Senhaja Sraîr» Jusqu’À La Fin Du Protectorat Espagnol (1956)
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N°: 5 – 4ème année – 1437H / 2966 Amz / 2016G Economie et Développement Processus d’organisation territoriale de la Région de «Senhaja Sraîr» jusqu’à la fin du Protectorat espagnol (1956) ADARDAK Charif : Doctorant en Economie, Gestion et Développement Durable (F.S.J.E.S. Tanger) Résumé : La Région de Senhaja Sraîr est parmi les Régions berbères qui ont connu, avant l’avènement du Protectorat en 1912, un modèle d’organisation territoriale développé, qui est celui de la confédération tribale. Dorénavant, la Région a subi un changement spatial dû à l’intervention espagnole pour administrer et maintenir l’ordre dans le Nord du Maroc depuis 1912 jusqu’au 1956.Cette intervention a bouleversé les relations socio- économiques qui existaient entre les tribus de Senhaja Sraîr, et entre celles- ci et leurs voisins, comme elle a participé à la disparition de la Confédération et de l’identité des Senhaja Sraîr. Dans cet article, on a essayé de présenter l’organisation sociale et politique des tribus de Senhaja Sraîr avant le Protectorat, ainsi que l’enchainement chronologique de l’intervention espagnole sur le plan territoriale jusqu’à l’indépendance du Maroc. Mots clés : Confédération de Senhaja Sraîr, Rif, Berbères, kif, organisation territoriale, Protectorat espagnol… 14 N°: 5 – 4ème année – 1437H / 2966 Amz / 2016G Abstract: Senhaja Sraîr area is among the Berber regions that experienced, before the advent of the Protectorate in 1912, a developed model of territorial organization, which is the tribal Confederacy. Since that time, the region submitted to a spatial change due to the Spanish intervention to administer and maintain order in northern Morocco from 1912 until 1956.This intervention upset the socio-economic relations that existed between Senhaja Sraîr tribes, and between them and their neighbors, as it participated in the disappearance of the Senhaja Sraîr Confederacy and identity. In this article, we have tried to present the social and political organization of the Senhaja Sraîr tribes before the Protectorate, and the chronological concatenation of Spanish intervention in their territory until the independence of Morocco. Key words: Senhaja Sraîr Confederacy, Rif, Berbers, kif, territorial organization, Spanish Protectorate… Introduction Il existe au Nord du Maroc trois Régions qui portent le nom de Senhaja, à savoir: Senhaja Mesbah (qui se divise en deux parties: Senhaja eddel- صنهاجة غدو -Senhaja Gheddou ,( صنهاجة الشمس-et Senhaja chems صنهاجة الظل Les deux premières Régions sont totalement . صنهاجة سراير-et Senhaja Sraîr arabisées ; pourtant, Senhaja Sraîr qui se trouve au Haut Rif Central est majoritairement amazighophone (berbèrophone), vu l’existence d’une proportion très importante de la population qui parle encore un dialecte .الشلحة -berbère appelé localement : chelha Historiquement, ces Régions qui se trouvent au Nord de la rivière d’Ouergha, étaient liées entre elles ethniquement, socialement et économiquement avant l’avènement du Protectorat, en 1912, qui les a divisé entre la France et l’Espagne. De ce fait, Senhaja Mesbah et Senhaja Gheddou se trouvaient sous le Protectorat français, et Senhaja Sraîr était sous le Protectorat espagnol. Désormais, les relations entre ces trois Régions 15 N°: 5 – 4ème année – 1437H / 2966 Amz / 2016G ont été bouleversées et une nouvelle organisation territoriale coloniale a vu le jour, pour créer des nouvelles relations pour ces Régions avec d’autres. Vu leur position stratégique au milieu des montagnes du Rif, les tribus de la confédération de Senhaja sraîr tissaient des relations avec celles du littoral (Bni Boufrah, Bni Gmil, Mestasa, Mtioua), du Rif ethnique (Bni Ammart, Bni Ouriaghel, Bni Itteft, Baqioua), de Ghomara et de Jebala, chacune selon sa situation géographique. Ainsi, cette Région a joué un rôle primordial lors du Protectorat espagnol, où elle a connu des transformations sur le niveau administratif, social et économique. Dans cet article, on a essayé d’exposer le processus du développement de l’organisation territoriale de la Région de Senhaja Saîr, avant et durant le Protectorat espagnol. I. Avant le protectorat espagnol Dans le Haut Rif Central, autour jbel Tidighin, le plus haut sommet des montagnes du Rif, se regroupent un ensemble des tribus qui partagent la même origine ethnique, langue, géographie, histoire, culture, traditions et mode de vie. Tous les chercheurs qui ont travaillé sur cette Région, en l’occurrence Grilli (1926), Coon (1931), Quecedo Ortiga (1931), Renisio (1932), Maurer (1968), Erola (1952), Ibañez (1959)… se sont mis d’accord sur l’appartenance de la majorité des tribus du Haut Rif Central à la confédération des tribus de Senhaja Sraîr, en l’occurrence : Ay Bounsar, Ayt Khennous, Ayt ahmed, Zerkat, Ay Bchir, Taghzout, et Ay Bouchibet. Cependant, il y avait une controverse sur la question d’appartenance des tribus d’Ayt Mezdouy, Ayt Seddat, Ktama et Targuist à cette confédération tribale. Pour résoudre ce différend, on a adopté une approche d’analyse globale : ethnique, géographique, linguistique, sociale, économique, religieuse, politique et culturelle. Ethniquement, Ibn Khaldoun consière Ktama comme une tribu berbère à part entière qui partage avec celle de Senhaja l’appartenance au lignage 16 N°: 5 – 4ème année – 1437H / 2966 Amz / 2016G berbère nommé « Branès » (Chahada, 2000). En outre, la population de la tribu d’Ayt Seddat est d’origine berbère senhaji avec l’existence des sous- douars peuplés par les chorfa khmalcha arabophones. Concernant la tribu d’Ayt Mezdouy, Maurer stipule que cette tribu est d’origine rifaine par ses habitants venus de Bni Ouriaghel (Maurer, 1968), mais en réalité la plupart de cette population est d’origine berbère senhaji avec l’existence d’une population immigrée venue des tribus limitrophes de Bni Ouriaghel et Bni Ammart. Pour la petite tribu de Targuist, une grande partie de sa population est d’origine rifaine (Maurer, ibidem), avec l’existence d’une partie d’origine arabe. Géographiquement, Ktama et Ayt Seddat appartiennent au massif de Senhaja Sraîr. Cependant, Targuist et Ayt Mezdouy n’y appartiennent pas et elles forment ensemble un bassin vaste. Linguistiquement tous les douars d’Ayt Mezdouy parlent chelha (Tasenhajit), la langue berbère des Senhaja Sraîr, à l’exception des douars d’Ay Bouzemmour et Ay Boudjay qui parlent le berbère rifain. De même, tous les douars d’Ayt Seddat parlent chelha à l’exception des sous-douars peuplés par les chorfa khmalcha, en l’occurrence Azaghar qui appartient au douar de Tiseghra, Tighanimin qui fait partie du douar de Tidouin et Ihajiouen qui appartient au douar de Talarouaq. De surcroit, chez les Ktama majoritairement arabisés, on trouve que tous les douars de la fraction d’Abdelghaya parlent chelha à l’exception du douar d’Izdad et une partie du douar Sahel (il s’agit des sous-douars suivants : Aghbal, Azer Mezdi, Achkour et Ifersioua), comme on trouve dans la fraction de Souahel (arabophone) un douar qui parle chelha qui est Talghount, et dans la fraction d’Amzaz (arabophone) le douar d’Ighmad parle aussi chelha. Pour Targuist, tous les douars parlent le dialecte arabe mêlé du berbère senhaji sauf le lignage d’Izeggaghen au douar d’Ayt Azza qui parle le berbère rifain. Socialement, ces quatre tribus partagent avec les autres tribus de Senhaja Sraîr les mêmes valeurs et mode de vie sauf pour les maisons à toit à double pente, qui caractérisent l’architecture des Senhaja Sraîr, qui se trouvent, en plus des sept tribus de Senhaja Sraîr, dans les tribus de Ktama, Ayt Seddat 17 N°: 5 – 4ème année – 1437H / 2966 Amz / 2016G et une partie d’Ayt Mezdouy. Dans le reste de cette dernière et dans toute la tribu de Targuist, on trouve une architecture assimilée à celle des maisons rifaines. De plus, la ville de Targuist, crée en 1926 par les militaires espagnols, où on trouve une population majoritaire d’origine senhaji est devenue la capital des tribus de Senhaja Sraîr. Economiquement, le souk de la ville de Targuist représente le carrefour commercial des Senhaja Sraîr venant essentiellement des tribus d’Ayt Mezdouy, Targuist, Ay Bounsar, Ayt Khennous Ay Bchir et Ayt Ahmed. Ainsi, le souk du centre d’Issaguen, chef lieu d’Ayt Seddat, attire une partie de la population de Ktama aussi. En outre, la culture du cannabis propagée dans les sept tribus de Senhaja Sraîr est la seule ressource actuelle pour les Ktama, Ayt Seddat et une partie des Ayt Mezdouy, et deux douars de la tribu de Targuist à savoir Guermelloul et Taourirt. Religieusement, les tribus de Targuist, Ayt Mezdouy et Ayt Seddat étaient encadrées par la zaouia des Khmalcha qui régissait d’autres tribus de la Confédération des Senhaja Sraîr, à savoir Ayt Ahmed, Ay Bounser, Ayt Khennous et Zerquet. Politiquement, les tribus qui connaissaient la présence de zaouia des Khmalcha (Ayt Ahmed, Ay Bounser, Ayt Khennous, Zerquet, Ayt Seddat, Ayt Mezdouy et Targuist) étaient encadrées et gérées au niveau politique par les chioukh de cette zaouia dont l’un d’eux, Sidi Mohamed El Kbir, est reconnu par Dahir du Sultan comme Pacha des Senhaja. Ils gouvernent la montagne, fractionnée en 4 circonscriptions : 1- Ktama, 2- Taghzout et Bni Bouchibet, 3- Bni Ahmed et Bni Bchir, 4- Bni Bounsar, bni Khennous, Bni Seddat et Zerkat (Maurer, ibid). Actuellement, et à cause de l’introduction de la culture du kif dans toute la Région de Senhaja Sraîr à partir des années soixante du 20ème siècle, le pouvoir des Khmalcha est substitué par celui des « beznassa » (trafiquants des drogues). Culturellement, ces quatre tribus partagent avec