« L’Ombre De Votre Esperance »
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Université Sorbonne Paris Cité Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3 ED 267 Art et Média LIRA. Laboratoire International de Recherche en Art EA7343 THESE DE DOCTORAT ÉTUDES CINEMATOGRAPHIQUES ET AUDIOVISUELLES ANDREA PIERRON « L’OMBRE DE VOTRE ESPERANCE » REPÈRES POUR UNE HISTOIRE PLASTIQUE DES REVUES D’ARTISTES EXPÉRIMENTAUX AU XXE SIÈCLE Thèse dirigée par Nicole Brenez Soutenue le 26 septembre 2017 Jury : M. Antoine de Baecque, Professeur École Normale Supérieure Rue d’Ulm Mlle Nicole Brenez, Professeur Paris 3 Sorbonne-Nouvelle M. Joël Daire, Directeur du patrimoine, Cinémathèque française M. José Moure, Professeur Paris 1 Panthéon Sorbonne Mme Valentine Oncins, Professeur Université Jean Monnet de Saint-Etienne Résumé « L’Ombre de votre espérance » : Repères pour une histoire plastique des revues d’artistes expérimentaux au XXe siècle. Cette thèse de doctorat se consacre à l’analyse de périodiques créés au cours du XXe siècle par des cinéastes et des plasticiens à l’œuvre dans le champ des avant-gardes et du cinéma expérimental. Les revues forment des objets plastiques et spéculatifs, complexes et composites de par les relations qui se nouent entre le texte et l’image, les montages qui se créent et le défi que constitue la transposition des images filmiques. En quoi ces revues d’artistes témoignent-elles d’une recherche expérimentale ? Comment les revues d’artistes participent-elles à une histoire critique et plastique des formes cinématographiques ? L’étude tente de comprendre les manières originales dont les cinéastes et les plasticiens se saisissent des revues afin d’élaborer, défendre, documenter, objectiver et analyser certains paradigmes cinématographiques. À quels titres les revues deviennent-elles elles-mêmes des propositions expérimentales, des laboratoires de recherche sur les liens entre l’image et le texte ? Nous observerons comment, grâce à leurs propositions techniques, graphiques et visuelles propres, les revues exposent certains enjeux matériels, poétiques, plastiques et théoriques propres à l’image cinématographique, comment elles questionnent le regard. Les revues offrent des plateformes de diffusion et de dissémination esthétiques, servent à ouvrir des réseaux de circulation pour les idées, singulières ou collectives, des rédacteurs en chef. Comment accompagnent-elles leurs efforts dans la construction d’un milieu cinématographique alternatif ? Les revues Dada I de Tristan Tzara et Hans Arp (1916), Dada Sinn der Welt de John Heartfield et George Grosz (1921), Le Promenoir de Jean Epstein, Pierre Deval et Jean Lacroix (1921-1922), G. für elementare Geschaltung de Hans Richter (1923-1926), Close Up du groupe Pool composé de Kenneth Macpherson, Bryher et H.D. (1927-1933), Film Culture de Jonas Mekas (1955-1996) et Cantrill’s Filmnotes d’Arthur et Corinne Cantrill (1971-2000) forment le corpus de cette thèse qui vise à contribuer à une histoire plastique des publications expérimentales. Mots-clés : Revue, Cinéma d’avant-garde, Cinéma expérimental, Histoire plastique, Iconographie, Mise en page, Image, Texte, Reproduction, Montage 2 Abstract « Shadow of Hopes » : Landmarks For a Plastic History of Experimental Film Journals In the XXth Century. This PhD thesis focuses on analyzing periodicals created during the XXth Century by both visual artists and filmmakers operating in the realm of avantgardes and experimental cinema. The journals become plastic, conceptual, complex, and composite objects because of the interplay between text and image as well as the reproduction of images and realization of photomontages. How these artists’ journals show signs of an experimental approach ? How do artists’ journals contribute to the critical and plastic history of film ? The dissertation aims to understand the unique ways the visual artists and filmmakers make use of the journals to create, defend, document, visualize and analyze some cinematic paradigms. To what extent the journals become in turn experimental works about the relationships between text and image ? We will study how magazines exhibit various plastic, aesthetical, theoretical, and poetical dimensions at stake in the cinematic image, relying on specific technical, graphic and visual undertakings, and how they call into question the perception. Journals become instrumentalized in ensuring the movement of the editors’ ideas, either collective or indivuals. How do journals support the editors’ efforts in building an alternative cinema domain ? Dada I edited by Tristan Tzara and Hans Arp (1916), Dada Sinn der Welt by John Heartfield and George Grosz (1921), Le Promenoir by Jean Epstein, Pierre Deval and Jean Lacroix (1921-1922), G. für elementare Geschaltung by Hans Richter (1923-1926), Close Up by Kenneth Macpherson, Bryher and H.D. (1927-1933), Film Culture by Jonas Mekas (1955- 1996) and Cantrill’s Filmnotes by Arthur et Corinne Cantrill (1971-2000) form the corpus of this PhD thesis, which aims to contribute to a plastic history of experimental publications. Key words: Magazine, Avantgarde Cinema, Experimental Cinema, Plastic History, Iconography, Layout, Image, Text, Reproduction, Editing 3 Remerciements Je tiens tout d’abord à adresser mes remerciements les plus sincères à ma directrice de recherches, madame Nicole Brenez, qui encadre mes travaux depuis le master. C’est avec grand plaisir que je soutiens ma thèse sous sa direction aujourd’hui. Elle m’a suivi avec intérêt pendant ces quatre années et je lui suis tout particulièrement reconnaissante de m’avoir aidée à chaque étape de mon parcours universitaire. Je remercie Messieurs Antoine de Baeque, José Moure, Joël Daire et Madame Valentine Oncins d’avoir accepté de présider le jury de cette soutenance de thèse. Je souhaite également exprimer ma gratitude à Dominique Païni qui est à l’origine du sujet de cette recherche. Mes remerciements vont aux personnes qui ont rendu possible ce travail : Arthur et Corinne Cantrill, les ayants droits qui ont acceptés de me donner accès à de nombreuses archives, Messieurs Christophe Tzara et Eric de Bourbon Parme, les personnels des différentes archives fréquentées dont la patience et le travail ont été du plus grand secours, M. Christophe Bichon de Lightcone, M. Stephano Califano au MACRO de Rome, Mme Sophie Hébert de la Cinémathèque Française et Mme Nina Schönig du Bauhaus Archiv de Berlin. 4 « L’encre ne sera-t-elle que l’ombre de notre espérance ? » Jean-Luc Godard, Le Livre d’Image, 2017. 5 Introduction La littérature périodique dédiée à la cinématographie se décline entre les revues de variétés, institutionnelles, publiques et privées, académiques et plasticiennes. Objets culturels, celles-ci représentent des instances discursives à la fois textuelles et visuelles, des systèmes complexes et composites. Notre étude porte sur les revues créées par des cinéastes et plasticiens qui exposent des enjeux matériels, poétiques, plastiques et théoriques de l’image cinématographique et offrent des plateformes de diffusion et de dissémination esthétique. Problématique : plasticité, discursivité et historicité Dans les revues d’artistes, l’image filmique se comprend comme reproduction : un tirage mécanique d’un ou plusieurs photogrammes isolés. La reprographie dématérialise et réifie l’image, déplace la photochimie pelliculaire sur du papier. De quelles manières suite à la réification, l’enjeu de la transposition et de la transformation devient-il l’objection de l’image ? Dans quelles mesures la réification et l’objection recadrent et requalifient-elles l’objet cinématographique en tant que dispositif, matière et plastique spécialement spatio- temporelle ? Le photogramme reproduit se comprend comme une pause et un second degré de l’œuvre : un déplacement matériel, un second degré du mouvement, du montage et de l’inscription plastique. Tel que l’écrit la réalisatrice Maya Deren à l’intérieur de Cinématographie : l’usage créatif de la réalité (1960) si l’image cinématographique se montre comme image fixe : « Le photogramme figé devient un moment où le déroulement de l’animation est différé, mis en veilleuse, qui peut, selon la position contextuelle, soit transmettre un sentiment d’hésitation critique (comme dans le regard en arrière de la femme de Lot [Voir Genèse, 19, 26]), soit constituer un commentaire sur l’immobilité et le mouvement comme opposition entre la vie et la mort1. » L’image fixe porterait de même un regard rétrospectif. L’objectivaton de l’image pénètrerait ici à l’intérieur d’un nouveau processus où elle-même s’assujettit à une objectivation matérielle, sensible et intelligible, c’est-à-dire où la réification de papier autorise une étude matérielle, plastique, critique et/ou symbolique. Le cinéaste Stan Vanderbeek différencie objectivation et symbolisation dans Re : Look Computerized Graphics (1970) : 1 Maya Deren, Julie Beaulieu (trad.), Écrits sur l’art et le cinéma, Paris, Paris Expérimental, 2004, p.93. 6 « Objectiver quelque chose c’est le réaliser. Visualiser quelque chose c’est le symboliser2. » Par objectivation on comprend l’actualisation des paradigmes de l’objet et par symbolisation, la description de celui-ci. Quelles proportions d’objectivation et de symbolisation se rencontrent-elles ainsi ? Dans l’article « En gros plan » (1940)3 Serguei Eisenstein considère que l’étude du film par une revue correspond à un détail en gros plan des structures internes du montage. « Si… Un article ne glisse pas jusqu’à devenir simplement un synopsis, il peut réfléchir les pensées simulées par le spectateur sous l’immédiate impression de l’œuvre… C’est un