Dictionnaire Black Déjà paru dans la collection Dico Compil'

Dictionnaire du Fantastique, Alain Pozzuoli, Jean-Pierre Krémer

Dictionnaire Gay, Lionel Povert

@ Jacques Grancher, Éditeur, 1995, Paris ISBN : 2733904523 Christiane/ Passevant Larry Portis

Dictionnaire Black

Éditeur Michel Grancher

Directeur de collection Alain Pozzuoli

A C Q U E S &Nffl 98, rue de Vaugirard 75006 Paris

À Bruce, Jamie, Mydia, Randa, Rosalie, Nora et à tous ceux qui luttent pour un rapprochement des peuples et un monde sans discrimination.

PRÉFACE

"Afrovisions"

"Je suis invisible, tu comprends, simplement parce que les gens ne veulent pas me voir." Ralph Waldo Ellison, L'Homme invisible (1952). Avec son unique roman traduit mondialement après- guerre, Ellison, américain et noir natif d'Oklahoma, accédait à la visibilité totale et globale, bombardé porte-parole de la commu- nauté noire aux côtés de son ami, l'activiste Richard Wright. Voici le dictionnaire des idées et des personnalités noires relevant de la géographie triangulaire du TRAFIC. Bibliothèque de la mémoire noire, mais aussi photothèque des classiques contempo- rains qui font partie à juste titre de l'humanisme tout simplement, universalisme dans lequel l'Afrique et ses diasporisations figu- raient jusqu'ici le tam-tam, le tonneau vide. Autant aller droit au cœur du problème : la nécessité d'entretenir et de développer une mémoire afrocentriste en cette fin de siècle. Elle ne vaut une note de musique ou un cliché photo que si elle brise l'infini processus de dissolution inauguré par le TRAFIC en 1492. En ce sens, le verbe et l'image du LIVRE deviennent la TERRE commune d'un peuple arraché à sa mère, quelquefois honteux de sa famille ou - actuellement - génocidaire (Rwanda). Pour devenir visible au monde (historiquement, politiquement, scientifiquement, artisti- quement et économiquement, l'Afrocentriste se doit d'être (très) singulier et universel. Alors le dictionnaire des idées et du monde noir pourra faire partie de l'Encyclopédie qui ambitionne depuis le XVIIIème siècle européen de mettre en "lumières" la totalité et la globalité de l'Être Humain générique. En écrivant cette préface, le souvenir me revient de papa Gotté*, sierra léonais anglophone, qui débarqua chez nous à Douala dans les années 20 avec un appareil photo, une bagnole et un ballon de foot. Commence l'entrée dans la modernité du jeune Dibango par le biais d'un bel échange Sud-Sud, déjà ; une aventure qu'aujourd'hui le rappeur de base qualifierait d'Afrocentriste. Est-ce le cas seule- ment ? Ce livre est le lieu et l'opportunité pour donner un visage et une adresse à l'Être sans TERRE afin qu'il soit localisé dans le MONDE. Un homme visible enfin ! Rouge est le sang de tout homme. Manu Dibango et Blaise N'Djehoya

*Voir Trois kilos de café de Manu Dibango en collaboration avec Danielle Rouard, Lieu commun, 1989. INTRODUCTION

Symbole de l'inconnu et de l'insolite, la couleur noire fascine bien qu'elle soit très souvent associée au mal, à la perversité, à la fata- lité, au malheur, à la peur. Depuis des siècles, les rapports entre Noirs et Blancs présentent un caractère obsessionnel dans les pays occidentaux comme en Afrique et sur les continents américains. Avec le temps, les cli- vages culturels et politiques basés sur la couleur de la peau ris- quent de s'estomper, mais ils restent très forts dans un contexte d'hégémonie et de découverte relativement récente. L'objet de ce premier Dictionnaire Black est de susciter la curiosité et de facili- ter la découverte des cultures noires dans des sociétés à prédomi- nance blanche. En présentant l'itinéraire, l'œuvre, la création, l'expression d'intellectuels, d'artistes, de musiciens, de sportifs, de militants pour les droits des peuples, de scientifiques... nous espé- rons offrir des informations qui permettent d'aller à la rencontre des civilisations noires et de découvrir la richesse et la diversité de cette très large communauté. Il ne s'agit pas ici de jouer la note exotique, mais de tenter d'éclairer différemment des événements, des idéologies, des évolutions, des images, des sons, du folklore, toute une mouvance multiforme : le monde social et culturel dans lequel vivent et s'expriment les Africains et la diaspora africaine dans le monde. "Noir c'est noir. Il n'y a plus d'espoir", entendait-on dans les années 60, mais, un "Noir", c'est quoi ? La réponse est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît à première vue. Depuis le XVIème siècle où les premiers esclaves africains sont importés sur les deux continents américains, les cultures s'entremêlent et le phénomène de brassage s'amplifie. Ce qui est considéré comme appartenant à la culture noire est souvent une fusion d'éléments africains, euro- péens, amérindiens, etc. Dans le contexte actuel, malheureusement structuré au plan idéologique par des préjugés racistes, il nous semble donc important de souligner dans cet ouvrage l'influence considérable de la culture africaine sur la culture en général. Que le racisme prime toujours sur nos attitudes, il n'y a pas de doute. Ce qui amène à souligner la couleur ou la généalogie des personnes et à considérer toute personne ayant un ou des ancêtres noirs comme "noire", quelle que soit la pigmentation de sa peau. Qui dirait qu'Harry Belafonte ou Henri Salvador ne sont pas "noirs" ? C'est pourquoi le Dictionnaire Black s'inscrit dans l'air du temps, partie intégrante d'une longue évolution en cours et à l'encontre de tout racisme. Si de la peur de la différence et de la volonté de domination naît le racisme, de la rencontre historique des peuples différents de par leur couleur de peau et leur culture émergent les remises en ques- tion culturelles, les fusions artistiques et les brassages multieth- niques dont dépend et dépendra l'étonnante vitalité intellectuelle et artistique humaine. La culture noire transcende les événements politiques et les conflits sociaux. Notre objectif a été de montrer la richesse de l'apport artistique, intellectuel, sportif et scientifique des cultures et des civilisations noires... Une contribution unique et universelle. Nous espérons, avec ce premier Dictionnaire Black, jeter un peu de lumière sur un héritage universel aux multiples facettes. AVERTISSEMENT

Le lecteur de ces pages s'apercevra rapidement de la richesse et de la profondeur du monde black dans sa globalité. Trop vaste à cer- ner, il est difficile d'y inclure tous les aspects ou de citer tous les personnages dont l'influence est majeure sur les événements. Pour ces raisons, nous avons limité notre recherche aux aspects cultu- rels sans pour autant prétendre à une étude exhaustive. Les person- nalités strictement politiques en sont absentes alors que de grandes figures des luttes pour la liberté y figurent, Nelson Mandela, Jomo Kenyatta ou Malcolm X par exemple. Les discographies, bibliographies, filmographies sont sélectives. Les lecteurs désireux d'une information plus complète pourront se référer aux ouvrages signalés dans la bibliographie. Les renvois internes sont signalés par le signe*.

TRIBE CALLED matie blanche dans ce domaine, A QUEST établie en 1935 par le célèbre joueur de base-bail blanc Babe Ruth. Groupe de rap américain-africain formé vers 1990 à New York. La popularité du jeu fait que cette performance est un symbole aux Q-Tip, Phife, Ali Muhammad Sha- yeux de millions d'Américains, in- heed et Jarobi se distinguent par acceptable pour les racistes. Les ré- leur style, une fusion rap-jazz. Si le actions sont violentes et les me- "hip-hop est le nouveau jazz", A naces de mort déferlent ! Tribe Called Quest (une tribu nom- Hank Aaron déclarera bien des an- mée quête) est à l'avant-garde du mouvement. Plusieurs tournées en nées plus tard, à propos de son ex- Europe durant l'année 1994, l'une ploit : "Il fallait absolument que je avec De la Soul*, la seconde pen- batte ce record. Il fallait le faire dant l'été, Lolapallouza Tour. A Tri- pour Jackie [Robinson], pour mon be Called Quest revient à Paris fin peuple, moi-même et pour tous 1994 pour séduire avec son rap-soul- ceux qui m'ont traité de « nègre »." funk-jazz... Un coktail des genres. Discographie : 1990, People's Instinc- ABDUL-JABBAR Kareem tive Travels and the Paths of Rhythm ; 1991, Check the Rhime ; 1993, Jive ; Sportif américain-africain, né en 1947 à New York. 1994, Midnight Marauders (Jive/BMG). Lew Alcindor, devenu Kareem Ab- dul-Jabbar après sa conversion à AARON Hank l'Islam, est l'un des meilleurs bas- Sportif américain-africain, né en ketteurs mondiaux par son talent et 1934 à Mobile (Alabama). sa taille (2m 18). En 1986, pendant le match qui oppose son équipe des Si Jackie Robinson* est le premier Lakers de Los Angeles aux Golden joueur de base-bail black à entrer State Warriors, il dépasse la barre dans les grandes équipes (en 1947) mythique des 35 000 points. En 1968, jusqu'alors réservées exclusivement encore amateur, il a refusé d'aller aux aux Blancs, Hank Aaron est le plus Jeux de Mexico pour protester doué et le plus spectaculaire. contre le sort des Américains-Afri- Issu d'une famille modeste, son pè- cains. TI a été 6 fois champion de la re est ouvrier et sa mère domes- NBA (National Basketball Associa- tique, Hank Aaron ambitionne tion) aux États-Unis. d'être joueur professionnel depuis l'enfance, encouragé par l'exemple de Jackie Robinson. Son talent est ABDUL-MALIK Ahmed objet de controverse et, lorsqu'il bat le record du plus grand nombre Musicien américain-africain, né à de "home runs" (coup porté à la Brooklyn (New York) en 1927. balle permettant de marquer) en Instrumentaliste de jazz d'une vir- 1974, il brise le mythe de la supré- tuosité exceptionnelle, Ahmed Ab- dul-Malik est marqué par ses ori- Il étudie au Ghana dans l'école de gines soudanaises. musique fondée par Kwamé Nkru- Ce bassiste - qui maîtrise avec le mah* et, de retour au Nigéria en même brio le , le violon, le 1969, il forme son propre groupe, violoncelle, le et divers instru- Sweet Abby and the Tophitters. Son ments orientaux - incorpore des mu- style est une synthèse de high-life*, siques africaines et sud-américaines juju*, afro-beat* et de rock. dans ses premières compositions des En 1970, il crée un nouveau style, années 50. Il joue avec les grands adawa, qui signifie "être indépen- musiciens de jazz, Thelonious dant". En 1974, bien avant la Monk*, Art Blakey*, Randy Wes- vogue des musiques africaines, De- ton, et avec des artistes plus folk le Abiodun est une star et fait déjà comme la chanteuse Odetta*. C'est des tournées en Angleterre. Ses in- l'un des pionniers de la fusion de novations musicales ont valu à ce- genres musicaux d'inspiration afri- lui que l'on surnomme "/' amiral", caine et américaine-africaine. une place importante dans l'évolu- tion de la musique populaire afri- Discographie : 1958, Jazz Sahara (Ri- caine et internationale. verside) ; Sounds of Africa (New Jazz); 1963, Eastern Moods (Prestige) ; 1964, Discographie : 1981, Beginning of a Spellbound (Status). New Era ; 1982, E 0 Fura, 1 000 Miles; 1983, Ma Se'ke; 1985, Oro Ayo. ABENI Queen Salawa Chanteuse et compositeur africai- ABRAHAMS Peters ne, née au Nigéria en 1965. Écrivain africain, né en 1919 à Jo- Connue depuis l'âge de 8 ans, cette hannesburg (Afrique du Sud). enfant prodige chante en yoruban Considéré comme l'un des plus im- dans le style waka (voir musiques portants romanciers africains, Pe- africaines). Elle est accompagnée ters Abrahams sera d'abord marin par des talking drums, des percus- durant deux ans avant de s'installer sions et un chœur de chanteuses. en Angleterre après la Seconde Sa renommée dépasse largement les Guerre mondiale. frontières du Nigéria grâce à un sty- En 1942, il publie une première le percutant et des paroles incisives. nouvelle intitulée "Dark Testa- Discographie ; Ikilo, Leader ; 1982, ment". Membre du parti commu- Challenge Cup, Leader ; Adieu Alhaji niste anglais, il écrit pour son quoti- Haruna Ishola; 1984, Indian Waka. dien, The Daily Worker. En 1957, il s'installe à la Jamaïque, où il est journaliste de radio et de télévision. ABIODUN Dele Son roman, Mine Boy, narre les dé- Chanteur, compositeur et guitariste sillusions d'un provincial devenu mi- africain, né en 1955 à Bendel (Ni- neur à Johannesburg. Une analyse géria). aiguë de l'exploitation et du racisme. Bibliographie : 1945, Song of the City; (Bernard Collins, Donald Manning, 1948, Path of Thunder ; 1950, Wild Linford Manning), créée à la fin Conquest; 1956, A Wreath for Vdomo des années 60. (Une couronne pour Udomo), Mine Boy ; 1965, A Night of Their Own ; Ce groupe se situe à la jonction du 1966, This Island Now ; Rouge est le courant rock steady (voir reggae) et sang des Noirs. du mouvement rasta. Leurs plus grands succès, Satta Amassa Gana et Yis Mas Gan, sont interprétés en ABRAMS Muhal Richard langue (ancienne) amharique. Musicien et compositeur améri- Discographie: Forward on to Zion; cain-africain, né à Chicago en Arise. 1930. Plus connu des musiciens que du public, Muhal Richard Abram, dès ACE Johnny l'âge de 18 ans, accompagne les Chanteur américain-africain, né à plus grands musiciens - Miles Da- Memphis (Tennessee) en 1929, vis*, Sonny Rollins*, Dexter Gor- mort en 1954 à Houston (Texas). don*, etc. Son premier succès, My Song, per- Respecté pour son sérieux et sa met à ce grand talent du rhythm & modestie, il joue de plusieurs ins- blues de gagner une place hono- truments (piano, saxophone) et for- rable au hit-parade blanc en 1952. me en 1961 son orchestre, Experi- Star du rock and roll en 1955 avec mental Band, dans lequel de jeunes le classique Pledging my Love, sa jazzmen et non des moindres ont carrière fulgurante prend brutale- débuté. En 1976, il quitte Chicago ment fin, la nuit de Noël 1954. Ce pour s'installer à New York. soir-là, Johnny célébrait cette fête Discographie : 1967, Levels and De- dans sa loge... en jouant à la rou- grees of Light ; 1968, If It Were the lette russe ! Seasons ; 1969, Young at Heart, Wise in Time ; 1970, Things to Come from Discographie : Johnny Ace : Mémorial Those Now Gone ; 1974, Fanfare for . the Warriers ; 1975, Afrisong, Sight- song ; 1976, Duet; 1977, I-OQA+19, You Can't Name Your Own Tune ; ACHAC (Association 1978, Lifea Blinec, Sprial/Live at Mon- Connaissance de treux ; 1979, Spihumonesty ; 1980, l'Histoire de l'Afrique ; 1983, Rejoicing Contemporaine) With the Light; 1985, View From Wi- Fondée en 1990, l'ACHAC a pour thin ; 1986, , Colours in but de promouvoir la recherche sur Thirty-Third; 1990, H earinga Suite. l'Afrique et la connaissance du monde africain. À cette fin, l'asso- ciation inaugure en octobre 1993 ABYSSINIANS (The) l'exposition Images et Colonies au Formation de chanteurs jamaïcains Musée d'histoire contemporaine de Paris. Trente ans après les décoloni- Son œuvre a maintes fois été saluée sations, quelles représentations de et récompensée tant par les intellec- l'Afrique et des Africains les Occi- tuels et les universitaires anglais, dentaux ont-ils aujourd'hui ? Trois américains, canadiens et nigériens ans de recherche pour tenter de cer- que par un large public. ner la question fondamentale au- tour de laquelle tourne l'exposition Bibliographie : 1958, Things Fall itinérante et qui sera présentée au Apart ; No Longer at Ease ; Arrow of God; A Man of the People; Anthills of Sénégal, au Canada, en Belgique, the Savannah ; Beware Soul Brother ; au Mali, au Burkina Faso, au Por- 1988, Hopes and Impediments. tugal, en Italie, en Allemagne, à la Réunion, en Guyanne et dans quel- ques villes françaises. Outre l'orga- ADAMS George Rufus nisation de rencontres, de débats et Musicien américain-africain, né en de projections sur l'Afrique contem- poraine et la réalisation d'ouvrages 1940 à Covington (Géorgie). et de films sur la thématique colo- Ce musicien, et parfois chanteur, niale, l'association publie la revue interprète toute une gamme d'ar- Plein Sud traitant de l'Afrique du tistes aussi impressionnants que di- Nord, de l'Afrique noire et de Ma- versifiés : Howlin' Wolf*, Light- dagascar. nin' Hopkins*, Sam Cooke* et (Voir associations, page 495) Charlie Mingus*. Saxophoniste hors pair, virtuose de la flûte et de la clarinette, George ACHEBE Chinua Rufus Adams passe d'un genre à Écrivain et poète africain, né en l'autre avec brio, mais semble 1930 à Ogidi (Nigéria). mieux s'épanouir dans le jazz mo- derne de Charlie Mingus ou celui Après des études de médecine et de de Thelonious Monk*. littérature à l'Université d'Ibadan, ce grand intellectuel nigérien tra- Discographie : 1973, Mingus Moves ; vaille pour la radio nationale. En 1974, Mingus at Carnegie Hall; 1975, 1958, il publie son premier roman, Suite for Swingers ; 1979, Sound Sug- Things Fall Apart, dont le succès gestions, All that Funk; 1980, Hand to est international. Le roman est tra- Hand ; 1982, Melodic Excursions ; duit en trente langues différentes. 1983, Gentleman's Agreement; 1985, Live at Montmai-ti-e ; 1986, City Critique de la corruption sur le mo- Gates; 1990, America. de humoristique, il manie le para- doxe avec aisance. Il fait dire à l'un des personnages de son roman A ADAMS Johnny Man of the People (1966) : "Je di- rai que vous avez eu une belle mort Chanteur américain-africain, né en si votre vie a poussé quelqu'un à 1932 à la Nouvelle-Orléans (Loui- abattre votre assassin, sans deman- siane). der à être payé." Débutant dans le gospel* avant de se recycler dans le rhythm & blues, ley*, chef d'orchestre comme lui et le Tan Nightingale (le rossignol trompettiste de talent, il joue no- beige) sort son premier tube en tamment avec Lionel Hampton*, 1968 avec Release Me. Puis c'est Woody Herman et son frère. Reconsider Me et / Can't Be All Bad en 1969. Depuis, sa produc- Discographie : 1960, Work Song, That's Right ; 1968, The Scavenger ; tion se ralentit sans toutefois perdre Comin' out of the Shadows ; 1970, en qualité. Soul Zodiac; 1972, Soul of the Bible ; Discographie : 1978, Heart & Soul ; 1974, Double Exposure ; 1978, A Little New York Midtown Music ; 1983, On 1983, From The Heart1992, Sings Doc Pomus. the Move, Blue Autumn ; 1993, Talkin' About You.

ADDERLEY Cannonball ADE King Sunny Saxophoniste et compositeur amé- ricain-africain, né en 1928 à Tampa Chanteur, compositeur et guitariste (Floride), mort en 1975 à Gary (In- africain, né en 1946 à Oshogbo diana). (Nigéria). Un jazzman légendaire dont le ta- Fils d'un organiste liturgique, il joue dans des groupes de highlife* lent a permis de populariser le gen- avant de se tourner vers une mu- re. Ses orchestres visent un large auditoire et la sensibilisation d'un sique plus traditionnelle, le juju*. En 1966, il forme son propre or- très large public. chestre. Ses textes commentent les Toute la mystique de Cannonball problèmes sociaux et sa musique (boule de canon) réside dans la combinaison de son excellence est une synthèse originale de mu- sique africaine et occidentale. Un musicale, de sa sensibilité populai- re et de son sens commercial. Sa cocktail trépidant de rythmes et de collaboration avec John Coltrane* sons... une musique à danser ! a été fructueuse. Dans les années 70, il fait des tour- nées en Europe, aux États-Unis et Discographie : 1958, Somethin' Else ; au Japon et devient, dans les an- 1959, , In Chicago ; 1963, nées 80, l'un des maîtres de la ; 1967-1968, world music* et le roi incontesté du Accent on Africa; Why am I Treated so juju*. Bad! ; 1971, The Price You Got to Pay to be Free; 1990, In Japan. Discographie : 1967, Alanu Loluwa ; 1974, E Kilo F'Omo Ode ; 1976, The Late General Ramat Mohammed ; ADDERLEY Nat 1977, Synchro Chapter ; 1978, The Musicien et compositeur améri- Golden Mercury of Africa ; 1979, The Royal Sound ; 1981, The Message, cain-africain, né en 1931 à Tampa Sound d'Afrique ; 1982, JuJu Music ; (Floride). 1983, Synchro System, Vintage Sunny Frère cadet de Cannonball Adder- Ade; 1989, Live Live JuJu. ADEWALE Segun ekobaluka, lui vaut de recevoir, au Chanteur, compositeur et guitariste moment de l'indépendance, une africain, né en 1955 à Oshogo (Ni- mobylette. géria). Les années passent. Il joue dans les On peut aisément imaginer la Nganda (cabarets de quartier) et sombre peu à peu dans l'alcoolis- consternation de sa famille lorsque me. Il meurt dans la misère à la fin le fils prodige, membre de la dy- des années 70. nastie royale d'Ondo, quitte le ly- cée pour jouer la musique du peuple. Cependant tout s'arrange. AFFAIRE PÉLICAN (L') Ses compositions, basées sur des rythmes traditionnels africains et (The Pelican Brief) - 1993. Film occidentaux, touchent bientôt un d'Alan J. Pakula. public international. C'est un jeune USA - 2h20 - Couleurs. loup du juju* dont le style original, Scénario : Alan Pakula d'après le le yopop (fusion de juju tradition- roman de John Grisham. Image : nel, de jazz, d'afro-beat et de reg- Stephen Goldblatt. Son : James Sa- gae), pourrait bien détrôner celui de bat. Montage : Tom Rolf, Trudy ses aînés - King Sunny Ade*, Ebe- Ship. Décors : Philip Rosenberg nezer Obey* et Dele Abiodun*. Musique : James Homer. Avec : Julia Roberts, Denzel Wa- À partir de 1984, ses tournées l'im- shington, Sam Shepard, John Heard, posent en Grande-Bretagne. Tony Goldwing, Robert Culp, Hu- Discographie : 1973, Koghodopa Fin- me Cronyn. na-Finna ; 198 L Ope Ye Baba ; 1983, Endurance ; 1985, Play for Me. Deux juges de la Cour suprême des États-Unis sont successivement as- sassinés sans qu'il semble y avoir de liens entre les deux meurtres. ADOU-ELENGA Une étudiante en droit découvre Musicien africain, né au Zaïre dans par hasard la clé des motivations de les années 20. ces deux crimes : la corruption et Adou-Elenga, chanteur et joueur de une affaire politico-financière qui likembé (instrument traditionnel met en cause la Maison Blanche. composé de tiges métalliques), aura Sa découverte la fait devenir la de sérieux ennuis avec les autorités cible favorite de tueurs à gages, coloniales au moment de la lutte commandités par l'establishment pour l'indépendance. Ses textes politique. Un seul homme lui vien- sont jugés, avec raison, trop sub- dra en aide, un journaliste d'inves- versifs : "Tôt ou tard, les condi- tigation... black. tions de vie de notre peuple chan- Sur fond d'intrigue politico-policiè- geront..." Paroles sur toutes les re compliquée, le spectateur est un lèvres qui auront un écho considé- peu perdu entre les bons et les mé- rable auprès du peuple zaïrois. chants, le FBI et la CIA, bien que Son grand succès, Ata ndele mokili toujours tenu en haleine. Denzel Washington*, héros parfait, incarne désintégration de la communauté le journaliste intègre et sans re- noire aux États-Unis. Influencé par proche. Image positive, le chevalier l'exemple des Black Muslims*, change enfin de couleur. Cepen- Bambaataa encouragera la création dant, nul sentiment ne vient trou- de sections de l'organisation dans bler les rapports des deux héros. le monde entier. Une camaraderie froide avec un Au début des années 80, l'organisa- geste de tendresse final, après le tion compte des milliers d'adhé- suspens et les sueurs froides. rents. Mais devant la violence des rappeurs et les conditions insuppor- tables des ghettos, Bambaata est AFRICA BAMBAATAA parfois impuissant. Des groupes politisés comme Public Enemy* Rappeur, chanteur et organisateur trouvent des oreilles attentives avec social américain-africain, né en 1955 à New York. Fight the Power. En dépit des difficultés rencontrées Il grandit dans un ghetto noir et, au dans cette lutte contre la violence, milieu des années 70, est un Bambaataa et la Zulu Nation sont membre des Black Spades, gang notoire. La mort de son meilleur très importants dans la genèse de la culture hip-hop*. Un nouveau type ami, poignardé sous ses yeux, pro- d'identification sociale est né. voque chez lui une prise de conscience. Il décide de se consa- Ses activités et sa musique sont très crer à la recherche d'un autre pôle influentes sur l'évolution du rap, au d'attraction pour la jeunesse du point d'être un symbole historique ghetto, hormis la frime, la drogue pour le mouvement. En hommage, et la violence. l'auteur-rappeur des Jungle Bro- thers* adopte le nom d'Afrika Ba- En 1976, il fonde la Zulu Nation*, by Bambaataa. inspirée par un film sur les Zoulous en Afrique du Sud, et adopte un Bambaataa a enregistré des disques nouveau nom, Africa Bambaataa. avec James Brown*, John Lydon L'idée maîtresse de la Zulu Nation (Johnny Rotten des Sex Pistols), est d'utiliser les réseaux et les liens Yellowman et UB40. communautaires des gangs pour Discographie : Beware (The Funk is créer un autre état d'esprit chez les Everywhere) , Unity et Planet Rock jeunes, une forme alternative de so- (1982) (Tommy Boys Records) ; The lidarité. Light (EMI) ; Return to Planet Rock (Warlock). La fin du radicalisme politique des années 60 et la destruction sociale menée par la politique gouverne- AFRICAINE mentale a eu pour conséquence d'abandonner les Américains-Afri- D'AMÉRIQUE (U) cains défavorisés à leur triste sort. 1991 - Film de Diabi Lancine. Ce qui a contribué à accélérer la Côte d'Ivoire - 22 mn - Couleurs. Images : Lucien Brunel. Montage : theid*, l'ANC devient un mouve- Eric Brunel. Musique : Thierry De- ment de masse. Sous l'impulsion lone, Lamine Diabete. Production : de Mandela et Tambo, l'ANC se Ministère de la Coopération (Paris). radicalise et s'allie avec le parti Descendante des anciens esclaves communiste sud-africain. africains en Amérique, Sanou vit En 1960, après le massacre de ce passé comme une obsession. El- Sharpeville (21 mars 1960) et les le commet un crime et, après avoir grèves qui ont suivi, l'ANC est dé- purgé sa peine, se réfugie en clarée illégale et entre dans la clan- Afrique. Emprisonnée, elle attend destinité. En 1961, Nelson Mande- son extradition. C'est en détention la* et quelques autres membres de qu'elle s'éprend d'un homme et tous d'eux s'enfuient sur l'océan. l'ANC créent le groupe Umkhonto we Sizwe, chargé d'organiser la lut- Un court métrage tout en allégo- te armée contre le régime. Lutte ries. L'émancipation, le retour dou- meurtrière soutenue par les pays leureux aux sources et la fuite vers socialistes, les mouvements pro- une destination mythique. gressistes des pays occidentaux et la volonté inébranlable d'un peuple en butte aux humiliations et aux AFRICAN MUSIC brutalités du régime raciste de (voir Musiques africaines) l'apartheid. Après des décennies de combat à tous les niveaux, l'ANC participe à AFRICAN des négociations avec le gouverne- NATIONAL CONGRESS ment sud-africain blanc après la li- Organisation sud-africaine noire bération de Nelson Mandela. fondée en 1912 comme alternative Celles-ci ne mettront pas fin aux à l'Union of South Africa, créée en brutalités. En avril 1993, le sécré- 1910 et dominée par des Blancs. De taire général du parti communiste 1912 à 1923, l'organisation s'appel- sud-africain, Chris Hani, succes- le South African Native National seur présumé de Nelson Mandela, Congress, puis prend le nom d'Afi'i- jeune leader adoré par la popula- can National Congress (ANC). tion noire et respecté de tous, est Jusque dans les années 50, l'ANC, froidement abattu devant chez lui. très légaliste, regroupe les élites et L'ANC poursuit les négociations les notables noirs opposés à la poli- qui finalement débouchent sur un tique des dirigeants blancs. En 1943, accord fin 1993. Une constitution se forme en son sein une "Ligue est élaborée et des élections démo- des jeunes" de laquelle sortiront cratiques ont lieu en avril 1994. Nelson Mandela* et Oliver Tambo L'ANC devient le parti sud-africain pour rejoindre ensuite les instances majoritaire après sa victoire aux dirigeantes de l'ANC en 1949. Avec élections (62,6% des voix contre l'instauration du régime d'apar- 20,3% au parti national de Frederik de Klerk, 10,5% à l'Inkatha et AFROCENTRISME 6,6% divers) et Mandela le premier Courant de pensée qui valorise président noir d'Afrique du Sud. l'apport des Africains à l'évolution Une nouvelle ère s'ouvre pour tous des civilisations. L'afrocentrisme les Sud-Africains. Un avenir fait de prend son essor aux États-Unis promesses et d'incertitudes. dans les années 80, précédé par un mouvement né dans les universités Filmographie : Que le soleil se lève : ni les rois, ni les généraux, film de Mo- à la fin des années 60, revendiquant konenyana (1993 - Afrique du Sud - l'enseignement de l'histoire des 52mn - Couleurs) sur les années 80, Américains-Africains. Des centres période décisive pour l'ANC. Analyse de "black studies" sont alors créés, du mouvement de libération et de la partant de l'idée que l'histoire du mobilisation pour la résistance. peuple noir avait été jusqu'alors oc- cultée par le pouvoir blanc et ses institutions, les Européens ayant AFRIQUE toujours dominé les universités JE TE PLUMERAI comme le reste de la société. 1992 - Film documentaire de Jean- Constat d'un état de fait. Marie Teno. Au fur et à mesure de l'évolution Cameroun/France - lh28 - Couleurs. des recherches, la participation des Scénario : Jean-Marie Teno. Ima- Américains-Africains à la culture ges : Robert Dianoux. Montage : nord-américaine est confirmée. Chantal Rogeon. Musique : Ray Le- Force est de reconnaître que, sans ma*. Production : Films du Raphia. les Américains-Africains, les Amé- Trente années ont passé depuis ricains n'auraient rien de commun l'indépendance. La nouvelle gé- avec les Américains d'aujourd'hui. nération d'Africains refuse le par- Une remise en question de toute ti unique, la corruption, le népo- l'histoire de la civilisation occiden- tisme et la faillite économique qui tale ! en est la conséquence. Le passé L'image d'Africains sauvages et colonial et sa violence politique sans culture a vécu. Difficile d'im- expliquent cependant le présent. poser, dans ces conditions, la con- Un constat sans concessions sur la naissance historique "eurocentris- corruption et la ruine orchestrée te" en référence unique et d'exclure de l'Afrique. toute influence valorisante de la ci- Afrique je te plumerai est un film vilisation africaine. critique sur les médias et l'édition En 1956, Cheik Anta Diop* pro- au Cameroun. Qui contrôle l'écrit voque un tollé dans les milieux uni- et l'information contrôle le savoir versitaires avec ses travaux sur et la culture de tout un peuple. Un l'origine noire de la civilisation témoignage courageux sur les égyptienne, Nations nègres et cul- moyens de sortir du cauchemar de ture. C'est une révélation par rap- destruction d'un continent. port à l'époque où les Africains sont considérés sans passé, sans notre connaissance historique. À la histoire, sans civilisation, sinon pri- lumière des dernières recherches mitive. D'autres ouvrages sui- afrocentristes, on imagine à quel vront : Unité culturelle de l'Afrique point nos perceptions du monde ac- noire (1960), L'Afrique noire pré- tuel ont été structurées par l'euro- coloniale (1960), Antériorité des centrisme. L'appellation "Moyen- civilisations nègres (1967), Parenté Orient", par exemple, tend à sépa- génétique de l'égyptien pharao- rer l'Égypte du continent africain et nique et des langues négro-afri- de sa culture. Les partisans de caines (1977), Civilisation ou bar- l'afrocentrisme placent l'Égypte en barie (1981). Une quête historique Afrique et sous l'influence africai- et scientifique qui s'appuie notam- ne alors que les critiques de l'afro- ment sur l'étude comparative des centrisme dénoncent dans ce cas un hiéroglyphes égyptiens, qu'il con- racisme inversé. Réhabilitation, re- naît parfaitement, et du wolof, sa mise en question intéressante des langue maternelle. origines, mythes ou tentative de ré- cupération de la civilisation occi- Poursuivant les travaux de Cheikh dentale par les vaincus de l'histoire. Anta Diop, l'historien Martin Ber- Mais l'histoire de qui ? Toute la nai, chercheur et enseignant anglais question est là. aux États-Unis, a analysé scrupu- leusement l'influence des empires Filmographie : L'Afrique a-t-elle une égyptiens sur le développement de histoire ? Film documentaire d'Henry la Grèce antique. Dans son ouvrage Picard (France - 35mn - Couleurs) ; publié en 1987, Black Athena. Les 1975, Des maisons, des greniers, do- cumentaire de Jean-Pierre Janiaud racines afroasiatiques de la civili- sation ancienne, il montre l'in- (France - 27mn - Couleurs), Le griot d'aujourd'hui, documentaire de Colet- fluence majeure de l'Égypte an- te Castagno (France - 29mn - Cou- cienne sur la Grèce antique, la civi- leurs) ; 1980, Les gens de parole, film lisation égyptienne descendant elle- documentaire de Jean-François Schia- même de civilisations africaines no (France - 59mn - Couleurs). très anciennes. De multiples signes entre les civilisations grecques et africaines indiquent que des liens ont effectivement existé. AILEY Alvin Danseur et chorégraphe américain- Au XIXème siècle, cette évidence africain, né en 1931 à Rogers avait été totalement écartée par les (Texas), mort en 1989 à New York. historiens européens en dépit des preuves. Il s'agissait alors d'établir Un des maîtres de la danse améri- un "modèle aryen" à l'origine de la caine-africaine, Alvin Ailey a créé civilisation et de parfaire ainsi l'hé- des ballets qui demeurent des mo- gémonie de l'Occident. Le racis- dèles du genre : Révélations (1960), me* a joué par conséquent un rôle Cry (1971), For Bird with Love fondamental dans la formation de (1986). AKII-BUA John arrive à Paris en 1969 et s'installe Athlète africain, né en 1949 à dans la banlieue parisienne, à Sar- celles. Après des études d'architec- Kampala (Ouganda). ture, il travaille dans un cabinet de John Akii-Bua est originaire d'une génie civil. Passionné de peinture tribu du nord de l'Ouganda, les et par le relief des matières, il com- Lango, persécutée par Idi Amin Da- mence à peindre en 1990. Ses com- da. Il a 43 frères et sœurs. En 1971, positions picturales utilisent des ce policier crée la surprise dans matériaux naturels, le sable, la l'univers du 400m haies en s'impo- cendre de bois, la peinture séchée sant lors de la rencontre USA/ selon des techniques improvisées et Afrique. Ses dons et son entraîne- retrouvent l'aspect ancestral des ment original (il court en portant signes et des symboles des pein- une veste lestée d'une dizaine de tures rupestres. Il a participé en kilos) lui permettent de devenir 1994 à plusieurs expositions : 1er champion olympique en 1972 et de festival international des films de pulvériser le record du monde du cultures noires de Paris*, Los An- 400m haies en 47"82. Pourtant, geles, Centre culturel américain- John Akii-Bua aurait pu ne jamais africain de San Francisco. être couronné car peu de temps avant les Jeux, l'afrique menace de se retirer si le Comité International Olympique persiste à vouloir invi- ALASSANE Mustapha ter la Rhodésie (pays où l'apartheid* Cinéaste africain, né en 1942 au est de rigueur). Le CIO recule par Nigeria. 36 voix contre 31 et Akii-Bua gagne sa médaille d'or. Il ne peut Pionnier du cinéma nigérien, Mus- tapha Alassane a travaillé avec défendre son titre quatre ans plus Jean Rouch à Niameh. Il a ensuite tard. L'Ouganda comme 15 autres étudié l'animation au Canada avec pays africains boycottent les Jeux de Montréal car le CIO laisse con- Norman Mac Laren. Il réalise le courrir la Nouvelle-Zélande alors premier dessin animé africain en qu'elle entretient des relations spor- 1965, La mort de Gandji (8mn, tives avec l'Afrique du Sud. Un couleurs). match de rugby a eu lieu entre les De réalisateur de documentaires et deux pays quelques semaines après de courts métrages d'animation, le massacre de 140 noirs sud-afri- dont le premier, Aouré, date de cains dans la banlieue de Soweto. 1962, il passe aux moyens et aux longs métrages, notamment un 35 minutes en 16mm dans le style AKOMATSRI Stanislas western, Le retour de l'aventu- Peintre africain, né en 1963 à Lomé rier( 1969), puis FWA, Femmes, Villa, Voiture, Argent, qui dénonce (Togo). l'arrivisme de la nouvelle classe au La famille de Stanislas Akomatsri pouvoir. Filmographie : 1962, Aoure (30mn, Mayflower (Arizona). couleurs) ; 1964, La bague du roi Ko- da (lOmn, cI) ; 1965, La mort de Attiré par le blues dès son plus jeu- Gandji ; 1966, Bon voyage Sim (ani- ne âge, Luther Allison grandit à Chi- mation 5mn) ; 1968, L'arachide de cago en pleine émergence du blues Sanchira ; 1969, Les contrebandiers, moderne. En 1957, son groupe (The Al Barka le conteur ; 1972, FW A ; Rolling Stones !) joue déjà dans les 1973, Shaki (25mn) ; 1974, (co-réalisé clubs de Chicago. Sous l'influence avec Anna Soering) Toula ou le génie des meilleurs représentants du blues des eaux ; 1977, Samba le grand électrique - BB King*, T-Bone Wal- (14mn); 1982, Kankamba. ker*, Albert King*, Freddie King*, Magic Sam* -, il donne le meilleur de lui-même sur scène. ALLEN Debbie Un talent indéniable, mais une célé- Comédienne, danseuse et choré- brité méritée qui se fait attendre. Lu- graphe américaine-africaine, née en 1950. ther Allison vit à Paris depuis le dé- but des années 80. Son fils, Bemard, Cette comédienne de talent est est également chanteur et guitariste. d'abord applaudie à Broadway, dans des spectacles musicaux, Pur- Discographie : Blues Nebulae, Love lie (1972), Raisin (1973), AintMis- Me Mama, Southside Safari ; 1988, behavin (1979) et le remake de Rich Man ; 1990, Let's Try It (Live West Side Story (1980). Puis, saluée 89) ; 1991, Power Wire Blues ; 1992, à la télévision dans une série, 3 More from Berlin ; 1993, Hand Me Down My Moonshine. Girls 3 (1977) et Roots : The Next Générations (1979). Elle débute au cinéma avec The Fish AMAZONES (The) that Saved Pittsburgh (1979) et joue l'un des principaux rôles dans Orchestre de femmes, formé en Ragtime (1981). C'est grâce à Fa- Guinée en 1961. me d'Alan Parker (1980) qu'elle Formation singulière qui combine s'impose réellement en tant qu'ac- cuivres, batterie, guitares, choeurs et trice. Sa performance y est totale- solistes pour une musique entraînan- ment réussie et lui permet de réali- te. Un mélange de traditionnel et ser la chorégraphie de certains épi- d'instrumentation modeme qui vaut sodes de la série de télévision basée à l'orchestre une popularité constan- sur le film. En 1986, elle joue aux te tant en Europe qu'en Afrique. côtés de Richard Pryor* dans Jo Jo Dancer, Your Life is Calling. Une Discographie : Au Cœur de Paris ; belle carrière. 1984, Sons de la Savane.

ALLISON Luther AMÉRICAIN-AFRICAIN Chanteur et guitariste de blues Terme employé depuis le début des américain-africain, né en 1939 à années 80 pour désigner les Noirs américains aux États-Unis et rem- sont frères et tous nés à Malden placer le mot "black", revendiqué (Massachusetts). Entre 1949 et la dans les années 60. Qu'il y ait une fin des années 50, ils produisent politique des mots liée aux identifi- une vingtaine de tubes dans le style cations ethniques est en soi lo- sentimental, notammement Rag Mop (1950), Undecided (1951), gique, de même que ce type de dé- The Naughty Lady of Shady Lane signation évolue avec les moeurs et (1954). les changements sociaux. Avant les années 60, la lutte sera rude aux États-Unis pour que le ter- AMOS John me péjoratif et humiliant de "nig- Comédien américain-africain, né ger" (nègre) disparaisse du langage en 1939 dans le New Jersey. en faveur de "negro", terme bientôt condamné par le mouvement Black John Amos est certainement l'un Power* vers 1965. Actuellement, des plus importants comédiens de la tendance est d'en référer aux télévision, son rôle dans la série, Noirs comme pour les autres mino- Good Times, illustre dans les an- rités de la société américaine. Par nées 70 une image positive de exemple, les citoyens d'origine chi- l'homme américain-africain. Très noise, japonaise ou vietnamienne apprécié du public, il participe à des États-Unis ne sont plus dési- des dizaines d'émissions télévisées. gnés comme étant des "jaunes", Il tient quelques rôles au cinéma, mais des Américains-Chinois, Amé- notamment dans le film de Melvin ricains-Japonais, etc. Van Peebles*, Sweet Sweerback's Baadassss Song (1971), puis dans Il est aussi question d'Américains- Let's do It Again (1975) et Ameri- Italiens ou d'Américains-Français. can Flyers (1985). Difficile d'être précis en ce qui concerne les Noirs car leur pays d'origine est rarement connu. AMPAW King En France, ce problème d'identifi- Cinéaste africain, né en 1940 au cation nationale-éthnique n'est pas Ghana. encore apparu avec la même acuité, on pourrait cependant parler de Après des études de cinéma en Au- "Français-Africains", ou de "Fran- triche, il travaille pour la télévision çais-Maghrébins"... Ou encore allemande et tourne son premier plus précisément "Français-Zaï- film, Ils appellent cela l'amour, en rois" ou "Français-Marocains". Allemagne fédérale. Il représente Peut-être faut- il s'y préparer ? l'une des figures importantes du ci- néma de son pays depuis son retour au Ghana, en 1976. AMES BROTHERS Filmographie : 1972, Ils appellent cela Célèbre quartette américain-afri- l'amour; 1983, Kukurantumi ; 1986, cain. Ed, Gene, Joe et Vie Ames Juju (co-réalisé avec Ingrid Metner). ANC caine, née en 1928 à Houston (voir African National Congress) (Texas). À 15 ans, elle débute dans son ANDERSON Texas natal et se produit ensuite Eddie "Rochester" avec les orchestres de Johnny Acteur américain-africain, né en Otis*, Lionel Hampton*, Quincy 1905 à Oakland (Californie), mort Jones*, parmi les plus grands. Tou- en 1977. jours acclamée par un public de fans, son succès n'est toutefois pas Comédien, comique de revue, jou- à la hauteur de son talent. Son in- eur de banjo... Eddie "Rochester" terprétation de He Says He Loves Anderson est un touche-à-tout du show-biz. Me reste l'un des plus jolis mo- ments du film de Sidney Poitier, Ses parents sont des enfants de la The Lost Man (1969). balle et, à 14 ans, il forme un trio avec un copain et l'un de ses frères Discographie : 1958, Ernestine Ander- pour se produire dans une revue iti- son ; 1976, Hello Like Before ; 1983, nérante. Il est bientôt lancé par une Big City ; 1984, When the Sun Goes émission de radio et, très vite, le ci- down ; 1987, Live at the Alley Cat; néma lui offre l'occasion d'exercer 1993, Now and Then. ses multiples talents. Une filmogra- phie impressionnante, notamment ANDERSON Marian le rôle principal dans Cabin in the Sky en 1943. Chanteuse d'opéra américaine-afri- caine, née vers 1902 à Philadelphie Filmographie : 1932, What Price Hol- lywood ; 1936, The Green Postures, (Pennsylvanie). Three Men on a Horse ; 1937, Melody S'il était impossible d'imaginer, il for two ; 1938, Jezebel, Gold Diggers y a un demi-siècle, qu'une chanteu- in Paris, You Can't Take It with You, se de couleur puisse fouler les Thanks for the Memoiy, Kentucky ; scènes des opéras du monde entier, 1939, You Can't Cheat an Honest Marian Anderson a donné tort aux Man, Honolulu, Man about Town, Go- préjugés et aux pessimistes. Consi- ne with the Wind ; 1940, Buck Benny Rides Again, Love thy Neighbor ; dérée comme l'une des plus 1941, Topper Returns, Kiss the Boys grandes chanteuses du XXème Goodbye, Birth of the Blues ; 1942, siècle, la grande contralto est une Tales of Manhattan, Star Spangled enfant prodige qui doit à sa déter- Rhythm ; 1943, The Meanest Man in mination de pouvoir chanter de the World, Cabin in the Sky ; 1944, l'opéra. Broadway Rhythm ; 1945, Brewster's À l'image de tant d'autres chan- Millions ; 1946, The Sailor Takes a teurs américains-africains, elle Wife, The Show-off; 1963, It's a Mad Mad Mad Mad World. chante à l'église, mais, vivant dans un milieu aisé, elle est rapidement prise en main par des professeurs ANDERSON Ernestine de chant. Les langues sont néan- Chanteuse de jazz américaine-afri- moins un handicap et c'est seule- ment après des années d'étude en d'un opéra aux États-Unis en 1955, Europe qu'elle commence à s'im- et y donnera sept représentations. poser comme cantatrice à partir de Première et dernière fois pour Ma- 1928. En 1930, elle est acclamée à rian Anderson ; elle prend sa retrai- Berlin et, en 1935, le grand chef te en 1965, mais donne un concert d'orchestre Arturo Toscanini dira à exceptionnel en 1966 à la Sainte propos de sa voix : "Ce que j'ai en- Chapelle de Paris et au premier tendu aujourd'hui, on a le privilège Festival international des Arts de l'entendre une fois par siècle." Noirs à Dakar (Sénégal). Cette même année, elle donnera un Une carrière plus que réussie cer- concert triomphal à New York, puis tes, mais on se prend à rêver aux au Carnegie Hall en janvier 1936. possibilités de cette artiste excep- Toutefois, le racisme ne désarme tionnelle sans les limites des préju- pas devant la célébrité. En février gés racistes. 1939, les Daughters of the Ameri- Discographie : 1990, Chant Brahms, can Revolution (descendantes des Sibelius ; 1993, Lady from Philadel- notables de la guerre d'indépen- phia. dance contre les autorités britan- niques entre 1776 et 1781) refusent qu'elle chante dans leur salle de ANGELOUMaya concert. Eleanor Roosevelt, épouse Écrivain américaine-africaine, née du président des États-Unis, organi- en 1928 à Saint Louis (Missouri). sera alors un concert à Washington rassemblant plus de 75 000 per- Poète, essayiste, romancière, dra- sonnes. maturge, comédienne et militante, Maya Angelou, Marguerite John- Marian Anderson est alors à l'apo- son de son vrai nom, a subi très gée de sa gloire. Pendant la Secon- jeune des épreuves particulière- de Guerre mondiale, devenue une ment dures. Ballottée entre sa mère véritable institution, elle chante et sa grand-mère, violée par un pour les soldats et contribue à l'u- beau-père, mère à l'âge de 16 ans, nion sacrée, mais ne manquera ja- elle réussit malgré tout ses études. mais de prendre la défense de sa Attirée par la danse et le théâtre, el- communauté. le est néanmoins contrainte de ga- Cependant ni sa voix sans égale, ni gner sa vie et celle de son enfant en sa maîtrise, ni sa renommée inter- faisant de nombreux petits boulots, nationale ne briseront tout à fait la serveuse, entraîneuse, danseuse. El- barrière du racisme. En 1954, après le donne aussi des spectacles dans 25 ans d'une carrière de succès, des night-clubs et prend ainsi des Rudolph Bing, directeur du Metro- contacts avec le milieu du show- politan Opera de New York, lui biz. En 1954 et 1955, elle part pour proposera d'interpréter le rôle des tournées européennes et afri- d'Ulrica dans Un Ballo in Mashera caines jouant dans la comédie mu- de Verdi. Une cantatrice noire fou- sicale de George Gershwin Porgy lera pour la première fois la scène and Bess. De retour aux États-Unis, elle mili- ANSAH Kwah te dans le mouvement pour les Réalisateur et écrivain africain, né droits civiques des Noirs (Civil en 1941 à Agona (Ghana). Rights Movement*) et crée un spectacle sur ce thème : Cabaret Il étudie d'abord le théâtre, puis tra- for Freedom. En 1960, Martin Lu- vaille aux États-Unis pour la firme ther King* lui demande de diriger RKO. Sa première pièce, L'Adop- les activités du Southern Christian tion, est jouée à Broadway et la se- Leadership Conférence dans les conde, Les Larmes d'une mère, au États nordistes. Ghana après son retour au pays. En 1961, elle quitte les États-Unis Ses deux premiers longs métrages, Love Brewed in the African Pot pour le Caire avec son compagnon, Vusumzi Make, Sud-Africain et (1981) et Héritage... Africa (1988), évoquent la question d'identité et militant anti-apartheid*. Quelques des valeurs acquises pendant le co- années plus tard, elle s'installe au lonialisme. Ghana avec son fils. Elle devient rédactrice de The African Review, journaliste au Ghanian Times et sur les ondes de la radio nationale, et APARTHEID enseigne à l'université. Système discriminatoire de divi- En 1966, elle monte sur les sion de la population d'Afrique du planches à Hollywood, écrit des Sud en catégories privilégiées et chansons et le scénario d'une série non privilégiées selon des critères télévisée. En 1972, elle signe le raciaux. Entre 1948 et 1993, toutes film Georgia en tant que scénariste. les institutions du pays auront pour En 1977, sa performance dans la but de préserver la domination de célèbre série TV, Roots, d'Alex la minorité blanche sur la masse Haley* sur l'histoire de l'esclava- des non-Blancs, les Africains, les ge, est primée. En 1979, son auto- descendants des immigrés indiens, biographie, 1 Know why the Caged etc. (en afrikaans, le mot signifie Bird Sings, est portée à l'écran. En séparation, mise à part). Une ségré- 1982, elle signe le script de Sister, gation raciale institutionnalisée et Sister, pour la télévision. Professeur réglementée qui va de la mention et écrivain de renommée internatio- de l'appartenance raciale sur le bul- nale, Maya Angelou axe son œuvre letin de naissance jusqu'à la ségré- sur le problème identitaire des gation de l'habitat, des écoles, des Américains-Africains et est l'une services publics, des lieux de loi- des grandes intellectuelles blacks sirs... de notre temps. Dans le système d'apartheid, l'ob- Dans le second film de John Sin- jectif des lois est de maintenir les gleton, Poetic Justice* (1993), inégalités au sein de la population : Maya Angelou tient un rôle et est droits civiques, droit à l'enseigne- l'auteur des textes poétiques lus par ment, droit d'exploitation des ri- Janet Jackson*. chesses du pays. Ces lois interdi- sent non seulement les mariages Entre 1913 et 1936, 70% de la po- mixtes, mais d'habiter les mêmes pulation noire est parquée sur envi- quartiers, d'utiliser les mêmes véhi- ron 14% des terres de l'Afrique du cules de transport pour les per- Sud. Les Africains ne peuvent ni sonnes de races ou de couleurs dif- acquérir, ni louer aucune propriété férentes. Un système basé sur le ra- ou terre en dehors des territoires cisme* pour exclure du pouvoir les désignés. Les Noirs ne sont admis catégories d'individus considérées sur les réserves des Blancs que comme biologiquement inférieures pour les servir. Un système de par le pouvoir blanc, selon des cri- contrôle est mis en place afin de tères biologiques de couleur de vérifier la présence légitime de peau. chaque Noir se trouvant sur les ré- serves attribuées aux Blancs. Des Les origines historiques de l'apar- livrets d'identification, passbooks, theid remontent à l'impérialisme sont délivrés à cet effet. De nom- britannique. La domination des po- pulations indigènes par le pouvoir breuses lois excluront pour les colonial se justifiait d'ailleurs par la mêmes raisons les Noirs et les gens nécessité d'attendre que celles-ci de couleur, principalement les des- soient "civilisées" pour leur accor- cendants d'immigrés indiens, de certaines professions. Le contrôle der des responsabilités civiques. des conditions de travail ne les Cependant, l'enjeu politique de concerne pas et tout droit de l'Afrique du Sud était plus com- contestation leur est dénié. En plexe. Les colons anglais avaient été précédés par les colons hollan- 1927, les rapports sexuels extra- conjugaux et interraciaux sont in- dais, les Boers (fermiers en hollan- terdits. dais). Implantés depuis le XVIIème siècle, les Boers avaient résisté à la Les conditions sociales de ce pays domination britannique (Guerre avant la Seconde Guerre mondiale des Boers, 1899-1902) comme les colons nord-américains à la fin du sont extrêmement précaires pour la XVIIlème siècle. Cette lutte antico- majorité de la population et il est difficile d'imaginer pire à cette lonialiste entre deux groupes de co- époque. Chez la plupart des Blancs, lonisateurs se réglera finalement en 1910 avec la création de l'Union de l'idée libérale selon laquelle les ha- bitants non "civilisés" manquent de l'Afrique du Sud - État souverain, mais sous dominion du Common- la culture nécessaire pour assumer la citoyenneté demeure très vivace. wealth britannique - où les non- Dans les années 40, l'industrialisa- Blancs sont écartés de toute partici- tion du pays exige cependant un pation politique. On légifère afin de minimum d'éducation pour les les cantonner hors de la vie pu- Africains et un semblant d'intégra- blique. tion des non-Blancs. Les lois ra- En 1923, un décret sur les régions cistes limitant la mobilité de la for- urbaines contraint les Africains ce de travail sont alors considéra- d'habiter les quartiers réservés. blement adoucies. La réaction à ces mesures permet au parti national gress (PAC), né d'une dissidence afrikaner (parti des Boers les plus au sein de l'African National "nationalistes", tendance fascisan- Congress* (ANC) en 1959, appelle te) de gagner les élections de 1948. à une grande manifestion pacifique Les réformes sont abrogées et le à Sharpeville pour protester contre principe d'un État raciste claire- les pass laws. Celle-ci se termine ment énoncé. La fiction libérale dans un bain de sang. L'armée tire passe à la trappe, les maigres droits sans sommation sur la foule des accordés aux Africains sont abro- manifestants. Bilan de la tuerie : 70 gés. morts. En pleine décolonisation de Sont alors mis en place les uBan- l'Afrique noire, le gouvernement tustans", régions administratives d'Afrique du Sud est unanimement réservées aux huit ethnies afri- et vivement critiqué dans le monde entier. Les condamnations et les ré- caines n'ayant aucune représenta- tion dans l'assemblée nationale solutions de l'Organisation des Na- tions Unies débouchent sur un em- sud-africaine. La superficie des Bantustans ou Homelands repré- bargo sur la vente d'armes à sente 13% de l'ensemble de l'Afrique du Sud. Mais en quittant l'Afrique du Sud et la politique de le Commonwealth britannique, l'apartheid visera à doter ces ré- l'État raciste d'Afrique du Sud ren- serves d'une certaine autonomie en force encore le système d'apar- vue d'une future indépendance. theid, en dépit des critiques interna- Les "indépendances" accordées à tionales. L'hypocrisie des Bantus- tans se poursuit. U "indépendan- certains Bantustans (le Transkei en ce" des "nations" africaines est un 1976, le Bophuthatswana en 1977, le Venda en 1979 et le Ciskei en leurre et ne concerne ni le contrôle des relations extérieures, ni la dé- 1981) ne seront jamais reconnues fense, ni l'économie, ni la "sécuri- par la communauté internationale. té" qui restent aux mains du gou- Un quart des individus de couleur vernement sud-africain. sont "déplacés", bannis vers ces ré- gions réservées, c'est déjà le princi- En 1976, la langue des Afrikaners pe et la pratique du "nettoyage eth- (hollandais ancien) est rendue obli- nique" afin de préserver la supré- gatoire pour les Africains, sauf matie blanche sur le reste du pays. dans les bantustans-ghettos. À So- Les pass laws (passeports inté- weto, une manifestation d'écoliers rieurs), sont désormais obligatoires contre l'enseignement de la langue pour les hommes et les femmes de des oppresseurs se solde par la couleur. Le syndicalisme leur est mort de 600 écoliers, de centaines interdit, de même que les rapports de blessés et d'innombrables arres- sexuels interraciaux ou les ma- tations d'adolescents et d'enfants riages mixtes. mineurs. Les réactions internatio- La résistance s'organise, inlassable- nales sont à nouveau très vives et ment réprimée avec férocité. En ont pour conséquence le boycott mars 1960, le Pan African Con- général de l'Afrique du Sud. Pres- sions sur les institutions et les en- estimé "libre et juste". Les élec- treprises multinationales pour un teurs noirs votent pour la première désinvestissement des capitaux fois. Le parti de Nelson Mandela dans le pays. Ce boycott coïncide remporte les élections avec 62,6% avec la crise économique mondiale des voix, suffisamment pour gou- et contribue, en 1989, à l'élection verner à la tête d'une coalition avec de F.W. de Klerk, puis à la libéra- les partis modérés, mais sans la tion de Nelson Mandela*. majorité des deux tiers nécessaire pour changer la constitution. Selon Les lois de l'apartheid sont abolies Mandela, un résultat parfait. Mais en juin 1991. A cette époque, la ré- comment s'exprimer autrement partition de la population se divise ainsi officiellement : 75,6% de quand il s'agit de rassurer une po- pulation anxieuse, d'éviter les Noirs (dont 24% de Zoulous), conflits sociaux et d'avoir à la tête 13,2% de Blancs, 8,6% de Métis et 2,6% d'Asiatiques. Des négocia- du pays un gouvernement dominé tions sont alors entamées entre le par un parti unique. gouvernement de Klerk et l' African Si le système d'apartheid est en National Congress*. En mars voie de démantèlement, les injus- 1992, un référendum de l'électorat tices sociales et la violence vont- blanc sur la politique d'ouverture elles disparaître pour autant ? Man- du gouvernement a pour résultat dela a conscience que la transition 68% de suffrages en faveur des ré- vers un régime d'intégration risque formes proposées, dont la création hélas de se faire dans le sang et la d'une deuxième chambre de l'as- haine, règlements de comptes entre semblée nationale. En avril 1993, Blancs et Noirs et surtout entre Chris Hani, secrétaire général du Noirs. Les viols dans les townships parti communiste sud-africain et se multiplient, les femmes se mobi- second grand leader après Nelson lisent. "La violence politique en- Mandela, est assassiné par un mili- gendre la violence physique contre tant nationaliste blanc. En novem- les femmes" disent les manifes- bre 1993, un document constitu- tantes sud-africaines dans les rues. tionnel est signé par Mandela et de Il est à craindre que l'héritage si- Klerk pour des élections démocra- nistre de l'apartheid perdure long- tiques au printemps 1994. temps encore. Fin avril 1994, la campagne électo- rale se déroule dans une atmosphè- Filmographie sur l'apartheid : Cry re turbulente, ponctuée de menaces Freedom* de Richard Attenborough et d'attentats. L'Inkatha, parti zou- (1987) ; Un monde à part* de Chris Menges (1987) ; Mapantzula* d'Oli- lou fondé en 1975 par Gatsha ver Schmitz (1988) ; Une saison Mongosuthu Buthelezi, revient in blanche et sèche* d'Euzhan Palcy* extremis sur sa décision de boycot- (1989) ; Every 83 Seconds [voir Festi- ter les élections. Près de 20 mil- val des films des cultures noires*] ; lions de votes sont exprimés pour Mzwakhe* (1991) ; Blue Notes and un scrutin parfois cahotique mais Exiled Voices [voir Festival*] (1991) ; Apartheid* de Jean-Michel Meurice Quelles seront les répercussions sur (1992) ; Seven up South Africa, docu- la politique et la vie des commu- mentaire d'Angus Gibson (1992 - In- terviews de dix-neuf enfants sud-afri- nautés en présence dans le pays ? cains de 7 ans) ; La volonté de dieu, Si Mandela est élu président, la po- film documentaire de Manu Bonmaria- pulation peut-elle espérer l'apaise- ment des violences ou est-elle ge (1993 - Sur les nostalgiques de l'apartheid) ; L'apartheid, c'est mons- condamnée à subir les affronte- trueux, documentaire de Jens Monath ments orchestrés par les Afrikaners (1993 - Quatre personnes et quatre réa- d'extrême-droite ou la déliquescen- lités de l'Afrique du Sud) ; Friends* ce de partis noirs, de l'Inkatha par de Elaine Proctor ( 1993 ). exemple ? Une fresque historique et politique importante qui pose les questions APARTHEID nécessaires pour comprendre la 1992 - Film documentaire de Jean- réalité de ce pays. Michel Meurice. France - 2h - Couleurs. Conseillers historiques : Joëlle Ches- APOLLO THEATRE selet et David Chandler. La Mecque du show-business Ce documentaire historique, réalisé black des Etats-Unis et peut-être du avant l'abolition de l'apartheid*, monde entier. Créé en 1934 par retrace l'histoire de l'Afrique du l'imprésario Sidney Cohen (rem- Sud et tente de cerner le processus placé par Frank Schiffman l'année de cette exclusion raciste qu'est l'a- suivante), l'Apollo est situé au partheid. Il remonte ainsi aux gran- cœur de Harlem (New York, 125 des étapes - le Grand Trek (1835- ème rue). Fermé en 1983, l'Apollo 1843), la bataille de la Blood River a depuis été classé monument his- (1838) et la guerre des Boers torique. (1899-1902), événements phares de la colonisation hollandaise qui Durant des décennies, tout artiste forgent une bonne conscience na- black n'était réellement consacré tionale blanche sur le dos des qu'après un passage obligé à l'A- Noirs. Puis arrivent les années 50 pollo. Il s'agissait d'affronter les avec l'institutionalisation de l'apar- ovations ou les huées d'un public theid et l'imposition d'un régime survolté, insensible à la frime, dont de fer sur une population noire ex- l'exigence avait fait la réputation clue, opprimée, mais qui résiste du célèbre music-hall. Comment ne malgré la brutalité de la répression. pas évoquer les soirées des mercre- À la fin de la Seconde Guerre mon- dis, réservées aux jeunes espoirs diale, il existe en Afrique du Sud qui ont permis la découverte de fu- une mouvance nazie, avec ses che- tures célébrités : Lena Home*, mises grises de sinistre mémoire. Pearl Bailey*, Sarah Vaughan*, La violence politique de l'apartheid Ruth Brown*, Sam Cooke*, James laisse des traces indélébiles dans le Brown*, King Curtis*, Stevie présent de l'Afrique du Sud. Wonder*, Marvin Gaye*... La liste est encore très longue. L'Apollo a Ones are not yet Bom ; 1970, Frag- été l'un des carrefours les plus im- ments ; 1972, Why are we so Blest ? ; portants du brassage de la culture 1973, Two Thousand Seasons ; 1978, américaine- africaine et américaine. The Healers. Un haut lieu de la musique et du spectacle! ARMATRADING Joan Avant de devenir une vedette natio- nale, Elvis Presley s'y est rendu, Auteur-compositeur-interprète bri- tannique d'origine antillaise, née en comme en pèlerinage, pour voir Bo 1950. Diddley*. Combien de musiciens, de chanteurs et de comiques blancs Après une petite enfance passée sont allés assister aux spectacles de dans les Caraïbes, sa famille im- ce lieu légendaire et "puiser" une migre à Birmingham quand elle a 6 inspiration dans ce creuset culturel. ans. C'est par une tournée que Joan Armatrading commence sa carriè- re, avec la comédie musicale H air. ARMAH Ayi Kwei Influencée par le rock des années 70, sa voix combine des inflexions Écrivain africain, né en 1939 à Ta- afro-antillaises et anglaises. On la koradi (Ghana). compare souvent à Tracy Chap- Après des études au Ghana (Achi- man*, dans un contexte différent mota School), puis en Angleterre et hormis la critique sociale. Ses (Groton School) et aux États-Unis chansons sont considérées comme (université de Harvard), ce roman- étant dans la mouvance féministe. cier travaillera comme traducteur et scénariste pour la télévision gha- Discographie : 1974, Whatever s for néenne et rédacteur pour Jeune Us ; 1975, Back to the Night ; 1976, Afrique à Paris. Son premier ro- Joan Armatrading ; 1977, Show Some man, The Beautyful Ones are not Emotion; 1983, Track Record ; 1986, Sleight of Hand ; 1988, The Shouting yet Boni, publié en 1968, est un Stage ; 1990, Hearts and Flowers ; succès considérable. Les critiques 1992, Square the Circle. le comparent à La nausée de Jean- Paul Sartre. C'est un ouvrage sur le désespoir et la désillusion dans le ARMSTRONG Lil contexte de fin de régime de Nkru- Chanteuse, pianiste et chef d'or- mah au Ghana où il est question chestre américaine-africaine, née d'abjection morale et de cynisme. Comment demeurer fidèle à ses en 1898 à Memphis (Tennessee), morte à Chicago en 1971. principes si ceux-ci sont taxés d'idéalisme naïf et enfantin ? Pourquoi Lil a-t-elle pris le nom de son illustre mari, Louis, alors qu'el- Ayi Kwei Armah a enseigné à l'université du Wisconsin (États- le l'a précédé sur scène ? Lillian Unis) et à l'université de Lesotho. Hardin dirige son propre orchestre de jazz dès 1920 et convaincra Bibliographie : 1968, The Beautyful Louis Armstrong de quitter l'or- chestre de King Oliver* pour venir trompette, ses improvisations re- jouer dans sa formation. marquables et ses solos étonnent Mariés en 1924, Lil accompagne plus d'un musicien parmi les plus au piano son mari sur tous les expérimentés et les plus doués. disques fameux qu'il enregistre à la Vers la fin des années 30, sa carriè- fin des années 20. En 1931, ils se re amorce une direction nettement séparent pour finalement divorcer plus commerciale. Dans les années en 1938. Lil jouera jusque dans les 40, la musique évolue avec le Bop* années 60. Quelques semaines et Satchmo devient le chéri d'un après la mort de Louis Armstrong, public blanc qui le connaît surtout elle meurt au cours d'un concert par les nombreux films où il chante donné en hommage à son ex-com- de cette voix rauque et légèrement pagnon. Nul doute que ses conseils comique. Mais le public ignore et son soutien ont été une aide es- beaucoup de ce grand créateur de sentielle pour la carrière et la re- jazz, inventeur du "scat". nommée du grand musicien de Après la Seconde Guerre mondiale, jazz. il est le non officiel "ambassadeur de l'Amérique". Son autobiogra- phie, Satchmo, est publiée en 1954, ARMSTRONG Louis et en 1957 la chaîne de télévision Chanteur, trompettiste, chef d'or- CBS tourne un documentaire sur chestre américain-africain, né en lui, Satchmo the Great (Satchmo le 1901 à la Nouvelle-Orléans (Loui- grand). Dès 1957, il soutient le mou- siane), mort à New York en 1971. vement pour les droits civiques. Un géant de l'histoire du jazz, cé- Pendant un demi-siècle, il aura re- lèbre pour ses compositions autant présenté le talent, la créativité et la que pour sa virtuosité d'instrumen- dignité de la communauté améri- taliste. Le grand "Satchmo", Sat- caine-africaine. chel Mouth (Bouche de valise), Discographie : The Louis Armstrong était adulé aux États-Unis comme Story chez Colombia. dans le monde entier. Filmographie : 1936, Pennies From Après une enfance difficile dans un Heaven ; 1937, Artists and Models ; orphelinat où il apprend le , il 1938, Eveiy Day's a Holiday, Dr remplace en 1919 King Oliver* Rhythm, Going Places ; 1943, Cabin dans l'orchestre de Kid Ory*. En in the Sky; 1944, Jam Session, Atlantic 1922, il "monte" à Chicago pour City, Hollywood Canteen ; 1947, New jouer dans la formation d'Oliver, Orleans; 1948, A Song Is Born ; 1951, rencontre Lil Hardin et se marie en The Strip, Here Comes the Groom ; 1952, Gloiy Alley ; 1954, Glenn Miler 1924. Pendant les années 20, il joue Story ; 1956, High Society ; 1959, The avec Bessie Smith*, Ma Rainey*, Five Pennies ; 1961, Paris Blues ; Sidney Bechet*, Fletcher Hender- 1965, When the Boys Meet the Girls ; son* et les plus importants pion- 1966, A Man called Adam; 1969, Hel- niers du jazz. Sa maîtrise de la lo Dolly. ARNOLD Billy Boy larité de ce groupe de rap alternatif : Musicien et chanteur américain- la volonté de provoquer une prise de conscience des enjeux sociaux. africain, né en 1935 à Chicago. Mais là ne s'arrête pas son origina- Tout jeune, il fait déjà figure d'en- lité, le groupe est mixte, hommes et fant prodige et prend des leçons de femmes. Leurs textes abordent des guitare avec Sonny Boy William- thèmes actuels : le rapport entre les son* qui lui donne son surnom de sexes, les très jeunes mères céliba- Billy Boy. Adolescent, il joue dans taires, la vie du ghetto et la discri- la rue avec Bo Diddley*. mination sociale. Mais si les pro- blèmes sont décrits ou dénoncés, la Il enregistre ses meilleures chan- sons entre 1955 et 1957. Malheu- fatalité n'est pas une perspective... reusement, le succès commercial il reste l'espoir d'en sortir et la ré- bellion hip-hop*. Influencés par la est mitigé malgré une expérience et culture africaine, leur musique atti- une fougue indéniables, une voix voilée de bluesman et son talent re un public large. d'harmoniciste. Un bluesman à re- Discographie : 3 years, 5 months and 2 découvrir ! days in the Life of.... ; 1993, People Discographie : I Wish You Would Evelyday ; Cool.., Unplugged (Chry- (Charly). salis), 1994, Zingalamaduni.

ARNOLD Kokomo ART ENSEMBLE Chanteur et guitariste de blues OF CHICAGO américain-africain, né James Ar- nold en 1901 à Lovejoy (Texas), Quintette formé à la fin des années mort en 1968 à Chicago. 60 et composé de musiciens améri- cains-africains de Chicago, Lester Bluesman populaire pendant les Bowie, Joseph Jarman, Malachie années 30. Il enregistre ses pre- Favors, Roscoe Mitchell et Don miers disques, puis c'est l'oubli des années 40 et 50. Le mouvement de Moye. blues revival des années 60 permet Du quartette initial au Roscoe Mit- de retrouver ce bluesman authen- chell Art Ensemble, Y Art Ensemble tique et les racines du blues texan. of Chicago alterne tous les genres : jazz, théâtre, mime. Kaléidoscope visuel et sonore, leurs concerts- ARRESTED spectacles offrent un éventail de DEVELOPMENT styles surprenants. Improvisations, provocation, surréalisme et expres- Groupe de rap formé à Atlanta sion extrême, un spectacle complet. (Géorgie). En juillet 1970, Art Ensemble of Ils chantent le respect de la nature Chicago enregistre avec Brigitte et fusionnent avec talent rap*, reg- Fontaine et Areski l'album Comme gae*, funk et blues*. Autre particu- à la radio. Leur musique défie toute catégori- Arthur Ashe a six ans quand il sation. Instruments de jazz, racines échange ses premières balles sur le africaines et influences pop. terrain de sport où son père est gar- Discographie : 1969, A Message to Our dien. C'est un enfant plutôt chétif, Folks; 1970, Certain Blacks, 1974, Ka- mais un talent précoce. À 12 ans, il balaba; 1980, Urban Bushmen; 1984, gagne le championnat de l' Ameri- Third Decade. can Tennis Association (association noire). En 1960, il est envoyé au ly- cée de St Louis (Missouri), les ASABIA matches mixtes étant interdits en Chanteuse et saxophoniste africai- Virginie, et est le premier Noir à ne, née en 1957 au Ghana. remporter le championnat national Issue d'une famille de musiciens, des jeunes espoirs. L'année suivan- elle chante dans des groupes gha- te, il obtient une bourse qui lui per- met de poursuivre le tennis et ses néens avant de se joindre aux Black études à l'université de Californie à Hustlers qui se produisent en Côte d'Ivoire où Asabia est une vedette. Los Angeles. En 1965, Arthur Ashe est le meilleur joueur universitaire Discographie : Wamaya. de tennis. En 1968, il est le premier Noir à gagner un tournoi du grand Chelem à Forest Hill. ASARE Bediako Fervent défenseur des droits ci- Écrivain africain né au Ghana. viques et humains, Arthur Ashe En 1952, il est engagé comme jour- fonde en 1972 avec d'autres jou- naliste au quotidien Ashanti Senti- eurs Y International Tennis Players nel. En 1957, il devient responsable Association. Association dont il se- de la communication à la Ghana ra le président de 74 à 79. En 1973, Trade-Union Congress, Fédération l'ATP boycotte le tournoi de Wim- syndicale du Ghana, et collabore en bledon afin de protester contre l'in- 1963 à la création du premier quo- justice d'une décision prise à l'en- tidien gouvernemental de Tanzanie. contre d'un joueur yougoslave. Entre 1970 et 1974, il travaille pour C'est à son instigation que l'Afri- le The Daily Nation de Nairobi que du Sud doit se retirer de la (Kenya), puis devient le directeur compétition pour la Coupe Davis du Ghanian Times. Sous forme al- en 1970. Invité à jouer dans l'Open légorique, son roman Rebel traite d'Afrique du Sud en 1973, il est le du conflit entre les traditions afri- premier Black à remporter cette caines et la modernité. compétition. En 1975, c'est l'apo- théose : il gagne le tournoi de Wimbledon et se retrouve numéro ASHE Arthur Un mondial du tennis profession- nel. Athlète américain-africain, né en 1943 à Richmond (Virginie), mort Arthur Ashe est aussi un décou- en 1993 à New York. vreur de talent, celui de Yannick Noah* par exemple et a écrit un et leur groupe s'inscrit dans la ouvrage sur l'histoire et la place de mouvance hip-hop, rébellion, cons- l'athlète noir dans le sport améri- cience politique et vision alternati- cain. En 1980, il contracte le sida ve. Premier groupe de rap poli- par transfusion sanguine suite à une tique, Assassin annonce la cou- opération du cœur. Peu après, il de- leur : "Le combat ne sera pas dans vient capitaine de l'équipe US de la les urnes mais dans la rue". Lors Coupe Davis. En 1992, sa séropo- d'un voyage à New York, ils parti- sivité est rendue publique par la cipent au projet "hip-hop against presse. Il est interpellé devant la apartheid" produit par Afrika Maison Blanche, peu de temps Bambaataa* et qui rassemble le après, dans une manifestation pour hip-hop new-yorkais. Le mouve- protester contre la politique du gou- ment hip-hop trouve enfin en Fran- vernement américain vis-à-vis ce l'écho contestataire qu'il a ou- d'Haïti et des réfugiés haïtiens. Il tre-Atlantique. est vaincu par la maladie six mois Chef de file du rap et pionnier du plus tard. hip-hop français, Assassin remplit la Cigale (Paris) en mars 1991 sans avoir sorti d'album. Freestyle sur ASHFORD Evelyn l'album des suprême NTM* fait un tabac et le premier disque, Note Athlète américaine-africaine, née mon nom sur ta liste (mai 1991) se en 1957 à Shreveport (Louisiane). vendra à 40 000 exemplaires sans Evelyn Ashford est une des pre- promotion. Cela n'arrête pas le mières athlètes féminines à courir groupe dans son attaque du systè- le 100m en moins de 11". Le boy- me, créateur d'exclusion, qui tend cott des Jeux olympiques de Mos- à "précariser une frange de plus cou en 1980 dérange quelque peu en plus grande de la population et sa carrière. Elle bat le record du revenir sur des acquis sociaux conquis de longue date..." Une monde du 100m à Colorado Springs perspective qui passe bien évidem- en 1983 (10"79) et remporte des ment par la critique des médias : médailles d'or aux Jeux olym- "Si ta vision du monde et de son piques de Los Angeles du 100m et histoire se construit uniquement à du 4 x 100m 1984. Evelyn Ashford travers les médias, tu peux être sûr porte toujours de magnifiques que tu ne seras qu'un pion mani- maillots moulants noirs et rouges. pulé par F État. Antiautoritaire et antiraciste, As- sassin refuse la manipulation et ASSASSIN mène sa carrière comme une lutte. Groupe de rap français formé en Pas de récupération et vive la 1985. contestation. Une formule qui vaut la peine d'être entendue dans l'al- Ils s'appellent Solo, Squatt, DJ bum-manifeste (produit, écrit, ar- Clyde, Doctor L et Madj, viennent rangé et supervisé par Assassin) : du 18ème arrondissement de Paris Le futur que nous réserve-t-il ? Le phénomène Rap est-il passé de black des États-Unis, Atlantic est le mode ? "La verve médiatique est principal producteur de rhythm & peut-être retombée, mais l'activité blues* des années 50 : Ray Char- et la demande ne le sont pas." Les les*, Ruth Brown*, Joe Tumer*, autonomes du rap prouvent le LaVem Baker*, Chuck Willis*, the contraire par leur vitalité et leur lu- Clovers*, the Drifters*, etc., et des cidité. Pas de leader, un travail de années 70 avec Otis Redding*, So- groupe qui se veut messager d'un lomon Burke*, Sam & Dave*, Per- esprit, d'un concept, d'un respect cy Sledge* et beaucoup d'autres. "pour les gens qui créent ainsi que les peuples qui souffrent et qui se Le succès de cette maison de pro- battent pour faire valoir leurs duction indépendante est phénomé- droits nal si l'on considère qu'elle a éga- lement enregistré les plus grands Discographie : 1990, La formule se- dans le domaine du jazz, Charlie crète (compilation Rappattitude chez Mingus*, John Coltrane*, Omette Virgin) ; 1991, Freestyle (album NTM Coleman*, comme dans celui du chez Epic) ; Note mon nom sur ta liste (Remark) ; 1993, Formule secrète 2, rock, Led Zeppelin, Crosby Stills La peur du métissage (BO du film Mé- Nash & Young et Eric Clapton. La tisse*), Le futur que nous réserve-t-il ? réussite totale d'un grand label ! (Assassin Productions chez Delabel).

ATTUCKS Crispus ATEBA Koko Marin américain-africain, né en Chanteuse et musicienne africaine. 1723 à Farmington (Massachu- Son groupe composé d'un percu- setts), mort en 1770 à Boston sionniste, de deux choristes et d'el- (Massachusetts). le-même à la guitare et au chant, Première victime de la "révolution fait penser aux troubadours. Koko américaine", guerre coloniale qui a Ateba est une artiste impression- abouti à la création des États-Unis, nante sur scène, non seulement par Crispus Attucks est tué lors de la un répertoire très riche et interna- fusillade des soldats britanniques tional, mais par une présence de la contre des manifestants colons. voix et des mélodies. Une trouba- Quatre Blancs sont également tués dour africaine, entre le griot et la au "massacre de Boston". chanteuse engagée. Les historiens pensent que Crispus Discographie : 1993, Frou Frou. Attucks est né en esclavage. Il s'en- fuit en 1750 et travaille sur une ba- leinière. L'ironie de sa mort est sou- ATLANTIC vent soulignée. La création d'une ré- Société de disques fondée en 1947 publique où "tous sont égaux" par Herb Abramson et Ahmet aboutira en effet au maintien de l'es- Ertegun. clavage pendant encore presqu' un Label important pour la musique siècle, bien après que la pratique de l'esclavage soit proscrite par le gou- Vert fondé par Amilcar Cabral*). vernement britannique. Ce restaurant, lié à un projet de co- opérative populaire en Guinée-Bis- sau, a plusieurs objectifs : une plus AU NOM DU CHRIST large scolarisation de la population, 1992 - Film de Roger Gnoan la vulgarisation des notions d'hy- M'Bala. giène et de santé, le développement Côte d'Ivoire - Ih40 - Couleurs. de l'autosuffisance alimentaire. Images : Mohamed Soudani. Mon- Au Port de Pidjiguiti, qui signifie tage : Ahoussy Diangoye. Musi- "qui boit de cette eau reviendra", que : Paul Wassaba. Production : travaille en corrélation avec la co- Aby Film/Amka Film. opérative Domingo Ramos (un des Après une soi-disant rencontre premiers dirigeants de la lutte ar- avec Dieu, un villageois, d'abord mée). La coopérative achemine une méprisé, accomplit des miracles. partie de sa production de fruits et Grâce à ses fétiches et à son ba- de légumes au restaurant, qui réser- gout, il accède au pouvoir et se dé- ve une part de ses bénéfices à l'en- clare prophète. De là, à utiliser voi de médicaments, matériel sco- laire et machines. l'emprise de la religion pour mani- puler la population, il n'y a qu'un De ce projet de restaurant et de co- pas. Mais sa domination sur le vil- opérative sont nés des écoles, un lage s'estompe... Il se fait alors centre de planning familial et des crucifier et envoie ses disciples dispensaires. Un projet généreux, dans la savane. une cuisine délicieuse et plein de Une satire des superstitions reli- musiques. gieuses et de la prolifération des (Au Port de Pidgiguiti, 28 rue Étex, sectes. Développement, tradition et 75018 Paris. Tél : 42 26 71 77). religion, ou comment dénouer les enjeux d'une histoire et d'une iden- tité sans cesse bafouées. Le choix AUTOUR DE MINUIT d'un camp religieux, à savoir chris- (voir Round Midnight) tianisme, islam ou animisme, est-il obligatoire ? Une réflexion africai- AVA ET GABRIEL ne et universelle sur le pouvoir et la religion. 1990 - Film de Félix de Rooy. Grand prix du Fespaco* 1993. Curacao/Hollande - 1 h40 - Couleurs. Scénario : Félix de Rooy et Nor- man de Palm. Images : Ernest Dic- AU PORT DE PIDJIGUITI kerson*. Montage : Ton de Graafe. Musique : Roy Luis, Ced Ride. Restaurant ouvert en 1976 à l'ini- Production : Cosmis Llusion Pro- tiative de membres du PAIGC (Par- ductions. ti africain pour l'indépendance de Avec : Nashaira Desbarida, Cliff la Guinée-Bissau et les îles du Cap San-A-Jong. À 1(1 fin des années 40, sur l'île de Wheta (Ghana). Curacao, arrive de La Haye un Éduqué au Ghana dans une école peintre, originaire du Surinam. Ga- chrétienne, le futur poète fera des briel doit réaliser une peinture mu- études supérieures à Londres et à rale à la demande du prêtre de la New York. Enseignant aux États- paroisse de Ste Anne. Or, s'il habi- Unis, puis au Ghana, Kofi Awoo- te en Hollande, Gabriel est noir et nor devient directeur du Ghana la population de l'île l'accueille froidement. Film Corporation. La dictature d'Ignatius Kutu Acheampong ne Autres moeurs, autres coutumes ne lui pardonne pas ses critiques et ses font qu'exacerber ce rejet de publications, il est incarcéré dans l'étranger. La discrimination des les années 70. habitants de l'île s'aggrave encore Son œuvre traite des difficultés ren- lorsqu'il courtise la jeune femme contrées par les Africains partagés qui lui sert de modèle. entre la culture occidentale et celle de leur pays d'origine. Son premier AVERY Margaret roman, This Earth, my Brother... (1972), s'inspire de son expérience Comédienne américaine-africaine, née en 1945 dans l'Oklahoma. personnelle. Il a également publié plusieurs recueils de poésie : Redis- Pour sa remarquable performance covery, Night of my Blood et Ewe dans La couleur poU/pre* (The Co- Poeay. lor Purple) de Steven Spielberg (1985), Margaret Avery est nomi- née pour l'Oscar du deuxième rôle AYLER Albert féminin. Malgré cette reconnais- sance et son talent, les rôles se font Musicien et compositeur de jazz rares à la télévision ou au cinéma et américain-africain, né en 1936 à Cleveland (Ohio), mort en 1970 à l'on peut s'interroger si l'industrie New York. cinématographique ne limite à des- sein les prestations des Américains- À 10 ans, il joue du saxophone alto Africains. Les rôles offerts aux dans la fanfare dans laquelle son Noirs dans les films se cantonnent père est saxophone ténor. Little encore trop souvent dans des illus- Walter* le remarque dans une boîte trations caricaturales. quand il a 16 ans et lui propose de faire des tournées avec son groupe. Filmographie : 1973, Magnum Force, Hell up in Harlem*; 1975, Night Stalker C'est pendant son service militaire (TV), Louis Armstrong Chicago Style qu'il découvre l'Europe. Démobili- (TV) ; 1979, The Fish That Saved Pitts- sé, il regagne les États-Unis, mais, burgh ; 1986, Murder She Wrote (TV). déçu par l'incompréhension qu'il rencontre, il repart en Suède en 1962 où il enregistre son premier AWOONOR Kofi disque. Il jouera notamment avec Poète et romancier africain, né à Don Cherry*, Dexter Gordon* et Cecil Taylor*. Il lui faut attendre de-Vence (France). Quatre mois 1965 pour enregistrer son premier plus tard, son corps est retrouvé disque aux États-Unis. dans l'East River. Un grand jazz- Ce très grand saxophoniste (ténor, man méconnu du grand public dis- alto et soprano) sera l'ami de John paraît à 34 ans. Coltrane* qui lui apportera son Discographie : 1962, III Remember soutien pour obtenir un contrat April, First Recordings ; 1963, Sum- avec la maison de disques Impulse. mertime, My Name is Albert Ayler ; Musicien hors du commun, il tente 1964,Vibrations (avec Don Cherry), une fusion du jazz et du pop, mais When the Saints Go Marching In , le succès d'estime dont il bénéficie Ghosts ; 1965, Bells, Spirits Rejoice ; 1966, Truth is Marching In ; 1967, Lo- auprès des musiciens ne permet pas ve Ciy ; 1968, New Grass ; 1969, Mu- à ce talent incompris d'être recon- sic is the Healing Force of the Univer- nu par le public. se et The Last Album ; Compilation En juillet 1970, il donne deux Paris 1966 chez Hat Hut et Village concerts historiques à Saint-Paul- chez MCA. Â Amadou Hampâté tit Bodiel, conte drolatique peul ; B 1994, La poignée de poussière, contes Écrivain, historien, ethno- et récits du Mali ; Kaidara, récit ini- logue, poète et conteur africain, né tiatique peul (version en prose) en 1900 à Bandiagara (Mali), mort (NEI/EDICEF) ; Petit Bodiel et autres en 1991. contes de la savane ; Contes initia- Après une carrière dans l'adminis- tiques peuls (Stock) ; Oui mon com- tration coloniale, il siège au conseil mandant ! (Actes Sud). exécutif de l'Unesco dès 1960. Ar- dent défenseur des cultures afri- caines, il est l'initiateur d'un mou- BA Mariama vement pour la sauvegarde des tra- ditions orales africaines. "En Enseignante, militante et romanciè- re africaine, née en 1929 à Dakar Afrique, quand un vieillard meurt, (Sénégal), morte en 1981 à Dakar. c'est une bibliothèque qui brûle" dira-t-il pour illustrer sa recherche Élevée par ses grands-parents après inlassable de la richesse poétique la mort de sa mère, son enfance se de l'oralité africaiine. Ses ouvrages déroule dans un milieu musulman sur la poésie peule, les contes, les traditionnel. Grâce à son père, mi- textes initiatiques et l'empire du nistre de la Santé, et à la directrice Macina font autorité et représen- de son école, Mariama Bâ passera tent une merveilleuse base pour dé- son concours à l'École normale et couvrir l'Afrique. Notamment, les deviendra institutrice. Mariée au deux volumes de ses mémoires : député Eugène Diop dont elle aura Amkoullel l'enfant peul, prix Tro- neuf enfants, elle partage sa vie piques en 1991, et Oui mon Com- entre son métier d'institutrice, sa mandant ! paru en 1994. L'ensemble vie de famille et ses activités de mi- de l'œuvre d'Amadou Hampâté Bâ litante dans plusieurs associations a reçu le grand prix littéraire de de femmes. l'Afrique noire en 1991. Son roman, Une si longue lettre pa- ru en 1979 et pour lequel elle ob- Bibliographie : 1961, Koumen, texte tient le Prix Noma l'année suivan- initiatique des pasteurs peuls (Mou- ton) ; 1969, Kaidara récit initiatique te, raconte la vie de deux amies peul (version poétique, Les Belles d'enfance confrontées l'une et l'au- Lettres) ; 1972, Aspects de la civilisa- tre à la polygamie. L'une d'elles se tion africaine (réédité en 1993, Présence révolte et exprime toute la dignité africaine) ; 1973, L'Étrange destin de et la rancoeur des femmes habituées Wangrin (10/18) ; 1976, L'éclat de la à se soumettre : « Ma voix connaît grande étoile (version poétique, Les trente années de silence, trente an- Belles Lettres) ; 1980, Vie et enseigne- nées de brimades. Elle éclate, vio- ment de Tierno Bokar, le sage de Ban- lente, tantôt sarcastique, tantôt mé- diagara (Seuil) ; 1984, L'Empire peul du Macina (Nouvelles Éditions Afri- prisante. [...] "Tu oublies que j'ai caines/EHESS) 1885, Djeddo Dewal : un cœur, une raison, que je ne suis mère de la calamité (NEA) ; 1991, pas un objet que l'on se passe de Amkoullel l'enfant peul (Actes Sud) ; main en main. Tu ignores ce que se 1993, Jésus 1'll par un musulman ; Pe- marier signifie pour moi : c'est un acte de foi et d'amour, un don total sommes en face de gens qui mettent de soi à l'être que l'on a choisi et tout leur génie à nourrir leurs sem- qui vous a choisi." » Un roman blables de fausses promesses. De magnifique sur la condition de la notre temps, à la guerre comme femme musulmane africaine et un dans la vie, on combattait de face. réquisitoire contre le sexisme. Son Aujourd'hui, le plus fort est celui qui second roman, paru peu de temps sait dissimuler le mieux." après sa mort, évoque les pro- Bibliographie : 1957, Sous l'orage blèmes liés aux mariages interra- (Les Presses universelles) ; 1964, Les ciaux, mais souligne à nouveau les dirigeants africains face à leur peuple méfaits d'un société basée sur l'au- (Maspéro) ; 1976, Le sang des mas- torité masculine. ques (Robert Laffont). Bibliographie : 1979, Une si longue lettre (Nouvelles Éditions Africaines) ; BAGDAD CAFÉ 1981, Un chant écarlate (NEA). (Out of Rosenheim) - 1987. Film de Percy Adlon. BADIAN KOUYATÉ Allemagne - lh30 - Couleurs. Seydou Scénario : Percy et Eleonor Adlon. Images : Bernd Heinl. Musique : Homme politique, médecin et écri- Bob Telson. Production : Pelemele vain africain, né en 1928 à Bamako film GMBH. (Mali). Avec : Marianne Sagebrecht, CCH Seydou Badian Kouyaté suit des Pounder, Jack Palance, Christine études de médecine à Montpellier Kaufmann, Monica Calhoun, Da- avant de retourner au Mali où il oc- ron Flagg. cupe jusqu'en 1968 d'importantes Après une dispute avec son mari, fonctions ministérielles. Il est dé- Jasmin, Bavaroise au cœur d'or, se porté à Kidal après le coup d'état retrouve traînant une valise en plein militaire, puis vit en exil à Dakar. désert du côté de Las Vegas. Elle Dans ses romans, notamment Le débarque dans un motel minable et sang des masques et Noces sacrées, perdu. Là, elle rencontre Brenda, il évoque l'étemel conflit entre le Américaine-Africaine et patronne modernisme et les traditions afri- du motel qui vient de virer son caines. Seydou Badian Kouyaté compagnon. Des personnages pit- prône, sinon un retour aux vertus toresques et un charme certain. traditionnelles, un équilibre entre sa- L'histoire d'une amitié et d'une gesse d'antan et modernisme pour complicité magique entre deux éviter les mensonges et la corruption femmes. Carol Christine Hilaria inhérents à la société africaine post- Pounder (originaire de Guyane bri- coloniale. Le vieux sage africain de tannique et comédienne de théâtre Sous l'orage fait ce constat : "De connue aux États-Unis) fait un nu- notre temps, l'homme n'avait méro superbe dans le rôle de Bren- qu'une parole ; aujourd'hui, nous da, la patronne pleine d'énergie, râ- leuse de première et généreuse mal- africaine, née en 1918 à Newport gré ce qu'elle en dit. Tendre et drô- News (Virginie). le, ce film à contre-courant a obte- nu le César du meilleur film étran- Dès son jeune âge, elle monte sur ger en 1989. scène ; son frère, Bill Bailey est danseur de claquettes. À 15 ans, el- le gagne un concours de chant ama- BAHULA Julian teur, fait des tournées avec plu- sieurs groupes et remporte un con- Batteur et compositeur africain, né en cours de chant à l'Apollo* de Har- 1938 à Mamelodi (Afrique du Sud). lem*. Percussionniste célèbre, il est, dans Elle travaille avec de grands or- les années 60, l'un des fondateurs du chestres de jazz avant de se produi- groupe légendaire de jazz Malombo. re en solo. Son talent la propulse au Il connaît le même succès en Europe top de la variété. Pendant les années avec son groupe fabula. En 1983, il 40, elle travaille avec les grands du est l'un des organisateurs du grand show business black : Noble Siss- concert pour l'anniversaire de Nel- le*, Cab Calloway*. En 1946, elle son Mandela*. Il vit depuis en An- chante à Broadway dans St Louis gleterre où il dirige le groupe Jazz Woman et est saluée comme l'un Africa. des espoirs les plus prometteurs. Discographie : 1964, 1964 Jazz Festi- En 1947, elle débute sa carrière au val Winners ; African Soul ; Soweto cinéma avec Variety Girl. Les suc- My Love; 1982, Jabula With Me. cès cinématographiques s'enchaî- nent, mais elle est surtout connue comme chanteuse de jazz, Carmen BAILEY Deford Jones* en 1955, St Louis Blues en Musicien américain-africain, né en 1958, Porgy and Bess* en 1959. 1899 près de Nashville (Tennessee). En 1967, elle gagne un Oscar pour Bluesman des origines, Deford Bailey son rôle dans Hello Dolly. C'est joue, entre 1928 et 1941, de l'har- aussi l'une des premières stars de la monica dans le spectacle (très télévision avec de très nombreux blanc !) de musique country, Grand shows et des productions depuis les Ole Opry. Pendant de nombreuses années 50, notamment The Milton années, il est le seul Black à y parti- Berle Show, Silver Spoons (feuille- ciper. Peut-être est-il aussi le pre- ton), The Pearl Bailey Show mier à avoir enregistré à Nashville, (1971), Cindy Eller: A Modem devenu depuis les années 50 l'un F aÙy Tale (1985). des hauts lieux de la musique po- Elle est aussi l'auteur de plusieurs pulaire aux États-Unis. livres, dont son autobiographie, The Raw Pearl (1968) et Talking to Myself (1971). Une artiste prolixe BAILEY Pearl et une réussite professionnelle me- Chanteuse et actrice américaine- née de main de maître. Discographie : Pearl's Pearls ; Back par son originalité et son sens du on Broadway, Hello ; Pearlie May. rythme. Elle tourne quelques films, jugés mineurs par certains : Zouzou Filmographie : 1947,Variety Girl ; en 1934, avec Jean Gabin dont 1948, Isn't It Romantic ; 1950, Arms and the Man, Bless You All ; 1954 : c'est le premier grand rôle. Zouzou ou l'histoire d'une ouvrière deve- House of Flowers ; 1955, Carmen nant une star du music-hall. Sui- Jones [Preminger]; 1956, That Certain Feeling ; 1958, St Louis Blues ; 1959, vront Princesse Tam-Tam, où elle Porgy and Bess ; 1960, All the Fine chante la merveilleuse chanson écri- Young Cannihals ; 1967, Hello Dolly ; te par le jazzman Spencer Williams 1970, The Landlord; 1976, Norman is (un ancien de La revue nègre), La that You ? chanson du bonheur, et Fausse Alerte, tourné au début de la Se- conde Guerre mondiale. BAKER Joséphine De nationalité française depuis 1937, son courage durant la Secon- Chanteuse et danseuse américaine- de Guerre mondiale lui vaut la re- africaine, née à Saint Louis en 1906, morte à Paris en 1975. mise de la Légion d'honneur et la médaille de la Résistance. Sa répu- "J'ai deux amours, mon pays et tation de chic fille devient celle Paris..." Qui ne se souvient ou n'a d'une femme généreuse lorsqu'elle entendu son grand succès interna- elle adopte douze enfants du mon- tional ! Après avoir été secrétaire et de entier. Une autre manière de lut- assistante de la célèbre chanteuse ter contre le racisme dont elle a de blues Bessie Smith*, elle est re- souffert, même à ses heures de marquée à Broadway, dans Shuffle gloire, notamment durant ses tour- Along (1922) et Chocolate Dandies nées aux États-Unis dans les an- (1924). nées 30. Cette femme magnifique En 1925, elle débarque à Paris avec meurt complètement ruinée en La revue nègre et fait partie de 1975, après une dernière tournée nombreuses revues aux Folies Ber- mémorable. Une personnalité ex- gères et au Casino de Paris. Adop- ceptionnelle et une artiste interna- tée d'emblée par les artistes surréa- tionale inoubliable. listes comme par le grand public Discographie : J'ai deux amours, La français, Joséphine Baker abandon- ne son célèbre costume de bananes petite Tonkinoise... Voir les compils : Joséphine Baker et 50 Years of Song et devient une vedette adulée. Elle (EMI). fait le tour du monde en chantant dans sa langue d'adoption, le fran- Filmographie : 1927, La Sirène des çais. Elle fonde également un night- tropiques [scénario : Maurice Deko- club, Chez Joséphine, où le Tout- bra] ; 1934, Zouzou ; 1935, Princesse Paris se bouscule. Tam Tam ; 1939, Fausse alerte. 1991, La fabuleuse histoire de José- Artiste accomplie, Joséphine Baker phine Baker (Film TV de Brian Gib- apporte au music-hall un renouveau son. USA/France/GB - 2h IO - Cou- 'eurs). Interprétée par Lynn Whitfield, destins, c'est Paris. Commence alors cette biographie filmée a reçu 5 Emmy un terrible périple à travers l'Afrique Awards, dont celui du meilleur film et et l'Espagne qui s'achève avec la a été également primé pour les choré- mort de Boubakar. graphies de George Faisan et les arran- L'histoire de Boubakar est tirée de gements musicaux de Ralph Burns. faits réels. Bako, qui signifie en bambara "l'autre rive", désigne la BAKER LaVern France pour beaucoup d'émigrants clandestins maliens. Les périodes Chanteuse de rhythm & blues* de disette et de misère dont souffre américaine-africaine, née en 1929 à une grande partie du continent afri- Chicago (Illinois). cain poussent ses habitants à partir Une voix puissante et chaude dé- pour tenter de survivre. Un regard couverte par le chef d'orchestre bouleversant sur la condition d'im- Fletcher Henderson* à la fin des migré, le racisme et l'égoïsme. années 40. LaVern Baker s'adapte Ce film a obtenu le prix Jean Vigo à tous les genres de musique et, en 1978. après quelques petits succès, elle signe en 1955 avec Atlantic*. Sa carrière décolle avec des tubes tels BALDWIN James que Tweedle-Dee (1955), 1 Cried a Écrivain américain-africain, né à Tear (1958) et Jim Dandy. Elle se New York en 1924, mort à Paris en retrouve, au début du rock and roll, 1987. parmi les plus grand(e)s Blacks de Fils de pasteur, James Baldwin prê- l'époque. che très jeune à Harlem. Il a 19 ans Discographie : Real Gone Gai (Charly). quand il termine son premier ro- man, Les Élus du Seigneur (Go Tell It on the Mountain) à Paris. Cette ville sera d'ailleurs le décor de son BAKO, L'AUTRE RIVE second roman, Giovanni's Room 1978 - Film de Jacques Champreux (Mon ami Giovanni), qui met en et Cheik Doukouré*. scène un jeune homosexuel améri- France/Sénégal - lh50 - Couleurs. cain-africain. Rapidement, c'est le Scénario : Jacques Champreux et succès. Cheik Doukouré. Images : Jacques L'homosexualité, la marginalité so- Ledoux. Montage : Andrée Devan- ciale et la discrimination raciale re- ture. viennent tout au long de son œuvre Avec : Sidiki Bakaba, Doura Mane, dans une analyse complexe des si- Cheick Doukouré, Guillaume Kor- tuations et des personnages qui lut- rea, Martin Trevières. tent pour leur identité tout en s'y emprisonnant. Le film documentai- En janvier 1972, Boubakar fuit la re de Karen Thorsen, James Bald- misère de son pays, le Mali, pour win (1987 - Ih28 - Couleurs) retra- rejoindre son frère à Paris. Bako, ce l'itinéraire de l'écrivain et de c'est le mot de passe pour les clan- l'homme. Un portrait composé d'interviews, de témoignages et Guinée/France - lh40 - Couleurs. d'images d'archives, permettant de Scénario : Cheik Doukouré et David comprendre l'engagement poli- Carayon. Images : Alain Choquart. tique de cet auteur exceptionnel. Décors : Yan Arlaud. Montage Mi- Bibliographic : 1953, Les Élus du Sei- chèle : Robert-Lauliac. Musique : gneur (Go Tell It on the Mountain) ; Loy Ehrlich, Ismaël Isaac et Boom 1956, Mon ami Giovanni; 1961, Ano- Baas. Son : Valérie Longeville. ther Country (Un autre pays) ; 1963, Production : Chrysalide Film, F2, La prochaine fois, le feu (The Fire Canal +, Bako Productions. Next Time) ; 1964, Blues For Mister Avec : Aboubacar Sidiki Soumah, Chai-lie ; 1968,Tell Me How Long the Salif Keita, Habib Hammoud, Ma- Train's Been Gone, Harlem Quartet. riam Kaba, Agnès Soral. Bandian a 12 ans. Dans son village BALLARD Hank de Makono, il partage son temps entre l'école, le foot et les travaux Chanteur et compositeur améri- domestiques. Il est fou de joie cain-africain, né en 1936 à Détroit. quand une jeune femme médecin, D'abord tourné vers le rhythm & Madame Aspirine, lui offre un blues en compagnie des Midnigh- "vrai" ballon de football. Malheu- ters avec qui il produit quelques reusement, son bonheur est de tubes à partir 1954, Hank Ballard courte durée... Le ballon, après un enregistre The Twist en 1959, enre- tir malencontreux, déclenche une gistrement historique s'il en est. Non, le créateur n'est pas Chubby série d'événements qui mettra le Checker*, mais Hank Ballard et les feu au village. Affolé, le jeune gar- Midnighters. Seulement voilà, ils çon s'enfuit à Conakry et découvre loupent leur passage à la télé et la grande ville avec les yeux de sont remplacés par Chubby Chec- Candide. Une dure réalité pour ker qui devient le roi du Twist ! l'adolescent qui rêve de ballon Malgré l'usurpation involontaire de d'or, récompense suprême. Après leur succès par Chubby Checker, ils bien des péripéties, la chance lui sourit en la personne du directeur

sortiront quelques titres fameux au d'une école de football. début des années 60 : Finger Poppin' Time et Let's Go, Let's Go, Let's Go. Un conte réaliste et parfois sombre, Sur l'émergence du twist et le vrai mais toujours avec une pointe créateur de ce raz de marée, voir le d'humour et de tendresse. Bandian film documentaire de Ron Man, fait des rencontres et confronte des Twist (1993). situations difficiles... mais garde son sourire malgré les épreuves.

Discographie : 1985, What You Get Difficile d'oublier la vision de Ban- When the Gettin Gets Good. dian captant l'attention de tout un

stade et des joueurs quand il drib-

ble et danse avec le ballon en haut BALLON D'OR (Le) des tribunes. Un merveilleux jeune

1993 - Film de Cheik Doukouré*. comédien pour un récit d'appren- tissage de la vie. Un film lucide et BAL POUSSIÈRE optimiste. 1988 - Film d'Henri Duparc*. Côte d'Ivoire - Ih31 - Couleurs. Avec Bakary Bamba, Tchelley Han- BALOGUN Ola ny, Naky Sy Savane, Thérèse Taba, Cinéaste africain né à Aba (Nigéria). Anne Kakou, Odile Diarra, Natou Koly, Bertin Kouakou. Après un passage à l'IDHEC (éco- Un chef de village a déjà cinq le de cinéma, Paris), Ola Balogun femmes, mais cela ne lui suffit pas est attaché de presse diplomatique. et il décide d'en épouser une sixiè- En 1968, il rentre au Nigeria et tra- me. Ainsi, il en aura une pour cha- vaille avec Film Unit, puis dans la que jour de la semaine. Mais la section cinéma du centre d'Études nouvelle épouse est une fille délu- africaines de l'université d'Ife, avant rée qui ne l'entend pas de cette ma- d'être responsable de la section au- nière. De quoi provoquer une série diovisuelle au musée national de La- de situations où abondent gags et gos, fin 1993. Il fonde alors sa so- quiproquos. Demi-dieu, c'est ainsi ciété de production. qu'il s'est prénommé étant le maî- Ola Balogun est l'un des réalisa- tre après Dieu, se prend lui-même à teurs africains les plus prolifiques. ses fantasmes de polygamie com- Entre 1969 et 1984, il réalise une me à autant de pièges dont il est fi- nalement la victime. vingtaine de courts et de longs mé- trages, notamment au Brésil et au Quoique différent par son ironie Ghana. Il est à l'origine de l'intro- acerbe de la dominante des films duction en Occident de l'opéra-folk africains, Bal poussière développe Yoruba. Sa production documentai- toute la veine humoristique et ro- re récente s'attache principalement à manesque de la comédie africaine. présenter les réalités du continent L'Afrique y est représentée dans une succession de saynètes co- africain, d'une perspective africaine. casses et une série de dialogues Un hommage lui a été rendu lors aussi drôles que savoureux. La vie du premier festival* international au quotidien d'un village africain de cultures noires de Paris, en ou conte ironique d'un polygame 1994. dépassé par les événements. Filmographie : 1971, Les ponts de Pa- Le film a remporté le Grand Prix ris, 1972, Alpha, In the Beginning ; au festival d'humour de Chamrous- 1975, Amadi; 1976, Ajani Ogun ; 1977, se en 1988. Musik-Man, A deusa negra ( Une déesse noire) ; 1979, //'

BARRISTER Sikiru Ayinde Chanteur-compositeur africain, né BARTHE Richmond en 1948 à Lagos (Nigéria). Artiste américain-africain, né en Yoruban et musulman, il est le 1901. créateur du fuji*, mélange de juju* Sculpteur de la Harlem Renaissan- et d'apala* (voir Musiques afri- ce*, Richmond Barthe est un créa- caines). Sikiru Ayinde, alias "Bar- teur de formes inspirées de l'art afri- REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier les personnes suivantes pour leur contribution à nos recherches ou à leur assistance technique dans la réalisation de cet ouvrage :

Amnesty International, Laurent Baudouin, Christian Boirai, Danièle Bouchan, Patti Britto, Jean Caillaud, Francine Carpon, Olivier Davanture, Emma de Lignères, Romain Décoret, Rose-Hélène Deplasse, Alice Depret, Alain Dervin, Laurent Desideri, Manu Dibango, Lydie Dooh-Bunya, Bernard Duroux, Tarek El-Heneidi, Gary Fields, Dominique Gentot, Gyslaine Grégoire, Gil Haselberger, Synnove Hjorthol, Barry David Horwitz, Liz 11er, Jamie Kosky, Christine Laffargue, Marianne Launay, Véronique Lesaine, Marie-Odile Masson, Jean-Michel Montu, Maryse Moreau, Kufi Mvuika, Élisabeth Noizet, Franco Manara, David Murphy, Serge Noël-Ranaivo, Neidra Palier, Patricia Pinard, Armand Pirrone, Bruce Portis, Mydia Portis, Lucien Schalck, Sylvain Sigre, Cynthia Simon, Isabelle Telle-Melt, Nathalie Tisserand, Patricia Treguer, Nelly Trumel, Christine Tune, Ellen Wright, Patricia Zerah et tous à la Discothèque de Radio France. CRÉDITS PHOTOGRAPHIQUES

Mise en page Danièle Bouchan

Joséphine Baker (Harlingue-Viollet), Toto Bissainthe (Lipnitzki-Viollet), Les Nègres (Lipnitzki-Viollet). [Roger-Viollet]

Muhammad Ali (Larry Schiller), Carl Lewis (Jose Azel), Nelson Man- dela (Alon Reininger), Spike Lee (Jean-Pierre Marois), Toni Morrison (James Keyser) [Contact Press Images].

Fresque de Zouro, Cynthia, Luther Allison, Koko Ateba, Ray Lema, Salik Keïta, Papa Wemba, Touré Kounda, Manu Dibango, Johnny Clegg, Savuka, Lokua Kanza et son groupe, Angélique Kidjo et ses choristes, Geoffrey Oryema, Black Jews (Christiane Passevant).

Richard Wright avec l'autorisation d'Ellen Wright.

Dee Dee Bridgewater (Francine Carpon).

Bo Diddley (Norbert Hess).

IAM (Delabel).

Billie Hollyday (William P. Gotlieb), Caroline du Nord (Elliot Erwitt), Septima Clark, Malcolm X, Chuck Berry, Tommie Smith el John Carlos, (Droits réservés).