événementielles, avaitd’alfred Wahl qui, rompant avec les tradi- recherchesces s’inspirenttravaux des un fait soCiaL totaL affectif à une équipe de football,qu’onde équipe une affectifà l’émergence d’un phénomène culturel phénomène d’un l’émergence nouveau, l’attachementnouveau, identitaireet désigne par un néologisme, le néologisme, un par désigne « calcio L’immédiatvoit après-guerre ne pouvait qu’être pouvait ne ) et e siècle s’inscrit dans l’his- dans s’inscrit siècle compétition et du football de masse lesàtentatives des d’utilisation du football de pertinents. masses » de george Mossedes semblent« nationalisation la ou plushobsbawm d’eric tradition » la de « l’invention que tresparadigmes historiographiques tels mobilisationautoritaire. toutefois d’au- desinstruments de contrôle social et de sente le sport et ses organisationssus » comme élaboré par renzo de Felice, selonqui pré- le modèle de la « capturesation dufootball du par lerégime consen- fasciste, quant à elle, polarisée sur l’instrumentali- était, l’attention italiens historiens des ball par les patronages. sportif catholique et la promotionassociatif mouvement du l’émergence du foot- toirereligieuse ont pour leur partétudié grâceaufootball. les spécialistes d’his- politiquementconstruite, entre autres, été catégorieacette où sens au laire », années aux 1960, 1930 qui années a rendu des ce sport ouvriers, « popu-partis nale » :c’est l’encadrement puissant des laculture ouvrière enune culture natio- quiaurait contribué à« métamorphoser ainsia ébauché unehistoire footballdu un objet historique autonome. alain corbin tifo. » RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page45 un deuxième axe de recherchesfootbaLListique fut consa- diffusion du sPeCtaCLe Les dYnamiques de La la société méridionale. centre et le nord de l’italie, mais aussi dans tures de contrôle social, notamment là etoùcommuniste par le biais de ces struc- constitution des sous-cultures catholiquesociétéitalienne. elle permit d’étudier la de tiquesetidéologiques qui parcourent la structures ses socialisation, et des tensions sociales, poli- sportive tive lyser la traduction dans la sphère associa-sentait le meilleur observatoire pour ana- un premier axe de recherches. elle repré- de leur autonomisation, constitua dèsjusqu’au lors début des annéessportiva 1970,promozione di momentEnti voir leurs projets politiques. l’histoire des comme un moyen privilégié de promou- dans le cadre de manifestations sportives,bilité associative liées au football, tissées liennes ont considéré les formes deencore, socia- dès 1944, lesMieux élites politiquesgénéralisé. ita-encadrement cet à palement celle du football,lique. n’a la pratiquepas échappésportive, et donc princi- de socialisation et d’identification symbo-tiques constituèrent les principaux agentsdécennies de l’après-guerre,les dans toutd’abord, recherches. lesde partis poli- la réflexion s’articule autour de trois axes sYmboLique et d’identifiCation agents de soCiaLisation Les Partis PoLitiques, les strates de la société. l’Église d’étendre sa présencede projet le dans dansoccupa qu’il centrale toutes sport, le cyclisme, dont il montre la place stefano Pivato a écrit l’histoire d’un autre proques. c’est dans cette perspectiverels et desque processus d’acculturation cisme,queréci- grâce desà échanges cultu- n’ont été possibles, après la chute du fas-social, contrôle de et nationale lisation fins de légitimation symbolique, de mobi- niveaux, national, régional et local.plète le foot- celui de la diffusionsion du dujeu, spectacle à différents footballistique,cré à l’étudequi descom- dynamiques de la diffu- elles se sont le plus développées, dans le ball a en effet représenté un facteur d’uni- fication nationale en créant les conditions finit aussi par stimuler les communications les stimuler par aussi finit « identités locales traditionnelles, mais elle mais traditionnelles, locales identités entre les “cent capitales de l’italie” par l’italie”“cent de entreles capitales La passion pour le footballrenforçale les pour Lapassion l’entremisechampionnats. de , de 1944 de , tions et, d’autre part, d’analyser les l’historicitémoda- d’un système de représenta- meuvent.ils’agissait d’une part desaisir en étudiant les acteurs sociaux quidont lesil pro-faut interroger les significationsculturation ettout de circulation des modèles, et évolue en fonction de processus d’ac- culturepartagée n’est pas monolithique sociale.réalitéunedécalageaveclaen systèmedereprésentations autonome, pratique et de réalité sociale que comme êtreà étudié tant dans sadimension de de recherches. le football gagne en effet manifestations constitua le troisième axe enfin, l’étude de la culture du footbaLL et affeCtif À une équiPe de L’attaChement identitaire football chez plusieurs types de litésde l’expression de la passion pour le diversobjets d’identification du et politiques, notamment par l’étude des milieux populaires aux élites intellectuelles facteursdel’émergence du sation générale », il restait à déterminerculture de masseles n’est pas une uniformi- si,comme l’affirme amalia signorelli, « la nuité avec les traditions campanilistiques.lescultures locales, assurant une conti- le football a su concilier son succès avec à Palerme. Vecteur d’une cultured’undiscours social commun, dede trente masse, national. justement était cadre le dont pétitions l’entremise de championnats et de com- entreles « cent capitales del’italie » par communications les stimuler par aussi tités locales traditionnelles, mais elle finit passion pour le football renforça les iden- santeslesetcultures locales. certes,la politiquesetéconomiques homogénéi- compte du jeu complexe entre les forces équipes des « petites patries », en rendant « s’effectue dans le cadre d’un imaginaires’effectued’un cadre le dans positionnement politique précis mais il mais précis politique positionnement L’attachementgrand d’un couleurs aux culturel qui est structuré par des par structuré est qui culturel club n’est pas réductible à un à n’estréductible club pas oppositions politiques. politiques. oppositions » tifo tifo tifosi et de ses pourles tifo ,des , des équipes locales à la le devenant ainsi des stéréotypes. À cesociaux, groupes titre, des réalité l’effective tions sociales vivent plus longtemps que représentationsetles auto-représenta- cosité », il faut comprendre le fait que les sité » des définitions collectives. Par « vis- deceque Paul Veyne appelle la« visco- mesure,la Juventus) sont des exemples nazionale,lalazio, etdans une moindre (l’intertorino) le roma, « droite » la et - tiques opposant la « gauche » (le Milan, la étiquettesdifférenciées en termes poli- représentations que véhicule ce club. les de ses fidèles, l’important réside dans les club ne reflète pas la composition sociale à la limite que le marquage politique d’un desoppositions politiques. Peu importe imaginaireculturel quiest structuré par précis mais il s’effectue dans le cadreréductible d’un à un positionnement politique pas n’est club grand d’un couleurs aux haitedonner auxautres. l’attachement vité se donne d’elle-même et qu’elle sou- enracinée dans la durée, qu’une collecti- mais plutôt comme l’image stéréotypée, considérée comme le être reflet pas d’une réalité doit particulière, ne » droite « de et gauche » « de entreclubs sition identités culturelles.les façonnent lasociales appartenances traditionnelle oppo-les mesure quelle dans déterminer de nirune grande équipe nationale permet l’analyse des choix qui amènent à soute- nale. nent des supporters à une échelle natio- par les grandes équipes urbaines qui drai- identité imaginaire. manententre uneidentité réelleune et en définitive, le leur choix et à expliquer leurlamanière dontappartenance. ils se plaisent àraconter régissent les oppositions entre tantd’étudier lesraisons objectives qui Vovelle donne à ces notions : il« imaginaire ne s’agit collectif », pas au sens que Michel tifo *FabienArchambault de Limoges. de l’université à contemporainehistoire en conférences de maître est Il participe d’une « mentalité » ou d’un tifo est un compromis per- Nazionale » n est historien. est , en passant tifosi mais janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 45 HiStoire RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page46 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La constitutiond’un savoir populaire émancipateur. coopération, frontières, murs, l’espace, habiter, l’organisation derapportsdomination, de urbanité... pourcompréhension déterminantsLa dynamiques des socio-spatiales sont participe milieula de son à l’homme de Les territoires sont des produits sociaux et le processus de production se poursuit. du global au local les rapports

46 produCtion de territoireS L des espacespublics les usagesféminins La villecôté femmes : biterémancipateurs. d’échanger et villesur ce que la peut être de connaissances un urbanisme leurs partagerqui faciliterait de habitants des aux modes d’ha- ethabitantes aux Gennevilliers permet à recherche-action débuté participatif de projet Laquotidienneté quartierducomme espace souventvécuest féminine. un

nombreuses que les hommes à vivre à hommes les que nombreuses villes occidentales, les femmesdes sontl’ensemble plus dans aujourd’hui, tiel. l’espace vécu des femmes pour l’essen- et rapidement bâtis par les hommes sont urbains de « chemins de grue » dessinés ou encore à temps partiel. ces espaces grossesse, première la de lors arrêtées souvent courtes, généralement alors sont féminines professionnelles rières lieu de travail et le logement. or, les car- le entre forte relation une maintenant en tout importante mal-logement de

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AR D nombreuses que les hommes à vivre dans vivre à hommes les que nombreuses

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des villes construites par les hommes. les par construites villes des ORINNE aujourd’hui, dans l’ensemblevilles dans aujourd’hui,des occidentales, les femmes sont plus femmessont occidentales,les

ver une solution à la situationla verà solution une l’impérieuse nécessité de trou- sieurs objectifs, en particulier années 1960 a répondu à plu- grands ensembles à la fin des des ville la de construction a

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UXEMBOURG * il ne s’agit alors pas tant de la seule forme publics etavec lamixitégenrée. espaces des d’usages mixité la raréfie professionnelles et les lieux de logementd’activités lieux les entre spatiale ture genrée de l’espace public. en effet la rup- fonctionnelle, renforce la fragmentation ville la moderne, de en ne permettant pas la mixité compartimentation la de loger. or la ville de la mondialisation, issue temps été réduite à la seule fonction de long- a fonctiond’habiter la même que tiers de grands ensembles. c’est-à-dire la population dans nombre de ces quar- générales de l’habiter de l’ensemble de déficiences aux confronté est féminin habiter cet enfin, rares. sont arrêts les où circulation une par mais meuble…), d’im- halls (bancs, hommes les faire le tion pérenne des lieux comme peuvent occupa- une par pas traduit se ne cela référant au nombre de lieux fréquentés, priation de l’espace public urbain, en se les femmes ont une plus grande appro- les par hommes. construites Pour autant, si villes cela signifie que des dans » plus diversifié. habiter d’un prisme au repenser à est contexte où un la conceptiondans ceci decompris, l’urbanisme institutionnels acteurs société, la de l’ensemble pour coup » et qu’elle ne va pas encore de soi construction sociale du territoired’une s’agit « après qu’il difficile plus d’autant est urbain l’espace dans femmes des place la pour lutte la néanmoins, née. vent à temps partiel et à durée détermi- sou- soit emploi cet que bien l’emploi, à nombreuses plus accèdent femmes les suivante décennie la durant effet, en professionnalisation. la et mation s’agit, entre autres, d’encourager la for- de démarche il la quartiers. des social développement de relais des mais quartiers des silencieuses occupantes des plus non femmes des faisant en qu’auféminine 1980 années des début urbaines ne se penchent sur la question vécu est souvent féminine.espace comme les politiquesquartier du dienneté quoti- or,cette quotidienne. l’urbanité urbaine que du fond de ce qui construit e a il hbtt t i sociale, Vie et habitat : ville la de politiques des périodes différentes les ments collectifs. elle a, par la suite, loge- connu de ensembles grands de duction pro- la reconstruction, la de période la pendant connu, a gennevilliers sienne, pari- région la de l’ensemble comme PartiCiPatifaCtion reCherChe-Projetde un RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page47 les cartes mentales sont un outil perti- outil un sont mentales cartes les Pour renforcer cette première approche, mentaLesCartes Les ter émancipateurs. nisme qui faciliterait des modes d’habi- d’échangeraussi sur mais ce que peutville, être la un de urba- connaissances leurs partageant en projet le dans ger s’enga- de habitants aux et habitantes les sur aux permet approche social cette femmes. contrôle d’un nence perma- la de conscience prenant en publics espaces des usages des mixité à la fois vers l’habiter, le droit à la ville, la orientée populaire, d’éducation rience à gennevilliers qui s’appuie sur une expé- recherche-action participatif et critique « la ville côté femmes » est un projet de récemment classé anru 2. opération anru, le second, d’une les agnettes,sortant grésillons, des quartier attarder, à travers deux quartiers l’un, le période que nous avons choisi de nous lement urbain… c’est sur cette dernière tions de l’agence nationale de renouvel- développement social urbain, interven- quartiers, des social développement raient plus largement le territoire com- territoire le largement plus raient s’approprie- femmes les que montrer à tend femmes et hommes entre ties l’analyse de 76 cartes également répar- et habitants. petit échantillon de plus de 70 habitantespremier d’un auprès œuvre en mis été a protocole ce ressenti. le selon leurs cou- les variant en nuit, trajets les tillés sont dessinés les trajets de jour, en poin- plein trait en rouge. en méfiance d’une appréhension, d’une malaise, d’un jet faisantl’ob-parcours noir,les en aimé) mal- ni aimé (ni intérêt sans parcours ciant les parcours appréciés en vert, les différen- en commune la dans ments déplace- représenterfemmesleurs de aux et hommes aux demandé avons nous blanche, feuille une et travail) de à gennevilliers, quartier de résidence ou de contextualisation (âge, date d’arrivée mations. avec un minimum d’éléments infor- des tire l’on que distorsions ces de autres, entre c’est, mais habituelle métrique la pas respectent ces ne ». cartes spatiaux marqueurs « les bles lisi- plus rendre de l’avantage a il nent. utilitaires. répondant essentiellement à des raisons trouve nuancée par l’étendue de trajets l’idée du confinement spatial féminin se les hommes. de ces premiers résultats, par ignorés ou appréciés bien ou sont accueillants alors que ces mêmes lieux tation à des espaces vécus comme peu confron- qu’une temps même en riale territo- appropriation grande plus une montrent elles évités. contraire au ou ressortir des espaces publics appréciés les femmes, plus que les hommes, font sept delacommune. les sur quartiers de peu que citent ne et représentent ne ils doute, sans rent celui des hommes. si ceux-ci le parcou- territoire parcouru est plus étendu que le et mieux connaissent le elles munal, VIII et ParisX. et VIII Parisde universités des géographie MessaoudiDalila d’Artois.l’université à conférences de maître est géographe. Elle Luxembourg*Corinne n est docteure en docteure est Cartesmentales est janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 47 produCtion de territoireS

RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page48 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La os esn ae rbli qe sine as osine ’s qe un d lâe e cncec sans conscience et la » l’âme de de ruine participe que n’est n’estscience impasse. souventqu’une conscience celle-ci sans science de « que citoyenne rabelais avec pensons L’appropriation nous société. de enjeu un construction du projet communiste. Chaque mois un éclairearticle une question scientifique et technique. et est scientifique culture La 48 SCienCeS O japonaises Les mathématiques

évolué à l’époque meiji (1868-1912) en s’adaptant(1868-1912)en étrangers. meiji concepts l’époque aux évoluéà edol’èremathématiques(1600-1868), ont les sous japon développéesau ture du pays ( pour appliquer cette politique de ferme- 1639, des mesures drastiques sont prises jésuites veulent importer. entre 1633 et les que chrétienne religion la avec et étrangers, les avec contacts les limiter tokugawa mettent en place des lois pour dirigeants (shoguns) de la dynastie des (notamment les Portugais), les premiers ciaux et culturels avec l’asie et l’europe après une période d’échanges commer- il est vrai que, au début de l’époque d’edo, sances que l’on qualifierait aujourd’hui l’onqualifierait que sances ment, et plusieurs domaines dedéveloppe- connais-de paix, de période une à l’époque d’edo correspond également avecpas derapport lechristianisme. n’ont qui ceux pour levée, est dentaux de 1720, l’interdiction sur les livres occi- commerciales avec le Japon et, à partir relations des également ont coréens les et chinois les pays : du totale ture ferme- la de l’idée relativiser à tendent historiens les Mais interdits. sont gers est leur réservé, qui à nagasaki,comptoir et lesle ouvrages dans étran-Japon seuls européens autorisés à pénétrer au les théorie) (en deviennent hollandais ne peuvent plus voyager à l’étranger, les

E TEINAVEC NTRETIEN cadre ? ce préciser Peux-tu l’époque meiji. à ouvert qu’il s’est et d’edo l’ère dant pen- lui-même était sur fermé japon le que dit n

Sakoku M

鎖国) : les Japonais

ARION

C

OUSIN * * rtces aoas ntmet en xix du début au médecine. notamment japonais, praticiens les par utilisés et traduits, être à ment égale- commencent européens fiques scienti- ouvrages des d’edo, l’époque durant originaux. résultats des poser ils savent aussi s’en détacher pour pro- plus profonde les ouvrages chinois, mais manière de étudient japonais savants les culturelle, et géographique mité vilégié depuis des siècles, de par sa proxi- interlocuteurpri- un constituant chine niques et méthodes de leur domaine. la collaborantfairepour évoluer tech-les guns certains et période cette durant exemple proposé de nombreux ouvrages du calendrier ou de la médecine ont par tions importantes. ainsi, les spécialistes de scientifiques connaissent des évolu- « différentescultures, la forme des textes,formedes la les intérêts pour les pour intérêts les communs entreles communs existe des résultatsexistedes d’une civilisation à civilisation d’une nature des objets naturedes s’entourent d’un groupe de savants étudiés varientétudiés pratiques ou la pratiquesou dans l’histoire, s’il l’histoire,dans applications l’autre » e siècle, les siècle, sho- moitié du xVii seconde la de partir à japonais ticiens métriques élaborées par les mathéma- trigono- ou algébriques méthodes les donné. enfin est résultat le et décrite, souvent sur un instrument de calcul) est dire un ensemble d’actions situation à effectuer, une à concrète), puis une grâce procédure (c’est-à- général (en proposé est mathématique problème un énoncé typique de cette tradition, un matique « algorithmique » chinoise : dans développe à partir de la tradition mathé - térise l’époque d’edo, le le d’edo, l’époque térise sification de l’activité culturelle qui carac- ( traditionnelles mathématiques des nais, probablement en raison du succès traité mathématique occidental en japo- en 1860, il n’existe aucune traduction de 1860 ? en japonaises mathématiques l’étatdes était quel tés hollandais. diffusées grâce aux traductions de trai- que l’héliocentrisme ou l’électricité,telles sontthéories, plusieurs et tensifient études hollandaises ( les calendéristes chinois sont perfec- sont chinois calendéristes les et les méthodes de calcul proposées par rapport avec l’élaboration du calendrier en effectuées également sont tiques mathéma- recherches certaines sées. spéciali- privées écoles des rieur, dans terakoya les locales, populations les par gérées écoles des (dans élémentaire niveau gnées, au milieu du xix ensei- toujours sont elles (1664-1739). Katahiro takebe et 1708) takakazu seki de ceux port au savoir chinois : voir, notamment, nombreux travaux, émancipés par rap- wasan 和算). durant la période d’inten- 寺子屋 e siècle ont donné lieu à de ) jusqu’au niveau supé- rangaku e siècle, depuis le 関孝和 弘 賢 部 建 wasan 蘭学) s’in- (1642- se se RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page49 transfert scientifique ne constitue pas constitue ne scientifique transfert ce étrangers. concepts et méthodes gage mathématique japonais adapté aux ou à la mise en place d’un nouveau lan- crent à la traduction de traités étrangers, mathématiciens de l’ère Meiji se les consa- historiens. les pour sujet un nent devien- elles abandonnés, plètement com- sont celles-ci de l’enseignement et lespratiquestraditionnelles wasan. nement qui impose le remplacement du l’État. ainsi, c’est la politique du gouver- par fixés sont programmes les dont et dentaux, à plusieurs niveaux dépendants,occi- modèles des inspiré hiérarchisé, tralisé de l’époque d’edo étendu par un système réseau d’écoles, le pluriel, protéiforme et décen- remplacer faut il est lui-même complètement remodelé. supérieur, dans un système éducatif qui au primaire du occidentales matiques 学制 en 1872, le décret de l’éducation ? échange... greffe,d’un d’une remplacement, d’un s’agit-il ? tion introduc-s’estcettefaiteComment occidentales (yōsan mathématiques les sur fondées tales, ries et méthodes scientifiques occiden- théo- les que ainsi production, de tion, connaissances, les modèles d’organisa- duire de manière rapide et profonde les intro- gouvernementpour le par prises alors sont mesures nombreuses de afin que l’intérêt de l’empire soit Monde promu. ».le travers à partout recherchée être doit connaissance « la étrangers : l’importation des concepts et modèles à explicitement incite il articles », cinq l’empereur prononce son « serment en lorsque 1868, en pourquoi, c’est cité. pays d’occident ont montré leur effica- les lesquels dans domaines efficaces, le pays d’un armement et d’une marine Meiji (1868-1912). il fautl’époque notammentcaractérise qui doter mouvement un vaste mouvement de modernisation, dans pays le d’engager nécessaire est il colonisation, la éviter et nations des concert le dans forte position une dre gouvernement japonais que, pour pren- au montre l’opium) de (guerres chine en situation la extérieur. commerce sent au Japon d’ouvrir ses frontières au du interventions commodore les Perry, les États-unis avec impo- 1853, en pour- et quoi ? occidentales matiques mathé- d’introduireles décidé a qui intégrantepartie destextes duwasan. n’estpas obtenus, résultats les prouve tion argumentative héritée d’euclide, qui démonstra- la géométrie, en exemple, par américains : ou européens textes néanmoins bien différente de celle des du tradition la de matiques mathé- textes des forme la tionnées. instaure l’enseignement des mathé- 洋算). wasan Gakusei est tions. ainsi, même si l’introduction des l’introduction si même ainsi, tions. démonstra- les constituent que tiles » nent pas l’intérêt des textes longs et « inu-débats chez les chinois, qui ne compren-nombreux de suscite mathématiques des vision cette (1538-1612). clavius christophorus de commentée latine Éléments des partielle traduction une proposent xix au France en introduites exemple, par sont, d’acupuncture japonaises tiques radiquement) les savants (certaines pra- certains si domaines scientifiques européens, intéressent des (spo- côté du péennes etjaponaises. euro- cultures les entre contrastes les donné étant traduits, traités des rente (wasan) et dont la forme est bien diffé- pas dans la continuité du savoir en place poser des ouvrages originaux, qui ne sont acteurs du pays récepteur doivent pro- d’adopter un processus de pensée et les une simple adaptation technique, il s’agit chinois xu guangqi徐光啟 xu chinois naire Matteo ricci (1552-1610) et le savant en mathématiques, en 1607, le mission- valeuren leurs connaissancesmettent scientifiques.missionnaires les nisme, chinois et, à terme, introduire le christia- Pour établir un dialogue avec les savants européens. mathématiques ouvrages duisent, dès le début du xVii intro- qui jésuites les sont ce chine, en Chine ? en analogue été a-t-il processus Le et européens envoyés auJapon. tirent pas les mathématiciens américains que des recherches des que mettre en évidence en mettre mais, en europe ou europe en mais, faut attendre la fin fautattendrela e du XX du siècle), les résultats du mathématiciens aux États-unis,il aux sérieuses soient sérieuses « les apports des apports les l’époque d’edol’époque études ont été ont études menées sur le sur menées menées pour menées nombreuses japonais de japonais d’euclide basée sur la version au japon, de japon, au sujet. e siècle pour siècle » (1562-1633) wasan e siècle, les n’at- xx du fin la attendrefaut il États-unis, aux ou europe en mais, d’edo l’époque de japonais mathématiciens des apports les évidence en mettre pour menées été ont études nombreuses de Japon, quement un sujet d’étude historique. au dures du du dures procé- et techniques les aujourd’hui, des fois ? aujourd’hui d’autre- japonaises mathématiques reste-t-il que civilisation àl’autre. nature des objets étudiés varient d’une la ou pratiques applications les pour cultures, la forme des textes, les intérêts résultats communs entre les différentes existedes s’il l’histoire, dans valide. est qui permet de montrer que le théorème ils s’intéressent surtout à la justification ces problèmes et, dans la grèce antique, proposentprocédurestraiterdes pour savants les antique, chine la dans ciés, résoudre les problèmes qui lui en sont : asso- l’autre Mésopotamie, les à scribes apprennent à culture d’une varie qui les mathématiciens, mais c’est la forme Pythagore sont utilisésde et enseignés par théorème ce à associés résultats Mésopotamie ou l’antiquité chinoise, les la depuis rectangle. triangle d’un côté du longueur la calculer de permet qui rème de Pythagore » est une procédure « théo- le aujourd’hui appelle qu’on ce d’edo,l’époque de Japon le dans ainsi, traditionnelles ! pratiques des absent est démontrer) de s’agit qu’il matique même de « théorème » (énoncé mathé- les Japonais avant l’ère Meiji, le concept sont évidemment connus et utilisés par si les résultats du et théorème de Pythagore qu’est-cevoudraitdire ? cela universelles que sont-elles tiques mathéma- les le mais est partout, même Pythagore de théorème Le connaissances occidentales. nouvelle importation plus générale des vaux japonais de l’ère Meiji lors de cette tra- les d’ailleurs utiliseront continent du savants les chine. en occidentales ser l’enseignement des mathématiques noises, au début du xx du début au noises, chi- autorités les forceront qui tionale les et interna- situation politique la à dues contraintes situation la plus de fois une c’est traditionnel. savoir le ter tains résultats européens pour complé- proprespratiques, introduisanten cer- leurs développer de continuer fèrent pré- ceux-ci chinois, les chez précoce plus est européennes mathématiques sérieuses soient menées sur le sujet. Propos recueillis par Pierre CrépelPierre par recueillisPropos sciences. des histoire Cousin*Marion e siècle pour que des recherches des que pour siècle wasan 和算 est docteure en docteure est constituent uni- constituent e siècle, à impo- à siècle, n janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 49 SCienCeS RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page50

PAR GÉRARD STREIFF Les français et l’entreprise information et manipulation

À l’occasion de la journée du livre d’économie (fin novembre), Mais on s’interrogera sur le caractère unilatéral des questions, iPsos et le Monde ont sondé l’opinion sur l’entreprise. Miracle, sur leur formulation (la notion d’entreprise est liée à l’idée de s’émeut le quotidien : « la France est réconciliée avec l’en- liberté, l’État, lui, est assimilé à contrôle et réglementation), treprise ». c’est « une conversion massive », estime encore sur les silences aussi : il y est question d’une entreprise en soi, le journal ; c’est la fin de « la grille dominants-dominés qui a sans statut (privée ? publique ?), sans actionnaires, sans aucun SondaGe pu prévaloir par le passé », ajoute brice teinturier, d’iPsos. rapport avec le cancer financier, sans lien avec les inégalités c’est peut-être aller un peu vite en besogne. il est vrai que croissantes. l’opinion subit depuis dix ans (au moins) un formidable pilon- on remarquera ensuite que les sondés ne font pas ou peu le nage libéral, entamé par sarkozy, amplifié par hollande, visant lien entre le nom des entreprises (qu’ils connaissent majori- à discréditer l’État (et sa dette !) ; cette propagande laisse des tairement, genre total, Psa, edF) et le nom des patrons, qu’ils traces, la confiance dans la puissance publique est atteinte ; ignorent, à plus de 90 %. et il semble que l’électorat socialiste y a été particulièrement on notera enfin la singularité de l’électorat Front de gauche/PcF, sensible. sa résistance aussi au bourrage de crâne patronal.

Pour vous, l’entreprise évoque-t-elle quelque chose de positif ?

ensemble des sondés, 89 % PC/front de gauche, 75 % Ps, 93 % umP/udi, 98 % fn, 87 %

Pour faire face aux difficultés économiques, pensez-vous qu’il faut que l’État fasse confiance aux entreprises et leur donne plus de liberté ? ou que l’État les contrôle et les réglemente plus étroitement ?

ensemble (confiance), 80 % PC/front de gauche, 50 % Ps, 74 % umP/udi, 97 % fn, 78 %

La revue du projet janvier 2015 50 RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page51

PAR MICHAËL ORAND Les nouveaux immigrés : de plus en plus d’européens, de plus en plus qualifiés

À l’heure où le fantasme du « grand remplacement » a micro ouvert dans tous les grands média, et où ses pro- moteurs peuvent asséner mensonges et contre-vérités, sans le moindre début de réaction, à longueur de journées, il apparaît plus que nécessaire de recadrer le débat avec des éléments concrets. Les chiffres les plus récents publiés par l’insee concernant les immigrés et plus particulièrement les nouveaux migrants dépeignent en effet un tableau bien différent de celui que nous présentent les charlatans d’extrême-droite.

en 2013, les immigrés, c’est-à-dire les personnes nées à l’étran- cains, qui représentent 30 % des entrées (dont 17 % pour le ger et de nationalité étrangère à leur naissance, étaient 5,8 Maghreb), puis l’asie, l’amérique et l’océanie avec 24 % des millions en France. en dix ans, le nombre nouveaux migrants. ainsi, l’immigration StatiStiqueS d’immigrés a augmenté de 800 000 per- européenne semble la source principale sonnes, faisant passer la part de la popu- 58 % des nouveaux de l’accroissement du nombre de nou- lation immigrée de 8,0 % en 2004 à 8,8 % « veaux entrants au cours des dernières en 2013. cela ne signifie cependant pas immigrés sont des années. que seuls 800 000 nouveaux immigrés sont arrivés en France sur cette période : immigrées, n’entrant les nouveaux migrants sont relativement il faut également tenir compte des décès plus seulement pour jeunes : la moitié d’entre eux sont âgés et des sorties du territoire. chaque année de 19 à 36 ans au moment de leur arri- en moyenne, ce sont 200 000 immigrés des raisons familiales, vée. Quelques pays font exceptions, avec qui sont arrivés en France, pour 50 000 des immigrés plus âgés, notamment la décès et 60 000 départs. 63 % d’entre eux ont belgique et le royaume-uni. ce sont éga- au moins un diplôme lement majoritairement des femmes, Parmi ces 200 000 immigrés environ puisque 58 % des nouveaux immigrés arrivant chaque année, l’origine géogra- du niveau du sont des immigrées, n’entrant plus seu- phique la plus représentée est l’europe baccalauréat. » lement pour des raisons familiales, (graphique), en particulier le Portugal, le comme cela a pu être le cas par le passé. royaume-uni, l’espagne et l’italie. en 2012, près de la moitié enfin, les nouveaux migrants sont de plus en plus diplômés : (46 %) des nouveaux entrants sur le territoire français venaient 63 % d’entre eux ont au moins un diplôme du niveau du bac- ainsi d’un pays européen. Viennent ensuite les immigrés afri- calauréat.

NOMBRE D’IMMIGRÉS PAR AN ET PAR RÉGION D’ORIGINE

La revue Source : INSEE, Recensements du projet janvier 2015 51 RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page52 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 52 revue deS mÉdia L ( une boîte de production, News dans l’ouvrage de nick davies, tannique contemporain toutes édictées bri- journalisme le critiquant règles dix et et les contraintes temporelles ontsensationnalisme du poussérecherche cette sensationnaLisme du reCherChe P non-information.de parodiques sites les plus en plus de fréquentent internautes les nouveau, phénomène et passif toujours pas n’est public Le faits. des vérification la La recherche du sensationnel et de l’exclusivité détourne les journalistes de possible ». c’est ce que stipule l’une des crue plus la forme la dans émotionnel état son de amplifiée version une dre dans le sens de la panique morale : « ven- bilité journalistique. les journalistes vont même si celles-ci manquaient de crédi- – divers faits et rumeur mélangeant – AR dés A (2008). NTHONY de « clowns psychopathes » partout les mêmes histoires breuses rédactions à publier la population terrorisent a poussé de nom- qui clowns a multiplication d’affaires de ( M ARANGHI dis ) Keep in News , information Flat Earth ) crédit a énooi e d l’information, de 12/11/2014). et cet épiphénomène des faux déontologie la par la police nationale (observatoire de interpellés été ont clowns jeunes les et dans un parc de douai que le journaliste passants aux peur faire de but le dans à deux mineurs de porter des masques la chaîne M6. c’est après avoir demandé minutes »de « 66 magazine au destiné tage sur les « clowns » qui était à l’origine repor- un pièces toutes de fabriquer à jt, plus de la moitié jt,la de plus traitées dans nos dans traitées ont trait aux faitsaux traitont violences contreviolences les personnes. personnes. les « divers liés aux liés divers informations de toutes les toutesde » nappeurs » – créés ou non clowns, « clowns tueurs » ou autres « kid- relayée par la chaîne membres. après que l’information a été cette page de « fan » atteigne Poutine. les que 50 000 pour suffi avaient Vladimir jours Quelques de patrie la dans en belgique avant d’atterrir en Mordovie, teur avait décidé de s’exiler fiscalement l’ac- où de moment au depardieu page gérard soutien au fausse la consacrée de Facebook souvient se on faits etleurcrédibilité. vérificationdes la journalisme : du taux compromettre les éléments fondamen- à et rigueur de manquer à journalistes les soldats » « petits leurs et média les amènent « l’exclusivité » de recherche la et précipitation la 2013). juin n°30, des adolescents et des enfants (ina stat avant en mettant diversfaits des ment Parmi celles-ci, on retrouve essentielle- liés aux violences contre les personnes. plus de la moitié ont trait aux faits divers Jt, nos dans traitées informations les toutes sortes sur de violences focalise observées. se de qui toutes formation l’in- de général traitement du l’image à pure player ex-nihilo bFM tV – est RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page53 mation traitée. sources et une uniformisation de l’infor- l’éventailde réduction une quence des consé- pour a qui ce d’accès, faciles et disponibles sources des tout avant News gans dans son ouvrage magique » qui serait tirée du « revolver » « piqûre hypodermique » ou une « balle sa attendant assis » « canard un à milé assi- être peut ne spectateur le tique. média- message au rapport par passif toutefois, le public n’est pas forcément d’information PastiChessites Les de herbert l’énonce comme information. fausse une d’ébruiter d’éviter – d’œil coup d’un l’espace en – permis aurait une recherche sur un moteur de recherche vérifier : à simple très pourtant était qui sources des crédibilité la de problème le bien montre – soit qu’elle anecdotique aussi information– cette forte » (SudOuest, 19/12/12). tiques, sociaux, qui ont fait cette France protéger enfin les grands principes poli- emplois contre les Mittal nos et consorts, et et nationale l’industrie défendre pour Florange, de salariés les soutenir nous serons encore plus nombreux pour plus loin. espérons que la prochaine fois [...]. Merci encore, et continuons toujours le chemin parcouru : 50 000 membres a uriné sur la moquette d’un avion. Voyez « cette page a démarré après que gérard en déclarant ainsi sur les réseaux sociaux :la retourner au profit de ses convictions situationpour la de profité a dernier ce nique. une fois la supercherie dévoilée, iro- but un dans bordeaux de l’ieP de communistes étudiants des l’union de étudiant un par créée été avait qu’elle découvrir pour page la de nistrateur l’admi- identifier rapidement par finira et par France 2, l’équipe du (1979), les journalistes cherchent Deciding What’s Petit Journal régulièrement les 900 000 visiteurs 900 000 les régulièrement au Grand Journal chronique une dorénavant sède apparus détournant quant à eux l’infor- récemment sont sites de flopée une du côtés aux 4/02/2014). différée » sur la loi de la famille ( d’avancementprovisoirepotentialité à christine boutin, qui a cité « la stratégie l’ancienne comme Présidente du Parti chrétien-démocrate, divulguait qu’il « informations » les degré premier au repris ont qui politiques personnalités notamment fait s’est connaître par certaines parodique site le (11/06/2013). selon mois par uniques Onion, tion. reprenant le modèle américain d’informa- sites de pastiches des sant grandis- succès le travers à l’observer parodiques de non-information. onsites peutdes élevée plus en plus de tation dance chez les internautes : la fréquen- ten- nouvelle une noter peut on natifs, tourner vers les se sites d’informationpeuvent derniers alter- ces si classique. le choix de se détourner de l’information faire et dispose il dont l’information de au conditionnement classique en fonction « résister » peut dernier ce 1930. F. skinner et ivan Pavlov dans les années a. berger,béhavioristes arthur burrhus théoriciens les l’expliquaient comme « tête » la viserait lui qui et média du désinformation s’ils ne sont pas connus pas sont ne désinformations’ils « le site français site le L’humourcertains comme titres des contenus des articles de ces sites ces de articles contenusdes d’information peuvent mener à la à d’informationpeuventmener de canal Plus – dépasse Gorafi du public qui les lit. lit. les qui public du , touteGorafi, e Inrocks Les – qui pos- qui – Le Figaro The , nité, aussi » ( perdraitteraiton etfoil’huma-tout. en mettait à nous prendre au sérieux,pourunconcurrent, onsitout lemonde arrê-se preniez nous vous jour un « si même : nalistique. comme l’énonce le finir par être assimilée au pastiche jour- puisse ne qu’elle afin sérieuse mation bilité d’écrire et/ou de relayer une infor- eux que revient la tâche et la responsa- c’està d’information. sources leurs de le facteur le plus important dans le choix tent en avant la crédibilité comme étant ToolWork intitulé l’université ben gourion, dans un article à communication en conférences de pelle Zvi reich, ancien journaliste, maîtrerap- le comme panneau. le dans bent breux commentateurs – crédules – tom- nom- de faux »sont ici rédigés articles les tous contraire, du preuve « Jusqu’à le si lit. s’ils ne sont pas connus du public qui les tion peuvent mener à la désinformation de ces nus sitesdes articles d’informa- l’humour des titres comme des conte- mation positive ». sourire le lecteur en recherche « d’infor- Le Gros Dijon, ou encore mation locale (Nord Presse Source Credibility as a Journalistic Gorafi Gorafi Sud ou Est, La Voix du morse, (2011), les journalistes met- journalistes les (2011), 20 Minutes etc.), leur but est de faire » le stipule sur son site – site son sur stipule le , 20/02/2013). en belgique Gorafi lui- n janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 53 revue deS mÉdia RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page54 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La des communistes. des confrontationprojet la le avecd’autres,dans et construire, analyses et les idées leurs connaître d’aujourd’hui,et d’hier fairecritiquer,penseurs compteet avecrendreles Lire, dialoguer pour 54 CritiqueS Le roy, auteur debd entretien avec maximilien poli. Du coup cette phrase n’apparaît pas dans la BD. la dans pas n’apparaît phrase cette coup Du poli. impossible qu’Allende ait est dit cela, qu’il il était beaucoup estime trop témoin ma Mais ». cul le dans mettre : « vos avions, vous pouvez vous les de sortir la Moneda faire le de essayait Pinochet lorsque prononcée aurait qu’Allende phrase une rapportent historiens plusieurs comme l’habillement ou les dialogues. Pour l’anecdote, : je demande des précisions pour des détails accumulés per- la quand Mais correspondances. les autres entre précis possible dans le cadre des sources qu’on possède, gène, car quand on écrit sur Gauguin, il faut être le plus P la vie des colonies à la fin du XIX La BD sur Gauguin m’a permis d’aborder la question de individuelle. figure d’une partir à collectif moment un des biographies historiques qui permettent de raconter fais Je instinctif. et naturel moi pour est qui ce de que la vie personnelle. Je ne me vois pas parler d’autresL’aspectde préoccupations des rejointfait politique en choses de scénariste ? et bandedessinée politique dessinateur devient-on Comment particulier.média un bd la faitde qui auteur un entretienavec vietminh. albert ou ) maître ( ni Clavier Dieu (Ni blanqui comme oubliées figures des biliter réha- s’attacheà il quand historien ou témoignages de remplis albums des peut avecrevient et palestine roy en part il quand Lereporter comme décrit être aussi maximilien dessinées, bandes de scénariste et dessinateur solliciter sans cesse malgré les matériaux écrits que j’aique écrits matériaux les malgré cesse sans solliciter sonne est encore vivante, c’est pire, je suis obligée de la anxio- elle. à terriblement C’est prisme avecson ments événe- les montre qui et Allende rencontré a qui exilée Sur la BD du Chili, en projet, la parole est donnée à une 2005 surlerôlepositifdelacolonisation. la guerre d’Indochine, était reliée à l’actualité de la loi de at o lhsor et u cme n eir pour levier la nuit, un la liberté nous écoute comme vue aujourd’hui est ou pour l’histoire demain. Par où exemple, l’ouvragetante mili- démarche une dans actualité notre avec liens des fairede aujourd’hui.est faireécho pourraitvolontéMa la médiation d’une autre personne en me disant que cela méconnues malgré leur intérêt actuel. J’utilise toujours rues dont j’ai étudié les œuvres que je trouve largement mets le témoignage en image. Ou des personnes dispa- de façon provoquée ou fortuite dans la vie réelle dont je rencontre je que personnes des sont personnages Mes enAmérique.la viepréindustrielle OO EUILSPAR RECUEILLIS ROPOS as a ut a iet nu écoute nous liberté la nuit la Dans C AMILLE , qui traite de la question de D e UCROT siècle, celle sur Thoreau, Dans transmettre le plus largementde l’idée juste possibleJ’ai pédagogique. professorale, àposition des publics variés. est en fait plus âgé que moi. Je ne prends pas non plus de travail servait à conscientiser mon m’alasi on demandé souvent : jeunesse.enfants pour format Mais mon public C’est presque l’inverse puisqu’on considère que c’est un pas d’appréhension, pas de « je ne vais pas comprendre ».de la dimension populaire et non élitiste de la BD. Il n’y a BDcomme unvecteur pour lefond. J’ai pris conscience raientessaisdesPalestine.lulasur Jepouvais utiliser la retours des lecteurs qui m’expliquaientdes eu j’ai quand biais, ce par idées des passer faire de que jamais ils n’au- parfait. C’est bien après que j’ai vu que c’était plus facile métier de la BD. Comme j’aimais etsorte écrired’outil. Verset dessiner15-16 ans j’aic’était réalisé qu’on pouvaitlis très peufaire deromans oude BD. Du coup, laBD est une Je passe ma vie à lire des essais pour la documentation. Je ? donctuconsidères tes bdcomme des sortes d’essais plus douxetmoinsidéologiqueautravail. côté d’affectsun tas donnent un qui tout développe on plus fort que celui de l’écrit. Quand on passe par l’image est qui l’image filtrede du taire,cause c’estsûrementà adhérer à mon propos. Ça pour le à coup,pas forçais les ne je que tempe, la sur flingue un ceavec n’est pas volon- pas alpagués, qu’ils n’avaient pas l’impression de me lire la presse j’ai souvent lu que mes lecteurs ne se sentaient tract, en donnant de la chair à une idée, j’évite ça. Dans côté le c’est militante version la dans peur fait qui Ce de façon militante parce que j’ai envie de faire réfléchir. de messages. J’entre dans cette logique de transmission sortes des idées, des relayertransmettre, de de est tion ça me va. Si je suis objectif avec moi-même mon inten- on voit l’étymologie (du latin si Aprèspas. suis le ne je moi Mais association. une ou galvaudés. très mot et « le Militant employés » pour les très comme gens, c’est sont être encarté dansIls un compliqué, parti ». est engagé « » militant « mot Le ? L’écritureest vécue comme unacte militant si celui-ci n’est pas coscénariste et me laisseC’est un long cartetravail deblanche. ping-pong avec le témoin, même psé as e rns du rangs les dans passé ) miles , celui qui se bat), alors RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page55 de circonstances, mais réellement composé. Les lecteurs tions, ce qui donne un recueil composé à partir de textes Yves Vargas a dû répondre aussi à de multiples sollicita- ducapitalisme Jean-JacquesRousseau, l’avortement sûrement dans mon scénario. Mes travauxredécouvrentseet restentdedans. Cette anecdote, l’utiliserai je de la fic- où, dans le camp, les prisonniersL’Espèce trouvent Humaine un bout de miroir anecdotes qui le rendent : parplus exemple,réel en lisant des travail mon dans j’inclus Mais concentrationnaire. système le sur lu beaucoup j’ai donc possible sensible finissent en camp. Je veux rendre cette expérience la plus mande,mineurscharbondesmettentgrèveduseet en tension de l’occupation et des réquisitions detorien l’armée spécialisé quialle- m’a envoyé tous : avec ses la travaux vert cette révolte un peu par hasard et j’ai contactédes unannées his- 1940 pour sortir des sentiers la et battus.Résistance guerre J’ai la en décou-ancrant sur mon travailler propos dans voulais le Je monde ouvrierPas-de-Calais. communistes en 1941 à Montigny-en-GohelleUn de mes projets dans le en Nord- cours ilporte y a aussi toutes surles lectures surune le contexte derévolte l’époque. de mineursanti-Gauguinquiétait accusé d’être pédophile). Et puis bouquins critiques (comme les livres anti-blanquistes ou amènent un éclairage plus intime. Et je complète avec les personnages.m’attacheJecorrespondances leurs qui à mes de biographies les toutes de lecture la par mence En fait je mène un véritable travail biographique quiclousdelafiction… com- faisreportagebdlapasde maisrestestu assezloin des cet ne tu documentation. dans la de régulièrement l’importance est échange apparaît qui points des un tions majeures de notre auteur est de lutter, parfois pied préoccupa- des l’une que vite assez sauront ou savent leuse est une des armes favorites de l’auteur), contre ce pointil- érudition une sur fondée polémique (la pied à bibLioGrapHie : bibLioGrapHie • • • • • • mer, Ed. La Boîte à Bulles, 2009. Bulles, à Boîte mer,La Ed. Cheminsdetraverse Lombart, 2010. Lombart, (dessin), 2010. 2009. , Ed. Le Lombart, 2011. Lombart, Le Ed. écoute, Soulman(dessin), Maximilien LeRoy (scénario), Michel Onfray (scénario), Maximilien Le Roy Le Maximilien (scénario), Onfray Michel Roy,Le Maximilien (dir.),Roy Le Maximilien Roy,Le Maximilien Maximilien Le Roy,Le Maximilien , Ed. Le Ed. liberté, créer Se – Nietzsche d’Antelme, je suis tombé sur un moment longue ! Et durée cede n’est pas compagnonnage sans un effets.voilà lectifs, ter les contributions à des ouvrages col- comp- sans Rousseau, sur livres Cinq P YVESVARGAS Delga 2014 AR V , Ed., LaBoîte Bulles,à 2010. , Ed. Casterman, Ed. mur, le Faire Bulles, à Boîte La Ed. Hosni, Dans la nuit la liberté nous liberté la nuit la Dans INCENT , un pavé dans la dans pavé un Gaza, M ETZGER Les de laisser la parole aux civils et aux progressistes… n’estpasderelayer lespositions duHamas, mais plutôt proposconnaissaientmonme pas.queAlors même ne celui de la ligue de défense juive (LDJ), de personnes qui droit aux tribunes injurieuses sur desle caractèreseu aussideshébreux.sites transformé avecJ’ai Internet comme été d’éditionmaisona ma de site le bonne guerre. Le truc dingue c’est ce quine s’estpas pouvoir passéretourner : après en Palestine mais sinon c’est de tion de la démocratie. Ce qui m’ennuie vraiment c’est de comprends la logique d’Israël, même si cela posed’honneur. Je légion la une à ques- ça préfère je Honnêtement, ? unesorte dereconnaissance deton travail interdictionreçuune israël…séjourfond,endeau c’est Pour finir, je voudrais : tu as parler de l’actualité récente ? graphie est-ce que les lecteurs de BD vont aller utiliser unepremièreBD.Mais ma pour biblio-sauf bibliographie aucune revanche lire.En les de obligés pas sont ne lecteurs les organisationbulles.pages,planchesenenen et Et puis traiter,paspu esttrèsBDcontraignantecarla dansson Ils peuvent parler de l’album mais aussi de ce que je n’ai lirepersonneslesj’aiavecqui éventuellement travaillé. loin. Une fois qu’on a fini le plus récit, aller pour annexes j’aime des mettre de bien j’essaie Souvent qu’on puisse intégrale des caractères. l’écriturevers allerdocumentaire pour du pars je : tion Mais il y a aussi cette « autre histoire Letemps descerises, éd.2005). Rousseau, » qui fonde la seconde (cf. : le matérialisme hypothético-émergent précédent livre un dans nom un donné déjà avait Yves Vargas auquel singulier mais » têtu « matérialisme ce vers lecture la dans ce : livrela premièreune double oriente continuité voit on d’étude, objets des diversité la de au-delà Mais salué parlesmaîtres dulibéralisme ausiècledernier. uns de ses contemporains et singulièrement à Mandeville,titre à : l’ensemble Rousseau se voit confronté à quelques- tres consacrés à la réception, avant celui qui donne son chapi- quelques philosophie,politique,anthropologie, : sections les entre clair partage un donc a On ». tique individuelle n’est ni morale ni économique, elle est poli- logie ». : «Ou la encore raison du maintien : de la propriété catégories enfantine… psychologie de de erreurs les « Bref appeler pourrait qu’on • • • • • collection Carnets de voyage, 2013. voyage, de Carnets collection Thoreau, la vie sublime, vie la Thoreau, (scénario), 2013. Lombard, (scénario), (texte), (scénario), A. Dan (dessin), Maximilien Le Roy (scénario), Roy Le Maximilien (dessin), Dan A. Loïc Locattelli (dessin), Maximilien Le Roy Le Maximilien (dessin), Locattelli Loïc Roy Le Maximilien (dessin), Gauthier Christophe Roy Le Maximilien (dessin), Prots Emmanuel Roy Le Maximilien (dessin), Vaccaro Eddy e poeae mtraits e Jean-Jacques de matérialistes promenades Les Emile , Ed. La Boîte à Bulles, à Boîte La Ed. ?, Etat quel Palestine, n’est pas un traité pédagogique, ni un traité , Ed. Casterman, 2014. Casterman, Ed. maître, ni Dieu, Ni Le Ed. route, la de loin Gauguin, 2013. Casterman, Ed. vida, la España Ed. Le Lombart, 2012. Lombart, Le Ed. Emile traite de l’anthropo- de traite hacké et mon nom mon et n janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 55 CritiqueS RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page56 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 56 CritiqueS tion (sic). Seul un conflit nucléaire ou une brusque accé- à un effondrement du capitalisme, mais plutôtpas croit ne il Cependant société. la de l’ensembleà vers un déclin sociaux, sanitaires et environnementaux des entreprises fortement accru par l’externalisation sans frein des coûts Calhoun considère que le risque de crise systémique est menace pourl’avenir ducapitalisme. lération du changement climatique représenteraient une d’exclus rité rassemblant entre popula- la de % 20 et 10 mais à faible croissance » avec tout de même prospère une mino- stable, capitalisme « un vers dirige se qu’on pense Mann système-monde. un comme capitalisme le présentant Wallerstein de l’analyse conteste Mann Wallerstein etCollins. par 1970 années les dès diagnostiqué soviétique tème la de lectuelle Georgi Derlugian revient sur la faillite politique et intel- l’horizon 2030-2050. à capitalisme du l’effondrement entraînera moyenne classe la de automatisation…) (robotique, » nologique Pour Collins la montée exponentielle du « chômage tech- deDavosprit ». du camp de « l’esprit del’affrontement Portode Alegre fruit » avec le camp de système-monde, « l’es- nouveau un naître va capitalisme, du l’épuisement de quence ler sans fin du capital ». Pour lui, du chaos actuel, consé- talistes ne sont plus aujourd’hui en mesure « d’accumu- d’avenirpas voit aune capitalisme Wallerstein parceAinsi qu’il considèrecapitalisme. du que l’avenir les capi- de question la à opposées voire de différentes, manières répondent autres les et uns les contre, Par tisme. refusent tout déterminisme mécanique et tout prophé- pective macro-historique de moyen et de long terme. Ils pers- une dans tous placent se Ils lui-même. pour pris com- y n’estsoutenable qu’il plus – historiques limites tel que nous le connaissons, est en passe d’atteindre ses bre et orageuse » et que le « système monde » capitaliste, som- historique période une dans entré est monde le « que d’accorddiagnostiquer sont pour auteurs cinq Les français contemporain. il est mortel, relève du blasphème dans le débat politique non-naturel et que fait comme tous le les systèmes comme historiques, affirmer Wallerstein que le effet, capitalisme est En un système historique, dominants. média La Découverte, 2014 Lecapitalisme ? a-t-il un avenir espérer davantage. fait qui passage Court ». épuré modèle un construit et faits les écarte qui commencement de abstraction leur sur surtout pencher se dit-il, faut, il « : auteurs deux les qui révèle sans insister les rapports que Vargas voit entre à l’évidence une certaine bonne humeur. C’est une note particulier étant fait à Engels et à son délibérément limitée à un corpus de références, un sort revient sur « Rousseau et Marx ». C’est pour une lecture l’auteur Ainsi chapitres. derniers des celle continuité, nomenklatura n CRAIGCALHOUN MANN,GEORGI DERLUGUIAN ET RANDALLCOLLINS, MICHAEL IMMANUELWALLERSTEIN, le paysage intellectuel des grands des intellectuel paysage le une question devenue taboue dans pose même, titre son par livre, Ce P AR Y ANN et l’effondrement du sys- du l’effondrement et L E P OLLOTEC Anti-Dühring , avec Usage,déréliction et résilience des femmes L’anatomiepolitique 2 à Fernand Braudel. notre époque dans une perspective de temps long chère pas moins que cet ouvrage collectif permet de repenser demeure n’en il approfondies, et nuancées discutées, Même si nombre d’analyses de ce livre mériteraientgence d’autres d’organisation formes d’être économique. et à une marginalisation progressive au profit de l’émer- classe, lisationnelle qui s’instillerait doucement genre » et le fantasmedu de théorie son « pouvoir la sur de destructionpolémique la civi- après mois Quelques corps etmisesousscellédesmots. blent d’une confiscation de leur parole. Exploitation dou- des se qui femmes, des l’oppression de mécanismes sociétés, dont la société occidentale contemporaine,différentes les de l’étude de partir à décortique Mathieu acceptent le laisser-faire en ce domaine.culturels » relativistes Nicole-Claude les que hommes) autres des pect res- (le l’homme de droits des nom au c’est l’excision, contreluttent femmes les que humains droits des nom m’apparaîtil « : c’estsi que au dernières ces de vécu du tion académique et non d’une compréhension profonde posi- d’une l’aune à pas, connaissent ne qu’elles lence Des femmes qui femmes. parlent d’autresdes femmes,place la en proieà à une vio-parlent qui hommes Des mettre enlumière laplacequiestfaiteauxfemmes. de afin acide, parfois ton un avec et humour sans non scanne le paysage intellectuel et politique international, Auregardpages, !le des fil l’anthropologuede contenu son perfection la à révèle l’ouvrage de titre le que c’est 2 politique Anatomie propres controverses. Si les de et recherche complexe,travaillémilitante et réflexion ses par pluriel de domaine un mais dogme un pas (s’ilabsurdité.son de une) fallait en n’estféminisme Le former. ports de forcerap- sociauxles etquestionne économiquesqui collectif en politique vue projet de d’un les trans- la psychologie et de l’individu, pour la remettre au cœur mérite d’écarter la question du genre du seul chemin de le donc a » anatomie « Cette ». reproduction de travail sion socio-sexuée du travail » et la « division sexuelle du », colonne vertébrale sexe de l’organisationde sociale via classes la « de divi- rapports « les sur matérialiste et dit « féminin ». Elle en appelle à une réflexion collective est qui ce de perpétuelle dévalorisation la et sexes des tissement, transsexualisme etc.), c’est la hiérarchisation de composer avec les différents attributs sexués (traves- et s’émanciper de possibilité la réinterroger,outre faut qu’il ce elle, Pour critiquer. va Mathieu Nicole-Claude nismes biologiques, c’est ce caractère individualiste que choix et le sentiment de ce qu’il est, contre les détermi- ses valorisant personnelle, construction sa de centre au l’individu remettent Butler, Judith comme auteurs L’anatomie politique 2 n in érts e Nicole-Claude de Mathieu qui constitue écrites la chair de cette tions interventions publiques et contribu- différentes des collection une C’est P NICOLE-CLAUDEMATHIEU », 2014 du monde Éditions Le Lagenre Dispute, « n AR . Et le moins que l’on puisse dire puisse l’on que moins le Et . M ORANE gender studies apparaît comme la preuve C HAVANON via , portés par des les salles de RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page57 par l’OCDE et présenté par Jean-Christophe Le Duigou, a minima le faisceau d’éléments qualificatifs proposé qualificatifs d’éléments faisceau le minima a tion oblige à des considérations géopolitiques, retenons qualifica- de entreprise telle une si fiscal, paradis d’un mises en exergue. S’il n’existe pas de définition juridique ment lier des conventions avec douze autres États y sont fin des paradis fiscaux en imposant à ceux-ci de simple- G20 qui avait, sous l’égide de Nicolas Sarkozy, décrété la notion même de paradis fiscal ainsi que l’hypocrisie du ebe e ’ciié rdcie odae cle de celle mondiale, l’évasion fiscale et monétaire. Les difficultés productive à définir la l’activité de semble l’en- pour clé problématique d’une traiter de mettent financières places aux fiscaux dis et du syndicaliste Jean-Christophe Le Duigou, Des para- « Vincent Paradis Piolet fiscal,« combien de définitions un grand rôle qu’il tait superbement – vues comme le comme vues – superbement tait qu’il rôle grand un 2000aucours– desquelles l’auteur tient 1990et années loin la plus discutable, retrace, à grandes enjambées, les politique, anachronique et peu explicité. La seconde, de détrimentautresaudesuns lessantcriterium selon un valori- – partiale assezn’en sectionmoins pasapparaît reconstructeurs, rénovateurs, refondateurs… Riche, cette cipaux dirigeants) commence durablement, : par vagues contestation interne organisée et large (incluant les prin- uneprompte reprise. C’est partirà decette date qu’une PCF avait tenté de minimiser les précédents, tablant sur péennes),d’autant plus retentissant quela direction du (euro- cuisant électoral échec nouvel d’un lendemain au 1984, en PCF du direction la connaît que crise la de mière relate la genèse, le déroulement et l’immédiat aval matériauhistoriqueà constituétrois enparties. pre-La relève d’une autre catégorie. Le livre est un essai politique Deux articles doivent être lus en commun, ceux de ceux commun, en lus être doivent articles Deux permettant de légitimer une sorte de délit d’initiés. à haute fréquence étant stigmatisées par l’auteur comme titrisation, ou les manipulations frauduleuses du lairefonctionnement.sonde Destechniques commela sein de la fraude et de la corruption comme pierre angu- tions du système capitaliste et de l’inclusion », mêmeJean-Françoiscriminelle en sonGayraud revient sur les muta- Avec sa contribution Dans les « eaux glacées de la finance thématiques lesplusbrûlantesaucœurdel’actualité. des certaines d’approfondir l’UMP,permet numéro ce nentoae» internationale L’économiemafieuse « et criminelle Été1984 quand le PCF se referme L’Occasionmanquée çais et le principal parti du droit français, fran- gouvernement le émaillé ont ciers tives à la fraude fiscale et à des délits finan- Alors que plusieurs affaires judiciaires rela- P Recherches internationales, 99 n° AR A suéet l péet opuscule précieux. présent le Assurément, historiques plusieurs produit ouvrages a titre, ce à et, leurs connaisseurs de l’histoire du PCF Roger Martelli compte parmi les meil- P ROGERMARTELLI Arcane 17, 2014 LEXIS AR I RÈNE C OSKUN T HÉROUX offshore » car ils per- ils car » trading ?» compréhension dumondecontemporain. sa améliorer et critique recul son étoffer voulant esprit tout à indispensable donc est numéro ce de lecture La lence. que de la résistance populaire organisée face à cette vio- duction de cocaïne et de la violence qui en découle ainsi dans la bourgeoisie et lesnarcotrafic du institutions mexicaines,d’implication de phénomènes pro- des mique écono- et politique approche une trouvera y lecteur Le mexicains.étudiants 43 de disparition la savoir à jours, met encore d’illustrer l’actualité tragique de ces derniers fense” communautaires dans l’Étatd’autodé- de “groupes Michoacánet » per- organisé Narco, au État : violence La Mexique « Gonzalez Solis Luis José de texte Le ment etlapleineexpression desforces productives. développe- le empêche qui corruption la de travers au tal et de la production et appropriation indue de ici richessesutile de tracer un parallèle entre parasitisme du capi- milliards de dollars 000 annuels.à une Il somme est de 1 équivaut qui ce aujourd’huidétournés, sont nationaux % des échanges inter- » qui souligne que 3 mondialisée gangrène une corruption, La « Abrika Belaid de bution contri- la soulignera On fiscale. d’optimisation initiale paradis fiscaux qui ont ainsi dépassé leur seule vocation les par passe international commerce du % 55 de près puisque ; » l’économiemondiale de verticale colonne « c’est que les paradis fiscaux sont devenus une véritable intéressant de comprendre, est toujours qu’il Ce dans caractéristiques. ce mêmedifférentes ces texte, dans pays noires, grise et blanche en fonction de l’implication des listes trois en fiscaux paradis les L’OCDEclasse ». tive fic- activité une ayant sociétés de l’existence de tation mations avec les autres administrations et enfin l’accep- d’infor-l’échange empêchant législation une réalisées, opérations des transparence de absence une bas, très des impôts inexistants : qui « ou souligne quatre critères ment dans la lignée des historiens positivistes du XIXs’inscritétrange-quilivre un ainsi signeMartelliRoger une tournure partiale au corpus. Historiographiquement, rément intéressant mais dont le caractère partiel donne La troisième est un recueil de documents d’archives laassu- matrice bolchevique s’avère décidément irréformable. : prolongementdecemoment 1984 posé comme nodal ment est ô combien pertinente. œuvreutilel’invitationet débatauqu’il lanceexplicite- tant décidément décisive. En cela, l’homme politique fait doigtdécennieunelesurmet trop pensée pour-peuet bienvenue, chronologie une avec Martelli, Roger 1980, public. L’éclairera-t-il ? Assurément,un trouver pourra l’ouvrage élégante, écriture en une par pointant les années ver un PCF décidément condamné à la disparition. Servi » de 1984, parmi manquée les dernières chances de sau- » de le 1956,retard Aprèsil y « aurait l’occasion donc eu « l’histoirelutionde France,de l’Europedemonde. du et accordent une telle place à la direction du PCF dansteraétonné devant certains jugementsl’évo- rétrospectifs qui » semble dire contexte, l’auteur. prétexte Enfin,« on res- cardés les communistes qui les intégreraientsocialiste 1980). dansSont 1970 àleset même années labro- réflexion : politiqueschangementsParti(lestelluriquesetsont au Sont écartés les bouleversements économiques, sociaux Marchais. Georges de et Thorez Maurice de » mentaux ressorts « décisifs les réflexion la de cœur au mis donc et social monde le économique et ses prépondérante, mutations sont donc choses secondes. est y Sont logie : l’histoire est celle cle des grands hommes, leur psycho- n n e siè- janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 57 CritiqueS RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page58 janvier 2015 janvier du projetdu La revue La contemporainssur ces textes éclairages desen en proposeprésentant projet l’histoire du revue constructive,et manièrel’actualité. La de mais dogme transmises. sans ont nous Leprojet communiste dedemain nesaurait sepasser desélaborations théoriques quemarx etd’autres avec lui 58 danS Le teXte communisme » « letrèspossible La deParis Commune : or ax n iprac priuir : guenmn d l cas ovir » la », ouvrière classe la deCommune gouvernement doit « aussi être : analysée particulière importance comme uneune préfiguration marx pour de la révolution communiste. insurrection, le dernier grand épisode révolutionnaire mentfrançaisd’adolphe thiers, duélu paruneassembléedix-neuvième nationale majoritairement siècle, revêtroyaliste. Cette Le18 mars 1871, le peuple de paris se soulève et tient tête, deux mois durant, au gouverne- P AR

des intérêts qu’elle a exprimés montrent que c’était une forme politique tout à fait susceptible d’expansion,tandis que toutes les formes antérieures de gouvernement avaient été essentiel- lementrépressives. Son véritable secret, voicilec’était : essentiellement un la classe ouvrière, le résultat de la lutte de la classe des producteurs contre la classe des appro- priateurs,formepolitiquela enfintrouvée permettaitqui réaliserdel’émancipation écono- mique du travail.

leurre.La domination politique du producteur ne peut coexister avec la pérennisation de son esclavage social. La Commune devait donc servir de levier pour renverser les bases écono-basesrenverserpour leslevier Commune deLa esclavage social. servir doncdevait miques sur lesquelles se fonde l’existence des classes, donc, la domination de classe. Une fois le travail émancipé, tout homme devient un travailleur, et le travail productif cesse d’être l’at- tribut d’une classe.

rature des soixante dernières années sur l’émancipation des travailleurs, les ouvriers n’ont pas plutôtpris,queoùsoit, celeur propre cause main,en que, sur-le-champ, onentend retentir toute la phraséologie apologétique des porte-parole de la société actuelle avec ses deux pôles, capitalet esclavage salarié (le propriétaire foncier n’est plus que le commanditaire du capita- liste), comme si la société capitaliste était encore dans son plus pur état d’innocence virginale, sans qu’aient été encore développées toutes ses contradictions, sans qu’aient été encore dévoi- lés tous ses mensonges, sans qu’ait été encore mise à nu son infâme réalité. La Commune, s’ex- clament-ils, entend abolir la propriété, base de toute civilisation. Oui, messieurs, la Commune F entendaitabolircettepropriété classe,detravaildu faitqui grand du nombre richesselade quelques-uns. Elle visait à l’expropriation des expropriateurs. Elle voulait faire de la propriété individuelle une réalité, en transformant les moyens de production, la terre et le capital, le et terre la production, de moyens les transformant en réalité, une individuelle aujourd’huiessentiellement moyens d’asservissement et d’exploitation du travail, en simples instruments d’un travail libre et associé. Mais c’est du communisme, c’est « l’impossible » com- munisme ! Eh quoi, ceux des membres des classes dominantes qui sont assez intelligents pour comprendre l’impossibilité de perpétuer le système actuel – et ils sont nombreux – sont deve- nus les apôtres importuns et bruyants de la production coopérative. Mais si la production coo- pérative ne doit pas rester un leurre et une duperie ; si elle doit évincer le système capitaliste ; si l’ensemblesi desassociations coopératives doitrégler productionla nationale selon unplan commun, la prenant ainsi sous son propre contrôle et mettant fin à l’anarchie constante et aux

convulsions périodiques qui sont le destin inéluctable de la production capitaliste, que serait- LORIAN ce, messieurs, sinon du communisme, du très « possible » communisme ? La multiplicité des interprétations auxquelles la Commune a été soumise, et la multiplicité

Sanscettedernière condition, Constitutionla communale eûtétéune impossibilité unet

C’estune choseétrange. Malgré tous les discours grandiloquents, et toute l’immense litté- G LIET ULLI J EAN Q

Karl Marx, La Guerre civile en France – 1871, Éditions sociales, Paris, 1952, p. 52 sq. UÉTIER

gouvernementde RdP-43_V07_RDP 27/12/1414:35Page59 travail ». ou qu’ils aient préféré suspendre le suspendre préféré aient qu’ils ou capitalistes en question aient disparu les que fermé, avaient qui fabriques compensation, de tous les ateliers ou de réserve sous d’ouvriers, ciations fut ainsi décidée « la remise aux asso- 1871 avril 16 Le ». Travail du mique écono- l’émancipation réaliser « de la « domination de classe ». Elle a tenté La Commune atentédes’attaquer à inachevée. demeure politique liberté la bitant, ductionmaintient pouvoirson exor- la propriété privée des moyens de pro- s’arrête aux portes de l’atelier, tantRépublique la producteur. Tantque que que tantdemeuredividu endominé est une « impossibilité », tant que l’in- sentiel. Car l’émancipation du citoyen du politique n’étaient pas encore l’es- réappropriation une visant mesures ces Mais citoyens. des permanente supposaituneparticipation active et d’élireunefois tous les cinq ans. Elle liberté la à pas réduisait se ne tique cables à tout moment ». La liberté poli-leurs, les représentants étaient « révo- population.aussilafidèle de Par ail- représentation une France en vera 4 employés. Jamais plus la on ne retrou- de conseil Commune, 25 ouvriers, du 12 artisans et membres 92 les une assemblée élue. On compte parmi laires n’ont été aussi nombreusespopu- couches les Jamais dans diversité. classedesproducteurs danstoute sa la participe auquel gouvernement de la classe ouvrière, c’est d’abord un veau dans l’histoire. Le gouvernement passés, mais un fait radicalement nou- la concrétisation de projets politiques ple continuation de luttes anciennes, classe ouvrière un tiellement PourMarx,Communela essen-est« nombreux groupes sociaux,s’y de retrouvaient. politiques, ditions tra- de Beaucoup ». d’expansion ble suscepti- fait à tout politique forme une « était Commune la le que signe néanmoins étaient Marx, pour l’essentiel ratent elles si prétations, tionnarisme d’État. Ces diversesfonc- du et inter-l’armée la de suppression par » marché bon à vernement projetle libéralencore deou réalisation municipal, d’un « gou- l’échelon à républicanisme le réinventer de sie des villes de province, une volonté de restaurer le pouvoir de la bourgeoi- centralisation du pays, une tentative contrela réaction saine une : façons de Paris l’ont interprétée de plusieurs Commune la de contemporains Les ouvrière CLasse La de gouvernement Premier : Commune La ». Non pas donc la sim- ovreet e la de gouvernement et l’initiative des classes laborieuses. c’estparasite», renforcer contrôle le forces jusque-là absorbées par l’État les toutes social corps au restituer « donc c’est l’État, Briser Commune. la à fonctionnaires des et nistration la police ; la subordination de l’admi- de communal contrôle sous mise la ; » arme en peuple le par placement rem- son « et » permanente l’armée de suppression la « : choses trois fie ils ont tenté de le « briser ». Cela signi- fonctionner pour faire leur le propre pour compte, l’État de emparés pas lui- l’État même ». Les communards contre ne se sont révolution une fut « Paris de État Commune La ouvrier. un pas fut ne la ouvrière classe de gouvernement L’éphémère livre I du du I livre du fin la à employée déjà avait qu’il formule une reprend Marx faisant, à « exproprier les expropriateurs ». Ce possèdent les moyens de production, vailleurs à la domination de ceux qui tra- les soustraire à visant tentative comprend la Commune comme une tion, il faut souligner le fait que Marx comprendre le sens de cette distinc- Marx, la « propriété de classe ». Pour communisme abolit en fait, nous dit le », civilisation toute de base « ral, Accusé d’abolir la propriété en géné- entend récuser. Marx que affirmations Deux sible. détruit la propriétéQu’il et ? qu’il est impos- communisme du disent-ils parole de la société actuelle ». Or, que un épouvantail brandi par les « porte- comme lieu premier en ici présente d’un traits « spectre » hantant l’Europe, les Marx le sous dépeint était niste lignes du premières les dans Comme ! commu- nisme : bouche la à mot qu’un Les adversaires de la Commune n’ont stigmatedu retournement : Communisme Le ait cme n épargnant rence des un autres travailleurs fainéantsdiffé- la à aurait, qui consciencieux comme taliste la fable consistant à présenter le capi- politiques del’événement. enseignements les dégager de essaie qu’il temps même en », ouvrière classe la de gouvernement « premier iii, napoléon de impérial pouvoir du antithèse en France. qui mit un terme à la Commune de Paris (18 mars – 28 mai 1871), leurs, marx rédige, quelques jours après la semaine sanglante (21-28 mai 1871) travail- des internationale l’association de général Conseil du demande la À ». L’aSSautCieL À du « 1871, , dans lesquelles le communisme Manifeste du Parti commu- Capital dans cette analyse « à chaud », marx prend la défense de la Commune, pour déconstruire pour rêveries abstraites.rêveries c’est-à-direde », donquichottisme « communisme n’est pas synonyme de le que actuelle société la de masque société sans classe se forment sous le la de matérielles conditions les que déjà dans les qu’ildisait ce ici répète pisme,Marx d’uto- forme toute Contre ». mun duction nationale selon un plan com- coopératives [qui] doit régler la pro- compris « comme l’ensemble communisme, des associations du bilité liste que Marx peut affirmer la possi- toire du mode de production capita- contradic- éminemment caractère C’est donc en mettant en évidence productives. le forces des gaspillage talisme ne peut qu’entraîner crises et potisme sur le lieu de travail, le capi- l’anarchie de la sur production et le des- Fondé impossible. devenu est qui lui-même capitalisme le plutôt bien c’est : jeu propre leur à nantes mence par prendre les classes domi- com- Marx possible, est munisme com- le que contraire au démontrer sur sa prétendue impossibilité. Pour porte communisme du adversaires les formulent que critique L’autre population detoutepropriété. la de majorité l’immense faits, les propriété privée mais excluant, dans promesse la hypocrite d’une société fondée sur la dépasser de tement jus- permet communisme le duelle, indivi- propriété la de abstraite tion réalité ». Loin d’être une simple néga- faire « de la propriété individuelle une selon laquelle le communisme entendl’idée comprendre faut qu’il capital le par imposée dépossession cette à opposition par donc C’est sation. poursuit par les ravages de la coloni- lente de la paysannerie anglaise et se tachée du sang au de l’expropriationÂge, Moyen est vio-du fin la dès contraire, capitalisme du réinvestir. L’histoire les pour travail son de et dispendieux, mis de côté les fruits Grundrisse La Guerre civile n : c’est parce janvier 2015 janvier du projetdu La revue La 59 danS Le teXte RdP-43_V07_RDP 27/12/14 14:35 Page60

LA REVUE DU PROJET Chaque mois un thème qui vous ConCerne Pour Construire ensembLe un Projet d’émanCiPation humaine

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En ligne sur : http://projet.pcf.fr CitoYennes, CitoYens... PartiCiPez ! « beauCouP mettent de L’énergie À résister, iL en faut tout autant qui se mêLent du débat PoLitique ! » Pierre Laurent, secrétaire national du PCf, a invité ainsi l’ensemble des forces sociales, syndicales, associa- tives, à investir le débat d’idées et à participer à la construction d’une véritable alternative politique à gauche. Nous voulons nous appuyer sur l’expérience professionnelle, citoyenne et sociale de chacune et chacun, en mettant à contribu- tion toutes les intelligences et les compétences. La Revue du projet est un outil au service de cette ambition. Vous souhaitez apporter votre contribution ? Vous avez des idées, des suggestions, des critiques ? Vous voulez participer à un groupe de travail en partageant votre savoir et vos capacités avec d’autres ? Laissez-nous vos Coordonnées, nous Prendrons ContaCt aveC vous. ou éCrivez-nous Par CourrieL À : [email protected]

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AGRICULTURE, PÊCHE, FORÊT ÉDUCATION RÉPUBLIQUE, DÉMOCRATIE ET INSTITUTIONS Xavier Compain Marine Roussillon [email protected] [email protected] Pierre Dharréville [email protected]

CULTURE ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR - SANTÉ, PROTECTION SOCIALE RECHERCHE Alain Hayot Jean-Luc Gibelin [email protected] Anne Mesliand [email protected] [email protected]

DROITS DES FEMMES ET FÉMINISME JEUNESSE

Laurence Cohen Isabelle De Almeida SPORT [email protected] [email protected] Nicolas Bonnet [email protected]

ÉCOLOGIE LUTTE CONTRE LE RACISME

Hervé Bramy Fabienne Haloui TRAVAIL, EMPLOI [email protected] [email protected] Véronique Sandoval [email protected]

ÉCONOMIE ET FINANCES PRODUCTION, INDUSTRIE ET SERVICES Yves Dimicoli [email protected] Alain Obadia [email protected] VILLE, RURALITÉ, AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

COMITÉ DU PROJET DU COMITÉ Isabelle Lorand PROJET EUROPÉEN ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE [email protected] Sylvie Mayer Patrick Le Hyaric [email protected] [email protected]

Frédéric Rauch Amar Bellal [email protected] [email protected] Guillaume Patrice Cohen-Seat [email protected] Michel Laurent Roubaud-Quashie Lieu d’études sur le mouvement [email protected] des idées et des connaissances [email protected]

Guillaume Caroline Bardot Hélène Bidard Davy Castel Clément Garcia Igor Martinache Léo Purguette Jean Quétier Gérard Streiff Noëlle Mansoux Roubaud-Quashie Rédactrice en chef Rédactrice en chef Rédacteur en chef Vice-rédacteur en chef Rédacteur en chef Vice-rédacteur en chef Vice-rédacteur en chef Vice-rédacteur en chef Secrétaire Rédacteur en chef adjointe adjointe adjoint adjoint Travail de secteurs Lectrices & lecteurs Combat d’idées de rédaction Sondages

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notes

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Parti communiste français