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CHANSONS DE BÉRANGKR

LE MÉNÉTRIER DE Le Bailliage de Meudon Des mêmes auteurs : Images de Vénerie le Vignoble La Pierre de Clamart Edmond et Louis Bouchery

Le Bailliage de

Meudon

Chaville - Clamart - Meudon Vélizy -

MCMLXXXV Q Edmond Bouchery 1985. Avec des dessins originaux de Suzanne Giry-Gouret Présidente d'honneur de la Société des Amis de Meudon.

Prologue 1704: Depuis vingt ans, Versailles, où siègent à la fois le Roi, le Gouvernement et la Cour, est la véritable capitale. Pour apprivoiser les grands vassaux, qui, au cours des règnes précédents, ne songeaient qu'à en découdre, Louis XIV a imaginé d'inciter la noblesse de et de Navarre à paraître à la Cour, voire à solliciter des offices - trop souvent dérisoires. L'opulente constellation de châteaux qui ponc- tue la campagne de l'Ile-de-France, y compris des secteurs que nous jugeons défavorisés - je songe au charmant Livry-Gargan, où se plaisait tant Madame de Sévigné - reçoit donc, au moins pendant une partie de l'année, les seigneurs « montés » de leur lointaine province. Mais il est évident que les proches de la famille royale et que les hauts dignitaires du régime s'installent dans les environs immédiats de Versailles. C'est ainsi que nous trouvons les Orléans à Saint-Cloud, les Conti à Issy, les Condé à , les Colbert à Sceaux. Quant à l'héritier du trône, le Grand Dauphin, il habite le château Renaissance de Meudon, le «Château-vieux», et se prépare, sur les instances du Roi son père, à faire bâtir un «Château-neuf». Et voilà que l'on crée pour lui un bailliage de Meudon en prélevant quatre paroisses - - Meudon - Vélizy - Viroflay - sur le vaste bailliage de Versailles et en y adjoignant une paroisse - Clamart - prise sur la prévôté de . Rien, semble-t-il, n'imposait cette réformette administrative, si ce n'est sans doute le désir du Roi de placer un fonctionnaire royal dans l'orbite du Dauphin et, plus encore peut-être, le souci d'ajouter un lustre supplémentaire à cette résidence princière pour essayer de retenir davantage un caractère fantasque qui, s'il eût cédé à ses penchants, se fût enfui loin, bien loin de Versailles avec sa meute du cerf et sa meute du loup... Et cependant ce sont les membres d'une autre famille illustre, les Le Tellier, qui furent les véritables initiateurs, nous dirions aujourd'hui les promoteurs, du bailliage. Si nous consultons la monographie que l'abbé Dassé, curé de Chaville, consacra à sa commune dès 1897, nous lisons que le premier Michel Le Tellier, maître des comptes, se montra à Chaville en 1596 et mourut en 1608. Il se disait seigneur de Doisu: une rue de Doisu exista longtemps qui conduisait à une cour encombrée de bâtiments hétéroclites - les mauvaises langues disaient la cour des miracles - qui représentait l'emplacement de ce premier domaine familial. Apparurent ensuite Michel Le Tellier (1608-1617) et Michel Le Tellier (1617- 1685), chancelier de France. C'est l'âge d'or de Chaville. Le Chancelier achète des terres considérables, tant à Chaville, bien sûr, qu'à Viroflay et à Villacoublay. Il fait construire, vers 1660, le château de Chaville avec une munificence inouïe chantée par les poètes. Son mausolée de marbre se dresse toujours à Paris, dans l'église Saint-Gervais. Le Chancelier avait assuré à son fils, le célèbre Louvois, la charge de secrétaire d'État. Celui-ci, sur les conseils du Roi, acheta en 1678 la seigneurie de Meudon au marquis de Sablé, fils de Servien, qui s'était ruiné. Louvois mourut prématurément en 1691. Selon les vœux de la Chancelière, Louis XIV se rendit acquéreur de Chaville pour son fils «bien-aimé », puis il acheta Meudon, toujours au nom du Grand Dauphin. L'année 1695 marque donc la fin de la présence des Le Tellier, mais le futur bailliage avait été en quelque sorte unifié entre les mains de cette famille pendant deux décennies. Cette domination d'un siècle (1596-1695) des Le Tellier n'alla point sans difficultés: récriminations des habitants de Chaville au sujet des eaux, les Le Tellier désirant en conserver la plus grande partie pour leurs fontaines jaillissantes - la grande mode de l'époque; récriminations des habitants de Clamart, lorsque Louvois, parachevant l'oeuvre de Servien, engloba, dans les murs de son parc, les biens communaux, en supprimant du même coup les droits d'usage. Difficultés, courantes à l'époque, mais qui se retrouvèrent, un siècle plus tard, dans les cahiers des États Généraux. Détail «amusant»: lorsque ce fameux mur fut abattu par Louis XVI en 1780, de nouveaux problèmes se posèrent, à savoir les dégâts infligés aux cultures par les chasses continuelles entre le parc de Meudon et le buisson de Verrières. En dépit de :YI ; ! C � M !'.; 1 I, i il. :l", 'T.iK la.JLH Œ:H\\, cette animosité tenace, l'oubli et le temps aidant, il semble que, dans l'inconscient de la mémoire collective, revive, peu ou prou, le fait d'« appartenir à Monsieur de Louvois ». Toutes les communes du bailliage, sans exception, lui rendent un hommage public. A Chaville, fleurissent les noms de Louvois et de Le Tellier sur les plaques bleues municipales aux abords du quartier Saint-Paul, le château Saint-Paul, aujour- d'hui démoli, ayant représenté longtemps le troisième et ultime avatar du fastueux château des Le Tellier. Les Clamartois ont nommé abusivement manoir Louvois un bâtiment qui date, certes, de cette époque, mais qui n'appartint jamais à Louvois. Peut-être celui-ci fut-il un jour simplement invité en voisin, lors - c'est une hypothèse gratuite - d'une pendaison de crémaillère! L'avenue Louvois conduit de la gare des Invalides à Meudon vers le cœur du village. Les toutes nouvelles installations urbaines de Vélizy, y compris un abri-bus, ont adopté le nom de Louvois; quant à Viroflay, près du stade, se cache une minuscule rue Louvois qui bute, il est vrai, sur l'ancien mur du parc. Remarquons que le découpage arbitraire du bailliage constituait, en réalité, un ensemble très cohérent, parfaitement soudé par sa calotte forestière (devenue la forêt domaniale de Meudon - altitude 175 m.). Étagées jusqu'à mi-pente au nord du dispositif, les composantes du bailliage offraient d'indéniables similitudes: thalwegs, plus ou moins accusés (ru Marivel à Viroflay et Chaville, ru d'Arthelon à Meudon, ru de Clamart) - chapelets de châteaux et maisons bourgeoises - vieux quartiers tassés autour de l'église, à proximité de la nappe phréatique - secteurs réservés à la blanchisserie - exploitations souterraines. Quelques anomalies cependant: Vélizy, créé de toutes pièces pour remplacer le village d'Ursine détruit par les Le Tellier, occupait une situation de plateau; Meudon, seule des cinq paroisses, descendait jusqu'à la Seine - altitude 30 m. environ. La création des premiers départements (Seine - Seine-et-Oise) pas plus que la réforme récente (Hauts-de-Seine, Yvelines) ne respecta cette unité. Remarquons surtout - et nous touchons ici au pourquoi de ce livre - que les ancêtres d'Edmond et Louis Bouchery habitèrent, au cours des siècles, tantôt l'une, tantôt l'autre des paroisses de ce terroir privilégié. Ils citent souvent Louis Mathieu Molé qui, au travers de ses souvenirs meudonnais, décrit avec ferveur la nostalgie qui s'attache aux sites où vécurent ceux qui nous précédèrent. Aussi, nos deux frères tinrent-ils très jeunes à errer parmi les venelles, parmi les formes de carrières et les étendoirs, parmi les champs également, où peinèrent leurs « anciens » : vignerons à Fleury et à Clamart, cultivateurs à Meudon, fermiers à Chaville, blanchisseurs de linge au Bas-Chaville, nourrisseurs et grainetiers à Viroflay. Ainsi fixèrent-ils, sur la plaque photographique, des décors inchangés depuis des temps immémoriaux et aujourd'hui défigurés. A cette longue quête familiale s'ajoute d'ailleurs une quête personnelle, la forêt de Meudon ayant constitué, grandes vacances comprises, le seul dérivatif de leur existence d'écoliers. Que de fois ils foulèrent les cantons les plus secrets de leur chère forêt! Leurs randonnées aboutissaient généralement au site pittoresque, entre tous béni, de la Grange Dame Rose, où régnait effectivement la plus exquise sérénité... Mais cet ouvrage se veut un autre patronage, celui de Madame Roland qui nous décrit avec tant de détails et tant de charme la journée, vers 1780, d'une famille parisienne, venue par eau du Pont-Neuf au Bas-Meudon et pérégrinant sous les frondaisons et à travers les fermes au gré de sa fantaisie. Que de familles parisiennes imitèrent au XIXe et au XXe siècle - au moins jusqu'à la suppression des bateaux- mouches en 1937 - la famille Phlipon ! A l'heure où croulent les dernières guinguettes sous le poids des ans ou la pioche des démolisseurs, il était bon d'adresser une pensée à ces millions de Parisiens qui déferlèrent au Bas-Meudon, les jours de fête, pour s'égailler ensuite à travers le bailliage. L'ouvrage est divisé en chapitres très courts, étapes fugitives, souvent obsolètes d'un itinéraire sentimental. Les têtes de chapitres sont illustrées, en principe, d'une double série de documents. 1° - Une notice provenant d'un Dictionnaire Topographique des environs de Paris, répertoire non daté mais qui fut écrit, à coup sûr, eu égard à la publicité tapageuse en faveur du «dépeçage» de Bellevue, vers les années 1820-1825. 2° - Une photographie ou une gravure ayant pour but, non pas de relater l'histoire exhaustive des moyens de transport à travers les âges, mais, plus simplement, d'éveiller l'imagination du lecteur en lui montrant par l'image l'animation - toute relative alors - de nos voies de communication. Ajoutons à ce sujet, qu'en 1835, à l'apogée du service des diligences, celles-ci ne déservaient, en principe, ni Chaville ni Viroflay, sur la route Nationale de Paris à Versailles ; les diligences relayaient à Sèvres. Et notons pour terminer que la voie de communication la plus prestigieuse, la plus antique aussi, était la vieille route de Bretagne qui barrait le bailliage en dia- gonale du Bas-Meudon à Viroflay. Cette route - romaine, s'il vous plaît - présentait l'inconvénient, d'une part, de couper les acquisitions récentes du Chancelier et, d'autre part, de «piétiner les plates-bandes» prévues pour la décoration de Chaville. Deux déviations s'imposèrent donc: la première devint un tronçon de la route des Gardes; la seconde, notre R.N.10 de Paris à Versailles. Des vestiges de la voie romaine, fort apparents, existent encore en forêt sur plusieurs centaines de mètres. René Rousseau Président de l'Association d'histoire locale: «Les Amis de Bagneux» Reliure aux armes des Le Tellier.

Armoiries des Le Tellier : D'azur, à trois lézards d'argent, posés en pal, rangés en fasce, au chef cousu de gueules, chargé de trois étoiles d'or.

A cinq heures du matin, le dimanche, chacun était debout... Nous partions tous les trois; on allait s'embarquer au Pont-Royal, que je voyais de mes fenêtres, sur un petit batelet qui, dans le silence d'une navigation douce et rapide, nous conduisait aux rivages de Bellevue, non loin de la verrerie... Madame Roland Mémoires

Martin, ermite, puis évêque de Tours, par- courant au IVème siècle la Gaule de l'Occident et du Nord, agit en faveur de la concentration nationale. Édouard Herriot

Cette enseigne proclame, sur la façade d'un estaminet du Val, la persistance de l'amitié populaire. Et quel meilleur guide, en effet, pour entreprendre, avec les moyens de transport mis successivement au service des hommes, la tournée du bailliage ?

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