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Guts Of Darkness

Le webzine des musiques sombres et expérimentales : rock, , progressif, metal, electro, hardcore...

mars 2009

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© 2000 - 2009

Un sommaire de ce document est disponible à la fin. Page 2/167 Les chroniques

Page 3/167 FROESE (Edgar W.) : Aqua

Chronique réalisée par Phaedream

C’est au travers une foutue grippe d’homme bourrée d’un virus Néandertalien que j’entreprends une série de chronique sur les œuvres solos des membres de TD. Et, à tout Seigneur tout honneur, je débute par le très énigmatique Aqua, de Sieur Froese. Univers musical abstrait, structure sonore riche. Voilà qui dépeint bien l’impression que laisse ce premier effort solitaire d’Edgar Froese. Le bleu glacial de cette pochette aux éclats de glace plus coordonnées que l’art musical même, annonce un très Berlin pour cette période électro progressive où la musique se terre derrières des idées novatrices qui sont l’apanage des créateurs solitaires d’une scène Berlinoise qui cherche à surpasser l’invasion Britannique de musique progressive. Je me souviens de mes premiers contacts avec le monde froid et très hermétique de la pièce titre Aqua. Je découvre la musique de TD sur le tard avec Tangram, Thief et White Eagle. Nous sommes en 1984 et Risky Business marche fort, à tout le moins chez nous, avec la prestation de …Rebecca De Mornay et son joli petit…minois. Je digère à peine Phaedra (que je considérerai comme un chef d’œuvre quelques années de Black Métal plus tard) que mon copain décide de me faire avaler Aqua. Ohhhh que les premières lapées ont été dépourvues de soif. Mais docilement, mes oreilles se formaient au merveilleux univers de la musique minimalisme (Mike Oldfield et Tubular Bells), minimaliste, folkloriste et progressive (Genesis et Selling England by the Pound) et de la musique électronique à proprement parlé, Jarre et Oxygene (1976), Vangelis et Spiral (1977) et Synergy Chords (1977). C’est dans ce micmac bruitiste musical que j’ai fini par percer la beauté mystérieuse de la MÉ et du monde de Tangerine Dream. Une longue intro pour parler d’Aqua, sauf n’aime pas Aqua qui veut…ou qui voudrait. Car Aqua était hors convention et poussait encore plus loin les limites des explorations auditives. Enregistré dans l’appartement de Froese avec une technologie maison qui consistait à capter diverses sources sonores à partir d’écouteurs sur les oreilles d’un mannequin, Aqua débute dans une faune sonore halieutique avec de fines modulations rythmiques qui survivent dans un marais stagnant, où les planctons sonores fusionnent avec la beauté abyssale d’une phase terminale. Y a de quoi fermer les yeux et rêver, imaginer cette ode perplexe et atonale avec de la bonne boucane. Des chapelets d’effets sonores se succèdent dans une marre aux ondulations crées par des coups de rames ou par la pure fantaisie d’un poète sans vers. Une étrange musique, dans un étrange univers qui se poursuit avec Panorphelia et sa structure séquentielle pulsative sur un beau errant. Hypnotique, doux mais lourd Panorphelia embrasse les limites d’un Mysterious Semblance At The Strand Of Nightmares. Avec NGC 891 nous replongeons dans l’univers underground des effets sonores où le trafic rural se fond aux bruits d’avions à réactions dans une intro qui tarde à embrasser la superbe prestance de Franke sur le gros Moog Modular. Un excellent titre qui croisse avec efficience et qui n’a rien à envier au Flamand Rose sur On the Run, quoique moins violent, mais drôlement plus élaboré. En ce qui me concerne, c’est le premier gros titre d’Edgar. Upland clôture avec une grosse orgue circulaire qui capte toutes formes d’énergies sonores, un peu comme les chasseurs d’ouragan. J’aime cette fusion orgue ecclésiastique dans un giron de modernité sonore.

Page 4/167 Une gigantesque ventouse qui absorbe toute l’énergie des sonorités circulaires dans un contexte statique. Très expérimental, mais pas vraiment musical. Upland dépeint à merveille Aqua et la complexité des recherches sonores de sieur Froese. Aqua n’est pas vraiment un album mélodieux ou/et harmonieux. C’est du travail de création qui à ouvert bien des portes dans l’exploitation sonore et des paramètres de fusion entre l’abstrait et l’harmonie pour une créativité plus harmonieuse dans les années qui ont suivies cet étrange album. Mais vous savez quoi? J’ai fini par trouver ça beau. Une forme de communication entre l’abstrait et la beauté perceptive d’un auteur à l’imagination créative et audacieuse. Commencez par NGC 891, Upland, Panorphelia et Aqua. Vous comprendrez pourquoi cela m’as pris un certain temps pour aimer cette première œuvre solo de mon oncle Edgar.

Note : 5/6

Page 5/167 FROESE (Edgar W.) : Aqua 2005

Chronique réalisée par Phaedream

Faire du neuf, avec du vieux. Mais surtout avec la dernière technique de pointe en remastering; DQC System. C’est pas ça qui va changer la donne, car Aqua 2005 n’a rien à voir avec sa 1ière version de 30 ans plus tôt. Edgar y a apporté de nombreux changements, notamment sur les structures rythmiques, laissant aux oubliettes le côté sombre et psychédélique de sa 1ière version. Tout d’abord la pièce titre. La richesse sonore halieutique est plus froide, plus digital et ondule sur de fines percussions dactylographiées et un léger séquenceur en mode procession, dans un univers aux effets sonores moins riches, moins diversifié. Ce faisant Aqua, accouche d’une nouvelle vie, assez intéressante tout de même, mais très loin de ses premières subtilités. Panorphelia garde l’aura mystérieux et la pulsion nerveuse de ses premiers jours, sauf qu’elle est enrobée de strates mellotronnées douces et mélodieuses et de courtes bribes séquencées. Une retouche à la Tangent, mais avec plus de mordant. Si les 2 premiers titres demeurent somme toute intéressants, NGC 891 perd beaucoup de son lustre sur cette version 2005 d’Aqua. Est-ce à cause du différend entourant Froese et Franke? Toujours est-il que le titre est amputé de plus de 4 minutes, en plus d’avoir un ‘’glitch’’ agaçant vers 2:30 minutes. La chaleur et la subtilité de la 1ière œuvre font place à une froideur numérique et à une placidité émotive que l’on perçoit avec agacement. Ceci étant dit, NGC 891 reste un titre très intéressant qui n’avait pas besoin d’être rhabillé des strates d’Edgar pour y donner plus de lustre. Upland a conservé l’essence de son cachet, alors qu’Upland Down est vraiment un remix d'Upland qui s’appui sur sa structure originale. Bonnes percussions, beau synthé et une bonne approche mélodieuse…mais qui sonne comme du déjà entendu... quelque part. Mais avec tout ce qu’Edgar mijote, un fan y perd ses oreilles!!! En conclusion, Aqua 2005 n’est pas si vilain. Si, comme moi, l’ambiant vous horripile vous allez aimer cette 2ième mouture sans hésitation. Par contre, j’avais fini par succomber aux charmes latents du 1ier Aqua. Charmes absents sur cette version 2005 dont les boîtes rhytmiques et les over strates d'Edgar ternissent une surprenante originalité pour l'époque. Un bon remixage qui va plaire aux amateurs de TD et Froese de la dernière génération.

Note : 4/6

Page 6/167 TRISTANO (Francesco) : Auricles bio on

Chronique réalisée par Phaedream

Une basse lourde et nerveuse éructe dans un dédale d’accords pianissimos cacophonique et Auricles bio/on 1prend forme. Francesco Tristano est un réputé pianiste Parisien qui a accroché ses notes sur une musique expérimentale minimalisme. Après un 1ier album, qui se serait bien débrouillé côté vente, dont je n’ai malheureusement pas entendu, Francesco Tristano s’associe à Moritz Von Oswald, chaînon incontournable paraîtrait-il de la scène techno Berlinoise, pour produire son 2ième opus, Auricles bio on. Loin d’être de l’électronique, Auricles bio on est un opus avant-gardiste qui se gargarise d’un désordre conceptuel minimalisme et qui graduellement se vêt d’atouts et d’ajouts musicaux adjacents, pour finalement créer une musique à la mélodie aussi audacieuse qu’improbable. Après le choc tintamarresque de son intro, la partie 1se développe sous une fine répétitivité enclumée qui traverse tornades et bourrasques retentissantes, gracieuseté d’un fougueux qui gruge le chronomètre avec des tombées cycloniques. Des notes et des accords en temps aléatoires, dont l’écho des fracassements sert de balancier à un fin mouvement séquencé, se dispersent dans une brume sonore afin d’installer une base hypnotique qui servira de structure rythmique à un titre qui évoluera sous de fines pulsations, sans jamais éclater de robustesse. Claquements de mains sur un tempo plus soutenu, Auricle bio /on1évolue par cycles, qui semblent improvisés mais finement calculés, dans un univers ambiant qui évolue perceptiblement vers un soft techno accrocheur et hypnotique, avec une finale cymbalistique cacophonique envoûtante. Pas facile à apprivoiser, mais la torture vaut les charmes. Moins atmosphérique et plus direct la partie 2 est plus enflammée. Le tempo se nourrit de fines percussions échotiques dont on discerne à peine un piano qui décompose sa mélodie. Un grisaillement de vieux 33 tours ajoutent une touche à la Plastikman à ce titre qui semble sortir des bas fonds d’un sous-marin submergé. En constante évolution, la structure rythmique change de décor avec la force de ses entrains, nous faisant vivre différents scénarios musicaux. Plus le titre avance, plus nous sommes en territoire de ‘’Dance Floor’’, mais avec un beat souple, où l’ondulation des corps va de paire avec une musique minimaliste qui cherche sa niche entre les ambiances et les survoltages. Il y a un parallèle à faire entre la MÉ et l’art minimalisme contemporain, ou le techno minimalisme. Si ce dernier est plus ‘’hard’’, parce qu’hasardeux et fuyant toute notion de beautés harmoniques, la recherche demeure le bijou du résultat. À ce niveau, Auricles bio on de Francesco Tristano atteint ses objectifs. Un bon techno minimalisme avec d’audacieuses implosions qui chahute dans un univers bouillant de sonorités complexes pour étendre ses ramifications entre les douces ambiances, les atmosphères plus tendues, aux mouvements plus secs d’une techno aux subtilités abstraites.

Note : 4/6

Page 7/167 SATURNUS : Martyre

Chronique réalisée par pokemonslaughter

Je me souviens avoir déjà bloqué un long temps sur cette petinture de Delaroche au Louvre.. il y a quelque chose de puissant qui s'en dégage et l'utiliser comme pochette pour un disque de doom mélodique m'apparaissait un peu audacieux.. C'est vrai quoi, c'est quand même mieux quand le contenu est à la hauteur du contenant, et là d'entrée le niveau est bien élevé. Et pourtant, malgré son côté kitschissime, je dois l'avouer, j'adore cet album. Comme dit plus haut, il y a quelque chose, une sorte de plénitude, de calme serein, de mélancolie touchante qui vous prend, vous apaise et vous repose. Saturnus quitte les quelques doom/death-eries précédentes et se complaît dans une usique d'obédience doom claire, mais aux explorations très ambiantes, calmes directement tirés de groupes de rock atmosphérique. Attention ceci dit, les growls sont toujours présents, et certaines parties se montrent bien doom et lentissimes, mais l'évolution s'est clairement faite vers une musique beaucoup plus douce, feutrée et intimiste. En témoigne le gros travail vocal de thomas Jensen : tout y passe, vocalises claires, chant parlé désabusé (à noter qu'il arrive à trouver une intonation vraiment touchante dans cet exercice très casse gueule que sont les spoken words), growl profond, son chant de vache malade (copyright mojo) qui passe étonnament bien ici... Placements impeccables, porté par des mélodies typiques du groupes, tout simplement belles... Pas d'autres mots, certains morceaux sont de véritables invitations au rêve la tête tourné vers le ciel ("Noir", "Softly on the path you fade", la merveilleuse acoustique "thou art free" et son refrain martelé à chialer, "Inflame thy heart" et son côté rock goth, et j'en passe). L'ensemble se révèle bien homogène, on a parfois du mal à différencier cependant, tous reposant sur le même type de schémas, mais au fil des écoutes c'est avec plaisir justement que l'on s'amuse à y découvrir de nouvelles choses, le travail d'arrangements étant bien colossal pour un album du genre... Bref, si pour certains, cet album représente clairement la frange "gay" du doom, les autres pourront être alors fier d'apprécier cet album et de savoir dénicher les bons dans ce style il est vrai, fort galvaudé. Un disque de rêveur, tout simplement.

Note : 5/6

Page 8/167 COHEN (Leonard) : Various positions

Chronique réalisée par Sheer-khan

Ce disque est mal aimé, et on peut le comprendre. Jusqu'ici, Leonard Cohen sortait un disque tous les deux ans, trois pour les deux intervalles les plus longs, là il aura fallut en attendre cinq, pour un résultat mitigé. Jusqu'ici, Cohen avait porté un soin particulier à la production de ses disques; celui-ci est incontestablement le plus cheap de sa discographie ("dear heather" est à part). La production de "New skin...", la retenue gracile de "Recent songs" avaient permis à Cohen de glisser vers une musique populaire et vieillotte en toute fluidité : "Various positions" est rythmé d'un bout à l'autre d'une batterie sotte en formica et impose définitivement le canadien comme un chanteur de variété. Ca y est, c'est fait. Leonard a 50 ans. 5 ans d'attente pour un disque à l'esthétique douteuse, à la durée frustrante, à la qualité variable. Ceux qui ne connaissent d' "Hallelujah" que la version Buckley seront les premiers à se prendre les travers de cette esthétique dans la gueule.

Cheap, ringard... c'est tout aussi incontestable que intimement lié au personnage.

Continuons sur "Hallelujah" comme symptome : Buckley s'y plonge en toute impudeur,

Page 9/167 sans la moindre trace d'ironie, sans la moindre conviction personnelle quant à la portée religieuse du mot titre. La version, absolument merveilleuse, du jeune Jeff, se focalise sur la pureté : le vieux Leonard, lui, la chante avec le sourire en coin, sa voix moqueuse qui commence à muter, entouré de ses choeurs vieille école.

Curieusement, en lutte permanente contre cette esthétique variété, "Various positions" se pose également comme un des disques les plus richement atmosphériques du canadien. "Dance me to the end of love" ou la matrice d'"in the death car" qui hissera 10 ans plus tard Bregovic au rang de grand musicien rock et cultivé, et qui demeure un des plus grands classiques de Cohen aux oreilles de son public; une valse populaire, une chanson généreuse, à la classe à peine entamée par sa prod en plastique, une danse, oui, un tourbillon élégant et raffiné servi par un texte impeccable; "Hallelujah" sur laquelle je ne reviendrai que pour dire qu'il s'agit ici de la seule version qui assume et véhicule son sens véritable et sa complexité;

"If it be your will", pénitence dépouillée et délicate, ce qui, chez Cohen, signifie bijou. Trois classiques dans l'oeuvre du bonhomme qui ponctuent avec une régularité mathématique un recueil dans lequel les atmosphères nocturnes ("the law", "Night comes on") côtoient la country la plus décomplexée ("The captain", "Heart with no companion"), la variété jazzy. "The law" est envoutante, "Hunter's lullaby" est gracieuse, "various positions" est un disque au contenu de qualité, mais dont le

contenant, hélas, risque de couter trop cher à beaucoup d'entre nous.

Page 10/167 Note : 4/6

Page 11/167 COMPILATIONS - DIVERS : Milano new wave 1980-83

Chronique réalisée par Twilight

Chez Spittle Records, on oeuvre à la diffusion de la musique dark italienne, celle qui n'a que peu goûté aux lumières de la célébrité ou de la médiatisation; voici par exemple une bonne compilation destinée à nous présenter quatre formations de Milan n'ayant pour la plupart même pas eu l'opportunité de sortir un album, c'est dire l'intérêt d'une telle galette. Other Side démarre par une excellente cold wave rythmée qui affectionne les structures assez linéaires et hypnotise par un jeu de basse bourdonnant très en avant au mixage. Le chanteur et guitariste Danilo Carnevale (également membre de Jeunesse d'Ivoire) a un timbre de voix pas très éloigné d'un jeune Peter Murphy qui se coule à merveille au milieu des guitares cristallines et froides. Changement net d'ambiance avec State of Art, plus funky dans son approche et qui se rapproche davantage de Talking Heads et A Certain Ratio dans le feeling. Le groupe se distingue par des rythmiques très exotiques (aaaah, Brésil...), quelques cuivres ainsi qu'un jeu hérité du funk; c'est surtout la voix qui lui assure la touche décadente nécessaire mais il faut reconnaître que l'ensemble n'est pas déplaisant. Avec La Maison, c'est sur les terres de Tuxedomoon que l'on marche; la musique s'articule autour de boîtes à rythmes limite cheap, un travail légèrement expérimental des synthés, des guitares un peu funky qui se glissent dans un climat psychédélique...Typiquement le genre de formation représentative de la new wave dans sa forme la plus créative. Pour conclure, Jeunesse d'Ivoire (formé des membres de Other Side) revient à quelque chose de plus froid et synthétique, notamment de par le chant féminin utilisé de manière variée, entre heavenly spectral, touches tristes et passages limite désespérés. Le livret indique que les morceaux ont été masterisés à partir des bandes originales: travail remarquable, le son est bon. Comme d'habitude chez Spittle, on a également soigné la présentation...D'ailleurs à l'heure où je vous parle, tous les amoureux de la scène italienne sont probablement en train de commander cette compilation

Note : 5/6

Page 12/167 GORED : Human

Chronique réalisée par yog sothoth

Hum… comment dire… Gored est un duo… basse / batterie (sous-entendu : pas de guitares et les 2 gars se partagent le micro)… allemand… qui évolue dans un registre… GoreGrind… (en effet, présenté comme ça, ça peut faire un peu peur)… bon pour les 3 qui restent dans le fond, sachez quand même que derrière l’artwork et le concept "médical" à la sauce Carcass se cache un obscur rejeton des défunts grindeux de Last days of humanity et… de Disembowelment (je vais bien, merci). Des premiers, ils empruntent le coté gras, flot de vocalises façon "je gerbe par les sinus" et passages blasts épileptiques, légèrement groove dans le bourrinage et même les parties mid-tempos avec samples de cours d’anatomie… du bons gros machin Grind quoi, j’aurais envie de dire gentiment méchant, voir même un peu rigolo… SAUF QUE, au fur et à mesure de l’avancée du disque, le binôme s’est amusé à distiller des parties de plus en plus lourdes, limite Ambient / Doom sur les derniers titres. Et là, exit le coté marrant, l’album est relancé par cette teinte beaucoup plus Dark qui lui confère une ambiance bien particulière, d’autant que le son de ces parties lentes est particulièrement réussi (la basse est toute ronde, du bonheur !), une performance dans le genre GoreGrind. Le seul bémol se révèle donc être le chant, uniformément "uber-pitchshifté", dans l’esprit, mais j’aurais aimé un peu plus de variété, ce qui n’empêche pas Human de se révéler comme une curiosité qui déride un peu un style qui se complait trop souvent dans sa bovinerie necro-scatophile. A suivre !

Note : 5/6

Page 13/167 MODERN ENGLISH : After the snow

Chronique réalisée par Twilight

Vu de l'extérieur, les choses prennent une teinte étrange; on se demande parfois franchement ce qui se passe dans l'esprit de certains artistes. En effet, si 'After the snow' est un bon disque, quel changement par rapport à son prédécesseur, 'Mesh and lace', produit un an à peine auparavant ! Exit les guitares déchirées et glauques, les batteries tribales, les atmosphères obscures...Le son de Modern English s'est purifié, les compositions, si elles n'ont pas perdu une certaine mélancolie, sont nettement plus soft, moins torturées. Le groupe explore un post punk tranquille qui rappelle parfois ce que donneront quelques formations indies des 90's. Le schéma d'écriture est devenu plus classique et c'est d'un angle presque pop qu'il faut désormais aborder les morceaux. Si certains d'entre eux sont rythmés ('After the snow', 'Someone's calling', 'Tables turning') et évoquent une version moins passionnée des Chameleons, d'autres se veulent plus délicats, ainsi 'Carry me down' avec ses nombreux breaks et ses orchestrations légèrement psychédéliques; de manière générale, le travail du clavier est très développé pour renforcer l'atmosphère des morceaux. Ce sont là bien des qualités mais elles ne masquent pas le fait que si 'After the snow' tient bien la route, il est moins intense que 'Mesh and lace' et plus banal dans ses sonorités. C'est ainsi et il faut le prendre tel qu'il est; surtout qu'à la lumière de ce qui suivra, ce disque est le dernier opus intéressant de Modern English avant que les sirènes d'une pop mièvre n'achèvent de les noyer.

Note : 4/6

Page 14/167 AVANT-GARDE : Cyanure

Chronique réalisée par Twilight

Quand j'écoute 'Cyanure' des Italiens de Avant-Garde, je réalise à quel point il prépare le terrain de leur dernier opus en date, 'Iron in flesh'; la plupart des éléments qui font la force de leur son sont déjà en place même si ils ne sont pas encore toujours exploités au maximum de leur potentiel, débuts obligeant. Globalement, les lignes sont épurées: boîte à rythmes post punk, guitares cold wave parfois légèrement plus sales, un brin de basse pour soutenir le tout et le chant en italien. Si les atmosphères sont bien posées, ni vraiment grises, ni vraiment noires mais oscillant sans cesse à la limite, la production manque un brin de pêche. Ce sentiment est plutôt subjectif car les compositions sont solides, les mélodies assez envoûtantes, c'est juste que le groupe a progressé et que ces éléments ont été améliorés, leur son me semblant plus compact et cohérent aujourd'hui. Des faiblesses, j'en signalerais une ou deux, à commencer par 'Fatuo', plutôt ennuyeux, très cold wave dans ses sonorités mais sans réelle consistance; pareil pour la piste cachée en fin de 'Cyanure', inutile et ressemblant surtout à du remplissage. Pour le reste, c'est plutôt bon, même si les mélodies vocales tournent vaguement en rond au fur et à mesure de l'album...Je dirais que cet enregistrement a les qualités et les défauts d'un premier essai très correct mais quand on connaît 'Iron in flesh', nul doute qu'il lui fait de l'ombre, beaucoup d'ombre. 3,5/6

Note : 3/6

Page 15/167 AXESS : Voices of Dawn

Chronique réalisée par Phaedream

Un mélange de percussions et d’arpèges sautillants ouvrent ce 4ième opus solo d’Axel Stupplich. De lentes modulations synthétisées couvrent l’intro de Beyond the Stars, qui devient plus mélodique avec sa fine ligne flûtée. Les séquences sont plus mordantes et le rythme s’anime nerveusement sous de douces strates synthétisées, plongeant le rythme dans un bouillon nostalgique. Car Voices of Dawn est un album empreint de nostalgie pour les fans de Pyramid Peak et des premières œuvres d’Axess. Si Beyond the Stars frôlent les mouvements impétueux d’un Jarre audacieux des années 70, Zeit nous plonge dans une noirceur nébuleuse qui s’éveille doucement sous un synthé feutré aux souffles cosmiques et une séquence qui tournoie avec plus de mordant. Du Axess à son meilleur, hypnotique et séduisant, avec de superbes solos d’un synthé percutant et juste assez de tempo pour flotter dans un océan étoilé. Un excellent titre sur Voices of Danw, de même que The Return Of Nibiru avec sa séquence tourbillonnante et cascadeuse qui se moule à une autre, plus sautillante, formant un rythme névrotique. Un synthé aux ondes bouclées et aux chœurs discrets couve cette fusion séquentielle hoquetante qui s’anime avec des percussions nourries. De sec et hachuré, en forme technoïde, le synthé devient plus harmonieux et moulant. Un paradoxe de rythme et de mélodie dans une ambiance survoltée alors que The Return Of Nibiru progresse sur un tempo de plus en plus agité, se nourrissant d’un déluge synthétisé totalement désorganisé, mais étonnamment créatif. Un titre bouillant qui dépasse les limites d’un Berlin School conventionnel. Le genre de titre qui fait découler la peinture des murs. Après une telle agressivité, Axess nous invite dans un couloir plus serein avec le mélodieux Roppongi Hills. Un doux titre sobre avec un synthé à la mélodie stridente, accouplée à un mellotron plus harmonieux. Une belle mélodie à la Klangwelt qui colle à la peau et un beau petit dessert pour les oreilles enflammées par les 3 premiers titres. En ce qui me concerne, Stonehenge est le joyau de Voices of Dawn. Une intro noire transpercée de souffles métalliques qui ajoutent une froideur cosmique à un mouvement plus que nébuleux. Du sombre TD qui décolle lentement sous les vapes d’un synthé moulant auquel se collent des vocales à peine audibles. Une splendide séquence ourle sur le mouvement, créant un effet d’hypnose. Une délicieuse hypnose qui atteint son paroxysme mélodieux avec une séquence en staccato qui circule en boucle cyclique dans un maelstrom harmonieux et complaisant à l’oreille. Du grand art électronique. Un des meilleurs titres de l’an 2008. Endless Dreams nous amène effectivement vers des rêves éternels avec sa douce séquence hypnotique qui coule comme de fines percussions, sur un synthé morphique. Un titre planant dans la plus pure tradition Berlin School. Voices of Dawn conclut aussi sur un mouvement planant, avec de belles vagues synthétisées qui ourlent dans ambiance lourde. Une ambiance enveloppée de strates onctueuses qui légèrement prend une structure lancinante avec une ligne de basse qui s’agite faiblement sous de fines percussions. Après un long silence de 3ans, Axess revient en force avec un opus impossible à éviter. En Voices of Dawn, il confirme son immense talent de compositeur et de visionnaire sonore avec un superbe mélange d’une Berlin School rétro à plus contemporaine. Un solide opus, plein de rythmes, de revirements et de tendresse qui dévoile toute la beauté et la subtilité de l’art électronique.

Page 16/167 Note : 5/6

Page 17/167 NUCLEUS : Elastic Rock

Chronique réalisée par Progmonster

À circonstances exceptionnelles, cas exceptionnel. Le 25 février dernier, , auteur de "La définitive biographie de Miles Davis", ouvrage de référence s'il en est, et par ailleurs mentor du groupe de britannique Nucleus, nous quittait. L'occasion de se pencher enfin sur ce groupe était donc trop belle, histoire de combler cet acte manqué toujours reporté et qui, de surcroît, me permettra d'atteindre le chiffre symbolique des 2600 chroniques ! Tout commence donc en 1970 avec la publication de "Elastic Rock", premier volet d'une longue collaboration qui les liera avec le label Vertigo. À ce stade, Nucleus contribue à sa manière à l'émergence d'une approche nouvelle qui, concrètement, voit liberté jazz et énergie rock se téléscoper. Des débuts timides donc, en totale symbiose avec ce qu'on écoutait alors. "Elastic Rock" est d'ailleurs en grande partie constitué de courtes plages à vocations atmosphériques. De l'introduction du thème "1916", qui annonce la couleur, aux errances abstraites de "Striation", façon "Moonchild", la musique de Nucleus se développe en catimini. Et tout particulièrement sur cette première face illuminée en bout de sillon par le upbeat "Twisted Track", seul moment relativement enlevé. Encore fort marqué par le , le guitariste Chris Spedding est pour beaucoup dans la coloration hybride de ce premier disque, rappelant le George Benson de "Miles Ahead", à défaut de faire la nique à Larry Corryel. Sur la deuxième face, "Torrid Zone" et son faux coda "Earth Mother", avec leur progression d'accord à la Herbie Hancock, ancrent l'album dans une approche plus en adéquation avec les fraîches expériences électriques du Miles Davis Band (la ligne de basse de Jeff Clyne). Sur la plage titre, "Battle of Boogaloo" ou "Crude Blues", les thèmes écrits par Ian Carr ou Karl Jenkins témoignent encore d'une autre source d'inspiration qui serait, elle, à situer quelque part entre "ESP" ou "Nefertiti". De fait, l'esprit de Miles est omniprésent sur ce disque. L'enchaînement des plages fait en sorte que "Elastic Rock" se présente à nous en tant que tout solide et insécable, où chaque musicien apporte sa pierre à l'édifice par le biais d'interventions toujours balisées tout en laissant à chacun le soin de briller (fantastique Brian Smith à la flûte et au soprano, explosif John Marshall sur un "Speaking for Myself" qui se paye un clin d'oeil à "If I Were A Bell").

Un début fringuant quoique encore un peu trop timide.

Note : 3/6

Page 18/167 NUCLEUS : We'll Talk about It Later

Chronique réalisée par Progmonster

Toutes proportions gardées, "Elastic Rock" est à Nucleus ce que "Fragile" fût à Yes : un album à partir duquel le groupe bâtira sa légende mais dont l'identité s'est consolidée autour d'une série de titres s'étant avant tout donné pour objectif de mettre en lumière le talent respectif de chacun des musiciens impliqués dans le processus d'écriture. Fort heureusement, "We'll Talk about It Later" reconduit la même équipe - chose plutôt rare dans le long parcours du groupe pour ne pas être souligné - ce qui nous permettra donc de redécouvrir l'ensemble sous un jour nouveau, plus inspiré, plus passionné tout simplement. Ce qu'il gagne en intensité Nucleus le perdra quelque peu en cohésion. À l'inverse de son prédécesseur, "We'll Talk about It Later" préfère entrer dans le vif du sujet sans crier gare, alignant ainsi quelques plages mémorables au temps d'exposition plus long, permettant ainsi une réelle imprégnation. Au vitaminé "Song for The Bearded Lady", un classique du genre, succède "Sun Child" qui voit la guitare de Spedding se décrisper un peu, se laissant aller à une forme de groove plus prononcé, allant même jusqu'à employer la pédale wah wah, s'arrogeant ainsi une attaque qui n'est pas sans rappeler les accords plaqués de sieur John McLaughlin sur "A Tribute to Jack Johnson". Il s'agit encore d'atmosphère et d'ambiance sur le brumeux "Oasis", l'aérien "Lullaby for a Lonely Child" ou la sanguine plage titre au clavier électrique sursaturé. Ainsi, Karl Jenkins apparaît comme la principale cheville ouvrière du complexe Nucleus, Ian Carr ne plaçant au final que deux titres : "Ballad of Joe Pimp", collision improbable entre Egg, Pink Floyd et Peter Tosh (si, si !), puis "Easter 1916", joyeux rappel de l'album précédent, dans un développement beaucoup plus ambitieux et ouvert dans son exposition, incluant même le chant pour un effet dramatique recherché qui referme le disque sur une note pour le moins étrange. Là où "Elastic Rock" paraissait donc timide, voire hésitant, "We'll Talk about It Later" se montre entreprenant et bouillonnant. Déjà un des moments clefs du groupe.

Note : 4/6

Page 19/167 NUCLEUS : Solar Plexus

Chronique réalisée par Progmonster

En terme de clarté, les choses se compliquent un petit peu à partir d'ici. De temps en temps, certains albums apparaîtront sous l'intitulé Ian Carr's Nucleus, voire Ian Carr tout court. Et pourtant nous parlons toujours du même Nucleus, même si, c'est vrai, le groupe va essuyer de nombreux changement de personnel... Pour "Solar Plexus" cependant, l'origine de cette confusion est simple : il s'agissait à la base d'une oeuvre commissionnée par le British Art Council, une oeuvre sur laquelle Ian Carr travaillait avant même que le groupe ne soit formé ! C'est donc tout naturellement qu'il mettra à contribution tous les membres de Nucleus avec même quelques invités de marque, comme Harry Beckett ou Kenny Wheeler qui viennent superbement le suppléer à la trompette, donnant encore plus d'amplitude à leur son. "Elements I & II" a de quoi surprendre : abstraction électronique esseulée que l'on doit à Keith Winter - au passage éclair - elle a pour délicate tâche de donner l'amorce à un album qui, à priori, veut jouer la carte de la différence. Mais en dépit de ces efforts, "Solar Plexus" assurera en réalité la continuité de l'oeuvre entreprise jusqu'ici, devenant presque par dépit la presque parfaite émulation de leurs deux albums précédents. On sent très nettement toute l'ambition placée dans le disque tout particulièrement à travers deux plages : "Spirit Level", introspectif et réfléchi à la fois, comme sur "Elastic Rock", et la longue pièce Davisienne "Snakeship's Dream", alors que des morceaux comme "Bedrock Dreadlock" ou encore l'extrêmement funky "Torso" misent tout sur l'énergie déployée, juste comme sur "We'll Talk about It Later". La puissance des cuivres et leur lyrisme, au point de presque en occulter un piano électrique étonnamment peu loquace, est un des éléments prépondérants qui rendent l'écoute de "Solar Plexus" viscéral. L'album signera en même temps la fin d'une époque puisque, dès l'album suivant, Nucleus devra composer avec les départs conjugués de Jeff Clyne, Karl Jenkins et John Marshall, ces deux derniers ayant entretemps rejoints les rangs de Soft Machine !

Note : 4/6

Page 20/167 NUCLEUS : Belladonna

Chronique réalisée par Progmonster

Il y a de quoi être terrassé par le doute quand trois membres, parmi les plus influents de votre groupe, décident de vous laisser seul la charge de mener à bien le devenir de votre formation. King Crimson a connu ça dès le début. Et c'est ce qui est arrivé à Ian Carr après le pourtant très réussi "Solar Plexus". Peut-être la main mise temporaire du trompettiste au cours de cette session leur laissa l'amère impression d'en être dépossédé... Ajoutez à cela que le britannique rencontrait alors de sérieux problèmes de santé, et vous aurez là un tableau relativement fidèle du climat hostile qui entourrait la confection de l'album "Belladonna", crédité au nom du seul Ian Carr. C'est pourtant, une fois encore, du Nucleus pur jus. Peut-être même une de leurs meilleures réalisations, entourée de cette aura particulière, se laissant séduire toujours davantage à des formes de jazz aux vapeurs doucement toxiques. À l'écoute de l'introduction tout en suspension de la plage titulaire, il ne fait aucun doute que Ian Carr désire en priorité orienter ses recherches en matière musciale sur les textures plutôt que sur l'écriture en elle-même. Avec le départ de Jenkins, cette dernière n'est bientôt plus un faire valoir, comme ce fût le cas pour "Elastic Rock". "Bitches Brew" est passé par là. "In A Silent Way" aussi, comme l'atteste "Mayday", propulsé par un charley qui, imperturbable, trace sa route dans une chapelle de notes en construction. Suspension disais-je ? Ce titre va à râvir à la cinquième plage de l'album qui joue la carte de l'exotisme avec ses percussions et ses flûtes de bambou. Parmi les nouvelles recrues, quelques figures vont aider à consolider le groupe pour un temps seulement : le batteur Clive Thacker et le claviériste Dave Macrae. Quelques autres futurs grands noms viennent prendre part à l'aventure, mais ce sera pour rejoindre des cieux déjà balisés par certains de leurs prédécesseurs directs : Roy Babbington à la basse, et un jeune Allan Holdsworth dans un rôle de guitariste rythmique inédit, seuls "Remadione" et surtout "Hector's House" lui permettront toutefois d'exprimer le talent inhumain qu'on lui connaît.

Note : 4/6

Page 21/167 NUCLEUS : Labyrinth

Chronique réalisée par Progmonster

D'aucun voient en "Labyrinth" un faux pas dans la carrière de Nucleus. Je ne partage pas nécessairement cet avis, bien que je puisse le comprendre. Pourtant, le groupe ne manquera pas de nous surprendre encore - et pas forcément dans le bon sens du terme - à travers certaines autres de ses publications futures. Tout comme "Solar Plexus", "Labyrinth" est une commande. Le mythe du minotaure qui a inspiré l'oeuvre est peut-être un prétexte, en tout cas il est assez représentatif de la situation dans laquelle se retrouve Ian Carr, obligé de trouver des solutions de l'intérieur. Il se fait qu'ici, conscient de cette période de trouble qui secoue alors sa formation, l'anglais prend le parti de tirer profit du désavantage qui l'accable, à savoir cette difficulté chronique à pouvoir se reposer un line-up stable, nécessaire quand il s'agit d'éprouver un matériel qui doit d'abord être rodé et maîtrisé avant de pouvoir se l'approprier, et s'octroyer ainsi des libertés d'interprétation. L'option idéale serait donc de se reposer plus que jamais sur les facultés d'improvisation des musiciens enrôlés. C'est pourquoi nous ne sommes pas surpris de retrouver sur "Labyrinth" le batteur Tony Levin, rompu à ce genre d'exercice, ou la chanteuse Norma Winstone (sur "Ariadne"). Leur présence est un signe, mais loin d'être un facteur prépondérant à la réalisation de ce nouveau disque, d'autant que leur apport est finalement des plus symbolique. C'est ce côté légèrement "freeform" qui perturbe les habitués. Peut-être aussi l'absence de guitariste... Et si cet aspect légèrement aléatoire, volontairement abstrait, sciemment entretenu, transparaît sur "Origins" et dans la façon dont la grande majorité des plages amorcent leur entrée, il ne justifie pas à mon sens le procès d'intention qu'on lui érige. Je serais même presque tenté de penser le contraire ; l'effusion instrumentale tout en densité développée sur des pièces comme "Bull Dance", "Arena" ou le rampant "Naxos B", à deux batteries, avec les cuivres qui poussent et donnent de la voix, fait honneur au jazz britannique, dans ce qu'il peut avoir de plus aventureux et de plus lyrique. "Labyrinth" cultive un goût pour l'étrange qui, à coup sûr, devrait rencontrer son public.

Note : 4/6

Page 22/167 NUCLEUS : Roots

Chronique réalisée par Progmonster

"Roots", comme un retour à la normale ? Alors que rien n'a jamais été stable dans la carrière de Nucleus, en tout cas jamais suffisamment longtemps, comment y croire ? Il est un fait certain que ce n'est pas avec cet album-ci que Ian Carr introduira un changement, si tel était toutefois son intention de départ. À l'instar de "Solar Plexus", "Roots" termine le second cycle du groupe articulé autour de l'axe Brian Smith/Dave Macrae/Clive Thacker, bientôt démantibulé. Roger Sutton à la basse et Jocelyn Pitchen à la guitare font leur entrée, assurant ainsi la transition vers un devenir toujours aussi incertain. "Roots", le titre, démarre plutôt bien en donnant un coup d'envoi énergique au disque. De loin le plus uptempo des albums réalisés jusqu'ici par Nucleus, il en ressort un côté jazz funk assez prononcé, pas désagréable, mais finalement quelque peu éloigné de nos préoccupations véritables. Comme pour corroborer cette approche plus carrée, Nucleus va même jusqu'à tâter de la samba sur "Caliban". Sans effets particuliers. La première face oscille donc entre service minimum et tentatives d'hybridation peu concluantes (le chanté "Images", dispensable). Même si on n'est pas emballé par ce qui se déroule, fondamentalement, il n'y a rien à reprocher à "Roots", album souple et alerte. On passe donc à la seconde partie du disque pour se rendre compte que, là encore, rien de mémorable ne se produit. Il faudra attendre "Odokamona" et sa ligne de basse proméninente pour se sentir à nouveau captivé par ce qui se passe. Sur un thème répétitif qui va en crescendo, Ian Carr pique à Miles les effets wah wah que celui-ci avait abusivement employé sur "On The Corner". L'album s'efface ensuite derrière "Southern Roots and Celebration", se développant en deux temps comme son titre l'indique ; très inspiré des musiques du monde, à la manière de Weather Report, pour atteindre l'apothéose sous forme de jam nerveuse et endiablée. Quelque peu décousu, privilégiant l'efficacité à l'inspiration, "Roots" se contente donc d'assurer. Mais de fort belle manière.

Note : 3/6

Page 23/167 NUCLEUS : Under The Sun

Chronique réalisée par Progmonster

Ce qu'il y a d'embêtant avec Nucleus, c'est que ses hésitations furent si nombreuses qu'il est pratiquement impossible de ne pas vous en toucher un mot. Et tout ce temps consacré à vous relater les derniers changements qui affectent le groupe est autant de temps perdu à ne pas vous parler de l'essentiel ; la musique en elle-même ! Avec "Under The Sun", Nucleus entame une troisième partie de carrière sous les meilleurs auspices. Si Gordon Beck, déjà présent sur "Labyrinth", réintègre le groupe, il ne fait en réalité que transiter puisque le nouveau claviériste attitré de Nucleus sera désormais Geoff Castle. Autres éléments importants qui viennent se greffer au groupe : le guitariste Ken Shaw, ici encore en partenariat avec Jocelyn Pitchen, et puis surtout l'arrivée primordiale de Bob Bertles, appelé à combler le vide laissé par le départ de Brian Smith. Le style des deux saxophonistes n'est pas fondamentalement différent. Bertles complète à merveille le travail de Carr, complétant ou répondant à ses appels. Les deux hommes sont particulièrement mis à contribution sur ce disque puisqu'il est propulsé par une énergie vivifiante qu'on n'avait tout simplement plus entendu depuis "We'll Talk about It Later" ! Niveau section rythmique justement, Roger Sutton est confirmé en tant que bassiste, et son rôle sur "Under The Sun" est d'autant plus renforcé qu'il jongle ici en compagnie de Bryan Spring, proche de Keith Tippett et Alan Skidmore, et dont le jeu proprement explosif ici propulse dorénavant Nucleus dans des sphères musicales proches de celles épousées par le Mahavishnu Orchestra du "Visions of The Emerald Beyond". Pour autant, ce n'est pas la guitare qui mène le débat. La basse ancre le chapiteau profondément dans le sol pendant que tous les solistes, batteur et percussioniste compris, s'amusent à virevolter autour des thèmes avec une ardeur communicative. "Pastoral Graffiti" représente la seule pose que s'accorde le groupe dans cette débauche de vitalité, à la fois proche de Weather Report ("In Procession") et de la complexité d'écriture d'un National Health ("New Life" ou la longue suite en quatre tableaux "A Taste of

Sarsaparilla").

Note : 4/6

Page 24/167 NUCLEUS : The Snakehips Etcetera

Chronique réalisée par Progmonster

Le retour en forme et en force de Nucleus sur "Under The Sun", déjà fort éloigné de l'habillage soigné et mûrement réfléchi de leurs tous premiers albums, laissait présager un nouveau départ tonitruant pour la bande à Ian Carr. Le groupe désormais stabilisé avec l'arrivée du batteur Roger Sellers aurait donc du nous livrer, en toute logique, quelque chose d'au moins tout aussi contagieux. Pour une raison que je ne m'explique pas, "The Snakehips Etcetera" s'enfonce dans une sorte de pastiche du genre qui ne rend pas justice au potentiel réel du collectif. Les groupes fusion de ce genre ne seraient rien sans leur bassiste. Mais Sutton est bien seul à défendre le navire. Sellers n'est pas Spring. Il joue juste, mais droit, trop droit peut-être, au point de renforcer malgré lui le côté prévisible et rigide d'une musique qui ne nécessite pas qu'on la conforte dans ses travers les moins glorieux. "Alive and Kicking" démarre sur des notions floues pour rapidement se stabiliser autour d'une jam interminable, interrompue à intervalles réguliers par les rappels de thème joués de concert par Carr et Bertles. C'est une definition qui s'applique à peu de choses près à chaque titre de l'album, si bien que l'intérêt véritable se loge dans les premières minutes de chaque morceau, histoire de découvrir ce qui s'y trame, la suite finissant par nous lasser assez vite. Dans un certain sens, "The Snakehips Etcetera" serait à ranger dans la même catégorie que "Labyrinth". Sauf que les quelques entorses à la règle qui égrainent le présent disque ne semblent pas avoir de portée réelle si ce n'est celle d'enrober dans une esthétique vaguement recherchée un propos qui finalement s'égare dans des banalités. Et ce n'est pas la présence renforcée de la guitare qui pourra faire maigre lot de consolation. Sous sa pochette du JB's période disco, le Nucleus de "The Snakehips Etcetera" ne restera pas un des plus mémorables, lorgnant, en étant large et conciliant, du côté du Soft

Machine post "Six" et "Seven", celui qui a vite préféré se réfugier dans un conformisme sans saveur.

Note : 2/6

Page 25/167 NUCLEUS : Alley Cat

Chronique réalisée par Progmonster

Il aura fallu attendre relativement longtemps avant que la discographie complète de Nucleus puisse revoir le jour en cd. Ses accointances avec la scène jazz progressive et son lien ténu avec Soft Machine n'y sont sans doute pas étranger. Pourtant, cette remarque prévaut surtout pour leurs trois premiers disques, "Elastic Rock", "We'll Talk about It Later" et dans une moindre mesure "Solar Plexus", les plus connus, les plus célébrés. C'est stupidement pour cette raison qu'aucune considération ne fût jamais quasi jamais accordée au reste de leur discographie, pourtant bien plus conséquente et qui, finalement, est à même de nous en dire bien plus sur la nature véritable du groupe de Ian Carr, qui désormais n'a plus peur de s'afficher en toutes lettres. Capable de rivaliser sans problème avec la meilleure fusion jazz en provenance des États-Unis, à l'image de ce que pouvait faire quelqu'un comme Joe Henderson par exemple, Nucleus est rarement tombé dans des travers faciles dans sa seconde partie de carrière (de "Belladonna" à "Roots"). On l'a vu, ce fût moins évident en ce qui concerne la troisième, et "Alley Cat" en est un exemple éloquent. Puisque Nucleus a pu pour la première fois en cinq ans maintenir un line-up identique sur deux albums de manière consécutive, le temps était peut-être venu de consolider les bases et de revenir à une formule éprouvée depuis longtemps laissée sur le côté. Ainsi, à défaut de pouvoir se reposer sur des individualités fortes, il faut pouvoir se recentrer sur l'écriture. Et en effet, les compositions de ce nouvel album renouent avec une volonté évidente de revenir à quelque chose d'un tant soit peu personnel. Si peu pourtant. Certes, impossible de réfreiner ses vieux démons puisque l'esprit jam transparaît encore, et en particulier sur les deux longs morceaux de l'album (la plage titre et l'orgiaque "Splat"), mais les atmosphères esquissées et les thèmes dessinés donnent un léger contrepoids au disque, lui permettant d'échapper de sombrer définitivement dans ce côté stérile trop souvent lié à ce type d'exercice de style. En cela, "Alley Cat" est sensiblement mieux que "The Snakehips Etcetera".

Note : 2/6

Page 26/167 NUCLEUS : In Flagrante Delicto

Chronique réalisée par Progmonster

Seul album en concert de Nucleus à paraître alors que le groupe était encore en activité, "In Flagrante Delicto" se distingue par quelques aspects pour le moins étonnants. Le plus curieux de tous étant sans doute de découvrir Dieter Dierks, l'architecte de la Kraüt music, en charge de l'enregistrement de ce concert donné en Allemagne le 6 février 1977. Simple exécutant technique, il fait preuve d'une sobriété exemplaire. Souligner ou non sa présence n'a aucune incidence sur le résultat final. La seconde est de constater que, hélas, Nucleus n'a pas su résister bien longtemps avant de connaître une nouvelle redistribution des rôles. Déjà, exit la guitare. Ensuite, la bonne nouvelle, c'est le retour de Brian Smith au saxophone. La mauvaise : le remplacement du solide Roger Sutton par le bassiste Bill Kristian. Le tout nous donne un album pris sur le vif, dense dans ses intentions, mais ramassé de par sa configuration recentrée en quelque sorte sur l'essentiel. Dans un tel contexte, Nucleus a moins tendance à se disperser. Et on ne pourra que s'en féliciter. "In Flagrante Delicto" n'est constitué que de quatre titres, que des inédits, mis à part l'interprétation de "Heyday", facilement un des titres les plus intéressants du tristement joyeux "The Snakehips Etcetera". "Gestalt" et "Mysteries" sont de longues improvisations parfaitement équilibrées, avec leurs moments de solo, mais le titre qui retiendra toute notre attention sera bien sûr la plage titre qui referme le présent recueil. Tout comme les autres plages, il fait preuve d'un esprit de synthèse dans l'approche qui, à ma grande surprise, nous ramène aux propos pondérés de "Elastic Rock". Aucune excentricité de quelque sorte que ce soit. Pour tout dire, on revient à une esthétique plus proche du Canterbury que de la Blaxploitation. Et tant pis pour "Live at Bremen" de Cuneiform et les autres enregistrements live posthumes ! Vu que ce sont des rééditions cds, y aura bien quelqu'un d'autre que moi pour s'en charger. Sur ce, pour votre soutien indéfectible, le Progmonstre vous salue bien bas.

Note : 4/6

Page 27/167 DADA POGROM : Happy happy happy

Chronique réalisée par Twilight

J'avoue que ce nouveau single du projet Dada Pogrom est plutôt déstabilisant...'Happy happy happy', pochette rose, vinyl orange...Est-ce de l'ironie ? La face A éponyme laisserait penser le contraire avec une synthie pop sautillante très influencée mew wave 80's avec chant au vocodeur. La face B poursuit dans la même lignée mais avec une touche plus froide renforcée par les vocaux féminins neutres répétant la même phrase de manière hypnotique. Je reste perplexe même si ça n'a rien de surprenant tant Dada Pogrom brouille les pistes et glisse sans cesse d'un genre à l'autre. D'un point de vue personnel, ça reste un peu léger mais peut-être que les fans d'electroclash apprécieront, d'autant que d'un point de vue esthétique, c'est un bel objet.

Note : 3/6

Page 28/167 ACTION BEAT : The Noise Band from Bletchley

Chronique réalisée par Hellman

Finalement, qu’est-ce qu’un album ? Une collection de chansons. Ou un ensemble cohérent sensé développer un monde singulier. Ou encore une manière comme une autre de présenter son projet. Un album, c’est chacune de ces choses là. Ou parfois les trois en même temps. "The Noise Band from Bletchley", c’est un échantillon sonore de ce que représente Action Beat. Ce n’est que cela. Et rien d’autre. Évoluant à plusieurs guitares, une seule basse, mais quand même entre une à quatre batteries, il y a forcément tout cet aspect spectaculaire entretenu par les membres du groupe qui paradent torses nus sur leur pochette que seule la musique enregistrée ici ne rend pas. Si l’attitude est résolument punk, la pratique toutes guitares dehors de cet exercice périlleux met en évidence l’influence majeure de formations aux accointances noise tels que les Fugazi, Sonic Youth, The Ex, ou, avec un peu d'imagination, les fous furieux de Lightning Bolt. Il y a aussi un petit côté math rock dans cette manière qu'ils ont d'harceler l'auditeur avec des riffs plaqués avec fureur. Sorte de vulgarisation plus sentie que réfléchie de l’approche développée depuis plus de trente ans déjà par l'école microtonale portée à bout de bras par Rhys Chatham et ses ensembles de guitares dissonants, la musique de Action Beat, si elle est incontestablement moins mâture et plus exubérante, reste tout de même plus encline à séduire un large auditoire même leur manque de nuance et de diversité est à déplorer. À chaque génération ses préoccupations. Ici, il s’agit moins de faire de la musique que de faire du bruit. Purement et simplement. Bref, si "The Noise Band from Bletchley" déborde d’une énergie toute juvénile sans pour autant emporter totalement l’adhésion, l’album nous donne au moins l’envie de découvrir le groupe sur scène, sa réelle place, et c’est déjà pas si mal. Au bout du compte, ce à quoi ce disque est en réalité destiné.

Note : 4/6

Page 29/167 MARCOEUR (Albert) : Travaux Pratiques

Chronique réalisée par Hellman

La publication d’un nouvel Albert Marcoeur, ouvrier de la musique, tel qu’il se définit lui-même, est toujours un évènement en soi. La quasi confidentialité de cette sortie rend la chose encore plus délectable, plus exclusive et donc encore plus enviable. Et de fait, "Travaux Pratiques" a toutes les raisons de l’être car il renoue avec la folle créativité qui firent les beaux jours d’un album comme "Celui Où Y A Joseph" (en 1984). D’emblée, l’obsédant "Bourrée en La" donne le ton, prolongeant l’expérience scénique de la tournée promotionnelle de son prédécesseur, "L’Apostrophe" en 2005. Tout en volutes de notes prodiguées par des vibraphones en canon. Du plus bel effet. Accompagné de ses deux frères, les fidèles Claude et Gérard, il réinvente une dynamique de groupe dominée par les violons du quatuor Béla, véritable fil rouge tout au long de l’album, qu’il saupoudre de temps à autres d’arrangements électroniques pour un résultat aussi étonnant que proprement original. Les textes, comme toujours, sont à la fois décalés et moqueurs, mais une certaine gravité transparaît quand on s'attarde au-delà des mots ("Stock de Statistiques", "Si Les Fumeurs Fument...", "Dans le Vif du Sujet"). Chez Marcoeur, c’est le trompe l’œil qui domine ; rien de ce qui paraît simple ne l’est vraiment, et quand le choses se compliquent, elles cachent souvent une désarmante évidence qu’il est délectable de déflorer. Depuis toujours, l'artisan Marcoeur s'est fait un devoir de mettre en lumière toute l'absurdité que peut nous offrir notre quotidien. "Travaux Pratiques" ne déroge pas à la règle. Alors soyez curieux : il ne tient qu’à vous de partager ce plaisir égoïste. Ruez vous sur le site du bonhomme !

Note : 4/6

Page 30/167 MENAHAN STREET BAND : Make The Road by Walking

Chronique réalisée par Hellman

Les cures de désintoxication à répétition d’Amy Winehouse nous empêchent d’envisager son avenir sous un ciel des plus cléments. Il ne faut pas être devin pour s’imaginer que c’est sans doute là une réflexion qui a du plus d’une fois tarauder l’esprit de Thomas Brenneck, artisan de ce son vintage tant prisé dont ont pu également bénéficier un groupe comme The Budos dont il fait par ailleurs partie... Menahan Street Band est son nouveau projet en date, conglomérat d’artistes triés sur le volet, et non des moindres : Sharon Jones & The Dap Kings, Antibalas et les Mighty Imperials. Besoin de faire un dessin ? En un mot comme en cent, ce "Make The Road by Walking", c’est de la balle ! Une petite merveille de musique soul comme on n’en fait plus, un son rond et moite, ample et généreux, bien roots, bien comme il faut. Il faut l’entendre pour le croire. Souvenez-vous du label Stax. Souvenez-vous... C’était hier. Et c’est... Maintenant ! Le champ d’investigation de cette musique aux vibrations conatgieuses s’étend aux rythmes latino, reggae et afro-beat par le biais de cuivres fastueux, le tout couplé à cette science toute moderne des gimmicks à répétitions qui fait de presque chaque titres des candidats possibles à un sampling en règle. Ce super combo, c'est un peu une sorte de Bar-Keys des temps modernes ayant digéré la grammaire des Skatalites et des Africa 70 réunis. Je veux. Enregistré en appartement, ce premier album du Menahan Street Band jouit donc d’une production dense qui sert parfaitement cette atmosphère chaleureuse et sensuelle à la fois. La cohésion du groupe et ce qu'il véhicule découlant forcément de cette incroyable promiscuité. Impossible de se tromper : "Make The Road by Walking" est bien parti pour nous accompagner tout au long de l'année...

Note : 5/6

Page 31/167 SHOLI : s/t

Chronique réalisée par Hellman

Attention, grosse révélation à l'horizon ! Signé chez Quarterstick, le label américain nous avait habitué aux éclats sanguinolants de Rodan, aux structures alambiquées des Shipping News, aux volutes sophistiquées de Rachel's, ce qui faisait d'eux les pourfendeurs d'un rock alternatif qui se rêvait de possibilités en dehors des circuits prééxistants. C'est la réputation du groupe Outre-Atlantique, vu le nombre soutenu de concerts donnés et une fa167ase de plus en plus conséquente, qui ont fini par leur mettre la puce à l'oreille. Une bonne pioche les Sholi. "All That We Can See" et "Tourniquet" constituent notre première prise de contact avec le groupe ; ces chansons montrent d’emblée une ambition d’écriture, des arrangements fouillés et bien senties, contrariées par une batterie en mouvement perpétuel, à l’instar des premiers Hella ou du malaimé "Danse Manatee" des Animal Collective. Ça joue sur les contrastes. Sur les combinaisons improbables. Sur le téléscopage d'approches à priori contraires. Nous sommes tout naturellement intrigués. Et invités à poursuivre. Car les mélodies d’orfèvre qui viennent se poser sur ces compositions plus tortueuses qu’elles ne le sont en apparence ont vite fait de vous posséder. Puis surgit "Spy In The House of Memories" avec son petit côté Radiohead (souvenez-vous de "We Suck Young Blood"), et c’est là que le déclic se produit. Contrairement aux idées reçues, le monde de la musique ne se divise pas de manière manichéenne entre d’arrogantes prétentions artistiques d’une part, et les chansons populaires de l’autre. Il existe un juste milieu. Cet album l'incarne à la perfection. La vraie bonne pop musique, n'est pas plate et prévisible. Elle possède divers degrés de lecture. Et Sholi remplit ce rôle avec une assurance qui laisse pantois. Ce discours, plutôt curieux au départ, devient subitement aussi évident à comprendre que notre langue maternelle. On s'en imprègne, on absorbe tout ce que le groupe daigne généreusement nous prodiguer. Mon premier gros coup de coeur de l'année.

Note : 5/6

Page 32/167 WELLS & MAHER SHALAL HASH BAZ (Bill) : Gok

Chronique réalisée par Hellman

"Gok", comme Gok Sound, le célèbre studio japonais où le bassiste et pianiste Bill Wells s’est plié à l'exercice toujours stimulante d'une rencontre, celle d'avec Tori Kudo, instigateur du groupe Maher Shalal Hash Baz, son épouse Reiko et sa bande de copains souffleurs. Entreprise louable que celle de Geographic qui nous permet de découvrir ce disque, paru à l'origine en 2006 sur Karaoke Kalk sous le titre "Osaka Bridge" ; un album délicat empli d’une touchante innocence, véritable signe distinctif de cette formation japonaise proprement étonnante. Ce grand orchestre dégingandé pas toujours au point qui prône l’amateurisme à travers une esthétique héritée de l’art naïf pratique cette discipline depuis quelques années déjà, donnant vie à des mélodies simples, d’une troublante fragilité. On pense au de Carla Bley. À Hermeto Pascoal (l'exotisme de "Liquorice Tics"). À Charles Mingus qui aurait ouvert son Workshop à de complets amateurs qui noient leur peine dans l’alcool. On pense aussi au décidement incontournable Robert Wyatt, non pas pour ses qualités de chanteur blessé, mais bien pour cette infaillible capacité à vous prendre aux tripes avec les sons les plus désuets, les plus désarmants qui soient. Le seul regret peut-être, c’est que les quinze courtes plages de "Gok" sonnent comme d’incroyables entrées en matière jamais abouties. Une belle collection de thèmes forts et poignants, au lyrisme à fleur de peau, balancés avec cette cruauté désinvolte que seuls les enfants peuvent avoir, et qui laissent des marques profondes. Cette fanfare, aussi grotesque soit-elle, interpelle, nous triture l’esprit et le cœur. Elle nous rappelle que la beauté se loge bien dans le regard de celui qui la contemple. Et le souvent poignant "Gok" a de quoi nous arracher les larmes des yeux. Bien qu'il s'agisse donc d'une réédition, il figure d'ores et déjà parmi les premiers prétendants au titre de chef-d'oeuvre pour ce millésime 2009.

Note : 6/6

Page 33/167 GAE BOLG : Requiem

Chronique réalisée par Sheer-khan

Néo classique, religieux et païen, médiéval, mais aussi empreint d'un sérialisme mélodique contemporain, parfois pulsé comme de la dark music, et toujours aussi dérangé. Pour son requiem, Gaë Bolg a paradoxalement délaissé son église, au profit d'une liberté stylistique proche de l'oecumenisme musical. Cette messe où se déploient les envolées de trompettes les plus lyriques, où s'élèvent les choeurs réligieux les plus orthodoxes comme les plus biaisés, où les synthétiseurs assumés et quelques guitares électriques se mêlent aux percussions anciennes et aux violons romantiques est une remarquable réussite; on bascule de douceurs en grimaces, de marches funèbres en recueillement, d'un siècle à l'autre. Eric Roger crée tensions et inconforts à coups de motifs répétitifs et agressants, séduit par la classe de ses lignes de trompettes, émeut par la qualité mélodique souvent triste dont il sait faire preuve, entre deux étrangetés. Dynamiquement plus retenu que ses oeuvres précédentes, même si l'on assiste encore à quelques processions énervés de chanteurs possédés, le Requiem est l'occasion pour l'artiste de dégrossir son approche faussement rustique et dévoiler son sens de la délicatesse, de la subtilité, mais aussi sa capacité à fondre ses multiples influences dans une cohérence pratiquement impensable : essayez donc de définir simplement le style d'un "la flammes s'éteint...", aussi new wave que religieux, que beau, que kitsch, que... différent de ce qui le suit, en toute fluidité pourtant. C'est toujours aussi ironique, toujours aussi inquiétant, toujours sous tendu d'une forme de violence; c'est aussi devenu particulièrement sensible, bienveillant à l'occasion, et régulièrement baigné d'une lueur atmosphérique subtile, magnifiée par une grande richesse mélodique. Décrire un à un les 14 chapitres de cette oeuvre serait peut-être le moyen le plus efficace d'évoquer avec exhaustivité les styles abordés, détournés même, par Eric Roger; mais ça serait surtout passer à côté de sa véritable réussite : la cohérence, l'affirmation d'un univers puissant et profondément singulier. Religieux discipliné sur "Introit", malicieux et pervers dès le "Dies Irae", totalement indocile sur "Lacrymosa" où les chants inquiétants sur bombardes de cuivres se font bousculer par une flûte psychotique après avoir été introduit par des trompettes élancées et classieuses qui succédaient elles-mêmes à une plongée de piano reverbéré au sang latin... vous voyez : je donne déjà l'impression, fausse, d'un grand n'importe quoi. Très légèrement déforcé par le synthétique de certains instruments, le Requiem de Gaë Bolg est une oeuvre d'une profonde beauté et d'une grande liberté, aux finesses harmoniques remarquables, aux puissances lyriques saisissantes. Une déclaration d'identité absolument captivante.

Note : 5/6

Page 34/167 RAJNA : Otherwise

Chronique réalisée par Sheer-khan

Plus de doute, la mutation est consommée. Débarrassé de Chambellant et de ses prétentions mystiques, Rajna développe depuis "Door of serenity" une musique plus honnête, plus humble sans doute, assumant avec tact une démarche qui aura été finalement, depuis les premiers jours, purement esthétique. Une musique de plaisir, de détente, où la méditation n'est que facultative et dont l'objectif premier demeure la séduction. C'est donc en toute logique, mais aussi avec un certain courage, que le duo affirme aujourd'hui la véritable disparition de la dominante "ethnique" de son heavenly, appuyant l'évanouissement du spirituel, vers des voies plus pop. Logique, courageux... mais pas encore convaincant. Les trois principaux symptômes de ce glissement sont l'utilisation systématique de l'electronique dans les percussions, la mise en forme de lignes de chant plus construites en lieu et place des vocalises, textes à l'appui, et enfin l'introduction d'éléments de vocabulaire purement pop et rock : guitares, basses, mais aussi des esquisses de couplet/refrain et de rythmes rock. Et c'est précisement sur ces trois terrains que Rajna ne fait encore que se chercher. Les percussions tout d'abord, les rythmes : on ne peut que constater le manque de charme des sons choisis; privés de la profondeur organique, de la richesse acoustique, les programmations de Fabrice Lefebvre s'affichent comme nettement trop purement décoratives, les pulsations sont moins sensibles, le groove est sec, et la texture même des sons a bien du mal à s'intégrer aux pastels alentours; l'approche est malheureusement trop souvent simpliste, voire datée. Les lignes de chant, elles, malgré certaines réussites sur lesquelles nous reviendrons, maintiennent la voix de Jeanne dans un spectre bien plus réduit qu'elle ne le mérite : car c'est bien dans les vocalises, la liberté volatile, que la française exprime son excellence et sa facilité, obligée aujourd'hui à simplement "chanter", en muselant littéralement son registre. Quant aux dites mélodies, elles sont souvent décevantes. "Hidden temple" avait confirmé le talent de Fabrice Lefebvre pour les notes; il semblerait que confronté aux balises nécessaires à la constitution de phrases, Rajna n'arrive plus à trouver les angles de liberté par lesquels il lui arrivait d'atteindre la grâce. Symptôme rock, la guitare, enfin, dont l'apparition se limite à quelques leads ou soli, peut sans doute mériter ses quelques compliments, (joli son, toucher souple et organique...) mais de manière un peu expéditive, on pourra surtout lui reprocher la même chose qu'aux percussions : simpliste, datée, rajoutée, beaucoup trop proche de l'ornement totalement factice pour pénétrer la musique de Rajna. Avec "Otherwise", le groupe pratique des juxtapositions qui ne mènent malheureusement que rarement à de véritables rencontres, les sons ne se mêlent pas, les mélodies passent sans réussir à s'attarder... sur ce point de la cohérence, et de la richesse de l'acoustique globale de l'album, "Otherwise" constitue par rapport à son prédécesseur une véritable chute. Mais bon, moi j'aime bien les époux Lefevbre, j'ai un grand respect pour leur simplicité, le talent de beauté dont ils ont fait preuve dans leurs deux albums précédents, et ce royaume extraordinaire que demeure la "trilogie tibétaine". "Otherwise" n'est donc qu'un premier faux-pas, et puisque l'échec relatif de l'album dans sa globalité a été exposé, il convient aussi de pointer les réussites ponctuelles qu'il contient. Dans sa quête pop/heavenly, Rajna trouve ici de jolies pièces. "Angel", pluie fine et lumineuse, où, sur la crête d'un piano en gouttelettes, Jeanne se situe entre la complainte, la louange, la mélancolie et la lumière : c'est simple, subtil et raffiné. Le piano, justement, dont les éclats floconneux illuminent le très joli "colours of love", qui dans son aspect "Rajna's playing U2" incarne le plus pleinement, me semble-t'il, la nouvelle démarche pop du duo. "Prima Ballerina", joliment texturé de violoncelle, développe une mélodie d'une nostalgie lumineuse très proche

Page 35/167 de que Brendan Perry a pu livrer à travers notamment des pièces comme "Carnival is over", mais qui aurait gagné à ne pas se parer dans sa deuxième partie d'un démarrage de programmations rythmiques qui ne fait que plus cruellement ressentir le manque d'aptitude du groupe à flirter avec quelque élément que ce soit du trip-hop. "Secret place", "Lost memories" plus typique du passé du groupe et qui montre que ce dernier n'a rien perdu, et qu'il est juste, sur le reste de cet album en demi-teinte, en train d'évoluer encore. "Lost memories", soudain profonde, émotionnelle, passionnelle, et dans laquelle Jeanne, ici pertinemment secondé d'un chant masculin, peut retrouver sa grandeur. Encourageant : la pièce qui tranche le plus radicalement avec l'habitude heavenly du duo, "Black humanity" et surtout sa conclusion dark rock saturé, est plutôt une réussite. Il y a bien d'autres choses, au hasard du travail de Fabrice arrangeur, producteur, qui contentent l'oreille... des havres synthétiques aux textures plus subtiles, des pointes d'émotions palpables... le candide "when i was a child..." ... mais "Otherwise" est trop bancal, et même raté sur de nombreux points, pour convaincre.

Note : 3/6

Page 36/167 FORSETI : Jenzig

Chronique réalisée par Sheer-khan

Cette première petite collection de Ritter porte bien son nom. Il présente en 8 petites pièces et 25 minutes la personnalité marquée de tradition du mélancolique Forseti, ce folklore germanique à la rythmique souvent un peu martiale, et à la diction anguleuse et hachée, pétri d'une profonde nostalgie. Pour l'instant les arrangements sont simples, une ou deux guitares simplement jouées et quelques percussions... un peu de flûte par ci, un violoncelle par là, de l'accordéon, mais tout cela dans une épaisseur acoustique finalement réduite, les instruments se succédant aussi souvent qu'ils ne se superposent. Très respectable, charmant, ce disque souffre encore, malheureusement, de quelques défauts qui le condamnent à n'être qu'un essai, avant le très joli "Windzeit". Le son des guitares tout d'abord, élément essentiel dans un recueil de folk plutôt dépouillée, n'est pas très joli. Un peu plastique, sans densité, sans magie. Les mélodies d'Andreas Ritter, ensuite, qui n'atteignent pas encore ce remarquable équilibre, entre tristesse et pudeur nostalgique, qui fait de "Windzeit" un disque tout aussi hermétiquement traditionnel, qu'intime et émouvant. De "Jenzig" à "Erde" Forseti va en effet ouvrir à chaque fois un peu plus le flot de ses émotions : simplement nostalgique sur le premier, plus triste sur le second, allant jusqu'au noir dans les plus sombres recoins du troisième. Les choses, ici, sont retenues, et en n'ouvrant pas son pathos à plus de profondeur, Andreas Ritter ne parvient pas dans ses mélodies à atteindre la grâce. La joliesse oui, la nostalgie légère parfois, mais "Jenzig", entre son son un peu avorté, ses arrangements un peu frileux et sa discrétion émotionnelle sort rarement de l'agréable contemplation. La musique de Forseti étant par ailleurs baignée d'une candeur pleine, que ce soit par ce choix très littéral d'une folk allemande traditionnelle ou par le message profond de Ritter, elle marche en permanence sur le fil de la naïveté : la chute n'est pas toujours évitée sur ce "Jenzig".

Note : 3/6

Page 37/167 FORSETI : Erde

Chronique réalisée par Sheer-khan

Il y a quelque chose de fondamentalement déprimant chez Forseti. Ce passéisme plaintif, cette rigueur craintive, cette incarnation désespérément littérale d'une tradition dont on n'arrive pas à s'extraire : il y a chez Ritter une dimension autistique dérangeante. Plus ouvert aux autres, "Erde" nous laisse entrevoir un artiste un peu moins apprêté, plus cru, sensiblement plus "vrai" et sincère qu'il ne l'était jusque là, trop préoccupé à se fondre dans une esthétique comme s'il s'était agi de lui obéir... comme un gentil garçon. En empruntant à Sonne Hagal, à Orplid, en allant chercher le grain de voix si reconnaissable de Ian Read et la contribution de Kim Larsen, Ritter réussit à s'extraire en partie de ses propres pièges. Nous sommes toujours dans la folk germanique traditionnelle, mais ce raffinement tout aussi maitrisé que trop aimable qui fit de "Windzeit" un album à la fois beau et distant a laissé la place à une authenticité salvatrice, par laquelle l'allemand arrive à nous transmettre une tristesse plus palpable, plus profonde, et que l'on se sent plus volontiers à même de partager. Toujours aussi délicats, les arrangements sont aussi plus dépouillés, plus essentiels, plus justes, comme si Forseti n'était plus dans l'écriture normée, mais pour la première fois, dans l'expression. "Empfindsamkeit", "Sterne", Andreas Ritter est plus enclin à laisser de côté ses rythmes folk et rigides pour des pièces plus directes et sensibles; "Dunkelheit", "Das abendland", il s'autorise, même si cela reste un peu masqué, une plus grande noirceur. Le fragile Ritter subira une crise cardiaque l'année suivant la sortie de ce "Erde", qui le laissera partiellement paralysé, faisant de ce troisième album le dernier d'une formation pour le moins emblématique du mouvement néo-folk; à l'heure ou le jeune artiste semblait enfin sortir d'une contemplation un peu naïve d'un vocabulaire anachronique qu'il voulait faire sien. Moins raffiné que son prédécesseur, "Erde" est à mes yeux le seul recueil réellement émouvant de Forseti, celui dans lequel Andreas

Ritter se dévoile suffisamment pour sortir d'un genre pur, et ainsi commencer une oeuvre.

Note : 4/6

Page 38/167 TROUBLE FAIT' : Sub Lumina prima

Chronique réalisée par Twilight

'Sub Lumina Prima' ou le retour aux sources ? Un voyage ? Voilà un disque qui suit un mouvement particulier et intéressant, pas si surprenant de la part de musiciens qui aiment à jouer les 'touche-à-tout'. Deux parties distinctes segmentent cette galette; une première que je qualifierais d'urbaine (faute de mieux) caractérisée par des atmosphères marquées post punk ('The relief man', 'Ausbruch'), voir même carrément gothiques (l'excellent 'Sister of darkness'), et une seconde plus 'roots', plus orientée vers des influences dark folk ('Tazenat' et ses percussions rituelles, 'Tenebrarum Angeli' avec sa touche médiévalo-folklorique), la transition étant assurée par 'Los ojos de la noche' qui m'évoque la folk wave de formations comme In my Rosary, la touche rock indie en plus. Pourquoi parlais-je de voyage ? Pour cette manière de partir d'un post punk goth moderne pour revenir à quelque chose de plus traditionnel, des influences anciennes. Il y a également l'usage des différentes langues pour souligner les atmosphères des compositions: anciennes comme le latin, ce que je suppose être du Breton, ou alors simplement l'anglais, l'allemand et l'espagnol. Outre la traditionnelle combinaison guitare-basse-batterie, Trouble Fait' enrichit ses lignes d'instruments tels que le bongo, le didgeridoo ou la derbouka. Le risque aurait été d'avoir un album disparate et décousu mais tel n'est pas le cas, le talent des musiciens étant d'agencer le tout en un mouvement logique qui prend la forme d'un voyage. Il ne reste plus qu'à vous laisser porter...4,5/6

Note : 4/6

Page 39/167 DILLINGER : CB200

Chronique réalisée par Dioneo

Il y a des lieux et des instants. Soudain tout se noue, tout se tisse pour tendre vers une grâce essentielle. Les éléments les plus grossiers se mêlent en fibres serrées, élégantes dans leur rudesse qui se fait simplicité, évidence. Et les cris, les bruits de la rue se parent d’un raffinement insoupçonnable, altier, magnifiquement proportionné. L’urgence pousse les formes les plus populaires, celles qui doivent s’épandre au plus vite, s’écouler en masse et sans délai, aux audaces les moins attendues, à l’incessante surprise, aux derniers retranchements de l’invention. Une simple chanson devient un hymne et l’éphémère achèvement de l’idée se retrouve en vente libre. L’air du temps échappe aux outrages, quitte à disparaître sous le jour suivant, tapi, prêt à rejaillir du fond des décennies futures. Ça s’appelle Motown à Detroit (Michigan) ; STAX à Memphis, (Tennessee) ; ZE Records, Downtown New York (NY) ; Factory à Manchester (UK). Ou Channel One. Kingston. Jamaica… Il y a d’abord ce single brut et racé, de ceux à quoi l’on ne doit rien ajouter ou retrancher sous peine d’irréparable, de retour au générique, aux tics de genre. Une chanson parfaite, parfaitement cinglée. Cokane in my Brain. Une ligne de basse entêtante, propulsive. Un drive de charley funky, limite disco, mais absolument dégraissé. Et presque rien d’autre, au début. Ne serait ce fameux contretemps (le skank), ici léger comme les fumées urbaines au trottoir d'un Brooklyn d'immigrés. Un mixage sec, brut, presque sans effets. Et par dessus, bien en avant, cette voix tendue et presque exaltée, qui balance d’une même traite questions et réponses. Qui débite ses bouts rimés et les rattrape au bond, en une poésie purement rythmique, en abstractions compactes et menaçantes. L’exultation aux artères dilatées. La Folie aux sinus et au cortex ravagés d’un feu glacial. Ailleurs sur le disque le débit, le timbre puissant du toasteur se déploient et se rétractent, se durcissent ou s’étirent en une virtuosité serrée, sans ornements, jeu de muscles et de nerfs, instinct et intellect rendus indiscernables. Mais cette fois les effets enveloppent, immergent, fondent le flot à un dub extrêmement dense, moins foisonnant qu’ailleurs à la même époque, dans les même parages. Point de vastes espace enluminés, comme chez le Roi Tubby. Pas de ténèbres insondables, on n'est pas chez Lee Perry. Mais un son exceptionnellement plein dans sa concision, un groove pesant qui ne s'encombre d'aucune précaution, se passe de tout effet d'annonce. Basse et batterie, guitare ou clavier cisaillant les temps pairs. Quelques éclats de cuivre liquéfiés par la reverb, qui filent en rigoles hors du mix ou se subliment en vapeurs, aspirées par les roulements centrifuges. Le son d’une époque, oui. Mais de celles, si rares et si brèves, où le marché, la production et ses chaînes happent soudain l’histoire souterraine, la vie qui sourde aux bas-fonds des villes et brûle aux frondaisons des collines alentour pour les recracher au visage du monde. Les riddims décalqués puis à peine maquillés, les fragments de vers saisis au vol d'autres hits puis retaillés, malaxés, triturés, deviennent autant de mots de passe, de signes dévoilés, un instant fugitif, aux yeux des profanes et des initiés. De messages furtifs, opaques ou aveuglants. Peu importe, au fond, l’emphase biblique où viennent s’ancrer les appels à la sédition. Peu importent, aussi, ces fins de morceaux tronquées, abruptes, qui nous laisse en suspens jusqu’à la prochaine entame. Il y a ces assonances affolés, ces coq-à-l’âne absurdes et emboîtés sans respirer, en véloces figures d'un plaisir sans excuse. On ne sait plus si l’on doit rire ou s’effrayer. L'insondable patois d'un temps et d'un taudis lointains ne parvient pas à étouffer la rage posée qui électrise le flux. Que l’intenable rasta nous vante la puissance de sa Honda toujours briquée, nous abjure d'incendier Buckingam et le Vatican, nous propose de fumer de la weed ou d’abattre Babylon en compagnie de Bruce Lee et de Jim Kelly,

Page 40/167 qu'il fasse la bête ou prêche l'élévation spirituelle, l'excitation s’imprime en nous, coulée de plomb aux frottements feutrés. C’est celle d’un lieu et d’un moment qui ne se rencontreront plus. L'instant d'un acte neuf, le souffle d'une seconde qui le reste à jamais : ça vit bien plus fort que tous les Classiques.

Note : 4/6

Page 41/167 BRIGHTER DEATH NOW : Great Death I

Chronique réalisée par Wotzenknecht

On dit souvent que la mort est une question de point de vue : ce jour là, j'allais donc découvrir celui de Roger Karmanik. "Prends ça, tu y verras mieux" me dit-il en me tendant une poignée de psilocybes. Ces derniers permettaient de voir, toucher, sentir ce que la musique seule ne permet que d'entendre, et c'était le seul moyen de pénétrer dans sa machine à recyclage de cadavres. Sur le dernier chemin humainement empruntable, je repensais à ce bon vieux Dante Alighieri égaré dans la forêt en me disant que ce soir, j'étais Dante et Roger était mon Virgile. "Par ici !" Un premier grondement se fait entendre à des kilomètres à la ronde, et au loin se dessine déjà le lieu maudit que j'allais pénétrer et, je l'espère, en ressortir. Ce n'était pas une île mystérieuse comme un tableau de Böcklin ou une cité enflammée sur le bord d'un gouffre. Ce n'était pas non plus une montagne creusée et percée de bains de lave dans lesquels les âmes damnées dansent des rondes de douleur infinies sur des grills infernaux, encore moins une oubliette dans lequel les pécheurs hurlent leur souffrance, soumis à diverses tortures sisyphiennes tout en répétant les mêmes mots de haine envers les dieux à chaque nouveau cycle. Non, c'était une usine. Une gigantesque usine dont les cheminées que l'on pouvait deviner sous une épaisse couche de graisse vomissait des vapeurs délétères et noircissait encore un peu plus le ciel, comme si cela devenait nécessaire pour dissimuler chaque maigre rayon de lumière qui se risquait à toucher le toit du monstrueux bâtiment. "Tu perds ton temps à chercher des dieux ici, me dit-il en me voyant lever les yeux dans le ciel charbonneux, ici-bas il n'y a que des morts, des vivants et des morts-vivants." La porte, ou plus précisément les deux gigantesques pans métalliques aux charnières huilées par les coulées de graisse humaine qui débordait des cheminées, s'ouvrit lentement sous mes yeux. L'odeur nauséabonde de viande calcinée et de sang séché me retourna immédiatement l'estomac ; je repérais vite un seau pour y déverser mon déjeuner. Il se trouvait parmi une pile de semblables, rassemblés au milieu de serpillières ayant visiblement servi à éponger les hectolitres de fluides organiques débordant des cuves qui cernaient les murs de béton...

(suite sur Great Death II)

Note : 5/6

Page 42/167 BRIGHTER DEATH NOW : Great Death II

Chronique réalisée par Wotzenknecht

(suite de Great Death I) ...Roger me regarda en souriant puis, levant les yeux dans ses machines, déclara d'un air solennel : "La mort est partout ! Chez toi, dans ta télévision, dans ta radio, dans ta famille. Tu pourris dès que tu cesse de grandir, tu te nécroses et tu te retrouves face à un choix : lutter pour retarder ton heure, ou sourire en l'attendant. La mort est dans l'humour. C'est l'absurde qui se fait écho. Le cycle dans un miroir. Les enfants pleurent en naissant. Rient en jouant. Se taisent lorsque le pire des hommes assouvit sur eux son désir de vivre. Ils pleurent, s'infectent et meurent. Le pire des homme rit, puis pleure et meurt aussi. Et le corps de tous les hommes, de toutes les femmes, de tous les enfants morts retournent ici, pour se faire broyer, déchiqueter avant de retourner au travail. C'est éternel. C'est le rendement. L'usine." C'était suffisant pour attiser mon envie de ressortir vivant mais pas assez pour tempérer mon excitation. Il fallait que je comprenne ce qui se passe, pourquoi ici des corps étaient rivés devant un clip de disco, pourquoi là-bas des cadavres de tout-petits avaient été soigneusement disposés dans ce qui s'apparentait à une parodie de jardin d'enfants. On aurait dit une suite de dioramas grandeur nature, dont chaque personnage était relié par divers tubes à une cuve, comme si chaque période quotidienne ou banale de la vie avait été recréé ici, avec des cadavres, dans ces relents de pourriture. "Je te l'ai dit, tout respire la mort. Je ne suis que jardinier. Homme d'affaires. Je sème, je plante, je brûle et je sème. Je recycle." Sur ma droite, des corps sans âme s'affairent à meuler leurs semblables dans des grands récipients. Le substrat brunâtre est sucé par un système de tuyauterie complexe tandis que les résidus finissent dans une broyeuse. Les ouvriers semblent peu concentrés à leur tâche et c'est sans surprise que je me suis fait éclabousser tandis que je me penchais au dessus des scies en métal qui tournent inlassablement au fond de la cuve. En relevant la tête, j'ai la désagréable surprise de découvrir que mon guide a quitté mon champ de vision. Je m'enfonce plus avant dans ce cauchemar d'acier et de sang, là où les roulements de machines sont de plus en plus présents – les martèlements résonnent dans ma cage thoracique comme en écho à mon battement de coeur, puis à mon horloge interne – mais où est-il donc parti ? Dans cette quasi-obscurité je n'ai que les vagues réflexions des mares de sang pour m'éviter les collisions, tandis que le bruit se fait de plus en plus oppressant au fur et à mesure que je m'approche des mécanismes les plus antiques, comme cette colossale horloge mécanique d'une bonne quinzaine de mètres de haut, qui tourne lourdement dans le vide avec pour seul cadran la roue nécrosée à huit branches – le cycle de l'usine, dont le centre me fixe soudainement – c'est moi, je suis au centre et la roue tourne autour, comme assiégé par une danse macabre qui n'attend que la fin de mon mécanisme pour nourrir le sien. Tandis que se referme dans ma tête le piège de cette construction inhumaine, je repense à ces chants que l'on entendait si souvent à l'église, qui prennent tout leur sens en le perdant totalement : on ne chantait par pour dieu, on le chantait pour soi, pour sa peur et son salut, mais point de salut, la danse continue, le cercle se rapproche, tourne de plus en plus lentement tandis que mon coeur ralentit – Ce n'était pas un guide, c'était juste un passeur... (suite sur Great

Death III)

Note : 6/6

Page 43/167 BRIGHTER DEATH NOW : Great Death III

Chronique réalisée par Wotzenknecht

(suite de Great Death II) ... "Réveille-toi imbécile, la visite n'est pas finie et ton attitude irrite les morts, rappelle-toi que tu portes encore en toi tout ce qu'ils ont perdu ! J'ai encore quelque chose à te faire voir. Tu auras tout le temps plus tard pour revenir par la bonne porte." L'usine... depuis combien de temps étions-nous ici ? Les ouvriers livides fixaient leurs orbites vides vers nous tandis que leur corps semblaient à la fois nostalgique et stressés à l'idée qu'un être vivant puisse encore pénétrer ce lieu. "Il faut que je te montre la salle la plus amusante." Venant de sa bouche, je ne savais plus trop à quoi m'attendre. "Le sexe, mon ami, le sexe et la mort sont interconnectés puisque l'un pousse l'autre. Le dérèglement du sexe, les perversions, les viols provoquent des dérèglements drastiques des processus mortels, il en résulte des précipités macabres tout à fait délicieux." Je n'osais imaginer ce qu'il entendait par sa dernière remarque. Allais-je devoir goûter aux liquides pâteux qui s'écoulent au dessus de nos têtes dans ces tuyaux qui débordent ? "C'est ma scène préférée, le dîner en famille. Regarde comme mes filles sont belles !" Le dernier diorama. Là, juste devant nous, se trouvait une scène qui aurait pu être tout à fait sans intérêt, fût-ce dans un autre contexte. Là, c'était tout simplement ignoble. C'était ses enfants, c'était sa femme, c'était lui en cadavre, tous réunis autour d'un joyeux apéritif avec un autre invité – MON cadavre. Tous les corps avaient une paille qui les reliait à leur verre, sauf que le liquide n'était pas aspiré : il semblait produit par les corps, comme un lent vomissement qui remplissait peu à peu les coupes transparentes d'une pâte grumeleuse. Roger poussa négligemment son propre corps par terre et pris place. "Joins-toi donc à nous, me dit-il en levant son verre dégoulinant comme pour porter un toast, et goûte à ton propre cocktail. Il aura la saveur de ton passé, le fumet de tes obsessions et le relent de ton inévitable nécrose." Que pouvais-je faire ? Je déposais avec précaution ce qui s'apparentait à ma carcasse sortie d'une morgue sur le sol et m'assis à mon tour. C'est à cet instant que les machines se turent et que je pris conscience de l'aliénation de leurs vrombissement sur mon corps. Le silence était infiniment plus angoissant, ne restait plus que lui, Roger, sa famille et cette atroce odeur à laquelle je commençais malgré moi à m'habituer. Dans ce néant pathétique et oppressant, je me résolus à lever les yeux vers mon guide – mais son cadavre avait repris place et j'étais seul une fois de plus, attablé avec une famille en état de décomposition avancée. Dans le silence, j'entendis de temps à autre une des fillettes fredonner un petit air avant de retomber dans le mutisme, à moins que cela ne soit une hallucination provoquée par toutes ces vapeurs délétères. Je pris mon courage et ma coupe à deux mains et but en espérant ne jamais me réveiller... (suite sur

Nordvinterdöd)

Note : 5/6

Page 44/167 BRIGHTER DEATH NOW : Nordvinterdöd

Chronique réalisée par Wotzenknecht

(suite de Great Death III) ...Je flotte dans l'éther, porté par un nouveau vrombissement – l'usine a sûrement repris son cours. J'entends au loin la voix de Roger qui chante quelque chose de l'ordre d'une vague incantation, soit pour me ramener dans le monde sensible soit pour finir de m'achever. Que voulez-vous que je fasse ? Perdu dans un coma sans âge, je repense à ce que j'ai vu, je repense une nouvelle fois à Dante, lui qui avait parcouru l'Enfer, le Purgatoire puis le Paradis ; je n'aurai finalement vu que trois fois l'Enfer, dont la seule raison d'être ne se trouve que dans cet atroce cycle de désintégration/régénération que la roue nécrosée résume à elle seule. Cette existence est une meule dont la vie est le pilon et la mort est le marteau, et les corps entre les deux. Le reste n'est qu'engrenages, mécanismes huileux et flaque de sang – plutôt en rire, donc, qu'en pleurer. Mais un autre bruit répétitif me ramène à la conscience. Lorsque je rouvre les yeux, je vois le visage de Roger, l'air satisfait, qui me soulève par le col. Tout tremble autour de nous ; j'aperçois vite par les ouvertures que nous sommes dans une vieille locomotive noire qui s'éloigne lentement du cauchemar par un chemin de fer qui semble abandonné depuis des millénaires. "Quand il y a trop de travail, on prend les gros moyens – ce train ramène les cadavres par centaines. Tu as encore du temps avant de faire partie d'eux, mais n'oublie jamais ce que tu a vu. L'écho est sans fin." Un grand coup de pied dans le dos et me voilà projeté dans le paysage obscur tandis que la locomotive s'éloigne en effaçant son propre chemin dans un nuage de poussière charbonneuse. Le réveil sera dur.

Note : 4/6

Page 45/167 U2 : The unforgettable fire

Chronique réalisée par Sheer-khan

Il s'en est passé des choses, depuis. Le succès galactique de "Joshua Tree", la révolution Zoo Tv, l'installation en croisière à jouir d'une stature qu'on s'acharne

à ne plus mériter à coup d'albums faciles; en 1984, année bénite, U2 n'est déjà plus l'auteur explosif du très respecté "War", et il n'est pas encore ce fameux "plus grand groupe de rock du monde". Pourtant, ce disque, ce son, cette musique, est toujours la première chose qui me vient à l'esprit, aujourd'hui encore, lorsque j'entends prononcer ces deux syllabes sans doute trop célèbres : U2. Première collaboration avec le tandem Eno/Lanois, "The unforgettable fire" va sceller, et incarner définitivement le "son" U2. C'est ici que la guitare papillon de The Edge ne ressemble plus à aucune autre; ici que la basse de Clayton est la plus ronde, grave et nocturne, assumant la mélodie fondamentale et les courbes rythmiques quand

The Edge fait l'avion; ici que Larry Mullen Jr impose cette approche absolument unique du rythme et de son instrument, aussi enclin aux toms qu'à la caisse claire dans un travail roulant et plombé d'accents profonds qui tient autant des

Page 46/167 percussions que de la batterie rock; ici, enfin, que Bono est un chanteur foncièrement lyrique et engagé qui a offert à ses compatriotes l'hymne "Sunday bloody sunday" et s'est révélé au reste de l'europe en charismatique leader d'un rock sombre et fantasque, au travers d'un clip de pleine nuit, de forêt et de buées hivernales : le superbe "New year's day"... à l'époque, Bono n'agace pas encore : il fascine. Les 20 premières secondes de ce disque, "A sort of homecoming", portent en elles seules tout l'album "Joshua tree". Elles nous mènent néanmoins vers une musique encore obscure, à la fois triste et lumineuse, mêlant l'espoir à la douleur et la sincérité au lyrisme; une musique incroyablement soignée, riche et puissamment atmosphérique, crépusculaire, limpide et brumeuse à la fois. Avec "Wire" ou "Indian summer sky", U2 traite le post punk en esthète, avec "homecoming" et "unforgettable fire" dont les superbes harmonies s'enfoncent dans le velours gothique de ses cordes profondes, il donne à la new wave une dimension musicale inédite; U2 impose sa très grande classe mélodique, son sens du clair obscur, cet univers sublime, depuis perdu dans l'explosion. Le célèbre "Pride" n'est que la partie émergée de l'iceberg : si le solaire "Joshua tree" explosera les ventes, "The unforgettable fire" est un album entièrement voué à la beauté du soir, au brouillard, et à l'amour du son. Passé un morceau titre parmi les plus classieux de la décennie, le groupe se plonge dans une longue suite de pièces purement atmosphériques, vibrantes, fantomatiques et étoilées;

"Promenade", "4th of july", "Bad" la merveilleuse; le temps de revenir à ses ombres post punk pour

Page 47/167 un "indian summer sky" qui s'ajoute aux 4 joyaux new wave qui ont ouvert l'album, et le sorcier indocile "Elvis Presley and America" reprend la route du mystérieux, jusqu'à l'aurore "Mlk", diaphane... religieuse. L'influence des deux producteurs est majeure, évidente. En arrière plan des dentelles de guitares reverbérées passent les voiles tour à tour profonds et éthérés d'ondes de claviers spectrales; chacune des notes volatiles de l'inimitable The Edge brille et virevolte comme une luciole. Une guitare en argent, des nuages et des cordes, des choeurs au lyrisme exacerbé : c'est fini, c'est vrai : il n'y a plus aucune racine punk dans cette messe pop ouvragée, mais U2, qui s'ouvre soudain en grand au plaisir du sonore, n'a sans doute jamais été aussi gothique. Oui, il s'en est passé des choses, depuis. Le succès galactique du très beau "Joshua tree", la révolution Zoo Tv, ou comment définir les nouvelles pistes de la pop pour les 20 ans à venir. Pourtant, dès qu'on me dit U2, c'est ce son, cet album, cette musique, à chaque fois, qui me vient en premier à l'esprit. Et aujourd'hui encore, à chaque fois, je me dis : quel groupe

extraordinaire...

Note : 6/6

Page 48/167 COLD PHOENIX : Your eyes are my eyes

Chronique réalisée par Twilight

Allez, devinez d'où nous vient cette petite perle...D'Italie, bien sûr ! Cold Phoenix, encore un groupe que j'aurais bien regretté de ne pas connaître. Leur musique ? Un parfait mélange de post punk goth et de cold wave. Basse bien marquée au mixage, guitares glacées, batterie sèche, parfois plus roulante ('Binding me to dream', 'Stop just a moment') et vocaux plaintifs (mais pas trop). Ca fleure bon Joy Division, les Cure et c'est très bien construit; les mélodies sont solides, les atmosphères soignées (on notera notamment le bon emploi du clavier). Bien qu'aucune faiblesse ne soit à signaler, j'ai une préférence particulière pour l'excellent 'La fleur du destin' (même si la syntaxe en est un brin douteuse), peut-être la chanson la plus froide et hypnotique du disque, légèrement fantômatique de par ses sons et les vocaux lointains. 'Sensation' est très bon également, linéaire, implacable, le genre de musique sur laquelle on s'imagine volontiers danser dans une cave à la lueur maladive d'une ampoule mourante, et n'oublions pas 'Stonehenge', légèrement plus crasseux dans le jeu de guitare. Six titres, c'est peu mais c'est jouissif et personnellement, j'en déguste chaque seconde.

Note : 5/6

Page 49/167 FANGER & SCHONWALDER : Stromschlag

Chronique réalisée par Phaedream

Disponible en édition limitée, via le site de Manikin, ou lors des prochains concerts de Fanger & Schonwalder, Stromschlag est une collection musicale de 2 commis-voyageurs de la MÉ. Une collection, plutôt une impression, d’une centaine de photos prises en musiques lors de la tournée Californienne du brillant duo Allemand. Un voyage dans les terres de Steve Roach, déjà déviergées par Tangerine Dream en 1977. Stromschlag pour un choc électrique? Pas vraiment. Mais une superbe collection musicale issue de l’imagination fertile de Fanger & Schonwalder qui ne cesse d’étonner dans un art minimalisme où la redondance est honnie. C’est tout en douceur que débute Wild Joe’s. De doux arpèges scintillant flottent dans une nébulosité hétéroclite, où des effets sonores d’une forêt boréale se trappent dans un sombre mellotron, complice d’une taciturnité musicale effervescente. Wild Joe’s s’anime sous une apparence ‘’groovy’’ qui sonne comme une douce romance mexicaine avec de fines percussions, une guitare acoustique et des notes aux éclats échotiques harmonieux. L’influence de Fanger est saisissante sur ce titre sobrement enjoué et rythmé qui rappelle du Food For Fantasy, ou certaines œuvres Californiennes de Mergener/Weisser sur label IC. Un titre envoûtant, qui baigne dans une ambiance ‘’jazzy groovy‘’ et qui se termine dans les douces exaltations d’un mellotron flûté. Un mellotron encore plus sombre ouvre Mojave qui expose l’air des sauvages savanes du désert américain. On y sent une forme d’agonie, alors que des accords flottant appellent au mirage. Un superbe paysage sonore d’une brillante réflexion. La douce pâleur de Mojave s’étend jusqu’à Yellow Stones avec une splendide présence mellotronnée qui rappelle la découverte de TD de l’Ouest américain. Vers la 5ième minute, une belle séquence fractionne le mouvement qui s’anime sous des spectres synthétisés assez ingénieux. Les esprits du désert s’éveillent avec les lamentations des premiers arrivants. La visualité musicale de l’Ouest américain, par Fanger & Schonwalder, est saisissante et dépeint avec une étonnante créativité les longs voyages en autobus. Hormis ce côté pittoresque musical, le duo n’oublie pas ses racines et nous gratifie d’un superbe Berlin School avec percussions et déviants en 2ième partie de Yellow Stones. L’un des bons titres de MÉ en 2008. De la belle MÉ qui s’éveille et meurt dans les ambiances nocturnes d’une terre érodée. Même structure introductive avec une faune sonore et zoologique fertile, See You Later In Bozeman part de sillons infertiles pour finalement créer une Berlin School lent et hypnotique parmi une kyrielle d’effets sonores où voix fantomales se mêlent aux souffles synthétisés aborigènes. Un long titre circulaire qui exploite les synthés spectraux, les mellotrons aux mouvances fantomatiques sur un tempo sobre mais persistant. Les mellotrons y sont particulièrement efficaces. Très bon. Et je sais que je me répète, mais le duo semble avoir une imagination sans bornes. Prenons Gallatin Field. Fanger Schonwalder aurait pu baisser la garde et offrir un titre bien séquencé qui colle à l’oreille, tel l’hypnose au cerceau. Mais non. Le duo habille ce rythme qui ondule en cascade avec des séquences qui s’entremêlent parmi des mélodies synthétisées qui se cristallisent dans une effervescence sonore riche et diversifiée, haussant toujours l’attention auditive d’un cran. Un bon titre aux effluves du Moyen Orient avec une touche Sudiste, alors que Twintron flotte dans la quiétude désertique avec de belles sonorités de grosse orgue. Une touche dramatique qui clôt un voyage finement dépeint par une

Page 50/167 créativité complice de cet étonnant duo. À quand le prochain?

Note : 5/6

Page 51/167 FROESE (Edgar W.) : Epsilon In Malaysian Pale

Chronique réalisée par Phaedream

Voici l’un des albums phares de la MÉ. Pour plusieurs journalistes et spécialistes de l’époque de la musique des années 70, Epsilon In Malaysian Pale est considéré un chef d’œuvre de musique ambiante et atmosphérique. Une étape dominante dans l’exploration sonore du mellotron. Un peu à l’image de Phaedra et Rubycon, Epsilon In Malaysian Pale est un album sombre, par endroits fantomatique, avec de lourds mouvements flottants et une lente évolution rythmique. Inspiré par ses voyages en Malaisie, aux Philippines et en Australie, ce 2ième album solo d’Edgar Froese est dans le même veine qu’Aqua. Froese exploite les échantillonnages sonores qui sont d’un paradoxe édifiant. Voulant dénoncer la surexploitation de ces paradis équatoriaux, Froese fait un habile mélange des sonorités des faunes aborigènes avec des sons plus industriels, comme un train sur une voie ferrée. C’est sur ces rails que débute Epsilon In Malaysian Pale. Splendide, le mellotron y flotte avec ses ondes austères qui se moulent agréablement à une sonorité flûtée. Un peu comme sur Phaedra l’ambiance est sombre et atonale, alors que Froese manipule le mellotron avec une dextérité telle que nous voyageons entre les sonorités graves d’orgue obscures aux douces mélodies flûtées. Vers la mi-temps, le bruit des rails nous émergent de notre torpeur célestielle pour insuffler un bref et lourd mouvement séquencé qui ourle auprès d’un mellotron aux musicalités mélodieusement flûtées. Un bref passage très TD qui s’éteint dans les immenses strates mellotronnées qui parcourt Epsilon In Malaysian Pale. Maroubra Bay nous rapproche un peu plus du terroir TD. Une onde terrifiante jaillit d’un néant abyssal pour embraser un synthé apocalyptique et symphonique. Une intro lourde et noire qui dessine lentement un beau mouvement séquencé. Une séquence qui ondule avec agilité parmi des strates errantes qui survolent une structure devenue mélodieuse, froissée régulièrement par les brises et les vagues d’un paradis terrestre encore vierge. Une superbe fusion de l’eau et des vents qui enrichit un Maroubra Bay qui maintient sa route ondulante, dans un univers hétéroclite qui se moule aisément à un mellotron enveloppant. Epsilon In Malaysian Pale est un petit bijou. Un petit chef d’œuvre qui expliquait pourquoi Froese était considéré comme l’âme de Tangerine Dream. Un album qui aurait pu faire le répertoire du Dream. Un incontournable en MÉ.

Note : 6/6

Page 52/167 FROESE (Edgar W.) : Epsilon In Malaysian Pale 2005

Chronique réalisée par Phaedream

Dans ce remixe, pas de titres en bonus! Même la pochette est semblable. Mais il y a toute une différence sonore. Tout d’abord, l’intro et la finale de Epsilon In Malaysian Pale sont plus longues. Mais ceci n’ajoute rien de bien nouveau, car la sonorité est plus métallique et le cri des animaux est remplacé par du métal que l’on tord avec malice. La structure musicale? La même, sauf que le mellotron est numérique, donc une sonorité plus froide, comparativement à l’original. Mais une sonorité qui équivaut à celle de l’ère numérique qui a engloutie la subtilité des équipements analogues d’antan. Donc, ce remixe n’apporte rien de nouveau. Je ne dirai pas que c’est un pâle reflet, car on parle d’une œuvre majeure. Franchement, si je n’avais pas écouté l’original je dirais que c’est tout à fait génial. Donc pas de chasse aux sorcières à faire…Mais c’est le prix qu’Edgar (et ses fans) a (ont) à payer pour récupérer son catalogue. Malgré tout cela, si vous ne possédez pas Epsilon In Malaysian Pale, il faut se le procurer. Même sans la chaude émotivité de l’original, ça demeure un superbe album remixé par un paresseux. Si Edgar avait eu le respect de son œuvre, il l’aurait actualisé au niveau sonore en travaillant avec ses vieux équipements. Comme Jarre l’a fait avec Oxygene. Et là il aurait pu se payer une traite d’improvisation et étirer harmonieusement les 2 titres de cet album, car la situation s’y prêtait admirablement bien. Mais Edgar ….hé que c’est pénible. M’enfin, ne vous en privé pas pour autant, car c’est tout simplement délicieux, pas aussi bien que l’original, mais ça s’écoute super bien. Donc on tente de le trouver la version de Virgin (l’album si possible). Si non, ce remixe n’est pas si vilain....il n’a juste pas la profondeur sonore de l’original. Mais qu’est-ce qu’Edgar en a à foutre???

Note : 5/6

Page 53/167 PSYCHONAUTS : Alchemy

Chronique réalisée par dariev stands

Re-Load Ambient… Un label belge minuscule, qui n’a existé que de 95 à 97, bâti sur les braises ardentes du mouvement new beat, qui avait fait plonger le Benelux la tête la première dans la techno et l’acid house, qui contaminait tout à l’époque. Le but de Re-Load Ambient était d’héberger les artistes qui ne rentraient pas dans les cases, qui voulaient faire non seulement de l’ambient (musique encore marginale à l’époque), mais de l’ambient sombre et expérimental, encore ! Le terme Illbient n’ayant pas encore été inventé et breveté par DJ Spooky (on en reparlera tantôt, de lui), l’instigateur de ce grand saut dans l’inconnu qu’est Alchemy parlait alors de « paysages psychotropes ». Cedric Stevens alias Acid Kirk, également connu sous le nom de The Syncopated Elevators Legacy, était l’unique homme derrière le projet Psychonauts. Un drôle de zèbre, qui fera peu parler de lui par la suite, et à qui revenait l’honneur de fournir la toute première sortie du label ! Le choc, à l’époque, à du être conséquent. Ni Richard D. James ni Aaron Funk n’étaient encore passés par là pour nous habituer à la perte de repère totale. Forbidden Planet est une entrée en matière mémorable, se concluant sur une voix s’échappant du haut-parleur d’un vaisseau spatial, avant de nous lancer dans une capsule de secours à toute vitesse, slalomant dans une ceinture d’astéroïdes, sur Molybdenum… La suite c’est de l’apnée, ni plus ni moins. Le psychonaute, c’est nous, et Acid Kirk nous avale tout rond pour mieux nous nicher la tête dans le chaudron de ses névroses et nécroses, et en bon explorateurs des tumeurs intérieures que nous sommes, on accepte. Après un interlude cauchemardesque (Where’s Palmer, brrrr…), on se retrouve à patauger dans un marais acide et pestilentiel (Xerophytic), harcelé par des nuées de moustiques cuivrés, avant de toucher du doigt le noyau de toute cette violence sourde, le catalyseur, la reine mère, la matrice… bref, Trauma Theme. D’aucuns sursauteront quand le beat explose au début du morceau, où exploiteront tout le potentiel caché de ce disque en l’écoutant au casque lors d’un après midi pluvieux, errant sur quelque terrain vague ou zone en friche… Les premières écoutes sont éprouvantes. Problème : les suivantes le sont aussi, mais pas pour les mêmes raisons ! Si l’on est impressionné au premier abord, l’ennui prend malheureusement progressivement le pas face au manque de renouvellement des structures, qui tombent un peu à plat sur Fœtus, le dernier morceau, par exemple. 7 minutes d’ambient sépulcral où il ne se passe pas grand-chose, et qui auraient vraiment gagné à être placées en ouverture, histoire de préparer un peu l’auditeur au voyage… Un album aux contours très flous, qui peut se révéler très puissant une fois mis sur les bonnes images.

Note : 3/6

Page 54/167 IRM : Virgin mind

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Virgin Mind passe littéralement au travers du corps. Il rentre par les oreilles et ressort par les yeux et la bouche, emportant avec lui tous les maux, les péchés et les maladies qui souillent la misérable carcasse qui sert de corps à chacun d'entre nous. Il nettoie totalement, avec violence, précision et acharnement. Le processus commence avec Janvs, le Dieu du passage, le Dieu à deux têtes qui nous invite à pénétrer notre propre organisme : INSIDE/OUTSIDE. Les découpages sont confiants, chaque incision est millimétrée, les deux transitions par la Chambre d'Amour sont là pour en témoigner. Mais que faire, une fois à l'intérieur ? C'est là que nos deux chirurgiens entrent en jeu. Prise de conscience de l'imperfection complexe des organes internes, et lutte contre leur propre volonté de vivre : « And none of them wants to take responsibility for what you plunged them into. And all of them wants to be swallowed back inside the primordial crimson hollow : YOU. » Ma mère, cette matrice, comme je suis la matrice de mes organes, qui lutte avec violence contre l'expulsion programmée. Un temps pour réfléchir, se recueillir, penser à son rôle et un temps pour retourner se déchiqueter de l'intérieur : 'Birth's Mark of Cruelty' ou le grand nettoyage mystifié jusqu'à l'intense ascension de sa propre échelle de Jacob : son système nerveux transfiguré. « LET IT OUT. EVERYTHING AT ONCE. EVERYBODY GATHER ON THE NERVE SCALES. » Dans cet espace éthéré où la foi a transformé notre corps en symbole macrocosmique, on s'élève au son des cloches, des pulsations, des spirales de bruits abstraits. Morts ? Loin de là : la seconde partie du rite commence. Après la purification, la compréhension. Les deux corps joints de l'androgyne originel sont là, gisant à nos pieds, pourrissant dans une mare de sang séché : ils se sont battus pour nous, Mercure et Soufre, ils se sont entretués et s'éveilleront à nouveau sous nos piétinements. La lumière est ici très forte, et l'émotion étouffante : dans ce blanc asphyxiant, seuls les gouttelettes de sang de nos corps 'purifiés' tracent encore quelques lignes dans le vide, ce qui ne nous empêche pas de nous faire sévèrement brûler par cette terrible blancheur ; elle rappelle cette naissance, cette re-naissance, cet éternel recommencement qui nous empêche de redevenir divinités - « Every day I give birth to myself ». Mais cette fois, je ne me laisserai pas faire. J'avance dans cette tempête, protégeant mes pauvres yeux avec mes avant-bras calcinés – La puissance divine de mon âme se résiste à toute compréhension, tout entendement - elle veut encore une offrande, un second sacrifice : je me laisse alors porter par les sons, j'éteins ma conscience et saisis ce que je peux encore saisir de l'infinie beauté de mon âme à nouveau vierge : Rouge, donc, immense, fondamentale, transcendantale, innommable. J'aurai tant aimé y rester pour l'éternité, rester et m'évanouir dans ce flot d'éther flamboyant. Mais un choc me réveille brutalement. Une note disproportionnée. Un piano. Deux notes. Une voix. Un cri. Celui de Saint Sébastien. Du rouge, je retombe dans le noir. Une image archétypale du corps du martyr, abandonné seul, nu, à la disposition des objectifs pervertis. Ce corps pourrait être le mien. Je ne veux plus voir de corps. Je ne veux plus entendre parler de corps. NO MORE BIRTH – NO MORE ANATOMY – NO MORE EXTASY. Le corps blanc est la source. Le corps rouge est divin. Le corps noir est terminal. Je veux changer de couleur. Je veux redevenir Dieu. Virgin Mind EST l'opération.

Note : 6/6

Page 55/167 U2 : Under a blood red sky

Chronique réalisée par Twilight

Le pouvoir iconographique de certaines images est tel qu'il marque à jamais. D'un point de vue personnel, cette pochette de U2 en fait clairement partie; d'ailleurs, en 1987, quand j'ai commencé à me crêper les cheveux et me vêtir de noir, alors que U2 faisaient partie de nos groupes favoris, c'était un badge convoité et certains portaient cette photo en t-shirt. Peut-être vous souvenez-vous également de cette vidéo de 'Sunday bloody Sunday' extraite du fameux concert de Red Rocks où Bono, le mulet hérissé au vent brandit un drapeau blanc ? Nous sommes en 1983 'Under a blood red sky' clôt une série de concerts importants après la sortie de 'War' et l'atmosphère de cette soirée a été soigneusement travaillée, à commencer par le choix du site, sorte d'amphithéâtre naturel dans les Rocky Mountains, près de Denver; à chaque extrémité un feu se détache dans la nuit, l'ambiance est mystique, flamboyante, étrangement intime malgré tout. Certains ont parlé d'un Stonehenge rock'n'roll. Rien n'était gagné vu les conditions climatiques maussades mais contre l'avis de leur manager qui souhaitait annuler, les musiciens se sont accrochés et ont mis beaucoup de leur poche pour la réalisation du film mais également pour s'assurer que les fans frileux puissent les voir tout de même lors d'un concert en salle le lendemain. Vous imaginez que la qualité sonore d'un tel événement capturé sur sillon et sur image se devait d'être à la hauteur et elle l'est. Curieusement pourtant, seuls deux titres du disque ('Gloria' et 'Party girl') proviennent des enregistrements de Red Rocks, les autres (excepté '11 o'clock tick tock' à Boston) ayant été capturés en Allemagne. La vidéo sortie simultanément, elle, propose en revanche, la soirée à Red Rocks. Profitant de sa série de remasterisations, U2 nous propose cette version 'deluxe' incluant les huit morceaux live du mini ainsi qu'une version rallongée de cinq chansons de la VHS, le tout dans un magnifique petit livre illustré e superbes photos. Si la partie audio est excellente, beaucoup se sont étonnés de sa courte durée; huit titre, c'est peu en effet même s'ils sont de grande qualité avec les incontournables 'Sunday bloody Sunday', 'New year's day', 'Gloria'...Seule ombre au tableau, l'inédit 'Party girl', un peu trop fun, limite dub dans sa rythmique, qui tranche avec l'atmosphère dramatique du reste. Pour le reste, que du bonheur, même si certains titres manquent forcément à l'appel. Le concert à Red Rocks tient quant à lui totalement ses promesses, un heure vingt de show halluciné et de communion avec le public durant laquelle Bono démontre ses qualités de showman charismatique. La pluie est vite oubliée et Red Rocks se révèle très vite un noeud d'énergie où seule compte la musique. La performance se trouve amputée d'un titre, 'I fall down', inutilisable en raison d'un problème de caméra. Pour le reste, tout est là, une sélection pointue de trois albums (même si manque mon 'Another time, another place' chéri) et un véritable événement tant sonore que visuel...Incontournable.

Note : 6/6

Page 56/167 EMMENS & HEIJ : Silent Witnesses Of Industrial Landscapes

Chronique réalisée par Phaedream

L’association Emmens/Heij a toujours produites d’excellentes aventures musicales. Les deux compères Néerlandais ont réussi à créer une homogénéité créatrice qui transcende les égos de ces brillants synthésistes. Silent Witnesses Of Industrial Landscapes (tout un titre) est le 4ième témoin de cette fructueuse association. Un album aux sonorités ambiantes intrigantes sur des structures très animées. Du New Berlin School à teneur ‘’heavy ‘’ électronique. Overture nous propulse dans les sphères moulantes du dernier Emmens; The Nearest Faraway Place Vol. 1. Intro sombre, mais moins métallique, où l’on entend l’ordre des séquences scintillée dans une nébulosité cosmique truffée de vapeurs sonores, comme si l’espace lâcherait du lest. Les séquences de Heij croissent et décroissent sous un clavier austère qui étend ses arpèges avec morosité. De lentes strates inondent ce cosmos obscur, éveillé par les sens d’un autre subtil mouvement séquentiel, et le mouvement décolle. Percussions sobres et clavier nostalgique sont étroitement ceinturés d’une ligne séquentielle légèrement frivole qui filtre les brefs solos d’Emmens, ainsi que de ses belles complaintes telles de sirènes galactiques qui charment et initient aux rêves. Les mélodies d’Emmens, sous les séquences audacieuses de Heij, nous amène à Elements In Decay. D’entrée de jeu, les séquences de Heij s’entrecroisent nerveusement sous de douces et enveloppantes strates qui tentent de diviser ce carrousel tournoyant. Le rythme se développe et se subdivise sur de belles séquences et de beaux solos. Deux artistes aux sommets de leurs arts qui se ‘’challenge’’ avec passion et créativité. Et c’est l’auditeur qui en profite avec des séquences folles, nerveuses et névrotiques accouplées à un synthé aux mélodies enivrantes ou aux explosions cosmiques. Liquid Ore Finding Its Way débute dans un bouillon cosmique aux effets sonores de iules électromagnétiques qui gravitent autour de nos auras. Une étrangeté inconfortable, où un monde animal abstrait attend sournoisement pour chevaucher les douces sinuosités séquencées. Des séquences nerveuses, au débit rapide, ouvrent une ligne qui explose sous de bonnes percussions et un synthé discret. Flirtant avec le prog rock, avec des synthés fantomatiques, Liquid Ore Finding Its Way poursuit sa chevauchée cosmique avec de belles séquences névrotiques et pulsatives qui découpent un rythme circulaire et ennivrant, sous un synthé plaintif et discret. Un titre lourd, construit sur les séquences agiles et furieuses de Ruud Heij, tout comme l’épique Setting The Wheels In Motion, mon meilleur titre sur Silent Witnesses Of Industrial Landscapes avec son synthé aux refrains accrocheurs. When Night Falls plonge Silent Witnesses Of Industrial Landscapes dans un lourd moment atmosphérique. Un étrange passage plutôt cauchemardesque avec des bizarres meuglements de bêtes qui se moulent à divers effets sonores et un clavier solitaire qui étend sa mélodie avec un cafard de l’âme. Le synthé est beau et transpire la sensibilité d’Emmens avec ses touches hésitantes et ses complaintes sidérales qui fusionnent dans un paysage taciturne. Quoiqu’un peu plus mélodieux Point of no Return est aussi débridé que Elements In Decay, Un titre qui chevauche l’inter espace avec des séquences soutenues et de beaux solos de synthé. Finale clôture avec la magie musicale que l’on retrouve sur cette 4ième collaboration Emmens/Heij. Intro atmosphérique, séquences ascendantes et un clavier mélodieux sur une structure qui passe d’atmosphérique à du heavy électronique, sous un synthé charmeur et spectral. Avec ses séquences, ses rythmes bouillants et son synthé aux mélodies frisant des structures de prog rock,

Page 57/167 Silent Witnesses Of Industrial Landscapes est toujours au cœur des aventures musicales de Gert Emmens. Un univers toujours étonnant et en constante effervescence qui redéfinit toujours et pousse encore plus loin, les frontières de la MÉ.

Note : 5/6

Page 58/167 U2 : The joshua tree

Chronique réalisée par Sheer-khan

Ce disque est sorti il y a 22 ans. Ecoutez le, il n'a pas bougé. Et il ne bougera pas. Un disque lumineux, terriblement racé, à l'image des 4 premiers titres qui se succèdent comme une véritable démonstration, et qui incarnent avec une remarquable évidence ce glissement fondamental par lequel U2 va réussir à contenter son auditoire grandissant, tout en abolissant les quelques barrières qui empêchait le reste du monde de s'abandonner à cette musique si séduisante. En effet, malgré "Bullet the blue sky" ou "Exit", U2 n'est plus un groupe de tourments, de ciel noir, d'atmosphères entre chiens et loups. "The Joshua Tree" est au contraire un album gorgé de lumière et de soleil, et si l'extraodinaire classe stylistique des 4 tubes d'intro continuent d'affirmer cette personnalité flamboyante et sonique que la bande à The Edge a épanoui sur "Unforgettable fire", ils révèlent sans doute possible la disparition d'une mélancolie fondamentale, d'une obscurité essentielle qui se logeait jusqu'ici en plein coeur de la musique des irlandais. Comme pour enfoncer le clou de cette toute nouvelle lumière, U2 va délaisser ses aspirations brumeuses et atmosphériques au profit d'un rock infusé de country/folk auquel vient répondre la production plus authentique de Eno et Lanois; U2 développant même à partir de "Running to stand still" une musique à dominance quasi acoustique : harmonica, guitare folk et batterie brute, pour une approche qui se révèle tout à coup étrangement américaine. Fasciné par l'amérique depuis toujours, U2 décide en effet avec "The Joshua Tree" de lui faire ouvertement les yeux doux (avant de la sauter franchement avec l'album suivant). La méthode de séduction se révèlera parfaite, "The Joshua Tree" étant l'album de U2 qui reste le plus vendu à ce jour, celui par lequel le quatuor, pour cela, a tout simplement aboli sa nationalité. Les textes tournent tous autour du nouveau monde, et c'est jusqu'au coeur même de sa musique que U2 troque son romantisme européen pour une nouvelle authenticité populaire qui se nourrit aussi bien du blues, que du gospel ou de la country. Toujours aussi lyrique et passionnée comme en témoigne immédiatement l'imparable "Where the street have no name", toujours conduite par une guitare celeste à nulle autre pareille, assise sur une basse profonde aussi souple et posée que pulsatoire, rythmée de charley sifflant et de toms qui roulent, la musique du groupe glisse ainsi en toute fluidité et sans heurt stylistique du gothique et new wave "Unforgettable fire" à l'américain et acoustique "Joshua Tree"; il passe comme en toute logique d'un monde, à son contraire. Un véritable tour de force, dont on peut naturellement discuter le but, mais certainement pas la réussite. Par la force de son style qui perdure, par son très grand talent d'écriture, et encore une fois grâce à la science exceptionnelle de son duo de producteur dont le travail est ici aussi subtil et complexe qu'apparemment invisible, le groupe livre avec "The Joshua Tree" un album magnifique, qui s'ouvre dans une apothéose de séduction pure, se développe ensuite dans la joie et la fraîcheur émerveillée, avant de se refermer dans le silence avec ses deux dernières pièces, l'une tendue, contrastée et grondante, l'autre lumineuse, éthérée et diaphane, religieuse à son tour, comme l'avait été "MLK" en cloture du grand feu. On peut regretter cette légèreté émotionnelle qui domine le centre de l'album, notamment avec les plus inutiles ""Running to stand still" et surtout "Trip through your wire"; "The unforgettable fire" restant à mes yeux le seul album du groupe sans morceaux dispensables; "The Joshua Tree" n'en demeure pas moins un album unique au lyrisme puissant et a l'aura stylistique exceptionnelle : encore une fois, 22 ans plus tard, il n'a pas bougé... et il ne bougera pas. Ce disque n'est plus sombre, comme l'étaient ses grands frères, et il ne cherche pas l'inventivité finalement fondatrice du Zoo Tv circus. C'est un fait: "The Joshua Tree" de U2 n'est pas un album

Page 59/167 gutsien. Mais comme tout le monde ici le sait : c'est une considération totalement indépendante de sa qualité fondamentale.

Note : 5/6

Page 60/167 BRISE-GLACE : When in Vanitas ...

Chronique réalisée par Hellman

Beaucoup d'atrocités se commettent dans le silence, d'un silence parfois lourd de sens. Elles acquièrent ainsi plus de poids, sublimant leur nature profonde dans ce qu'elles peuvent avoir de plus déplaisantes. Album instrumental parfaitement malsain, du genre qui s'attarde sur vos blessures pour mieux s'y enfoncer et vous broyer de l'intérieur, "When in Vanitas ..." déploie son aura néfaste pendant près d'une heure dans un climat décharné où il ne fait pas bon vivre. Possible mise en musique d'oeuvres picturales aussi violentes qu'un Bacon, un Bosch ou un Goya, c'est un parfum de mort, un parfum de fin des temps, une odeur de pourrissement mêlée à de la tôle rouillée qui se dégage de cette atmosphère délétère méticuleusement érigée. La ligne d'horizon est toujours lointaine. Fuyante. Mais elle pratique sa découpe patiemment, méthodiquement, arrachant des lambeaux d'un ciel gris titane dans une gerbe d'ocre profond. Distorsions sourdes (les six longues minutes de nuisances souterraines de "Restrained from Do and Will not") et rythmiques tribales se livrent à un chassé croisé pendant toute la durée de ce long périple, créant un lien étroit mais possible entre les expérimentations chevronnées de This Heat et les ambiances glauques de Scorn. Aussi déplaisant soit l'endroit, rien ne résiste à ce Brise-Glace sans futur qui compte à son bord quelques figures de proues des musiques alternatives ou d'avant-garde : Dave Grubbs, Henry Kaiser, Gene Coleman, Jim O'Rourke. Et pour salir tout ça, Steve Albini. Fine équipe. Des titres au format plus conventionnel comme "Host of Latecomers" ou "Stump of a Drowner" rivalisent de diabolique efficacité avec leurs plages plus expansives où Brise-Glace se laisse aller à ses penchants les plus extrêmistes, sur de long passages bruitistes à même de générer cette tension pesante et permanente qui font de "When In Vanitas ..." un disque rare sur lequel il est bon de venir se fracasser.

Note : 5/6

Page 61/167 PANGÉE : Hymnemonde

Chronique réalisée par Hellman

Le Canada a été de tout temps une terre de légende. Cela est vrai aussi pour la musique progressive. Acteur discret mais toujours bien présent, il nous a apporté des formations telles que les excellents Maneige, Harmonium et Sloche, en provenance du Québec, ou, et dans un tout autre genre, Rush, dont on oublie trop souvent les origines (et quelque part, c'est bon signe). Si la production de la scène actuelle n'est pas des plus brillantes, c'est aussi un peu le reflet de l'environnement immédiat dans lequel nous baignons tous. Opposé aux insipides Nathan Mahl, Visible Wind fût un temps considéré comme une alternative intéressante et originale. Mais le devenir de cette scène s'écrit désormais en points de suspensions. Pendant un bref instant cependant, Pangée aura su nous redonner espoir. Un espoir que l'on sait désormais déçu puisque les québécois n'ont jamais donné suite à cet "Hymnemonde" paru en 1995. Pangée n'avait sûrement pas la prétention de changer la face du monde en enregistrant cet album, bien que le concept même du disque s'articule justement autour de sa possible origine mythologique. "Hymnemonde" est constitué de trois longues suites qui nous resservent comme à l'accoutumée ce même amalgame d'influences que sont Genesis, pour son lyrisme, Yes, pour son exubérance et King Crimson, pour sa complexité. Pour bien des raisons, il est tentant de comparer cet essai à ce que réalisèrent les suédois de Anglagärd à la même époque. Au niveau des climats. Au niveau du travail rythmique aussi (et en particulier tout ce qui touche aux percussions). À la différence près tout de même que les transitions sont ici bien plus hasardeuses. Il y a de très bons passages au milieu d'autres peu convaincants, mais comme toujours, ce genre de disque ne pourra révéler ses qualités intrinsèques qu'après un nombre conséquent d'écoutes. À moins qu'il soit parvenu à vous en dissuader avant même d'arriver jusque là...

Note : 4/6

Page 62/167 SPACE NEEDLE : The Moray Eels Ate The Space Needle

Chronique réalisée par Hellman

Pendant trois minutes, les guitares de Jeff Gatland et Anders Parker s'amusent à broder une trame complexe et immuable qui finit par hypnotiser l'auditeur et suspendre le temps. Quand, soudain, tout s'arrête, puis redémarre propulsé par la batterie de Jud Ehrbar. Deux minutes plus loin, le groupe abandonne sa charge héroïque pour un long passage de dissonances aléatoires sur une assise jazz plus feinte que véritablement ressentie. Chaotique, hésitant, modulant... Puis bref retour à l'explosion du thème avec vigueur, deux minutes avant de disparaître. "Where The Fuck's My Wallet ?" nous aura ainsi balladé pendant près de quinze minutes sans jamais trop savoir où, quand et comment. Ira-t-on jusqu'à se demander pourquoi ? Une circonspection qui retranscrit assez fidèlement l'impression tenace laissée après l'écoute de "The Moray Eels Ate The Space Needle", album qui pourrait presque ériger en valeur étalon la constante inconstance dont fait preuve ici les Space Needle. Car si, individuellement, les titres de ce disque ne manquent pas de charme, la juxtaposition d'éléments si différenciés, avec des niveaux de productions parfois aux antipodes l'un de l'autre, donnent surtout l'impression d'une collection de titres regroupés pêle-mêle sans soucis de cohérence. "Flowers for Algernon" revient aux boucles de guitare et maintient le cap sept minutes durant alors que "Never Lonely Alone", puis "Love Left Us strangers", à sa suite, sont des chansons pop minimales, comme si Elliott Smith avait du composer un pastiche Motown pour le "Blue Velvet" de Lynch à la place de Badalamenti. Le grand écart. Et de fait, l'album alterne sans cesse entre chansons pop à l'esprit garage, au mieux proche des Mercury Rev, et pièces ambitieuses aux atmosphères d'abord furtives, puis brutales, transcendées par la présence du violon électrique de Max Buckholtz ("Hypatia Lee" et "Bladewash"). Un album... déroutant.

Note : 3/6

Page 63/167 POLYTOXICOMANE PHILHARMONIE : Plays Psycho Erectus

Chronique réalisée par Hellman

Parfois, moins on en sait sur un groupe ou un projet, mieux ça vaut. Non pas par crainte d'être déçu, même si cela peut arriver, mais parce que ça stimule l'imagination. Et avec un groupe tel que Polytoxicomane Philharmonie, quel nom !, il aurait pu difficilement en être autrement. Le collectif aux pseudonymes loufoques est allemand, en provenance de Francfort probablement, et, sans surprises, verse dans le psychédélisme déluré. On ne naît pas et on ne grandit pas sur les terres de Amon Düül II sans conséquences... "Psycho Erectus", premier album, est redoutable d'efficacité et de justesse dans tout ce qu'il entreprend. Parce que le groupe ne se contente pas de faire voyager l'auditeur à travers de brumeuses et faciles fumisteries. Il y a un vrai travail d'exécution derrière, parfois même supérieur à ce que leur ont inspiré leurs aînés. Ça plane, oui, mais ça groove aussi, et pas un peu. Basse et batterie n'en font jamais des tonnes mais maintiennent intact le pilier rythmique sur lequel tout repose. Dans un premier temps, "Flight 858" et "Poisonous Moth", entre autres, nous en font la démonstration derrière un chant scandé ou incanté, féminin et masculin. On notera aussi une certaine noirceur sur un titre comme "Sulphur", pourtant amené sur la pointe des pieds, se déchirant ensuite sur de lourds accords de basse qu'une guitare volubile vient narguer. "Lokus Pokus" et "Chanson Verte" alternent les approches, injectant d'inattendues effluves jazz dans leur discours. Je ne vais pas vous faire le détail des autres titres, si ce n'est vous dire que le groupe s'y montre à chaque fois inspiré. S'il fallait faire la fine bouche, peut-être leur reprochera-t-on la relative linéarité de l'ensemble qui, en dépit des nombreuses variations abordées tout au long du disque, ne décolle jamais faute d'une production plate qui tend à tout mettre au même niveau. Malgré tout, Polytoxicomane Philharmonie reste un des rares groupes actuels à s'être lancé dans cette vague de renouveau du rock psychédélique avec tant d'à propos.

Note : 5/6

Page 64/167 NINE HORSES : Snow Borne Sorrow

Chronique réalisée par Hellman

La dernière fois que David Sylvian était apparu, c'était en homme libre. Libre de toutes contraintes. Libre de toute envie. Il nous avait alors présenté "Blemish", album rédempteur et difficile dont on n'aura sans doute pas encore percé tous les mystères d'ici dix ans et, accessoirement aussi, première publication de son tout nouveau label Samadhisound. Quelques sorties et quelques années plus tard, le constat est tristement identique à celui qui s'observe partout ailleurs : un intérêt décroissant pour la chose musicale, des ventes sporadiques que même les copains David Toop ou Harold Budd ont toutes les peines du monde à assurer. Et donc, à l'instar de Peter Gabriel qui n'hésite jamais à faire des apparitions sur ses productions Realworld, voire même à publier ses disques sous sa propre licence histoire de doper les ventes, Sylvian s'associe à son frère Steve Jansen pour créer Nine Horses. Karn et Barbieri n'étant pas de la partie, on ne peut pas parler de Rain Tree Crow II. Et encore moins de Japan. Dissimulé derrière une esthétique soignée mais effacée, "Snow Borne Sorrow" aurait mérité une réelle couverture médiatique tant le produit de ces sessions étalées sur quatre longues années possède tout le potentiel nécessaire à une rencontre longtemps souhaitée auprès d'un public plus large. Pas tout à fait une entorse à "Blemish" puisque l'album véhicule lui aussi une atmosphère relativement oppressante, fondamentalement introvertie. Si l'intention est la même, le résultat, lui, est différent ; plus ouvert, plus en résonance avec la longue liste d'invités, pour le moins impressionnante et qui impose le respect, chacun apportant par petites touches leur propre pierre à l'édifice, l'exirpant d'une torpeur et d'une austérité souvent coutumière de ce type de production. Finalement, c'est en vain que Nine Horses aura fait tant de mystère sur son origine, puisque c'est un David Sylvian grand cru, une soul blanche post moderne pleine de zones d'ombres, où souffle et voix donnent le ton, rencontrant les objectifs de "Blemish" avec l'extrême préciosité de "Dead Bees On a Cake".

Note : 4/6

Page 65/167 U2 : Rattle and hum

Chronique réalisée par Sheer-khan

Nul doute que les 4 irlandais ont vécu l'année 1987 comme des gamins émerveillés de leur propre entrée au panthéon; nul doute non plus que c'est bien de l'amérique contestataire et bouillonnante, en ces années d'ultime et extrême Reaganisme, dont U2 se revendique; nul doute qu'il faut un véritable courage et une foi intacte pour silloner un pays qui vous accueille en brandissant les drapeaux de ses contradictions... si ce n'est que se faire alors cautionner par BB King ou Dylan himself, que de hisser haut l'étendard de Hendrix pour se ranger derrière, relève surtout d'une facilité un peu déconcertante, pour ne pas dire de la démagogie. Même s'il serait injuste de ne pas reconnaître aux irlandais de October et War une légitimité totale à se ranger aux côtés des protest singer américains, on peut tout de même s'interroger sur cette nouvelle musique, particulièrement impersonnelle et complaisante, à laquelle le groupe va mêler des captations live de la grande messe ricaine qui suivit l'évènement commercial "Joshua Tree". Avec "Rattle and Hum", accompagné d'un long métrage en salle, rien que ça, U2 tente de rendre à l'amérique

Page 66/167 ce que celle-ci lui a donné; ça n'est donc pas seulement un témoignage live de la tournée, c'est aussi un recueil de 9 nouvelles chansons, écrites sur le vif par un groupe qui est en train de se prendre la force imparable d'une toute nouvelle culture en plein dans la gueule. U2 est surtout en train de se laisser submerger par un ingrédient fondamental de sa personnalité, un ingrédient qui lui échappe encore complètement, mais dont il saura faire avec un cynisme et une clairvoyance remarquable la première force de frappe de sa métamorphose à venir : la frime. U2 se la joue, Bono se la pète grave; chapeaux, vestes en cuir et guitares en bandoulière, le groupe qui vient de conquérir le monde avec une préciosité du niveau de "With or without you" pense être à même de briller dans l'urgence, dans le brut et l'authentique : dans le blues. "Quel autre groupe avec une telle stature est capable d'apprendre les accords de "All long the watchtower" 5 minutes avant de monter la jouer sur scène? Il n'y a que nous", déclara mégalobono. Et quel autre groupe s'imagine que la dite et bien pâle version, après celle de Hendrix, est digne de figurer sur un album? Il n'y a bien qu'eux. Musique impersonnelle et complaisante : les tubes "Desire" ou "Angel of Harlem" sont efficaces et sympathiques mais ce n'est tout de même pas l'extase, et la frime, encore et toujours, qui pousse le groupe à nous servir du 6.30 minutes fadasse dans un style blues/rock où il n'a pas grand chose à dire ("Hawkmoon" ou "Love rescue me"), à faire du rock de base sans plus de majesté ("When love...", "God's part II"). Il n'y a guère que l'excellent "All I

Page 67/167 want is you", et surtout le magnifique "Heartland" (tiens donc?! On y retrouve le tandem Lano/Enois) a être ici dignes du groupe qui vient de livrer "The Joshua

Tree". Côté live, rien à signaler pour ma part. Ce saupoudrage de titres éparses et hétéroclites, s'il a le mérite de fixer le bon "Silver and gold" sur galette, est bien trop dispersé et ornemental pour retransmettre quoi que ce soit de ce qui fût, sans aucun doute, une série de concerts d'anthologie. "Rattle and Hum" est un faux pas, qui fût sans doute nécessaire à provoquer cette extraordinaire réaction que fût

"Achtung Baby", et qui peux, je l'avoue, être largement savouré pour son côté patchwork, viscéral et dénudé, pour la part incontestable de sincérité que la groupe y a mis. Je n'y vois pour ma part qu'un album ou le groupe, faute de recul, a noyé toute personnalité dans une auto-contemplation complaisante de sa toute nouvelle stature. Ils en tireront la leçon avec une acuité saisissante, et reviendront trois

ans plus tard, avec l'album le plus important de leur carrière.

Note : 2/6

Page 68/167 THE BROTHERHOOD OF PAGANS : Only once

Chronique réalisée par Twilight

En musique, rien n'est jamais joué. Je déplorais dans ma chronique de 'Tales of vampire' qu'il s'agisse de l'unique album des Brotherhood of Pagans; or quatorze ans plus tard, le groupe me prouve que j'ai tort en nous proposant tout soudain un second album. La première remarque qui me vient à l'esprit, c'est que les Français sont toujours aussi pointilleux sur la qualité de la production, les arrangements, les atmosphères sont très travaillés et toujours aussi efficaces. Musicalement, c'est avec une certaine émotion que je m'y suis plongé pour me retrouver au coeur d'un disque varié, sombre et intense. Là où 'Tales of vampires' plongeait au sein d'une nuit mystique, un peu effrayante mais refuge à la fois, 'Only once' creuse plus profondément dans l'obscurité, là où le rite pourrait s'avérer dangereux. Il en résulte des morceaux très orientés deathrock (les excellents 'As the serpents do', 'Resurrection MKII') et d'autres encore plus sombres et violents, ainsi 'I am his voice !' dont les samples et certaines touches martiales évoqueraient presque des échos de Der Blutharsch. Le groupe n'hésite d'ailleurs pas à s'offrir quelques audaces telles que les percussions passées à l'envers de 'I'll dig your grave' ou quelques touches limite KMFDM sur 'Get off'. D'un point de vue personnel, je trouve que le chant de Sailor a gagné encore en efficacité, c'est très flagrant sur le beau et mystique 'The gardens of Alkinoos' qui met également en lumière un autre atout des Brotherhood of pagans: un excellent usage du clavier (atout déjà développé sur 'Tales of vampires') qui soutient habilement d'excellents riffs et renforce les climats des chansons. Deathrock oui mais un deathrock personnel, mystique, plus que punk dans la tradition car 'Only once', contrairement à ce que sa pochette laisserait supposer, est un disque quasi ésotérique, aux ambiances malsaines. Quelques touches de percussions rituelles, des sons bien sélectionnés, un bon travail vocal, et une production impeccable. En quatorze ans, le groupe n'a pas trouvé le chemin vers la lumière, il a au contraire plongé plus profondément encore au coeur de l'obscurité.

Note : 5/6

Page 69/167 MAURIZIO : M-Series

Chronique réalisée par dariev stands

Pourquoi commencer par ce M-Series, qui comme son nom l’indique, regroupe le meilleur des 8 maxis sortis entre 92 et 97 par le label M ? Pourquoi ne pas attaquer par le versant le plus accessible avec les labels Burial Mix et Rhythm & Sound (Alias R&S pour les intimes) ? Où encore par le versant expérimental avec Basic Channel, dont l’ascétisme sonore est encore plus prononcé ? Il s’agit de la même bande de mecs, après tout. Peut-être parce que Plastikman est déjà fort apprécié sur ce site, et que Maurizio peut parfois s’en rapprocher. Peut-être aussi parce que ce disque est un pont idéal entre la techno ou la house et le dub, cette musique aux inépuisables trésors dont on va de plus en plus vous parler sur Guts… Ce M-Series est un indispensable pour toute personne prétendant s’intéresser au minimalisme dans la musique électronique. Chaque titre est bâti sur le même canevas : une basse chaude mais déshumanisée pulsant main dans la main avec un beat sec et amer, le tout servant de support pour des effets dub évoquant souvent le bruit de gouttes qui tombent sur du contreplaqué… Les premières écoutes sont souvent un choc esthétique notable pour l’auditeur, avant de réaliser que l’oxygène va se mettre à manquer. Hypnotisés, nous sommes, par cette "heroin house" telle qu’aiment l’appeler les deux créateurs, hors du temps et des modes, délestée de tout ce que la house music pouvait contenir de facile ou de clinquant. Pas mal pour un genre enfanté du disco. C’est que Moritz Von Oswald, moitié du duo Maurizio (et non pas unique membre comme on serai tenté de penser), a fait ses gammes dans un groupe de post-punk (Palais Schaumburg pour ne pas le nommer)… L’épure, ça le connaît, à fortiori. Parfois, on retrouve le balancement du reggae, dont le contretemps a été effacé, supplanté par un battement de cœur presque exempt de beats, seulement menée par cette basse organique, ce pouls invariable et réguler (M7). Parfois, les sons plus typiquement house se font entendre (M4 red logo side). Un petit mot tout de même sur l’élitisme quasi militant, hérité de Detroit, du duo : Très peu d’infos sont données sur le label ou la formation, les morceaux sont représentés par les macarons des maxis vus sur la pochette (une démarche qui rappelle Aphex Twin) et non par des titres, et le boîtier métal de l’édition originale est conçu de telle sorte qu’on a grande chance de casser ou rayer son cd en l’ouvrant pour la 1ère fois ! Une fois la coquille Saint-Jacques ouverte, une inscription : "Buy Vynil". Le mec avec son cd cassé dans les mains est censé se dire "ah ouais, merci grand maître". Certaines pistes ont tout de même été éditées pour pouvoir remplir le CD à ras bord, ce qui tend à montrer nos deux allemands sous un jour un peu moins dédaigneux. La galette plastique tant honnie s’achève en apothéose sur ce M6A dégoulinant de sueur, comme ondulant au ralenti dans un sauna infesté de moustiques… C’est à la fois germanique et jamaïcain. Comprenez par-là froid et chaud, robotique et sensuel, cérébral et viscéral. Impossible de trancher avec pareille musique. Juste écouter dans son bain en regardant la vapeur d’eau se déposer en petites stalactites au plafond…

Note : 5/6

Page 70/167 CZUBALA (Marcin) : Dope

Chronique réalisée par dariev stands

Un drôle de type que ce Czubala. Pas vu, pas pris, il avait échappé à la vigilance de pas mal de monde à l’époque… Passé de la pologne à l’Allemagne il y a quelques années déjà, il livrait en 2001 son premier album dont la classe pochette vous aura peut-être interpellé. A quoi s’attendre en voyant ça, et les titres ? Les couleurs du drapeau allemand, à côté d’une flamme de briquet en rouge sur fond rouge… On est bien loin de la pochette du récent dernier skeud du meme gars, passé du côté kéké de la force (n’allez pas voir, où alors avec des lunettes de soudure). Pourtant, ici, la proverbiale techno minimale si chère aux teutons depuis 10 ans se prend un sacré coup dans le pif… Tout l’album a ce côté un peu troublant, le cul entre deux chaises : est-on en territoire minimal qui se serait roulé dans la boue où chez un authentique amoureux du glauque dans la techno, à la manière des fameux Hypnotizer et The Horrorist ? Dès Under A Groove, on a l’impression de patauger dans une soirée mousse aux bulles de son salaces, malmenés par un tempo primesautier, l’opinel dans une main, la clope éteinte dans l’autre. Quand ce n’est pas le souffle asthmatique d’un robot qui vient grésiller à nos oreilles (Domestic Violence), où les relents de gaz d’échappement de semi-remorques qui nous arrivent par la bouche d’aération, sur fond de pépiements façon Richard D. James (Discoteque)… Et on s’enfonce un peu plus dans le crade, avant de ressortir finalement les yeux révulsés par une porte dérobée (Wrong Exit) d’un club imaginaire qu’on aurait pu appeler "L’Enfer". Un album insidieux, quoique encore très balisé.

Note : 4/6

Page 71/167 THO THO : Tho tho

Chronique réalisée par dariev stands

ThoTho est l’une de ces surprises musicales comme on aimerait en voir plus souvent… Un projet de dimensions pharaoniques à l’écoute, qu’aurait pu imaginer DJ Spooky par exemple. Et pourtant, il y a de quoi se réjouir : c’est une production française ! Et ambitieuse qui plus est : le mariage mille fois tenté, souvent raté, des instruments classiques et des beats concassés de l’electronica. C’est un quatuor à cordes qui s’y colle, jouant les compositions du maître d’œuvre, qui dirige également les cliquetis électroniques qui parsèment tout l’album. On note tout de même une légère prépondérance des instruments classiques sur les beats, mais globalement les noces ont bel et bien été consommées, non sans dissonances et fracas baroques (Plage 14). La réussite du projet tient peut-être au fait que les membres du quatuor à codes semblent joué un rôle actif dans sa mise en place… On tient en tout cas à signaler que cet album, bien qu’autoproduit, n’a absolument rien à envier à une grosse production niveau son et finition. C’est un travail de titan qui a été accompli ici. Collisions digitales, glissandi vertigineux, supernovas electroniques rencontrant des vortex de cordes s’ébaudissent dans nos oreilles comme si tout allait de soi, de nombreux passages collent au cerveau, et l’apparente absence de structure (très peu de répétition sur tout l’album) joue en fait en faveur de ThoTho. Si les pièces sont courtes, elles s’enchaînent toutes sans transition comme part d’un grand tout indivisible, où le thème de départ peut ressurgir au bout de 10 pistes, avant un soudain emballement de la rythmique, et où un passage contemporain qui fait cohabiter quinte de toux et quintes diminiuées peut s'incruster sans peine. Le tout est honorablement desservi par un packaging ovniesque tout à fait à l’image de la musique : classieux mais inclassable, démesuré mais obsédant. Singulier.

Note : 5/6

Page 72/167 ATOMIC NEON : Darkenia

Chronique réalisée par Twilight

Le revival cold wave actuel concerne visiblement l'Allemagne aussi puisque le label Black Rain vient d'ajouter à son écurie une jeune formation qui se veut représentatrice de l'authentique son des 80's et il est clair qu'à l'écoute de cd, il n'y a pas à chercher loin les influences de Atomic Neon: The Cure (waow, le scoop !). C'est plus que flagrant sur des morceaux tels que 'Who am I', que ce soit dans le jeu de basse ou le chant un peu plaintif , 'Blades' et ses petits airs de 'Just like heaven' ralenti ou encore 'Cold room' (c'est Robert qui chante ou quoi ?); ce n'est pas foncièrement désagréable mais très peu original et surtout, l'interprétation sonne hésitante. On pourrait pardonner ce genre de défaut et encourager (après tout, chacun a le droit de débuter, pas vrai ?); où les choses se gâtent, c'est que Atomic Neon veut aussi démontrer qu'ils ne sont pas seulement des clones des Cure et ils cherchent à le prouver par des chansons plus rock ('Mein Kleid', 'Herrgott' ou 'Our love') qui ne sont pas franchement des réussites. Ca sonne comme de l'indie maladroit et paradoxalement l'usage de leur langue maternelle nuit davantage au feeling de ces morceaux-là, particulièrement sur 'Herrgott', rock pompier de fort mauvais aloi où Rio Black délaisse le timbre mélancolique pour un chant rocailleux assez ennuyeux. Si je veux bien reconnaître que 'Darkenia' inclut quelques titres pas désagréables, il se trouve confronté au problème suivant: les meilleurs morceaux sont très inspirés Cure, le talent en moins, les autres sont de maladroits essais se voulant plus personnels mais qui ratent leur objectif et rompent la cohérence du disque. Et puis, bon, il faut bien le dire, on s'ennuie vite; cinq ou six morceaux, ça passe, mais treize ! le plus comique est que Atomic Neon vient de splitter et c'est déjà la guerre entre les membres qui proposent deux

MySpace différents, l'officiel et l'autre...Pitié, les gars, vous auriez pu nous épargner ça !

Note : 2/6

Page 73/167 SYNTH.nl : AtmoSphere

Chronique réalisée par Phaedream

Ce 2ième album de Michel van Ose167ruggen (Synth. NL) est inspiré des couches d’atmosphères qui entourent notre planète. Un peu dans la même veine que son 1ier opus AeroDynamics, le synthésiste Hollandais continue de forger une musique animée avec des rythmes accrocheurs. AtmosPhere offre un bel éventail avec une touche plus près des atmosphères nébuleuses que du cosmique, comme on trouvait sur AeroDynamics. Un nouveau genre de synth pop progressive avec une approche assez ‘’heavy’’. Troposphere se fomente comme un grain dans l’espace. Un train arrive de nulle part et dégage des effets sonores hétéroclites. L’ambiance est cosmique, sauf pour de fines cymbales qui initient un jeu de percussion plus animé, dans une sphère cosmique aux chœurs mellotronnés et aux vapes légères. Une séquence syncopée se fond agréablement à ce tableau spatial, créant un rythme soutenu qui ceinture une nébulosité active. En un titre, le synthésiste Hollandais situe sa musique. Mélodieuse et rythmée, nappée d’un lourd mellotron qui donne l’impression de ralentir le tempo. Lourd et traînassant Troposphere, tout comme Cumulonimbus qui semble en être le remix, rebondissent dans les tympans avec une richesse sonore inouïe. AtmosPhere grenouille de ses titres aux intros vaporeuses et climatiques qui débouchent sur des rythmes francs, agités avec une touche de Jarre. Des titres comme Troposphere, Altocumulus, l’excellent Altostratus, et le très Jarrien Exosphere avec ses violons enivrants, exploitent des séquences ébréchées sur des percussions bien aérées et un synthé mélodieux. Du ‘’cosmic’’ bo167on intelligent et accrocheur. L’intro de Stratosphere nous plonge dans un bouillon cosmique statique qui s’anime doucement avec des cymbales circulaires et une séquence hoquetante qui ceinture un mouvement à peine rythmé. Mélodieux, le synthé flotte rêveusement alors que le titre immerge dans une ambiance noire avec, en arrière-plan, la mélodie initiale qui flotte plus qu’elle ne s’agite. Un des titres plus ambiants que l’on trouve sur cet album, tout comme Thermosphere et Cirrostratus qui oscillent toujours entre les nébulosités et les rythmes fragmentés. Atmosphère est plus élaboré. Une douce séquence rotative avec une chorale mellotronnée insuffle une douce mélodie que les frappes sèches des percussions n’arrivent pas à altérer. Un bon titre, comme la majorité qui compose ce 2ième opus of Synth.NL Du synth pop avec une touche plus progressive, comme Mesosphere et ses longs solos de synthé et Nimbostratus et son approche dramatico-cosmique. Si vous avez aimez AeroDynamics, AtmosPhere ne vous décevra point. Un album fort en rythme et qui effleure les racines d’une MÉ ambiante ne passe pas inaperçu. Il y a une forte influence de Jarre, notamment aux niveaux des percussions et des refrains synthétisés qui mordent aisément l’oreille. Un bon album pour amateur de synth pop, aux percussions franches et aux orchestrations bien fignolées.

Note : 4/6

Page 74/167 NEVA : Individu

Chronique réalisée par Twilight

'Survivante des années farouches, la cassette d'Individu' renaît de ses cendres' et nous, nous applaudissons des deux mains. Depuis l'intense bonheur qu'avait constitué celle en cd de 'Fausse conscience', tant de rumeurs avaient couru sur de possibles rééditions supplémentaires de matériel de Neva, tentatives avortées ou même mortes-nées, qu'on n'osait plus y croire. Deux parties scindent 'Individu', une première constituée de morceaux live enregistrés en 1987 et une seconde capturée en studio entre 1984 et 1986. On y retrouve le style de Neva dans sa forme la plus brute, un mélange de sons synthétiques, de boîtes à rythmes un brin cheap, des basses grondantes et les vocaux totalement déjantés de Jacquy. C'est l'essence même d'un batcave hérité de l'école britannique qui est ici personnalisé par le groupe qui du coup appose sa propre marque dans le genre, même s'il aura fallu bien des années pour que les gens s'en aperçoivent. Sombre et urgente, la musique parvient à faire cohabiter en ses lignes une bonne accroche mélodique avec un feeling totalement décadent; le chant aigu, survolté, comme possédé assure le reste. D'excellents morceaux comme 'Sacrilège', 'Images de la nuit', 'Frénézie' ou 'Cités perdues' témoignent du potentiel live de Neva. Le studio atténuerait-il cette folie ? Pas le moins du monde, 'Ecotchiezko' , sa rythmique punky et ses vocaux de ouf, 'Psykodrame' et ses atmosphères froides, le bon 'Out-Live' plus orienté minimal wave, sans oublier 'Amnésie' ou les attaques carrément bruitistes de 'Irresponsable' (le spectre de Virgin prunes n'est pas loin) ont vite fait de remettre les pendules à l'heure ou plutôt de les dérégler définitivement...'Individu', en comparaison avec 'Fausse conscience' livre un témoignage encore plus brut de l'univers du groupe; un bon travail de mastering sur les bandes originales permet d'en jouir pleinement sans problème de qualité sonore douteuse. Remercions 'Alone Prod.' pour ce cadeau inespéré et parlons des textes...euh...en fait je crois que vous en avez déjà assez encaissé pour le moment...

Note : 5/6

Page 75/167 U2 : Achtung baby

Chronique réalisée par dariev stands

J’aurai personnellement été d’avis de ne chroniquer que ce U2-là. C’est vous dire le respect total que j’ai envers ce disque. A bien des égards, il s’agit de l’album allemand de U2. Pour sa froideur d’abord ; sa relative lourdeur comparé aux autres, ses incursions electro (avec beaucoup d’avance sur le reste du rock, c’est un fait), son univers à part, véritable chantier de reconstruction, à l’image de Berlin. De toute évidence, U2 avait demandé à Eno de recréer pour eux l’ambiance de la trilogie berlinoise de Bowie, ce rebond inattendu qui relança pour toujours sa carrière. Je me souviens encore de ma toute première écoute de Zoo Station : "merde, c’est quoi ça, je croyais que j’avais mis un cd de U2 ?". D’où sortaient ce jerk spatial et distordu, ces chœurs plus trafiqués que du Daft Punk, ce plan complètement Toolien en intro, cette profondeur de son à la lumière aveuglante, comme une ville ultramoderne dans laquelle on pourrait se perdre ? Zoo Station, désolé de vous le dire, ça me faisait immédiatement penser à Babylon Zoo. Un truc futuriste et carton-pâte, alors qu'il ne s'agissait en fait que de la gare routière de Berlin. Even better than the real thing achevait mes préjugés et relançait la machine de plus belle. "bon, je rêve où il commence à me plaire le grand cono, là ? Je le reconnais plus… où est passé le geignard de Joshua Tree ? ‘give me one more chance, you’ll be satisfied’, ouais ouais, mais quel beau parleur ce mec. Le pire c’est qu’on a envie de le croire, c’est ça qui est fort." The Edge dira fort à propos qu'il s'agissait du "son de 4 types en train d'abattre le Joshua Tree". On revient, heureusement pour nos sens égarés, dans les clous avec un One sous perfusion McCartney qui porte ma foi bien son nom (s’il fallait n’en garder qu’une de U2… idée valable pour l’album si vous voulez mon avis). Cela dit, dans le genre slow ultime pour une dernière danse dans un sous-marin qui bouffe ses dernières réserves d’oxygène, on lui préfèrera le chef d’œuvre qu’est Trying to throw your arms around the world, sur lequel la diction alambiquée de Bono atteint des sommets. On croirait, à son écoute, entendre les crépitements lointains d’un feu d’artifice, tandis qu’un crépuscule bleu et rose s’étend sur le Sahara. Oups, j’ai failli sauter Until the end of the world. La façon dont Bono y contraste avec ces hauteurs guitaristiques, avec la compacité de cette production chargée à bloc, la façon dont il y balance, clope au bec "You were acting like it was the end of the world" a quelque chose de Han Solo, quelque chose d’une vieille classe hollywoodienne, un peu macho, qui serait vouée, plus tard, à disparaître. Inépuisablement riche, Achtung Baby est un album plein de sentences qui tapent, à l’image du pantalon couvert de miroirs de Bono (qui fréquente souvent les mêmes friperie que Jim Morrison, il faut croire) : “A woman needs a man / Like a fish needs a bicycle” “When you close your eyes, you can feel the enemy” ou encore “it’s no secret that ambition bites the nails of success”. Toutes ces paroles, souvent profondes, et faisant partie intégrante du personnage sardonique campé par Bono, ne seraient rien sans la manière de les chanter, indéniablement réussie. C’est à peu près l’opposé de l’intensité concernée et poétique de Ian Curtis : Bono est hâbleur, gouailleur, frimeur, et surtout sensuel à l’excès (écoutez le suffoquer comme Prince sur Even better than the real thing, par exemple). L’écho porté sur sa voix maniérée, couplé avec le foisonnement des guitares mirobolantes, donne l’impression d’un enregistrement live, avec un Bono perché à des centaines de mètres au dessus de la foule, cabotinant en équilibre sur une structure métallique, au mépris du vertige et du bon goût… A force d’adoration des foules à une dimension encore rarement vue, le chanteur allait muer non pas en papillon, mais en The Fly. Un alter-ego salvateur à ce stade de megastar absolue, dont il est paradoxalement l’archétype, le cliché qui en est tellement outrancier et irréel qu’il en désamorce toute le

Page 76/167 sérieux. L’homme aux lunettes de mouche, au costume de cuir noir qui n’apparaît que la nuit et sous les projecteurs… Une démarche post-moderne, mais qui s’arrange bien pour susciter la fascination de milliers de gens qui fantasment dessus bel et bien au premier degré (j'omets ici volontairement de vous parler de MacPhisto, 2ème alter ego du chanteur). Bref, avec Achtung Baby, U2 arrivait avec un "package" à la Bowie, un concept aussi bien visuel que sonore et qu’il faut analyser en ayant toutes les cartes en main… Clips et live aussi. A suivre, donc. Autre artifice qui fait toute la différence ici : la pro-du-ction. Impossible de faire comme si on en foutait, le duo de producteurs avait ici atteint la maturité de sa relation avec U2, acquise au fil des ans. Lanois pour le côté orfèvrerie sonore aux multiples couches, et bien entendu Eno pour ses mythiques stratégies obliques, sorte de méthode instinctive et dadaïste en studio qui aura sauvé bien des géants en mal de renouveau. Même sur des compositions très faibles comme So Cruel ou Acrobat, la sauce prend grâce à ces cascades de guitares omniprésentes, mais aussi grâce à cette batterie mixée comme pour un album de breakbeat, et ce même sur les ballades (So Cruel en particulier). Et quand ce son ultra travaillé rencontre un The Edge soudain pris d’un accès de funkitude le temps de The Fly (essaie de suivre ce solo Ash Ra Tempelien jusqu’aux tréfonds de l’univers, pour voir) et de Mysterious Ways (autre meilleur morceau du groupe, qui vient cette fois rappeler Can), eh bien, c’est la panique in da club, comme ils disent. Le plus fortiche est peut-être qu’à part ces deux titres, tout le reste du disque n’est au final que du U2 classique, épique et emphatique, mais servi par cette production si imbattable… Il y a bel et bien moult synthés années 80 sous ces effets par camions, sous ces percus africaines pour faire cool. Véritable pied de nez au nivellement par le bas du mainstream des années 80, ainsi qu’à un Bowie qui reprendra foi en l’expérimentation peu après (coïncidence ?), le carton du disque sera hénaurme… Mais plus encore le sera son influence sur les groupes à venir. Coldplay, The Killers… La liste des vaches à stades est longue… Fort heureusement pour le monde, des petits malins nommés Radiohead avaient aussi pris ce disque en pleine poire (Thom Yorke, 22 ans). Résultat après maturation : Ok Computer, Kid A. D’où croyez vous que venait ce virage à 180° en pleine gloire ? Cette invasion de sons électroniques sans raison ? Ce violoncelle en solo dans l’écouteur gauche de votre casque sur Airbag (Who’s gonna ride your wild horses) ? Cette coda sur There There (idem) ? Ces fins d’album sous lexomil, portées par un orgue dénué de tout espoir, où la vie semble s’écouler lentement de vos veines (Love is blindness) ? Etc etc… On pourrait trouver ainsi plusieurs idées par morceau. Ce qui ne fait en rien de U2 un plus grand groupe que Radiohead, remarquez. Ça fait simplement de Achtung Baby un album dont on ne se lasse pas, et qui prend sa réelle valeur au fil des ans…

Note : 5/6

Page 77/167 PUBLIC IMAGE LIMITED : Death disco

Chronique réalisée par dariev stands

Public Image prenait ici du poil de la Bête. La Bête avec un grand B. Death Disco est un monstre, une abomination de l’ère nucléaire qui n’aurai jamais du voir le jour. Des musiciens punk qui apprennent à jouer et qui deviennent assez bons pour jouer du disco, genre qui exige une certaine aisance technique… Un hooligan édenté qui se met à la basse et s’avère – sans explication rationnelle – un tisseur de lignes dub épaisses comme les murs de briques de sheffield. Et un gratteux maladif qui torture la mélodie du "Lac des cygnes" de Tchaikovsky pendant que Johnny Ex-Pourri dégueule littéralement son désespoir. Toute la chanson est une lamentation sur le lit de mort de la mère de Lydon, dont il décrit ici l’agonie avec une colère écorchée vive… Contre qui ? Contre Dieu, contre la vie, contre la mort ? “Words can never say the way, seeeee it in your eeeeeeeeeeeeeeeeyes” ... Le malaise est d’autant plus fort qu’il s’agit quand même d’une parodie de maxi disco, format qui supplantait le 33 tours en popularité pour beaucoup à l’époque. Le disco de la mort, qu’ils appelaient ça. Dès l’intro, la ligne de basse nous attrape aux mollets pour ne plus nous lâcher… Beaucoup de musiques copulent ici dans l’aigreur, pendant que le monde politique opère son virage à droite définitif. C’est l’apothéose du groupe, Lydon irradiant de morgue et de classe dans son 3 pièces écossais sur la vidéo promo du titre, et la plupart du public à l’époque se consternant de plus en plus devant ce rejet absolu du punk binaire des origines. Fodderstompt megga mix (rien que les titres se foutent allègrement de la gueule du disco), semble être l’extension logique de Death Disco, alors qu’il ne s’agit ni plus ni moins que d’une version instrumentale et métronomique de Fodderstompf, cette grosse farce improvisée pour remplir la face B de First Issue. Au final, le groupe ne fait ici que recycler des titres du premier et du 2eme album (Death Disco renommé Swan Lake, très malin). Ironie ultime de l’histoire, le groupe se rendra compte que le format maxi tant raillé propose un son bien meilleur que les 33 tours normaux, très utile pour retranscrire la profondeur des lignes de basses bombastiques de Jah Wobble. Résultat, il prendra la résolution de ne plus sortir sa musique que sous ce format… Une résolution qui tiendra le temps d’un 2ème album époustouflant, avant que Wobble ne quitte le navire justement, laissant les fans endeuillés par cette perte tragique pour le son PiL. A suivre dans ces pages.

Note : 5/6

Page 78/167 CERVELLI STANKI : Street rock'n'roll

Chronique réalisée par Twilight

Kubrick savait-il à quel point l'esthétisme de sa version de 'A Clockwork Orange' marquerait les esprits ? Toujours est-il que après les Adicts, ce sont les Italiens de Cervelli Stanki qui s'en sont inspirés. S'ils n'ont pas poussé le souci du détail aussi loin que leurs collègues britanniques (notons tout de même que la tête de Monkey est tatouée sur l'épaule du chanteur), ils officient eux-aussi dans un registre punk rock. Pas question de révolutionner le genre, nous avons affaire à quelque chose de bien pêchu, basique, efficace, mais dont la touche rock'n'roll assure à cette galette un bon potentiel mélodique. On sent également quelques influences street qui ne surprennent pas vu les influences oï des textes (quotidien de la classe moyenne, quelques histoires de filles e tutti quanti). Le chant principal est plutôt scandé, l'aspect mélodique étant la tâche des choeurs. 'Street rock'n'roll' est un disque efficace dans son genre, plaisant à l'écoute avec quelques bons rebondissements ('Giorgia', 'Apocalipse now' ou 'Street rock'n'roll') mais j'avoue que le plus pour moi, ce sont les vocaux en italien. Rien de très nouveau mais un disque assez plaisant pour se secouer un bon coup de temps à autre.

Note : 4/6

Page 79/167 SONAR : Sonar

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Dive + Hypnoskull, tu vois le tableau. Je ne prétends pas que Sonar transcende les projets respectifs de Dirk et Patrick, loin de là ; mais ça annonce clairement la couleur. Au menu donc, du rythme, des boucles bruitistes, de l’attrape-gorge, du ramonage de cage à miel mécanique et sans vie. Ce premier album bien que plus simpliste et moins précis que ses successeurs (qui verront Erik Van Wonterghem prendre la chaise encore chaude de Patrick) vise une certaine efficacité et se rapproche des vieux projets d’indus rythmique dignes de ce nom (Esplendor Geometrico, Vivenza…) en restant visiblement à l’écart de la scène allemande qui fait la gloire de Ant-Zen et Hands, ces derniers ayant la fâcheuse tendance à esthétiser un max ce qui pourtant apparaît aux oreilles des détracteurs comme une suite d’enregistrement d’usine à métaux (ce qui, dans le cas de Vivenza, est vrai). On retiendra de ce premier essai une forme brutale, sèche, lobotomisante mais pas impérissable.

Note : 3/6

Page 80/167 AURAL BLASPHEMY : Catharsis

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Il faut un certain talent pour s’assurer d’en avoir aucun. Aural Blasphemy, c’est le Winterkälte du pauvre : des boucles pneumatiques collées au kilomètre autour desquelles gravitent un peu de poussière, des grésillements, des voix qui parlent de machines et des synthés maltraités et modulés en rythme. Nécessairement, lorsque l’on est une copie, il y a toujours de bonnes choses à sauver : c’est donc sans surprise que nos petits corps remuent les fesses sur les titres les plus pêchus ; mais nous ne sommes pas dupes et nous remercions nos cours de psycho pour nous avoir permis de réaliser que nous ne dansons que par transfert affectif, et que ce genre de simulacre n’est fait que pour nous rappeler tout le bien-être que nous procurait l’objet de désir. Désolé donc, Aural Blasphemy ; mais après trois écoutes, tu sors.

Note : 2/6

Page 81/167 DIE FORM : Some Experiences With Shock

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Quand j’entendais les histoires de mes potes de fac de médecine qui fouillaient dans les cuves à morceaux de cadavres autopsiés, je me disais que je m’étais trompé de filière. Après coup, je réalise que non, car eux sont obligés de les étudier alors que je peux obtenir un diplôme d’enseignement supérieur rien qu’en prenant lesdits bouts de viande en photo. Die Form, c’est mon retour aux petits plaisirs sadiques et ‘Some Experiences with Shock’ est un exemple rare de musique médicale, affreusement sordide qui plus est. C’est un hôpital pour enfants pris en otage par des chirurgiens peu enclin à pratiquer la médecine traditionnelle. Au programme durant votre séjour : visite de la morgue (Red Action), promenade dans les services grands brûlés (‘Survival of a Severely Burned Child’, ‘Anesthesia & Disfigurement’), essais chimiques expérimentaux (‘CloseUp’, ‘Catheterization’), tests psychiatriques (‘Masochist’, ‘Medial Canthus Operation’), ouverture crânienne sans anesthésie (‘Life inside the Machines’, ‘Distress’), et plus si complications. En pleine vague minimal wave, Die Form se démarque vite par son esthétique morbide tant musicale que visuelle qui restera solidement ancrée au cœur d’un des couples les plus intègres de la scène. Mais si la suite est toute aussi bonne, rarement une telle pesanteur malsaine aura gardé toute sa saveur au fil des décennies. On peut enfin parler de musique glauque sans galvauder le terme : loin devant la plupart des disques industriels dits malsains, c’est un des trop rares albums que j’ai regretté de mettre la nuit au casque.

Note : 6/6

Page 82/167 DIE FORM : Inhuman

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Ceux qui suivent un tant soit peu le groupe le savent : il y a clairement deux facettes Die Form. L’une, héritée des musiques industrielles, est une ambiance sordide d’hôpital en décrépitude, et l’autre, héritée de la minimal wave et de l’électro , donne au groupe des structures plus rythmées. Entre les deux, Philippe Fichot déploie son univers gothique et sado-masochiste à chaque fois imprégné d’un savant dosage des deux pôles. ‘Inhuman’ se situe clairement dans la facette électro : c’est un recueil de morceaux langoureux mais accessibles, visiblement pensés pour le dancefloor ; parfois bien sentis (le sensuel ‘The Supreme Vice’, le tubesque ‘Zoopsia’), parfois moins pertinents (le bancal ‘Amnesic Disorder’ et son affreux final). La voix d’Eliane est toujours aussi sublime, et les mélodies bien souvent imparables et envoûtantes, avec souvent une ressemblance avec L’Ame Immortelle en plus tranchant qui n’est pas pour me déplaire. Oui mais voilà, tout tourne en rond sur douze titres calibrés assez semblables dans leurs structures et plongeant finalement peu au cœur de l’ambiance si particulière du groupe. Pas le meilleur Die Form donc, la place est prise ; mais clairement un bon ajout à toute collection érotique.

Note : 4/6

Page 83/167 DIE FORM : Exhuman

Chronique réalisée par Wotzenknecht

‘Exhuman’ est un de mes Die Form préférés en ce qui concerne les visuels. Tout en restant dans l’univers contrasté qui danse entre sexe et mort avec une impressionnante volupté, Philippe Fichot rend aussi hommage aux surréalistes en mêlant ses photos fétichistes avec des essais de compositions abstraites réalisées en chambre noire qui reprennent l’esthétique totale imposée depuis une trentaine d’années. Contrairement à son jumeau ‘Inhuman’, ‘Exhuman’ est loin de chercher à chauffer le dancefloor : c’est à nouveau dans le glauque classieux que l’on replonge, avec des fresques érotico-morbides comme ‘Electroïd’ ou ‘Hypnogramme’ qui voient la voix d’Eliane se faire tordre par un régulateur électronique du meilleur effet. Lorsque les hostilités reprennent, exit le sexe : c’est à nouveau la chirurgie froide et sans préavis qui font les rythmiques de ‘ Nature Destruction’, ‘Fatal Insomnia 2’ et ‘Chaos Theory’, dont la seule chaleur est assurée par quelques sonorités dark trance qui passent par là. Le reste de l’album est un concentré de sensualité rampante, vénéneuse : Philippe, en retrait, n’a de cesse de susurrer des paroles peu amènes tandis qu’Eliane souligne son propos de sa voix souvent détournée, pervertie, amoindrie par divers bidouillages qui donnent à l’ensemble une teinte très particulière, comme la version électronique d’une orgie macabre tirée de je ne sais quel livre de Clive

Barker. Entrez dans la danse, mais n’oubliez pas d’en sortir.

Note : 5/6

Page 84/167 DIE FORM : Her[t]z Frequenz

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Bon, là on va faire vite, parce que bon, hein. Caché sous un digipack limité distribué par SPV (oui eh bien c’est souvent mauvais signe), Die Form nous offre un inédit pas terrible, sa version alternative, un vieux tube réenregistré, et son remix. ‘Her[t]z Frequenz’ ressemble à un générique de manga mis en chanson (le mauvais côté Das Ich, quoi) sur lequel Eliane et Philippe répètent les mêmes mots à l’envi. La seconde version est un peu plus aseptisée et dance, ce qui la dessert encore un peu plus. ‘Bite of God’ est évidemment une bombe mais elle a une vingtaine d’année et c’était pas la peine de la dépoussiérer, surtout dans deux version tellement semblables que je suis bien incapable de dire ce qui les différencie. L’artwork quant à lui est loin du raffinement habituel, bref, circulez ; il n’y a rien à voir.

Note : 2/6

Page 85/167 SIMIAN (Ashen) : Omicron In Ostrobothnian Finsternis

Chronique réalisée par Phaedream

Ashen Simian est l’anagramme d’Ami Hassinen du groupe Nemesis. Groupe qui orientait sa musique entre une techno aux couleurs nébuleuses et un retro Berlin School. Omicron In Ostrobothnian Finsternis est sa 1ière œuvre solo. Un album où les 8 titres présentés démontrent la très grande versatilité de ce synthésiste Finlandais, qui n’a pas peur d’emprunter des sentiers audacieux tout en respectant une éthique musicale mélodieuse. De brèves respirations haletantes métalliques ouvrent Vaporizer. Une hyperventilation saccadée qui respire sur des percussions martelantes et de beaux accords mélodieux, avant de s’engouffrer dans une techno impétueuse à la Juno Reactor. Aimant jouer avec ses structures rythmiques, tout en les assaisonnant de passages cosmiques, Ashen Simian brouille le tempo par de courtes intercades, tantôt modérées tantôt spatiales, faisant de Vaporizer une techno qui oscille entre la frénésie des rythmes et les espaces sphériques. On observe la même structure sur Start Before You Stop, quoique plus progressif que techno. Tout à l’opposé Footprints in the Sky est une sombre mélodie, enrobé d’une sensualité cosmique à la Patrick O’Hearn. Une très belle pièce avec une basse roucoulante. On tombe dès la 1ière écoute. De fins arpèges tournoient comme un carrousel cosmique pour introduire Meteorstorme. Une intro nébuleuse et spatiale qui entame son tempo avec des percussions roulantes et en cascade, dans un sombre océan étoilé d’accords d’une guitare solitaire. Imprécis, le rythme s’engage dans une forme de boléro incomplet qu’un synthé tente de stabiliser avec des strates en crescendo qui bifurquent sur des violons aux lourds accords orchestraux. Avec Omicron et Finsternis nous pénétrons dans le domaine de l’étrange. Comme une horloge aux tic-tacs hors du temps, Omicron carillonne doucement sur une belle flûte et de fins arpèges mélodieux. En peu de temps, le titre prend une tangente plus lourde avec une guitare pesante et un rythme au débit plus fluide. Quand à Finsternis, d’étranges pulsations croassent dans un univers atonal. À mi-chemin le synthé ourle de belles strates mélodieuses qui enveloppent ses curieux bourdonnements sans pour autant réussir à moduler un rythme harmonieux. Ostrobothnia nous introduit dans un univers prog rock avec ses accords d’une guitare acoustique et son mellotron flûté en ouverture. Un tempo martelant, mais souple, allume le rythme sur un mellotron prédominant qui passe de la flûte aux chœurs denses sur une cadence légèrement à la hausse. Des accords de claviers sautillent sous un synthé symphonique qui coule de superbes solos à la Wakeman. Pièce de résistance, Absit Invidia débute avec un vent strié d’ondes synthétisées. Une intro ambiante qui embrasse une douce séquence sautillante et pulsative, dans un contexte musical incohérent. Séquences sur séquences, la cadence se subdivise sur un synthé aux solos indisciplinés et une structure séquentielle minimalisme qui ondule dans une féerie sonore errante. Les strates se multiplient alors qu’une guitare explose de solos forts juteux, qu’un synthé souffle un solo doucement harmonieux sur une structure séquentielle aux ajustements névrotique. Du Tangerine Dream, de l’époque Baumann, Franke et Froese sur une structure musicale contemporaine fait de Absit Invidia un titre incontournable pour ceux qui aimerait savoir à quoi sonnerait le TD des années 70, en 2010. Superbement bon, même si totalement décontenançant. Assez représentatif d’Omicron In Ostrobothnian Finsternis lorsqu’on s’y arrête. Un très bon album...je sais vous allez encore dire que Phae a la quote facile, mais si il y avait un volet excellent, un très bon aurait un 4

Page 86/167 étoiles!!! Ça vaut un 4/6

Note : 5/6

Page 87/167 COHEN (Leonard) : Ten new songs

Chronique réalisée par Sheer-khan

"By the rivers dark, I wandered on". Parce que sa voix est le frisson acoustique le plus profond qui soit. Parce qu'il revient de sa montagne où il s'est tu, retiré, apaisé durant de longues années; parce qu'il est sage, serein, lucide; et parce que c'est bel et bien dans la conscience aigüe de sa propre mort à venir, que le vieux lion retient aujourd'hui son regard d'apocalypse sur le monde : " I lived my life, in babylon". Alors Sharon Robinson arrangeur s'en est tenu à l'essentiel; piano, batterie et basse, percussions chaloupées et un filet de guitare; Madame Robinson producteur a choisi et programmé une palette simple de sons aux allures naturelles, pour ne convier personne à cette séance de confessions et de recueillement, personne d'autre que le vieux maître tranquille à la voix d'ébène; alors Sharon Robinson compositeur a assisté Leonard Cohen, 67 ans, dans son élégance et sa pudeur; elle lui a soufflé la chaleur de la soul pour asseoir sa bienveillance naturelle, elle lui a prêté son groove reposant comme un fauteuil en velours, et le vieil homme s'y est assis, comme un dieu fatigué. Et parce qu'il n'est pas un dieu mais un homme, elle a soigné ces dix nouvelles chansons de ses choeurs, elle a accompagné le récital Cohen de sa féminité et de sa sensualité, parce qu'il n'est pas un dieu mais un homme, qui n'a jamais survécu pour autre chose que la douceur des femmes. Dans une ambiance feutrée, dans les lueurs rassérénées d'une variété soul à la classe discrète, à la grâce éthérée, à la souplesse féline de son groove en coton, l'ampleur prophétique de la voix de Cohen vient se loger tout au creux de l'oreille... chhht, silence : Leonard parle. Résolu, abandonné au cours des choses, en pleine communion avec la fatalité, l'ancien quinquagénaire au pessimisme implacable et terrifiant est désormais un moine âgé et pacifique; le petit frère complice de tous les enfants tristes, l'amant de toutes les femmes, le grand père rassurant de tous les vieillards du monde, qui sentent venir la fin. Parce que c'est bel et bien dans la conscience aigüe de sa propre mort à venir que le vieux lion retient son regard d'apocalypse : alors Sharon Robinson a assisté Leonard Cohen, 67 ans, dans son élégance et sa pudeur... et ensemble ils ont écrit "Here it is" et "By the rivers dark". Parce qu'il est sage, serein, apaisé, alors la dame lui a soufflé la chaleur de la soul pour asseoir sa bienveillance naturelle... et ensemble, ils ont écrit "Love itself", "Alexandra leaving" et "The land of plenty". Parce qu'il s'est tu, retiré durant de longues années, et parce que sa voix est le frisson acoustique le plus profond qui soit, alors Madame Robinson a accompagné le recital Cohen de sa feminité et de sa sensualité, et parce qu'il n'est pas un dieu mais un homme, ensemble ils ont écrit "My secret life" et "A thousand kisses deep". Chhhtt... sa voix à la profondeur canonique vient se loger au creux de l'oreille... "by the rivers dark, in a wounded dawn"... posé, sage et serein, abandonné au cours des choses et en pleine communion avec la fatalité, l'homme qui a survécu à l'Avalanche descend aujourd'hui de sa montagne, dans la conscience aigue de sa propre mort à venir; lui, Leonard, qui n'a jamais survécu pour autre chose que la douceur des femmes. "May everyone live, and may everyone die, hello my love, and my love, Goodbye"...

Note : 6/6

Page 88/167 DIAFRAMMA : Albori

Chronique réalisée par Twilight

'Albori' compile les premiers singles et maxis du groupe (soit le premier line up) en y ajoutant des démos. Comme pour la réédition de 'Siberia', ce petit coffret inclut de plus un DVD proposant le clip de 'Altrove' ainsi que divers extraits de concerts. Musicalement, nous brassons-là la période la plus sombre et la plus ouvertement post punk/cold wave de Diaframma. Les Italiens nous y proposent des compositions nocturnes jusqu'à l'étouffement, audacieuses dans leur structures, alternant entre torpeur et attaques sur le fil du rasoir. Comme dans toute formation du genre, la rythmique est reine: la basse ronde occupe l'arrière plan de manière hypnotique, tandis que la batterie se déploie en mettant en valeur chaque élément, notamment le jeu de cymbales; la guitare alterne entre mélodies froides ('Effeto notte') et riffs tranchants ('Pioggia') selon le climat du morceau. L'écriture est dépouillée, froide, sans la moindre chaleur; même le chant grave et convaincu de Nicola Vannini ne s'autorise pas réellement de pointes trop passionnées. Cette musique est noire, incisive, jamais vraiment violente, toujours sur le fil...Difficile d'imaginer des teintes autres que noires et grises, qu'elles soient apaisées ou plus meurtries. Il suffit de s'immerger dans l'ambiance de 'Effeto notte', 'Pop art', 'Pioggia' ou 'Xaviera Hollander' pour comprendre, Diaframma n'a pas encore développé au maximum l'approche pop que l'on trouvera sur 'Siberia' après que le groupe ait changé de chanteur, tout ici n'est que spleen urbain, cotonneux, maladif, doux, sans lendemain...une musique qui se réorientera pour ne pas s'asphyxier elle-même. 4,5/6

Note : 4/6

Page 89/167 VON HAULSHOVEN : Kiko And The Ancient Astronaut

Chronique réalisée par Phaedream

Personnage à l’imagination aussi colorée que débordante, von Haulshoven (Eppie E. Hulshof) nous offre l’histoire de Kiko, un sculpteur de dolmen qui aurait reçu la visite d’extra terrestres afin de lui insuffler les secrets des dolmens. Un long titre de 72 minutes dans la plus pure tradition d’une Berlin School rétro. Une MÉ dont les doux rythmes minimalismes circulaires toisent des moments atmosphériques lourds, truffés d’effets sonores cosmiques. L’histoire de Kiko débute avec une chorale mellotronnée, frappée de quelques accords aux lourdes réverbérations qui ouvrent une scintillante voie lactée. Parmi cette coruscante obscurité, on entend presque un vaisseau spatial rugir sur une longue trainée bourdonnante, initiant un premier mouvement séquentiel aux fins arpèges sphéroïdaux. Von Haulshoven est dans son élément. Une séquence hypnotique qui tournoie légèrement sur un cycle minimalisme où chœurs mellotronnés fusionnent avec des strates lourdes et ondoyantes. Une 2ième séquence se moule dans les sillons de la 1ière, fractionnant un lent tempo hypnotique, alors qu’une fine ligne de basse pulse sur de lents solos sinueux, ouvrant le passé de Schulze et Body Love. Le synthésiste Néerlandais nous démontre son habilité à couvrir un mouvement minimalisme d’onctueux solos et de lourdes strates aux déploiements évasifs. Ce 1ier segment musical étire sa superbe mélodie hypnotique jusqu’à la 16ième minute, là où un doux ballet cosmique s’installe sous de lourdes vibrations. De belles couches synthétisées embrassent cette portion atonale qui pulse légèrement sous une fine séquence basse qui circule parmi un coussin d’effets sonores cosmiques analogues. Une séquence échotique perce cette fragilité sonore, moulant un crescendo discret sur une structure séquentielle de plus en plus animée, mais toujours sobre, à un synthé sifflotant. Hésitant entre l’ambiant et le rythme discrètement séquencé, Kiko And The Ancient Astronaut évolue sous différents horizons sonores, jusqu’à la 40ième minute, là où le mouvement s’amplifie avec de bonnes séquences agressives et de bons solos. Une croisade de plus ou moins 15 minutes qui s’atténue dans des vapes atmosphériques lourdes, truffées d’effets sonores composites. Un peu comme si l’univers infiltrait la terre. Un moment atmosphérique intense qui se meurt sur une finale animée, comme Jarre avait l’habitude d’offrir sur Oxygene et Equinoxe. Avec cette pièce épique de 72 minutes, Von Haulshoven évite les pièges d’une redondance ennuyeuse. Certes les séquences sont sobrement circulaires, mais les atmosphères et les solos de synthé qui les entoure sont d’une richesse sonore attrayante. Et lorsque l’on s’y noie comme il faut, on entend toujours une séquence cyclique qui attire notre ouïe, surgir de nulle part. Pour audacieux et amateurs de Berlin School rétro, style

Body Love. Pas si mal après tout, mais une ouverture d’esprit peut alléger cette longue écoute.

Note : 4/6

Page 90/167 DUTCH SPACE MISSION : Cosmic Grunn

Chronique réalisée par Phaedream

Intro morphique qui stagne dans un bouillon spatial, The Sky Is Crying est très représentatif des œuvres de Space Dutch Mission. Une ouverture lente qui vrille paresseusement sur des effets sonores cosmiques. Un cosmos noir et froid percé par un vaisseau spatial bruyant, mais paralysé par une vitesse que l’œil ne peut capter. Les obscures strates ondulantes créent un ballet cosmique oblong, ceinturé de fins arpèges séquencés qui virevoltent avec une cadence progressive martelante. Des lignes séquentielles lourdes, à la Redshift, sculptent ce mouvement linéaire statique qui serpente avec force ce cosmos qui rage plus qu’il ne crie. La musique du duo Hollandais Space Dutch Mission embrasse les longs mouvements planants du début des années 70. Une MÉ au développement lourd et lent qui finit toujours par épouser des mouvements séquentiels sautillants, ondulants et magnétisants. Un mélange de Tangerine Dream des années Zeit et Keller Schonwalder d’une époque plus contemporaine. Cosmic Grunn, la pièce titre, ouvre avec cette même poussée éolienne aux ondes sombres et métalliques. Une intro noire et atonale qui se berce de ses vagues réverbérantes, en attente des séquences de Von Haulshoven qui animeront le mouvement avec agilité et charme, derrière un cosmos analogue des années 70. À noter ici la guitare qui fraye langoureusement sous ses séquences minimalismes et de lourdes strates enveloppantes. Un superbe morceau de MÉ, style Berlin School rétro, qui rassemble tous les ingrédients des grands noms de l’époque, tel TD, Schulze et Ashra. The Dream Experiment est un long titre aux différents passages sonores. Tantôt bruyant et atonal, le morceau développe de lourdes réverbérations circulaires qui oscillent dans un néant hostile, poussant l’ouïe aux limites de sa tolérance. En d’autres moments le mouvement est magique, voire paisible, avec un synthé mélodieux et de fines séquences sautillantes. Un Dr Jekyll & Mr Hyde musical qui peut plaire à cause de sa structure bigarrée et indisciplinée, mais qui peut aussi avoir ses côtés agressants avec ses lourdes réverbérations circulaires et un synthé métallique au froid sibérien. Ce synthé caustique ouvre Floating Stones. Un merveilleux titre qui côtoie les structures tribales de Steve Roach, avec un côté plus cosmique, plus électronique. Les percussions tablas y sont superbement suggestives et épousent à merveille un synthé caméléon, aux souffles mellotronnés, sur un fond sonore envahissant. Space Dutch Mission est un groupe particulier. N’aime pas ce duo Hollandais qui veut. Von Haulshoven et Phrozenlight explorent des structures musicales très progressives, même si les racines de la Berlin School sont omniprésentes, avec une approche agressive, même si les structures peuvent être morphiques, dans un flot sonore étonnamment riche. Moi j’ai aimé, mais je l’ai entendu plus qu’une fois….

Note : 4/6

Page 91/167 COIL : Unnatural History III

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Les fans respectueux n’ont que leurs yeux pour pleurer, car les disques de Coil ont cessé d’être pressés et distribués depuis belle lurette et c’est une course contre la montre dans le marché d’occasion pour tout récupérer à prix décent avant la flambée – déjà bien entamée ; d’autant que la très grande majorité de ces raretés sont tout à fait indispensables au vu de la qualité de leur contenu, ce qui met en concurrence les mélomanes et les collectionneurs fous… ‘Unnatural history III’ donc, coda de la trilogie rétrospective des inédits et raretés du groupe, est aussi génial que le second volume, peut-être encore plus riche musicalement puisqu’il met sur un pied d’égalité un certain nombre de facettes du groupe : le dub cosmique de ‘First Dark Ride’, la version très early-Skinny Puppy de ‘Panic’, un lancinant et déséquilibrant ‘Meaning What Exactly’ qui sent le psychotrope à plein nez, de l’indus plus glauque, typé « tribal défonce » avec 'Scope' ainsi que le très barré remix de ‘Feeder’ de Chris & Cosey, un peu de moon musick avec le spoken-word planant de ‘Lost Rivers of London’… on trouve aussi une session jazz-rock embrumée et géniale, ‘Neither His Nor Yours’, ainsi que ‘Baby Food’, étrange trip cosmico-ambient haut perché, que l’on croirait sorti d’un vieux Tangerine Dream, qui fait penser à un vol au dessus d’un océan, lui-même surplombant les nuages… Last but not least, les amusantes ‘Music for Commercials’ qui comme son nom l’indique est une suite de courts instrumentaux commandés par des compagnies publicitaires, amusant dans le contexte mais pas forcément mémorable, si ce n’est pour le côté Nurse With Wound + flûte de pan... Mis les uns dans les autres, cette joyeuse participation à la tristesse du monde est à l’image de l’art brut qui lui sert de couverture : il y en a encore de partout, des psychotropes, des couleurs, des fluides, des sons, des lumières… et au milieu, l’auditeur happé, comme un bleu, dans une formidable spirale de sensations magiques, au sens littéral...

Note : 5/6

Page 92/167 :

Chronique réalisée par Hellman

1967, une année charnière, on ne le répètera jamais assez ; Pink Floyd explore notre psyché avec "The Piper At The Gates of Dawn", Jimi Hendrix nous balance deux albums, "Are You Experienced ?" and "Axis : Bold As Love", jetant les bases d'un hard rock aventureux et inventif, les Beatles, enfin, nous délivrent leur "Sgt.Pepper's Lonely Hearts Club Band" qui va durablement changer notre manière d'appréhender la musique populaire. Tout ça en quelques mois à peine, rendez-vous compte ! Pourquoi tant de noms illustres comme entrée en matière à cette chronique des Moody Blues ? Tout simplement parce qu'on peut difficilement passer sous silence l'influence toute relative de nos cinq britanniques, même si celle-ci fût en quelque sorte plutôt un prolongement de la démarche entreprise par les quatre garçons de Liverpool, et non pas une révolution en soi. L'angle d'approche des Moody Blues va conforter celles et ceux qui croient que la musique pop peut s'élever et, avec elle, élever le débat. Dans cette préciosité des arrangements, et plus particulièrement avec cet album, "Days of Future Passed", l'art des chansonniers se décline en cortège princier, requiem flamboyant, grandiloquence au romantisme exacerbé (le mégatube planétaire "" qui conclut le disque de fort belle manière). Comme les Stones et les Beatles, les Moodies viennent du rhythm'n'blues. Cela fait alors déjà trois ans qu'ils s'échinent à vouloir percer mais décidément la sauce ne prend pas. Le groupe s'accorde alors le temps de la réflexion, puis nous revient avec un projet ambitieux, dans l'air du temps, qui les voit s'associer au chef d'orchestre Peter Knight. C'est le London Festival Orchestra qui va apporter cette touche onirique déterminante, collision jusque là inédite entre classique et musique rock, ouvrant ainsi à la musique pop des autoroutes de possibilités qu'il reste à construire et dans laquelle de nombreuses formations vont venir s'engouffrer, à commencer par le premier King Crimson. Les facettes rock (le très Who "Peak Hour"), psychédéliques ("The Sun Set" d'inspiration indienne) et progressives (la suite "The Afternoon") qui modèleront le visage de la musique mondiale pour les dix prochaines années prennent leur source ici même.

Note : 4/6

Page 93/167 THE MOODY BLUES : In Search of The Lost Chord

Chronique réalisée par Hellman

La quitte ou double de "Days of Future Passed" s'avèra payant. Pour autant, Decca ne fût pas enclin à dégager le budget nécessaire à la reconduction d'une session en compagnie du London Festival Orchestra. La compensation viendra du mellotron de , déjà largement utilisé sur l'album précédent, mais qui prend ici une place prépondérante. Avec l'appui de cet instrument particulier, c'est toute une nouvelle esthétique qui voit le jour. Chez les Moody Blues, la musique pop se recouvre désormais d'une aura brumeuse, à la fois mystérieuse et mystique, charriant avec elle les images d'un passé mythologique, un monde parallèle, en d'autres temps, en d'autres lieux. Un romantisme anglo-saxon qui se nourrit de son folklore et de sa propre culture pour s'inventer un monde où la magie règne en maître ("", "The Actor"). Plus que jamais, place à l'imaginaire. À l'instar de "Their Satanic Majesties Request" des Rolling Stones, "In Search of The Lost Chord" sera surtout l'occasion pour les Moody Blues de se fondre dans le psychédélisme pur et dur, en se mettant à l'épreuve de substances en tout genres. Les délires s'expriment dans la plupart des cas avec pondération, se contentant de simples effets sur le très Floydien "", surgissant par endroits pour créer l'étonnement à défaut de parvenir à réellement simuler un relief, alimentant aussi une énergie rock toujours tapie dans l'ombre ("Ride My See-Saw"). À l'opposé, "" et son refrain étonnant ("Timothy Leary") plaide ouvertement pour sa cause. On le voit, la conceptualisation de "In Search of The Lost Chord", de l'incantation allumée de "Departure" aux effluves orientales de "Om", en transitant même par la farce so british de "Dr.Livingstone, I Presume", est d'un tout autre registre, placé sous le signe de l'expérimentation, mais une expérimentation douce et délicate, toujours sous contrôle.

Note : 4/6

Page 94/167 THE MOODY BLUES : On the Threshold of a Dream

Chronique réalisée par Hellman

L'ambitieuse course entamée par les Moody Blues depuis le coup de poker réussi de "Days of Future Passed" gravit un échelon supplémentaire avec la publication de "On the Threshold of a Dream", titre qui donnera d'ici peu son nom à leur propre label, c'est dire l'importance qu'accorderont les musiciens du groupe à ce nouvel essai... Pourtant, sans vouloir tuer tout suspens, "On the Threshold of a Dream" est un album décevant. Encore tout auréolés du succès rencontré par "Nights In White Satin", les Moody Blues ont quartier libre pour enregistrer un nouveau concept album, cette fois articulé autour du rêve, en investissant le studio pendant deux longs mois. On aurait pu donc s'attendre à des arrangements fouillés, à des pistes démultipliées, à une surabondance de timbres et d'instruments, ne serait-ce que pour se hisser au niveau de la puissance dégagée par un ensemble orchestral, ou encore pour rivaliser avec la diversité d'approche inaugurée sur "In Search of The Lost Chord". Mais il n'en est rien. Exception faite de l'obscure introduction "In The Beginning", la première face de leur quatrième album sonne définitivement rock ! Les guitares reviennent en force sur des titres comme "Lovely to See You", "Send Me No Wine" ou "To Share Our Love". Chassez le démon, il revient au galop : les Moodies semblent vouloir accorder une seconde chance au rhythm'n'blues qui les a vu naître. Mais pour nous passionner, il aurait fallu que leurs chansons aient ce semblant de modernité qui font des "S.F.Sorrow" ou "Parachute" des Pretty Things des disques tout à fait remarquables. Dans sa première partie donc, "On the Threshold of a Dream" sonne complètement démodé. Reste une deuxième face plus contemplative, où les Moodies retrouvent leur bagout pour les belles mélodies, comme l'illustre magistralement leur mini suite "Have You Heard" et son ambitieux passage instrumental intitulé "The Voyage" où les efforts un peu vains, mais tardifs, d'un magnificent mellotron auront bien du mal à renouer totalement avec la féérie de leur univers.

Note : 3/6

Page 95/167 THE MOODY BLUES : To Our Children's Children's Children

Chronique réalisée par Hellman

Souvent, les idées surpassent les capacités réelles de l'être humain. C'est bien en cela qu'on le trouve si ingénieux, car il s'efforce de toujours trouver les moyens pour les exprimer. La voie dans laquelle se sont engagés les Moody Blues depuis leur revirement symphonique sur "Days of Future Passed" n'a été qu'une quête éperdue vers une forme d'absolu, le remodelage permanent d'une sculpture qui peine à s'extraire de cette glaise pour trouver sa forme si pas définitive en tout cas la plus satisfaisante possible. Si l'ambition a toujours été le moteur principam des Moody Blues, "To Our Children's Children's Children" en incarne très certainement le sommet absolu. Mais comme ce fût déjà le cas pour "On The Threshold of a Dream", cela n'en fait pas pour autant un album automatiquement séduisant. Pourtant, contrairement à leur disque précédent, "To Our Children's Children's Children" use et abuse des dernières techniques studio, noyant certaines de leurs compositions derrière des couches successives de montages et de découpages divers qui en limitent l'interprétation. À leur tour, les Moodies découvrent que l'ingénierie technique est le véritable troisième homme du groupe. L'idée que sous-tend l'approche sophistiquée adoptée par les Moody Blues est là, on la devine, mais ils ne sont toujours pas parvenus à trouver le moyen de l'exprimer convenablement. La première partie de l'album est particulièrement confuse : les transitions sont quelques fois brutales, les combinaisons manquent parfois de cohérence, les compositions, d'un abord plutôt direct et efficace, passent la plupart de leur temps à se perdre dans des détournements inutiles ("Out and In"). Comme souvent, les Moody Blues nous réservent le meilleur pour la fin, curieusement quand ils reviennent à des formats qui ne s'embarrassent pas de tant de fioritures ("Sun is Still Shining" et le superbe ""). Difficile, "To Our Children's Children's

Children" fait partie de ces rares disques qui ne peuvent s'apprivoiser que sur la longueur.

Note : 4/6

Page 96/167 THE MOODY BLUES :

Chronique réalisée par Hellman

Le succès a quelque chose de grisant. Mais il induit aussi plus de responsabilités. Imaginez l'embarras de musiciens pris au piège de leur propre orgueil, appelés à donner suite à la forte demande du public en reproduisant sur scène des titres qui ne doivent leur existence qu'aux arrangements élaborés (pour ne pas dire élaborables) en studio uniquement. "A Question of Balance" est fort probablement né de ce besoin des Moody Blues à pouvoir défendre leur matériel sans artifices. Un exercice auquel nos cinq britanniques devraient pouvoir s'en sortir sans trop de dommages pense-t-on. C'est en tout cas ce que laissent entrevoir "Question", puis "How Is It", les deux premières chansons de leur nouvel album. La démarche moins ambitieuse du groupe marque donc une pause dans leur escalade baroque. Les titres se gonflent un peu, semblent prendre plus d'assurance, et suivent une trame linéaire parfaitement balisée, prévisible mais parfaitement crédible. Le peu d'éléments à connotation ouvertement psychédélique se fondent désormais dans l'ensemble sans trop faire de vagues, substituant enfin le détail à l'oeuvre. Tant d'attention portée à contenir leurs penchants pour la démesure ne pouvait rendre la lecture de l'album que d'autant plus facile. Mises à nu, les chansons de "A Question of Balance" permettent, et peut-être pour la toute première fois, de se rendre compte que les Moody Blues, c'est avant tout la somme de cinq fortes personnalités. Tous écrivent, et tous défendent au chant leurs propres compositions, ce qui alimente le prisme des sentiments visités par les Moodies. Mais ce sont Thomas, Hayward et Pinder qui sortent leurs épingles du jeu, véhiculant cette mélancolie caractéristique, avec leurs nuances respectives (Jean-Jaques Goldman se sera largement inspiré du refrain de "Melancholy Man" pour écrire son "Comme Toi"). À côté de cela "Tortoise and The Hare" ou "Minstrel's Song", que l'on doit à Lodge, sont particulièrement pénibles. Tout est question de balance donc, et dans le cas présent, les efforts consentis ne permettent hélas pas d'établir autre chose qu'un statut fortement mitigé, rarement passionnant. La suite, la semaine prochaine...

Note : 2/6

Page 97/167 ATARAXIE : Anhedonie

Chronique réalisée par pokemonslaughter

J'en vois déjà d'ici commencer à râler sur le copinage etc entre chroniqueurs, zicos etc... Et bien pour une fois on va déroger à la règle et pas être tendre avec cet album, quand bien même vous n'êtes pas sans savoir les connivences entre chroniqueurs et groupes. Ouais, c'est pas super intéressant ce que je déblatère là mais cela m'apparaissait nécessaire afin de recadrer certaines choses lues ici et là. Surtout que bon Ataraxie, on peut le dire, il s'agit du chef de file du doom/death en France, et il serait un doux euphémisme que de dire qu'ils étaient attendu au tournant pour ce deuxième album. On passera sur l'aspect "j'ai épluché mon DSM IV de psychiatrie pour faire mes textes" pour s'attaquer à la partie qui nous intéresse le plus. Alors comparé à "Slow transcending agony" ça donne quoi ? Intriguant d'ailleurs cette manie qu'ont beaucoup à comparer les albums entre eux. Parce que justement, "Anhedonie" n'est pas vraiment l'album que l'on attendait comme suite. Attention, je n'ai pas dit que ce disque était mauvais, loin de là, mais soyons honnête je ne m'attendais pas à ça. Je m'explique : Ataraxie évite l'ecueil du "plus mélodique, plus facile", il fallait d'ailleurs s'y attendre avec un leader aussi passioné qu'extremiste concernant le genre. du coup "Anhedonie" se montre comme un disque quasi funeral en fait, ultra extrême, beaucoup moins facile d'approche que son prédecesseur. Certains passages ne seront pas d'ailleurs sans rappeler Funeralium, c'est dire l'approche. On ne plaisante pas ici, et on est pas là non plus pour draguer de la gonzesse. Voilà qui dès les premières écoutes m'a bien rassuré. Seulement, l'inspiration est-elle au rendez vous, parce qu'avec des morceaux toujours plus longs (24 minutes pour "Avide de sens") il y a intérêt à être au top sous peine de se voir oublié illico... ET c'est là que je me distingue de la majorité des gens. Ok, le chant est une nouvelle fois très impressionnant, Marquis n'a plus rien à prouver dans ce domaine, ok la prod' est ultra adaptée, puissante et contrôlée, ok le jeu de batterie se montre fin, varié et inspiré, mais pour autant, je trouve de nombreuses longueurs dans cet album. Ben ouais, et c'est pas faute d'avoir essayé encore et encore. Les responsables ? Un "silence of death" qui traîne qui traîne... Et c'est d'autant plus dommage qu'avec cette montée sympa avec les roulements ça aurait pu vraiment donner quelque chose d'énorme, mais malheureusement, cette montée ne donne rien... Pour autant, le morceau se montre quand même super étouffant et lourd, mais je ne sais pas, il manque quelque chose pour moi. Idem pour "Avide de sens", vraiment beaucoup trop longue et répétitive, la faute à un riff principal répété 12000 fois franchement pas terrible. Ici encore, la lente montée se révèle très sympa, mais s'il faut se farcir 10 minutes de riffs chiants avant... Le groupe joue de plus en plus sur le gros gimmick "lacher d'accord sur mega gros son", et cela se révèle à double tranchant. J'entends par là que je peux trouver cela énorme par moment, et chiant façon "il se passe rien bordel" à d'autres, et pourtant , je le répète, je suis fondu du genre, je pense que tout le monde le sait hein. Et de fait, sur un morceau comme "walking through the land of falsity" le résultat se montre vraiment énorme. Bon sang ce morceau est comme déjà mort, d'une lourdeur rare, et réellement glaçant, tout en lachers d'accord lentissimes et autres larsens. Vraiment impressionnant. Et le groupe élève encore plus le niveau d'ailleurs avec le morceau titre, sans problème meilleure réalisation du groupe, qui allie enfin riffs death inspirés (ce n'est pas toujous le cas) et ralentissements doom absolument édifiants. Le genre de riff de ceux qui font battre le coeur fort et taper du poing sur le col. Clairement à mon sens un standard du genre, il y a tout dans ce morceau. Et du coup le contraste avec les morceaux "à problèmes" sus-cités ne s'en ressent que plus encore. Constat mitigé donc pour un album qui a été clairement réfléchi, pensé et qui pour une fois va à contre

Page 98/167 courant du sens commun. Plus lent, plus extrême, plus méchant, rien que ça force le respect... Et puis croyez-moi, en concert c'est à voir au moins une fois.

Note : 4/6

Page 99/167 THE ORGAN : Thieves

Chronique réalisée par Twilight

Moi qui croyait The Organ séparées...Ah ben si, elles le sont bien...Mais alors ? C'est quoi ce nouveau mini (car c'en est bien un) ? Il semblerait que les filles se soient retrouvées en studio histoire de finaliser des titres inachevés prévus pour l'après 'Grab that gun'. Tant mieux, parce que si ça n'enlève rien à la douleur de leur disparition, au moins celà nous laisse quelques morceaux supplémentaires pour nous plonger dans ce spleen si particulier dont The Organ a le secret. Rien que pour 'Even in the night', cette sortie valait la peine: un petit orgue feutré et triste, des arrangements dépouillés et cette voix, cette merveilleuse voix de Katie Sketch (qui produit d'ailleurs ce disque)...Je sais l'avoir dit à plusieurs reprises mais je suis tout de même à chaque fois impressionné, Katie est le pendant féminin de Morrissey...Ecoutez donc 'Oh what a feeling' ou 'Let the bells ring', ce timbre tellement empli d'une mélancolie simple; ça vous fiche le blues, un blues délicieux dans lequel on se glisse et qu'importe cette petite larme qui danse au bord de l'oeil. Merci pour ce dernier cadeau et si un jour l'idée de rejouer ensemble vous tenaille, n'hésitez pas trop.

Note : 5/6

Page 100/167 HIEROPHANT : The tome

Chronique réalisée par pokemonslaughter

Bon, si on parlait des bas fond du doom extrême ? Histoire de voir si ça sent encore plus mauvais qu'en surface, et si cthulhu possède réellement 8 phallus ? Histoire de remettre en cause un peu les affabulations de notre saïmone bien aimé. Enfin bon je dis ça, huit bites ça peut être cool, mais si elles sont à l'image de hierophant, bon courage mesdames les Grandes Anciennes ! Ouais, Hierophant... Ouais, ouais ouais.. hum. Bon bah c'est naze, tout simplement. il s'agit en fait d'un one man band américain, qui a fait son trou dans le milieu, notamment en devenant par la suite Catacombs qui a sorti récemment un "in the depths of R'lyeh" plutôt sympa. Mais soyons clair, Hierophant, un peu comme le type sur le forum, cela n'a strictement aucun intérêt. Du funeral doom ultra basique, qui réduit le style à sa plus simple forme : une mélodie lugubre à 3 notes pendant 10 minutes, trois accods de fond, batterie pachydermique... Le son évidemment bien pourri, les instruments carrément pas ensemble, le grognement sourd et inintelligible ... Ouais, ouais... Bah le truc c'est qu'on se fait carrément chier en fait. Pourtant l'ambiance est là c'est clair, les harmonies trouvées, toutes en oppositions son clair à la evoken/rythmiques ultra saturées, dégagent quelque chose de réellement froid, mais le ptit gars ne maitrise absolument pas la recette du 2 riffs/15 minutes. Résultat : mophine attack, c'est le bad trip du mauvais disque "putain mais c'est quand qu'il se passe quelque chose ?".. Jamais. Et le pire c'est que sur ce cd, il a y a les deux premières démos, qui sont faites des mêmes morceaux. Deux fois le même calvaire, l'horreur ! D'autant plus con que la démo "Autumn dusk" se montre un peu plus réussie, mais cela ne rattrape pas le désastre juste avant. Typique des funeral black/doom bands myspace-iens, et avec 10 ans d'avance ! J'ai envie dire, la classe. Bref, un disque chiant, c'est tout. C'est poisseux, c'est froid mais c'est aussi super pourri. Allez poubelle. (vous noterez par ailleurs qu'aucun jeu de mot n'aura été fait sur le titre de cette compil', mais je laisse les commentaires pour ceci bien entendu)

Note : 2/6

Page 101/167 BESTIAL WARLUST : Vengeance war 'till death

Chronique réalisée par pokemonslaughter

ahah ce bodel ultime que c'est ce groupe ! Je vois d'ici la gueule de certains gutsiens, toujours à la recherche du truc le plus hype/déglingué qui soit. Vous savez ce genre de types qui à force de refuser la mode, finit par en suivre une autre qui a juste pour particularité de se déclamer différente. Bref, passons. Parce que ce premier album de Bestial Warlust, c'est un peu ce genre de trucs élitistes justement. J'entends par là que putain c'est vraiment le bronx, et qu'il faut s'en être enfilé des saloperies pour bien cerner où le groupe veut en venir, et en percevoir la réelle brutalité. De la musique qui ne peut être perçue que lorsqu'on est déjà bien atteint du bulbe en quelque sorte. Parce que pendant les 30 minutes de "Vengeance war till death", on va en prendre plein la gueule. Et du pas fin ! Du satanik war metal qu'ils appellent ça. Il est vrai qu'avec des futurs Destroyer 666 et gospel of the Horns cetaines choses s'expliquent. Cet aspect totalement jusqu'au-boutiste notamment. Du blast complètement boeuf pas carré et "frappé", des guitares dont on discerne à peine les riffs, qui se noient l'une dans l'autre, des riffs "über evil" quasi incompréhensibles aux premières écoutes, des structures qui n'ont de structurées que le nom, des solos qui partent en couillesn et puis surtout.. ce chant, qui braille à tout va, n'importe quand, avec un timbre super satanique. Tiens le mot est laché, satanique. C'est un peu le truc qui change tout sur cet album : il y a quelque chose de définitivement noir ici, quelque chose qui dérangerait presque. Tout est sale, dégueulasse, complètement possédé (la voix !), "necro" pour reprendre les termes en vogue. Lorsque le groupe ralentit le tempo, il en devient presque incantatoire (aaah le démarrage de "Satanic"), lorsqu'il bourrine (95% du temps) c'est l'enfer, recouvert d'un aspect "non contrôlé" qui leur confère un aspect quasi grind. Le genre d'atmosphère "souffrée" que je n'ai retrouvé que dans quelques vieux albums de black, ou sur le deuxième Angel corpse par exemple. Pour le reste, je crois que bon nombre d'entre vous n'y verront que du bruit, et une grose hype autour de ce genre de groupes capables de nous faire passer des vessies pour des lanternes. Peut-être ! Toujours est-il que ce disque je me le suis enquillé à fond hier soir, et j'ai carrément pris mon pied ! Et ça, ça ne trompe pas. Bière, sueur, satan et death metal bordel ! Un groupe qui porte vraiment bien son nom ! Bestial satanik war metal qu'ils appellent ça. Ouais...

Note : 4/6

Page 102/167 COIL : presents Black Light District - A Thousand Lights in a Darkened Room

Chronique réalisée par Wotzenknecht

La chambre d'écho. Je n'avais plus que ces mots en bouche en ce mémorable weekend de psychonautisme où la cueillette de l'un faisait le voyage des autres. Et s'il y a une chose sur lequel nous sommes tous tombés d'accord, c'est que lorsque les murs ont la fâcheuse tendance à se transformer en accordéons, mieux vaut éviter de s'isoler dans une pièce, ornée d'un miroir qui plus est. Coil, sous l'appellation Black Light District, nous fait revivre l'expérience des drogues hallucinogènes prises dans un espace clos. Ce n'est ni un voyage astral, ni – à l'instar de – un simulacre d'enthéogènes sous forme auditive : c'est plutôt l'effet qui est ici diablement bien retranscrit. Comme le personnage de la pochette, on est invités à se démultiplier pour pénétrer à l'intérieur du mur, pour un trip horizontal, pas effrayant mais pas rassurant, dans une chambre d'écho devenu hypertore. Une description pleinement consciente me ferait dire que l'introduction est un petit hommage à John Cage, que 'Red Skeletons' ressemble à du Scanner (d'ailleurs cité dans les remerciements) ou du cEvin Key, je dirai aussi que 'Die Wölfe Kommen Zurück' rappelle furieusement '' ; mais de vous à moi, est-ce bien pertinent de décrire des trucs aussi camés, subliminaux que 'Green Water', ou oser aborder le claustrophobique et pétrifiant 'Cold Dream of an Earth Star' ? John est là, il parle par moments comme pour s'assurer que nous sommes toujours sous contrôle, puis il nous laisse à nouveau choir seul dans la spirale silencieuse que notre cerveau se déroule en guise de tapis rouge. A la frontière du bad trip, Black Light District a la gentillesse de nous quitter avec le presque new-age '' pour nous éviter de chuter plus loin dans la 'darkened room'. Complètement halluciné donc, ce disque qui se fait passer pour de l'ambient mais qui n'est autre qu'un des meilleurs pièges silencieux qu'il m'ait été donné d'entendre. Pour terminer par une phrase de sagesse entendue au sortir de cette état liminal : « La destination du voyage n'appartient qu'à toi ».

Note : 5/6

Page 103/167 CANDLEMASS : From the 13th sun

Chronique réalisée par pokemonslaughter

'Tain je le sentai venir déjà sur l'album d'avant, mais là ça se confirme, plus qu'à se laisser pousser la moustache (ça a déjà été fait en plus) et Candlemass devient un cover band de . Non parce que sur cet album là, c'est vraiment euh.. direct quoi. C'est quasiment du mimétisme parfois, notamment Flodkvist qui imite à merveille Ozzy, tant dans son timbre que dans se sintonations. Niveaux riffs c'est pareil, tout le monde connait. Du gros riff note à note, lourd, groovy, lourd, parfois inquiétant ("Tot") voire carrément psyché ("Blumma apt"), rien que du classique finalement, rien qu'on ait pas vraiment déjà entendu finalement... Sauf qu'ici c'est de Candlemass qu'il s'agit, et le Leif a bien compris comment faire sonner ces riffs. Quand Candlemass pastiche le grand Sabb' il le fait bien, aussi simple que ça. Surtout dans la première moitié de l'album avec le super énergique "Elephant star" qui ferait groover un mort. En plus de ça, affublé d'une prod' dantesque, avec un son de guitare bien crunchy et graveleux et quelques experimentations "de l'espace", l'album se laisse écouter tranquillement finalement. Je regretterai juste que le groupe ne soit pas allé plus loin dans ce domaine et que le disque ne se révèle finalement pas assez profond en termes d'ambiances. Je veux dire, un morceau comme "Galatea" aurait mérité d'être plus poussé avec ses ambiances feutrées en son clair. De même pour les sons "spatiaux" déjà utilisés auparavant. Mais après un "" complètement décousu, celui-ci parait déjà plus homogène. Bref je crois qu'avec le terme "Sabbathien" tout est résumé ici, difficile d'aller plus loin niveau vocabulaire concernant ce disque. Plaisant au final, mais à son écoute, on se remet à penser au Candlemass épique et on ne peut s'empêcher de penser que bien que le groupe soit toujours

à un très bon niveau quand il donne dans le doom trad'... C'était mieux avant.

Note : 4/6

Page 104/167 NIELSEN (1865-1931) (Carl) : Symphonie n°3

Chronique réalisée par Sheer-khan

J'ai pour l'oeuvre du danois Carl Nielsen une passion absolue. J'aime cet homme, j'aime sa musique. Plus qu'une autre, elle incarne avec une personnalité profonde, complète et indomptable, la beauté en musique. Une oeuvre qui ne ressemble qu'à elle-même, et dont j'ai déjà et modestement tenté d'évoquer les particularités et identités, dans la chronique des pièces pour piano. Je le disais alors : ce qui vaut pour ses pièces solistes vaut pour ses symphonies; cette troisième, "espansiva", n'est qu'espaces, émotions et nuages, aussi largement romantique et mélodieuse que foncièrement plastique; une immense demi-heure de vagues et de contrastes, de merveilles d'acoustique pur et d'instants mélodiques superbes. Nielsen est un compositeur à part. Entre héritage et liberté, classicisme et abstraction, il développa une oeuvre puissante et singulière, où s'exprime un sens mélodique aussi original que saisissant. Si ses 3 dernières symphonies (4,5 et 6) sont marquées par l'expression dramatique et tragique, "Sinfonia espansiva" est une sorte de culminance héroïque, largement tempérée par des balancements tour à tour

Page 105/167 mélancoliques, pastoraux voire diaphanes. Très porté sur les cordes, le danois utilise l'orchestre comme une pâte acoustique homogène dont il travaille la matière et les nuances avec souplesse et dextérité. Boisé, subtil, organique, l'orchestre de

Carl Nielsen joue sur les voiles et les épaisseurs des altos, violons et violoncelles pour habiller l'espace avec profondeur, avant d'en détacher des lignes indociles de hautbois ou de flûte qui détaillent le mouvement permanent des harmonies de cordes. Régulièrement emportée par la force des cuivres et plombée de lourdes timbales, la musique du danois oscille entre les bourrasques terrestres et les territoires harmoniques et sonores les plus éthérés. Le premier mouvement en est une formidable démonstration. Dans une virtuosité rythmique remarquable, "allegro espansivo" se déroule en successions d'élans épiques et puissamment inspirés et de tensions soudainement silencieuses, entretenues au loin par le sifflement des cordes, inquiétées d'une flûte, clarinette, ou violon soliste.

Eclats de cuivres, apothéoses harmoniques, optimisme et tourments, Nielsen enchaîne les accès massifs et les plongées de silence, les thèmes germaniques et les neiges mélodiques slaves; un tourbillon changeant de thèmes marqués, puissamment évocateurs, et de havres suspendus, mystérieux et hantés. Le murmure. Le bruit.

L'horizon. L'orage. Avec en son coeur l'explosion d'un des thèmes les plus marquants du genre, véritable déclamation romantique, tragique et raffinée, construit en réponses entre trompettes et trombones, "Allegro espansivo" réussit à malmener sans jamais tomber dans l'agression, par sa virtuosité flamboyante et sa pratique incessante du contraste. A l'opposée de cette versatilité dynamique, "Andante pastorale" est une des pièces les

Page 106/167 plus sublimes et essentielles du compositeur danois; un authentique moment d'exception. Minimal, vibrant, le long mouvement installe une gravité lente et neutre, à l'aide de cors austères qui tapissent le silence en un lourd balancier; un léger coup de timbale marque l'arrivée des flûte, hautbois et clarinette, puis le glissement saillant des cordes imprègne l'austérité d'une tristesse plus palpable. Aérien et mélancolique, neigeux, Tchaïkovskien, l'andante finit par s'élever au celeste absolu avec l'entrée des voix : une vocalise angélique dont l'apparition illumine l'espace sonore dans un accomplissement de pureté mélodique saisissant, et dont les frissons ne vous quitteront plus jamais. Offert comme accomplissement au coeur d'un andante mélancolique, ce stupéfiant moment d'élévation à l'acoustique cotonneuse et irisée est ainsi décrit par l'auteur lui-même : " deux voix créant une atmosphère extrêmement tranquille de bonheur paradisiaque". Nous sommes en 1910 et Nielsen y impose une écriture minimaliste à la portée émotionnelle irradiante, dont le Gorecki de la symphonie n°3 ne sera qu'un héritier parmi d'autres. Oeuvre de basculement vers la maturité, la symphonie n°3 de Nielsen montre cette rencontre magnifique entre culture de l'harmonie classique, et cette liberté virtuose et magistrale vers laquelle avance l'étonnant compositeur. Une pièce à la beauté stupéfiante, merveilleuse alchimie de douceurs, d'éclats, de classicisme, de romantisme et de pures atmosphères,

de brises froides, de coton, et d'aurores boréales.

Note : 6/6

Page 107/167 COMPILATIONS - TRIBUTE ALBUMS : Expositions - a tribute to Charles de Goal

Chronique réalisée par Twilight

Un hommage à Charles de Goal ? Quelle bonne idée. C'est vrai, pourquoi toujours s'en tenir aux artiste internationaux ? C'est d'autant plus justifié que Charles de Goal revient sur le devant de la scène avec un album dopé au punk et qu'il est indéniable que voilà un groupe qui n'a pas eu le succès qu'il méritait (encore un) à l'époque malgré un potentiel certain. Des thèmes trop dérangeants ? Une absence de compromis ? Qu'importe. Voilà donc 'Expositions' et je confesse d'emblée de pas connaître la moitié des formations ici présentes. J'attaque avec mon coup de coeur, mes Tchiki Boum chéris (qu'est-ce qu'ils attendent pour sortir un disque ceux-là) qui nous proposent une version post punk sombre d'un de mes titres favoris, 'Face/coma'; subtile ironie, les musiciens se placent du côté des bourreaux et non de la victime comme dans l'original, d'où un côté cruel un peu festif presque flippant. Toujours dans la voie gothique, une bonne version électrique de 'Frederic' par Trouble Fait', une interprétation réussie de 'Retour au dancing' par No Tears qui enveloppent la chanson de leur feeling cold wave si particulier pour lui conférer un spleen nocturne vraiment efficace. J'étais surpris et content de trouver ici les exilés israéliens de Sophya mais force est d'admettre que leurs deux participations sonnent hélas plutôt hors de propos, qu'il s'agisse de la version ralentie, ennuyeuse, de 'Technicolor' ou de 'Plus haut' en compagnie de Dirk Polak (Mecano), assez sympa musicalement mais desservie par le français légèrement approximatif des artistes. Pas de souci pour Guerre Froide qui reste très proche de l'esprit Charles de Goal mais s'en sort bien. Parmi les découvertes, je citerais Raendom et son punk synthétique, à la fois pêchu et désincarné, la cold wave de Dorcel, 'Missiles a&b' version punk made in Viande Froide, miam ! Pour le reste, il y a de bonnes choses mais qui restent souvent trop proches des originaux ('Rorsach garden', Die Perlen'). Un peu de mal avec Martin Angor un peu trop chanson française à mon goût ou le punk 'boîte à rythmes' de Copine Connie et même avec Synapscape (initiative audacieuse certes mais je ne croche pas). A noter qu'on trouve encore trois titres en piste CD-ROM (j'ai une faiblesse particulière pour Femme Fatale et son 'Frederic' froid et synthétique). Une belle initiative donc qui permet de promouvoir de jeunes talents tout en rendant justice au vieux briscard

Charles de Goal. 4,5/6

Note : 4/6

Page 108/167 XXX ATOMIC TOEJAM : A Gathering of Tribes for the Last Human Be/In

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Première et dernière incursion de Cold Meat dans le cyberespace-digitech-trancecore-post-industrial-old-school-Skinny-Line-Assembly-242-TVT-waxtrax-1989-poch ettesimmondes-style, XXX Atomic Toejam, formé de Peter Marklund (Memorandum) et Fredrik Thordendal (Meshuggah), et confiant après la réussite de l'unique single de sa première nomenclature (Sephulcre Inc.) nous offre deux titres bien croustillants remplis de samples de drogués, de tech-trance vulgos, de guitares chugga-chugga et de grosses voix de méchants. Dur d'aller plus loin dans la description vu la durée de l'EP : un titre plus rentre dedans, l'autre plus lancinant ; reste qu'on aurait bien aimé que l'album annoncé par Karmanik voit le jour (je ne résiste pas à vous mettre son titre, ce qui me permet de rallonger cette misérable chronique : 'mindPULSE; phantasy-phase #1; Marilyn Chambers eating Helena Russel behind the green door in space 1999'), au lieu de cela on se contentera d'un autre titre sur la compilation Karmanik Collection et de la participation de Thordendal sur un remix qui clôt 'Ars Moriendi', rétrospective elle-même bouclant

Memorandum.

Note : 3/6

Page 109/167 CHRISTIAN DEATH : Zero sex

Chronique réalisée par Twilight

Un single dégotté d'occasion...Le premier titre, 'Zero sex', plutôt bon, assez typique du Christian Death de la période 'Sex, drugs and Jesus Christ', un deathrock assez lourd mais plutôt bien travaillé; basses grondante, guitares malsaines, un jeu de batterie développé couplant roulements et percussions plus exotiques (selon les crédits, Valor s'y serait collé...chapeau) et les choeurs de Gitane en arrière-fond. Le second, 'The nascent virion' poursuit les interrogations de Valor sur les questions du sexe, du sida...Même atmosphère sombre, même technique percussive, une mélodie un brin moins efficace mais prenante néanmoins; un bon single destiné à ceux qui apprécient le Christian Death de 'Church of no return' ou 'This is heresy'.

Note : 4/6

Page 110/167 CRETIN : Freakery

Chronique réalisée par pokemonslaughter

Bordel quand j'ai vu ce cd à Gibert, direct je me suis dit "putain celui-là, avec un nom pareil il est pour moi". C'est marrant ce genre d'achats compulsifs quand même. Pas entendu une seule note de ce groupe, je savais juste que c'était du grind, et plaf le détail qui tue (en l'occurence un nom qui déboite) et j'achète. Société de consommation bla bla blaaaaah. en plus, il a un autre truc super classe ce groupe, c'est le premier groupe de metal extrême à avoir un chanteur qui va changer de nom sur le prochain album. Ici c'est Dan martinez. sur le prochain ça sera Marissa (qui pète le heu ahah, hum). Ouais si vous avez pas pigé, le beugleur qui officie sur cet album, est devenu le premier transsexuel du metal extrême. Moi je dis, quand on écoute "Freakery", ça fait bizarre. Genre Barney Greenway qui serait gay... M'enfin moi je dis pourquoi pas ? Y a juste des photos où on voit l'homme/femme un coup moustachu, l'autre coup euh "déguisé" en femme en train de faire la chaudasse pendant un concert de Repulsion, on a juste du mal à y croire... bon, tout ça pour caser le mot Repulsion dans la chro. Parce que je pourrai le caser à chaque ligne en fait. Cretin ne s'en cache pas, ils aiment Repulsion ça s'entend et ils ne comptent pas franchement changer d'optique. voilà je crois que tout est dit, c'est du Repulsion avec une prod' bien carton, et un batteur qui bourre encore plus (en même temps Col Jones était pas réputé être jazzy dans Exhumed). Résultat ? Ca poutre ça mes bons amis ! Trois riffs par chansons, alternances blasts/rythmes up tempos punky, du chant craché exactement comme dans Repulsion, et ma foi c'est très bon. On s'en lasse naturellement assez vite, par manque de vraies surprises ou d'inspiration particulière, il fallait s'y attendre quand on est aussi clivé dans le style créé par un seul groupe. Les enchainements d'accord sont bons sans casser la barraque, on sent les types qui aiment envoyer du bois, mais il manque la grosse folie. Du grind old school de bonne qualité néanmoins, avec un son idéal entre crade et puissance qui rappelera sans surprises également Terrorizer ou le vieux Napalm Death... On notera également quelques gros solos "je fais n'importe quoi comme dans Slayer la classe en moins, mais ça sonne quand même parce qu'on fait du grind" (ouf !), qui font leur petits effets comme sur le premier Carcass. Pour le reste, ben je crois que j'ai tout dit, sans surprises, mais plutôt efficace et puis des skeuds de ce genre moi j'en redemande, bêtement.

Note : 4/6

Page 111/167 THE UNITED STATES OF AMERICA : The united states of america

Chronique réalisée par dariev stands

C’est en lisant une interview de John Carpenter que je fus intrigué pour la première fois par l’existence de ce groupe. Il y présentait The United States Of America comme l’un des groupes les plus bizarres jamais enfantés par le mouvement psychédélique… New York oblige, ces derniers n’en faisaient pas totalement partie. Tout comme les Silver Apples ou le Velvet Underground (aux côtés desquels ils joueront au Boston Tea Party en 68), les USA se réclamaient de l’avant-garde (terme qui prenait vraiment son sens ici) de New York - son leader Joseph Byrd ayant été l’élève de John Cage – et jouissaient d’une liberté indéfectible dans leur musique comme dans leurs textes. C’est bien simple : un tel disque serait inimaginable aujourd’hui. Trop cruel, trop fourbe, trop choquant… Cet album, c’est une sarbacane aux flèches imbibées d’ayahuesca rangée dans un fourreau de velours. Une sirène aux atours pop qui vous attire dans son antre pour mieux vous dépuceler de votre naïveté de petit ricain à coup d’expérimentations brutales et de stridences sournoisement déguisées en effet psychédéliques à la mode. Premier élément perturbant : la schizophrénie de la face A : la comptine éthérée Cloud Song succède au jerk fuzzé aride et dissonant Hard Coming Love, lui-même succédant à l’exhibition des horreurs de The American Metaphysical Circus, mise en bouche révélatrice de l’incroyable cruauté de Joseph Byrd, le leader du groupe. Tout, de l’arrangement invraisemblable à la basse grouillante en passant par les effets métalliques sur la voix de la chanteuse, semble avoir 30 ans d’avance. Il faut réaliser qu’un groupe comme Broadcast, fleuron du label Warp de la fin des années 90, aura calqué toute son œuvre sur ce seul morceau. Tendez l’oreille, car derrière le chant, c’est de l’indus avant la lettre qui se cache, développant un crescendo de monstruosités sonores. The Garden Of Earthly Delights est une chanson incroyable, troublante et poétique, à ranger entre Baudelaire et une version garage et crue du Jefferson Airplane. Les paroles sont une ode à la beauté mortelle des femmes, chantées sur une tuante mélodie : "Choleric fruit, deadly to eat…. You will find them in her eyes". Bien entendu, à l’élégance mortelle de la voix de Dorothy Moskowitz succède un tout autre tableau, contrastant avec le précédent : Joseph Byrd y campe, sur fond de bidouillages soniques et de fanfare de cirque, un personnage nauséabond expliquant d’un ton désinvolte à sa maîtresse SM (la femme fatale du morceau d’avant ?) qu’il ne quittera pas sa femme pour lui, ni sa belle villa et son yorkshire terrier. La face B, plutôt que de s’ouvrir sur une fête foraine suicidaire, se dévoile sur des chants grégoriens totalement surréalistes dans ce contexte, tétanisant l’auditeur avant une bonne grosse dissonance de cordes introduisant Where is Yesterday, réflexion d’une rare intelligence sur les changements drastiques des années 60. On sent la volonté du groupe de tout raconter, de ne rien censurer, comme s’ils avaient conscience que ce ne serait plus possible par la suite. "Shadows on the pavement but no bodies do you find" chante Gordon Marron. La voix est juvénile mais anxieuse, en décalage avec la candeur de l’époque, qui s’est ici salement fait la malle. C’est la contemplation de l’horreur dans toute son entièreté et son dérisoire que nous propose le groupe… L’étape d’avant le post-modernisme, réaction de refoulement compréhensible devant tant de questions sans réponses. Dès la plage suivante, le schéma de la face A semble se répéter, un tube yé-yé perverti par Dorothy Moskowitz vient souffler les interrogations de la chanson précédente dans l’air du temps et dans les drogues, avant qu’une deuxième Cloud Song n’apparaisse, Love song for the dead Che et ses amants évanouis dans la nature, en proie à un spleen baroque digne des grands noms de la pop orchestrale. Si Moskowitz est la Nico du groupe, cantatrice européenne aux sous-entendus érotiques, et Byrd son Lou Reed, infatigable scruteur des

Page 112/167 névroses sexuelles des riches, Gordon Marron est définitivement sa Moe Tucker. Son Stranded in Time est à première vue une bluette pop proche de Polnareff. Encore une fois, un coup d’œil sur les paroles fera déchanter, et donnera tout son sens à ces violoncelles nostalgiques. Car Marron est aussi le John Cale de la bande, avec ses violons malaxés par le "tape echo" et les amplificateurs. L’absence de transition avec le retour de Joseph Byrd et de ses histoires de supermarché du sexe et de la torture est d’autant plus abrupte. On retrouve ici son cynisme et sa cruauté à dépeindre le glauque de l’amérique des adultes, que l’on retrouvera plus tard chez Mike Patton. La fin du disque achève tout espoir de rédemption et toute innocence : California Good-Time Music porte une dernière pique fumante et caustique à la pop californienne tant honnie par les New Yorkais (dans un pastiche digne du Aphex Twin de Windowlicker), puis Love is All vient nous secouer une dernière fois les puces, pauvres hippies attardés que nous sommes, avant de basculer dans un tourbillon polyphonique de résidus sonores picorés sur tout l’album… Ce n’est pas vraiment un medley, plutôt un cut-up frénétique de samples de chacune des chansons du disque, faisant ressortir l’humour et la malice de la formation, tout en appuyant, preuves à l’appui, la théorie exposée dans Coming Down : "Reality is only temporary.". Et en effet, le petit exercice de mémoire entraîné par ce medley permet de le vérifier. Qu’est-ce qu’il nous reste dans la tête, finalement, au bout du compte ? Des souvenirs épars, sans cohérence, sans comparaison avec la beauté du disque, qui ne nous aura frappés que le temps du saphir parcourant le sillon. L’un des rares disques nocifs et dérangeants des années 60 qui n’ai rien perdu de sa force aujourd’hui, à ne pas écouter en boucle.

Note : 6/6

Page 113/167 NECROVATION : Breed deadness blood

Chronique réalisée par pokemonslaughter

Bon après le death "pour tout le monde" façon bloodbath, on peut peut-être s'attaquer à un truc d'hommes, de vrais, un truc sale bien dégueu et qui pue bien l'underground non ? Bon ! vous vous souvenez la chro de Repugnant ? Et bien avec Necrovation vous avez un peu le frère jumeau. sortis à peu près en même temps, ces deux albums sont un peu la preuve que le death old school avait encore quelques trucs à dire ces temps-ci. Enfin quelque chose à dire, il n'y a rien de révolutionnaire ici, mais l'écoute de cet album procure des putains de sensations qui rappellent à quel point le style peut être bandant. Necrovation, ça speede, ça bastonne, c'est débile, méchant, direct et sans fioritures, du death, du vrai. Jusque là rien qui différencie vraiment des autres, si ce n'est qu'en terme de compos et d'atmosphère, Necrovation possède définitivement sa propre touche. Ce côté raw, méchant, sans concession qui renvoie immédiatement à la scène death suèdoise de la fin des années 80. J'entends par là la période des démos des futurs ténors du genre. Ici on pense plus à Carnage, Nihilist, Convulse qu'à leur suite plus "chiadé" on dira. Sauf qu'ici Necrovation possède un son qui décape méchamment : batterie qui claque, guitares incisives, sombres, basse en travail de sape (s'entend par là, audible), et chant bien ultra réverbéré comme un certain Matti kärki au temps de Carnage. Pas de fioritures ici, pas de mélodies à la con, non on est plus dans le paradis du tremolo et de la power chord vicieusement placée. Plus direct donc que Repugnant, Necrovation n'en demeure pas pour autant dénué de toute finesse, certains riffs se montrent vraiment vicieux, bien trouvés et réfléchis. Pour le reste hein, faut s'accrocher pour vraiment différencier les morceaux entre eux soyons honnête, mais quel plaisir de se prendre ces 9 morceaux dans la gueule, ça aboie, ca file comme l'éclair avec son lot de breaks et accélérations qui filent le frisson.

Définitivement l'un des rares disques du "renouveau old schol" qui vaille vraiment le coup.

Note : 5/6

Page 114/167 BLOODBATH : Resurrection through carnage

Chronique réalisée par pokemonslaughter

Il fallait bien que j'y passe.. Pas que le premier maxi "breeding death" m'ait réellement transcendé, mais les nombreuses éloges et t-shirts en concert ont fini par me convaincre d'aller donc acheter un album de ce fameux "super groupe" qui selon les dires de certains se révèle être Le groupe de death old school actuel. Mouais. c'est fou comment on peut s'enfermer dans ses propres dogmes et demeurer hermétique à tout autre vie. Alors bon, allez hop, je me choppe le premier album, on verra bien ce que ça donne. Première surprise : le son, pas terrible du tout ! Enfin, non ce n'est pas exactement ça, l'album souffre beaucoup de ce son de batterie "en mousse". Bon sang c'est du death metal oui ou non ? C'est quoi ce tic tic tout poussif ? Quel gachis ! Car il faut bien le dire, niveau riffs il y a de l'idée. Ceci étant dit, Bloodbath donne en réalité plus dans le dark/death que dans l'old school pur et dur. Je ne sais pas si c'est l'influence de Nyström et ses autres groupes mais je ne m'attendais pas à ces leads sombres et breaks limite black... On pense bien evidemment à Grave ("So you die") en bien plus complexe, Entombed ou du vieux Hypocrisy naturellement mais Bloodbath se distingue par ses riffs un peu plus chiadés que la moyenne du genre, son étonnante diversité au sein des morceaux : il y a du mid tempo, du grand ralentissement, des traditionnelles et nombreuses rythmiques typiques du death suèdois, quelques blasts... Les morceaux se révèlent plutot finement construits, avec quelques refrains death plutot efficaces, mais pfff... Ils sont où les breaks qui tuent, les riffs assassins que l'on retrouve si nombreux chez ses idoles ? J'entends par là qu'au delà de la qualité indéniable de chacune de ces compos, faites par des types qui savent composer un morceau c'est on ne peut plus évident, ceux-ci ne font que rappeler certaines de leurs influences ou bien ne font que poudre aux yeux (les leads darks). Désolé, il s'agit bel et bien de resenti subjectif mais malgré toute cette dose de violence, à part un ou deux morceaux ("Death delirium", "Cry my name","Bathe in blood" assez mortelle) mais pour moi Bloodbath manque cruellement d'efficacité. Pas assez de riffs directs, de hargne.. On sent l'hommage plus que le truc vécu à 200%. D'autant plus rageant que bon sang, les morceaux suscités démontent vraiment. Pour autant ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, voici clairement un bon album, peut-être un peu surestimé mais dont le succès ne m'étonne finalement plus tant que ça maintenant.

Contrat rempli ?

Note : 4/6

Page 115/167 SACRIFICE : Torment in fire

Chronique réalisée par pokemonslaughter

Il y a des fois, on se demande finalement qui est le précurseur et qui est le suiveur. Je veux dire, on s'en contrebranle un peu du moment que c'est bon, mais il y a des groupes super anciens qui se révèlent complètement actuels, et d'autres nouveautés qui sonnent déjà vieilles. Question de perception peut-être mais quand on y réfléchit, c'est parfois étrange. C'est vrai quoi, pourquoi j'ai envie de dire que Razor sonne vieux, et que Sacrifice sonne encore ultra actuel, alors que finalement à l'époque ce n'était pas si éloigné... Enfin bref, replaçons le contexte. Nous sommes en 1984, Slayer n'a pas encore srti son "Hell awaits" et une jeune bande de canadiens vient se poser comme le groupe de thrash le plus "bastos" du moment. Et il y a franchement de quoi ! Vous cherchiez le chainon manquant entre le premier Slayer et un bon vieux "Reign in blood" ? N'allez pas plus loin ! Disque finalement majeur du genre, injustement sous-estimé/oublié, "Torment in fire" est une petite perle de fureur totalement incontrôlé. Alors tous les poncifs du genre, mais rappelez vous le contexte... Du gros riff thrashy en veux tu en voilà, non sans rappeler les futurs Sepultura, Slayer bien entendu, mais aussi Venom, Razor et autres Possessed. vous êtes fixé niveau référence ? Ambiance bien "evil" à base de gros solos qui partent dans tous les sens, de rythmiques ultra véloces, de parties de doubles qui rappellent étrangement celles de Dave Lombardo et d'un chant absolument possédé. Bon sang, ça hurle, on est pas loin du black metal par moment. absolument incontrôlé le truc en fait. Ca bastonne à tout va, plaf cymbales bloqués, pan pan pan, un cri et c'est parti à fond les ballons. On sent une certaine urgence, les caandiens envoient leur bois et n'ont rien à foutre du reste, c'est peut-être d'ailleurs cette énergie totalement sincère qui fait que l'album demeure encore et toujours d'actualité. Ou bien peut-être cette prod' qui a super bien vieilli : grain de guitares typiques de l'époque, batterie puissante, bonne gestion de la stéréo... Alors oui ce n'est clairement pas fin pour un sou, et d'ailleurs le travail de composition ne l'est pas non plus. simple, direct, c'est la seule chose qui les différencie d'un Slayer par exemple, la science du break qui tue n'est pas parfaite, et on reste parfois sur sa faim au milieu de ce déluge de hurlements et de riffs à 200 à l'heure. a trop bastonner à tout va, on perd parfois en intensité, oné touffe quoi. Pourtant, difficile de résister à un "Turn on your grave" et son riffing très Metallica, ou au quadruplé "the exorcism/Possession/decapitation/beyond death" quasi punk dans son angle d'attaque (moins de deux minutes de moyenne)... et puis aah quel bonheur d'entendre ces solos complètement hystériques au vibrato ! On en fait plus des comme ça ma bonne ptite dame ! Bref, un classique c'est certain, et ça j'espère avec ma modeste contribution à ce site être arrivé à vous faire pencher sur cet album, histoire de vous faire douter sur la pertinence que sont les soi-disantes "bases" du genre. Et puis en plus, y a un moment le mec rote sur son micro, et ça les mecs c'est signe de qualité. Indéniablement.

Note : 5/6

Page 116/167 NOISEX : Ignarrogance

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Un bon chroniqueur est comme un bon maire : ce n'est pas parce qu'il aime à promouvoir les hauts lieux de sa ville qu'il peut se permettre de négliger les signalisations autour des zones en éboulement. Pour vous aujourd'hui, je vais mettre mon casque de la DDE et poser des plots oranges fluo autour de Raoul. Raoul est contre l'ignorance et contre l'arrogance. Il est contre l'ignarrogance. Raoul a des piercings partout, il est copain avec tout le monde (autant VNV Nation que Haus Arafna d'après ses remerciements) et signe sur Ant-Zen. Raoul a une boite à rythme. Raoul compose une ou deux mesures et les copie/colle sur quatre ou cinq minutes. Raoul fait tourner sa boite à rythme. Raoul récite les titres des morceaux. Raoul remplit deux heures et les range dans deux CDs. Oui, les trente-trois titres sont identiquement mauvais. Parfois, Raoul emprunte un synthétiseur. Alors il appuie sur les touches. Ça fait des notes, et des fois, c'est joli. Et comme il est contre le Sida, Raoul, il nous a mis un préservatif Raoul dans sa version box-set limitée. Pour que tu penses à Raoul quand tu fais l'amour. La prochaine fois Raoul, mets une fille entière dans ton coffret (à la limite s'il manque de la place enlève les CDs), ça devrait attiser mon intérêt. Allez, on dit tous bonjour à Raoul.

Note : 1/6

Page 117/167 AIRSCULPTURE : Burn

Chronique réalisée par Phaedream

Je ne vous ai pas encore entretenu sur Air Sculpture, un trio Anglais qui produit un MÉ improvisée plus éthérée que rythmée. C’était mon opinion, jusqu’à ce que mes oreilles se mesurent à cette œuvre titanesque qu’est Burn, le 11ième opus de Beasly, Christian et Ruczinski. Enregistré au 2ième Festival de Hampshire Jam en Novembre 2002, Burn circulait en cd-r pirate et faisait le délice des amateurs témoin de cette haute voltige séquentielle absolument démente. La magie Internet rend cet enregistrement disponible sur plateforme téléchargeable, et légale, de haute qualité sonore comparable à un vrai cd-r; format en 320 KBPS ou Flac.

Un long titre continue, divisé en 4 actes, Burn s’ouvre avec Stage I. Du Air Sculpture comme j’ai un lointain souvenir avec une longue intro sombre et traînante. Des sonorités de vielles orgues s’accouplent à un mellotron aux chœurs discrets et un synthé aux stries fantomatiques. On croirait entendre les souffles d’un saxophone perdu dans un maelstrom cosmique où l’absence de mouvement est à peine remarquable, tant l’étendue sonore est mouvante et dense. Sons sur sons, dans un contexte atonal pur où l’expérimentation est à la base de cette intro, Stage I s’anime curieusement sous des arpèges cristallins qui se répercutent en cerceaux de verres qui oscillent sur une plaquette prismatique. Ces cercles qui s’entrechoquent ne sont pas sans rappeler l’univers brillant et stratosphérique d’Eddie Jobson sur l’étonnant Theme of Secrets. Des tintements qui s’engouffrent dans une muraille statique qui refuse d’évoluer, préférant gober toute sonorité et l’étouffer dans une sphère psychédélique sérielle, plutôt que de la libérer dans une ambiance un plus musicale. Une intro très lourde, curieuse et difficile à gober avec sa haute teneur inerte et bruyante. Il y a certainement eu des mâchoires qui ont du se décrocher lors de cette ouverture, mais faut pousser la curiosité plus loin, le meilleur étant à venir. Stage II continue l’exploration des ambigüités soporifiques avec des strates aussi lentes, formant une nébulosité opaque qui semble infranchissable. De fines pulsations animent le mouvement qui hennie sous un synthé aux souffles désertiques. Nous pénétrons dans un univers psychédélique où croassements électroniques de tous genres agacent la tranquillité morphique, avant de se transformer en une étrange séquence qui moule un rythme lent, mais progressif, avec des séquences plus nettes et plus enjouées. Un bon moment truffé de splendides solos qui agrémentent une structure minimalisme séquencée à la rétro Berlin School. Une structure qui devient névrotique avec ses séquences abondantes et frénétiques qui accélèrent un rythme toujours saisi par des solos d’un synthé plus tranchant. Stage III crache le feu avec des séquences qui s’entrecroisent pour former un rythme ambivalent, mais toujours nerveux. L’univers multi rythme des séquenceurs se déploient avec une subtilité croissante et Thor que ça tapoche. Une vraie leçon sur l’art du séquencing et de ses énormes possibilités rythmiques. Ce rythme s’accroche à un univers sonore intensément créatif qui oscille entre le psychédélique et le progressif, toujours sur les prémisses d’un rock électronique pesant et puissant. Un mouvement fou qui s’étend jusqu’à Stage IV et de sa structure circulaire qui débite un rythme plus fou qu’effréné dans une danse féérique de synthés totalement discordants, mais simplement divin. De la haute voltige électronique. Burn d’Airsculpture est un petit bijou d’une MÉ explosive et sauvage qui a failli échapper à mes oreilles. Intense, névrotique et archi indiscipliné, voilà un superbe album aux antipodes musicaux dans une ambiance abstraite, disponible en format téléchargement sur le site de Musiczeit. Mais je

Page 118/167 vous le dit de go….c’est pour les oreilles qui en ont entendus de toutes sortes.

Note : 5/6

Page 119/167 ANDY (Horace) : Dance Hall Style

Chronique réalisée par Dioneo

À l’ouverture, un grondement vous aspire. Lointain comme un vide qui soudain se dilate. Pas moins anxiogène. L’écho vrillé d’on ne sait trop quoi, d’abord. Et puis la pompe, la rythmique hydraulique. Accords plaqués en remontant sur le deux et le quatre. Écho partout, cymbales crissantes, mix sans fond. Le son déjà classique du dub ? L’Inchangée Profondeur du genre, formules appliquées au quart de gradation près sur les potentiomètres, depuis le temps des Fondateurs ? Pas vraiment. Non. Tout de suite, il se passe autre chose. Ces trémolos de guitare, par exemple, avec leur groove en sourdine, presque asphyxié. Et puis comme un détail dans le son, un éclairage qui évoquerait l’Île aux Trésors comme un souvenir voilé, une absence, une gêne vaguement douloureuse. De fait on est ailleurs. En plein Bronx, à vrai dire. Chez Bullwackie, précisément. En bon producteur jamaïcain (certes bien délocalisé), ledit Lloyd Barnes importe ici ses manières et méthodes de parfait contrebandier. Pas un simple pirate, non. Un passeur en alerte, un commerçant habile. Un brouilleur de pistes. En l’occurrence il taille entre ses murs d’accueil (une affaire, sans doute, de rares mètres carrés) une enclave de Sound System. Comme au pays ? Non, bien sûr, pas tout à fait. Comme nombre de ses compatriotes, il adapte et se fond, hybride et maquille. Implante ses réseaux, les ramifie ; jauge les Locaux pour en faire des auxiliaires ; répartie les cargaisons ; pèse et redistribue, les mêlant à ses fonds de cale, les marchandises du cru ; substitue les denrées, affine les échanges et les permutations. Plus que d'autres, il colle à ses racines. Pas de hip-hop embryonnaire, ici, pas de souches trop manifestement mutantes. Il n’empêche. Dans cet espace inouï que creuse le dub, partout où il s’implante, s’engouffre un air différent. Plus sec, plus vicié. La tension des rues alentours, avec leur misère plus sale, plus poussiéreuse, plus suie. Ici point de mangrove où l’on pourrait se réfugier. Aucune langueur tropicale. Et ce parti pris d’allonger les morceaux en d’interminables ‘discomixes’ (ces versions destinées aux dancehalls -tiens donc- et qui alternent sans coupures passages purement dubs, aux voix effacées ou triturées, et couplets ou refrains maintenus dans leur entière intelligibilité) qui, curieusement, amplifient et distordent le malaise, la hantise, la nervosité du flux sans jamais les diluer. Et puis bien sûr, il y a cet impossible organe. Unique, toujours étranger, autre. Haut perché, chevrotant par phases mais exempt du falsetto très soul qui ailleurs illumine, érotise l’anomalie (chez Junior Murvin, chez Cedric Mynton des Congos, chez Desmond Dekker bien avant ceux-là…). Délicate, oui. Mais on ne peut la nommer douceur, pas tout à fait, cette qualité toute spéciale de l'interprétation. Ensommeillée souvent, parfois jusqu’à la torpeur. Mais jamais totalement apaisée. Conscient du gemme singulier qui lui tombe entre les mains, ‘Wackie décide d’en magnifier l’étrangeté. Ce timbre étonnant, il ne cherche pas à le polir. D’une piste sur l’autre il le multiplie, superpose les lignes, trace des parallèles et noue des entrelacs. Le chanteur harmonise avec lui-même, en duos, en trios. En mineur, souvent. Les effets prolongent encore sont phrasé traînant, ondulé. Et ses histoires, ces mises en garde, ses appels ou ses suppliques, rayonnent d’une aura d'inquiétude à nulle autre semblable. Du spleen en sillons que rien ne vient abréger. Sans remède envisagé. Clairement, le très secret Horace n’est pas ici en ses lieux familiers. Trop de bruit dans cette ville. Toute latitude, pourtant, lui est laissée. Il choisit son répertoire, couche les favorites d'entre ses chanson telles que lui les entends. Des instruments, même, lui passent entre les mains, afin qu’il leur insuffle lui-même la couleur. Mais sans doute, ses rues lui manquent, et le refuge des collines proches. La promesse même du bonheur, des tendresse, se teinte d’un mélancolie à vif. Les incitations à l’Unité ont quelque chose de noué, d’insidieusement

Page 120/167 retenu, comme l’espoir ou la menace d’une émeute ou d’un esclandre. Non, ce dub-là, proche cousin de l'originel mais à la musculature plus lourde, tendue d’un plus puissant voltage, bourdonnant d'un stress jusqu'alors inconnu, n’enrobe rien. Le luxe tout relatif des moyens, la modernité des équipements (par rapports aux studios des pionniers) n’amortit pas le choc. Il expose au plus nu cette bizarre beauté, souple dans sa marche, chaloupée, mais rêche sur la peau, au tympan ; âpre sous la langue et pourtant veloutée. Fragile et assurée. Ce son-là ne noie pas l’énigme. Il nous la livre, telle quelle, opaque et sans excuse. Ainsi se coule en nous l’ambiguë séduction.

Note : 5/6

Page 121/167 COIL vs ELPH : Born Again Pagans

Chronique réalisée par Wotzenknecht

A partir de 1994, Coil fait une crise de schizoïdie aiguë et commence à prendre plusieurs pseudonymes pour des raisons plus ou moins valables : The , Time Machines, Black Light District et surtout Elph, le seul qui aura un vrai suivi tandis que les autres resteront à l’état de one-shot. Selon le groupe, Elph est la face non contrôlée de Coil, c’est-à-dire le bruit des machines laissées seules en proie aux glitches (cliquetis électroniques parasites), au hasard et autres fantômes passant par le studio à ce moment là. Un petit mot sur la pochette de 'Born Again Pagans' qui bien que moche résume à elle seule tout Coil : qui d'autre que Saint Sébastien, figure classique et homoérotique par excellence, pouvait mieux retranscrire les éléments porteurs du groupe : ferveur, sexualité, amour ; dans sa version psyché qui plus est ? Bref, ‘Protection’, le premier titre de ce mini est encore signé de Coil et rentre en ligne droite dans l’electro anglaise de l’époque (il aurait très bien pu figurer dans les compilations Artificial Intelligence) : rythmiques complexes, effets en tout genre, synthés rondouillets et une seconde partie absolument délicieuse (c’est vraiment le mot le plus approprié !) avec une montagne russe analogique et rebondissante qui repose l’auditeur tout en douceur. Plus durs et sobres, les trois titres sous le patronyme Elph sont aussi d’une toute autre charge émotive : loin de la danse réjouissante de ‘Protection’, ‘Glimpse’ voit un petit drone grésiller tandis que ‘Crawling Spirit’ plombe l’air par un souffle caverneux court mais très perturbant. Le superbe ‘PhilM #1’ reprend les textures de ‘Glimpse’ avant de se plonger dans une ambient funèbre rappelant les travaux les plus solennels de Nurse With Wound (‘Salt Marie Celeste’, ‘Funeral Music for Perez Prado’) puis de disparaître dans l’éther comme si de rien n’était. Un mini très prenant donc malgré l’aspect angoissant et spectral de la facette Elph qui aura besoin de quelques autres sorties pour prendre vraiment forme.

Note : 4/6

Page 122/167 HIGHGATE : s/t

Chronique réalisée par yog sothoth

Highgate ou l’archétype du groupe sympa mais qui en fait peut être un tout petit peu trop… et encore, je passe gentiment sur l’artwork pas terrible façon "la guerre c’est dark donc c’est gris sur fond gris" et sur les photos de forêt en noir et blanc pixélisé dans le livret, terriblement "dark" aussi. Mais NON, je ne passerai pas sur l’affront de nous avoir pondu un pavé monobloc de 59 minutes, que RIEN dans la structure du morceau ne justifiait, le disque étant quand même clairement constitué d’au moins 3 "morceaux" distincts, et le recours à ce procédé de plus en plus utilisé par des groupes en manque flagrant d’inspiration ou de crédibilité… sauf que de l’inspiration, on en retrouve quand même un peu chez Highgate, dans un registre assez proche du Doom extrême (genre Moss / Khanate), mais plus orienté sur des riffs extrêmement lourds et ralentis que sur les bourdonnements du 666ème sous-sol de l’Enfer tout ça… bien nauséeux quand même, et porté par un chant écorché placé très en avant dans le mix, l’ensemble se révèle suffisamment immersif pour retenir l’attention jusqu’à la presque fin du disque, s’octroyant parfois quelques accalmies avant de revenir sur des atmosphères cyanurées. Je regrette seulement des transitions parfois un peu abruptes... et la fin du disque donc (quand je parlais de trop en faire...), où le groupe a eu la mauvaise idée de clôturer avec une espèce de sale riff postcore tournoyant bien générique qui se traine pendant un bon moment avant de laisser place à un court machin noisy. Malgré ces quelques erreurs de jeunesse, ce premier skeud positionne Highgate dans le peloton des formations à suivre, à eux maintenant de poursuivre leur plongée dans les abysses…

Note : 4/6

Page 123/167 COIL vs ELPH :

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Seconde confrontation entre Coil et sa propre ombre, ‘Worship the Glitch’ ne fera pas l’unanimité et ce pour plusieurs raisons qui nécessitent un peu d’éclaircissement. Comme je l’ai précisé dans la chronique du mini ‘Born Again Pagans’, le groupe enregistre sous le patronyme Elph ce qui sort du studio de façon non réfléchie, imprévue, involontaire, comme généré par les empruntes de leurs propre passages ou des poltergeist glissant leurs doigts sur les potentiomètres et autres boutons. Seul hic, cette musique composée par des spectres semble aussi s’adresser à des spectres. Un humain normalement constitué n’y entendra qu’une succession de brouillons, de point de départs ou de chutes rassemblées et livrées telles quelles ; et c’est le cas. Il y a pourtant beaucoup de subtilités à voir et à entendre de façon presque subliminale, comme le fait que ‘Dark Start’ ne soit que la version ultra-filtrée de ‘Ended’. La plupart des titres ont quelque chose d’un lieu vide dans lequel les choses continuent d’exister, en résonance avec le passé : l’étrange ‘We Have Always Been Here’ laisse filer un tout petit son en stéréophonie qui refuse de cesser son mouvement, les trois ‘The Halliwell Hammers’ n’auraient pas détonné sur les BO de Silent Hill, les voix de répondeur téléphonique de ‘Decadent & Symmetrical’ refusent de se poser à la bonne hauteur… et puisqu’il en est question, parlons-en, des voix : Elph se fait une joie de les filtrer au maximum pour entretenir ce cachet ‘EVP’ (Electronic Voice Phenomena, le phénomène étrange de voix parasites sur des enregistrements, sensés provenir du monde des morts...) qui lui donne ce caractère hanté et laissé à lui-même. Ca ne rend pas l’écoute d’une traite moins fastidieuse car au delà de cette ambiance rien ne se passe de fondamentalement extraordinaire et à moins d’être soi-même dans un état parapsychique, on décroche vite.

Note : 3/6

Page 124/167 COIL : Stolen & Contaminated Songs

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Exactement au même titre que 'Gold is the Metal' pour 'Horse Rotor Vator', 'Stolen & Contaminated Songs' est l'appendice de 'Love's Secret Domain' donc constitué de versions alternatives, de titres non retenus et de chutes diverses. Pour la petite anecdote, Coil a toujours été à la ramasse en ce qui concerne les préventes et ce disque était initialement prévu pour n'être distribué que par sa mailorder. Sauf que la qualité du contenu était telle qu'ils et ont été obligés de sortir une édition commerciale de cet objet pour étouffer une vague de bootlegs... bref, cette « face B » de l'album est tout à fait délectable indépendamment car sa variété et sa richesse justifie cette fois indiscutablement son existence. On se retrouve à nouveau plongé dans la multitude qui faisait la force de LSD : un peu de classique avec ‘Original Chaostrophy’ (dont la seconde moitié est jouée… à l’envers) et le court mais très beau ‘Corybantic Ennui’ ; du jazz psychédélique ( !) avec ‘Omlagus Garfungiloops’ (‘exploding frogs again’ à l’envers…) et la version maquette de l’éponyme ‘Love’s Secret Domain’ avec son texte de Blake ; de l’électro-glitch avec les liminaux ‘Furthur’, ‘Inkling’… Parmi les meilleurs morceaux, on notera le solennel ‘Who’ll Fall ?’ sur lequel sied l’enregistrement d’une voix qui annonce le suicide d’un de leur proche, l’orchestral et très Psychic TV ‘The Original Wild Garlic Memory’, le gros pavé dark-ambient ‘Her Friends the Wolves’ (pas aussi effrayant que les remixes de ‘How To destroy Angels’, mais tout de même) et évidemment le dub cosmique de ‘NASA-Arab’ au pattern rythmique digne des vieux Autechre (Bien qu’ils soit sorti deux ans plus tard, impossible de ne pas penser à l’Anti EP’) que l’on retrouvera sur un maxi, accompagné d’une face B tout aussi sexy, sinon plus. Que dire de plus ? La seule chose qui le rend un peu plus timide que l’album dont il est tiré est le manque de voix mais devant la diversité des compositions, on s’en accommodera tout à fait.

Note : 5/6

Page 125/167 CHRISTIAN DEATH : An official anthology of 'live' bootlegs

Chronique réalisée par Twilight

Tout est dans le titre...une note sur le disque précise qu'il s'agit d'une compilation de pirates dont les conditions d'enregistrement ne répondent pas toujours aux standards professionnels; néanmoins le groupe a apprécié plusieurs de ces versions qu'il présente ici dans le but de garder un minimum de contrôle artistique sur la marchandise...mouais...J'apprécie pourtant la pirouette, tant de types se font de l'argent sur les dos des musiciens avec des enregistrements illégaux qu'il est amusant de penser que l'inverse se produit ici. Les chansons sélectionnées couvrent une période entre 1981 et 1986 et, fait intéressant, proviennent principalement de dates européennes. Exception faite de Los Angeles nous trouvons donc Amsterdam (huit titres), Londres (un) et Dusseldorf (un également). Après écoute, il faut reconnaître que dans certains cas les versions valent la peine, ainsi 'Theatre of pain' ou 'The blue hour' à la qualité très correcte (surtout quand on a en mémoire certaines sorties légales de chez Cleopatra); occasion nous est donnée également d'entendre Valor interpréter certains morceaux plutôt typiques de Rozz Williams, ainsi 'This Glass house' plutôt réussi, 'Awake at the wall' où manque néanmoins la sensualité de son collègue ou encore 'When I was bed'; notons qu'il nous chante aussi un inédit, 'Coming forth by day' (jamais entendu auparavant mais j'ai l'impression que certaines lignes ont été réutilisées plus tard). Le disque se conclut par une version assez bruyante de 'Figurative theatre' au son pourri ainsi que le bien nommé 'Untitled- followed by crowd chaos', soit une composition difficile à identifier, interrompue brusquement pour demander au gens de se pousser, de reculer, visiblement la foule devenait un brin incontrôlable. Pas évident de noter un tel objet, tant de lives de Christian Death circulent déjà...Celui-ci n'est pas un officiel mais n'a pas même la saveur illégale du pirate...Je laisserai donc le fan s'exprimer; l'achat vaut la peine pour le côté collection, ensuite la qualité sonore reste très acceptable sur plus de la moitié des morceaux et enfin, ces versions sont peu courantes. Je déplore simplement pour ma part que le livret n'ait pas reproduit les images de la pochette arrière du vinyl. Vous savez tout ou presque. 3,5/6

Note : 3/6

Page 126/167 BAX (1883-1953) (Sir Arnold) : November woods / The garden of fand / Tintagel ...

Chronique réalisée par Sheer-khan

Bax était un homme fasciné par le merveilleux, la nature et le rêve, passionné par l'Irlande où il vécut plusieurs années, amoureux des forêts et des légendes celtiques. Compositeur prolixe et d'une virtuosité orchestrale rare, il composa de nombreux poêmes symphoniques dont "November woods", "Tintagel" et "Fand" sont parmi les plus importants. Qu'il peignit la falaise majestueuse de Tintagel, battue par la mer et le vent, ou les ombres mouvantes et mystérieuses qui peuplent les bois d'automne, Bax avait une écriture tempétueuse et dynamique : des atmosphères crépusculaires suspendues à l'acoustique délicate, mais immanquablement traversées d'apothéoses orchestrales puissantes et tourmentées. Bax est un conteur et un peintre. Profondément romantique, il fût aussi largement habité par le langage impressionniste de Debussy; ses compositions pour orchestre relèvent autant de la narration que du paysage, mélant des courbes mélodiques émouvantes et raffinées aux vibrations harmoniques les plus évocatrices. De la magie d'une flûte chantant à l'aube des cordes qui se lèvent jusqu'à la vindicte orchestrale grandiloquente, le

Page 127/167 compositeur était détenteur d'une acoustique complexe et multidirectionnelle dont il usait avec virtuosité dans une musique au chatoiement magique et constant. Bienvenu sous les arbres, à fouler les feuilles mortes... bienvenu au royaume des ombres , des lueurs merveilleuses et des présences dangereuses. Les cordes respirent dans le silence, en attendant la nuit; un alto se détache comme une ombre, un hautbois malveillant passe au loin dans la brume tandis que les violons aux aigus tremblants s'élèvent dans le décor pour y planter la nuit. Le compositeur amène ses atmosphères sonores vers des mélodies pleines qui racontent une histoire, une envolée retenue de cordes qui se plaignent tandis que les bassons, hautbois et clarinettes déroulent des inquiétudes. Bax n'a pas encore croisé la musique de Sibélius mais il partage déjà avec le finlandais de la symphonie n°6 cette capacité à peindre la nature superbe et mystérieuse, complexe, tour à tour accueillante, fascinante, enjouée ou malveillante. Alors que l'heure est au silence et à la lune

étrange, des cuivres sourds se contorsionnent, comme pour s'extraire d'eux-mêmes.

Peu à peu ils s'agitent, s'énervent et se démènent, pour enfin s'élancer sur un tapis de cordes lourdes en une déclamation violente et dramatique, engloutissant l'espace, dévorant le peu de lumière. Dans ces trois poêmes au sommet desquels trône le sublime "November woods", Bax atteint un équilibre à la fois ravissant et spectaculaire entre émotions et atmosphères, grâce à sa science extrême de l'orchestre, mais aussi à un grand sens mélodique, alors en pleine embellie.

Page 128/167 Percussions de toutes sortes, grondantes, métalliques, cassantes ou boisées, plans superposés de cuivres multicolores, du cor à la trompette, une utilisation plastique des cordes majestueuse et subtile et les innombrables détails croisés des bois, des harpes et du celesta... Bax est tout autant dans les lumières, les lueurs et les ombres que dans les parfums, les sons innombrables et les êtres cachés, les images et les souvenirs, la promenade et la légende. Trois oeuvres parmi les plus belles du

compositeur.

Note : 5/6

Page 129/167 BAX (1883-1953) (Sir Arnold) : Winter legends

Chronique réalisée par Sheer-khan

Oeuvre versatile, vindicative, particulièrement dense et tourmentée, "Winter

Legends" est le fruit de la rencontre tardive de Bax avec l'oeuvre du grand

Sibelius, par laquelle il fût profondément marqué. Délaissant ses inspirations celtes pour l'ampleur des sagas nordiques, le compositeur livre une partition pour piano et orchestre violemment contrastée, abrupte et virtuose dans laquelle tourbillonnent explosions dramatiques et atmosphères mystérieuses, aggressions percussives et vibrations harmoniques subtiles et picturales. Annoncé par une caisse claire martiale d'où surgit la course ascendante d'un piano incoercible, le premier mouvement explose en thèmes épiques et ardents, s'appuyant sur un mélodisme contrarié et austère pour déployer une formidable flamboyance orchestrale; bois, cuivres, cordes, piano soliste et percussions diverses dans une débauche de timbres et une multiplication des plans en perpétuelle évolution; un déroulement narratif complexe et exigeant où l'imbrication des atmosphères et les variations sauvages de densité malmènent et dérangent par leur succession d'images et de décors, de noir

Page 130/167 profond et blanc aveuglant. Pianiste imposant à la technique colossale, fortement influencé par Debussy, Bax utilise toute l'étendue harmonique de l'instrument, des flocons qu'il distille par centaines sur les flancs acérés des montagnes de cuivres, au martèlement plaqué des octaves les plus basses. La course initiale revient en articulation des épisodes qui se succèdent, imposant l'oppression de sa rythmique en cascade, surgissant de l'arrêt brusque d'une scène qui s'achève pour aller se jeter dans l'explosion du thème suivant. Un allegro particulièrement indocile et inconfortable dont la splendeur architecturale est hélas contrariée par une écriture mélodique rèche et sévère, malheureusement trop plastique pour servir le propos essentiellement pictural du compositeur. Mais passé ce premier mouvement d'intenses confrontations, Bax tient toutes ses promesses, sans perdre de sa violence ni de sa gravité. Inventif et pluriel, virtuose de l'orchestre, le britannique maîtrise ses effets, multiplie les écritures; de la longue plage pianistique aux harmonies vibrantes, à l'impressionnisme moderne typique de leur époque, aux poussées insoutenables d'un orchestre noir charbon. Bax redevient le peintre flamboyant et atmosphérique de "Spring fire" ou "November woods", entame son lento par un long paysage de piano aquatique et brumeux, perlant comme de la pluie sur les ondulations mélancoliques de cordes retenues; des cuivres solennels, maintenus dans le lointain, les chants mélés des hautbois et bassons en une mélodie grave et imposante qui place les combattants à l'orée de la guerre. Car tout cela explose. Légendes d'hiver,

Page 131/167 sagas islandaises, des gonflements de cordes de plus en plus énormes propulsés des enceintes par des roulements surpuissants de timbales et caisses claires, jusqu'à l'éclatement des cuivres qui se deversent dans des thèmes impressionnants et noirs, sous un tourbillon de violoncelles. Puis la tourmente retombe, la bataille est finie, plus rien d'autre, à nouveau, que ces champs sous la neige et les arbres dans le givre, que le piano qui goutte en harmonies tiercées. Durant une demi-heure, du lento à l'épilogue, le sorcier britannique va ainsi nous mener de nocturnes en violences, d'inquiétudes de hautbois qui s'avancent comme une forêt vivante, en scintillements étoilés de piano et de celesta, d'évènements tragiques en paysages de froid. Déclamative, parfois jusqu'à l'agression, la musique de Bax est aussi puissamment suggestive, formidablement riche et changeante et toujours constituée de multiples évènements, jusque dans ses lentes plages d'atmosphères, toujours inquiètes. "Winter legends" est une pièce de musique intense et virtuose, sauvage,

entre l'épreuve et l'émerveillement.

Note : 5/6

Page 132/167 CEMETARY : An evil shade of grey

Chronique réalisée par pokemonslaughter

Je lacherai pas le morceau avec mes vieilleries, il y en a tellement, et encore je vous épargne les grosses daubes.. Parce que hein, vous méprenez pas, j'achète pas tout non plus. Encore qu'avec Cemetary, je me suis un peu fait avoir. Pensez donc, une pochette qui n'est pas sans rappeler celle du "Left hand path", une prod' made in sunlight d'époque, un style bien suèdois comme il faut... Y avait tout quoi. Et d'ailleurs finalement les premières écoutes se montrent fort plaisantes. Pensez donc, une sorte de death suèdois au son rugueux quelque part entre "tales from the 1000 lakes" d'Amorphis et le premier Entombed, qui sortirait un peu des sentiers battus en se montrant plus mélodique que la moyenne. On pense pas mal au premier Necrophobic pour ces mélodies simples, Mordicus également pour ce côté heavy metal prononcé, et bien évidemment aux grands du genre (je ne fais pas l'affront de les re-re-re-citer) pour les traditionnelles rythmiques speed. Seulement voilà, le groupe pêche cruellement par ces compos fourre-tout, qui ne marquent pas vraiment. Des leads intéressantes pas assez exploitées, des structures pas super cohérentes, des claviers abominables, des "experimentations" (pour le genre) franchement pas terrible... c'est bien beau de vouloir caler des parties acoustiques mais si ça se résume à reprendre la lead note à note, tout seul, aevc un son dégueulasse, non merci. D'autant plus dommage que les idées sont pléthores, on sent une réelle volonté de proposer quelque chose d'à la fois "evil", crade et mélodique à la fois. Helas, Cemetary se montre bien trop peu inspiré pour tenir la longueur face à ses compatriotes. Pas asez de riffs vraiment catchys, ces leads toutes simples, vous savez ces mélodies à 4 notes dont la rythmique varie en fond qui ne sont passez exploitées, ou plus frustrant, certains riffs vraiment bien trouvés ("Where the rivers of madness stream", "Nightmare lake") qui se montrent juste posés là... Néanmoins voilà un bon disque d'archiviste, le cul entre deux chaises, par un groupe qui se cherche clairement, pas assez mélo, pas assez méchant, le groupe galère à trouver la bonne alchimie... Pas étonnant d'ailleurs que le groupe ait reviré vers quelque chose à la Paradise Lost par la suite, ils y seront beaucoup plus à l'aise... Jugement dur c'est clair, ceux qui connaissent l'album me le diront sûrement, mais le constat est là, l'album ne repasse pas, malgré son charme indéniable. Et ce n'est pas cette guitare de droite au son "frotté" abominable (insoutenable au casque, à croire que le mec ne sait pas faire de tremolo) qui me fera changer d'avis...

Note : 3/6

Page 133/167 THE MOODY BLUES : Every Good Boy Deserves Favour

Chronique réalisée par Hellman

Les Moody Blues sont depuis tellement longtemps à la recherche d'un équilibre qu'il eut été trop triste qu'ils n'y soient jamais parvenus. "Every Good Boy Deserves Favour" prétend être celui qui s'en rapproche le plus. Car l'album se veut un subtil compromis entre l'immédiateté redécouverte par le biais de "A Question of Balance" et une réelle ambition esthétique à laquelle les Moodies n'ont plus goûté depuis "To Our Children's Children's Children". Cet aspect conceptuel, vague fumisterie, se traduit avant tout par la combinaison entre "Procession" et "One More Time to Live", ouvrant respectivement la première et seconde face du disque en utilisant les mêmes paroles sur un environnement musical complètement différent. L'amorce est plaisante, mystique et ténébreuse, mais trop vite rattrapée par le rock de "". "Our Guessing Game" puis l'enfantin "Emily's Song" confirment que les Moody Blues sont fait pour les chansons douces, mais si celles-ci ne manquent pas de charme, elles ne dégagent pas non plus d'aura particulière. Sans surprises, "After You Came" enchaîne sur une proposition rock à la mode des Who. Et le schéma de se reproduire à peu de choses près sur la seconde face, se refermant sur le simili-épique, simili-grotesque "My Song". Comme trop souvent, les quelques beaux moments qui égrainent le parcours de cet album se voient gâchés par des titres peu inspirées positionnés un peu n'importe où, un peu n'importe comment, empêchant à l'oeuvre d'accéder à un épanouissement homogène qui lui serait pourtant des plus profitables. Finalement, le léger mieux qui distingue ce "Every Good Boy Deserves Favour" de son terne prédécesseur, il faut aller le trouver dans le nombre un tout petit peu plus conséquent de titres aux mélodies séduisantes et aux timides arrangements progressifs avec lequel il renoue. Mais cela reste toujours trop peu pour convaincre...

Note : 3/6

Page 134/167 THE MOODY BLUES :

Chronique réalisée par Hellman

Un peu comme ce fût le cas aussi pour leurs camarades de Procol Harum avec "A Whiter Shade of Pale", les Moody Blues ne furent rien d'autre finalement que le groupe d'un titre, d'un seul titre, mais quel titre ! "Nights in White Satin", qui contient en son sein les germes d'un monde musical nouveau qui ne demandait alors qu'à se propager, chanson parue à l'origine en 1967 et republiée en 1972, avec un nouveau carton à la clef ! Le nouvel enregistrement studio des Moody Blues, "Seventh Sojourn", profitera de ce soudain regain de popularité pour bien se vendre lui aussi, mais ce n'est déjà plus le même groupe... Depuis "A Question of Balance", les Moodies Blues semblaient avoir mis de côté leurs prétentions artistiques, pourtant très fortes au début, comme ont pu le démontrer des disques comme "Days of Future Passed", "In Search of The Lost Chord" ou les décousus mais ambitieux "On A Threshold of a Dream" et "To Our Children's Children's Children". Leur louable recherche vers plus l'épure ne s'est malheureusement pas faite sans conséquences dans leur cas. Le bref sursaut de "Every Good Boy Deserves Favour" n'était donc qu'un leurre. Avec "Seventh Sojourn", sans autre forme de procès, ils plongent les pieds joints, tête la première, dans la grande soupe populaire. Composer des chansons, de belles chansons, voilà tout ce que les Moody Blues désiraient. Et par conséquent, cela ne nous intéresse plus vraiment. Ce sont encore les titres aux relans vaguement romantiques qui s'en sortent le mieux ("New Horizons", "The Land of Make Believe", "When You're a Free Man"), pendant que d'autres se vautrent dans la niaiserie bon marché ("For My Lady"). Ce qui n'empêche pas les Moodies d'étoffer leur son : ainsi, les chorus de guitare de Hayward, leurs placements, n'avaient jamais pu profiter d'une telle mise en valeur de par le passé, consolidant l'image rock du groupe. La même année, le succès fût au rendez-vous. Une tournée mondiale s'en suivit. Puis vint le split inéluctable.

Note : 2/6

Page 135/167 DZYAN : S/t

Chronique réalisée par Hellman

Dzyan, comme le livre mystique du même nom, transpire l'esotérisme par tous les pores du sillon. Obscur groupe allemand perdu dans la masse des productions étiquettées faute de mieux, Reinhard Karwatky et les siens n'auront que trois occasions de s'exprimer. Leur premier disque, sensé donner l'impulsion de départ, fait figure d'exception dans leur carrière éclair puisque Dzyan va au devant d'un drastique remaniement de son effectif qui précipitera sa chute. Mais ne brûlons pas les étapes. Le groupe est alors constitué de cinq membres et c'est à tâtons qu'ils s'aventurent dans des dédales houleux où se bousculent de multiples perspectives qu'ils s'efforcent de rendre pertinentes. Progressif dans la forme, l'écrin dans lequel le groupe évolue aborde sans peur l'expérimentation électronique, au travers de nombreux effets qui, soit introduisent les morceaux, soit viennent leur apporter une autre dimension en dynamitant leurs structures de l'intérieur. De là découle sans doute cette saveur doucement pyschédélique ("Hymn"), encouragée par des guitares acidulées sur des titres comme "Dragonsong" ou "Back to Earth". Des éléments de jazz, sous une déclinaison plus hybride, éclairent le disque d'interventions au saxophone parfois bien allumées, alors qu'un chant doublé, voire triplé, par des backings délimitent tout cet exercice à des chansons de genre. Le champ des possibilités est donc circonscrit quelque part dans une frontière floue qui incluerait le "Space Shanty" de Khan et les trois ou quatre premières sorties de Nektar. Sans être forcément les plus aboutis, "Emptiness" et l'oriental "The Wisdom", tout en percussions, apparaissent comme les titres les plus marquants du lot, ceux où Dzyan s'essaye à des tas de choses en même temps, dans un effet collage pas toujours heureux mais en tout cas audacieux. Un disque à l'atmosphère singulière qui partage finalement bien peu d'éléments avec l'esthétique allemande telle qu'on la conçoit. Et c'est déjà en soi une bonne surprise.

Note : 4/6

Page 136/167 DZYAN : Time Machine

Chronique réalisée par Hellman

"Time Machine" et son succésseur, "Electric Silence", voient Dzyan se recroqueviller dans une formule en trio. Du groupe d'origine ne reste plus que le bassiste Reinhard Karwatky auquel s'adjoignent désormais Peter Giger aux percussions et Eddy Marron à la guitare. "Kabisrain" met les pendules à l'heure ; déjà, nous n'avons plus l'impression d'entendre le même groupe. En un sens, c'est plutôt normal puisque c'est exactement de cela qu'il s'agit ! Derrière une puissante chambre d'écho voici qu'arrivent des arabesques d'abstractions aux percussions et à la guitare classique qui charrient avec elles un parfum d'étrange, commun à Oregon ou à certaines productions ECM, et je pense plus particulièrement à Codona. C'est alors que déboule sans coup férir "Magika" qui prend tout le monde à rebours en réintroduisant un discours électrifiée, plus proche d'une certaine idée du rock. Une certaine énergie se dégage de ce titre, mais sa structure mouvante laisse à penser qu'il s'agit d'une improvisation. La première face se referme sur "Light Shining Out of Darkness", autre exercice de style à la guitare acoustique. Le nouveau Dzyan a parlé, et effectivement, tous nos repères semblent s'être dissous face à cette musique qui ne se laisse pas facilement dompter. La longue plage titre de dix sept minutes qui conclut le disque avec un sens du drame consommé résume les approches abordées jusque là, à savoir l'urgence et la fébrilité des amplifications électriques aux songes éveillés d'un ailleurs possible. Les nouvelles recrues, c'est un fait, ont clairement plus de bagage que les personnes qu'ils remplacent au pied levé, et la musique de Dzyan s'en ressent, plus sérieuse, plus cérébrale aussi, n'ayons pas peur des mots. Eddy Marron double ses parties de guitare : les rythmiques assurent une assise solide (chapeauté par l'imperturbable Karwatky à la basse) alors que les solii se révèlent incendiaires au point d'évoquer le Mahavishnu Orchestra. Du jazz fusion psyché ?

Ça existe, Dzyan l'a inventé.

Note : 5/6

Page 137/167 DZYAN : Electric Silence

Chronique réalisée par Hellman

Si Dzyan, dans sa nouvelle forme, a délaissé le chant et le saxophone qui faisaient la pluie et le beau temps sur leur tout premier disque, il n'en reste pas moins fortement imprégné par le jazz. D'abord, en raison de la virtuosité dont ils font preuve. Grâce aussi à l'incroyable ouverture induite par leurs compositions aux structures si maléables, libres de toute interprétation. Sur "Electric Silence", ce côté mystique, déjà relayé par les passages les plus inspirés de la musique indienne sur "Time Machine" est toujours bel et bien présent (sitar et percussions sur "A Day In My Life"), mais il est d'autant plus marqué par l'apport du clavier, du mellotron en l'occurence, laissant pour la première fois transparaître une influence notable : celle de Florian Fricke et son Popol Vuh. "Khali" aurait par exemple très bien pu figurer sur "In Den Garten Pharaos" sans que cela soit choquant. L'exploration du psyché ou d'un ailleurs fantasmé demeure en vers et contre tout le point de fuite du groupe et peut-être parvient-il sur cet album, plus que sur les autres, à construire une musique qui ne ressemble décidément à aucune autre. On peut entendre des marimbas sur "Back to Where We Come From", des steel sur "For Eartly Thinking", les deux seules longues pièces de l'album, dans lesquels s'insinuent la guitare expressive de Eddy Marron, qui sonne plus que jamais comme un John Abercrombie rock. Dzyan n'abandonne donc pas pour autant son optique électrique avec quelques morceaux dans la veine de l'étonnant "Magika". Les passages de ce type sont d'ailleurs plus nombreux sur ce nouvel et déjà ultime album, tout simplement parce que les titres sont en général plus courts. Mais quelque soit le titre, aucun n'échappe aux errances psychotropes prodiguées par le groupe. Quel que soit le point de départ, les moyen pour parvenir à la ligne d'arrivée ne sont jamais ceux auxquels on s'attend. "Electric Silence"... Finalement, le titre n'est pas usurpé.

Note : 5/6

Page 138/167 COIL : Queens of the Circulating Library

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Sorti le jour de la fête des mères et distribué lors d’un concert au Royal Festival Hall Cornucopia, ce singulier opus de Coil est son incursion la plus radicale dans le drone, plus encore que sur ses essais avec Time Machines. Il s’agit d’une pièce rendant hommage à toutes les mères, dont l’une d’entre elle – celle de , ancienne chanteuse d’opéra – récite un petit texte écrit pour elle par où elle se déclare reine de la bibliothèque circulaire en vantant métaphoriquement le mérite de ceux qui cultiveront leurs arbres et leurs livres. « Return books, don’t burn books… ». Sa déclaration dure quelques minutes puis elle nous laisse flotter seuls dans les airs, sur un drone presque immobile qui plus que jamais m’apparaît comme bleu. Un bleu ciel, frais, pur – loin de nous ennuyer, le son nous berce et nous transporte en toute quiétude ; il ne cherche pas à s’imposer ou à nous abandonner dans le vide : on observe seulement les quelques nuages évoluer lentement dans l’atmosphère tandis que notre corps se prend pour un oiseau se laissant porter par un courant doux et serein. Une expérience relaxante et méditative à tenter au casque pendant la sieste, pour ainsi saisir un avant-goût du paradis.

Note : 4/6

Page 139/167 COIL : Constant Shallowness leads to Evil

Chronique réalisée par Wotzenknecht

Coil n’est décidément jamais là où on l’attend et nombreux sont ceux qui sont restés sur le carreau avec cette sortie. Point de musique astrale ou de mélancolie exacerbée : si l’on retire la bizarroïde fresque électro-rituelle ‘I am the Green Child’, ‘Constant Shallowness leads to Evil’ est un album purement et simplement bruitiste. ‘Higher Being Command’, ‘Beige’, ‘Lowest Common Abominator’, ‘Freebase Chakra’, ‘Tunnel of Goats I-XVIII’ : tous ne sont qu’une succession de nappes de synthétiseurs distordus au maximum dont chaque canal fonctionne indépendamment. Oui, c’est le ‘Metal Machine Music’ de Lou Reed en version synthé. Passé la surprise, on s’interroge : pourquoi un tel disque ? Venant de la part de John, Peter & leurs acolytes ponctuels, on se doute qu’il y a quelque chose dans leur intention. Alors on plonge, on se replonge."Persistance Is All" nous disait le titre du concert. Certes, ce n’est pas aussi agressif ou chargé qu’un Merzbow, même si on retrouve le même plaisir masochiste dans ce bain de textures abrasives, rêches et saturées. Seulement, ‘Constant Shallowness…’ n’a pas vocation d’ouragan sonore : il avance doucement, comme s’il nous poussait en avant sur son paysage électrostatique. John récite de façon détachée quelques incantations, comme s’il invoquait quelque Dieu pyrique tandis que nous nous carbonisons dans son bûcher de distorsions. Et sur la longueur, ça commence à faire effet, ses contours prennent sens – si ‘Queens of the Circulating Library’ était la sérénité incarnée, ‘Tunnel of Goats’ est l’épreuve du feu, le rite purificateur sans lequel on ne saurait apprécier notre état à sa juste valeur. A l’arrivée, John éclate de rire, peut-être pour nous accueillir, peut-être pour se moquer - un disque difficile d’accès donc qui mérite une attention accrue car s’il est gratifiant dans certaines conditions, il peut tout aussi bien s’avérer insupportable dans d’autres.

Note : 3/6

Page 140/167 KIRLIAN CAMERA : Held V - Shadow Mission

Chronique réalisée par Twilight

Nouvel album pour Kirlian Camera...En réalité, selon mes informations, un préambule à un best of retraçant l'histoire du groupe qui devrait voir le jour sous peu. Ces onze pièces en tous cas ont tout pour faire saliver, entre neuf et relecture. Hanté par le thème de l'espace puisque tout évoque une dramatique odyssée spatiale, ce disque baigne dans l'électro, même si la superbe intro au violon de la nouvelle version de 'Heldenplatz' laisserait présager le contraire. Kirlian Camera renoue avec une forme d'electro minimal, glacé et dansant qu'il affectionnait à l'époque de 'Solaris' et c'est magnifique. 'E.D.O' développe un climat à la fois malsain et mélancolique de par les sonorités, comme des cris, en arrière-fond, et le timbre mélancolique de Elena. Cette tristesse planante se retrouve sur le court mais intense 'Odyssey Europa', le même genre de spleen présent sur la boulversante reprise du 'Julia dream' de Pink Floyd version cabaret (mmm, le son de l'orgue Hammond). 'Edges' se profile comme un futur tube avec sa touche dansante; le groupe y démontre qu'on peut être à la page sans faire de la musique facile pour tuning, peut-être pas leur essai le plus profond mais bien agréable tout de même. Suit un remix, celui de 'K-Pax' par Fotonovela, plutôt réussi, le temps que nos Italiens qui n'ont pas perdu le goût de l'expérimentation nous livrent le premier de deux instrumentaux ambient, froids, étrangement mélancoliques, 'Alien Chill calling' I et II. Entre eux, 'Enemy closing in' où Angelo pose également sa voix, d'où une touche dramatique parfaitement adapté au malaise étrange des compositions, malaise qui tant musicalement que thématiquement nous évoque l'époque 'Solaris'. Les versions de 'Heldenplatz' (la même sans l'intro de vilon) et 'E.D.O' qui concluent le disque sont efficaces, même si elles n'apportent pas grand chose de plus; gageons qu'elles feront un tabac sur les dancefloors. Certains groupes semblent ne jamais échouer et Kirlian Camera fait partie de ceux-là; certes, 'Shadow mission' ne renouvelle rien, confirme plutôt, mais avec brio.

Note : 5/6

Page 141/167 DARK TALES : Living out

Chronique réalisée par Twilight

En la ville de Pavie existait une formation du nom de Dr Mabuse, laquelle ne laissera rien derrière elle à l'exception d'une poignée de concerts; de ses cendres, en 1981, naquit un autre groupe, Dark Tales. Rapidement, les musiciens se taillent une petite réputation dans la scène locale, jouent à Turin, Ferrara, enregistrent trois démos et participent à une compilation. C'est là que tout s'arrête. Affaibli par le manque de moyens, de reconnaissance, le combo jette l'éponge. Alors que Spittle Records le remet pour nous au goût du jour, on comprend qu'effectivement la new wave froide de Dark Tales avait du potentiel et qu'elle avait de quoi s'engouffrer à la suite de formations culte du genre telles que Neon. Les chansons sont rythmées, plus totalement post punk mais pas non plus purement cold wave, quelque chose entre les deux, avec en plus des parties de clavier marquées; on oscille entre le froid, le sombre et le pop, entre Joy Division, Bauhaus et Wall of Voodoo. La qualité sonore n'est pas parfaite mais reste très correcte, elle ajoute un charme d'époque au feeling général. Six morceaux, c'est peu, mais ils sont bon et assurément, certains avaient des potentiels de tubes ('Living out', '1984' ou 'Mad being'); il n'est jamais trop tard pour en profiter.

Note : 5/6

Page 142/167 MALOMBRA : Our Lady of the Bones

Chronique réalisée par Twilight

Le progressif, ce n'est pas vraiment mon rayon; non pas que j'aie quelque chose contre mais je suis plutôt rejeton du post-punk donc ces constructions alambiquées, ces démonstrations techniques et autres morceaux de vingt minutes, je ne suis pas très fan. J'ai pourtant fait exception pour une formation italienne du nom de Malombra, simplement parce que j'adore la voix de son chanteur Mercy découverte au sein des projets Ianva et Helden Rune. J'ai donc souhaité en découvrir plus. Si la démarche est avant tout influencée par le rock progressif, les influences gothiques ne sont pas loin non plus, même si moins présentes que sur le premier essai éponyme. 'Our Lady of the Bones', second opus de Malombra, s'inscrit dans une démarche spirituelle comme un rite initiatique, une approche de la mort et de l'au-delà. Pas question de brusquer les choses qui démarrent avec un court instrumental aux ambiances mi-chamaniques (les percussions) mi-folkoriques (la flûte) qui enchaîne sur un tempo plus martial à la manière du Bolero de Ravel...Quelques bruitages, des constructions néo-classiques étouffées, puis une voix féminine incantatoire qui s'adresse à Lilith...Tout semble exploser mais pas pour longtemps, la batterie s'efface peu à peu, de même que les guitares. Il faut attendre le quatrième titre pour que Mercy se mette à chanter; les ambiances sont mélancoliques servies par le violon puis plus grandiloquentes sur fond d'orgue et de tempi lents. Après quatre minutes, le morceau s'emballe, les atmosphères se font inquiétantes, la batterie roule puis tout éclate en un hard rock sombre; les étiquettes sont réductrices tant les techniques se mêlent: jeu de cymbales jazzy par instants, farandole de violon hanté, soli de guitare, climats obscurs...Si les breaks et le changements sont nombreux, les musiciens prennent la peine de laisser les ambiances se poser. Mercy n'a pas encore développé la texture grave qui caractérisera ses travaux suivants mais se montre déjà efficace et contribue au feeling gothique de la musique. Après ce sabbat endiablé, 'Our Lady of the Bones' démarre de manière plus tranquille avec notamment l'apport du piano et d'atmosphères pas toujours éloignées du Pink Floyd de 'The Wall'. Rien n'est jamais joué pourtant et à nouveau la transe se profile sur des rythmes plus rituels, des sonorités folles comme autant de spectres glissant à toute vitesse. La batterie s'accélère, le côté hard rock revient à la charge, vite complété par des montées d'orgue psychédéliques...Dix minutes, tout retombe, pas pour longtemps, l'accélération reprend, l'auditeur est balloté dans cette danse macabre qui paraît ne jamais se terminer. Avec ses vingt minutes, le titre éponyme est le plus long du disque. 'Sinister morning' se présente d'emblée comme plus sombre, plus désespéré et je songe parfois à Saviour Machine. Le voyage n'est pas fini, la tempête intérieure se lève, le violon serpente entre les riffs, les touches de l'orgue; le rythme d'abord rituel, s'emballe...se casse et la chanson s'achève de manière nettement plus calme pour céder la place à 'Stonehenge' divisé en trois parties, la première consistant en une récitation, la seconde en quelque chose de plus atmosphérique et psychédélique (encore Pink Floyd) avant un final totalement barré accéléré à l'extrême qui glisse sur 'Requiem for the human beast' dont les orgues funèbres apportent une touche de mélancolie bienvenue; Mercy opte enfin pour son timbre grave, l'émotion se fait plus noire, le rythme s'apaise, violon, guitare sèche, puis tout repart avant que le voyage ne s'achève pour de bon sur une petite mélodie cabaret, laissant l'auditeur que je suis, les habits en lambeaux, le visage en sang, le regard empli

Page 143/167 d'images à la fois belles et effroyables...Expérience positive ? Je ne saurais le dire, intense, c'est certain.

Note : 4/6

Page 144/167 CCCP : Compagni, cittadini, fratelli, partigiani - Ortodossia II

Chronique réalisée par Twilight

Cette compilation regroupe deux des premiers minis de CCCP, soit 'Ortodossia II' et 'Compagni, cittadini, fratelli, partigiani', petites merveilles illustrant d'emblée le style du groupe. On y trouve des titres rapides très punk dans la composition ('Militanz', 'Sono come tu mi vuoi' ou 'Spara Jurij') menés par une boîte à rythmes déchaînée; s'ils sont bons, c'est ailleurs que se révèle tout le potentiel de nos Italiens. L'excellent 'Punk islam' et ses touches orientales notamment ou encore 'Morire' qui débute par une mélodie calme pour basse et guitare...une voix scandée dans un microphone se profile dans le lointain, la guitare prend une teinte gresillante tandis que Giovanni proclame: 'Laude a Mishima e a Maiakovski', puis explosion, beat rapide et fin...Génial ! Citons encore 'Emilia paranoica' et sa rythmique quasi hypnotique, allusion à leur région d'origine. Le chant est une composante essentielle de l'identité de CCCP, bien qu'ils soit souvent scandé, il part dans quelques envolées plus mélodiques par moment, ce qui renforce le charme des morceaux. A noter pour la petite histoire que ces premiers essais ont été enregistrés avec peu de moyens dans une chambre utilisée comme studio d'enregistrement improvisé...on en fait des belles choses avec peu de moyens.

Note : 5/6

Page 145/167 RICOCHET GATHERING : Trilogy

Chronique réalisée par Phaedream

Trilogy est une compilation d’extraits, enregistrés lors des festivals de Ricochet Gathering des années 2005 à 2007. Fidèle à sa marque de commerce, Vic Reck et son label Ricochet Dream propose un excellent pressage et montage de ses morceaux inédits qui ont été délivrées dans un contexte d’improvisation parfois tranquille, à d’autres moments survoltés. Deux titres pour chacun des trois festivals présentés en format digipak, démontrant que l’ère du numérique téléchargeable à encore de la compétition, pour le plus grand bonheur des consommateurs. Z Dna Oceanu décolle cette compilation avec un titre qui plane dans un milieu halieutique. Très près de Froese et Aqua, le titre dérive lentement sous un synthé plaintif, comme un sax solitaire, parmi de lourdes strates qui ourlent telles des vagues sur une structure très atonale. Wyspa est la 1ière surprise sur Trilogy. Un titre légèrement plus dynamique avec sa séquence pulsative qui bat au rythme de tam-tam tribal sur un synthé aux lourdes réverbérations circulaires. Les synthés bouclent de superbes solos dans une atmosphère clanique avec des guitares qui s’échangent les cercles plaintifs parmi des chœurs amérindiens et des effets sonores qui sortent de l’ordinaire. Une superbe pièce envoûtante qui étonne d’écoutes en écoutes. Une basse martelante initie la cadence de Tug of Love. Le rythme y est lourd et est prétexte à une abondance de solos qui vrillent en cercle sur un tempo qui gagne en lourdeur avec de fins arpèges séquencées qui scintillent sous un orage de décibels pour s’atténuent en mi-parcours. Place à une atmosphère ambiguë où les bruits étranges fusionnent sur des stries aigues, créant une atmosphère psychédélique à la Pink Floyd, avant que les lourdes pulsations initiatrices reviennent nous gruger les tympans. Un lourd titre électro-psychédélo où l’esprit de l’improvisation est largement perceptible. Tuscan Sunset nous ramène dans les décors tribaux de Steve Roach. Strates errantes sur tam-tams pilonnant et un mellotron aux flûtes mélodieuses, accompagnée d’une fusion guitares synthés très musicales. Un bon titre, dans la lignée de Wyspa, mais en plus rythmé. À entendre Nasze Miejsce, j’ai un peu de difficulté à croire qu’il s’agisse de pure improvisation. Un long titre de 17 minutes qui débute sur des percussions canonnantes en ‘’fade in’’, ce qui me semble être une vraie batterie, avec un séquenceur en double phase créant une cadence nerveuse. La complicité entre musiciens est indéniable, car tout converge avec justesse tant au niveau du rythme que des solos. Des solos bouclés qui fusent avec force sur un titre lourdement animé qui se rapproche plus d’un rock progressif, voire électronique, que de l’électronique pur. Seules les ondes ondoyantes qui circulent, telles des serpentins sonores, pour terminer en superbe explosion synthétique nous rappellent l’atmosphère électronique. Une ambiance musicale plus près de la folie d’Ozric Tentacles que du pur TD, qui est à l’origine de ses festivals. Un gros rock prog plein d’énergie, d’accords en boucles et de complaintes synthétiques sur réverbérations lourdes et traînassantes. Juteux….Montana clôture avec des synthés légèrement symphoniques et autres aux solos vrillé sur des percussions de métal feutrés. De beaux accords mélodieux circulent parmi cette tempête sonore qui vit sur une structure au rythme funky. On sent en milieu de titre les égards de l’improvisation, mais le tout se restructure vers une finale éclatante et saisissante où solos extrêmement pointus épousent une forte élégie d’accords puissamment élevés qui se termine dans un ‘’fade out’’ rappelant que ces concerts improvisés sont des orgies musicaux qu’une poignée d’auditeurs ont la

Page 146/167 chance de contempler, mais surtout d’entendre dans toute leurs splendeurs.

Note : 5/6

Page 147/167 JUDAS PRIEST : Ram it down

Chronique réalisée par Nicko

Ok, je suis de retour et si y'en a que ça gêne, c'est pareil... Bref, je continue avec Judas... 1988, "Ram it down", qui fait suite au live plutôt moyen "Priest...Live" et à l'album décrié "Turbo". Bientôt 20 ans au compteur depuis la création de la formation en 1969 - le nom est arrivé en 1971, mais on va pas chipoter... En 1988, Judas Priest est déjà considéré comme un dinosaure du metal dont l'âge d'or est maintenant derrière lui. Et c'est pas avec ce "Ram it down" que ça va changer ! Ca commençait pourtant bien avec un title track bien furieux et speed, limite entre power et thrash metal survitaminé. Pendant un moment, je me suis dit que c'était reparti là où ça n'aurait jamais dû s'arrêter avec "Screaming for vengeance". Après quelques titres, faut se rendre à l'évidence, à l'image de "Point of entry", le groupe enchaine les morceaux convenus, sans génie, couplet/refrain, mid-tempos, sans âme. Le son des instruments est abominable, synthétique, les guitares, seules, s'en sortent par moments avec des relents agressifs, mais dans l'ensemble, c'est du heavy metal propret avec un Rob Halford qui s'en sort avec plus que les honneurs faut l'admettre. On a un peu l'impression que c'est le seul qui veut vraiment donner de la pêche à un album trop convenu. Même un morceau plus aventureux comme "Blood red skies" me laisse de marbre. K.K. Downing et Glenn Tipton s'en sortent aussi bien avec des solos/duo pas mauvais, mais désservis par une production pas du tout adapté. Désolé d'être aussi direct et sans trop de complaisance, mais là, Judas Priest nous sort le stéréotype de l'album d'un groupe qui cherche à retrouver sa gloire d'antan sans y parvenir. Limite pathétique au final... Du niveau de "Point of entry" et de "Turbo", c'est-à-dire bien bas.

Note : 2/6

Page 148/167 NECROBLASPHEME : Destination : Nulle part

Chronique réalisée par Nicko

Il aura fallu attendre près de 6 ans pour voir débouler le deuxième album des français de Necroblasphème alors qu'ils avaient sorti le premier au bout d'à peine un an et demi après leur création ! Au programme, pas de révolution ceci-dit, le quintette frappe toujours très fort dans le gros gras death metal avec quand même un concept et un artwork très décalé et délaissant le gore qui caractérisait les débuts du groupe. Sur cette galette, on retrouve le chant toujours aussi grave et profond de Yann, la frappe chirurgicale d'Olivier derrière les fûts et la rythmique de plomb bien pesante des 4 et 6 cordistes. Ce qui change, c'est qu'avant, les morceaux étaient beaucoup plus direct avec des riffs entrainants, limite catchy, et une dynamique dans les structures des morceaux. Là, on sent que l'accent a été mis sur l'ambiance noire, sombre et pesante. Leur death metal est plus réfléchi, moins facile d'approche je trouve. On a vraiment l'impression de se prendre un gros monolithe (tel celui qu'on trouve en plein milieu de la pochette) dans la gueule, oppressant, lourd, du gros magma puissant et opaque. C'est là que se joue la réussite de l'album. Pour ma part, je regrette juste certains breaks et le sens du riff si prenant du premier album. N'empêche, ce deuxième album reste du bon gros metal qui tâche, bien exécuté avec une grosse production ultra-adapté, bien crade et lourde à la fois.

Note : 4/6

Page 149/167 METALLICA : Death magnetic

Chronique réalisée par Nicko

Allez, fallait bien en parler de ce nouveau Metallica, 5 ans après le très décrié "St. Anger". Voici donc la cuvée 2008 de Metallica, premier album avec Robert Trujillo à la basse. Faut se rendre à l'évidence, les américains se sont pas foutu de la gueule du monde avec cet album. C'est pas le disque ultime, mais quand même, il envoie du charbon méchamment ! Les 2 premiers tiers de l'album sont tout bonnement excellents. Ils gardent toujours leurs structures à rallonge, mais là, en plus, ils balancent des gros riffs très typiques de leurs années 80, très thrash metal, mais avec un son plus actuel sans pour autant perdre en agressivité. Je fais parti de ceux qui ont beaucoup apprécié "St. Anger" pour ce côté décalé et différent. Là, avec ce "Death magnetic", je le trouve tout aussi réussi, mais dans un style plus direct et facile d'accès et surtout très inspiré. Ca respire la spontanéité et en plus, ça marche vachement bien. La touche Metallica qui a fait leur succès est définitivement de retour, c'est quasiment un retour aux sources après une décennie à expérimenter divers horizons. Là, on peut le dire bien haut, Metallica joue du thrash metal. Les solos sont de retour et là dessus, putain, ça fait du bien. "All nightmare long" n'est qu'un simple exemple pour illustrer cet état de fait. Je sens juste une petite baisse de régime à partir de "The unforgiven III" mais la fin, avec "My apocalypse", permet au groupe de terminer l'album sur une bonne touche bien brute de décoffrage !! Inutile de dire qu'avec ce nouvel album, Metallica renoue avec sa gloire passée et, j'imagine, une bonne partie de ses fans des années 80 (et puis, même le logo d'origine est de retour !). Bref, du très bon boulot de la part des californiens.

Note : 5/6

Page 150/167 DARKTHRONE : Dark thrones and black flags

Chronique réalisée par Nicko

Et c'est reparti ! A peine un an après le très bon "F.O.A.D", le duo norvégien culte Darkthrone revient déjà avec ce "Dark thrones and black flags". Vous faites pas d'illusions, ce nouvel album peut être considéré comme un album de chutes de studio de "F.O.A.D", c'est pareil, du punk/black metal roots jusqu'au bout des ongles. On retrouve ce son necro, ces morceaux qui ne tiennent que sur quelques riffs, donc à double tranchant. Tout a été écrit et enregistré à l'arrache, même la pochette est un quasi-coopié/coller de son prédécesseur. Fenriz chante toujours aussi mal, mais il a un vrai feeling à la batterie. Ensuite, on a encore droit à un livret culte avec des photos de Fenriz en camping, sa liste de CD à découvrir/acheter d'urgence, genre les trucs impossible à dénicher "que c'est obligé que tu le possèdes sinon c'est pas un trve"... Bref... Après, l'album s'écoute, mais il n'y a aucune nouveauté depuis le précédent album. On trouvera donc des morceaux sympas et d'autres chiants. Toujours plus loin dans le direct, le up-tempo très punkisant, le chant de poivrot, bref, du black metal "Do It Yourself", "Fuck Off And Die". Le groupe n'en fait qu'à sa tête, continue de sortir des albums tous les ans. Ca finira bien par lasser les fans même si il reste toujours au milieu de tout ça des morceaux intéressants.

Mais qu'est-ce qu'il y a comme déchets...

Note : 3/6

Page 151/167 MOTÖRHEAD : Motörizer

Chronique réalisée par Nicko

"Nicko c'est comme Lemmy... il n'arrêtera JAMAIS!"... Voici une citation d'un de nos chroniqueurs les plus acharnés et respectés. Je ne sais pas si je n'arrêterais jamais, on verra dans une trentaine d'années, mais en tout cas, y'en a un qu'on n'arrête vraiment pas, c'est Lemmy. Plutôt Mr. Lemmy Kilmister. Imperturbablement tous les deux ans, le voici qui sort avec ces comparses de Motörhead un nouvel album. Je les vois déjà les détracteurs du groupe qui vont nous sortir qu'à l'instar d'AC/DC, Motörhead sort tout le temps le même album. Je laisserai ce genre de considérations de côté et encouragerai ces mêmes personnes à aller se cultiver un minimum et écouter les albums de Motörhead qu'il n'en est rien. Et le pire, c'est qu'à quelques rares exceptions près, le groupe s'en est sorti toujours très bien et depuis quelques temps, je trouve même qu'il se bonifie avec le temps. Putain, mais quel feeling encore cet album. C'est du gros rock n' roll burné (on en attendait pas moins de la part de Lemmy & co.), mais toujours super inspiré, la bibine à la main et à taper du pied ! C'est lourd, c'est rapide, c'est bon, c'est inspiré, la basse toujours aussi vrombissante, le "meilleur batteur de rock n' roll au monde" derrière les fûts et ça balance ! Putain, comment ça fait du bien. C'est intense comme du bon vieux putain de rock n' roll ("Rock out") avec toujours ce p'tit côté bluesy histoire de faire varier l'album ("One short life"). Pas de titres inutiles, pas de remplissage, de la pure jouissance. "English rose" est parfaite pour chanter sous la douche, "The thousand names of God" est une parfaite conclusion à l'album. Non, Lemmy n'est pas à la retraite, il garde toujours son chant intacte et son envie de jouer du bon rock speed pied au plancher et cette expérience si énorme. Encore une fois, on se fait avoir. Un putain d'album !

Note : 5/6

Page 152/167 DEVIAN : God to the illfated

Chronique réalisée par Nicko

Oui, aujourd'hui, j'ai définitivement envie de vous faire chier ! C'est clair ! Voilà, je continue avec le deuxième album de Devian, nouveau groupe de Legion et Emil, d'anciens membres de Marduk. Je sais que personne n'aime ce groupe, mais je m'en fous, moi, j'adore. Ils ne ré-inventent rien, ils jouent tout simplement du bon thrash/black metal à la suédoise avec une touche de plus en plus forte de heavy dans leurs lead de guitares (raah ce "Assailant"). Legion a retrouvé son chant bien puissant, même si ça reste moins démoniaque que lorsqu'il avait 19-20 ans sur "Heaven shall burn... when we're gathered". Emil bourrine comme il faut derrière, d'une précision et d'un touché si suédois, fidèle à lui-même, même si je le répète, quelques blasts en plus ne feraient pas de mal loin de là. Les compos sont très rentre-dedans, sans compromis, directes. Pas de grosses expérimentations, juste du bon gros metal extrême, mélange de black et de thrash. "Ninewinged serpent" représentait pour moi une véritable surprise, là, ce successeur permet de poser véritablement les bases de leur style et de consolider ce qui avait déjà été mis sur le premier album. L'inspiration est là, l'exécution aussi. Du très bon boulot, carré, précis, inspiré, du bon metal extrême made by Abyss Studio !

Note : 5/6

Page 153/167 OFERMOD : Tiamtü

Chronique réalisée par Nicko

Ah les groupes cultes... Là, je tiens un spécimen rare. Ofermod... 10 ans d'existence et juste 4 morceaux composés ! Bon, ok, dans le tas y'a quand même du fabuleux... Les voilà qui nous sortent leur premier album, "Tiamtü". Vu la qualité de l'EP "Mystérion tés anomias", on pouvait s'attendre à du bon black metal orthodoxe mais aussi être forcément déçu car la barre était placée très haut. C'est un peu ce dernier sentiment qui prédomine ici. Franchement, je suis déçu. L'album n'est pas vraiment mauvais, mais il manque véritablement de profondeur et d'âme. Je peux comprendre qu'on ne fasse pas aussi bien que leur mini-CD, mais là, la production est mauvaise, elle manque cruellement de noirceur et de profondeur abyssale. Les compos ne sont pas spécialement inspirées. J'ai un peu l'impression que le groupe avait comme prétexte son concept pour nous sortir un album en demi-teinte. La batterie ne claque pas comme par le passé, le son est trop propre et lisse. Et alors le chant... Nebiros a toujours un chant bien démoniaque, pas trop mis en avant, mais alors le chant clair se voulant chœur fait vraiment pitié... Sur "Pralayic withdrawal", ça devient absolument horrible et ridicule. Tout n'est pas à jeter, mais un peu à l'image d'un Watain, Ofermod nous sort un album plus facile d'accès avec moins d'ambiance et une production pas adapté. Je ne peux qu'être déçu...

Note : 3/6

Page 154/167 COOPER (Alice) : Along came a spider

Chronique réalisée par Nicko

Les vieux dinosaures... Après Lemmy, voici Alice Cooper, nouveau sexagénaire ! Toujours aussi actif comme son comparse britannique. Le voici de retour 3 ans après le bon "Dirty diamonds". "Along came a spider" fait partie de ces albums d'Alice Cooper un peu passe partout, sans trop de génie, mais pas non plus pourri. L'écoute de l'album se fait bien, mais il ne se passe pas grand chose, faut avouer. Du rock n' roll sur ton de film d'horreur à la Hammer, bien joué, avec de bons moments, mais rien de transcendant ! Pour faire simple, il s'agit d'un album de plus, qui ne sert pas à grand chose, juste à dire que l'artiste est toujours vivant. Sans être aussi mauvais que "Dragontown", ce 25ème album studio (!) ne restera pas dans les annales bien qu'on ait droit à quelques invités de marques comme Slash. Typiquement l'album bouche trou où on ne sait même plus quoi ajouter tellement c'est bateau, les morceaux sont tous typés couplet/refrain, sans inventivité, sans génie, sans inspiration. Le genre d'albums qu'on a trop souvent eu à écouter chez Alice. Bref, déception.

Note : 3/6

Page 155/167 THE CRAMPS : Songs the lord taught us

Chronique réalisée par dariev stands

A circonstances exceptionnelles... Bon, je vais pas vous la faire en entier : Lux Interior est passé du statut de mort-vivant culte du psychobilly à celui de mort tout court. Ça fait chier. Comme disait un internaute fort avisé en ces pages : "quand Lux Interior est mort, j’ai pleuré toute la journée, quand Xenakis est mort, j’ai repris 2 fois de la Féta". Trêve d’âneries, dire que je n’avais pas envisagé cette chronique depuis longtemps serait mentir. On va donc laisser de côté la rubrique nécro qui pourtant leur va si bien, et célébrer comme il se doit la pulsation lubrique et râpeuse de cette musique, bel et bien immortelle, elle, en revanche. Dès TV Set, tout auditeur pourvu d’une paire d’oreilles en bon état de marche sera pris de palpitations spasmophiles, le cerveau suspendu au trémolo d’outre-tombe de Lux Interior, le battement de cœur réglé sur le tempo Moe Tuckerien primitif de Nick Knox, et le bas-ventre… laissez Poison Ivy, s’en occuper, elle sait y faire. Méfiez-vous, sa guitare coupe. J’en oublierai presque l’inénarrable Brian Gregory, un vrai méchant de comics, plus vrai que nature, lui aussi préposé au massacre à la six cordes. La formation classique des Cramps, qui se retrouvait là dans les studios de Sam Philips à Memphis (ceux de Presley et Jerry Lee Lewis) avec Alex Chilton, enfant du midwest le plus crasseux tout comme eux et ex-leader des Box Tops et de Big Star, grand laissé pour compte du rock s’il en est, qui allait ici prodiguer LE son qu’il fallait pour mettre en valeur une telle formation (pas de basse !). Le résultat ? 13 chansons que le seigneur leur a apprises. Plutôt le seigneur du bas que celui du haut, si vous voulez mon avis. "A classer dans Musique Sacrée" dit la tranche de la réédition cd. Une réédition bien cool (quoique forcément sacrilège à posséder, pour un groupe pareil) qui rajoute 5 prises alternatives au son égal à celui de l’album, avec en prime un aperçu des engueulades entre Alex Chilton et un Lux chaud bouillant, se transformant littéralement à loup garou en direct pendant une prise de I Was a Teenage Werewolf, à l’époque un peu dans la déchéance et la bouteille. Un parfait complément à l’ambiance de l’album. Mais qu’y trouve-t-on exactement, dans cet album ? Eh bien, le meilleur des Cramps, à peu de choses près : Il y a I’m Cramped, leur morceau emblématique, mais surtout Garbageman, véritable profession de foi et déclaration de guerre à l’intention des faux punks, qui avaient bien du mal à rivaliser avec la démence scénique du groupe, ici brillamment suggérée par des paroles cultissimes et un solo à se frapper la tête contre les murs. Les tubes immortels s’enchaînent ensuite : I Was A Teenage Werewolf donc, bluesy et lugubre, et accessoirement meilleur chanson jamais écrite sur la puberté (Blink 182 se chargeant de la puberté… des blaireaux), l’énorme Sunglasses After Dark (aaaaaaaaaahh i’m so shaaaaarp !!), plus noise et urgent que du Sonic Youth et le rockabilly pur de Mad Daddy, éructé jusqu’à l’épuisement par un Elvis branché sur 10 000 volts. Lui aussi venait de clamser, et pourtant ici, son cadavre n’avait jamais semblé aussi fringuant. Eboueurs nyctalopes, retourneurs de tombes, rôdeurs des vidéo-clubs et disquaires de l’amérique profonde, les Cramps étaient déjà connus comme des spécialistes de l’exhumation de séries Z des années 50 et collectionneurs de 45tours obscurs (ils disaient en avoir plusieurs pièces remplies jusqu’au plafond). Ils étaient - de l’avis de leurs fans qui le crient depuis bientôt 30 ans - un style de vie avant d’être un groupe. Référentiel jusque dans les moindres recoins cradingues et mal éclairés. D’où les vieux rocks oubliés déterrés ici à grand coup de pelles dans le cimetière des bacs à soldes : Rock It To The Moon, Tear it Up de Johnny Burnette, Strychnine des Sonics, et bien sûr le génial Fever de Little Willie John, popularisé par Presley, transcendant littéralement l’original. C’est une véritable nuit des mort-vivants… Pourquoi donc s’en faire pour un chanteur mort, puisque les Cramps se

Page 156/167 seront échinés à démontrer, toute leur carrière durant, que l’oubli et la mort n’on aucune importance tant qu’il existera des fous et des nerds pour tout traquer, tout récupérer, et tout célébrer, inlassablement. Précisons quand même : ce sont bel et bien les originaux des Cramps qui remportent la palme ici. Un légère baisse de régime sur la face B coûte à ce disque sa sixième boule, amplement méritée mis à part ce petit désagrément. Laissons le mot de la fin à Paul Rambali, auteur des excellentes notes de pochettes du non moins excellent livret, aux superbes photos : “It shivers and quakes, it slithers and crawls, and it throbs and it trembles. And I’m gone.”

Note : 5/6

Page 157/167 BOWIE (David) : iSelectBowie

Chronique réalisée par Nicko

Un retour sans chronique de Bowie ne serait pas un véritable retour ! Donc voilà, fin 2008, Bowie décide de sortir une compilation de morceaux pour la plupart peu connus du grand public mais qui sont de véritables petits bijoux, des perles. Ces titres sont tous tirés de ses précédents albums et sont facilement disponibles. Pas de raretés ici, rien qui puisse contenter le fan à la recherche de la pépite d'or. Le remix de "Time will crawl" est anecdotique, tout comme le morceau lui-même... Non, là, on a juste une compil' qui permet de mettre en lumière des titres qui n'ont pas eu le succès d'autres. L'intérêt ici est d'avoir une petite explication par Bowie lui-même sur chacun de ces titres, des petites anecdotes, des petites histoires sympas. Une exception ? Bah oui forcément, le premier titre ! Bowie le dit lui-même, "Life on Mars?" est un hit, tellement fabuleux qu'il n'a pas pu ne pas l'inclure. Pour le reste, que du bonheur... Rien de nouveau, du surperflu, oui, mais quand on aime... Et si vous ne connaissez pas ces titres, allez-y, vous y trouverez votre compte. Pas indispensable quand on possède les albums, c'est juste une compilation qui permet à nouveau de voir quel formidable artiste est David

Bowie.

Note : 4/6

Page 158/167 IMPIETY / ABHORRENCE : Two barbarians - A vulgar abomination of Satan's intolerant warlords

Chronique réalisée par Nicko

Un peu de brutalité maintenant, ça faisait longtemps... Là, on est parti sur un split entre Impiety et Abhorrence. Ca commence avec Impiety, de Singapour, qui nous propose un nouveau morceau et une outro. Après avoir été totalement subjugué par leur dernier album en date, "Formidonis Nox Cultus", j'attendais beaucoup de ce split. Quelle déception !! Le morceau proposé est totalement confus, super brutale mais plat comme pas deux. Je trouve ce "Storm of abhorrence" totalement loupé et indigne du statut des asiatiques. Il n'y a aucune dynamique, du simple bourrinage stérile. Quant à l'outro, limite j'en aurais honte... Les voilà qui reprenne à leur sauce le riff du "Eye of the tiger" (Rocky...) de Survivor et à s'amuser/délirer avec. Voilà, pour Impiety, c'est torché, et c'est dommage ! Maintenant Abhorrence. Je ne suis pas super fan de ce death metal bien boeuf, mais à côté de cette mascarade d'Impiety, ils remontent vachement le niveau, Ca bastonne à mort avec une réelle rage et la volonté d'en mettre plein la vue. Le chant est ultra-démoniaque et on sent que le duo, que je ne connaissais pas du tout, maitrise sont sujet. Le dernier morceau est une reprise de Sarcofago et force est de constater que ça défouraille sévère. Au final, Abhorrence sort largement vainqueur et je dois dire que j'ai été très surpris de voir ce résultat. Après, il faut plus prendre cette sortie comme une sorte de pièce de collection, car très limitée, parce que la durée plutôt courte n'aide pas à avoir un jugement définitif sur le potentiel de ces groupes. La preuve en est de la piteuse performance d'Impiety en regard de ce qu'ils ont pu faire par le passé.

Bref, un split étonnant, déroutant et pour le moins décevant.

Note : 3/6

Page 159/167 IMPIETY : 18 atomic years - Satanniversary

Chronique réalisée par Nicko

On continue sur Impiety... Après un split, voilà qu'ils nous sortent une compilation double-CD pour fêter les 18 ans de la bande à Shyaithan ! C'est vrai que quand on y pense, y'a de quoi faire depuis les débuts du débuts des années 90 typiquement black metal ! Le format de la compil' propose une rétrospective partant des plus récents travaux pour revenir vers les débuts du groupe. Rien est laissé au placard avec même des morceaux des premières démos du groupe. En terme d'inédits, le groupe nous prpose une intro et un nouveau titre, spécialement écrit pour l'occasion, "Dominion 18". Il s'agit d'un morceau plutôt long, plus de 7 minutes 30, plus calme et lourd que leurs morceaux typiques. Ceci dit, je préfère le déferlement de blasts ! Le chant est aussi moins extrême et puissant. Comme sur le split avec Abhorrence, le morceau inédit n'est pas franchement représentatif de la musique généralement joué par le combo. Pour le reste, on a donc droit à 3-4 morceaux de chacun des albums du groupe. Ce qui nous permet de voir toute l'évolution du groupe à travers les ans, du gros black metal bien brutal à la Angelcorpse des derniers albums, au black technique de "Kaos kommand 696", pour revenir au thrash/black de l'énorme "Skullfucking armageddon", au black primitif d'"Asateruul awaleen" avant de finir sur les débuts (!) très death metal plus typique lors du début des années 90 que le black. Enfin, on a droit à un packaging très sympa avec un format singulier et un artwork très soigné. Même si les fans n'y trouveront pas autant de nouveautés que cela, cette sortie propose quand même de l'intérêt notamment grâce à un objet bien soigné et de qualité générale bonne.

Note : 4/6

Page 160/167 IMPIETY : Dominator

Chronique réalisée par Nicko

Ah ! Quand même !! Après deux sorties dont les nouveautés étant tout de même très moyennes (sur le split avec Abhorrence et le best of), voici un mini-CD (3ème sortie en 4 mois !), "Dominator" qui remet les pendules à l'heure !! On a droit à 4 titres (dont une reprise de Sarcofago) et une intro. Au programme, c'est bien simple, c'est du massacre total, l'annihilation de toute forme de résistance, de l'agressivité pure. Le chant est ultra-vindicatif, méchant. On retrouve tout à fait le style présent sur "Formidonis Nox Cultus" en plus brutal mais en légèrement moins inspiré. Mais putain, quelle intensité !!! Ca n'arrête pas, ça bourrine à mort, entre blasts et up-tempos destructeur. Voilà un quart d'heure ultra-intense et sans répis, dans le même ordre d'idée qu'Angelcorpse. Voilà en tout cas la sortie qui me rassure sur le futur d'Impiety, les asiatiques sont toujours aussi virulents et brutaux. Vous voulez vous prendre des mandales dans la gueule, ne plus savoir où donner de la tête et toujours savoir ce qui se passe ? Vous aimez le gros metal extrême ultra-brutal qui possède une énorme production qui dégomme tout sur son passage ? Voilà, "Dominator" est là pour vous, Impiety à sa meilleure forme ! Si le prochain album est dans la même veine, ça va donner sévère !!

Note : 5/6

Page 161/167 FLUX OF PINK INDIANS : The fucking pricks treat us like cunts

Chronique réalisée par Twilight

En matière de punk expérimental, je pensais avoir atteint le summum avec CRASS; avec ce second album leurs collègues de Flux of Pink Indians vont pourtant bien plus loin encore. 'The fucking pricks treat us like cunts' est le résultat d'un pari osé, audacieux mais également un peu utopiste, la démarche étant de rendre la musique inaudible pour que les auditeurs se concentrent sur les textes. Ces derniers traitent notamment de la violence entre hommes et femmes (l'un des membres ayant lui-même subi un viol), ce qui vaudra au disque (sorti comme un double) de se voir bannir des rayons des magasins HMV pour obscénité. Comme il fallait s'y attendre, les ventes feront de toute manière un flop: 5000 copies uniquement alors que Flux of Pink Indians en avait vendu 20000 du précédent opus. Ce disque est pourtant incroyable. Pas évident du tout effectivement. Dans sa version cd, il se présente comme un unique morceau de près d'une heure mais découpé en titres comme à l'origine. La première constante est que 'Fucking pricks treat us like cunts' est en perpétuel mouvement, n'y cherchez pas le moindre embryon de titre; la musique semble évoluer en totale indépendance de la récitation, tantôt masculine, tantôt féminine, parfois même en duo. On frise l'indus, sifflements de guitare, piano désaccordé, roulements de batterie, cassures, breaks, explosions, reprises, bruitages, accélérations, bribes radiophoniques, jamais les musiciens ne laissent s'installer la structure d'une chanson traditionnelle... Un véritable magma sonore, malsain, maintenant l'auditeur dans un état de tensions quasi permanent où les instants de calme (rares) sont vite suivis d'attaques bruitistes. Le travail vocal est lui aussi remarquable mais j'avoue que si le but était de mettre les textes en avant, la méthode choisie n'était pas la meilleure; les voix sont elles-aussi déformées par les effets, superposées, se donnent la réplique rapidement...Certes la récitation se détache parfois de belle manière mais j'avoue qu'il n'est pas aisé de suivre le propos de la narration (la version cd ne propose pas les paroles, peut-être était-ce le cas sur le LP ?)...Qu'importe, qu' on la saisisse ou non, la violence du propos s'incarne à merveille dans les sonorités et les intonations colériques du timbre, faisant de cette gallette une oeuvre cohérente, violente, remuante, à placer aux côté d'Einstuerzende Neubauten bien plus que des Sex Pistols (dont on trouve ironiquement un bout de reprise de 'EMI')...Le punk dans sa forme la plus extrême, la plus audacieuse et la plus pure, rejeton de 'Music metal machine'.

Note : 5/6

Page 162/167 Informations

Vous pouvez retrouvez nos chroniques et nos articles sur www.gutsofdarkness.com.

© 2000 - 2009

Page 163/167 Table des matières

Les chroniques ...... 3

FROESE (Edgar W.) : Aqua ...... 4

FROESE (Edgar W.) : Aqua 2005 ...... 6

TRISTANO (Francesco) : Auricles bio on...... 7

SATURNUS : Martyre...... 8

COHEN (Leonard) : Various positions...... 9

COMPILATIONS - DIVERS : Milano new wave 1980-83 ...... 12

GORED : Human ...... 13

MODERN ENGLISH : After the snow...... 14

AVANT-GARDE : Cyanure ...... 15

AXESS : Voices of Dawn ...... 16

NUCLEUS : Elastic Rock ...... 18

NUCLEUS : We'll Talk about It Later...... 19

NUCLEUS : Solar Plexus ...... 20

NUCLEUS : Belladonna ...... 21

NUCLEUS : Labyrinth...... 22

NUCLEUS : Roots ...... 23

NUCLEUS : Under The Sun...... 24

NUCLEUS : The Snakehips Etcetera...... 25

NUCLEUS : Alley Cat...... 26

NUCLEUS : In Flagrante Delicto ...... 27

DADA POGROM : Happy happy happy...... 28

ACTION BEAT : The Noise Band from Bletchley ...... 29

MARCOEUR (Albert) : Travaux Pratiques ...... 30

MENAHAN STREET BAND : Make The Road by Walking...... 31

SHOLI : s/t ...... 32

WELLS & MAHER SHALAL HASH BAZ (Bill) : Gok...... 33

GAE BOLG : Requiem ...... 34

RAJNA : Otherwise...... 35

FORSETI : Jenzig ...... 37

FORSETI : Erde ...... 38

TROUBLE FAIT' : Sub Lumina prima...... 39

DILLINGER : CB200 ...... 40

Page 164/167 BRIGHTER DEATH NOW : Great Death I...... 42

BRIGHTER DEATH NOW : Great Death II...... 43

BRIGHTER DEATH NOW : Great Death III ...... 44

BRIGHTER DEATH NOW : Nordvinterdöd ...... 45

U2 : The unforgettable fire...... 46

COLD PHOENIX : Your eyes are my eyes...... 49

FANGER & SCHONWALDER : Stromschlag ...... 50

FROESE (Edgar W.) : Epsilon In Malaysian Pale...... 52

FROESE (Edgar W.) : Epsilon In Malaysian Pale 2005...... 53

PSYCHONAUTS : Alchemy ...... 54

IRM : Virgin mind...... 55

U2 : Under a blood red sky ...... 56

EMMENS & HEIJ : Silent Witnesses Of Industrial Landscapes...... 57

U2 : The joshua tree ...... 59

BRISE-GLACE : When in Vanitas ...... 61

PANGÉE : Hymnemonde ...... 62

SPACE NEEDLE : The Moray Eels Ate The Space Needle ...... 63

POLYTOXICOMANE PHILHARMONIE : Plays Psycho Erectus...... 64

NINE HORSES : Snow Borne Sorrow ...... 65

U2 : Rattle and hum...... 66

THE BROTHERHOOD OF PAGANS : Only once ...... 69

MAURIZIO : M-Series ...... 70

CZUBALA (Marcin) : Dope ...... 71

THO THO : Tho tho...... 72

ATOMIC NEON : Darkenia ...... 73

SYNTH.nl : AtmoSphere ...... 74

NEVA : Individu ...... 75

U2 : Achtung baby ...... 76

PUBLIC IMAGE LIMITED : Death disco ...... 78

CERVELLI STANKI : Street rock'n'roll ...... 79

SONAR : Sonar...... 80

AURAL BLASPHEMY : Catharsis...... 81

DIE FORM : Some Experiences With Shock ...... 82

DIE FORM : Inhuman...... 83

DIE FORM : Exhuman...... 84

Page 165/167 DIE FORM : Her[t]z Frequenz ...... 85

SIMIAN (Ashen) : Omicron In Ostrobothnian Finsternis...... 86

COHEN (Leonard) : Ten new songs ...... 88

DIAFRAMMA : Albori...... 89

VON HAULSHOVEN : Kiko And The Ancient Astronaut ...... 90

DUTCH SPACE MISSION : Cosmic Grunn...... 91

COIL : Unnatural History III...... 92

THE MOODY BLUES : Days of Future Passed ...... 93

THE MOODY BLUES : In Search of The Lost Chord ...... 94

THE MOODY BLUES : On the Threshold of a Dream ...... 95

THE MOODY BLUES : To Our Children's Children's Children ...... 96

THE MOODY BLUES : A Question of Balance...... 97

ATARAXIE : Anhedonie...... 98

THE ORGAN : Thieves ...... 100

HIEROPHANT : The tome ...... 101

BESTIAL WARLUST : Vengeance war 'till death...... 102

COIL : presents Black Light District - A Thousand Lights in a Darkened Room...... 103

CANDLEMASS : From the 13th sun...... 104

NIELSEN (1865-1931) (Carl) : Symphonie n°3...... 105

COMPILATIONS - TRIBUTE ALBUMS : Expositions - a tribute to Charles de Goal...... 108

XXX ATOMIC TOEJAM : A Gathering of Tribes for the Last Human Be/In ...... 109

CHRISTIAN DEATH : Zero sex ...... 110

CRETIN : Freakery ...... 111

THE UNITED STATES OF AMERICA : The united states of america...... 112

NECROVATION : Breed deadness blood...... 114

BLOODBATH : Resurrection through carnage...... 115

SACRIFICE : Torment in fire...... 116

NOISEX : Ignarrogance ...... 117

AIRSCULPTURE : Burn ...... 118

ANDY (Horace) : Dance Hall Style...... 120

COIL vs ELPH : Born Again Pagans...... 122

HIGHGATE : s/t ...... 123

COIL vs ELPH : Worship the Glitch ...... 124

COIL : Stolen & Contaminated Songs...... 125

CHRISTIAN DEATH : An official anthology of 'live' bootlegs ...... 126

Page 166/167 BAX (1883-1953) (Sir Arnold) : November woods / The garden of fand / Tintagel ...... 127

BAX (1883-1953) (Sir Arnold) : Winter legends ...... 130

CEMETARY : An evil shade of grey ...... 133

THE MOODY BLUES : Every Good Boy Deserves Favour ...... 134

THE MOODY BLUES : Seventh Sojourn...... 135

DZYAN : S/t ...... 136

DZYAN : Time Machine ...... 137

DZYAN : Electric Silence...... 138

COIL : Queens of the Circulating Library ...... 139

COIL : Constant Shallowness leads to Evil ...... 140

KIRLIAN CAMERA : Held V - Shadow Mission...... 141

DARK TALES : Living out ...... 142

MALOMBRA : Our Lady of the Bones...... 143

CCCP : Compagni, cittadini, fratelli, partigiani - Ortodossia II...... 145

RICOCHET GATHERING : Trilogy...... 146

JUDAS PRIEST : Ram it down ...... 148

NECROBLASPHEME : Destination : Nulle part...... 149

METALLICA : Death magnetic...... 150

DARKTHRONE : Dark thrones and black flags ...... 151

MOTÖRHEAD : Motörizer ...... 152

DEVIAN : God to the illfated ...... 153

OFERMOD : Tiamtü...... 154

COOPER (Alice) : Along came a spider...... 155

THE CRAMPS : Songs the lord taught us ...... 156

BOWIE (David) : iSelectBowie...... 158

IMPIETY / ABHORRENCE : Two barbarians - A vulgar abomination of Satan's intolerant warlords ...... 159

IMPIETY : 18 atomic years - Satanniversary ...... 160

IMPIETY : Dominator ...... 161

FLUX OF PINK INDIANS : The fucking pricks treat us like cunts ...... 162

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