Table ronde n°1

Vers un acte III de la décentralisation : quelles compétences pour nos territoires ?

Perrine TARNEAUD. – Merci Hervé Marseille pour cette introduction. Nous allons commencer les débats par la première table ronde : quelles compétences pour nos territoires ? J’appelle à la tribune : Catherine Morin-Desailly, sénatrice, conseillère régionale de Haute-Normandie, Jean-Léonce Dupont, sénateur, vice-prési- dent du Sénat et président du conseil général du , Frédéric Leturque, maire d’Arras et Jean-Jacques Pignard vice-président du conseil général du Rhône. Hervé Marseille vient de détailler l’acte III de la décentralisation qui va être présenté en conseil des ministres (le 10 avril). On attendait un seul texte, finalement, il y en aura trois, sans vraiment clarifier les compétences de chacun des territoires.

Jean-Léonce DUPONT. – Je voudrais tout d’abord dire à Hervé, élu fran- cilien, qu’il a devant lui deux élus normands. Vous avez compris la grande amitié avec laquelle nous travaillons de manière pérenne puisque chacun sait que la Normandie est la porte maritime du Grand et de la région Île-de-. Pouvoir échanger sur tous ces sujets est donc un grand plai- sir permanent. S’agissant de l’acte III, comme l’a très bien dit Hervé, il y aura trois textes. Il nous faut peut-être être modestes dans la critique car nous avons déjà connu le découpage d’un certain nombre de textes liés à la réforme des ter- ritoires. On a déjà donné !

« Acte « III de la décentralisation » Ce qui n’était pas une réussite hier ne l’est pas plus aujourd’hui. On peut effectivement s’attendre au pire, notamment dans la cohérence et la vision globales car, vous imaginez bien que traiter, d’abord la région et ensuite les compétences laisse supposer que la région n’aura aucune compétence puisque ce sera traité après coup. Ce découpage ne me paraît pas présa- ger d’orientations intéressantes. Initialement, on m’avait demandé de faire la synthèse…

Perrine TARNEAUD. – Vous deviez effectivement conclure cette table ronde. Finalement, vous l’introduisez.

10 Jean-Léonce DUPONT. – Je suis comme un auditeur qui, finalement, arrive avec déjà les conclusions. Je vais donc essayer de lancer un certain nombre de débats, ayant des positions que beaucoup, j’imagine, ne parta- geront pas. Cela permettra de lancer réellement le débat. un rapide survol, Hervé l’a dit, dans notre famille politique, la décentrali- sation est un de nos thèmes, un thème fantasmatiquement intéressant, en particulier pour les élus. Malheureusement, constatons que ce n’est pas un thème de première importance aujourd’hui dans la réflexion et l’attente des Français. Il faut en avoir absolument conscience. La décentralisation rapidement : année 1980. Ce qu’a fait Gaston Defferre dans les années 1980 était vraiment une initiative révolutionnaire que nous nous sommes tous appropriée. Simplement, cela s’est fait à une époque où les collectivités avaient des marges de progression, notamment financières, relativement intéressantes. Aussi, le transfert de compétences n’a pas posé de difficulté puisque la capacité financière locale pouvait y répondre. Je vous en donne une illustration : dans mon département, celui du Calvados, pour le transfert des collèges que nous avons accueilli avec sérénité, entre la dotation reçue de l’État et le montant réel consacré à la dépense, nous sommes dans un rapport de 1 à 10. On m’a donné 1 et la dépense annuelle est de 10. Cela n’a pas posé de questions. Pourquoi ? Parce que nous étions à une époque où nos marges de progression financière, fiscale, nous permettaient d’absorber sans problème ces compétences. La décentralisation de Jean-Pierre Raffarin, est intéressante car elle constitutionnalise l’autonomie des collectivités et la non-tutelle d’une collec- tivité sur l’autre. J’insiste sur ces deux points car, pour les textes sur les- quels nous aurons à travailler, vous verrez que ces deux questions sont objectivement et réellement posées. C’est une avancée, me semble-t-il, dans la vision des territoires qui était la nôtre et ce n’est pas étonnant venant de Jean-Pierre Raffarin ; mais à mon avis, cet acte II de la décentralisation a posé un problème, notamment le fait de donner la compétence générale à la région. Jusqu’alors elle ne

l’avait pas. Le fait de la lui transférer a abouti à l’idée encore plus dévelop- Acte « III de la décentralisation » pée de ce millefeuille où tout le monde peut absolument tout faire. Je pense que ce transfert de compétence générale n’a pas été une bonne orientation dans l’acte II de la décentralisation et que c’est une des causes, parmi d’autres, des difficultés d’appréhender et de simplifier la situation que nous connaissons aujourd’hui. quand on parle aujourd’hui décentralisation, je pense qu’il faut naturelle- ment poser le problème des compétences – il y a plusieurs manières de l’aborder –, mais très vite, se pose également celui de l’architecture, un pro- blème très compliqué. On le sait d’autant plus que les parlementaires -qui

11 ont vécu le dernier acte, la loi de 2010- ont été nombreux à s’interroger ici et là. Je vous en dis deux mots car cela peut éclairer les débats. Comme on vit une période que d’aucun pense qu’elle n’est pas très bonne, on finirait par croire que ce qui était présenté avant était bon. Il faut tout de même avoir un regard objectif, me semble-t-il ! La loi de 2010 avait deux ambitions officielles annoncées : la première : simplification, la deuxième : aux moindres coûts. quand on parle de simpli- fication administrative, on arrive au bout du bout à une complexité crois- sante. Sur le texte qui nous a été proposé, j’affirme à titre personnel, que nous sommes allés vers une complexification et nous serions allés vers un mode de fonctionnement plus onéreux. Pour illustrer mon propos, le fameux texte sur le conseiller territorial, qui a été compris par la population comme la disparition d’un des deux éche- lons, en réalité n’était pas du tout la suppression d’un échelon puisque c’est un élu qui gérait deux assemblées. De la même manière que vous avez, aux niveaux communal et intercommunal, des élus qui gèrent deux niveaux territoriaux que sont la commune et l’intercommunalité. Ceux qui ont une petite expérience de vie communale et intercommunale savent bien que ce n’est pas parce que vous siégez à l’intercommunalité que vous dépensez moins sous prétexte que vous gérez une commune. Vous êtes plutôt souvent à défendre les intérêts de votre commune à l’inté- rieur de l’intercommunalité. C’est d’ailleurs un des problèmes fondamen- taux. Le sentiment communautaire l’emporte rarement sur la défense de l’intérêt communal. On peut imaginer le futur conseiller territorial qui conti- nuerait à défendre son département à l’intérieur de l’assemblée régionale ! Je ne vous parle pas du nombre d’élus supplémentaires, puisque cer- taines assemblées seraient passées à 200, 250 voire 300 élus territoriaux. Pour vous donner une idée, 300 élus, c’est l’équivalent du Sénat ! Nous sommes 348 sénateurs. Nous savons ce qu’est la complexité de gérer 348 élus avec leur intelligence, leurs caractéristiques mais souvent toutes leurs

« Acte « III de la décentralisation » exigences. Je peux vous affirmer que la gestion aurait été complexe car, derrière ces assemblées tout à fait pléthoriques, nous aurions eu tantôt des majorités politiques, tantôt des majorités par projet et tantôt des majorités géographiques, c’est-à-dire l’alliance d’un certain nombre de représentants de départements contre, éventuellement et souvent, le département le plus important qui porte en général la métropole. Tout cela pour vous dire que c’était assez compliqué et que nous en arri- vions à un certain nombre d’incohérences. Cela étant dit, nous sommes sur un acte nouveau. Je vais réellement « décoiffer » puisque je sais que cela ne sera pas partagé par beaucoup.

12 Je pense que lorsqu’on compare la France à toutes les grandes démo- craties, la vraie différence, c’est le niveau communal. Vous retrouvez dans pratiquement toutes les grandes démocraties l’équivalent de nos intercom- munalités, l’équivalent du niveau départemental et régional. La vraie synergie à venir de l’organisation des territoires viendra de l’arti- culation intelligente que nous pourrons trouver entre les niveaux communal et intercommunal. Je l’appelle mutualisation croissante. Je demande du temps pour l’organiser, mais sachez que c’est fondamentalement à ce niveau que nous aurons des capacités d’évolution. Si nous continuons tous ensemble à poser comme principe que l’on ne touchera pas à la cellule de base, quoi qu’il arrive, toutes les solutions que vous verrez émerger contourneront le problème, mais ne résoudront pas la différence fondamentale que nous avons avec l’ensemble des autres grandes démocraties. une fois cette articulation à venir posée de la commune et de l’intercom- munalité, je reste convaincu que le niveau départemental est le niveau de péréquation de solidarité entre les territoires. Ce n’est pas très original, c’est relativement consacré, mais derrière le mot solidarité, je mets bien sûr la solidarité à la personne, l’ensemble des prestations que le département dis- tribue, mais aussi la solidarité territoriale. C’est pourquoi si un point dans l’acte III de la décentralisation qui nous est proposé m’intéresse, c’est la reconnaissance de l’aménagement du territoire comme compétence du niveau départemental. C’est, me semble-t-il, le niveau qui nous permet d’éviter la fracture territoriale. C’est d’autant plus important que nous allons vivre, dans les 10 ans qui viennent, nous le savons tous, le vrai phénomè- ne nouveau de métropolisation. Nous aurons, je l’espère quelques métropoles de niveau international et un pays comme la France -ne nous leurrons pas- ne doit pas avoir plus de trois ou quatre métropoles de niveau international. Ne reproduisons pas au niveau des métropoles ce que nous avons tellement produit sur un certain

nombre de territoires, c’est-à-dire la multiplication. une métropole de niveau Acte « III de la décentralisation » international c’est : un million d’habitants, c’est un aéroport international, ce sont des sièges de multinationales. Sur l’espace français, pays de 66 millions d’habitants, nous avons de l’ordre de trois métropoles de niveau international. Derrière, nous avons une vraie réflexion à porter sur des pôles de niveau régional/interrégional et même un peu plus important. De mon point de vue, ils doivent être des gestionnaires de projets sur des syndicats mixtes que je qualifierais d’ouverts parce qu’ils permettent d’être financés par l’apport des membres et non des impôts supplémentaires.

13 Ce phénomène de métropolisation va émerger. Il pose de facto la réalité des territoires hors champ métropolitain. C’est pourquoi, me semble-t-il, le dépar- tement devrait rester, sauf exception, le niveau de péréquation des territoires. Ne croyez pas que mon propos soit strictement théorique, je l’ai vécu. Je donne une illustration : la gestion du contrat de projet État/région. Dans ma région, comment cela s’est-il passé ? Il y a trois départements. L’État est venu. Il a réfléchi sur ce qu’il allait faire sur le territoire et a discuté avec la région. Au bout du compte, quand vous regardez la « répartition » de l’effort de l’État, vous vous apercevez que, grosso modo, 55 % sont répartis sur le département principal et le reste sur les deux autres et que, dans le département principal, 95 % des fonds de l’État sont orientés vers l’agglomération caennaise qui représente un tiers de la population. Ce sont 95 % des moyens pour un tiers de la population. Si le département n’avait pas été là pour dire : on est tout à fait d’accord pour que l’effort principal porte sur l’agglomération où il y a une vraie dyna- mique, de vrais projets structurants, mais néanmoins sur le reste du dépar- tement, il y a ici et là un certain nombre de projets intéressants et dynami- sants, nous n’aurions pas pu faire émerger un certain nombre de projets. Je vous le dis et j’insiste, le département est bien le niveau de péréqua- tion de solidarité qui permettra de ne pas aller trop loin dans la fracture ter- ritoriale entre rural et urbain. Alors les régions… ! Vous avez bien compris que, dans mon esprit, les régions ne devraient pas avoir la compétence générale. Je pense égale- ment qu’elles sont trop importantes en France. Nous avons trop de régions. Nous en avons 22 sur le territoire métropolitain. Pourquoi 22 ? Là encore, nous avons quelques blocages historiques, culturels et idéolo- giques. On nous rappelle toujours que l’on pourrait reconstituer ce qu’étaient les anciennes provinces. Le pouvoir hyper centralisateur de la France, dès qu’il voit une organisation lui échapper, notamment territoriale, met tout en place pour que cela ne puisse pas aboutir. Ce que fait l’Alsace est intéressant, mais elle peut le faire parce que c’est

« Acte « III de la décentralisation » une région composée de deux départements. quand on est une région à deux départements, on n’est pas loin des problèmes départementaux. quand on est une région à dix départements, ce n’est plus du tout la même problématique. Il y a tout de même une différence d’approche entre la région Rhône-Alpes et celle de la Corse, entre la Haute-Normandie, l’Alsace et éventuellement la région Île-de-France. Le vrai problème est de donner une vraie dimension aux régions. Là encore, on distingue problème théorique et problème pratique. Problème pratique : on le voit en Normandie. On parle depuis toujours de la réunification de la Basse et la Haute-Normandie. On dit : « oui, mais quid

14 de la capitale régionale ? » Nous butons sur la capitale régionale. Ce ne sont pas que des problèmes franco-français. Regardez ce qui se passe au niveau européen entre Bruxelles et Strasbourg. Sur les capitales européennes, ce n’est pas simple non plus. Je reste convaincu qu’il faut aller vers ces grandes régions et que, pour y arriver, il faut simplement poser une condition simple : il faut que les futures capitales régionales ne soient pas les grandes agglomérations de la région. Voyez ce qui se passe en Californie. Los-Angeles n’est pas la capitale de la Californie. Je suis convaincu que si nous pouvons réaliser la réunification de la Basse et la Haute-Normandie, ce n’est ni Caen ni le Havre ni Rouen qui deviendraient capitale, mais peut-être Deauville, Évreux, Bernay… Tout cela pour vous dire qu’un problème peut effectivement faire que vous bloquez un processus d’évolution intéressant. Grandes régions, compé- tences fixées sur l’investissement et non le fonctionnement, grands équipe- ments, enseignement supérieur, recherche, grands moyens de transports… bref, tous les champs qui ont été initialement occupés par les régions et qui se sont beaucoup élargis. Rappelez-vous ce qui s’est passé en 2010 quand il a été question de sup- primer la compétence d’aide aux milieux culturels et sportifs, au niveau des régions et des départements, rappelez-vous les réactions immédiates de l’ensemble des acteurs qui ont expliqué aux uns et aux autres qu’il fallait continuer ce millefeuille. C’est pourquoi, j’y reviens, il y faut une idée extrêmement claire des uns et des autres. Dans ma grande réorganisation : mutualisation des intercommunalités et des communes croissante sur deux mandats ; péréquation des départe- ments ; réduction du nombre de régions replacées sur les compétences d’investissements et grands équipements. J’y ajoute, parce que nous sommes au Parlement, diminution du nombre des députés notamment après la limitation du cumul des mandats… Vous imaginez 577 députés n’ayant qu’un seul mandat…! Je souhaite

beaucoup de bonheur au président de l’Assemblée nationale, aux présidents Acte « III de la décentralisation » de commissions et de groupes pour gérer ce « brûlot ». Je pense que nous pourrions également réduire le nombre de sénateurs aux alentours de 200. Vous voyez, c’est une vraie réforme qui part des territoires et qui va jus- qu’au plus haut niveau de l’État. J’imagine que cela va entraîner beaucoup de réactions de votre part.

Catherine MORIN-DESAILLY. – Tout d’abord, je voudrais rebondir sur la réflexion de Jean-Léonce parlant du nombre de parlementaires, de séna- teurs, de députés, qui renvoie à la loi dont nous allons prochainement

15 débattre sur le cumul des mandats. Je trouve qu’il y a une vraie incohérence aujourd’hui de la part du gou- vernement à vouloir légiférer sur le cumul des mandats, en tout cas appe- lant au non-cumul strict tout en nous proposant un acte III de la décentrali- sation qui ne simplifie rien du tout en termes de strates du fameux mille- feuille administratif. Je pense qu’il fallait pousser les curseurs ensemble et réfléchir à quel élu pour quel territoire, quelle mission et quelle capacité pour rendre cette mission dans l’esprit de proximité que, nous, centristes appe- lons de tous nos vœux. Je pense qu’il faudrait aussi poser cela comme préalable dans notre réflexion dans les projets de loi à venir. Jean-Léonce a eu raison aussi de dire, à la suite de Hervé Marseille, que l’acte III, tel qu’il se profile, l’acte III 1, puis l’acte III 2 puisque nous sommes dans un deuxième temps de l’acte III, ce texte tripartite ne simplifie en rien, à mon sens, ce qui était prévu par la loi du 10 décembre 2010. Cette loi renvoyait à un texte que nous devions voter au plus tard au 1er janvier 2015 qui devait simplifier les compétences. Je vois qu’il n’en est rien. Nous aurons, certes, un texte sur les compétences mais qui interviendra dans un troisième temps, déconnecté d’une réflexion sur l’architecture des collectivités. On reproduit donc la même erreur que lors de la loi de 2010. Cette loi de 2010, j’y étais favorable en ce sens qu’elle mettait sur les rails un certain nombre de réflexions face aux évolutions des territoires, mais je ne l’ai pas votée parce qu’elle est restée au milieu du gué. On n’est pas allé jusqu’au bout du raisonnement qui aurait occasionné une vraie simplifica- tion de ce millefeuille, une vraie définition et une vraie répartition des com- pétences. Je suis peut-être plus jusqu’au-boutiste parce que nous tirons aussi notre réflexion, notre expérience en tant qu’élus locaux. Je n’ai jamais été élue d’un département. Jean-Léonce est très investi dans son département. Il y réalise un certain nombre de projets avec beaucoup de réussite. Nous sommes forcément imprégnés de notre propre expérience qui renvoie à la

« Acte « III de la décentralisation » question : les élus sont-ils vraiment à même de s’auto-réformer, c’est-à-dire de réformer l’ensemble des structures dont ils dépendent ? Forcément ! Nous sommes convaincus du mandat que nous portons et des missions que nous exerçons pour le compte de ce mandat et on se dit que ce que l’on fait est très important.

Perrine TARNEAUD. – La limitation du cumul règlera ce problème en tout cas.

Catherine MORIN-DESAILLY. – Je crois qu’il faut aussi se faire ses propres critiques.

16 Il faut réfléchir aux défis immenses devant nous. Ce XXIe siècle est un bou- leversement de civilisation. Il faut aussi partir du constat de tous ces défis que nous avons à relever : le défi énergétique, la nécessité d’une croissan- ce durable, la mutation industrielle,… Je suis dans un département en pleine mutation industrielle. Je parle sous le contrôle de mes collègues présents, élus de ce département. La question de l’emploi évolue donc, la question de la mobilité, l’allongement du temps de la vie, les questions de démographie médicale questionnent l’organisa- tion et le devenir des territoires. Il y a aussi un sujet auquel il faudrait que nous réfléchissions – il est diffi- cile car il est extrêmement complexe, je m’y suis un peu penchée –, il s’agit de la mutation numérique qui va bouleverser complètement tous nos usages du quotidien, qui ne nous fera plus travailler ni raisonner de la même manière. La démocratie s’exercera même différemment. Prenons le cas de l’énergie avec les réseaux électriques intelligents, on va s’échanger des énergies et donc on ne pourra plus raisonner de la même manière. La question de la capitale normande soulevée par Jean-Léonce me fait me demander si c’est un problème à l’heure du numérique. Il y a peut-être une nouvelle forme de capitale du XXIe siècle à imaginer, davantage basée sur les mutualisations et les coopérations que sur la définition d’un lieu géo- graphique stricto sensu. C’est un peu iconoclaste ce que je dis mais je pense qu’il faut aussi que l’on ait une vision peut-être un peu prospective. quelques principes à mon sens sur lesquels doivent se construire cette décentralisation acte III. Ce sont des principes que nous, centristes, avions déjà affirmés en amont de la loi de 2010 : - c’est créer une nouvelle dynamique pour sortir de la crise, créer un nouveau modèle territorial capable de rivaliser avec ce qui se passe autour de nous. en europe, des pays ont déjà avancé sur le sujet. C’est être surtout effica- ce dans l’action publique, ce que nous demandent aussi nos concitoyens. Surtout bien utiliser l’argent dont nous disposons : la crise des finances

publiques est un impératif. C’est aussi et surtout veiller à l’équilibre des ter- Acte « III de la décentralisation » ritoires, Jean-Léonce l’a évoqué, mais je crois qu’il faut inventer un nouveau modèle notamment pour la ruralité que le phénomène de métropolisation met fortement en question ; - c’est aussi le principe de la responsabilisation et d’un renforcement de la démocratie. Je pense que cela passe par l’autonomie fiscale des collectivités qui leur permet de choisir des projets qui font l’objet de l’adhésion ou de la sanction des concitoyens concernés. Pour une meilleure démocratie, cette autonomie fiscale est indispensable ; - ces quelques principes réaffirmés, je pense qu’il faut vraiment simplifier le

17 millefeuille autour de deux blocs : communes et intercommunalités. Ce qui a tout de même été fait dans la loi de 2010, avec la possibilité des fusions de communes. et les élus ruraux notamment y réfléchissent maintenant sérieu- sement.

Perrine TARNEAUD. – Jean-Jacques Pignard approuve.

Catherine MORIN-DESAILLY. – Les petites communes de 150 habitants et moins ont bien conscience que, dans le cadre d’une intercommunalité, beaucoup nous le disent en Seine-Maritime, il y a peut-être à réfléchir à voir fusionner des communes. Nous avons des exemples. Nous verrons com- ment cela évolue. en tout cas, une intercommunalité gardant la clause de compétence générale, une intercommunalité renforcée et maîtrisée corres- pondant à une logique de bassin de vie, des choix vraiment assumés par les élus en matière de finances publiques et de compétences. Il faudra maintenant sérieusement aller sur le bloc région/département. C’est peut- être sur ce point que se situe ma divergence avec Jean-Léonce. Il faut, à ce niveau, des coopérations renforcées, une clarification des compétences, voire fusionner ces deux niveaux de collectivités.

Perrine TARNEAUD. – une réaction très vive de Jean-Léonce Dupont.

Catherine MORIN-DESAILLY. – Je termine mon raisonnement parce que je le tire de mon territoire. evidemment, il n’est pas duplicable partout. Il fau- dra peut-être des adaptations selon les identités territoriales. Alors, quid du devenir du département ? quand on a deux métropoles (plus de 500 000 habitants représentant plus de la moitié du nombre d’ha- bitants du département), quand existent deux pôles métropolitains qui se sont mis en route – qui d’ailleurs sont géographiquement des pôles qui cou- vrent plusieurs départements-, anticipent une réunification de notre région parce qu’ils couvrent des départements des deux régions : Haute et Basse-

« Acte « III de la décentralisation » Normandie. Je me demande vraiment ce qu’il reste aux départements ! N’y aurait-il pas, là, une opportunité pour la région/département de se regrou- per pour justement assumer avec efficacité l’ensemble des missions que tu évoquais Jean-Léonce.

Perrine TARNEAUD. – Vive le conseiller territorial alors, la réforme de 2010 !

Catherine MORIN-DESAILLY. – J’attire votre attention. Cela mérite un débat entre nous parce qu’un sondage a été réalisé lors des états généraux de la démocratie territoriale au Sénat. 11 000 élus y ont répondu. 50 % y

18 étaient favorables et 50 % défavorables. Cela veut donc dire que les avis sont extrêmement partagés et que cela mérite un vrai débat. en tout cas, la région doit avoir de vraies compétences. Ce n’est pas le cas du texte qui s’annonce. On nous annonce une régionalisation en trompe- l’œil. elle doit vraiment être responsable de l’aménagement stratégique du territoire en matière d’infrastructures physiques comme dématérialisées. elle doit également piloter ce qui relève de la formation qui conduit à l’em- ploi qui permet, ensuite, de mesurer la pertinence de l’employabilité sur le territoire. Cela questionne également le regroupement des lycées et des collèges. Il faut vraiment que la région ait des compétences effectives et que le chef de filât annoncé ne soit pas un chef de filât qui ne s’assume pas, qui ne cor- responde pas à de vraies compétences et à une vraie autonomie fiscale pour pouvoir les mener à bien.

Jean-Léonce DUPONT. – C’est un problème de conception. Je respecte évidemment tout à fait ce que dit Catherine, mais je ne le partage pas du tout. Nous n’avons pas – comme cela a été présenté –, trois doublons qui seraient les intercommunalités et les communes, le département et la région, l’État et l’union européenne. Nous avons deux triptyques : un trip- tyque commune, intercommunalité et département qui gère la proximité et la solidarité et nous devrions avoir un triptyque région, État, europe qui gère les orientations stratégiques, les grands investissements, les grands équi- pements. On se trompe. Faites une analyse de la fusion budgétaire des départements et des régions et vous m’expliquerez quelles sont les syner- gies réelles. Sur la problématique des deux métropoles, notamment de Seine- Maritime, je vous avertis, je vous mets en danger. Si votre idée est de construire deux métropoles, quid du territoire qui reste entre les deux ? et surtout, quid des compétences métropolitaines ? Si vous êtes dans la ges- tion de projets, il n’y a pas de problème. Si vous êtes dans l’intégration des

compétences « départementales », ce n’est pas un souci. Vous allez héri- Acte « III de la décentralisation » ter de toute la charge sociale. Or, ce n’est pas de là que vous tirerez les moyens de développer un territoire. À mon avis, la vraie question sur la métropole est de voir quelle compé- tence régionale est transférée car la question se pose beaucoup plus sur le développement économique et de projets. Si vous prenez le social, vous allez nous libérer d’une croissance de dépenses que nous avons bien du mal à contrôler. Réfléchissez bien à ce que seront les métropoles.

19 Perrine TARNEAUD. – Jean-Jacques Pignard, pour la région lyonnaise, comment vous situez-vous dans le débat entre Catherine Morin-Desailly et Jean-Léonce Dupont ?

Jean-Jacques PIGNARD. – C’est une boutade, mais cela me rappelle quelques bons souvenirs ici il y a deux ans au groupe, puisqu’à l’époque, j’étais dans cette maison. Pour faire clair, Jean-Léonce a voté contre la loi, Catherine s’est abstenue et, moi, j’ai voté pour. Nous pourrions refaire notre débat, mais je crois que ce serait un peu long. Je suis élu du Rhône, vice-président du Rhône. J’ai été maire d’une ville moyenne de 35 000 habitants pendant vingt ans, Villefranche-sur-Saône, et je suis encore vice-président du département. Cela dit, pour répondre à votre question. Je crois qu’il faut toujours partir du concret. Je vais prendre un exemple. J’ai un fils et une belle-fille qui ont des enfants. Ils ont été élevés, surtout mon fils, dans le bain de la politique et de la vie administrative. Nous bavardons et mon fils me dit : « Au fait, papa, je ne me souviens plus bien… pour l’aîné qui est à la crèche ». Je lui dis : « la crèche, c’est la ville de Lyon ». Il me dit : « je n’arrive pas à trou- ver une place à la crèche, je voudrais une assistance maternelle ». Je réponds : « là, c’est le département et c’est mon problème ». Mon fils adore le cinéma. Il me dit : « Tu t’occupes bien de l’institut Lumière ? ». Je dis : « oui, c’est le département » ; « et le festival lumières ? » : « Non, cela, c’est la communauté urbaine ». Ma belle-fille, qui aime la danse, me dit : « Vous vous occupez bien de la maison de la danse ? », « Oui, c’est le département » ; « Je voudrais voir un truc à la biennale », je lui dis : « non, ceci, c’est la com- munauté urbaine ». On pourrait continuer comme cela ! On parle du millefeuille administratif. Même les gens qui, théoriquement, par leur formation, leur éducation… ont du mal à comprendre. Alors, je me mets à la place de quelqu’un qui n’a pas cette « culture ». Pour en revenir au vrai débat que vous avez posé sur les triptyques, les diptyques, etc. Pendant 150 ans, nos Républiques mais pas seulement,

« Acte « III de la décentralisation » même les monarchies, l’empire, étaient sur un système ternaire. Tout le monde comprenait. Il y avait le maire. On le connaissait. On allait en toute simplicité le voir. Si on avait des problèmes, on savait qu’il était là. C’était cela la proximité. Il y avait le département qui, à l’époque, jouait un grand rôle. Le conseil général était une institution et on savait que c’était la structure intermédiaire, puis vous aviez l’État. C’était un rythme ternaire que tout le monde com- prenait. Pour faire simple, il y avait : le maire, le conseiller général, le dépu- té et le sénateur. ensuite, on a doublé ces trois points de base pour des raisons qui se jus-

20 tifiaient tout à fait. Tout d’abord, on a recréé la région en 1955 (cf. edgard Faure), avant qu’on lui donne la forme actuelle. Il y avait deux échelons intermédiaires. Puis est arrivée l’europe et tant mieux ! Il y a donc eu une sorte de deuxième échelon au plus haut niveau. Puis, on a créé l’intercom- munalité et on est passé de trois à six. Honnêtement, six, c’est trop ! Les gens se font à un rythme ternaire. Après tout, c’est celui de la valse, mais la valse à six temps est plus difficile à danser que la valse à trois temps, dirait Jacques Brel. Il y a donc un vrai problème comme pour les départements et les régions. Nous n’étions pas d’accord dans nos votes sur le conseiller territorial. en clair, pourquoi étais-je pour le conseiller territorial ? Parce que je pense que ce qui bloque d’abord, ce sont les hommes ou les femmes : on ne suppri- me pas un poste parce que c’est celui d’un copain. Par exemple, lorsque j’ai été élu maire, il y avait une SeM pour la ville, il y avait une SeM pour la communauté. La ville comptait 35 000 habitants, la communauté 70 000. Il y avait bien sûr deux présidents de SeM, un pour la ville et un pour la communauté. J’ai essayé pendant mon premier mandat de dire cela irait mieux de ne faire qu’une seule SeM. Pas question parce qu’il y avait deux présidents. Au deuxième mandat, j’ai pris les choses en main, je me suis fait élire président des deux SeM et, une fois que j’ai été président des deux, je n’en ai fait qu’une. Pourquoi étais-je pour le conseiller territorial ? Ce qui bloque, c’est que les conseillers régionaux ne veulent pas disparaître ni les conseillers généraux. Si, au bout de 10/15 ans, la même personne avait été dans les deux col- lectivités, le problème se serait peut-être réglé. De cela, on peut toujours débattre ! La question de fond, et Catherine l’a dit au sujet des régions, est qu’il faut bien voir qu’à l’origine le département est un organe de centralisation car la France a d’abord été fondée par les provinces. Des provinces qui ont fait la France : la Bourgogne, la Normandie, l’Auvergne, etc. La Révolution a cassé ces provinces et même leur nom. On a créé 83

départements puis d’autres avec la règle de Talleyrand. On coupait des Acte « III de la décentralisation » petits carrés... pour qu’il n’y ait aucune culture de base, etc. D’ailleurs, on s’est bien gardé de reprendre des noms de province. On leur a donné des noms les plus neutres possibles, des noms de rivière : Haute-Saône, Saône-et-Loire, Loir-et-Cher, Loire-Atlantique ou des noms de montagnes : Basses-Pyrénées, Hautes-Pyrénées, Hautes et Basses-Alpes. C’était le meilleur moyen pour l’État de gommer tout ce qui pouvait avoir une culture locale et de faire des circonscriptions qui, certes, avaient un conseiller régional, mais très vite, Napoléon a mis les choses au point. Il a mis un pré- fet et le problème était réglé.

21 Très curieusement, le département, c’était l’anti-décentralisation. Cela a été au contraire ce qui, pour la République naissante, a permis d’asseoir l’État central. La région s’est faite dans l’autre sens car, lorsqu’ont été créées les régions au milieu des années 1950, appelées les régions de programme, les IGAMeS, on leur a donné curieusement des noms de province : Auvergne, Bourgogne, Alsace, etc. Pour aller dans ton sens, Jean-Léonce, c’est vrai que l’Auvergne est plus petite, avec quatre départements ; l’Aquitaine et le Languedoc-Roussillon en ont cinq. Les seules régions, grandes en termes de départements, les huit à dix, n’ont pas de nom de province. que signifie Midi-Pyrénées ? Il y a une notion géographique et une notion de montagne. Ma région, c’est Rhône-Alpes. Ce sont des régions qui pourraient s’apparenter à de grandes régions comme tu les souhaites mais qui n’auraient plus, alors, la petite cul- ture locale. S’agissant du grand débat département/région, j’ai bien entendu et je connais ta position Jean-Léonce depuis assez longtemps et je connais celle de Catherine. Il y a tout de même une réflexion à avoir. qu’est-ce qu’un département aujourd’hui ? J’ai 20 ans d’expérience et, parfois, je me pose la question de l’autonomie réelle d’un département dans la mesure où les quatre dépenses principales que nous avons aujourd’hui portent dans des domaines sur lesquels les élus n’ont aucune prise. Faut-il un choix politique pour payer pour les problèmes liés aux per- sonnes âgées ?! On est obligé de payer et, comme il y a de plus en plus de personnes âgées – et c’est tant mieux – on paie de plus en plus. Le RSA, a-t-on un choix politique ? Il est très limité. que fait-on ? On paie. Dans le département du Rhône, aujourd’hui, on est à 5 M€ de plus par mois de RSA. Cela signifie qu’à la fin de l’année on sera pratiquement à 50 M€ de plus. A-t-on un choix politique ? Aucun. Pour ce qui est du problème des personnes handicapées, on a le choix de ne pas ouvrir de places, je vous l’accorde, mais si l’on veut essayer d’avoir une

« Acte « III de la décentralisation » politique, on est pris aussi et on continuera avec la politique pour l’enfance. Pourquoi je m’interroge…? À terme, on pourrait régler le problème en sup- primant la compétence générale au département pour les secteurs culture, sports, etc., mais cela veut dire qu’aujourd’hui 70 % des dépenses des départements ne sont plus appréhendés par les élus et ne relèvent pas d’un choix politique. C’est un élément que je voulais apporter à la réflexion.

Frédéric LETURQUE. – Je vais vous livrer mon expérience de maire depuis deux ans, mon expérience de vice-président de communauté urbai- ne depuis douze ans, d’adjoint au maire pendant 10 ans et de conseilleur

22 régional pendant un mandat. J’ai 44 ans. Je n’ai pas la prétention de connaître complètement la manière d’organiser l’architecture de la France, en tout cas, j’ai plusieurs convictions mais pas de certitudes. Je pense que c’est le débat qui doit vraiment per- mettre de construire progressivement les choses. Il ne faut surtout pas se précipiter parce que lorsque Napoléon ou d’autres ont planté le décor, ils ne l’ont pas fait pour 10 ans. On voit d’ailleurs que nous en sommes encore les héritiers. Contrairement à ce que vous avez exprimé, je pense que les régions sont trop petites. Si l’on regarde l’organisation des régions européennes, je considère que le découpage, qui a été fait pour essayer de donner à la représentation européenne des représentants du pays sur la base des grandes régions est plutôt intéressant. S’il y avait une chose dont j’aimerais que l’on puisse discuter, ce serait de l’évolution des grandes régions françaises en grandes régions de dimension européenne, c’est-à-dire que la région Nord-Pas-de-Calais à laquelle j’ap- partiens irait de Dunkerque au Havre. Cela réglerait peut-être d’ailleurs les points de vue autour du canal Seine-Nord, par exemple. Où l’on sent bien une pression du lobbying exercé par des élus du secteur du Havre ou des élus du secteur de Rouen dont certains sont au gouvernement et d’autres l’ont été à une autre époque et qui, finalement, font pression pour que des projets n’avancent pas. Au moins, les projets d’intérêts généraux seraient posés de manière sérieuse et on ne dépenserait pas un milliard pour rien. De plus, je pense que les départements et les régions tels qu’ils sont ont vécu. Je trouve que l’expérience de l’Alsace ou celle de Lyon sont deux expériences autour desquelles il faut tirer bonne leçon et à partir desquelles il faut réfléchir en osant même dire qu’il n’y a peut-être pas de schéma par- fait reproductible de manière systématique sur toute la France. Nous avons en fait des territoires différents, peuplés de manière différente. Aujourd’hui, il faut peut-être se poser intelligemment la manière pragma- tique dont il faut gouverner ces territoires.

quand je vois le département du Pas-de-Calais, 1 million et demi d’habi- Acte « III de la décentralisation » tants, la région Nord-Pas-de-Calais, 4 millions et demi d’habitants, il y a un grand écart entre ma région et d’autres beaucoup plus petites comme cer- tains départements. On ne raisonne pas de la même manière et quand on a, comme en région Nord-Pas-de-Calais, la ville d’Arras (43 500 habitants) ou la ville de Calais (70 000 habitants) ou la ville de Boulogne (45 000 habi- tants), ce sont véritablement des villes, pas des bourgs qui s’inventent en villes et qui deviennent des cœurs de département. quand on regarde un peu l’organisation de certains départements, on est un peu surpris, quand je discute avec des préfets ou sous-préfets, de l’im-

23 portance accordée parce que l’on défend la proximité, mais on ne se rend pas compte que la facture est élevée. Je pense qu’il faut que l’on ait un raisonnement à la fois sur le principe de grandes régions et sur celui d’une organisation adaptée à la masse de population qui occupe certains départements, certains territoires. Je suis en revanche intimement convaincu de l’importance du rôle et de l’avenir du mandat de maire, pas parce que je suis maire – je le pensais déjà avant –. Pourquoi suis-je convaincu de l’importance de son rôle ? Parce que la vie est de plus en plus complexe. Les citoyens sont perdus et comme certains le pensent, l’évolution de notre société, la modernisation vont aller en s’accélérant. Je le vois dans la manière dont on est amené en tant que maire à gérer les affaires publiques. On se rend compte que le citoyen a peu de balises autour desquelles la politique et les institutions représentent encore quelque chose. Je ne parle pas des balises Argos qui sonnent fortement en ce moment pour des élus en perdition. Je parle plutôt des repères qui doivent permettre aux citoyens de se situer. Très franchement, la commune est la porte d’entrée vers laquelle les citoyens viennent naturellement pour poser un certain nombre de problé- matiques. Je suis favorable au regroupement de communes, au fait que certaines fusions de communes s’organisent, mais je pense que cela doit se faire non pas dans un cadre forcé mais volontaire. quand on libérera notre organisa- tion et que l’on fera un peu plus confiance à l’ingéniosité des territoires, quand on libérera un peu l’autorisation que l’on peut avoir à l’échelle des ter- ritoires de proposer au niveau national un schéma d’organisation qui serait validé, mais qui nous permettrait de faire avancer correctement nos sec- teurs, je pense que l’on gagnera en efficacité. Cela veut donc dire qu’il faut accepter des organisations différentes et – à un moment donné tout de même –, une structure d’État très forte et très renforcée. Pour finir, je pense que le sens des intercommunalités et des communes

« Acte « III de la décentralisation » est en marche. L’idée des métropoles qui a été posée à une certaine époque me semble être plutôt une bonne chose, à condition que la couche supplémentaire qui vient se placer soit posée dans le cadre de ma réflexion précédente, car si l’on autorise des métropoles, si l’on garde des pays, si l’on préserve les communes, que l’on défende le département et que l’on dise que les régions ont de l’importance, on ne change rien. Il faut donc donner de la liberté d’invention et d’ingéniosité aux territoires à condition qu’elle s’organise dans un principe de simplification. Je prends l’exemple de mon territoire : la ville d’Arras (43 500 habitants), la communauté urbaine d’Arras (100 000 habitants), la métropole autour de

24 laquelle nous travaillons qui regrouperait les territoires de Lens, Béthune, Douai et Arras (un million d’habitants). quand vous devez travailler sur le poids à apporter à un projet tel que le canal Seine-Nord ou quand vous défendez une gare TGV dans l’une ou l’autre de ces villes, vous travaillez sur l’aménagement du territoire. quand s’installe le Louvre à Lens, ce n’est pas le Louvre à Lens pour Lens. C’est plus important, c’est le Louvre pour un territoire. quand vous défendez l’implantation d’une entreprise, vous la défendez dans un territoire beaucoup plus important. quand vous rencontrez le patron de la SNCF, on ne se regarde pas, lui de haut et moi avec mes 43 500 habitants. On discute en ayant à défendre un certain nombre de réalités qui pèsent un peu plus fortement. Pour conclure, premièrement, travaillons sur une régionalisation vraiment affirmée de notre pays. Deuxièmement, faisons confiance aux territoires, aux élus, y compris sur la manière dont l’imposition doit être pour une par- tie libérée afin de pouvoir être dans une dynamique de construction. Troisièmement, préservons un point de repère, une balise forte pour les citoyens, la commune qui me semble être la porte d’entrée, celle qui repré- sente encore quelque chose d’utile pour eux.

Philippe AUGIER. – J’ai beaucoup aimé le rappel historique de Jean- Jacques Pignard qui éclaire aujourd’hui ces différences que l’on sent dans la conception même – sur cela, je partage l’avis de Jean-Léonce – c’est une conception de la politique. Car ces vieilles régions, ces vieilles provinces étaient organisées autour de fiefs. Il y a les politiques qui veulent que cela bouge -on a entendu quelques engagements -, et ceux qui ont envie que le département reste le point majeur et ceux qui sont restés dans une menta- lité de fief, de féodalité. Je dirais « réac ». en Basse-Normandie, on a une très grande notion de fief. C’est aussi vrai en Haute-Normandie.

Perrine TARNEAUD. – Peut-être pas qu’en Normandie. « Acte « III de la décentralisation » Philippe AUGIER. – Parce qu’il y a eu, et de manière relativement conti- nue, de grands hommes politiques qui ont cultivé leur fief. Aujourd’hui, on a l’impression que les choses vont éclater et donc échapper.

Perrine TARNEAUD. – C’est moins le cas aujourd’hui. Ces grands barons locaux sont en train de disparaitre même s’ils existent encore !

Philippe AUGIER. – Les plus départementalistes sont souvent ceux qui assurent la suite dans cette fonction.

25 Catherine a raison, aujourd’hui, les frontières explosent dans tous les sens, les frontières de l’économie, les frontières des technologies, tout explose. Les territoires doivent s’organiser autour de ces réalités. Le poids social réduit la marge de manœuvre des conseils généraux à epsilon. Jean- Léonce ne peut disconvenir de cela car chaque fois que l’on va le voir pour trouver le financement d’un projet, il nous dit qu’il n’a plus d’argent. Pourquoi ? Parce que le social pèse trop. Il n’a pas de marge de manœuvre. Je crois que l’on doit s’organiser autour des réalités. Ce constat du poids social dans les conseils généraux est une réalité. Les frontières de l’économie explosent. Catherine faisait référence à un pôle métropolitain que l’on est en train de construire autour du Havre. Ce pôle métropolitain déborde sur le Calvados de manière évidente puisque l’on est autour d’un estuaire et que cet estuaire a deux rives et que cela commu- nique surtout depuis qu’il y a un pont. Auparavant, la Seine était une vraie frontière. Aujourd’hui qu’il y a un pont, il n’y a plus de frontière. D’ailleurs, le monde économique montre le chemin puisque les chambres de commerce ont fait leur propre révolution et, chez nous, la révolution des chambres de commerce normandes va jusqu’à la fusion des deux chambres régionales. C’est acté pour 2015 elles ont commencé à travailler ensemble.

Perrine TARNEAUD. – Donc la réunification de la Normandie est en marche.

Philippe AUGIER. – Oui, bien sûr ! une fois de plus, c’est l’économie, ce sont les mouvements sociaux naturels qui montrent le chemin. et le poli- tique court derrière et ne comprend pas toujours ce qui se passe.

Perrine TARNEAUD. – La réponse sans doute de Jean-Léonce Dupont. Êtes-vous un « réac » ?

Jean-Léonce DUPONT. – J’ai bien compris que j’étais soit un révolution-

« Acte « III de la décentralisation » naire, soit un réactionnaire. Philippe est bientôt un ami de 30 ans. Sincèrement, je pense plutôt être dans la dynamique. Ce que je vous ai dit à propos des niveaux communal et intercommunal, est que nous n’avons pas le courage d’aller jusqu’au bout. quand le président Sarkozy nous disait : « les territoires ont augmenté le nombre de personnel et ont plus que com- pensé les diminutions des effectifs de l’etat », il avait raison. Simplement, on s’aperçoit que les dizaines de milliers de fonctionnaires supplémentaires embauchés tous les ans l’étaient fondamentalement aux échelons commu- nal et intercommunal. Si nous n’avons pas le courage de poser la question de ce qu’est la

26 mutualisation, de dire qu’il nous faut du temps – peut-être un ou deux man- dats –, pour arriver à ce que la cellule de base soit constituée d’un établis- sement public lui-même composé de l’équivalent de mairies d’arrondisse- ment ou de communes déléguées, dans lequel on a réellement transféré le mode de fonctionnement mutualisé, je vous assure que nous passerons à côté des vraie réformes. Concernant le département, ce n’est pas le département en tant que tel. Je ne sais pas d’ailleurs si je serai toujours à la tête d’un département. Ce n’est donc pas le problème. Ce n’est pas parce que je suis président de département que je défends les départements. La vraie question que je me pose est : comment, par rapport au phéno- mène de métropolisation, nous allons lutter réellement contre une fracture territoriale ? C’est-à-dire à quel niveau allons-nous trouver les moyens de faire en sorte qu’il n’y ait pas de fracture territoriale ? La métropolisation est en marche, elle est irrémédiable ! Si nous ne nous posons pas la question de cette péréquation, je vous promets que nous aurons de vrais problèmes ! La région. un mode de scrutin, ce n’est pas neutre. Il structure une vie politique. quand nous avons un mode de scrutin régional, un scrutin pro- portionnel, cela veut dire que toutes les têtes de liste, pour avoir le maxi- mum de voix, doivent être issues des pôles agglomérés là où il y a le plus de population. Comme ce sont les têtes de liste qui sont élues, on aboutit effectivement à une surreprésentation des agglomérations dans les conseils régionaux. Voyez le phénomène de métropolisation, le phénomène de surreprésen- tation des agglomérations dans la région. Si, demain, vous n’avez pas une structure que j’appelle département, qui peut évoluer – ce n’est pas le pro- blème –, mais qui organise un minimum de péréquation entre les territoires, vous aurez une vraie rupture territoriale.

Jean-Paul ALDUY. – Je trouve que l’on sous-estime dans cette discussion

deux innovations fondamentales qui sont en train de se mettre en place : le Acte « III de la décentralisation » grand Lyon et l’Alsace. Il y a là, les ferments d’une évolution qui va enfin trou- ver des solutions concrètes au problème du millefeuille qui nous préoccupe. J’étais sénateur à l’époque, j’ai voté la loi instaurant le conseiller territorial. J’ai été meurtri par le débat au Sénat, car d’une loi qui était une loi où l’on réduisait, petit à petit, tout le monde en voulait 15, 20, 30 et, à la fin, on a débouché sur 300 conseillers territoriaux, à Toulouse, je crois, etc. Ce n’est pas parce que l’on a été bête que l’idée était mauvaise. Les sénateurs ont été mauvais. A partir d’une idée très intéressante… je regrette… et j’en fai- sais partie…

27 Jean-Léonce DUPONT. – Ce n’est pas possible !

Jean-Paul ALDUY. – Les territoires ruraux étaient représentés avec le conseiller territorial, beaucoup plus qu’avec le système d’élection actuel des régions. On réglait le problème de la répartition sur les territoires et donc de la capacité de la région à traiter le problème de la fracture territoriale et, en même temps, comme au niveau des intercommunalités, on créait une ambiance qui faisait que, peu à peu, on éliminait les doublons, les opposi- tions. Je vis dans une région du sud Languedoc-Roussillon où, après l’épisode du proconsul de la Septimanie : Georges Frêche, décédé. On connaît pire que le proconsul, un jacobinisme régional épouvantable qui est d’ailleurs lié au système électoral dans lequel on se trouve. Le délégué territorial aurait changé le dispositif. Je demande donc que l’on réfléchisse à ce qui se passe au Grand Lyon. qu’est-ce que le Grand Lyon ? Je donne mon point de vue. Je suis très admiratif de ce qui est en train de se passer. On va enfin avoir un pilote dans l’avion qui aura des compétences d’État, y compris le Dalo, les pouvoirs de police, des maires, du préfet sur les IMR, l’insalubrité, l’hébergement d’ur- gence, le social du département. C’est vrai qu’il y a un petit conflit avec Jean-Jacques queyranne pour avoir aussi, dans le domaine de l’économie, un minimum de choses. Le département va rester en dehors du Grand Lyon. On voit bien que cela ne veut plus rien dire et que c’est au niveau régional que devra se traiter la fracture territoriale. Ce qui se passe au Grand Lyon est très intéressant. Ce qui me plaît dans le dispositif, c’est que l’on va être obligé de se poser la question sur les onze métropoles qui existent. Cela fera onze plus trois, soit quatorze. Il restera six ou sept communautés urbaines qui se demanderont ce qu’elles font là en tant que communautés urbaines et comme on va faire monter les compétences des communautés d’agglomération vers celles des communautés urbaines, on voit bien que l’exemple du Grand Lyon est en

« Acte « III de la décentralisation » train de tirer vers le haut tout le dispositif français. À partir de là, on peut avoir une vraie réponse au débat que nous avons.

Perrine TARNEAUD. – Jean-Paul Alduy, nous allons parler des métro- poles lors de la seconde table ronde.

François GODIN, Conseiller général du Jura. – Je voulais intervenir à propos de ce qu’a dit Frédéric Leturque sur le nombre de communes en France. 36 000 communes, il y en a certainement beaucoup trop. Je vou- drais savoir ce qui pourrait être utilisé pour les réduire. Je suis depuis 15 ans

28 conseiller général et je n’ai connu qu’une seule fusion sur 545 communes dans le Jura qui a permis à deux communes de se rapprocher. en quinze ans, c’est peu ! Si on incite les communes à se rapprocher, je crois que c’est inévitable, on ne verra plus de communes de 45 habitants. Dans mon département, la plus petite commune en a 9. Si l’on veut être efficace, réduire les dépenses, avoir des mutualisations, il faudrait peut-être déjà se pencher sur ce niveau historique. On ne va pas refaire l’histoire de France, mais je crois qu’il serait important de trouver, non seulement des mutualisations, mais aussi des synergies, car trop d’entre elles travaillent encore de manière isolée.

Frédéric LETURQUE. – Vous ne pouvez pas travailler sur la fusion de communes sans volonté. un mariage forcé ne fonctionne jamais. On a plein d’exemples. en revanche, il faut que la loi ou la dynamique telle que Jean- Paul la situe par rapport aux métropoles incite au débat. Les citoyens sont des gens responsables. On a trop l’habitude de penser pour eux. Il faut penser avec eux. Si l’on pose la problématique en France en prenant du temps, de l’organisation du pays et de son organisation admi- nistrative et représentative, je suis persuadé qu’il y aura des mouvements naturels de fusion avec une évolution d’organisation qui doit permettre, peut-être comme cela a été dit tout à l’heure, de garder un principe de com- mune supra-communal par rapport à ce que l’on connait aujourd’hui et peut- être de créer des « mairies de quartier » ou de territoire faisant que la porte d’entrée commune pour le citoyen reste physiquement claire, mais que l’or- ganisation et l’architecture se découpent différemment. Je pense qu’il faut vraiment faire confiance aux territoires. L’exemple que vous citez, je ne le connais absolument pas dans l’arrondissement d’Arras. en revanche, travailler avec 22 communes rurales qui ont entre 500 et 100 habitants, lorsque je vois la difficulté que nous avons eue à travailler à l’agrandissement de la communauté urbaine pour passer de 24 à 39 com- munes… Je ne suis pas président de communauté urbaine, mais j’ai dis à

mon collègue Philippe Rapeneau : grand bien te fasse de gérer cela ! Acte « III de la décentralisation » Si je dois « blablater » sur les réalités sociales du territoire intercommunal en réfléchissant à la hauteur de la commune de 500 habitants, je ne m’oc- cupe pas des gens qui « sont sur le carreau » et qui ont des difficultés sociales réelles. Le maire rural se dit : j’en ai deux sur ma commune, je vais m’en occuper. Tout va bien, vos problèmes sociaux, je m’en fiche. D’ailleurs, quand on regarde la réforme que le gouvernement a lancée sur l’intercommunalité ou sur le troisième acte de la décentralisation, quand on transforme une loi qui devrait être globale en trois, cela veut bien dire que l’on ne sait pas où l’on va. On a donc raison de débattre entre nous.

29 quand on voit les débats sur les commentaires, sur l’Alsace ou Lyon… je suis convaincu comme Jean-Paul que ce sont deux exemples à étudier avec beaucoup d’attention.

Ségolène MISSOFFE. – Je suis maire-adjointe à Boulogne-Billancourt et conseillère régionale d’Île-de-France. Je voudrais reprendre les propos de Mme Morin-Desailly. Les élus ne vont peut-être pas être contents, mais ne pourrait-on pas trouver un système pour que cela ne soit pas les seuls élus qui fassent cette réforme ? J’ai l’impression que l’on n’y arrivera jamais ! Comme vous dîtes, nous sommes tous convaincus que ce que nous faisons est formidable et que nous sommes irremplaçables ou presque.

Perrine TARNEAUD. – Il faut bien que cela passe par une loi, par le Parlement. Peut-être quand il y aura une limitation stricte des mandats !

Jean-Léonce DUPONT. – Il y a eu M. Attali. C’était la réponse.

Frédéric LETURQUE. – C’est ce que j’allais dire et regardez ce que l’on a fait. On ne regarde pas ce que propose M. Attali. On ne regarde pas non plus ce que propose M. Jospin. On voit beaucoup d’experts…

Philippe AUGIER. – Le rapport Mauroy est « tombé aux oubliettes ».

Perrine TARNEAUD. – Des avis d’experts existent.

Catherine MORIN-DESAILLY. – J’ai dit cela de manière volontairement provocatrice parce que je pense qu’il faut impliquer aussi les élus dans cette réflexion. Il faut qu’ils s’approprient, de par leur expérience, l’évolution des territoires. D’ailleurs, on le voit bien ici et là. Jean-Paul a évoqué le Grand Lyon, on a évoqué l’Alsace. Dans mon département, il y a l’exemple d’une commune nouvelle assez conséquente. Il faut regarder ces exemples pour

« Acte « III de la décentralisation » voir comment on avance.

Perrine TARNEAUD. – L’initiative vient plutôt du terrain, finalement ?

Catherine MORIN-DESAILLY. – Oui, mais elle doit être conjuguée avec des regards extérieurs. La commission Balladur avait apporté un certain nombre de réflexions que l’on a abandonnées. Je le regrette. un certain nombre d’initiatives issues de cette commission étaient intéressantes. Il est certain que nos mandats, malgré tout, nous lient fortement à notre réalité.

30 ment du pouvoir urbain par rapport au milieu rural. écrase- Il faut faire très attention. cet à et désespérance cette à rapport par conséquence en votes des vu a on pourtant, et, rurales zones des dans d’immigrés hordes de vu jamais n’a l’on que parce élections dernières aux votes de mouvements les ! urbain monde du vis-à-vis rural monde du jacquerie d’une veille la à peut-être est On péri-urbain. milieu un dans habitants 000 9 de commune personnellement. vinces et l’État. L’État jacobin est-il prêt à cette évolution ? Je ne le crois pas pro- les entre pouvoirs des répartition la dans différemment France la niser orga- faut il mais département le lâche On corollaire. le c’est ceci, car tain Servan- Jean-Jacques Schreiber au milieu des années 1970 ? Je n’en suis pas complètement cer- par prôné régional pouvoir ce vers aller à France en prêt vraiment est-on Mais l’État. qu’abandonnerait pouvoirs des partie de l’ensemble des pouvoirs actuels des régions, des départements et d’une d’organiser la France comme un État fédéral avec des régions qui disposent facement du département à condition d’aller beaucoup plus loin, c’est-à-dire tempsplein, donc accessible essentiellement aux fonctionnaires etretraités. cément des assemblées, Jean-François Copé l’avait dit. C’était un emploi à for- faisait l’on puisque système, le fonctionnarisait qui et lisible non teuse, et ritorial, je ne suis pas d’accord avec Normandie lui. C’était une pure absurdité, plus coû- la entre Limoges, de côté à ! Perpignan Couzeix habitants, 000 9 doit rester la cellule de base de l’organisation territoriale même s’il est sou- est s’il même territoriale l’organisation de base de cellule la rester doit haitable de diminuer le nombre de communes. de nombre le diminuer de haitable mettent de garder en partie une autonomie délibérante sur un petit territoi- petit un sur délibérante autonomie une partie en garder de mettent re et de regrouper des moyens de fonctionnement au niveau de la commu- la de niveau au fonctionnement de moyens des regrouper de et re ne la plus proche. On peut probablement diminuer d’un tiers, ou de presque la moitié, le nombre des communes en France si on développe le statut de statut le développe on si France en communes des nombre le moitié, la communes associées. Mais gardons bien la commune comme échelon de échelon comme commune la bien gardons Mais associées. communes base. A qui s’adressent nos concitoyens ? Vont-ils s’adresser à un vice-pré- sident d’ePCI, non. Ils ne savent même pas ce que veut dire ePCI. Ils vont Ils ePCI. dire veut que ce pas même savent ne Ils non. d’ePCI, sident s’adresser au maire, un adjoint ou un conseiller municipal qu’ils connais- qu’ils municipal conseiller un ou adjoint un maire, au s’adresser sent, qu’ils savent joindre. savent qu’ils sent, Cela correspond à une autre notion, la notion de proximité : la commune la : proximité de notion la notion, autre une à correspond Cela compris forcément pas n’a On écrasé. délaissé, sent se rural monde Le une dans suis Je communes. les sur porte sujet autre un sur réflexion Ma Cela avait tous ces inconvénients, mais je crois que l’on peut imaginer l’ef- Je me sens plus proche de Jean-Paul Alduy même si, sur le conseiller ter- GABOUTY.Jean-Marc une méthode peut être utilisée, ce sont les communes associées qui per- qui associées communes les sont ce utilisée, être peut méthode une La notion de proximité est essentielle dans la démocratie et l’intercommu- – Conseiller général et maire d’une commune de commune d’une maire et général Conseiller –

31 « Acte III de la décentralisation » nalité ; qu’elle soit communauté de communes, communauté d’aggloméra- tion ou, demain, métropole ne répond pas à ce besoin de proximité de nos concitoyens. La gestion. Je rappelle que l’intercommunalité a un mode de gestion et d’intégration dans la mutualisation tout de même très vicié puisqu’il ne fonc- tionnait qu’avec un système de carotte qui est le coefficient d’intégration fis- cale. Ainsi, les élus ont transféré des compétences, non pas pour être plus opérationnels, – ils ne le sont pas forcément plus –, mais uniquement pour augmenter la dotation d’État, la DGF bonifiée. Il faut réfléchir à cela mais gardons la proximité sinon je pense que nos concitoyens auront des réactions très fortes en la matière.

Perrine TARNEAUD. – Cette notion de proximité développée est partagée, notamment par Frédéric Leturque.

Catherine MORIN-DESAILLY. – Je voudrais dire un mot sur le conseiller territorial. Je suis conseillère régionale depuis 2010. que je sois dans l’op- position ne change rien à ce que je vais dire car je fais le même constat par rapport aux élus de la majorité. Nous sommes pratiquement occupés à ne rien faire. Je pense que si, à la faveur d’un scrutin qui re-territorialise notre représentation, et Jean-Léonce a raison de poser la question du scrutin de liste, nous étions un élu de ter- ritoire, identifié, je crois que je pourrais tout à fait assumer des missions élargies qui intégreraient les missions actuelles de proximité d’un département. Nous avons quatre à cinq séances plénières par an, une commission avant la séance plénière. Vous allez me dire : c’est peut-être aussi lié à la personnalité de notre président de région qui ne fait peut-être pas vivre la démocratie…

Perrine TARNEAUD. – Visiblement oui, d’après la salle.

« Acte « III de la décentralisation » Catherine MORIN-DESAILLY. – Je ne suis pas loin de penser que c’est partout pareil. Peut-être que les élus régionaux pourront en témoigner. Très honnêtement, le fait d’être indemnisée à ne rien faire je le vis un peu comme une forme de scandale. Oui, Jean-Léonce ! Il y a une vraie question à se poser sur la pertinence à regrouper les missions de territoire autour d’une réflexion sur l’articulation du couple département/région.

Karine RENOUIL. – Maire-adjointe à Nogent-sur-Marne (Val-de-Marne). Ce témoignage est fort et assez consternant. J’ai 45 ans. Je n’ai que cinq ans de politique derrière moi, je n’ai évidemment pas de certitudes et je suis

32 en train de construire mes convictions… Je retiens que le maire doit rester une balise. Je pense que beaucoup dans cette salle sont d’accord. Le maire est celui que l’on croise dans la rue, à qui on peut à peu près tout demander. Je suis d’accord qu’il faut augmenter les intercommunalités. Nous avons bénéficié de l’intérêt fiscal en créant une communauté d’agglomération avec le Perreux-sur-Marne. Nogent et le Perreux-sur-Marne ont trois DGS au lieu de deux. Je pense que cela représente un coût pour la collectivité. Certes, c’est rentable pour certains, mais pour la collectivité, c’est stupide. Faut-il nous forcer, ou pas, à faire de plus grandes intercommunalités ? Dans ce cas, alors qu’on avait le choix, on ne l’a pas fait. Peut-être qu’à un moment donné il faut y être forcé. Je retiens des propos de Catherine Morin-Desailly. Même si mes convic- tions ne sont pas encore complètement définies, je suis assez d’accord avec le fait qu’il nous faut de grandes régions. en europe, c’est ainsi que cela se passe. Je suis d’accord avec Jean-Léonce, il est important de faire attention à la fracture territoriale. Je ne suis pas d’accord avec Jean-Léonce, je pense que l’on peut y faire attention au niveau de la région, mais je suis d’accord pour continuer à discuter avec Jean-Léonce pour vraiment avoir des convic- tions. Je suis vraiment d’accord avec Jean-Jacques Pignard. Je pense que le conseiller territorial est la seule manière d’arriver à rassembler départe- ments et régions. Il y a des présidents de conseil général et des présidents de conseil régional. On ne peut pas demander à ces personnes de le faire. C’est quand même compliqué Jean-Léonce ! Sur un point que l’on n’a pas abordé celui du rapport hommes/femmes : dans la salle, nous sommes à peu près 50 % de femmes et 50 % d’hommes, c’est vraiment bien. en revanche, Jean-Léonce, combien y a-t- il de femmes dans ton conseil général ? Je pense 15 %, c’est énorme ! Chez Catherine Morin-Desailly, je pense que c’est 50/50, parce que c’est un

autre scrutin. Le conseil territorial aurait accordé 90/10. Acte « III de la décentralisation » quelle est la solution ? C’est une question que je vous pose à tous les quatre. Je sais que la solution proposée par les socialistes n’est pas la bonne, mais il faut tout de même en trouver une. Avez-vous des idées sur le sujet ?

Perrine TARNEAUD. – Il y a beaucoup de réactions.

Hubert de JENLIS. – Maire de Genlis, conseiller général à Amiens dans la Somme. Ce débat sur le conseiller territorial est passionnant. On a la

33 chance d’avoir des versions différentes. Il y a forcément du bon à retenir partout. Je suis assez d’accord avec Frédéric Leturque sur l’importance du maillon communal, de la proximité avec le maire, le fait qu’il soit parfaitement iden- tifié par la population. Je rejoins Jean-Léonce Dupont sur la notion de proximité de la commune, l’intercommunalité et le conseiller général. Je suis d’accord aussi avec vous sur le fait de dire qu’au conseil général, on a de moins en moins la possibi- lité d’agir. Dans la Somme, 60 % du budget du conseil général sont consa- crés au social. On subit, on n’est plus acteur. Maintenant, je trouve que l’on n’a pas assez insisté sur les clauses de compétence générale. Je suis conseiller général depuis deux ans. Je suis à mon compte dans le privé. Je trouve qu’il y a une gabegie des finances publiques notamment dans les collectivités territoriales. C’est peut-être mon côté pratico-pratique de chef d’entreprise qui me fait dire cela, mais si l’on avait vraiment des compétences affinées et précises, on n’aurait peut-être pas le problème que rencontrent votre fils et votre belle-fille Jean-Jacques Pignard, à savoir qui fait quoi et on n’aurait forcé- ment pas les mêmes problèmes de gabegie comme au temps où l’argent public abondait. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. On entend parler de sub- side du garrot dans les collectivités. Je suis toujours choqué de voir que l’on en vient à faire « un peu » de clientélisme en donnant des subventions par ci, des subventions par-là !

Perrine TARNEAUD. – J’entends « beaucoup » dans la salle.

Hubert de JENLIS. – J’essaie d’être un peu politiquement correct ! Cela ne fait que deux ans que je fais de la politique… j’apprends, comme Mme Karine Renouil. Je rejoins sa vision pragmatique. J’aimerais bien connaître votre position sur la clause de compétence générale qui, pour moi, est un « micmac » que j’ai du mal à saisir. « Acte « III de la décentralisation » Perrine TARNEAUD. – Nous le ferons en conclusion.

Emmanuel DEZELLUS. – Je suis né à Rouen en Haute-Normandie. J’ai commencé ma carrière à Caen en Basse-Normandie. J’ai travaillé avec Jean-Marc Gabouty, à Limoges. Je suis élu en Bourgogne dans une petite ville de 5 000 habitants. Je suis vice-président d’un ePCI qui fait de 10 000 à 20 000 habitants grâce à la réforme de 2010. Je ne suis pas excellent législateur comme vous tous. en tout cas, dans la réforme de 2010, on a réussi un compromis entre la réflexion du terrain

34 et -ce qui a été dit précédemment- sur le fait qu’il ne faut pas forcément que, seuls, les élus prennent les décisions. Nous, un peu par force, nous sommes passés de 10 000 à 20 000 habi- tants dans notre ePCI mais surtout, sachez, que nous sommes 52 com- munes. Les décisions, les compétences, nous sommes en train de travailler sur cela. Je pense que s’il n’y avait pas eu une intervention forte du législa- teur qui a probablement fait perdre les élections sénatoriales à , il faut avoir le courage de le dire, on n’en serait pas là, donc on avance. Bien sûr, on peut débattre, nous sommes centristes, mais la situation est inquiétante dans nos territoires ruraux. Au niveau du territoire, nous sommes en train de ne plus avoir d’économie, de ne plus avoir de moyens. Si l’on ne met pas en place une politique forte de l’aménagement du terri- toire, c’est-à-dire prendre une décision forte sur : que fait-on au niveau éco- nomique sur les territoires ?... Tout le monde a raison. Les raisonnements sont tous bons. J’ai été chef d’entreprise. quand on est chef d’entreprise, on dit toujours que la stratégie est celle que l’on décide et on la met en appli- cation. Mais à un moment donné, il faut arrêter de tourner en rond et prendre vraiment des décisions d’urgence.

Jean-François HAREL. – Élu à Villejuif, ville communiste depuis 1925 et, dans moins de 11 mois, on va libérer la ville grâce à l’uDI ! Je suis élu de l’opposition à l’agglomération : sept communes, 200 000 habitants. À Villejuif, 55 000 habitants. Ce que je viens de vivre il y a 48 heures, c’est l’application de la loi qui date d’il y a un ou deux ans qui va modifier le nombre d’élus à l’agglomération. L’agglomération, quand on est dans l’opposition, c’est juste une chambre d’enregistrement car tout se décide au bureau. Je n’entrerai pas dans le détail, mais je voudrais attirer votre attention sur le fait que l’on va passer de 56 élus à 68. en termes de responsabilités, élus, opposition comprise, 15 au maximum travaillent. Il y a donc un énorme gâchis.

Vous avez parlé de réforme sur le nombre d’élus à l’Assemblée et au Acte « III de la décentralisation » Sénat. quid des autres assemblées ? Cela commence à donner l’exemple d’une vraie concentration de gens qui travaillent. quand on vient du monde de l’entreprise, c’est impossible hormis à faire des sacrifices monstrueux. Nous sommes, majoritairement, gouvernés que par des gens qui sont des administratifs. Je n’entre pas dans le débat, il n’y a pas de polémique, c’est le résultat. qui doit décider ? Ce sont les élus du peuple, pas l’administra- tion. À l’arrivée, il faut que l’on soit moins nombreux dès le départ de la file d’attente de l’expérience pour avoir, après, des conséquences à tous les étages, mais c’est à nous de donner l’exemple au niveau local.

35 Une intervenante. – Je suis maire d’une petite commune rurale de 2 000 habitants et vice-présidente d’un ePCI. Je souscris tout à fait : le conseiller territorial était une étape vers la disparition du département et la fusion des deux instances. Cela mis à part, pour ce qui concerne la place réservée aux femmes. J’ai entendu Manuel Valls au congrès des maires au mois de novembre dire : on va passer au scrutin de liste dans les petites communes parce qu’il faut des femmes. Je vais faire partie maintenant des petites communes qui vont passer au scrutin de liste. quand j’entends cela, cela me fait dresser les cheveux sur la tête et ils sont longs ! Il faut des gens compétents, motivés. qu’est-ce qui empêche les femmes à se présenter ? une femme dans une commune rurale qui a un projet qui a envie de se présenter, personne ne l’empêche de monter une liste, d’être tête de liste et de se présenter. Je trouve cela antiféministe de mettre des quotas. Cela sous-entend que l’on n’est pas capable d’y arriver et cela me gêne vraiment !

Perrine TARNEAUD. – Merci à tous pour vos témoignages. Je vais demander aux quatre orateurs de conclure aux différentes réactions et témoignages que nous venons d’entendre.

Jean-Jacques PIGNARD. – Pour faire le lien avec la prochaine table ronde, je crois que nous sommes tous conscients qu’il faut une simplifica- tion. Tout le problème est de savoir comment. Les points de vue se justifient tous. Je crois qu’il faut être pragmatique. Je voudrais dire, par ce que je n’ai pas dit dans mon intervention, mais étant élu de Lyon, je ne peux quand même pas le taire. Je crois que ce que nous faisons à Lyon peut effectivement servir. Il faudra bien s’entendre sur le mot métropolisation car il y a les métropoles dont on a parlé. Mais ce qui va se passer à Lyon est carrément une nouvelle collectivité territoriale. Ce sera à la fois une ville, un département et une communauté. Il y a donc un

« Acte « III de la décentralisation » côté franc-tireur.

Philippe AUGIER. – Cela ne sera pas une nouvelle collectivité au sens de la Constitution.

Perrine TARNEAUD. – Nous allons en parler dans un instant.

Jean-Jacques PIGNARD. – Je fais ce lien car, encore une fois, je parle de pragmatisme sur les compétences générales. Je suis spécialisé dans le domaine de la culture. Dans une ville comme Lyon, il y a de grandes insti-

36 tutions internationales : un opéra national, la maison de la danse, le théâtre national populaire. Jusqu’à maintenant, les collectivités, c’était le mille- feuille. Il y avait l’État, la région, le département, la ville, parfois la commu- nauté. Pourquoi ? Parce que l’État a une vision très centralisatrice. quand on parle aujourd’hui, dans le domaine de la culture, des établissements nationaux, il y en a quatre à Paris et un à Strasbourg. Vous avez l’Odéon, la Colline, la Comédie française, Chaillot et Strasbourg. Tous les autres, qui se disent nationaux, je pense au TNP (Opéra national de Toulouse) sont payés par les collectivités locales. Il faut aussi que l’on soit clair sur cela. Pourquoi va-t-on tout de même faire un pas en avant à Lyon ? Parce que, pour financer ces gros équipements culturels, il y aura toujours les collecti- vités, mais qu’un seul interlocuteur avec l’État : la métropole.

Jean-Léonce DUPONT. – Je voudrais tout d’abord vous dire et constater que la famille centriste est sympa ! Il y a débat, tolérance et respect de l’autre. C’est vrai dans la salle, des sénateurs centristes et, plus générale- ment, de cette grande maison du Sénat où, objectivement, règne naturelle- ment le respect des opinions des gens ne partageant pas nos idées. La compétence générale est une vraie question. Nous aurons à nous la poser. Je reste convaincu pour l’instant que la commune doit garder cette compétence générale, mais dans le sens que j’indiquais, qui doit aller vers une mutualisation sur une période déterminée. Cela ne vous surprendra pas, je pense que le département, pour le moment, doit l’avoir. Je ne vous cite qu’un exemple : la tempête de 1999 dans mon département. quels sont les deux élus qui ont réagi et que l’on a contactés ? Le maire et le conseiller général ; parce qu’ils étaient identifiés et que l’on savait qu’ils avaient capa- cité à réagir ; donc compétences générales et compétences plus spéciali- sées pour la région. Autre chose que je voudrais dire à ceux qui rêvent de la fusion des régions et des départements. Je ne partage pas tout à fait leur avis. Rêvez ! Peut- être qu’un jour le rêve deviendra une réalité. Si vous devez aller jusque-là,

posez le problème du statut de la fonction publique territoriale car si vous Acte « III de la décentralisation » n’êtes qu’en addition des effectifs existants, vous m’expliquerez comment la région qui, aujourd’hui, n’a aucune marge ni liberté financière, les départe- ments qui sont de plus en plus contraints par la prise en charge locale de la solidarité nationale… Si vous n’avez pas capacité à agir sur la fonction publique territoriale, vous n’aurez aucune synergie dans le regroupement. Allez jusqu’au bout de votre raisonnement et ayez le courage de poser la question.

Perrine TARNEAUD. – Catherine Morin-Desailly est d’accord avec vous.

37 Catherine MORIN-DESAILLY. – Oui. Sur ce deuxième point, je ne peux qu’être d’accord avec Jean-Léonce, il faudra pousser jusqu’au bout le rai- sonnement. Mais pour rebondir sur ce que disait M. Dezellus, je pense que la crise des finances publiques que nous traversons qui est extrêmement grave va nous pousser à proposer enfin -en tout cas je l’espère-, une vraie réforme. Jean-Léonce, tu es un très bon gestionnaire de ton département. Dans d’autres départements, en tout cas le mien, il n’y a plus d’argent.

Jean-Léonce DUPONT. – Il y a aussi de mauvais gestionnaires de région.

Catherine MORIN-DESAILLY. – De toute manière, je pense que l’on sera amené à ce choix. Je voudrais juste attirer l’attention sur un point : le futur projet de loi nous amène à créer encore des strates supplémentaires.

Perrine TARNEAUD. – Les futurs projets de lois ?

Catherine MORIN-DESAILLY. – Oui, la loi tripartite. Le Haut conseil des territoires…

Jean-Léonce DUPONT. – Il paraît que c’est le Sénat… Non ?

Catherine MORIN-DESAILLY. – Oui, on le pensait. Les conférences territoriales de l’action publique… encore un lieu où l’on va débattre, s’organiser, etc. Je pense qu’il faut vraiment s’inscrire en faux contre ce qui se profile qui ne va rien simplifier du tout, bien au contraire, c’est ce qu’on lâche à chaque strate d’élu qui défend très bien sa corporation au niveau des associations pour pouvoir dire : les textes vont passer, en tout cas, on espère que cela ne préempte pas les élections municipales à venir. Voilà pourquoi on rejet- te les compétences derrière cela. Nous avions cette exigence de clarification des compétences en 2010

« Acte « III de la décentralisation » quand nous avons conclu la loi et que le gouvernement s’était engagé à ce qu’elles soient clarifiées. Je pense qu’elles doivent l’être au niveau du couple région/département quelle que soit l’évolution de ces deux dernières collectivités : soit la complémentarité soit la fusion.

Frédéric LETURQUE. – Premièrement, il s’agit surtout de combattre les projets de loi à la découpe. J’en appelle aux parlementaires. C’est vraiment indispensable et cela doit être dénoncé avec force. Deuxièmement, réfléchissons à cette question des grandes régions car je pense vraiment que l’on n’a pas le droit de regarder l’europe sans travailler

38 cette question. Je serais très heureux d’appartenir à la même région que vous car il y a beaucoup de Normands et de gens de cette partie sur la Seine. Troisièmement, pour les territoires, travaillons au sur mesure et n’imagi- nons pas de Bercy, du ministère de l’Intérieur, ou du haut de nos certitudes dans nos territoires respectifs parce que l’on pense que l’expérience, la vision et le vécu que l’on a sont plus importants que ceux du voisin et qu’ils doivent s’imposer à tout le territoire métropolitain…essayons de libérer un peu l’invention des territoires. quatrièmement, gardons et préservons la commune, quelle que soit l’ar- chitecture que nous construisons, quelle que soit la taille de la commune, ou l’invention de la coopération entre les communes. Je crois vraiment que c’est le repère du citoyen et que s’il y a bien une valeur à partir de laquelle on a le droit de travailler, c’est celle de la représentation nationale donc celle qui considère le citoyen dans ce qu’il est. Dernier point, puisque nous allons parler finance, utilisons peut-être un levier bonus-malus. Bonus pour ceux qui inventent, osent et réalisent des économies ; malus pour ceux qui n’inventent pas, qui sont conservateurs révolutionnaires ou révolutionnaires conservateurs et qui, finalement, peu- vent être un peu « rabotés » dans leur dotation générale. « Acte « III de la décentralisation »

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