le magazine de l'actualité musicale en Fédération Wallonie-Bruxelles n° 8 - Mai / juin 2014

BRNS Patine artistique

The Experimental Tropic Blues Band | Fabrizio Cassol | Quatuor Alcea | majid bekkas | Trop de festivals en Belgique ? 3

Conseil de la Musique Quai au Bois de Construc- édito tion, 10 - 1000 Bruxelles www.conseildelamusique.be L’été est la saison par excellence des fes- Contact par mail : [email protected] tivals. Pendant plusieurs semaines, des di- Contactez la rédaction : zaines de manifestations, concentrées le première lettre du plus souvent sur quelques jours, vont animer prénom.nom@conseil- delamusique.be les villes, les sites historiques et les prairies d’une bonne partie de la Belgique. RéAT D C Ion Une addition d’événements qui relance D irectrice de la rédaction l’éternelle question… n’y a-t-il pas trop de Claire Monville festivals aujourd’hui en Fédération Wallo- Comité de rédaction Nicolas Alsteen 38 08 nie-Bruxelles ? François-Xavier Descamps Christophe Hars Claire Monville Mais déjà, qu’est-ce qu’un festival ? Dans Coordinateur 32 l’esprit de Jean Vilar, le festival était un de la rédaction moyen de plus pour regrouper un public et lui François-Xavier Descamps faire partager les valeurs esthétiques et mo- Rédacteurs Nicolas Alsteen rales qu’il défendait. Mais aujourd’hui, notre Benjamin Brooke société voguant entre loisir et communica- Collaborateurs tion, le festival est devenu plus une formule Nicolas Capart Elsa de Larcerda qu’un état d’esprit. Véronique Laurent On peut s’interroger sur l’identité et l’utilité Luc Lorfèvre Jacques Prouvost des festivals, surtout quand ils affichent des Dominique Simonet 27 programmes fort identiques. Plusieurs élé- Didier Stiers Benjamin Tollet ments de réponses sont complémentaires : Fabrice Vanoverberg un accès plus facile à la culture ou un aspect Correcteurs 11 plus économique. En effet, à l’heure de la Christine Lafontaine Nicolas Lommers crise, ils sont bienvenus car la culture génère Photographe Cover de l’emploi. Et puis, un festival qui marche © Mathieu Zazzo bien peut contribuer à l’équilibre économique d’une région. Mais l’utilité majeure d’un festi- PR OMOTIon val doit ou devrait être artistique et culturelle. &IF D F Usion François-Xavier Descamps Y a-t-il trop de festivals au mètre carré en A BOnneMENT Wallonie et à Bruxelles ? La réponse est fi- V ous pouvez vous abonner nalement très belge : on peut sans doute gratuitement à Larsen. répondre par oui ou par non en fonction de [email protected] Tél. : 02 550 13 20 l’angle d’analyse choisi… Bonne lecture. Cont cep ion Claire Monville g raphique Directrice supersimple.be Impression Paperland Prochain numéro Sommaire ARIC T Les Septembre 2014 OUVRUE E T R L’interview indiscrète Françoiz Breut p.27 Le.com Diversité musicale, mon beau souci p.28 J’ai acheté des disques avec Veence Hanao p.4 12 Décryptage De l’utilité des médailles p.30 En vrac p.5 In situ L’Abbaye de Floreffe p.32 RENCONTRES LES SORTIES Entretien BRNS p.8 16 En Fédération Wallonie-Bruxelles p.34 Rencontre One Horse Land p.11 Listing des sorties p.36 Rencontre The Experimental Tropic Blues Band p.12 Rencontre Little X Monkeys p.13 VUES D’AILLEURS Rencontre Majid Bekkas p.14 Rencontre Afrikän Protoköl p.15 Échos d’Ailleurs p.36 Rencontre Fabrizio Cassol p.16 Vue de Flandre Oscar & the Wolf p.37 Trajectoire Jean-Pierre Bissot p.18 Vue d'australie… p.38 Rencontre Quatuor Alcea p.20 BONUS ZOOM C’était le… 1er juilet 1990 p.39 Dans la jungle des festivals p.22

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j'ai acheté des disques avec… e an vr c… J’ai acheté des

disques avec… Pr ix Caecilia L’Union de la Presse musi- cale belge a fait connaître ses Prix Caecilia, les ré- compenses annuelles des Veence meilleurs CD et DVD selon les critiques belges. 11 pro- ductions ont été récom- pensées : les Symphonies Jaza z u Vert de Brahms sous la direc- Stage d’initiation et de tion de Riccardo Chailly Hanao perfectionnement au Jazz (Decca), les Concertos Entre une date programmée à La J’ai découvert Bertrand Belin en 2010 avec l’ Hypernuit. C’était une révélation. pour violon de Stravinsky À partir de là, j’ai commencé à m’abreuver de nouvelles formes d’expression. J azz au Vert est un événement annuel in- et Prokofiev sous l’archer Louvière et un concert du côté de À l’origine, ma culture, c’est le hip hop. Avec ce disque, j’ai réalisé qu’on pouvait contournable pour tous ceux qui désirent ap- de Patricia Kopatchins- raconter des histoires autrement qu’en rappant. J’avais déjà eu cette intuition au profondir leurs connaissances musicales en kaya (Naïve), les Songs Genève, Veence Hanao soigne ses contact de Gainsbourg ou de Léo Ferré et puis, je me suis passionné pour une de Britten par le ténorI an jazz ! L’esprit qui anime ce stage résidentiel oreilles chez le disquaire. Entre nouvelle génération de chanteurs français qui abordaient les mots différemment: Bostridge, le récital Ra- Mathieu Boogaerts, Babx ou Bertrand Belin. Ces gens réinventent l’écriture. Au est unique : les participants, complètement meau de la jeune soprano ct oet e b nne vieille radio ! vinyles et CD’s, chanson et hip hop, contact de leur musique, je me suis détourné d’une certaine densité textuelle pour immergés dans l’univers du jazz, sont stimu- Sabine Devielhe (Erato), le cœur de l’artiste palpite comme me focaliser sur le choix des mots. J’ai également compris l’importance des silences. Selon une étude menée aux États-Unis par Edison Re- lés musicalement et enrichis à long terme ! un album Ligeti-Barber par Bertrand Belin Chez Belin, par exemple, ils sont fondamentaux. La narration et le sens de l’épure search et Triton Digital, la bonne vieille radio reste le Chaque année, près de 140 stagiaires sont le Keller Quartet (ECM), un une production signée Madlib. Parcs sont également des éléments propres à son univers. Tout comme l’imaginaire qu’il moyen le plus utilisé pour découvrir de nouveaux artistes là pour confirmer l’intérêt de ce plein de jazz disque Mendelssohn du Cinq7/Wagram/Pias parvient à (r)éveiller en chantant. Chez lui, les thèmes abordés sont assez sombres, pour 75% des Américains, devant le bouche-à-oreille Aujourd'hui à sa 30e édition, Jazz au Vert pro- quatuor Ebène (Virgin), nicolas alsteen mais il emmène l’esprit ailleurs. Surtout, ce n’est jamais pompeux. On n’est pas un récital John Dowland (66%) et YouTube (59%). Chez les 12-24 ans en revanche, pose une multitude d’activités : des cours confronté à de la « poésie chiante ». Venant du hip-hop, j’étais un peu hermétique à YouTube arrive largement en tête des moyens utilisés de Thomas Dunford (Al- la forme musicale empruntée par Bertrand Belin. Et malgré ça, il a quand même pour découvrir de nouveaux artistes (83%). L’étude de d’instruments, d’ensembles et d’harmonie, pha) et les Soldaten de réussi à m’embarquer dans ses histoires. Je trouve ça énorme. J’ai donc acheté son grande ampleur, réalisée chaque année depuis 1998, a ainsi que toute une série d’ateliers : big band, Zimmermann filmés à dernier album. Il s’intitule Parcs et je suis impatient de l’écouter. interrogé 2.023 personnes âgées de 12 ans et plus par té- ensemble vocal, musique africaine, rythme et Salzbourg (Euroarts). Du léphone et s’intéresse aux comportements des consom- improvisation libre. Sans oublier chaque nuit côté des artistes belges, Earl Sweatshirt est un des rappeurs de Odd Future, un collectif américain qui mateurs en rapport avec les plateformes numériques. des jam sessions qui se déroulent dans un bar des productions de Phi- regroupe des artistes comme Tyler, The Creator, Hodgy Beats, Domo Genesis ou lippe Herreweghe (album Les données pour la question sur la meilleure manière Dé cès de Jean Vallée au format jazz club. Le stage proposera aus- Frank Ocean. Dans la bande, Earl n’est pas le plus charismatique. D’un point de Gesualdo-Phi) ou de Leo- de découvrir de nouveaux artistes portent sur les 950 si un concert des professeurs et se termine- vue médiatique, il reste également en retrait, dans l’ombre de Frank Ocean ou Américains qui ont déclaré que se tenir au courant des Né à Verviers en 1941, nardo Garcia-Alarcón Tyler, The Creator. Par contre, dans sa façon de poser la voix, Earl Sweatshirt est dernières sorties en termes de musique était «très im- Jean Vallée avait eu une ra par le concert des élèves organisé dans le à la tête du Chœur de sans doute le meilleur. Comme sur la plupart des disques publiés sous l’enseigne portant» ou «plutôt important» pour eux. longue carrière d’auteur- grand théâtre de la Marlagne. À l’occasion du Chambre de Namur (Na- e Odd Future, on va sans doute se retrouver avec une production un peu cheap. compositeur-interprète. 30 anniversaire du stage, plusieurs musiciens bucco de Falvelli chez Am- Et pourtant, les mecs parviennent toujours à en faire quelque chose d’excitant. L’étude souligne la bonne santé de la radio, qui semble Il avait notamment été renommés viendront animer différents cours bronay) remportent des très bien résister ou s’adapter à l’ère numérique. 47% des C’est tout l’intérêt de ce collectif. J’ai eu l’occasion d’assister au premier show de deux fois candidat au et master class. prix. Le Prix Snepvangers Earl Sweatshirt Odd Future à Bruxelles. Mais Earl n’était pas là… Apparemment, il a raté cette Américains ont écouté de la radio en ligne au moins une concours Eurovision de la pour la musique belge ré- 30e édition - du 20 au 26 juillet 2014 / La Marlagne - Doris première tournée européenne à cause de sa mère : elle l’a envoyé dans un centre fois au cours du mois précédant l’enquête. De ce côté- chanson pour la Belgique compense un album dédié Centre Culturel Marcel Hicter 5100 Wépion / Infos & Columbia/Sony de rééducation après avoir découvert les textes de ses morceaux… Elle trouvait ça ci de l’Atlantique, la radio semble également avoir en- et s’était classé deuxième au compositeur Jean-Luc inscriptions : [email protected] trop barré. Du coup, elle l’a fait enfermer. Le pauvre, il devait sans doute déprimer core de beaux jours devant elle. Selon Médiamétrie, 43,6 avec la chanson L’Amour Fafchamps pour sa pièce www.leslundiddhorense.be dans sa chambre, tout seul, en train de regarder ses potes s’éclater en direct sur millions de Français ont écouté la radio en semaine à la ça fait chanter la vie en Lettre soufie. Un prix spé- MTV. Quand j’y pense, je suis triste pour lui. (Sourire) fin 2013 et les podcasts sont une niche active, avec 21 1978. Il avait été choisi en cial a été décerné à la col- millions de téléchargements par mois. En février, 6.644 1980 par Robert Hossein lection Palazetto Bru Zane Ça, c’est un classique de chez classique. Je connais ce disque par cœur. Je l’ai web radios ont dépassé les 10 heures d’écoute totale pour tenir le rôle de l’ins- dédiée aux raretés du ré- choisi pour son côté « pièce de collection » : c’est un bel objet. Quand j’ai commencé en France et le plus gros réseau, Radionomy, a atteint pecteur Javert dans Les Dee zer arrête le pertoire français. à rapper, j’ai rencontré Noza (beatmaker pour des artistes comme Grems, Baloji, etc., les 63,8 millions d’écoutes actives sur le mois. La chaîne misérables d’après Victor Ndlr). Un jour, je cherchais quelqu’un pour m’aider à faire de bonnes productions. de radio NRJ a atteint à elle seule près de 33 millions Hugo. Au Palais des Sports …ett hé lés'écoutec aujourd'huiargem gratuitement !ent I t's a sin ! Pour ça, je savais que Noza était l’homme de la situation. Avant d’accepter d’écoutes actives pour un total de 13 millions d’heures de Paris, ce spectacle Soldout vient de signer la de bosser avec moi, il m’a demandé de lui expliquer ce que j’écoutais comme d’écoute sur Internet. attirera plus de 500.000 Deezer a annoncé à ses utilisateurs l'arrêt musique de Puppylove, le musique. À l’époque, j’étais engoncé dans le rap français. J’adorais les artistes du personnes. Jean Vallée de son offre de téléchargement. Son service premier long métrage de collectif Time Bomb (Lunatic, Pit Baccardi, les X-Men, etc.), les disques d’Oxmo avait aussi présenté une la réalisatrice belgo-suisse Puccino ou le premier album de Booba (Temps mort). Quand je lui ai dit ça, Noza émission de variétés sur la d'achat de MP3, proposé sur le site et sur les Veen ce Hanao Dé cès de Gérard Mortier Delphine Lehericey. Le Jaylib avait l’air un peu dépité pour moi… Alors, il m’a fait écouter les de Jaylib RTBF, La bonne étoile. applications mobile Deezer, est fermé depuis premier single extrait de Poète urbain, dandy citadin, Veence Hanao est le Champion Sound et Madvillain. J’ai pris deux claques. Ces disques ont vraiment tout changé. C’est Passionné d'art lyrique, Gérard Mortier a occupé plu- le 10 avril. Le pionnier français du streaming la BO est une reprise de nouveau héros d’un hip hop francophile décomplexé Stones Throw Records/V2 comme si je les avais toujours attendus.Champion Sound est un album conçu par sieurs hautes fonctions dans le milieu, en dirigeant no- musical explique qu’il souhaite aujourd’hui se Pet Shop Boys, I t’s a Sin. et sans œillères. Acclamé par la presse nationale, J Dilla et Madlib, deux rappeurs et producteurs américains réunis pour l’occasion tamment le Théâtre de la Monnaie, le Théâtre de Paris, concentrer sur le cœur de son offre : l’accès à L'album sortira au mois de encensé par la critique internationale, son dernier sous le nom de Jaylib. Sur ce disque, ils se partagent le boulot. Quand l’un produit, le New York City Opéra ou encore le Teatro Real de Ma- 30 millions de titres sur ordinateur, mobile et mai en même temps que album (Loweina Laurae) pose des mots sur le pavé l’autre plante le flow. Et inversement. La recette fonctionne parfaitement. Surtout drid. Il est décédé d'un cancer du pancréas alors qu'il tablette, sans publicité et même sans réseau le film. bruxellois et contourne habilement les codes éculés en termes de production. Avec cet album, j’ai découvert une nouvelle façon de était âgé de 70 ans. du rap. À travers ses chansons, l’artiste épingle la traiter les sons et de produire mes propres chansons. J’ai compris ce qu’était la pour un abonnement mensuel de 9,99€ par métropole et ses contrastes, les petits riens du quo- compression. J’ai pigé tout l’intérêt de « diguer », de fouiller dans l’histoire pour mois. Une version totalement gratuite, mais tidien et les grandes contrariétés de l’époque. trouver des idées fraîches dans d’autres styles musicaux. avec publicité, est également disponible.

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e an vr c… en vrac…

Roec rd Ah nd t e winner is… LeM Conseilusiq deu l’UEe en adopte li lag nouvellene Les Octaves de la Musique fêtaient L ua m sique FNAC b atTU ! leurs 10 ans directive Les perceptions c lassique est-elle uneJeou nouvellek b x mondiales de Le Conseil de l'Union européenne a adop- Les Octaves et les prix 2014 ont été remis Slatemo remuerte ?le couteau dans la plaie offre en té la directive concernant la gestion collec- droits d’auteur en aux artistes récompensés par d'anciens lau- streaming tive du droit d'auteur et l'octroi de licences augmentation réats, comme Sharko, Jeronimo, Veence Ha- En publiant un article intitulé Requiem. La multi-territoriales pour la musique en ligne. nao, Éric Legnini ou encore MLCD, Jali et musique classique en Amérique est morte, La Fnac a lancé dé- Cette nouvelle directive vise à améliorer l'ef- L e s p e r c e p t i o n s Saule. Et tous ont chanté avec l'Orchestre Tot o s raccroche Slate a réouvert le débat. Mis en perspec- but mars un ser- s ron ha monica ficacité en matière d'octroi de licences par Au rayon « Clips » mondiales du droit Philharmonique Royal de Liège. Salvatore tive dans l'article : l'argent, la perte d'audi- vice de musique c oi- e m s ci d'auteur ont enre- Adamo a été célébré avec une Octave d'hon- en streaming sur les organismes de gestion collective dans Coubiac,Trpf o Angakok,ort Khohd, Ithilien, Âgé de 91 ans, l’harmo- teurs pour les radios spécialisées et la dimi- le secteur de la musique en ligne. Cela de- On ne pourra que trop vous gistré un nouveau neur. niciste belge Toots Thie- nution du nombre de spectateurs, faisant le mode de l’abon- vrait permettre aux consommateurs d'avoir conseiller de découvrir le record, selon le rap- Hungry Hollows lemans a fait savoir à n e m e n t , s e r v i c e Lauréats par catégories musicales : ainsi écho d'une situation très difficile aux un choix plus vaste de musique à télécharger dernier clip de BRNS, Void, port annuel publié l’agence Belga qu’il ne se pour l’instant uni- Le Loud by Court-Circuit a décidé, pour cette Chanson française : Stromae - R acine carrée sentait plus suffisamment États-Unis, suite notamment à la ferme- ou à écouter en mode continu et cela favori- le premier extrait de leur par la Cisac (Inter- ture de l'Opéra de la ville de New-York et quement acces- album Patine, sortie pré- année, d’aller plus loin qu’un simple concours de Pop / Rock : Puggy -To Win The World en forme pour jouer un serait la mise au point de nouveaux modèles national Confedera- aux multiples problèmes rencontrés par les sible en France. Une vue le 25 août. Le groupe groupes de rock dur en aidant les cinq groupes Musiques urbaines : Scylla - Abysses concert entier et qu'il dé- d'accès à la musique. Le développement des tion of Authors and première formule participera également au lauréats à trouver des dates un peu partout en Electro : The Magician - When the Night is Over cidait donc de mettre un orchestres. L'auteur soulève aussi d'autres services licites de musique en ligne dans l'en- Composers Socie- terme à sa carrière mu- « d'appel » propose Disquaire Day le 19 avril Belgique et même à l’étranger, entre mars et Jazz : David Linx & Diederik Wissels - Winds questions, comme celle du vieillissement du semble de l'Union permettrait également de ties). Les sommes sicale. Afin de ne pas dé- de choisir 200 mor- prochain avec une sortie septembre. C’est ainsi que Le Loud Tour a été of Change public, un débat présent au sein de nos fron- mieux lutter contre les atteintes en ligne du « surprise ». C'est l'occasion collectées par les cevoir son public devant ceaux en écoute il- mis sur pied par l’asbl Court-Circuit (Centre M usiques du monde : Jawhar - Qibla wa qobla tières également. Dans ses Dépêches Notes droit d'auteur. La directive a aussi pour ob- également de découvrir 227 sociétés de 120 sa méforme, il a décidé limitée pour 2 eu- de ressources, d’informations et de promotion Musique classique : Sophie Karthäuser et dans la foulée d’annuler sur France Musique, Clément Rochefort évo- jectif d'accroître la transparence du fonc- Mountain Bike via leur clip pays réunies au sein quait d'ailleurs récemment le rapport euro- ros par mois. Pour déjanté I lost my hopes des musiques actuelles en Fédération Wallonie- René Jacobs / Pergolèse - Septem verba a tous ses concerts. Jean- tionnement des organismes de gestion col- de la Confédération péen sur l'accès à la culture, soulignant que 4,99 euros par mois, (in paradise). Avec un Bruxelles). Coubiac, Angakok, Khohd, Ithilien et Christo Baptiste Frédéric Isidore lective du droit d'auteur et d'en améliorer internationale des on accèdera au « Ju- premier album éponyme Hungry Hollows vont donc bénéficier d’une large Musique contemporaine : L’Ensemble Ictus Thielemans, plus connu 60% des 15-24 ans avaient déserté opéras et l'efficacité, en leur fixant des exigences de sociétés d'auteurs sous le surnom «Toots», kebox illimité », ou- sous le bras, vous pourrez visibilité en foulant par exemple, des scènes dirigé par Georges-Élie Octors - Laborintus II ballets «par manque d'intérêt». Un constat bonne gouvernance et de gestion financière, et compositeurs at- est l’un des musiciens vrant l'intégralité du les découvrir sur scène comme le Magasin 4, le Biplan, le Rockerill, le souligné aussi par Stéphane Dorin, socio- de transparence et de communication d’in- pendant l'été. Les liégeois teignent 7,8 milliards belges les plus connus catalogue (plusieurs DNA, l’Escalier Café… et aussi celles de festi- Lauréats par catégories génériques : logue et auteur d'une étude sur les publics formations. Kennedy’s Bridge dévoi- d'euros pour 2012, Album de l'année : N o Deal - Mélanie De Biasio dans le monde. Originaire millions de titres) et vals tels que le Durbuy Rock Festival, le Road to du quartier des Marolles des orchestres : Le public vieillit avec la gé- lent quant à eux le clip de une hausse de 2% Artiste de l'année : Stromae accessible depuis Rock ou le Dour Festival. à Bruxelles, son talent lui nération du baby-boom et, à la différence Finland, premier extrait de par rapport à 2011 Spectacle / Concert de l'année : Girls In n’importe quel ordi- leur EP Basics. a permis de côtoyer les du théâtre, les concerts classiques ne voient A larcón rempile en droite ligne avec Hawaii jazzmen les plus presti- pas progresser la fréquentation des 15-24 nateur. Possibilité de la croissance du PIB gieux sur les scènes du ans. Face à l'ampleur de la polémique sus- choisir une formule Aupou CAV&MAr un Millenium mondial (+2,2% se- Octave d’honneur : Adamo monde entier. optionnelle à 5 eu- SergeGoom hDorny renvoyée ! de l’Opéra de citée par l'article, un site Internet a été en- FRs olo lon la Banque mon- Prix : tièrement consacré à la clarification du pro- ros pour une écoute Uneit gu are des Le chef argentin signe un deuxième man- diale) et légèrement Dresde Prix du public Bel RTL 'Le tube belge de l'an- blème : Is classical music dead ? multi-supports (mo- dat à la direction artistique du Chœur de ( Rfs) supérieure à celle Gi rls in Hawaii aux bile, tablette). La radio des née' : Stromae enh c ères www.isclassicalmusicdead.com Chambre de Namur et y crée un nouvel or- du PIB national dans Le ministère de la Culture de l’état de Saxe radios en Allemagne a décidé de mettre fin au Prix PointCulture : Éric Van Osselaer chestre baroque : le Millenium Orchestra. 68 pays. En termes Prix Jeff Bodart de la Sabam : BRNS Le groupe belge Girls in L rhe ma c é de la mu- contrat de Serge Dorny, nommé en sep- Hawaii vient d’accepter Rendez-vous est déjà pris en février 2015 de territoires, l'Eu- Prix de la Ministre de la Culture : Marie Warnant s ique en croissance R adio Fr Solo (RFS) tembre 2013 à la tête de l’Opéra de Dresde de devenir ambassadeur pour le premier concert du Millenium ! rope est toujours en Musiq’3Trph o uneé nouvellee Rad foisio en Allemagne est un logiciel gra- et ce, pour cause de mésentente avec de Music Fund. La société tête des perceptions Tiré vers le fond par le tuit, très simple et l’équipe artistique et administrative. Son Taylor USA a ainsi offert récompensé mondiales (58.8%) plongeon des ventes Ba isse de tempo chez Covadis sans pub qui vous contrat devant débuter le 1er septembre pro- pour Music Fund une gui- Lseste f ivals Tempo de Mouscron devant la région Asie tare Taylor 314 CE qui va Le 27 février, les radios de la RTBF se sont “physiques”, le marché permet d’écouter chain, pour une durée de 5 ans, Serge Dor- L ite dro d'auteur eteochefo d R rt annulés (18.6%) et l'Amérique accompagner le groupe réunies à Tour & Taxis en marge de l'exposi- de la musique semble les radios d’Internet ny n'aura même pas eu l'occasion d'endos- reprendre du poil de la du Nord (16.4%) en reueo v t c rrigé par belge lors de leur tournée tion Vu à la Radio. Six programmes étaient en Trois des quatre sociétés qui composent le groupe Co- sans aller sur leurs ser pleinement son costume. Il revient ainsi bête en Allemagne, rejoi- recul. L'origine des européenne 2013-2014, compétition pour remporter le Trophée Ra- vadis sont en faillite. Luigi Coduti, le patron du groupe, a sites. Vous n’avez à Lyon où son contrat court jusqu'en janvier Van n de La otte avant d'être vendue aux gnant ainsi la Suède et la annoncé l'annulation des Tempo Festival de Mouscron et droits par secteur : [PIAS] pas content dio. Le jury composé de Jean-Paul Philippot même pas à les re- 2015. enchères l'année pro- Norvège parmi les bons de Rochefort. D'autres événements organisés par Cova- chercher car une radio & TV 31%, pho- chaine. L'argent contri- (Administrateur général de la RTBF), Fran- vendeurs. Il s’agit de la Le conseil des ministres a approuvé le 14 dis pourraient également être annulés. liste de près de 1200 no 21 %, câble et sa- buera à soutenir les pro- cis Goffin (Directeur général des radios de première hausse (1,2%) février dernier la proposition de réforme radios francophones tellite 13%, spec- 2 jets de Music Fund dans la RTBF), Claude Delacroix (RTBF), Jan Hau- en 15 ans chez nos amis du droit d’auteur déposée par le ministre teutons, pour atteindre 1er i“Mort er Award” est mise à jour ré- tacle vivant 10%, Soundstation le monde en entier. Music tekiet (VRT), Françoise Dost (Secrétaire gé- Une nouvelle salle de concert à Liège Vande Lanotte, comprenant également un Fund est une organisation ainsi la coquette somme gulièrement et au- vidéo et cinéma 5%, nérale des Radios Francophones Publiques) Gérard Mortier, récemment décédé, sera à la fois le nouveau code de la propriété intellectuelle. à but non lucratif, qui col- de 1,45 milliard de revenus tomatiquement. Le autres 16%, digital et Frédéric Delcor (Secrétaire général du Mi- dédicataire et le premier lauréat de cette récompense Depuis la fermeture de la Soundstation en 2008, Cette proposition est actuellement en dis- lecte des instruments de totaux. La vente de CD a player a été dévelop- 4%. nistère de la Fédération Wallonie-Bruxelles) augmenté de 1,3% pour qui sera remise le 31 mai 2014 à Graz (Autriche). Ce prix, le projet d’implanter une nouvelle salle de concert cussion en commission des affaires écono- musique et organise des résultat de la collaboration entre le magazine spécia- pé par quelques pas- à Liège, sous la Cité Miroir, est évoqué. La Fédéra- formations de réparateurs a décidé de récompenser Puisque vous avez 69% des ventes totales. miques. Les deux patrons du label indépen- Le vinyl fait une percée lisé Opernwelt et la Compétition internationale pour sionnés qui pensent tion Wallonie-Bruxelles a marqué son accord pour d’instruments de musique du talent, le programme que Laurent Grau- dant [PIAS] ont écrit une carte blanche afin de 47,2% pour seulement la mise en scène de Graz, Ring Award, a pour objectif qu’Internet est un subventionner les travaux à hauteur de 1,218 mil- dans des pays en conflit lus réalise et anime tous les dimanches à de récompenser les initiatives les plus novatrices prises de mettre en lumière le manque de concer- ou en développement. 2% des ventes globales phénomène social lion d’euros, sur un budget global de 2 millions. La midi. Laurent Graulus partira à Dublin afin par les professionnels du milieu de l'opéra. La cérémonie tation avec le milieu professionnel concer- Elle est née en 2004 d'une quand même. Les ventes qui peut encore être de participer aux RadioDays Europe 2014, sera ouverte par un discours du réalisateur et metteur en Ville de Liège doit intervenir pour 700.000 euros. La né ou les citoyens, dénonçant l’absurdité du synergie entre l’ONG, Ox- digitales enregistrent une un lieu d’échanges le plus grand rassemblement professionnel scène Michael Haneke (Don Giovanni, créé en 2007 au nouvelle Soundstation aura une capacité de 600 fonctionnement de cette proposition et ses fam-solidarité et de l’En- hausse de 11,7% représen- non intéressés. consacré au media de la radio. tant 17,9% des ventes. Palais Garnier et repris plusieurs fois par la suite). places et sera gérée par la même équipe qu’au- implications. semble Ictus. www.radiofrsolo.info paravant, à savoir les organisateurs du festival Les Carte blanche à lire sur focus.levif.be www.musicfund.eu Ardentes. Ouverture prévue : janvier 2015.

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entretien entretien

BRNS « On est des gens ordinaires. nant, marqué par un réel parti-pris es- Void thétique. C’est aussi pour cette raison Naïve/Pias On ne joue pas dans un groupe qu’on s’est tourné vers un réalisateur pour mettre en œuvre le clip vidéo de Void. inaccessible, enfermé, tout là-haut, C’est presque un court-métrage habillé par notre musique. La chanson est hors- dans sa tour d’ivoire. » format. Elle marque une transition avec notre E.P. précédent où l’on se présentait systématiquement avec du rentre-dedans. Ici, on essaie de proposer quelque chose de plus spacieux.

Quand on se penche sur l’agenda de ces deux dernières années, on se rend compte lanqués sous les majuscules de chette sérigraphiée des mains de l’illus- que BRNS n’a jamais arrêté de tourner. BRNS (prononcer « Brains »), trateur Carl Roosens, on entrevoit sept Vu cet improbable planning, une question quatre garçons cultivent un chansons et autant de morceaux de bra- s’impose : quand avez-vous composé les champ d’action illimité. Au dé- voure. Façonné dans ses moindres détails morceaux du nouvel album ? part, l’affaire repose sur les par les Bruxellois, ce disque rencontre Timothée Philippe : L’essentiel du nouvel épaules de Timothée Philippe et l’adhésion du public et les faveurs média- album est né il y a longtemps, à l’été 2012. d'Antoine Meersseman, deux blonds aux tiques. Après une année 2013 passée sur À l’origine, il s’agissait surtout d’un pro- idées extra-larges. Le duo rêve d’un choc les routes européennes, BRNS rassemble totype. Dès que quelques jours de repos Pfrontal : un duel entre batteries sur fond ses envies d’ailleurs et s’enferme quelques se présentaient, on en profitait pour s’or- de chaos électronique. Ce songe bruitiste jours en studio aux côtés de Staf Verbeeck, ganiser de petites sessions à la campagne tombe rapidement à l’eau, mais les musi- l’homme qui a posé les doigts sur les pre- ou dans notre local de répétition. Au bout ciens continuent de jouer dans les flaques. miers morceaux de dEUS et sur les der- d’un moment, on comptait suffisamment Antoine éclabousse son synthétiseur et nières compos de Madensuyu. Au bout de de nouveaux morceaux pour enregistrer Tim tabasse ses cymbales. Le tandem tente l’effort, 54 minutes de réconfort découpées un album. le passage en force. Histoire de combler les sur les plages de Patine, album spacieux DL : En réalité, ce sont les tournées qui ont espaces vides et de tuer les temps morts. et ambitieux, annoncé pour la fin du mois amené les nouvelles compositions. Quand L’ossature des morceaux prend forme. À d’août. En attendant l’été, BRNS laisse fil- on a commencé à jouer à l’étranger, on dis- l’été 2010, la guitare de Diego Leyder rejoint a trer deux nouveaux morceaux sur un 45 posait seulement des chansons du E.P.

© M thieu Zazzo le groupe. D’une précision chirurgicale, tours (d)étonnant. Souvent, les programmateurs des salles elle s’infiltre dans les veines des chansons. nous demandaient de jouer un show d’une pop L’ADN de BRNS est né ici, au carrefour Votre histoire est jalonnée de 45 tours. Le heure. On s’est donc efforcé de travailler de ces trois cerveaux, matières grises aux premier a lancé votre carrière. Qu’en est- sur de nouveaux morceaux de façon à al- desseins hauts en couleurs. Assez rapide- il cette fois ? longer la durée de nos sets. ment, BRNS finalise trois enregistrements Diego Leyder : Dans les deux cas, c’est un (Mexico, Here Dead He Lies, Clairvoyant) concours de circonstance. Notre premier Est-ce que l’expérience acquise sur scène et les libère sur la toile. Quelques jours 45 tours a vu le jour suite à une proposition lors des différentes tournées européennes plus tard, ces morceaux trouvent refuge de Xavier Daive, le programmateur de la a influencé la composition des nouveaux à quelques lieues de là, dans les bureaux salle bruxelloise de l’Atelier 210. Quand il morceaux ? d’une petite salle bruxelloise. Scotchée sur est venu vers nous avec cette idée, on avait DL : Oui et non. Au niveau du son, par BRNS YouTube, l’équipe de programmation de seulement enregistré trois morceaux. On exemple, on a aujourd’hui une idée beau- l’Atelier 210 s’agrippe aux mélodies tenta- a donc profité de cette opportunité pour coup plus précise de ce qu’on veut. On joue culaires de BRNS. Après ce choc virtuel, sortir nos premières chansons sur un vé- davantage sur les détails, de façon à don- le groupe est invité à reproduire ses chan- ritable support, à la fois physique et gra- ner du relief aux chansons et de créer une Patine artistique sons dans le monde réel. Au lendemain phique. Cet enregistrement nous a ser- véritable ambiance. Après, l’expérience du concert, le boss du 210, un collection- vi de rampe de lancement pour la suite. scénique n’a jamais freiné notre proces- Engagé sur le chemin de la reconnaissance internationale, BRNS prend neur de microsillons, propose de presser Cette fois, on souhaitait s’appuyer sur un sus créatif. Parce qu’on sait très bien qu’on le succès à contre-pied et triomphe dans un registre sensiblement les précieuses chansons sur un 45 tours. objet pour passer l’été et introduire en dou- va devoir réadapter certains passages pour différent.M oins brutale, plus ample et aérée, la musique du La suite de l’histoire a fait le tour des pla- ceur la sortie du nouvel album. On profite les jouer en concert. tines : les 300 exemplaires du vinyle se du Record Store Day pour sortir le 45 tours. quatuor bruxellois livre une vision totalement décomplexée de la sont écoulés comme des petits pains… Et Par le passé, les compos de BRNS résul- pop. Manipulées avec audace et perversion, les chansons de BRNS l’affaire ne tient pas du miracle ; la mu- Le single issu de ce nouveau 45 tours s’in- taient d’une forme de collage. Ce procédé esquissent de nouvelles formes d’expression : refrains, mélodies sique de BRNS a quelque chose d’irrésis- titule V oid. C’est un morceau de sept mi- a-t-il évolué en cours de route ? tible dans ses mélodies, ses rythmiques nutes assez sombre et dénué de refrain. AM : À l’époque de Wounded, les idées ve- et couplets entament leur métamorphose dans l’antre de Patine, en lacets et ses refrains entortillés qui se Peut-on le voir comme une déclaration naient essentiellement de Tim et Antoine. premier album estival amorcé par un 45 tours printanier. scandent le poing levé et la larme à l’œil. d’indépendance ? Après, on venait se greffer sur les mor- Bientôt rejoint par César Laloux, percus- Antoine Meersseman : On voulait éviter ceaux avec d’autres idées. Cette fois, on a Nicolas Alsteen sionniste et multi-instrumentiste hors- de revenir avec un gros single up-tempo non seulement reproduit cette méthode cadre, le groupe s’affirme, dès 2012, avec la ou une chanson outrageusement évidente. mais Diego et moi sommes aussi arrivés publication du E.P. Wounded. Sous la po- On préférait arriver avec un morceau éton- avec des propositions et des squelettes de

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entretien Rencontre

chanson. Certains titres sont même issus mini album pour des raisons mercantiles. glais, Belge ou Américain, peu importe. Il reno c ntre Folk de sessions d’improvisation. Chose qu’on (Sourire) faut faire ses preuves. ne faisait jamais par le passé. On a égale- ment composé des trucs à quatre. Au fi- BRNS s’est construit en autoproduction. César vient de sortir un E.P. avec le groupe One Horse Land nal, le prochain album est plus cohérent Aujourd’hui, vous signez un deal avec un Italian Boyfriend. Pour sa part, Diego s’im- parce qu’il découle d’un véritable travail important label indépendant. Est-ce que plique dans One Horse Land, une autre d’équipe. Ça part moins dans tous les sens. ça change quelque chose dans votre quo- formation bruxelloise. Est-ce facile de L a chevauchée folklorique tidien ? faire vivre un projet parallèle en marge de Fin 2012, BRNS a joué une série de dates AM : Ça ne change pas grand-chose à la si- BRNS ? L’union fait la force. En Belgique, la formule officie en compagnie du chanteur et dessinateur tuation antérieure. On a signé avec le la- César Laloux : C’est assez compliqué. Mais au rang de devise nationale. Elle préside aujourd’hui Carl. Que reste-t-il de cette expérience bel français Naïve. C’est une maison de à partir du moment où tu détermines à commune ? disques importante, bien implantée au ni- l’avance tes priorités, c’est plus facile à ac- à la destinée d’un supergroupe tricolore. One Horse TP : Notre collaboration avec Carl s’est veau européen. Pour eux, signer un groupe cepter. Là, on vient de publier le premier Land rassemble des musiciens venus d’horizons achevée en beauté en septembre 2013 par comme BRNS, c’est une prise de risque re- E.P d’Italian Boyfriend. On compte bien la mise en ligne du clip vidéo de Our Lights, lativement conséquente. Déjà, on aimait jouer quelques dates pour le défendre sur lointains. Des mecs de BRNS, Ruacutane et Coffe Or dernier single issu de notre E.P. Wounded. cette attitude. En plus, notre critère « N°1 » scène. Mais, honnêtement, c’est difficile Not s’allient à deux nanas pour emballer Bored With Carl avait illustré la pochette du disque et était de trouver un label qui n’intervienne de combiner les agendas des uns et des The Music, un premier album bordé d’orchestrations puis, nous sommes partis en tournée en- absolument pas dans notre processus créa- autres. Les dates de BRNS s’enchaînent à semble à l’occasion du Brut Tour. Après, tif. Ce qui signifie, qu’une fois encore, on un rythme soutenu. Pour moi, le plus im- féériques et de mélodies bucoliques. Ambitieux et c’est important de faire la part des choses, a conçu le disque par nos propres moyens. portant aujourd’hui, c’est d’assurer la pro- sophistiqué, traversé de dialogues langoureux, ce de laisser les envies des uns et des autres motion de notre nouvel album. Les choses disque promène la musique folk sur les sentiers s’épanouir séparément. Travailler avec des se passent tellement bien avec BRNS que Le label Naïve a effectivement une as- de la gloire : des chemins récemment chevauchés personnes différentes et ouvrir son uni- sise européenne. Ce qui tombe plutôt bien personne dans le groupe n’a envie de com- vers à d’autres influences, c’est toujours puisque BRNS s’exporte aujourd’hui au- promettre la dynamique du projet. Avec par José González ou Angus & Julia Stone. Joli. enrichissant pour un groupe. delà de nos frontières nationales. Quel est Italian Boyfriend, ce sera donc un jeu de Nicolas Alsteen le secret pour élargir son auditoire en de- patience. Il conviendra d’attendre que les O bonnes opportunités se présentent.

Ce n’est donc pas Carl qui signe le visuel du hors de la Belgique ? © ne Horse Land nouvel album ? AM : On s’est toujours positionné dans une DL : Pour réaliser la pochette, on a fait appel optique de développement. De nombreux Dans son mode de communication, BRNS aux services de Boris Görtz, un graphiste à groupes s’arrêtent à la question du cachet. se révèle comme un pur produit de la géné- a sortie de votre album s’accom- de loin, influencent la diffusion de la mu- cement participatif. Compter sur les in- qui nous avons donné carte blanche. Il est Avec BRNS, on part du principe qu’on se ration Facebook. Cette extension virtuelle pagne d’une nouvelle identité. sique. Les aspects promotionnels et admi- vestissements financiers des internautes, parti sur un travail autour du métal et de paie le minimum syndical. On garde de est-elle une composante indissociable de Avant Bored With The Music, One nistratifs, notamment, prennent un temps c’est un modèle économique d’avenir pour sa corrosion. À l’époque de Wounded, c’est l’argent en caisse pour pouvoir financer votre musique ? Horse Land s’est en effet construit dingue. Le titre de l’album s’amuse de cette enregistrer un album ? en voyant la pochette réalisée par Carl que des dates à pertes. Là, par exemple, on va TP : Quand on a commencé à jouer en- sous le pseudo Another Belgian situation. C’est vraiment ironique. JF : Ce mode de financement ne peut pas de- nous avions trouvé le titre du disque. Cette jouer en Estonie. C’est payé une misère. semble, Internet était notre seul moyen de Band. Pourquoi changer de nom? venir la norme. Je m’imagine d’ailleurs as- fois encore, c’est en découvrant la création Je pense que personne ne voudrait de ce communiquer vers l’extérieur. On s’expo- Jérémie Fraboni : Ce changement d’identi- Musicalement, One Horse Land privilégie sez mal rééditer l’expérience. Je vois davan- de Boris Görtz que nous sommes tombés plan. Mais nous, on va le faire… Chaque sait principalement via Bandcamp et Fa- té correspond d’abord à l’envie de passer un les ambiances feutrées et les mélodies in- tage ce modèle comme une façon de palier d’accord sur Patine. Les deux artistes in- date à l’étranger nous permet d’aller plus cebook. Au fil des années, ces habitudes Lcap, de se professionnaliser. Parce qu’au dé- timistes. Quels sont les projets qui vous in- à la diminution des subsides. Pour accumu- vités à imaginer nos visuels ont travaillé loin, de trouver un nouveau public et de sont restées. Ça ne correspond en rien à part, Another Belgian Band, c’était surtout fluencent en ce sens ? ler de l’argent, il faut déjà être en mesure de après avoir écouté nos chansons. À chaque monter des tournées de plus en plus consé- une stratégie élaborée. On annonce gé- une blague qu’on se faisait entre nous. Mais Audrey Coeckelberghs : Mon parcours per- toucher les gens. Quand on est peu connu fois, les pochettes font référence à notre quentes. C’est un processus assez lent. Il néralement les dates de nos prochains ce « running gag » s’est effiloché au fil du sonnel est particulier. J’ai commencé avec les du public, ce n’est pas une mince affaire… musique. La patine, c’est l’empreinte du faut savoir se montrer patient, accepter concerts et puis, surtout, on relaie notre temps. Certains considéraient même Ano- grands classiques du rock, des trucs comme En plus, le support en ligne implique des temps sur un matériau, le travail naturel des dates dans des bars pour espérer reve- vie sur la route. L’année dernière, on est ther Belgian Band comme un nom péjora- Led Zeppelin ou Black Sabbath. Ensuite, je paiements par carte de crédit. Et, généra- de la matière. Par extension, on a appliqué nir plus tard dans un club et le remplir. À parti en tournée avec le photographe Oli- tif, une forme d’autodépréciation. Après deux suis passée au jazz. Et puis, finalement, j’ai lement, les moins de 20 ans n’y ont pas ac- cette vision à nos chansons. chaque fois, c’est un pari. On n’est pas du vier Donnet. Il conduisait notre van. Sans E.P’s et de nombreuses réflexions, la compo- étudié la musique classique. Du coup, je ne cès. Ce qui complique encore un peu plus tout dans une logique de rentabilité. Dès le vouloir, il a documenté notre périple. sition du groupe a changé et la musique a évo- me sens jamais rattachée à un genre précis. les choses… Avec One Horse Land, on a ré- Certains observateurs présentent Woun- qu’un nouveau territoire s’offre à nous, on Cette dimension « carnet de voyage » nous lué. D’une certaine façon, One Horse Land One Horse Land s’est formé sans idée musi- colté 2.500 euros. Ce n’est pas une somme ded comme votre premier album. P atine ne se pose aucune question : on fonce. Si plaît tout particulièrement. Elle donne vient marquer une transition. Avec ce nou- cale préconçue. Quand on a commencé, on mirobolante mais nous, avec ça, on est en serait donc votre deuxième essai. Vu de un public t’attend quelque part, pourquoi une image assez fidèle de notre quotidien veau nom, on passe d’un projet amateur à un ne savait pas dans quel registre allaient évo- mesure de faire tourner la boutique. Le jour l’intérieur, comment percevez-vous les ne pas y aller ? en tournée. On est des gens ordinaires. On truc sérieux et, sans doute, plus ambitieux. luer les chansons. C’est pour cette raison que où on s’est décidé à travailler sur l’album, choses ? ne joue pas dans un groupe inaccessible, le projet a mis quelques années avant d’émer- on n’a pas plébiscité les services d’un label. AM : Officiellement, Patine est notre pre- Début mai, vous avez joué quelques dates enfermé, tout là-haut, dans sa tour d’ivoire. Peut-on comprendre le titre de votre album ger. On avait besoin de temps. Pour se trou- On s’est directement inscrit sur cette plate- mier album. Avec Wounded, on propo- en Angleterre. On présente souvent le Ça permet aux gens d’entrevoir notre réali- (‘Bored With The Music’) comme un ras-le- ver. Se comprendre. Et, progressivement, forme. La raison est toute simple : on n’était sait plutôt une compilation de chansons. Royaume-Uni comme le bastion impre- té. Pas si glamour que ça, au final.(Sourire) bol, une sorte de réaction épidermique à construire quelque chose de cohérent. La mu- pas en mesure de présenter un objet suffi- C’était une collection de singles. Ce disque nable de la pop. C’est vrai ? l’état actuel de l’industrie musicale ? sique folk et les ambiances dépouillées font samment qualitatif pour convaincre une est né à la suite de plusieurs sessions d’en- DL : Quand on va en Angleterre, on joue JF : Il ne faut pas y voir du rejet, plutôt quand même l’unanimité au sein du projet. maison de disques d’investir dans le projet. registrements. Il n’intégrait aucune conti- dans des petits clubs. Ce sont des dates de l’ironie. Bored With The Music, c’est du Nick Drake et Mark Hollis sont des noms qui Aujourd’hui, avec notre premier album, on nuité. On ne l’a pas enregistré avec l’en- jouées à l’arrache dans des conditions as- second degré, une manière décalée de nous parlent. Sur la scène actuelle, on se re- voit forcément les choses différemment. vie de construire un ensemble cohérent. sez difficiles. Mais cette réalité touche éga- mettre en évidence les frustrations inhé- trouve aussi derrière des formations comme Cette fois, on a vraiment planché sur un lement les groupes anglais. Là-bas, tout le www.brns.be rentes à un projet musical. Quand on joue Megafaun ou Giant Sand. One Horse Land Bored With The Music fil conducteur. On a veillé à établir des monde est logé à la même enseigne : cent dans un groupe, ce n’est pas le tout de com- COD&S liens entre les chansons. En comparaison, livres sterling, quatre paquets de chips, En concert poser des chansons, il faut aussi gérer une Le 16 mai, Nuits Botanique, Bruxelles (complet) L’album a vu le jour par l’entremise de Kiss www.onehorseland.be Wounded était plutôt un E.P. camouflé en une bière et pas d’hôtel. Qu’on soit An- Le 10 octobre, Ancienne Belgique, Bruxelles tonne d’activités parallèles qui, de près ou Kiss Bank Bank, une plateforme de finan-

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Reo nc ntre Reo nc ntre

En ce 20 mars 2014, le monde entier célèbre les images sont retravaillées et des mor- reno c ntre b luegrass la journée du bonheur. À Liège, sous un soleil ceaux sont venus s’ajouter. Ce sera aussi sans la fanfare : c’était une chouette idée carrément estival, les Tropic ont terminé leur pour le festival, mais plus envisageable répétition hebdomadaire dans le local partagé pour la suite. Little X avec Piano Club et My Little Cheap Dictaphone. BS : L’idée est de rendre le projet moins ci- blé, plus compréhensible pour n’importe Y’a d’la joie ? Pour le moment, nous sommes qui. Et donner une image un peu bizarre Monkeys en stand-by, répond Jeremy. Je ne dirais pas de la Belgique, qui fasse un peu peur, mais aura Beaudry L que ça soit marrant en même temps. On

© R etour aux sources que c’est le bonheur. Le disque, celui des bosse pour arriver à quelque chose d’inté- Belgians en l’occurrence, est prêt. On attend ressant et de pertinent. En tout cas, ce sera Ressusciter la beauté désespérée du folk/bluegrass traditionnel, la marier bien déglingué. Ça, c’est promis. juste que les choses se mettent en place, avec l’énergie de la soul Tamla Motown et y rajouter une touche contem- ajoute-t-il à propos de leur « side project ». www.tropicbluesband.com poraine. Voilà la mission que s’est fixée Little X Monkeys, formation O

© livier Donnet Di dier Stiers namuroise nous offrant l’Amérique profonde à portée de main. Bluffant.

reno c ntre avec un autre nom. L’engrenage s’est mis Luc Lorfèvre rock en route… Le disque a été enregistré dans l’urgence aussi, en trois ou quatre jours, sans gros moyens, avec un studio mobile, a première fois que nous avons ligne François-Xavier Marciat. Nous avons Bala de au Tennessee dans le local du Prince Harry à Beyne- vu Little X Monkeys en live, nous lancé Little X Monkeys avec Marjorie, guidés Heusay. En 2011, The Experimental Tropic Blues Band est avons été frappés par le contraste. par l’envie commune d’exprimer notre passion à l’affiche du Beale Street Music Festival, le volet The À gauche de la scène, il y a ce gui- pour le blues, le bluegrass, le folk ou la soul. « rock » de Memphis In May. Le Mississippi menaçait Travailler à l’arrache, ça vous a rappelé de déborder, il y avait des alertes aux tornades, ra- tariste aux cheveux courts, avec Pour essayer de décrocher quelques dates, on vos débuts ? conte Jean-Jacques, alias Boogie Snake. Les groupes une chemise de mormon fermée a enregistré cet EP. On a fait ça à deux dans DD’I : Enregistrer avec Jon Spencer (l’al- ne bougeaient pas, les Amerloques attendaient, jusqu’au col et des bretelles faisant re- mon salon, avec un seul micro et le plancher Experimental bum Liquid love, Ndlr) nous avait déjà don- et on nous a dit : « Allez les Belges, allez-y ! » On a monter son pantalon aux chevilles. Loo- qui craque. On a balancé le morceau Black- né envie de faire un truc avec des petits commencé à jouer, il pleuvait à fond ! » Et c’est la ké comme Tom Sawyer, le garçon est dans Bird sur la Toile et il y a eu très vite un fee- galère… Le public, qui s’attendait manifestement L moyens, vite, et juste entre nous. son monde, enfermé dans ses notes acous- dback positif. Notre concert à la Maison des à voir arriver une autre formation, n’en a manifes- DC : C’est ce qu’on a appris à New York, en tement rien à secouer, des représentants belges. Et tiques qui nous emmène dans les pages Musiques, dans le cadre de la Fête de la Mu- Tropic tout cas, ce côté punk. il le manifeste ! Dirty Coq : Nous avions une heure, d’un roman de John Steinbeck, un plan sique en juin 2013, a été diffusé sur Classic 21 mais au bout de 45 minutes, on a lâché le truc, on séquence de Broken Social Breakdown ou et notre participation à la Nuit du Soir au Bo- Vous n’étiez pas punks auparavant ? s’est cassés. Et les gens du festival nous ont rappelé une compilation d’inédits de Woody Guth- tanique a aussi suscité pas mal de débouchés. DC : En Belgique, tout le monde aime faire en menaçant de ne pas nous payer ! Les USA, rie. À deux mètres de lui, un petit bout C’est là qu’on a rencontré le programmateur des disques propres, avec un minimum de version soyons carrés ! On s’est ramenés, reprend de femme claque des mains et fait vire- du festival Roots & Roses et Maurice Charlier Blues Band production. Un son déglingos, comme ce- Boogie Snake, et on a fait n’importe quoi pendant volter sa robe blanche. Elle a la voix d’Et- de Cod&S qui nous a signés sur son nouveau quinze minutes. On avait joué le jour précédent lui des premiers Black Lips, c’est rare, chez au même endroit et là, ça s’était bien passé… Un ta James, l’accent de Dolly Parton, le jeu label SkyMyHusband. nous. Bon, auparavant, on ne le faisait pas, grand moment de solitude, comme le qualifie Devil de jambes de Tina Turner époque River Pour son album, Little X Monkeys est C ôté Belgians ou juste avec les premières démos. D’inferno. Dans le public, des gens nous tournaient Deep, Mountain High et un charme naturel passé du salon de François-Xavier à la le dos en faisant des doigts d’honneur. D’autres se qui n’appartient qu’à elle. On se prend une chambre. On a acheté du matos et une table Vu de l’intérieur, en quoi le groupe a-t-il le marraient… Et puis, cette personne qui nous renvoie claque. Après le concert, on se renseigne de mixage mais on veut garder l’esprit et la sur scène pour les quinze dernières minutes, ce plus changé ? pour savoir de quel bled paumé du Kentuc- spontanéité de nos premières chansons avec Le lâcher prise. On est moins à vouloir n’était pas très agréable. Comme tous les invités ky vient ce groupe et là, surprise : on ap- un son brut et cette énergie qui doit beaucoup DC : « exotiques », le groupe de Liège est chaperonné, à faire les choses « bien ». Le live est beau- Memphis… Et The Belgians, c’est de là que ça vient : prend que Little X Monkeys est un groupe à l’interprétation de Marjorie. Ce chemin vers omment rester motivé pen- Si le disque des Belgians est prêt, c’est que coup plus libre, je trouve… on ne les y appelait pas autrement. Il y avait peu de du terroir. les sources de la musique américaine n’est pas dant un tel break, alors qu’on vous avez fait vite ? DD’I : On a trouvé une liberté, la liberté différence entre accompagnement et surveillance, Formé en 2012 dans la province de Namur à sens unique. On se sert de bases anciennes a eu auparavant un emploi DD’I : Le précédent (Liquid love, Ndlr) re- d’être complètement décomplexés par rap- résume le batteur du trio. On est allés chez Goner, par Marjorie Piret (dont la langue mater- pour faire quelque chose de vivant et de très du temps ultra chargé ? monte à fin 2011. Pour celui-ci, on avait de port à la musique. En tout cas, par rapport un disquaire vraiment superbe où tu peux passer nelle est l’anglais – ce qui aide) et François- festif. Jusqu’à présent, personne n’a collé l’éti- quelques heures. La femme qui nous accompagnait Devil D’inferno : On arrête de la matière et on voulait au départ le sor- à la vision que les gens ont souvent de la Xavier Marciat, Little X Monkeys propose quette « revival » à notre musique. Et ça nous se voir. Comme ça, quand on tir très vite. Et puis, il y a eu cette idée des musique. s’est assise sur une chaise, au magasin, avec son sac un mélange authentique et sans fioriture touche beaucoup. Initialement, on croyait que sur les genoux, le temps qu’on finisse… Le matin, se retrouve, c’est cool ! Belgians, les vidéos… Dans l’urgence, les DC : Nos débuts, c’était vraiment la galère ! une bagnole nous attendait à la sortie de l’hôtel de bluegrass, de folk et de soul. Mais il ou- notre projet allait être très ciblé, mais on se Dirty Coq : Avant, on répétait trois fois par choses se sont précipitées. On s’est toujours battus pour arriver à un pour nous emmener. Après, on nous reprenait pour blie fort heureusement de nous la jouer rend compte qu’on intéresse des tas de géné- Csemaine et le week-end, on jouait ou on DC: Tout est parti d’un concert au Lou’s truc correct, mais on n’avait pas les outils aller manger un burger. Nous, on voulait aussi voir «vintage» et insuffle un souffle nouveau rations différentes, notamment beaucoup de partait en tournée. Là, on a décidé de ne Bar (Rue de la Boucherie, à Liège, Ndlr), un pour. Devil D’inferno n’avait jamais joué d’autres choses, quoi… Mais dès qu’on essayait de dans des compositions originales qui com- jeunes. répéter que le jeudi. On n’est pas pressés : tout petit lieu. Tu y mets 40 personnes et de batterie, on se débrouillait, mais c’était se faire la malle, on nous appelait ! Boogie Snake, portent, ça et là, quelques zestes pop. Alors on maîtrise nos morceaux. Moi, ça me per- c’est bourré. On s’est dit qu’on allait s’appe- dur. On courrait toujours pour essayer de Dirty Coq et Devil d’Inferno sont même présentés à qu’il annonce son premier album Mys- www.littlexmonkeys.com met de faire un peu de musique sur le côté, ler The Belgians pour ne pas dire Tropic faire « bien ». Maintenant, c’est non : retour Jerry Lee Lewis ! Ils nous tapent devant la limousine, tic River pour l’automne, le groupe aug- porte ouverte, et puis voilà… Qu’est-ce que tu veux à Devil D’inferno de faire des ceintures, et et qu’il y ait alors trop de monde ou que ça aux sources ! dire ? « Bonjour, ça va ? Vous êtes très connu en menté de trois musiciens sur scène jouit à Boogie Snake… foute la merde. Alex Stevens l’a entendu, Belgique ! » Et puis tout autour, il y avait des gens déjà d’une réputation sulfureuse sur foi Little X Monkeys Boogie Snake : Rien ! (Rires) Si, je travaille a trouvé que ce serait cool d’aller au festi- Ce qui nous ramène aux Belgians : où en avec des appareils photos et des caméras. C’était de quelques concerts jubilatoires et du EP Mystic River SkyMyHusband Records la technique. De la guitare : les accords, les val de Dour sous ce nom. Et nous, on ne êtes-vous aujourd’hui ? pénible ! Vraiment bizarre, ce voyage, conclut Boogie Black Bird publié à l’arrache en mars 2013. Snake. Très amusant, mais très freako ! machins… voulait pas faire un concert de Tropic juste DD’I : Par rapport à ce qu’on a vu à Dour, Les choses ont très vite bougé pour nous, sou-

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Reo nc ntre Reo nc ntre

reno c ntre w orld reno c ntre f usion Majid Bekkas Afrikän Jongler avec les cultures Protoköl ouvre l’esprit U n protocole à contre- Majid Bekkas, le magicien des rencontres, est de retour avec un album qui littéralement fait courant du chacun-pour-soi la passerelle (Al Qantara) entre l’occident et Afrikän Protoköl est un nouveau projet « burkinabelge » l’orient, entre l’Afrique et l’Europe. Le bluesman né pendant un voyage du saxophoniste bruxellois marocain allie la musique gnawa et classique Guillaume Van Parys au Burkina Faso. Le fruit de arabe aux influences allant du blues américain cette rencontre entre jazz et rythmes traditionnels jusqu’aux flûtes et percussions indiennes.Le Maroc burkinabés est un tout nouvel album intitulé Freedom a toujours été un carrefour des civilisations. from the known. C’est une invitation à se libérer de jid Bekkas a M Benjamin Tollet la peur, un encouragement pour aller vers l’inconnu. © f

Benjamin Tollet © A ricän Protoköl

e Marocain Abdelmajid Bek- esclaves. Le oud est quant à lui l’instrument Mon pays, le Maroc, a toujours été un car- frikän Protoköl est un appel contre interculturelle. Ce grand trompet- en soi montre déjà la réussite du métissage de kas commence sa carrière musi- de prédilection de la musique classique arabe, refour des civilisations, une passerelle à l’ouverture d’esprit, démon- tiste du jazz belge et des rencontres inter- différentes cultures pour créer une plus-value cale en 1972 en jouant du raconte Majid Bekkas au téléphone depuis entre l’Afrique et l’Europe, entre l’Occi- trant musicalement que la culturelles est invité sur deux morceaux artistique et humaine. dans le style populaire de l’époque sa maison à Rabat. dent et l’Orient. Cet album est dans la différence nourrit l’esprit. Le de l’album et rejoint souvent ses disciples dans des groupes comme Jil Ji- continuité. Depuis 2001 je ne fais que ce projet est né de l’amitié entre sur scène. L’album sortira en Afrique avant d’être lala et . Ce n’est Quel est le lien entre ces musiques et le genre d’expérience, jouant avec différents Moïse Ouattara et Guillaume présenté en Belgique pendant les festivals pourtant pas dans ce style qu’il évolue- blues afro-américain qui est omniprésent musiciens du monde. Van Parys, qui se sont rencontrés lors d’un On pourrait traduire le titre Freedom from estivaux. C’est notre volonté, symboliquement ra comme artiste solo. Initié à la musique dans votre musique ? voyage du second au Burkina. C’est avant the known par « se libérer du connu ». C’est c’est important car le projet est né en Afrique. Lgnawa par le maître Ba Houmane à Salé, Majid Bekkas : La musique gnawa et le Belle nouveauté c’est l’apparition de la Atout un projet artistique et humain. Plus que une manière de parler de la thématique cen- On fait le lancement officiel au festival Jazz il se fait connaître avec son Gnaoua Blu- blues ont la même racine : leur mère c’est musique indienne. faire de la musique ou se faire du pognon, on trale du projet : s’affranchir du conditionne- à Ouaga. C’est chouette de pouvoir retourner es Band dans les années 1990. En paral- l’Afrique ! Leur histoire est semblable, liée J’ai voulu faire la liaison entre l’oriental et veut véhiculer un message, explique Van Pa- ment, ce qui détermine notre existence, pour- et montrer le chemin qu’on a fait depuis lors. lèle, il étudie la guitare classique et le oud, à l’esclavage. Les gnawas sont les esclaves le jazz. On retrouve sur l’album de la flûte rys, qui a travaillé dans la coopération au suit Van Parys. Comme par exemple la Pendant son séjour au Burkina, Afrikän l’instrument phare de la musique clas- qui sont restés au Maghreb et le blues fut bansuri et des tablas (percussion indienne) développement avant de se lancer dans nationalité dans laquelle on est né, qui nous Protoköl jouera aussi à l’ambassade belge sique arabe. Depuis lors, il a partagé la créé par les esclaves qui ont été envoyés en et c’est pourquoi j’ai choisi de travailler ce projet. Je me suis vite rendu compte que donne la possibilité de voyager, ou non dans dans le cadre du bicentenaire d’Adolphe scène avec nombre de musiciens virtuoses Amérique. Ce sont les musiques de la dias- avec Manu Hermia (saxophoniste et flû- même dans la coopération, les rapports hu- le cas des Burkinabés. Même chose pour notre Sax. En juillet et août, les Burkina-belges comme , Joachim Kühn et pora africaine et du coup elles se ressem- tiste belge) et le percussionniste maro- mains sont inégaux. Les institutions vien- vision de la société, la religion, la famille… seront en tournée en Belgique. On pourra Klaus Doldinger. On a pu le voir aussi au blent. Je ne parle pas du blues américain cain Khalid Kouhen. Ils connaissent bien nent avec beaucoup d’argent, font un deal avec Avec notre musique on veut encourager les entre-autres les découvrir au Festival Es- sein du superbe quartet Makenba avec actuel mais de l’essence du blues. la musique indienne et ont l’habitude de les Africains qui n’en ont pas, c’est une lo- gens à aller vers l’inconnu. peranzah ! le balafoniste ivoirien Aly Keïta, le per- jongler entre les styles, ce qui donne plus gique assez bizarre, des rapports humains as- cussionniste argentin Minino Garay et le de possibilités et d’ouverture. Khalid était sez biaisés. Je voulais faire un vrai échange www.afrikanprotokol.be La musique gnawa est une musique ri- Agir maintenant www.jazz-ouaga.org saxophoniste français . tuelle. Vous essayez de mettre cette pro- déjà présent sur mon premier disque Afri- culturel et un apprentissage mutuel. Afrikän Un chouette détail dans le titre : now est fondeur dans votre musique ? can Gnawa Blues, enregistré avec le label Protoköl, ce ne sont pas les blancs qui vont dire mis en valeur dans le mot « known ». C’est Aujourd’hui, Majid Bekkas est recon- Certainement, mais pas comme dans un belge Igloo. aux Africains comment faire, au contraire, un appel à l’action, un encouragement pour nu comme maître du guembri et du oud, vrai rituel gnawa où dans les communau- jouer avec ces gars est un apprentissage au agir maintenant. Il y a des choses qui se pas- des instruments pourtant issus de deux tés il y a des sacrifices et un ordre à suivre… Pourquoi retourner vers une formule à quotidien ! sent dans notre société comme la montée des mondes fort différents. Le premier est Un rituel gnawa est comparable à la ma- trois ? extrémismes, l’individualisme, le repli sur sa l’instrument principal des gnawas, le se- cumba au Brésil ou le vaudou en Haïti et C’était ma formule de base, celle qui per- Le groupe est composé de musiciens de propre culture, la peur qui nous est insufflée. cond est issu de la musique classique au Bénin. Mais tout de même, en jouant met que chaque musicien ait suffisam- la scène de jazz belge comme le saxopho- Comme artiste on ne peut pas rester indiffé- arabe. Ce sont deux cultures différentes et en du guembri, je suis en liaison avec ça, je le ment de place pour s’exprimer. La parti- niste Toine Thys et d’une section ryth- rent par rapport à ça, s’indigne Van Parys. même temps ce sont mes cultures. J’appar- sens dans la vibration de mon instrument. cularité de ce trio c’est que chacun joue au mique 100% burkinabé composé du bat- Je me pose la question de savoir quel est mon tiens au monde arabe et à l’Afrique. Le Ma- moins trois instruments. D’un morceau à teur Moïse Ouattara, son frère Achille à la rôle dans la société, que faire pour inverser ces roc a ses racines en Afrique et fait partie du Sur Al Qantara, le métissage musical reste l’autre on change de couleur de manière basse et le percussionniste Zouratie Kone tendances. Il faut se libérer de la peur, car elle monde arabe. Le guembri est un instrument à l’ordre du jour. tout à fait naturelle et agréable à l’oreille. aux percussions. Le saxophoniste ivoi- limite les possibilités de notre existence. On le marocain de racine africaine, de la famille du Tout à fait. Al Qantara veut dire le pont, rien Yizih a rejoint l’aventure et Laurent fait via la musique, via notre énergie positive, ngoni du Mali, qui est arrivé au Maroc via les c’est-à-dire la passerelle entre les cultures. www.majidbekkas.com Blondiau (Mäâk) est le coach de cette ren- notre groove qui appelle à la danse. Ce projet

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rencontre rencontre

reno c ntre jazz peut y échapper comme avec la musique. J’aime le jazz, et le fait de participer à ces expériences me donne l’impression d’être dans le jazz des débuts, celui qui exprimait la joie comme la douleur. Des gens comme Fabrizio Billie Holiday restent des héros de l’expé- rience humaine.

Quel est le lien avec C onference of the Birds ? Cassol Dans ce projet, je travaille avec de jeunes artistes. La plupart de mes amis musiciens sont aussi enseignants de façon régulière. écoute le chant Moi pas, je ne fais que des ateliers, des master classes ponctuels. Il me manque donc une forme de transmission. J’avais des oiseaux aussi envie de savoir comment ces jeunes voient leur place dans le monde en tant qu’artistes. Cela peut paraître pompeux Saxophoniste et compositeur, mais, si je me connecte à ma jeunesse à raux i il a coutume de faire le tour du Liège, le fait de s’engager artistiquement G était la vision générale. On le faisait, on abrice F monde de la musique. Mais, avec s’impliquait, et les autres, on les considé- © son projet Conference of the rait comme ringards. C’était il y a trente Bert Cools (guitares-espaces sonores), Rudy Mathey (clarinettes), Fabrizio Cassol (saxophones), Antoine Birds, Fabrizio Cassol s’entoure ans. Pierre (batterie), Felix Zurstrassen (basse), Manu Baily (guitares) de jeunes musiciens belges Aujourd’hui, y a-t-il une telle réflexion ar- pour s’interroger sur l’intuition, tistique ? l’engagement artistique et la Les jeunes musiciens sont devant un ave- créative, tellement forte, et qui est pous- autant qu’un recueil de poésie persane nir riche en possibilités, en options. Main- sée par le collectif, l’âme groupe. Je me

raux d’obédience soufie. D’où vient le nom du i

G place de l’artiste dans la société. e tenant on est clairement dans le XXI souviens de Jacques Pelzer, mon parrain projet ? siècle. Beaucoup de jeunes développent du jazz. Il disait que le jazz, c’était les Ita- Les premières partitions que j’ai amenées F Dominique Simonet © abrice leur intuition de manière forte, ils n'ont liens, les Juifs et les Noirs, parce que leur étaient inspirées de chants d’oiseaux, dont pas le choix, ils ne peuvent hésiter. C’est là diaspora, leur collectivité est leur fonde- Olivier Messiaen avait fait l’annotation et où l’on retrouve un des aspects de l’anima- ment. Aujourd’hui, nous sommes dans le classement. Il s’en est servi comme base lité, au centre de Conference of the Birds, un une multiplicité qui nous dépasse, mais pour certaines de ses compositions. Au a musique n’est pas gratuite, en- percussionniste Michel Debrulle. Puis, Afrique du Sud, on a une autre vision, une lien direct un peu refoulé dans le monde l’âme groupe est en train de revenir très départ, pour moi, l'utilisation de ce maté- core moins fortuite. Elle procède suite à une rencontre avec les pygmées autre conception esthétique du théâtre et de occidental. fort. Le soutien de sa communauté rede- riau musical était juste une envie person- d’une pensée, que celle-ci soit po- Aka en Afrique centrale, il fonde un nou- l’opéra. Ce MacBeth est une autre façon d’ob- vient fondamental pour un artiste. nelle. Quand on a commencé à avoir ces litique, religieuse, philosophique, veau trio avec Michel Hatzigeorgiou à la server les jeux de pouvoir et leur côté destruc- Et le rapport avec l’Afrique ? réflexions sur l’intuition, on a regardé ces sociale… Mourir pour des idées, basse et Stéphane Galland à la batterie : teur. Ça finit dans la désolation complète, c’est Il se situe dans la réflexion sur les âmes Curieusement, pour travailler sur la partitions, puis ça s’est élargi. Que ce soit d’accord, mais de mort lente, pré- Aka Moon, toujours en activité. très puissant. Le spectacle sera présenté au individuelles et les âmes groupes. En conscience artistique et l’importance du aussi un album de Dave Holland et une conise le sage Georges Brassens. Il n’em- Kunsten Festival des Arts. Et quand je rentre Afrique, les collectivités ethniques et collectif dans un monde individualiste, poésie perse, tout cela m’arrange. J’aime pêche: depuis toujours, l’on joue pour des Depuis, on ne compte plus les participa- après Pâques en Belgique, c’est pour travailler familiales sont très fortes. Elles sont en vous revenez en Belgique, avec des compa- bien l’idée de conférence, avec tous ces Lidées, l’on chante pour des idées. tions de Fabrizio Cassol à des spectacles avec le metteur en scène Alain Platel au spec- tout cas beaucoup plus exprimées que triotes musiciens. jeunes oiseaux qui réfléchissent ensemble. Depuis le milieu des années 1970, cela théâtraux et chorégraphiques, alors qu’en tacle Coup fatal. Musiciens et chanteurs sont chez nous. Dans le travail avec Confe- Conference of the Birds nous donne un ne semble plus être dans l’air du temps. même temps, il déploie son talent musi- congolais avec, parmi eux, le contre-ténor rence of the Birds, on essaie de voir la rela- bon point de vue pour observer le monde www.fabriziocassol.com L’époque est écartelée entre, d’une part, la cal polymorphe dans bien d’autres direc- Serge Kakudji, qui en a eu l’idée du spectacle. tion entre le monde humain et le monde contemporain. Il est important de reve- virtuosité et l’omniscience érigées en ab- tions, comme autant de rencontres. L’une On dit qu’en Afrique, les enfants savent dan- animal : à partir de quand y a-t-il décon- nir centré sur ce que je considère être solus et, d’autre part, la fabrication indus- des dernières en date se matérialise par ser et chanter avant de savoir parler. Ici, les nexion entre les deux ? C’est alors que mon pays, la Belgique. Je devais prendre Init v é d’honneur du Festival de Wallonie trielle de sons ayant des airs de musique le projet Conference of the Birds, qui ras- musiciens vont aussi danser, ce qui est rare. les humains prennent leur destinée en plus conscience de ce qu’est la Belgique, Et une actualité estivale bien chargée pour Fabrizio sans en être, sons devenus omniprésents. semble six jeunes musiciens belges et le On va faire l’ouverture d’Avignon, puis on sera main, l’idée étant de voir comment cette donc pas de travail « musique du monde » Cassol. En cette année où la Belgique fête le bicen- Fallait-il faire entrer la musique dans les cinéaste Maxime Pistorio. Un retour aux à Bruxelles en novembre. destinée se dessine en rupture ou en lien avec ce groupe ! Même si tous connais- tenaire de la naissance d’Adolphe Sax, le Festival aéroports, Monsieur Eno ? sources pour ce grand voyageur qui, lors avec le groupe. L’animal, lui, est dans son sent la chanson, je veux dire que, dans de Wallonie s’est donc choisi Fabrizio comme invité d’honneur. Mais on aura donc l’occasion de l’écouter de l’entretien, vendredi 11 avril, se trouvait Quel est le sens de l’évolution de votre dé- présent, il ne pense pas à la semaine pro- Conference of the Birds, chaque musicien En tout cas, celle de Fabrizio Cassol ne au Cap, pour une adaptation du MacBeth chaine. L’humain bien. connaît quelque chose de la musique à de maintes reprises dans les prochains mois, que marche ? ce soit avec Macbeth au Kunstenestivalsesarts trouve sa place ni dans les aéroports, ni de Verdi par le metteur en scène sud-afri- J’ai commencé à tra- Fabrizio Cassol : contemporaine, du jazz, du classique, de (mai), en Avignon en juillet avec Coup Fatal de Alain dans les ascenseurs. Saxophoniste alto, so- cain Brett Bailey. Le sujet de la pièce, ce sont vailler la musique avec la synchronisation, Le balancement entre l’individuel et le col- la musique indienne ou africaine. Tout Platel, aux Festival Les Inattendues à Tournai fin prano et aulochrome, compositeur, Cas- les Sud-Africains qui observent la situation c’est-à-dire en essayant de comprendre et lectif, c’est aussi toute l’histoire du jazz. ça, ils l’ont, donc le travail peut se situer août et sur les routes de Wallonie durant tout l’été sol (Ougrée, 8 juin 1964) a d’abord défrayé au Congo par rapport au désastre actuel. Le de connecter toutes les cultures. Depuis Le jazz est effectivement une histoire de ailleurs. avec le Festival (Liège, Namur Libramont, Stavelot, la chronique au sein de l’anticonformiste Congo, c’est le cœur même de l’Afrique. Beau- plusieurs années, je travaille avec des gens destinées individuelles connectées avec etc.). Plus d’infos : www.festivaldewallonie.be. L’al- Trio Bravo (1984-1992), avec le trombo- coup de choses ont été expérimentées là-bas, de la mise en scène car, avec eux, les pro- le groupe. Charlie Parker, Duke Elling- bum Conference of the Birds est quant à lui prévu C onference of the Birds, c’est le titre d’un pour septembre chez Outhere. niste-tubiste Michel Massot et le batteur dans le meilleur et surtout dans le pire. Ici, en blèmes humains sont mis en face, on ne ton, c’est le maximum de l’individualité album du contrebassiste Dave Holland

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t ctoraje ire trajectoire

Le bon calcul devenu un repère pour moi. Je l’ai surtout re- Darwin Case, Majid Bekkas ou, plus ré- Dès l’âge de huit ans, comme beaucoup marqué lorsque cette émission a disparu. Je cemment LOBI et encore Ève Beuvens et de jeunes, Jean-Pierre Bissot joue de la me suis aperçu d’un certain manque. Il faut son Heptatomic. J’ai toujours été à l’écoute des musique avec l’Harmonie du village. De dire qu’il y a quelque chose d’unique dans musiciens et de leurs rêves les plus fous. J’es- la trompette. Cela ne durera que jusqu’à cette musique qui se crée dans l’instant. saie de savoir où ils en sont, de les aider à réa- ses quatorze ans, lorsque la fanfare péri- C’est cela qui l’intéresse et le fascine. Le liser ce dont ils ont envie. Parfois cela prend du clite. Est-ce par dépit qu’il se lance alors jazz est la conjugaison du cœur et de l’esprit. temps car je ne les pousse pas, ce sont eux qui dans des études de math à l’Université de Il allie la spontanéité et la recherche intellec- doivent sentir s’ils sont prêts. Mon job, c’est de Liège ? Peut-être. En tous cas, l’amateur tuelle. C’est le mélange des genres, le mélange les stimuler, de faciliter leur travail. Quand il de musique qu’il est, a les oreilles bien ou- des couleurs. Les musiciens voyagent beau- s’agit de faire venir des musiciens en résidence, vertes. Et il les laisse traîner du côté du coup, font des rencontres, partagent leurs ex- cela chiffre vite. Il vaut mieux être convaincu… Centre de Recherche et de Formation Mu- périences. Il y a, dans cette musique, un lien et être convainquant. sicale, animé à l’époque par Jacques Four- constant entre les générations, les continents, De ce point de vue là, on peut lui faire gon et le célèbre Henri Pousseur. les cultures. confiance. Jean-Pierre Bissot remplit le C’est à cette période qu’il établit ses pre- cahier des charges qui lui est imposé sans miers contacts avec les Jeunesses Mu- L’esprit du Gaume faillir et ne se contente pas des deux créa- sicales. Jean-Pierre Bissot s’en souvient Il y a autant de jazz qu’il y a de styles. Au Gaume, tions annuelles qu’il doit mener à bien. bien : Le responsable de l’époque m’avait invi- j’ai voulu proposer cette diversité de styles. Il fal- Notre scène musicale belge est riche, tient-il à té à venir le voir travailler au Conservatoire lait de toute façon que nous nous singulari- souligner. Le but du Gaume et des Jeunesses de Liège. Il y avait organisé le concert d’un or- sions au maximum, être différents de Liège ou est de proposer au public, bien plus réceptif chestre allemand de musique contemporaine. de Bruxelles. Le public devait avoir une bonne qu’on ne le pense, toute cette culture.L’exercice Le jour « j », il y avait plus de mille jeunes pré- raison de venir jusqu’à nous. Jean-Pierre Bis- n’est pas si simple et pour se faire entendre, sents dans la salle… Mais mon contact n’y sot se tourne alors vers le jazz européen sur il faut se battre. Le jazz est exclu des médias était pas ! Il était en panne sur la route. Il m’a lequel, à l’époque, peu de programmateurs qui cloisonnent et utilisent le matraquage. demandé de présenter le concert à sa place ! misaient, préférant faire venir les stars amé- Notre volonté est d’abattre les murs entre les dif- Ce baptême du feu s’avère plus que ricaines. C’est aussi un moyen de ne pas par- férentes expressions artistiques et musicales. concluant car il se voit, quelques mois plus ticiper à la surenchère de l’offre et des ex- Mais le marketing les recrée sans cesse. D’où tard, engagé par les Jeunesses Musicales. Il clusivités. Jean-Pierre Bissot a le nez fin. la difficulté à nous faire entendre sur les ondes. laisse tomber les études de math, assiste, en Il invite Claude Nougaro, alors au creux de tant qu’élève libre, aux cours de musicologie la vague, qui laissera entendre au public et La sensibilité par la jeunesse. e et à partir de là, tout s’enchaîne rapidement. à quelques journalistes tout heureux de re- © J an-Pierre Bissot Pour sensibiliser les jeunes à écouter et à En 76, il crée la section de la province du layer l’info en primeur, les prémices d’un fu- vivre d’autres musiques, le Festival a eu Luxembourg des Jeunesses Musicales. tur Nougayork jubilatoire. l’idée de proposer également des stages, lu- J’ai toujours voulu créer des liens avec les Jeu- diques et pédagogiques, aux enfants de 6 à Passage à l’Act. nesses Musicales des autres pays en leur pro- 12 ans. Ici aussi, on s’attache plus à éveiller Début 80, avec un sens aigu du contact et posant de sélectionner leurs meilleurs jeunes la jeunesse à la culture (musique, peinture, un enthousiasme débordant, il arrive à jazzmen. Certains ont accrochés, comme la danse) qu’à simplement l’occuper pendant convaincre le bourgmestre de Chassepierre Suède, d’autres moins. C’est comme cela que les vacances. Imaginez les enfants chan- d’accueillir le mythique Act Big Band. Il Esbjorn Svensson est venu plusieurs fois en ter et jouer avec Aka Moon, à entrer dans imaginait que des hordes de hippies allaient Gaume avant que tout le monde ne se l’arrache. l’univers de Steve Waring ou de Piet Mar- Jean-Pierre déferler sur son village ! Ce n’était pas gagné Le Gaumais est fier aussi d’avoir invité pour ris & Jaune Toujours, ou encore de Charles d’avance. Heureusement, tout se déroule à la première fois en Belgique Jean-Marie Trenet. Cela ouvre les horizons. merveille et le succès est au rendez-vous. Machado, Laurent Dehors, Stefano Bollani L’idée de créer un festival de jazz fait alors ou encore François Bourassa. Élargir encore. rapidement son chemin et, dès 85, il invite Non content du succès du Gaume Jazz d’été Bissot ni plus ni moins que Don Cherry à venir et du travail que cela demande, Jean-Pierre Défendre les jeunes musiciens jouer en Gaume. À l’époque, l’infrastruc- belges. Bissot a lancé, voici trois ans le Gaume ture des lieux se résume à un plancher ban- Animé par le passion des mélanges et des d’Hiver, d’Automne et de Printemps qui ac- cal et une charrette à foin en guise de scène. échanges, Bissot n’oublie pas l’une des cueille les concerts des Lundis d’Hortense 30 ans de boulimie Le célèbre trompettiste américain est un missions premières des Jeunesses Musi- et permettent de faire exister Gaume le peu dubitatif mais Jean-Pierre Bissot se cales : faire éclore les jeunes talents locaux. reste de l’année. Et ici aussi, les résultats musicale montre persuasif et, après un bon dîner, le Il propose alors aux musiciens belges, des donnent raison à l’infatigable organisateur. jazzman accepte. Le Gaume Jazz Festival cartes blanches et se démarque ainsi un D’ailleurs, lorsque Jean-Pierre Bissot prend Entre deux réunions avec les Jeunesses est né, l’histoire peut vraiment commencer. peu plus des grands festivals belges et eu- des vacances, c’est encore pour s’occuper de Musicales, Jean-Pierre Bissot, cheville ouvrière ropéens. Dès 1991, il propose à Charles Loos jazz. Au Maroc, cette fois-ci. Il s’efforce ain- Pourquoi le jazz ? de mettre sur piedNo Wall, No War, un bal- si, chaque année depuis 2009, à inviter des infatigable et véritable âme du Gaume Jazz On peut imaginer que Jean-Pierre Bissot let jazz sur des chorégraphies de Martine jazzmen issus des 27 pays de la Communau- Festival, a pris le temps de faire le tour est ouvert à toutes les musiques, qu’il en Herbette. Plus tard, il donne les moyens à té européenne à jouer avec des musiciens lo- d’horizon de 30 ans de passions avec nous. écoute beaucoup et que toutes le passion- Pierre Van Dormael de créer Djigoui avec caux. Le mélange des genres, toujours. nent. Mais alors, pourquoi le jazz en par- Soriba Kouyate, à Aka Moon de rencon- Jacques Prouvost ticulier ? Quand j’étais jeune, chaque jour, trer Sivaraman et ensuite à Michel Hatzi Après trente ans de travail inlassable, dans l’émission de radio de Gérard Valet, à de monter un Tribute To Jaco Patorius avec Jean-Pierre Bissot n’est pas prêt à se repo- 12h30, il y avait un morceau de jazz. C’était 22 musiciens. Il y aura aussi Mäâk Spirit, ser sur ses lauriers.

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roenc ntre rencontre

omment avez-vous débuté ? d’aujourd’hui et goûter aussi au plaisir de Deslt qua i és complémentaires Mélanie Pelé & Hélène Koer- participer à des projets transversaux, mê- ou quand Alcea parle d’Alcea ver : C’est sous l’impulsion de lant diverses disciplines artistiques contem- Mélanie Pelé (par H. Koerver) : Elle est la locomotive Gilles Millet du Quatuor Da- poraines. Grâce à la bourse Vocatio (Ndlr du quatuor, nous apprenons beaucoup de son expé- nel lors d’une master class au - anciennement bourse de la Vocation) nous rience dans le domaine. Une force en mouvement Domaine Rurhof que nous avons le projet d’enregistrer un disque. C’est permanent. avons décidé de nous lancer dans l’aven- aussi une façon de se professionnaliser et Hélène Koerver (par M. Pelé) : Ce qui me frappe ture ô combien périlleuse, mais passion- de montrer le fruit de notre travail. Nous le plus chez Hélène, c’est son envie permanente nante du quatuor à cordes. Après plu- avons la chance de compter sur un parrai- de musique, d’aller toujours au-delà du papier, de C l’écriture. Une sorte de miroir et de moteur. sieurs années au sein du Quatuor Amon, nage exceptionnel : celui de Abdel Rahman le virus ne m’a jamais vraiment quitté. Le El Bacha qui jouera avec nous un quintette Franziska Deschner (par M. Pelé et H. Koerver) : Ce quatuor est avant tout un mode de vie, de avec piano. Un disque qui sera essentielle- qui nous épate chez elle, c’est sa détermination, sa pensée, un projet qui est au centre de tout. ment consacré à Schumann. perspicacité, sans chichis. Elle est volontaire et on Nous avons décroché une bourse d’accom- peut toujours compter sur elle. pagnement de la SMart et intégré le cycle Un quatuor, c’est aussi une aventure hu- Suzanne Vermeyen (par Mélanie P. et Hélène K.) : Sa de formation de ProQuartet. maine très particulière ? personnalité est d’une grande douceur - celle qui Oui, car la vie privée est très présente nous manque parfois - et nous admirons aussi son Pourquoi le quatuor à cordes est-il parti- dans le travail. Une sorte de vase clos enthousiasme et sa flexibilité. C’est également une personne très ouverte et lumineuse. culièrement difficile ? avec ce que cela compte de merveilleux Il ne s’agit pas seulement de jouer en- et de plus difficile. Il faut sans cesse faire semble : ici, il est presque question de un pas vers l’autre et apprendre à « cou- science, de savoir. Il faut une formation per la poire en deux » ! Un challenge de très solide, des heures de pratique musi- tous les jours. Chez Alcea, on peut dire cale journalière. Il faut chercher l’équilibre que toute la palette de la féminité y est L e quatuor à cordes : sonore, la justesse, un son d’ensemble qui déclinée. Garder une belle entente et un une démocratie fragile ? ait sa propre personnalité, un travail d’or- équilibre, c’est la chose la plus fragile à Dans le Quatuor Alcea, on a bien compris que la démocratie est un travail de tous les jours. Il faut fèvre… On tente notre petit rêve et on se dit maintenir dans un quatuor. Il faut se dé- pouvoir palier à certaines configurations inhérentes que c’est un privilège unique ! Comment passer continuellement, mais accepter au système de groupe : certains parlent plus (ou les autres musiciens peuvent-ils vivre sans aussi la critique. Choisir entre tout se mieux), ont plus d’expérience, sont plus âgés, … quatuor, sans ce répertoire d’exception ? dire ou pas. Nous avons plutôt choisi une forme de réserve. Parfois dans certaines Bref, chez les Alcea, chaque jour, en alternance, un membre du quatuor devient « Mister President ». Il mésententes, il vaut mieux s’abstenir, l

A Quelle est la place du quatuor dans votre vie ? prend la répétition en main. Cela permet à chaque © cea Aujourd’hui, c’est une priorité. Cela passe laisser reposer. Souvent les choses se rè- personne de s’investir véritablement à tour de rôle avant tout. C’est un pari. On le fait à fond glent d’elles-mêmes. et de sortir éventuellement de sa réserve. C’est aus- reno c ntre classie qu pendant deux ou trois ans et puis on fera si une façon de voir le travail musical et technique sous le prisme de l’autre : quelle est sa vision, ses un bilan. Nous travaillons en moyenne Au fond c’est un choix de vie, le quatuor ? quatre fois par semaine durant quatre En quelque sorte. C’est un mode de vie, de priorités ? Cela évite les frustrations et permet de heures. C’est un travail qui demande une pensée qui est très « invasif ». On sait beau- s’ouvrir à l’autre et d’être dans une véritable écoute. grande régularité et beaucoup de ténacité. coup de choses sur les autres. Les « sacri- Le quatuor à cordes est aussi un groupe qui s’appa- Quatuor Alcea Il n’y a pas de secret : des heures, de la vo- fices privés » sont continuels. On se frotte rente beaucoup à la famille ou à la fratrie. On vit lonté et la recherche de la perfection. aussi aux valeurs des autres, leurs envies, continuellement ensemble. On connaît les goûts leurs modes de fonctionnement. et les difficultés de chacun. On se soutient aussi beaucoup. Il y a un véritable système d’entraide qui Comment travaille-t-on ? Quelle est votre est précieux. L es Alcea, tout pour formation ? Quelles sont vos envies aujourd’hui ? Il n’existe pas de formation de quatuor à Outre le répertoire « classique » du quatuor cordes dans les écoles de musique et rare- à cordes qui va de Haydn à aujourd’hui, le quatuor ! ment dans les Conservatoires Supérieurs. nous avons aussi envie, aujourd’hui, de C’est un travail hors du temps, une sorte nous essayer au jazz, à l’improvisation Alcée, un poète inventeur du vers alcaïque, une plante d’auto-hypnose, de méditation qui rend aus- avec Arnould Massart que nous admirons médicinale, un mot qui désigne la force dans la Grèce si très indépendant. Il faut aussi construire beaucoup. une méthode de travail et pour cela, nous antique, … En 2012 naît le Quatuor Alcea, un quatuor suivons très régulièrement des master class Quels sont vos besoins aujourd’hui ? de femmes. Depuis, elles ont fait du chemin : bourses, avec de grands Maîtres du quatuor : Valen- L’investissement que nous faisons depuis master class, projet de CD, … Elles incarnent toute la tin Erben (Ndlr - Quatuor Alban Berg), Petr deux ans est énorme. Le quatuor à cordes Prause (Ndlr - Quatuor Talich), Heime Mul- est un choix passionnant, mais qui peut palette de la féminité, sans en rajouter, sans mièvrerie ler (Ndlr - ex Quatuor Artemis), … aussi conduire à une situation profession- et avec une énergie hors du commun. nelle précaire. Ce qui nous manque à ce Vous venez de recevoir la bourse Voca- jour, c’est d’avoir un relais avec les mai- Elsa de Lacerda tio, vous avez aussi rejoint le collectif sons de concerts, saisons et festivals. Une Bl!indman, quels sont vos projets ? personne qui nous aiderait à faire un tra- Deux magnifiques opportunités dont nous vail de diffusion. sommes très heureuses. Grâce à Bl!ndman, nous allons pouvoir explorer le répertoire www.quatuoralcea.com

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petits marchés bio, des commerces de proximité… Les gens recherchent des choses comme celles-là. Plus sociales, plus humaines, plus terre-à- terre. Pour moi, c’est une des raisons qui expliquent pourquoi des fes- tivals continuent, aujourd’hui encore, de pousser comme des champi- gnons sur nos terres. Désormais, le public recherche des saveurs. Plus l'expérience « concert » sera agréable, bienheureuse et humaine, mieux ce sera.

La guerre des nerfs Une chose est certaine, la multiplication des festivals d'été n'ar- range pas les programmateurs. En coulisses, on assiste à de nom- breuses surenchères autour de noms ronflants. Dans cette course aux têtes d'affiche, on voit même émerger une pratique désor- mais consacrée dans le milieu : l'exclusivité. Ça, c'est un sujet com- vant de célébrer comme il se doit l'ouverture de la plexe, remarque Jean-Yves Laffineur. Certaines exclusivités sont saison des festivals d'été, on s'est arrêté quelques mi- complètement ridicules. Aujourd'hui, des festivals en posent sur tous nutes sur le bord de la route pour se poser une ques- les artistes programmés, y compris les illustres inconnus. Ce modus tion banale, mais finalement primordiale : qu'est-ce operandi est néfaste pour les artistes et nuisible à la diversité culturelle. qu'un festival ? Pour Alex Stevens, programmateur Maintenant, quand une tête d'affiche se retrouve dans une dizaine de du Dour Festival, ce n'est pas seulement le fait d’avoir festivals d'été, c'est aussi un non-sens. Le programmateur d’Espe- des têtes d'affiche, c'est d’abord passer plusieurs jours dans une atmos- ranzah ! est rejoint dans son analyse par Alex Stevens. Si on prend phère particulière, un peu hors du temps. C'est surtout une passion les artistes belges francophones, par exemple, le festival de Dour ne met Apour la musique, un état d'esprit et une manière de vivre. Du côté de jamais d’exclu. Je pense que c’est une aberration. Nos artistes doivent l'abbaye de Floreffe, à Esperanzah!, le programmateur Jean-Yves jouer et être exposés à un maximum de festivals. Car ce sont des lieux Laffineur lie également la notion de festival à des rencontres et à où l’on trouve beaucoup de «touristes» belges et internationaux. Il s’agit une volonté d'aller au-devant d'expressions artistiques différentes.Ar- d’un bon tremplin pour nos artistes. Par contre, pour la méga tête d'af- tisan de la programmation des Nuits Botanique, Paul-Henri Wau- fiche qui va te saigner et venir chercher des dizaines de milliers d’eu- ters pose un constat et s’interroge. Ce mot renvoie à l'idée qu'il n'y ros, si elle joue la semaine d'après à une heure de chez toi et que, de ton a pas un moment mais des moments qui sont conjugués. Mais à par- côté, tu ne parviens pas à écouler des tickets, là, ça commence à deve- tir de quand le nombre de moments est-il suffisamment significatif que nir compliqué de partager. Mais ce n’est clairement pas le même cas pour créer un festival ? C'est une question que l'on peut se poser. Ce- de figure. À partir du moment où l'agent de l’artiste dit « on fait une pendant, si on se la pose, on occulte peut-être l’essentiel : la qualité d’ap- seule date mais il nous faut un maximum de blé », on tombe direc- B

© ernard Babette proche. Dans mon esprit, un festival doit toujours privilégier le conte- tement dans la logique de l’exclusivité. En réalité, c’est souvent l'atti- nu à l'enveloppe. Dans le cas contraire, on se situe dans un rapport tude de l'agent qui détermine les exclus. direct à la consommation… Au final, il existe certainement autant de Pour tirer leur épingle du jeu, les festivals misent alors sur leur festivals que de lieux. C’est une notion très polymorphe. Je ne connais personnalité. Aussi, le festival Esperanzah! construit-il la ma- pas un festival qui soit le même qu'un autre. L’important, c’est de trou- jeure partie de sa programmation avec le regard tourné vers ver un équilibre entre le contenu, l'environnement, l’ambiance et, sur- d'autres continents. Nous avons la chance de travailler sur une af- tout, l’amour de la musique. Si les gens qui organisent ces rendez-vous fiche spécialisée et qualitative, souligne le programmateur. Certains musicaux sont de véritables mélomanes, alors on touche à l’essence groupes s'identifient à notre démarche. Dans ces cas-là, ils se tournent zoom même du festival. Par contre, si la passion est celle de l'événementiel, spontanément vers nous. Par ailleurs, nous avons aussi la réputation c’est autre chose… d'avoir révélé de nombreux artistes. Aujourd’hui encore, nous sommes perçus comme un tremplin vers de plus grandes scènes. Depuis plusieurs années, de nouveaux festivals bourgeonnent À Dour, le festival se positionne davantage à l'échelon européen Dans la jungle aux quatre coins du pays. Une situation qui préoccupe, notam- et international. Plutôt que de taper toutes nos billes sur une seule ment, Jean-Yves Laffineur.Il y en a trop, regrette-t-il. À mon sens, tête d'affiche, on va proposer de bons noms dans tous les styles musi- cette situation ne va pas perdurer. Elle engendre un sérieux dé- caux. On essaie toujours de se diversifier pour toucher des publics ve- séquilibre économique. On assiste désormais à une flambée des nus de partout. Sans forcément avoir les Rolling Stones à l'affiche, on prix sur les têtes d'affiche. Chaque festival veut un nom porteur. s’en sort. Car, pour nous, tous les publics sont importants. Aussi bien des festivals Cette surenchère financière ne peut pas tenir sur la longueur. le local que le public français, hollandais, flamand, wallon ou bruxel- Avant, les choses étaient relativement simples : quelques opéra- lois. On prend soin de tout le monde, dans tous les genres. Ce n’est pas En Belgique, dès que l'été pointe le bout du nez, on assiste au traditionnel raout festivalier. teurs pourvus d'une forte identité artistique s'activaient dans des simple, mais c'est tout l’intérêt du projet défendu par le Dour Festival. Sur la carte européenne, notre pays est, de loin, celui qui compte le plus d'événements sphères musicales clairement définies. Depuis cinq ou six ans, on Et quand l’alchimie fonctionne, c’est magique. assiste à l'éclosion de festivals aux lignes de programmation dé- consacrés à la musique « live » sur son territoire. Et le phénomène ne s'atténue pas. Chaque concertantes. Ces manifestations entrent alors directement en Un été classique et des notes bleues année, de nouvelles manifestations musicales fleurissent dans les campagnes de la Fédération concurrence avec les autres festivals d'été. Il y aurait donc trop Sans doute moins dense, le secteur des festivals de musique clas- Wallonie-Bruxelles. Toujours plus nombreux, les programmateurs redoublent d'inventivité de festivals en Belgique pendant la belle saison ? Pas sûr, note le sique et de jazz inscrit ses gènes dans une dynamique autre. Si programmateur des Nuits Botanique. Tout ce qui permet aux ar- en termes d'impact public et commercial, aucun événement de pour attirer de nouveaux publics sur leur prairie. Bienvenue dans la jungle des festivals. – tistes de jouer c'est bien. Il faut multiplier les occasions de toucher réel- ces deux genres ne rivalisera jamais avec les mastodontes esti- lement le public dans un véritable rapport à la scène. S’il y a de plus en vaux que sont (devenus) Les Ardentes ou le Dour Festival, sans Nicolas Alsteen & Fabrice Vanoverberg plus de festivals, c’est aussi parce qu’on entre dans une nouvelle ère de même parler du tentaculaire Rock Werchter, nombre d'organisa- socialisation autour des fêtes. Aujourd’hui, on vit dans un monde où le tions sont parvenues à créer au fil du temps une identité propre. virtuel prend le dessus sur le réel. Paradoxalement, on voit fleurir de Souvent rejointes par un public fidèle et parfois pointu, notam-

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Desiv fest als De Concert !

tanique, par exemple, ils étaient accompagnés du sélection, explique le co-président de l’association. Mons Orchestra. Suite à cette expérience positive, Chaque festival propose deux groupes à partir de sa le réseau des festivals devient une association sensibilité et de son positionnement. Cette année, officielle en 2008. Aujourd’hui, De Concert ! compte avec Les Nuits Botanique, nous avons mis en avant trente membres actifs. Parmi ceux-ci, de nombreux Robbing Millions et Mélanie De Biasio. Ensuite, à ambassadeurs français (Les Eurockéennes, La partir du moment où un des noms proposés est pro- Route du Rock, Les Vieilles Charrues, Les Nuits grammé au moins trois fois à l’affiche des festivals Sonores ou le Sakifo), mais aussi des manifes- de l’association, il entre dans une «shortlist». Ce tations belges (Nuits Botanique, Couleur Café, programme existe depuis cinq ans. Il fonctionne Dour Festival), allemande (C/O Pop), suisse (Paléo parfaitement. Face à l’avalanche de propositions Festival), danoise (Spot Festival), hongroise (Sziget artistiques à laquelle nous sommes quotidienne- Festival) ou islandaise (Iceland Airwaves). Au fil du ment confrontés dans le métier, cette sélection est temps, l’association s’est fixée des objectifs com- vraiment intéressante. Parce que, dans certains muns. Ainsi, deux à trois fois par an, De Concert ! cas, ce sont des artistes que, personnellement, organise des rencontres d’échange et de partage je n’aurais peut-être pas eu le temps de découvrir d’expériences dans des domaines variés (organi- s’ils n’avaient pas été présentés par des gens que sation, protection de l’environnement, accueil des je connais et à qui je fais confiance. Pas fermée à personnes handicapées, approche du mécénat, des l’arrivée de nouveaux membres, l’association De sponsors et des partenariats, communication, etc.) Concert ! s’élargit sur base d’un mécanisme de e Au début du XXI siècle, plusieurs festivals euro- La volonté est ici de créer une émulation positive cooptation. Chaque année, de nouveaux candidats péens se sont trouvés des atomes crochus. À force au niveau européen. Cela étant, De Concert ! n’est se proposent. Traditionnellement, pour se décider, de se croiser devant les scènes et de partager pas une force de lobby, insiste Paul-Henri Wauters. on applique le principe de la table ronde. On tient leur passion musicale autour d’un verre, quelques On n’est pas là pour ça. Mais on est capable de beaucoup au dialogue. On ne prend aucune décision programmateurs ont eu l’idée de formaliser leur se mobiliser pour réagir collectivement quand un si 80% des effectifs, au moins, n’est pas présent relation à travers l’association De Concert ! Les pré- membre de l’association est attaqué. Aujourd’hui, autour de la table. Parce que, dans tous les cas, ça mices du projet remontent à 2006, note Paul-Henri on doit notamment faire face à des municipalités reste du relationnel. Dans ce métier c’est comme Wauters, Directeur du Botanique et co-président qui ne soutiennent plus un festival parce qu’elles ça. Le côté amical demeure une composante de cette fédération internationale des festivals. À voudraient le faire elles-mêmes. Parfois, le pouvoir fondamentale. Les gens s’entendent vraiment bien. l’époque, nous avions opéré un échange artistique subsidiant oublie qu’il est là pour soutenir les Donc, avec les nouveaux adhérents, on avance pru- avec trois autres opérateurs européens : Les Euroc- actions de ses administrés plutôt que, de lui-même, demment. Les gens se proposent, on en discute. Hu- kéennes de Belfort, le Spot Festival et Benicàssim. organiser une concurrence au sein même de la mainement, on sent très vite quand un partenaire Nous avions proposé Venus, les Français avaient gestion de la cité… Pour les artistes belges et euro- potentiel va apporter quelque chose de positif. choisi Dionysos, les Danois Teitur et Benicàssim péens, De Concert ! présente aussi un intérêt non Lorsqu’un festival est là pour le contenu et pas pour avait retenu The Sunday Drivers. Ces artistes ont négligeable. Chaque année, les festivals adhérents l’enveloppe, ça se passe toujours bien.

B joué dans les quatre festivals en proposant une à la fédération favorisent, en effet, la circulation © ernard Babette création avec des ensembles locaux. Aux Nuits Bo- de projets artistiques communs. On opère une

L a météo des festivals ment pour le festival de musique contemporaine Ars Musica, les fête, nul besoin de secouer les serviettes en compagnie de Pa- diverses manifestations offrent également à nombre d'artistes trick Sébastien pour apprécier le moment. Depuis le désastre survenu en 2011 sur la plaine de Kiewit lors du Pukkelpop, les organisateurs des et/ou formations l'occasion d'affronter un répertoire parfois peu festivals belges regardent le ciel d’un autre œil. joué en concert. Même si dans la musique classique, plus que dans tout autre C’est certain. Mais bien avant cette catastrophe, genre, le répertoire peut s'étendre sur plusieurs siècles (de la Re- nous avons eu droit à l’arrivée d’un « nuage toxique » Si bien sûr, le choc qu'on peut ressentir en découvrant en live naissance à Wolfgang Rihm en passant par Schubert et Ravel, formé suite à l’incendie d’un entrepôt de stockage les Sequenze de Luciano Berio ne se produit pas à chaque repré- le spectre est large) et que dans le jazz, les genres se bousculent, de pneus, se souvient Jean-Yves Laffineur, program- sentation (sauf à dévaloriser la notion même de choc), chaque chaque festival essaie de témoigner d'une identité propre. Entre mateur du festival Esperanzah! Déjà à l’époque, nous avions été prévenus sur le champ par l’Institut festival représente une respiration à part dans le calendrier musiques classiques pour le plus grand nombre (les Musicales de Royal Météorologique (IRM) et nous avions évacué musical. Entre événements solidement ancrés dans le pay- Beloeil, entre Tchaïkovski et Verdi), jazz manouche et apparen- le camping en moins de trois heures. Aujourd’hui, sage (l'historique Comblain Jazz Festival, les Django Folies) et té (les Django Folies) et volonté farouche de présenter majoritai- nous bénéficions d’une connexion synchronisée nouveaux venus (le Festival imPulsions de Schaerbeek, dont rement des artistes belges (Printemps Musical de Silly), chaque avec l’IRM pendant toute la durée du festival. Dès la première édition vient de s'achever), le monde des festivals événement s'inscrit dans un créneau certes évolutif, mais dont le qu’une alerte survient, nous sommes prévenus. Du jazz/classique made in Fédération Wallonie-Bruxelles offre un contenu musical s'inscrit dans une certaine fidélité, voire conti- côté de l’IRM, on insiste sur le fait qu’aucune mesure très large éventail d'activités, entre grand public et connais- nuité, manière aussi évidente que naturelle d'inscrire l'événe- spécifique n’a été prise suite à la tragédie de Kiewit. Pour une raison toute simple, note le météorologue seurs affirmés. Trop de festivals tuent-ils les festivals ? Tenta- ment dans le temps, au milieu d'une offre pléthorique où média- Alexandre Dewalque, nous avons toujours utilisé les tive de réponse. tisation et tradition vont main dans la main. meilleurs moyens mis à disposition pour avertir le Si la notion même de festival recouvre toute une série de Alors qu'aujourd'hui encore plus hier, la publicité (au sens pre- public en cas de danger. Par contre, et la demande concepts et de projets, le but premier de toute manifestation est mier du terme) s'envisage par des moyens de plus en plus vir- est venue des organisateurs d’événements, nous de permettre la rencontre entre musiciens et auditeurs. Au-de- tuels entre réseaux sociaux et sites web, une écrasante majorité avons mis sur pied un nouveau service qui permet, via une interface sécurisée, de visualiser en temps

là de l'aspect quelquefois religieux (ou apparenté) du concert, de festivals classique et jazz en Fédération Wallonie-Bruxelles © Ben Lakhal où public et artistes sont séparés physiquement, tout festival continue de drainer un public sinon local, du moins à vocation réel les zones de précipitations, le déplacement des orages, etc. Aujourd’hui, les organisateurs des concourt au rapprochement entre compositeurs, musiciens et largement régionale. Ailleurs, pourtant, nombre de manifes- festivals d’été reçoivent un sms dès qu’un de ces auditeurs, à commencer par l'immédiat après-concert, moment tations évoluant dans un créneau similaire, notamment chez avertissements est lancé. Ils ont aussi – et surtout parfois (souvent ?) où le « on stage » et « le off stage » ne forment nos voisins français, ont la chance de se dérouler dans des lieux – un accès direct, via une ligne téléphonique sécuri- plus qu'un lieu d'échange musical et de partage émotionnel. Et très courus en été par les visiteurs venus de toute l'Europe (et sée, aux prévisionnistes de notre bureau du temps, si dans la notion même de festival, on retrouve l'idée même de même au-delà). Pour ne citer que deux exemples, le Festival de 7j/7 et 24h/24.

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zoom l'interview indiscrète

En tournée sur les routes du pays, on s’est arrêté quelques minutes L’interview chez Françoiz Breut, la plus bruxel- loise des chanteuses françaises. À indiscrète l’heure du thé, elle nous a ouvert la porte de son appartement : une caverne d’Ali Baba où s’empilent Chez les trésors : crêpes sucrées, vases colorés, bouquins de collection et Françoiz autres objets insolites. On a profité de notre passage pour farfouiller en toute indiscrétion. L’intéressée nous Breut éclaire sur nos plus belles trouvailles.

© Françoiz Breut Nicolas Alsteen

Une photo des dunes à Dunkerque Un coffret sérigraphié Le vinyle du Pouet-pouette de Sttellla Un jour, un photographe m’a proposé Ce coffret renferme quelques secrets B

© ernard Babette d’écrire un texte sur un de ses projets : des et date de 1994. À l’époque, je venais de Il y a quelques jours, j’ai acheté une nou- clichés destinés à une exposition au Fres- m’installer à Bruxelles avec Dominique A. velle platine pour écouter tous les vieux vi- noy, une école du Nord de la France dé- Avant cela, on vivait à Nantes où on jouait nyles qui traînent à la maison. Je suis ain- diée aux créations audiovisuelles. Le mec sous le nom de Squad Femelle, un groupe si tombée sur le tout premier album de la Roque d'Anthéron (en Provence) - que la presse d'outre-Quié- même mieux s'en sortir que la majorité de leurs confrères euro- concentrait son travail sur les paysages. de reprises avec notamment Dominique Sttellla. Il date de 1978 et s’intitule Pouet- vrain aime qualifier de « Mecque du Piano » - accueille chaque péens, qui ont vu la part du financement public diminuer drasti- Ce qui m’a interpellé, c’est que la plupart A et Pierre Bondu, des gens de Perio (Li- pouette. Je ne peux pas m’épancher pen- année des pointures mondiales du piano classique (Evguény quement au fil des ans. des photos se focalisaient sur un site natu- thium, ndlr). Le 45 tours qui est dans ce dant des heures sur le sujet parce que je Kissin, Anne Queffélec, Nelson Freire et on en passe treize à la rel protégé dans la région de Dunkerque. coffret contient des relectures de X-Ray ne l’ai écouté qu’une fois. Mais ça a chan- douzaine), ce qui laisse supposer des budgets très importants et Secteur où la notion de rentabilité est généralement toute re- Comme j’ai vécu un an là-bas aux débuts Specks, Damon & Naomi ou The Kinks. gé mon point du vue sur Sttellla. Disons une fréquentation en conséquence malgré des tarifs assez éle- lative, voire carrément impossible (mais c'est le cas de toutes des années 1990, je connaissais cet endroit Après cet épisode, j’ai toujours couru der- que, jusqu’ici, j’aimais bien le personnage vés (82.200 spectateurs en 2013). Dans la catégorie jazz, l'incon- les grandes maisons d'opéras comme La Monnaie), la musique que les gens du coin appellent Le Clipon. rière ce besoin de jouer pour le plaisir car de Jean-Luc Fonck. Pour ce qui est de la tournable Jazz à Juan (à Antibes - Juan-les-Pins) est devenu de- classique est bien sûr en première ligne dépendante du sou- Suite à cette proposition, je me suis intéres- je n’ai pas toujours pris du bon temps en musique, par contre, ça passait mal. Mais puis ses débuts en 1960 une attraction touristique à lui seul, à tien de ses partenaires, qu'ils soient publics ou privés. À moins sée à l’histoire de ces dunes, depuis leurs enregistrant... Mon album Vingt à Trente avec Pouet-pouette, on tient quelque chose l'instar du Montreux Jazz Festival. Toutes deux locomotives du d'un jour envisager des places aux tarifs totalement déraison- origines jusqu’à la période résidentielle en Mille Jours, c’était assez horrible car je ve- de génial. Dans l’énergie, ça m’a fait penser secteur, les deux manifestations bénéficient évidemment d'un nés, et carrément irréalistes, la survie même de manifestations passant par les derniers soubresauts… Ré- nais de rompre avec Dominique mais on aux débuts de The Feelies. Même si c’est sponsoring, d'une logistique et « last but not least » d'un soutien telles que le Festival de Wallonie ne cesse de se poser, alors cemment, la municipalité a en effet déci- travaillait encore ensemble. Ce n’était pas un peu plus bancal, les guitares sonnent public conséquent. même que ses recettes propres sont passées en peu de temps dé d’y implanter des citernes pour stoc- la joie…Dans ce coffret, on trouve aussi la d’enfer et les jeux de mots m’ont fait pis- de 33 à 25% et que le sponsoring est lui aussi en forte diminu- ker du méthane. Les coups de gueule des première trace de ma discographie solo ser de rire… C’est vraiment punk. Les pa- Alors quid du financement de tels événements en nos contrées, tion. Pour maintenir le budget (et donc l'offre artistique) à un citoyens n’ont pas suffi à arracher le site à avec Little Female Cook qui fait référence roles sont débiles mais elles collent parfai- même à une échelle plus réduite ? S'il paraît évident que le niveau constant, l'apport des subventions publiques a permis son triste sort… Au final, cette belle pho- à ma première expérience professionnelle. tement à la musique. Dans le genre, c’est nombre de festivals en Wallonie et à Bruxelles a atteint un stade jusqu'à présent de compenser le manque de rentrées, notam- to de Renaud Duval témoigne de la bê- Je bossais en cuisine au Supra Bailly, un assez unique. quantitatif où l'offre est tellement abondante que s'y retrouver de- ment grâce aux apports du Ministère de la Culture de la Fédé- tise humaine et d’une époque imprégnée bar d’Ixelles. La patronne était systémati- mande des talents de Sherlock Holmes, la réponse doit être nuan- ration Wallonie-Bruxelles, ainsi qu'au soutien de la Loterie Na- par les logiques économiques. Au départ, quement bourrée et vers 18h, sa collabora- cée. Même si certains directeurs et/ou organisateurs de festival tionale. Et si l'exclusivité des artistes a toujours existé (tu viens ça me semblait insurmontable d’écrire un trice reprenait le flambeau et c’était encore regrettent un trop-plein de festivals subventionnés par la Fédé- jouer chez moi et pas chez mon concurrent, ok ?) et demeure texte pour une expo-photos. Déjà, pour pire. Elle passait son temps à insulter les ration Wallonie-Bruxelles, ils sont également les premiers à sou- une donnée incontournable pour tout organisateur (cfr. la ques- moi, écrire reste quelque chose d’assez la- clients. J’ai composé la sérigraphie pour ligner l'importance du rôle joué par les pouvoirs publics. Tout en tion des exclusivités posée précédemment dans ce dossier), l'argent borieux… Pourtant, c’est venu assez faci- tous les éléments du coffret. Tout est fait essayant de jouer dans la même cour des (relativement) grands au demeure le nerf de la guerre et s'il n'est suffisant pour garantir lement. Sans doute parce que c’est moins main. Un fan allemand m’a écrit qu’il avait niveau européen, où tout le monde est finalement logé à la même une affiche cohérente et qualitative, le rôle du programmateur contraignant qu’une chanson : on n’est pas trouvé le coffret sur eBay à près de 300 eu- enseigne financière (et encore davantage depuis la crise des sub- deviendrait impossible sans ce paramètre financier dont nous enfermé dans une musique, on peut débor- ros. Il ne l’a pas acheté. Il trouvait ça un primes en 2008), les festivals wallons et bruxellois estiment dépendons tous. der et dire plein de choses. peu cher. Je veux bien le croire…

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Loe . c m Le . com

a « culture » a-t-elle encore sa place dans le service public ? doivent en outre être couplés à des obligations en matière de créneaux ho- C’est une question que se posait Laurent Raphaël dans raires et de particularités stylistiques, disait alors Toine Thys, musicien. l’édito du Focus Vif du 6 septembre 2012. Et plus préci- Ils permettraient à nos artistes de se faire connaître et de trouver plus aisé- sément : la culture de marge. Il faut dire qu’à l’époque, on ment des endroits où jouer. Que ce soit en salles ou en festivals. faisait quelque peu le grand nettoyage chez Pure FM : fini le rock alternatif made in Pompon, et exit le hip-hop dis- En ce début d’année, dans une lettre ouverte envoyée aux par- tillé par DJ Sonar. Grand nettoyage ou aseptisation, tout dépend tis politiques (échéance électorale oblige), le FACIR enfonçait le des points de vue. clou. Et évoquait cette fois le nivellement par le bas induit par le L virage commercial qu’ont emprunté les radios et télévisions fran- Certes, le nouveau King Lee passe sur La Première où Alexandra cophones en Belgique. En ces temps de concentration des mé- Vassen a même fait de l’ex-Starflam son « maître chanteur » d’un dias, le souci est d’autant plus criant. Les productions musicales jour. Exception ? Un rappeur belge a-t-il réellement une chance sont de plus en plus formatées et uniformes. Les grands médias, pri- de se faire entendre sur une radio généraliste, ou même un peu vés comme publics, ne se posent plus en « découvreurs de talents » mais plus grand public que la « street » Radio Kif ? La communication, privilégient les stars internationales, les émissions de téléréalité et les les médias, tout ça s’est un peu ouvert, admet Aral, le DJ et emcee gros festivals. On peut effectivement se demander si c’est le rôle verviétois, auteur il y a peu avec son complice Sauzé d’un fort bon du service public de diffuser un hit parade signé… NRJ ! La dif- album (Connection). On est sensés avoir plus de possibilités dans les fusion dans les salles et festivals est massivement dominée par les pro- festivals, attirer plus l’attention des organisateurs. Mais c’est quand ductions étrangères, essentiellement françaises et anglo-saxonnes, au même un petit peu une illusion. En théorie, c’est plus facile d’accès, il détriment des artistes de la Fédération Wallonie-Bruxelles. est plus facile d’être connu, mais en réalité, sur le terrain même, c’est ce qui a toujours été là qui continue à marcher. Chez nos voisins français aussi, la question de la diversité musi- cale s’est posée. Il n’y existe pas de dispositions légales en la ma- Les quotas ont été mis en place, nous dit le Conseil Supérieur de tière. Mais dans ses rapports, le Conseil Supérieur de l’Audiovi- l’Audiovisuel (CSA), pour que les œuvres audiovisuelles européennes suel (français) souligne son action : Par sa politique de sélection des ne pâtissent pas de la prolifique production étrangère bon marché, et opérateurs, le Conseil a dessiné un paysage radiophonique pluraliste bénéficient d’une visibilité, voire d’un financement accru.La décision en matière de programmes, notamment sur le plan musical, et a veillé a bien entendu fait l’objet d’une directive européenne, qui a été à ce que les différents publics puissent, sur les zones où ils se trouvent, appliquée en Fédération Wallonie-Bruxelles. Où, petite particula- disposer d’une offre attractive et variée. rité, s’ajoutent à ces quotas européens des quotas plus spécifiques à l’identité culturelle de la Fédération. Et quand il s’agit de scruter, de ce point de vue, le paysage audiovi- suel hexagonal, on travaille à partir d’indicateurs. Tels que rensei- Les radios ont à respecter un régime de quotas particuliers. En gnés par l’Observatoire de la Musique (rapport 2011) : la part du Top chiffres, voici ce que cela donne… Elles doivent assurer au moins 40 des titres les plus diffusés dans l’ensemble de la diffusion, la rota- 70% de production propre et émettre en langue française. Elles tion moyenne hebdomadaire (en moyennes trimestrielles) d’un titre sont tenues de diffuser annuellement au minimum 30% de mu- francophone et d’un titre de production française non francophone et siques sur des textes en langue française (par rapport à l’ensemble le nombre brut de rotations par radio, la rotation moyenne hebdoma- des musiques chantées) et au moins 4,5% d’œuvres musicales de daire (en moyennes trimestrielles) d’un titre international, le nombre compositeurs, d’artistes interprètes ou de producteurs de la Fédé- d’artistes différents diffusés, le nombre de titres différents diffusés et ration Wallonie-Bruxelles (sur l’ensemble des œuvres musicales). le nombre de semaines de présence à partir du moment où un titre entre en programmation, la part des nouveautés dans l’ensemble de Il existe quelques exceptions à ces règles. Pour les radios diffu- la diffusion, le nombre moyen de nouvelles entrées par station et sur sées sur Internet, par exemple. Ou à la RTBF, où ces quotas sont l’ensemble des stations de l’échantillon, la répartition des genres mu- adaptés au contenu des diverses radios. Des dérogations peuvent sicaux, le taux d’exclusivité de diffusion de titres pour chaque radio, être accordées. Début avril, le CSA a ainsi autorisé Twizz Radio la répartition des titres par label, la répartition des titres diffusés par SA à baisser de 40% à 30% sa diffusion d’œuvres musicales sur des structure de production (majors, indépendants distribués par des ma- textes en français pour son programme DH Radio. Moyennant une jors, indépendants distribués par des indépendants)… contrepartie : porter de 6% à 7,5% la diffusion d’œuvres musicales émanant de compositeurs, d’artistes-interprètes ou de producteurs Permettre l’accès à une variété de contenus est un des objectifs au centre indépendants installés en région de langue française ou en région de ces politiques publiques de diversité culturelle, note (notre) CSA dans Diversité musicale bilingue de Bruxelles-Capitale. son rapport d’activités 2013. Pour l’heure, le Conseil Supérieur de l’Au- diovisuel ne peut qu’assurer une présence dans ce débat, accompagner, in- Il entre aussi dans nos missions, dit-on au CSA, de veiller au plura- dique encore Paul-Éric Mosseray. Notamment par des actions comme lisme des médias en Fédération Wallonie-Bruxelles. On est là dans la co-organisation de formations (avec le Conseil de la Musique). Où de mon beau souci le domaine social, celui de l’égalité des chances. En termes de di- nouveaux professionnels des métiers de la musique bénéficient des Notre paysage audio-visuel ne manque pas de versités des genres musicaux, par contre, et pas plus qu’en France informations et conseils d’acteurs radiophoniques de premier plan. d’ailleurs, aucune règle de contrainte n’existe. La diversité musi- chaînes et de médias spécialisés. Mais qu’en est- cale reste un défi, résume Paul-Eric Mosseray, directeur du service Reste cette question, oui, qui ne manque pas de bon sens : faut-il vrai- il une fois qu’on en sort ? Les goûts des uns et les Éditeurs (radio, télévision, nouveaux médias). ment se soucier de tout cela, ouvrir de nouveaux chantiers et déve- envies de genres des autres sont-ils comblés ? lopper de nouvelles règles à l’heure d’Internet ? Parce qu’on trouve de La Fédération des Auteurs, Compositeurs et Interprètes Réunis (FA- tout, sur Internet ? Personne ne s’est jamais plaint de son manque de Quelles règles applique-t-on… s’ils en existent ? CIR) a déjà eu l’occasion de s’exprimer sur cette vaste problématique pluralisme musical ! Le hic est là, justement : à côté de « tout », il y a dans une précédente édition de Larsen. À propos des quotas notam- aussi « n’importe quoi ». Alors, un coup de main pour le tri, quelques Didier Stiers ment, jugés insuffisants (que ce soit pour le public ou pour le privé). Ils conseils avisés ne se refusent pas. C’est ça aussi « se faire une culture ».

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Deoioo qu b ster l’agenda

Comme c’est le cas pour les Caecilia, remporté deux Octaves, j’ai bénéficié ouvrir des pistes pour faire fleurir mais n’orientent pas mes choix de l’obtention d’un Octave fait systéma- d’un bon coup de projecteur sur mon des dates de tournée. Pour Fabrice programmation a priori. De t l’uTIli é des tiquement l’objet d’une ligne ou deux projet, je suis passé dans les JT, je Lamproye, programmateur des dans le CV des lauréats. Et, en dépit crois que ça a pas mal aidé... Et puis, Ardentes et du Ronquières Festival, A Slex tevens, qui concocte chaque de sa moindre exposition, le concours c’est toujours agréable et intéressant les concours ne servent que d’indi- été le menu du Dour Festival, évoque peut s’avérer un gage de qualité/ d’obtenir la reconnaissance de sa cateurs, sans être déterminants. quand à lui l’utilité de tremplin comme médailles… crédibilité, certainement au-delà de propre scène nationale. Cette année, J e n'y fais pas trop attention, cela le Concours Circuit, en amont : nO bosse pas mal avec le Concours Circuit Nombre de concours sont organisés nos frontières. Interrogé à l’époque, j’ai eu la chance de me produire au n’influence pas mon choix. On essaye Redboy, chantre de My Little Cheap côté de l'Orchestre philharmonique plutôt, en tant que programmateur, qui permet de faire du défrichage dans en Belgique. Simple distribution Dictaphone dont le premier album royal de Liège – sous la houlette de d’anticiper ces prix qui parfois sont tous les jeunes groupes de la Fédéra- tion Wallonie-Bruxelles. On y remet un de gommettes ou véritable était récompensé lors du cru 2010, Jean-Pierre Haeck et de l’arrangeur l’occasion pour certains agents de en témoigne: “Les Octaves ont une Renaud Lhoest – qui m’ont offert spéculer. Lui aussi souligne l’intérêt prix chaque année d’ailleurs (…) Pour sésame pour une carrière, quelle certaine portée à l’étranger. C’est en une superbe version de ma chanson. de l’écho médiatique : Les Victoires de le reste, programmer un groupe est un quelque sorte une validation de ses Quand je vois tout le travail qui a été la Musique sont fort médiatisées, tu faisceau de signaux positifs (qualité est réellement leur utilité ? pairs, une reconnaissance dans son réalisé en amont, je me dis que c’est peux difficilement passer à côté. Cela des morceaux, des concerts, lieux où ils ont été programmés, actualité) qui l propre pays, qui a du sens quand tu un peu dommage que la cérémonie permet de mettre un peu d’attention

© A exis Haulot Nicolas Capart vas au Canada, en France ou même n’est pas été plus vue... Mais je pense sur des artistes plus connus en France nous poussent à le faire. Avoir gagné en Angleterre, où cela est perçu que ça viendra, les organisateurs y qu’en Belgique, et cela aide donc à la un prix peut-être parfois vu comme comme quelque chose de sérieux.” travaillent...” promotion quand tu as choisi de les un signal positif et aider dans le choix Saule ne tarit pas d’éloge sur l’événe- programmer. Ces prix ont donc un in- dans le cas où le concours est crédible. Gagner un Octave peut également ment non plus. “En 2006, comme j’ai térêt plutôt promotionnel a posteriori,

otre petite Belgique a toujours qui, en 2004, décide de lancer les Octaves la frontière linguistique, comme nous Un concours peut être intéressant pour une une lucarne à la télé change tout. Les Vic- ponse de Martine D.Mergeay est claire : été grande dès qu’il s’agit de de la Musique. But avoué : dynamiser le l’explique Damien Waselle, jadis cofon- structure comme la nôtre lorsqu’il est très toires françaises en sont un autre exemple, Un sourire et un bouquet de fleur ! (Rires) papoter musique. Depuis tou- secteur en récompensant les groupes ou dateur de Bang!, aujourd’hui devenu di- médiatisé, quand il y a de la télévision au- conclut Damien Waselle. Cela ne sert pas à grand-chose en définitive, jours, terre de notes et de festi- artistes les plus méritants. Agents, ma- recteur de la promotion et du marketing tour de l’événement… confirme Damien mais si cela n’existait pas ce serait bien triste vals – dont certains parmi les nagers, diffuseurs, labels ou journalistes chez [PIAS]. On lui a demandé si l’ob- Waselle. Je vais à nouveau faire référence Caecilia : pour le plaisir… (…) Il existe bien des prix discographiques plus réputés du globe (Rock sont conviés à prendre part au processus tention d’un prix en général – d’un Oc- à la Flandre, mais les M.I.A.’s par exemple Si la musique classique est parmi les dans le monde, des Grammy Awards au prix Werchter, Tomorrowland) – , notre pays de sélection des nominés et à la formation tave en particulier – pouvait faire pen- (Music Industry Awards, Ndlr) sont diffu- genres étrennés aux Octaves, elle dispose Marguerite Long Thibaud, etc. Ces récom- est aussi théâtre de bien des compétitions, d’un jury d’experts pour les départager. cher une balance lors du choix de signer sés sur la VRT en prime-time. C’est un gros en outre de ses compétitions propres. On penses, qui ne se décernent pas à la légère, en- Nconcours, tremplins et autres remises de Des deux malheureux prix décernés lors un groupe. Sa réponse a fusé : Non. Celui show, dont les audiences tournent chaque connaît le Concours Reine Élisabeth, trent dans le CV et les attributs des artistes. récompenses organisés pour saluer le ta- de l’édition première, il est décidé d’en dé- que l’on surveille toujours d’un œil, c’est le année autour de 700 ou 800 mille téléspec- exemple le plus médiatisé. On connaît un Surtout s’ils sont débutants. Ces prix sont une lent des jeunes pousses qui bourgeonnent limiter plusieurs dès la deuxième mou- Humo Rock Rally, du côté flamand. En re- tateurs. On y a déjà connu quelques belles peu moins les Prix Caecilia, dont Mar- reconnaissance pour eux et un indicateur – dans la Fédération Wallonie-Bruxelles. ture. Huit genres, comme les notes de traçant les palmarès successifs, on se rend aventures. La victoire d’un groupe peut ain- tine D.Mergeay, membre du jury, jour- voire un label qualité – pour les programma- Alors que les Octaves distribuaient leurs l’Octave, y sont aujourd’hui mis à l’hon- rapidement compte qu’il y a énormément de si se répercuter immédiatement dans les naliste de La Libre Belgique et voix des teurs. Pour les jeunes maisons d’éditions, cela bons points pour l’année musicale écou- neur : chanson française, jazz, pop/rock, groupes qui ont émergé du concours. Et pas ventes le lundi qui suit. ondes de Musiq’3, nous explique le fonc- peut se révéler un coup de pouce formidable lée le 8 avril dernier, nous avons tenté de électro, musiques du monde, classique, nécessairement en finissant n°1. Donc on y tionnement. Organisés par l’Union de la au niveau visibilité. sonder différents acteurs du milieu pour urbaine et contemporaine. À cela vien- accorde une attention particulière. Est-ce alors au désamour de la presse Presse Musicale Belge depuis 1974, ils sont décrypter l’importance d’un tel événe- nent s’ajouter trois prix génériques (al- francophone qu’incombe la faute ? Ou les complètement bilingues et œuvrent donc ment. Quels enjeux pour la scène ? Quelles bum, artiste et spectacle de l’année), une Nous le pressentions et c’est bien au ni- Octaves manquent-ils d’envergure ? Pour à l’échelle nationale. En plus des dix Prix conséquences pour les primés ? Quelles in- récompense d’honneur (pour l’ensemble veau de l’exposition que le bât blesse. Car, ce qui est des MIA’s, il y a eu un déclic et Caecilia – belges mais aussi internationaux cidences au rayon production ? Quelles ré- d’une carrière) et quatre prix spécifiques. même si les télés locales diffusent la soi- une volonté d’organiser un événement qui a – y est désigné à chaque édition «le jeune percussions côté programmation ? rée des Octaves (en différé) et si la chose des épaules. L’ancêtre du concours (les ZA- musicien de l’année», alternativement issu Ça, c’est la théorie. En pratique, peu ou est souvent retransmise (en direct) en MU’s, Ndlr) réunissait jadis entre eux les de chaque communauté. Les Octaves cherchent la lucarne mal exposés, les Octaves sont encore radio, le concours demeure confidentiel professionnels du secteur à l’AB et n’était C’est la triple alliance formée par RTL, la méconnus du grand public. Un déficit pour les non-initiés. Et c’est justement absolument pas relié dans la presse, si ce Lorsqu’on lui demande l’utilité réelle SABAM et le Conseil de la Musique (de- de popularité par rapport aux cérémo- de cet intérêt du public que dépend l’im- n’est pas une brève pour dire «untel a gagné, d’une telle manifestation, ce qu’elle ap- puis 2009 remplacé par PointCulture) nies homologues organisées au nord de pact réel d’une manifestation culturelle. c’est cool». Cela peut paraître triste, mais porte concrètement à ses lauréats, la ré-

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in situ… in situ…

In L’AbbayeSitu… din a N a homas Blairon T

de Floreffe © G ëtan © S ous l’arc-en-ciel uand on commence à tirer sur le fil des origines l’un n’aurait pas existé sans l’autre. Le succès d’Esperanzah ! fut lui du festival Esperanzah !, d’autres refont surface. aussi immédiat. Aujourd’hui, 80% de notre public est fidèle. Le plus Le Temps des Cerises, d’abord, un festival organisé dur, c’est le dernier cinquième, explique Jean-Yves Laffineur. Il à l’abbaye de 1976 à 79. Et pour comprendre com- n’y aura jamais ici de têtes d’affiche payées des sommes mirobolantes ment est né celui-là, il faut remonter aux années de comme à Werchter, au Pukkelpop ou même aux Ardentes. Cette an- scolarité passées par un certain Bernard Gillain, née, on verra tout de même sur la grande scène de la cour d’honneur au petit séminaire, entre les murs austères de cette même abbaye le chanteur et musicien Salif Keïta, la chaleureuse et conviviale Ayo fondée en 1121, et dont l’enseignement pétri de latin, grec et fran- et, pour le côté plus jeune, conscient et collectif, Fauve et sa poésie mo- Qçais bannissait la langue populaire de la région : le wallon. C’était derne. Le festival attire des artistes qui trouvent du sens à venir chez pourtant la langue de ses jeux et celle utilisée par son grand-père, nous. Un texte de Pete Seeger, chanteur folk américain, paru dont il découvre à l’adolescence des cahiers de poèmes oubliés. dans la revue Rock&Folk et relevé à l’époque par Bernard Gillain, Après des études à l’IAD, Bernard Gillain entrera à la RTBF avait déjà pointé ce sens : (…) Dans votre pays, vous devriez pouvoir et n’aura de cesse au travers de plusieurs émissions, dont Ma- construire votre musique nouvelle sur ce que l’ancienne a de meilleur… rie clap’sabots, de défendre la musique populaire wallonne. Di- Nous devrons lutter durement pour faire progresser dans chaque pays verses rencontres, avec Julos Beaucarne notamment ou avec un une musique qui puisse aider les gens à vivre et à survivre, et finale- groupe appelé les Pêleteus, l’expérience d’un festival folk mémo- ment créer un monde neuf, paisible et coloré comme l’arc-en-ciel. L’es- rable à Pons dans le sud de la France et l’organisation de trois prit du Temps des Cerises continue de planer. autres événements nommés Champs (dans la province du Luxem- bourg), poseront des jalons vers la naissance d’un collectif et en- Les vieilles pierres qui vibrent fin du festival le Temps des Cerises. En 1976, Bernard Gillain re- Tout se tient, poursuit Jean-Yves Laffineur, et nous respectons une vient donc malicieusement investir l’abbaye de son enfance, avec éthique cohérente. Parfois, je fais des avancées, et c’est l’équipe qui me dit l’envie de confronter la culture de Wallonie aux cultures minori- non. Le public ne veut pas de publicité commerciale sur le site. Quand taires d’Europe et du monde, dans ce joyau du patrimoine histo- on entre à Esperenzah !, on entre dans un autre monde. Les festivals rique mélangeant les styles gothique, classique et baroque, per- sont généralement financés par des grosses banques. Celui-ci tra- ché au dessus du village de Floreffe et dominant la vallée de la vaille avec Credal, alternative et éthique. Le ticket boisson a pris Sambre. Le succès sera fulgurant et 50.000 personnes se dépla- son nom, devenant une monnaie sensibilisant à une finance res- ceront pour la dernière édition de 79. Dans la foule planante de ponsable. Tout un chœur d’associations se retrouve pendant trois cet été-là, comme seules savaient la rendre les années septante, jours sous l’appellation Village des possibles : Repair cafés, mou- dans une atmosphère sans limite et sans frontière, se trouvait un vement Tansition, et autres constructeurs de meubles en palettes grand jeune homme de 17 ans. Et le souvenir de cet événement in- ou cuisiniers d’insectes démontrent que d’autres solutions exis- croyable ne l’a jamais quitté. 14 ans plus tard, en pleine crise exis- tent. L’alter-mondialisme s’intègre aujourd’hui à la culture domi- tentielle, il voudra croire que l’on peut revivre cet élan. Trois jours nante mais Esperanzah ! continue le combat en assumant, voire par an. Chaque année au début du mois d’août et depuis une autre revendiquant le label « conscious festival ». Une radio, installée © Bernard Weickmans période de 14 ans, Jean-Yves Laffineur enrichit les souvenirs so- dans une roulotte colorée, sillonne le site, mène débat , teinte l'ab- nores de l’abbaye, diffuse dans ce lieu au passé religieux des mu- baye de mille nuances de musique et engagement. Esperanzah ! Voici revenu le temps des festivals : celui siques pas toujours catholiques. commence également à développer des projets militants à l’an- d’Esperanzah! se tient au cœur de l’été entre les née, s’exporte à Barcelone et propose cette année une quatrième murs de l’abbaye de Floreffe. Événement festif et Conjonction de coordination journée. Jean-Yves Laffineur a cette conviction que l’on peut En 2002, au moment de sa re-conversion, il va voir Michel changer le monde par la musique. C’est l’effet abbaye : il a cette militant, il prend place dans un lieu porteur de magie. Alexandre, dynamique administrateur de l’abbaye. Celui-ci est sorte de foi et les moines lui soufflent peut-être la rigueur de son Retour sur une belle histoire de transmissions. dubitatif : Je pensais à des festivals comme Dour, à la foule, et je me di- engagement. Esperanzah !, c’est la générosité et, cerise sur le gâteau, sais que, non, on ne peut pas faire ça ici… Mais Jean-Yves m’a convain- la fête en plus !, conclut Bernard Gillain. Véronique Laurent cu, a évoqué le Temps des Cerises, la nostalgie, j’ai dit oui. Jean-Yves Laffineur insiste :Il existe une filiation totale entre les deux festivals ; Du 31 juillet au 3 août 2014 www.esperanzah.be

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leso s rties les sorties

signal de Sweet Jane a toujours été là, déclare ce trentenaire mo- et de la basse de Cédric belge. C’est aussi un (Billy Joe) à la basse. Les quatre garçons réapparaît sur nos derne. «Là», c’est dans la tête, dans le sang, Raymond. Entre envies florilège de composi- sont arrivés à la musique par la voie du fwb écrans radars. Après d’ailleurs et respect des tions écrites exclusive- mais aussi dans le cocon familial. Dans la garage rock. On traîne tous cette esthétique deux albums remar- traditions, les quatre ment par les musiciens qués et des concerts langue de Vondel, «Chance» se traduit par hommes esquissent des de l’orchestre mêlant derrière nous, mais on s’est vite orienté vers remarquables aux côtés «Geluck», son vrai nom. C’est le regretté paysages sonores aux des notes de jazz, pop un format plus pop. Après trois répétitions, de Calexico, Sophia ou Marc Moulin qui lui a soufflé l’idée. Fils de horizons indistincts. – rock, classique, … Le les mecs balancent une maquette sur in- Echo & The Bunnymen, l’illustrateur belge Philippe Geluck, An- Au loin, on distingue la tout est porté par des ternet. C'était un peu n'importe quoi. Pour- Christel Mignolet s’est toine a découvert le piano à l’âge de six ans, griffe de Chet Baker et mélodies tantôt réci- tant, plusieurs labels se sont manifestés. À laissé oublier pendant traversé sa crise de l’adolescence avec Nir- Clifford Brown. De près, tées, tantôt chantées… l’heure où sort son premier album, Moun- dix longues années. on reconnaît les lignes et même quelques vana, découvert Radiohead en étudiant la tain Bike a déjà beaucoup tourné, roulé sur La chanteuse réactive contemporaines tracées touches de rap. C’est Scarlett O’Hanna aujourd’hui son projet musique en Angleterre et approfondi ses par Messiaen et Ligeti. surtout également un le bitume français, allemand ou italien et Kmeron

Romance Floats le temps d’un disque gammes au jazz Studio d’Anvers. Dans son Mixé par Dan Lacksman orchestre totalement partagé l’affiche avec de grands sprinters, © Pop-up Records/Cargo Records déchiré entre mélodies top 3 frenchie, il place Souchon en tête, (Telex) dans l’antre du dédié à la création des pointures comme Ty Segall ou Thee lumineuses et écriture studio Synsound, Bees musicale, sous la direc- A près deux essais fort Antoine Chance juste devant Camille et JP Nataf. Après Oh Sees. Enregistré au Snapshot Studio, à ténébreuse. Entourée and Bumblebees peine tion de Garrett List. recommandables (Im- l’expérience au sein du groupe Coco Royal, Bruxelles, le disque file à toute allure. Ici, d’une triplette de pro- Fou à cacher sa joie. On ne Ce musicien américain postor et Cheap Bling Chance profite de ce premier album pour plusieurs chansons impriment le rythme. ducteurs finauds (Sacha M ercury/Universal s’en plaindra pas. N.A. diplômé de la Julliard livier Donnet O Bling), Scarlett O’Hanna Toorop, Calo Marotta et affirmer son identité. Des textes poétiques School de New York est © D’abord, il y a I Lost My Hopes (In Paradise) : plante le troisième Rudy Coclet), épaulée Sentimental qui craint pour sa santé mentale, et bien dans l’air du temps signés Jacques né en 1944. Il a créé et un single à siffler sous la douche, tout nu volet d’un impeccable par la guitare de Antoine Chance squatte les ondes avec sa Duvall ou Marcel Kanch. Des musiques Zamponi dirigé sous l’impulsion ou en pantoufles. Ailleurs, on s’accroche à triptyque avec R omance Mountain Bike Geoffrey Burton (Arno, pop francophone à fortes influences anglo- Ulisse all’ Isola di Circe d’Henri Pousseur la Floats, disque débarras- personnelles qui doivent autant à la pop la rampe, le souffle coupé par cette méca- Adamo, Bashung), Ensemble Clematis classe d’improvisation Mountain Bike sé des tics folkloriques saxonnes. Avec un tel patronyme, on est roastbeef de Coldplay qu’à la chanson nique bien huilée. Sur la pochette de l’al- Sweet Jane invite ses Ricercar du Conservatoire Royal et de toutes mimiques évidemment tenté d’évoquer cette fameuse française de qualité. Sur Qui sait, Bye Bye H umpty Dumpty Records/Pias bum, un type plane à un mètre du sol. On chansons à voyager le de Liège pendant plus pianistiques. Enregistré veine du débutant pour ce bonhomme qui ou Elle danse, Antoine bouscule avec beau- Le label Ricercar publie À l’été 2012, en plein pic de températures, doit ce visuel à un pote. Son délire, c'est de dé- long de la promenade de trente ans. Orches- aux portes de Paris dans un (magnifique) coffret des Anglaises (PJ Har- débarque avec un premier album délicieu- coup de classe les frontières et imprime tra Vivo ! : un projet deux garçons ont dit non à la voiture pour nicher des photos de sauts en vélo et de gom- le manoir des studios CD de l’enregistre- vey, Beth Orton) ou au sement intitulé Fou. Sauf qu’il faut reca- sa marque. Je suis à dix minutes de tout, discographique coloré enfourcher Mountain Bike, groupe de rock mer la bécane. Du coup, à l'image, les cyclistes La Frette, antre de Syd ment de l’opéra U lisse bord des falaises scan- drer le propos. Fou est bien son premier dans un autre rayon, un chemin de traverse, et empreint d’enthou- déluré, porté par une passion pour les mé- apparaissent dans des positions impossibles. Matters et espace (con) all’isola di Circe du dinaves (Ane Brun, Stina siasme. E.D.L. À l'origine, c'était une bla- sacré en Belgique pour disque solo mais il n’a rien d’un bébé, An- chante-t-il sur Raté d’un rien. Il est comme compositeur italien Gio- lodies gratinées. Cette pochette, c'est une façon de contrarier les Nordenstam). Dans tous avoir vu s’élever les toine, et encore moins d’un débutant. J’ai ça Antoine. Il fait de la chanson «bien d’ici» seffo Zamponi. L’œuvre gue, indique le batteur Charles-Antoine dit clichés associés à notre nom de scène. Dans le les cas, l’itinéraire vaut chansons d’E verest – le l’impression que l’envie de faire de la musique qui nous emmène ailleurs… est dirigée par le chef « Nerveux ». Étienne a pris le micro et on s'est groupe, personne ne roule à vélo. Mountain le déplacement. L.L. Reinhard Keiser N.A. argentin Leonardo dernier sommet de Girls Brockes – Passion retrouvé autour des disques de Deerhunter, Bike, c'est juste un nom qu'on a choisi en qua- In Hawaïï –, le nouvel al- Garcia Alarcon, à la Vox Luminis, Beck ou Grandaddy. On a gratouillé quelques trième vitesse. Totalement en phase avec bum de Scarlett O’Han- prime ici séparément. Grégoire Fray, leader tête de l’Ensemble Cle- Les Muffatti et Peter trucs et finalement, on a monté un projet avec l’esprit du disque : rapide et ultra efficace. matis, de la Cappella na infiltre la pop dans Guillaume Ledent joue aux visions versatiles Van Heyghen Aurélien (June Moan) à la guitare et Stef toute sa modernité. les équilibristes sur un et électriques. Nouvelle Mediterranea et du Ramée N.A. Électricité, groove, fi- premier versant intitulé étape discographique Chœur de Chambre de La Brockes-Passion peut nesse et mélodies roc(k) Marcher sur les murets. d’un projet à ranger Namur. Par sa création être considérée comme ambolesques caraco- De son côté, Guillemot sous l’étiquette auto- même, U lisse all’isola drum and bass, détaille le pianiste Mar- l’archétype de l’oratorio lent ici d’une chanson Guillaume Ledent plonge sa plume imagée collée de « Vegetal Noise di Circe de Zamponi est tin Daniel. Formaté et totalement rebooté & Guillemot de la Passion allemand. à l’autre sans jamais dans un second volet Music », l’album Teh City un opéra qui, d’emblée, Histoires d’écailles Cette Brockes-Passion par ces multiples références, le duo utilise oublier de sourire. Car baptisé Je vole sous That Disappears plonge marque l’histoire de la et de plumes Dashbox Fiorini/Houben jouit d’ailleurs d’une alors ses quatre mains pour imaginer la si les sujets abordés sur l’eau. Compartimentés ses racines dans le rock musique parce qu’il est Ploum! Records/COD&S Dashbox Quartet popularité ininterrom- musique de demain : une tripotée électro- R omance Floats sont mais solidaires, les deux industriel et ne contient le premier opéra créé à Take-Off Records Bees and Bumblebees pue durant tout le 18e nique confectionnée à base d’éléments or- graves, la façon de les À l’heure où les maisons disques se répondent jamais ses montées Bruxelles. Igloo Records siècle car pas moins chanter est totalement de disques rechignent via des duos (L’homme- de sève. Puissant, Q uatuor formé à Bien que ce dernier eut ganiques. En mouvement sur de vrais ins- de onze composi- jubilatoire. Scarlett à signer des petits ven- caméléon, Hispoires conquérant, le groupe Bruxelles au début du R éunis autour de leur sans doute énormément truments (Korg, basse électrique, Fender teurs, dont Händel et O’Hanna fait corps avec deurs de chansons, deux de fapille) et des combine ici ses pulsions XXIe siècle, Dashbox passion pour le jazz, le de succès à l’époque, Rhodes), les deux garçons créent des beats Telemann, la mirent les harmonies et épouse artistes d’ici unissent interventions musicales électroniques et ses réconcilie ses références pianiste Fabian Fiorini nous n’en avons gardé en musique. Deux mutants sous un nom court et un peu col- neuf titres aux charmes leurs forces sur un ef- de l’un chez l’autre. Une instincts organiques bigarrées autour d’un et le trompettiste Gré- que trop peu de traces. excellents ensembles lant : Glü – qui se dit Glue et pas Glou. Après spontanés et intempo- fort commun. Guillaume belle complicité pour un dans un enchevêtre- premier E.P. éponyme gory Houben prennent Heureusement, la par- belges se sont ici réunis un premier EP distribué gratuitement sur rels. Un disque à aimer Ledent et Guillaume projet qui mérite d’être ment de béton armé : un partagé entre envies un malin plaisir à tition ainsi que quinze l

pour servir la Brockes © G ü la toile en 2012, le groupe revient accom- pour la vie. N.A. Duthoit (Guillemot) salué. N.A. paysage urbain au futur électroniques et désirs revisiter les codes du gravures des décors et – Passion de Reinhard ont soumis leurs nou- incertain. La gorge dé- pop-rock. En cinq titres genre avec, comme changements de scène pagné d’un batteur (Alex Rodenbourg) et Keiser : les chanteurs de veaux morceaux aux ployée entre la voix de incrustés de guitare seule contrainte, le sont parvenues jusqu’à d’un emcee (Extravaganza) pour délivrer l’ensemble Vox Luminis Glü oreilles attentives des Mike Patton (Faith No et de clavier, Dashbox souci de sa faire du nous. Il ne nous man- #2, deuxième épisode d’une série ultra di- et les instrumentistes internautes pour sortir More) et celle de Trent se penche lourdement bien. Cette « happy » quait que l’enregistre- #2 de l’ensemble Les Muf- versifiée où l’on mélange allégrement les Histoires d’écailles et de Reznor (Nine Inch Nails), sur l’héritage de David culture, récemment ment. E.D.L. Nf af Records fatti. Les Muffati qui génomes du hip-hop avec quelques molé- plumes par l’entremise Grégoire Fray se débat Bowie (Mister Dicky), (pop)ularisée par l’Amé- fêtent cette année leur Pendant longtemps, Martin Daniel et Do- cules drum and bass, dubstep ou break- d’une plate-forme de avec justesse au cœur avant de se redresser ricain Pharrell Williams 10 ans de joyeux com- rian Palos se sont glissés sous les idées core. Difficile d’appliquer un code-barres financement parti- de la ville fantôme. vigoureusement sur trouve aujourd’hui son Orchestra Vivo pagnonnage avec leur cipatif. L’entreprise Entouré par d’excellents des mélodies chargées pendant noir-jaune- Orchestra Vivo ! cuivrées du collectif Rue des Pêcheries, ou une étiquette donnée sur le répertoire Igloo records chef, l’épatant Peter Sweet Jane communautaire se Thot musiciens, il esca- d’électricité (Teh Black rouge à travers les notes brass band aux visions illuminées par le de Glü. On essaie de produire une musique Van Heyghen. Une dé- Time Away matérialise aujourd’hui The City That Disap- lade quelques solides Sheep) et quelques bleues distillées avec jazz et le hip-hop. Aujourd’hui, le pianiste électrique d'influence électronique. Et, pour Orchestra Vivo ! C’est couverte pour tous les SJ Records sous la forme d’un joli pears monuments (N egative refrains lunaires cata- bonheur sur Bees and le dernier grand projet amoureux de la musique et le bassiste répondent à l’appel des ro- donner davantage de relief aux morceaux, coffret, concocté avec Black Basset Records Buildings, T races, HRT Z) pultés dans l’espace Bumblebees, album A lors que certains de Garrett List qui ras- ancienne ! E.D.L. bots en façonnant un corps électro fait de on travaille désormais avec un VJ. L’image soin et passion par ces et impose un disque par des lignes de basse confectionné par s’acharnent à retrouver A ctif depuis 2005, semble 29 musiciens de chair et d’os. On a toujours été fasciné par les dans le viseur, le beat chevillé au cœur, Glü deux artisans de la coup de poing. Robuste aériennes et rebondies Fiorini et Houben en des boîtes noires au Thot s’articule autour talent, tous très actifs sorties des labels Warp et Ninja Tune. On a se veut une réponse vivante de l’homme à compagnie du batteur aning Cities langue française. Musi- et redoutable. N.A. (One More Chance, So sur la scène musicale o M fond de l’océan, le des idées éclairées de calement, chacun s’ex- Tired). N.A. Hans Van Oosterhout aussi écouté énormément de minimale et de l’ordinateur. N.A. ©

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les sorties vues d'ailleurs

Ottorino Respighi UMAN Fred and The Hea- Vuedfl e andre Impressions brésiliennes La Tournée Des Grands lers LISTE Orchestre Philharmo- Ducs Hammerbeatmatic é chos d'ailleurs nique Royal de Liège Gran Via Records Team 4 Acton DES John Neschling, direction Jaz z Little X Monkeys L a Chiva Gantiva Oscar & The Wolf Bis/New Arts Mystic River SORTIES Fiorini/Houben SkyMyHusband Records Música para sentirse ‘vivo’ Eugène Ysaÿe Quartet C roc-blanc Envoyez-nous la Harmonies du soir Bees and Bumblebees Benoît Lizen Hayn u flamingo rosado que pende de la cabeza del date de sortie de Orchestre Philharmo- Igloo Records Aluka Glaïn cantante durante sus conciertos. Hay una variedad muy vos productions. nique Royal de Liège Honest House Records particular de rock que no riñe con las maracas y con la Max Colombie a déjà eu plusieurs vies. Enfant star, prétendant N ous relaierons dans ces colonnes : Tatiana Samouil, Thi- Gansan feat. Foulane voz que de tanto en tanto se resbala hacia el francés y Mambo à l'Eurovision, le garçon s'est finalement retiré du monde pour [email protected] bault Lavrenov, Émilie Bouhssine un poco más adelante sigue cantando: Chofer, chofer / Live at Gaume Jazz Bertier Belaud, Olivier Giot, más velocidad / espiche la chancleta y verá cómo le va. façonner un projet à son image : poétique et insaisissable. Apparu C hanson Quatuor Ardente Festival Honest House Records Home Records Manon Ache Jean-Jacques Kanto- My TV is Dead Lu sur elespectador.com, posté le 17 février en 2010 sur les rebords d'une pop éthérée, Oscar & The Wolf s'est La Douleur Embellit row, direction IF Trio Gravity Musique en Wallonie progressivement détaché des guitares pour déambuler sous les l’Ecrevisse Imaginary Folklores Depot 214 Records Alternative Records Home Records néons de sa propre révolution. Sexy, délicates et aguicheuses, les Gioseffo Zamponi Scarlett O’Hanna Ulysse all’Isola di Circe A u Monde, Patrick Davin dirige Airco MDM Experience Romance Floats chansons laissent désormais la matière synthétique s'enrouler dans Chœur de Chambre Le Roi du Silence Wake Up Cargo Records l’Orchestre de la Monnaie dans de Namur, Ensemble la grande histoire des musiques noires. Soul et R’n’B résonnent ainsi Autoproduction LC Music l’opéra de Philippe Boesmans mis Clematis, Cappella Me- One Horse Land Antoine Chance diterranea, Leonardo Nicolas Kummert Bored With The Music en scène par Joël Pommerat au cœur d'Entity, premier album d'un rêveur hors-catégorie.

Fou Garcia Alarcon Liberté COD&S a C’estn u événement réellement exceptionnel qui se dé- M Mercury/Universal Ricercar Prova Records © rie Wynants Nicolas Alsteen The Scrap Dealers roulait le 30 mars à La Monnaie de Bruxelles. Sixième Anouk & Frouch Orchestra Vivo ! Red Like Blood opéra de Philippe Boesmans (septième si l’on compte Trio Cpoontem rain Orchestra Vivo JauneOrange Records comme un véritable travail de création l’orchestration Guilty Igloo records du Couronnement de Poppée) Au Monde était présenté Autoproduction The Janssens Six Ways To Funk Flexible Ensemble Shoot Me au public pour la première fois : la création du monde, en Delrue Rituals Me tal Autoproduction quelque sorte ! Autre partenaire important de la réus- bien derrière des artistes comme Deven- redoute de découvrir le vrai visage de ces Risquons Tout Orkestrom Recordings Oscar & The Wolf site de ce spectacle, l’Orchestre de la Monnaie, splendi- dra Banhart ou Bon Iver. Récemment, lieux et de gâcher une part du rêve. Petrol Records Augures Sweet Jane dement conduit par Patrick Davin, déploie les magnifi- Entity Time Away Pias Recordings Inauguration cences de timbres de la musique de Boesmans avec une j'ai découvert les joies du dancefloor. Je Olivier Juprelle Eetl c ro Black Basset Records SJ Records suis sorti en club et j'y ai pris goût. Tout Le bruit et et la fureur précision remarquable et une visible délectation. Qu’il La musique d'Oscar & The Wolf renvoie Aymeric de Tapol Pias Mont-Dore The Tangerines s’agisse des vents, des percussions ou de l’accordéon, ça m'a donné envie de composer des mor- l'oreille à des projets comme Autre Ne Winter Dance Escalades Somewhere Behind The chaque intervention est strictement calibrée, parfaite- ceaux plus sombres et langoureux. Dans Veut, How To Dress Well, mais aussi à des Le Colisée Vlek Records Black Basset Records Noise ment en place, et ravissent l’auditeur en continu, em- mon esprit, les nouvelles chansons de- Vie Eternelle E.P. Anorak Supersport artistes de la trempe de James Blake ou Bad Dancer porté par un maelström sonore du meilleur effet. Autoproduction vaient être moites, dansantes et sexy. Frank Ocean. Ce sont des noms qui in- Calme E.P. Thibet Pprco - o k Lu sur forumopera.com, publié le 30 mars par Cette transition musicale s'est aussi opé- Guillaume Ledent Police Records Vision & Certitude fluencent votre travail ? Claude Jottrand rée au contact des séries télévisées. J'ai Pour moi, écrire des chansons, c'est d'abord & Guillemot Amute Le Studio Americain/COD&S Glü Histoires d’écailles et de Savage Bliss l paraît que vous avez découvert votre vraiment été influencé par l'atmosphère une question d'émotions. Mes références plumes #2 Three Four Records Thot voix en participant à des karaokés. contenue dans certaines productions musicales ne sont pas à l'origine de mon Ploum! Records Naff Records The City That Disap- Applause pears T he Magician C'est une légende ? américaines, des choses comme True processus créatif. Au quotidien, j'écoute Mokele Acids Claire Spineux Black Basset Records Max Colombie : Non, c'est la vérité. Je Blood ou Six Feet Under. d’ailleurs très peu de musique. Les chan- Il est né à la maison Enschede Autoproduction Ready to dazzle at Coachella Best Of Records devais avoir six ou sept ans. À l'époque, sons que j'écoute le plus sont celles que j'en- Autoproduction Vegas Te h Magician’s bio reads like some kind of twisted day- BRNS Everything you know is j'étais obsédé par les chansons de Sade. tends en soirée ou chez des amis. Souvent, dream. The DJ/producer, real name Stephen Fasano, was Si vous deviez décrire votre nouvel al- Marie Warnant Soldout Patine wrong Dès que je pouvais prendre part à un ka- la musique des autres m’effraie. Quand il Puppylove Soundtrack once one half of Balearic disco duo Aeroplane. In 2010, bum en une scène (tirée d'une série ima- Nyxtape Naïve/Pias Moonzoo Music raoké, je chantais sur un de ses morceaux. s'agit d'un titre léger et un peu anodin, ça Idizou/Pias Flatcat Records he disembarked that flight and boarded his own magical ginaire) ? Cecilia::Eyes Vismets carpet ride — basically he left to work on his solo act as Mon préféré, c'était Your Love Is King sur Je vois plutôt des vampires qui marchent passe facilement. Mais dès qu'un morceau Disappearance I Abracadabra The Magician. While he’s yet to create a website, The Ma- son premier album. À côté de ça, je me sous le soleil. La scène se situerait dans me touche réellement, la charge émotion- Classique Ermnxpé i e tal dEPOT214 Records Pias gician has developed quite a following on both Facebook suis fait la voix sur When You Say Nothing une rue, quelque part à San Francisco ou nelle devient quasiment insupportable. Je Collection Pléiades If Trio Dario Mars And The and Soundcloud, where you can stream a number of his At All, un tube de Ronan Keating large- au Maroc. Pour moi, ce tableau symbolise me sens beaucoup plus à l'aise au contact Imaginary Folklores - Musique Sacrée du Guillotines Wol r d – Trad remixes. His version of Lykke Li’s I Follow Rivers has fans ment popularisé par la bande originale du bien l’ambiance du disque. Les morceaux des films et des séries télévisées. Après, je Baroque allemand Home Records Black Soul following him across Europe. And this weekend, now just Majid Bekkas film Coup de foudre à Notting Hill. Et puis, d’Entity enferment une part d’ombre mais ne sais pas dans quel style musical ranger Passion & Résurrection Ván Records a three days away, he’ll be at Coachella. Oiseaux-Tempête Al qantara Ricercar Consort, Les Oiseaux-Tempête il y avait aussi des choses plus classiques se dandinent dans un environnement ul- la musique d'Oscar & The Wolf. Ce n'est pas Agrémens, Chœur de Dashbox Igloo Records Sub Rosa L u sur DesertSun.com, publié le 8 avril par Lynn Lieu comme le You Are Not Alone de Michael tra-lumineux. à moi de l'expliquer. Pour moi, Entity, c’est Chambre de Namur Dashbox Take-Off Records Mokoomba Jackson, par exemple. un organisme impossible à définir. Quand je Ricercar Rising Tide (LP) croise le regard de quelqu'un dans la rue, par Hp i hop Flying Komodo Traditionnellement, comment se construit Dowland Igloo Records th exemple, je peux me sentir intrigué ou fasci- Lachrimae or Seven Devil Women 13 Independant Music Awards Au point de départ, la musique d'Oscar & une chanson chez Oscar & The Wolf ? Autoproduction Nisia Avant d'écrire une chanson, je m’invente né. Mais je n'arrive jamais à expliquer pour- Teares Aral & Sauze Karim Baggili est nominé dans la catégorie "World The Wolf reposait sur des mélodies folk as- Hathor Consort Connection Eredità toujours une histoire. En général, je dé- quoi. Ça reste toujours dans le domaine du Italian Boyfriend Home Records Beat". Il avait déjà remporté il y a 3 ans l'award du sez épurées. On se situait davantage dans Romina Lischka, Autoproduction Italian Boyfriend meilleur album dans cette même catégorie. place des éléments de ma vie privée dans ressenti, pas du palpable. Je pense que c'est direction un registre pop-rock. Aujourd'hui, avec En- 62TV Records/Pias une autre réalité. L’intrigue de mes fan- la même chose pour ma musique. Fuga Libera King Lee tity, on découvre des morceaux bercés par Menace 2 The World I’ve listened to Arabic music since I was a kid and at tasmes se déroule entre Miami et Los Mountain Bike the same time I live in Europe and I’m not 100% Jorda- la soul et le R’n’B. Comment cette transi- Deerty Recordz Mountain Bike Angeles, parfois à San Francisco ou dans www.oscarandthewolf nian. So for this album, I wanted to have the traditional tion s'est-elle opérée ? Humpty Dumpty Records/Pias sound blended with a more uniquely modern feeling. Avant, je sortais rarement de chez moi. le Grand Canyon. Je n'ai jamais visité ces J'étais assez casanier. Je me retrouvais endroits. J'ai presque peur d'y aller. Je L u sur www.independentmusicawards.com

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vs ue d'ailleurs C'éie ta t l … Vue d'australie C'était le … Chet Faker le 1er juillet 1990 L e verre divin Cheveux noirs, barbe rousse, l’Australien Nicholas Murphy mélange les styles et les couleurs sous la cape de Chet Faker. Entre claquements de doigts et pincettes électroniques, son premier album Built( On Glass) bat la mesure aux rythmes d’envies organiques et de pulsions synthétiques. Jazz, electronica, pop et R’n’B se portent ici au chevet d’un disque sensuel et éthéré, voisin patenté des confections romantiques de James Blake et Nicolas Jaar.

Nicolas Alsteen © Lisa Friling

n associe souvent votre diteurs s’est élargi de façon exponentielle. tout sur l’honnêteté. Quand on se dévoile nom à la scène électronique Les internautes commentaient la vidéo aux de la sorte, on est assez vulnérable et, dans australienne (, Cut quatre coins du monde. D’un point de vue mon esprit, le verre fait écho à cette fragi- Copy). Pourtant, votre mu- personnel, je considère No Diggity comme lité, à cette volonté de transparence. Cette sique est assez organique. le Saint Graal. C’est mon ADN. Quand j’ai métaphore englobe tous les thèmes per- Comment expliquer cette entendu ce morceau pour la première fois, sonnels abordés dans les chansons. J’aime petite erreur de casting ? j’ai tout de suite su que c’était le genre de aussi l’idée selon laquelle je construis ma Chet Faker : La raison de cette confusion musique que je voulais faire. discographie sur une base sensible et dé- Otient essentiellement à ma nationalité. On licate. C’est une façon de garder la tête sur n’est pas des milliers à s’exporter en Eu- Est-ce difficile de s’exporter au-delà des les épaules, de considérer que tout peut rope. Naturellement, les gens nous asso- frontières nationales quand on est Aus- s’écrouler du jour au lendemain. cient, parce qu’on vient de loin. Un autre tralien ? facteur vient aussi expliquer ce rapproche- Ça n’a jamais été aussi facile, je pense. Go- Votre nom de scène découle de celui du ment: le public n’a pas encore eu l’occasion tye, Flume, Tame Impala… L’Australie s’ex- trompettiste Chet Baker. C’est votre ar- d’écouter mon nouvel album. L’amalgame porte enfin de façon homogène. C’est que tiste préféré ? repose exclusivement sur mes premiers l’état d’esprit a évolué. Avant, la scène mu- Il l’a longtemps été. Plus maintenant. morceaux. Et puis, l’année dernière, j’ai sicale répondait essentiellement à des lo- Quand j’ai commencé à jouer de la mu- enregistré un E.P. avec Flume (Lockjaw). giques territoriales. Les musiciens jouaient sique sous mon nom, je me suis rendu C’est aussi pour ça que les médias asso- d’abord pour leurs potes et puis, si ça plai- compte qu’un autre Nicholas Murphy cient régulièrement nos deux noms. sait, ils parcouraient le pays. Pendant avait déjà enregistré deux albums en Aus- longtemps, de nombreux artistes se sont tralie. Pour éviter toute confusion, j’ai pris Sur votre premier E.P., on pouvait en- contentés de cette situation. Et on peut les un pseudonyme. J’aime la profondeur et tendre une reprise du tube de Blackstreet, comprendre : l’Australie se situe à l’autre la délicatesse qui se dégagent de l’œuvre N o Diggity. Que représente cette chanson bout du monde et s’étend sur des milliers de Chet Baker. Il enregistrait la musique à vos yeux ? de kilomètres. Ça prend des plombes pour comme il l’entendait, sans chercher à Cette reprise a donné naissance à Chet Fa- en faire le tour. De temps en temps, cer- prouver son talent. J’apprécie cette rete- ker. Avant ça, ce pseudonyme n’existait pas. tains partaient en tournée. Mais, pour la nue, toute cette modestie. C’est le premier morceau sur lequel j’ai bos- majorité, les opportunités étaient rares et sé. En une nuit, j’ai réinterprété No Diggity beaucoup trop onéreuses. Aujourd’hui, www.chetfaker.com à ma sauce. J’ai posté ma reprise sur You- le contexte économique a changé, les tic- Tube et je suis allé me coucher. Le lende- kets d’avion sont plus abordables qu’autre- L e présent article est reproduit avec l'autorisation main, la vidéo était inondée de commen- fois. Le développement d’Internet nous a de l'Éditeur, tous droits réservés. Toute utilisation taires euphoriques. Les gens adoraient fait énormément de bien. Pour moi, c’est le ultérieure doit faire l'objet d'une autorisation l’adaptation et la production. Pour moi, principal facteur de cette nouvelle visibilité. spécifique de la société de gestionC opiepresse : [email protected] c’était le début d’un truc. À l’époque, je ne pouvais pas imaginer que c’était le point de Quelle est la signification du titre de votre départ de ma carrière. Mais pourtant, ça album, Built On Glass ? Chet Faker l’était… En quelques jours, Internet a pris L’idée de base, c’était de souligner l’aspect Built On Glass le contrôle de ma reprise. Le cercle des au- authentique du disque. Cet album mise Downtown/Future Classic/Pias

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