Dee Dee Ramone avec Veronica Kofman

Mort aux ! Traduit de l’américain par VIRGINIE DESPENTES Tiens, puisqu’on parlait des Ramones, le livre de leur bassiste Dee Dee est l’un des trois meilleurs bouquins rock de tous les temps. Me cherchez pas : les livres rock correspondent grosso modo à trois familles caté- goriques. Premièrement, il y a les livres universitaires. Lents, lourds, lugubres. Écrits comme ça, par des professeurs qui accumulent les anecdotes vérifiées et les références de singles disparus sans jamais approcher le quart de la moitié de l’intensité du pire solo de . Des livres, ça? Des pensums! Deuxième catégorie: les dictionnaires du rock. Tous 5 pesant près de 20 kilos. Le rocker les adore. Armé d’un stylo, il les annote en rouge, ajoutant les morts récents. Notamment , 5 juin 2002, Los Angeles. Surdose. Et enfin, bingo: les bizarres brûlots des rescapés du grand huit binaire. Mötley Crüe, le batteur du Band ou Ian Hunter, on prend tout. Parce que ces grands Mort aux Ramones 6 moins àlatélé. En touscas, ni àlaradio,encorerait pas,nullepart. américain décidaquecemouvement punknepasse- Dans untouchantensemble,lemétier dudisque menace pourl’opulente bourgeoisie dubusinessrock. dansladéfonce». comme lui,«sérieux Vicious lepremier, quirévéraitDee Dee, ungars de labassesurleurpremier en1976.Sid album,paru fans apprendront àmoulinerdesaccords outricoter de lancedupunkaméricain.Deux générationsde D’un coup, lesquatre deForest Hill seretrouvent fer deviennent fièrement pros, deviennentsalementbons. Stooges. Lesquatre Ramonesapprennent àladure, sique dix-huitansdurant. morceau, lorsdechaqueconcert, »c’était lui.Gueulait çaavant chaque Three Four marques d’amplis etaccidentsdebagnoles…unevie. tout estrestitué endirect, baffes,lignes,shoots, souffle avant laconclusionvicieuse dupetitchapitre, quedéfinitives, pasmoyencourtes dereprendre son listique, droit aubut,phrases dequinze mots,aussi désossé, sansinutilecirconvolution oufioriture sty- voilà toutàfaitlestyledupersonnage. duJulespique autruc… Vallès branché220volts, ligne, auculdelamachine.AlorsquandDee Dee brûlés racontentladéflagrationvécueenpremière Mais lesRamonesreprésentaient uneformidable Au début,lesRamonessontungroupe derock One TwoEn plusDee Dee étaitunRamone.« décapé, Un livre àl’image desonrock, finalement: : quatre gaminspaumés,fousdesBeatles etdes clas- Du coup la fabuleuse aventure de Dee Dee vire tra- gédie. Que faire ? Restent le camion, la route, les clubs. Déçu par l’ampleur de cette moderne croisade, le groupe accepte toutes les compromissions avec l’idée de départ (« Être les nouveaux Beatles, yeah, yeah, yeah») se colletant avec les bas-fonds de l’Amé- rique puis de la planète, portant eux-mêmes le matos, dix-huit ans empilés à six dans un minibus, on est loin du boeing privé du Zeppelin. Le groupe admet tout, toute cette misère, sauf… Sauf que ça n’em- pêche pas les Ramones de faire une prodigieuse consommation de drogue et d’alcool. Comme des grands. Comme des stars. Tout sauf idiot, Dee Dee ne prêche pas. Il raconte minutieusement l’explosion de sa personnalité. Sa transformation en humanoïde dézingué et querelleur. Dans une crise samouraï ultime, le bouillant bassiste finit par s’autovirer du groupe dont il est fondateur, a trouvé le nom, écrit les principaux hits aussi. C’est ça, l’histoire. Comme une grande virée sur le Rollercoaster de Coney Island. Avec une superbe ten- tative du Victor Hugo punk pour recoller les mor- ceaux de sa pauvre vie. 7 Par un destin taquin, Joey le chanteur allait mourir d’un cancer le 15 avril 2001, juste après la publica- tion de ce livre, juste avant la probable réconciliation, le tribute des grands du rock, le Rock’n’Roll Hall Of Fame et l’inévitable reformation. Depuis ce jour ter- rible de la disparition de son chanteur, Dee Dee se colletait avec son fantôme. Quel culot, ce disparu ! Mort aux Ramones 8 Enfants duRock, (tous deuxétantpassésaux excellent producteur télé» un affirmant aubouillantex-Ramone quej’étais« Stiv etJohnny ontsauvélasoirée (etmabobine)en de cadeau,semblaitêtre d’en découdre illicopresto. àuneprofession quineluiavaitappartenance pasfait ».Son intention,sijeconfirmaiscette rock critique dégainedeconnard Dee Dee affirmaquej’avais «une la formationdumeilleurgroupe detouslestemps, Paris. Déboulantpourpréparer cequiauraitdûêtre serviteur, assisdansunbistrot mexicainducentre de , Dee Dee Ramoneetvotre modeste Ce soir-là,nousétionsréunisàquatre, Stiv Bators, 1990,àParis. Dee Dee Ramone.Un mardi demai ?Moi quivous parle, j’aimêmedînéavec sonnelle sayez pasçachezvous. bleu, seringuedanslebras.Mes chersenfants,n’es- que lafillearetrouvé le bassiste desRamonestout garde pourmacopine,pasdeproblème, ouais,sauf à Hollywood, sonpremier fixdepuishuitans,j’en Watson, maisfutuneoverdose surcanapé,chezlui, diaque enscènecommeMolière etJohnny Guitar comme pourKeith Relf etpas nonpluslacrisecar- Lynyrd Skynyrd, paslachâtaigneélectriquequitue route. son boulotd’Averell Dalton jusqu’au bout desa tant desapropre historique,faisantbien importance Dee Dee lemaudissait,protes- Dans sesinterviews, Vous reprendrez bienunetranched’expérience per- Qui nefutpasunecatastrophe enavioncomme on enresta là). Je n’ai jamais revu Dee Dee et incroyablement, ça m’a manqué. Atypique, le personnage était allé jus- qu’au bout de son destin. Ex-Ramone, écrivain, il publiait, mais tournait aussi régulièrement avec un groupe pro dont il était enfin patron (rires). Ses der- nières années sur terre ressemblent à un chemin de croix, une ultime pénitence. Il se pourrait, et cette notion mériterait d’être très prochainement débattue par des pasteurs, voire des théologiens, que Dee Dee Ramone soit mort en état de semi-sainteté. Comment expliquer alors l’absence totale de réac- tions de la presse mondiale à cette disparition alors que celles du guitariste des Beatles ou du bassiste des Who font le journal de Claire Chazal? Dee Dee avait ce qu’on appelle « une sale réputa- tion». Irrécupérable maniaque en proie à des sautes d’humeur démentes, il avait commis plusieurs crimes, brûlant une nuit la guitare de Thunders, déboulant encore tout récemment à 4 heures du matin chez un ami photographe pour redécorer son appartement à la batte de base-ball… Qu’on se rassure: dans le rock du troisième millé- naire, on ne verra plus trop de voyous comme ce 9 Monsieur Dee Dee Ramone. Braves gens, l’industrie musicale maintient à bonne distance ces vilains punks de cuir noir, leur opposant chaque soir les saines valeurs de la télé karaoké. Peut-être est-ce pour cela qu’on voit de plus en plus de gens se promener avec un casque de Walkman sur les oreilles. Dans le métro, la réalité ou l’espace, ils sont les seuls à entendre Dee Dee Ramone crier «one two three four ». Et ils sont les seuls à entendre les tubes de Dee Dee, ces cartes postales de la misère la plus noire: 53d & Third, Loudmouth, Now I Wanna Sniff Some Glue, , Chinese Rocks. Moi, j’appelle ça un suicide.

Philippe Manœuvre Introduction Dragon volant Si jamais il existe une quelconque logique dans cette vie, alors j’aimerais beaucoup la connaître. Et me voilà, une nouvelle fois, hôtel Chelsea, à New York. Ce que j’ai pu me défoncer, dans cet hôtel… Et, aujourd’hui, c’est ici que je viens décrocher. Bizarre, non? Dans deux semaines, c’est mon anniversaire. Ça me laisse donc quinze jours pour décrocher de la Métha- done, la pire de toutes les drogues, niveau accoutu- mance. Je sais déjà que cette épreuve sera plus difficile que toutes celles que j’ai connues. Aucune chance pour que ça reste anecdotique. Et tous les démons de 13 mon passé reviennent pour me tourmenter. On raconte que le Chelsea est hanté. Je suis prêt à le croire. Juste à l’instant, une libellule entre dans la chambre, elle vole en dessinant des cercles. Un dragon avec des ailes. Un dragon femelle. Comme Connie, un de mes démons d’il y a très longtemps. 14 Mort aux Ramones Introduction diques quej’aidecethôtel, jusqu’au dernierd’entre marcher. Qu’elle aille sefaire foutre. pour quejeregarde lalumière. Raté.Çaneva pas fonce droit dessus.Elle tentedemefaire craquer, vole dessuspar-derrière, puisfaitdemi-touretme s’en foutroyalement. Elle estprisedefrénésie,elleme libellule undecesregards quipourraittuer, maiselle trop marre detoutça.Je vais résister. Je lanceàla Ramone. On étaittouslesdeuxdesjunkies. en 1975.Connieétaitgo-godanseuse.J’étaisun pour nousrevendre delacame.C’étaiten1974,ou pour allerLower EastSide etonatrouvé quelqu’un que mal.On estdescendus,on asautédansuntaxi ce qu’on pouvait, etons’est remis enroute, tantbien si derienn’était. On arassemblénosesprits,enfin, c’est fini.Allez,va tecoucher.» tefaire enculer, «Va façonConnie: nuit», le «bonne bouteille parlafenêtre, labrisantau passage.C’était Et puiselles’était fatiguéetouteseule,elleavait jetéla teur ettentédemetuerentailladantlecouavec. avait pétéunebouteilledechampagne contre leradia- avant l’endroit. ça,elleavait totalement détruit Elle Finalement, elle s’est écroulée etendormie.Seulement, tant detouslesnoms.Connieétaittrès,trèsbourrée. frapper. enmetrai- Elle parlaporte afaitirruption Je vais renvoyer enenfertouslessouvenirs mer- À présent,c’est ledébutdesannées90,etj’enai Le lendemainmatin,onafaittouslesdeuxcomme Donc jemesuismisaupieu. Il yadix-septans,elleentraitdansmachambre sans eux. Je craque une allumette sur la descente de lit et je m’approche de la libellule, par surprise. Je lui mets le feu à la tête avec une autre allumette, puis je la regarde cramer. Ensuite, je me sens de nouveau bien, normal. Alors, je me détends et je fixe un ventilateur débranché, je le fixe en essayant de le mettre en marche, par ma seule volonté. Mieux vaut pas m’em- merder. Si tu connais un tout petit peu la vie, tu com- prendras de quoi je parle… ONE Enfance Deutschland über alles

Ce que je réalise aujourd’hui, c’est à quel point je me suis pris la tête pour des choses absolument sans importance. Probablement parce que je croyais profondément que je n’étais qu’un vaurien. Mes parents étaient atroces. Leurs vies étaient un véritable chaos et je crois qu’ils m’en tenaient pour responsable. Ma mère était une ivrogne, à moitié dingue, trop émotionnelle, sujette à des crises de nerfs durant les- quelles elle se roulait par terre dans tout l’appartement en donnant des coups de poings dans le vide, ou bien elle tombait et martelait le sol, afin que tout le monde comprenne bien que c’était une dure et qu’il ne fal- 19 lait surtout pas l’emmerder. Elle se faisait appeler Tony, ce qui est à peu près aussi ridicule que moi me faisant appeler Dee Dee, si on y réfléchit bien. Non seulement ma mère ressemblait énormément à Connie, ma petite amie du début des années 70, époque où les Ramones débutaient, mais en plus mon père était un être faible, égoïste et alcoolique. Lui 20 Mort aux Ramones Enfance toute laclasse.Ils devaient tendre lebraspourfaire le matin, ilfallaitqu’elle prête sermentaudrapeau,avec s’entretuaient et sebattaientdanslesrues. arrivé aupouvoir, en1933.Communistesetnazis de violence.Ma mère avait deuxansquandHitler est lin étaitalorsunegrandeville,oùilyavait beaucoup parFrédéricdans unhôpitalconstruit leGrand. Ber- Hamburger Hill, pendantla guerre deCorée. ticipé àlabatailledeBulge et, plustard, àlaprisede les raidsaériensquiontdémoliBerlin. Papa avait par- Mamanavait était làpendant bienniquélecerveau. figé, perdu danslevague. Je crois quelaguerre leur avaient touslesdeuxcemême regard, àlafoisvide, et monpère étaitbelhomme,luiaussi.Mais ils était trèsbelle,jedoisquandmêmeluiaccorder ça, lin, ilsformaientvraimentunbeaucouple.Ma mère ville allemandemerdique. merdique pourdéménagerdansuneautre putainde famille devait quitteruneputain devilleallemande devenu sergent-chef, ettouslesdeuxans,toutenotre sept, Mon père avait trente-huit ans,mamère àpeinedix- caine. Ils sonttombésamoureux etsesontmariés. diale, àBerlin, ilétaitenposte avec l’armée améri- a rencontré monpère aprèslaSeconde Guerre mon- peu aumecquej’allaismoi-mêmedevenir. Ma mère aussi ressemblait unpetitpeuàConnie,et Ça n’a pasétéfacile pourelle,àl’école. Chaque Ma mère estnéeàBerlin, undimanche de1931, J’ai vudesphotosdumariagedemesparents, àBer- le belâge … Quand jesuisné,monpère était salut nazi et chanter Deutschland, Deutschland Über Alles et Die Faterland. « Deutschland, Deutschland Über Alles» signifie «Allemagne, Allemagne au-dessus de tout» et il paraît que cette chanson a été écrite par Horst Wessel, un maquereau berlinois, qui s’était converti au nazisme. En 1936, les Jeux olympiques ont eu lieu à Berlin, et la ville était tellement propre qu’on l’aurait crue nettoyée à la brosse à dents. Quand la Seconde Guerre mondiale a commencé, ma mère avait huit ans. Elle a découvert les cartes de rationnement et les îlotiers. Les gens de religion juive ont été obligés de coudre une étoile jaune sur leurs vêtements. Puis il y a eu Krystallnacht, la nuit où les juifs ont été systé- matiquement attaqués dans les rues, et dans leurs maisons. Ma mère se souvenait des hurlements. C’était une petite fille qui n’en avait après personne. Elle était simplement terrorisée. Trois années de bombardements ont suivi. Tous ceux qui avaient entre quatorze et quatre-vingt-quatre ans avaient pour ordre de défendre Berlin. Ma mère avait quatorze ans quand la guerre a pris fin. La ville était remplie de cadavres, il y en avait partout. La rivière 21 était pleine de corps. Ma mère a aidé à les enterrer. J’avais dans les quatorze ans quand j’ai découvert une piscine couverte dans l’une des bases de Berlin. J’ai demandé à ma mère: «Maman, c’est un endroit drôlement bien. Pourquoi tu ne viens pas t’y baigner, avec moi et Beverly? — Non, Douglas, je ne peux pas. 22 Mort aux Ramones Enfance elle savait comment s’habiller, etelle avait un45tours rock’n’roll. C’étaitunebellefouteusede merde, mais famille soittuéedansl’accident. allemande quittelaroute, etquetoutenotre petite ment pitiéquej’espérais,ensecret, quenotre voiture refusait des’arrêter. Mes parents mefaisaienttelle- pour éviterqu’elle nemevomisse dessus,monpère et qu’il fallait quejeluitiennelatêtecôtéportière pour moi.Idem, envoiture, quandelleétaitmalade par lafenêtre duquatrièmeétage.C’étaitbizarre, pourquoi mamère semettaitàbalancerlavaisselle rien n’était. Je n’arrivais pasvraimentàcomprendre lendemain matin,toutlemondefaisaitcommeside deux, jusqu’à cequetoutl’immeuble soit réveillé. Le lui mettaitdegrandesclaques.Ils onthurlé,tousles Mon père étaitassisàcalifourchon surmamère, il se passait. mon litpourallerjeterunœilducouloir, voir cequi venant dusalon.Jepar degrandsbruits de suissorti d’alcooliques. Une fois,j’aiétéréveillé enpleinenuit bagarres entre mesparents, depures empoignades jours enAllemagne.Je mesouviensdeviolentes six ans.On habitaitunebasemilitaire àMunich, tou- vaux etdeshumainsmorts.» guerre. Elle étaitremplie àrasbord dusangdesche- Ceci dit,c’est mamère quim’a faitdécouvrirle C’était mesparents quifaisaienttoutceboucan. Mes plusvieuxsouvenirs remontent àquandj’avais Je mesouviensbiendecettepiscine,aprèsla — Et pourquoi pas? — de Bill Haley et les Comets. Elle avait aussi le disque Going to Kansas City. C’était la fin des années 50, impossible d’ignorer tous les jeunes à cheveux gomi- nés et vestes cintrées qui dansaient autour de la faculté américaine de Munich, juste à côté d’où j’habitais. J’ai essayé d’aller à la fac, mais j’ai échoué dès le pre- mier examen. J’étais trop honteux pour y retourner, sauf à l’heure du déjeuner, quand personne ne pou- vait me voir. Je me cachais dans les buissons et j’es- pionnais les teenagers qui traînaient dans le coin avec leurs transistors. Il n’y a que comme ça que je pou- vais entendre cette musique. Je suis tombé amoureux du rock’n’roll, c’était excitant, c’était provocant. Tout ce qui me semblait être «limite» m’attirait. Comme aller voir La Momie au cinéma avec ma mère, ou Les Dix Commandements, tout seul. Le film durait six heures, alors il y avait des entractes spéciaux : ils ouvraient toutes les portes pour que tout le monde sorte fumer une cigarette, ou juste prendre l’air. Le contraste entre la salle de cinéma, obscure, rassurante et coupée du reste du monde et la lumière du dehors, crue et aveuglante, où tout le monde pouvait se voir, m’excitait. J’avais peur de perdre mon ticket et qu’on 23 ne me laisse plus rentrer. La Momie était un film plus flippant et plus tordu, mais aller voir un film aussi complexe que Les Dix Commandements tout seul était une expérience délicieusement étrange. Je me souviens de mon excitation quand la police a ramené Jimmy Preger, le jeune voyou du quartier, là où on habitait. Il s’était évanoui et ils l’ont remonté 24 Mort aux Ramones Enfance donnait l’impression depétiller. ballon, avec duCocaetdesglaçonsronds. Çalui picolait dubourbonFour Roses dansdegrandsverres était bientrop occupéàboire. Et mamère, pareil. Elle arrivé, ensuite.Papa n’a jamaisvoulu m’expliquer. Il con, sanslevouloir. Je nesaispascequileurest Une nuit,desamisàeuxsontpasséspar-dessuslebal- dans lacave. mère. Avant qu’ils nel’emmènent, ellem’a enfermé chargé, lesflicssontvenus, etilsontembarqué ma la police.Finalement, quelqu’un d’autre s’en est tait notre immeuble.Ma mère mehurlaitd’appeler Madame Preger étaitla mamandeJimmy, ellehabi- chercher Madame Preger.» «Va au solenmecriant: vapes, mamanpiquaitsacriseetpapalamaintenait se passait.J’étaistoutsomnolent,encore dansles en pyjamadanslasalleàmanger, pourvoir cequi l’ouvrent. Je merappellequ’une foisjemesuispointé heures dumatin,ilfallaitencore qu’ils Même à5 mettait lahonte.Jamais depaix,jamaiscalme. taient lebordel jusqu’à cequ’ils s’écroulent, etçame ment glauque. sept ans,j’avais comprisquemonfuturseraitsale- À seize ans,ilétaitdéjàfoutu. Et illesavait. Moi, à peu àlaJames Dean. Il n’en avait plusrienàbranler. »,un vous faire mettre pourcequevous m’avez fait tous sur unbrancard. Jimmy avait uneattitude«allez J’en étaisarrivéaustade oùj’évitaismonpère. Mes parents organisaientdesfêtestrèssauvages. Mes parents ontcontinuéàboire etàboire. Ils fou- J’avais trop la trouille de rentrer à la maison. Je pas- sais le plus clair de mon temps à traîner dans la base, tout seul. Je vivais dans un monde complètement imaginaire. La réalité était trop déglinguée pour moi. Au début des années 60, moi et ma famille, on est revenus pour un moment en Amérique, à Atlanta, en Georgie. Mon père avait été muté là-bas. On a emménagé dans un petit appartement à côté de la base militaire. Ma mère l’avait appelé le «boulevard des punaises». En Allemagne, il n’y avait pourtant pas tellement de punaises. N’empêche que notre appar- tement en était infesté. À la base militaire d’Atlanta, la vie sociale était très active, pour les familles. Alors, on sortait souvent, et c’était fun. Les soldats et leurs femmes étaient jeunes, la plupart d’entre eux n’avaient pas vingt ans, ou venaient à peine de les avoir, et les enceintes du snack-bar de la base crachaient du rock’n’roll, à fond. C’était là qu’on pouvait s’acheter des disques de rock’n’roll, des radio-transistors, de l’aftershave Aqua Velvet ou des chaussettes Gold Cup. Il y avait aussi du rock à la piscine. On aurait dit que ça allait avec le soleil, les comics et les chips. Les week- 25 ends, il y avait des soirées dansantes où jouaient les meilleurs groupes de twist. Maman, ma sœur Beverly et moi-même n’en rations pas une seule. Une fois, mon père et moi étions à un parc d’attractions, en banlieue d’Atlanta. On est passés devant une remorque avec une scène construite à côté. Une tente était montée der- rière, avec des filles en bikini qui dansaient sur du 26 Mort aux Ramones Enfance On n’imaginait mêmepasqu’il existaitautre chose. possible. Vivre danslamisère nousparaissaitnormal. toute cettemerde. On essayaitdeleprendre lemieux baient d’accord pourtenirlesenfantsresponsables de plus soifetquitapaientlesmères, etlesdeuxquitom- tous lemêmeproblème –despères quibuvaient jusqu’à gamins lesvolaient. ethaineux, onavait On étaitcruels de plombauterrainjeu,àchaquefois,d’autres dessus. Si quelqu’un ramenaitdesbillesousoldats s’asseoir surlesbalançoires ets’amusaient àsecracher jamais eu.Autour demonimmeuble,lesgossesvenaient ricains nefontpastrop bonménage. nuyaient, etd’Allemands encolère. AllemandsetAmé- américains enragés,depersonnesàleurchargequis’en- lation dePirmasens étaitunmélangedesoldats peu gênédeledire, tellementc’était pourri.La popu- dessus denostêtes.Quand on habitaitlà,onétaitun nuage noirquipuaitl’égout planaitenpermanence au- taient làtravaillaient àl’une desusinesetunénorme y avait beaucoupdeviolence. Tous lesgensquihabi- masens étaitlegenre d’endroit oùtoutpeutarriver, il nommé enAllemagne.J’avais onze oudouze ans.Pir- scandale etçam’aurait embarrassé. qu’on nes’arrête pas,monpère auraitencore faitun sommes contentésdepasserdevant. J’étaissoulagé der lesfillessedéshabiller, maismonpère etmoinous ment sexy. On pouvait allerdanslatentepourregar- rhythm’n’blues, jouéparunvraigroupe. C’étaitjoli- Je n’avais pasbeaucoupd’amis. En fait,jen’en ai Peu detempsaprès,monpère aétédenouveau C’est à Pirmasens que j’ai été confronté à la violence pour la première fois. Ça s’est passé entre moi et un autre gosse, Krudd. Comme moi, Krudd avait une mère allemande et son père était affecté à la base mili- taire. Il travaillait au réfectoire, il faisait les menus des repas des troupes. Il consacrait tout son temps libre à se saouler au club des appelés et à jouer aux machines à sous. Quant à la mère de Krudd, c’était une vraie « hausfrau » allemande. Elle ressemblait à ce que les Allemands appellent une «putzfrau», c’est-à-dire une vieille taupe édentée, cradingue, toujours à passer la serpillière dans les escaliers et d’une humeur genre «fais bien gaffe». Rien de bien surprenant à ce que Krudd soit aussi sinistre. Il ne pouvait pas en être autrement, d’autant qu’il grandissait à Pirmasens – c’était un pauvre gosse, dès le départ, il était de la loose. Krudd n’avait aucun statut social à l’école. Il était zéro populaire. Il faut dire qu’en plus, il puait, et qu’il était trop gros. C’était un pauvre dégénéré, et tous les élèves de l’école le traitaient comme tel. Ça nous fai- sait quelque chose en commun, lui et moi. On n’était pas populaires. Et on était des loosers. Mais Krudd avait quand même quelque chose pour 27 lui. Il avait une guitare folk. Une Framus Tobacco Sun- burst, qui, étrangement, devenait rock’n’roll dès qu’il s’en emparait et en jouait, avec ses grosses pognes. Ça faisait partie du grand mystère de la guitare. Personne ne savait comment jouer du rock’n’roll, à l’époque, alors je ne me faisais pas prier pour m’asseoir et regarder Krudd jouer. Il me montrait quelques petits trucs, 28 Mort aux Ramones Enfance fallait quejefasse. et avec monpauvre jeudejambes,j’aifaitcequ’il pourquejem’enfort tire enfaisant lecoupdepoing reproduise, alors,commec’était unadversaire trop vais pasrester sans rienfaire enattendantqueçase m’avait déjàbattuuneheure auparavant. Je nepou- plus méchant,etilétaitlegrand.Et, enplus,il allait memettre enpièces,c’était évident.Il étaitle àriendutoutdanscecasdefigure. Krudd serviraient que j’yaille. Tous mesdélires etmesrêveries neme Je nesavais pasmebattre, maisilfallaitquandmême d’un cercle dehurlementsmoqueursetantipathiques. solution. Après lescours,jeme suisretrouvé aucentre ment. J’étaisdégoûté,maisjenevoyais pasd’autre en plusilfallaitquej’assisteàmonpropre enterre- rencontre aprèsl’école, Krudd pourunerevanche. sa leçon.Seulement, selonlecodelocal,ilfallaitqueje il voulait quetoutlemondeaille s’asseoir etcommencer quelabagarrecru étaitfinie, leprofesseur étaitfurieux, pleine figure, etjesuistombéparterre, surlecul.J’ai pourquoi nicomment,ilm’a misuncoupdepoingen les courscommencent,et,sansquejecomprenne ni moi. Un jour, àl’école, ontraînaitensembleavant que avec étaitdeplus enplusperturbé, je sentaisqueKrudd réduite. C’étaitdemafaute,et concentration étaitfort et jem’en suisdésintéressé. Àl’époque, mafacultéde de guitare aperdu desonattrait,cessant d’être nouveau, me suisunpeuentraîné.Mais, assezvite,toutcetruc comme Je m’étais misdans lepétrin,sansavoir rienfait,et The House oftheRisingSun en opentuningetje J’ai sorti une lame. C’était un couteau à cran d’ar- rêt, manche nacré, une lame de dix centimètres de long, tranchante comme un rasoir. Les armes telles que poings américains ou cran d’arrêt étaient en vente libre en Allemagne et tout le monde portait quelque chose sur soi. Ça a aidé Krudd à se calmer, à reculer et à réfléchir un peu mieux. J’ai repris le contrôle de la situation et je m’en suis sorti comme ça, j’ai bluffé pour ma sortie, tailladant les airs, feignant de savantes attaques, et prenant cet air diabolique que je sais si bien faire. Pour moi, cette scène a été importante, car personne, à part mes parents, ne m’avait encore jamais frappé. J’avais peur de Krudd, alors c’était une bonne chose qu’il recule. Pas besoin de préciser que j’ai perdu son amitié dans l’affaire, ni que je m’en fou- tais complètement. C’est aussi à Pirmasens que j’ai découvert la mor- phine. Il y avait une décharge, derrière un garage. Un jour, j’y ai trouvé toute une caisse de gros tubes de morphine cachée dans une poubelle. Un pauvre GI avait dû se la mettre de côté pour plus tard, sans doute pour quand il rentrerait à la maison, aux États- Unis. C’était l’époque où Elvis Presley faisait son 29 service en Allemagne et la rumeur veut qu’il ait com- mencé la drogue à ce moment-là, pour rester debout quand il était de garde, durant les longues nuits gla- ciales d’hiver. La morphine que j’ai trouvée était mélangée à de la pâte vert kaki, qui sortait de tubes géants. On aurait cru des tubes de dentifrice, mais avec des énormes seringues au bout. Il fallait s’enfon- 30 Mort aux Ramones Enfance trouvé: «Qu’est-ce quec’est ça,papa? «Qu’est-ce trouvé: risque deledérangeretje luiaimontrécequej’avais et qu’il n’arrivait pasàsedétendre, maisj’aiprisle voyait toutde suitequ’il avait desennuispleinlatête notre danstouslessens.Çase toutpetitappartement, rond commeunfauve encage,ilarpentaitrageusement cette trouvaille. Quand jesuisarrivé,il tournaiten père. Je pensaisqu’il seraitfierdemoisijeluiamenais j’en airamenéàlamaisonpourlesmontrer àmon trouvé desampoulesdemorphinevers lesbalançoires, rare. Une autre fois, j’étaisauterraindejeuetj’ai d’ampoule depharmacie,oufiole,estextrêmement au coindesmeilleursnuages.Latrouver sousforme plus ancienne.Un ticketpourleseptièmeciel,direct que c’était. Mais,sa porte. àl’époque, toutlemondeignoraitce suite superpopulaire etqu’on feraitlaqueuedevant pareil, àparierqu’ilun truc ilyafort seraittoutde Aujourd’hui, sijamaisquelqu’un mettaitlamainsur terrain dejeu,pourlesmontrer auxautres enfants. dangereux, maisjelesaiquandmêmeemmenéesau de détail,ils’envoie toutletube,illico. grosse, maisunvraitoxico nes’arrête pasàcegenre ça n’avait riend’attirant, l’aiguille étaittellement flige çaàmoi-même.C’estvraiqu’au premier abord, drogues, etçaavait l’air trop dégueupourquejem’in- la chair. Àl’époque, jeneconnaissaisrienaux cer l’aiguille danslacuisseets’injecter lemachindans La morphineestdel’héroïne pure, soussaformela Les aiguillesétaientmenaçantesetavaient l’air — Donne-moi ça tout de suite!» Il a grimacé en m’arrachant la boîte des mains. «Où t’as trouvé ça? Où? — Je sais pas… — Allez dégage!» Je suis parti. Il était fou de rage. Papa détestait la drogue. Je ne sais pas comment, mais même à l’âge de douze ans, j’étais au courant que j’étais un looser. Je ne pou- vais pas m’imaginer un futur. Je me disais que le seul truc pas trop mal que je pouvais envisager de faire, c’était de m’engager dans l’armée. Seulement, je n’étais même pas capable de m’inscrire pour une semaine chez les scouts. J’avais trop la trouille de déranger mon père, je n’osais même pas lui demander la permission d’aller camper. C’est alors que j’ai entendu les Beatles pour la pre- mière fois. Tout de suite après, j’avais mon premier radio-transistor, une coupe Beatles et un costume Beatles. De nos jours, ça semble ridicule, mais en 1963 les Beatles étaient fabuleusement énormes. J’avais l’im- pression d’être fait pour les nouveaux morceaux rock’n’roll qu’ils jouaient sur Radio-Luxembourg, la 31 station radio qui émettait d’Angleterre. Ils passaient des pubs pour les narghilés et programmaient les Searchers, les Beatles ou Dave Clark Five. Avec ma sœur Beverly, on allait voir des films comme Blue Hawai, avec Elvis Presley, ou The Parent Trap (La Fiancée de Papa) avec Hayley Mill. Quand les Beatles ont sorti A Hard Day’s Night, tous les kids 32 Mort aux Ramones Enfance histoires àmoi,dans ma tête,j’avais mascène. m’en foutais del’ambiance àlamaison.J’avais mes à labière, ausautdu lit…Celadit,àl’époque, je au matin,non-stop, si j’avais commencémesjournées sentis plusàl’aise sij’avais tabassémasœurdusoir la maison.Je nesaispas,peut-être qu’ils seseraient je neleurpardonnerai pourl’ambiance quirégnaità jours aussipermanentepourmoi.Je crois quejamais gards. Mes parents constituaientunepunition tou- Douglas Colvin àDee Dee Ramone. dans cenouveau délire, etj’aidécidédepasser un pseudo,maisj’aimaisbienleconcept.J’étaisparti semblait méchammentosédetroquer sonnompour était George Perkins etPaul, Paul Ramone.Çame John LennonsefaisaitappelerJohnny Silver. George gant, sonnerglamour. C’étaitlestyledel’époque, et Beatles. Tout lemondevoulait être prestigieux, élé- soient vraimentconnus,ilss’appelaient lesSilver personne. Çameplaisait.Avant quelesBeatles ne nouveau nom,Dee Dee. Cetypeneressemblait à m’acomment, maiscetarticle donnél’idée demon Je nemesouviensexactementnidupourquoi nidu attiré monattention.Letypeavait l’air d’être dingue. lutteur surnomméGorgeous George aspécialement moi. Je lesairemontés pourleslire. d’un Leportrait caisse de delàilluminés,tous. C’était tangible.On estsortis dans lasalledecinémasonttombésamoureux. Les rebelles m’attiraient nettementplus quelesrin- Un lespoubelles,j’aitrouvé une soirquejesortais Playboy dans labenneàordures derrière chez J’espérais que tout allait s’améliorer quand on repar- tirait à Berlin, la ville natale de ma mère. Mais ça n’a pas été le cas. Alors, bon… Ça ne m’intéressait plus tel- lement. J’avais le rock’n’roll et ça donnait du sens à mon identité. J’essayais d’être le moins possible à la maison et je passais mes journées à chouraver des trucs avec mon copain Robert. On opérait essentiellement au grand magasin Ka De We, tout près de la place Wit- tenberg. On cherchait aussi à piquer des reliques de guerre dans les magasins d’antiquités autour de la place Nolendorff, pour essayer de les revendre à des GI. Avec Robert, on pouvait traîner des heures et des heures dans de vieux bâtiments détruits par les bom- bardements, dans les quartiers tout bousillés, à la recherche de reliques de guerre à refourguer aux anti- quaires. Notre terrain de chasse préféré était la Potz- dammer Platz, où il y avait eu la grande gare, et aussi le bunker de Hitler. Une fois, j’ai trouvé un casque nazi auquel on avait soudé un manche. Il faut croire qu’après la guerre, quelqu’un avait voulu se faire cuire des patates… Ils ont construit le mur de Berlin là où on avait habité. Je me souviens que ma petite sœur, moi et ma 33 mère on prenait la ligne S pour aller rendre visite à mes grands parents, à Berlin-Est. Au lieu d’un Frigi- daire, ils avaient un placard, qui faisait chambre froide. Je ne sais pas pourquoi, mais le lait en Alle- magne ne tournait pas comme il le fait en Amérique. Leur appartement était chauffé au charbon et le beau- père de ma mère avait une petite remise, gardée par 34 Mort aux Ramones Enfance magazines quiparlaientde groupes commelesMon- seul dansmachambre etjelisais un milk-shakeauchocolat. D’autres fois,jerestais tout lais ausnack-bardelabase prendre uncheeseburgeret comme trucs sion rock’n’roll delastationl’armée, ilspassaientdes donc toutseul,avec Kessie leteckel.J’écoutaisl’émis- sœur prenait descours.Papa étaitonnesaitoù.J’étais Maman étaitavec Beverly àl’école de danse,oùma l’heure derentrer dîner. maient surleurpassage.Çavoulait dire quec’était tous lesengins. Tous lesaccla- lesgossesduquartier inverse, toutcliquetant,jusqu’au parking oùétaient heures del’après-midi, lestanksremontaient ensens 4 daient ArgentinishaAlle,vers Grune A Wald. Puis, à pendant uneminutepoursaluerlestanksquidescen- promener Kessie,je sortais notre teckel,etjem’arrêtais cain deBerlin, vers Argentinisha Alle. Tous lesmatins, leurs pauvres armesrusses. des grimacesaux Vopo quimontaientlagarde, avec et moionsecollaitlenezcontre lesvitres, pourfaire Est, letrainnes’arrêtait plusauxstations.AlorsRobert Quand ontraversait Berlin- prenait lemétro ligneE. Alors,avec Robert, on liser letramwaydelaligneS. pouvait paslecaresser, parce qu’il mordait. Greif dormait sous latabledecuisine,maisonne un chien-loupquis’appelait Greif. Toute lajournée, Chez moi,iln’y avait jamaispersonneàlamaison. Par améri- lasuite,onaemménagédanslequartier Plus tard, lesAméricainsn’ont pluseuledroit d’uti- Dang Me de Roger Miller. Ou alorsj’al- 16 et Hit Parader , ces keys, Paul Revere and the Raiders, ou de Dino Dessi and Billy. Je jouais un peu sur la guitare électrique ita- lienne que j’avais achetée au magasin de musique Am Zoo, près de Ausburger Platz. J’y allais tous les jours, je restais devant les vitrines et je regardais les guitares. Celle que je préférais était une Sunburst Echo verte, avec trois gros micros et un vibrato. Les groupes de Berlin se produisaient au Liverpool Hoop et à la faculté américaine de Berlin. Ils instal- laient leurs colonnes sono Selmer et leurs amplis Vox et ils reprenaient les tubes du moment: Working In a Coal Mine, In The Midnight Hour, Gloria des Sha- dows of Knight. Ces groupes étaient extraordinaires. Les meilleurs étaient les Hound Dogs, les Restless Sect et surtout les Boots. À cette époque, j’avais commencé la dope. Il y avait plein de dealers dans le quartier du Braunhoff Am Zoo. Ils remplissaient les seringues hypodermiques de morphine liquide, en pompant directement dans de grosses bouteilles en plastique. La came allemande était toute bizarre, mais elle était marrante. Quand tu la shootais, premièrement, ça faisait l’effet d’une décharge électrique. Puis c’était l’engourdissement 35 total. Je l’aurais volontiers fait plus souvent que ce que je faisais, c’est-à-dire trois ou quatre fois par mois, si j’avais eu moins peur de mon père. Il a fallu que j’at- tende un peu, et que je parte m’installer à New York, pour devenir sérieux sur les drogues. Sur ma liste des trucs importants, les fringues figu- raient en bonne place, aussi. Les vestes Levi’s étaient 36 Mort aux Ramones Enfance nos vies. pédales etnou