Fausse objectivité, vrai assujettissement : le poids déterminant de la finance et de l'idéologie mondialiste sur les médias français publics et privés

Les « grands médias » au pas cadencé ?

La disparition apparente de la déontologie professionnelle⋅ au sein des « grands médias » à la lumière de la crise politique économique et sociale : stratégie éditoriale militante et asservissement à tous les étages paraissent être la règle. Les « grands médias » sont sans doute majoritairement devenus les troupes de choc du conservatisme, de l'austérité et de l'atlantisme promus par les oligarchies financières occidentales.

Par Alain Pucciarelli

Essai réalisé essentiellement avec des informations en accès libre sur internet, téléchargeable librement sur pucciarelli.fr

⋅Le terme déontologie professionnelle fait référence à l’ensemble de principes et règles éthiques (code de déontologie, charte de déontologie) qui gèrent et guident une activité professionnelle. Ces normes sont celles qui déterminent les devoirs minimums exigibles par les professionnels dans l’accomplissement de leur activité. (source Wikipedia)

1 Promenade dans la banlieue médiatique de l'état profond

Avis aux perfectionnistes et aux sceptiques

La rédaction de ce manuscrit s'est inscrite dans les deux années et quelque qui précèdent la glorieuse année 2016. Mes recherches sur Internet peuvent donc aujourd'hui s'avérer « dépassées » pour certaines d'entre elles. (Ma technique de mise en page et de « copier coller » étant imparfaite, des imperfections formelles émaille le texte) Ce travail ne vise en aucun cas à définir précisément une réalité chimiquement pure. Il a juste la modeste ambition de constituer un outil pour tous ceux que la vérité sur le réel fonctionnement de nos médias interpelle. Les idées extrémistes racistes et/ou xénophobes n'ont pas leur place dans ces pages. Mon enquête est pragmatique, mais vigilante. Chacun est bien entendu invité à se lancer à son tour dans la passionnante recherche d'une information, forcément partielle, mais indicative d'un état de notre société et de ses élites, dont en principe font partie nos « grands journalistes ». Il reste que, par exemple, avoir été membre des « Young leaders » une fois (groupe d'influence atlantliste, instrument parmi d'autres de l'hégémonie des Etats unis, qui a un grand succès chez nos hommes politiques, dont par exemple MM. Hollande et Juppé, et notre personnel de presse), et même si l'intéressé(e) prétend que c'est du passé, est une notation pertinente quant au réel positionnement politique et philosophique de l'individu en question. Les angles d'attaque des différentes parties du livre doivent tout à la fantaisie de l'auteur, qui a tout d'abord fait cette enquête amusante pour statuer sur ses propres interrogations. Certains noms ne sont pas cités, d'autres ont l'honneur de détours assez long. Pour encourager le lecteur à poursuivre sa propre enquête, j'ai parfois opté pour la publication d'articles entiers, ou bien pour des extraits d'articles internet, voire pour de simples liens. Je cite toujours mes sources. Tout ceci représente avant tout un travail d'accumulation d'informations disponibles sur le net, auxquelles leur organisation en un discours cohérent donne puissamment sens. Il ressort de tout cela que les grands médias français sont bel et bien devenus dans leur majorité des « instruments oligarchiques » au service des puissants, de l'atlantisme, et de son rejeton l'européisme. On évoque à présent l'existence de réseaux d'influence russes, avec en fond d'image la silhouette de l' « ignoble » Vladimir Poutine. Ces réseaux existent peut-être, et pourquoi pas, mais il est clair que les réseaux atlantistes tiennent fermement la boutique dans notre pays. Ce travail permet aussi ça et là d'engager une réflexion générale sur qui nous a été construit depuis au moins le septennat de M. Mitterrand, l'objet « UE » ayant été conceptuellement mis sur les fonds baptismaux à la fin de la Seconde guerre mondiale (voire avant) par les Etats Unis, qui sont maintenant, via l'UE et l'Euro, maîtres chez nous et déterminent largement nos politiques économiques et étrangères, par Bruxelles interposée. C'est en tout cas la conclusion à laquelle je suis parvenu au terme de la rédaction de cet ouvrage. Si l'on peut aboutir à la conclusion inverse, voire à une vision notablement différente en argumentant aussi solidement que possible, alors, vive le débat, dès lors que l'auteur s'est engagé dans cette aventure en essayant d'avancer avec un regard objectif, mot fort à la mode, si peu inscrit dans le fait médiatique. J'ai encore choisi de publier des textes qui disent le contraire de ce que l'on nous raconte tous les jours sur les médias mainstream, afin que chacun puisse se faire une idée personnelle à propos des arguments des uns et des autres. Je vous prie en conséquence, éventuel lecteur, d'aborder ces pages comme l'on se promène

2 dans un jardin. Chaque partie (voir table des matière ci-dessous) a sa propre cohérence. On peut se promener à sa guise en effeuillant ainsi le contenu de chacun des chapitres sans avoir lu ceux qui précèdent ou qui suivent. Ce choix a imposé quelques redites. Le visiteur n'est responsable ni des couleurs ni de la présence des essences, et encore moins de la saison qui peint la nature. Mais il doit vivre avec et au moins connaître, fût-ce à minima, les raisons pour lesquelles le monde qui l'entoure lui renvoie l'image qu'il perçoit. Puis s'interroger sur sa propre perception. Bonne lecture.

3 Table des matières

Avant-propos, page 8

I Parti pris : évacuer l'air du temps, page 10

II Journalisme (?), page 17

III Les regards alternatifs, page 47

IV Promenade dans le monde de la bienpensance, page 58

V Quid des droits l'homme ? Le poids de l'oligarchie, page 69

VI Le capital humain, page 85

VII Atlantisme : un puissant système idéologique mondialisé, page 92

VIII Les racines de l'atlantisme dans les médias, page 152

IX Quelques portraits de « grands journalistes » et assimilés, page 176

Conclusion page 239

Postface : page 278 Une réalité différente, cela vous tente ?

4 Remerciements

Ce travail doit beaucoup à quelques sites internet qui font un travail indispensable d'éclaircissement et d'analyse susceptible d'informer et de nourrir la réflexion des citoyens curieux de la « chose publique », de ses modes de fonctionnement, et des problématiques liées à la vie démocratique en , en Europe et ailleurs aussi. Il se trouve que « la toile » a pris aujourd'hui une importance particulière face aux dérives de la « grande presse » qui paraît trier les informations et ses sources selon une même grille, proposant une vision appauvrie et souvent tendancieuse des réalités qui frappent à nos portes. La presse est née du désir de démocratie et d'expression sous l'ancien régime. Sous des formes diverses, bien avant la naissance des journaux « modernes », à savoir les entreprises de presse. Elle a été le vecteur des voix oppositionnelles, de la révolte, de l'exigence morale, bref, de l'idée de liberté que se faisaient des gens instruits et courageux face au monde féodal et aristocratique. Elle a contribué à créer l'opinion publique, déjà déterminante dans le déclenchement de la Révolution de 1789, qui s'est ensuite affirmée en France tout au long du XIXe siècle et bien entendu au-delà. L'écrit contestataire a longtemps été sa raison d'être même quand elle est devenue « populaire », et que son rôle dans le fonctionnement de la démocratie dite bourgeoise s'est révélé indispensable, irremplaçable. Pendant l'Occupation, face à la presse de collaboration sont nés des journaux dans la clandestinité dont certains ont eu une vie officielle après la Libération. En 1945, l'une des tâches du Conseil National de la Résistance a été de libérer les médias de l'emprise de l'argent qui s'était peu à peu imposée et avait conduit certains d'entre eux à véhiculer la propagande des occupants et de leurs collaborateurs français. On peut dans tous les cas affirmer, en dépit des aléas de l'histoire, que le phénomène « médiatique », au sens où quelques personnes se sont longtemps adressées à une multitude pour faire passer des messages de vérité et de dénonciation de l'injustice, est de noble naissance, car lié au souci du bien public. Ce passé instructif, la genèse de l'information en Occident, montre que la presse, fût-ce sous ses formes les plus simples et les plus archaïques, a très tôt été une nécessité dans le développement des idées et d'une conscience sociale, voire nationale. Malheureusement, de nos jours, le pouvoir de l'argent sur le monde médiatique est, à nouveau, devenue une réalité incontestable. Et quand l'argent est tout, la « grande presse », dite professionnelle, qui appartient à des oligarques bien de chez nous, se met tout naturellement aux ordres de ceux qui la paient, même si parfois percent derrière le nuage du conformisme généralisé des informations pertinentes. Le service public d'information pour sa part ne le cède en rien à ses « concurrents », l'Etat étant devenu le bras armé des oligarchies qui le dominent et l'agissent. Certains « grands journalistes » touchent des salaires de PDG. Parallèlement, la masse des professionnels de l'information subit la précarité et les bas revenus. Il faut donc rendre hommage à des sites internet qui font honneur à l'idée de liberté de conscience et d'opinion. Ils ne défendent pas tous des valeurs identiques, mais tous sont le signe que l'exigence d'une parole libre et contradictoire n'a pas disparu avec la mainmise des oligarques sur les grands moyens d'information (le public on l'a dit ne se distinguant en rien du privé sur le plan idéologique), l'omnipotence de la publicité, et les modes standardisés de formation des journalistes, qui sont, à l'instar de nos « élites » économiques ou administratives, formatés dans le cadre d'une idéologie univoque envahissante. Citons donc ici, parmi d'autres acteur de la planète internet, l'OJIM http://www.ojim.fr/ (Observatoire des journalistes et de l'information médiatique), dirigé par Claude Chollet, dont le

5 suivi de l'actualité des médias est remarquable, du fait qu'il montre et décrit sans polémique inutile l'univers médiatique et ses (nombreuses) parts d'ombre. Associons à ce site irremplaçable celui d'Olivier Berruyer, Les-Crises.fr, qui fournit au quotidien des analyses pertinentes et critiques du travail des grands médias et, souvent, de leurs parti-pris outranciers. Ce simple travail de décryptage sans part-pris ni « étiquetage » inutile est aujourd'hui un acte presque scandaleux aux yeux des acteurs reconnus du système médiatique. C'est exactement celui que ce texte entend prolonger et approfondir. Une liste des sites utilisés figure en fin d'ouvrage. Merci donc à tous ceux, ils sont assez nombreux, dont le travail m'a été si utile.

6 Les « grands médias », une force politique majeure omnipotente mais non élue

“Plus un peuple est éclairé, plus ses suffrages sont difficiles à surprendre. […] Même sous la Constitution la plus libre, un peuple ignorant est esclave.” [Condorcet] “On avait parfaitement compris, longtemps avant Georges Orwell, qu’il fallait réprimer la mémoire. Et pas seulement la mémoire, mais aussi la conscience de ce qui se passe sous nos yeux, car, si la population comprend ce qu’on est en train de faire en son nom, il est probable qu’elle ne le permettra pas.” [Noam Chomsky] “Plus une société s’éloigne de la vérité, plus elle hait ceux qui la disent.” [George Orwell] “Dans une société bien huilée, on ne dit pas ce que l’on sait, on dit ce qui est utile au pouvoir” [Noam Chomsky] (source les-crises.fr, extrait)

Ce contexte où l'argent et son pouvoir sont rois s'impose dans le cadre d'une influence atlantiste prégnante, qui contrevient au concept d'indépendance des esprits, à la liberté des débats, et s'oppose à la renaissance d'un véritable pluralisme politique. On peut avancer que, dans l'Union européenne, quand l'Etat s'est débarrassé de bon nombre de ses pouvoirs régaliens, il est devenu très difficile de faire entendre une réflexion réaliste sur ce que pourrait être une réforme de la presse, et une transformation de ses modes de fonctionnement dans le cadre national. La presse est aujourd'hui un enjeu stratégique de première importance. Aucun véritable changement ne sera durable sans le retour d'un monde médiatique pluriel et contradictoire susceptible d'interroger librement la réalité politique et économique de l'heure, et d'éclairer vraiment les citoyens quand certains journalistes, oublieux de leurs missions, prétendent officiellement livrer une vérité univoque contre toute idée alternative. En cela, ces nouveaux directeurs de conscience sont devenus des propagandistes. Dans de nombreux cas, payés directement ou indirectement par l'argent public. A.P.

7 Avant propos

En France, en Europe, aux Etats-Unis, les médias « libres » donnent de sérieux signes de dysfonctionnement, ne serait-ce qu’à travers la fréquente similarité de leurs discours. De toute évidence, la « liberté » ne signifie plus le pluralisme des opinions. Signifierait-elle à présent le contraire, à savoir une uniformité, finement modulée, savamment présentée comme « naturelle » et exclusive d'avis divergents (traduction : « nous » sommes la vérité, « ils » sont le mensonge...) ? Chez nous, on glose plus volontiers sur la propagande qui sévirait en Russie que sur l’embrigadement des « grands médias » bien de chez nous au service des politiques d’austérité et des stratégies atlantistes qui nous entraînent dans de multiples conflits. Quand aux « droits de l'homme », ils cessent visiblement d'être pertinents à la frontière de nombreux pays, la Grèce, l'Espagne, le Portugal par exemple, ou pour d'autres raisons, l'Arabie saoudite, ou le Qatar, ou encore devant le portail des entreprises françaises et européennes qui licencient à tour de bras en continuant à allouer des dividendes somptueux à leurs dirigeants, devant aussi la sauvagerie de la société US, avec ses sordides stratégies pour rendre acceptable la peine de mort, ou les « cartons » de sa police sur les noirs, manifestants ou pas (etc...). En revanche les « droits de l'homme » reprennent tous leurs droits face à la Russie et à son président, véritable réincarnation du Démon que l'Occident, éternel « chevalier blanc », se doit de combattre et de terrasser. Au gré de la volonté US, tel qui était hier l'ennemi du genre humain (le président syrien, l'Iran) peut se muer en allié présentable, ce qui prouve bien qui donne le « la ». On peut supposer que, dans le cas de la Russie, les choses se passeraient de la même manière pour peu que Washington en décide ainsi. Peut-on accepter un tel univers médiatique, omniprésent, qui tient plus à travers ses discours convenus du conte de fée ou du film d'horreur que d'un mode d'information adulte, mature, honnête, apte à éclairer un contexte économique, politique et militaire complexe et très dangereux ? Comment un continent aussi éduqué et sophistiqué que l'Europe a-t-il pu convertir aussi radicalement en quelques décennies sa « grande » presse et sa pensée économique et géopolitique officielle au simplisme venu d'Outre Atlantique, à savoir, pour aller vite, la mise en scène ad nauseam de « la lutte du Bien contre le Mal »? Si donc nous avons choisi de parler des « grands médias » (ce que nombre de commentateurs font à présent régulièrement), et par voie de conséquence des « grands journalistes » qui les animent (ce qui « ne se fait pas » souvent), nous avons le devoir de comprendre ce qui se passe dans une « corporation », elle se conduit souvent comme telle, qui se reconnaît officiellement dans le pré carré « institutionnel » de la déontologie professionnelle et de la liberté de conviction, au fil d'un engagement grégaire frauduleusement abrité derrière les « droits de l'homme » et un sourcilleux mais problématique souci de la démocratie. Nous serons donc obligés de nommer le « militantisme atlantiste » aussi bien sur le plan économique que géostratégique d'une partie de la profession, mais aussi de dénoncer parallèlement l'asservissement/collusion (voire la consubstantialité) avec les oligarchies en place qui spécifie apparemment une large majorité de ses membres. Ce texte s'appuie sur des informations et des documents que l'on trouve sur le Net en libre accès. C'est donc Wikipedia que nous avons prioritairement sollicité pour définir le terme d'asservissement, et celui d'aliénation, moins précis et compréhensible que celui de « militantisme » qui pourtant paraît souvent justifié : « En sciences sociales, l'asservissement est la mise en servitude, en esclavage, en domination ou en aliénation. (...) La notion d'aliénation (du latin : alienus, qui signifie « autre », « étranger ») est généralement

8 comprise, en philosophie, comme la dépossession de l'individu, c'est-à-dire la perte de sa maîtrise, de ses forces propres au profit d'un autre (individu, groupe ou société en général). Il renvoie ainsi fréquemment à l'idée d'une inauthenticité de l'existence vécue par l'individu aliéné. Ce terme est à l'origine un terme juridique, se rapportant à un transfert de propriété. » En la matière, l' « asservissement » peut être décrit comme l'attitude consistant à défendre bec et ongle des thèses et des idées pour d'autres raisons que leur justesse ou leur nécessité dans le cadre de l'intérêt général, à savoir l'intérêt personnel, qu'il soit moral, professionnel ou autre. Et nous serions de la sorte en dehors de toute déontologie journalistique, du moins telle qu'elle s'impose en principe dans l'exercice du métier de journaliste (Charte de Munich, 1971. Voir plus loin). L' « aliénation » est comme la phase ultime de l'asservissement, le journaliste faisant sienne les idéologies que les structures professionnelles de son métier lui font obligation de défendre sous peine de licenciement ou de mise au placard. Or, peut-il exister une vraie presse si elle est globalement convaincue d'avoir à nouveau trahi ses valeurs fondatrices au moins telles qu'elles nous ont été léguées par le CNR après 1945 en réaction à l'existence d'une presse « aux ordres » dans l'entre deux guerres et pendant l'Occupation elle-même ? Voilà le sujet même de ce travail, qui tente d'apporter quelques éléments de compréhension. Sans oublier pour autant en France la dérive liberticide de l'Etat qui, au printemps 2015, en imposant la « loi sécurité », a mis les citoyens sous surveillance (lire en postface l'interview d'Emmauel Todd), ni plus ni moins qu'aux Etats Unis et donc, à terme, la « liberté de la presse », du moins ce qu'il en reste. Qui en parle encore en ce début 2016, alors que l'état d'urgence consécutif aux attentats du 13 novembre est à présent régulièrement reconduit et que le gouvernement Valls a eu la tentation d'interdire les manifestations contre le projet de loi dite « El Khomri », qui n'est qu'un copié collé des instructions données par Bruxelles, ce que M. jean Claude Junker a clairement confirmé ?

9 I-Parti pris : Évacuer l'air du temps

La France n'est pas le seul pays occidental où des citoyens se posent de graves questions quant au travail des grands médias. Aux Etats Unis, Noam Chomsky, intellectuel mondialement connu, en a fait l'un de ses chevaux de bataille, ce qui donne à ce présent ouvrage une légitimité assurée dans le combat pour la liberté des consciences et de l'opinion : sans information honnête, le système démocratique ne peut plus fonctionner, les citoyens n'étant plus en situation de voter en toute connaissance de cause.

« La crise générale des médias occidentaux la solitude de Noam Chomsky (source « lescrises.fr »): Un (extrait du) texte d’Arundhati Roy que l’on retrouve dans la préface du livre de Noam Chomsky, intitulé “For Reasons of State” (Pour raisons d’état). (...)

Assise chez moi à New Delhi, en regardant une chaîne d’informations américaine faire sa propre promotion (« Nous rapportons, Vous décidez »), j’imagine le sourire amusé aux dents abîmées de Noam Chomsky.

Tout le monde sait que les régimes autoritaires, indépendamment de leurs idéologies, utilisent les mass-médias pour leur propagande. Mais qu’en est-il des régimes démocratiquement élus du « monde libre »?

Aujourd’hui, grâce à Noam Chomsky et à ses compagnons analystes des médias, il est presque évident pour des milliers, voire des millions d’entre nous que l’opinion publique dans les démocraties« d’économie de marché » est fabriquée comme n’importe quel autre produit du marché de masse — savon, interrupteurs ou pain en tranches. Nous savons qu’alors que, légalement et conformément à la constitution, la parole peut être libre, l’espace dans lequel cette liberté peut être exercée nous a été volé, et a été vendu aux enchères aux plus offrants. Le capitalisme néolibéral n’est pas simplement une affaire d’accumulation de capital (pour quelques-uns). C’est aussi une affaire d’accumulation de pouvoir (pour quelques-uns), d’accumulation de liberté (pour quelques-uns). Inversement, pour le reste du monde, les personnes qui sont exclues du conseil d’administration du néolibéralisme, c’est une affaire d’érosion de capital, d’érosion de pouvoir, d’érosion de liberté. Dans « l’économie de marché », la liberté de parole est devenue un produit de base comme un autre — la justice, les droits de l’homme, l’eau potable, l’air pur. Seuls ceux qui ont les moyens de se l’offrir peuvent en bénéficier. Et, naturellement, ceux qui peuvent se le permettre utilisent la liberté de parole pour fabriquer le genre de produit, le genre d’opinion publique qui convient le mieux à leur objectif. (Les informations qu’ils peuvent utiliser). La manière exacte dont ils font cela a été le sujet d’une bonne partie des écrits politiques de Noam Chomsky.

Le premier ministre Silvio Berlusconi (article écrit quand M. Berlusconi était premier ministre italien), par exemple, a une participation majoritaire dans les principaux journaux, magazines, chaînes de télévision et maisons d’édition italiens. « En réalité, le premier ministre maîtrise environ 90% de l’audience télévisée italienne » rapporte le Financial

10 Times. Qu’est-ce qui fixe le prix de la liberté de parole? Liberté de parole pour qui? Il faut reconnaître que Berlusconi est un exemple extrême. Dans les autres démocraties — en particulier aux États-Unis — les magnats des médias, les puissants lobbys d’entreprise et les fonctionnaires sont imbriqués d’une manière plus élaborée, mais moins flagrante. (Les rapports de Georges Bush Jr avec le lobby pétrolier, avec l’industrie de l’armement et avec Enron, et l’infiltration d’Enron dans les institutions gouvernementales et les médias des États-Unis — tout ceci est maintenant de notoriété publique).

Après le 11 septembre 2001, et les frappes terroristes à New-York et Washington, le comportement flagrant de porte-parole du gouvernement des États-Unis qu’ont endossé les médias dominants, leur promotion d’un patriotisme vengeur, leur empressement à publier les communiqués de presse du Pentagone comme des informations et leur censure explicite de l’opinion dissidente sont devenus l’objet d’un humour assez noir dans le reste du monde.

Ensuite, la Bourse de New-York s’est effondrée, les compagnies aériennes en faillite ont fait appel au gouvernement pour des renflouements financiers, et il a été question de lois de contournement manifestes afin de fabriquer des médicaments génériques pour combattre l’alerte à l’anthrax (beaucoup plus important et urgent, bien sûr, que la production de génériques pour combattre le sida en Afrique). Tout à coup, il a commencé à sembler que la liberté de parole et l’économie de marché pourraient finir par s’effondrer à côté des tours jumelles du World Trade Center. Mais bien sûr, cela n’est jamais arrivé. Le mythe continue.

Il y a cependant un aspect plus intéressant à la quantité d’énergie et d’argent qu’investit l’establishment pour gérer l’opinion publique. Il évoque une peur très réelle de l’opinion publique. Il relève du souci perpétuel et effectif d’une prise de conscience collective, car si les gens devaient découvrir (et comprendre entièrement) la véritable nature des choses qui sont faites en leur nom, ils pourraient agir en conséquence. Les personnes puissantes savent que les gens ordinaires ne sont pas toujours d’instincts impitoyables et égoïstes. (Quand les gens ordinaires pèseront les coûts et les avantages, une certaine conscience troublée pourrait facilement faire pencher la balance). C’est pour cette raison qu’ils doivent être tenus éloignés de la réalité, élevés dans une atmosphère contrôlée, dans une réalité adaptée, comme des poulets d’élevage ou des cochons dans un enclos. Ceux d’entre nous qui ont réussi à échapper à ce destin, et qui creusent en grattant çà et là dans l’arrière-cour, ne croient plus tout ce qu’ils lisent dans les journaux et regardent à la télévision. Nous nous mettons au courant et cherchons d’autres façons d’arriver à comprendre le monde. Nous recherchons l’histoire jamais divulguée, le coup militaire mentionné en passant, le génocide non-signalé, la guerre civile dans un pays africain consignée dans une histoire sur une colonne d’un pouce à côté d’une publicité pleine page pour de la lingerie en dentelle. »

Le complotisme

En ce début 2016, alors que la critique des « médias mainstream » s'intensifie, ces derniers, relayant une initiative de l'Etat ( www.ontemanipule.fr) , se sont mis à traquer les « sites complotistes »

11 qui empoisonneraient l'atmosphère médiatique et pèseraient sur l' « ambiance sociale », racontant des mensonges susceptibles d'effrayer en prenant le contre pieds de la Grande presse en matière d'explication du monde comme il va. Il est possible de constater que la liste des « complotistes » est un fourre-tout confectionné à la louche. Pour se faire une idée, parmi d'autres sites, www.conspiracywatch.info. On y trouve par exemple le respectable site de l'UPR, président François Asselineau, parti politique souverainiste qui présente des candidats aux élections et tient un discours sans ambiguïté à propos de l'UE, de l'Euro ou de l'OTAN, « lescrises.fr » d'Olivier Berruyer qui fait un travail remarquable dans le décryptage de l'actualité médiatique et des manipulations de l'opinion les plus visibles, et bien d'autres sites qui ont comme point commun de contester la stratégie rédactionnelle que tous les grands médias ont adopté pour tenter de convaincre le bon peuple qu'il est inutile de réfléchir à la place de « ceux qui savent ». L'un des arguments premiers pour intégrer la « liste d'infamie » est d'être d'une manière ou d'une autre un vecteur supposé des idées d'extrême droite ou plus généralement « populistes ». On sait que, par exemple, le souverainisme, longtemps patrimoine de la gauche communiste et des gaullistes, a mauvaise presse du fait que le FN s'en est emparé. Il reste pourtant un terrain de lutte essentiel pour tout citoyen désireux de rendre à son pays le droit de conduire lui-même ses affaires, quelle que soit sa couleur politique. On doit comprendre que la multiplication des prises de paroles et de l'expression contestataire sur Internet est largement le fruit de l'uniformité des informations délivrées par la grande presse (ou supposée telle) écrite, télévisuelle et audiovisuelle qui ne laisse pas d'espace suffisant à des opinions différentes. A ce titre, les critiques adressées aux « complotistes » renvoient à celles mettant en cause nos médias grand public, qui s'illustrent par une même vision des réalités françaises ou étrangères, ce que nous aborderons plus loin.

Contre certains propos catastrophistes de Michel Onfray

Le contexte médiatique actuel formate efficacement les consciences, suffisamment en tout cas pour conduire certains intellectuels de grande qualité à extrapoler à partir de contraintes parfaitement analysables :

Michel Onfray : "Notre civilisation judéo-chrétienne est épuisée, morte. Après deux mille ans d’existence, elle se complaît dans le nihilisme et la destruction, la pulsion de mort et la haine de soi". Source B runobertezautresmondes | 18 février 2016 à 10 h 01 min | Catégories: Non classé | URL: http://wp.me/p5XrE6-4u9 b . (Source Le Point )

Extraits : Le débat en France n'est plus possible." C'est ce qu'avait affirmé Michel Onfray en novembre dernier pour justifier le report de la parution de son livre Penser l'islam, chez Grasset. Accusé par les uns d'islamophobie et par d'autres d'être récupéré par les djihadistes, le philosophe athée avait en effet jugé qu'"aucun débat serein" n'était plus possible sur le sujet. À l'occasion de la parution de l'ouvrage en Italie vendredi 5 - il sortira finalement dans l'hexagone en mars - Michel Onfray a accordé une interview au Corriere della Sera.

"Je trouve sidérant que notre élite journalistique et mondaine, intellectuelle et parisienne, si prompte à traiter de sexiste quiconque refuse d'écrire professeure ou auteure, n'ait rien

12 à dire au viol de centaines de femmes par des hordes d'émigrés ou d'immigrants, comme on ne dit plus, car le politiquement correct impose migrants", répond-il alors que le journaliste lui demande quelle a été sa réaction aux agressions sexuelles du 31 décembre, à Cologne. "La France a renoncé à l'intelligence et à la raison, à la lucidité et à l'esprit critique. Houellebecq a raison : nous vivons déjà sous le régime de la soumission."(...)

Interrogé sur la faiblesse actuelle d'une civilisation occidentale "à bout de force" face à un islam qui progresse en Europe, Michel Onfray répond : "Notre civilisation judéo- chrétienne est épuisée, morte. Après deux mille ans d'existence, elle se complaît dans le nihilisme et la destruction, la pulsion de mort et la haine de soi. Elle ne crée plus rien et ne vit que de ressentiment et de rancœur. L'islam manifeste ce que Nietzsche appelle une grande santé : il dispose de jeunes soldats prêts à mourir pour lui. Quel occidental est prêt à mourir pour les valeurs de notre civilisation : le supermarché et la vente en ligne, le consumérisme trivial et le narcissisme égotiste, l'hédonisme trivial et la trottinette pour adultes ?"(...)

Cet extrait de l'interview de M. Onfray appelle quelques remarques. On peut, hâtivement, associer crise de civilisation et crise d'un système économique, lui-même enraciné dans des valeurs idéologiques médiatiquement dominantes.

Mais on peut aussi faire la part des choses entre une civilisation judéo-chrétienne léguée par une histoire longue, et les contorsions idéologiques actuelles des élites, majoritairement représentantes des oligarchies qui nous gouvernent dans les faits, attachées à imposer un modèle consumériste financiarisé anglo-saxon à la terre entière depuis les années 80 du XXe siècle, et particulièrement après la chute du « camp socialiste » dans les années 90 du même siècle. « Nihilisme, destruction, haine de soi, pulsion de mort » sont des marqueurs liés à la société que l'on tente de nous imposer, via une production publicitaire, cinématographique et télévisuelle massivement impliquée dans le formatage des esprits, celle du supermarché, de la vente en ligne (etc...)⋅ . Mais tous les citoyens ne sont pas concernés par cette aliénation aux « idées nouvelles » et à un individualisme outrancier qui nous viennent d'outre Atlantique notamment par le truchement d'une grande presse aux ordres. Nous assistons à une tentative de fabrication aux forceps d'une société conforme aux vœux des dominants. Devant la bataille idéologique incessante menée en Europe contre la souveraineté des états, les droits sociaux, l'intérêt général, devant la mise en pièce de l'état social et de la puissance des pouvoirs publics nationaux au profit de pouvoirs oligarchiques non élus d'une rapacité inouïe, ce que risque d'entériner la mise en œuvre du « traité transatlantique », il va de soi que la conscience des citoyens a du mal à retrouver la voie de l'intérêt général.

Il convient enfin de s'interroger sur l'abaissement continu des exigences scolaires, sur le vieux parti pris « pédagogiste » du Ministère de l’Éducation Nationale, visant à instaurer un égalitarisme généralisé dans le secondaire (lire mon « Éducation Nationale : le naufrage tranquille », Edilivre, 2014), ennemi de l'égalité et si nocif pour les élèves les plus fragiles. Les « esprits bien faits » ne sont apparemment plus à l'ordre du jour, ce qui a et aura forcément des conséquences sur la qualité du débat démocratique, un citoyen peu ou mal formé et mal informé étant susceptible de devenir assez aisément le jouet de nombres d'idées dominantes omniprésentes actuellement dans ce que l'on appelle encore le débat public.

Opposer comme le fait M. Onfray la force archaïque et sectaire d'un Islam en perdition, certains Musulmans voulant traduire concrètement dans les faits la « parole divine », comme de parfaits illuminés qu'ils sont, au vide moral de l' « Occident », c'est acter une équivalence non avenue. On sait que l'islam (lui-même objet d'un débat sans fin dans les pays européens qui ont tendance à se

13 raidir face à la présence musulmane croissante) est devenue un outil fort commode pour nourrir, hélas à juste titre, la crainte du terrorisme, et favoriser les mesures liberticides dans les états démocratiques. On peut être surpris à ce titre que ce beau prétexte à l'autoritarisme d’État ne compte plus pour rien quand il faut valoriser l'arrivée massive des « réfugiés », en majorité musulmans, au nombre desquels par ailleurs la logique veut qu'il faille compter une frange de terroristes susceptibles de nous frapper à nouveau, ce que l'Allemagne a eu le malheur de découvrir.

M. Onfray affiche donc un jugement à l'emporte pièce, au fond idéaliste, car il a en l'occurrence abandonné le regard politique qui fait si souvent la qualité de ses interventions. Nulle fatalité à la situation actuelle : comme toujours, les hommes, leurs luttes, les uns, les dominants, voulant renforcer leurs positions sans limite visible, les autres ne sachant comment renouer avec la résistance face à l'exploitation multiforme qu'ils subissent.

On appelait jadis cela la lutte des classes. Il se trouve que les médias y interviennent à présent en tant qu'acteurs majeurs, généralement du côté des pouvoirs en place. Un rapide coup d'oeil sur le XXe siècle pourrait nous conduire à penser qu'une fois de plus, la presse a failli. Sauf que les conditions de sa faillite morale et déontologique ont à présent des racines spécifiques, même si elles ne sont pas fondamentalement différentes de celle qui ont conduit le CNR à libérer les organes de presse du pouvoir de l'argent.

Aperçu du champ de bataille

Il ne s’agit pas dans cet essai de dresser l’inventaire des turpitudes d’une profession, d’un système médiatique omniprésent, ou encore de porter des condamnations définitives via l’examen d’une situation qui apparaît extrêmement préoccupante à l’auteur. L’âge d’or du journalisme n’a jamais existé. En revanche, que dire de ses manquements inexcusables répétés à ses principes fondateurs ? Il ne peut donc être question de chanter un passé mythifié pour mieux pourfendre le présent. Les journalistes sont des citoyens comme les autres, avec leurs qualités et leurs défauts. Avec leurs faiblesses aussi. Qu’ils apparaissent comme une corporation aux yeux de ceux, la majorité d’entre nous, qui consomment leurs « productions informationnelles » (cette expression permet d’éviter en amont le mot information, et le couple démoniaque qui va avec « information/désinformation » qui n’est sans doute plus opératoire) n’est pas étonnant. Qu’ils revendiquent bien haut un savoir faire et une technicité spécifiques est dans l’ordre des choses. Après tout, tout métier (réputé) intellectuel reconnu fait de même. Le problème est qu’une part grandissante de nos concitoyens leur conteste cette expertise pour de bonnes ou de mauvaises raisons, que nous allons essayer de conjuguer. Pour son malheur, le journalisme véhicule des valeurs qui, de toute évidence, souvent le dépassent singulièrement. Éternel hiatus entre les concepts et la réalité vécue. L’idée d’une information libre et objective est évidemment fort belle. Mais les journalistes ne sont ni libres, ni objectifs, surtout quand l’exercice de leur métier s’inscrit dans un contexte économique et idéologique précis, contraignant peut-être plus encore aujourd’hui que jamais. A cela, faut-il répondre qu’il est de la responsabilité de chacun de ces professionnels de porter individuellement une parole libérée et désincarnée (écouter sur ce sujet l'interview de Natacha Polony disponible sur le Net)? La question appelle la réponse. Nul n’existe hors sol. A l’instar des personnels politiques, les journalistes n’ont aucun droit à revendiquer un jugement ou une vision incontestable, car comme

14 eux, ils sont en démocratie par définition contestables, même si les contester relève parfois à les entendre du « crime de lèse majesté ». Le débat argumenté contradictoire, sans concession, sans mauvaise foi et sans agressivité devrait être en quelque sorte la racine de la légitimité des organes de presse et de leurs « professionnels de l’information ». Tel n’est apparemment pas toujours le cas. Reconnaissons à ces cadres de la démocratie le droit d’être impliqués dans la vie de la Cité. Contestons leur dans la foulée l’usage qu’ils font « parfois » de leur pouvoir réel sur les consciences, au nom de leurs convictions, de leur « panurgisme » ou de leur intérêt égoïste. On ne peut pas en effet colporter la légende de l' « exigence déontologique » quand on est inséré dans un système qui apparaît de plus en plus pour ce qu'il est, à savoir la voix des maîtres de l'heure, qui sont banquiers, grands patrons, et membres de ce qu'il convient de nommer l'oligarchie économique mondiale. On l'a dit précédemment, le service public d'information en France ne se démarque en rien des médias privés sur ce plan et s'est conformé comme l'Etat son patron à la doxa néolibérale et européiste qui fait toujours flores comme on peut le constater à la faveur de l « épisode grec », de l' « épisode ukrainien » ou plus récemment dans le contexte syrien ou celui de la « crise des réfugiés » ainsi que dans celui du Brexit. La tournure que prend la couverture médiatique à propos des élections du futur président américain montre d'ores et déjà que nous ne sommes pas informés sur les deux candidats, mais invités à favoriser la « virginale » Mme Clinton au détriment du démoniaque Trump, que l'on commence à faire passer pour une créature de Vladimir Poutine ! Une véritable analyse de ces deux candidats affligés tous deux de défauts majeurs et de zones d'ombre importantes, point. Il est piquant que le service public d'information audiovisuel se mette en grève au printemps 2015 pour protester contre des mesures « d'économie », disons d'austérité, que nombre de ses journalistes approuvent quand d'autres qu'eux sont frappés. Voilà en tout cas une belle leçon d'incohérence et de « probité intellectuelle ». Le rédaction de l'Express, touchée en septembre 2015 par des « charrettes » au nom d'une vision de l'économie que cet hebdomadaire défend avec virulence pourra à son tour méditer sur ce que devrait être la « responsabilité éditoriale ». D'autres comme à l'OBS voient arriver leurs propres charrettes de licenciement quand celles de l'Express pourrait faire un retour remarqué. A force de servir un système inique, on finit par en faire les frais. Dans le privé, on n'en est d'ailleurs pas à une contradiction près. Pour exemple d’école peut-être, M. Elkabbach, affirmant il y a quelques années en direct à la télévision sur , dans une émission de M. Drucker (cf le film télévisuel « Les nouveaux chiens de garde » visible sur internet) son assujettissement (obséquieux ?) à M. Lagardère, son patron, présent, souriant devant cet hommage (servile ?). Ce faisant, M. Elkabbach n’était sans doute plus journaliste dans le groupe Lagardère, mais employé de M. Lagardère, ce qui a peu à voir avec une posture d’indépendance et d’objectivité. C’est en tout cas ce que l’on peut penser de cette triste prestation, sans attenter à la dignité du « grand journaliste » symboliquement agenouillé devant son employeur, oligarque de première grandeur, maître d’un groupe industriel et médiatique qui ferait dit-on, avec des « collègues » de son aloi, la pluie et le beau temps à l’Élysée, sous ce septennat comme sous les précédents. Chacun peut, encore grâce à Internet, se faire une opinion sur le sujet. Nous touchons là l'autre problème, et non des moindres en France (et ailleurs) : l’essentiel des médias appartient aux nouveaux féodaux qui en effet dictent la politique des états, chez nous, en Europe comme aux États-Unis. Dans ce cadre de « reféodalisation » du monde (terme emprunté à Pierre Legendre), comment imaginer que la profession des journalistes, massifiée, affaiblie, maltraitée souvent, méprisée probablement, économiquement ébranlée au moins pour ce qui concerne la masse des « sans

15 grade », puisse opposer une résistance enracinée dans la contrainte déontologique, même dans le cas improbable où une partie de ces professionnels s’opposeraient à la doxa qu’ils sont chargés de nourrir jour après jour, sans être placardisés voire purement et simplement « virés » ? Il est donc temps de tenter d’éclairer la problématique à l’œuvre. En commençant par ce qui est tu, ou minoré, ou encore déformé dans le traitement des sujets essentiels. Les journalistes ne sont pas les ennemis de la démocratie. Ils sont (trop) souvent, comme tant d’autres professions ou corps constitués, les victimes, parfois consentantes, du recul des valeurs républicaines ici, et démocratiques ici et là, qui aide l’intérêt particulier à prévaloir de plus en plus lourdement sur l’intérêt général. Intervenant en flanc garde des puissances dominantes, voire de plus en plus en troupes de choc, ils sont parallèlement acteurs et symptôme de la paralysie politique et idéologique officielle qui caractérise notre pays et ses partenaires occidentaux relevant du « camp des démocraties ». Ils mènent au moins pour les plus connus d'entre eux une guerre idéologique et politique au profit de leur caste, quand ils en sont, et de leurs patrons quand ils aspirent à en être. C’est prioritairement l’aspect symptomatique de ce triste contexte qui nous intéresse ici, et avec lui, la description (succincte) des liens qui enserrent nos « élites », terme pris au sens large, de à Washington. Ce travail est un canevas susceptible d’aider à éclairer des arcanes pas si obscurs que cela pour peu que l’on prenne la peine d’aller y voir. Le choix d'évoquer certains noms et pas d'autres relève, répétons-le, de la volonté de l'auteur et n'obéit pas à une logique autre que celle de sélectionner des exemples d'école de ce que nous dénonçons. Les journalistes sont donc, aussi, souvent des victimes, et, dans le meilleur des cas, affectées du « syndrome de Stockholm », qui leur fait adopter les intérêts de leurs geôliers et employeurs, au demeurant fort généreux pour les premiers couteaux... La vie comme elle va en somme. L’idéologie dominante a ses militants, ses grands seigneurs, ses cours souveraines et complices où tout ce beau monde se vautre ouvertement dans la connivence, noblement nommée « réseaux », « ouverture au monde », « enrichissement naturel » (etc...). Et règne par ailleurs sur ses serfs, taillables et corvéables à merci. Retour donc à la déesse « déontologie journalistique », vénérée autant que violée plus souvent qu’à son tour par ses prêtres les moins scrupuleux.

16 II-Journalisme (?)

« Qu’est-ce qu’un journaliste ? C’est un homme qui d’abord est censé avoir des idées. C’est ensuite un historien au jour le jour, et son premier souci doit être de vérité. Peut-on dire aujourd’hui que notre presse ne se soucie que de vérité ? Comme il est difficile de toujours être le premier, on se précipite sur le détail que l’on croit pittoresque ; on fait appel à l’esprit de facilité et à la sensiblerie du public. On crie avec le lecteur, on cherche à lui plaire quand il faudrait seulement l’éclairer. A vrai dire on donne toutes les preuves qu’on le méprise. L’argument de défense est bien connu : on nous dit, « c’est cela que veut le public ! ». Non, le public ne veut pas cela ; on lui a appris pendant vingt ans à le vouloir, ce qui n’est pas la même chose (…). Pour Camus, les quatre commandements du journaliste libre sont l’ironie, la lucidité, le refus et l’obstination. Ces qualités, alliées à une indépendance vis-à-vis des puissances de l’argent (souligné par l’auteur), devraient permettre au journalisme d’ « informer bien au lieu d’informer vite, de préciser le sens de chaque nouvelle par un commentaire approprié, d’instaurer un journalisme critique et, en toutes choses, de ne pas admettre que la politique l’emporte sur la morale ni que celle-ci tombe dans le moralisme » (extrait tiré de Nouvelles alternatives, 21 août 2013, Albert Martin)

Affirmer qu’Albert Camus pourrait écrire ces lignes de nos jours est pour beaucoup d’entre nous une évidence. A l’origine de cet essai en effet, un constat que tout citoyen attentif peut faire : sur nombre de sujets essentiels, la crise économique mondiale, les tensions internationales, les difficultés nées de notre intégration grandissante à l’Union Européenne et à la mise en œuvre systématique de politiques d’austérité sans fin, la problématique de l’Euro liée au souci précédent, le traitement superficiel (quand il existe) des souffrances des sociétés grecques, espagnoles, portugaises, anglaises, françaises, dernièrement la russophobie sans frein liées au parti pris atlantiste, c'est à dire à Washington (etc...), l'omniprésence d'un droitdelhommisme échevelé non pas prioritairement face à la mise en cause des droits sociaux et à la misère galopante dans notre pays, mais face à la détresses des « réfugiés », comme si cette dernière interdisait de traiter de la première ou devait primer sur elle, il est loisible de se rendre compte que l’essentiel des « grands médias » audiovisuels ou écrits disent à peu près la même chose, à savoir que nous vivons des événements inévitables qu’il nous faut endurer et que la Russie est un nouvel ennemi de l’humanité, que la morale (le moralisme!) doit commander la politique, etc.... Pourquoi ? Parce que c’est raisonnable, juste et vertueux, le moralisme tenant table ouverte dans les grands médias, qui favorisent l'émotion et répugnent à privilégier un regard politique s'adressant à l'intelligence des citoyens. Ne pas penser de la sorte n’est donc ni raisonnable, ni juste, ni vertueux, voire immoral, et donc méprisable. Qui nous dit cela ? La majorité des hommes (et des femmes) politiques, les journalistes de télé, de radio ou de presse écrite, qui sont parfois les mêmes, les experts de tout poil (une poignée) qui arpentent les studios et occupent fréquemment les colonnes des « grands journaux ». Première remarque : l’essentiel des chantres de l’austérité et du TINA (« There is no alternative » de Margaret Thatcher) puissamment médiatisés gagnent, au moins à Paris, très convenablement leur vie, et ont souvent des réseaux susceptibles de leur permettre soit de changer de poste sans passer par la case Pôle emploi, soit de caser avantageusement des membres de la famille. La connivence est semble-t-il une des règles de vie dans ces milieux « autorisés » qui s’affranchissent volontiers de la morale commune pour avancer leurs pions et ceux de leurs amis. On verra que ce mécanisme de connivence est partiellement visible quand on a par exemple la curiosité de savoir qui fréquente les

17 déjeuners mensuels du « Siècle », où se mêlent hommes politiques, journalistes, grands patrons, etc… L’hystérie anti-russe ensuite qui alimente la légitimité pour le moins effrayante d’une éventuelle confrontation militaire avec cet ancien et puissant allié, seul capable dans le monde de pulvériser les États-Unis si tout cela tourne mal : on peut parfaitement argumenter pour contrer le déluge de propagande qui nous submerge, sans pour cela être un agent du « poutinisme » actif. Rappeler qu’au temps de l’URSS, le général De Gaule avait tendu la main à ses homologues soviétiques, fût-ce à la grande fureur des États-Unis, nous fera bientôt risquer un procès en sorcellerie. A la fin juin 2015, les réactions à la décision du Premier Ministre Grec de soumettre à référendum les propositions de l'UE ont donné une idée précise de ce que pèse réellement l'exigence démocratique quand un vote risque de mettre en cause la toute puissance des oligarchies financières dans l'UE. Le même phénomène a eu lieu à l'occasion du « Brexit ». Nous essaierons de savoir si un chef d’orchestre distribue régulièrement ou ponctuellement des éléments de langage repris ensuite par les grands médias, (cela est parfois visible, comme dans le cas de l'arrivée massive des « réfugiés » en Europe), si ils sont plusieurs à influer sur les contenus, et quelle est la source de l’idéologie omniprésente dans les pratiques de la « corporation médiatique », au moins dans sa partie parisienne telle qu’elle s’affiche sur internet grâce à certains sites tel celui de l’OJIM. Car il se pourrait bien que l’une des particularités de la France, à savoir Paris, qui concentre pouvoir politique, économique, financier, culturel et idéologique, soit également l’une des clés pour comprendre ce qui se passe dans notre pays. Bref, le panorama médiatique actuel manque cruellement de mesure, de pluralisme d'opinions, et donc d’honnêteté. La complexité de l’existence et de la vie des sociétés ne saurait se satisfaire d’idées simples orientées généralement dans une seule et même direction, surtout quand ces idées sont assénées jour après jour et régulièrement démenties par les faits. Et il est facile de constater qu’il faut souvent courir le Net pour avoir des informations régulières clairement différentes de celles qui sont portées par la presse ayant pignon sur rue, même si en l’occurrence, l’esprit critique doit rester de rigueur, ni plus ni moins qu’à la lecture des « grands journaux ». Ce hiatus dans l’univers médiatique, sur lequel ont doit, fût-ce naïvement, s’interroger, illustre pourtant ce qui pourrait bien être l’un des plus grands scandales français de ce début du XXIe siècle, à savoir l’existence d’une presse prétendument libre, bénéficiaire d'aides publiques importantes dans le cas de la presse écrite (lire en postface un article du Monde Diplomatique sur le sujet), affichant hautement son improbable indépendance à des fins partisanes moralement indéfendables. Certes, en dehors de quelques titres abonnés aux mensonges et à la propagande au moins dans certains domaines, rien n’est tout blanc ou tout noir en cette matière comme dans toutes les autres. Mais on est en droit de se poser des questions et de tenter, sinon d’y répondre, du moins d’évoquer des pistes de réponse. Un pays démocratique ne saurait admettre que ses « grands médias » aient abandonné tout ou partie des principes déontologiques qui fondent et légitiment leur existence. Le seul soupçon d'une dérive en ces matières devrait (en principe) mobiliser le pays. Mais, bien évidemment, principaux concernés, les médias ne parlent pas du vice absolu qui les spécifie si fréquemment : ils sont pour l'essentiel la propriété des grands oligarques français. La crise des médias diagnostiquée dans ces pages est l'un des aspects les plus inquiétants de la crise de la démocratie française.

Le journalisme existe-t-il encore quand il cache les vrais enjeux ?

18 Pour prendre la mesure des inquiétudes que chacun peut à bon droit nourrir soit pour lui- même et sa famille, soit pour l’avenir de l’humanité versus crise écologique ou militaire, il faut souligner la gravité des faits économiques, politiques et les tensions guerrières, sur les plans national et international qui marquent ce dangereux début du XXIe siècle. Ces faits devraient faire l’objet d’une information solide, structurée, ouvertement partisane pourquoi pas, plurielle en tout cas, mais nourrie de faits avérés et d’interrogations rationnelles susceptibles d’éclairer le citoyen et de l’aider à comprendre le monde dans lequel il vit, puis à faire des choix politiques en connaissance de cause quand le moment de l’élection est là. Certains commencent certes à se demander à quoi bon voter quand l'Etat a délégué une part essentielle de ses pouvoirs régaliens à Bruxelles, qu'à tour de rôle chaque majorité parlementaire, quel que soit le président de la République, applique la même politique, ou quand l'expression démocratique est purement et simplement bafouée, comme cela a été fait du résultat du référendum sur le « traité constitutionnel» en 2005 par l'adoption du « traité de Lisbonne » en 2007, ce qui autorise à penser que l'UE et ses partisans se moquent, en la matière très ouvertement, de la démocratie « représentative » qui l'est si peu, puisque, à l'initiative du président Sarkozy, le Parlement a voté en Congrès contre l'avis exprimé dans les urnes par la majorité des Français. L'exemple du traitement infligé à la Grèce prouverait encore, si il en était besoin, le refus de l'expression démocratique dans le fonctionnement de cette Europe, de la part des instances européennes et des gouvernements de l'UE. MM. Sarkozy ou Tsipras laisseront une triste trace dans l'histoire de l'UE et de leurs pays respectifs. Le scandale de la démocratie ouvertement piétinée avec la complicité active des élus de la Nation en 2007 reste un cas d'école. Il aurait du être un moment essentiel de débat public via les grands moyens d'information, cela n'a pas été le cas. Bien au contraire. Après avoir massivement soutenu le vote « oui », les médias ont entériné l'initiative de M. Sarkozy et l'abstention complice des socialistes qui ont permis l'adoption du « Traité de Lisbonne », clone du TCE (On peut aussi rappeler à ce propos la déclaration de M. Junker, président de la commission européenne, affirmant tranquillement après les premières discussions avec les nouveau dirigeants grecs à propos de la dette de ce pays que les traités européens ont une légitimité supérieure à l'expression démocratique dans les pays de l'Union sans faire plus de vague médiatique que cela). En la matière, ce faux « quatrième pouvoir » que serait la presse a largement failli à ses responsabilités présumées, et ce symptôme de délitement a lui seul aurait légitimé le présent travail. La « grande presse » s'est globalement conduite comme l'auxiliaire zélé du pouvoir politique en reniant au passage sa raison d'être, qui à priori est d'informer et d'interroger l'actualité pour nourrir la démocratie. On peut presque dire que d'interprète en principe éclairé de l'actualité et des opinions, cette presse s'est muée en bâillon de l'expression populaire, voire en bonimenteur au service de ce qui peut être considéré comme un coup de force, voire un coup d'état symbolique (Le Congrès avait le droit de voter comme il l'a fait, mais la légitimité de ce vote est évidemment en cause car tournant le dos à l'expression démocratique très clairement exprimée précédemment dans les urnes). Que reste-t-il de l'exigence démocratique quand la représentation nationale engage le pays dans une stratégie qu'une majorité de citoyens refusent ? Il est bien loin le temps où le général De Gaulle quittait ses fonctions de Président de la République suite à l'échec d'un référendum. D'instrument de l'exercice démocratique par excellence avec le droit de vote, la presse est souvent devenue celui de sa négation, se reniant de la sorte elle-même. Cette presse est apparue comme un élément du puissant dispositif institutionnel et économique qui régente à présent le monde occidental, à l'ombre « bienveillante » des Etats Unis, dont l'UE procède,

19 nous le savons à présent (voir plus loin). La preuve de cette perversion du système médiatique est que l'exigence démocratique est devenue pour les médias non plus le fondement d'une démarche éditoriale pourtant si souvent brandie, mais un argument comme un autre pour emporter l'adhésion des citoyens. On appelle cela du cynisme, posture longtemps attribuée aux états, ces « monstres froids » et à leurs dirigeants. Nombre de médias, dont les plus connus, sont ainsi symboliquement aujourd'hui constitutifs de l'appareil d'état, au moins en France, lui-même inséré dans l' « appareil bruxellois » et donc « étasunien » (lire plus loin). Nous sommes ainsi contraint de constater le suicide symbolique d'une profession, qui lui interdit à priori de revendiquer son exception et sa raison d'être originelles.

« Déontologie »

Nous assistons à la disparition tangible d'une chimère, celle de la « libre information », à l'effacement d'un principe, celui de la déontologie journalistique, qui inclut l'indépendance et la liberté d'expression et de penser, à la disparition d'un droit fondamental, la possibilité pour les citoyens de connaître la réalité des faits. L'impossibilité fréquente d'accéder à une information libre et honnête (en dépit d'internet), conduit à la mise sous tutelle du débat public. Le rôle des médias fait aujourd'hui souvent penser à celui du « baron » qui par son intervention biaisée et faussement polémique dans une discussion commerciale sur un marché permet au vendeur son complice d'emporter le morceau et de berner le client, quand ils ne sont pas directement, de plus en plus fréquemment, la voix des maîtres de l'heure. On ne peut pas mettre en cause la démocratie, et le mode de dévolution du pouvoir par le vote comme beaucoup s’y essaient par les temps qui courent, sans prendre en compte le travail quotidien des médias « mainstream », ou la professionnalisation du personnel politique, ou encore la formation des élites par exemple à , à l'ENA ou dans les écoles de commerce, voire dans d'autres « grandes écoles » diverses et variées qui fabriquent nos « têtes d'oeuf », surtout si l’on sait que nombre de « grands journalistes » sortent de l'une ou l'autre de ces « filières d'excellence » (elles distillent toutes peu ou prou la même idéologie et les mêmes visions économiques néolibérales ). A ce titre, des rapprochements troublants peuvent être constatés entre les parcours de quelques uns d’entre eux. De quoi est-il principalement question en effet ? Comme nous l'avons déjà évoqué : -De l’avenir de notre pays, de ses emplois, de son industrie, de son bien-être, et donc du devenir de nos enfants. De l’avenir des pays européens enserrés dans une Union « austéritaire » de plus en plus technocratique et autoritaire. -De la paix ou de la guerre, quand il est devenu naturel de traiter la Russie comme une puissance de second ordre, de la mettre au ban des nations en dépit de l’intérêt bien compris des Européens tel que l’illustre à maintes reprises l’histoire du XXe siècle, -ou de la scandaleuse attitude des Etats-Unis, du Canada et de l’Ukraine au sein d’une commission de l’ONU s’opposant au vote d’une résolution condamnant la propagande fasciste et nazie (qui fait florès dans l'Ukraine pro-occidentale), avant que cette résolution ne soit présentée en assemblée générale. -Et du fait que l’UE, continent des droits de l’homme autoproclamé, s’abstient lors de ce scrutin. Qui le sait, qui en parle, que disent nos « grandes consciences » médiatiques ? Que penser encore en décembre 2014 de la constitution d’un gouvernement ukrainien en forme de farce, avec le choix d’étrangers (proches des États-Unis, voire simplement américains) naturalisés dans la foulée ou de néo nazis sans complexe (dont le Premier ministre du moment « Yat » (Arseni Iatseniouk ) ainsi nommé par Mme Nuland (cacique néoconservateur à Washington et collaboratrice

20 de M. Obama, deus ex machina du coup d'état contre M. Ianoukovitch) au sein des instances dirigeantes ukrainiennes (Cela aurait-il un rapport avec le vote à l'ONU cité plus haut,) ? Quels commentaires rageurs ou indignés quand le premier ministre ukrainien « Yat » travestit l’histoire et fait de l’URSS l’agresseur de l’Allemagne nazie ? (Toutes ces informations sont sur le Net) L’absurde tiendrait donc les guides de l’actualité mondiale ? Qui éclaire, qui informe, où sont les « grands intellectuels », ou, à défaut, les « grandes voix » ? Elles existent bien sûr, mais ont rarement l'occasion de s'exprimer sur les grandes chaînes de télévision ou sur les ondes. Les exemples de « forfaiture » médiatique, à savoir la trahison par les personnels de presse de leur mission d'information au service de la société, sont sans nombre, tant les parti-pris sont aujourd'hui fréquemment patents et massivement défendus par la majorité des organes de presse. Il semblerait qu’une accélération de l’uniformisation médiatique soit intervenue après 2003, quand la France de M. Chirac savait encore dire non à son allié américain et refusait de participer à une guerre injuste et inutile en Irak, dont les conséquences ne cessent aujourd’hui encore d'influer si négativement sur la situation du Moyen Orient et de peser significativement sur le climat des relations internationales. Est-il acceptable que les affirmations des uns, les « grands professionnels » ou présentés comme tels, adossés à la puissance de diffusion de la télévision, de la presse écrite et audiovisuelle et au pouvoir exorbitant de leurs richissimes propriétaires ou de l'Etat, soit exclusives des arguments des autres ou, plus simplement, de convictions étayées et sérieuses qui valent au moins d’être connues, voire, pourquoi pas, combattues ? On verra plus loin comment un grand patron de presse (Denis Olivennes) affiche sans fard son mépris pour l'info qui circule sur internet. On pourra rétorquer que la presse mainstream est faite par des journalistes professionnels (et donc en principe fiables), ce qui est peu le cas de sites internet d’information créés souvent par des particuliers, au nom de leurs convictions ou de leur expertise, voire de leur révolte face au monde officiel de l’information tel qu’il existe à présent. Mais peut-on admettre que les informations innombrables qui surgissent via des liens sur le Net, fussent-elles plus ou moins bien traduites de l’allemand, du russe ou de l’anglo-américain, ne trouvent quasiment pas d’échos chez les « pro » qui auraient de la sorte comme le privilège de détenir la Vérité contre des arguments jugés spécieux et trop fréquemment éliminés sans examen de passage à l’antenne ou sur les ondes au nom par exemple du « complotisme »? (quelques exemples plus loin) N’est-il pas pertinent de prendre en compte le nombre grandissant d’internautes qui cherchent ailleurs des informations qu’on ne trouve plus dans la « grande presse » qui, droite dans ses bottes, ne se porte pas bien du tout ? Il est intéressant à ce titre de constater que le sacro-saint « profit financier» ne compte plus pour les propriétaires des grands moyens d’information déficitaires, quand il s’agit d’asseoir un pouvoir, une influence. On peut parier que, sous une forme ou une autre, de grands quotidiens nationaux comme Libération ou Le Monde continueront encore longtemps à paraître en dépit de leurs déficits d’exploitation et du recul régulier de leur diffusion payante, car le gain espéré par les propriétaires n’est pas financier, mais politique, ce qui à priori n’a plus de prix (et même si le montant des aides publiques à la presse compenseraient dans certains cas les contraintes financières liées à la baisse de la diffusion). On sent bien que la fable du combat du bien contre le mal, (que nous avons évoquée plus haut) chérie officiellement par la diplomatie US (et de plus en plus par l’ensemble des pays occidentaux, ou alliés des Etats-Unis dont la France) ne saurait tenir lieu de canevas en terme d’information.

21 Existe-t-il d’ailleurs une information susceptible d’être éclairée via un schéma préétabli si le système médiatique n’est pas une organisation de propagande ? Certes non. Rendre compte de la réalité en évitant autant que possible les partis pris personnels ou systémiques devrait évidemment être une règle absolue pour les journalistes professionnels. Enquêter, recouper, vérifier devraient constituer un socle incontournable de l’exercice de leur métier. Il suffit de parcourir l’internet pour prendre la mesure d’une défiance grandissante à l’encontre des médias officiels, qui semblent avoir oublié les bases du métier selon les sujets traités. Parmi d’autres, un reportage réalisé en Ukraine par le journal Elle, interviewant une femme en tant que « patriote ukrainienne » sans préciser qu’elle est ouvertement engagée dans la mouvance néo nazie du régime de Kiev. Ou des reportages apportant des « preuves » en carton à propos de l'implication de la Russie dans la catastrophe aérienne du Boeing de la Malaysia Airline (Médiapart) (Lire en postface un article sur le sujet écrit par un journaliste américain) ou de la présence de l'armée russe en Ukraine (AFP). Combien de fois n'a-t-on pas annoncé l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe sans preuve tangible (AFP, Reuters, Le Monde, Libération etc...)? Ce type de parti pris et cette volonté apparente de construire une réalité virtuelle loin de la réalité touche en fait tous les domaines, économiques, culturels, sociétaux, comme si un lobby s'était emparé des leviers de l'information pour en faire son domaine réservé, au service des pouvoirs en place et de leur idéologie. Les outrances qui succèdent au Brexit en ce début d'été 2016 sont consternante de mépris des faits et des citoyens de la part d'une presse devenue clairement caisse de résonance des intérêts dominant. Pour preuve, ces papiers repris du site « les-crises.fr » le jeudi 30 juin 2016 (commentaires Olivier Berruyer):

" B rexit : quand le clergé européiste réagit…

Où va l’Europe après le Brexit ? Emmanuel Macron, Sylvie Goulard et Daniel Cohn-Bendit étaient à Sciences Po le 25 juin pour parler du futur européen. Une discussion menée par Jean Quatremer, correspondant de Libération à Bruxelles. «Exemple : 28’20 : Jean Quatremer : Le débat qui a lieu actuellement, c’est de savoir si on rend la sortie de la Grande Bretagne très douloureuse ou pas ? En clair, l’idée, c’est d’abord de les faire sortir, et puis ensuite, dans 2 ans, de renégocier un accord pour voir à quelle partie du marché intérieur ils auront accès. Et ça va être violent, parce que ça veut dire que pendant plusieurs années, ils n’auront plus accès au marché intérieur, y compris pour leurs services financiers, y compris pour le droit au séjour, etc. Et donc, pour la première fois, et là je trouve ça fascinant ce qui va se passer, c’est que là, on va mettre en oeuvre et on va voir grandeur nature ce qui se passe quand un pays, qui en plus n’est pas totalement intégré à l’union européenne, quitte l’union européenne, et c’est ça qui est intéressant. Et ça panique l’extrême droite, ça panique complètement l’extrême droit, parce qu’ils se disent… ils ont compris que ça va mal se passer. Ce que tu disais tout à l’heure, à propos de Boris Johnson, même de Nigel Farage, qui disent : finalement, il n’y a pas urgence… C’est que les mecs se rendent compte qu’ils se sont faits sauter eux mêmes ! Et là, c’est génial ! On doit pas être gentils avec les britanniques ! Quand je dis : il faut être méchant avec les Britanniques, moi, je fais partie des gens qui poussent à fond pour que çe soit dur, c’est parce que : il faut qu’on voie ce que c’est ! Daniel Cohn-Bendit : Il faut prendre au sérieux ! Jean Quatremer : Voilà ! Pour moi : ils ont voulu sortir… et on va respecter leur vote, mais

22 jusqu’au bout ! Ils vont le bouffer jusqu’au bout ! Et c’est ça qu’on doit faire. Et je crains effectivement de la part d’un certain – mais pas du côté français,pour l’instant, ça branle pas du manche, là les français sont très… [gestuelle de fermeté] là pour qu’on soit durs. Mais en tout les cas que d’autres pays comme les pays bas par exemple, et l’Allemagne, se disent : mais non, on va trouver tout de suite des accords en même temps qu’on négocie la sortie. C’est à dire qu’en fait la sortie devient un argument de chantage pour avoir le meilleur accord possible. » Bref, l’UE , c’est comme une secte ou la mafia, ils cherchent à te casser les genoux quand tu demandes poliment à partir. »

Journaliste : ” Nous, médias, comme vous, élus, n’arrivons pas à faire passer l’idée que l’Europe app orte quelque chose ; il y a un vrai mea culpa à avoir !”

Comme en 2005, les médias ont joué à fond leur rôle : assurer la propagande de l’Union européenne. Un moment mythique donc hier : sur BFM TV, la journaliste Roselyne Dubois, dépitée, lâche le morceau face à Nadine Morano ; elle reconnaît que sa fonction est d’influencer l’opinion – et non pas de l’informer : « Nous, médias, comme vous, élus, n’arrivons pas à faire passer l’idée que l’Europe apporte quelque chose. Que faut-il changer ? Il y a un vrai mea culpa à avoir ! » L’aveu est fascinant dans sa naïveté même : la journaliste ne trouve rien d’anormal à déclarer qu’elle se charge de la communication de l’UE, cela va de soi pour elle, elle y croit totalement, et à complètement oublié la Charte de Munich régissant (si peu…) les devoirs de sa profession, dont : 2. Défendre la liberté de l’information, du commentaire et de la critique.

9. Ne jamais confondre le métier de journaliste avec celui du publicitaire ou du propagandiste

Évidemment, jamais elle n’arrivera à faire le lien avec ses anciens confrères de la télé soviétique dans les années 1980…

Autre florilège de la fin de semaine : Marie Drucker : “Comment peut-on avoir 25 ans et rejeter l’Union européenne ?” Sa consœur Marie Drucker n’a pas hésité, quant à elle, ce 24 juin historique sur France 2, à mettre en cause la réelle signification du vote des Britanniques : “Tous ceux qui ont voté pour le Brexit, pour la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne, le voulaient-ils vraiment ? (…) De nombreux observateurs estiment qu’il s’agit moins d’un vote de rejet de l’Europe et l’Union européenne qu’un vote contre les élites, contre l’establishment, contre la politique intérieure, bref, comme le sont souvent les référendums, un vote de colère.”

Autrement dit, selon notre grande interprète, les électeurs auraient pu voter contre leur souhait véritable, non pas guidés par leur raison (que seuls les eurobéats possèdent à coup sûr), mais aveuglés par une passion, la colère. On imagine mal Marie Drucker faire le même genre d’analyse si le Brexin l’avait emporté : “Tous ceux qui ont voté pour le Brexin, pour le maintien de la Grande-Bretagne dans

23 l’Union européenne, le voulaient-ils vraiment ? De nombreux observateurs estiment qu’il s’agit moins d’un vote d’adhésion à l’Europe et à l’Union européenne qu’un vote en faveur des élites médiatiques, qui manipulent avec opiniâtreté l’opinion, et pour la politique intérieure, survendue par d’habiles communicants, bref, comme le sont souvent les référendums, un vote de crédulité.“

Même type de réaction partisane, qu’on n’imagine pas en sens inverse, de la part de François Jost, chroniqueur du Nouvel Obs et professeur à l’université Paris III. Il estime que ce référendum est un “un semblant de démocratie” :

“S’il y a une leçon à tirer de cet événement historique, c’est bien en effet le paradoxe suivant : le référendum, brandi par tous les populistes comme outil démocratique par lequel le peuple va s’exprimer, produit l’effet contraire de ce pour quoi il est soi-disant fait. Car, au- delà de ces slogans qui font du pays l’acteur de cette rupture avec l’Europe, que disent les chiffres ? D’abord que 51,9% des votants ont été favorables au Brexit. On se réjouit du taux de participation de 72,2%. Il signifie pourtant que c’est seulement un peu plus de 36% des Britanniques qui ont décidé de la sortie. (…) Pour qu’un référendum portant sur une décision à portée historique soit juste, il faudrait au moins exiger une majorité qualifiée, par exemple que trois-quarts des votants soient pour ou contre la question posée.”

Si le Brexit ne l’avait pas emporté, François Jost se serait-il insurgé contre ce “semblant de démocratie“, sur le fait que seuls 36% des Britanniques auraient pu décider du maintien du Royaume-Uni dans l’UE ? Et l’a-t-on entendu exiger que trois-quarts des votants se prononcent pour l’entrée de nouveaux pays dans l’UE ? Par exemple, le 13 novembre 1994, la Suède s’est prononcée par référendum sur son adhésion à l’UE. Celle-ci fut acceptée à seulement 52,8 % des suffrages exprimés. Faut-il donc exiger que la Suède sorte de l’UE et organise un nouveau vote où les trois-quarts des votants (75%) devraient se prononcer pour l’adhésion afin que celle-ci soit validée ? Mais revenons à nos journalistes, en pleine gueule de bois ce 24 juin. Audrey Pulvar, sur Europe 1, a ainsi osé déclarer que les gens qui ont voté contre le Brexit sont “des gens qui vivent dans la modernité, qui savent à quel point il est important de maintenir des échanges commerciaux, des échanges de populations, etc.” Comprenez : les gens qui ont voté pour le Brexit sont des ploucs arriérés qui ne savent pas ce qui est bon pour eux. On entendait exactement la même chose en 2005. Elle a même osé ajouter : “La presse anglaise a une énorme responsabilité dans ce résultat.” Il est vrai que le Sun, plus gros tirage d’Angleterre, a pris parti pour le Brexit. En revanche, cela ne la gêne pas le moins du monde que près de 100 % de la presse française se soit prononcée contre le Brexit. -Commentaire recommandé Spectre Le 26 juin 2016 à 01h08 D’abord que 51,9% des votants ont été favorables au Brexit. On se réjouit du taux de participation de 72,2%. Il signifie pourtant que c’est seulement un peu plus de 36% des Britanniques qui ont décidé de la sortie. (…) J’adore cet argument, qui se retourne comme un gant ! Maastricht = 51,04% de oui avec 69,70% de participation = 34,3% des Français ont décidé du oui

24 ! François Hollande = 28,63% des voix au premier tour avec 79,48% de participation = 22% des Français l’envoient au second tour, qu’il remporte avec seulement 39% du corps électoral. Tyrannie de la minorité ! ! Karine Daniel (député PS) = élue avec 12% des voix (https://www.les-crises.fr/a-tous-les-naifs-du- vote-blanc-karine-daniel-une-star-est-nee-ou-pas-car-avec-7-des-citoyens/). Comme ça, elle pourra gentiment voter la loi Travail rejetée par les trois quarts des Français, vive la légitimité ! Et maintenant on parle carrément d’une pétition pour revoter sur le Brexit ! ! Incroyable ! ! La prochaine fois que je ferai un jeu de société en famille ou avec des amis, je leur proposerai de relancer les dés jusqu’à ce que j’obtienne le résultat voulu, je suis sûr qu’ils seront tous d’accord… » Pour ceux que les avis aristocratiquement sots et méprisants de BHL intéresseraient: http://www.les-crises.fr/etrange-defaite-a-londres-par-bernard-henri-levy-bonus-rogoff-le-fiasco- democratique/

[Propagande] Brexit : L’arnaque du “vote des jeunes”… (extraits 28 juin 2016)

-La propagande

Bien sûr, la propagande tourne à plein dans les médias européistes anglais. Mais les médias français ne sont pas en reste : Eh oui, car il n’y a plus de futur sans “Europe”…

25 (Source : Libération) Amère, tu m’étonnes, quand on t’a détruit ton avenir radieux…

(Source : 20 minutes)

26 Les jeunes sont particulièrement européistes, donc… Mais il est “dommage” – pour ne pas dire franchement manipulateur – de ne pas parler de l’abstention (sondage Sky News) : Ce qui change un peu la vision des choses quand on s’intéresse à la classe d’âge entière, non ? :

Il est difficile d’étendre les résultats aux abstentionnistes : sont-ils aussi europhiles que les votants ? Osent-ils dire le fond de leur pensée quand ils sont sondés ? En tous cas, leur non mobilisation démontre leur désintérêt du sujet… Le jeunisme à l’oeuvre est assez interpellant : Il postule en effet deux choses : 1. que le “jeune” a une maturité politique d’une valeur au moins égale à celle d’adultes plus âgés, ce qui est osé… 2. que le “jeune” ne vieillit jamais, ne devient jamais vieux, ne comprend donc pas avec le temps ce qu’est l’UE et ne change donc jamais d’avis… Bref, que les différences apparentes ne sont en fait pas basées sur un critère d’âge (et donc d’expérience), mais de génération (c’est à dire qu’on postule que les jeunes d’aujourd’hui seront toujours de grand europhiles à 50 et 70 ans…) Alors, après, tout ceci peut, certes, se discuter, mais je trouve dommage que nos défenseurs de la maturité politique de la jeunesse et du respect de ses souhaits eu égard aux nombre d’années qu’il lui reste soient restés aussi silencieux par exemple au moment des européennes 2014 (où FN = PS + UMP…) :

27 ou du référendum écossais #GrosHypocrites :

Et comment ont voté les jeunes hommes au 1er tour de la Présidentielle en Autriche le mois dernier ?

28 51 % pour l’extrême droite au 1er tout, pas mal… (…) Et on saluera la vision (prophétique ?) de Peter Sutherland, ancien Commissaire européen à la concurrence (1989-1993), ancien directeur général de l’OMC (1993-1995), et ancien président de Goldman Sachs International (1995-2015), ancien président du pétrolier BP (1997-2009), ancien directeur de Royal Bank of Scotland, ancien administrateur du Groupe Bildergerg et ancien Président Europe de la Commission Trilatérale (je crois qu’on valide tout là…) : « La jeune génération au Royaume-Uni a été sacrifiée, tout ça à cause d’une déformation des faits et des conséquences. D’une façon ou d’une autre, ce résultat doit être annulé. » [Peter Sutherland] (Source) Intéressant, ils ne se cachent même plus… Sylvie Goulard, eurodéputée libérale : “Moi je ne crois pas que le peuple, dans sa grande sagesse, est capable de tout comprendre. (…). Donc, il faut arrêter de penser que les élites sont mauvaises et que le peuple est bon; on a une interaction à réinventer, et dans le mot “leader”, il y a vraiment “to lead”, donc il y a aussi la question de dire, est ce qu’à un moment, il y a aussi les gens qui prennent leurs responsabilités, et peuvent dire aux autres, après les avoir écoutés, après avoir dialogué avec eux : “Bah là, non : ma responsabilité à moi, parce que c’est moi qui suis en fonction, c’est de faire quelque chose qui est douloureux pour toi mais qui sera bon pour tes enfants, ou qui sera bon pour l’ensemble de la collectivité” (Source : L’Obs) (Et l’avis des jeunes qui vont se payer l’aéroport toute leur vie, toutça toutça…) ? (...) Répartition des votants de chaque camp en fonction du vote aux dernières législatives : Zoom sur la dernière question : “Pensez-vous que la vie dans le pays est meilleure ou pire qu’il y a 30 ans :

Pour près de 50 % des femmes et 40 % des hommes, la vie est pire… C’est aussi le cas pour 34 % des cadres (!) et 57 % des ouvriers (en gros, AB cadres, C1 prof. intermed., C2 employés, DE ouvriers). On voit aussi que des raison politiques profondes guident le Leave, et pas qu’économiques, puisqu’on calcule que 38 % de ceux qui pensent que la vie est meilleure veulent néanmoins partir (contre 70 % chez ceux qui pensent le contraire). » CQFD ! (ajout de l'auteur)

La république « une et indivisible » a perdu l'un de ses soutiens essentiels

Or, si on commence à se poser (hélas à juste titre) la question de la réalité des valeurs

29 déontologiques qui fondent en principe l’engagement des journalistes professionnels, c’est sinon tout l’édifice républicain démocratique, du moins son organisation institutionnelle qui est mise en cause. Le fait médiatique doit être pris en compte à ce titre tout autant que celui de la laïcité ou de la politique économique, du chômage (etc...), car il est concrètement l'un des piliers de notre « vivre ensemble » comme l'on dit aujourd'hui. En principe, répétons-le, une démocratie, « le pouvoir du peuple »(« Système politique, forme de gouvernement dans lequel la souveraineté émane du peuple », source Larousse)., ne peut fonctionner vertueusement qu’en s’appuyant sur une information honnête et argumentée. On sait bien que la réalité se déploie loin de ces théories iréniques. Mais nous atteignons sans doute aujourd’hui un seuil critique dans la perception par le public de ce qui apparaît à beaucoup comme de la désinformation systématique. Les citoyens font de moins en moins confiance au personnel politique, et peut-être demain considéreront-ils majoritairement que les journalistes sont trop proches des pouvoirs en place et de leurs intérêts pour retenir plus longtemps leur attention. Qui ne soupçonne pas, derrière les révélations les plus croustillantes touchant à la malhonnêteté des uns ou à la corruption des autres, des règlements de compte au sein du système de pouvoir par presse interposée ? En mai 2015, Mme Rachida Dati, mise en cause par la justice pour une utilisation à des fins personnelles de fonds publics lorsqu'elle était ministre de M. Sarkozy, n'accusait-elle pas une frange de l'UMP d'être à l'origine de ses ennuis (dont on n'a plus entendu parler)? En dehors de quelques affaires, qui soulignent la force du journalisme d’investigation (une espèce en voie de disparition) quand ce dernier est pratiqué avec courage (par exemple M. Mauduit et l'affaire Tapie ou le cas Sarkozy, emblématique des dérives à l'oeuvre quand l'ancien président de la République ambitionne de rempiler en 2017!), qu’est devenue presque systématiquement cette presse sinon une caisse de résonance pour des discours uniformes apparemment fabriqués en série, à partir « d’éléments de langage » comme l’on dit, par des officines ou des forces occultes (lire plus loin) ? Le problème est donc de prendre conscience de l’abaissement tendanciel du débat démocratique, formaté par les « grands médias » souvent en grande difficulté (diffusion en baisse) et de tenter, avec d’autres, de le remettre en selle. Le succès du journal en ligne Médiapart prouve que des solutions économiques novatrice en matière de médias existent, ce qui ne fait forcément de Médiapart un atout pertinent dans le combat pour le pluralisme des idées du fait d'une ligne éditoriale confuse qui sacrifie souvent au conformisme ambiant (lire en conclusion les textes consacrés à ce sujet quand nous abordons le profil d'Edwy Plenel). Car une république « une et indivisible » ne peut reposer que sur une confiance légitime des citoyens dans leurs institutions, leurs outils d'information, et dans les personnels qui les animent. Nous en sommes loin. Notre pays paraît en effet de plus en plus morcelé idéologiquement, socialement, économiquement et culturellement à la faveur de la croissance inédite des inégalités de toutes sortes. Le rôle des médias dans cette apparente dislocation du « fait français » n'est pas mince. On peut toujours rêver qu'une information honnête et libre serait, parmi d'autres outils, un instrument efficace pour cimenter un sentiment d'appartenance vivace à la communauté nationale qui paraît aujourd'hui plus ou moins problématique. En démocratie, le conflit idéologique est naturel et légitime, le consensus idéologique apparent est mortifère. En outre, le travail de décryptage constitutif de cet essai, uniquement grâce aux informations mises en ligne sur internet, et non démenties par les intéressés, prouve par la facilité d’accès aux sources utilisées ici que le secret éventuel à propos par exemple des réseaux atlantistes ou de la collusion avérée entre « grands » journalistes, hommes politiques et milieux économique et financier en France ne sont plus justiciables du secret aux yeux des intéressés. C’est dans notre pays comme une légitimité oligarchique qui s’affiche ouvertement, en tant

30 que pouvoir global, nouvelle aristocratie sure de son bon droit, à l’instar de ce qui existe depuis longtemps aux Etats-Unis. Jusqu'à preuve du contraire, il est donc pertinent de constater la mort du « journalisme de masse », le journalisme « officiel », qui a pignon sur rue, à quelques rares exceptions près. Dans la foulée, il est également permis de constater que devenir la voix des puissants de ce monde transforme les professionnels de cette presse en personnel politique comme les autres, moins les élections, plus l'asservissement, si on considère que servir la soupe (toujours la même) n'est pas précisément le rôle d'un journaliste, y compris quand le salaire est rondelet ou que l'individu est économiquement partie prenante de l'oligarchie qu'il sert en servant ses propres intérêts. Seuls quelques titres, répétons-le, sauvent l'honneur d'une profession faillie, trop rarement soucieuse de faire réellement son « job ». Il est donc nécessaire de porter à la connaissance du plus grand nombre la charte des droits et des devoirs de journalistes, dite « charte de Munich », qui s'en tient aux fondamentaux. Signée en 1971, elle reflétait un pluralisme et une exigence qui ne sont apparemment plus de mise.

La « charte de Munich » (source Wikipedia)

La Charte de déontologie de Munich (ou Déclaration des devoirs et des droits des journalistes), signée le 24 novembre 1971 à Munich et adoptée par la Fédération européenne des journalistes, est une référence européenne concernant la déontologie du journalisme, en distinguant dix devoirs et cinq droits. Le texte reprend les principes de la Charte des devoirs professionnels des journalistes français écrite en 1918 et remaniée en 1938, pour y préciser les droits permettant de les respecter. Il reprend le principe secret professionnel (article 7), en y ajoutant un devoir jugé essentiel, celui de protection des sources d'information des journalistes.l « La charte de Munich a été rédigée avec le concours de Paul Parisot, président du Syndicat des journalistes français (CFDT), devenu Union syndicale des journalistes CFDT, journaliste à Franc- Tireur, embauché au début des années 1960 à la rédaction du quotidien France-Soir de Pierre Lazareff, où il a tenté d'empêcher l'arrivée de Robert Hersant, avec la société des rédacteurs du journal. Paul Parisot obtient la création de l’ Union nationale des syndicats de journalistes (UNSJ) en 1966. Lors du congrès de la FIJ (Fédération Internationale des Journalistes) à Dublin en avril 1968, les syndicats de journalistes français, belges et allemands demandent que des garanties soient recherchées en Europe, pour l'indépendance des journalistes, face aux pressions du patronat et des États. Ensuite, lors d'une conférence organisée en 1971 à Munich à l'invitation du Deutscher Journalisten-Verband, Paul Parisot rédige la déclaration des droits et des devoirs des journalistes, dite Charte de Munich, signée par tous les autres syndicats de journalistes français, ainsi que ceux de cinq autres pays du « marché commun » européen (Allemagne, Belgique, Italie, Luxembourg et Pays-Bas). » Un peu d'histoire (avant d'en revenir à la Charte) En ce temps-là, 1971, encore très proche pour l'auteur, la pluralité des titres, la relative prospérité de plusieurs d'entre eux du fait de tirages importants, en l'absence d'une concurrence publicitaire agressive des chaînes de télévision ou des sites internet qui se sont multipliés depuis, sur fond de politisation importante de la société française, avec notamment un parti communiste fort et des organisations syndicales puissantes, être journaliste dans un titre signifiait souvent engagement dans le débat politique, et convictions dans le cadre de la Guerre froide. Pour rappel, l'ORTF a été supprimée en 1974 pour donner naissance à TF1, Antenne 2, Radio France, à la SFP, à TDF et à l'INA, tous organismes appartenant au service public. La

31 « libéralisation » des années 80 fut l'oeuvre du premier septennat Mitterrand, dont chacun jugera de l'efficience en termes de qualité d'information et de niveau culturel. Reportons-nous encore à Wikipedia : « L'ordonnance du 23 mars 1945 établit le monopole d'État sur les stations de radio. Cependant, les années de guerre ont anéanti une grande part du réseau de transmission français. C'est sur un poste émetteur laissé par l'armée américaine qu'est créée une radio publique d'un style nouveau : c'est « Paris Inter ». Elle commence à émettre sur la région parisienne le 16 février 1947. Diffusée sur toute la métropole à partir de l'émetteur d'Allouis, elle sera baptisée plus tard France 1 puis RTF Inter. Mais malgré le monopole, d'autres radios parviennent à émettre en France depuis l'étranger. Outre Radio Andorre dont les programmes continuèrent en espagnol et en catalan durant la guerre, et Radio Luxembourg et RMC, qui reprirent leurs programmes après la guerre, (programmes évidemment différents de ceux pro-allemands de la guerre pour RMC), une nouvelle radio périphérique (c'est comme cela que l'on appelait ces radios qui émettaient depuis des pays situés à la périphérie de la France) fut créée en 1955 : Europe n°1, devenue Europe 1 par la suite. Son ton moderne et tourné vers les jeunes (avec notamment la célèbre émission Salut les Copains) remporta un vif succès, à tel point qu'elle ringardisa bientôt Radio Luxembourg et Paris Inter surnommées alors « radios à papa » par la jeune génération férue de musique anglo-saxonne et notamment de rock'n'roll diffusée sur l'antenne d'Europe 1. Ces radios réagirent dans les années 60 en se modernisant et en changeant de nom (Paris Inter devint France Inter en 1963 et Radio Luxembourg devint RTL en 1966). Une autre radio périphérique importante commence à émettre dans le sud de la France au début des années 1960 : c'est Sud Radio, à partir d'un émetteur situé sur le territoire de la Principauté d'Andorre. L'année charnière pour la radio est 1963. L'ORTF s'installe à la maison de Radio France, quai Kennedy à Paris. On opère aussi une réorganisation des réseaux. La grande station nationale généraliste « RTF Inter » devient France Inter. À côté, la RTF organise deux stations thématiques : France Culture (issue de la fusion de France III-National avec France II) et France Musique (ex- France IV Haute-Fidélité, créée en 1954). Deux autres suivront : France Inter Paris (1971, devenue FIP) et RFI (1975) (reprise de l'ancienne Paris Mondial). Ces stations existent toujours. Seule RFI a quitté le giron de Radio France. En 1974 l'ORTF est démantelée et le secteur radio échoit à l'entreprise publique Radio France. Deux phénomènes se développent en réaction à ce monopole : les radios périphériques et les radios pirates.

-Des radios pirates aux radios libres Les radios périphériques, plaçaient leurs émetteurs hors du sol français, mais le plus proche possible des frontières afin de pouvoir être reçues en France. Les principales étaient dans les années 1960 et 1970, RTL qui émettait depuis le Luxembourg, RMC à Monaco, Europe 1 émettait depuis la Sarre (en Allemagne), et Radio Andorre et Sud Radio qui émettaient depuis l'Andorre. Mais de nombreuses autres radios se sont développées illégalement sur le sol français. On les appelait les radios pirates. Le phénomène se développa surtout à partir de la fin des années 1970. Il faut citer : Radio Campus à Villeneuve-d'Ascq, Radio cœur d'acier à Longwy et sur tout le bassin sidérurgique lorrain, Radio Ivre à Paris, Radio Verte à Béziers, Radio Active à Lyon, L'Eko des Garrigues et Radio Fil Bleu à Montpellier. »

32 Dans les années 70, le président de la République était Georges Pompidou, ancien Premier ministre du général de Gaulle. L'Union européenne n'était pas le monstre qu'elle est devenue depuis, elle comptait 6 membres, puis 9 membres à partir de 1973. (Notons que la France a alors cessé d'emprunter à 0 % auprès de la Banque de France pour s'endetter sur les marchés, et n'oublions pas que M. Pompidou avait été « général manager » de la banque Rothschild avant de devenir premier ministre du général de Gaulle). L’État avait encore le pouvoir de gouverner et d'imprimer sa marque régalienne sur la vie du pays. Le monde était marqué par les tensions entre le « bloc de l'Est » et le « monde libre ». Les Etats Unis étaient empêtrés dans la guerre du Vietnam (qui s'est terminée en 1975 par la défaite des Etats Unis) et une partie du Moyen Orient regardait vers l'URSS. Économiquement, c'était encore un temps d'expansion pour l'économie française, libérée du fardeau algérien depuis 1962, date de l'indépendance de l'Algérie). Le panorama médiatique dans les années 70 (source Wikipedia). Les médias internet n'existaient pas, l'informatique en France restait confidentielle, les hautes technologies n'avaient pas conquis notre quotidien. L'oligarchie financière et économique (démesurément renforcée par les privatisations massives qui ont commencé pendant le premier septennat Mitterrand) n'avait pas encore fait main basse sur l'essentiel des médias, même si l'Aurore faisait partie de feu l' « empire Boussac ». -Presse quotidienne parisienne Devenir alors journaliste, au moins dans un support de diffusion nationale (cela était aussi vrai en province, selon les régions), cela consistait à choisir entre plusieurs titres aux engagements marqués : -L'Aurore, était la voix d'une droite dure. Créée par Clémenceau, elle sera absorbée par en 1985. -La Croix existe depuis 1883, et tente encore d'affirmer sa spécificité chrétienne dans un monde qui ne lui facilite pas la tâche. -Libération nouvelle mouture (le premier Libération créé après la Libération par Hubert Dastier de la Vigerie avait disparu en 1963) est né en 1973, à l'ombre de Jean Paul Sartre, qui aurait du mal à « retrouver ses petits » dans le quotidien actuel, à la pointe du politiquement correct. -Le Matin de Paris, (1977-1987) se voulait le quotidien de l'hebdomadaire du Nouvel Observateur. -Le Figaro, déjà journal de droite qui absorbera l'Aurore -Combat, né en 1960, disparu en 1974. -Le Quotidien de Paris, journal de la « droite décomplexée » (déjà!), 1974-1996. -L'Humanité, créée par jean Jaurès, devenu le quotidien du PCF -Le Parisien Libéré, créé en 1944, devenu en 1986 Le Parisien /Aujourd'hui en France -France Soir, célèbre par son succès phénoménal du temps de Lazareff, créé en 1944, disparu en 2012. -Le Monde Le Monde est un journal français fondé par Hubert Beuve-Méry en 1944. C'est l'un des derniers quotidiens français dits « du soir », qui paraît à Paris en début d'après-midi, daté du lendemain, et est distribué en province le matin suivant. Quotidien français dit « de référence » depuis plusieurs décennies, il est le plus diffusé à l'étranger jusque dans les

33 années 2000 avec une diffusion journalière hors France de 40 000 exemplaires1,2, tombée en 2012 à 26 000 exemplaires3. (...) Le Monde est la propriété du groupe Le Monde, détenu depuis 2010 par les hommes d'affaires , Pierre Bergé et Matthieu Pigasse 6 . Il est aussi disponible dans une version en ligne. Agences de presse Déjà existaient l'AFP, Reuters, AP. L'ACP, créée en 1951, fut liquidée en 1981. Hebdomadaires économiques -Le Nouvel économiste, créé en 1976 -Le Journal des Finances, 1867-2011 -Stratégie, créé en 1971 -L'Usine Nouvelle, créé en 1891 -Les Echos, créé en 1908 -l'Agefi, 1911-2006 Magazines -Le Point, créé en 1972 -Le Pélerin, créé en 1873 -Le Nouvel Observateur, créé en 1950 -L'Express : le titre est fondé en 1953 par Jean-Jacques Servan-Schreiber et Françoise Giroud comme supplément politique du journal libéral Les Échos.

Il n'était pas concevable alors de passer d'un titre à l'autre, sauf dans l'une des deux nébuleuses idéologiques relativement précises et homogènes, celle de la gauche (l'Humanité représentant sans doute alors une exception), ou celle de la droite. Ces notions avaient encore un sens alors que les « partis de gauche » construisaient un « programme commun de gouvernement ». La naissance de Libération deuxième tome a en apparence changé la donne, et permis de croire à une innovation réelle pendant un court laps de temps. -Panorama médiatique actuel Il faut donc avoir à l'esprit ce contexte spécifique pour imaginer que les journalistes d'alors n'étaient pas de même nature que les journalistes d'aujourd'hui. Pour souligner cet argument, voici l'extrait d'une déclaration de Florence Aubenas (source OJIM) : « Les gens qui deviennent journalistes sont différents de ceux d’il y a vingt ou trente ans. Les écoles de presse sont devenues systématiques. Aujourd’hui, quand on recrute un journaliste, il y a neuf chances sur dix qu’il sorte d’une école de journalisme ! Le profil n’est pas celui de gens de terrain, jeunes, mais plutôt de personnes ayant de bonnes compétences générales, de type Sciences-Po, avec un bac + 5 en poche. Il faudrait ouvrir cette sélection. » Grâce à l'OJIM, nous pouvons suivre l'évolution d'un quotidien bien connu des dérives à l'oeuvre, Libération. La preuve par « Libé » (source OJIM-Extraits)

34 (…) «Libération : « des maos aux bobos” Le journal fut fondé le 4 janvier 1973 dans le baptême d’une conférence de presse avec Sartre pour parrain, au cours de laquelle Jean-Claude Vernier, Serge July et Philippe Gavi annonçaient leur volonté de créer un nouveau type de presse émancipé de la pression des banques et de la publicité, d’offrir au peuple un journal qui ne le méprise pas mais libère sa parole (souligné part l'auteur). Quarante ans plus tard, Libé, contrôlé par Édouard de Rothschild, homme d’affaires héritier du célèbre banquier, est devenu précisément le symbole d’une doxa essentiellement partagée par les élites médiatico-politiques, combat la « libération de la parole » et craint plus que tout le déchaînement des bas instincts du peuple » (souligné par l'auteur). Note de l'auteur : Libération a à présent pour actionnaires de référence les hommes d'affaires Bruno Ledoux — propriétaire du siège du journal — et Patrick Drahi — propriétaire des sociétés Numéricable et SFR, ce qui ne change rien aux liens qui unissent le journal au monde des affaires. « Comment un tel renversement a-t-il pu se produire ? C’est qu’à l’analyse, l’histoire de Libération traduit, plutôt qu’un quelconque mouvement d’émancipation du peuple, celui de l’avènement d’une nouvelle classe dirigeante et de son idéologie, celle de babyboomers galvanisés par mai 68 qui allaient prendre le pouvoir dans de nombreux secteurs clés de la société française et l’exercer presque sans partage à partir des années 80. L’histoire de Libé, c’est donc avant tout celle d’une génération, aujourd’hui épuisée, déclinante, menacée, qui avait succédé à celle forgée par la Résistance et le mythe gaullien. Tout commence toujours par un mythe : celui qui amorcera l’ascension de Libé et des babyboomers, c’est mai 68, et c’est d’ici qu’il faut partir pour raconter leur histoire. (...) Si mai 68 nous paraît a posteriori une révolution accomplie, une rupture décisive après quoi s’est imposée une nouvelle morale, une nouvelle élite et un nouveau rapport au monde, il faut néanmoins garder à l’esprit que tel ne fut pas le sentiment des protagonistes de cette « révolution » après que les événements se furent produits. Et c’est bien compréhensible : les émeutes étudiantes de mai sont suivies, le 30 mai, par une manifestation monstre d’un million de personnes en soutien au Général, et par la victoire éclatante de ce dernier aux élections législatives du 23 et 30 juin. Les étudiants trotskystes et maos, qui désiraient la révolution au sens de celle d’octobre 17 en Russie, ne laissent après leur action qu’un pouvoir renforcé dans sa légitimité et sont renvoyés à leurs chères études, comme si venait simplement de sonner la fin de la récréation. Si les idées de mai 68 vont bel et bien finir par triompher, ce sera donc par un biais indirect. La révolution aura lieu, mais sous la forme d’une revanche sur cette révolution manquée. D’une certaine manière, le cas de figure est presque à l’opposé de celui qu’on a pu observer avec la Révolution française, où une révolution politique radicale acheva la longue diffusion des idées des Lumières. A l’inverse, c’est à partir de l’échec d’une révolution politique que vont se diffuser les idées de 68 et que celles-ci vont bouleverser la société française sous l’égide, notamment, d’un quotidien mythique : Libération.

La Gauche prolétarienne Dans l’émission de France Culture, « Concordances des temps », datant du 25 novembre 2006, Jean-Claude Vernier, l’un des fondateurs de Libé, et Laurent Martin, spécialiste de l’histoire des médias, nous offrent un éclairage passionnant sur la naissance du quotidien. Celle-ci a donc lieu, comme nous le raconte ce dernier, dans « un climat extrêmement tendu, puisque depuis 68, ceux qui ont espéré le Grand Soir et qui ne l’ont pas vu se réaliser, essaient de prolonger cette espèce de tension et de passion révolutionnaire (…). Donc, un certain nombre de gens qui n’ont pas abandonné leur rêve de 68 fondent des journaux, fondent des groupuscules, en particulier le groupe (…) de la Gauche prolétarienne, qui est un de ces groupes gauchistes nés non pas pendant mai 68, mais dans le sillage de mai 68. » Serge July appartient alors à ce groupuscule clandestin (car interdit par le ministre de l’intérieur de l’époque, Raymond Marcellin), où il agit sous pseudonyme, et se trouve donc clairement dans un cadre d’activisme révolutionnaire.

35 -L’affaire de Bruay-en-Artois Une anecdote que rapporte l’historien nous éclaire sur l’atmosphère qui règne dans ces franges militantes : Serge July, jugé trop mondain par ses camarades, est envoyé à Douai en janvier 71 pour « s’imprégner de la base ». Là, il prend parti avec son groupe dans l’affaire de Bruay-en-Artois : « c’est une affaire finalement assez sordide, une fillette qui est violée et assassinée dans le coron et évidemment les gens de ce groupe maoïste pensent que le coupable est tout désigné, il s’agit d’un notaire… » Serge July écrit alors dans La Cause du peuple, que le notaire, Mr. Leroy, est forcément coupable puisque le soir du meurtre, il mangeait huit cent grammes de viande… Dans un réflexe essentialiste et par une argumentation tautologique aussi simpliste que ceux qui poussaient les intellectuels antisémites à désigner Dreyfus coupable parce que juif, Leroy est coupable parce que bourgeois, et l’instinct épurateur qui en découle est également assez effrayant. Ainsi, se référant à un article du Nouvel Observateur de mars 1981, Jean-Noël Jeanneney, l’animateur de « Concordances de temps », rapporte comment July aurait répliqué à une militante émettant des doutes quant au fait de désigner le notaire à la vindicte populaire : « c’est parce que tu as peur, toi, fille de bourgeois, de voir la tête de ton père au bout d’une pique. ». L’affaire restera en tout cas classée sans suite.

-L’APL du 18 juin 1971 (…) Libération va (...) représenter une mutation, en phases successives, de cet élan révolutionnaire violent des origines. Et la première phase de cette mutation, c’est la création de l’APL, l’Agence de Presse Libération, le 18 juin 1971. La date, bien évidemment, n’est pas anodine, mais exprime clairement la manière dont l’agence se définit en situation de résistance contre le pouvoir. Elle permet également à l’APL de substituer, en quelque sorte, le symbole qu’elle voudrait devenir au symbole qui fonde le prestige du pouvoir gaulliste, l’appel du 18 juin 1940. L’APL commence du reste déjà à agir, moins comme un organe de lutte radicale, que comme un relais entre la marge et les institutions. Laurent Martin, toujours : « Disons que l’APL avait vocation a fournir les informations (…) sur tout le mouvement social qui se déroulait à l’époque non seulement à la presse militante, qui, elle, existait déjà depuis 1968 (…), mais aussi à la presse dite bourgeoise, à la presse traditionnelle, à la presse classique. »

-Du deuil de 68 à une nouvelle stratégie de conquête Or, l’un des événements qui va faire connaître l’APL au grand public est justement celui qui amorce le basculement définitif de la lutte immédiate à la lutte médiatique( souligné par l'auteur) . En mars 1972, Pierre Overney, militant maoïste de , de l’usine de Flins, est abattu de sang froid par le chef du service d’ordre lors d’une altercation. La direction plaide la légitime défense, mais un jeune lycéen a pu prendre des photos du drame et, via l’APL, celles-ci vont être diffusées dans les grands médias et démentir totalement les allégations de la firme. Coup de maître pour l’agence, donc. Mais d’un autre côté, si les obsèques de Pierre Overney, le 4 mars, sont suivies par deux cent mille personnes, « certains y ont vu les obsèques du mouvement de 68 », explique Jean-Noël Jeanneney. Et Laurent Martin de préciser : « Quelqu’un comme Benny Lévy, Pierre Victor, le chef de la Gauche prolétarienne, sent qu’il y a un danger de basculement dans la révolte violente qui va causer des morts. Donc, il va essayer d’infléchir le mouvement maoïste en particulier vers, disons, d’autres formes d’action, et en particulier le journalisme. » De l’Agence de Presse Libération va naître, l’année suivante, le quotidien du même nom.

-Libération : une synthèse sous le patronage de Sartre Cet « infléchissement », qui doit à la fois, désormais, éviter la révolution violente et atteindre ses objectifs par d’autres moyens, s’affirmera grâce à un amalgame entre l’option qu’incarne Jean-Claude Vernier et celle que représente Philippe Gavi, un ancien d’HEC. La première consisterait à « faire un journal par le peuple, pour le peuple, et dont le contenu serait composé essentiellement des informations que feraient remonter les militants des comités Libération, puisqu’on passe finalement sans transition quasiment des comités mao aux comités Libération » (Laurent Martin). La seconde est de faire un journal professionnel capable de rivaliser avec la presse traditionnelle. Et c’est Serge July qui va accomplir la synthèse, de par sa légitimité de militant maoïste, en ralliant finalement la seconde option. La synthèse a lieu sous le haut patronage de Jean-Paul Sartre qui définit ainsi, face à Jacques Chancel sur France Inter, en 1973, les objectifs du journal : « Nous avons une seule opinion certaine, nous croyons à la démocratie directe et nous voulons que le peuple parle au peuple. » Quand Jacques Chancel fait remarquer au philosophe, qu’en termes de diversité d’opinions, la rédaction de Libération ne compte pas de gens de droite, celui-ci lui rétorque : « Il est évident que les gens de droite n’ont pas dans l’idée de donner la parole au peuple. » Encore une tautologie d’époque qui ne peut aujourd’hui que nous faire sourire, à l’heure où le sociologue Christophe Guilluy montre comment le socle électoral de la gauche est essentiellement constitué des classes aisées des grandes villes profitant de la mondialisation capitaliste… Néanmoins, ce besoin de « démocratie directe » peut sembler parfaitement légitime au début des années 70, alors que

36 l’ORTF s’assimile peu ou prou à un média d’État aux mains du régime gaulliste.

-Première version : l’utopie 70’s Le journal qui naît alors est en parfaite adéquation avec l’esprit de cette jeunesse révélée à l’Histoire en mai 68 : utopiste, manichéenne, éprouvant une certaine fascination pour les totalitarismes de gauche, mais plutôt vertueuse quant à ses principes. Tandis que des étudiants hippies fondent des communautés ou abandonnent leur carrière promise pour aller élever des chèvres en Ardèche, les journalistes de Libé, ne subvenant à leurs besoins que grâce aux contributions de leurs lecteurs (donc très mal), ne pratiquent aucune hiérarchie des salaires et s’organisent eux-mêmes selon un système de démocratie directe. « Serge July lui-même est à la tête vaguement d’une direction qui n’ose pas dire son nom : on l’appelle une “unité de décision” », explique Laurent Martin. Tout cela est également typique d’un certain contexte socio-économique : nous sommes dans la dernière décennie des « trente glorieuses », le culte de la consommation provoque des réactions de rejet bien compréhensibles, et dans le même temps, la prospérité du pays ne permet pas de soulever des masses miséreuses pour faire la révolution. Reste une grande latitude pour expérimenter, sans crainte réelle de l’avenir, des solutions alternatives. La nostalgie des révolutions violentes porte Libé à saluer la victoire des Khmers rouges en avril 75, en plaçant en une : « Phnom Penh : sept jours de fête pour une libération. » Le journal qui se fera porte-flambeau de la lutte prétendument antifasciste, se réjouit donc, à l’époque, de l’avènement d’un régime qui exterminera en quelques années plus de 20% de la population de son pays…

-Le social ou les mœurs Libération est véritablement le lieu où se vit la mutation de la gauche moderne. Aussi, dès les années 70, s’amorce ce mouvement de transition de la lutte sociale à la question des mœurs (souligné par l'auteur). Si l’« Affaire Lip », en 1974, permet au journal de réaliser un beau travail sur le terrain et d’accompagner cette aventure assez émouvante d’ouvriers licenciés qui reprennent en main leur propre usine en se lançant dans l’autogestion, une crise s’ensuit pourtant au sein de la rédaction, entre militants purs et durs d’un côté, et tenants du journalisme professionnel de l’autre, menant au remplacement progressif des premiers, du moins les plus intransigeants d’entre eux. Déjà, toutefois, la lutte se déplace sur le terrain des mœurs : le féminisme, l’homosexualité et… la pédophilie (qui a – littéralement – « bonne presse » dans les années 70) deviennent des dossiers importants pour la rédaction. Quitte à créer une rupture avec le lectorat ouvrier, comme en témoigne encore Laurent Martin : « Ils (certains rédacteurs de Libération) se heurtent effectivement à cette autre fraction de la rédaction qui sont les maos et qui, eux, voient d’un assez mauvais œil, finalement, cette émancipation par le corps en particulier, considérant qu’il y a là un danger d’effrayer les masses ouvrières, qui n’ont pas cet affranchissement par rapport aux normes morales… » Affranchissement tel, à l’époque, que les célèbres « petites annonces » de Libé, rédigées dans un langage très cru, peuvent être ouvertement pédophiles, tandis que certains articles sont gaiement titrés : « Câlins enfantins ». En 2010, au sujet d’un documentaire à charge contre l’Église catholique réalisé par Paul Moreira, Ondine Millot titre dans Libé : « Quand l’Église se tait ». On ne peut que convenir qu’au contraire de l’Église, Libé, durant des années, ne s’était pas tu au sujet de la pédophilie, mais en avait claironné la promotion.

-La fin du premier Libé Mais la fin des années 70 va signifier pour Libération, comme pour toute la génération que le journal incarne de manière symptomatique, la fin des utopies. D’abord, cesse la complaisance que le journal entretenait pour le terrorisme (s’il était d’extrême gauche). Après avoir refusé de condamner les actions de la fameuse RAF (Fraction Armée Rouge) de la bande à Baader, Libé finit par titrer en une : « RAF/RFA, la guerre des monstres », le 18 octobre 1977, suite au carnage final des terroristes. Ce changement de cap ne se fera pas sans provoquer l’ire de nombreux lecteurs qui viennent faire le siège du journal. Mais Serge July ne cède pas. Celui-ci, d’ailleurs, dès 1978, devient un invité régulier du Club de la presse, et par là, la figure émergente d’une rédaction censée être composée exclusivement d’égaux. Le mouvement s’accélère et sont rapidement sapés tous les principes fondateurs du premier Libé. Plus de mode autogestionnaire, re-hiérarchisation des salaires et des postes, introduction de la publicité et de capitaux extérieurs…

37 De février à mai 1981, le journal cesse de paraître, se restructure et resurgit sous une forme tout à fait neuve, du côté de la presse classique et mieux, depuis l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République le 10 mai, du côté du pouvoir (souligné par l'auteur).

-Seconde version : les années 80, réalisme et paillettes Les années 80, si elles marquent le début d’une longue récession économique, marquent également l’ascension fulgurante d’une nouvelle gauche dont Libé, rompant avec ses racines maoïstes, se fait le porte-voix : « sociale-démocrate à tendance libertaire. » S’amorce ainsi le remplacement d’un consensus historique par un autre. Celui de l’après-guerre, résultat de l’alliance entre les acteurs de la Libération, le consensus gaullo-communiste, va être progressivement remplacé par l’alliance des enfants de 68, le consensus libéral-libertaire décrit par le philosophe Jean-Claude Michéa. D’un côté, la droite liquide plus ou moins la nation et l’héritage gaulliste pour virer franchement libérale, de l’autre la gauche au pouvoir délaisse la réforme sociale pour s’attaquer à réformer les mœurs, alors que le PC autrefois si puissant débute sa descente dans les vestiges de l’Histoire. D’ouvriériste, la gauche devient médiatique, s’approprie la plupart des postes clés dans ce domaine, avec le soutien du pouvoir mitterrandien qui régnera sur toute la décennie (souligné par l'auteur). Libération, dans un contexte aussi favorable, atteindra son pic de diffusion en 1988 en frôlant les 200 000 exemplaires.

-L’arme du « tout-culturel » Si July essuie de nombreuses critiques des anciens soixante-huitards qui lui reprochent de trahir tous les principes sur lesquels s’était fondé le journal, celui-ci se défend avec cet argument que l’on peut aisément qualifier de mauvaise foi : « Ce n’est pas moi qui ait changé, c’est le monde » ! En fait, plus exactement, il justifie l’introduction de la publicité (le 16 février 1982) avec cette phrase : « Non, Libération ne change pas ; c’est la publicité qui a changé. Elle est un art. On ne sait plus très bien où commence la culture et où finit la publicité. Sans elle, Libération eût été incomplet. » (cf. Benjamin Dormann, Ils ont acheté la presse, Jean Picollec, 2012). Voici encore un propos extraordinairement symptomatique qui annonce le « tout-culturel » de Jack Lang. N’importe quelle personne ayant reçu un minimum d’éducation sait faire la différence entre une pub pour du shampoing et une toile de Van Gogh. Pas Libé. Pas la gauche des années 80 qui ne sait plus où s’achève la culture et où commence la réclame, où s’achève la culture et où commence la propagande. Table rase des poussiéreux classiques ou des « humanités », table rase de la déférence pour la grande littérature, la grande musique ou les grands penseurs, du Beau et du Vrai recherchés pour eux-mêmes, vient l’ère du « tout-culturel », c’est-à-dire de la culture comme emballage d’une idéologie ou d’un produit au service du consensus libéral-libertaire. En outre, les années 80 représentent l’âge d’or des pubards et des communicants, et Libé, par sa maquette, son losange rouge, ses célèbres titres à base de calembours et son langage volontiers relâché, affirme un nouveau style d’une redoutable efficacité.

-Troisième version : les années 90, triomphe et déclin Cependant, le deuxième septennat de Mitterrand va s’accompagner d’une perte de vitesse significative puis d’un renversement de la courbe des ventes de Libération. Cherchant des alternatives, une nouvelle formule, Libération 3, est lancée en 1994 mais se révèle un échec qui enfonce encore davantage le journal et l’oblige à faire appel à Claude Maggiori et à confier 60% de son capital au groupe Chargeurs. Ainsi, comme l’écrit Jean Stern, entre 1982 et 1996, Libération perd toute son indépendance. Néanmoins, Libé a-t-il encore besoin d’une quelconque indépendance ? Pour s’opposer fondamentalement à quoi ? La croisade des années 80 est achevée,

38 ses idées règnent dans la plupart des postes de pouvoir, le consensus libéral-libertaire est pleinement installé. Au moment où les idées de Libé s’institutionnalisent de manière implicite sous la forme d’une Pensée Unique qui irradie presque tous les cercles du pouvoir (souligné par l'auteur), le lectorat de Libé décline, sans doute parce qu’il s’agit également du moment où le peuple commence de divorcer des élites, le magistère du journal dans la France « d’en haut » s’accompagnant d’un désaveu progressif de la France « d’en bas ». Les militants maos sont devenus des journalistes « in », et ceux-ci sont désormais des notables des médias qui n’assument pas leur statut, perdent le peuple, et s’apprêtent à vieillir en bobos.

-Les années 2000 : fusion et crispation Entre 2001 et 2005, la diffusion de Libération encaisse un recul de 20%. Le déclin s’accélère, rompu seulement par les unes anti-Le Pen durant la campagne présidentielle de 2002. Le lendemain du premier tour, la fameuse photo du visage de leader frontiste marqué d’un « NON » en lettres capitales, fait diffuser le journal à 700 000 exemplaires (300% d’augmentation). Symbole éloquent, encore une fois, la génération qui a pris le pouvoir culturel et trahi les idéaux initiaux de la gauche ne trouve plus d’autre justification que dans l’antifascisme pavlovien, folklorique et parodique pour conserver ses prébendes. Autre symbole éloquent, Serge July fait appel à Édouard de Rothschild en 2005 pour éviter la faillite de son journal. L’année suivante, le 30 juin, Serge July quitte le journal pour le sauver, selon ses dires, et obtempérer aux conditions posées par Rothschild. La rédaction fait mine de s’inquiéter de perdre une indépendance qu’elle n’a plus depuis dix ans. July remplacé par Rothschild avec l’accord du premier, cela annonce déjà le mariage de Carla Bruni avec en 2008 : la fusion complète, enfin réalisée, entre la droite libérale et la gauche libertaire. Ainsi, ce qui semble un scandale ou une anomalie à beaucoup n’est en réalité qu’une conclusion strictement logique d’un processus enclenché depuis plusieurs décennies et qui trouve là son achèvement.

-2010 : paradoxes terminaux Depuis le départ de Serge July, Laurent Joffrin a eu la direction de Libé, fait la campagne de Ségolène Royal en 2007 et enrayé légèrement la chute des ventes en 2010 et 2011, laissant cette année-là son poste à Nicolas Demorand. Le déclin s’est depuis de nouveau confirmé et fin 2013, le quotidien prévoit une perte nette de 1,3 million d’euros, alors qu’Édouard de Rothschild et les héritiers de l’éditeur italien Carlo Carraciolo annoncent vouloir se désengager . Devant cette débâcle bien réelle, le quotidien s’empêtre toujours davantage dans sa propre mythologie comme un vieillard cherchant désespérément à rallumer la flamme de sa jeunesse. Aussi, après la mort du jeune Clément Méric en juin dernier, Libé a-t-il employé tous les moyens pour recycler le cadavre du jeune homme en icône, et pour régler ainsi ses propres problèmes de légitimité : mettre en scène une hypothétique menace fasciste qui ferait passer Libé, comme à ses débuts, pour un organe de résistance et non pour un organe de collaboration avec le pouvoir. Le 15 novembre dernier, le fantasme du vieillard sembla se réaliser. Un homme au crâne rasé entra dans la rédaction pour faire feu. C’est tout Libé qui serait « méricisé », martyr du fascisme ressuscité, accrédité dans ses délires ! Cependant, cruelle ironie de l’histoire, on découvrit cinq jours plus tard l’identité réelle du tireur, Abdelhakim Dekhar, un vieux militant d’extrême gauche qui avait déjà été mêlé à l’ « affaire Rey Maupin » vingt ans plus tôt, un « antifa », dont Libé, deux jours avant d’en être victime, approuvait les méthodes violentes dans ses propres colonnes, un révolutionnaire qui semblait incarner la version sénile des premiers rédacteurs du Libé des années 70 et qui tirait sur le Libé des années 2010 au nom de l’antifascisme délirant, un militant enfin qui, comme les rédacteurs du journal, voyait du fascisme partout, mais lui, même jusque dans Libé. Après la tragédie, la farce.

39 -À quand le requiem ? Dérouler l’histoire de Libération, c’est dérouler, en accéléré, l’histoire de la génération 68, une génération finalement saturée d’imaginaire, qui s’est forgée sur la mythification d’une révolution ratée, a régné par le « tout-culturel », et s’achève aujourd’hui dans le résistantialisme d’opérette. Sauf qu’entre temps, sur un plan très concret, cette génération aura accouché d’un nouveau consensus historique redoutable, le consensus libéral-libertaire, ayant laminé toutes les anciennes structures familiales, sociales, nationales selon lesquelles les hommes avaient jusque là toujours vécu, une tabula rasa plus formidable qu’aucun Bolchevik ne l’aurait jamais rêvé (souligné par l'auteur). Si un journaliste appartenant à une nouvelle génération désirait, aujourd’hui, combattre un pouvoir jugé inique et crypto-totalitaire, si un journaliste d’une nouvelle génération se retrouvait dans une attitude comparable à celle qu’adoptèrent les journalistes du premier Libération, et souhaitait, par conséquent, rendre la parole au peuple et combattre la presse aux ordres, il est fort possible qu’il agirait sur un média Internet financé par ses propres lecteurs afin, comme au temps du premier Libé, d’échapper à la double pression de la finance et de la publicité. Et s’il se penchait sur l’histoire de Libé, sur l’histoire, donc, de la génération qui l’a précédé, il est assez probable qu’il la jugerait aussi périmée que Serge July et ses acolytes durent juger la génération gaullienne, si bien que son papier finirait sans aucun doute à la manière d’une oraison funèbre. Quarante ans, c’est long. À quand le requiem ? »(sélectionné par l'auteur) Cette histoire méticuleusement racontée (M. Drahi a succédé à M. Rothschild, en attendant un prochain propriétaire ?) a le grand mérite d'éclairer la fabrique d'une doxa via un vecteur, un journal, qui a à la fois traduit, exprimé et contribué à forger le carcan idéologique qui sévit aujourd'hui, notamment à travers le projet politique social démocrate, qui est devenu l'ersatz européen de l'univers anglo-saxon. Le « projet social démocrate » étant à présent une ambition néolibérale comme les autres, on sent bien que l'on flirte en la matière avec l'essence même du problème posé par les médias, à savoir le poids du fric, mais aussi l'adhésion des « cadres moyens » que sont la plupart des journalistes à cet air du temps mortel pour la démocratie. On est en droit de penser que les « infos », incluses dans le grand « nuage musical et informationnel » qui enserre la planète se sont fondues dans une vaste clameur harmonique, où la « disharmonie », à savoir le «son différent » ou ce qui est revient au même, la parole alternative, sont bannis, au fond pour des raisons tout autant commerciales que politiques.⋅ Dans ce temple du « concert », voire de ce qui s'apparente à une chorale efficacement organisée et guidée (story telling?), les « arguments politiques » usuels et répétitifs peuvent souvent être assimilées à des annonces commerciales et ceux qui les colportent à des VRP de la doxa du jour, moyens privés d'information obligent. Les médias publics sont pleinement intégrés à la grande symphonie médiatique qui berce les citoyens comme le chant des sirènes le faisaient dit-on des compagnons d'Ulysse, car nos élites politiques font globalement partie de ce monde de l'unanimisme et du conformisme assumés dans le cadre européen et atlantique. L'information marchandise étant devenue largement majoritaire, toute voix discordante est un couac condamné comme tel. Nous pouvons avoir l'impression que le monde de l'information tient à présent plus de l' « entertainment » que de la sphère politique. On est par ailleurs en droit de faire un parallèle avec ce qu'est devenue cette sphère politique qui, rappelons-le, quel que soit le camp (à quelques exceptions près), propose sur le plan économique les mêmes analyses et les mêmes politiques depuis 1983. Le « politiquement correct » tient de l'harmonie relative de la musique industrielle, fabriquée en série et formatée pour trouver aisément des oreilles complices. L' « entertainment » est donc à la

40 fête, omnipotent, la démocratie, qui crie, qui pleure, qui grince, n'est pas dans le coup. Elle est priée de rester blottie dans les discours et les ouvrages savants ou pas, dans tous les cas « blacklistés », nul dans le monde des décideurs, n'a plus besoin d'elle. Le « politiquement correct » utilise par ailleurs un discours très étudié pour exprimer non la réalité, mais ce qu'il convient que les citoyens en retiennent. La distorsion du sens de certains mots qui reviennent sans cesse dans les discours politiques et médiatiques relève d'une technique parfaitement pensée. Pour approcher cette problématique, un extrait d'une papier de Jean Pierre Garnier (sociologue), posté sur le site « Article 11 » le 18 janvier 2015 :

« Petit lexique techno-métro-politain (extrait)

« Les mots du pouvoir sont rarement innocents. Ceux qui accompagnent les évolutions urbaines actuelles n’échappent pas à la règle. Une novlangue métro-techno-politaine est mise au service de l’ordre urbain, social et technologique imposé par les classes dominantes. Pauvre et répétitive, cette sémantique matraquée jusqu’à la nausée n’en est pas moins arme de guerre sociale. Le langage basique des aménageurs à l’heure de la « métropolisation » des « eurocités » est à la ⋅lire en postface l'interview d'Emmanuel Todd par Atlantico, relayé par lescrises.fr fois succinct et infra-théorique. Ce qui peut se comprendre : l’action doit primer sur la réflexion. Mais cette action, pour être menée à bien sans susciter d’opposition, suppose un formatage de l’opinion. C’est pourquoi le verbe n’est pas seulement descriptif mais aussi roboratif : il doit susciter l’adhésion - voire l’enthousiasme. Cependant, à la différence de la propagande des régimes dits totalitaires, où la politique était « au poste de commande » dans le choix du vocabulaire, c’est la technique qui sert de référent ultime à celui-ci, garante d’efficacité et d’objectivité. Présentée comme une seconde nature, la technique imprime aux décisions prises le sceau de l’inéluctabilité : il ne s’agit plus de gouverner mais de gérer. On aurait pu croire que les critiques dont l’idéologie technocratique fit l’objet à la belle époque de la « contestation du système » avaient laissé des traces. Il n’en est rien. À la faveur de la dépolitisation massive consécutive à la succession d’« alternances » politiciennes sans alternatives politiques, le scientisme et le technicisme ont opéré un retour en force dans les discours des gouvernants et de leurs servants, chercheurs en sciences sociales compris. Pour la plupart, ces derniers n’ont rien trouvé de mieux que de faire écho aux gouvernants en se bornant à enrober les stéréotypes langagiers en usage parmi la technocratie aménageuse de circonlocutions plus pédantes que savantes pour les parer des plumes de la scientificité. De ce verbiage éminemment consensuel, les exemples fourmillent. De même que, parallèlement, on s’évertue à nier le caractère oligarchique du pouvoir local en place en adjoignant au terme « démocratie » censé le définir l’épithète pléonastique « participative », auquel on ajoutera parfois, pour faire bon poids, celui de « citoyenne », on parlera à nouveau de « prospective », comme au temps des soi-disant « Trente glorieuses », mais en précisant qu’elle sera désormais « partagée ». Par qui ? On ne le sait. Seuls les mauvais esprits feront remarquer qu’elle ne le sont que par une minorité de « décideurs ». En ces temps interminables de « crise », où la morosité a gagné une bonne partie de la population, il faut user de mots susceptibles de lui redonner espoir. C’est pourquoi le « futur », l’« avenir » ou, plus littéraire, le « devenir », ont repris du service dans les discours dominants - évidemment dépouillés de la connotation pessimiste, sinon nihiliste, que leur avait insufflée la mouvance

41 « punk » puis « destroy » dans les années 70. Si l’on se garde de promettre « radieux » les temps à venir comme s’y était risquée la propagande stalinienne, ils sont néanmoins présentés comme souriants grâce aux innombrables « révolutions » scientifiques et techniques (télématique, informatique, communicationnelle, bio- et nano-technologique…) qui jalonneraient plus que jamais l’évolution de l’humanité dans sa marche en avant guidée par le « progrès ». Ainsi qualifie-t-on d’« avancée » n’importe quelle « innovation », quand l’expérience prouve qu’elle peut être synonyme de régression. Tout ce qui évoque le « mouvement » est, par conséquent, empreint de positivité, le mouvement du capital et ses effets de plus en plus délétères n’étant, bien entendu, jamais mentionnés. Dans le champ urbain, comme ailleurs, cet aggiornamento linguistique fonctionne selon deux principes : la fabrication de néologismes plus oxymoriques ou pléonastiques les uns que les autres et le recyclage sans fin de termes anciens. Ainsi en va-t-il du vocable « technopole » — ou « technopôle » — mis sur orbite dans les années 80 du siècle dernier, et de celui de « métropole », qui connaît une nouvelle vogue depuis le début du siècle.

(…) Ainsi naquirent, au moins sur le papier, les « technopoles », dotées chacune d’un ou plusieurs « technopôles » spécialisés selon la branche d’activité (informatique, biotechnologie, médecine, etc.) et qui allaient rivaliser entre elles, et pour certaines, avec leurs homologues des pays voisins, dans la course à la « compétitivité » et à l’« attractivité ». Dans les campagnes de marketing urbain, c’est à qui se targuerait de mériter le plus le label « technopolitain », sans voir ou en feignant d’ignorer que dans la technopolis, la Technique, adulée comme une nouvelle divinité, a fini par dissoudre le sens que l’histoire avait donné au mot « Cité ». (…) D’où ces proclamations ronflantes des maires, des présidents de Conseils généraux ou régionaux, relayés par les médias et les têtes pensantes diplômées qui leurs sont inféodées. Chacun vantera-t-il ainsi, avec d’emphase, les « atouts » du territoire qu’il a pour mission de « dynamiser », de faire « rayonner » et de rendre « attractif » aux yeux des « investisseurs » et de la « matière grise ». Et ce dans le cadre européen de « la concurrence libre et non faussée » qui, pour ne pas avoir été inscrite dans le projet de constitution rejeté par le peuple, n’en régit pas moins désormais les rapports entre « métropoles », comme les rapports sociaux en général. Environ 80 substantifs, une quinzaine de qualificatifs, à peine une trentaine de verbes composent le lexique techno-métropolitain. Une liste assez courte, à l’instar de la pensée qu’elle résume. Mais elle suffit, pour les raisons évoquées plus haut, à résumer les grandes lignes de la vision du monde urbain véhiculée par les promoteurs de la technopolisation ou de la métropolisation. Décortiquer ce que recouvre cette vision, mettre au jour les intérêts qu’elle dissimule, dégager les logiques, les processus et les mécanismes sociaux des politiques urbaines qu’elle inspire nécessiterait, certes, le recours à une foule de concepts et d’arguments puisés dans la théorie critique. Ce que s’entêtent à faire une poignée de penseurs « radicaux », héritiers de Karl Marx et de Henri Lefebvre, tels le géographe anglais David Harvey ou le sociologue étasunien John Bellamy Foster, lesquels n’ont de cesse de dévoiler les tenants et les aboutissants de l’urbanisation du capital. Ce n’est évidemment pas là le propos des apologistes de la technopolisation, qu’ils en soient les « acteurs » ou les commentateurs autorisés. « Décideurs » et chercheurs, même combat : il ne s’agit pas de penser au-delà de ce qui est indispensable à l’action, et encore moins de critiquer cette dernière, mais d’« impulser », de « catalyser » et de « motiver ». Tout au plus pointera-t-on les « dysfonctionnements » qui peuvent en résulter, afin d’être en mesure de les éliminer. On parlera alors de « tensions » ou de « distorsions », métaphores empruntées à la physique, c’est-à-dire à une « science dure » non

42 suspecte de mollesse à l’égard de l’« idéologie » - anticapitaliste, faut-il le préciser - qui porte à les appréhender en termes de contradictions et à y discerner les manifestations spatiales d’une domination sociale. Avec des idées simples en forme de slogans, on s’attachera donc à exalter l’accession de villes triées sur le volet au « club très fermé des technopoles », pour reprendre l’une des expressions favorites de feu le maire de Montpellier, Georges Frêche, et au rang de « métropoles » pour celles qui auront le plus phagocyté leur environnement rural. Ce qui donnera, par exemple, dans la prose d’un groupe de chercheurs parmi tant d’autres : « Dans la plupart des classements internationaux, x… [n’importe quelle « ville européenne », voire « globale », au choix] gagne des places, ce qui est sans doute l’élément le plus significatif de sa capacité actuelle d’attraction et de rayonnement ». Ou encore : « La gouvernance métropolitaine met à profit une relative convergence d’intérêts publics et privés pour faire du développement économique sa priorité, et favoriser le placement de x… [idem] dans la concurrence entre villes nationales européennes voire mondiales »1. En peu de mots, on ramasse ainsi une pensée qui n’en requiert pas plus, dissuadant de s’interroger sur la signification politique des phénomènes et des pratiques qu’ils désignent pour, au contraire, les « valoriser » et les « promouvoir », comme le veut toute propagande en faveur de l’ordre établi, fût-il urbain, comme c’est le cas ici.(...) Un monde de l'information s'est « libéré » du réel pour entonner son propre discours (qui n'est pas originellement le sien) en dépit souvent de toute vraisemblance. Le virtuel a ainsi détrôné le réel. En France, Antenne 2 ou FR3 vivent de fonds publics, TF1 et les autres médias privés vivent de la publicité ou de financements de la part de leurs propriétaires et de l'Etat, le rapport au public et à l'information est donc biaisé par de solides intérêts politiques et financiers. Exemple par M6 (source OJIM, extraits) :

« Pas de « pression politique » mais des « pressions économiques » ! Interrogé par Maïtena Biraben, dans l’émission « Le Supplément », Nicolas de Tavernost, patron de M6, a avoué faire pression sur les journalistes de la chaîne afin qu’ils évitent certains sujets. « Je ne peux pas supporter qu’on dise du mal de nos clients. Nous vivons de nos clients ». « Absolument, il y a des choses qui sont beaucoup plus compliquées à traiter que d’autres ». Un aveu qui vaut de l’or. Au moins, le patron de M6 a le mérite d’être clair : celui qui paye commande, même dans les médias et même avec les journalistes ! Et de citer un exemple concret : « à un moment donné, il y avait une émission de Capital sur la téléphonie et nous sommes partie prenante puisque nous détenons M6 Mobile de l’opérateur Orange. Je leur [aux journalistes, ndlr] ai expliqué que si on faisait une émission sur la téléphonie et qu’elle était bonne pour Orange, on aurait forcément dit que c’était compréhensible, et si elle était mauvaise pour Orange, on se serait fâché avec notre client ». Heureusement pour les journalistes, Nicolas de Tavernost leur laisse « une très grande liberté pour traiter beaucoup d’autres choses »… Ouf ! » Seul à présent en télévision et en radio, l' « audimat » est pris en compte, car permettant de fixer un prix aux annonceurs publicitaires. La presse écrite, en perte de vitesse, est fréquemment assimilable aujourd'hui à un crieur des rues vantant les mérites de potions (amères) prétendument sucrées, concoctées dans les officines européennes et atlantistes. Dans notre civilisation technocratique de l'image et de la conformité (nous aborderons ce sujet plus loin), se définir différent, parler autrement, et viser le réel pour le rendre « préhensible » et analysable, puis

43 réformable, est une lutte qui n'est pas gagnée d'avance. L'univers de l'individualisme à tout crin sécrète en matière politique et médiatique une uniformité saisissante. La « liberté individuelle » est par là devenue un leurre gavé aux loisirs et à la consommation. Le discours différent est réputé monstrueux, les avis exogènes sont présentés comme absurdes ou dangereux, ou encore « populistes », le pluralisme des idées n'a plus cours. Nous sommes apparemment face à un « totalitarisme doux » (lire en postface l'interview d'Emmauel Todd), qui tue la différence grâce à la force de frappe de la télévision et des radios, et pour ceux qui lisent, de la presse écrite au moins pour une frange majoritaire de celle-ci. Une partie de notre société est maintenue sous hypnose. On ne saurait mieux dire que Florence Aubenas, sans pour autant oublier la contrainte dans laquelle se trouvera tôt ou tard notre pays, à savoir restituer d'une manière ou d'une autre aux organes d'information une liberté éditoriale réelle, en expropriant leurs propriétaires privés actuels, ce qui ne réglera pas tous les problèmes, mais posera au moins les bases d'un devenir acceptable.

Revenons-en à la « charte » de 1971 qui fleure bon le « terroir » d'antan:

« Préambule

Le droit à l’information, à la libre expression et à la critique est une des libertés fondamentales de tout être humain. Ce droit du public de connaître les faits et les opinions procède l’ensemble des devoirs et des droits des journalistes. La responsabilité des journalistes vis-à-vis du public prime toute autre responsabilité, en particulier à l’égard de leurs employeurs et des pouvoirs publics. La mission d’information comporte nécessairement des limites que les journalistes eux-mêmes s’imposent spontanément. Tel est l’objet de la déclaration des devoirs formulés ici. Mais ces devoirs ne peuvent être effectivement respectés dans l’exercice de la profession de journaliste que si les conditions concrètes de l’indépendance et de la dignité professionnelle sont réalisées.

Tel est l’objet de la déclaration des droits qui suit.

Déclaration des devoirs Les devoirs essentiels du journaliste, dans la recherche, la rédaction et le commentaire des événements, sont : 1) respecter la vérité, quelles qu’en puissent être les conséquences pour lui-même, et ce, en raison du droit que le public a de connaître ; 2) défendre la liberté de l’information, du commentaire et de la critique ; 3) publier seulement les informations dont l’origine est connue ou les accompagner, si c’est nécessaire, des réserves qui s’imposent ; ne pas supprimer les informations essentielles et ne pas altérer les textes et les documents ; 4) ne pas user de méthodes déloyales pour obtenir des informations, des photographies et des documents ; 5) s’obliger à respecter la vie privée des personnes ; 6) rectifier toute information publiée qui se révèle inexacte ; 7) garder le secret professionnel et ne pas divulguer la source des informations obtenues confidentiellement ; 8) s’interdire le plagiat, la calomnie, la diffamation, les accusations sans fondement ainsi que de recevoir un quelconque avantage en raison de la publication ou de la suppression d’une information ; 9) ne jamais confondre le métier de journaliste avec celui du publicitaire ou du propagandiste ; n’accepter aucune consigne, directe ou indirecte, des annonceurs ;

44 10) refuser toute pression et n’accepter de directives rédactionnelles que des responsables de la rédactionTout journaliste digne de ce nom se fait un devoir d’observer strictement les principes énoncés ci-dessus ; reconnaissant le droit en vigueur dans chaque pays, le journaliste n’accepte, en matière d’honneur professionnel, que la juridiction de ses pairs, à l’exclusion de toute ingérence gouvernementale ou autre.

Déclaration des droits 1) Les journalistes revendiquent le libre accès à toutes les sources d’information et le droit d’enquêter librement sur tous les faits qui conditionnent la vie publique. Le secret des affaires publiques ou privées ne peut en ce cas être opposé au journaliste que par exception en vertu de motifs clairement exprimés. 2) Le journaliste a le droit de refuser toute subordination qui serait contraire à la ligne générale de son entreprise, telle qu’elle est déterminée par écrit dans son contrat d’engagement, de même que toute subordination qui ne serait pas clairement impliquée par cette ligne générale. 3) Le journaliste ne peut être contraint à accomplir un acte professionnel ou à exprimer une opinion qui serait contraire à sa conviction ou sa conscience. 4) L’équipe rédactionnelle doit être obligatoirement informée de toute décision importante de nature à affecter la vie de l’entreprise. Elle doit être au moins consultée, avant décision définitive, sur toute mesure intéressant la composition de la rédaction : embauche, licenciement, mutation et promotion de journaliste. 5) En considération de sa fonction et de ses responsabilités, le journaliste a droit non seulement au bénéfice des conventions collectives, mais aussi à un contrat personnel assurant sa sécurité matérielle et morale ainsi qu’une rémunération correspondant au rôle social qui est le sien et suffisante pour garantir son indépendance économique. Munich, 1971 » Point n'est besoin de faire un dessin : les préconisations de la Charte paraissent pour le moins « décalées » dans l'univers médiatique actuel. Un exemple parmi d'autres du fait que nos médias trient les infos en fonction de leur rôle de directeurs de conscience, et non selon leur mission, qui est d'informer :

Silence gêné des médias français après la Manif pour tous en Italie (source OJIM) le 22 juin 2015 dans Médias

Alors qu’une simple apparition de Femen fait tourner les imprimeries à plein régime, la mobilisation de centaines de milliers de personnes à Rome pour la défense de la famille et contre la dénaturation du mariage samedi 20 juin a été très peu relayée par les médias dominants. « Une simple dépêche de l’Agence France-Presse, relayée automatiquement par la plupart des médias en ligne. Pas un article, pas un reportage », s’étonne le site catholique Aleteia . Si la Manif pour tous s’est bien félicitée pour cette mobilisation considérable, les médias français ont en effet brillé par leur silence, se contentant du « minimum syndical ». Les manifestants italiens s’étaient rassemblés pour s’opposer au projet de Matteo Renzi de légaliser les unions entre personnes de même sexe ouvrant un droit à l’adoption. « Bravo aux Italiens qui ont réussi une mobilisation historique que personne n’avait vu venir ! C’est un peu comme en 2012, en France, lors du lancement du mouvement social contre la loi Taubira », a déclaré Ludovine de La Rochère, présidente de la Manif pour Tous. Au moins, nos voisins seront-ils épargnés par l’éternel débat médiatique qui succède à chaque manifestation en France : en Italie, la police ne communique pas sur le nombre de manifestants. » Que l'on adhère ou que l'on n'adhère pas aux convictions des manifestants, ne sommes-nous

45 pas dans un cas avéré de censure ? Massivement appliquée par nos gens de presse sans que l'on soit certain qu'ils aient subi de quelconques pressions de la part de leur hiérarchie.

Enfin, pour le simple plaisir de relayer quelques inepties assénées par un « grand professionnel » de la presse, les propos de Stéphane Soumier, animateur de la matinale de BFM Business (source Medias, 17 mai 2016): « Stéphane Soumier est revenu sur son blog sur les déclarations de « son actionnaire », Alain Weill, patron de NextRadioTV (BFMTV, RMC, BFM Business…). Au micro de France Inter mercredi 11 mai, Alain Weill avait déclaré que « la presse dans son schéma traditionnel est amenée à disparaître ». Ainsi, l’alliance entre son groupe et celui de Patrick Drahi, SFR/Numéricable, ne pose aucun problème car celle-ci « est purement industrielle, elle est pure ». Pour défendre son patron, Soumier s’est alors lancé dans une démonstration plutôt capilo-tractée… « Quelle convergence peut-on trouver entre l’aéronautique et la presse? Voyons voir, distribuer le journal dans les avions? Quelle convergence peut-on trouver entre un grand groupe de luxe et de la presse? Là je cale, totalement. On est donc, au mieux, sur une forme de mécénat, au pire dans une recherche de contrôle et d’influence », explique-t-il. Concernant la convergence entre un opérateur de télécoms et un média, elle est, pour Soumier, « tout autre ». En effet : « J’achète les journaux pour fidéliser les abonnés. Voilà la logique « industrielle ». Qu’est-ce que ça veut dire ? C’est simple : j’achète leur liberté, leur indépendance, leur intransigeance, leur arrogance, comme une valeur que je vais revendre, et que je vais revendre à mes vrais clients, abonnés SFR. Pour ça j’accepte sans doute de perdre de l’argent. Parce que mon centre de profit c’est l’abonné, pas le journal », assure-t-il. Et de poursuivre son raisonnement : « Cette stratégie, si elle a un sens, signifie que toucher à la liberté, à l’indépendance, à l’intransigeance, à l’arrogance de la presse, et bien c’est perdre la valeur que je viens d’acheter. Si je propose à mes clients une presse sous contrôle, comment penser qu’ils y verront un avantage qui les poussera à rester abonné ? » CQFD… Ainsi, pour l’animateur de BFM Business, la concentration des médias entre les mains d’un panel de propriétaires de plus en plus réduit n’est pas un problème puisqu’il s’agit d’industriels (forcément) désintéressés ! Patrick Drahi, LVMH, Dassault se retrouvent donc, indirectement, hissés au rang de sauveurs de la presse n’ayant absolument aucune idéologie, aucun intérêt à défendre – pas même un soupçon de libéralisme sans-frontièriste… Les lunettes roses, ça vous change une vie. »

46 III-Les regards « alternatifs »

Pour développer l’argumentaire qui va suivre, il convient de structurer le discours et de mettre en lumière certaines et importantes informations et réalités tues ou minorées bien qu’essentielles à la compréhension plurielle du monde qui nous entoure. Cette méthode empirique éclairera l’ampleur des orientations informationnelles qui construisent les discours officiels que nous subissons au jour le jour et, éventuellement, de les relativiser fortement. Il s’agit pour ce faire de choisir un angle de vue, une perception différents, une vision de terrain, de s’appuyer sur des faits, et de faire prévaloir une réflexion rationnelle contre un discours global qui souvent le paraît fort peu. Pour s’extraire des tours d’ivoire qui sécrètent des discours univoques et des consensus trompeurs, s’appuyer donc sur un certain bon sens, qui avec ses défauts, n’est apparemment pas la chose la mieux partagée chez les journalistes, pour bien des raisons qui ont été évoquées et qui seront développées plus loin. Mais également, échapper à une possible dérive simplificatrice en faisant appel au travail de quelques personnalités et experts, fort peu médiatisés, et dont les analyses paraissent validées jour après jour par l’actualité économique sociale et géopolitique. La liste est indicative et ne vise pas à l’exhaustivité. La mise en exergue de ces « autres regards » dessine comme au pochoir la partialité des principaux médias évaluée à travers leur ligne éditoriale.

-Maurice Allais (prix Nobel d’économie en 1983)(source Wikipedia)

La France compte trois prix Nobel d’économie, dont Maurice Allais. Son travail est peu prisé des médias, car il était farouchement opposé à la doxa économique de l’heure. Décédé en 2010, Maurice Allais ne peut plus arpenter les studios de télévision ou de radio où par ailleurs il a été fort peu invité. Il apporte pourtant dans son œuvre un socle solide à la critique du monde tel qu’il tourne (mal) et tel qu’il est âprement défendu par les « grands médias ». Combien sont ceux qui connaissent son existence et ses prises de position ? M. Allais était notamment opposé à la mondialisation telle qu’elle s’est déployée (texte disponible sur internet) : « En tout cas, au regard de l’accroissement massif du chômage, de la très forte diminution des emplois dans l’industrie, et de la baisse considérable du taux d’accroissement du produit national brut réel par habitant à partir de 1974, il est tout à fait impossible de soutenir que la politique de libre échange mondialiste mise en œuvre par l’Organisation de Bruxelles a favorisé la croissance et développé l’emploi ». Ce Nobel d’économie, le prix lui a été décerné en 1983, combattait la disparition de toute protection du marché européen, le libre échange généralisé, la délocalisation des activités industrielles et des investissements financiers. L’état déplorable de l’Union européenne aujourd’hui devrait au moins conduire certains experts à s’intéresser (disons publiquement, pour ne fâcher personne) à ses travaux. Maurice Allais attribuait cette orientation libre-échangiste désastreuse aux multinationales américaines puis mondiales qui « détiennent partout en raison de leur considérable pouvoir financier et par personnes interposées la plus grande partie du pouvoir politique (…) Cette domination se traduit par un incessant matraquage de l’opinion par certains médias financés par de puissants lobbies plus ou moins occultes (souligné par l’auteur). Il est pratiquement interdit de mettre en question la libéralisation des échanges comme cause du chômage (…) On trouverait en vain un nombre significatif de « spécialistes » sur les plateaux de télévision ou dans la grande presse défendant, ou critiquant ces points de vue pourtant plus pertinents que jamais. Maurice Allais met également en cause l’OMC (organisation mondiale du commerce) : « (…) la

47 libéralisation totale des mouvements de biens, de services et de capitaux à l’échelle mondiale, objectif affirmé de l’OMC (…) doit être considérée à la fois comme irréalisable, comme nuisible et comme non souhaitable(…) L’ouverture mondialiste à tous vents des économies nationales ou des associations régionales est non seulement dépourvue de toute justification réelle, mais elle ne peut que les conduire à des difficultés majeures. Le véritable fondement du protectionnisme (souligné par l’auteur), sa justification essentielle et sa nécessité, c’est la protection nécessaire contre les désordres et les difficultés de toutes sortes engendrées par l’absence de régulation réelle à l’échelle mondiale ». Ou encore : « La mondialisation, on ne saurait trop le souligner, ne profite qu’aux multinationales, elles en tirent d’énormes profits (souligné par l’auteur)(…) Il est nécessaire de réviser sans délai les traités fondateurs de l’Union européenne tout particulièrement quant à l’instauration indispensable d’une préférence communautaire(…) Il faut de toute nécessité remettre en cause et repenser les principes des politiques mondialistes mises en œuvre par les institutions internationales, tout particulièrement par l’Organisation mondiale du commerce (…) Dans la situation d’aujourd’hui, la France s’autodétruit elle-même (…) si la politique généralisée de libre échange mondialiste de l’organisation de Bruxelles est poursuivie, elle ne pourra qu’échouer et nous mener au désastre. La crise d’aujourd’hui, c’est avant tout une crise de l’intelligence. Il est dérisoire de ne remédier qu’aux effets. C’est aux causes qu’il faut s’attaquer. (…) L’économie doit être au service de l’homme, et non l’homme au service de l’économie » (souligné par l’auteur)

L’OCDE a publié au début du mois de décembre 2014 (disponible sur le site internet OCDE) un rapport stipulant que l’austérité est un frein puissant à une quelconque reprise économique. Les experts de l’OCDE, qui ne sont pas d’affreux gauchistes, soulignent que réduire les inégalités de revenus, qui ne cessent de croître, pourrait être un moyen de renouer avec une croissance que nos gouvernants affectent de rechercher à travers des politiques restrictives mises en œuvre en Europe, comme si leurs actes ne contredisaient pas parfaitement leurs discours (on appelle cela le « courage politique », voire la « vertu républicaine », exemple parfaitement illustré par l'attitude déplorable de M. Valls, Premier ministre de la France en mars 2015, date où sont écrites ces lignes). Nos dirigeants n’étant pas plus sots que leurs concitoyens, dont beaucoup voient bien que le résultat tangible de tout cela est l’affaissement de l’état protecteur, l’affaiblissement des droits sociaux et la mise en cause des services publics, un chômage grandissant ainsi qu’une paupérisation croissante de la masse de nos concitoyens, on peut d’ores et déjà affirmer qu’ils nous mentent. Il suffit pour s'en convaincre d'écouter les « saillies » de M. Macron (soutenu par M. Valls dans sa lutte contre les droits sociaux ou le statut des fonctionnaires) et d'entendre M. Hollande le recadrer mollement, et de déplorer la loi El Khomri qui dynamite le droit du travail sous la conduite avisée d'un pouvoir que les médias appellent encore « de gauche », sans doute par inadvertance (Lire l'interview d'E. Todd en postface). On sent bien que la question de la redistribution des richesses et du niveau des revenus (par exemple) est sans doute bien plus qu’un souci anecdotique quand l’Union européenne sous direction allemande (lire l'article du site « L'Arène nue » en postface) se suicide à coup de plans d’austérité répétés. En outre, et nous y reviendrons plus loin, la signature du Traité transatlantique négocié en catimini entre une Europe qui n’existe pas sur le plan politique (et qui est espionnée au su et vu de tout le monde par la NSA) et un état, les Etats-Unis, puissamment dirigé, va aggraver considérablement la situation au détriment des pays européens, sans même parler du « statut d'économie de marché » qui pourrait être accordé à la Chine en 2016 (ou plus tard?) et accentuer la concurrence de sa main d’œuvre à faible coût contre les économies européenne et US. On peut certes penser, ou affecter de penser que M. Allais avait tort, mais on devrait

48 parallèlement, au vu de la gravité de la situation économique en Europe, débattre de ses opinions, et des problèmes qu’il a mis en exergue, et non les dissimuler ou les rejeter comme absurdes, ce qui en gros est fait jour après jour dans des journaux comme Le Monde, Libération, Le Figaro (à quelques bémols près, voir en postface les prises de position de Natacha Polony), Le Point (etc…) ainsi que sur la plupart des plateaux radio et télévisuels.

-André Orléan, économiste, directeur de recherche au CNRS (Source Médiapart, 15 mai 2015) Economiste, auteur de « A quoi servent les économistes si ils disent tous la même chose ? » (Note de l'auteur : peut-on se poser la même question à propos des journalistes?), Manifeste pour une économie pluraliste (éditions Les Liens qui Libèrent), André Orléan apostrophe Jean Tirole, prix Nobel d'économie : « Avoir le Nobel, ce n'est pas disposer de la vérité » « À quoi servent les économistes s’ils disent tous la même chose » ? C’est la question posée par le Manifeste pour une économie pluraliste publié cette semaine. André Orléan, directeur de recherche au CNRS, qui a dirigé l'ouvrage (...) André Orléan refuse la polémique avec le prix Nobel d’économie Jean Tirole, il précise même qu’il applaudit cette distinction, mais il réclame que cet éminent représentant de l’économie dite “néoclassique”, qui prône la dérégulation, soit le porte-parole d’un courant parmi d’autres, et pas de toute l'économie. Il réclame un pluralisme opposé à une forme de pensée unique. Un pluralisme qui vient d’être refusé à l’Université… « Historiquement l'économie a toujours été un lieu de débat, ce n’est pas une science exacte et donc les débats ont toujours existé, jusqu'aux années 90, explique André Orléan à Mediapart. La France apportait beaucoup, elle était une terre d'accueil de ce pluralisme et ça s'est arrêté parce que le corpus dominant, celui des néoclassiques, a été de plus en plus dominant. La théorie néoclassique a pris des positions de pouvoir et elle a perdu une espèce d'esprit critique. Les néoclassiques se présentent tout le temps comme les seuls défenseurs de la seule vraie science. Il n'y a plus aucun débat. » « Nous avons proposé qu'il y ait un espace dans les universités qui soit consacré à ces différentes formes d’approche économique. Les ministres, nous avions fini par les convaincre, et le 11 décembre leurs cabinets nous ont dit : “oui nous allons créer ces nouvelles sections”, et “ce sera bien”, et à ce moment-là il y a eu cette lettre de Jean Tirole à Geneviève Fioraso. Il s’opposait [à cette démarche] dans des termes très violents. Il disait qu’accepter, cela reviendrait à retourner à l'obscurantisme. Nous ne comprenons pas. Ce n'est pas une question gauche droite, c'est une question de pluralisme démocratique. Un gouvernement de gauche, normalement, devrait privilégier des courants qui ont des pensées alternatives sur les rapports sociaux. Il y a là une vraie question. Pourquoi un gouvernement, et en particulier un gouvernement de gauche, n’accepte pas cette réforme qui ne coûte rien et qui n'est pas révolutionnaire »… « Ce livre est un des derniers cris d'alarme avant, peut-être, une extinction totale, prévient André Orléan… On ne peut pas faire vivre la recherche de cette manière. Toutes ses forces vont absolument dans le même sens, or la seule vraie force est de dire "méfiez-vous ce n'est pas parce que vous êtes puissant que vous dites la vérité, ce n’est pas parce que vous avez le prix Nobel que vous dites forcément la vérité". La vérité, c'est l'esprit critique, et on ne peut pas faire un corps scientifique sans cet esprit critique et sans cette humilité. La crise financière a quand même montré au monde quels étaient les dangers d'une pensée unique qui ne s'autocritique pas. Or rien n'a changé ! Les capacités d'autorégulation de ce corps de néoclassiques sont nulles. » Tout comme dans la majorité des médias, un discours univoque s'impose donc en économie. Ceci pourrait évidemment rester une affaire de spécialistes et d'universitaires. Mais tel n'est pas le

49 cas. Après avoir imposé leur présence dans le cadre universitaire, les économistes « néoclassiques » interdisent à présent, avec la complicité de l'Etat, toute voix discordante dans l'approche des « sciences économiques » au sein de la sphère universitaire. L'économie se veut science exacte, et les tenants de ce dogme refusent toute opinion alternative, en France comme dans de nombreux autres pays. Le résultat tangible de cette prise de pouvoir par des économistes voués à la promotion du néolibéralisme (que certains nomment aussi « ultra libéralisme) triomphant est qu'à présent, l'apprentissage de l'économie se réduit peu à peu à la transmission de la doxa que nous serinent jour après jour les médias et les « experts » commis par leurs collègues dont certains émargent auprès des grands groupes industriels, commerciaux ou bancaires. A présent, même les professeurs du secondaire sont concernés par ce que l'on peut appeler un formatage. M. Orléan pointe le problème de l'Agrégation de Sciences économiques, dont le jury valorise les candidats conformes à ses présupposés néoclassiques. Nous sommes en l'occurrence en matière universitaire dans une situation similaire à celle que connaissent les « grands médias ». Toute pensée hétérodoxe est pourchassée, un seul discours doit prévaloir. On peut donc deviner que la crise des médias n'est qu'un aspect d'une crise autrement profonde qui touche au cœur de notre identité, de notre qualité de citoyen, et de la liberté de plus en plus formelle dont nous jouissons.

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-Pierre Legendre Avec M. Legendre, on a le sentiment d'accéder aux racines de l'actualité géopolitique. Juriste de formation, il a développé une réflexion passionnante sur la manière dont les cultures naissent et progressent. Il avance, après Freud, que les cultures se construisent comme se construit un individu, sur des causes objectives et, via le langage, sur des interprétations qui le sont moins. Il a eu des relations suivies avec Jacques Lacan, dont l'apport à la réflexion psychanalytique s'avère majeur. « ...le monde social, c'est d'abord une construction d'interprétations, fondamentalement une affaire langagière... Et ça porte à conséquence pour penser le politique ». Face à l'occidentalo- centrisme, il affirme encore : « On a fabriqué des théories surgelées, à consommer n'importe où sur la planète, qui donnent aux intellectuels occidentaux une espèce de rente de situation... ça sous- entend à l'adresse du reste du monde : ou bien vous suivez nos pensées, ou bien vous êtes des demeurés... ». Pierre Legendre soutient que le monde vit une « reféodalisation » : « ...il y a une privatisation rampante de fonctions traditionnellement étatiques... Du côté de la culture française, on peut dire que l'intelligentsia est coupée de la compréhension de la tradition qui porte les états occidentaux ». « Cette impérialité chrétienne (…) a été laïcisée et (…) donne la domination mentale de l'Occident. Au final ça produit la croyance au bon droit occidental de convertir la planète à son modèle institutionnel... Tout ce qui n'est pas « démocratique » (...) selon nos critères ne mérite pas attention et doit être démoli » (extraits de « Vues éparses, entretien radiophonique avec Philippe Petit, éditions Mille et une nuits). Dans « Dominium mundi », à la fois film et livre (Mille et une nuits), Pierre Legendre donne comme un concentré de sa pensée si vaste et si riche : « La techno-science-économie (…) promeut la gestion. (...) La science globalisée capte la force religieuse, avant tout celle de l'Occident, la force stratégique du christianisme occidental (…) Le management est le savoir du pouvoir sans nom qui déferle sur la planète. (…) Le management est devenu (…) propagande (…) porteuse du marché sans frontières et de la liberté sans limites. Le management est au service du business (…) Il se plie à tous les projets, à toutes les modes. Il vend (…) sa boîte à outil du pouvoir efficace- scientifiquement efficace (…) L'ordre rationaliste à l'occidentale (…) promeut un univers de déracinés. Il (…) parie sur l'idéal standard d'un travail nomade, précaire, dans un monde industriel

50 apatride. (…) ». Pour lui, ce qu'il est convenu d'appeler Globalisation/ Mondialisation se confond pour beaucoup avec l'étape ultime de l'occidentalisation du monde (« Ce que l'Occident ne voit pas de l'Occident », conférence au Japon, Mille et Une Nuits). L’œuvre de Pierre Legendre est un outil irremplaçable pour pointer les excès dont on l'a dit les médias sont un symptôme parmi d'autres. Sait-on par exemple que les technocrates du Ministère de l’Éducation Nationale nomment les établissements scolaires « entreprises apprenantes », et que le système éducatif est victime d'un formatage managérial (je développe ce thème dans mon ouvrage « Éducation Nationale : le naufrage tranquille » Edilivre 2014) ? Le « prêt à penser » qui plombe le débat public et politique trouve chez Pierre Legendre un mode d'explication pertinent, car il montre quelles sont les racines de dérives dangereuses nées aux Etats Unis, le pôle impérial et militaire de l'Occident.

-Les « économistes atterrés », une nébuleuse maintenue dans ses nuées Parfois invités ça et là, certains membres des économistes atterrés, peu médiatisés, portent pourtant une parole importante, qui n’est pas univoque. Certains sont pour le maintien de l’Euro, d’autres contre, tous pointent les dysfonctionnement du système économique actuel. Parmi eux, des noms plus ou moins reconnus, mais des regards pertinents. Entre autres, Frédéric Lordon, André Orléan (lire plus haut), Henri Sterdyniak, que l’on entend peu. En dehors de ses ouvrages, M. Lordon dispose d’un blog sur le site du Le Monde Diplomatique. Ils affirment notamment : « La crise économique et financière qui a ébranlé le monde en 2008 n’a pas affaibli la domination des schémas de pensée qui orientent les politiques économiques depuis trente ans. Le pouvoir de la finance n’est pas remis en cause.(…) La fiscalité sur les hauts revenus et sur les entreprises a été systématiquement réduite depuis une trentaine d’années. Ainsi, les riches ont pu acquérir les titres de la dette publiques émise pour financer les déficits publics provoqués par la réduction des impôts (…) Et il faudrait maintenant payer aux riches les intérêts de la dette… » On voit bien à l’œuvre une « politique de classe » dont nos médias se font « peu » l’écho. Faut-il taire l’injustice criante des politiques mises en œuvre depuis au moins 1983, et poursuivies jusqu’à aujourd’hui via la droite ou « la gauche de gouvernement » ? Que penser de nos organes d’information qui dans leur écrasante majorité confortent l’immense transfert de richesse de la poche des citoyens vers celle des détenteurs de patrimoine, sans au moins faire semblant de poser le problème ou de dénoncer ce scandale ? Nous sommes face à une complicité objective d’une majorité des journalistes et des journaux les plus en vue avec ces choix politiques fondamentaux imposés aussi bien en France que chez nos « partenaires » européens, envers et contre tout.

-Jacques Sapir (source Wikipedia) Jacques Sapir est un spécialiste de l’histoire économique et de l’économie de l’URSS, sur laquelle il a écrit deux thèses, et de l’économie de la Russie en transition. Ses recherches ont contribué à la mise en cause du concept d’ « homo economicus ». Il se démarque de l’individualisme méthodologique et s’appuie entre autres œuvres sur celle de Marx. Auteur d’un ouvrage défendant la nécessité de la « démondialisation » et la sortie de l’Euro, M. Sapir passe régulièrement sur BFM business, et a fait une apparition remarquée sur France Culture (Ses deux derniers ouvrages sont : « Souveraineté, laïcité, démocratie » Michalon, et « L'Euro contre la France, l'Euro contre l'Europe, Le poing sur la table, le Cerf).

51 Il anime un blog très suivi « Russeurope », http://russeurope.hypotheses.org, mais fait « rarement » le 20h de TF1 ou de France 2 ( !). Il est sans doute tenu en suspicion par les journalistes « qui pensent bien » (expression empruntée à Stendhal, « Lucien Leuwen »), la russophobie faisant aujourd’hui pour nombre de commentateurs office de colonne vertébrale idéologique. Il a même fait l’objet d’un traitement tendancieux de la part du journal Libération, ce dont il s’est plaint sur son blog sans être démenti. Chacun peut trouver les détails de tout cela sur le Net. A noter l'excellence de ses intervention théoriques à propos de la souveraineté, de l'Euro etc... On peut notamment lire sur son blog un papier en date du 25 septembre 2015 (« Tyrannies et dictature ») : (…) Ainsi, l’Union européenne n’a pas été conçue, peu ou prou, pour protéger les peuples contre les influences de la mondialisation. Le prétendre est un mensonge éhonté. Elle a été, en réalité, à l’avant garde du mouvement qui a défait les Etats au profit des grandes firmes multinationales. Elle n’est en vérité que l’héritière du projet américain conçu dans la guerre froide. Elle se construit sur ce que Stathis Kouvelakis en se référant à un ouvrage relativement récent de Perry Anderson, décrit comme ainsi : « …une mise à distance de toute forme de contrôle démocratique et de responsabilité devant les peuples est un principe constitutif du réseau complexe d’agences technocratiques et autres collèges d’experts qui forme la colonne vertébrale des institutions de l’UE. Ce qu’on a appelé par euphémisme le « déficit de démocratie » est en fait un déni de démocratie ». L’Union européenne est une des formes de cette tyrannie qui nous menace (...).

-Karl Polanyi Nous reprends des éléments de la présentation de son ouvrage majeur « La grande transformation » (paru en 1944) dans l’édition Gallimard de 1995. « Professeur à Columbia, (…), Karl Polanyi est un représentant caractéristique du milieu d’Europe centrale qui a produit Max Weber, Schumpeter, Wittgenstein, Popper, Carnap. Il appartient à cette génération d’intellectuels européens qui se sont sentis acculés à répondre au défi que le phénomène national-socialiste lançait à leurs valeurs et à s’expliquer la maladie de leur temps. La « Grande transformation », c’est ce qui est arrivé au monde à travers la grande crise économique et politique des années 1930-1945, c'est-à-dire (…) la mort du libéralisme économique. Ce libéralisme, apparu un siècle plus tôt était une puissante innovation (…) le marché, autorégulateur, jusque là élément secondaire de la vie économique, s’est rendu indépendant des autres fonctions. (…) Pour la première fois, on se représentait une sorte particulière de phénomènes sociaux, les phénomènes économiques, comme séparés et constituant à eux seuls un système distinct auquel tout le reste du social devait être soumis. On avait désocialisé l’économie, et ce que la Grande crise des années trente imposa au monde, c’est une re-socialisation de l’économie. Ce précurseur d’origine hongroise a donc pointé très tôt la constitution de l’univers économique en force autonome déconnectée des contraintes politiques : « La source de l’originalité de Polanyi est d’avoir regardé la société moderne ou l’économie dite libérale à la lumière des sociétés non modernes et en contraste avec elles. C’est ce qui fait que ses analyses (…) ont pu survivre et nourrir aujourd’hui la réflexion de tous ceux qui, anthropologues, économistes et historiens, s’interrogent sur la spécificité de notre société moderne. On sent bien que la « re-socialisation » de l'économie est pour l'heure derrière nous, ce qui bien entendu peut laisser craindre le pire. Comme le dit (en gros) Jean-Claude Michéa, philosophe « sulfureux » pour les tenants de la doxa (Lire par exemple son ouvrage « Le complexe d'Orphée », Climat, 2011), les limites du libéralisme sont atteintes quand les individus, dépourvus de la « commun decency » dont parle Orwell, contreviennent à la théorie libérale et se laisse entraîner par

52 le goût du lucre au mépris de toutes les règles humaines ou institutionnelles, sciant par là la branche sur laquelle ils sont (confortablement) assis. En la matière, prétendre faire confiance à la sagesse des hommes face à l'appât du gain est évidemment une sottise, ou la preuve d'une naïveté désarmante.

-François Asselineau La spécificité de François Asselineau est d’allier un travail politique et d’explication de première importance à une carrière d’Inspecteur des finances. Il a créé un mouvement politique, l’UPR, en 2007, qui tente de s’imposer dans l’arène médiatique et électorale non sans mal bien entendu. On peut affirmer qu'il est « blacklisté » par les grands médias, ce qui freine évidemment la progression de l'UPR. Son cheval de bataille : la sortie de l’Euro et de l’Union européenne, le retour à la souveraineté nationale et à la maîtrise du destin du pays par ses citoyens, via la maîtrise de la monnaie (le franc) et des décisions budgétaires, tout comme la sortie de l’OTAN, considérée par l’UPR comme un instrument majeur de la domination US sur ses alliés. On peut ne pas adhérer à ses dires, sauf qu'il les appuie sur des faits difficilement contestables. Avant-dernière preuve en date de la stratégie impériale des Etats-Unis dénoncée par M. Asselineau, la conférence donnée par Georges Friedman, géopoliticien américain pour Stratford (organisme privé de renseignement très proche de la CIA), dans le cadre du « Chicago Council on Global affairs » en février 2015. Il y est clairement dit que les Etats Unis ne peuvent espérer conserver leur leadership mondial qu'en empêchant la Russie et l'Allemagne de se rapprocher (preuve par l'actualité). Pour les sceptiques, on trouve la vidéo sous-titrée sur le site de l'UPR, dont le discours est ainsi parfaitement légitimé, et ailleurs sur le Net. A ma connaissance, aucun média « mainstream » ne s'est fait l'écho de cette conférence. Notre suzerain mondial est si sûr de son fait qu'il ne cache même plus le cœur de sa stratégie, dont on mesure les conséquences catastrophiques en Ukraine (et ailleurs). L'actualité Net nous apporte de fait en mai 2015 une nouvelle indication de ce qu'est vraiment l'influence US dans l'UE. Reportons-nous donc au Net pour enfoncer le clou grâce au site « Une semaine en Europe » d'Eric Verhaeghe. Les faits ci-dessous dénoncés sont corroborés (pour une fois) par nombre de médias mainstream, mais peu en tirent des conséquences légitimes quand au statut de l'UE, et dans l'UE, à celui de l'Allemagne.

« L’Allemagne, cet hyper-porte-avion américain »

« La révélation, cette semaine (début mai 2015), des pratiques d’espionnage de l’Allemagne au profit de la NSA a levé un nouveau voile sur la véritable nature de la politique prussienne en Europe: celle d’une soumission aux Etats-Unis et d’une mise en coupe réglée de l’Union Européenne ; (…) Les faits sont limpides: le renseignement allemand a espionné des milliers de responsables français et des entreprises susceptibles de concurrencer les Etats-Unis. Au premier rang de celles- ci, on trouve Airbus, qui est pourtant un consortium franco-allemand. De façon totalement lamentable, l’Allemagne n’a pas hésité à jouer contre son camp en communiquant aux Américains (et à Boeing) les secrets industriels du fabricant européen. Airbus a d’ailleurs annoncé le dépôt d’une plainte. » L'Autriche elle-même demande des comptes à l'Allemagne, qui visiblement ne joue pas pour son camp (officiel!), mais pour celui du grand patron dont elle est en Europe le puissant second. La France se tait, alors que cet espionnage a largement touché les hautes sphères politiques françaises,

53 tout comme sans doute celles des autres pays de l'Union. « Les services allemands se sont dépêchés d’effacer le maximum de traces de ces écoutes menées à partir d’une station bavaroise. Il est néanmoins invraisemblable que l’espionnage allemande n’ait pas obtenu une autorisation officielle au plus haut niveau pour transmettre aux alliés américains des informations aussi sensibles. Ceux qui défendaient becs et ongles les bienfaits du couple franco-allemand en seront pour leur grade: l’Allemagne a des amis encore plus puissants et encore plus chéris que la France…(...) » Au moment des négociations du malheureux « traité transatlantique », les Etats Unis doivent savoir à l'avance ce que pensent et ce que veulent leurs partenaires (veulent-ils vraiment quelque chose qui diffère de ce que désirent les Etats Unis?). Ceci dit, si la proximité de l'Allemagne avec les Etats Unis est telle qu'on le suppose, on peut se demander à quoi sert précisément ce travail de renseignement auprès de vassaux dévoués, dont la France est devenue un exemple. L'avenir le dira sans doute. L'UE n'existe donc pas sur le plan politique et stratégique, et son principal membre en terme de puissance économique est en l'occurrence un pion américain (sous réserve d'une protestation ad hoc du gouvernement allemand), pas moins impliqué dans la stratégie mondiale des Etats Unis qu'Israël ou le Canada. On peut également prendre connaissance sur le net d'un ouvrage écrit suite à de longues interviews d'Helmut Kohl, qui désirait publier ses mémoires avant de se raviser, accusant au passage Mme Merkel elle-même d'être un agent américain (sans réactions de cette dernière malgré un battage internet), ce qui collerait assez bien avec les pratiques des services secrets allemands, annexe de la CIA, à l'encontre de leurs alliés européens. Tout cela est disponible sur Internet.

Pour rester dans le même ordre d'idées, en 2003, le magasine Historia a publié un article dévoilant les fondements réels de la construction européenne, ce dont M. Asselineau se fait régulièrement l'écho sur son site UPR ( https://www. upr .fr/) . Le journaliste Rémi Kaufer s’est appuyé sur des documents déclassifiés du gouvernement américain montrant que la communauté du renseignement des États-Unis a mené une campagne dans les années 1950 et 1960 pour favoriser l’unification de l’Europe.

« Celle-ci finança et dirigea le Mouvement fédéraliste européen. Les documents confirment des soupçons émis à l’époque : en coulisse, l’Amérique travaillait avec acharnement à pousser la Grande- Bretagne à s’intégrer à un État européen. Un mémorandum, daté du 26 juillet 1950, donne des instructions pour une campagne visant à promouvoir un véritable parlement européen. Il est signé par le Général William J. Donovan, chef du Bureau américain des services stratégiques en temps de guerre (OSS), l’ancêtre de la CIA. Certains de ces documents, découverts par Joshua Paul, chercheur à l’Université de Georgetown à Washington, avaient été mis à disposition par les Archives nationales américaines. Le principal levier de Washington sur l’ordre du jour européen était le Comité Américain pour une Europe Unie (ACUE : American Committee on United Europe), créé en 1948. Donovan, qui se présentait alors comme un avocat en droit privé, en était le président. Le vice-président, Allen Dulles, était le directeur de la CIA pendant les années 1950. Le comité comptait parmi ses membres Walter Bedell Smith, le premier directeur de la CIA, ainsi que d’anciennes personnalités et des responsables de l’OSS qui travaillaient par intermittence pour la CIA. Les documents montrent que l’ACUE a financé le Mouvement européen, l’organisation fédéraliste la plus importante d’après-guerre.

54 En 1958, par exemple, l’ACUE a assuré 53,5 % du financement du mouvement. L’European Youth Campaign, une branche du Mouvement européen, était entièrement financée et contrôlée par Washington.(…).

Les dirigeants du Mouvement européen – Retinger, (…) Robert Schuman et l’ancien premier ministre belge, Paul-Henri Spaak – étaient tous traités comme des employés par leurs parrains américains. Le rôle des États-Unis fut tenu secret. L’argent de l’ACUE provenait des fondations Ford et Rockefeller, ainsi que de milieux d’affaires ayant des liens étroits avec le gouvernement américain. Paul Hoffman, directeur de la Fondation Ford et ex-officier de l’OSS, fut également à la tête de l’ACUE à la fin des années 1950. Le Département d’État y jouait aussi un rôle. Une note émanant de la Direction Europe, datée du 11 juin 1965, conseille au vice-président de la Communauté Économique Européenne, Robert Marjolin, de poursuivre de façon subreptice l’objectif d’une union monétaire. Elle recommande d’empêcher tout débat jusqu’au moment où « l’adoption de telles propositions serait devenue pratiquement inévitable ». (Traduit de l’anglais par Laurent Dauré. Les phrases soulignées sont le fait de l’auteur)

On trouve aussi sur son blog, sous la plume de Nicolas Klein : « Une fausse opposition à l’égard de l’Union européenne

L’une des plus grandes forces des systèmes formellement démocratiques mais en réalité dictatoriaux est de créer, pour se maintenir, des oppositions « à la marge ». En d’autres termes, il s’agit de se constituer un groupe d’adversaires prétendument acharnés, d’ennemis de la liberté et du bien contre lesquels il convient de combattre sans relâche pour la survie d’un projet idéal et de « valeurs communes ». L’Union européenne répond tout à fait à cette définition et elle sait mieux qu’aucune autre organisation (sauf, peut­être, que l’OTAN) promouvoir des opposants « mortels » qui, tout en reprenant quelques idées salutaires, contribuent à discréditer toute opposition réelle à la « construction européenne ». Leurs méthodes habituelles ? »

On ne peut pas affirmer que ces faits et analyses aient largement nourri notre bonne vieille presse, si friande pourtant de scoops. D'autres voix s'élèvent pour tenir des discours allant dans le même sens, ce dont M. Asselineau se fait l'écho :

« Nous y arrivons tout doucement. Les langues se délient et certaines personnalités osent (enfin) parler de certains sujets tabous. Au cours de l'émission de M. Taddeï, « Ce soir (ou jamsais!) », supprimée à la rentrée 2016, Marie- F rance , Garaud a déballé ce que beaucoup de monde savait mais que les officiels préféraient taire au profit d’une geste européenne à l’eau de rose. Elle a révélé devant des millions de spectateurs une arnaque qui a endormi les européens et le monde pendant des décennies. « Jean Monnet était un agent américain payé pour détruire les états européens », a t-elle dit. Venant d’une personnalité aussi sérieuse que Marie-France Garaud, on peut penser que les traqueurs de « complots » en seront pour leurs frais. On peut aussi espérer qu’une petite lumière va enfin s’allumer dans certains esprits pour permettre la compréhension de quelques événements d’aujourd’hui. D’autant plus que les analogies avec le temps présent ne manquent pas. « Par exemple, on sait

55 maintenant que les Etats-Unis ne libèrent jamais un pays. Ils l’occupent (quand ils peuvent), le remodèlent à leur goût et y mettent un dirigeant à leur solde ». (François Asselineau) Les Etats-Unis ont officiellement appuyé l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne, ils imposent aujourd’hui la signature du traité de libre échange dit « traité transatlantique » et paraissent toujours jouir de forts soutiens, sinon de complicités au plus hauts niveaux politiques et donc médiatiques des pays de l’Union. Il faut encore savoir qu’après la Seconde guerre mondiale, les Etats-Unis ont lancé l’opération « Mockingbird » financée par la CIA pour influer sur les médias américains et sur ceux de leurs alliés. On doit se demander si cette opération n'a pas réussie au-delà de toute espérance en se déployant en Europe, et notamment en France. (Lire Wikipedia sur le sujet) -Atlantisme suite : quand la presse écrite fait son travail (…)

En la matière il suffit de lire les journaux quand cela se trouve (autant le souligner quand on peut le dire!). Trouvé évidemment sur Internet.(Le Figaro). La « loi renseignement » a en effet fait l'objet d'un article au vitriol dans « Le Figaro ». Nous le citons parce que l'information est doublement intéressante. Sans faire de procès d'intention au Figaro, on peut supposer que cette loi déplorable, concoctée par un gouvernement socialiste, est une bonne occasion pour la « droite de gouvernement » de botter les fesses de son adversaire de gouvernement, qui, selon certains dires, serait « de gauche ». Mais on a également le droit de voir dans la précipitation qui a prévalu lors de l'adoption de la « loi renseignement » une volonté de s'aligner sur la Patriot act concocté par l'administration Bush après les attentats du 11 septembre 2001. Si un et un font deux, on peut craindre qu'entre les prétendues négociations sur le traité transatlantique et cette soudaine volonté de l'Etat de fliquer l'ensemble de la population française sans contrôle judiciaire à priori, on soit face à une grande manœuvre visant à rapprocher autant que possible la France des standards US pour un vaste projet d'uniformisation économique, politique, et dans la foulée, via l'OTAN, stratégique, ce qui par ailleurs est déjà le cas. Le discours de M. Asselineau trouve encore en la matière au moins une apparence de réalité. Voici donc l'opinion du bâtonnier des avocats de Paris, Pierre-Olivier Sur (propos recueillis par Yves Thréard, journaliste au Figaro)

-« Loi Renseignement : un "mensonge d'État"- -Les mots sont forts, à la veille du vote solennel du projet de loi Renseignement à l'Assemblée Nationale. Alors que le ministère de l'Intérieur fait tout son possible pour tenter de rassurer sur le contenu du texte, quitte à tordre le coup à la vérité et à faire dire à la jurisprudence le contraire de ce qu'elle di t, le bâtonnier de Paris Pierre-Olivier Sur a porté un coup très dur ce lundi dans Le Figaro. "Ce projet de loi est un mensonge d'État", dénonce le représentant des avocats de Paris, pas du tout séduit par la communications gouvernement et élyséenne. "Le président de la République l'a présenté lui-même récemment à la télévision comme un texte essentiel pour lutter contre le terrorisme, alors qu'il va s'appliquer bien au-delà, à beaucoup d'autres domaines. Ce projet menace gravement les libertés publiques", dénonce-t-il. Pour Me Sur, "ce texte est un fourre-tout où domine l'arbitraire". Entre autres reproches : "Jusqu'à présent, dans le cadre d'une enquête, on ciblait, on isolait la cible suspecte avant de la placer sous contrôle. A l'avenir, on écoutera d'abord tout le monde, sur parfois de vastes zones géographiques.

56 On va inverser la méthode. La nouvelle logique sera celle de l'entonnoir. C'est dangereux". L'avocat en appelle au Conseil constitutionnel, dont on sait qu'il sera saisi à la fois par le président François Hollande et par des députés, et "ne pense pas que les Sages laisseront passer cette illégalité", en parlant de l'exclusion de l'autorité judiciaire dans le mécanisme d'autorisation des mises sur surveillance. "Au nom des libertés publiques, ils devraient la censurer » A l'heure où ces lignes sont écrites, la « loi renseignement » paraît se porter à merveille. La preuve ? Nul n'en parle plus. Gageons que les adversaires « raisonnables » de M. Hollande en 2017 omettront d'en faire un argument à charge.

57 IV- Promenade dans le monde de la « bienpensance »

Cet ouvrage n’étant pas une thèse universitaire, mais, on l'a dit, un essai, l’auteur a choisi quelques thèmes phares pour tenter de souligner combien la revendication d’un parti pris passe pour nombre de médias avant le travail journalistique lui-même, ce qui délégitime complètement la production de nombre d’organes de presse peuplés d’individus titulaires de la carte professionnelle et donc, en principe et par principe, attachés à la déontologie de leur profession (cela vaut la peine de se répéter). Prioritairement, voici des exemples précis et irrécusables des dérives à l’œuvre.

Politique étrangère

-2001 : après le 11 septembre, M. Bush pointe du doigt l’Afghanistan des Talibans et déclenche une guerre d’occupation contre ceux que les Etats-Unis armaient et finançaient quand il s’agissait d’affronter l’occupation soviétique. S’en suit un long conflit « contre le terrorisme » toujours en cours, et en échec, ainsi que la ruine d’un pays que, déjà, l’occupation soviétique n’avait pas arrangé. La mort de Ben Laden devait conclure une course poursuite meurtrière et ruineuse. Mais les GI’s sont toujours sur le terrain, même en nombre réduit. Les assassinats ciblés au Pakistan et en Afghanistan se poursuivent et nul ne peut prévoir la fin de ce gâchis et de cette guerre sans fin.

-2003 : les Etats-Unis se lancent dans une nouvelle guerre contre l’Irak à partir de l’affirmation d’un mensonge éhonté, à savoir que ce pays dispose d’armes de destruction massive. L’engagement médiatique en France est fort derrière cette expédition, que seul le courage de M. Chirac évite de transformer en une expédition également française. Dans ces moments peu glorieux brillent quelques « grandes âmes » atlantistes : BHL, Pascal Bruckner par exemple appuient cette aventure sans perspective. Les réseaux atlantistes en France ne se cachent pas. Dès l’accession de M. Sarkozy à l’Élysée en 2007, la France réintègre le commandement intégré de l’OTAN, et la politique étrangère des Etats-Unis devient celle de la France. Que penser de M. Sarkozy ? Qu’est alors devenue la France ? S’agit-il de son peuple, de sa société prise dans sa diversité et son hétérogénéité, de la « Patrie des Droits de l’Homme », de la fille de la Révolution, ou encore de la République démocratique, laïque et indivisible ? Certes non. Cette France là est celle des grands ensembles économiques privés qui se sont constitués suite aux massives privatisations des années 80 et suivantes, et à la naissance d’une puissante nomenklatura d’origine française, qui très vite s’inscrit dans l’univers néolibéral promu par les Etats-Unis, avec un peu plus tard, après Maastricht, l’inscription avérée de l’Union européenne dans le grand jeu planétaire atlantiste. Si les alliés des Etats-Unis ont eu le droit de (faire semblant de) croire les balivernes de l’administration Bush, M. Bush et ses proches conseillers sont responsables de centaines de milliers de mort et de la destruction matérielle d’un pays qui va en mourir. Où sont les condamnations de cette administration ? Qui réclame haut et fort la traduction de MM. Bush et Powell (etc...) devant un tribunal international ? Comment admettre qu'un jeune Bush, fugace candidat républicain à la Maison Blanche pour succéder à M. Obama, puisse évoquer cette guerre non seulement sans la condamner, mais en la jugeant fondée ? On peut craindre en la matière que l'essentiel est de n'avoir publiquement jamais tort.

-2011 : après avoir fait « ami ami » avec M. Kadhafi,la France de M. Sarkozy, avec l’aide des

58 Anglais et grâce au soutien US (Les Etats-Unis étaient-ils les vrais commanditaires de l’opération ?) s’en prend à un affreux dictateur qui avait été peu avant reçu avec tous les honneurs à l’Élysée, plantant sa tente de Bédouin sur une pelouse parisienne. L’unanimité médiatique est presque totale. M. Juppé, alors ministre des affaires étrangères, énonce avec aplomb que « 40 ans de dictature, cela suffit ». Au nom de qui parle-t-il ? De la « déesse droits de l’homme » ? De l’intérêt national, voire européen ? A chacun d’en juger. En quoi le régime de M. Kadhafi était-il à ce point haïssable qu’il fallait le renverser au profit de l’anarchie actuelle et des dangers régionaux qu’elle fait courir aux voisins de la Lybie et à l'Europe du fait des tragiques tentatives d'émigration des populations chassées par la guerre et l'absence d'avenir ainsi que par la diffusion du danger terroriste islamiste ? Le flux actuel des réfugiés, drame inouï lié aux aventures guerrières occidentales au Moyent-Orient et en Lybie, est la conséquence abrupte et bien visible de l'inconséquence des dirigeants occidentaux. Le chaos règne en maître dans ces partie de notre « proche étranger ». Appuyés par les Etats-Unis, sans lesquels ils n’auraient pas pu assumer la lourde charge du conflit lybien, les belligérants de première ligne ont outrepassé le mandat de l’ONU et renversé le régime Kadhafi, nul n’ayant de toute évidence sérieusement songé à la suite des événements. Conséquence, un nouveau pays en miettes, le vide politique, la guerre civile, la déstabilisation du Mali et de l'Afrique sub-saharienne, et la présence des « extrémistes » musulmans face à l'Europe, qui ont trouvé en Lybie et au sud du pays un terrain de jeu à leur mesure. Plus, on l'a souligné, une masse croissante de réfugiés tentant de gagner l'Europe au péril de leur vie. Ce qui n’empêche pas les médias, sans s'attarder sur les causes de ce désastre, d’entonner la louange de l’intervention militaire française au Mali, (après avoir célébré les exploits de notre aviation contre les « kadhafistes ») qui subit de plein fouet la disparition de la Lybie en tant qu’état constitué et organisé. BHL insiste et signe, affirmant que l'opération anti-Kadhafi, était nécessaire, et qu'il ne regrette pas de l'avoir fortement soutenue. (Serait-ce la une indication pertinente qu'elle a été décidée par Washington?) Qui parle « réellement » de ce gâchis, coûteux en terme de dépenses militaires pour les finances publiques que l'on dit exsangues, qui ne cesse de gagner en Centre Afrique et ailleurs ? Qui pose de bonnes questions quant aux buts de guerre poursuivis par les agresseurs que sont les trois pays occidentaux ? On peut se gargariser de la réussite démocratique en Tunisie (Les Matins de France Culture, 1er mai 2015), mais on devrait aussi s'interroger sur ses chances de survie du fait de la prolifération islamiste à sa frontière orientale. Les attentats contre les touristes étrangers en Tunisie par exemple fin juin 2015 (et au-delà) renforcent cette crainte. La liste des conflits s’allonge, les objectifs stratégiques s’estompent : « contenir le terrorisme » est-il un projet de longue haleine et une promesse de résolution du problème ? Jusqu'à quand va-t-on guerroyer ? Que faire des centaines de milliers de migrants qui prennent la route pour venir dans l'UE ? Les Etats Unis poussent à présent les feux contre la Russie, qui, sur le plan militaire, n'est pas spécialement sous-développée. Le risque pris par notre « grand allié » sur le dos de l'Europe n'impressionne apparemment pas grand monde dans les allées du pouvoir et dans les rédactions. On assiste donc à une aggravation de la stratégie occidentale qui défie la seule puissance au monde capable de détruire les Etats Unis. Qui la dénonce, où sont nos grands journalistes, nos hommes politiques en charge de l'intérêt national ? Mystère, que même internet ne permet pas de percer aisément. Quelques déclarations (MM. Fillon, Giscard d'Estaing et d'autres encore) montrent qu'au moins en paroles, une partie de nos « décideurs » voient le danger de cette politique de la tension aux confins de l'UE. Mais ils ne

59 sont apparemment pas majoritaires dans leur propre camp. Quant aux socialistes dits de gouvernement, camp « majoritaire », c'est sur le sujet au mieux le silence des cimetières, et au pire un alignement complet sur Berlin et Washington. On conduit ainsi nos sociétés sur la voie d'un cataclysme de plus en plus prévisible en les tenant dans l'ignorance du fait qu'on joue avec la vie ce chacun d'entre nous. Existe-t-il pire trahison du devoir d'informer (lire un article sur le danger nucléaire en postface)?

Le « pôle ukrainien »

2012 :

-Omissions

Après avoir connu la révolution orange, l’Ukraine soudain se réveille « affamée d’Europe » nous raconte-t-on. Le dossier ukrainien, largement traité sur le net et dans d’innombrables interventions contradictoires pose pourtant des questions premières à notre grande presse. Quid des tireurs de la place Maïdan qui sont à l’origine du coup d’état qui a renversé M. Ianoukovitch ? Des propos contradictoires ont circulé, mais la vulgate médiatique a désigné la police de l’ancien pouvoir sans preuves réelles. Une conversation téléphonique entre Mme Ashton (alors représentante de l'UE) et un officiel ukrainien a pourtant souligné des faits troublants, qui pourraient prouver un complot extérieur aux manifestants et au pouvoir en place pour provoquer un coup d’état qui a bien eu lieu. Quand le nouveau pouvoir ukrainien se met à bombarder sa propre population, les « séparatistes de l’Est », qui crie à l’atteinte aux droits de l’homme ? Il paraît en outre normal à nos « grands européens » que des émissaires US viennent se mêler de l'affaire ukrainienne, aux portes de la Russie, et de l'UE. On sait aujourd'hui (lire plus haut) que Mme Nuland, membre éminent de l'exécutif US, s'est personnellement occupée de la constitution du dernier gouvernement ukrainien, peuplé de créatures très liées aux Etats Unis, sinon américaines (et dans ce cas naturalisées ukrainiennes dans l'urgence on l'a précisé plus haut). Ces omissions (parmi d'autres) prouvent simplement une fois encore que l'UE n'existe pas sur le plan diplomatique, et que le « rêve européen » que l'on nous a vendu était un leurre. Lorsque la Russie préserve ses intérêts en mer noire en récupérant la Crimée qui était russe depuis le 18e siècle (en dehors de la parenthèse 1954 quand, dans le cadre de l'URSS, Khrouchtchev l'a rattachée à l'Ukraine), y compris en proposant le retour à la Russie par voie de référendum, pourquoi, plutôt que d'accabler M. Poutine de tous les défauts et de tous les noms, ne pas expliciter les enjeux, afin de laisser chacun libre de son jugement ? Imaginons une base russe au Mexique, et ce que seraient les réactions US (et occidentales) ! On fait enfin état de la présence aux frontières russes de soldats US et anglais, et de mercenaires payés par des entreprises privées américaines qui ont sévi en Irak. Que fait donc l'OTAN aux frontières de la Russie, quelle est la réalité palpable de la « menace russe » sur le vieux continent, quand on sait ce pays encerclé par des bases US ?

60 Que valent les états de l'UE, dont la France, qui se laissent traiter comme des vassaux sans tenir aucun compte de leur intérêt national, même quand preuve est apportée que le « grand allié » espionne ses supposés alliés et les implique dans ses stratégies nationales propres ? Comment enfin accepter que l'Allemagne, notre autre « grand allié » espionne elle aussi la France pour le compte des Etats Unis ? Tout n'est-il pas dit ?

-Panurgisme

Un avion de la Malaysia Airlines est abattu au dessus du territoire ukrainien et s’écrase dans la partie sous contrôle des séparatistes : M. Obama n’attend pas les résultats d’une éventuelle enquête et accuse les séparatistes et leurs complices, les Russes bien entendu. On peut supposer qu’il a des preuves. On pourrait espérer que la presse exige ces preuves. Non, les coupables sont désignés unanimement, point. On attend toujours ces preuves de l’implication des séparatistes et des Russes dans cette tragédie qui a servi de prétexte à la prise des premières sanctions contre la Russie, décision illégale car niant le droit international et le rôle de l'ONU. Moralité : quand les Etats-Unis décident, il n'y a plus de droit international, mais le droit US (lire l'article de Noam Chomsky en postface). Défendu avec vigueur par notre grande presse. Il en est de même pour le meurtre de M. Nemtsov (qui s'en souvient encore?), dont nul ne connaît les commanditaires. Ce qui n'a pas empêché nos « grands médias » d'accuser implicitement (pour le moins) le président Poutine du forfait. Il faudrait aussi revenir sur les supputations liées à l'état mental de M. Poutine, ou bien sur les

61 divagations très médiatisées (les matins de France Culture, M. Bonnet sur Médiapart) à propos des mystères de l' « âme russe », ce mirage néocolonial que des « journalistes » ou réputés tels n'hésitent pas à colporter et à nourrir. L'indignité d'un tel comportement face à un état russe déterminant pour l'avenir du continent européen est proprement sidérant : que valent des « journalistes » qui se lancent dans ce type d'argumentaire ? On a envie de répondre : ce que vaut leur carte de presse. Mais ce serait infamant pour leurs collègues qui essaient malgré tout de faire convenablement leur (difficile) travail... Oui, ils existent encore.

-Mensonges

Combien de fois n’a-t-on pas annoncé l’invasion de l’Ukraine par la Russie (taper sur internet : invasion de l'Ukraine par la Russie)? En France au moins 16 fois (cité plus haut). L’hystérie a gagné la presse française : quiconque conteste les informations mettant en cause unilatéralement les Russes et leurs « affidés » ukrainiens « séparatistes » fait forcément partie d’un réseau Poutine (Médiapart, France Culture, Le Monde, Libération etc…) Autre type de difficulté : la presse en France travaille beaucoup avec les agences de presse (AFP, Reuter, AP). Cette collaboration permet de garder un volet « étranger » sans avoir à investir trop souvent dans les envoyés spéciaux qui coûtent cher. On peut aussi regretter que certains envoyés spéciaux tels ceux du journal Elle (le problème a été évoqué plus haut) fassent leur travail apparemment en amateurs après avoir occasionné les dépenses liées à leur voyage. On reste en outre sceptique quand Elle (groupe Lagardère, comme Europe 1) présente des excuses pour les omissions relatives à la vraie nature politique de l'une des « dames » interviewées, car un voyage au long cours fait en principe l'objet d'une préparation de la part de la rédaction en chef. Il n'y a aucune raison de penser que le rédacteur en chef du magazine, sous l'autorité de son directeur, fasse mal son travail. Il existe donc maintes raisons de supposer que les reporters ont fait le travail qui leur a été demandé et que leur apparent amateurisme est la marque d'une stratégie éditoriale précise (et masquée) de la part de la direction de Elle. Les « journalistes » passent à l'arrivée pour des « nulles » ou des professionnelles malhonnêtes, mais c'est sans doute le prix à payer pour éviter les ennuis (Ont-elles d'ailleurs évité les ennuis?)

-Désinformation

Du haut des chaires informationnelles multiples, instantanées quand elles sont audiovisuelles ou télévisuelles, « à cheval sur l’ actualité », on assène donc à présent des vérités univoques, que les contestataires ont bien du mal à remettre en cause, soit qu’ils soient niés, soit qu’ils soient renvoyés dans l’infamant enclos de la légèreté et/ou de l’extrémisme, soit encore qu’ils soient ridiculisés et traités comme des vauriens, quand ils ne sont pas simplement casés dans le clapier des « populistes » ou ignorés. Car il serait vain de chercher aujourd’hui au sein même de la nébuleuse médiatique ayant pignon sur rue les sources des informations et des réflexions qui nous sont assénées jour après jour, avec pour aller vite, l’affirmation directe ou pas que, en dépit des signaux d’alarme qui se multiplient sur les plans social, économique, en matière de sécurité collective, le monde doit continuer tel qu’il est, avec une même vision, un goût prononcé pour les conflits et les interventions, contre les « populistes », les racistes, les fascistes (etc…), les néonazis ukrainiens étant étrangement épargnés, et qu’en matière de « politique étrangère » (la France ayant apparemment perdu la sienne), nous sommes dans le camp du Bien, contre celui du Mal, qui reste l’apanage de toutes les forces qui

62 s’opposent à l’influence occidentale dans le monde. A ce titre, M. Joffrin, directeur de Libération, (lire plus loin), est emblématique (lire son débat avec M. Emmanuel Todd dans Libération). Il s’agit d’une véritable glaciation du « débat démocratique » dont, de toute évidence, une caste s’est emparée pour diffuser une même vision des choses et du monde. Un exemple (les-crises.fr) datée de novembre 2014 est éclairant à ce sujet. Olivier Berruyer prouve qu’une dépêche AFP issue d'une dépêche en anglais à propos de l’Ukraine a traduit le mot « tank », qui en gros signifie en anglais camion citerne, par « blindé », et donc char d’assaut. Nul ne s’en est préoccupé, et l’essentiel des journaux a repris l’information erronée affirmant que des troupes blindées russes entraient en Ukraine, alimentant une tension déjà forte. Il vaut mieux incriminer l’incompétence du journaliste qu’un désir affirmé de tromper les citoyens, mais cette dangereuse méprise soulève peut-être à son tour le problème du niveau de ces « professionnels » dont une partie ne paraît pas disposer d’une culture véritable. Il faudrait aussi s’interroger sur l’usage à priori systématique et aveugle fait des dépêches des agences de presse (France Presse, Reuter, Associated press) qui ne sont pas plus objectives que leurs clients. Les sujets sont nombreux à être passés à la moulinette du conformisme ambiant. L'actualité sociale par exemple.

-Social

Toujours le monologue médiatique mainstream :

« Misère de l’information sur l’Europe des mobilisations sociales par Frédéric Lemaire (ACRIMED) www. acrimed .org (Autre détour essentiel par internet) Les années 2010 et 2011 ont été marquées, dans de nombreux pays européens, par des manifestations contre les politiques de rigueur budgétaire ; en 2010, ce fut le cas notamment en Grèce, en Roumanie, en Allemagne, en Italie, en Espagne ou encore en France. Plus récemment, en ce début d’année 2011, la Grande-Bretagne et le Portugal ont connu des mobilisations relativement exceptionnelles. L’occasion pour nous d’élargir notre observation du traitement médiatique des mobilisations sociales en France à d’autres pays, comme nous l’avions fait en mars 2010 dans notre article « Loin, très loin, de la Grèce et de ses grèves : le journalisme en panne d’Europe » L’information sociale a rarement vocation à faire la « une » des titres de presse et des journaux télévisés. Pour être médiatisées, les mobilisations sociales doivent « faire l’événement », soit par leur ampleur, soit par leurs conséquences parfois spectaculaires (violences, notamment). Ce qui est valable pour la France l’est a fortiori pour les mobilisations sociales dans d’autres pays d’Europe. Plusieurs poids, et plusieurs mesures. Une comparaison, même partielle, du retentissement médiatiques des différentes mobilisations sociales qui se sont déroulées en Europe depuis un an, nous livre un premier enseignement : toutes ne se valent pas au regard de la hiérarchisation de l’information par les médias dominants. Il y a les mobilisations dont on ne parle pas ou peu, et qui passent quasiment inaperçues. Ainsi, le 31 mai 2010, en Roumanie, les principaux syndicats appelaient à une grève générale illimitée, pour s’opposer à de considérables coupes budgétaires (avec notamment une baisse de 25% des salaires de la fonction publique).

63 Cette grève, assortie d’une manifestation, participait et participe d’un mouvement social d’autant plus significatif qu’il s’inscrit dans la durée : en 2009, le pays avait déjà connu la manifestation la plus massive de la décennie. Cela ne suffit pourtant pas à percer le mur du silence médiatique. La Roumanie est membre de l’Union européenne, certes ; mais c’est, semble-t-il, un pays trop lointain pour susciter spontanément l’intérêt du public français. Quand bien même ce serait le cas, est-ce une raison suffisante pour que la plupart des médias fasse l’impasse sur ces mobilisations, et renoncent à y intéresser leurs publics ? Qu’on en juge : si l’on excepte deux articles, publiés , le 1er juin 2010 sur rfi.fr et france- info.com [1], les sites des grands titres presse se sont bornés à reprendre les quelques dépêches d’agence dédiées à la manifestation. Pour en savoir plus, une seule solution : s’informer auprès de médias alternatifs comme Le Courrier des Balkans, la source la plus complète sur la question. Il y a les mobilisations dont on parle un peu plus. Ce fut le cas des grèves générales en Grèce de février et mars 2010 (dont le traitement médiatique fut un exemple éloquent de la misère de l’information sociale sur les pays européens, comme nous l’avons relevé dans l’article déjà mentionné) ou des mobilisations sociales en Irlande à la fin de la même année. Si « l’actualité sociale » dans ces deux pays a retenu quelque peu l’attention, c’est sans doute à proportion de son caractère spectaculaire, mais aussi, comme le montrent la quasi-totalité des articles publiés sur l’Irlande, parce que les mobilisations sont l’occasion de mettre en valeur les interventions de l’Union européenne et du FMI. Celles-ci, évidemment, ne sont pas étrangères aux mobilisations… Mais tout se passe comme si les manifestations n’étaient évoquées que parce qu’elles offrent un « angle » pour parler de la zone euro et de sa crise et que les articles s’insèrent ainsi dans la rubrique « économie » ; c’est du moins ce qu’indique la lecture des articles recensés en note [3]. À croire, du même coup, que c’est parce que les déboires de l’économie de la Roumanie n’ont pas d’incidence directe sur le fonctionnement de la zone euro que les mobilisations sociales dans ce pays n’ont pas bénéficié du même (et très relatif) succès médiatique. La place respective des mobilisations dans la hiérarchie de l’information ne s’explique pas seulement par les distances géographiques et culturelles, les inégalités d’ampleur des mobilisations ou les différences de connexion avec l’« actualité » de la crise européenne. Il suffit, pour s’en convaincre, de comparer la médiatisation des mobilisations qui se sont déroulées à une quinzaine de jours d’intervalle au Portugal (le 12 mars), et en Grande-Bretagne (le 26 mars). Non seulement ces deux mobilisations, qui ont rassemblé chacune plusieurs dizaines de milliers de manifestants, ont été d’une ampleur comparable, mais elles peuvent toutes deux être considérées comme historiques – dans les deux pays concernés, les grandes manifestations sociales étant relativement rares. Malgré ces similitudes, la manifestation à Londres a bénéficié d’une couverture médiatique sans commune mesure avec celle de la mobilisation de Lisbonne, qui s’était tenue une semaine auparavant. Pour cette dernière, c’est moins que le service minimum qui a été assuré, y compris sur les sites de presse en ligne, puisque sauf erreur ou omission, on compte en tout… un article, publié sur liberation.fr [4]. À moins de recourir à l’hypothèse peu convaincante d’une hostilité latente au Portugal et aux Portugais - une lusitanophobie qui serait partagée par l’ensemble de la presse – ne restent que les explications suivantes : - D’abord la nature particulière de la mobilisation au Portugal : celle-ci n’était pas organisée par des syndicats mais par un collectif informel de précaires, tandis que celle de Londres, de nature plus « classique », pouvait bénéficier, aux yeux de la presse, d’un surcroît de légitimité. - Ensuite le lieu de la manifestation : l’impact symbolique de celle-ci était d’autant plus grand

64 quand elle se déroule, non à Lisbonne, mais à Londres, haut-lieu de la finance. Ainsi de nombreux articles rappellent que la mobilisation est la plus importante depuis… les années Thatcher, qui marquent l’essor du capitalisme financiarisé. - Enfin, et peut-être surtout, la forme inégalement « spectaculaire » des manifestations : celle de Londres a été marquée par quelques scènes de violence et a fourni un lot appréciable d’images « choc ». C’est du moins ce qui ressort du traitement des événements par la presse anglo-saxonne, comme l’a mis met en évidence un article d’Arrêt sur images sur le traitement médiatique de la manifestation londonienne par la presse britannique.. C’est ce qui ressort également du traitement médiatique de la manifestation londonienne par les JT en France. Ainsi le journal de 20h sur France 2, le 26 mars 2011, consacre deux minutes à la mobilisation. Que retiendront les téléspectateurs ? Que la « violence », attribuée à des « casseurs », aurait manqué de dissimuler l’ampleur de la manifestation. « On en oublierait presque qu’il y avait 250.000 personnes cet après-midi dans les rues de la ville » indique l’envoyé spécial, qui ne croit pas si bien dire : seulement trente secondes d’explication seront consacrées aux motifs de la mobilisation. Même le « sujet » du JT de TF1, du même jour, pourtant encore plus court, est parvenu à être moins caricatural ! Ce n’est donc pas grâce aux grands médias que l’on apprendra ce que vivent et ce que veulent les peuples d’Europe quand ils se mobilisent. Et qu’ils bénéficieront d’une égalité de traitement à la mesure de la solidarité européenne complaisamment revendiquée sur d’autres fronts. Mais il n’y pas seulement ce que l’on dit ou ce que l’on tait, il y a aussi la façon dont on en parle ».

Les mots de la vulgate (suite ACRIMED). A comparer avec ceux cités par Jean pierre Guérin (lire plus haut) Les disparités d’un traitement minoré des mobilisations sociales n’empêchent guère, bien au contraire, de recourir à une grille d’analyse relativement homogène, coulée dans la langue de plomb de l’« austérité », dont les termes souvent très vagues et connotés dispensent de toute analyse économique ou politique.. Comme le montre le champ lexical employé pour détailler le lot des mesures et des dispositifs qui visent à mettre en œuvre l’« austérité », le problème et sa solution relèvent de la médecine, voire de la chirurgie. Résumons donc ce que nous apprend une lecture attentive des articles de presse sur les questions d’austérité sur les sites de presse en ligne, et blogs de journalistes associés. La « cure de rigueur » (ou « potion amère » lorsqu’elle est « drastique ») est une « thérapie de choc » qui se compose de « coupes budgétaires », « efforts d’ajustements » et de « sacrifices ». Elle apparaît en fait comme une sorte de « régime de rigueur » qui peut être auto-administrée dans le cadre d’un « budget ambitieux », ou par un tiers (l’Union européenne, le FMI…). Elle permet de « restaurer la compétitivité » et la « confiance des marchés », comme on perd un peu de poids pour retrouver une silhouette attirante et séduire à nouveau. Florilège - « Dans la foule bigarrée, on trouvait tous ceux qui, de près ou de loin, commencent à sentir les effets de l’amère potion gouvernementale. » (« À Londres, manifestation historique, mais pas unifiée contre l’austérité », Rue 89, 28 mars) - « Mais les syndicats estiment que la cure d’austérité va trop loin, qu’elle est trop rapide et, surtout, doutent des vertus de cette thérapie de choc » (« Heurts à Londres pendant

65 la manifestation anti-austérité », L’Express.fr, 26 mars) - « De nombreux pays européens, eux aussi soumis au régime de rigueur depuis la crise financière de 2008- 2009 » (« Heurts à Londres pendant la manifestation anti-austérité », L’Express.fr, 26 mars) - « Des efforts d’ajustement intenses seront demandés à ceux qui vivent de subsides de l’État (chômage, pension d’invalidité...) […] Des sacrifices qui s’ajoutent à ceux des trois plans antérieurs dont les effets se font déjà sentir : depuis janvier, alors même que la consommation a brutalement chuté, les retraites et les salaires ont été gelés. » (« Manifestations géantes contre l’austérité à Londres », LesEchos.fr, 28 mars) - « Plan d’austérité portugais "ambitieux" » (LeFigaro.fr, 15 mars) - « Après le Portugal, l’Espagne ? Le gouvernement espagnol a beaucoup fait pour rassurer les marchés. Mais il lui reste des obstacles à franchir. » (« Dette : Madrid espère éviter la contagion », LeFigaro.fr, 8 avril)

Malheureusement, de telles thérapies de choc ont des effets indésirables, et peuvent créer des complications et mener certains pays dans l’« impasse » , « au bord de la crise de nerf » ou du « psychodrame ». Premier symptôme : la « grogne sociale ». Heureusement, comme nous l’avions déjà constaté en Grèce, elle est bien souvent « résignée » (les syndicats manifestent avant tout pour « réclamer une pause ») ; même si, plus radicaux, les « vandales » donnent parfois l’image « d’un pays livré au chaos » comme lors des manifestations en Grande-Bretagne). Florilège - « Le Portugal au bord de la crise de nerfs : La démission du Premier ministre relance la question de la fragilité des finances publiques. » (« Le Portugal au bord de la crise de nerfs », France Soir.fr, 25 mars) - « Mais le psychodrame portugais est venu bousculer l’édifice patiemment mis en place depuis des semaines, en posant la question d’un sauvetage à marche forcée. » (« L’Europe pousse au sauvetage du Portugal », LeFigaro.fr, 24 mars) - « La grogne sociale, illustrée par des manifestations et grèves quasi quotidiennes, devrait également renforcer la gauche antilibérale » (« Portugal : vers des élections anticipées qui pourraient arriver trop tard », L’Express.fr, 25 mars).

Il arrive néanmoins que les troubles s’aggravent. Lorsqu’un gouvernement se refuse à s’administrer une « cure de rigueur » suffisamment « drastique », il y a alors risque de « contagion » des symptômes à d’autres pays fragiles. C’est à ce moment que l’Union européenne et le FMI se rendent « au chevet » d’un pays en proie au trouble pour permettre, afin de circonscrire le mal, et à travers un « plan de sauvetage », de convaincre le malheureux pays de prendre « la médecine » qui s’impose. Florilège - « Samedi 26 mars, ils sont descendus en masse dans les rues de Londres pour réclamer une pause » (« À Londres, manifestation historique, mais pas unifiée contre l’austérité », Rue 89, 28 mars) - « Vitrines brisées, poubelles en feu, scènes d’émeutes. Diffusées en boucle sur les télévisions du monde entier, les images spectaculaires des débordements de la première grande manifestation contre les coupes budgétaires, samedi soir à Londres, donnent l’impression d’un pays livré au chaos. » (« À Londres, manifestation historique, mais pas unifiée contre l’austérité », Rue 89, 28 mars) - « Y a-t-il un risque de contagion pour l’Espagne ? L’an dernier, lors des crises grecque et irlandaise, Madrid avait admis que la « chute » du maillon portugais pourrait déclencher des attaques spéculatives contre le grand voisin ibérique. » (« À Lisbonne, une aide de rigueur après l’échec du plan d’austérité », Liberation.fr, 25 mars) - « L’Union européenne au chevet du Portugal » (LeMonde.fr, 24 mars) - « Les

66 conditions d’un prêt du FMI et de la zone euro seraient certes moins élevées que le recours aux marchés financiers, mais les contreparties sociales seraient tout aussi dures à avaler pour les Portugais que l’amère potion de José Socrates. Cette médecine ne réglerait qu’une partie du problème. » (« La droite portugaise joue avec le FMI », Marianne2.fr, 24 mars)

À force d’évoquer la crise économique, les politiques menées et surtout leurs effets sociaux dans le langage de maladies contagieuses et des traitements de chocs, les acteurs des mobilisations sociales sont, volontairement ou non, présentés comme des patients réfractaires à la seule politique possible. La crise de l’endettement ? Une épidémie naturelle. Les mesures par les institutions européennes et le FMI ? Des remèdes. Les opérations d’ajustement prônées par certains gouvernements européens, la Commission et le FMI ? Des « sauvetages ». Qui pourrait s’y opposer sans basculer dans la folie ? Dès lors, que reste-t-il à connaître des mobilisations sociales et à comprendre de leurs motivations ? Fort peu de choses en vérité. Que reste-t-il à débattre ? Rien. Frédéric Lemaire (avec Henri Maler) »

Les notes [1] Respectivement, le 1er juin 2010 : « Les pays d’Europe centrale frappés par la crise » et « Les Roumains fâchés avec le plan d’austérité », France-Info.com . [2] Lire par exemple : « Roumanie : grève générale dans la fonction publique contre le plan de rigueur » , le Courrier des Balkans, 31 mai 2010. [3] « Irlande : manifestation contre le plan d’austérité », NouvelObs.com, 27 novembre 2010 ; « Budget d’austérité sans précédent en Irlande », L’Express.fr, 8 décembre 2010 ; « Les Irlandais manifestent contre le plan d’austérité du gouvernement », France24.com, 27 novembre 2010 ; « Les Irlandais disent "no" à l’austérité », Europe1.fr, 27 novembre 2010. [4] « Au Portugal, manifestations monstres contre la précarité » , Liberation.fr, 13 mars.

Cette insupportable uniformisation des discours, éditoriaux, analyses « mainstream », la présence réitérée des mêmes « spécialistes » et autres experts sur les ondes ou devant les caméras, toujours sûrs d’eux, arrogants, en dépit du fait qu’ils ont accompagné et aidé toutes les politiques économiques et sociales qui nous ont menés où nous en sommes, lasse sans bruit le public, assommé par la similarité des discours proférés, du moins si l’on en croit la baisse de la diffusion des journaux (à titre d'exemple, les catastrophiques chiffres de diffusion du Monde et de Libération cités par le Canard Enchaîné daté du mercredi 24 août 2016 : 50000 exemplaire vendus dans toute la France pour Le Monde, soit -4,40 % sur un an, et 19000 pour Libé, soit -31%) , les déboires de LCI, le naufrage de Libération, les difficultés du Monde, de l'Obs, du Journal du Dimanche l'Express (etc...) ou tant de commentaires laissés sur internet via une grande diversité de sites. L’outrance, et les accents propagandistes véhiculés à tout propos, entre autres lors du référendum sur le traité de Lisbonne (France Inter s'est alors distingué notamment par la voix de M. Guetta dont nous reparlerons plus loin), les discours guerriers à propos de l’Ukraine, l’inquiétante russophobie qui contrevient à l’intérêt bien compris de l’Europe (lire en postface à propos d'Antenne 2), les mensonges à propos de l’Irak de Saddam Hussein, ou de la Lybie de Mohammar Kadhafi, l’instrumentalisation des conflits ukrainien, syrien, tout paraît donc montrer que l’information est trop souvent une arme politique de plus aux mains de ceux qui ont le vrai pouvoir, à savoir la puissance économique et financière, elle-même réfugiée sous l’aile protectrice des Etats Unis.

67 Et que, par voie de conséquence, trop nombreux sont les journalistes qui se contentent de répercuter des informations sans les avoir vérifiées, peur peu qu’elles aillent dans le « bon sens », qui est aussi celui de la préservation de leur emploi. Sont-ils encore, dans ce cas précis, des journalistes ? Ou bien faut-il créer une nouvelle dénomination pour ces professionnels du discours institutionnalisé, que l’on retrouve de Washington, à Londres à Milan (etc…) ? Ou bien encore doit-on déduire de tout cela, comme nous le faisons ici, que le métier de journaliste, globalement, a disparu au profit du métier de communiquant ? Par exemple, qui peut savoir ce qui réellement se passe au Moyen Orient entre Daesh et toutes les nébuleuses islamiques que l'on dit financées par les états du golfe persique avec l'accord et l'aide de la Turquie, de la Grande Bretagne, de la France et des Etats-Unis ? Chacun peut se faire une idée, mais sur quelles bases sures ? Quand la France se met à vendre des armes, dont des Rafale, à des monarchies moyenâgeuses qui financent plus ou moins ouvertement les « djihadistes » que par ailleurs elle combat au Mali, où décrypter une cohérence sans l'aide de médias réellement et librement impliqués dans leur mission d'information ?

68 V-Le poids de l'oligarchie écrase le droit à une véritable information

Pour paraphraser maints contempteurs de l’Europe (si, si, ils existent, mais ont peu de moyens d’être entendus : lire en postface les articles de Jacques Sapir et Jean luc Melanchon), aucun enseignement n’est jamais tiré des échecs patents de la construction européenne, qui pourtant fait des dégâts sociaux et économiques considérables. Qui pleure officiellement sur les Grecs, les portugais, les Espagnols ? On se lamente sur leurs difficultés financières, on se réjouit des mesures antisociales drastiques que prennent les dirigeants (fortunés) de ces pays contre leur population, et, en ligne de mire, on déploie le rêve frémissant des « grands équilibres »... comptables. Que de vies gâchées, (enfants et adultes mal soignés ou sans soin, recul de l'espérance de vie...), que de souffrances muettes, insupportables ! Sur les chômeurs, que d’aucuns, ministres ou chefs d’entreprise, entreprennent de culpabiliser, les désignant à la vindicte publique (lire en postface l'article de Jacques Sapir à propos des manipulations des chiffres du chômage pour faire croire qu'il décroît), quel discours de vérité autre que celui d'une fatalité qui nous serait imposée à l'instar des catastrophes naturelles, et donc par définition, inévitables, et ne relevant d'aucune responsabilité humaine, sinon celle des chômeurs incapables de « se démerder » ? Qui se penche réellement sur le désastre que vit la France à travers un chômage de masse qui croît ? Quel avenir pour la jeunesse quand notre tissu économique fiche le camp? Quel regard sur les inégalités grandissantes ? Comment penser les difficultés d'intégration majuscules qu'affronte le pays sans prendre en compte la disparition accélérée des emplois ? Essentielles victimes du bourrage de crâne (appelons à présent les choses par leur nom), les droits de l’homme, qui paraissent souvent invoqués comme supplétifs d’appétits parfaitement égoïstes ou impérialistes. La liberté, individuelle bien entendu, et bien sûr économique, est le premier vecteur moral et philosophique des libéraux et remplace concrètement (au moins dans les pays occidentaux) les Droits de l’homme égalitaires, bien trop égalitaires, dans un univers qui promeut en réalité l’inégalité et le chacun pour soi. La lutte contre la racisme, lequel dans de telles circonstances ne peut que croître, tente de cacher la réalité des régressions imposées aux pays développés. Car nous vivons le temps d’un alignement absolu de l’essentiel de ce qu’il faut bien appeler nos « élites » sur l’hégémonie de Washington, et, sur l’idéologie individualiste US, les stratégies économiques et financières en vogue à Washington, sur ses visées mondiales en matière économique et militaire. Un « staff » néolibéral occidental est né, qui promeut une logique ultra libérale sans avoir à présent besoin de consignes du centre US. Ainsi en a-t-il été de l'Empire romain, qui a peu à peu ouvert son centre décisionnel aux élites des marges précédemment conquises. Nous n'en sommes peut-être pas loin. Quel média « sérieux » tente par exemple d’éclairer réellement ce que sont les enjeux du traité transatlantique actuellement négocié dans le dos des Européens par des gens dépourvus de toute légitimité démocratique ? Il suffit à cet égard, la démocratie, de constater que M. Macron, banquier de son état, devient ministre de l'économie après avoir été secrétaire général adjoint de l'Elysée sans jamais avoir affronté le suffrage universel, qu'il tient des discours parfaitement adaptés au projet néolibéral qu'en principe M. Hollande s'était engagé à combattre lors de la campagne électorale des présidentielles qui l'a porté au pouvoir, et que tout cela passe médiatiquement comme une lettre à la poste. Dans un tel contexte, peu d'experts ou de « grands journalistes » dévoilent les conséquences

69 prévisibles d’un tel accord au grand public en dehors du Monde Diplomatique et d'une poignée de titres minoritaires pour ce qui est de la presse écrite ou internet (l'Arène nue, le blog de Liliane Held-Khawan, le blog de jean-Luc Mélanchon, le site UPR ...). Ce qui doit alerter le citoyen, c’est que les journaux d’opinion ont quasiment disparu et sont massivement remplacés par les journaux d’ « une » opinion, la même, celle des milieux dominants en Europe et aux Etats-Unis. Nous reviendrons sur ces affirmations. Enfin, la mise sous surveillance des citoyens via la nouvelle « loi sécurité » ne paraît pas non plus bouleverser le paysage médiatique, alors que le gouvernement Valls (traduisant la politique de M. Hollande) copie pieusement la philosophie des mesures liberticides prises aux États Unis avec le « Patriot act » puis pilote sans trop de difficultés un état d'urgence à rallonge suite aux attentats du 13 novembre 2015 et suivants.

Aux racines de la désinformation

Il y a à cette situation plusieurs raisons. En France, on l'a dit, les médias principaux sont devenus dans les années 70 et 80 la propriété d’hommes d’affaires de premier plan, ce qui n’empêche pas les difficultés économiques des grands quotidiens nationaux de rester importantes, et d’envoyer pas mal de journalistes à Pôle emploi, ce qui, en soit, ne revêt peut-être pas la gravité que l’on attache généralement à des licenciements massifs, dans l’industrie par exemple. Le Canard Enchaîné en date du mercredi 3 juin 2015 nous donne un aperçu de la situation de dépendance des « grands médias » écrits : -Le Parisien, Aujourd'hui en France, Les échos, appartiennent à Bernard Arnault, groupe LVMH -Le Monde, Le Nouvel Observateur, Télérama appartiennent à Xavier Niel (Free), Mathieu Pigasse (banque Lazard), Pierre Bergé (Fondation Yves Saint laurent) -Libération, l'Express, l'Expansion appartiennent à Patrick Drahi (SFR, Numericable) -Le Figaro, le Figaro Magazine appartiennent à Serge Dassault (Dassault aviation, Dassault éléctronique) -Marianne appartient à Yves de Chaisemartin (ex dirigeant du groupe Hersant puis du groupe Altran) Le Point appartient à François Pinault (groupe Kering)

Télé/radio (source Wikipedia)

TF1 : groupe Bouygues M6 : M6 est la chaîne principale du Groupe M6 ou Groupe Metropole Television qui possède d'autres chaînes parmi lesquelles figurent W9, 6ter, Paris Première ou Téva. Le groupe est également présent dans les domaines de la téléphonie mobile, la vente à distance, Internet, le football, le cinéma, la presse. BFM TVchaîne de télévision française d'information nationale en continu, filiale du groupe NextRadioTV.

La suite, chacun d'entre vous la trouvera sur internet.

Cette « structure capitalistique » libérale pèse évidemment sur les contenus (voir plus haut): généralement, le traitement de l’actualité économique ou européenne de ces « grands » journaux, qu’ils soient audiovisuels ou papier, voire dans le cas de ces derniers, numériques aussi, est en gros parfaitement conforme aux intérêts des propriétaires et à l’idéologie qui fonde leur puissance (mondialisation, libre échange, flexibilité de l’emploi, « modération » des salaires,

70 multiculturalisme, europhilie, atlantisme).

A ce titre, n'est-il pas amusant de lire Mme Nougarayde, ex-directrice du Monde, mettre en cause en mai 2015, quelques mois après sa démission du poste de directrice de la rédaction de ce journal dit « de référence », la liberté éditoriale du Monde du fait de ses propriétaires (MM. Berger, Niel, Pigasse), les mêmes que lors de son passage à la direction de ce quotidien, et alors que sa ligne politique était peu ou prou la même qui est suivie aujourd'hui (néolibéralisme, atlantisme, etc... ) ? Médiapart nous a dit en mai 2015, qu'un bras de fer opposait la société des rédacteurs du Monde aux actionnaires pour la nomination d'un nouveau directeur, et que les actionnaires essaieraient de « passer en force », autrement dit d'imposer leur choix contre celui des journalistes. Qui cela peut-il étonner ? Les « grands médias » dans leur majorité sont donc convertis au « TINA » de Mme Thatcher, à l’unisson des politiques menées par la droite et la gauche depuis 1983, et le fameux « tournant de la rigueur » de M. Mitterrand. Et il est donc difficile de prendre fait et cause pour des professionnels généralement connus et reconnus, mais pas toujours, qui, dans l’exercice de leurs fonctions, ont généralement soutenu une politique dont les conséquences les frappent à leur tour, mais il est loisible de regretter que la presse, telle qu’elle a vécu depuis au moins la Libération, « soit en train » de disparaître : nous avons assisté en France à une révolution dans le monde des médias, qui est à la fois numérique et politique. Et cette « révolution » ne porte pas des fruits prometteurs. On pourrait même avancer qu'il s'agit d'une involution. Les discours à propos des politiques économiques ou européennes sont, on le répète, à quelques exceptions près, univoques. Les commentaires également. L'apparente variété actuelle du paysage médiatique ne met pas en cause, sinon parfois à la marge, l’unité éditoriale (ce qui a été dit plus haut), et cela serait le cas dans les autres pays occidentaux, particulièrement aux Etats-Unis, en Grande Bretagne (à l'exception notable du « Sun » qui a fait campagne pour le Brexit), en Allemagne et dernièrement en Italie, si on en croit certains commentateurs transalpins. Nous sommes donc face à une pluralité de supports médiatiques sans pluralisme. La « libération » des ondes et les bouleversements de la presse écrite depuis les années 80 ont de toute évidence accouché d’un système uniformisé et donc globalement univoque. Est-il possible de remédier à ce silence bavard, payé par les lecteurs, les téléspectateurs, nos impôts, la publicité, et si tel est le cas, comment ? Car on peut parler du système médiatique, pour désigner les « médias main stream », mais il conviendrait d’évoquer par quel cheminement tant de journalistes en arrivent à se mouler aisément dans le carcan de la doxa actuelle, dont les discours du MEDEF et de M. Obama (et sans doute bientôt de son successeur) donnent les bases essentielles. Pour croiser hors internet des points de vue réellement critiques n’allant pas dans le sens -de l’ « austérité nécessaire », -du fédéralisme européen, -d’une germanophilie exacerbée, -ou, via la crise ukrainienne, de la russophobie ambiante, -ou encore de la « nécessaire » austérité en Grèce, -puis de la nécessité d' « ouvrir l'Europe » sans conditions aux réfugiés, et avoir accès à des discours rationnels et équilibrés ouvrant sur la réflexion personnelle du citoyen, il faut se lever tôt, avec la foi du charbonnier ! En cette fin septembre 2015, le journal du soir de M. Pujadas (France 2, par exemple les 27 et 28 septembre 2015) se fait une spécialité de la traque des petits dysfonctionnements de notre société, contribuant à dresser au passage les citoyens les uns contre les autres, et du soutien à toutes les mesures remettant en cause le droit du travail, livrant son méchant travail sous la couleur

71 d'évidences partagées. M. Macron ne doit pas se sentir abandonné ! Souvenons-nous qu’à la Libération, Le CNR a décidé que les organes de presse devaient être indépendants des intérêts privés, l’exemple sinistre du « Temps » servant alors de guide pour forger une nouvelle morale de l’information même si cela n’est peut-être pas directement lié au constat fait plus haut. Citons Laurent Mauduit, journaliste à Médiapart qui apporte un éclairage passionnant car solidement argumenté sur la réalité à l'oeuvre :

« Main basse sur l’information! 02 septembre 2015 | (Source Médiapart, extraits) « Accélération de la concentration dans la presse quotidienne et audiovisuelle ; multiplication de faits de censure ; consanguinité de plus en plus accentuée et malsaine entre les milieux d’affaires et les médias ; verrouillage de l’information sur de nombreux médias audiovisuels, à commencer par l’audiovisuel public : la France vit une grave régression démocratique ! C'est presque le retour à la presse de l'avant-guerre, celle du Comité des forges. Pour la liberté et le pluralisme de la presse, et plus généralement pour la liberté et le pluralisme de l’information, ce sont décidément des jours très sombres que traverse la France. Accélération de la concentration dans la presse quotidienne et la presse audiovisuelle ; multiplication de faits de censure venant s’ajouter à des comportements très répandus d’autocensure ; consanguinité de plus en plus accentuée et malsaine entre les milieux d’affaires et les médias ; verrouillage de l’information sur de nombreux médias audiovisuels, à commencer par l’audiovisuel public… C’est peu dire que notre pays connaît une évolution qu’il faut bien qualifier pour ce qu'elle est : une grave régression démocratique ! Sous le précédent quinquennat, celui de Nicolas Sarkozy, ou dans les années juste antérieures, en prévision de l’alternance, le rachat de la plupart des grands quotidiens français par de richissimes amis du chef de l’État avait déjà fait grand bruit. Au fil des mois, on avait en effet assisté à une véritable boulimie d’acquisitions de la part de milliardaires dont la plupart n’avaient pas la presse pour métier, quand leurs activités ne dépendaient pas de la commande publique et qui pour beaucoup d’entre eux entretenaient des liens de forte proximité voire d’amitié avec le chef de l’État et qui faisaient partie des célèbres invités de la soirée du Fouquet’s. Entrée au capital du Monde, en alliance avec les Espagnols de Prisa (l’éditeur d’El País), d’Arnaud Lagardère, qui s’est souvent présenté comme le « frère » de Nicolas Sarkozy ; rachat des Échos par Bernard Arnault, le témoin de mariage (avec Cécilia) du même Nicolas Sarkozy ; rachat du Figaro par Serge Dassault, sénateur UMP, et également ami proche du même Nicolas Sarkozy en lequel il voyait le fils qu’il aurait aimé avoir ; acquisition de Libération par le banquier Édouard de Rothschild, qui a souvent passé ses vacances à La Baule avec le même Nicolas Sarkozy : dès cette époque, ce mélange des genres, cette consanguinité avaient fait à juste titre scandale. On s’était pris alors à penser que la France, du Second Empire jusqu’à aujourd’hui, en passant par l’époque gaulliste, ne s’était décidément jamais départie de ses terribles travers : ceux d’un régime présidentialiste qui dispose d’une culture démocratique faible et méprise les contre- pouvoirs, à commencer par celui de la presse. Et pourtant, il faut bien admettre que dans ce domaine de la liberté de l’information et du pluralisme – comme dans beaucoup d'autres ! –, l’alternance de 2012 n’en a pas été une. Et que la régression démocratique s’est encore accentuée. Sans doute n’y a-t-il plus de lien d’amitié visible entre le chef de l’État et les grands patrons qui ont fait main basse sur l’information. Mais c’est pourtant presque pire : la consanguinité entre les milieux d’argent et les grands médias s’est

72 dramatiquement accentuée. Et le pluralisme en a d’autant reculé. L’indice le plus récent de cette appropriation de la presse française, écrite et audiovisuelle, par une petite camarilla de milliardaires est l’empire immense que vient de se constituer en à peine quelques mois Patrick Drahi, le patron de Altice Media Group (AMG), la filiale domiciliée au Luxembourg du groupe d'Altice (SFR, Numericable). Que ce grand patron ait du talent pour construire un groupe gigantesque en jonglant avec les milliards, dans une folle politique d'endettement, voilà qui ne fait guère de doute – on peut lire à ce sujet la longue enquête de ma consœur Martine Orange (...). Mais que l'on puisse y voir la garantie d'un rebond de la presse libre et indépendante, c'est évidemment une tout autre affaire. À la manière d’un Jules Mirès, le célèbre homme d’affaires du Second Empire, qui entre ses folles spéculations sur la bulle de l’époque, celle des chemins de fer, investissait à tout va dans la presse pour mieux consolider son influence et entretenir des relations de connivence avec le pouvoir (lire La presse dans le piège de la démocratie illibérale), Patrick Drahi a racheté à une vitesse éclair tout ce qui était à vendre. Il a d’abord mis la main sur Libération, le journal créé en 1973 par Jean-Paul Sartre et Serge July. Cela a ensuite été le tour du groupe L’Express, fondé en 1953 par Françoise Giroud et Jean-Jacques Servan-Schreiber, c’est-à-dire l’hebdomadaire éponyme et une ribambelle d’autres titres parmi lesquels L’Étudiant ou encore L’Expansion… Et puis, pour finir, fin juillet, il y a eu l’accord avec Alain Weill, au terme duquel Patrick Drahi va progressivement prendre le contrôle du groupe NextRadioTV, c’est-à-dire, là encore, d’un portefeuille considérable de chaînes et d’antennes, parmi lesquelles BFM-TV, BFM-Business ou encore RMC (lire Alain Weill ouvre les portes de NextRadioTV au milliardaire Patrick Drahi). Cette opération de concentration est l’aboutissement d’une longue histoire. Et le capitalisme de connivence à la française avait déjà abîmé beaucoup de ces titres, avant même que Patrick Drahi ne s’en empare. Épuisé par de longues années de crise et tout autant de plans sociaux qui ont vu des générations entières de journalistes expérimentés quitter le navire, le Libération d’aujourd’hui n’a plus grand-chose à voir avec le Libération d’hier qui était la propriété de la société des journalistes (la SCPL), système de gouvernance inspiré de celui du Monde, qui garantissait son indépendance. De même, L’Express d’aujourd’hui, avec ses couvertures « Spécial immobilier » ou « Classement des hôpitaux » – voire pire, ses couvertures machistes (« Ces femmes qui lui gâchent la vie ») ou carrément xénophobes (« Le vrai coût de l’immigration ») – n’a plus grand-chose à voir, et depuis bien longtemps, avec la publication dans laquelle écrivaient Albert Camus ou Jean- Paul Sartre, et qui fut parmi les premiers journaux, avec Combat, à dénoncer la torture en Algérie. Dans le rachat par Patrick Drahi de tous ces titres, qui ont chacun une histoire longue en même temps qu’une relation passionnée depuis longtemps avec leurs lecteurs, il y a comme un aboutissement. C’est une triste fin de cycle !

« Assurer la liberté de la presse, son honneur et son indépendance » Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, une bonne partie de la presse française a vécu en effet une refondation. Pour prendre en compte le programme du Conseil national de la résistance (CNR) (on peut le consulter ici) qui fixait comme priorité le fait « d’assurer la liberté de la presse, son honneur et son indépendance à l'égard de l'État, des puissances d'argent et des influences étrangères », beaucoup de journaux ont, par divers moyens, cherché à l’époque les garanties de leur indépendance. Le Monde – imité vingt-cinq ans plus tard par Libération – a construit son indépendance à l’égard « des puissances d’argent » grâce à un système de gouvernance dans lequel la société des journalistes détenait le contrôle majoritaire du journal. Ailleurs, d’autres

73 modèles ont été inventés, comme une société coopérative ouvrière pour Le Courrier picard, et d’autres modèles encore… Pendant plusieurs décennies, le legs démocratique du CNR a survécu, dans des formes juridiques multiples. Et dans leur fonctionnement, bien des journaux ont gardé des types de fonctionnement attestant qu’ils étaient des produits hybrides : des produits, certes marchands, devant trouver leur équilibre financier, mais aussi des instruments de la démocratie, garantissant le droit à l’information des citoyens. L’ère Drahi sonne donc la fin de cette époque. C’est en quelque sorte pour la presse la fin d’un long déclin. Avec l’irruption du roi du câble dans le secteur de la presse, il est maintenant établi que la presse n’est plus qu’un produit marchand, qui s’achète et se vend, dans de pures logiques commerciales ou d’influence. C’est le retour à l’époque d’avant le CNR : le retour à la presse de l’avant-guerre, celle du Temps, le journal du Comité des forges, avec lequel Hubert Beuve-Méry, le fondateur du Monde, voulait rompre à la fin de la guerre, au motif qu’il avait été trop près des puissances d’argent (en même temps que du Quay d’Orsay !), trop emblématique de ce qu’il qualifiait « la presse d’industrie ». La presse de connivence… (...) » « ...Or, ce qu’il y a de très spectaculaire dans ce système de verrouillage de l’information en France par quelques grandes fortunes, c’est que tout y concourt, et que la puissance publique elle- même apporte de facto son appui à cet immense mouvement de spéculation et de concentration de l’information. Comme l’a établi récemment une longue enquête de Mediapart sur le trafic des fréquences audiovisuelles délivrées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), les tribulations récentes de la chaîne Numéro 23, fondée par Pascal Houzelot (lire Le fructueux trafic des fréquences audiovisuelles), illustrent le fonctionnement ahurissant du capitalisme de connivence à la française. Financé par une partie du gotha français des affaires ainsi que par un oligarque russe ; ami du banquier Matthieu Pigasse et du milliardaire Pierre Bergé et coopté par eux au conseil de surveillance du Monde ; par ailleurs soutenu et conseillé par David Kessler qui fut le conseiller pour les médias de François Hollande à l’Élysée après avoir été celui du même Matthieu Pigasse, Pascal Houzelot a en effet obtenu à titre gracieux au printemps 2012 une fréquence, alors que tout le monde se doutait qu’à peine le délai légal de deux ans et demi imposé par la loi serait dépassé, il revendrait la chaîne. En réalisant une formidable culbute financière. Et c’est donc ce qui s’est effectivement passé : si le CSA – qui réexaminera l’affaire à la mi- septembre – n’y met pas le holà, Pascal Houzelot et ses alliés feront une plus-value insensée de 88,5 millions de vente, en cédant à NextRadioTV la chaîne Numéro 23, dont la fréquence a été attribuée gratuitement. Lequel groupe NextRadioTV a lui-même été revendu dans l’intervalle à Patrick Drahi, au terme de cet immense et sinistre jeu de Monopoly qui bouleverse tout le paysage de la presse audiovisuelle française…(...) Retour à la presse du Comité des forges Mais dans cette enquête de Mediapart, nous soulignions aussi que l’affaire Houzelot, pour être la plus scandaleuse de toutes, n’en révélait pas moins les tares d’un système pernicieux qui permet à de richissimes hommes d’affaires de spéculer grâce à des fréquences qui leur sont attribuées gratuitement, d’arrondir ainsi leur fortune, ou d’asservir des médias audiovisuels à leurs caprices personnels. Des exemples du même type que celui de l’affaire Houzelot, on peut en effet en citer d’autres : celui de Claude Berda (AB Productions), qui a revendu en mars 2010 une fortune – 192 millions d’euros pour être précis – ses chaînes TMC et NT1 à TF1. Et même l’État s’est mis à donner le mauvais

74 exemple, puisqu’il a finalisé en octobre 2014 la rétrocession pour près de 25 millions d’euros au groupe Lagardère des 34 % du capital que France Télévisions détenait dans la chaîne de la TNT Gulli. Pour les plus grandes fortunes, la loi qui encadre la TNT est donc une bénédiction : elle autorise toutes les spéculations possibles et imaginables. Ou presque toutes. Mais l’exemple le plus spectaculaire qui résume la folie du système français, c’est celui de Vincent Bolloré, le célèbre homme d’affaires qui fut l’un des invités vedettes du Fouquet’s (et celui qui prêta son jet personnel et son yacht à un Nicolas Sarkozy tout juste élu !). Car c’est précisément grâce à ce système de spéculation autour des fréquences de la TNT que l’homme d’affaires peut monter au capital du groupe Vivendi et, par ricochet, devenir le véritable patron de sa filiale, le groupe Canal+. Tout cela grâce à cette loi qui offre à titre gracieux des canaux pouvant ensuite être revendus à prix d’or. Quand, à la fin de l’été 2011, Vincent Bolloré cède le contrôle de 60 % des deux chaînes de la TNT qu’il contrôle, Direct Star et Direct 8, il réalise une affaire en or. Direct Star, c’est l’ex-Virgin 17, qu’il a racheté au groupe Lagardère quelque 70 millions d’euros et qu’il rétrocède à Canal, pour près de 130 millions d’euros. Et Direct 8, il l’a obtenue gracieusement, au terme d’une autorisation que le CSA lui a accordée le 23 octobre 2002. Dans le « deal » que Vincent Bolloré fait avec le groupe Vivendi, les deux chaînes sont valorisées 465 millions d’euros, alors que l’industriel breton et ami de Nicolas Sarkozy n’a investi pour elles guère plus de 200 millions d’euros. Grâce à l’État, il fait donc une culbute financière exceptionnelle… La culbute est d’autant plus importante que Vincent Bolloré est payé en titres Vivendi, à un cours exceptionnellement bas, de 17 euros, du fait de la crise financière qui est à l’époque encore très violente – le cours est aujourd'hui à plus de 23 euros. Dès à présent, Vincent Bolloré a donc fait une culbute presque 50 % au-dessus de ce que l’on pensait à l’époque où il a vendu les deux chaînes de la TNT. Et dans la foulée, il est devenu l’homme fort du groupe Vivendi (il devient le président du conseil de surveillance en juin 2014), et donc aussi, l’homme fort de sa filiale, le groupe Canal+. En somme, tout concourt, y compris la puissance publique, à ce que le système de l’information soit en France totalement – ou presque – verrouillé par quelques grandes fortunes. La presse dans toutes ses composantes : la presse écrite comme la presse audiovisuelle… Et de ce système stupéfiant, on devine sans grand peine les ravages : même s’il s’agit d’une valeur fondatrice de la République, le droit à l’information des citoyens est en France sans cesse malmené – beaucoup plus qu’il ne l’est en tout cas dans les pays qui ont des cultures fortes de contrepouvoirs. Et comme par un fait exprès, de nombreux exemples sont venus illustrer ces derniers temps les risques d’un système qui livre la presse aux ambitions, aux intérêts ou aux caprices des puissances d’argent. Le cas le plus récent et le plus flagrant est celui de la censure décidée par le même Vincent Bolloré, comme l’a révélé récemment Mediapart ( A Canal+, Vincent Bolloré censure un documentaire sur le Crédit mutuel): dans son enquête, mon confrère Fabrice Arfi a révélé par le menu comment le tout-puissant patron de Vivendi et homme fort de sa filiale Canal+ a personnellement censuré d’un simple coup de téléphone un documentaire sur le Crédit mutuel et la fraude fiscale, qui devait être diffusé sur la chaîne cryptée. Lequel Vincent Bolloré a avec le Crédit mutuel de nombreux liens d’intérêt. Dans le même registre, on peut encore citer la spectaculaire reprise en main qui se dessine pour les Guignols de l’info de Canal+ que le même Vincent Bolloré a d’abord envisagé de supprimer avant,

75 face au tollé, d’avancer en crabe, en commençant par placer l’émission en mode crypté, en se débarrassant sinon du producteur historique du moins de toutes les signatures connues qui ont fait son succès, et en la repositionnant pour qu’elle se moque plus des « people » que des politiques. Il ne s’agit, certes, pas ici d’information. Mais cela donne la mesure de l’humeur du nouveau maître des lieux. Et quand les saltimbanques sont remis au pas, les journalistes ont eux-mêmes tout à craindre. Vieille leçon de l’histoire : sous le Second Empire, il n’y avait pas que la presse qui devait être à la botte ! Les caricaturistes l’étaient tout autant et devaient avant parution soumettre leurs dessins au ministère de l’intérieur… Cette spectaculaire montée en puissance des milieux d’argent dans la presse audiovisuelle a donc généré des phénomènes de désinhibition. Les patrons de la presse ou de l’audiovisuel n’hésitent plus à donner des coups de canifs publics dans le droit à l’information. Et même, sans fausse pudeur, à le revendiquer publiquement. Témoin le patron du groupe M6 Nicolas de Tavernost (lire plus loin) qui n’a pas eu le moindre scrupule, en juin dernier, à admettre exercer des pressions sur les journalistes de sa chaîne et notamment ceux qui réalisent l’émission Capital, pour « ne pas contrarier des clients ». Il était l’invité d’une émission de Canal+, et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il a dit les choses en toute franchise (dans une vidéo dont il est malheureusement impossible d'expurger la publicité !) :

Le néolibéralisme en terrain conquis dans l'audiovisuel public On savait certes, déjà, que la censure existait à M6. Car l’affaire évoquée par Nicolas de Tavernost est ancienne. Dans cet entretien, il fait allusion à la censure d’une enquête de la chaîne qui portait sur Xavier Niel en 2013, et dont Mediapart s’était fait l’écho (lire Les secrets de Xavier Niel (6) : le papivore). Mais il y a aujourd’hui quelque chose de nouveau : les oligarques parisiens qui contrôlent la presse et l’audiovisuel n’hésitent plus même à admettre publiquement qu’ils répugnent à ce que leurs journaux respectifs fassent des enquêtes corrosives sur le voisin. Et le plus inquiétant, c’est que cette pratique fait visiblement jurisprudence, même si d’autres propriétaires de médias n’osent pas encore l’avouer publiquement. Imagine-t-on une grande enquête du Monde sur l’affaire Pascal Houzelot, lequel siège au conseil de surveillance du groupe de presse ? On l’attend toujours. Espère-t-on de grandes enquêtes des innombrables quotidiens contrôlés par le Crédit mutuel sur les actes de censure de Vincent Bolloré ou sur l’écheveau opaque des sociétés holding qui lui assure le contrôle de son groupe, dont certaines sont au Luxembourg (lire à ce sujet cette autre remarquable enquête de ma consœur Martine Orange, consultable ici, là, là et encore là) ? En fait, on voit bien au travers de ces questions les effets ravageurs de ce système, celui du capitalisme de la barbichette : comme dans la petite cour de récréation des milieux d’affaires parisiens, tout le monde connaît tout le monde, il est des territoires économiques entiers où même les journalistes les plus pugnaces peinent à s’aventurer. Avec au bout du compte, le triste résultat que l’on sait : si dans quelques médias, le journalisme d’investigation peut encore être pratiqué dans les affaires qui touchent à la politique, la corruption ou la fraude, l’investigation économique et financière est le plus souvent sinistrée. Qui ose enquêter sur un Vincent Bolloré ? Les journalistes qui s’y sont risqués savent que c’est immensément compliqué. Qui ose enquêter sur l’immensément riche et puissant Xavier Niel ? À Mediapart, nous avons cette liberté. (...) Mais beaucoup de confrères savent qu’ils vont au-devant de grandes difficultés. Et le pire, c’est que ce verrouillage de l’information a un effet de contagion sur l’audiovisuel et tout particulièrement l’audiovisuel public, où les journalistes qui tiennent le

76 haut du pavé sont le plus souvent ceux qui professent avec application les points de vue dominants de ces mêmes cercles des milieux d’argent parisiens. Écoute-t-on le journal de France 2 ? Pas le moindre souci de pluralisme des approches – alors que c’est la richesse de l’économie : avec François Lenglet, on a toujours un seul son de cloche – néolibéral il va sans dire. Écoute-t-on France Inter ? Pour l’éditorial du matin, les journalistes économiques qui y officient et qui sont très compétents ont depuis toujours été mis sur la touche, au profit hier de l’ultraréactionnaire Jean-Marc Sylvestre, au profit aujourd’hui de l’éditorialiste des Échos Dominique Seux qui fait des libelles à peine plus nuancés que ceux du Medef. Écoute-t-on même France Culture ? Même la « matinale » de la radio qui, plus encore que d’autres, devrait pourtant avoir le souci du débat intellectuel contradictoire et du pluralisme a lentement dérivé au fil des mois vers le « tout-libéral » et assène périodiquement un seul point de vue en économie, celui de Philippe Manière, l’ancien pamphlétaire radical du Point. Et que dire de C dans l’air, l’émission de France 5 : n’y pérorent, le plus souvent, que les mêmes imposteurs de l’économie, ceux qui défendent depuis des lustres ces mêmes points de vue, ceux de la pensée unique néolibérale. Tout juste y a-t-il quelques poches de résistance, comme Cash Investigation sur France 2, et quelques rares autres émissions de ce type… » La « modernité » néolibérale est donc passée par là. La quête de l’objectivité, exigence qui a officiellement légitimé la grande vague de privatisation et de libéralisation des médias à l’ombre de M. Mitterrand, était un prétexte commode pour imposer une nouvelle donne (néo)libérale dans le traitement de l’information. On pouvait certes critiquer le mode de fonctionnement de l’ORTF, étroitement soumise au pouvoir politique, mais on sait ce qu’il est advenu de tout cela, TF1 par exemple n’étant aujourd’hui en rien le vecteur d’une « information objective » ou de qualité, ni plus ni moins d’ailleurs que ses concurrentes. La tutelle du politique s’est effacée pour laisser place à la tutelle de l’argent. Les journaux de province pour leur part n’ont pas (toujours?) échappé à cette main mise du privé financiarisé sur les moyens d’information, et de grands groupes se sont constitués avec plus ou moins de bonheur et de réussite. L’exemple du « groupe Hersant » prouverait si il en était besoin, que maîtriser l’information ne va pas de soi quand on manque d’une stratégie économique originale comme celle de Médiapart. La presse de province, qui partage largement les défauts de sa consœur parisienne, est sans doute un sujet à part entière qui devrait être pris en compte tout autant que ses alter ego parisiens. L'épisode Tapie à est à cet égard parfaitement éclairant. L’essentiel des radios est privé. Les chaînes publiques de télévision et le service public de la radio s’alignent sur le ton dominant véhiculé par les concurrents privés. L’État ne s’est-il pas incliné si visiblement avec M. Hollande (il a pris en la matière le « témoin » de ses prédécesseurs) devant les oligarchies économiques et financières (« mon ennemi, c'est la finance »!), ceci expliquant cela ? Il est patent qu’un nombre restreint de commentateurs et d’experts accaparent les tribunes à la télévision et sur les ondes. Les mêmes noms tournent en boucle. L’essentiel des débats ont lieu entre gens qui partagent peu ou prou la même sensibilité politique, économique. S’opposent alors ce qui sont pour et ceux qui ne sont pas contre ( excelle dans cet exercice). Des noms reviennent sans cesse, dont chez les journalistes « vedettes » Alain Duhamel, Christine Okrent, Laurent Joffrin, Christian Barbier, Ruth Elkrief ou FOG, qui, sous une impertinence de façade confortent le système qui les emploie (lire plus loin quelques portraits de « grands journalistes »). Au-delà des changements de type économique, de l’intrusion massive des nouvelles technologies,

77 des bouleversements qui ont affecté les équilibres géostratégiques de la planète, de la « peopolisation » des journalistes vedettes qui sont chez nous le reflet de ce qui se fait depuis longtemps outre Atlantique, quel regard peut-on porter sur un système médiatique qui paraît traiter de plus en plus l’ « info » comme une marchandise inoffensive pour le pouvoir en place et destinée à faire de l’audimat ? Le décalage entre le travail des journalistes patentés et celui, sur internet, de quelques particuliers spécialistes de leur domaine, généralement parfaitement au fait des disciplines qu’ils traitent, pose apparemment le problème des individus qui exercent le métier de journaliste contre un salaire et un statut. Et celui de leur compétence. Cela souligne que traiter de l’actualité ne peut pas se résumer à quelques techniques et postures, ou à une adhésion militante, (!), mais demande à l’heure de l’économie reine et du Droit triomphant plus que de l’habileté, un vrai niveau. Et une intégrité hors normes. Plus, à l’heure de la doxa intraitable, du courage. Un engagement véritable en somme.

Cette réflexion permet de poser le problème des hommes, et de leur rapport au cadre professionnel, au salaire, à la carrière, à l’insécurité croissante de l’emploi. La profession de journaliste est aujourd’hui sinistrée, et les « charrettes » se multiplient pour les « sans grade ». On a en tout cas le sentiment, peut-être injustifié, que la multiplication des médias a induit une « massification » de la profession, et donc une multiplication d’intervenants plus ou moins aptes à maîtriser les sujets brûlants de l’heure. Mais, dans tous les cas, quelle liberté éditoriale est la leur ? A-t-on de plus en plus à faire face à un système médiatique « low coast » fort bien pensé, et doit-on y chercher l'une des raisons de ce qu’il faut bien nommer un emballement mimétique compulsif du monde de l’information autour d’éruptions répétitives diffusant à tout propos une jungle de commentaires pourtant similaires ? Résultat : un prolétariat de journalistes taillables et corvéables à merci, à la discrétion d'une oligarchie grassement payée et forte de ses accointances avec les puissants de ce monde.

« La preuve par Canal Plus » (source OJIM, extraits) Ci-dessous, le contenu d'un compte rendu critique du travail de Canal Plus (notamment à travers le Petit Journal) en guise de démonstration. Même si le nouveau patron de Canal a depuis bouleversé cette chaîne et sans doute condamné son développement, voire pire, cette analyse garde toute son actualité par son acuité. Un réel système sous-tendait ce qui pouvait apparaître comme la résultante d'un travail innocent, immédiat, et réactif. Or, tout était pensé, pesé, point de hasard ni de fatalité. Choix des hommes, définition de la ligne éditoriale, dramaturgie parfaitement maîtrisée, cet exemple prouve que les hommes sont tout autant responsables du résultat que le « système ». Les récents changements affectant Canal Plus sous la poigne sans finesse de Vincent Bolloré (lire plus haut) donnent par ailleurs une bonne idée de ce qu'est la réalité du pouvoir de l'argent sur la télévision. Selon le Monde du 3 septembre 2015, « Vincent Bolloré a été nommé président du conseil de surveillance de Groupe Canal +. » Le communiqué publié jeudi 3 septembre par Vivendi, sa maison mère, concrétise une nouvelle donne au sein du groupe audiovisuel. L’homme d’affaires breton sera désormais le nouveau capitaine de Canal + : il détiendra le pouvoir mais pourra aussi s’occuper de l’opérationnel, comme il a d’ailleurs commencé à le faire ces derniers mois. Déjà président du conseil de surveillance de Vivendi, M. Bolloré va s’investir personnellement et passer du temps à Issy-les-Moulineaux, au siège de la direction de la chaîne cryptée, où il aura désormais un bureau permanent, annonce-t-on dans son entourage. »

78 « L’Ojim a visionné et analysé les deux premières semaines de la saison de cette émission quotidienne qui est aussi l’émission phare de la chaîne cryptée. Un modèle de propagande dernière génération. Il y a quelques mois, nous évoquions le cas Canal, les difficultés que rencontrait actuellement la chaîne, ses origines et ses évolutions, lesquelles avaient fini par aboutir à un mélange inquiétant de dérision et de fanatisme. Le visionnage attentif de son émission-vitrine en cette rentrée médiatique allait être l’occasion de détailler les procédés très particuliers que celle-ci emploie et qui lui permettent d’assener une espèce de matraquage idéologique indolore et pourtant permanent. Le temps de la propagande « à la papa » telle qu’usitée par Goebbels ou Staline est bien définitivement révolu. Plus de slogans manifestes, plus de foi affirmée avec éclat, plus de mythologie en toc orchestrée de manière pompeuse, plus de dénigrement littéral du déviant. Non, au Grand Journal, on est moderne, on fait dans le bourrage de crâne high-tech, on formate tout en finesse, on agresse à la Sun Tzu (le grand stratège chinois), c’est-à-dire systématiquement par un biais indirect. On est pourtant bel et bien en présence d’une véritable machine de guerre idéologique, très construite, très offensive, bien que peut-être de moins en moins efficace… Rappelons que cette émission, qui prit la suite de Nulle part ailleurs, avait d’abord était élaborée afin de répondre au problème que posait la création, par la gauche au pouvoir, d’une chaîne cryptée inaccessible aux pauvres, en proposant au moins quelques programmes en clair. Cette nécessité avait alors été transformée en moyen de racoler des CSP+, cœur de cible de la chaîne, et attirer ainsi de nouveaux abonnés. Qu’en est-il donc du Grand Journal au début de la saison 2014- 2015, alors que la chaîne a subi de nombreuses attaques et qu’elle a, l’année dernière, rappelé Antoine de Caunes, figure de l’antique Nulle part ailleurs, pour tenter de renouer avec son souffle originel en le mettant à la tête de son programme phare ?

Le règne des chroniqueurs Ce qui frappe d’emblée lorsqu’on observe le montage général, la mise en scène et les gimmicks de l’émission, c’est à quel point les chroniqueurs qui y participent sont ici « starifiés ». Bien sûr, ce phénomène tient à une tendance générale qui s’est développée au cours des vingt dernières années, mais il atteint dans le Grand Journal un degré incomparable. Le générique est toujours précédé d’un sketch mettant en scène certains des chroniqueurs. Avant chacune des parties qui composent le programme, ce n’est pas l’invité ou le thème qui est introduit, mais les visages et les noms de ces héros qui se succèdent dans un montage éloquent et une image idéale. Enfin, régulièrement, ceux-ci sont intégrés comme figures dans les différents sketchs, dans les vidéos parodiques, dans les scènes des Guignols. Ce qui produit deux effets concomitants : premièrement, traités sur le même plan que les politiques, les sportifs ou les artistes célèbres, ils y gagnent un statut symbolique comparable. Deuxièmement, cela participe à fonder un facteur déterminant du discours implicite : l’esprit de connivence. On peut également remarquer que ces « stars » à la place des « stars » semblent toutes – hormis le disgracieux Jean-Michel Aphatie -, issus d’un casting photo drastique. Que l’on préfère passer à l’écran des gens au physique avenant est tout à fait compréhensible, mais encore une fois, par son côté systématique, le Grand Journal atteint sur ce point un niveau objectivement caricatural. Et ce, toujours pour la même raison : faire des chroniqueurs les vraies vedettes, les vecteurs essentiels du désir et de l’identification, à la place des invités. Quant à ces derniers, en raison de la brièveté des séquences, de leur enchaînement tambour battant, de la multiplicité des chroniqueurs qui les entourent et s’en nourrissent comme prétexte à leurs gags, ils en ressortent, à quelques exceptions près, à l’état de simple carburant d’une machine qui ne fabrique que sa propre gloire.

Une propagande VIPis te Si c’est l’équipe du Grand Journal qui est starifiée, c’est donc que c’est à elle et à son « esprit » que le téléspectateur est convié à adhérer, et non directement à des invités qui, en proposant diverses visions du monde, pourraient du moins entretenir un panel d’opinions un rien démocratique. Il ne s’agit pas de s’identifier à un peuple entier mythifié et au dictateur censé l’incarner, mais à une caste, une caste de journalistes branchés et télégéniques, la « hype » friquée et bien-pensante, vis-à-vis de laquelle le CSP+ visé par le programme peut davantage se sentir à portée que le téléspectateur de TF1. Il s’agirait « d’en être ». D’où la culture permanente de cet esprit de connivence qui tranche avec les codes traditionnels de distance objective. D’où la règle de l’implicite qui prévaut toujours en matière

79 idéologique, et non l’exposition claire des partis pris possibles. C’est en effet toujours l’implicite qui caractérise une aristocratie : seuls ceux qui y appartiennent sont initiés à ses rites, on n’expose pas ceux-ci au vulgaire. Paradoxe typique de la gauche mitterrandienne et de sa télé par excellence : on se présente comme de gauche, et même à la gauche de Hollande, mais l’ouvrier de chez Renault peut toujours attendre pour capter les sous-entendus ; le pauvre paysan ne sera représenté que par les séquences de L’Amour est dans le pré rediffusées dans le zapping pour faire s’esclaffer les beaux gosses médiatiques ; la femme de ménage comprend d’instinct qu’elle n’aura jamais la moindre chance d’être intégrée parmi les « élus » casseurs de ringards. Sauf que, comme au Grand Journal, on ne pense pas, mais on déconne dans l’entre soi pailleté, on n’a pas l’occasion de s’arrêter sur ce genre de contradictions.(...)

(...)

La tyrannie du montage Entre les quelques questions de Polony auxquelles on n’a pas le temps de répondre et les assertions péremptoires d’Aphatie, l’invité est également systématiquement coupé par des extraits vidéos, des tableaux de statistiques, voire par un sketch. Le portrait à l’écran de l’invité est en outre titré d’un adjectif censé résumer d’emblée ce qu’on est censé penser de sa personne. Le tout sur une durée de moins d’une dizaine de minutes entièrement maîtrisée par les organisateurs du plateau. Dans un tel contexte, il est évident que l’invité a peu de chance d’incarner autre chose que la marionnette qu’on a décidé qu’il incarnerait avant que ne s’animent les vraies marionnettes des Guignols de l’info… Le procédé est totalement déloyal et contraire à la constitution du moindre débat. D’abord, diffuser des extraits vidéo, sélectionnés, coupés, montés hors de leur contexte et les asséner à un invité sommé de se justifier (encore une fois, sans disposer du temps pour cela) et pris totalement au dépourvu représente une méthode pour le moins malhonnête. Ensuite, les sketchs de Sébastien Thoen répondent également à un procédé pour le moins pervers. Celui-ci va interroger des gens dans la rue soit sur le mode de la blague soit sur celui du témoignage brut. Il place donc le sujet du débat sous le signe de la dérision, ou colporte des réactions censées avoir le poids du réel. Sauf qu’on peut évidemment monter les extraits qu’on a sélectionnés et ceux-ci n’ont bien entendu aucune valeur objective. Mais présentés de cette manière, ils se trouvent lestés d’un effet de réel totalement factice et comminatoire. Idem en ce qui concerne les chiffres que Jean-Michel Aphatie fait brutalement surgir sur un écran au cours de la discussion, qu’il s’agisse de sondages ou de statistiques. Ceux-ci produisent immédiatement un effet de vérité objective et indiscutable, alors qu’on sait bien que les chiffres doivent au contraire être manipulés avec beaucoup de précautions et mis en perspective, sans quoi on peut bien leur faire dire à peu près tout et n’importe quoi. Mais prenons un exemple particulièrement éloquent, lors du passage de Nicolas Dupont-Aignan sur le plateau du Grand Journal, le 2 septembre.

Dupont-Aignant : lynchage orchestré Parce qu’il est représentant d’une droite gaulliste classique, Dupont-Aignan est d’emblée considéré comme un ennemi politique par les déconneurs de l’émission qui demeurent très sérieux en matière de rectitude idéologique. Le 2 septembre, il est invité au sujet de la polémique autour de la réforme des rythmes scolaires, suite au cadenassage des écoles par des maires refusant d’appliquer cette réforme. Il est probable que l’essentiel des téléspectateurs dans ces échanges confus, rapides, lapidaires qui acculent totalement un Dupont-Aignan débordé, ne retiendra que l’adjectif qui souligne son portrait en lettres capitales dès le début du « débat » : « LE PROVOCATEUR ». On aurait pu écrire : « le rebelle », « l’insoumis », « le frondeur », mais toutes ces épithètes ont, à gauche, une résonance positive. On choisit donc de l’étiqueter simple « provocateur », exposant d’ailleurs dans un premier temps comment cette provocation est une provocation contre la République. « Le principe républicain, c’est d’appliquer la loi », déclare Aphatie, plus méprisant que jamais. Donc d’expulser Léonarda ? a-t-on envie de lui répliquer. Même Natacha Polony y va de son soupçon d’anti-républicanisme. Dupont-Aignan tente de revendiquer le simple droit de grève. La rhétorique est archi- classique. À gauche, quand on désobéit : on résiste au fascisme. À droite quand on désobéit : on assassine la République, et donc on concourt au fascisme. À gauche, quand on obéit, c’est parce qu’on est attaché à la République. À droite, quand on obéit c’est par esprit de collaboration. Il n’y a rien d’autre à comprendre. S’ajoute à cette première pseudo-démonstration, un sketch de Sébastien Thoen qui donne la parole à des enfants, lesquels ne comprennent pas pourquoi ils ne peuvent pas aller à l’école. Le procédé est totalement grotesque. Pourquoi ne pas convier des élèves de CM2 à s’exprimer sur le plateau dans ce cas ? Enfin, dernière partie de la démonstration, Aphatie fait défiler plusieurs extraits qui tendraient à prouver que Dupont-Aignan a toujours fait dans la provocation et dans le spectaculaire au cours de sa carrière politique. Sauf que collecter des extraits vidéo sur une longue carrière politique, puis les rassembler permet évidemment d’illustrer n’importe quoi. On aurait tout aussi bien pu démontrer que l’homme avait toujours été dépressif ou optimiste, grincheux ou lyrique, amateur de thé ou de café. Surtout, dans une démocratie

80 médiatique comme la nôtre, quel homme politique ne verse pas dans le spectaculaire ? Mélenchon, invité le 11 septembre, ne sera jamais accusé d’un tel vice, alors qu’il s’y vautre en permanence (il allait quelques jours plus tard s’afficher avec Jérôme Kerviel à la fête de l’Humanité). En tout cas, la démonstration est achevée : Dupont-Aignan n’est qu’un vulgaire provocateur, sa provocation a des relents plus ou moins fascistes, et ne sert en définitive que son carriérisme politique. Hormis ce lynchage parfaitement orchestré, on ne retiendra aucun échange véritable sur la question de fond : celle de la réforme des rythmes scolaires…

Taubira, Mélenchon : ceux qui triomphent A contrario, quelques invités politiques, exclusivement de gauche, ressortent triomphaux de l’expérience. Ce furent Taubira et Mélenchon lors de ces deux premières semaines. Cela tient autant du fait qu’ils bénéficient d’un traitement de faveur que de leur propre talent en de semblables circonstances. Traitement de faveur : Taubira est annoncée par cette phrase de de Caunes : « Rare en télévision, ce soir, elle a accepté l’invitation du Grand Journal. » Pour une fois, c’est donc l’invitée qui est mise à l’honneur et accueillie avec gratitude. Ensuite, Taubira, comme Mélenchon, bénéficieront d’un temps d’antenne supérieur aux autres invités politiques, comme si on ne se décidait pas à les quitter et que l’on désirait leur avis sur tout, Taubira parvenant même à se faire réinviter en direct pour une autre émission. Mais l’autre point important, c’est également que ces deux invités sont de véritables bêtes médiatiques et qu’ils désamorcent tous les pièges que nous avons décrits plus haut afin de conserver la maîtrise de l’entretien ; et ils les désamorcent sans doute pour les avoir étudiés en amont. Ainsi, après un extrait de Martine Aubry suite auquel on demande à de réagir, celle-ci réplique : « Je suis étonnée de la transition… » mettant en relief la perversité du procédé du montage sauvage d’extraits en cours de débat. Comme Aphatie coupe la ministre, celle-ci rétorque, offensive : « Je peux finir une phrase ? » et force les chroniqueurs à lui laisser le loisir de s’expliquer. Mélenchon, lui, observant son portrait qui le montre grimaçant avec le titre : « ANTISYSTÈME », fait remarquer : « Elle n’est vraiment pas belle, la photo ! », révélant encore la déloyauté de ces raccourcis caricaturaux. À son sujet, d’ailleurs, le sketch réalisé par Sébastien Thoen sera pour une fois parfaitement complaisant. En effet, le comique demande des signatures de soutien au président du Front de Gauche dans le quartier huppé du XVIe arrondissement. C’est la bourgeoisie du XVIe qui est la vraie cible du sketch, que l’on tente de ridiculiser et non l’invité lui-même. Cette bourgeoisie représente une autre cible rituelle de Canal++ (avec le peuple ringard de province), non tant par esprit anti-bourgeois puisqu’en vérité, si la nouvelle bourgeoisie branchée et médiatique de gauche ne perd jamais une occasion de tacler la vieille bourgeoisie de droite, c’est simplement en raison d’une rivalité obsessionnelle.

La bouillie commune En dehors de ces cas extrêmes, on pourra remarquer la prestation tout à fait correcte d’Eric Ciotti le 4 septembre, évoquant la situation en Irak et parvenant à formuler un propos sans être en permanence interrompu. Sur le même sujet -l’intervention contre l’État Islamique-, le 12 septembre, les invités parviennent également à développer à peu près leurs aperçus. Quand le thème est difficile et que l’invité en a une connaissance particulière que ne peuvent partager les chroniqueurs, le brouillage manipulatoire du discours est moins effectif et, faute de débat, on peut au moins entendre une analyse rapidement ébauchée. Sinon, la grande majorité des invités appartient à l’aile gauche du parlement : Stéphane Le Foll, Bernard Poignant, Julien Dray, Jean-Marie Le Guen, et bien sûr Mélenchon et Taubira. La plupart du temps, seule une bouillie confuse surnage de ces échanges truffés des lieux communs du politiquement correct. De toute manière, l’important ici, ce ne sont pas les idées, c’est le sketch. Lorsque les sujets sont délicats, ils sont en général éludés d’un slogan convenu. Le cas Mehdi Nemmouche, par exemple, qui soulève tout de même beaucoup d’inquiétudes sur l’intégration et la radicalisation de l’Islam en Europe, est résolu par le terme : « PSYCHOPATHE », accolé à son portrait. Ainsi peut-on bien s’enfoncer dans le crâne qu’un cas clinique marginal n’est le symptôme de rien en ce qui concerne la situation de l’Islam en France. Néanmoins, le mauvais accueil de la société française vis-à-vis de ces populations immigrées sera tout de même pointé du doigt. En somme, ce ne sont pas les dérives de l’Islam fanatique qui sont criminelles, mais les Français de souche qui, par leur méchanceté, les rendent inéluctables.

Rissouli et la chasse aux fachos Parmi les (trop) nombreuses rubriques qui émaillent cette première partie, on trouve celle de Karim Rissouli, tellement anecdotique qu’on se demande bien ce qu’elle est censée nous apprendre. Une suite de flash info sans la moindre cohérence constitue en général son intervention. Cependant, le 9 septembre, le chroniqueur donne dans le scoop inédit. On nous montre des images d’une réunion sur le parvis de la mairie de Calais, où une foule est échauffée par un ex militant du FN, Yvan Benedetti. La population de Calais, exaspérée par le nouveau camp de réfugiés installé chez elle, est encouragée par Benedetti à s’organiser et, Rissouli force un peu le propos, à former des milices. Le chroniqueur, en

81 bon adjuvant de la police de la pensée, en appelle à une condamnation judiciaire des déclarations du tribun. Le tatouage d’une croix gammée dans le cou d’un des hommes assistant au discours est zoomée pour faire s’effarer le téléspectateur. Encore une fois, on manipule sans vergogne. Qu’il y ait un skinhead à Calais et que celui-ci ait eu envie de se rendre à ce genre de réunion n’est symptomatique de pas grand chose, et sûrement pas de ce que laisse entendre le chroniqueur : que l’assemblée serait un regroupement de nostalgiques du IIIème Reich… Tenant son « affaire », Rissouli revient le lendemain avec des images des migrants, montrant la misère qui est la leur et comment les associations qui s’en occupent sont totalement débordées. Que ceux-ci soient également des délinquants qui enfreignent la loi française et qu’ils se livrent à de nombreuses déprédations dans la ville de passage qu’est pour eux Calais n’est bien sûr jamais mentionné. La population calaisienne elle-même n’est jamais interrogée ou prise en compte. Non, vu des studios parisiens et de la hype de Canal+, le problème est d’une simplicité déroutante : les méchants fachos d’un côté et les gentils migrants de l’autre. Et la seule question à se poser revient à se demander pourquoi l’État n’enferme pas les premiers et ne nourrit pas les seconds.

L’esthétique du zapping Dans cette première partie, Augustin Trapenard assure la caution culturelle « dure ». Le 11 septembre, de Caunes l’introduit en prétendant que se vulgarise à Paris l’expression « se faire trapenardiser », pour poursuivre l’autocélébration permanente que l’émission se rend à elle-même. Bien, mais pour ce qui est de haute culture, Trapenard ne relaiera durant ces semaines de rentrée littéraire que les romans qui font le « buzz », lesquels sont rarement promis à une quelconque postérité. Le 2 septembre, le « critique littéraire » nous append que Frédéric Beigbeder bousculerait les codes du roman… On peut certes apprécier les productions du plus mondain des romanciers français, mais affirmer, après Joyce, Proust ou Céline, que Beigbeder bousculerait les codes du roman relève tout de même de la bêtise la plus manifeste. Enfin, cette première partie du Grand Journal s’achève dans le « Zapping », métaphore de tout ce qui précède. Le rythme est trop rapide pour le moindre début de réflexion, mais cette vitesse générale est un moyen de propagande subliminale. Au lieu de marteler sans cesse le même slogan, on fait tout défiler dans une confusion et un relativisme délirants, en orchestrant néanmoins les choses de manière à ce que ne surnage au delà de l’agression du flux, qu’une vision extraordinairement simpliste et autoritaire des choses. Dans le zapping, trois types d’extraits dominent la sélection. 1) Des extraits de documentaires sérieux qui, en quelques secondes, ne nous apprennent rien, mais instillent l’idée que les monteurs auraient une véritable conscience politique. 2) Des extraits d’émissions de téléréalité ou de jeux télévisés pour ménagères, laissant entendre que chez Canal+, on n’est pas des ploucs et qu’on peut donc se gausser librement de ces derniers. 3) Des extraits du Grand Journal de la veille, induisant le fait que l’émission est donc la référence ultime dans le domaine médiatique. En outre, la même technique de montage sélectif permet d’inclure des témoignages unilatéraux qui, sur chaque sujet, offrent systématiquement le même filtre idéologique limité. Par exemple, le 1er septembre, on diffusera les images d’un peuple ukrainien révulsé par Poutine. En aucun cas les arguments des partisans, pourtant nombreux, du président russe. Lequel sera juste après présenté dans Les Guignols sous les espèces d’un conquérant impavide. Voilà comment fonctionne le bourrage de crâne du Grand Journal : sans avoir l’air d’y toucher et sans se donner les moyens d’aucun débat véritable et constructif, on divulgue en permanence, sur le ton de la déconnade, une idéologie ultraformatée qui passe comme un code implicite d’appartenance à une élite VIP autocélébrée tout en faisant fantasmer au spectateur le bonheur de s’y identifier.

Batterie de sketch La suite de l’émission, au centre de laquelle s’insinuent Les Guignols de l’info, marionnettes mythiques qui en sont comme la perle au milieu de l’huître, ne déroule presque plus qu’une interminable succession de sketchs brefs, de gags mitraillés jusqu’à épuisement par une armée d’adulescents. Rire et chansons version bobo n’offre plus que mille variations sur le même ton. Les Guignols consacrent l’essentiel de leur énergie dans le Hollande bashing. Cet acharnement pourrait paraître étrange de la part d’une émission si marquée à gauche, pourtant la gauche dont on se réclame ici est une espèce d’utopie immaculée, un trailer pour le meilleur des mondes qui n’a d’autre fonction que d’être exhibé sur l’écran de son portable dernier cri. L’engagement politique se résume dans le fait de porter un tee- shirt Che Guevara en se rendant à sa soirée privée. Quant à l’analyse générale du monde telle que divulguée par les Guignols, elle est d’une simplicité redoutable. En Amérique : des dictateurs sanguinaires. En Russie : des dictateurs sanguinaires. Au Moyen-Orient : des dictateurs sanguinaires. En France : un incapable, Hollande, qui laisse Valls faire le travail, mais Valls, c’est déjà Sarkozy, Sarkozy, c’est plus ou moins , Marine, elle n’est jamais présentée sans son père, Jean-Marie, qui lui est toujours Hitler… En somme, le monde est peuplé d’ignobles fascistes. Heureusement, des studios de Canal++, on résiste avec humour et on empoche les bénéfices financiers, moraux et narcissiques qui en résultent.

82 Éternelle adulescence C’est donc une vision du monde d’ados niaisement idéalistes, binaires, irresponsables, ignorants et narcissiques, mais forts en vannes et munis d’un compte en banque d’adultes parvenus qui imprègne tout le programme. Apogée soixantuitarde. Dans la seconde partie, dominent la sous- culture américaine, le sport, et les performances des jeunes stars du Net recrutées par Canal. On se demande à ce moment-là si l’émission ne s’adresse pas en fait exclusivement à un public à peine pubère. La fameuse « miss météo » du Grand Journal, cette année la jolie Raphaëlle Dupire, ne passera pas le 8 septembre, ne se sentant pas à la « hauteur » de sa mission. Elle sera donc relayée ensuite par Alison et Poulpe. Cette séquence est également symptomatique. Sous prétexte de mépriser la météo, info beauf par excellence, et au lieu de se contenter de ne pas la présenter, l’émission propose de la tourner en dérision à travers le sketch d’un jeune mannequin qui incarne peu ou prou une bimbo de l’époque de Stéphane Collaro avec moins de poitrine et davantage d’esprit. Hormis la séquence du Gorafi, le vendredi, les comiques du Web repérés par l’équipe du Grand Journal ne donnent pas grand chose dans un tel contexte et développent le même humour ultra stéréotypé qui se limite à une succession mécanique de vannes d’une phrase. On a beau changer les têtes, Alison, Poulpe, Jérôme Niels, la très médiocre Nora Hamzaoui, il semble que se poursuive sans interruption la même et unique litanie qui finit par assommer d’ennui le téléspectateur ayant passé la vingtaine.

Kultur Kampf Hormis ce robinet à vannes, donc, la « culture », c’est soit la rubrique « pop culture » de Mathilde Serrell qui égraine des nouvelles dans la même superficialité alerte qui fonde le rythme de l’émission, soit des invités qui peuvent certes être Ora-ïto et Daniel Buren (9 septembre), pour faire dans l’épate-bobo, Houellebecq avec Délépine et Kervern, qui s’en sortent en effet plutôt bien, à l’instar de Benoît Poelvoorde. Mais plus généralement, on tombe sur Luc Besson pour le navet blockbuster Lucy, Cameron Diaz pour le navet blockbuster Sextape, Charlotte le Bon et Helen Mirren pour le navet bien-pensant Les Recettes du bonheur… En soi, pourquoi pas ? Simplement, si on prétend mépriser le plouc à longueur de temps, encore faudrait-il avoir les moyens culturels de se le permettre. On aura également le nageur Florent Manaudou et les stars de la rentrée littéraire Frédéric Beigbeder et Emmanuel Carrère. Mais surtout, le 10 septembre, un grand moment de communion autour de Djamel Debbouze et de Mélissa Theuriau, incarnant à eux deux le summum artistique, humain et moral tel que peut le rêver la clique du Grand Journal. Il est comique, elle est journaliste de gauche ; elle est belle, il est d’origine maghrébine ; ils sont un couple mixte et un couple qui travaille ensemble et, en l’occurrence, elle vient de réaliser un documentaire pour Canal+ à la gloire de l’improvisation théâtrale (et donc de Djamel Debbouze dont ce fut la voie d’avènement). Béatitude et extase. Personne, à ce moment-là, ne se permettrait la moindre dérision. On baigne dans le sacré. Mais également dans l’idéologie. Car derrière le film, le couple cherche à imposer l’improvisation théâtrale aux programmes scolaires… Laquelle possède en effet mille vertus. Mais pose également mille problèmes qu’il eût été opportun de soulever. Plutôt que la langue de Racine, l’inhibition de l’étude et l’intégration de l’héritage, on valorise ainsi le « viens comme tu es », « parle comme tu peux », et « dispense-toi des modèles ». Étant donnée la dégradation actuelle de la transmission, on peut penser qu’il serait bon d’actionner d’autres leviers que celui-ci pour relever le niveau général. On peut aussi penser que Djamel Debbouze ne représente pas forcément non plus le modèle absolu à donner en exemple aux jeunes Français comme s’il s’agissait d’une version XXIème siècle de l’ « Honnête homme » pascalien du XVIIème. Goebbels à Beverly Hills

83 Si dans les régimes totalitaires classiques, la propagande adoptait la forme d’un certain lyrisme paternaliste à l’attention d’un peuple massifié et infantilisé, la propagande divulguée en permanence par le Grand Journal adopte celle de la déconne adulescente à l’attention d’une masse atomisée à laquelle on propose le fantasme de rejoindre un carré VIP. Quant à ce carré VIP, cette élite autocélébrée et décérébrée, elle ressemble moins à une aristocratie qu’à une bande de lycéens « populaires » dans une série américaine. Lorsque cette élite du fond du bus se penche du côté droit, elle voit des fachos ; du côté gauche, elle voit des ringards. Elle méprise autant le petit peuple des loosers que les bandes rivales en classe à Louis le Grand. Sa vacuité pailletée n’a d’égale que sa morgue. Et elle sévit du lundi au vendredi dès 19h10. En clair, sur Canal Plus. »

VI-Le « capital humain »

84 Les systèmes existent à travers les hommes qui les meuvent. Mais la presse, au sens large, est-elle un « système » ? D'après Wikipédia, « Un système d'information (SI) est un ensemble organisé de ressources qui permet de collecter, stocker, traiter et diffuser de l'information1. Il s'agit d'un système socio- technique composé de 2 sous-systèmes, l'un social et l'autre technique. Le sous-système social est composé de la structure organisationnelle et des personnes liées au SI. Le sous-système technique est composé des technologies (hardware, software et équipements de télécommunication) et des processus concernés par le SI2. L'apport des nouvelles technologies de l'Information est à l'origine du regain de la notion de système d´information. L'utilisation combinée de moyens informatiques, électroniques et de procédés de télécommunication permet aujourd'hui -selon les besoins et les intentions exprimés- d'accompagner, d'automatiser et de dématérialiser quasiment toutes les opérations incluses dans les activités ou procédures d'entreprise. Ces capacités de traitement de volumes importants de données, d'inter-connexion de sites ou d'opérateurs géographiquement éloignés, expliquent qu'elles sont aujourd'hui largement utilisées (par exemple dans les activités logistiques) pour traiter et répartir l'information en temps réel, en lieu et place des moyens classiques manuels - plus lents - tels que les formulaires sur papier et le téléphone. Ces capacités de traitement sont également fortement appréciées par le fait qu'elles renforcent le caractère « systémique » des données et traitements réalisés : la cohérence et la consolidation des activités lorsqu'elle est recherchée et bien conçue permet d'accroître la qualité du contrôle interne de la gestion des organisations, même lorsque celles-ci sont déconcentrées ou décentralisées. » Dans ce contexte « systémique » puisqu'il est loisible d'en parler ainsi, les journalistes se vivent généralement comme appartenant à sinon un système, du moins à une corporation (l'auteur en a été. Cette réalité est évoque plus haut). Selon Wikipedia, « Une corporation, dont le mot vient du latin corporari (« se former en corps »), ou plus exactement un corps, est une personne morale, en général de droit public, instituée par une loi. Ses composantes sont toutes des personnes physiques et/ou morales qui possèdent une même caractéristique (en général l'exercice d'une fonction). On peut distinguer les corps (ou ordres professionnels) non seulement des sociétés, des associations et des syndicats qui sont des regroupements volontaires de droit privé, mais aussi des établissements qui sont des groupements de biens, et de certaines sociétés qui ne sont pas des sujets de droit mais des contrats entre les sociétaires. Le corporatisme peut désigner, selon qu'il prend ou non une connotation péjorative, la tendance qu'ont les membres d'un corps professionnel ou administratif à privilégier leurs intérêts matériels au détriment de ceux du public qu'ils servent (consommateurs, administrés, justiciables, usagers, élèves, clients, patients, etc.). » Cette corporation a donc ses frontières, le statut, avec la carte de presse, un régime d’imposition favorable, une liberté de travail (très) relative. La profession s’est paupérisée depuis au moins une vingtaine d'années, et l’effet massification induit par la multiplication des écoles de journalisme, des « radios privées » et des « journaux internet » est allée de pair avec la précarisation des journalistes, sur fond de difficultés économiques grandissantes pour ce secteur et/ou de dépendance absolue à la publicité. La presse a cette particularité d’être à la fois matérialisée par des entreprises, contraintes d’équilibrer leur budget sous peine de disparaître, et la diffusion d’idées, sous la forme

85 d’informations, ce qui en fait un pourvoyeur d’idéologie : dire par exemple que l’austérité est nécessaire ou qu’elle est nuisible renvoie à deux conceptions du monde, de son organisation, à la place de l’humain, de l’économique et à des structures de pouvoir. Les individus qui agissent cette drôle de machine si complexe sont donc déterminants, car les messages passent par des journalistes, et sont aussi en principe le fruit de leurs convictions, de leurs parti pris, ce qui est bien naturel. Le pouvoir de ces gens est directement indexé sur la place des moyens de communication dans nos sociétés saturées de matériels de haute technologie. Les médias s'invitent à toute heure du jour ou de la nuit chez les gens, dans les voitures, qu'on le veuille, ou que parfois on ne le veuille pas. Cette liberté individuelle de principe est largement tamisée par la contrainte idéologique, qui a pesé de tout temps sur la presse comme sur toute expression formalisée (écriture, discours, reportage, film etc...), mais peut être aujourd’hui plus que jamais. On l'a vu, après la Libération, chaque point de vue politique, chaque parti pris avait plus ou moins son journal. On savait que l’on achetait un journal communiste, de centre droit, de centre gauche, de droite etc… Les journalistes, qui pour beaucoup n’avaient pas de formation spécialisée, brillaient par la diversité de leurs origines sociales, de leurs formations. Leur signature était la marque d’un engagement, tout comme les titres qui les employaient. On pouvait donc en parcourant les divers journaux se faire une opinion personnelle, pour peu que le sujet en vaille la peine. Souvenons-nous des bagarres autour de la CED, de l’affaire de Suez, de la guerre d’Indochine etc… Déjà, le monde médiatique était le reflet de la vie politique du moment. Mais le pluralisme idéologique qui marquait cette vie politique donnait au pluralisme médiatique de l'époque une réalité palpable. Être journaliste était exercer une forme de citoyenneté exigeante, combative, souvent enracinée dans des convictions fortes. La Seconde guerre mondiale était passée par là, elle avait légué des engagements, des refus, une espèce de rage de faire du neuf, d'éviter les pièges moisis de l'entre deux guerre, exigence qui avait par exemple conduit à interdire aux puissances économiques de posséder des moyens d'information. Las, tout ceci est oublié. Sous cet angle, certains peuvent considérer que l'après Libération a été une manière d'âge d'or des médias en France (ce qui peut être contesté), chacun étant clairement étiqueté dans un camp idéologique et ferraillant férocement contre ses « adversaires », ce qui n'a pas empêché nombre de ces individus précisément définis de nouer relations et amitié avec les adversaires du jour, démocratie et sentiment d'un destin commun obligent.

La presse : un secteur économique comme un autre ?

A présent, on fabrique des journalistes (de base) comme des techniciens supérieurs, des informaticiens, mais avec des limites précises : celles du niveau culturel et intellectuel. A quelques exceptions près, (MM. Demorange, Badou par exemple pour les jeunes « grands journalistes », issus de Normale Sup et quoiqu'on en pense par ailleurs, tant de diplômés de Science-po Paris dans les postes d'importance, lire plus loin), le gros des troupes au moins en province ne paraît pas briller par la qualité de la formation en dépit de la superbe des écoles de journalisme. Et quand des surdiplômés s'investissent, fussent-ils passés par une école de journalisme « cotée », ce n'est pas forcément pour faire honnêtement leur travail, mais pour faire carrière. Que chacun se reporte au site de l'OJIM pour pointer les diverses odyssées triomphales des uns et des autres auxquelles nous ferons partiellement honneur plus loin. Est-il aventuré de comparer les entreprises de presse actuelles à des entreprises, et non plus à des pourvoyeurs d'idées et d'idéologie adossées à un ensemble industriel produisant la matière

86 presse ? Si l'on part du principe qu'une entreprise doit produire pour vendre, et que chacun de ses produits peut être répété à l'infini, on est en droit de se poser la question. En effet, un univers médiatique officiel où circulent essentiellement les mêmes idées, la même idéologie, les mêmes part-pris peut s'apparenter dans son fonctionnement à une entreprise produisant des biens matériels. En la matière, les biens, tout aussi formatés que des productions matérielles, sont idéologiques. Or, dans un contexte de production de masse, les fonctionnements au sein des entreprises ont à voir avec des contraintes objectives. Un patron dirige. Il délègue à des cadres le soin de mettre en œuvre les stratégies définies par ses soins selon des modalités changeantes au gré des époques. Le management roi peut ainsi s'immiscer dans le monde de la presse. En principe, dans les organes de presse, existe un « comité de rédaction » qui permet au Directeur (et/ou au rédacteur en chef) de définir la ligne, et aux chefs de service de la décliner selon les besoins de leur service. Ce type d'organisation est plus ou moins identique dans les journaux « à l'ancienne », car il permet en principe à chacun de prendre la parole pour donner son avis, étant entendu que la ligne du journal s'impose à tous quand le débat est clos. Les choses se gâtent quand la concurrence est peu ou prou sur les mêmes standards de lecture de l'actualité. On peut donc avancer à ce stade que les journalistes, qui peuvent à présent indifféremment travailler dans un titre ou un autre (à quelques exceptions près comme Le Monde Diplomatique »), ou sur toute chaîne télé « de grande écoute » sont d'autant plus considérés qu'ils sont conformes à ce que l'on attend d'eux ici et là. Ils sont de la sorte devenus des pions dans un seul et même jeu. On peut donc supposer que, symboliquement, le journaliste n'ayant plus l'envie ou le droit de porter un regard différent sur le monde qui l'entoure fût-il adossé à des faits vérifiables, l'uniformité du paysage médiatique le lui interdisant, ainsi souvent que sa formation, il est assimilable à un technicien supérieur chargé de distiller une marchandise idéologique quasiment identique où qu'il exerce ses éventuels talents. Il est prolétarisé. Il vend sa force de travail ni plus ni moins qu'un employé ou un ouvrier contre un revenu. Ayant perdu sa liberté de conscience, il a perdu sa spécificité. Et son utilité symbolique. Et donc son niveau de vie et en dehors des « vedettes », son statut social. A ce stade du raisonnement, on doit donc souligner que la première responsabilité de l'uniformité des discours médiatiques relève sans doute en premier lieu des structures économiques qui aujourd'hui caractérisent nos « grands médias » qui ont fait de leurs journalistes des « employés ». Ce qui n'exonère en rien ces derniers de leurs responsabilités. La propriété privée oligarchique des grands moyens d'information se traduit par la présence à la tête de ces entreprises de « grands patrons » intimement liés à l'univers du business mondialisé. On peut donc déjà faire un lien avec la ligne éditoriale des différents journaux. Raconter comme M. Artus sur France Culture (Les Matins) que l'investissement privé dans les affaires de presse relève du souci citoyen des investisseurs est une plaisanterie. Quand M. Bergé se fâche contre la rédaction du Monde, il le fait comme un patron et non comme un citoyen indigné. On doit penser que ses remarques acerbes exprimées publiquement sont au moins un avertissement pour les journalistes visés, et leur direction avec. L'argent n'a certes pas d'odeur, mais quand il a le pouvoir, il l'exerce. Dans le service public, le patron est l'Etat, quels que soient les directeurs des chaînes ou des radios, par définition relativement éphémères. En réalité, l'Etat entend que son service public véhicule l'idéologie qui est la sienne, à savoir aujourd'hui néolibérale. Comment s'y prend-il ? Soit qu'il nomme lui-même les grands cadres, soit qu'il délègue cette responsabilité au CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel), cela revient au même

87 car les membres du CSA sont à part entière tenants de la doxa de l'heure et expression tout autant qu'arme de l'oligarchie. Nul ne soupçonnera M. Schramek, actuel « patron » du CSA, d'être un vigoureux opposant aux politiques menées au moins depuis M. Jospin, dont il était l'un des proches (en réalité, ces politiques ont été mises systématiquement en œuvre à partir de 1983). Ce système faussement démocratique s'appuie donc sur un socle idéologique commun aux grands décideurs. Le « formalisme démocratique » ne doit pas travestir la réalité. Le dernier conflit entre les personnels de Radio France et le nouveau directeur M. Gallet marque bien le clivage à l'oeuvre : un technocrate bien introduit est nommé à la tête du service public radiophonique sans expérience véritable des métiers en cause, mais avec une feuille de route conforme à la politique d'austérité du gouvernement. M. Olivier Poivre d'Arvor, directeur de France culture, émet des réserves à propos de la politique du nouveau patron, il est remercié. Autre exemple, Mme Ernotte, nouvelle « patronne » de France télévision, a fait sa carrière chez Orange, et véhicule donc des valeurs et des visions de gestionnaire du privé. La presse n'est pas son métier de base. Le divertissement, la culture non plus. La gestion l'est assurément. Management à tous les étages !

On ne lui fera pas le procès en sorcellerie néolibérale, mais elle a travaillé au plus haut niveau dans une entreprise engagée dans la concurrence mondiale pour les parts de marché. Est-ce donc cette personne, quelles que soient ses qualités, qui sera susceptible de rendre un peu de lustre à l'information sur France 2 ou France 3, ou qui saura améliorer la qualité de ces chaînes qui singent fréquemment TF1 avec les mêmes modes de fonctionnement, usant et abusant (au moins pour France 2) d'animateurs-producteurs royalement payés pour faire de l'audimat et favoriser le chiffre d'affaire des publicitaires ? On peut en douter. Est-elle là pour « réduire la voilure » du service public télévisuel ? On peut le craindre. Sur le sujet, l'article de Laurent Mauduit traitant des conditions contestables de la nomination de Mme Ernotte:

« Pourquoi la télévision publique a-t-elle passé sous silence le scandale Ernotte ? (mai 2015)

Pour quiconque voudrait vérifier que la télévision publique française souffre d’un manque terrible d’indépendance, l’affaire Ernotte fonctionne comme un révélateur. A ma connaissance, aucune chaîne de télévision publique ne s’est fait l’écho des irrégularités en cascade qui ont permis à une personnalité qui ne connaît strictement rien à ses problématiques d’être choisie par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) comme la future patronne de France Télévisions. Toute muselée, toute prisonnière qu’elle soit du capitalisme de connivence à la Française, la presse écrite a évoqué ce scandale, qui en dit long sur l’anémie de notre démocratie. Après l’enquête de Mediapart révélant ces irrégularités innombrables (Lire France Télévisions : la désignation de la PDG entachée et France Télévisions: la justice va être saisie du scandale Ernotte), plusieurs journaux, du Parisien jusqu’au Monde, ont eux aussi publié de longs articles documentés confirmant que la désigntaion de Delphine Ernotte s’était déroulée de manière irrégulière. Mais sur les chaînes très nombreuses de France Télévisions, à ma connaissance, rien ! Pas le moindre écho. L’information était importante, mais les chaînes publiques ont préféré la taire. On observera, certes, que ces chaînes de télévision publiques sont malheureusement assez coutumières de ce genre de censure. Un seul exemple : même si la crise financière a révélé l’imposture de quelques économistes mondains qui, se présentant sous leur casquette universitaire, cachent qu’il siègent dans des conseils d’administration de grandes banques ou compagnies d’assurance, et vendent aux téléspectateurs toujours les mêmes recettes, celles du néolibéralisme, la télévision

88 publique se rend le plus souvent complice de ces imposteurs. Il a longtemps suffit de suivre l’émission « C dans l’air » présentée par Yves Calvi, sur la 5 pour le mesurer : depuis des lustres, ce sont toujours les mêmes économistes qui y ont leur rond de serviette ; et on a tôt fait d’y oublier que l’économie n’est pas une science exacte, mais une branche des sciences sociales dont la richesse ne tient qu’à la diversité de ses approches. Mais dans le cas de la procédure de désignation de la future PDG de France Télévisions, la censure – ou plutôt l’autocensure- prend un relief encore plus spectaculaire. Rien, pas un mot ! L’affaire Ernotte est tout simplement passée à la trappe. Pour défendre mon enquête, pour expliquer le travail d’enquête que j’avais mené sur Mediapart, il n’y a donc eu que Thierry Ardisson sur Canal + qui m’en a offert l’opportunité, samedi, lors de son émission « Salut les terriens ». Merci donc aux Terriens ! Et pour celles et ceux qui souhaiteraient retrouver le passage de cette émission, je m’autorise à le publier ci-dessous. C’est à visionner à partir de 17’55’’. Pour être complet, une autre émission, celle du « Tube » sur Canal +, le même jour, a aussi rendu compte des débats que soulevaient la désignation de Delphine Ernotte. Voici cette émission : En somme, il a fallu se promener dans le paysage audiovisuel en dehors de l’empire France Télévisions pour être honnêtement informé. Cette autocensure en dit donc très long sur les maux qui ronge la télévision publique. Car il y a, certes, le vice premier : l’affaire Ernotte est venu confirmer que la nouvelle loi qui encadre le CSA, organisant le huis clos, a permis que la désignation de la nouvelle présidente soit polluée par des embrouilles et des embûches innombrables. Mais ce n’est pas le seul des maux dont souffre la télévision publique. Comme par un effet de contagion, il y a les effets innombrables d’une caporalisation qui est à l’œuvre depuis toujours ; les effets d’un manque patent d’indépendance, qui conduit trop souvent les acteurs de cette télévision publique sinon à courber l’échine du moins à se taire. Puis-je en donner une illustration ? Lors de cette même émission avec Thierry Ardisson, j’ai eu un bref échange, qui n’a pas été retenu au montage, avec l’animateur Frédéric Lopez, qui a semblé intéressé par ce que je racontais mais qui s’est dit dans l’impossibilité de commenter mes informations. Tout le monde a compris la sous-entendu : dans l’univers de France Télévisions, il ne serait pas toléré qu’un animateur ou un journaliste dise en liberté ce qu’il pense de l’avenir du groupe public. C’est ici, pourtant, que commence le naufrage de France Télévisions. Pourquoi tout au long de cette affaire Ernotte n’a-t-on pas entendu la voix des Sociétés de journalistes ? Ce que je vais dire est peut-être arrogant mais je le ressens comme une vérité essentielle : il n’y aura de télévision publique libre et honnête que si la loi qui l’encadre ne garantit réellement son indépendance, et aujourd’hui, nous sommes loin du compte ; mais aussi seulement si la collectivité des journalistes revendique haut et fort le droit imprescriptible des citoyens d’être correctement et honnêtement informés. Que cela plaise ou non aux puissances, quelles qu’elles soient… »

Et voici l'approche de l'OJIM :

89 « Delphine Ernotte prétend ne pas porter d’« idéologie politique ». Vraiment ? le 12 mai 2016 dans Médias (source OJIM)

Longuement interrogée par puremedias.com , la présidente de France Télévisions s’est défendue de toute idéologie et de tout parti pris politique. Pour Delphine Ernotte, le fait d’avoir été accusée d’être nommée par l’Élysée est « une pure calomnie ». « Je n’avais jamais rencontré le président, je l’ai vu après ma nomination. D’ailleurs on en a plaisanté, il m’a dit « il paraît que je vous ai nommé mais on ne se connaît pas ». Mais c’est classique… », explique-t-elle. Lorsqu’on lui demande si elle est « proche de la gauche », elle répond par la négative. « Je ne suis pas une femme politique. Je suis arrivée ici car je suis une femme d’entreprise », se défend-t-elle. Et de poursuivre : « Je ne suis pas là pour porter une idéologie, je trouve ça malsain. Ma compétence n’est pas d’être de droite ou de gauche. Elle est d’être une femme d’entreprise, et je le revendique. Cela semble bizarre à tout le monde mais je n’ai jamais fait de politique. » Confiant avoir des « sujets d’étonnement » en découvrant « ce microcosme médiatique », elle estime qu’on lui « colle beaucoup d’étiquettes complètement fausses ». Et ce sans aucune raison ? Pas si sûr… En effet, Ernotte oublie-t-elle, entre autres, qu’en septembre 2015 sur Europe 1, elle expliquait sans sourciller : « On a une télévision d’hommes blancs de plus de 50 ans et ça, il va falloir que ça change. » Et celle-ci de continuer en appelant à ce qu’il y ait plus de « femmes », plus de « jeunes » et plus de « toutes les origines » sur les écrans. Ainsi sous des couverts de politiquement correct, on voudrait donc nous faire croire que le progrès n’est pas du progressisme et qu’il n’est, de ce fait, pas une idéologie. Et pire : que le racisme inversé n’est pas du racisme… » Ces choix sont extrêmement inquiétants, au moins pour ceux qui pensent que le service public d'information a une autre mission que celle de travailler comme le privé et de répercuter les discours tout faits de la doxa qui, en quelque sorte, gère aujourd'hui d'une main de fer le monde des idées politiques et « sociétales ». Au moins, au temps de l'ORTF, les choses étaient claires. Tout le monde savait que par exemple M. Peyrefitte, obéissant au général de Gaule, dirigeait autoritairement la ligne de la chaîne télévisée nationale, et on pouvait à juste titre s'en indigner quand on évoquait la presse anglo-saxonne supposée plus libre. Aujourd'hui, la liberté formelle des médias cache une main mise tout aussi autoritaire des pouvoirs économiques de l'heure sur l'expression médiatique, avec la complicité active de l'Etat. Comme dans les pays anglo-saxons, qui sont devenus le nœud d'un empire civilisationnel mondial. On a donc des individus, les journalistes, et au-dessus d'eux les patrons, tout puissants, dont certains sont aussi journalistes (!) et, ne les oublions pas, les annonceurs, missi dominici des lobbies économiques, dont l'importance dans l'équilibre des comptes des entreprises médiatiques et dans la stratégie des états et des organisations internationales, donne à leurs avis un poids singulier. Un « surmoi » d'une efficacité formidable pèse aujourd'hui sur le monde médiatique, qui est de toute évidence devenu bon gré mal gré le bras armé des oligarchies qui mènent le monde occidental. Constat qui n'est pas exclusif d'une critique similaire ou apparentée des médias US, allemands, russes ou chinois (etc...). Mais dans une vieille démocratie européenne comme la nôtre, il serait peut-être temps de se poser

90 de bonnes questions.

VII- « Atlantisme »: un puissant système idéologique

91 mondialisé

I-Il serait facile de traiter tant de « grands journalistes » ou d'« experts » d'agents américains ne serait-ce qu'en prenant connaissance du ton des articles et commentaires concernant la Russie et M. Poutine, qui sont trop souvent à sens unique. Rappelons ici que la Russie ne fait absolument pas le poids en terme économique face aux « pays occidentaux », à savoir la sphère d'influence directe américaine, Japon et Corée du Sud compris, et que seuls les Etats-Unis peuvent se permettre d'avoir un nombre considérable de bases militaires dans le monde et notamment en Europe. Les Etats-Unis, véritables patrons de l'OTAN, sont responsables d'au moins 43 % des dépenses militaires mondiales (ce chiffre aurait progressé significativement et avoisinerait les 50 %), l'Europe de 17 % loin devant la Russie et la Chine. (chiffres Wikipedia pour 2010/2012). On a accusé la Russie d'avoir beaucoup investi dans la modernisation de son arsenal nucléaire, mais selon Noam Chomsky (lire en postface), ce serait aussi le cas de notre partenaire américain sous la présidence Obama. Cacher cela reste un déni d'une gravité extrême quand on prétend travailler pour informer les citoyens. Mais « agent américain » renvoie à « agent de l'étranger », et les choses ne sont pas si simples. Le terme, ignominieux (en tout cas pour l'auteur) ne rendrait en effet sans doute pas compte d'une réalité complexe. Un « agent » travaillant pour une puissance étrangère est payé pour cela. Il tourne le dos aux valeurs véhiculées par son pays, aux intérêts de ce dernier. Et de la sorte, le concept de trahison peut être brandi. Jean Monnet était un agent américain, ce dont apparemment tout le monde se fiche. Robert Schuman également. La déclassification de documents secrets US en 2000 a permis d'en avoir la certitude : ces deux personnages émargeaient au budget de la CIA, ce qui a notamment été confirmé par Mme Marie France Garaud sur un plateau de télévision (émission accessible via internet) que nous avons évoquée plus haut. On veut bien qu'en pleine guerre froide, cette situation n'ait pas été vécue comme une aberration par ces anticommunistes patentés, mais c'est une réalité lourde de sens, qu'il est loisible d'interpréter sévèrement, surtout à la lumière du combat du général de Gaulle, pendant et après la seconde guerre mondiale. Si l'on évoque par exemple BHL (du fait qu'il s'intéresse beaucoup aux médias, au moins pour s'y exprimer) sur le plan de son rapport aux Etats Unis, on a le droit de se poser la question car il est, médiatiquement, systématiquement aligné sur la politique US, voire plus va-t-en guerre que les Etats Unis eux-mêmes. Il aurait sa carte de presse (au point où nous en sommes!). On peut pourtant douter que son engagement aux côtés des Etats Unis soit vénal, du fait qu'il est à la tête d'une grande fortune, et qu'il n'a aucun besoin de subsides pour régler sa vie comme il l'entend. On serait dans ce cas face à un engagement idéologique et politique, comme pouvait l'être l'engagement de tant d'intellectuels aux côtés de l'URSS pendant la guerre froide. Avec un dogmatisme et un aveuglement égaux à ceux des partisans du « socialisme réel ». La part intéressée de ces engagements n'est donc pas toujours une raison suffisante pour expliquer ces partis pris brutaux, « bruts de décoffrage », sourds à toute critique. Il y faudrait joindre l'approche des racines psychologiques, sociales de ces militants, intégrer des paramètres intimes de la vie personnelle des uns et des autres, le milieu dans lequel ils évoluent, bref, comme toujours, il est essentiel de respecter ces positionnements à la lumière de l'humanité de ces individus de premier plan médiatique, y compris et surtout quand on les supporte difficilement. Sans pour autant s'épargner une critique légitime de prises de position qui, souvent, peuvent apparaître extrémistes d'un point de vue politique, humain, voire moral.

92 Qu'on le sache, Aragon n'avait pas d'intérêt égoïste à pousser si loin son engagement dans le mouvement communiste, en connaissance de cause. Sans établir un parallèle littéraire et intellectuel entre BHL et Aragon (!), reconnaissons au premier des raisons objectives de s'inscrire dans un « air du temps » qui le subjugue. En la matière, la « philosophie » peut être un vecteur d'aliénation comme un autre. Victimes et promoteurs d'une idéologie, voilà peut-être une explication des engagements sans retour qui ont sans doute à voir avec des problèmes identitaires que seuls les intéressés connaissent peut-être et dont les ressorts relèvent de mécanismes psychologiques profonds qu'il ne nous appartient pas d'approcher ici. Ce qui n'enlève évidemment rien à la responsabilité des uns et des autres dans leur engagement. Ce serait d'ailleurs leur faire injure que de les priver de cette responsabilité. L' « atlantisme » est donc apparemment un concept complexe, qui mérite un petit détour. Un rapide rappel historique est nécessaire pour définir ce que sont les contraintes induites par l'hégémonie économique et culturelle d'un pays sur la plupart des autres. Les cités grecques de l'Antiquité ont longtemps été soumises à l'influence de l'Empire perse. Ce dernier stipendiait ses agents grecs pour essayer d'influer sur la politique des cités, les diviser. L'empire perse utilisait des mercenaires grecs pour renforcer son armée. Alexandre le Grand a mis fin à cette hégémonie manu militari. L'Empire romain a fondé une politique d'influence plus subtile, appelée à un grand avenir, en formant les élites des pays vassaux à Rome, les souverains vaincus envoyant leur progéniture étudier dans la capitale de l'Empire, et en organisant la « romanisation » culturelle avec un tel succès que plusieurs des « grands » empereurs étaient issus de contrées conquises militairement. Notons que Rome proposait alors avec la Pax Romana, une culture, une écriture, un mode d'organisation urbaine, économique, administrative,et une intégration dans les grands courants commerciaux de son vaste domaine. Se rallier à Rome a été un temps un espoir et une ambition « totale » pour les marchands et les élites de l'Antiquité, qui trouvaient là le moyen de s'apprprier un univers qui a longtemps représenté l'opportunité première pour les « âmes bien nées ». La Romanité unifiait les élites de l'Empire dans un même rapport au pouvoir, à la légalité romaine, au droit romain et pour leur plus grand profit. On sait notamment grâce à Pierre Legendre que l'église d'Occident s'est moulée plus tard dans le juridisme romain, et qu'elle aurait dans la foulée récupéré le rêve de l'empire universel pour le perpétuer. Au XVIIe siècle, La France de Louis XIV, alors première puissance du continent européen, entretenait en Ecosse un parti « français », et a soutenu les rois catholiques anglais qui ont malgré tout mal fini. Plus tard, au XVIIIe et XIXe siècles, à l'heure de la prépondérance anglaise, l'or anglais a financé toutes les coalitions européennes contre la France de la Révolution et de l'Empire. Il suffit par ailleurs de lire Balzac ou Stendhal pour mesurer l'influence anglaise sur l'évolution européenne. Musique, littérature, mode de vie, innovations dans le confort domestique ou mise en œuvre de la révolution technologique et industrielle, Londres était le centre intellectuel, financier et économique du monde né après 1815. La référence comme avait pu l'être la France et Rome en leur temps, plus la banque et l'industrie. La disparition de la « musique française », tellement combattue par Jean Jacques Rousseau, affirmant que la langue française n'est pas faite pour la musique, contre Rameau qui représentait la tradition classique française en musique, est sans doute un reflet de l'influence anglaise tout autant que l'aspiration à un monde nouveau qui a porté la naissance du romantisme, avec individualisme à la clé. La « patron » est donc aujourd'hui un état, les « Etats Unis d'Amérique », qui n'a pu prendre son envol qu'après la terrible guerre de sécession. Cette dernière a permis dans les années soixante du XIXe siècle aux « fédéraux » de terrasser les « confédéraux » au terme d'une conflagration

93 terrible, qui annonçait dans sa tactique et son armement ce que seraient les futures guerres en Europe. On peut pointer que le « rêve fédéral » européen, qui doit tant aux Etats Unis, s'est heurté à l'hypothèse confédérale portée un temps par M. Chevènement. A chacun de lire cette coïncidence comme il l'entend. Il se trouve que l'hégémonie US actuelle présente bien des aspects nouveaux, liés aux développement des nouvelles technologies. Le cinéma américain a inondé l'Europe et le monde occidental à la Libération, le jazz s'est imposé comme un patrimoine mondial, les Etats Unis sont devenus le modèle en Europe et ailleurs, à tous points de vue. Les industries culturelles US sont aujourd'hui un vecteur d'influence, de conformité et d'aliénation extraordinaire. Internet leur doit tout. Traverser le continent européen, c'est pointer la conformité apparente du Vieux continent avec le « grand allié », zones commerciales, adolescents casquettés, baskets, joggers, motards en bande type « easy rider », culte du corps, etc... Mais il serait trop simple de dénoncer l' « atlantisme » sans faire un détour par le « soviétisme », à savoir l'influence idéologique, culturelle et économique qu'a pu avoir l'URSS sur les pays occidentaux avant de renouer avec le phénomène américain.

Guerre froide : les « agents de Moscou »

Longtemps, l'Occident a vécu dans la hantise de la subversion communiste, qui trouvait ses racines réelles et/ou imaginaires à Moscou. Mais le poids idéologique de l'URSS via les « partis frères » n'était pas un fantasme. Il existait bien en France par exemple une frange non négligeable de la population qui suivait le PCF, lui-même inféodé à l'URSS sans véritablement s'en cacher. On sait que Maurice Thorez, patron du PCF, était réfugié en URSS pendant le second conflit mondial. On sait également qu'il avait à cœur de promouvoir en France l'internationalisme à la sauce stalinienne, ce qui n'enlève rien au courage des communistes qui se sont fait tuer pendant le conflit ou à la légitimité des luttes ouvrières soutenues et encadrées par le PCF qui tentaient de préserver des acquis ou d'en conquérir de nouveaux avant et après l'Occupation. En quoi consistait donc cette influence soviétique en France ? Elle a été avant tout la croyance dans le messianisme communiste. Mais si tel était globalement le cas au niveau des « prolétaires », dans les usines, chez les petites gens, une frange de la bourgeoisie française s'est aussi retrouvée dans ce combat. Aragon reste une figure essentielle de ces intellectuels qui se sont engagés dans la lutte idéologique sans état d'âme. Les intellectuels ont été nombreux à adhérer au Parti ou a en devenir des « compagnons de route ». Le PCF, parfaitement structuré, avait ses journaux, l'Humanité à Paris, la Marseillaise à Marseille et sa région (etc...), ses écoles de section, son école centrale, et entendait forger sa propre intelligentsia dans le cadre de la « démocratie bourgeoise ». Il avait aussi ses journaux pour enfants, ses organisations de jeunesse, un grand cousinage avec la CGT qui véhiculait les mêmes valeurs sur le plan syndical que le parti sur le plan politique, à savoir la « lutte des classes » telle que définie par le marxisme léninisme. On sait également que certains secteurs économiques travaillaient volontiers avec l'URSS, notamment dans l'agriculture. Qui se souvient par ailleurs que les hauts fourneaux du complexe sidérurgique de Fos sur Mer (du temps de la présidence Pompidou) ont été construits notamment avec des ingénieurs soviétiques ? A la faveur de la Guerre froide et des différents « coups » de Moscou en Hongrie, en Tchécoslovaquie, en Pologne, le prestige du communisme s'est assez rapidement délité, et la fin du bloc de l'Est a été le coup de grâce pour le communisme à la française (A l'époque, être contre l'URSS c'était être pour le « monde libre » et donc les Etats Unis).

94 Qu'en reste-t-il aujourd'hui ? Beaucoup de rancœur, de la haine aussi, parfois de la nostalgie, et la suffisance des vainqueurs de la guerre froide qui ont triomphé sans que la planète ne soit mise à feu et à sang. Mais de grandes fortunes dans le « camp communiste », point que l'on sache. Du moins de grandes fortunes liées à cet engagement messianique. Avec le recul, à l'époque comme aujourd'hui, on voit bien que le différentiel économique entre l'Occident et le « bloc socialiste » rendait le « danger communiste » plus fantasmatique que réel. L'essentiel de la bourgeoisie française et des élites de notre pays n'a jamais adhéré au fond au rêve millénariste véhiculé par les communistes. En outre, le pouvoir financier de l'URSS ou son rayonnement économique et culturel n'ont pas été en mesure de changer les fondamentaux des « démocraties occidentales ». La tradition bourgeoise de la France ne pouvait majoritairement s'accommoder d'un modèle qui privilégiait une économie collectivisée.

-Nota bene :

Notons dans la foulée du « danger communiste » aujourd'hui éteint la persistance d'un anticommunisme viscéral chez les « gauchistes » d'antan, trotskistes, maos et tant et tant. Ce vieux cauchemar pour des « esprits libres » s'est de toute évidence transformé en « russophobie ». (La « maophobie » n'est pas tendance, la « sinophobie » non plus). Et a généré pas mal de revenus confortables. Le millénarisme communiste sous une forme ou sous une autre a créé sans doute autant d'idiots que le néolibéralisme, ce qui peut-être rapproche les uns et les autres, souvent les mêmes, quant à la nature de leurs positions « incontestables » car « indiscutables ». Ces gens lourdement marqués véhiculent ainsi, au moins en apparence, des modes de penser tout aussi dogmatiques avant qu'aujourd'hui, sauf qu'ils portent aujourd'hui des idées absolument contraires à celles qui étaient les leurs jadis, mais « de la même manière », alliant surdité et convictions bétonnées. Nombre de ces « radicaux » se sont confortablement recasés dans le système actuel, médiatique ou politique, en se l' appropriant, apparemment sans juger défavorablement leur parcours pour le moins contestable, et parfois en le revendiquant (Hélas!). Une aventure psychologique identitaire plus que politique sans doute ! En tout cas, point de folie dans tout cela, et un sens certain de l'opportunisme. Chacun trouve et exploite son identité idéologique et sa nature propre comme il peut, pas forcément comme il le devrait. Mais ces étranges positionnements parfois très médiatisés n'ont pas été pris en compte comme ils auraient dû l'être. Ces « intellectuels » sans aveu auraient dû perdre toute crédibilité : c'est souvent le contraire qui a eu lieu. Admettons qu'ils ont rendu bien des services au Système. Toute peine mérite salaire, et on serait tenté de dire dans le cas de nombre de ces révolutionnaires en peau de lapin que tout mercenaire appelle son revenu, (que d'aucuns pourraient tenir pour une « prime de délinquance ») qui a souvent été plus que convenable. Mais ce serait peut-être faire un procès d'intention à certains d'entre eux, du moins à ceux qui n'ont pas prospéré sur la folie extrémiste de leur jeunesse pour nourrir la folie actuelle du monde comme il va (mal). Appelle-t-on cela la vertu ? Oui, si le terme est encore usité.

-Le rôle actuel des Etats Unis

Rappelons succinctement que la « modernité » est depuis 1945 américaine en Europe comme au Japon et sur une grande partie de la planète. Vainqueur de la guerre, mais épargnés par les destructions contrairement à l'URSS, les Etats Unis ont en outre profité économiquement du conflit quand l'Europe était ruinée. La seconde guerre mondiale leur a permis de développer des capacités économiques et militaires dans des proportions inouïes. Arrivant en France, puis en Allemagne (etc...), ils avaient dans leurs bagages le savoir-faire et la capacité industriels, la

95 civilisation du tout automobile, du cinéma grand public (Walt Disney compris), de la publicité comme art de vivre la société de consommation, du « confort moderne » avec par exemple les réfrigérateurs, les industries de divertissement livrables clé en main, le dollar s'imposait dans les échanges mondiaux. Plus le discours sur la liberté opposé au totalitarisme de l'URSS. Ils avaient aussi une stratégie pour l'Europe et pour le monde dans le cadre de la probable confrontation avec l'URSS qui allait surgir très rapidement après la victoire sur les « pays de l'Axe ». Leur vision impériale, adossée à une puissance économique, financière, militaire sans égale dessinait un avenir mondial aux couleurs US. Ils avaient également une stratégie médias « mondialisée » bien avant tout le monde, même si on sait que les Nazis en possédait une également mais à un niveau moindre et d'une nature différente. Les nazis pratiquaient une propagande sans fard, dont le film de Leni Riefenstahl tourné lors des jeux olympiques de 1936 à Berlin est resté un sommet. Mais la place des médias n'était pas ce qu'elle est devenue et, surtout, le système nazi qui voulait tout contrôler ne pouvait sans doute pas laisser se développer une industrie des loisirs relativement autonome, et parallèlement, ne concevait pas son éventuelle hégémonie dans un cadre social et civil apaisé, ce qui a fait l'une des forces de l'influence US qui s'est toujours voulue pacifique et respectueuse des droits humains, quoiqu'on en pense par ailleurs. Pour les Etats Unis, le « soft power », à savoir le contrôle politique et celui de l'information sont devenus partie prenante d'une stratégie impériale mondiale via les nouvelles technologies. La « modernité » a consisté de plus en plus pour les pays du monde « atlantique » à copier l' « ami américain » en terme économique, de mode de vie, puis d'organisation internationale. La vie politique européenne et japonaise a traduit dans les orientations politiques cette influence déterminante, et en France, hors l'épisode gaulliste, les « pro-américains » ont depuis des décennies leurs réseaux, leurs accointances avec la puissance publique et sont porteurs du projet néolibéral qui a conquis la sphère économique et financière occidentale depuis les années 80. La culture française s'est peu à peu convertie à l'idéologie libérale anglo-saxonne, et le système de formation des élites a suivi, faisant de la France « un pays comme les autres ». Voici un article internet décrivant la stratégie médias actuelle des Etats Unis d'Amérique.

Les États-Unis financent des médias étrangers «indépendants» Par Julie Lévesque Mondialisation.ca, 23 avril 2015 Url de l'article: http://www.mondialisation.ca/les-etats-unis-financent-des-medias-etrangers-independants/5444668

Le magazine étasunien Foreign Policy a publié récemment un texte intitulé Les hurluberlus, les trolls et les idiots utiles (Cranks Trolls and Useful Idiots), dans lequel l’auteur, Dalibor Rohac, traque « les guerriers de l’information de la Russie » lesquels ont selon lui infesté le web de mensonges et de propagande sur des sites web potentiellement payés par le gouvernement russe. Rohac écrit: Tout au long du conflit dans l’est de l’Ukraine, ces sites ont systématiquement régurgité la propagande russe, répandant des mensonges, des demi-vérités, et des théories du complot, souvent directement traduits du russe [...]

L’hebdomadaire tchèque Respekt a publié un article de fond sur le mystérieux site de « nouvelles » Aeronet (également connu sous le nom AENews). Lancé en 2001 par des passionnés d’aviation, le site a changé de propriétaire plusieurs fois. Depuis l’été 2014,

96 il a régulièrement publié des articles accusant le nouveau gouvernement ukrainien de fascisme et alléguant que des mercenaires étasuniens et britanniques se battaient dans l’est de l’Ukraine. (Dalibor Rohac, Cranks, Trolls, and Useful Idiots, Foreign Policy, 12 mars, 2015)

Premièrement, regardons la faiblesse des allégations dans l’article. L’auteur accuse des médias de faire exactement ce que lui-même et les médias traditionnels étasuniens font généralement lorsqu’ils traitent de questions touchant à la politique étrangère, comme la question ukrainienne : ils «[régurgitent systématiquement la propagande étasunienne, répandent] des mensonges, des demi-vérités, et des théories du complot ». Ils ont toutefois l’avantage de ne pas avoir besoin de traduire quoi que ce soit. Apparemment pour Rohac, un article écrit en russe est nécessairement de la propagande russe. C’est aussi simple que cela : les Russes ne produisent tout simplement pas de contenu journalistique honnête. Cet argument à propos de textes « directement traduit de sources russes » n’est pas seulement faible, il est xénophobe. Les exemples de l’auteur pour prouver ses points sont faibles. Aeronet n’est pas le seul site à avoir non seulement accusé, mais aussi prouvé la nature fasciste du gouvernement ukrainien. De nombreux médias indépendants ont publié de nombreux articles à cet effet, démontrant que plusieurs figures clés au sein du gouvernement non élu sont des néonazis et que le Bataillon d’Azov est rempli de membres liés à des groupes néonazis: Svoboda et le Secteur droit (Right Sektor) (sans compter les anciens membres du défunt parti fasciste UNA-UNSO), ont non seulement intégré le Cabinet, mais les deux principales entités néonazies se sont vues confier des positions clés qui leur accordent de facto le contrôle des forces armées, de la police, de la justice et de la sécurité nationale .

Alors que le parti de Iatseniouk contrôle la majorité des portefeuilles et que le chef néonazi de Svoboda, Oleh Tyahnybok, n’a pas eu de poste ministériel important (apparemment à la demande de la secrétaire d’État adjointe Victoria Nuland), les membres de Svoboda et de Secteur droit occupent des postes clés dans le domaines de la défense, de l’application de la loi, de l’éducation et de l’économie. (Michel Chossudovsky, Les États-Unis ont installé un gouvernement néonazi en Ukraine, Mondialisation.ca, mars 2014)

Même les grands médias comme et la BBC ont admis que « de nombreux membres [du Bataillon d'Azov] ont des liens avec des groupes néonazis », bien qu’ils minimisent leurs propres déclarations en disant que leur présence est « exagérée »: « Je n’ai rien contre les nationalistes russes, ou une grande Russie », a déclaré Dimitri, [un membre du bataillon d'Azov...] « Mais Poutine n’est même pas un Russe. Poutine est un juif. » Le symbole du bataillon n’est pas sans rappeler la Wolfsangel nazie, même si le bataillon prétend qu’elle représente en réalité les lettres N et I superposées, signifiant « idée nationale ». Bon nombre de ses membres ont des liens avec des groupes néonazis et même ceux qui rient de l’idée qu’ils soient des néonazis ne l’ont pas nié de manière très convaincante. (Shaun Walker, Azov fighters are Ukraine’ s greatest weapon and may be its greatest threat , The Guardian, 10 septembre 2014) Mikael Skillt est un tireur d’élite suédois ayant sept ans d’expérience dans l’armée et la Garde

97 nationale suédoise. Il se bat actuellement avec le Bataillon Azov, un groupe armé volontaire pro- ukrainien dans l’est de l’Ukraine [...] Quant à ses opinions politiques, M. Skillt préfère se qualifier de nationaliste, mais en réalité, ses points de vue sont typiquement néonazis [...] M. Skillt croit que les races (sic) ne devraient pas se mélanger. Il dit que les juifs ne sont pas des Blancs et qu’il ne faut pas les mélanger avec les Blancs. Son prochain projet est d’aller se battre pour le président syrien Bachar al-Assad parce qu’il croit que M. Assad se tient debout face au « sionisme international ». (Dina Newman , Ukraine conflict: ‘ White power ‘ warrior from Sweden, BBC News, 16 juillet 2014) En ce qui concerne le deuxième argument de Rohac relativement aux mercenaires occidentaux qui se battent en Ukraine, en mai dernier plusieurs médias ont rapporté que les mercenaires de la société militaire privée Blackwater, désormais appelée Academi, opéraient en Ukraine. L’information n’est pas venue du Kremlin, mais plutôt d’une source médiatique allemande et a été publiée par le média de masse allemand Bild am Sonntag : Environ 400 mercenaires d’élite de la société étasunienne notoire de sécurité privée Academi (anciennement Blackwater) participent à l’opération militaire ukrainienne contre les manifestants antigouvernementaux dans les régions du Sud-Est du pays, selon un média allemand.

Citant une source du milieu du renseignement, le journal Bild am Sonntag, écrivait dimanche que les employés d’Academi sont impliqués dans la répression militaire de Kiev envers les militants pro-autonomie près de la ville de Slaviansk, dans la région de Donetsk. (400 US mercenaries ‘ deployed on ground ‘ in Ukraine military op, Rt.com, 11 mai 2014)

Quelques jours après les révélations allemandes, le magazine français Paris Match a publié un article citant des témoins affirmant avoir vu des mercenaires étrangers sur le terrain en Ukraine : Plusieurs témoins assurent avoir entendu certains des miliciens parler avec un fort accent de l’ ouest ukrainien. Ils ont aussi remarqué plusieurs hommes venus du Caucase, possiblement des mercenaires tchétchènes. D’ autres, ne parlaient jamais, semblaient étrangers à la région. Le photographe de guerre Jérôme Sessini a passé près d’ une heure à côtoyer ces miliciens avant qu ’ ils n ’ ouvrent le feu.

« Ce n’ est pas une certitude, mais à leur attitude générale et à leurs gestes très précis, j’ ai eu la nette impression – disons à 95% – qu ’ il y avait des mercenaires américains ou formés par les Américains parmi eux » explique Sessini, qui a côtoyé pendant plusieurs années les hommes des sociétés de sécurité privée américaines lors de ses reportages en Irak et en Afghanistan.

Plusieurs de ces hommes étaient masqués, ou drapés dans des keffiehs, ce qui rend difficile de pointer qui parmi eux a tiré les coups mortels. (Alfred De Montesquiou, Révélations sur la tuerie Krasnoarmeïsk , Paris Match, 15 mai 2014)

À la fin janvier de cette année, un homme armé en uniforme parlant clairement avec un accent anglais a également été filmé par un réseau de télé local ukrainien. Il a ensuite été identifié comme étant Christopher Garrett alias Leon Swampy . Selon RT, il n’était pas le seul : « Des gens armés en uniforme parlant couramment l’anglais sans accent ont été

98 repérées à Marioupol après un tir de roquette, alimentant les allégations selon lesquelles des membres de sociétés militaires privées étrangères servent au sein des troupes ukrainiennes. (Ukraine: Military-Clad English-speakers Caught on Camera in Mariupol Shelling Aftermath. Who Are They?, RT 26 janvier 2015)

Le recrutement de combattants pour l’Ukraine par des Français est un fait également bien documenté. L’ancien membre de la Légion étrangère Gaston Besson a fait du recrutement pour le Bataillon d’Azov. Plus d’informations sur les légions de l’OTAN ici.

Donc, comme nous pouvons voir, ce que l’auteur de Foreign Policy qualifie d’« accusations » et d’« affirmations » sont en réalité des faits vérifiés et facilement vérifiables pour quiconque sait se servir d’un ordinateur. Rohac admet qu’« il n’y a aucune preuve directe reliant le site Aeronet à la Russie », tout en suggérant qu’« il est géré par un individu ou une organisation dont les motifs sont étroitement alignés avec ceux du Kremlin ». Les raisons qu’il invoque pour justifier le lien possible sont peu convaincantes : « le contenu politique du site, le secret qui l’entoure et son apparence relativement professionnelle ». En outre, souligne Rohac, l’éditeur d’Aeronet affirme qu’il se rend parfois à Moscou pour affaires, ajoutant qu’il a « des amis en Russie. » Cela ne prouve rien et ne tiendrait pas devant un juge. Le site Areonet est clairement critique des États-Unis et de la propagande antirusse, mais cela n’implique pas systématiquement un financement russe. Il existe de nombreux organes de presse occidentaux indépendants, y compris celui-ci, qui expriment un point de vue similaire et n’ont aucun lien avec le gouvernement russe. Ce texte de Foreign Policy est typique de la chasse aux sorcières post 11-Septembre des grands médias. De nos jours si vous publiez des articles qui critiquent les politiques occidentales et contredisent le discours biaisé des médias occidentaux, vous êtes soit un « site de conspirations » ou un obscur organe de propagande du Kremlin ou de quiconque est l’ennemi du jour. Il est devenu évident pour bien des citoyens occidentaux que ceux qui lancent les accusations sont ceux qui commettent le délit. Les médias occidentaux se livrent à la propagande de guerre pour Washington depuis très longtemps et ont propagé de nombreuses théories du complot (entre bien d’autres, les armes de destruction massive de l’Irak, l’utilisation par le gouvernement syrien d’armes chimiques contre des civils, les forces de Kadhafi sur le Viagra violant des femmes libyennes). (souligné par l'auteur) Le financement étasunien de médias « indépendants » à l’étranger Alors que les grands médias occidentaux accusent souvent la Russie de financer secrètement des organes de presse contrôlés par l’État (russe) on ne parle presque pas, voire jamais, du financement étasunien de médias étrangers. Le gouvernement des États-Unis finance des médias à l’étranger et la plupart du temps brouille ses pistes en finançant de soi-disant organisations non-gouvernementales (ONG), qui à leur tour donnent des subventions à des médias étrangers alignés sur le discours dominant des médias occidentaux. Quand la Russie le fait, les médias qui reçoivent les fonds sont considérés comme étant contrôlés par l’État. Cependant, lorsque les États-Unis s’ adonnent au même exercice, le geste est présenté de cette manière très orwellienne propre à l’ Amérique comme un effort pour « développer un secteur

99 médiatique indépendant à l’étranger ». Des « médias indépendants » financés par l’État? Ça ressemble étrangement à un oxymore. Depuis 2007, le gouvernement étasunien a directement donné au moins 25,5 millions de dollars en subventions à diverses organisations étasuniennes à but non lucratif pour des projets médiatiques en Ukraine seulement. Sur 18 subventions, 14 sont allées à Internews Network. Un rapide coup d’ œil sur son site Internet montre que cette ONG est alignée sur les discours des médias traditionnels occidentaux, donc avec la politique étrangère de la Maison-Blanche. Parmi les bailleurs de fonds du réseau Internews se trouvent de nombreuses agences gouvernementales ainsi que des « fabricants de démocratie » occidentaux bien connus, à savoir des organisations engagées dans la promotion des intérêts des États-Unis à l’étranger en prétextant défendre la démocratie et les droits humains. En voici quelques-uns : Rockefeller Brothers Fund

Rockefeller Family & Associates

Rockefeller Foundation John D. and Catherine T. MacArthur Foundation

John S. and James L Knight Foundation

Google

Open Society Foundations

Omidyar Network

European Commission

Différents Ministères des affaires étrangères et organismes de développement international (Pays-Bas, Norvège, Suède, Royaume-Uni, États-Unis)

Groupe de la Banque mondiale

Freedom House

National Democratic Institute (NDI) (organisation des démocrates, à but non lucratif)

National Endowment for Democracy (NED)

Freedom House et le National Endowment for Democracy (NED) se sont avérés être des partenaires de la CIA par le passé. Comme l’explique Robert Parry, « Freedom House et le National Endowment for Democracy soulignent leur attachement à la liberté de pensée et à la démocratie, mais les deux ont coopéré avec une opération de propagande organisée par la CIA dans les années 1980, selon des documents publiés par la bibliothèque présidentielle de Ronald Reagan ». Le NED a mainte fois été lié à des « activistes » dans les pays étrangers où les gouvernements ne sont pas soumis à Washington et s’ y opposent. D’une certaine manière, le NED a remplacé la CIA. Sur sa page web, le NED affirme qu’après la Seconde Guerre mondiale, « les responsables

100 politiques américains ont recouru à des moyens clandestins en envoyant des conseillers, du matériel et des fonds pour soutenir les journaux et partis en état de siège en Europe. Lorsque l’ on a révélé vers la fin des années 1960 que certaines ONG étasuniennes recevaient du financement clandestin de la CIA pour mener un guerre d’ idées dans des forums internationaux, l’administration Johnson a conclu que ce financement devait cesser, recommandant l’établissement d’un “mécanisme public-privé” pour financer ouvertement des activités à l’étranger ». Ainsi naquit la NED. La fondation se décrit comme étant non gouvernementale même si elle est « financée en grande partie par le Congrès étasunien [...] et distribue des fonds à des organisations privées dans le but de promouvoir la démocratie à l’étranger ». Puisqu’il est bien connu et documenté que les États-Unis renversent depuis longtemps des gouvernements de gauche démocratiquement élus et appuient des dictatures à travers le monde, comme l’Arabie saoudite, la prétention de la NED « de promouvoir la démocratie à l’étranger » est absurde. Comme nous pouvons le voir dans ces articles des années 1970 et 1980, l’instauration par le président Johnson d’« un mécanisme public-privé » pour financer ouvertement des activités à l’étranger » n’a pas mis un frein à la propagande médiatique de la CIA. Rare moment de vérité dans le New York Times en 1977 “enquêtant sur le rôle de la CIA dans les efforts de propagande mondiaux, incluant Radio Free Asia.”

Article dans le Santa Cruz Sentinel le 22 septembre 1981 sur une campagne de désinformation de la CIA. « Le Centre d’aide aux médias internationaux (Center for International Media Assistance CIMA), un projet du National Endowment for Democracy, a publié plusieurs rapports annuels sur le développement des médias dans le monde entier. Le premier rapport s’appelait U.S. Public and Private Funding of Independent Media Development Abroad. (Financement étasunien public et privé voué au développement des médias indépendants à l’étranger). Le but affiché du rapport est « d’apprendre qui sont les principaux bailleurs de fonds, dans quelle partie du secteur ils se concentrent (aide directe aux médias, formation des journalistes, campagnes d’information du public, amélioration de l’environnement juridique des médias, et gestion des médias) et de connaître les opportunités d’éduquer des donateurs potentiels à propos de l’importance du développement des médias indépendants comme élément essentiel des sociétés démocratiques ». Certaines des principales conclusions du rapport de 2007 étaient les suivantes : - En 2006, le financement étasunien public et privé pour le développement des médias internationaux dépassait 142 millions de dollars; - Le financement du gouvernement étasunien s’élevait à près de 69 millions de dollars; - Les subventions d’organisations à but non lucratif soutenues par le gouvernement ’ le National Endowment for Democracy et l’US Institute of Peace ’ totalisaient 13 millions de dollars. L’Agence étasunienne pour le développement international (USAID) et le Bureau de la démocratie, des droits de l’homme et du travail rattaché au Département d’État étaient les donateurs gouvernementaux les plus importants, avec des dons respectifs de 49 684 000 dollars et 11 800 000 dollars en 2006 seulement. Le plus important donateur privé cette année-là était l’Open Society Institute avec 40 millions de dollars, suivi par la Fondation John S. et James L. Knight, avec

101 7 millions de dollars. La stratégie du gouvernement pour la période 2007-2012 détaillée dans le rapport est particulièrement intéressante. Selon le Plan stratégique du département d’État et de l’USAID pour l’exercice fiscal 2007-2012, le gouvernement ferait « progresser la liberté de presse en aidant à créer et à développer des médias indépendants [...] » L’USAID joue un rôle clé dans le financement des médias « indépendants » à l’étranger, en particulier dans l’ancienne Union soviétique: « Grâce aux efforts visant à transformer les médias contrôlés par l’État en médias indépendants dans les États post-soviétiques, l’Europe et l’Eurasie est la seule des quatre directions générales géographiques de l’USAID à avoir un expert désigné en développement des médias. » (Ibid.)

La rhétorique employée dans ce rapport constitue de la pure propagande et ne se donne même pas la peine d’être logique. Il dit clairement que l’État étasunien investit de l’argent et des ressources « visant à transformer les médias contrôlés par l’État en médias indépendants ». S’ils sont financés par l’État étasunien, comment peuvent-ils être qualifiés d’indépendants? Nous sommes portés à croire, que les médias financés par la Russie sont contrôlés par l’État alors que ceux financés par les États-Unis sont « indépendants ». Pour une raison quelconque, peut-être la raison même, dans le rapport de 2010 intitulé Le financement du gouvernement étasunien pour le développement des médias, le terme « indépendant » a été supprimé. Ce rapport précise que le financement étasunien des médias étrangers a augmenté « de façon spectaculaire » entre 2005-2010 : « Au cours des cinq dernières années, le Département d’État étasunien et l’USAID ont dépensé plus d’un demi-milliard de dollars afin de soutenir le développement des médias internationaux [...] Les budgets du Département d’État et de l’USAID pour l’exercice 2010 totalisaient plus de 47,9 milliards de dollars. Moins de 0,3 pour cent de cette somme, soit 140,7 millions de dollars, a été consacré au développement des médias. Cela représente tout de même une augmentation des dépenses de 36 pour cent, soit 37,3 millions de dollars de plus que l’exercice précédent pour le développement des médias et une hausse encore plus spectaculaire comparativement aux 68,9 millions dépensés cinq ans plus tôt ».

Source : rapport de CIMA de 2010 Le gouvernement étasunien finance même directement les médias russes (souligné par l'auteur). Par exemple, en 2011-2012 l’ USAID a donné 2 540 000 dollars en subventions pour un programme appelé « La presse écrite indépendante en Russie ». Les principaux bénéficiaires sont les organisations russes FNE et la Fondation Finformpolicy Dvl. Cela semble très peu, mais, comme nous l’avons vu plus haut, la plupart des fonds de l’État pour « le développement des médias », autrement dit pour la propagande et la subversion politique, transite par des organisations « non gouvernementales » financées par le gouvernement, telles que le NED et Freedom House, obscurcissant ainsi les origines du financement. Ces organisations n’accorderont sûrement pas de subventions aux médias qui s’opposent au discours des grands médias occidentaux. Par exemple, le rapport annuel de 2012 du NED, indique, uniquement pour la Russie, plus de 4,6 millions de dollars de financement pour divers programmes « d’accès à l’information »,

102 incluant entre autres : 74,730 dollars « Pour continuer à développer en Russie un réseau de journalisme d’investigation dans le domaine de l’environnement » et 80 000 dollars pour une organisation qui « surveillera le recours à la torture par des fonctionnaires chargés de l’application de la loi en s’appuyant sur des reportages dans la presse régionale et en offrant des consultations dans ses bureaux locaux. L’organisation fera connaître les résultats de sa surveillance sur son site Internet, à travers des ONG partenaires et dans les médias locaux et nationaux ». Si le montant dépensé par le gouvernement étasunien pour les médias « indépendants » a diminué au cours des dernières années, CIMA explique dans son rapport de 2013, Financement du gouvernement étasunien pour les médias : Tendances et stratégies , que cela est dû à « des compressions dans le financement du développement des médias associé au retrait des États-Unis en Irak et en Afghanistan en particulier, une baisse de 28 millions de 2010 à 2012 en Asie du Sud et en Asie centrale, et de 17,7 millions au Proche-Orient ». Depuis le début des rapports de CIMA, il y a eu deux hausse marquées du financement du gouvernement étasunien : « Les données indiquent une brusque hausse du financement en 2008 dans le cadre d’un investissement majeur dans la démocratie et la gouvernance en Irak ’ incluant les médias ’ et une autre en 2010 en raison d’un investissement similaire en Afghanistan. » Ces données sont très révélatrices et discréditent complètement l’idée de « médias indépendants » promue par le gouvernement étasunien et la NED. Elles montrent clairement que dans la dernière décennie, le gouvernement des États-Unis a considérablement augmenté son financement des « médias indépendants » dans les pays qu’il a illégalement envahis et occupés militairement. Comment les États-Unis peuvent-ils prétendre financer le développement des médias indépendants et « promouvoir la liberté » à l’étranger, tel que mentionné dans le rapport de 2007, lorsqu’ils donnent l’argent après avoir mené des guerres illégales contre les pays récipiendaires, tué des millions de leurs citoyens, détruit leurs infrastructures et alors qu’ils les occupent militairement? Si ce n’est pas exactement l’essence de la propagande et d’un média contrôlé par l’État, c’est quoi? Julie Lévesque »

II-les sous-ensembles français de l'oligarchie mondiale

- « Aux dîners du Siècle, l’élite du pouvoir se restaure (le Monde Diplomatique, via internet)

En France comme dans la plupart des démocraties libérales, les membres de la classe dirigeante constituent un groupe social conscient de lui et séparé des autres. Mais l’intégration à ce monde ne s’opère pas spontanément. Entamée au moment des études, elle se prolonge au sein de cercles élitistes, tel Le Siècle, et de réceptions mondaines où se coudoient les vedettes issues de divers horizons professionnels. par François Denord, Paul Lagneau-Ymonet et Sylvain Thine, février 2011 Publié aux Etats-Unis en 1956, en pleine guerre froide, L’Elite du pouvoir de Charles W. Mills a suscité d’intenses controverses. Ce livre démontrait en effet que le pays censé incarner le pluralisme démocratique était en réalité contrôlé par une étroite minorité d’individus juchés aux

103 postes de commande des plus puissantes institutions de la société moderne (Etat, grandes entreprises, armée, médias, etc.). Le sociologue reconnaissait que « l’élite du pouvoir » se laisse difficilement circonscrire : « Les hommes des sphères supérieures sont impliqués dans un ensemble de “bandes” qui se recoupent et de “cliques” unies entre elles par des liens compliqués (1). » Dans la France contemporaine, les choses sont plus simples : un mercredi par mois, vers 20 heures, l’élite du pouvoir s’attable dans les salons cossus de l’Automobile Club de France pour le dîner du Siècle. De l’aveu même de l’ancien président de cette association, on y mange plutôt mal (2). Mais qu’importent les mets et les breuvages. De l’avis d’un habitué, M. Jean-Louis Beffa, ancien président de Saint-Gobain devenu conseiller auprès de la banque Lazard, « on va aux dîners du Siècle pour le pouvoir (3) ». Non pas le pouvoir élu, l’autre — quoiqu’un large pont relie les deux : les agapes mensuelles se déroulent place de la Concorde ; l’Assemblée nationale se trouve juste de l’autre côté de la Seine.

Les « importants » autour d’une table Créé en 1944, Le Siècle n’est ni un groupe de réflexion, ni un club mondain. En favorisant un dialogue réglé entre patrons, journalistes, politiques, hauts fonctionnaires et, dans une moindre mesure, universitaires ou artistes, cette association cherche à produire du consensus plutôt qu’à constituer des antagonismes politiques. Elle réunit des gens « importants » pour ce qu’ils font, plutôt que pour les affinités ou les goûts qu’ils partageraient. L’initiative de fonder ce cénacle revient à Georges Bérard-Quélin (1917-1990), un journaliste radical-socialiste, éphémère secrétaire de rédaction en 1940 de La France au travail, un journal collaborationniste, avant d’épouser la cause de la Résistance. Homme de réseaux, « BQ », comme on le surnomme, est aussi le patron de la Société générale de presse, une agence dont le fleuron éditorial porte les mêmes initiales que lui : le Bulletin quotidien. Les fondateurs du Siècle et de la Société générale de presse se donnent pour mission de bâtir, grâce à ces deux instruments, « un pont entre des mondes qui s’ignorent trop en France (politiques, hauts fonctionnaires, journalistes, industriels, banquiers) ». D’un côté, l’association entend faire se rencontrer les puissants et participer à leur renouvellement générationnel, indépendamment des organigrammes industriels et financiers, des hiérarchies administratives ou des honneurs institués. De l’autre, le périodique a pour fonction de fournir à ces mêmes dirigeants un digest de l’actualité économique et politique. C’est sur cette base que le BQ s’impose d’abord comme la gazette coûteuse (en 2011, 25 euros par jour) d’une amicale guindée, avant que son lectorat ne s’élargisse progressivement aux rédactions, administrations et états- majors politiques et patronaux. Dans l’immédiat après-guerre, de profonds clivages fragmentent la classe dominante : résistants contre collaborateurs ou vichyssois ; patrons — libéraux ou corporatistes — discrédités contre hauts fonctionnaires planificateurs ; partis politiques désunis contre un Parti communiste au plus haut de ses résultats électoraux. Bérard-Quélin et ses associés œuvrent à réconcilier les élites, communistes exceptés. Avec un certain succès. Alors que les premiers gouvernements de la Ve République comptaient 20 % de membres du Siècle dans leurs rangs, cette proportion n’a fait que croître durant les années 1960 et 1970, pour atteindre les 58 % en 1978 (4). Depuis lors, elle oscille entre le tiers et la moitié des ministres (quelle que soit leur orientation politique), avec un pic de 72 % entre 1993 et 1995, sous le gouvernement de M. Edouard Balladur... A l’occasion de l’hommage rendu au fondateur du Siècle après son décès, son ami Pierre Moussa,

104 un inspecteur des finances reconverti dans la banque (fameux pour avoir tenté de soustraire Paribas à la nationalisation en 1982), se félicitait du chemin parcouru. Le petit cercle des années 1940-1950 a en effet progressivement intégré les principales personnalités politiques françaises (de François Mitterrand, un proche de Bérard-Quélin, à Georges Pompidou en passant par Pierre Mendès France) et a su réunir en un seul réseau grands patrons du public et du privé. « Aujourd’hui, concluait M. Moussa, pas seulement bien sûr grâce au Siècle, mais — je le pense sincèrement — en partie grâce à lui, la situation a changé totalement ; reste à entretenir cette communication entre secteurs d’activité ; reste aussi une tâche permanente, qui est de faire communiquer entre elles les générations successives. » Le Siècle rassemble désormais environ sept cents membres et invités, soigneusement cooptés par son conseil d’administration, lui-même composé d’une quinzaine de personnes renouvelées pour moitié chaque semestre. La cheville ouvrière de l’organisation s’appelle Etienne Lacour, rédacteur en chef de la Société générale de presse, où il travaille depuis une quarantaine d’années. Il a d’ailleurs remplacé Jacqueline Bérard-Quélin dans l’élaboration des plans de table. Une tâche cruciale dans une organisation où l’on ne fait que dîner : répartir plusieurs centaines de personnes sur des tables de sept ou huit, de telle sorte que tous les secteurs d’activité soient représentés et sans froisser les susceptibilités individuelles, relève de la pure alchimie sociale. On ne demande d’ailleurs pas à entrer au Siècle : on y est invité, grâce au parrainage de deux membres au moins. Le conseil d’administration ne vote l’admission définitive, à la majorité qualifiée, qu’au terme d’une période probatoire d’un ou deux ans. Dès lors, l’enjeu pour le futur impétrant consiste à se montrer, aux dîners, courtois, informé, intéressé, affable, capable de mots d’esprit et discret — les propos tenus à table ne doivent pas être divulgués.

Unité de genre, conformité de classe Être membre du Siècle témoigne, d’abord, d’une insertion réussie au sein de la classe dominante. Aux côtés des patrons du CAC 40, des responsables des bureaucraties d’État et des bobardiers de renom, l’association regorge de personnalités de droite, comme MM. Nicolas Sarkozy, François Fillon, Jean-François Copé, respectivement chef de l’Etat, premier ministre et secrétaire général du parti majoritaire. La gauche parlementaire n’est cependant pas en reste. « J’aime beaucoup le Siècle, dit ainsi Mme Martine Aubry. J’ai cessé d’y aller en 1997 lorsque je suis devenue ministre. C’était très intéressant. Je me retrouvais à des tables avec des gens extrêmement différents (...). L’initiative peut être perçue comme totalement élitiste, mais cela reste un vrai lieu de rencontre. J’y ai beaucoup appris. Car, pour moi, la vraie intelligence, c’est d’essayer de comprendre des gens qui ont une logique différente (5). » L’ancien bras droit de M. Jacques Delors, M. Pascal Lamy, actuel directeur général de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), explique sa présence par une forme d’entrisme : « Il est important que les hommes de gauche ne laissent pas les décideurs être en contact seulement avec la droite. » D’autres, comme M. Pierre Moscovici, reconnaissent sans détour que Le Siècle se révèle « un réseau social très influent (6) ». Plutôt de droite, de centre ou de centre gauche ? En 1995, quelques mois avant le plus important conflit social survenu en France depuis 1968, le conseil d’administration du Siècle faisait figure de boudoir paisible. Mme Aubry y voisinait avec M. Jérôme Monod, grand patron connu pour sa proximité avec MM. Jacques Chirac et Alain Juppé ; Pierre Rosanvallon, l’ancien théoricien de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) devenu secrétaire général de la Fondation Saint-Simon, y bavardait avec M. Jean-Claude Casanova, inlassable promoteur du giscardo-barrisme ; Olivier Duhamel, le médiatique professeur de droit public, y côtoyait M. Didier

105 Pineau-Valencienne, le très libéral président-directeur général de Schneider. Si l’on s’intéresse non plus à l’étiquette politique des membres du Siècle mais à leurs caractéristiques sociales, on saisit alors une image fort différente de celle officiellement promue. Plutôt qu’un « tremplin pour des éléments brillants que la naissance ou le milieu ne prédisposent pas à se constituer un tissu de relations dans les antichambres du pouvoir (7) », l’association fait surtout se rencontrer les sachems des affaires, publiques et privées. On s’y félicite d’avoir repéré Mmes Rachida Dati ou Fadela Amara, ou d’avoir perçu précocement les talents de M. Stéphane Courbit, l’ancien patron d’Endemol France, qui n’a pas fréquenté des écoles aussi prestigieuses que les autres convives. Mais l’unité de genre, l’uniformité d’âge, la monotonie des diplômes scolaires, l’homogénéité des origines et la conformité de classe restent absolument confondantes. Les membres du Siècle sont très majoritairement des hommes (85 %), âgés de plus de 55 ans (80 %), fils de patrons, de hauts fonctionnaires ou de professionnels libéraux (55 %), diplômés d’un institut d’études politiques (50 %) et, pour nombre d’entre eux, énarques (40 %), quand ils n’ont pas usé les bancs des grandes écoles d’ingénieurs ou de commerce (25 %). Le Siècle n’est cependant pas un simple lieu de rencontre où chacun de ces happy few ferait un pas pour sortir de son monde et côtoyer ses pairs en pouvoir. De la société de cour au Commissariat général du Plan, « l’élite » a toujours sécrété des instances de coordination. Mais la mise en relation qui s’y effectue n’est jamais réciproque ; elle dépend des rapports de forces entre les différentes fractions de la classe dominante. Quand ils vont au Siècle, certains transgressent plus que d’autres : les rares syndicalistes attablés avec des patrons ; les journalistes banquetant avec les politiciens préférés de leurs employeurs (et refusant d’informer le public de ces rencontres...) ; des hommes et quelques femmes politiques commensaux de leurs adversaires électoraux. En revanche, l’industriel ou le banquier qui bavarde avec un journaliste célèbre, entreprend une figure de la majorité comme de l’opposition, échange avec un syndicaliste, voire devise avec un haut fonctionnaire qui, dans quelques années peut-être, deviendra l’un de ses collaborateurs ne se commet pas. Il ne sacrifie rien. Il a même tout à gagner à la domestication de représentants d’univers sociaux qui se sont constitués historiquement contre les puissances de l’argent (syndicalistes et milieux intellectuels) ou se doivent, si l’on en croit les déclarations de principe, d’en être indépendants (journalistes, hauts fonctionnaires et personnel politique). Malgré le halo de mystère qui nimbe ses rencontres, Le Siècle n’est pas une assemblée de comploteurs. Rien de crucial ne s’y conclut et les exemples de transactions nouées entre deux coups de fourchette sont si peu nombreux que la presse les répète inlassablement : « On raconte (...) que la révolution de palais suscitée par le transfert de Franz-Olivier Giesbert du Nouvel Obs au Figaro, en septembre 1988, se noua lors d’un dîner du Siècle, en présence de Philippe Villin, alors bras droit du papivore Robert Hersant. On dit encore que l’entrée d’Édouard de Rothschild au capital de Libération s’est jouée place de la Concorde (8). » Les décisions capitales pour le pays se prennent dans les instances internationales ou communautaires, à l’Assemblée nationale et au Sénat, au conseil des ministres et dans les conseils d’administration. En revanche, elles font suite à des rencontres et à des conversations. Elles impliquent une manière commune de poser les problèmes politiques ou d’appréhender la marche des affaires privées, que Le Siècle facilite, en marge des instances légitimes de décision qui fondent une véritable démocratie économique et sociale. (souligné par l'auteur) A l’automne 2010, des entrefilets dans les journaux ont annoncé l’accession de Mme Nicole Notat à la présidence du Siècle, en remplacement de M. Denis Kessler. L’ancienne secrétaire générale de la CFDT, reconvertie dans le conseil auprès de grandes entreprises, succède ainsi à un ancien dirigeant du Mouvement des entreprises de France (Medef), fossoyeur assumé des conquêtes

106 sociales promues par le Conseil national de la Résistance (9). Le croisement de leurs trajectoires met au jour la fonction principale du Siècle : réunir les élites pour qu’elles œuvrent de concert à la reproduction de l’ordre social. Et M. Kessler d’ironiser : « Nicole Notat me succède. Après un patron, une syndicaliste. La preuve d’une certaine ouverture, non (10) ? (1) Charles W. Mills, L’Elite du pouvoir, Maspero, Paris, 1969, p. 16. (2) Denis Kessler, « Le Siècle face à ses injustes critiques », Le Monde, 16 décembre 2010. (3) Cité par Jean-François Polo dans « Les patrons et l’opéra, une relation particulière », Les Echos, Paris, 19-20 novembre 2010. (4) Jean Bothorel, La République mondaine, essai sur le giscardisme, Grasset, Paris, 1979, p. 54. (5) Les Echos, 21 mars 2008. (6) Le Parisien - Aujourd’hui en France, 22 août 2010. (7) Brochure commandée par le conseil d’administration du Siècle à l’historienne Agnès Chauveau, 31 décembre 2000, p. 14, reprise par Anne Martin-Fugier, « Le Siècle (1944-2004), un exemple de sociabilité des élites », Vingtième Siècle, n° 81, janvier-mars 2004. (8) Stratégies, 14 avril 2005. (9) Challenges, 4 octobre 2007. (10) L’Expansion, 1er décembre 2010.

-Dîner du Siècle : La liste des participants dévoilée vendredi 30 mai 2014, par Comité Valmy Révélation. Mercredi 25 février, une liste confidentielle des membres de l’association « Le Siècle » a été mise en ligne depuis les Etats-Unis. Jusqu’à maintenant, ce club élitiste réunissant le gratin de la politique, des affaires et des médias avait tenté de maintenir le secret sur l’identité de ses adhérents. En vain. A l’ère numérique, le secret absolu n’est plus possible. C’est ce que vont comprendre, à leur détriment, les participants d’un rituel mondain et ultra-select, dénommé le « dîner du Siècle ». Une fois par mois, à Paris, place de la Concorde, l’élite française se réunit en toute discrétion. Depuis hier, cette précaution est devenue inepte : Cryptome.org -un site américain spécialisé, à l’instar de Wikileaks, dans la publication de documents sensibles- a mis en ligne la liste complète des participants au dîner du « Siècle » qui s’est tenu le 27 janvier 2010. Une controverse, liée à l’opacité et au but exact de ces réunions, subsiste depuis l’automne : suite à l’appel du réalisateur Pierre Carles, des rassemblements de protestation se tiennent chaque mois face à l’établissement dans lequel se réunissent les convives triés sur le volet. Au regard des nombreux témoignages rapportés par des anciens membres, une chose paraît certaine : fondé en 1944, le « Siècle » n’est ni une loge maçonnique complotant dans l’ombre ni un simple rassemblement huppé et sans conséquences. Le défaut de transparence, la mise en place d’un circuit parallèle de pouvoir échappant à tout examen démocratique et la connivence cultivée entre gens influents sont les principaux griefs adressés à cette association. (souligné par l'auteur) Quatre mois plus tard, le militantisme anti-élitaire s’est émoussé. Le dîner du Siècle qui s’est déroulé mercredi 23 février, n’a pas connu l’opposition affichée lors des mois précédents. Outre le temps pluvieux, sans doute faut-il y voir la conséquence de la féroce répression policière déployée à

107 l’occasion des rassemblements de janvier et de novembre. De nombreux manifestants avaient rapidement été interpellés et embarqués par les forces de sécurité.

Une nouvelle aristocratie Le site Cryptome a dévoilé mercredi son précieux document, au jour même où se tenait, sans véritable contestation populaire, la dernière réunion du Siècle. Ce pdf de 98 pages, compressé pour téléchargement en fichier zip, est le bottin mondain par excellence : les noms des dizaines de personnalités ayant participé au dîner de janvier 2010, ainsi que leurs coordonnées professionnelles, y figurent. Les adresses privées de domicile ont été par contre gommées. But invoqué, en préambule du texte, par la mystérieuse source anonyme ? Donner la possibilité aux citoyens hostiles à cette pratique d’interpeller directement, par téléphone ou email, ses adeptes. La démarche se présente ici comme une contre-attaque : « La publication de la liste facilitera les protestations à l’encontre des dirigeants et de ceux qui contribuent à détruire l’héritage de la Résistance : notre sécurité sociale, notre système de pensions, nos services publics ». Si le document semble authentique, il confirme d’ores et déjà ce que l’on devinait à propos du « Siècle » : la société civile, les partis politiques radicaux et les « minorités visibles » n’y sont quasiment pas représentés. Une caste à part, secrètement affairiste et déconnectée de ce qui constitue pourtant la diversité –politique, économique et culturelle- de la société française. Liste non exhaustive des noms figurant dans la liste du dîner du 27 janvier 2010 et dans celle, également affichée, des anciens membres du conseil d’administration du Siècle : En politique : Nicole Notat (nouvelle présidente du Siècle), Jérôme Monod (ex-conseiller à l’Élysée), Martine Aubry (PS), Anne-Marie Idrac (ex-secrétaire d’Etat au commerce), Pascal Lamy (OMC), Hubert Védrine (PS), François Baroin (porte-parole du gouvernement et ministre du Budget), Jean-Michel Berard (préfet), Marguerite Berard-Andrieu (conseillère technique à l’Élysée ), Xavier Bertrand (ministre de l’Emploi), Jean-Marie Cavada (eurodéputé), Olivier Dassault (député UMP), Rachida Dati (eurodéputé), Tony Dreyfus (député PS), Jean-Paul Faugère (directeur de cabinet du Premier ministre), Jean-Pierre Fourcade (sénateur UMP), Philippe Galli (préfet), Michel Gaudin (préfet de police de Paris), Hervé Gaymard (député UMP), Elisabeth Guigou (député PS), Hubert Haenel (sénateur UMP) , Christian Jacob (pdt du groupe parlementaire UMP), Pierre Joxe (PS, membre du Conseil Constitutionnel), Anne-Marie Lizin (sénatrice belge), Hervé Mariton (député UMP), Pierre Méhaignerie (député UMP), Catherine Nay (conseillère à l’Élysée), Françoise de Panafieu (député UMP), Pierre Steinmetz (membre du Conseil Constitutionnel), Henri Weber (PS, eurodéputé), Eric Woerth (alors ministre du Budget). Dans le domaine médiatique et culturel : Marie-Louise Antoni (Le Monde), Olivier Nora (Grasset), Louis Schweitzer (Le Monde), Nicolas Baverez (Le Point, Le Monde), Jacques Attali, Véronique Cayla (Arte), Michèle Cotta (ex-France 2), Richard Descoings (Sciences Po), Denis Jeambar (éditions du Seuil, Marianne, IPJ), Alain Minc, Denis Olivennes (Europe 1, alors au Nouvel Obs), Alexandre Adler, Blandine Kriegel (philosophe), Pierre Assouline, Christopher Baldelli (RTL), Alexandre Bompard (Fnac, alors à Europe 1), Stéphane Boujnah (membre fondateur de SOS Racisme, dirigeant à la Deutsche Bank et à la Deutsche Securities Algeria), Takis Cadilis (Lagardère Entertainment), Monique Canto-Sperber (Ecole Normale Supérieure), Emmanuel Chain (producteur Tv), Teresa Cremisi (Flammarion), Axel Duroux (ex-TF1 et RTL), Bernard Fixot (éditions XO), Alain Genestar (Polka Magazine, ex-Paris Match) Antoine Herouard (secrétaire général de la Conférence des évêques de France) Emmanuel Hoog (INA), Serge July (ex-Libération), Julien Kouchner (CAPA), Pierre Louette (AFP), Rémy Pflimlin (France Télévisions), Sylvie Pierre-Brossolette (Le Point), Henri Pigeat (CFJ), PPDA, David Pujadas,

108 Jean-Marie Rouart (Paris Match), Laurent Solly (TF1), Didier Quillot (Lagardère, Canal+), Nicolas de Tavernost (M6), Thomas Valentin (M6), Gérard Unger (LICRA), Lionel Zinsou (Libération /Rothschild Group). En vrac : Jean Veil (avocat de Jacques Chirac), Denis Kessler (ex-vice-pdt du MEDEF), Jean-Pierre Jouyet (AMF), Marie-Hélène Berard (trésorière de la chambre de commerce France- Israël et de la Fondation Chirac), l’Allemand Joachim Bitterlich (Veolia Environnement), Christian de Boissieu (conseiller économique auprès de Matignon), Jean-Paul Costa (pdt de la Cour européenne des droits de l’homme), Anne-Marie Couderc (Lagardère Active), Denis Delmas (pdt de TNS Sofres), Jérôme Jaffré (CECOP), Philippe Delmas (ex-vice-pdt Airbus), Frank Esser (pdg SFR), Louis Gallois (pdt exécutif EADS), Benoît Genuini (médiateur national de Pôle emploi), Philippe Ingall- Montagnier (procureur général près la cour d’appel de Versailles), Georges Kiejman (avocat), Bruno Laserre (pdt de l’Autorité de la concurrence), Jean-Bernard Lévy (pdt de Vivendi), Thierry de Montbrial (IFRI), Christian Noyer (gouverneur de la Banque de France), Michel Prada (ex- AMF). liste non exhaustive des participants au "dîner du Siècle" qui s’est tenu le 27 janvier 2010. Mise en ligne CV : mars 2011

• 6 mars 2011 16:17, par Comité Valmy • A Noter encore que Wikipedia nous indique que Jean-Christophe Le Duigou (CGT) fait également parie de cette coterie : Jean-Christophe Le Duigou est un syndicaliste français, un des principaux dirigeants de la CGT aux côtés de Bernard Thibaut. Né en 1948, il est titulaire d’une maîtrise de gestion à l’université de Rennes et d’un diplôme d’études supérieures spécialisées en informatique. Ancien élève de l’École nationale des impôts, il a été secrétaire national du Syndicat des agents de la direction générale des Impôts CGT de 1978 à 1982, puis secrétaire général de la Fédération des Finances CGT de 1982 à 1994. En 1995, il est nommé directeur du Centre confédéral CGT d’études économiques et sociales[1]. De février 1999 à décembre 2009, il est secrétaire national de la CGT, membre du bureau confédéral, chargé des questions économiques et des retraites. Membre du Conseil économique et social de 1982 à 2004, il est membre du Conseil d’orientation des retraites depuis 2000. A ce titre, il était le principal négociateur de la CGT lors des négociations sur les retraites. Ne s’arc-boutant pas les 37,5 années de cotisation, il est décrié par une fraction de la base CGT. Il a cosigné en 1999 un livre avec le responsable CFDT du dossier retraites Jean-Marie Toulisse : L’Avenir des retraites (éd. de l’Atelier). S’il a quitté le bureau confédéral au Congrès de 2009, il rejoint officiellement Bernard Thibaut comme conseiller spécial[2]. Il a co-fondé, en 1991, le « lobby d’intérêt général » Confrontations Europe où il côtoie Jean Gandois (ex-n°1 du CNPF, ancêtre du MEDEF), Jean Peyrelevade (ancien PDG du Crédit Lyonnais), Michel Pébereau (PDG de BNP-Paribas), Franck Riboud (PDG de Danone), Francis Mer (ex-PDG d’Usinor, ministre de l’Economie de Raffarin)[3]. (...)

Source :http:

109 Pour continuer dans la description de cette réalité « aristocratique » qui ne se cache pas, poursuivons ce « voyage initiatique » :

-Parade de l’oligarchie à Saint-Germain-des-Prés par Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, février 2011 (Monde diplomatique via internet) Fondée en 1990 par Bernard-Henri Lévy, la revue La Règle du Jeu a fêté à la fin de 2010 ses vingt ans au Flore, le café que fréquentèrent autrefois Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre, en face l’église Saint-Germain-des-Prés. Les temps ont bien changé et le quartier aussi. Le grand luxe y a détrôné l’existentialisme. Pour cet anniversaire, le Flore a accueilli de nombreux invités. Une foule disparate où l’on trouvait des intellectuels certifiés, des journalistes établis et quelques hommes politiques importants. Une oligarchie des lettres et des arts, de la presse et des médias bien plus que des affaires et de la politique. Mais une oligarchie non dépourvue de pouvoir en ces temps de communication de masse. Toutefois, dans les murs vénérables du Flore, l’ambiance n’est pas aux affaires ni aux stratégies politiques. La foule qui s’y presse manifeste l’aisance et l’enjouement d’une société mondaine où les retrouvailles ont toujours le goût agréable de complicités anciennes, d’un entre-soi fort engageant, d’une réunion de famille où les nouvelles vont bon train et où les animosités passent au second plan d’une entente affichée, garante de l’avenir. L’excellence des invités est en harmonie avec cette commémoration festive de la naissance d’une revue intellectuelle, littéraire et politique. Les buffets sont somptueux, le champagne coule à flots dans une générosité qui n’a d’égale que la classe dont font preuve les invités. Les pouvoirs ici mis en commun ne couvrent pas le même champ que ceux rassemblés dans les grands cercles parisiens, mais ils les complètent. (souligné par l'auteur). Le pouvoir est dépendant de ces rassemblements qui, sous leur aspect mondain et futile, concentrent les agents sociaux qui ont la capacité, et même le rôle, de prendre des décisions, de définir des stratégies, d’orienter la vie culturelle et politique. L’anniversaire de la revue de Bernard-Henri Lévy met en évidence un capital culturel de grande ampleur par la présence d’une « intelligentsia » dont les qualités peuvent être éventuellement discutées, mais qui représente un pouvoir considérable dans les structures de production des biens culturels. Les gens de lettres étaient foison, depuis Philippe Sollers jusqu’à Milan Kundera en passant par Christine Angot. Belle brochette pour l’information écrite avec Laurent Joffrin, directeur de Libération, Etienne Mougeotte, qui occupe le même poste au Figaro, Franz-Olivier Giesbert, qui dirige Le Point, ou encore Maurice Szafran, directeur de Marianne, et Nicolas Brimo, administrateur délégué au Canard enchaîné. Côté ondes hertziennes, un choix de gourmet : Jean-Luc Hees et Philippe Val, respectivement présidents du groupe Radio France et de France Inter. Pour la télévision, on citera Michèle Cotta, ancienne directrice de France 2, Thierry Ardisson et Marc-Olivier Fogiel, sans oublier le principal intéressé de la soirée, Bernard-Henri Lévy, qui, entre autres liens avec les chaînes publiques, a été reconduit en 2009, pour cinq ans, et à la demande de Nicolas Sarkozy, à la présidence du conseil de surveillance d’Arte, où il siège depuis 1993. Mais l’hôte du Flore n’est pas sans contacts avec le monde des affaires. Bernard-Henri Lévy lui- même est, selon le Who’s Who, le fils d’un président de société. L’entreprise de négoce de bois de la famille Lévy, la Becob, a été rachetée en 1997 par M.François Pinault. Les relations entre le philosophe et l’homme d’affaires semblent cordiales. Dans son rôle de mécène, M. Pinault n’oublie pas de soutenir les affaires de Bernard-Henri Lévy, dont la production de films. Celui-ci tient une chronique régulière dans Le Point, propriété de M. Pinault. M. Xavier Niel, actionnaire majoritaire

110 et dirigeant historique du groupe Iliad (Free), douzième fortune professionnelle de France selon Challenges, représentait également le patronat lié aux médias et à la communication. L’un des deux autres propriétaires du Monde, M. Pierre Bergé, ancien président-directeur général d’Yves Saint Laurent, participait également à la soirée. Une telle fête ne pouvait être celle de l’oligarchie sans que le monde de la politique y soit représenté. Les rigueurs de l’hiver n’ont pas empêché Mme , MM. Bruno Lemaire (Union pour un mouvement populaire), (Parti socialiste), François Bayrou (Mouvement démocrate) et Hubert Védrine (ancien ministre des affaires étrangères qui avait commandé à Bernard-Henri Lévy un rapport sur l’Afghanistan) de rejoindre leurs amis à Saint- Germain-des-Prés. Au Flore, les invités étaient trop nombreux pour se connaître tous personnellement. Or l’occasion permet d’étoffer son carnet d’adresses, puisque de tels raouts sont là pour conforter le capital social. C’est aussi le moment de renforcer les liens qui unissent les sous-ensembles de l’oligarchie les uns aux autres, celui des affaires avec ceux de la culture et de la politique. L’oligarchie est l’ensemble de tous ces réseaux, de ces partitions de la haute société, touchant aux domaines les plus divers de l’activité sociale (souligné par l'auteur). Dans une complicité enjouée qui subsume chacune de ces fractions dans la classe grande bourgeoise. (...) Les soirées de la grande bourgeoisie des affaires et de la politique se déroulent dans les beaux quartiers traditionnels. Dans les cercles, Union interalliée, Automobile ou Jockey Club, ou les salons de tel ou tel palace du 8e arrondissement. La cooptation des invités y est plus stricte que pour la soirée de Lévy au Flore. Mais le principe est le même : regrouper les élites, en faisant varier leurs champs d’activité économique et sociale. Et aussi leurs sensibilités politiques. L’unité idéologique des membres dans les grands cercles parisiens, très majoritairement de droite, contraste avec un certain brouillage des frontières politiques au Flore, où certains invités, tels MM. Jack Lang, Laurent Fabius ou Arnaud Montebourg, se revendiquent d’une gauche diverse et plurielle. Cette hétérogénéité ne doit pas faire illusion. Si la classe dominante présente un large éventail d’opinions, elle fait preuve d’un attachement sans faille au capitalisme, garant de ses revenus confortables. La présence de courants plus ou moins soucieux de social ne remet pas en cause le système financier et la droite conservatrice peut tolérer une gauche modérée qui ne menace pas ses intérêts fondamentaux. S’agit-il bien encore d’une « gauche », ou plutôt d’une alternative à la droite déconsidérée, aujourd’hui, par un président de la République qui n’a pas encore revêtu les habits de sa fonction ? Certaines des personnalités de cette « gauche » modérée sont proches de M. Dominique Strauss-Kahn. M. Védrine est membre du conseil d’administration de Louis Vuitton Moët Hennessy (LVMH), le groupe contrôlé par M. Bernard Arnault. L’oligarchie, de droite comme de gauche, bien que traversée par des inflexions professionnelles et idéologiques, reste solidaire et unie dans la défense de ses intérêts (souligné par l'auteur). La fête du Flore fait penser à la société de cour analysée par Norbert Elias. « Par l’étiquette, écrivait-il, la société de cour procède à son autoreprésentation, chacun se distinguant de l’autre, tous ensemble se distinguant des personnes étrangères au groupe, chacun et tous ensemble s’administrant la preuve de la valeur absolue de son existence. » Les mondanités à l’occasion d’anniversaires, de mariages ou tout simplement de dîners, cocktails, vernissages et autres premières d’opéra jouent un rôle dans la mobilisation de la classe dominante dans ses différentes composantes. L’ironie dont les dominés, qu’ils appartiennent aux classes moyennes ou populaires, gratifient fréquemment ces mises en scène de l’oligarchie exprime en

111 réalité leur refus d’une position dominée. Mais cette dénégation par la dérision interdit de prendre la mesure de tout le bénéfice social qu’apporte la participation à ces grand-messes de la bourgeoisie, nécessaires au fonctionnement collectiviste de ceux qui concentrent les richesses et les pouvoirs. Rien de bien neuf dans cette brillante réunion au Flore. Sauf sa visibilité, largement amplifiée par la publication d’un compte rendu détaillé de la soirée dans la revue dont on fêtait l’anniversaire. Publié sur Internet, en accès libre, il comprenait la liste des invités, rendue ainsi accessible à un large public, comme ce fut le cas pour la fête du Fouquet’s le 6 mai 2007, à l’occasion de l’élection de M. Nicolas Sarkozy. L’argent décomplexé affiche ses victoires et sa santé. La classe dominante s’expose avec une ostentation que la vieille richesse prenait soin d’éviter. La visibilité des rouages du pouvoir montre des dominants conquérants et assurés de leur avenir, la guerre des classes dont parle l’un d’entre eux, M. Warren Buffett, leur semblant définitivement gagnée. Mais la crise financière et le rejet de cette société dont les inégalités sont devenues insupportables remettent en cause, une fois de plus, cet exhibitionnisme de la domination et laissent présager une nouvelle phase de discrétion prudente. Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot Sociologues. Dernier ouvrage paru : Le Président des riches, Zones,

« Paris Match » raconte la soirée

Pour comprendre comment l’anniversaire d’une revue de « littérature, philosophie, politique, arts » bascule dans la chronique mondaine, il suffit d’écouter Catherine Schwaab, rédactrice en chef à Paris Match, décrire les agapes sur le site de l’hebdomadaire (1). février 2011 « Hier soir, Bernard Henri Lévy fêtait les vingt ans de La Règle du jeu, qui est une revue politique et sociologique dans laquelle il écrit, dans laquelle il a soutenu Sakineh, l’Iranienne... Il fêtait donc les vingt ans de cette revue au Flore, qui était dix fois trop petit, dix fois... cent mille fois trop petit pour accueillir tous les invités, incroyables, qui se sont succédé jusqu’à 3 heures du matin. Il y avait Roman Polanski qui était à l’étage avec Arielle Dombasle, et qui est tombé dans les bras de Yann Moix, car Moix a écrit un livre sur l’horreur, l’affreuse mésaventure qui lui est arrivée et sa garde à vue (2). Le livre s’appelle La Meute, Polanski l’a beaucoup remercié ; c’était assez émouvant de les voir tous les deux faire connaissance... Il y avait la vieille bande de Bernard-Henri Lévy donc, [l’écrivain et éditeur] Jean-Paul Enthoven, le peintre Jacques Martinez, beaucoup de jolies filles, les amies de Lévy et toutes celles qui frétillent régulièrement autour de lui. En matière de très jolies filles, il y avait Arielle Dombasle à l’étage (…) habillée d’une très jolie robe bleu marine, sexy avec sa queue de cheval ; elle était ravissante. A la fin, la foule s’est un petit peu clairsemée, mais il a fallu attendre très, très longtemps, car, autour de minuit, on n’arrivait pas à bouger à l’intérieur du Flore. Les serveurs — ils étaient une douzaine — passaient avec des plateaux, avec des coupes de champagne, qu’ils distribuaient ; le champagne a quand même coulé jusqu’à la fin de la soirée et je sais que Bernard-Henri Lévy leur a offert 100 euros à chacun, car il les a remerciés d’avoir été aussi stoïques. Et pour terminer, tout le monde, enfin, ceux qui restaient sont partis au Raphaël, où la soirée s’est prolongée jusqu’à

112 5 heures du matin (...).

(1) « BHL fait exploser le Flore ! », ParisMatch.com, 1er décembre 2010. (2) Roman Polanski est accusé par la justice américaine du viol d’une mineure en 1977. Il a été incarcéré en Suisse à l’automne 2010.

Source principale : Oumma.com, Hicham Hamza //fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Christophe_Le_Duigou

III-Quelques « grandes figures » médiatiques de l'atlantisme On peut assimiler les personnalités atlantistes à des néoconservateurs à la française, qui se reconnaissent dans les évolutions économiques juridiques et sociétales qui prévalent au Etats Unis et donc dans le monde économique et financier mondial ainsi que dans la vision géostratégique de Washington. Elles font généralement partie du gratin mondain qui a éclos à Paris.

-Bernard-Henri Lévy (source Wikipedia-extraits)

(...) Il est le fils d'André Lévy, qui à 18 ans s'est engagé pour la défense de l'Espagne républicaine2, et de Dina Siboni. Il a un frère Philippe et une sœur, Véronique, convertie au catholicisme en 20133 et auteur du livre Montre-moi ton visage4. Après avoir passé plusieurs années au Maroc, alors protectorat français, sa famille s'installe en France, à Neuilly-sur-Seine, en 1954. En 1946, son père s'installe à Casablanca dans le quartier d' Anfa 5 et fonde au Maroc6 la Becob, une société d’importation de bois exotiques africains et de résineux (de Finlande, d'URSS ou de Roumanie)7, rachetée par le groupe Pinault-Printemps-Redoute en 197 8 . Après la vente de l'entreprise, Bernard-Henri Lévy est resté actionnaire et administrateur de plusieurs sociétés. Il est à la tête de la société civile immobilière Finatrois. (...) En 1996, le magazine économique Challenges classe la famille Lévy comme 187e plus grosse fortune française avec 455 millions de francs10. (...)

L'École normale supérieure (1968-1971) En 1968, il est reçu à l’École normale supérieure de la rue d’Ulm où il a comme professeurs de philosophie Jacques Derrida et Louis Althusser. Il publie un premier article dans la revue Les Temps modernes intitulé « Mexique, nationalisation de l'impérialisme » à la suite d'un séjour au Mexique en 1969. (...)

113 Les débuts (1971-1976) En 1971, il est reçu à l’agrégation de philosophie13. En septembre 1971, il écrit dans Combat un long reportage consacré à l'Irlande du Nord ainsi qu'une série d'articles sur le monde paysan français ; dans une problématique maoïste, il montre comment la lutte des classes opère dans les campagnes françaises. Parrainé par Charles Bettelheim, professeur d’économie proche de Louis Althusser, il voyage dans le sous-continent indien, plus spécialement au Bangladesh durant la guerre de libération contre le Pakistan. À son retour, en mai 1973, il écrit son premier livre : Bangla-Desh Nationalisme dans la révolution.(...) De retour en France, il est nommé chargé de cours à l’université de , où il enseigne l’épistémologie. En octobre 1974, il crée la collection « Figures » chez Grasset, inaugurée par des livres de Jean- Paul Dollé et de Philippe Nemo. (...) Il fait partie jusqu’en 1976 des conseillers de François Mitterrand au sein du « Groupe des Experts » où il siège en compagnie de personnalités politiques comme Michel Rocard, Laurent Fabius ou Édith Cresson. (...)

Les « Nouveaux Philosophes » Article détaillé : Nouveaux philosophes.

La polémique autour d'André Glucksmann Le 30 juin 1975, dans Le Nouvel Observateur, Bernard-Henri Lévy salue la parution aux éditions du Seuil de La Cuisinière et le mangeur d'hommes d'André Glucksmann, qui établit un parallèle entre le nazisme et le stalinisme, en attribuant à Marx la responsabilité du Goulag. Issu de la mouvance maoïste et rompant avec elle, Glucksmann appelle à entreprendre une critique de fond du marxisme, à partir d’une réflexion sur le totalitarisme, (...) Glucksmann rejoint Lévy chez Grasset, où se forme un courant philosophique représenté par des auteurs très différents les uns des autres – Christian Jambet, Guy Lardreau, Maurice Clavel , etc., – mais qui ne se reconnaissent tous à leur opposition au schéma totalitaire, jusqu’au cœur de la philosophie quand elle prétend détenir le pouvoir de changer radicalement le monde, et à la nécessité d’envisager une nouvelle perspective de la pensée.16 (...)

L'émergence du concept (…) Le 9 mai 1977, dans un article intitulé La grande colère des faits, consacré aux Maîtres Penseurs, l'ouvrage d’André Glucksmann qui va bientôt paraître, Michel Foucault constate : « Le goulag, toute une gauche a voulu l’expliquer, sinon comme les guerres, par la théorie de l'histoire, du moins par l’histoire de la théorie. Massacres, oui, oui ; mais c’était une affreuse erreur. Reprenez donc Marx ou Lénine, comparez avec Staline, et vous verrez bien où celui-ci s’est trompé. Tant de morts, c’est évident, ne pouvaient provenir que d’une faute de lecture. On pouvait le prévoir : le stalinisme-erreur a été l'un des principaux agents de ce retour au marxisme-vérité, au marxisme-texte auquel on a assisté pendant les années 1960. Contre Staline, n’écoutez pas les victimes, elles

114 n’auraient que leurs supplices à raconter. Relisez les théoriciens; eux vous diront la vérité du vrai17. » (...)

C'est à partir de ces bases que se construit la nouvelle philosophie. Au-delà de la remise en cause de la responsabilité des philosophes dans l'histoire, il s'agit de questionner le désir de faire la révolution – non pas une révolution, mais la révolution, radicale, finale, totale – pour en étudier les tenants et les aboutissants, jusque dans ses effets les plus concrets19.

La Barbarie à visage humain (1977) (…) Le 27 mai 1977, Bernard Pivot convie sur le plateau de l'émission Apostrophes, Bernard-Henri Lévy et André Glucksmann, pour débattre de la question : « Les nouveaux philosophes sont-ils de droite ou de gauche ? » Sont également invités Maurice Clavel, qui soutient leurs thèses, et François Aubral et Xavier Delcourt, qui s’y opposent. Le débat fait connaître au grand public les nouveaux philosophes.

Le Testament de Dieu (1979) Article détaillé : Le Testament de Dieu.

Le livre (…) La critique des erreurs historiques par Pierre Vidal-Naquet sert à Cornelius Castoriadis pour relever « l'imposture » philosophique du « nouveau philosophe » proclamé tel par le numéro « historique » des Nouvelles littéraires. Castoriadis dénonce dans Le Testament de Dieu des objectifs inhérents au souci du profit financier et de l’intérêt personnel : « Que l’industrie des médias fasse son profit comme elle peut, c’est, dans le système institué, logique : son affaire, c’est les affaires. Qu’elle trouve des scribes sans scrupule pour jouer ce jeu n’est pas étonnant non plus. Mais tout cela a encore une autre condition de possibilité : l’attitude du public. Les « auteurs » et leurs promoteurs fabriquent et vendent de la camelote. Mais le public l’achète – et n’y voit que de la camelote, des fast-foods. Loin de fournir un motif de consolation, cela traduit une dégradation catastrophique, et qui risque de devenir irréversible, de la relation du public à l’écrit. Plus les gens lisent, moins ils lisent. Ils lisent les livres qu’on leur présente comme « philosophiques » comme ils lisent les romans policiers. En un sens, certes, ils n’ont pas tort. Mais, en un autre sens, ils désapprennent à lire, à réfléchir, à critiquer. Ils se mettent simplement au courant, comme l’écrivait L’Obs il y a quelques semaines, du « débat le plus chic de la saison »31. »

L'historien Gérard Noiriel considère que les « nouveaux philosophes » sont des personnes « possédant les titres requis pour pouvoir être considérés comme des « penseurs » (normaliens et agrégés de philosophie), mais davantage attirés par le journalisme que par la recherche, [qui] se lancent dans la publication d'essais grand public qui rencontrent d'emblée un fort succès dans les médias »32. Il estime que « ce n'est évidemment pas la profondeur de leur pensée qui explique [leur] succès médiatique [mais le] fait que les thèses anticommunistes qu'ils défendent sont en phase avec les discours dominants. »33 L'historien François Cusset observe que « l'opération s'apparente à une mise au pas du champ intellectuel. Car Lévy semble plus hargneux envers l'« idéologie du désir » deleuzo-guattarienne

115 qu'à propos des camps soviétiques. »34 (...)

L'Idéologie française (1981) Article détaillé : L'Idéologie française. En janvier 1981, paraît chez Grasset L'Idéologie française, dans lequel Bernard-Henry Lévy fait de la France le laboratoire conceptuel du fascisme européen. (...) Très controversé, l'ouvrage fut particulièrement critiqué par Raymond Aron (pour qui « Bernard- Henri Lévy viole toutes les règles de l'interprétation honnête et de la méthode historique »)42, Paul Thibaud, Emmanuel Le Roy Ladurie ou encore Pierre Nora, mais est salué par l'écrivain Philippe Sollers comme « un livre-clé qui a fait tomber bien des tabous, et qui reste pleinement d'actualité43 ». (...)

Du voyage au Pakistan (1981) au conseil de surveillance d'Arte (1993) En septembre 1981, Bernard-Henri Lévy part au Pakistan avec Marek Halter et Renzo Rossellini afin de remettre aux résistants afghans trois postes émetteurs radio, achetés par le Comité des Droits de l'Homme et utilisés par « Radio Kaboul », qui appelle à la résistance armée contre l'occupation soviétique. Il évoque cette rencontre avec le commandant Massoud dans ses Réflexions sur la Guerre, le Mal et la fin de l’Histoire parues en 2002. À cette occasion, le journaliste Christophe de Ponfilly affirme que Lévy rencontra Massoud en 1998, lors d'un autre voyage en Afghanistan, et non en 198148. (...) En mai 1990, il lance et dirige une revue intitulée La Règle du jeu. En 1991, il est nommé pour un an président de la Commission d’avance sur recettes au cinéma.

(...) En juillet 1993, il devient président du conseil de surveillance de la chaîne Arte.

De 1994 à 2005 En mai 1994, il présente au festival de Cannes « Bosna ! », le film qu’il a tourné dans Sarajevo assiégée, dans les tranchées tenues par l’armée bosniaque et dans les combats que celle-ci mène contre les milices serbes. (...) Puis, dans la foulée du film, à l'occasion des élections européennes, il a, depuis le tremplin constitué par l’émission L’Heure de vérité, animée par François-Henri de Virieu, lancé l’idée de la liste « L'Europe commence à Sarajevo » pour contraindre les partis politiques à prendre en compte la situation dans les Balkans. Dirigée par Léon Schwartzenberg, elle comprend, outre Bernard- Henri Lévy, Romain Goupil, Pascal Bruckner, André Glucksmann, Michel Polac , Alain Touraine 54 … De nombreuses personnalités soutiendront la liste tels : Marek Halter, Susan Sontag et Paul Auster, la Sud-Africaine, prix Nobel de littérature, Nadine Gordimer, l’ancien maire de Belgrade Bogdan Bogdanović. Cependant, le 30 mai, à quelques jours des élections, Bernard- Henri Lévy annonce le retrait de la liste, déclarant : « L'effet a atteint tous les objectifs possibles, on ne peut pas faire mieux, le but n'a jamais été d'envoyer cinq députés pro-Bosniaques à

116 Strasbourg, mais de faire que chaque député européen ait la Bosnie en tête »55. Maintenue par Léon Schwartzenberg, cette liste, qui avait été créditée un temps de 12 % d'intentions de vote, obtiendra finalement 1 % des suffrages exprimés56. (...) En 1995, dans les colonnes du Point, il dénonce l’attribution de la Palme d'or à Cannes cette année-là à Emir Kusturica et son film Underground. (...) Fin 2001, il soutient l'intervention américaine en Afghanistan et proclame en novembre 2001 à propos de cette intervention : « la victoire éclair d’une stratégie que nous n’étions pas bien nombreux à juger d’une habileté, d’une efficacité militaro-politique insoupçonnées. » 60 (souligné par l'auteur) En juin 2000, il fonde avec Alain Finkielkraut et Benny Lévy, à Jérusalem, l'Institut d'études lévinassiennes, consacré à la pensée et à l'œuvre du philosophe Emmanuel Lévinas. En février 2002, le président de la République Jacques Chirac et le premier ministre Lionel Jospin confient à Bernard-Henri Lévy la mission de reconstruction culturelle d’un Afghanistan libre. En 2002 et 2003, il ne se positionne pas contre la guerre en Irak. Dans un article publié en 200262, il écrit que « [c]e n'est pas ici que l'on défendra ce massacreur de Kurdes et de chiites, ce terroriste, ce mégalomane suicidaire, ce fou, ce Néron actionniste dont, en 1998 déjà, Massoud me confiait qu'il était en possession d'armes chimiques et bactériologiques massives. » Pour ces raisons, il trouve cette guerre « moralement justifiée », mais aussi « politiquement désastreuse » notamment à cause des conséquences négatives qu'il entrevoit en matière de lutte contre le terrorisme 63 . (...)

De 2006 à 2007 (…) En novembre 2006, il soutient d'abord Dominique Strauss-Kahn lors de la primaire interne du Parti socialiste qui doit désigner le candidat du parti pour l’élection présidentielle, mais rejoint finalement la candidate choisie par le Parti socialiste Ségolène Royal dès le mois de janvier 2007, la considérant comme « courageuse ». Il annonce son choix publiquement après les propos du candidat de l'UMP Nicolas Sarkozy sur la pédophilie et le suicide, propos qu'il juge « inacceptables ». Il sera à ses côtés pendant toute la campagne, comme le raconte par le menu le livre d’Ariane Chemin et Raphaele Bacquet, La Femme fatale (Albin Michel). (...) En octobre 2007, BHL publie un livre sur le Parti socialiste, Ce grand cadavre à la renverse (Grasset). L'auteur commence son ouvrage en indiquant que Nicolas Sarkozy lui a demandé de le soutenir lors de la dernière élection présidentielle. BHL précise qu'il a refusé parce qu'il fait partie de la gauche. Ce qui le conduit à définir la gauche tout en indiquant l'évolution dangereuse qui lui semble être la sienne. La gauche se définit, selon l'auteur, comme le courant politique auquel appartiennent ceux qui sont anticolonialistes, portent un jugement positif sur Mai 68, négatif sur Vichy et qui se reconnaissent dans le combat des dreyfusards. La gauche connaît une évolution qui la conduit, selon Bernard-Henri Lévy : 1. à devenir antiaméricaine de façon trop systématique ; 2. à se détourner de l'idée de liberté ; 3. à devenir complaisante à l'égard d'Al-Qaïda et du Hamas. Une prise de position de l'ancien président des États-Unis Jimmy Carter sur un dialogue possible avec le Hamas est citée comme exemple de cette évolution ( 283 de l'édition livre de poche) ;

117 4. à cesser d'être universaliste ou internationaliste, devenant chauvine 67 . Depuis le début de l'année 2007, BHL est actionnaire68 et membre du conseil de surveillance69 du journal Libération.

De 2007 à 2012 (…) Lors de la guerre d'Ossétie du Sud de 2008, BHL s'est rendu en Géorgie en août 2008, publiant le récit de son voyage dans deux pages « Témoignages » du Monde 72 . Un article de Rue89 73 montre que son témoignage est imprécis, notamment grâce à plusieurs témoignages (dont celui de l'eurodéputée Marie-Anne Isler-Béguin). Son compagnon de voyage, Raphaël Glucksmann, le soutient vigoureusement dans un droit de réponse publié par Rue89 74 , le 23 août 2008. Dans son témoignage, il écrit notamment :"J'ai accompagné votre cible dans la quasi-totalité de son périple géorgien et tout ce qu'il a dit avoir vu en ma compagnie est vrai". (...) En janvier 2009, il publie dans le journal Le Point une note de soutien à Israël justifiant l'opération Plomb durci 78 . (...) En 2009, il déclare que le Parti socialiste « doit disparaître » pour « en finir, le plus vite possible maintenant, avec ce grand corps malade » depuis le déclin du communisme. Car d'après lui le Parti socialiste n'incarne plus la gauche française ni l'espérance de qui que ce soit. À ses yeux, le Parti socialiste doit renouer avec l'essentiel, l'identité même de la gauche selon lui : l'antifascisme, l'anticolonialisme et l'anti-totalitarisme, et il voit l'égalité comme le point de convergence de ces trois principes. Il exprime l'espoir de reconstruire, sur les ruines du Parti socialiste, la gauche de demain, moderne et réinventée81. (...) Dans son ouvrage De la guerre en philosophie paru en février 2010, il cite les réflexions du philosophe Jean-Baptiste Botul, alors que celui-ci est un personnage fictif inventé par le journaliste Frédéric Pagès 85 . Ce dernier évoque un « grave accident philosophique qui pourrait compromettre la suite de sa carrière » mais constate toutefois que « même pris en flagrant délit de lecture hâtive ou de fiche mal digérée, [BHL] est fêté par les télés, choyé par les radios, encensé par les journaux »86. BHL est toutefois la risée de la presse étrangère. L 87 . Dans Pièces d'identité, il combat les souverainetés nationales et incite les politiciens à embrasser la loi du marché et la mondialisation, arguant que « l'anti-américanisme est une métaphore de l'antisémitisme ». Au nom de l'idée du « juif d'affirmation », il incite également les juifs au repli communautaire tout en fustigeant les juifs assimilés 88 . (souligné par l'auteur) (...) En 2011, il crée le prix Saint-Germain. (…) Le 16 mai 2011, il apporte publiquement son soutien à Dominique Strauss-Kahn, qui venait d'être accusé de viol sur une employée d'hôtel91. Toujours en mai 2011, Bernard-Henri Lévy est accusé avec Alexandre Adler, Caroline Fourest et quelques autres, d'être un intellectuel faussaire, selon le titre du livre de Pascal Boniface, qui consacre un chapitre à ce qu'il considère être les « multiples mensonges, contre-vérités » de ce dernier92. Le 9 novembre 2011, se déroule la parution de son livre La Guerre sans l'aimer (éditions Grasset), la chronique d'un écrivain et philosophe, devenu activiste et émancipateur d'un peuple, au cœur du « printemps libyen »93,94. Il affirme le 11 novembre 2011 s'être engagé en Libye en tant que juif et sioniste: "J'ai porté en étendard ma fidélité à mon nom et ma fidélité au sionisme et à Israël" 95 . (souligné par l'auteur) (...)

118 En 2014, il lance un appel sur le plateau du Grand journal de Canal+ pour annuler les Jeux olympiques de Sotchi à la suite des manifestations pro-européennes de 2013-2014 en Ukraine. (…) Engagements internationaux (…) Le 11 mars 2011, il s'exprime sur la position française au sujet de la révolution libyenne, et appuie Nicolas Sarkozy sur la décision d'instaurer une zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye113. Il se rend à plusieurs reprises en Libye pour soutenir les rebelles face aux forces de Mouammar Kadhafi. (...). Bernard-Henri Lévy a dit, lors de Convention nationale du CRIF de l'hiver précédent, qu'il avait agi dans cette affaire en pensant à l'intérêt de l'État d' Israël 116 . Des intellectuels comme Jean-François Kahn condamneront par la suite sévèrement le rôle joué par BHL dans la crise libyenne117. Le 14 novembre 2011, il prend position contre les atrocités du régime Assad en Syrie, dans un article publié dans le Huffington Post 118 . Le 22 juillet 2014, soit cinq jours après le crash du Vol 17 Malaysia Airlines, il accuse implicitement Vladimir Poutine d'en être le responsable, apporte son soutien à Petro Porochenko et dénonce la pusillanimité de l'Union européenne vis-à-vis du président russe119. Le 31 octobre 2014, Bernard-Henri Lévy s'est retrouvé bloqué plus de 4 heures à l'aéroport de Tunis-Carthage en raison d'une manifestation contre sa venue. Plusieurs dizaines de Tunisiens sont venus l'accueillir à sa descente d'avion aux cris de « BHL Dégage ! » et « Non aux intérêts sionistes en Tunisie ». Les manifestants lui ont reproché son intervention en Libye qui aurait semé le chaos dans la région et son soutien inconditionnel à Israël ; ils l'ont accusé de "haine contre les Arabes et les musulmans" 120, 121. (...)

Critiques d'ordre général • BHL est présenté par certains journalistes et philosophes comme un imposteur intellectuel 129 . Ses détracteurs estiment que sa réussite ne serait due qu'à un réseau de connaissances bien organisé130. • Pascal Boniface est critique vis-à-vis de BHL. Dans un article intitulé « BHL n'est pas seulement ridicule, il est aussi dangereux », il écrit : « Il est de bon ton, dans de nombreux milieux, de se gausser de Bernard-Henri Lévy et d’affecter à son égard, une indifférence ironique. L’affaire Botul – dont BHL a le culot de s’estimer victime – n’est ni sa première, ni sa dernière escroquerie intellectuelle. La carrière de BHL est faite d’affabulations et de ratés monumentaux, qu’il veuille créer un journal, faire un film, écrire une pièce de théâtre ou un livre. Il y a un écart grandissant entre l’écho médiatique qui lui est donné et la désaffection du public, qui n’est pas dupe. »131 Dans l'ouvrage Les Intellectuels faussaires (éditions JC Gawsewitch, mai 2011) : « En tête de liste, il y a l’influent Bernard-Henri Lévy, alias BHL le « seigneur et maître des faussaires », dont le « moralisme se mue en Maccarthysme », redoutable dans l’art d’exercer le « terrorisme intellectuel », alors même que ses fiascos retentissants disqualifieraient sur-le-champ bien moins omnipotent que lui. » (...)

119 Critiques de l'engagement politique • En 1977, Lévy déclare à propos d'une éventuelle arrivée des communistes au pouvoir en France : « […] je serais le premier écrivain français, à faire à mon gouvernement cet affront qui n'a jamais été fait depuis qu'il y a de la littérature en France, qui est de changer de nationalité […] »152. • Il écrit à propos de l'argent : « […] la vertu qu’il a de substituer le commerce à la guerre, la frontière ouverte aux univers fermés ; le temps de la négociation, de la transaction, du compromis, qui succède, grâce à lui, à celui de l’impatience, de la violence, du troc, de la rapine, du tout ou rien, du fanatisme. » (souligné par l'auteur) Cette phrase peut sembler en contradiction avec celle153, tenue au Congrès d'Épinay du 13 juin 1971, qui dénonçait : « toutes les puissances de l’argent, l’argent qui corrompt, l’argent qui achète, l’argent qui tue, l’argent qui ruine, et l’argent qui pourrit jusqu’à la conscience des hommes ». • En 1985, Bernard-Henri Lévy, Revel et Glucksmann signent une pétition pour encourager Ronald Reagan à continuer à soutenir les Contras au Nicaragua. Ceux-ci s'illustreront dans des crimes de guerre et ceci débouchera sur un scandale majeur de l'ère Reagan : l'affaire Iran-Contra 154 ,155. (...)

Critiques de la relation aux médias • (...) • Dans un article pro-géorgien consacré au Conflit russo-géorgien de 2008 publié par le Corriere della Sera, El Mundo, l'Expressen, The Huffington Post et la Frankfurter Allgemeine Zeitung, Lévy prétendait notamment qu'il s'était rendu à Gori, entre autres allégations démenties par la suite par Rue89 160 ,161. • En décembre 2010, Bernard-Henri Lévy écrit dans Le Point : « Il faut le dire et le redire : présenter comme un « arc républicain », ou comme une alliance entre « républicains des deux rives », ce nouveau rapprochement rouge-brun qui voit les crânes rasés du Bloc identitaire fricoter, sur le dos des musulmans de France, avec tel ancien du Monde diplo, Bernard Cassen, est un crachat au visage d'une République qui, à Monte Cassino, puis dans les combats pour la libération de Marseille, puis dans la poche de Colmar, en Alsace, face à la division Das Reich, n'a pas eu de plus vaillants défenseurs que les pères et grands-pères de ces hommes et femmes que l'on voudrait, aujourd'hui, clouer au pilori162. »

Bernard-Henri Lévy ayant en l'occurrence confondu Bernard Cassen avec Pierre Cassen, l'ancien directeur général du Diplo dès lors incriminé à tort réplique par une lettre au directeur du Monde : « On aurait cependant attendu de M. Lévy, qui a très souvent signé dans le quotidien, qu'il respecte les normes minimales de la profession, et tout particulièrement celles inscrites dans la « Charte d'éthique et de déontologie du groupe Le Monde ». Celle-ci stipule notamment que « Les journalistes disposent des moyens nécessaires pour exercer rigoureusement leur métier, collecter et vérifier les informations, indépendamment de toute pression extérieure. Ils s'interdisent toute manipulation et plagiat, ne relaient pas les rumeurs, évitent le sensationnalisme, les approximations et

120 les partis pris. Ils doivent éviter tout lien d'intérêt avec les acteurs des secteurs sur lesquels ils écrivent, et s'engagent à déclarer tout conflit d'intérêts »163 »

• En juillet 2010, il confond dans un de ses blocs-notes du Point l'animateur Frédéric Taddéi et le footballeur Rodrigo Taddei de l'AS Roma164. • Toujours en 2010, il fustige le même Frédéric Taddéi dans un Bloc-Notes du Point pour avoir invité l'humoriste condamné pour antisémitisme 165 Dieudonné, article auquel Taddéi répliqua dans un droit de réponse166. • BHL est aussi régulièrement accusé de se mettre personnellement en avant dans ses reportages, ce qui a été particulièrement relevé dans son dernier film Le Serment de Tobrouk 167 .

(...)

Critiques du discours de Nicolas Sarkozy à l'université de Dakar En octobre 2007, à l'occasion de la sortie de son livre sur le Parti socialiste Ce grand cadavre à la renverse, Bernard-Henri Levy a attaqué vivement Nicolas Sarkozy en fustigeant son « Discours de Dakar » et son rédacteur, le conseiller du président de la République, Henri Guaino : « L'homme africain, disait le texte, n'est pas assez entré dans l'Histoire. Jamais il ne s'élance vers l'avenir. Dans cet univers où la nature commande tout, il n'y a de place ni pour l'aventure humaine, ni pour l'idée de progrès. » Il dira : « C'est un discours raciste ». « BHL est un petit con prétentieux », lui répliquera le conseiller183. (...) 1. 2. 3. rt de Tunis [archive] 4. ↑ Bernard-Henri, Le Point, 24/02/2015. [14] [archive] 5. ↑ Bernard-Henri Lévy, entretien avec Eugène Bastié, Le Figaro,31/03/2015[15] [archive] 6. ↑ Le Parisien, Frédéric Gerschel, 31/03/2015{http://www.leparisien.fr/politique/bhl-fait- inviter-les-chefs-kurdes-a-l-elysee-31-03-2015-4654089.php [archive]] 7. ↑ La délégation comprend notamment : Mustafa Qadir Mustafa, ministre des peshmergas ; Serwan Sabir Mustafa Barzani, commandant du Secteur 6 ; le Major Général Aziz Waysi Izzadin, commandant en chef des unités spéciales ; le brigadier général Bakhtyar Mohammed Sidiq, commandant de la 13ème brigade et le brigadier général Salar Ibrahim Saber, chef du Joint Operation Center 8. ↑ a et b Récidives, Éditions Grasset & Fasquelle, Paris, 2004 9. ↑ BHL, DHL, BHV, TGV [archive], 22 juin 2010. 10. ↑ Selon son biographe non officiel Philippe Cohen, « A Gori, BHL ne s'est pas mis à la vodka », sur le site marianne2.fr [archive], BHL a une « théorie de la guerre éternelle entre le bien et le mal » ; cette thématique est en effet récurrente dans ses travaux consacrés aux situations de guerre ou de conflit, tels que Réflexions sur la Guerre, le Mal et la fin de l'Histoire (2001), Bosna ! (2001), ou encore Qui a tué Daniel Pearl ? (2003) 11. ↑ Le Monde Diplomatique [archive] 12. ↑ LMSI [archive] 13. ↑ Pascal Boniface, BHL n'est pas seulement ridicule, il est aussi dangereux , 15/04/2009 [archive] 14.↑ a et b Gilles Deleuze, À propos des nouveaux philosophes et d’un problème plus

121 général [archive], publié comme Supplément au o 24, mai 1977, de la revue bimestrielle Minuit, et distribué gratuitement. Mis en ligne en 2004 par Multitudes. 15. ↑ La critique du Testament de Dieu par Pierre Vidal Naquet http://www.pierre-vidal- naquet.net/spip.php?article49 [archive] 16. ↑ Simon Leys, « Une excursion en haute platitude », Lire, o 125, février 1986, repris dans Essais sur la Chine. 17. ↑ Jacques Bouveresse, Prodiges et vertiges de l’analogie, Raisons d’agir, 1999, 31 18. ↑ « Une imposture française », page ? 19. ↑ « Une imposture française », par Nicolas Beau et Olivier Toscer, éditions des Arènes, 2006. Relevé par le journaliste Sébastien Fontenelle [archive] ou par le critique de Lire.fr [archive] 20. ↑ La critique de William Dalrymple sur le livre Qui a tué Daniel Pearl ? [archive] dans la New York Review of book, décembre 2003. « Le principal problème que pose Qui a tué Daniel Pearl ? est l’amateurisme du travail de recherche effectué par son auteur. [...] BHL a visé beaucoup trop haut, eu égard à ses compétences » 21. ↑ La réponse de Bernard-Henri Lévy à William Dalrymple [archive] 22. ↑ La réponse de William Dalrymple à Bernard-Henri Lévy [archive]

Résumons : une grande fortune, un pro-américain « primaire », des réseaux en béton, ses entrées au sommet de l'Etat en France, une apparente influence sur la politique étrangère de son pays, des idées à l'emporte pièce à propos d'Israël ou de l'anti-américanisme qui serait un antisémitisme déguisé (!), M. Bernard Henri Levy n'a pas besoin d'être recruté par les « Youngs leaders » pour présenter un pedigree atlantiste proche de la perfection, voire plus parfait que parfait. Le simplisme apparent de ces analyses sur le monde comme il va ne nécessitait pas une agrégation de philosophie. Il est un révélateur puissant des classes dominantes françaises, au moins dans leur version parisienne. Mais n'est-ce pas la seule qui compte en France ? Versons encore à son actif sa réaction violente face au Brexit, et son mépris pour l'expression démocratique. L'importance sociale et politique de ce personnage apparemment issu directement du Bel Ami de Maupassant en dit plus long sur le milieu dans lequel il est inséré que sur lui, personnage contingent parmi d'autre. Homme de réseau, homme d'argent, homme de pouvoir, il est au centre d'un système qui n'a que faire de ses sottises ou échecs accumulés dès lors que BHL maîtrise apparemment un pouvoir discrétionnaire sur le monde qui l'entoure, des petits marquis parisiens aux grands féodaux qui peuplent les allées du pouvoir. Avec ou sans son assentiment, cet oligarque symbolise un univers politique et social opaque dans lequel le pouvoir ne doit rien à l'élection, ni aux règles de la démocratie représentative. Ici, point de génie certes, mais une redoutable intelligence des situations et des rapports de force, alliée à un apparent besoin de se hausser du col depuis son socle économique et social riche en opportunités. L'illustration parfaite d'une coïncidence miraculeuse entre un ego démesuré et un contexte économique et social particulièrement favorable. Saint Simon n'est pas loin. Il reste que constater le pouvoir réel de cet individu sans mesure donne une piètre idée du monde dans lequel il évolue, celui de nos élites ou supposées telles. La France d'en haut se chercherait-elle l'homme providentiel ? Entre M. Hollande, ses amis, ses adversaires politiques et « notre » BHL, la quête est mal partie. Mais, en attendant, tout ce beau monde s'amuse et jouit, en expliquant au bon peuple qu'il faut se serrer la ceinture aujourd'hui et demain.

122 BHL est plus que BHL, accordons lui le statut de symptôme, qui n'est pas symbole, mais qui dans son cas donne au moins une spécificité à son arrivisme idéologiquement légitimé par la défense de la liberté et des droits de l'homme. Peut-on avancer qu'il est un artefact ? Si tel est le cas, nos classes dominantes ne le sont pas moins, et ne doivent leur existence prolongée qu'au lent et long travail des « grands médias ». Une bonne raison pour se débarrasser de ce miroir déformant qu'est devenue la presse aujourd'hui et pour reprendre langue avec la réalité de M. Tout le monde. Pour éclaircissement, visionner « Qui veut la peau de Roger Rabbit ». Tout y est dit. Hélas.

-Site « anticons », à savoir anti néoconservateurs en référence au néoconservatisme américain. Voici donc de nouveaux outils d'influences atlantistes.

« Source : A NTICO NS : Observatoire du néo-conservatisme « Ce site se propose de faire connaître au public francophone la nébuleuse française au service de l’idéologie néo-conservatrice, un courant de pensée né aux États-Unis dans les années 70, dont les promoteurs ont accédé de façon coordonnée au pouvoir en 2001, à l’origine des grands bouleversements géopolitiques du XXIe siècle. Il se veut une compilation non exhaustive mais factuelle d’informations sourcées et/ou facilement vérifiables. Le néo-conservatisme ou néoconservatisme est un courant de pensée politique d'origine américaine apparu à la fin du XX e siècle . Il s'agit d'une conception qui a émergé aux États-Unis par opposition au relativisme culturel et à la contre-culture de la Nouvelle gauche (« New Left ») des années 1960. Cette philosophie a influencé les politiques menées par George W. Bush, signifiant un réalignement de la politique américaine, et le passage de quelques libéraux sociaux à la droite du spectre politique, d'où le terme qui fait référence aux « nouveaux » conservateurs1,2. À l'origine, le terme néo-conservateur était utilisé pour critiquer les sociaux-libéraux qui sont passés du côté du Parti républicain3,4. Michael Harrington, un social-démocrate, a forgé l'usage du mot néo-conservateur en 1973 dans Dissent, un magazine sur les politiques de protection sociale5. Selon E. J. Dionne, le néo-conservatisme est né sur le principe que le social-libéralisme a échoué1. Le premier théoricien néo-conservateur à avoir adopté ce mot et qui est considéré comme le fondateur de cette idéologie est Irving Kristol et père de William Kristol, fondateur du think-tank « néo-conservateur » Project for the New American Century. Irving Kristol a été un militant trotskyste actif pendant sa jeunesse et a exposé ses vues néoconservatrices en 1979 dans l'article Confessions of a True, Self-Confessed 'Neoconservative'. Les idées de Kristol sont influentes depuis les années 1950 quand il a cofondé et édité le magazine Encounter. Un autre idéologue de ce mouvement était Norman Podhoretz, éditeur au magazine Commentary de 1960 à 1995. En 1982, Podhoretz se désignait déjà comme un néo-conservateur dans un article du New York Times Magazine intitulé The Neoconservative Anguish over Reagan's Foreign Policy8,9. La doctrine Reagan était considérée comme anticommuniste et en opposition avec l'influence mondiale de l'URSS. Elle était au centre de la politique étrangère américaine jusqu'à la fin de la Guerre froide, un peu avant que Clinton ne devienne président. L'influence néo-conservatrice sur la politique étrangère américaine sera un peu plus tard au premier plan de la doctrine Bush.

123 Les journaux néo-conservateurs prééminents sont Commentary et The Weekly Standard. Il existe aussi des cercles de réflexion néo-conservateurs sur la politique étrangère dont notamment American Enterprise Institute (AEI), Project for the New American Century (PNAC), The Heritage Foundation et le Jewish Institute for National Security Affairs (JINSA) L'islamophobie des néoconservateurs va avec la revendication du multiculturalisme, ce qui peut apparaître contradictoire. Mais nous sommes face à une machine de guerre idéologique, et non face à un système de pensée susceptible d'expliquer et de transformer le monde dans le sens de l'intérêt général(!).

-Le Cercle de l’Oratoire

Le « Cercle de l’Oratoire » est un think tank français atlantiste et néoconservateur fondé en 2001, à la suite des attentats du 11 septembre. Il se réunit dans une salle du temple protestant de la rue de l’Oratoire à Paris, d’où son nom. Proche du PNAC (Project for a New American Century, le think tank néo-conservateur dont étaient issus les principaux membres de l’administration Bush), son but est de défendre la politique américaine auprès de l’opinion publique, le plus grand danger selon eux étant l’islamisme qu’ils qualifient « d’islamo-fascisme » ou de « fascisme vert ». Le Cercle de l’Oratoire a bien entendu soutenu l’invasion de l’Irak, et il assimile clairement l’anti- sionisme à de l’antisémitisme. Depuis 2006, il publie une revue intitulée « le meilleur des mondes » (éditée par les éditions Denoël). Ses principaux membres sont: – Michel Taubmann, directeur du service Info d’Arte-Paris – Florence Taubmann, vice-présidente d’«Amitié judéo-chrétienne» – Bernard Kouchner, ministre de gauche puis de droite, fondateur de Médecins du Monde – Philippe Val, directeur de Charlie Hebdo, récemment nommé directeur de France Inter – André Glucksmann, philosophe et essayiste – Pascal Bruckner, essayiste – Romain Goupil, cinéaste – Olivier Rolin, écrivain – Marc Weitzmann, écrivain – Antoine Vitkine, journaliste pour Arte – Élisabeth Schemla, fondatrice du site proche-orient.info – Jean-Luc Mouton, directeur de l’hebdomadaire protestant Réforme – Thérèse Delpech, directrice des affaires stratégiques au Commissariat à l’énergie atomique (décédée depuis) – Antoine Basbous, directeur de l’Observatoire des pays arabes – Frédéric Encel, géopoliticien, spécialiste du Proche-Orient – Cécilia Gabizon, journaliste, spécialiste des questions de l’islam au Figaro – Mohammed Abdi, secrétaire général de l’association « Ni Putes Ni Soumises » – Jacky Mamou, ex-président de Médecins du Monde D’autres personnalités n’en sont pas membres mais en sont néanmoins proches en soutenant des pétitions ou des meetings organisés par le Cercle de l’Oratoire. On peut citer notamment Bernard- Henri Lévy, Alexandre Adler, Guy Sorman, et Alain Finkielkraut. Comme on le voit, le « Cercle » est constitué d’habitués des plateaux TV et du rayon politique/actualité des librairies, toujours là lorsqu’il s’agit de dire au « public » ce qu’il doit penser, tout particulièrement lorsqu’il s’agit des Etats-Unis, d’Israël, de l’Islam et du Proche- Orient en général…

124 On doit notamment aux gens du « Cercle » la diffusion sur Arte d’un pur documentaire de propagande contre ceux qui osent mettent en doute la thèse officielle du 11 septembre. On y retrouve l’inévitable Alexandre Adler, ainsi que Philippe Val dans le débat qui avait suivi la diffusion… Voici un démontage point par point des méthodes de désinformation utilisées dans ce ce documentaire: Le Cercle de l'Oratoire est proche du PNAC (Project for a New American Century), le think tank néoconservateur dont étaient issus les principaux membres de l’administration Bush. Son but est de défendre la politique américaine auprès de l’opinion publique, le plus grand danger selon eux étant l’islamisme qu’ils qualifient « d’islamo-fascisme » ou de « fascisme vert ».

Zoom : Pierre-André Taguief, la croisée des chemins (…)Politologue et historien. Membre du cercle de réflexion néoconservateur Le Cercle de l’Oratoire, il fait également partie du comité de rédaction de la revue de ce cercle, « Le Meilleur des mondes ». Taguief déclarait : « Fallaci vise juste même si elle peut choquer par certaines formules ». Oriana Fallaci est la journaliste italienne qui écrivait entre autre : « Les musulmans se multiplient comme des rats ». (...) Michel Taubmann, de Troski à Bush Journaliste français à Arte, il est également le directeur de la revue « Le Meilleur des mondes », un prolongement du cercle de l’Oratoire, alors que dans sa jeunesse, il militait pour la ligue communiste.

Lui et ses amis de l’Oratoire ont apporté tout leur soutien à l’administration Bush pendant 8 ans. On y retrouve entre autre : Monique Canto-Sperber, André Glucksmann, Pierre-André Taguieff, Pascal Bruckner, Olivier Rolin, Stéphane Courtois, Max Lagarrigue, Thérèse Delpech, Antoine Basbous, Frédéric Encel, Cécilia Gabizon, Elisabeth Schemla, Fadela Amara, Bernard Kouchner. (sélectionné par l'auteur) Les meilleurs amis de l’Amérique – Libération

Florence Taubmann, caution morale chez Endemol Membre du cercle de l’Oratoire et épouse de Michel Taubmann, Florence Taubmann est pasteur du Temple de l’oratoire du Louvre et vice-présidente de l’Amitié judéo-chrétienne. Elle est également l’auteur de quelques ouvrages religieux : “Les fêtes religieuses, la prière personnelle” ou bien encore “Les lamentations de Jérémie”. En juin 2011, elle rejoint le comité de déontologie d’Endemol France, groupe de production connu pour ses émissions de téléréalité comme Loft Story, Star Academy et autres Secret Story. ( Nous retrouvons, dans le capital d’Endemol, Silvio Berlusconi et Goldman Sachs). Secret Story

125 Alexandre Adler, l’ami d’Henry Kissinger 1965, Alexandre Adler adhère à la SFIO pendant la campagne présidentielle de François Mitterrand. Après 1968, il quitte le Parti socialiste pour le PCF (11 ans), rédacteur en chef adjoint de la revue La Pensée. En 1984, il est recruté par le Parti socialiste pour travailler à sa commission de politique extérieure. Après 1988, il se rapproche de Jean-Pierre Chevènement puis de Philippe Seguin. En 2007, il appelle à voter Nicolas Sarkozy dans sa chronique éditoriale au Figaro. Ami personnel d’Henry Kissinger, Richard Perle, Paul Wolfowitz. En 2003, il écrit à propos de Rony Brauman « Les traîtres Juifs » (...)

-Les directeurs de conscience Beaux-parleurs, très arrogants, les directeurs de conscience bénéficient d’une position incomparable au sein de la sphère politico-médiatique. Jamais inquiétés, malgré des comportements et propos révoltants, ils influencent considérablement l’orientation de notre société. La plupart du temps, ils se présentent à gauche, mais une simple analyse de leurs états de service nous démontre très vite que depuis des années, ils œuvrent pour leurs propres intérêts, ainsi sans le moindre scrupule ils parviennent à naviguer au plus près des différents pouvoirs qui se succèdent.

Avec en arrière plan qui passe pour de l’évidence, un savant dosage de pensée unique et de néocolonialisme, nos « bienfaiteurs désintéressés » affichent en permanence des parti-pris impérialistes. Sous couvert de droits de l’homme agités à la moindre remise en cause, ils sont en fait les véritables chiens de garde des versions officielles même quand ces dernières reposent sur des théories fumeuses, contradictoires ou très mal investiguées. Mais les directeurs de conscience n’ont pas d’autre choix, car c’est pour eux une simple question de survie. -BHL Nous en avons parlé. -Phillippe Val Directeur de la publication et de la rédaction du journal Charlie Hebdo de 1992 à mai 2009, il est nommé directeur de France Inter le 17 juin 2009 par Jean-Luc Hees. En 1984, invités sur le plateau de France 2, Font et Val chantent « Emigré, reste là, t’en va pas » ponctué de phrases comme « à force d’avoir le nez collé au Figaro, ils ont attrapé des morpions au cerveau ». Paroles signées Philippe Val. Dans Charlie Hebdo en janvier 2005, Val écrit : « [Les otages français, Christian Chesnot et George Malbrunot] ont été enlevés par des terroristes islamiques qui adorent égorger les Occidentaux, sauf les Français, parce que la politique arabe de la France a des racines profondes qui s’enfoncent jusqu’au régime de Vichy, dont la politique anti-juive était déjà, par défaut, une politique arabe. » (...) Christine Ockrent, La « Reine Christine » fait le ménage (lire plus loin son portrait) Le 20 février 2008, elle est nommée directrice générale déléguée de l’audiovisuel extérieur de la France (AEF), directrice générale déléguée de France 24, et directrice générale déléguée de RFI. Elle quittera l’AEF fin mai 2011 sur fond de guerre d’influence et de règlements de compte

126 juridiques. Elle est membre de plusieurs réseaux d’obédience « atlantiste » dont l’institut Aspen, la French-American Fondation, et le Centre for European Reform. Elle supervise le licenciement, en Août 2008, de Richard Labévière, grand journaliste d’investigation à RFI, suite à son initiative d’interviewer Bachar el-Assad à l’occasion de sa venue en France, invité au défilé du 14 juillet par Nicolas Sarkozy pour passer les troupes françaises en revue à ses côtés. Cette interview aurait constitué une faute grave car il n’aurait pas informé sa hiérarchie. Le mois suivant, l’épuration a continué avec l’affaire Bertrand Coq et Grégoire Deniau, tous deux Prix Albert Londres, mis à pied et licenciés de France 24, le premier (rédacteur en chef) pour cause d' « incompatibilité », le second (directeur de la rédaction) pour cause d’organisation d’un débat télévisé animé par Sylvain Attal autour du 11 septembre 2001 où ont été évoquées les théories du complot, selon la presse officielle emmenée par « Le Canard enchaîné ». A noter que Bertrand Coq est le co-auteur d’un brûlot contre Bernard Kouchner intitulé « Les tribulations de Bernard K. en Yougoslavie » (Michel Floquet, Bertrand Coq, Éditions Albin Michel, 1993), où l’auteur dénonce la politique spectacle du Ministre et son affairisme personnel. Censures françaises, Richard Labévie Nicole Bacharan, la stratégie du choc émotionnel Elle écrit des romans pour enfants dans la série Nemo. Elle est également politologue. Le 11 septembre 2001, elle déclara : » Ce soir, nous sommes tous Américains « . Spécialiste de la société américaine, elle publie des chroniques dans la revue Le Meilleur des Mondes, un prolongement du réseau néo-conservateur du « Cercle de l’Oratoire ». Elle est l’auteur de nombreux essais sur l’Amérique. Nicole Bacharan donne fréquemment des conférences pour l’organisation « The French American Fondation ». GANSER Daniele – Les armées secrètes de l’OTAN André Glucksman, l’indignation sélective (André Glucksman a disparu en novembre 2015) Il soutient les boat people en 1979. Il est également connu pour sa contribution à la cause indépendantiste tchétchène. Maoïste à la fin des années 60, par la suite il se reconvertit pro- américain et défenseur inconditionnel d’Israël. En 1985, André Glucksmann, Jean-François Revel et Bernard-Henri Levy signent une pétition pour encourager Ronald Reagan à continuer à soutenir les Contras ( contre-révolutionnaires ) du Nicaragua. En 2001, il participe à la création du think tank néo-concervateur « Le Cercle de L’Oratoire » ainsi qu’à sa revue « Le Meilleur des Mondes ». Nous le retrouvons en 2004 signataire du PNAC (Projet pour le Nouveau Siècle Américain). L’objectif affiché du PNAC est de promouvoir le leadership mondial des États-Unis. Parmi les membres du PNAC, citons entre autre : Donald Rumsfeld, Paul Wolfowitz, Dick Cheney, Jeb Bush. -P NAC: « Recons t ruire les défenses de l’Amé rique Le site joint M. Finkielkraut au groupe des « néocons » français. L'auteur ne partageant pas cet avis, les lecteurs sont priés de se reporter au site internet.

-Le Project for the New American Century (Projet pour le Nouveau Siècle Américain, PNAC) est un think tank néoconservateur américain ayant fonctionné de 1997 à 2006. Cet organisme qui se présente comme une organisation d'éducation à but non lucratif, a été fondé au début de l'année 1997 par William Kristol et Robert Kagan. L'objectif affiché du PNAC est de promouvoir le leadership mondial des États-Unis. Le PNAC pose en principe fondamental la considération selon

127 laquelle le « leadership américain est à la fois bon pour l'Amérique et bon pour le monde » et apporte son soutien pour une « politique reaganienne de puissance militaire et de clarté morale ». Cette organisation a exercé une forte influence sur les hauts fonctionnaires du gouvernement des États-Unis durant les mandats du président américain George W. Bush et a eu une incidence très importante sur le développement militaire et la politique des affaires étrangères, particulièrement en ce qui concerne la sécurité nationale et la guerre en Irak.

Objectifs Fondé au printemps 1997, le PNAC se définit comme une organisation bénévole d'éducation dont l'objectif est la promotion d'un American Global Leadership (Leadership global américain). Le PNAC se place ainsi comme groupe de réflexion et d'influence, œuvrant à trouver et engager des moyens de prolonger au XXIe siècle le leadership mondial des États-Unis acquis depuis la Seconde Guerre mondiale, que ce soit dans les domaines politique, économique, culturel ou militaire. Son siège social de Washington, D.C. se trouve d'ailleurs dans le même immeuble qu'une autre organisation défendant les intérêts des États-Unis, l'American Enterprise Institute.

Contexte et historique À l'initiative du projet du New Citizenship Project, une organisation 501(c)(3) dirigée par William Kristol et Gary Schmitt, le Project for the New American Century est fondé en partie par la Sarah Scaife Foundation, la John M. Olin Foundation et la Bradley Foundation. Le 26 janvier 1998, dans une lettre ouverte au président Bill Clinton, ses membres appellent explicitement à mener une campagne en Irak pour renverser Saddam Hussein

Membres fondateurs du projet • William Kristol , (fondateur & président du PNAC) • Robert Kagan , (cofondateur) • Bruce P. Jackson • Mark Gerson • Randy Scheunemann

La direction • Ellen Bork, Deputy Director • Gary Schmitt, Senior Fellow • Thomas Donnelly, Senior Fellow • Reuel Marc Gerecht, Senior Fellow • Timothy Lehmann, Assistant Director • Michael Goldfarb, Research Associate

Membres signataires du projet Parmi ses membres, se trouvent de nombreux politiciens néo-conservateurs, certains occupant de hautes fonctions au sein de l'administration de George W. Bush : • Donald Rumsfeld (ancien secrétaire à la Défense)

128 • Paul Wolfowitz (ancien président de la Banque mondiale) • Richard Armitage • Dick Cheney (ancien vice-président des États-Unis) • Lewis Libby • Elliott Abrams • William John Bennett • John Ellis "Jeb" Bush • Eliot A. Cohen • Midge Decter • Paula Dobriansky • Steve Forbes • Aaron Friedberg • Francis Fukuyama • Frank Gaffney • Fred C. Ikle • Donald Kagan • Norman Podhoretz • J. Danforth Quayle • Peter Rodman • Stephen Rosen • Henry Rowen • Vin Weber • George Weigel

Membres collaborateurs au projet • Francis Fukuyama • John R. Bolton • Jeane Kirkpatrick • Robert Kagan • Charles Krauthammer • Richard Lee Armitage • William Kristol • John Lehman • Richard Perle • Daniel Pipes • Norman Podhoretz • Donald Rumsfeld • Gary Schmitt • Zalmay Khalilzad (ambassadeur des États-Unis en Irak) • Robert Zoellick • Seth Cropsey • Midge Decter • Paula Dobriansky • Thomas Donnelly

129 • Nicholas Eberstadt • Hillel Fradkin • Aaron Friedberg • Stephen J. Solarz • Frank Gaffney • Jeffrey Gedmin • Reuel Marc Gerecht • Charles Hill • Bruce P. Jackson • Eli S. Jacobs • Michael Joyce • Jeffrey Bell • I. Lewis Libby • Tod Lindberg • Rich Lowry • Clifford May • Joshua Muravchik • Michael O'Hanlon • Martin Peretz • William J. Bennett • Jeffrey Bergner • Ellen Bork • Peter W. Rodman • Stephen P. Rosen • Vin Weber • Randy Scheunemann • Rudy Boschwitz • William Schneider, Jr . • Richard H. Shultz • Stephen J. Kantany • Henry Sokolski • Linda Chavez • Dov S. Zakheim • R. James Woolsey, Jr. • Marshall Wittmann • Leon Wieseltier • Eliot Cohen • Donald Kagan • Kenneth Adelman • Richard V. Allen • Gary Bauer André Glucksmann et Bernard Kouchner sont quelquefois cités comme membres du PNAC. En fait, ils n'ont été que signataires, en 2004, à côté de personnalités aussi diverses que Massimo D'Alema ou Joe Biden, d'une lettre ouverte présentée par le think tank néoconservateur aux chefs d'états et

130 de gouvernements de l'Union européenne1.

Propositions Le PNAC fait partie d'un projet plus large, appelé New Citizenship Project (Projet pour une nouvelle citoyenneté), une organisation financée par la Bradley Foundation 2 . Norman Podhoretz, père fondateur du néo-conservatisme et signature fondatrice du PNAC, en explique les enjeux : « L’essence de notre pensée affirmait que l’Amérique incarnait une puissance de Bien dans le monde et qu’elle n’était pas responsable de l’antiaméricanisme, cette haine irrationnelle que notre pays inspirait à l’étranger. Nous défendions les États-Unis contre les critiques émises à gauche et nous soutenions un rôle actif de notre puissance sur les affaires du monde, afin de répandre la liberté et la démocratie partout où cela était possible. »3

Le rapport Rebuilding America's Defenses présente sa doctrine (Reconstruire les défenses de l'Amérique)4, rédigé par les membres du PNAC en 2000, document de 90 pages qui porte sur la stratégie militaire des États-Unis. Du fait de son importance, tant par sa taille que par son influence, ce rapport équivaut à un programme politique. Il présente une vaste analyse de la situation, partant du postulat selon lequel le leadership américain profite à la fois aux États-Unis et au reste du monde. Dans cet esprit, diverses propositions sont présentées : • Maintenir une supériorité nucléaire ; • Augmenter la quantité de personnel militaire ; • Repositionner les bases américaines ; • Modernisation des équipements militaires de façon sélective ; • Développer et déployer des défenses anti-missiles ; • Assurer la supériorité des forces conventionnelles à long terme ; • Augmenter le budget de la défense à hauteur de 3,8 % du PIB.

Controverse Les idées avancées par le PNAC dans le rapport Rebuilding America's Defenses font l'objet de critiques parfois extrêmement violentes : « This is the new Mein Kampf. Only Hitler did not have nuclear weapons. It's the scariest document I've ever read in my life. » (Ceci est le nouveau Mein Kampf. La seule différence est que Hitler n'avait pas d'armes nucléaires. C'est le document le plus effrayant que j'ai jamais lu dans ma vie.) Docteur Helen Caldicott, 2000. Cette comparaison sera souvent utilisée par les détracteurs du PNAC, notamment des organisations non gouvernementales pacifistes, des partis politiques, et des associations citoyennes [ souhaitée] . Selon eux, les deux textes présenteraient de grandes similitudes, telles que ses objectifs (la domination du monde par un seul pays), ses rédacteurs (un mouvement politique radical accédant au pouvoir) ainsi que ses conséquences (ignorées et/ou sous-évaluées bien que le groupe au pouvoir envisage une dictature militaire mondiale), et les armes de destruction massive actuelles rendraient les dangers potentiels encore plus grands. Les partisans des thèses du complot intérieur, y voient même des indices laissant penser que les attentats du 11 septembre 2001 auraient pu être organisés par le gouvernement américain lui- même, afin de pouvoir justifier ses opérations militaires depuis 2001 et faire voter des lois

131 liberticides au nom de la lutte anti-terroriste ; on trouvait en effet dans ce rapport la phrase suivante : « Further, the process of transformation, even if it brings revolutionary change, is likely to be a long one, absent some catastrophic and catalyzing event – like a new Pearl Harbor. » (De plus, le processus de transformation, même s'il apporte un changement révolutionnaire, sera probablement long en l'absence d'un événement catastrophique et catalyseur - comme un nouveau Pearl Harbor).

Notes et références 1. ↑ An Open Letter to the Heads of State and Government of the European Union and NATO, September 28, 2004 [archive] 2. ↑ Voir la fiche correspondante [archive] sur le site mediatransparency.org 3. ↑ Interview de Norman Podhoretz, 14 mai 2008 : leblogdrzz.over-blog.com/article- 19638099.html 4. ↑ Version originale [archive], Traduction française proposée par reopen911 [archive]

Articles connexes • American Enterprise Institute • Heritage Foundation • article général : Impérialisme américain • doctrine Bush de "remodelage du Grand Moyen-Orient" • Géopolitique du pétrole

Liens externes

• Site officiel • () Le site web du PNAC • () Sep 2000 Rebuilding America's Defenses plan • Sites critiques • () Analyse générale du PNAC • () Parodie et critique du PNAC • Sites en français • () Présentation du PNAC par l'Observatoire français des Think Tanks • () "Reconstruire les défenses de l'Amérique" rapport publié en 2000 par le PNAC, traduction française proposée par reopen911

• Portail des associations • Portail des années 1990 • Portail des années 2000 • Portail de Washington, D.C.

132 -Bernard Kouchner « Il est membre suppléant de la Commission des affaires constitutionnelles du Parlement européen, et il fait campagne en 2005 pour le « oui » au référendum sur le traité constitutionnel. Il est membre (juin 2006) du conseil d’administration des laboratoires d'idées Notre Europe 1 et Les Amis de l'Europe. Bernard Kouchner a connu une vie militante, qui l'a conduit à adhérer à l'Union des étudiants communistes, au début des années 1960, au Parti socialiste, au PRG, puis à nouveau au Parti socialiste. Militant de l'action humanitaire et du droit d'ingérence, il est plusieurs fois secrétaire d'État et ministre (Action humanitaire, Santé) au sein des gouvernements socialistes de Michel Rocard, Édith Cresson, Pierre Bérégovoy et Lionel Jospin. De 1999 à 2001, il exerce les fonctions de Haut représentant du secrétariat général de l'ONU au Kosovo. En 1963, il publie dans Clarté une « Lettre à un moderne Rastignac » où il conseille à ceux qui veulent réussir de décrier la société : « Je suis communiste et Rastignac. Paradoxe ? Détrompez-vous ; le mélange n'est pas détonnant. Il est même étonnamment efficace. Vous riez ? Je vous attends…15 »

Le « French doctor » des années 1970 deviendra ministre de différents gouvernements de gauche et de droite. En 2007, il soutient la candidature de Ségolène Royal. Il voudrait une alliance avec François Bayrou. Il critique Nicolas Sarkozy, puis devient son ministre des Affaires étrangères. Dans son livre « Le Monde selon K », Pierre Péan révéla des liens privilégiés entre Bernard Kouchner, Omar Bongo (42 ans président du Gabon, décédé en 2009) et Denis Sassou-Nguesso (28 années à la Présidence du Congo, en exercice), lui permettant le mélange de ses activités publiques et privées en Afrique, par l’intermédiaire de deux sociétés, Africa Steps et Iméda. En 2002, Total (où le Qatar vient d’entrer à hauteur de 2% début 2012) avait fait appel à Bernard Kouchner, payé 25 000 euros, pour un rapport affirmant que ce groupe pétrolier ne pouvait aucunement être mis en cause pour son comportement en Birmanie. Pourtant en 2005, un accord amiable sera conclu entre Total, une association birmane ayant contesté le rapport, et huit ressortissants birmans. Hubert Védrine, ancien ministre socialiste des Affaires étrangères, dit de lui : « Ça m’a fait rire de lire que Bernard Kouchner était allé faire une conférence à Washington pour mettre en garde les Etats-Unis contre le risque de parler à l’Iran. Faudrait pas qu’on soit les derniers néo- conservateurs du système ». Michel Collon : Kouchner, le vrai et le faux

-Atlantic Council : l’officine de propagande de l’OTAN In Articles on 10 novembre 2014 at 2 h 04 min Fondé en 1961, l’Atlantic Council (Conseil de l’Atlantique) se proclame « cercle de réflexion atlantiste influent auprès de l’OTAN« . L’Atlantic Council publie des documents favorables à la coopération transatlantique et internationale. Il déclare encourager ainsi le libre-échange entre les deux continents et, dans une moindre mesure, avec le reste du monde.

« Idées, Influence, Impact. » Thinktank ou machine de guerre? Selon sa charte, l’Atlantic Council est, depuis sa création, une institution non partisane, avec des membres modérés des deux tendances « gauche et droite ». En dépit de ses connexions, le Conseil

133 se dit indépendant du gouvernement des États-Unis et de l’OTAN. A / Qui sont ses intervenants ? Zbigniew Brzezinski, grand stratège néocon. Très présent sur ce forum, Zbigniew Brzezinski est le géostratège qui a conseillé les présidents Jimmy Carter, George W. Bush et Barack Obama. L’Atlantic Council offre à Zbigniew Brzezinski une tribune permanente, lui permettant par exemple de rabâcher sans relâche son couplet favori du moment : « il est dans l’intérêt des américains que l’occident arme l’Ukraine« . Le fait que le gouvernement de Kiev utilise des groupes paramilitaires ouvertement néo-nazis comme le bataillon Azov ne gêne absolument pas cet « accro » à la domination mondiale qui parfois ne masque même pas ses intentions. En 1998, lors d’une conférence, Brezinski déclarait : « L’Ukraine constitue l’enjeu essentiel [pour soumettre l’Eurasie] […]. Si l’occident devait choisir entre une Ukraine démocratique et une Ukraine indépendante, ce sont les intérêts stratégiques et non des considérations démocratiques qui devront déterminer notre position. » Dans un entretien accordé au Nouvel Observateur en janvier de la même année (1998), Brzezinski explique « Pourquoi et comment il a financé Ben Laden en Afghanistan ». Une discussion filmée entre deux invités de l’Atlantic Council nous éclaire davantage : le sénateur démocrate Chris Murphy et le sénateur républicain John McCain débattent sur le thème du jour « le rôle des États-Unis dans la sécurité européenne« . Et quand John McCain s’intéresse à notre sécurité, cela devient vraiment préoccupant. Rappelons en effet qu’ il ne fut pas gêné de s’afficher avec Oleh Tyahnybok, le néo-nazi ukrainien. Et le même McCain soutenait en 2011 les rebelles de Libye et en 2013 ceux de Syrie. Résultat : Partout les islamistes sont les nouveaux maîtres de la Libye, et les djihadistes ont même désormais leur Etat à cheval entre la Syrie et l’Irak. Anders Fogh Rasmussen est également très présent dans les dossiers et conférences de l’Atlantic Council. Ancien premier ministre Danois, Anders Fogh Rasmussen a fortement soutenu dans la « période Bush » la guerre en Irak de 2003. Rasmussen affirmait « L’Irak a des armes de destruction massive. Ce n’est pas quelque chose que nous pensons, c’est quelque chose que nous savons. » Toutefois une contrevérité, même de ce calibre, ne l’a pas empêché de devenir le 12ème secrétaire général de l’OTAN (du 1er août 2009 au 1er octobre 2014). En Avril 2014, l’ex maoïste, ex Premier ministre du Portugal et 11ème président de la Commission européenne José Manuel Barroso, s’est déplacé à Washington pour recevoir le Prix du Leadership 2014 de l’Atlantic Council. Une distinction qui peut s’expliquer par le fait qu’un an auparavant, Barroso l’ultra- libéral avait relancé le Marché transatlantique, vaste espace économique, politique et militaire dominé par les Etats-Unis. Mme Clinton avait qualifié ce projet d’ « OTAN économique ».(à propos de M. Barrosos, consulter le site de l'UPR et noter qu'il vient d'être recruté par Goldman Sachs, la banque US qui a donné à l'UE tant de « grands responsables » dévoués aux intérêts américains) B / A quoi ressemblent les débats organisés par l’Atlantic Council ? L’une des spécialités de l’Atlantic Council est la mise en place de tables rondes qui ont actuellement pour objectif de convaincre de la permanence du leadership des États-Unis dans un monde souvent qualifié de « post-occidental ». Prix du meilleur citoyen global, parmi les nominés: Shimon Peres, président d’Israël ou encore Petro Poroshenko, président d’Ukraine Ces rencontres réunissent un panel de représentants des gouvernements des affaires et de la sphère

134 politico-médiatique. Par exemple : « Macro-tendances 2030 : les États-Unis pourront-ils rester leader dans un monde post-occidental ? » Pour animer ce débat, une directrice de la Fondation Bertelsmann à Washington DC, Annette Heuser, un néocons historique, Robert Kagan, chef de file des néo-conservateurs et cofondateur avec William Kristol du think tank « Project for the New American Century » (PNAC), et pour parfaire le tout, Moisés Naím, Directeur exécutif du FMI, fabricant de misère comme l’a montré John Paul Kampfner pour la BBC. Moisés Naím est également chroniqueur pour de nombreux journaux dont El Pais, The New York Times et Slate en France (sélectionné par l'auteur). Naím est enfin membre du conseil d’administration de la « Dotation nationale en faveur de la Démocratie » (NED, National Endowment for Democracy), une fondation financée par le gouvernement américain. Un des fondateurs de la NED, Allen Weinstein, expliquait au Washington Post que « bien des choses qu’ils [à la NED] faisaient maintenant étaient faites clandestinement par la CIA 25 ans auparavant » Autres intervenants sur ce fil de discussion du site de l’Atlantic Council, cette fois consacré au droit maritime, nous retrouvons entre autres Leon Panetta, Directeur de la CIA et ancien secrétaire général de la Maison Blanche sous Bill Clinton, John Negroponte, ambassadeur américain qui soutenait secrètement les Escadrons de la mort au Honduras, Bruce Josten de la Chambre de Commerce américaine, et enfin Martin J. Durbin de l’American Petroleum Institute. De facto ces « dialogues » n’ont rien de démocratique. Il n’y a pas le moindre débat contradictoire à l’Atlantic Council, seulement des recherches de convergences d’intérêts entre lobbyistes cumulards qui partagent des points de vue similaires sur la plupart des questions d’ordre économique ou géostratégique. En substance, la préoccupation principale de ces échanges peut se résumer en deux points : 1. Les Etats-Unis sont en train de perdre leur leadership et tout doit être mis en oeuvre pour récupérer la première place. 2. Pour y parvenir, il est primordial de favoriser au maximum la réduction de la réglementation financière sur les sociétés transnationales. (souligné par l'auteur) C / Qui sont les directeurs et les directeurs honorifiques de l’Atlantic Council ? Parmi un parterre bien choisi de fonctionnaires de l’armée américaine, d’affairistes ou bien de professionnels des médias, il semble instructif de dégager quelques personnalités et de relater certains de leurs faits d’armes qui indéniablement confirment le caractère cynique et suprémaciste de l’Atlantic Council. Kissinger, Baker, Albright, Powell, Clinton et Kerry. Henry Kissinger, pour qui « Les grandes puissances n’ont pas de principes, seulement des intérêts ». En parfait accord avec sa logique, alors qu’il était Secrétaire d’État, il confessa entre autre à Nixon : « Aussi désagréables que soient ses actes, le gouvernement de Pinochet est meilleur pour nous que ne l’était Allende« . Madeleine Albright, Secrétaire d’État sous Clinton, protégea certains criminels alliés à l’OTAN durant la guerre de Yougoslavie. Dans la même période, elle justifia publiquement la mort de 500 000 enfants irakiens par embargo. Colin Powell, secrétaire d’État de l’administration Bush, prononça à l’ONU un discours sur les armes de destruction massive en Irak. Les « preuves » qu’il avançait se sont révélées fausses, mais ce rapport servit de prétexte à Bush pour envahir l’Irak. Condoleezza Rice fut aussi secrétaire d’État sous les deux mandats de George W. Bush. Rice fait

135 également partie de plusieurs conseils d’administration, dont celui du pétrolier Chevron. En avril 2014, sa nomination chez l’un des acteurs majeurs du stockage de données en ligne Dropbox occasionna une polémique. Wesley Clark, ancien général des Forces armées des États-Unis, fut chargé de diriger l’opération « Allied Force » (78 jours de bombardements sur l’ex Yougoslavie). Wesley Clark fut le conseiller militaire d’Hillary Clinton pour la primaire démocrate de 2008. H. Kissinger et J. Baker. Malgré leurs 91 et 84 ans ils restent des éléments clés de la politique étrangère des USA. James Baker, chef de cabinet de Reagan, directeur de campagne puis secrétaire d’état de GH Bush, conseillé juridique de GW Bush pour faire annuler la victoire d’Al Gore , conseiller du groupe Carlyle et président d’une commission sur l’Irak. Il prôna le maintient des USA en Irak. Très actif et pro-guerre sur les fronts Syrien et Ukrainien de l’impérialisme US. Frank C. Carlucci, ex directeur de la CIA, deviendra directeur du Carlyle Group, une société qui unissait par de multiples intérêts les familles Bush et Ben Laden. Robert M. Gates, directeur de la CIA lui aussi, deviendra secrétaire à la Défense des États-Unis sous la présidence de Bush et conservera son poste sous Obama. Dans les années 1980, il fut impliqué dans le scandale Iran-Contra. Source : http://www.atlanticcouncil.org/images/publications/Companions_in_Competitiveness.pdf D / Qui finance l’Atlantic Council ? « L’Atlantic Council exprime sa gratitude envers les fondations privées, les agences US et étrangères, les entreprises et les personnalités qui le soutiennent. Ces soutiens permettent au Conseil de mettre en œuvre une propagande de qualité et de produire des analyses régulières, entérinant par là-même la poursuite de sa mission« . Atlantic Council Supporters. Nous pouvons dégager six catégories de pourvoyeurs de fonds : l’Industrie de l’armement (essentiellement aéronautique et spatiale), le pétrole et l’énergie, la finance internationale, les médias et la communication, les Départements d’État américains, et les gouvernements. Quelques uns des sponsors : multinationales de l’armement, de l’énergie, de la finance ou encore des médias… 1 L’industrie de l’armement Airbus Group, Lagardère et Daimler sont très présents dans le secteur aéronautique civil et militaire. Safran est un grand groupe industriel et technologique français très actif sur les marchés civils, militaires et spatiaux. Thales est spécialisé dans l’aérospatial et la défense. Avascent est une entreprise au service de la défense et de l’aéronautique. Sikorsky Aircraft Corporation est un constructeur américain d’avions et d’hélicoptères. Qineti est une multinationale britannique spécialisée dans le domaine de la défense. MDPA Missiles Systèmes est un sous-traitant d’Airbus Group. ATK est une entreprise américaine jouant un rôle majeur dans les secteurs de l’armement. Textron est une entreprise américaine du secteur de l’aéronautique et de la défense, comme Raytheon spécialisée elle dans les domaines des systèmes de défense et l’électronique. ANA All Nippon Airways est une compagnie aérienne japonaise partenaire à la fois de Boeing et d’Airbus. Lockheed Martin est la première entreprise américaine et mondiale de défense et de sécurité. Leidos travaille avec le ministère américain de la Défense, et le constructeur automobile suédois Saab est aussi un constructeur aéronautique militaire et civil. 2 Le pétrole et l’énergie

136 Chevron Corporation est la deuxième compagnie pétrolière des États-Unis. Grupa Lotos SA est une holding pétrolière semi-publique polonaise. ENI est la société nationale italienne des hydrocarbures. Areva est une multinationale française du secteur de l’énergie. General Electric est un conglomérat américano-canadien qui opère aussi dans le domaine de l’énergie. 3 La finance Internationale Bank of America, Merrill Lynch sont des banques d’investissement. Kulczyk Investments SA est une société d’investissement internationale. Barclays Capital est une banque d’investissement britannique. Blackstone est une banque d’investissement américaine et un important gestionnaire de hedgefunds. Intesa Sanpaolo est une banque italienne. MCB est la quatrième plus grande banque du Pakistan. Nous remarquons encore la banque Rockefeller Financial (groupe Rockefeller), la Banque Royale du Canada, et Kirkland & Ellis LLP qui est une société internationale d’avocats d’affaires. Enfin la Deutsche Bank est la plus importante banque d’affaire allemande. 4 Les médias et la communication Thomson Reuters est une agence de presse canadienne, Orange Pologne est le principal opérateur polonais de télécommunications, Bloomberg LP est un groupe financier américain spécialisé dans les services aux professionnels des marchés financiers. Tenir Ihlas est une agence de nouvelles turque. Bertelsmann est représenté au sein de l’Atlantic Council par sa « fondation Bertelsmann » connue pour promouvoir les idées néolibérales. Le groupe allemand Bertelsmann est l’un des premiers groupes de presse européen. Century Fox est l’une des plus grandes sociétés de production cinématographique US. IBM est une multinationale présente dans les domaines liés au matériel informatique et leurs réseaux, et Microsoft est la première entreprise mondiale d’informatique et de micro-informatique. 5 Les Départements d’État américains Département de l’énergie des USA, Département de l’Armée de l’Air des USA (US AIR FORCE), Département de la Marine des USA (US NAVY), Conseil du Renseignement national des USA, Département d’État des USA (Ministère des Affaires étrangères). 6 Les gouvernements Canada – Commission européenne – Émirats Arabes Unis – Estonie – Géorgie – Grande-Bretagne – Hongrie – Irlande du Nord – Koweït – Lettonie – Lituanie – Luxembourg – Macédoine- Monténégro – République slovaque – République tchèque – Singapour – Taipei.

L’Atlantic Council en France 1 Nicholas Dungan, un homme d’influence Dungan, sur les plateaux de France24 et BFM, présenté comme « expert » des USA à l’IRIS Nicholas Dungan est le principal représentant de l’Atlantic Council sur les plateaux de la télévision française. En 2013, l’employé de la CIA et de la NSA, Edward Snowden révèle que les services secrets américains espionnent les européens dans des proportions considérables, un dossier très embarrassant pour les États-Unis qui s’apprêtent à ouvrir les négociations sur le traité de libre échange avec l’UE. Sur France 24, Dungan revient sur les révélations de Snowden. Si dans un premier temps il souligne l’aspect néfaste de cette affaire en termes d’image, très vite il fustige la démarche de Snowden en proférant que celui-ci a violé la loi et il invoque la lutte contre le terrorisme pour minimiser l’attitude étasunienne. En fait, il nous ressert un argument qui,

137 aujourd’hui encore chargé d’émotion, se suffit à lui-même, mais qui avant tout ici permet de se débarrasser des questions embarrassantes : « Il faut comprendre qu’aux États-Unis, on ne s’est par remis des attentats du 11 septembre 2001. » (Les Etats-Unis n’ont jamais cessé d’espionner la France). Dungan conclura son intervention en affirmant que l’ensemble des pays européens veulent ce traité de libre échange… Rappelons qu’en 2014, année des élections européennes, 55 % des Français n’ont jamais entendu parler de ce traité. Le politologue Nicolas Dungan est membre de la Chatham House, une société savante britannique ultra droitière qui accueille des conférenciers influents : , Madeleine Albright, Ellen Johnson Sirleaf, Abdullah Gül, Anders Fogh Rasmussen, … Nicholas Dungan est également Conseiller spécial à l’IRIS qui est dirigé par le journaliste Pascal Boniface, mais surtout Nicholas Dungan est un ex-Président de la French American Foundation, un Cheval de Troie du libéralisme américain dans la société française qui compte parmi ses anciens disciples, communément appelés « Young Leaders », une ribambelle de journalistes et de personnages politiques français de droite comme de gauche. 2 Les parutions de l’Atlantic Council influencent-elles les opinions françaises ? Avec le temps, l’Atlantic Council s’est imposé dans les médias français comme une référence en matière d’économie et de politique internationale. Aussi il est très courant que des journaux tels que Le Monde, Le Point, ou Le Figaro utilisent les analyses de l’Atlantic Council. Et même davantage : il y a une véritable « interaction » entre la presse occidentale et l’Atlantic Council qui à son tour reprend les chroniques du Monde, du Figaro, mais aussi du quotidien économique et financier britannique Financial Times, ou encore de l’hebdomadaire néoconservateur The Weekly Standard. Finalement, dans sa grande majorité, la presse de masse française a un lien direct avec l’Atlantic Council qui peut poursuivre ainsi sans trop d’embarras son entreprise à marche forcée d’ « OTANisation des esprits ». (souligné par l'auteur) L’Atlantic Council, qui a également pour vocation d’influer par une orientation des débats et discours toujours favorable aux intérêts américains, dispose depuis 2008 de son propre réseau de « jeunes leaders ». En 2009, l’Atlantic Council organisa à Strasbourg une conférence des jeunes atlantistes. A l’ordre du jour « comment inculquer la paix et la sécurité dans le monde ? » Difficile de faire plus grotesque quand on sait que le discours d’ouverture fut prononcé par… Bernard- Henri Lévy, le « philosophe » va-t-en-guerre qui sponsorise une nouvelle guerre « humanitaire » ou « démocratique » tous les six mois. Enfin l’Atlantic Council distille un nombre considérable de rapports qui très fréquemment servent de supports techniques à certaines institutions françaises comme par exemple le Consulat Général de France, ou bien l’Etat-major des armées, ou encore l’Institut de Recherche Stratégique de l’École Militaire. Conclusion L’Atlantic Council est un lobby qui regroupe en son sein une multitude d’anciens secrétaires d’État américains, et il entretient des liens étroits avec l’état américain. L’Atlantic Council est financé par des états et des multinationales qui engrangent des bénéfices colossaux dans les secteurs liés directement ou indirectement à la guerre. Véritable bélier au service des guerres sous faux prétextes, (Yougoslavie, Afghanistan, Irak, Libye), l’Atlantic Council est la représentation parfaite du réseau de propagande efficace et moderne qui réunit les plus hauts niveaux des différents pouvoirs (politiques, médiatiques, financiers, administratifs et militaires). L’OTAN possède avec l’Atlantic Council un outil idéal pouvant convaincre du bien-fondé de ses actions un public très large du fait des différentes apparences de ses mandataires. Ces

138 propagandistes ont un autre avantage, celui de communiquer sans jamais avoir en face le moindre contradicteur.(sélectionné par l'auteur)

• A propos Ce site (observatoire du néoconservatisme) se propose de faire connaître au public francophone la nébuleuse française au service de l’idéologie néo-conservatrice, un courant de pensée né aux États-Unis dans les années 70, dont les promoteurs ont accédé de façon coordonnée au pouvoir en 2001, à l’origine des grands bouleversements géopolitiques du XXIe siècle.

-Washington sur Seine ? Ces ministres de François Hollande qui ont été formés par les Américains (source Atlantico)

La French American Fondation est connue pour sa formation, les "Young Leaders", réservée à une dizaine de jeunes surdiplômés chaque année. Sur les huit socialistes sélectionnés comme Young Leaders depuis François Hollande en 1996, six rentrent dans son gouvernement cette semaine. Le plus "atlantiste" n'est pas toujours celui qu'on croit...

"Hollande l'Américain"

En septembre 2006, lors de sa visite aux États-Unis, Nicolas Sarkozy avait prononcé un discours à la French American Foundation (FAF), rappelant la nécessité de « rebâtir la relation transatlantique », paraphrasant ainsi les statuts de la fondation dont l’objectif est de « renforcer la relation franco-américaine considérée comme un élément essentiel du partenariat transatlantique ». A ceux nombreux qui me demandent, à l’occasion de la visite de François Hollande à Barack Obama, « pourquoi est-ce que les journalistes ne nous parlent pas de ça, à propos de François Hollande, au lieu de nous parler de son séjour d’étudiant et de son goût des cheeseburgers dont on a rien à faire?». Qu’ils demandent donc la réponse aux journalistes qui ont l’art de nous servir ces hamburgers, préparés par les communicants, en prenant leurs lecteurs pour des cornichons ! Qu’ils la demandent en particulier aux Young Leaders des médias, aujourd’hui actionnaires ou directeurs des principales rédactions, ces copains de promo de certains de nos nouveaux ministres pour certains d’entre eux : de Laurent Joffrin (Nouvel Observateur) à Denis Olivennes (Europe 1, Paris Match et du JDD), en passant par Matthieu Pigasse, Louis Dreyfus et Erik Izraelewicz (Le Monde)… Et la liste hommes de médias Young Leaders est longue, comme on peut la lire plus intégralement dans l’enquête « Ils ont acheté la presse ». A New-York, la venue de François Hollande et de sa nouvelle équipe était attendue sereinement. Vu de la FAF, « Welcome à la Hollande team » ; on reste en terrain connu, tout est sous contrôle, on est même fier d’avoir autant de ses poulains dans la place, nous l’avons vu. Que les angoissés se rassurent : « le changement, ce n’est pas pour maintenant », n’en déplaise à Jean-Luc Mélenchon, l’allié peu atlantiste ! »

139 French-American Foundation

Forme juridique Fondation But Amélioration des relations franco-américaines

Fondation 1976, France Alain Chevalier Olivier Chevrillon Phlippe Dennery André Gadaud Jean-Louis Gergorin Pierre de Gunzburg Stanley Hoffmann Fondateurs Serge Hurtig Pierre Jouven James Lowenstein David McGovern Thierry de Montbrial Pierre Tabatoni Nicholas Wahl

34, avenue de New-York Siège 75116 Paris Structure Association loi 1901 Président Jean-Luc Allavena Site web http://www.french-american.org/ modifier « La French-American Foundation - France est la principale organisation en France qui se consacre à « renforcer les liens entre la France et les États-Unis ». Depuis sa création en 1976, elle se consacre à encourager un dialogue actif entre les deux nations. L'objectif de cette fondation est d'œuvrer à une meilleure compréhension mutuelle entre les deux pays et à la recherche de solutions partagées. Elle organise des séminaires pour des jeunes dirigeants (Young Leaders) français et américains issus de la politique, de la finance, de la presse « à fort potentiel de leadership et appelés à jouer un rôle important dans leur pays et dans les relations franco-américaines ». La Fondation est dirigée par Jean-Luc Allave

-Histoire En 1975, plusieurs personnalités politiques, universitaires et économiques décidèrent de créer un environnement d’échanges et de débats afin d’approfondir la relation entre la France et les États- Unis. La naissance de la French-American Foundation fut officialisée en 1976 à Washington par les présidents Valéry Giscard d’Estaing et Gerald Ford, lors des célébrations du bicentenaire de la

140 Déclaration d’indépendance américaine. Le premier programme d’envergure, le programme « Young Leaders », vit le jour 5 ans plus tard, en 1981. Il s’agissait de la première grande initiative transatlantique visant à renforcer les liens entre les deux pays en encourageant la rencontre et l’échange entre futurs leaders français et américains. D’autres programmes suivirent ensuite, tel le programme « Jeunes Espoirs » créé en 2012, pour permettre à la French-American Foundation de devenir aujourd’hui l’un des acteurs majeurs de la relation franco-américaine.

Programme « Young Leaders » En 1981 vit le jour le programme Young Leaders, programme d’échanges et de rencontres entre jeunes leaders français et américains. Plus de 30 ans après, il continue de jouer un rôle-clé dans le développement des liens transatlantiques, rassemblant aujourd’hui plus de 400 dirigeants issus du monde de la haute fonction publique, de l’entreprise, des médias, de l’armée et de la recherche.

Processus de sélection Tous les ans, un jury en France et aux États-Unis sélectionne vingt français et américains destinés à occuper une position de leadership dans leur domaine, et appelés à jouer un rôle important dans la relation entre les deux pays. Les candidats retenus participent ensuite à deux séminaires de cinq jours chacun, répartis sur deux années consécutives – alternativement en France et aux États-Unis – afin d’échanger des réflexions sur des thèmes d’intérêt commun et de tisser des liens forts et durables.

Personnalités françaises ayant participé au programme « Young Leaders » Côté français, on trouve parmi ceux-ci (date d'admission entre parenthèses) : • Henri de Castries (1994, président du directoire du groupe Axa) • Emmanuel Chain (1999, journaliste) • Jérôme Clément (1982, président d’ARTE) • Laurent Cohen-Tanugi (1996, ancien vice-président de Sanofi-Synthélabo) • Annick Cojean (2000, journaliste au Monde) • Jean-Marie Colombani (1983, fondateur de Slate et ancien directeur du Monde) • Matthieu Croissandeau (2002, rédacteur en chef adjoint du Nouvel Observateur) • Jean-Louis Gergorin (1994) • Nicolas Gaume (1999, PDG de Mimesis Republic et président du Syndicat national du jeu vidéo) • Bernard Guetta (1981, journaliste à France Inter) • François Hollande (1996, président de la République française) • Stéphane Israël (2012, directeur de cabinet d'Arnaud Montebourg puis PDG d'Arianespace) • Erik Izraelewicz (1994, directeur du Monde) • Jean-Marc Jancovici (2002, ingénieur consultant pour l'ADEME, vulgarisateur dans les médias des questions énergétiques) • Jean-Noël Jeanneney (1983, président de la Bibliothèque nationale de France) • Laurent Joffrin (1994, PDG de Libération) • Alain Juppé (1981, maire de Bordeaux)

141 • (1998, journaliste au Monde) • Yves de Kerdrel (2005, éditorialiste au Figaro) • Pierre Kosciusko-Morizet (2009, PDG de PriceMinister) • Marie Lajus (2006, préfète déléguée pour l'égalité des chances) • Anne Lauvergeon (1996, ancienne présidente d’AREVA) • Philippe Le Corre (2005, professeur à SciencesPo et à l'IRIS) • Frédéric Lemoine (2007, directeur du groupe Wendel, à ce titre administrateur de Saint- Gobain) • François Léotard (1981, ancien ministre de la Défense) • Bruno Le Roux (1998, député depuis 1997 et président du groupe socialiste à l'Assemblée depuis 2012) • Emmanuel Macron (2012, ministre de l'Économie, de l'Industrie et du Numérique) • Pierre Mariani (1996, directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy de 1993 à 1995, puis responsable à BNP Paribas et enfin dirigeant de Dexia) • Alain Minc (1981, conseiller politique, économiste, essayiste et dirigeant d'entreprise) • Arnaud Montebourg (2000, ancien ministre de l'Économie) • Aquilino Morelle (1998, conseiller politique au cabinet du président de la République François Hollande) • Pierre Moscovici (1996, ministre de l'Économie et des Finances) • Philippe Naudet (2013, commandant du sous-marin nucléaire d'attaque Améthyste (S605) 1 ) • Olivier Nora (1995, président des Éditions Fayard) • Christine Ockrent (1983, journaliste) • Denis Olivennes (1996, président d'Europe 1) • Valérie Pécresse (2002, ancienne ministre de l'Éducation nationale) • Éric Raoult (1994, ancien député et ancien ministre) • Alain Richard (1981, ministre de la Défense tout le long du gouvernement Jospin) • Pierre Richard (1984, fondateur et président de Dexia de 1987 à 2008) • Pascal Riché (2000, co-fondateur de Rue89) • Guy Sorman (1982-1984, essayiste libéral) • Jacques Toubon (1983, député UMP) • Marisol Touraine (1998, ministre des Affaires sociales et de la Santé) • Najat Vallaud-Belkacem (2006, ministre des Droits des femmes) • Laurent Vigier (2010-2011, PDG de la branche internationale de la Caisse des dépôts et consignations) • Cédric Villani (2012-2013, Médaillé Fields, en tant que membre d'EuropaNova) Youngs leaders ?

• Créé en 1981, le programme Young Leaders est le programme phare de la French- American Foundation et continue de jouer un rôle clé dans l’approfondissement de la coopération entre la France et les Etats-Unis. Il rassemble aujourd’hui 400 dirigeants issus du monde de l’entreprise, de la haute fonction publique, de l’armée, des médias et de la recherche. • Chaque année, vingt français et américains âgés de 30 à 40 ans et appelés à jouer un rôle important dans les relations franco-américaines, sont sélectionnés par un jury en France et aux Etats-Unis. Les candidats retenus participent à deux séminaires de cinq jours chacun, sur

142 deux années consécutives – alternativement en France et aux États-Unis – afin d’échanger sur sujets d’intérêts communs aux deux pays et tisser des liens d’amitié durable. • La promotion 2014 s’est réunie en séminaire cette année à Bordeaux, du 8 au 12 octobre, et a été reçue par le Maire Alain Juppé, lui-même Young Leader. • Les Young Leaders ont rencontré des dirigeants économiques et industriels locaux et ont visité des sites stratégiques de la région, comme celui du Laser Megajoule. Le groupe s’est également rendu à bord de la frégate l’Hermione, à l’occasion de son escale à Bordeaux. Des tables rondes Young Leaders ont été organisées sur des thèmes d’actualité, autour de dirigeants d’entreprises et d’anciens Young Leaders comme Michel Combes, Directeur Général d’Alcatel Lucent, et Philippe Manière, Managing Director de Footprint > consultants. • (...) • Les commissions de travail rassemblent experts et professionnels sur un thème d’intérêt commun entre la France et les États-Unis. Les objectifs de ces commissions sont d’une part de répondre à des problématiques concrètes rencontrées par les membres des commissions dans le cadre d’un échange de bonnes pratiques, et d’autre part de formuler des recommandations avec les acteurs-clés. • Source : Annuaire des Young Leaders/ site « young leaders »

Prix Washburne pour l'égalité des chances En 2013, pour la seconde édition, la cérémonie de remise du Prix s’est tenue le 14 mai à la résidence de l’Ambassadeur des États-Unis en France, Charles H. Rivkin, et en présence de Fleur Pellerin, Ministre déléguée auprès du Ministre du Redressement productif, chargée des PME, de l’Innovation et de l’Économie numérique, et Young Leader 2012. Une médaille à l’effigie d’Elihu Washburne a été remise aux deux lauréats, Worldwide Flight Services et Coca-Cola Enterprises.

-Jacques Delors : un deus ex machina pour une EU financiarisée et mondialisée à l'ombre des Etats Unis (source Wikipedia) Un absent remarquable dans cette liste : Jacques Delors. On doit bien pouvoir vérifier ses liens organiques avec l'atlantisme dont il est, sous le drapeau européen, un fidèle serviteur. Il faut donc partir à la pêche aux informations, tant le personnage est discret, secret, et féroce. L'air patelin du bonhomme ne doit pas en effet cacher la réalité outrancière de l'idéologue au service des oligarchies, activisme qu'il a obstinément mis en œuvre depuis au moins 1981 (plus tôt sans doute?). « Jacques Delors, né le 20 juillet 1925 à Paris, est un homme politique français. Il est ministre de l'Économie, des Finances et du Budget de 1981 à 1984, maire de Clichy-la- Garenne en 1983-1984, et est aussi connu pour son engagement européen : il est notamment président de la Commission européenne de 1985 à 1994 et fondateur de l’institut de recherche « Notre Europe - Institut Jacques Delors» dans le but de « penser l'unité européenne ». Donné favori à l'élection présidentielle française de 1995, il renonce à se présenter.

143 (...)

Engagements politiques et syndicaux Rattaché à l'origine à la famille de pensée démocrate-chrétienne et syndicale, il participe aux activités de La Vie Nouvelle, mouvement catholique (les « chrétiens de gauche ») d'inspiration personnaliste qui jouera un rôle essentiel dans l'émergence de la « deuxième gauche », au sein duquel il crée en 1959 le club de réflexion Citoyens 60 ainsi que la revue du même nom, qu'il dirige jusqu'en 1965, et travaille en liaison avec le club Jean Moulin. C'est cette même année (1959) qu'il devient membre de la section du plan et des investissements du Conseil économique et social (CES) jusqu'en 1961. À cette époque, il est l'auteur, sous le pseudonyme Roger Jacques, d'écrits d'inspiration marxiste (« ! » point d'exclamation ajouté par l'auteur) dans des revues d'extrême-gauche. Il est rapidement remarqué et devient « expert économique » à la CFTC. Jacques Delors en tant que militant syndicaliste a toujours exprimé une méfiance du Marché commun car il conduirait selon lui à étrangler l'économie française, c'est ce qui ressort du livre sur Jacques Delors La Face cachée de Jacques Delors de Romain Meyret. (note de l'auteur : il était clairvoyant!) En 1964, Jacques Delors suit le courant majoritaire non confessionnel du syndicat devenu Confédération française démocratique du travail (CFDT) dont il est depuis resté adhérent. Il est également membre un temps du Parti socialiste unifié (PSU).

De Chaban-Delmas à Mitterrand En 1962, Jacques Delors entre au Commissariat général du Plan en tant que chef du service des affaires sociales et culturelles, poste qu'il garde jusqu'en 1969 pour devenir chargé de mission auprès de Jacques Chaban-Delmas jusqu'en 1972. À ce titre, il influence grandement le projet de « nouvelle société » que souhaitait promouvoir celui-ci. Participant à la mise en œuvre de ce programme, il est notamment l’inventeur des contrats de progrès et l’inspirateur de la loi sur la formation permanente (1971). De 1969 à 1974, il est aussi secrétaire général auprès du Premier ministre, pour la formation professionnelle et la promotion sociale. De 1973 à 1979, il est membre du Conseil général de la banque de France et occupe sur la même période le poste de membre du Conseil de la banque de France. De 1974 à 1979, il est professeur de gestion à Paris IX. En 1974, il crée aussi le club de réflexion politique Échanges et projets ; c'est cette même année qu'il adhère au Parti socialiste. Durant, le congrès de Metz, il va rejoindre le camp de François Mitterand qui était pour une projet d'une économie administrée et dirigée par l'État contre l'aile modéré du Parti Socialiste, ce choix sera critiqué plus tard par Michel Rocard qui est contraire à ses prises de positions pour une économie de marché. Il soutient François Mitterrand qui exprime son opposition au capitalisme et refuse de s'allier avec Michel Rocard pour une voie médiane [réf. nécessaire] . De 1975 à 1979, il est directeur du Centre de recherche Travail & société. En 1976, il est choisi comme délégué national du PS pour les relations économiques internationales, fonction qu'il occupe jusqu'en 1981. .

Ministre des Finances Jacques Delors est élu député européen (président de la commission économique et monétaire) en 1979, mais démissionne de ce poste en 1981. Sur cette période, il est président de la commission

144 économique et monétaire du PS. En 1981, il est nommé au poste de ministre de l'Économie et des finances dans le premier gouvernement de Pierre Mauroy. De 1981 à 1984, il est successivement : • du 22 mai 1981 au 23 juin 1981 : ministre de l'Économie et des Finances, dans le gouvernement Pierre Mauroy (1) ; • du 23 juin 1981 au 22 mars 1983 : ministre de l'Économie et des Finances, dans le gouvernement Pierre Mauroy (2). À ce titre, il est l'un des initiateurs du tournant de la rigueur à partir de 1982 ; il est chargé en plus du Budget à partir de mai 1983. Bénéficiant de la confiance des milieux économiques internationaux (« ! »), il applique d’abord une politique de « rupture » pendant la période dite de l’« état de grâce » : nationalisations, dévaluations du franc, amélioration de l’efficacité des circuits de financement, et politique de relance. Après une première pause dans les réformes sociales qu’il propose dès 1982, Jacques Delors encourage le maintien de la France dans le Système monétaire européen (SME) et pratique une politique de rigueur. Il supprime, notamment, l'échelle mobile des salaires en 19825, l'équilibre budgétaire sera un objectif recherché, mais il vante le mérité du modèle reaganien de création d'emploi en omettant de mentionner le déficit du budget fédéral américain ; la lutte contre l'inflation bénéficiera de la baisse générale des matières premières, reste silencieux sur le redéploiement de la politique industrielle dans le contexte du SME et de l'avance de l'économie allemande industrielle. Il demeure fidèle à la priorité sur la lutte contre l'inflation et le maintien d'une parité fixe avec le Deutsche Mark, ce qui entame la politique du Franc fort ou du Franc Mark. Cette politique sera accusée de l'amorce du déclin industrielle français et l'abandon de champions nationaux industrielle dans les secteurs dominés par les allemands afin de ne pas contrecarrer le politique franco- allemande et un retournement d'alliance de l'Allemagne avec le Royaume-Uni ; • du 22 mars 1983 au 17 juillet 1984 : ministre de l'Économie, des Finances et du Budget, dans le gouvernement Pierre Mauroy (3).

Président de la Commission européenne (...) Sa volonté d'aller de l'avant dans la construction européenne lui fait croiser l'enthousiasme de la Table ronde des industriels européens (ou European Round Table), lobby fondé par Étienne Davignon qui rassemble les dirigeants des grandes multinationales européennes. En effet à l'époque, l'idée d'un grand marché européen ne constituant pas une priorité pour la majorité des gouvernements, il se tourne donc vers les industriels afin que la construction ne s'enraye pas. Membres de la « Table ronde » : • César Alierta Izuel - Telefónica • Nils S. Andersen - A.P. Møller-Mærsk • Paulo Azevedo - Sonae • Franco Bernabè - Telecom Italia • Kurt Bock - BASF • Jean-François van Boxmeer - Heineken • Carlo Bozotti - STMicroelectronics • Svein Richard Brandtzaeg - Norsk Hydro • Antonio Brufau - Repsol YPF • Ton Büchner - AkzoNobel

145 • Paul Bulcke - Nestlé • Jean-Pierre Clamadieu - Solvay • Vittorio Colao - Vodafone • Ian Davis - Rolls-Royce • Rodolfo De Benedetti - CIR Group • Pierre-André de Chalendar - Saint-Gobain • Christophe de Margerie - Total • Marijn Dekkers - Bayer • John Elkann - Fiat • Stephen Elop - Nokia • Tom Enders - EADS • Ignacio S. Galá - Iberdrola • Antti Herlin - KONE Corporation • Zsolt Hernádi - MOL • Heinrich Hiesinger - ThyssenKrupp • Joe Hogan - ABB • Frans van Houten - Royal Philips Electronics • Pablo Isla - Inditex • Jacek Krawiec - PKN Orlen • Bruno Lafont - Lafarge • Thomas Leysen - Umicore • Gary McGann - Smurfit Kappa Group • Gérard Mestrallet - GDF Suez • René Obermann - Deutsche Telekom • Dimitri Papalexopoulos - Titan Cement • Olof Persson - AB Volvo • Jan du Plessis - Rio Tinto • Norbert Reithofer - BMW Group • Gerhard Roiss - OMV • Kasper Rorsted - Henkel • Güler Sabanci - Sabanci Holding • Paolo Scaroni - Eni • Severin Schwan - F. Hoffmann-La Roche • Jim Snabe - SAP • Carl-Henric Svanberg - BP • Johannes Teyssen - E.ON • Peter R. Voser - Royal Dutch Shell • Jacob Wallenberg - Investor AB • Willie Walsh - IAG

Secretary General • Brian Ager

146 En janvier 1985, alors qu'il entre en fonction à Bruxelles, il reprend nombre de thématiques que le président de l'European Round Table (et de Philips) - Wisse Dekker - avait publié dans : Europe 1990 : un agenda pour l'action. Parmi elles : faire tomber les barrières commerciales et les frontières fiscales. Objectifs parfaitement atteints selon l'économiste américain Rawi Abdelal qui avance que Jacques Delors a joué un rôle déterminant dans la dérégulation des marchés financiers en décidant « de pousser la libéralisation bien plus loin que ne le prévoyait à l’origine le programme de marché unique ».(souligné par l'auteur). Il introduit notamment la directive 88 (361) sur les mouvements de capitaux en juin 1988 précisant qu'« aucune transaction, aucun transfert de capitaux n’échappait à l’obligation de libéralisation »6. Delors est alors persuadé (note de l'auteur :?) que la création du marché intérieur ne peut se faire sans une circulation des capitaux totalement libre. En 1991, lors de l'émission La Marche du siècle sur France 3 il parle de cette aide qui dynamisa l'Union européenne : « Lorsque j'ai lancé en 1984-1985, le projet de grand marché, la Table Ronde des Industriels a soutenu ce projet. Et aujourd'hui, les industriels invitent les gouvernements à aller plus vite encore, et ce n'est pas moi qui leur dirais le contraire : nous avons bien besoin de cette poussée salutaire, sinon nous aurions tendance à ne pas aller au rythme où les événements vont. » Il souhaite ainsi une Europe qui devienne un pôle aussi compétitif que les États-Unis ou l'ensemble asiatique ; une fois cette condition atteinte l'Europe sociale pourrait se construire. Cette idée de l'Europe allait dans le sens contraire de celle de François Mitterrand qui en 1978 déclarait : « Nous voulons l'Europe des travailleurs, contre l'Europe marchande, l'Europe des profits, l'Europe des grandes affaires». (« ! » ajouté par l'auteur) Pendant son long mandat ont lieu la signature des accords de Schengen (juin 1985), l'élargissement de l'Europe communautaire (entrée de l'Espagne et du Portugal en 1986), l'adoption de l'Acte unique européen (1986), la réforme de la politique agricole commune (PAC, associée à la création du Programme européen d'aide aux plus démunis (« on en voit les résultats aujourd'hui » ajouté par l'auteur), Delors soutenant la proposition de Coluche et la signature du traité de Maastricht (1992). Artisan d'un renforcement de l'exécutif européen, Jacques Delors représente la Communauté européenne, à la manière d’un chef d'État, lors des grands sommets internationaux (réunions du G7 et de l'Organisation de coopération et de développement économique, etc.). Il est l'instigateur du livre blanc de la Commission recommandant la création d'un grand marché européen régulé par la mise en place de solidarités nouvelles (« ? »). Ce livre blanc débouche sur la signature de l'Acte unique en février 1986, qu'il appelle « mon traité favori » mais la partie monétaire ignore les contraintes sur la croissance et l'emploi pour l'économie et elles seront maintenues par le traité d'Amsterdam sous le qualificatif de « Pacte de croissance et de stabilité ». Il rejette cette règle lors de la crise de l'euro. En 1989, il préside le Comité dit « Delors », composé d'experts et des gouverneurs des banques centrales des douze pays membres. Le rapport du comité Delors ouvre la voie à la création de la monnaie unique. Viennent ensuite l'adoption du « paquet Delors I » (1987) et du « paquet Delors II » (1992).

Après 1994 (...) En 1995, il préside la commission internationale sur l'éducation pour le XXIe siècle à l'UNESCO jusqu'en 1998. L'année suivante, il devient président du conseil d'administration du Collège

147 d'Europe, à Bruges (jusqu'en 2000) et président de l'association Notre Europe (précisément de mars 1996 à 2004). En 2004, Jacques Delors signe la pétition initiée par Pierre Larrouturou, Michel Rocard et Stéphane Hessel, proposant un projet de « Traité de l'Europe sociale» (« ! »). En retrait de la vie politique, il continue d’intervenir régulièrement dans le débat public, par la presse notamment, et se prononce en faveur du traité établissant une Constitution pour l’Europe à l’occasion du référendum organisé en France en mai 2005. (Note de l'auteur : la Non a triomphé, puis, à l'initiative du président Sarkozy, dès son élection en 2007, le Congrès a entériné le Traité de Lisbonne, qui reprend le même projet contre donc l'avis d'une majorité de Français) À l'automne 2006, il s'engage en faveur des États généraux de l'Europe, une initiative de l'ONG EuropaNova. Fondée en 2002 par Guillaume Klossa, cette ONG a pour but de promouvoir l'intérêt général des citoyens européens. EuropaNova met en œuvre un certain nombre de programmes opérationnels visant à renforcer l'identité européenne – comme le premier programme de jeunes leaders européens "40under40" construit en partenariat avec Friends of Europe – et à contribuer au débat démocratique de proximité. Elle contribue également de manière proactive au débat d'idées en faisant des propositions opérationnelles. Parmi ces programmes : les rencontres autour de Young Leaders (souligné par l'auteur) permettent depuis 2003 à de jeunes décideurs européens de participer au débat public européen ; le programme Auditions citoyennes confronte citoyens et principaux décideurs politiques de l'Union ; le programme 40under40 rassemble chaque année et deux fois par an depuis 2011 des trentenaires de toute l'Union européenne et venant de toute discipline pour les amener à développer une compréhension commune des enjeux européens, et ébaucher des solutions de sortie de crise. Elle rend depuis 2006 un rapport annuel de la Société civile européenne au Conseil européen des Chefs d'État et de gouvernement, (…) cherche à faire progresser le débat pour des institutions communautaires plus efficaces et pour une Union européenne plus proche des citoyens. Il fédère citoyens, associations, personnalités et experts qui soutiennent la construction européenne. L’association est composée de 44 sections qui regroupent plus de 3000 membres repartis sur la France entière. Le ME-F organise régulièrement à Paris et en région des colloques, des conférences, des séminaires… Il est un lieu permanent d'échange et de rencontre pour les militants européens. "Les Jeunes Européens-France" regroupent les adhérents du ME-F âgés de moins de 35 ans dans une association autonome qui compte environ 1000 personnes. Le Mouvement Européen-France est co-organisateur aux côtés de l'ONG EuropaNova des États Généraux de l'Europe (EGE). Cette agora géante propose le temps d’une journée de débattre des enjeux européens au cours de grands débats. Organisée en 2007 à Lille, en 2008 à Lyon, en 2010 à Strasbourg et en 2012 à Paris avec le soutien de plusieurs dizaines d’autres organisations, elle réunit en moyenne 3000 participants. La cinquième édition des États Généraux de l'Europe s'est tenue le 9 mai 2014 au Conseil Économique, Social et Environnemental à Paris et a rassemblé plus de 1000 personnes. Ces états généraux se tiendront largement grâce à son engagement et à celui de Notre Europe à Lille le 17 mars 2007 pour lancer les célébrations continentales de l'anniversaire du traité de Rome. Il les ouvre aux côtés de Martine Aubry. Près de 4 000 participants y assistent.

148 En décembre 2007, avec son institut de recherche Notre Europe - Institut Jacques Delors il s'engage en faveur d'une Communauté européenne de l'énergie afin de renforcer le pouvoir de négociation de l’union européenne par rapport aux pays producteurs de pétrole et de gaz. Le 15 septembre 2010, il soutient le lancement du Groupe Spinelli par Guy Verhofstadt, Daniel Cohn-Bendit, Isabelle Durant et Sylvie Goulard et en intègre le Comité de Pilotage. Il s'agit d'un groupe interparlementaire informel au Parlement européen qui rassemble les élus désireux de relancer la recherche d'un fédéralisme au sein de l'Union Européenne. Il regroupe des personnalités telles que Mario Monti, Andrew Duff, Joschka Fischer, Pat Cox, Elmar Brok et Élie Barnavi.

Les Eurocitoyens : Depuis novembre 2012, le Mouvement Européen-France est le chef de file d’une plate-forme réunissant plus de 55 organismes comprenant des associations, des think tanks et des citoyens. Les Eurocitoyens, c'est une initiative de la société civile européenne qui fédère un grand nombre d’associations européennes à Paris et en France afin de créer la synergie nécessaire pour ouvrir et élargir le débat européen. En France, le Mouvement Européen est présent depuis 1949. Dans les années 1980, le Mouvement connaît peu d'activité. Il est relancé à l'occasion de la campagne du référendum sur le Traité sur l'Union européenne (Traité de Maastricht) sous la présidence de Jean François-Poncet (UDF) qui succède à Louis Leprince-Ringuet. Les présidents suivants seront Jean-Louis Bourlanges, Anne- Marie Idrac, Pierre Moscovici, Sylvie Goulard (société civile puis à partir de février 2009 Députée européenne MoDem), Christian Philip élu le 25 juin 2010, Jean-Luc Sauron (par intérim), et actuellement Jean-Marie Cavada (Député européen ADLE). Le Bureau national du Mouvement Européen-France est composé de représentants de la société civile et de responsables politiques. Ce Bureau, l'exécutif permanent du ME-F, reflète le pluralisme du Mouvement.(« ! ») Bureau national de l'association : Président : Jean-Marie Cavada (député européen ADLE) Secrétaire général: Jean-Pierre Spitzer (...)

Anciens présidents 1950 : Raoul Dautry 1952 : René Courtin 1962 : René Mayer 1968 : Pierre Sudreau 1969 : Gaston Defferre 1973 : Louis Leprince-Ringuet 1990 : Jean François-Poncet

149 1995 : Jean-Louis Bourlanges 1999 : Anne-Marie Idrac 2005 : Pierre Moscovici 2006 : Sylvie Goulard 2010 – 31.08.2011 : Christian Philip 01.09.2011 – 02.12.2011 : Jean-Luc Sauron, Vice-président délégué, Président par intérim 03.12.2011 – : Jean-Marie Cavada

(...) Jacques Delors est notamment : • président fondateur et membre du conseil d'administration du think tank « Notre Europe », ainsi que membre d'honneur de l' Institut Aspen France 14 . (note de l'auteur : lire plus bas) • membre honoraire du Club de Rome 15 . • président du Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale (Cerc) depuis 2000. • parrain de l'EICD 3A à Lyon en 1988. • invité permanent du bureau national du PS. • parrain de la deuxième promotion du cycle des hautes études européennes de l'école nationale d'administration (2008).

Petit détour par l'Institut Aspen (source Wikipedia)

Difficile de trouver un lien organique entre M. Delors et la « patron américain » qui est à la base de la construction européenne, et donc à la manœuvre à travers Jacques Delors. Grâce à l'Institut Aspen, voilà qui est fait : Les instituts Aspen forment un réseau international d'échanges et de réflexion à but non lucratif fondé en 1950 à Aspen dans le Colorado aux États-Unis (voir Aspen Institute). Ils se donnent pour but d'« encourager l’ouverture sur le monde, la prise d’initiative et l’exercice des responsabilités au service du bien commun ». Le réseau, composé d'associations indépendantes, est présent en Allemagne, en Espagne, aux États-Unis, en France, en Inde, en Italie, au Japon, en Roumanie et en République tchèque. Le comité inclut Madeleine Albright, Sylvia Earle, Henry Louis Gates, David Gergen, David H. Koch, la reine Noor de Jordanie et Condoleezza Rice 1 . Walter Isaacson est le président et CEO.

L'institut Aspen France L’institut Aspen France a été créé en 1983 sous l'égide de Raymond Barre. C'est un organisme indépendant (« ! ») de tout parti ou organisation. Son siège est à Paris, après avoir été à Lyon pendant quelques années. Le président du Conseil de Surveillance est Cyril F. Benoit depuis juin 2013, en succession de Jean-Pierre Jouyet (« ! ») qui en reste Président d'honneur. L’institut Aspen France se donne pour mission de « rapprocher des leaders de tous horizons et de toutes générations en organisant un dialogue dans un esprit ouvert et non-partisan (!), d'agir sur

150 les grands enjeux contemporains et de saisir les opportunités de demain ». Il offre des plate formes d'échange et programmes de formation : • Séminaires de leadership dont le programme « Leaders Politiques d'Avenir » à destination de jeunes élus francophones, • Aspen Europe-Afrique, forum de dialogue entre les deux continents créé il y a 20 ans, • Conférences et débats sur des thématiques d'intérêt commun (le rôle de la puissance publique dans la relance de l'économie, la régulation financière, …), • Clubs de réflexion autour de sujets liés à la prospective (« Dandizan ») et à l'action collective (« Qu'est-ce qu'on fait maintenant »). L’institut Aspen France est financé par les contributions des membres (individuels, entreprises ou collectivités).

Organisations affiliées Au courant des années 1960 et 1970, l'Institut s'est enrichi d'organisations, de programmes et de conférences. Celle-ci incluent le Centre pour la Physique d'Aspen, le Aspen Strategy Group et le Communications and Society Program. »

151 VIII-Les racines de l' « atlantisme » dans les médias

La panorama de l' « atlantisme global » est donc largement évoqué, chacun peut poursuivre sa propre enquête. L'auteur rappelle que les publications sur internet, à partir de sites crédibles, sont considérées comme sérieuses dès lors que les intéressés ne les ont pas contestées. On peut se demander si « les réseaux Poutine », dans la mesure où ils existeraient, auraient une telle puissance et un tel enracinement chez les « élites françaises ». On peut en tout cas d'ores et déjà considérer à coup sûr que le « problème médias » n'est que la partie émergée de l'iceberg atlantiste, qui peut être considérée comme une vaste entreprise de vassalisation de nos « élites ». Les médias sont donc considérés par les gouvernements américains comme une arme politique, au même titre que le cinéma, les feuilletons, Mac Do, Coca Cola, la mode vestimentaire basket jean casquette à grande visière (etc...), et sont une arme essentielle version soft power de la stratégie de domination mondiale des Etats Unis. Dans ce cadre, il est clair que sont particulièrement pris en compte les médias audiovisuels, de par l'impact massif qui est souvent le leur. Rien, dans l' « expression » des Etats Unis, dans leurs réussites commerciales, industrielles, culturelles, urbaines, ne paraît « gratuit ». L' « american way of life » est une voie directe vers la vassalisation des cultures différentes, et l'organisation implicite d'une complicité généralisée avec les entreprises de domination des Etats Unis, dont le système s'est créé des obligés et des partisans partout dans le monde. On serait tenté d'avancer que toute naissance des classes moyennes, avec l'accès au bien-être voire à la richesse dans les pays « émergents », mais aussi dans ceux qui ont depuis longtemps émergé, est à l'origine d'une présence potentiellement propice aux intérêts des Etats Unis qui sont en gros, depuis quelques décennies, le reflet symbolique de la réussite, les parangons de la liberté, le pays qui aurait offert à « tous » la possibilité de s'enrichir et les défenseurs des valeurs telle la liberté qui permettent tout cela sur la planète entière. Comme une ombre portée qui se serait posée sur notre monde via le vieux fantasme du « paradis terrestre ». Le règne du dollar sanctuarise aux yeux de beaucoup les rapports de domination internes à chaque pays, les gagnants de la bataille économique trouvant à tort ou à raison dans le système atlantique un garant à la préservation ou à l'extension de leurs privilèges. Jadis, le général Weygand a dit « « Plutôt Hitler que le Front Populaire ». Le temps a passé, la peur de ceux qui ont « tout » (voire de plus en plus) demeure, avec la recherche renouvelée d'un protecteur « sûr ». On se doute que les oligarques richissimes des anciens pays du bloc soviétique se sentent plus souvent proche de l'Occident (via Wall Street ou la City) que d'un quelconque combat national de résistance à la puissance occidentale. Les « sanctions contre la Russie » visaient probablement à créer des soucis à M. Poutine au sein même de l'appareil d'état et économique russe. Ce n'était pas mal visé. En France, sans doute plus encore en Grande Bretagne, mais aussi en Allemagne et ailleurs en Europe, nombre des « élites » ont à ce point adhéré à l'hégémonie US et au système de pouvoirs en tous genres qu'elle a générés qu'ils en ont parfois apparemment oublié leur première appartenance, celle qui les lie « normalement » à leur pays d'origine. Ce qui permet de se demander ce que deviennent les cultures européennes face au rouleau compresseur de l'influence « atlantique ». Le récent Brexit prouve peut-être que l'influence des Etats unis sur leur vieil allié n'est plus si forte qu'elle a été. L'avenir nous dira de quoi il retourne.

152 On doit parallèlement supposer que les élites américaines considèrent leur aire d'influence comme un domaine réservé, dans lequel elles sont chez elles, tout comme leurs homologues des pays « occidentaux » se pensent naturellement américains bien que subissant objectivement une aliénation contrairement à leurs homologues américains. Mais choisir le camp du « fric » contre celui de l'intérêt national est devenue une norme, sous réserve de la preuve du contraire. En ce sens, se sentir « citoyen de la terre », galopant dans la Mondialisation, c'est avant tout s'identifier à la Grande puissance qui tente de faire de la terre entière son domaine. Il n'en reste pas moins que la plasticité de l'appartenance à la sphère US offre maintes portes pour entrer et se sentir chez soi, dans le cadre d'un conformisme idéologique qui, en France, a presque tout emporté en trente ans. Combien d'Européens sont allés vivre aux Etats Unis sans crainte d'un quelconque différentiel culturel, et y ont fait souche, en dehors bien sûr des grandes vagues migratoires du début du vingtième siècle ? Qui ne connaît en France un ami, une relation qui vit outre Atlantique, ou qui partage son temps entre les deux rives de l'océan ? Combien de proches ou de relations ont-ils fait le voyage de New York histoire de se sentir dans le cœur même de la civilisation occidentale ? Que signifie d'autre que l'acceptation d'une intégration organique dans le giron US (pour l'heure encore non formalisée) l'attitude des services secrets allemands espionnant leurs voisins et partenaires européens : le lien transatlantique transcende au plus haut niveau de la République fédérale les relations qui auraient dû rester celles de partenaires et d'alliés, mais non de complices. L’Allemagne, à l'instar d'Israël, est-elle aujourd'hui symboliquement un énième état américain en devenir en attendant le tour de la France, sans parler des autres pays de l'Union européenne ? Cette osmose « naturelle » est sans doute le plus grand succès du « modèle américain », qui est devenu un référent premier. Immense réussite de l'establishment US depuis au moins 1945, l' « américanisme » « coule de source » et s'interroger à propos de l'indépendance nationale est devenu en Europe une grossièreté, voire un signe d'arriération marquée à l'ombre de l'UE, elle- même créature des Etats Unis. L'idée d'indépendance nationale n'est plus recevable dans l'univers factice de la Mondialisation/Globalisation, dans lequel seuls se retrouvent vraiment les profiteurs de cette dernière. Mais les médias ont tant et si bien fait qu'une partie des victimes du système actuel ne veulent pas y renoncer. N'a-t-on pas vu les Grecs empêtrés dans leur crise tenir toujours fortement à l'Euro, au nom duquel ils se font « plumer » ? Les médias sont une arme de destruction (de la lucidité) massive. Mais, après tout, les Etats Unis ne sont-ils pas, dans le cadre d'un mythe férocement entretenu, une projection grandiose de l'ambition européenne de dominer le monde ? L'évidence, l'air du temps aujourd'hui en « Occident » est Yankee. Néolibéralisme, donc mythe de la « liberté », individualisation, financiarisation de l'économie, multiculturalisme et « créolisation » des sociétés, lutte virtuelle mais virulente contre l'idée de racisme (liée à la précédente contrainte), nuage vagabond et capricieux des droits de l'homme (lié lui aux deux précédentes contraintes), donc exigence de l'égalité hommes femmes comme (en principe) priorité affichée (etc...), tout un fatras d'idées reçues et acceptées sans examen fondent à présent cette doxa. Les Etats Unis sont les « combattants de la Liberté », point, et qu'importe si tant de faits prouvent le contraire. Plus la judiciarisation de la vie sociale et politique. Voilà sans doute les racines du « droitdelhommisme » à la française qui bat si souvent les estrades médiatiques. On n'a probablement jamais connu un phénomène de suprématie aussi complet : il englobe donc l'économique, le financier, le culturel, le social, le « sociétal » , le politique (par exemple la mode

153 des primaires pour désigner un candidat aux présidentielles), et génère en Europe la fascination pour les institutions US, les modes de vie, de consommation, de production, la mondialisation. Voilà un vrai triomphe, d'autant plus grand qu'il est aujourd'hui très concret et dans le même temps largement virtuel. Le « rêve américain » offre une réalité palpable pour certains, mais, avec, une illusion puissante, un mirage, pour tout dire une croyance majoritairement partagée. Par voie de conséquence, les médias travaillant dans cette aire solidement construite aussi bien sur le plan intellectuel que sur le plan de l'imaginaire, voire sur celui de la foi, font dans le virtuel de manière organique, et collent au modèle du grand frère aussi bien par contrainte managériale que par adhésion à ce nouveau catéchisme. Beaucoup de journalistes ont par ailleurs trouvé dans ce choix un moyen d'arriver socialement et de décrocher des revenus plus que confortables. Le triomphe US, enraciné dans l'enrichissement de beaucoup, contrairement à ce qui s'est passé pour les tenants du modèle soviétique, apparaît total, sauf que le devenir économique de l'Empire peut susciter les plus grandes craintes. Mais, en terme de médias, si le succès « atlantiste » est tout aussi grand qu'en d'autres domaines, il vaut la peine de s'y arrêter un instant dans le cadre de ce travail : petit exercice analytique autour du phénomène audiovisuel :

-L'écran Commençons par énoncer des évidences : le « petit écran » a bouleversé les modes de vie. Il y a un « avant la télé » et un « après », en Europe comme aux Etats Unis, sauf que la « révolution télévisuelle » est un cadeau du grand frère US à l'Europe, voire au monde entier. Vie familiale, éducation des enfants, loisirs, tout a été « transmuté » par l'irruption dans les familles d'une vie extérieure bavarde, intelligente ou sotte, qui informe (en principe), amuse, parfois enseigne et, plus que tout, distraie. En outre, la télévision, par les publicités et les reportages dans les pays lointains, a été un remarquable vecteur du tout automobile et du « voyagisme », cette maladie qui envoie tant de nos compatriotes au soleil quand l'hiver sévit en Europe. Bref, une autorité hors sol, omnisciente, fille du « way of life » américain, s'est largement imposée auprès de nombre d'entre nous depuis au moins une quarantaine d'années notamment à la faveur de la baisse du prix de l'énergie. Elle permet d'imposer la consommation de biens idéologiques, culturellement typés et la consommation de biens matériels (voitures, voyages, nourriture etc...) à la base de ce que l'on a nommé « société de consommation », qui par ailleurs , austérité oblige, consomme de moins en moins. On peut avancer que l'internet a prolongé cette tendance lourde. La télévision formate grandement les modes de penser, de ressentir, et de voir le monde. Alliant l' « information » et tout ce qui touche par ailleurs au quotidien, aux désirs, au plaisir, à l'espoir et donc à l'illusion, elle est une arme absolue de gestion des masses, masses dont chacun d'entre nous fait partie, soit que cette présence permanente suscite l'envie de s'extraire du troupeau en tentant de rejoindre le groupe des bergers, soit qu'elle conforte les uns et les autres dans un consumérisme sans bornes, soit qu'elle sécrète un sentiment de révolte sans exutoire. Tout le monde est concerné. La puissance de l' « écran » peut être analysée en deux volets. Le premier est l'aspect « hautes technologies ». Au départ, quand les premiers (et gros) téléviseurs sont apparus, ils proposaient uniquement des images en noir et blanc, grand retard sur le cinéma, mais ils représentaient une magie brutalement présente, qui usait déjà de feuilletons américains rentabilisés depuis longtemps dans leur pays d'origine. Qui ayant dépassé la soixantaine, ne se souvient de la livraison du premier téléviseur dans la

154 maison ! Puis, l'habitude aidant, l'objet a été non plus perçu comme l'effet d'une magie, d'un miracle intime qui relayait le cinéma à la maison, et créait plus encore un événement quotidien, mais comme un bijou technique. La couleur, la taille des appareils, la survenue des commandes à distance, la mise en relation avec les magnétoscopes, puis avec les ordinateurs qui entre temps se faisaient leur place au soleil, l'insertion dans le monde connecté enfin, avec à présent des écrans plats, que l'on peut suspendre au mur comme des tableaux, de gros progrès dans la définition de l'image, etc... La télévision est donc, matériellement devenue la preuve que même les familles modestes profitent de l'essor des technologies les plus fines, ce qui crée une apparence d'égalité entre les gens, l' « égalité technologique », que l'ordinateur puis les tablettes ont peut-être plus encore représentée. Mais l'écran a aussi une autre caractéristique, il est comme un « miroir animé ». Le téléspectateur ne s'y voit pas personnellement, mais il voit des présentateurs, des feuilletons, des films qui lui permettent de s'approprier un réel lointain concret ou rêvé et de s'y intégrer virtuellement. L'identification fonctionne à plein. Par la force de la technique audiovisuelle, le virtuel prend donc une place première dans la vie de nos contemporains, et peut se targuer d'être une « réalité » concurrentielle avec le quotidien de nos concitoyens. Les magazines papier à scandale ou non sont là pour donner (faussement) chair et os aux personnages « importants » qui animent la « petite lucarne ». Or, le miroir recèle des pouvoirs particuliers. Jean Cocteau en avait fait la porte d'entrée de la mort personnifiée par la belle Maria Cazares. Pierre Legendre en fait l'élément tiers qui permet à chacun d'entre nous, se voyant, de nouer avec la réalité qui lui est extérieure (« je est un autre »), une relation tangible et signifiante à l'image, ce que ferait le langage quand comme chez le linguiste Saussure, il est divisé en signifiant et signifié. Le signifié ne peut naître que par les mots, les signifiants, lesquels ressortent à la fois du rationnel, un objet un mot, mais de l'irrationnel aussi, le langage n'étant pas réductible à un outil intellectuel strictement rationnel, mais s'enracinant dans notre inconscient comme l'avait avancé Freud. L'écran télévisuel, ce miroir qui en outre parle, amuse, attriste, et agit donc à la fois sur le conscient, mais aussi sur l'inconscient est un signifiant. Le signifié échappe alors à celui qui a mis sa télé au centre de son existence, les mots et les représentations sont ceux des autres, des « professionnels » de l'information, amuseurs, des animateurs, etc... La « référence fondatrice » des individus évoquée par Pierre Legendre dans « Ce que l'Occident ignore de l'Occident » (Mille et une nuits) lorsqu'il évoque le « mythe du miroir » s'inscrit alors sans doute comme une médiation biaisée par la toute puissance de l'image et du son technologiques. « Je sont les autres » pourrait-on dire. La télé n'occupe-t-elle pas souvent l'essentiel des conversations sur les lieux de travail, à l'heure du repas par exemple, comme un univers de substitution pour tant d'entre nous ? N'a-t-elle pas généralement préempté l'espace familial, se substituant, à la maison, à la vie sociale, et donc à la formulation des identités respectives via un échange continu entre les membres de la famille ? La télé est devenue un écran, au sens d'obstacle dans les relations sociales. L'écran internet, qui suppose un usage individuel, a affiné l'isolement humain et le poids du virtuel. De fait, la haute technologie, les apparences brillantes du monde télévisuels, l'autorité avec laquelle s'expriment tant de « gens importants » face à la caméra induisent un pouvoir hiérarchique pour beaucoup de téléspectateurs, on dirait un « surmoi », et influent donc grandement sur leur liberté de penser. Quand certaines publicités de rue se contentent de vanter un produit en affichant sur une image du produit « vu à la télé », on voit bien que la télé à un pouvoir spécificateur particulier, et que, en l'occurrence, un présentateur de journal télévisé à 20 heures a sans doute un impact puissant sur les consciences quand il s'adresse « les yeux dans les yeux » à chacun des téléspectateurs qui ne

155 se souvient pas (ou ne sait pas) toujours combien cette évidence (un présentateur, des informations, un ton ») est un spectacle construit, agi par de nombreuses personnes qui partagent sans doute beaucoup de qualités, mais rarement une objectivité de tous les instants. Un « journal télévisé » est bâti, les infos sont hiérarchisées, et rien n'est moins neutre que la « grande messe du 20h » ou d'une autre heure d'ailleurs. La radio, plus immédiate, moins formalisée par la force des choses, n'a sans doute pas le même impact. On serait tenté à ce propos de souligner l'effort fait par certains producteurs d'émission (Philippe Meyer, l'Esprit Public, France Culture) pour donner à leurs propos un lustre particulier, une solennité revendiquée, en usant d'un langage, d'un ton et d'une approche « savants » des problèmes discutés, le tout à partir de situations sociales prestigieuses (ou supposées telles). Le résultat peut paraître formellement efficace (affaire d'opinion), le contenu peut-être moins, mais ce parti pris de l' « excellence » est difficilement généralisable à l'ensemble des émissions radios. A contrario, les discussions en direct à la radio peuvent présenter plus d'attrait par leur immédiateté, leurs concurrentes télévisuelles permettant d'accéder aux mimiques et aux réactions physiques des intervenants, accroissant leur proximité, la magie relevant alors souvent du seul talent du présentateur, ou de la qualité des invités (Des tentatives d' « institutionnalisation » des ces débats à la télévision ont été faites avec par exemple « L'heure de vérité » sur la 2. Penser également aux conférences de presse données par nos présidents de la République dont, exemple parfait, le général de Gaulle). -télévision : le « » des présentateurs L'objet télévision est un support remarquablement apte à impressionner, à tenir à distance, notamment en matière d'information, et dans le même temps à intégrer, à « faire consensus » à l'ombre d'une autorité institutionnelle, donc indiscutable, en tout cas présentée comme telle. On peut croire en effet que le simple fait d'animer une émission donne à l'animateur une légitimité puissante, y compris pour les amuseurs (Nagy, Jean Pierre Foucault, Laurent Ruquier...), car s'adressant à tous, il se drape d'une responsabilité particulière qui pourrait être analysée comme « politique », dans le sens où toute parole publique dans un système démocratique doit en principe respecter la morale, l'honnêteté, les institutions, et par là les téléspectateurs, en tant que citoyens porteurs d'une exigence de « vertu publique ». Le clash qui a opposé au mois de mai 2015 M. Ruquier (suite à « On n'est pas couché ») à l'une des invitées pour cause de « mensonge avéré » pourrait conforter cette dernière hypothèse. Les techniques télé nous sont venues des Etats Unis, comme tant de choses. Incluant le virtuel de l'image dans le récit des affaires très concrètes du monde, elle ont opté pour une apparence extrêmement normée des présentateurs, cravate costume, coiffure impeccables pour les hommes (au moins en ce qui concerne la présentation des journaux télévisés), chic bourgeois plus ou moins « branché » selon l'âge pour les femmes. L'apparence est donc dans ce cas aussi un vecteur premier de la crédibilité, et donc de la légitimité de ces journalistes, y compris quand ils disent un peu n'importe quoi. En la matière, « l'habit fait le moine ». En outre, ces « professionnels » se présentent toujours avec l'aura de l'autorité morale dispensée depuis leur statut et leur positionnement médiatique, condamnant la méchanceté, louant le bien et le juste, sortant de la sorte des prérogatives de la presse, qui n'a pas à tenir le rôle d'un prêtre ou d'un directeur de conscience. Souvenons-nous de Roger Gicquel (« Ce soir, la France a peur »), des prestation de Claude Mourousi, des présupposés du discours de Patrick Poivre d'Arvor, du sérieux dame patronnesse de Claire Chazal, etc... Le présentateur, en quête d'empathie et donc d'attention désarmée de la part des téléspectateurs, s'attriste, se réjouit selon les nouvelles annoncées, parfois l'un et l'autre dans l'instant, et imprime de la sorte une conduite moralisatrice à son auditoire.

156 Cessant d'être journaliste, il nie la liberté des gens auxquels il s'adresse, soulignant par là la stratégie perceptible d'infantilisation qui procède de ses techniques audiovisuelles, et au fond, le mépris pour ceux à qui il s'adresse, la technique et l'écran lui donnant comme la capacité de guider les consciences, ce qu'apparemment le système audiovisuel exige systématiquement à présent de ses employés à quelque niveau qu'ils travaillent. Il suffit de jeter un coup d'oeil sur les chaînes en continu, animées souvent par de jeunes journalistes parfaitement formatés, pour s'en convaincre. Utilisée de la sorte, cette information télévisuelle souligne les parti pris éditoriaux et le côté spectacle de ces prestations, qui ont cessé de véhiculer de l'information au sens strict pour s'apparenter de plus en plus à une « représentation », avec textes (sur prompteur), acteurs, dramaturgie à la clé. Ouvrir sa télévision, pour prendre connaissance des « informations » ou pas, c'est accéder à un spectacle plus ou moins réussi, donc à de l'émotionnel, avec, quand les acteurs sont bons, forte émotion à la clé, et donc adhésion. Un bon acteur sait faire cela. Certains présentateurs de journaux télévisés aussi (sont-ils encore journalistes?). Quant aux présentateurs d'émission, amuseurs publics etc..., ils ne réussissent que si ils savent faire cela. Il suffit de se référer à l'ensemble des journaux télévisés de la planète pour constater que les mêmes techniques de présentation sont généralement à l'oeuvre, sur le modèle CNN et font que les « journalistes-présentateurs » en deviennent interchangeables. Or, dans le cadre d'un article écrit, il est impossible de faire de la production en série, même si on dit en gros la même chose que le voisin, ce qui par les temps qui courent est fréquent. A ce titre, la télévision telle qu'elle véhicule une presse télévisuelle construite sur un modèle né aux Etats Unis il y a quelques décennies est un tombeau pailleté pour l'existence d'une presse digne de ce nom dans le cadre idéologique dominant actuel. -le théâtre Mise en scène, parole, nous sommes donc (aussi?) au théâtre. Mais l'écran limite l'impact de la présence humaine qui caractérise une représentation théâtrale, et donc avec elle les imperfections qui peuvent intervenir dans le jeu des acteurs. On doit donc préciser ce qu'est ce théâtre particulier. Jadis existait une émission télé (« Au théâtre ce soir »), qui consistait à retransmettre à la télévision (parfois en direct) une pièce de théâtre filmée sur scène lors d'une représentation publique. Nul mystère, les acteurs jouaient, le metteur en scène était connu tout autant que l'auteur de la pièce. On jouissait des réactions des spectateurs, rires, applaudissements, et chacun pouvait visualiser à la fin le dernier tour des acteurs venant saluer le public sous les applaudissements. Avec l'information télévisée, seuls les principes du théâtre sont retenus : immédiateté du propos écouté en direct, dramaturgie ( hiérarchisation des sujets traités), discours et donc construction d'un texte, parole et donc virtualisation et interprétation de la réalité via un personnage, qu'on ne nommera pas acteur, mais pour ce qui est des médias, « journaliste audiovisuel » à défaut de disposer d'un autre vocable. La télé joue dans la catharsis, elle englobe, agglomère et unifie, mais non pas dans l'égalité on l'a dit plus haut : elle assujettit. On est à l'opposé de Brecht et de sa distanciation, à savoir donner au spectateur la liberté de juger ce qu'il voit et entend en évitant l'adhésion qu'un spectacle peut susciter ou doit susciter selon le but recherché. La télévision est donc une nouvelle forme de théâtre, sans spectateurs, mais avec des téléspectateurs, donc la vie en direct en moins, avec ses metteurs en scène, les rédacteurs en chef, ses acteurs, les « journalistes », ses querelles de préséance entre « grands acteurs », et les ambitions individuelles qui sous tendent tout cela. A l'arrivée, l'applaudimètre est l'audimat, qui a tellement partie liée avec la publicité et ses contraintes. On peut donc avancer que trop souvent, les

157 journalistes télévisuels s'apparentent à des annonceurs, dont ils défendent indirectement les intérêts. On pourrait en dire autant de tant de « radios libres » qui organisent leurs programmes autour des contraintes publicitaires (public visé, âge requis, heure de diffusion etc...) Tout comme la société est à présent au service de l'économie, une grande partie des médias audiovisuels est au service des annonceurs, et, message informationnel oblige, de l'idéologie qui va avec. Dans la mesure où ces professionnels de la télé deviennent des « gens importants » de par leurs revenus et la place qui leur est faite dans l'actualité people qui submerge le monde de l' « information instantanée », on peut considérer qu'une nouvelle oligarchie s'est constituée, au service des grandes oligarchies économiques et financières, et que de la sorte, un prolétariat doit leur servir la soupe et leur permettre de « tenir leur rang ». -l'empathie Voilà le piège majeur véhiculé par l'information audio et télévisuelle. L'adhésion du public passe (voir plus haut) par l'empathie avec le ou les présentateurs. Parole télévisuelle, parole d'évangile, surtout quand elle s'appuie sur une cohorte de « spécialistes » qui, plus encore que les journalistes, font dans le professoral et le paternalisme hautain, à savoir qu'il n'y aurait rien à redire à leurs déclarations prononcées depuis leur expertise. Nous assistons à la fabrication d'un « sacré » à vocation forcément unificatrice comme cela est toujours le cas en la matière. Ce qu'essaient de faire avec plus ou moins de succès tant d'hommes ou de femmes politiques, qui veulent à toute force « parler d'évidence ». Ils savent, ils disent, ils expliquent, et les citoyens sont priés d'entériner, sous peine de devenir populistes ou extrémistes. Si l'on considère que la première qualité du journalisme est de permettre la prise de distance, le regard libre et la réflexion informée, il est clair que la quête de l'osmose, du consensus ou de ce qui en tient lieu n'est en rien la résultante d'un vrai travail d'information. Persuasion (endoctrinement?) ou journalisme, il faut choisir. -la « naturalisation » du réel Naturaliser le réel, c'est le définir comme « nécessaire », intouchable et tout autant dominateur, car lié à de grandes puissances (ici économiques et financières) réputées tout aussi glorieuses et omniscientes que le monde des dieux ou « de Dieu ». A chaque moment de l'Histoire sa Bible, et ses évangiles, voire son Coran ? Pourquoi pas. Chaque époque quête de toute évidence une transcendance adaptée aux contraintes qu'elle génère et qui lui sont imposées. En Occident, l'économisme et le culte managérial tiennent pour l'instant la corde en dépit d'échecs très concrets répétés et profonds. Ainsi va la réalité du monde quand elle subit en permanence une forte virtualisation médiatique. Naturaliser le réel, c'est assurément susciter puissamment l'approbation populaire du TINA (« There is no alternative ») de Mme Thacher et de ses innombrables émules. Au fond, cette information, véhiculée par la télévision, les radios et l'essentiel de la presse écrite développe jour après jour un récit répétitif et a en effet bien des caractéristique du discours religieux alignant les préceptes, lois et règles qui doivent guider nos pensées. Tel était le cas de la propagande dans l'ex URSS, dans les dictatures diverses et variées. Nos démocratie, via le détour par la technologie au service de la finance, nous ont ainsi construit un inquiétant monde de l'évidence, qui ne tient plus compte de la réalité mais dit ce que nous devons penser d'une réalité dont nous ne connaissons plus ni les tenants ni les aboutissants. Ce qui nous est raconté est vrai, et c'est vrai parce qu'on nous le raconte. Le mondialisme a de toute évidence aliéné les classes dirigeantes des pays « alliés » des Etats Unis, mais aussi en la matière les élites américaines elles-mêmes, qui ne peuvent plus que concevoir le terrain d'expression de la puissance US, à savoir une grande partie du monde, comme un domaine US.

158 Or, la puissance US est on l'a vu multiforme. L'organisation de la sphère économique et financière par les « anglo-saxons » conduit à nouer entre l'idéologie à l'oeuvre et les profiteurs du système global qui en découle un compagnonnage qui ne s'enracine plus dans les réalités nationales, mais dans le fait international financier, juridique et idéologique qui s'impose aujourd'hui aux niveaux nationaux, internationaux, dans les instances internationales aussi qui apparaissent de plus en plus comme des relais de la puissance de l' « Empire ». Tous les adversaires deviennent des ennemis, la rationalité cède la pas à la morale (A. Finkielkraut 17/05/2015, France Culture à propos de la naissance de la République française).

La preuve par les preuves

Voici grâce à l'OJIM un éclairage cru sur l' « hyper classe médiatique mondiale » (extraits) qui nous sert quotidiennement la soupe.

-, « Arianna Huffingtone figure de proue de l’hyper-classe médiatique mondiale. « Nous vivons un âge d’or du journalisme »

L'âge d'or du journalisme est apparemment un « âge en or » pour certains dont cette dame richissime. A tout seigneur tout honneur donc, Mme Huffington, « patronne » d'Anne Sinclair qui est directrice éditoriale de la version française du Huffington Post, média originellement américain, ce qui par ailleurs ne signifie pas que Mme Sainclair soit moins riche que son employeuse (!).

Arianna Huffington, la fondatrice du site international The Huffington Post compte parmi les personnalités médiatiques et journalistiques les plus influentes du monde. Son site, fort d’une influence certaine outre-Atlantique, a su s’importer dans pas moins de 15 pays et connaît un véritable rayonnement. (...) Arianna Stassinopoulos, fille d’un journaliste grec, est née à Athènes en 1950. Elle possède toujours la double nationalité États-unienne et grecque. À 16 ans, elle décroche une bourse et s’installe en Angleterre où elle poursuit des études d’économie à l’université de Cambridge. (…) C’est au Royaume-Uni qu’elle connaîtra ses premiers émois journalistiques avec Bernard Levin (de 22 ans son aîné), un célèbre journaliste anglais proche du parti travailliste (presse écrite et radio) avec qui elle entretient une relation amoureuse. Ce dernier est décrit par le Times comme le journaliste le plus célèbre de son époque. Elle le quittera en 1980 suite au refus de ce dernier de se marier et d’avoir des enfants. Elle s’envole alors pour les États-Unis et rencontre, en 1986, l’homme politique (républicain) et homme d’affaires (riche héritier de l’industrie du pétrole texan) Michel Huffington avec qui elle se marie. Le couple aura 2 enfants (2 filles aujourd’hui étudiantes dans la prestigieuse université de Yale). Son mari devient secrétaire adjoint de la défense pendant le mandat de Ronald Reagan. Le couple s’installe alors en Californie pour que Michel puisse accéder à un siège à la chambre des représentants. En 1997 le couple se sépare, son mari annonce publiquement sa bisexualité et s’engage dans le militantisme LGBT. (...) Partie aux États-Unis (à New York) en 1980, elle travaille pour le National Review. (...) C’est en 2005 qu’elle fonde le site The Huffington Post, avec l’homme d’affaire Kenneth Lerer, un site d’information internet basé très largement sur l’interactivité entre les internautes et les

159 journalistes. Le site connaît un succès immédiat. Il est alors marqué très à gauche. En 2011 elle décide de vendre le HP… au même géant AOL qu’elle estimait corrompu 7 ans auparavant… Une transaction estimée entre 300 et 315 millions de dollars. Depuis l’émergence du Huffington Post, Arianna est devenu une véritable vedette des média, elle est présente en temps qu’invitée ou chroniqueuse dans de nombreuses émissions radio et télé. Une célébrité qui la pousse même à prêter sa voix pour un dessin animé (The cleaveland Show). Arianna fait aujourd’hui partie du conseil d’administration de la « Archer School for Girls », une école élitiste pour fille de 12 à 18 ans. Arianna Huffington estime que son journal en ligne est à la fois une entreprise de presse et une plate-forme collaborative. Une manière d’utiliser des collaborateurs gratuitement tout en récoltant des bénéfices. Ce qui lui permet d’estimer que « nous vivons un âge d’or du journalisme ». Depuis 2011 elle a réussi à exporter le modèle Huffington Post dans 15 pays où il a à chaque fois rencontré le succès. Arianna Huffington explique le changement de ligne du site par la demande : les articles politiques attirent en effet moins de 15% du lectorat contre 50% à ses débuts. En France, elle jette son dévolu sur Anne Sinclair pour animer le HP France (lancement début 2012), confiant avoir apprécié son travail de blogueuse lors de son passage à Washington. (...)

Parcours militant/politique : un caméléon libéral-progressiste Malgré sa relation avec le journaliste Bernard Levin proche des milieux travaillistes anglais, Arianna Huffington ne laisse pas transparaître un véritable intérêt pour les politiques de gauche. Son mariage avec Michel Huffington lui permet d’intégrer les réseaux républicains. La journaliste se situe à l’aile gauche du parti, libérale certes, mais aussi progressiste. Après son divorce elle reste active dans les réseaux républicains mais se rapproche des démocrates sur les sujets de société. Ainsi, elle se déclare favorable à l’avortement et opposée au port d’arme. Son entrée sur la scène politique se réalise en 2003, elle affronte Arnold Schwarzenegger (Républicain) pour le poste de gouverneur de Californie. C’est un échec mais une belle expérience politique de son propre aveu. Elle effectue ainsi un virage « socialisant » qui durera environ 7 ans. En 2004, elle soutient John Kerry contre Georges W. Bush à l’élection présidentielle et met ainsi définitivement un terme à son passé Républicain. En 2007, elle intègre le top 100 des femmes les plus influentes du monde pour le magazine Forbes et y figure tous les ans depuis, ainsi que dans le classement du Times. En 2008, elle publie Lunatic Fringe Hijacked qui traite de la vulnérabilité de la sécurité intérieure américaine. (...)

Combien elle gagne Depuis 2011 Arianna Huffington est payé 4 millions de dollars par an par AOL pour diriger le Huffington Post. La vente du site au groupe AOL en février 2011 lui aurait rapporté 18 millions de dollars. La « liberté d'expression » à un prix ! (note de l'auteur) Il doit être clair que la ligne politique du Huffington ne dérange en rien les pouvoirs en place.

Visitons quelques carrières de journalistes français connus (source OJIM)

160 -Anne Sinclair : (Cette dame fait-elle partie de l' « hyper classe médiatique mondiale ? De par ses fonctions actuelles, cela paraît plausible)

« Elle est née le 15 juillet 1948 à New York aux États-Unis. De nationalité franco-américaine, elle a passé les cinq premières années de sa vie aux États-Unis. En 1991, elle a épousé Dominique Strauss-Kahn (ex ministre des Finances, ex député-maire de Sarcelles, ex directeur général du Fonds monétaire international (FMI) et membre du Parti Socialiste). Le couple serait séparé depuis juin 2012. Ils ont une fille. Elle est la fille de Joseph-Robert Schwartz (change son nom en Sinclair par décret du 3 août 1949) et de Micheline Rosenberg. Ancien résistant, Schwartz fut directeur de Radio-Levant à Beyrouth, puis secrétaire général de la délégation de la France libre au Caire. Proche ami de Pierre Mendès- France, il deviendra directeur général des parfums Élisabeth Arden, directeur technique des parfums Caron, directeur de Revlon International et administrateur de nombreuses sociétés. Sa mère, Micheline Nanette Rosenberg était la fille de l’un des plus grands marchands d’art et galeristes de l’entre-deux-guerres, Paul Rosenberg. (...)

Formation universitaire Cours Hattemer. Licenciée en droit, diplômée de l’Institut d’études politiques de Paris (filière Politique et Social, 1972).

(Pour les détails de son parcours professionnel dense et varié, se reporter au site de l'OJIM.)

Parcours militant Profondément marquée par son engagement à « gauche » (guillemets de l'auteur) et ses racines juives, elle a parfois laissé ses opinions personnelles prendre le pas sur sa neutralité journalistique ou sa confraternité professionnelle. Elle a par exemple toujours refusé de recevoir le président du Front national, Jean-Marie Le Pen dans ses émissions. (...) La journaliste Florence Belkacem a raconté comment, en 1995, Anne Sinclair avait demandé son éviction de TF1, car « j’aurais insulté la mémoire du peuple juif ». Motif : lors d’un entretien avec Jean-Marie Le Pen pour son émission « Je suis venu vous dire » en janvier 1995, Florence Belkacem lui avait fait observer une minute de silence en l’honneur du 50ème anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz. (...)

Ce qu’elle gagne Héritière du marchand d’art Paul Rosenberg (représentant de Picasso, Matisse et d’un grand nombre de peintres français), elle possède plusieurs centaines d’œuvres de grande valeur. Sa fortune est difficilement estimable – de plusieurs centaines de millions à quelques milliards d’euros. À titre d’exemple, un tableau de Léger « La femme en rouge et vert » (1914), a été vendu aux enchères, en 2003, pour 22,4 millions de dollars. « L’Odalisque, harmonie bleue » (1937) de Matisse, a été adjugé pour 33,6 millions de dollars en 2007.

161 Patrimoine immobilier : aux États-Unis, Anne Sinclair a acquis pour 4 millions de dollars, une demeure située au cœur de Washington, dans le quartier de Georgetown (380 mètres carrés incluant cinq chambres, six salles de bains, une piscine et un jardin). À Paris, elle possède un appartement place des Vosges, acheté plus de 4 millions d’euros (une somme réglée comptant) et un autre dans le XVIème arrondissement, acheté pour la somme de 2,59 millions d’euros. Au Maroc, elle a acquis un riad en plein cœur de Marrakech pour un peu moins de 500.000 €.

Sa nébuleuse -Conseil d’administration du Musée Picasso -Membre du Club Le Siècle (parrainée par Alain Minc) -Membre de la Fondation Saint-Simon (source Wikipedia): Selon Pierre Rosanvallon 1 , « la fondation Saint-Simon a été créée après le tournant de 1981, pour mettre sur pied un espace d'échange social et de production intellectuelle totalement indépendant(note de l'auteur :!), différent à la fois des clubs politiques et des institutions universitaires ». (...) La fondation Saint-Simon se plaçait en opposition à tous les courants de pensée "totalitariste" et soutenait une démocratie accompagnée d'un libre développement du marché. La fondation s'est illustrée par la publication d'ouvrages à destination du grand public ("Vive la Crise" en 83 et "La Guerre en face" un an plus tard). Elle insistait en particulier sur le caractère indissociable de l'économie de marché et de la démocratie. Elle voulait réconcilier le monde de l'université, celui de l'entreprise et celui de la haute administration en France. Selon Pierre Nora, c'était « la rencontre de gens qui avaient des moyens avec des gens qui avaient des idées ». Elle a publié des notes et des études. La fondation a fait l'objet au cours des années 1990 de nombreuses critiques mettant en cause son influence, jugée excessive et masquée, sur la politique française. Les membres de ce "club" très fermé formaient ce qu'Alain Minc appelait « le cercle de la raison » et que leurs adversaires qualifiaient de « cercle de la pensée unique ». La Fondation Saint-Simon était membre du Club de La Haye 3 , un groupe de contact réunissant 25 organisations similaires dans le monde.

Membres

• Président : Roger Fauroux et François Furet • Secrétaire : Pierre Rosanvallon • Trésorier : Alain Minc • Administrateurs : Jean-Claude Casanova, Jean Peyrelevade et Yves Sabouret Parmi les autres membres on trouvait des chefs d'entreprises tels que Jean-Louis Beffa, Antoine Riboud, Christian Blanc, Jean-Luc Lagardère, Francis Mer, des journalistes comme Jean Daniel, Laurent Joffrin, Serge July , Christine Ockrent, Franz-Olivier Giesbert et Jean-Pierre Elkabbach ou encore le philosophe Luc Ferry, le sociologue Alain Touraine, le politicien Bernard Kouchner et l'économiste Thomas Piketty.

Dissolution Le 22 juin 1999, le conseil d'administration de la fondation Saint-Simon (Jean-Claude Casanova, Roger Fauroux, président, Alain Minc, Jean Peyrelevade, Pierre Rosanvallon) a décidé à l'unanimité de proposer à ses membres la dissolution de l'association au 31 décembre. (...)

Résumons pour ce qui nous intéresse : Mme Sinclair est née aux Etats Unis, elle a la double

162 nationalité franco-américaine, ou l'inverse, elle est passée par l'IEP Paris, a occupé de hautes fonctions dans le monde médiatique public et privé, notamment à Europe 1 et TF1, elle est membre du club « Le siècle » lieu privilégié de la connivence de nos « élites », et a été membre de la fondation saint Simon aujourd'hui dissoute, où elle a côtoyé une partie des grands commis du néolibéralisme. Aujourd'hui elle est directrice éditoriale du pôle français d'un média américain, dont la fondatrice naviguerait entre les républicains et les démocrates US, ce qui n'en fait pas une dangereuse révolutionnaire. Sa fortune personnelle n'est en rien une contre-indication à son statut de journaliste, mais autorise à se poser des questions quant à l'exercice de son métier. Peut-on en effet être pleinement journaliste et membre de l'oligarchie dont on partage les intérêts ? A chacun d'évaluer ces faits à l'aune de la liberté de la presse et de la déontologie journalistique (du moins à l'aune du concept de cette dernière!). Le regard de Mme Sinclair sur par exemple les problèmes économiques ou la politique des Etats Unis, voire sur les relations franco- américaines, ne doit pas souvent (!) être en contradiction avec sa position sociale, ses intérêts de classe ou encore sa double culture. A noter également qu'elle baigne « au moins partiellement » dans un milieu néolibéral dont l'un des emblèmes est son ex époux, M. Strauss Kahn, ou encore une de ses relations M. Minc. Comme l'on pourrait dire, « elle fait pleinement partie de la bande »

-Après le Huffington, voilà Slate, encore un clone du monde médiatique US « francisé » (source Wikipedia-extraits) Slate (« ardoise » en français) est un magazine en ligne américain lancé en 1996. En 2009, les journalistes Jean-Marie Colombani, Éric Leser et Johan Hufnagel, assistés de l'économiste Jacques Attali, créent une version française du magazine1 à laquelle vient s'ajouter, en 2011, une version africaine.

Slate.com Le magazine a été créé en 1996 par l'ancien rédacteur en chef du New Republic Michael Kinsley. Propriété de Microsoft, il est alors un élément de MSN. Le 21 décembre 2004, le magazine est racheté par le Washington Post Company. Il est géré depuis le 4 juin 2008 par Slate Group, l'entité des publications en ligne créée par le Washington Post Company pour développer et gérer les magazines uniquement disponibles sur Internet. Slate, qui propose quotidiennement de nouveaux articles, couvre la politique, l'économie, la culture et le sport. Il vit des recettes publicitaires et est disponible gratuitement depuis 1999. (...) Slate a en moyenne 6 millions de lecteurs2 et est rentable2.

Slate.fr Le 10 février 2009, un magazine en ligne homonyme français a été lancé, fondé par Jean-Marie Colombani, ancien directeur du journal Le Monde, Éric Leser, Johan Hufnagel, et Éric Le Boucher, journalistes, et Jacques Attali 3 . Le Slate Group ne possède que 15 % du capital du magazine français2 et ses cinq fondateurs indiquent en avoir le contrôle3. Slate.fr reprend le concept, la gratuité et l'habillage de la version américaine dont il propose aussi une sélection

163 d'articles traduits, en plus de ses propres articles. Au contraire de journaux en ligne comme Rue89 ou Bakchich, Slate.fr reste sur une formule magazine, ne proposant ni actualités, ni scoops2. Le capital de la société E2J2, qui est l'éditeur du site internet slate.fr, est composé à 50 % par les cinq membres fondateurs, 15 % par le Washington Post et 35 % par Viveris Management (depuis la levée de fonds en juin 2009 au cours de laquelle Viveris Management a injecté 1,5 million d'euros)4. -(Boursier.com) — Près de trois ans après la prise de participation majoritaire d'ACG Group, acteur indépendant de premier plan du private equity européen, Viveris Management devient ACG Management. ACG Management s'affirme ainsi comme le pôle "Grand Public" d'ACG Group et propose par ailleurs des solutions d'investissement à un large public d'investisseurs institutionnels. Créé à Marseille en 2000, le spécialiste de l'investissement dans les PME non cotées a déjà financé près de 300 entreprises en France, en Outre-mer et dans le bassin méditerranéen. Dotée d'une base solide d'investisseurs particuliers et institutionnels, la société a recueilli plus de 715 millions d'euros de souscriptions depuis l'origine. Son offre se compose de produits fiscaux grand public tels que les FIP et les FCPI, de sociétés gérées ou conseillées ou encore de mandats de gestion.- (...) Quelques « vedettes » de Slate.fr (source Wikipedia): - Jean-Marie Colombani (…) a été président du directoire du journal Le Monde et directeur du journal Le Monde de 1994 à 2007. Jean-Marie Colombani est diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris et de l'Université de Paris II Panthéon-Assas. Il est membre du club Le Siècle. (...)

Le Monde (...) Le 22 mai 2007, le vote des membres de la société des rédacteurs du Monde (SRM) portant sur un troisième mandat de Jean-Marie Colombani à la tête du directoire du groupe s'est conclu par un désaveu. 48,5 % des suffrages se sont exprimés pour une reconduction ; 46,7 % se sont prononcés contre. 60 % des voix étaient cependant nécessaires selon les règles internes du journal. Il n'a donc pas été reconduit par le conseil de surveillance, la SRM disposant d'un droit de veto1. À l'occasion de son départ du Monde, il devait percevoir une indemnité de 950 000 €2. (...)

Radio et télévision Jean-Marie Colombani anime une chronique politique hebdomadaire sur France Inter ainsi que l'émission Faces à Faces sur Public Sénat. Il a animé avec Jean-Claude Casanova (Agrégé des facultés de droit et de sciences économiques, docteur ès sciences économiques et diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris, Jean-Claude Casanova, commence sa carrière comme avocat stagiaire (1954-1955) avant de séjourner dans le département d'économie de l'université Harvard (1957-1958). Durant ses études en France, il présida la Conférence Olivaint. Il y côtoya, entre autres, Jean-Pierre Chevènement. Rentré en France, il devient assistant à la Fondation nationale des sciences politiques (1958-1959) puis à la faculté de droit et des sciences économiques de Dijon (1963-1964). Élu directeur d'études et de recherches à la Fondation nationale des sciences politiques, poste qu'il occupe jusqu'en 1990, il devient professeur titulaire à l'Institut d'études politiques de Paris en 1969 (…) Il a animé avec Jean marie Colombani l'émission La Rumeur du monde sur France Culture. Il a également coanimé les émissions L'Heure de vérité (France 2) et Questions à domicile (TF1), avec Anne Sinclair.)

164 (...) Résumons : Sciences Po Paris, Le Siècle, TF1, Anne Sinclair, Jean Claude Casanova, membre du directoire de l'IEP Paris. La collaboration au Monde des deux journalistes économiques orthodoxes, feu Eric Israelevitch et Eric le boucher a commence sous son règne. On tourne en rond.

-Éric Le Boucher, né en le 26 mai 1950 à Paris, est un journaliste français, directeur de la rédaction du magazine économique Enjeux-Les Échos et l'un des cofondateurs du magazine en ligne Slate.f Diplômé de l'Institut de statistique de l'université de Paris et titulaire d'un DEA de gestion et d'un doctorat d'économie, tous deux obtenus à l' Université Paris-Dauphine 1 , il travaille comme économiste à l'Institut de recherche en information économiques et sociales de Paris Dauphine entre 1975 et 19792. Il intègre la rédaction de L'Usine Nouvelle, puis du Matin de Paris en 1982 et du Monde en 1983. Il y travaille comme journaliste économique puis correspondant à Francfort, rédacteur en chef et éditorialiste. Il intervient chaque matin sur Radio Classique 3 .(Depuis 2007, Radio Classique fait partie du Groupe Les Échos, pôle médias de LVMH Moët Hennessy Louis Vuitton. Depuis 2009, Radio Classique se positionne comme la radio du sens et de l’émotion au service de tous ceux qui ont soif de détente et de culture. Elle a donc adopté une nouvelle signature : « Vie Moderne, Radio Classique ». Le 12 décembre 2012, Etienne Mougeotte est nommé directeur général de Radio Classique 2) (...) En 2008, il entre dans la rédaction des Echos.(En 2007, le groupe LVMH, dirigé par Bernard Arnault, rachète Les Échos au terme d’un âpre conflit.) Il présente l'édito économique vers 6 h50 sur Europe 1, suite aux modifications de grille après le départ de Marc-Olivier Fogiel de la matinale d’Europe 1 en février 2011 et reprend ce créneau depuis la rentrée 2011 dans la pré-matinale d' Emmanuel Maubert 4 .

Idées Dans sa chronique hebdomadaire d’analyse économique du quotidien Le Monde, il développe une analyse critique du modèle économique français. Il le considère comme inadapté à la situation économique contemporaine et appelle de ses vœux une refonte de ce modèle. Il écrit ainsi dans Économiquement incorrect : « le "modèle social" français date des années 1960 et de la grande industrie. Il est incapable de répondre, malgré son coût très élevé, aux défis des nouvelles précarités et des nouvelles insécurités. [..] [Il est] manifestement en échec »5. Il a également été extrêmement critique de la politique menée par Jacques Chirac, « un roi fainéant ». Il juge que sa politique a été celle de l'immobilisme et a retardé les réformes nécessaires comme celles favorisant l'augmentation de la productivité ou la hausse de l'immigration. Éric Le Boucher est un fervent partisan de l'immigration qu'il a eu l'occasion de défendre dans de nombreux articles. Il parle ainsi de « bienfaits de l'immigration » et soutient que l'arrivée des immigrés pousserait les salaires des Français vers le haut6.

Membre d'institutions économiques Il a été membre de la Commission pour la libération de la croissance française dite « Commission

165 Attali » qui a remis son rapport en janvier 2008. Il est également membre du Codice, Conseil pour la Diffusion de la Culture Economique,( Le Conseil pour la Diffusion de la Culture Économique (CODICE) est une instance indépendante (!) et pérenne créée en octobre 2006 à l’initiative de Thierry Breton, ministre de l’Économie, des Finances et de l'Industrie1. Christine Lagarde a reconduit le CODICE dans ses missions en 2008. 2010 marquera la fin de ce conseil2.) créé en 2006 pour apporter des solutions à la méconnaissance de l'économie par les français7. Il est nommé par décret du 6 novembre 2010 au Centre d'études prospectives et d'informations internationales 8 . (Le Centre d'études prospectives et d'informations internationales (CEPII) est un centre de recherche en économie français, rattaché aux services du Premier ministre, membre du réseau coordonné par le Commissariat général à la stratégie et à la prospective (France Stratégie). Le directeur, est depuis décembre 2012, l'économiste Sébastien Jean 1 . Il a pris la succession d'Agnès Bénassy-Quéré qui le dirigeait depuis juillet 2006. Créé en 1978 par le Premier ministre Raymond Barre, le CEPII a, comme principal domaine de recherche l'économie internationale.) Résumons : économiste néolibéral, qui a été recruté au Monde avec feu M. Israelevitch, tout aussi néolibéral, il est membre du CEPII qui a été dirigé par Agnès Bénassay-Quéré dont les analyses aux Matins de France Culture étaient en conformité avec celle de M. Le Boucher. Pour préciser les choses, voici la liste des membres du Cercle des économistes dont fait (faisait?) partie Mme Bennassy-Quéré, et dont l' « orthodoxie » en matière économique n'est plus à prouver :

Y annick ALGAN Professeur d’économie, Sciences Po, Paris Co-directeur du Master Economics and Public Policy (EPP) Co-directeur du Macroeconomic Program CEPREMAP (Centre pour la Recherche Economique et ses Applications) Chercheur affilié : IZA (Institute for the Study of Labor) et CEPR (the Center for Economic Policy Research), Labor, Public Policy and Macroeconomic Economic Program Membre du Conseil Economique, Social et Environnemental

Patrick AR TUS Chef économiste de NATIXIS Membre du Comité Exécutif de NATIXIS Professeur d’économie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Membre correspondant du Conseil d’Analyse Economique Membre du Conseil Scientifique de l’AMF Membre du Conseil d’administration de TOTAL, et d’IPSOS en qualité d’administrateur

A gnès A BÉNASSY-QUÉRÉ Professeur à l’Ecole d’économie de Paris, Université Paris 1 Présidente-déléguée du Conseil d’Analyse économique Membre de la Commission Economique de la Nation Membre du Haut conseil à la stabilité financière

Françoise BENHAMOU Professeur d’Economie à l’Université de Paris 13 Membre du Collège de l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes)

166 Membre du Comité directeur de l’Association Française de Sciences Economiques (AFSE)

Jean-Paul BETBÈZE Président-Fondateur de Betbèze Conseil SAS Economic Advisor de Deloitte Membre du Bureau du CNIS (Conseil national de l’Information statistique) Président du Comité Scientifique de la Fondation Robert Schumann et Membre de l’Académie des Sciences commerciales

Laurence BO ONE Managing Director et Chef économiste Europe de BofA Merrill Lynch Global Research Membre du Conseil d’administration du Groupe Kering Membre correspondant du Conseil d’analyse économique auprès du 1er Ministre Professeur associé à Sciences Po

Anton BRENDER Chef économiste de Candriam Professeur associé honoraire à l’Université Paris - Dauphine

André CARTA PANIS Professeur à l’Institut d’Etudes Politiques d’Aix-en-Provence Chercheur au GREDEG, UMR 7321, CNRS, Université de Nice-Sophia Antipolis et au CHERPA, EA 4261, Sciences Po Aix, et chercheur associé à Chaos International

Jean-Michel CHARPIN Inspecteur général des Finances Membre du Conseil d’orientation des retraites Membre de l’Académie des technologies Membre du conseil d’administration de l’Ecole d’économie de Paris

Jean-Marie CHEVALIER Professeur Emérite de sciences économiques à l’Université Paris-Dauphine (Centre de Géopolitique de l’Energie et des Matières Premières) Senior associé au Cambridge Energy Research Associates (IHS-CERA)

Hippo lyte d’ALBI S Professeur d’économie, Université Paris 1 Chercheur associé, Ecole d’économie de Paris Directeur de l’équipe française des National Transfer Accounts Editeur associé du Journal of Economic Demography et du Journal of the Economics of Ageing

Christion de BOISSIEU

167 Professeur d’économie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Professeur au Collège d’Europe à Bruges Membre du Collège de l’Autorité des Marchés Financiers

Pierre-Yves GEOFFARD Directeur de PSE-Ecole d’Economie de Paris Directeur de recherche (CNRS) Directeur d’études à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

Patrice GEOFFRON Professeur de Sciences Économiques à l’Université Paris Dauphine Directeur du Laboratoire d’Economie de Dauphine (LEDa) et du Centre de Géopolitique de l’Energie et des Matières Premières (CGEMP). Président du comité d’orientation de la Chaire d’Economie du Climat (CDC Climat, Total)

Bertrand JACQUILLAT Co-fondateur et Président d’honneur d’Associés en Finance Professeur Emérite des Universités à Sciences Po Paris Administrateur de Klépierre et Presses Universitaires de France

Jean-Hervé LORENZI (Président) Président du Cercle des économistes Titulaire de la Chaire Transition Démographique, Transition Economique, de la Fondation du Risque Président du Pôle de Compétitivité, Finance et Innovation Membre du Directoire d’Edmond de Rothschild France Administrateur indépendant du Conseil de surveillance d’Euler Hremès, du Conseil d’administration du Crédit foncier et de BNP Paribas Cardif Membre du Comité Editorial de la Revue Risque Membre du Conseil d’administration de l’Institut Louis Bachelier, de la Fondation du Risque de la Fondation Médéric Alzheimer, de l’IDATE et de l’Association Anvie

Catherine LUBOCHINSKY Professeur à l’Université de Paris 2 Panthéon-Assas Membre du Conseil Scientifique de Unicrédit and Universities Foundation Membre du European Shadow Financial Regulation Committee

Jacques MISTRAL Senior fellow, Brookings Institution, Washington DC Helen L DeRoy Visiting Professor, The University of Michigan Conseiller spécial à l’Institut Français des Relations Internationales (IFRI) Président de l’Association Paul Ricoeur Directeur indépendant de BNP Paribas Cardif

Olivier PASTRÉ

168 Professeur à l’Université de Paris VIII Président d’IM Bank (Tunisie) Conseiller scientifique de la Revue d’Economie Financière Administrateur de l’Association des Directeurs de Banque Professional Fellow de l’Institut Europlace de Finance Administrateur de CMP Banque Chroniqueur à France Culture et sur ARTE Directeur de collection aux Editions Fayard

Jean PISANI-FERRY Commissaire Général à la stratégie et à la prospective Professeur associé à la Hertie School of Governance (Berlin) Chroniqueur pour Project Syndicate et le magazine chinois Caixin

Jean-Paul POLLIN Professeur à l’Université d’Orléans

Hélène REY Professeur d’économie, London Business School Membre du Collège de l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution. Présidente du Comité Scientifique. Membre de la Commission Economique de la Nation

Dominique ROUX Président de Bolloré Télécom Professeur à l’Université Paris-Dauphine Directeur du Master Management des télécommunications et des nouveaux médias, Directeur scientifique de la chaire économie numérique Administrateur de Mille mercis.com

Christian SAINT-ÉTIENNE Professeur titulaire de la Chaire Jean-Baptiste Say d’économie industrielle au Conservatoire National des Arts et Métiers Président de l’Institut France Stratégie

Christian STOFFAËS Ingénieur général des Mines Chef économiste au conseil général de l’Industrie, de l’Energie et des Technologies (CGIET) au Ministère de l’Economie, des Finances et du Commerce Extèrieur Professeur associé d’économie, Université Paris II Panthéon-Assas Président du Cercle des ingénieurs-économistes

Akiko SUWA-EISENMANN Directeur de recherches (Institut scientifique de la Recherche Agronomique) Chercheur, Ecole d’Economie de Paris

169

David THESMAR Professeur de Finance à l’école des Hautes Etudes Commerciales (HEC) Research fellow au Centre for Economic Policy Research (CEPR) Associate Editor, Journal of Finance, Review of Finance

Philippe TRAINAR Directeur des risques et membre du comité de direction du groupe SCOR Professeur à l’Université Paris-Dauphine

Alain TRANNOY Directeur d’Etudes en poste à Marseille à l’École des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) Directeur de l’AMSE (Aix-Marseille School of Economics) Membre du Conseil d’Analyse Economique Conseiller scientifique à France Stratégie

-Jacques Attali est un économiste, écrivain et haut fonctionnaire français, né le 1 er novembre 1943 à Alger. Conseiller d'État, professeur d'économie, conseiller spécial de François Mitterrand de 1981 à 1991, puis fondateur et premier président de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) en 1991, il a présidé en 2008 la Commission pour la libération de la croissance française. Il dirige actuellement le groupe PlaNet Finance et le groupe Attali & Associés. Il a publié plus de 65 essais, biographies et romans. Il est également éditorialiste de l'hebdomadaire L'Express et président du conseil de surveillance de Slate. (...) En 1965, il sort major de promotion de l'École polytechnique. Ingénieur du Corps des mines, il est ensuite diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris puis reçu au concours de l'ENA. En 1968, il effectue un stage de l'ENA dans la Nièvre, sous la férule du futur préfet de police de Paris, Pierre Verbrugghe. Il retrouve à cette occasion François Mitterrand, qu'il a déjà rencontré un an auparavant, comme président du conseil général de la Nièvre. Il sort troisième de sa promotion de l'ENA en 1970 N 4 . Il reçoit en 1979 un doctorat d'État en sciences économiques de l'Université Paris-Dauphine, ( Les enseignants viennent du département d'économie de la faculté de droit d'Assas. Ils affirment ainsi l'indépendance, et une nouvelle autonomie de leur discipline. Ces orientations sont notamment formulées par les professeurs Alain Cotta, et Pierre Tabatoni. Il s'agit de s'inspirer des « formules gagnantes » anglo-saxonnes. L'unité de valeur (UV), inventée18 à partir du crédit unit américain, est mise en place. Face à Alain Badiou, Gilles Deleuze et Félix Guattari à Paris VIII Vincennes, Dauphine propose Jacques Delors (sélectionné par l'auteur) et Jacques Attali.) (...) Il devient maître de conférence en sciences économiques à Polytechnique en 1968, poste qu'il conservera jusqu'en 19854. Il devient ensuite professeur de sciences économiques à l'université Paris-Dauphine, à l'École des ponts et chaussées et à l'École du génie rural. Dans son laboratoire à Dauphine, l'IRIS, il réunit autour de lui quelques jeunes chercheurs : Marc Guillaume, Yves Stourdzé, Jean-Hervé Lorenzi, et Erik Orsenna. (Rappel de l'auteur : Jean Hervé Lorenzi, membre du Cercle des économistes comme on l'a vu plus haut) fait partie de l'école

170 économique dominante, qui défend les politiques économiques actuelles) Son étroite collaboration avec François Mitterrand commence en décembre 1973. (…) En 1981, celui-ci, qui vient d'être élu président de la République, le nomme conseiller spécial à son arrivée au palais de l'Élysée, et l'installe dans l'ancien bureau des aides de camp qui jouxte le bureau présidentiel. Il assiste au conseil des Ministres, au conseil de Défense, et à tous les entretiens bilatéraux du président. (…) Il conseille au président de faire venir au palais de l'Élysée Jean-Louis Bianco, Alain Boublil, François Stasse, Erik Orsenna, François Hollande et Ségolène Royal. En 1982 et 1983, il plaide pour la « rigueur économique » (comme M. Delors). Il organise le sommet du G7 de Paris en juin 1982. (…) Consulté successivement par les présidents Sarkozy puis Hollande, Jacques Attali milite pour le concept d'économie positive5 et ses idées sont à l'origine d'une partie des dispositions de la loi Macron.

(…) En novembre 1998, il fonde à Paris PlaNet Finance, une organisation aujourd'hui présente dans 88 pays qui finance, conseille et forme plusieurs centaines d'institutions de microfinance 15 . Elle emploie plus de 2 500 salariés et poursuit des activités de conseil, de notation, de financement et d'assurance. En particulier, elle travaille dans les banlieues françaises. Jacques Attali préside également le Conseil d'administration de la Fondation PlaNet Finance et de ses filiales, tels que MicroCred et PlanetRating. Défenseur de la constitution et de l'établissement d'un état de droit mondial, condition du maintien de la démocratie par la constitution d’un nouvel ordre mondial. Il pense que l'économie régulée par une institution de surveillance financière mondiale peut être une solution à la crise financière émergeant en 2008. Cette institution financière est une première étape vers l'instauration d'un gouvernement démocratique mondial dont l'Union européenne peut devenir un laboratoire.

Carrière financière privée En 1994, Jacques Attali crée Attali et Associés 16 , cabinet de conseil international spécialisé dans le conseil stratégique, l'ingénierie financière et les fusions-acquisitions. Jacques Attali est administrateur du broker français Kepler Cheuvreux 17 , de la société de biotechnologie Pharnext, préside le conseil de surveillance de Slate.fr (...)

Retour sur la Commission pour la libération de la croissance française, dite Commission Attali Article détaillé : Commission pour la libération de la croissance française. Le 24 juillet 2007, Jacques Attali est chargé par Nicolas Sarkozy de présider une commission chargée d'étudier « les freins à la croissance »23 (...). Cette commission est composée de quarante-deux membres, choisis librement par lui, essentiellement issus du courant libéral et social-démocrate. Elle a rendu son rapport unanime24 le 24 janvier 2008 et remis au président de la République le 23 janvier 2008. Il émet des recommandations pour transformer en profondeur l’économie et la société françaises afin de « libérer la croissance » et relever différents défis macro-économiques.

Commission pour l'« économie positive » En 2012, François Hollande a commandé à Jacques Attali un rapport sur la situation de l'« économie positive », c'est- à-dire au service des nouvelles générations. L'objectif de ce rapport est de mettre fin au « court- termisme », de passer d'une « économie individualiste » fondée sur le court terme à une économie fondée sur « l'intérêt général et l'intérêt des

171 générations futures », d'organiser la transition d'un « modèle ancien fondé sur l'économie de la richesse » à un modèle dans lequel « les agents économiques auront d'autres obligations que la maximisation du profit » (!)25. Ce rapport propose 44 réformes. Il s'inscrit dans le cadre du mouvement de l'économie positive, qui se réunit depuis 2012 chaque année au Havre, et bientôt dans d'autres pays. En 2012, il est l'une des personnes prises comme exemple26 ,27 ,28, en qualité de prescripteur d’opinion29, par le film documentaire français sorti en janvier 2012 : Les Nouveaux Chiens de garde, qui explore les collusions entre les médias français et le pouvoir politique français. En octobre 2012, l'association Acrimed (Action critique Médias) a publié un article intitulé « Ces économistes qui monopolisent (toujours) les débats »30. Elle en a écrit plusieurs consacrés à Jacques Attali31. (...)

Résumons : M. Attali apparaît au même titre que M. Minc comme un agent d'influence majeur au moins dans la sphère parisienne. Au-delà des livres, des discours et des déclarations, sa philosophie politique, qui envisagerait (réellement?) une démocratie mondiale, et donc un « peuple mondial », quand le « peuple européen » lui-même est aux abonnés absents, paraît surtout privilégier l'intérêt privé et synthétiser une part des réflexions relatives à la disparition des nations, en quoi il rejoint le souci des fondateurs de cette Europe atlantiste et leur ambition de favoriser le pouvoir des oligarchies au détriment des droits « naturels » des citoyens dans notre démocratie. Sa proximité au moins universitaire avec M. Delors ne saurait à ce titre nous tromper. Il est apparemment l'un des moteurs de la nébuleuse atlantiste en France. Que chacun essaie de s'y retrouver dans le large et varié champ de ses actions polyformes. Notre opinion est en tout cas faite en ce qui le concerne. Est-ce un hasard si Le Monde lui consacre un long papier dithyrambique en cette fin août 2016 ?

Un médias US s'invite à Bruxelles

Puisque nous sommes en phase avec la présence américaine dans les médias, notamment européens, et avec leurs représentants idéologiques plus ou moins officiels, du moins avec les cadres qui véhiculent et promeuvent les politiques liées à l'instauration d'un ordre néolibéral, que l'on peut qualifier d'ultralibéral en France, en Europe et ailleurs sur la planète, lesquels se pavanent régulièrement dans les « grands médias », il est temps de signaler l'arrivée d'un nouveau venu d'outre atlantique. On se sent bien entouré.

« Politico, « le média européen qui ne veut pas d'un million de lecteurs » (source Arrêt sur image)

Le site américain, une nouvelle voix pour l'UE ?

Politico débarque en Europe ! Le magazine politique américain, qui a bousculé le paysage médiatique des États-Unis lors de sa création en 2007, pose ses valises à Bruxelles au cœur des institutions européennes où il entend rendre la ville - et ses querelles politiques - si passionnantes qu'Hollywood aura bientôt envie d'y tourner des films. Rien que ça. Une arrivée prévue de longue date pour ce média qui tape déjà sur le gouvernement grec et vise, non pas les lecteurs, mais les décideurs les plus importants. Ça commence bien ! L’anthropologue Paul Jorion est tombé de sa chaise (...) en découvrant un article consacré à la Grèce publié sur la version européenne de Politico fraîchement débarqué à

172 Bruxelles. Signé Pierre Briançon – ancien rédacteur en chef de Libé passé ensuite à l’Expansion et Reuters – l’article assure que "le gouvernement Syriza d’extrême-gauche a dilapidé la bonne volonté de ses partenaires européens". Tout y passe : "Syriza est nouveau au pouvoir, et ses dirigeants n’ont aucune expérience gouvernementale, le parti "gouverne de la même manière que s’il était en campagne", le ministre de l’économie Yanis Varoufakis préfère donner des interview people plutôt que de travailler, et leurs propositions sont vagues et évasives… bref, pour Jorion, "des débuts très peu prometteurs pour Politico [qui entend] nous abreuver du catéchisme d’une religion féroce appelée Troïka. Comme si c’était cela qui manquait !" Des débuts surtout surprenants de la part de ce titre lancé le 21 avril 2015 et qui s’affiche sur Twitter "la plus grande rédaction impartiale de Bruxelles", comme le rapporte Jean Quatremer. Le correspondant à Bruxelles de Libération consacre un papier à cette arrivée dans son journal puis en version longue sur son blog. Et c’est peu dire que le confrère est enthousiaste : "ce débarquement américain sans précédent dans la capitale de l’Union fait frétiller d’aise les institutions communautaires qui y voient là une forme de reconnaissance : enfin, un média américain investit Bruxelles "! Même enthousiasme pour Nicolas Beytout, directeur de l’Opinion cité par Le Point : "cela souligne à quel point l'Europe est devenue un sujet pour les États-Unis. C'est le signe de la montée en puissance de l'Europe". "nous montrerons que nous sommes meilleurs que le New York Times" Aux Etats-Unis, Politico a été lancé en janvier 2007 avec une ligne éditoriale très claire : "Je pense que nous montrerons que nous sommes meilleurs que le New York Times ou le Washington Post". Cet accès de modestie est signé Jim VandeHei, co-fondateur de Politico, ancien du… Washington Post, bien décidé alors à dépoussiérer le journalisme politique américain, un peu trop “plan-plan” à son goût. Huit ans plus tard, Politico a, semble-t-il, réussi son pari, passant de 12 à 300 journalistes. Comment expliquer un tel succès ? Il y a d'abord l’histoire que Politico aime bien raconter. Celle d’un média précurseur, qui le premier, a adopté un ton incisif et "fun" sur l'actualité politique américaine, en poussant ses journalistes à publier tout ce qu’ils voyaient, tout ce qu’ils entendaient et à en faire le service après-vente sur les réseaux sociaux. Une bien belle histoire donc mais qui mérite d'être complétée. Car si Politico est encore vivant aujourd'hui et s'est fait une place de choix aux côtés du Times et du Post, ce n'est pas uniquement grâce à son ton, que l'on retrouve aujourd'hui sur la plupart des sites politiques, ou la polyvalence de ses journalistes. C’est aussi, et surtout, grâce à son modèle économique, que l’entreprise compte aujourd'hui exporter à Bruxelles. Des espaces de pub pour les lobbyistes La version papier du titre (tiré à 40 000 exemplaires) assure ainsi 50% des revenus de Politico, grâce à la publicité. Mais pas n’importe quel type de publicité : dans les pages intérieures du quotidien, point de montres de luxe ou de jolies voitures : la pub ici prend la forme d'espaces réservés aux lobbyistes, groupes d’intérêts, compagnies pétrolières et autres entités qui cherchent à avoir de l’influence au Congrès américain, comme le racontait l'an dernier Corine Lesnes, correspondante du Monde aux Etats-Unis . Mais ce n’est pas tout. Politico dégage aussi des bénéfices grâce à son offre premium, réservée aux professionnels et présentée ainsi par Bill Nichols, directeur de la rédaction: "Vous êtes un lobbyiste ou un avocat dans le secteur de l'énergie. Vous avez une réunion. Si le président se prépare à annoncer une décision sur le gaz naturel, vous voulez le savoir tout de suite. Vous voulez connaître tous les détails de la proposition et comment elle est accueillie au Congrès". Si vous n'êtes pas avocat en revanche, passez votre chemin, le coût de l’abonnement annuel pouvant varier entre 2

173 000 et 70 000 euros, selon le nombre de souscriptions (en 2014, plus d’un millier d’organisations étaient abonnées à ce service). Et si cela ne suffisait pas : Politico a lancé l’an dernier un magazine qui rassemble tous ses articles les plus longs. Un bimensuel financé par… Bank of America. Un journalisme pas tout à fait impartial donc. Aux Etats-Unis, il semblerait que Politico entretienne de très bonnes relations avec l'administration Obama. En 2010, le New York Times Magazine racontait, par exemple, comment Politico couchait - ou presque ! - avec le pouvoir. Ou plutôt avec le directeur de la communication de la Maison Blanche qui s’endormait tous les soirs après un dernier échange de mails avec Mike Allen, journaliste star de Politico, et se réveillait chaque matin avec la lettre quotidienne du même Allen, devenue la bible des décideurs américains. "Nous n’avons pas besoin d’un million de lecteurs. Nous voulons 100 décideurs qui lisent nos newsletters" (...) 20 ou 100 décideurs mais une chose est sûre : Politico débarque en nombre et avec de gros moyens – on avance la somme de 10 millions de dollars, et Quatremer croit savoir que le financement est assuré pour plusieurs années afin de donner le temps à Politico.eu de s’installer dans le paysage médiatique. Les moyens sont issus pour moitié de la maison-mère américaine et – pour l’autre moitié – du groupe de presse allemand Axel Springer qui détient Bild – pourfendeur de l’attitude des Grecs – ou encore Die Welt. A ce jour, 36 journalistes, tous anglophones, ont été embauchés et l’équipe devrait tourner à terme avec une cinquantaine de personnes. Aux manettes : Kaminski donc, ancien du Wall Street Journal. Une place proposée mais déclinée par l’Américain Peter Spiegel, patron du bureau du Financial Times à Bruxelles, précise Quatremer. Une armée donc quand on sait que Le Monde dépêche seulement deux correspondants à Bruxelles dont Cécile Ducourtieux. Cette dernière consacre également à Politico un long papier un peu moins enthousiaste que celui de son confrère de Libé. Elle n’hésite pas à souligner que la fête de lancement (…) comptera parmi les invités le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, le président du Parlement européen, Martin Schulz, la commissaire à la concurrence, Margrethe Vestager ou le très influent Martin Selmayr, chef de cabinet du président de la Commission Jean- Claude Juncker (...) (...) En tout cas, d'un côté ou de l'autre de l'Atlantique, Politico affiche haut son ambition. Le journaliste Craig Winneker, cité par Quatremer, frise le manque de confraternité : "Ce n’est pas qu’il n’y a pas ici de très bons journalistes, mais ce n’est pas la majorité". Et vlan ! Une attitude que semble regretter la correspondante du Monde : selon elle, l’ambition de Politico de "faire quelque chose de différent énerve une partie de la presse dans la capitale de l’Europe, où nombre de journalistes, confrontés à l’euroscepticisme grandissant des citoyens de l’Union, ont été poussés, ces dernières années, à faire plus de pédagogie et de politique." (Note de l'auteur : et ont donc cessé d'être des journalistes) (... De la fiction à la réalité, il n'y a parfois qu'un pas : Politico vient en effet de perdre un sérieux atout dans la course à la couverture de la campagne présidentielle américaine de 2016 : l'une de ses journalistes, très bien introduite au sein du camp Clinton, vient de signer au... New York Times, alors qu'Hillary vient de se déclarer candidate à la primaire démocrate. Le vent serait-il en train de tourner ?

174 Par Anne-Sophie Jacques et Robin Andraca »

Résumons : une presse née pour offrir ses services à la minorité richissime des lobbyistes, financée aux Etats Unis par une banque, co-financée en Europe par des grands groupes de presse allemands, qui trouve aisément ses « grands journalistes » européens prêts à jouer le jeu de cette curieuse mais juteuse aventure dont on doit se demander ce qu'elle partage avec une véritable stratégie d'information et d'éveil : à priori pas grand chose. Est-là la « modernité » dont on rêve dans certains salons parisiens ? Où une forme nouvelle de journalisme, qui n'est plus du journalisme, mais un vecteur d'informations économiques branché en direct sur le « difficile » quotidien des lobbyistes si nombreux à Bruxelles ? A cette aune, Politico est moins un organe de presse qu'un outil d'information financière de plus pour le petit monde de la finance. Un outil d'information spécialisé donc, et non un « journal » au sens classique du terme, tel que la charte de Munich contribue à le définir. Que dire des « journalistes » qui émargent à son budget ? Peut-on encore appeler cela du journalisme, en dépit de l'accueil favorable que certains collègues ont réservé à Politico ? Que penser de ces derniers ? Que dire des « grands pro » qui s'engouffrent dans cette aventure cyniques, (en l'absence prévisible de véritables infos sur le montant de leurs rémunérations ) ? La course au fric ne concerne pas les seuls banquiers, les grands patrons et les traders. Vous avez dit « déontologie » ?

IX : quelques portraits de « grands journalistes » et assimilés Nous allons constater que les « grands journalistes », les têtes d'affiche, ceux qui trustent la

175 renommée, les bonnes places, et pour beaucoup de larges revenus, se sont quasiment constitués en aristocratie au service des oligarchies triomphantes du jour. Mais après tout, de tous temps en France la royauté a eu besoin de ses féodaux/aristocrates pour asseoir, maintenir et renforcer son pouvoir. Rien donc de neuf sous le soleil, sinon l'absence remarquée d'armures, de chevaux, de perruques poudrées et de courbettes visibles. Formation,origines sociales, acteur et thuriféraires du consensus atlantiste et donc européen, ils sont sans doute à part entière comme il a été dit plus haut une composante oligarchique de première importance à l'heure du « tout info » et du « tout écran ». Mieux encore, ils sont assimilables à des troupes de choc sur le front de la guerre de l' « information », car nous sommes bien face à une guerre, puisque une vision biaisée de la réalité doit prévaloir sur la réalité elle-même pour aider à la perpétuation du pouvoir oligarchique en dépit des dégâts (sociaux, économiques, géostratégiques) qu'il cause. Ce qui induit que ces soldats d'un nouveau type doivent autant que possible garder les apparences et le « maintien » professionnel des journalistes lambda qu'ils ne sont plus, (si ils l'ont jamais été ?). A chacun de juger.

- Franz-O lvier Giesbert , « prince mondain de la connivence tranquille » (source OJIM, extraits) Doit-on situer M. Giesbert (« FOG » pour les branchés) dans l' « hyper classe médiatique mondiale » qui est un surgeon du pouvoir hégémonique des Etats Unis? En tout cas, si la catégorie de l' « hyper classe médiatique française » existe, il y a en principe toute sa place.

« Contrairement à ce qu’on pourrait croire, je n’appartiens pas au milieu médiatique parisien. » (Télérama, 31 janvier 2014) (!)

(...) Né à Wilmington aux États-Unis dans l’état du Delaware, Franz-Olivier Giesbert, journaliste et écrivain franco-américain, est issu d’une famille d’origine allemande, écossaise et juive (immigrée aux États-Unis avant la Première guerre mondiale) du côté paternel, et d’une famille d’imprimeurs normands catholiques du côté maternel. Son père, Américain, était du débarquement de Normandie sur les plages d’Omaha Beach le 6 juin 1944. Cette Normandie, Giesbert la rejoindra à l’âge de trois ans. Il y recevra une éducation catholique et de gauche, élevé par sa mère, professeur de philosophie et adjointe du maire PS d’Elbeuf, et par son père, dessinateur commercial. À l’adolescence, il milite un temps pour l’Algérie française avant de passer, à l’âge adulte, par un « bref attrait pour le communisme » (Note de l'auteur : très bref sans doute!).(...) FOG est diplômé en 1969 du Centre de formation des journalistes (CFJ), où il rencontre son ami Patrick Poivre d’Arvor et se lie avec son professeur Jacques Ozouf. Parcours de journaliste D’après Marion Van Renterghem, qui a publié un formidable papier sur Giesbert dans M. le magazine du Monde du 6 juillet 2012, celui-ci est « devenu journaliste pour contredire son père, qui méprisait la profession ». Il signe son premier papier sur l’élection présidentielle américaine à 18 ans dans le journal Liberté-Dimanche, propriété du groupe Paris Normandie dont sa famille maternelle est actionnaire. Lorsque celle-ci lui propose, à 19 ans, le poste de rédacteur en chef adjoint du quotidien Paris Normandie, il refuse et se dirige vers des études de droit avec l’objectif d’intégrer l’ENA ou de devenir avocat. En parallèle, il reste néanmoins durant 4 ans au sein du quotidien, où il s’occupe des pages littéraires. En 1971, il fait un stage au Nouvel Obs à l’issue duquel, sur la recommandation de Jacques Ozouf, son professeur au CFJ, il intègre la rédaction. Il y est d’abord correspondant aux États-Unis puis

176 chef du service politique grâce à l’aide de Jean Daniel. Enfin, il est propulsé directeur de la rédaction à 36 ans avec le but de relancer les ventes de l’hebdomadaire, qui s’effondrent sous le mandat de François Mitterrand. Un Mitterrand avec lequel FOG poussa la connivence jusqu’à l’extrême… Il rédigera d’ailleurs sa biographie, « François Mitterrand, une vie » (éd. Du Seuil, 1997). Durant cette période, il sauve le journal, selon l’aveu même de Claude Perdriel, mais l’ambiance en souffre beaucoup et sa présence génère beaucoup de tensions, notamment avec Jean Daniel. En septembre 1988, c’est le choc : Giesbert rejoint l’ennemi. Le Figaro tout d’abord, opposant du Nouvel Obs, honni de la gauche ; Robert Hersant ensuite (propriétaire du Figaro), ennemi farouche de la famille maternelle de Franz, en lutte avec l’homme d’affaire dans le capital de Paris Normandie. Qui plus est, Hersant est lié à des faits de collaboration avec les Allemands. « Cet homme est dangereux », avait pourtant estimé FOG lorsqu’il était à l’Obs. Il devient directeur des rédactions et membre du directoire du Figaro. Le dîner du Siècle a ses raisons que la raison ignore ! Du côté de l’Obs, c’est le scandale. FOG est qualifié de « traître », de journaliste « sans convictions ». La trahison est sur toutes les bouches. FOG n’en a que faire ; depuis le début, il ne roule que pour lui-même. Durant cette période au Figaro, notre journaliste mène une vie de nabab où la mondanité est à son comble. Il s’achète une belle Mercedes, quitte sa femme pour la milliardaire Nahed Ojjeh… fille du ministre syrien de la défense, un pays alors en guerre contre la France. FOG n’en est pas à une contradiction près, et reçoit le tout-Paris dans l’hôtel particulier de sa nouvelle épouse. C’est en 2000 que, sous l’influence de Claude Imbert, fondateur du Point, ce dernier fait de Franz- Olivier Giesbert le directeur de son magazine. En 2003, il devient PDG du groupe SEBDO Le Point. Grâce à sa politique de unes agressives et polémiques, les ventes de l’hebdomadaire passent de près de 300 000 en 1999 à environ 415 000 en 2010. FOG agace, divise, mais il gagne. « C’est de loin le meilleur patron de presse », dira Christophe Barbier, patron de L’Express, pourtant journal concurrent. Quoi qu’il en soit, il profite de ses unes enflammées pour soutenir, puis allumer Sarkozy. Vieille tradition « fogienne ». Le président de la République aurait même demandé sa tête à François Pinault en 2008, sans succès. En 2011 il sort un livre sur Nicolas Sarkozy, « M. le Président », dans lequel il révèle des « off » et s’en prend sévèrement à lui. Comme à son habitude, FOG est passé par la connivence pour en aboutir au lynchage – comme il l’avait fait avec Jacques Chirac, sur lequel il a également publié un livre. Le tout pour son seul intérêt. « Chèvres, veaux, canards ou cochons : ils sont ses amis, ses semblables, ses frères, comme il dit, mais il les saigne de ses mains quand ils sont à point », écrit Marion Van Renterghem à propos de la vie de Giesbert à la campagne. Symboliquement, il en fait de même avec les hommes politiques. Au début de l’année 2014, Franz-Olivier Giesbert démissionne de son poste de directeur du Point. Il demeure néanmoins « Conseiller de la direction de rédaction ».

À la télévision En plus de faire partie de l’élite de la presse papier, Franz-Olivier Giesbert est également présent sur beaucoup de plateaux de télévision. Il présente, sans grand succès, l’émission « Le Gai savoir » sur Paris Première en 1996. En 2001, il commence sa collaboration avec le service public. Il présente : de 2001 à 2006, « Culture et Dépendances » sur France 3, une émission littéraire ; de 2006 à 2009, « Chez FOG », émission politique, sur France 5 ; en 2009/2010 « Vous aurez le dernier mot » sur France 2, qui traite de l’actualité culturelle ; en 2010/2011, une autre émission

177 culturelle intitulée « Semaine critique ! » sur France 2. À partir d’octobre 2011, il anime « Les grandes questions » sur France 5 et, tous les mois, l’émission « Le monde d’après » sur France 3, un magazine de société consacré à l’économie. Durant la campagne présidentielle 2012, il assure, aux côtés d’Hélène Jouan, le rôle d’examinateur de l’émission politique « Des paroles et des actes » sur France 2. Il sera très violemment critiqué sur internet et les réseaux sociaux pour ses propos méprisants sur les petits candidats (ces « candidats qu’on aurait pu nous épargner ») lors de l’émission du 12 avril 2012. Un avis qu’il partage visiblement avec Jean-Michel Apathie, qui avait tenu le même genre de propos sur le plateau du « Grand Journal » et sur RTL à propos, notamment, du candidat Jacques Cheminade.

Sa nébuleuse Alain Minc, son meilleur ami à qui il dédicace ses livres en l’appelant « mon frère ». Lors de ses fêtes organisées à l’hôtel particulier de son ex-femme syrienne, il reçoit notamment : l’écrivain Denis Tillinac, le patron de Havas Pierre Dauzier, l’éditeur Bernard Fixot et sa femme Valérie-Anne Giscard d’Estaing. Il est également ami avec Pierre Mauroy, numéro deux du PS, avec qui il a écrit un livre, PPDA, qu’il a rencontré au CFJ, Laurent Joffrin et Jean-François Kahn. Il a fréquenté le club Le Siècle, où Philippe Villin, alors vice-PDG du Figaro, l’a repéré en 1998. À propos de ce club, FOG déclare n’y avoir « pas mis les pieds depuis dix ans ! D’autres, au journal, y vont, et ils ont raison : on y rencontre un préfet, un directeur de prison, un banquier, un ancien ministre… C’est un club très utile, on y récolte plein d‘infos » (Télérama, 31 janvier 2014).

Parcours militant (…) Il eut un temps sa carte au Parti Socialiste. Cependant, FOG ne semble pas vraiment engagé durablement à droite ou à gauche et suit sa propre voie, celle de ses seuls intérêts. « Je suis un bouchon au fil de l’eau, un prédateur sans plan de carrière : un truc m’intéresse, je prends. Je vois ma vie comme ça », se définira-t-il.

(...) Son salaire est inconnu. Cependant, voici quelques citations et déclarations à propos de ses revenus. « J’ai des revenus fluctuants. Un peu comme ceux des agriculteurs… enfin, peut-être un peu supérieurs. » (Marianne, février 2013) « Je ne suis pas très bien payé comme patron de journal. Je suis certainement l’un des moins bien payés, sinon le moins bien payé, de France. » (Marianne, février 2013) (...)

Ils ont dit « Le pouvoir, il se vautre dedans pour l’observer. Il le désire pour le trahir et le raconter », Marion Van Renterghem, Le Monde, 6 juillet 2012. « Avec ses “potes” journalistes Laurent Joffrin et Jean-François Kahn, le patron du grand hebdo

178 de centre droit se gausse d’avoir concocté des plans “pour faire élire Hollande”. Comme toujours, il commence maintenant à l’avoir dans le viseur », Marion Van Renterghem, Le Monde, 6 juillet 2012. (...) « Franz appelait tous les députés par leur prénom. Il leur parlait avec une liberté de ton incroyable. Du genre : “Et la baise, ça va en ce moment ?” ça les faisait marrer, ils se sentaient en confiance, ils lui racontaient tout », Jean-François Kahn. (...) « Franz nous ressemble. Il a la même mauvaise foi que nous, les politiques. Cette langue qu’on a entre nous, ce truc un peu ésotérique, il la parle aussi. On n’a pas besoin de finir nos phrases. On se livre sans prudence car il est des nôtres », Pierre Charon. (...) Il a dit : « Je suis solidaire du monde des immigrés. Quand l’un d’eux est attaqué, je prends sa défense », JDD, 3 avril 2011. « Des crises de la presse, j’ai passé ma vie professionnelle à en traverser. La presse a survécu à tout, y compris à la télévision. Mais je suis vraiment un type de l’écrit, j’adore le papier. Je ne comprends plus rien aux réunions sur le numérique. Je ne suis plus l’homme de la situation. Être à la tête d’un journal, ça vous dévore. J’ai passé ma vie à ne pas dormir pour des histoires de ventes, de pub en baisse…», Télérama, 13 janvier 2014. « Le problème de ce film (Les Nouveaux Chiens de Garde, NDLR), c’est qu’il est con et vieux. Con, on voit très bien pourquoi. Et vieux, parce qu’il parle de la presse d’avant. On n’en est plus là, l’information elle ne passe plus par là. […] Il y a quand même une réalité numérique complètement dingue. Il y a des trucs qui existent qui sont extrêmement puissants. Par exemple du côté d’Alain Soral, on aime pas en parler, évidemment, puisque ça nous gêne, mais c’est énorme ! », LCP, 4 mai 2014. « Je fais partie des connards qui ont diabolisé Le Pen », soir des élections européennes du 25 mai 2014, France Résumons : Fils de famille, famille qui lui a permis de mettre le pied à l'étrier, le Siècle, des amis et relations puissants dans la « corporation », lié avec Alain Minc, un opportunisme apprécié par les politiques qui le reconnaissent des leurs, et un cynisme parfait pour transformer ouvertement le métier de journaliste en promenade ambitieuse et ludique, mais sans prise de risque idéologique excessive (...) face à la doxa de ses patrons. Bel Ami réincarné ?

-Christine Ockrent (source Wikipedia) : tout un symbole (2010)

Christine Ockrent (...)

179 Christine Ockrent est la fille du diplomate belge Roger Ockrent1 (ancien chef de Cabinet du Premier ministre Paul-Henri Spaak, puis directeur de l'Administration belge de Coopération économique pour le Plan Marshall, et ambassadeur de Belgique auprès de l'OCDE) et de Greta Bastenie,2. (…) Elle partage la vie de Bernard Kouchner (...) Installée en France après la nomination de son père à l'OCDE, Christine Ockrent suit les cours du collège Sévigné de Paris, puis est diplômée de l'Institut d'études politiques de Paris en 1965 (section relations internationales) et étudie à l' Université de Cambridge 1 . Après un stage au Bureau d'information des Communautés économiques européennes en 1965 et 1966, elle se lance dans une carrière de journaliste au sein de l'unité européenne de documentaires d'actualités de NBC News entre 1967 et 1968. Elle collabore au célèbre magazine de CBS, 60 Minutes entre 1968 et 1976 comme réalisatrice et journaliste au bureau londonien de l'émission et est correspondante pour la même chaine de 1976 à 19774. Elle travaille ensuite comme journaliste et réalisatrice au magazine vendredi sur FR3 et à l'émission 20/20 sur ABC News 1 . Pour la chaîne française, elle décroche un scoop en 1979 en interviewant dans sa cellule Amir Abbas Hoveida, ancien premier ministre du Shah d'Iran, destitué lors de la Révolution islamique. L'orientation des questions et la rigueur du ton adopté par Christine Ockrent suscitent une vive controverse au sein du monde du journalisme, au vu de la situation de l'ancien dirigeant iranien, exécuté le surlendemain d'une balle dans la nuque à l'issue d'un procès expéditif mené par l'ayatollah Sadeq Khalkhali 5 ,6.

(...) De retour en France en 1980, elle intègre la rédaction d'Europe 1 et se voit confier la charge du journal de 8 heures. Puis en octobre 1981, elle est embauchée par le nouveau président d'Antenne 2, Pierre Desgraupes, qui la désigne pour présenter le journal télévisé de 20 heures en alternance avec Patrick Poivre d'Arvor, avec la charge de rédactrice en chef adjointe puis rédactrice en chef déléguée. Elle est alors la première femme à présenter régulièrement un journal télévisé de 20 heures en France et reçoit le surnom de « reine Christine ». Elle s'y maintient jusqu'en juin 1985 où elle rejoint RTL comme rédactrice en chef et éditorialiste, puis TF1 en mai 1987 en qualité de directrice adjointe et en septembre 1987 elle anime Le Monde en Face 1 jusqu'en mars 1988. Lorsqu'elle retrouve la présentation du journal de 20 heures d'Antenne 2 en septembre 1988, une polémique éclate à propos de son salaire : 120 000 F par mois et 55 000 F de frais7. Elle produit et présente ensuite pour la chaîne publique le magazine Carnets de route en 1990, la série Qu'avez- vous fait de vos 20 ans ? entre 1990 et 1992, et le magazine bimensuel Direct en 1991 et 1992, tout en tenant une chronique hebdomadaire, Portrait au laser puis Portraits, sur l'antenne de France Inter de 1991 à 19941. À partir de 1992, elle intègre France 3 pour présenter des émissions politiques et d'information (…) En parallèle, elle dirige la rédaction de l'hebdomadaire L'Express d'octobre 1994 à mars 1996. Elle est également éditorialiste pour le magazine d'actualité Regarde le monde sur Canal J entre 1995 et 1996, et chroniqueuse au quotidien InfoMatin en 1994 1 . Après avoir retrouvé l'antenne d'Europe 1 à partir de 1995 comme membre du comité éditorial, éditorialiste politique hebdomadaire et intervenante au Club de la presse, elle est nommée en 1997 directrice déléguée de Finance communication et compagnie, holding de BFM, radio sur laquelle elle présente les chroniques hebdomadaires l'Actualité de la semaine et l'Actualité en question et lance le site Internet BfmBiz.com en 2001. Elle tient aussi des éditoriaux dans les colonnes de La Provence (1997) et Metro (quotidien) (2002) dont elle préside le comité éditorial du groupe

180 international jusqu'en 2008, et dirige la rédaction de l' éphémère l'Européen (1998-1999)1. Elle cesse d'animer France Europe Express fin juin 2007 pour une nouvelle émission politique dominicale en seconde partie de soirée. Selon ses propos, ce changement est indépendant de la nomination de son compagnon, Bernard Kouchner, comme ministre des Affaires étrangères. Elle l'expliquerait par l'épuisement du concept après dix ans d'émission. La nouvelle émission, diffusée à partir du 23 septembre, est baptisée Duel sur la 3, et propose un débat opposant deux invités sur l'actualité politique, économique ou sociétale8, ne faisant pas taire les critiques de la section du Syndicat national des journalistes contre son manque d'indépendance supposé vis-à-vis du gouvernement où siège son compagnon. La Société des journalistes lui reproche également ses prestations rémunérées auprès d'organismes privés, interdites par sa chaîne, et qui constituerait un mélange des genres contraire au devoir d'impartialité9.

Directrice générale déléguée de l'Audiovisuel extérieur de la France Présentant Une fois par mois sur TV5 entre 2002 et 2006, et tenant chaque semaine un billet de six minutes (trois en français et trois en anglais) sur France 24 de mars 2007 à février 2008, elle est nommée le 20 février 2008 directrice générale déléguée de l' Audiovisuel Extérieur de la France 10 . Elle devient également directrice générale de France 24 et directrice générale déléguée de RFI, en remplacement d'Antoine Schwarz, sur proposition d’Alain de Pouzilhac, étant de ce fait numéro 2 de la radio4,11. Suite à cette nomination, elle quitte France 3 qui décide d'arrêter son émission Duel sur la 3 et elle arrête également ses participations à l'émission de Laurent Ruquier On va s'gêner sur Europe 1. En août suivant, le licenciement du journaliste de RFI, Richard Labévière, auteur d'une interview du président syrien Bachar el-Assad, est critiqué en tant que « licenciement politique »12 et dénoncé par l'intéressé comme une volonté d'alignement éditorial de la station par Christine Ockrent sur une orientation pro-« israélo-américaine »13. Scénario contesté par d'autres journalistes14 et par Alain de Pouzilhac 15 . Elle annonce en mai 2011 qu'elle quitte son poste à l'AEF16.

Cercles d'ententes Christine Ockrent participe au club français Le Siècle. Elle participe également à plusieurs reprises aux réunions du groupe Bilderberg, cercle fermé de l'élite politique et financière internationale : Le groupe Bilderberg, aussi appelé conférence de Bilderberg ou club Bilderberg, est un rassemblement annuel et informel d'environ 130 membres, essentiellement américains et européens, et dont la plupart sont des personnalités de la diplomatie, des affaires, de la politique et des médias. Ce forum annuel a été inauguré en mai 1954 à Oosterbeek aux Pays-Bas, lors d'une réunion à l'hôtel Bilderberg (d'où son nom) et possède des bureaux à Leyde 1 . Il est au centre de plusieurs controverses du fait de sa non médiatisation et du caractère confidentiel du bilan des conférences. 2005 : La réunion s'est déroulée du 5 au 8 mai, en Bavière. Celle-ci fut préparée par le comité de direction comprenant : Josef Ackermann de la Deutsche Bank , Jorma Ollila de Nokia, Richard Perle (ancien conseiller du Pentagone), Vernon Jordan (confident de l’ancien président Bill Clinton), Jürgen Schrempp de DaimlerChrysler, Peter Sutherland de Goldman Sachs International , Motorola, Daniel Vasella de Novartis et James Wolfensohn de la Banque mondiale. Étaient attendus Henry Kissinger, Natan Sharansky et Bernard Kouchner 19 . Cette année-là, un commentateur politique espagnol, Daniel Estulin, aurait réussi à infiltrer la réunion20. (...)

181 Distinctions et affiliations Christine Ockrent a été promue au grade d'officier de la Légion d'honneur le 14 juillet 200719. Elle est également officier de l'ordre national du Mérite ainsi que de l'ordre de Léopold par arrêté royal du 27 avril 2007. En 1985, elle a reçu le 7 d'or du meilleur présentateur du journal télévisé et un « Super 7 d´or ». Elle est membre du comité consultatif du think tank Centre for European Reform 20 (Le Centre for European Reform est un think tank basé à Londres, dont l'objectif est d'améliorer la qualité du débat sur l'Union européenne. C'est un forum au sein duquel les gens qui ont des idées, de Grande-Bretagne comme du reste du continent, peuvent discuter des nombreux défis politiques, économiques et sociaux auxquels fait face l'Europe. Il cherche à travailler avec des organisations similaires ailleurs en Europe, en Amérique du nord et partout dans le monde. Le CER est pro-européen mais cela ne l'empêche pas de critiquer l'Union. Il considère l'intégration européenne comme largement bénéfique mais reconnaît que sur de nombreux aspects l'Union ne fonctionne pas correctement. Le CER a ainsi pour but de promouvoir de nouvelles idées afin de réformer l'Union européenne), administratrice de l' IFRI 2 (L’Institut français des relations internationales (IFRI) est en France un centre de recherche et de débat indépendant (Note de l'auteur : !)consacré à l’analyse des questions internationales. Inspiré du modèle anglo-saxon, l’Ifri, think-tank ou « laboratoire d’idées » français, s’est affirmé dans la durée, depuis sa création en 1979 par Thierry de Montbrial. Part intégrante du réseau des plus grands think-tanks internationaux, l'Ifri a pour mission de réunir acteurs et analystes de la vie internationale et de mener une réflexion libre et approfondie sur les grands enjeux contemporains. Il a ainsi vocation à :développer la recherche appliquée dans le domaine des politiques publiques à dimension internationale ; favoriser le dialogue et une interaction constructive entre chercheurs, praticiens et leaders d'opinion.) et de l'International Crisis Group 22 . (L'ICG a été créé en 1995 comme organisation non-gouvernementale internationale sur l'initiative d'un groupe de personnalités transatlantiques désespérées par l’incapacité de la communauté internationale à anticiper et répondre efficacement aux tragédies survenues en Somalie, au Rwanda et en Bosnie au début des années 1990. Cette initiative a été menée par Morton Abramowitz (en) (ancien ambassadeur des États-Unis en Turquie et en Thaïlande, alors président de la Fondation Carnegie pour la paix internationale), Mark Malloch Brown (futur administrateur du PNUD, vice-secrétaire général de l'ONU et ministre britannique pour l'Afrique, l’Asie et l'ONU), et son premier président, le sénateur George Mitchell. L'idée était de créer une nouvelle organisation dotée d’un personnel hautement qualifié, agissant en tant qu’yeux et oreilles du monde face à l'imminence de conflits, et d’un conseil d’administration jouissant d’une grande influence et capable de mobiliser une action efficace de la part des décideurs politiques du monde entier. L'International Crisis Group reçoit des financements1 de divers gouvernements, pour l'essentiel occidentaux, ainsi que de fondations caritatives, d'entreprises et de donateurs individuels. En 2012, son budget s'élevait à 20,3 millions de dollars américains. Parmi ces fonds, 49 % de provenaient de 18 gouvernements différents et de l'Union européenne, 31 % d'entreprises privées et de donateurs individuels, et 20 % de diverses fondations et organisations philantropiques. George Soros, président de l'Open Society Institute, est membre de son conseil d'administration, et son conseil consultatif compte des entreprises telles que Chevron et Shell. Les critiques font valoir que l'ONG ne mérite pas ce nom, 40 % de son financement venant directement des gouvernements selon le rapport annuel 2008 2 , 30 % émanant d'entreprises privées. Ils accusent également l'ONG de promouvoir activement les campagnes de guerre de l' OTAN , notamment en Afghanistan 3 . Elle est régulièrement invitée par l'OTAN 4 . (souligné par l'auteur) Elle a été membre du conseil d'administration de l'Institut Aspen France (lire plus haut) et de RSF 23 . Lors du 30e anniversaire de la French-American Foundation, elle était membre du comité d'honneur24. Elle est également membre d'un programme de cette fondation25. Engagée pour la cause européenne, elle est enfin l'une des cinq journalistes avec Caroline de Camaret, Quentin Dickinson, Guillaume Klossa et Jean Quatremer à figurer au comité d'honneur du (?)e anniversaire du traité de Rome. (Internet est à la disposition des esprits curieux si toutefois le texte figure toujours en ligne) • Notes et références

182 1. ↑ a, b, c, d, e, f, g et h Notice biographique, Who's Who in France, 2008 2. ↑ a et b Isabelle et Christine Ockrent, émission C'est de famille sur Europe 1, 13 juillet 2011 3. ↑ Biographie sur AGEFI [archive] 4. ↑ a et b « Audiovisuel extérieur de la France : Christine Ockrent, numéro 2 de RFI [archive] », communiqué de presse de RFI, 3 juillet 2008 5. ↑ Portrait de Christine Ockrent [archive] par Les Échos, 21 février 2008 6. ↑ En 1979, le premier "coup" d'Ockrent [archive], Arretsurimages.net, 21 février 2008 7. ↑ Pierre Favier et Michel Martin-Roland, La Décennie Mitterrand, Paris, Le Seuil, « Points », tome III, 1997, 128 (re édition, 1996). 8. ↑ « "Duel sur la 3", le nouveau magazine politique de Christine Ockrent », dépêche AFP, 29/08/2007 [archive] 9. ↑ « Christine Ockrent, journaliste aguerrie et compagne de Bernard Kouchner [archive] », Télé Satellite, février 2008 10. ↑ Soit davantage que le PDG de France Télévisions - Le Canard Enchaîné, o 4683, 28 juillet 2010, 2. 11. ↑ Alors que, selon Le Canard Enchaîné [précision nécessaire] , la nationalité belge de Christine Ockrent aurait dû empêcher cette nomination, les statuts de la radio ne permettant pas aux ressortissants étrangers d'occuper ce poste. 12. ↑ « L'"affaire Labévière", ou un sacrifice sur l'autel du politiquement correct [archive] », Bakchich.info, 4 septembre 2008 13. ↑ Marc Endeweld, « Licenciement politique à RFI [archive] », Le Monde diplomatique, 4 septembre 2008 14. ↑ « Labévière licencié de RFI, délit d'opinion ou victime autoproclamée ? » [archive], Marianne, 27 août 2008 15. ↑ «On n’est pas plus cons que les Américains !» [archive], Libération, 10 décembre 2008 16. ↑ Le Figaro.fr [archive] 17. ↑ Christine Ockrent va animer une émission de géopolitique sur France Culture http://www.lexpress.fr/actualites/1/economie/christine-ockrent-va-animer-une-emission-de- geopolitique-sur-france-culture_1211868.html [archive] 18. ↑ “On n'est pas couché” : les invités de Laurent Ruquier samedi 2 février sur France 2| http://www.coulisses-tv.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=6685%3A %E2%80%9COn-n-est-pas-couch

Résumons : famille de notables, proche des dirigeants politiques belges (dont M. Spaak, inféodé aux Etats Unis comme l'affirme, preuves à l'appui, M. Asselineau président de l'UPR), IEP Paris, relations professionnelles étroites avec les Etats Unis, Young leader, Le Siècle, le groupe de Bilderberg, où siège également Bernard Kouchner, l'Institut Aspen (etc...), on voit que les multiples implications de Mme Okrent dans des systèmes centraux de l'atlantisme devraient au moins tempérer la réputation professionnelle de cette journaliste, qui à certains égards s'apparente sans doute plus à un agent d'influence qu'à une femme de presse. Peut-on en déduire que cette « grande professionnelle », donnée en exemple, valorisée plus que de raison en tant que journaliste, devrait plutôt être honorée comme vecteur politico-idéologique de la toute puissance des Etats Unis ? Comparativement, en terme de propagande, BHL ne fait pas le poids, tant ses partis prix sont visibles voire ouvertement outranciers. On est en droit de penser que le statut officiel de journaliste de Mme Okrent est un peu « étroit », ce militantisme atlantiste s'accordant mal avec l'exigence de liberté et d'indépendance que l'on

183 attend en principe (attente bien longue!) des personnels de presse qui ne devraient d'ailleurs pas avoir vocation à être « starisés ». Elle est emblématique des dérives à l'oeuvre dans le monde médiatique qui est devenu une arme politique comme une autre aux mains de l'oligarchie. Mme Okrent est de toute évidence un personnel politique, n'en déplaise à sa carte de presse. Dans son cas, l'IEP Paris est un détail. A noter que cette dame, dont l'excellence étincelle, n'a pas eu besoin de l'ANPE puis de Pôle emploi pour trouver à foison des postes de responsabilité et des revenus tangibles. Nous dirons pour rester convenables qu'elle est « pertinente » dans le cadre et la situation actuelles. Vive la déontologie !

-Christophe Barbier, le petit marquis libéral libertaire (source OJIM) « Il existe une série d’épisodes historiques qui ont permis de trancher, si j’ose dire, entre le « bien et le mal », entre ce qui est de Gauche et ce qui ne l’est pas. » (La Règle du jeu, 21 février 2013)

Patron de L’Express, extrêmement présent sur les plateaux télé, Christophe Barbier a rendu omniprésents dans le débat public sa silhouette svelte, son port altier et son écharpe rouge. Est-il vraiment de gauche, comme il l’a longtemps soutenu ? Est-il passé à droite ? C’est ce dont l’accusent certains, à gauche, en raison d’étranges accointances avec le sarkozysme… La réponse est dans sa fameuse écharpe qui noue sur ses épaules deux pans qu’on a longtemps crus opposés. En effet, il s’agirait d’un cadeau offert par Carla Bruni-Sarkozy lors de son mariage avec Yamini Kumar, en 2008. La chanteuse bobo avait elle-même marqué, par ses noces avec le président, celles de la gauche bien-pensante et de la droite d’argent. Quant à l’épouse de Barbier, elle se trouvait incarner à elle seule cette alliance, se trouvant être à la fois une militante de gauche et la directrice de la communication de la marque de luxe Hermès… La com’, le fric, le pouvoir, le libéralisme en matière économique et en matière de mœurs, le soutien des puissants et la moraline en plus ! Aucun doute, Barbier est un pur spécimen de libéral-libertaire, le vrai visage de la Gauche chevauchant la mondialisation capitaliste, un petit marquis des médias adoubé par le système et qui ne le critique que pour l’enjoindre à étendre encore davantage sa domination sous les auspices du Droit (Gauche libertaire) et du Marché (Droite libérale). Il est né en janvier 1967 à Sallanches (Haute-Savoie), son père était secrétaire de mairie(...) Élève du lycée du Parc, à Lyon, il « monte » à Paris pour faire l’ENS (École Normale Supérieure) de la rue d’Ulm en 1987. Titulaire d’une maîtrise d’Histoire, il obtient également en 1992 un diplôme du MS Média de l’ESCP Europe.

Parcours professionnel Christophe Barbier débute dans Le Point, en 1990, sa carrière de journaliste politique. Il passe ensuite sur Europe 1 (1995) avant de devenir chef du service politique de L’Express à partir de 1996, magazine dont il devient, en 2001, directeur adjoint de la rédaction, puis en août 2006, et suite au départ de Denis Jeambar, directeur de la rédaction tout court. Avec Denis Jeambar, il aura aussi animé dans les années 1990 l’émission « Affaires publiques » sur La Cinquième (sur le rôle des institutions françaises et européennes). Grand habitué des plateaux télé, Barbier aura participé de 2003 à 2006 à « Ça se dispute » (i>Télé), animée alors par Victor Robert, où il incarne la perspective de gauche face au droitier Éric Zemmour, et intervient également comme éditorialiste dans la matinale de la chaîne. En 2005, il milite pour le « Oui » au référendum sur la constitution européenne. Dès septembre 2006, c’est sur LCI et dans le cadre d’un accord avec L’Express, qu’il présente un éditorial et une interview politique quotidiens dans la matinale. Il revient ensuite

184 assurer le même contenu sur i>Télé à partir de l’été 2011. Il est par ailleurs un invité régulier de l’émission « C dans l’air » (France 5) – et se trouve même être la personnalité la plus présente sur le plateau entre 2008 et 2012. On le retrouve aussi fréquemment invité sur Sud Radio ou dans « Le Grand Journal » de Canal+. Au sein de cette dernière émission, il intervient les vendredis pour commenter l’actualité de la semaine. Le 14 février 2008, grâce à ses liens d’amitié avec la nouvelle Première Dame, Christophe Barbier obtient, pour L’Express, la première grande interview de Carla Bruni-Sarkozy. En mars 2013, il suscite la colère de sa rédaction à la suite de plusieurs couvertures polémiques : celle sur le coût de l’immigration, celle sur Bernard Tapie et celle, enfin, sur Marcela Iacub (qui relate sa relation avec DSK, après la chute de ce dernier, dans un « roman » tapageur). « Christophe Barbier aime à rappeler qu’un journal, c’est un directeur et une rédaction. Or cette rédaction a le sentiment, une fois de plus, de ne pas être entendue par son directeur », lit-on en conclusion d’un communiqué interne que s’est procuré 20 Minutes . Il se trouve qu’en effet, Barbier avait auparavant vertement critiqué la couverture du Nouvel Observateur sur Iacub… Opportuniste ? Ou finalement, à la différence des membres naïfs de sa rédaction, parfaitement cohérent avec une idéologie libérale- libertaire qui n’est schizophrène qu’en surface et dont la morale est pour le moins flottante. Être à la fois pour l’immigration de masse, pour la GPA, pour tous les gimmicks intellectuels de gauche, et pour ses propres intérêts dans un marché mondialisé étant, comme l’a démontré Jean-Claude Michéa, l’attitude la plus logique qui soit, et la plus pragmatique si l’on veut se trouver – et rester – du bon côté du manche, et non, comme Barbier le soutient « au-dessus de la mêlée »… (...)

Il a dit : « Il existe une série d’épisodes historiques qui ont permis de trancher, si j’ose dire, entre le « bien et le mal », entre ce qui est de Gauche et ce qui ne l’est pas. La Gauche c’est donc d’abord cela », La Règle du jeu, 21 février 2013 « L’histoire de la Gauche doit être lue à coté de celle de la France et de ses années noires », Id. « Conservateur et conventionnel, alors que je me suis prononcé pour le mariage homosexuel, la procréation médicalement assistée et la gestation pour autrui ? » Blog de Christophe Barbier, 25 janvier 2013 « L’immigration est une bonne chose pour la France, une très bonne chose pour la vitalité française », Édito de L’Express , 13 novembre 2012 « Il faut parfois dire les choses crûment, violemment. Oui, l’Express l’affirme, les syndicats français sont nuls. Nuls, on le voit avec cette affaire Séphora. Déplorables. Les commerçants veulent ouvrir. Les salariés veulent travailler. Les clients veulent venir à des heures inhabituelles, le dimanche, ou tard le soir. Et évidemment, il y a toujours un syndicat pour être pointilleux, et jouer le respect stupide du droit. », Édito de L’Express , 24 septembre 2013. « Admettons que l’on ferme toutes les salles à Dieudonné, il a un million et demi ou deux millions de vues sur internet, que fait-on derrière ? […] Internet n’est pas un no man’s land. On peut aussi combattre sur internet juridiquement ceux qui violent la loi, et notamment la loi Gayssot. On peut y aller, il suffit que les autorités s’en donnent les moyens […] Internet est un champ d’impunité parce que ça part dans tous les sens. Mais ça se régule aussi internet ! Entre nous, les Chinois y arrivent bien.» RMC, “Les Grandes Gueules”, 3 janvier 2014.

185 Nébuleuse Bernard-Henri Lévy ; Carla Bruni-Sarkozy ; Denis Jeambar ; Raphaël Enthoven. Ils ont dit : « Quel est donc le programme que propose le petit soldat Barbier ? La « baisse des charges sociales », la hausse de la CSG, l’application de la « TVA dite sociale » dont rêvait Sarkozy, la « flexibilité du travail » (comme si elle n’existait pas), la révision des prestations sociales, la fin de l’État-Providence, le « coup de pied aux fesses » contre « l’assistanat ». Bref, un traitement de choc – un vrai – qui serait le pâle héritage d’une donation cosignée par Margaret Thatcher et Ronald Reagan », Jack Dion, Marianne, 1er novembre 2012 « Les médias sont infiltrés par les journalistes comme Christophe Barbier un des suceurs journalistes de la cour », Ambrino H B, Blog Mediapart, 10 juillet 2012 « Evidemment, il s’agit là d’une extrême-droite “parfumée” comme dirait Mélenchon, qui a tous les honneurs médiatiques et devant laquelle il faut s’agenouiller, contrairement aux vilains extrémistes qui prônent la souveraineté des peuples, quelle horreur… A ce sujet, notons que Barbier termine en beauté avec un sophisme plein de cynisme : les Grecs ont inventé la démocratie, à nous de leur rendre la pareille avec une “gouvernance moderne”, c’est-à-dire étrangère et technocratique… Sans oublier l’aspiration à l’avènement de l’homme nouveau, l’Homo Europeus, qui naîtra du jour au lendemain dans la nouvelle “nation européenne” ! Quand Barbier décide d’envoyer la sauce, ça ne rigole pas », Erca, AgoraVox, 12 juin 2012

Resumons : si le mot conformisme a encore un sens, nul doute que l'adjectif 'conformiste » qualifie convenablement M. Barbier. Ses accointances avec BHL ou Mme Sarkozy en font une créature du système en dépit de ses origines modestes. Il a su en tout cas donner les gages nécessaires pour pouvoir intégrer la sphère d'influence puissante de l'univers BHL. Normale Sup l'associe à une certaine norme patricienne (Nicolas demorand, Ali Badou). Ce qui lui vaut le pouvoir d'être présent sur de nombreux plateaux TV et de nous asséner ses jugements péremptoires et « de bon sens », comme il convient quand on défend les puissants. A défaut d'un autre élément, sa proximité avec l'aire d'influence BHL suffit pour l'auteur à l'inscrire dans la mouvance atlantiste.

-Jean-Pierre Elkabbach la fascination du pouvoir (source OJIM. Extraits) « Nombreux sont les témoignages qui le décrivent fasciné par le pouvoir et les “puissants”, courant dans leur sillage, leur arrachant des interviews, des rencontres, des entrevues, se grisant de cette proximité avec “ceux qui font le monde” » Vincent Quivy, Profession : Elkabbach, édition du Moment, 2009

Atteint d’une « sorte de maladie » selon son biographe, Jean-Pierre Elkabbach cultive une particularité dans le monde du journalisme : il n’écrit pas, ou très peu. C’est assez rare pour un journaliste mais cela ne l’a nullement empêché de mener la carrière que l’on sait. C’est qu’à défaut de manier la plume, cette figure indéboulonnable de la radio et de la télévision, née à Oran en 1937, maîtrise parfaitement l’art du courtisan, ce qui lui a rendu bien des services et lui aura assuré cette carrière impressionnante de plus de 50 ans. Il est ainsi l’un des derniers dinosaures du journalisme français.

186 Sarkozyste convaincu pour les uns, opportuniste proche de tous les pouvoirs pour les autres, Jean- Pierre Elkabbach ne laisse pas indifférent. Sorte de Talleyrand du journalisme, la proximité avec le pouvoir et les puissants le fascine au point que la déontologie demeure trop souvent rangée au fond d’un tiroir, comme une vieille promesse bien vite rattrapée par l’ambition. (...)

Études Il obtient son baccalauréat au lycée Lamoricière d’Oran avant de partir pour Paris. Dans la capitale, il fait des études à l’Institut français de presse, à la faculté des lettres de l’Université de Paris ainsi qu’à l’Institut d’études politiques (IEP) de Paris. (...)

Parcours (...) Après les événements de mai 68, auxquels il a pris part en faisant grève, il est mis au placard, muté à Toulouse, puis envoyé comme correspond à Bonn (Allemagne). Cela ne l’empêche pas, dès 1970, d’accéder à la présentation du journal télévisé de la première chaîne. Deuxans plus tard, il passe, au même poste, sur la deuxième chaîne et présente également le magazine « Actuel 2 ». En 1974, il rejoint France Inter et présente la tranche info de la mi-journée. L’année suivante, il est nommé rédacteur en chef de la station, puis rédacteur en chef à la direction de l’information de Radio France. En 1977, il devient également directeur de l’information d’Antenne 2. Fait marquant : en octobre 1979, il écarte Claude Sérillon de la revue de presse pour avoir traité de l’affaire des Diamants de Bokassa. Entre 1977 et 1981, il anime sur la chaîne publique plusieurs émissions dont « Cartes sur tables ». En 1981, suite à l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République, il est écarté de l’antenne car jugé trop proche de l’ancienne majorité. Il rejoint alors Europe 1 où il anime, jusqu’en 1987, l’émission « Découvertes ». Il est ensuite nommé directeur d’antenne et se voit proposer la présentation du « 8h-9h ». L’année suivante, il est nommé directeur général adjoint. En novembre 1990, tout en conservant ses fonctions sur Europe 1, il devient le conseiller du président et du directeur général de La Cinq, Yves Sabouret. En 1991, sur La Cinq, il anime « Pile ou face » et « Dimanche, 20h10, Elkabbach ». En 1992 il présente « Repères » sur France 3 jusqu’en 1993. Entre avril 1993 et juin 1994, il s’entretient avec François Mitterrand pour le documentaire « François Mitterrand : conversations avec un Président » (diffusé après sa mort). En décembre 1993, il est élu président de France 2 et France 3 (qui deviennent alors France Télévisions). Il quitte ses fonctions en 1996 après la polémique concernant les contrats juteux qu’il consentait à certains animateurs (comme Jean-Luc Delarue). Il retourne alors sur Europe 1 et anime « L’invité du matin » et « Le club de la presse ». Parallèlement, il est nommé président de Public Sénat en décembre 1999. Il fera trois mandats (décembre 1999-avril 2009) et présentera « Bibliothèque Médicis », émission littéraire qu’il anime toujours aujourd’hui. En juillet 2000, il est nommé conseiller spécial pour la stratégie des médias du groupe Lagardère (qui possède Europe 1). En avril 2005, il passe directeur général de l’antenne d’Europe 1 et administrateur de Lagardère Active Broadcast, tout en conservant son émission matinale. En 2005, Lagardère le nomme président d’Europe 1. Diverses polémiques ont alors entaché sa présidence

187 (voir plus bas). Très vite tombé en disgrâce, il est remplacé à la présidence d’Europe 1 par Alexandre Bompard mais conserve toujours son émission matinale. Il sera ensuite nommé, en guise de compensation, à la tête de Lagardère News, une structure rassemblant les médias d’information du groupe. Faits notoires Le 28 janvier 2007, à quelques semaines de l’élection présidentielle, il reçoit Jean-Louis Bianco, proche de Ségolène Royal, sur l’antenne d’Europe 1. Alors que M. Bianco s’emporte contre Franck Tapiro, conseiller en communication de Nicolas Sarkozy soupçonné d’être à l’origine de la récupération politique de Jean Jaurès par le candidat UMP, Jean-Pierre Elkabbach rétorque : « Non, ce n’est pas notre inspirateur. » Lapsus ô combien révélateur d’une proximité des plus nettes avec le candidat Sarkozy… « Mais pourquoi vous dites “notre” inspirateur ? Vous n’êtes pas de l’UMP, Jean-Pierre Elkabbach ! », lui fait immédiatement remarquer Jean-Louis Bianco. (Profession : Elkabbach, de Vincent Quivy) En 2009, Vincent Quivy fait paraître le livre « Profession : Elkabbach », portrait à charge où le journaliste est présenté comme « employé des politiques » et « soumis au pouvoir ». Selon l’auteur, la longévité de Jean-Pierre Elkabbach dans les médias est due en grande partie à ses accointances avec les différents chefs d’État et gouvernements. Pour lui, il n’est donc pas un sarkozyste convaincu, comme l’avancent certains, mais un opportuniste qui mange à tous les râteliers. Vincent Quivy souligne également le caractère égocentrique et tyrannique d’un journaliste n’hésitant pas à humilier ses collaborateurs. En juin 2012, Jérôme Impelliziera, un conseiller régional PS, a saisi le CSA afin qu’il se penche sur le temps de parole des éditorialistes « proches de la droite ». En vue de la campagne présidentielle, celui-ci demandait la « comptabilisation dans le temps de parole de l’UMP » de certains journalistes dont il dressait la liste et parmi lesquels figurait, en premier lieu, Jean-Pierre Elkabbach. (...) En septembre 2014, dans son livre Blessures, Paul Amar révèle l’existence d’un pacte secret entre Jean-Pierre Elkabbach et Nicolas Sarkozy au début des années 90. À l’époque, selon le journaliste qui se base sur des confidences de Sarkozy, Elkabbach aurait demandé à ce dernier, ministre du budget, de le faire élire à la tête de France Télévisions. En échange, le présentateur lui aurait promis d’user de toute son influence au sein du groupe public pour garantir à Édouard Balladur un traitement favorable lui permettant d’être élu président de la République en 1995. « Elkabbach est venu me voir et m’a proposé la chose suivante : ‘Fais-moi élire président de France Télévisions, je te fais élire Balladur président’ », aurait déclaré l’ancien président avant d’ajouter : « Avec Elkabbach, on pouvait s’entendre. »

Distinctions En mai 2009, il est promu officier de la Légion d’Honneur par Jacques Chirac, puis commandeur par le Premier ministre sur un décret de François Hollande (juillet 2014). Une récompense critiquée par Libération, qui dans un court article écrira : « Elkabbach, carpette d’honneur ». (...)

188 Ils l’ont dit « Jean-Pierre Elkabbach est une sorte de baron d’Empire ou de gentilhomme enrichi dont le portrait traduit la réussite et l’ascension […] Journaliste ? Pas vraiment. Disons plutôt homme de lettres, à la manière dont au XIXe siècle, on désignait les gens de presse. Homme de lettres ? Non, le mot ne convient pas non plus. Alors quoi ? […] Chef d’entreprise ? Dirigeant ? Homme de médias, d’images ou de pouvoir ? Peut-être une peu tout ça à la fois. Et c’est déjà une indication de sa personnalité et de l’époque qu’il a traversée : un mélange de fonctions et de genre, un ensemble fourre-tout qui ne se connaît pas de barrières », Vincent Quivy, Profession : Elkabbach, février 2009 (...) « On a soupçonné Jean-Pierre Elkabbach d’être sarkozyste. C’est injuste : il fut également giscardien, puis mitterrandiste… Pilier du groupe Lagardère et des interviews du matin sur Europe 1, Elkabbach a en effet courtisé tous les présidents afin d’en obtenir quelque récompense », Vincent Quivy, « Profession : Elkabbach », février 2009. (...) « Jean-Pierre Elkabbach porte une lourde responsabilité dans l’émergence du Front national. Jean-Pierre Elkabbach a été l’un des journalistes politiques qui ont le plus invité Jean-Marie Le Pen dans les années 80. Demandez à la rédaction d’Europe 1, qui se souvient des éclats de rire entendus dans le bureau d’Elkabbach quand il recevait Le Pen », Paul Amar, « C à vous », France 5, 16 septembre 2014. (...) « Elkabbach, comme tant d’autres, est un journaliste de fréquentation, mais autant que possible de haute fréquentation : celles de présidents de la République et d’une partie de leur entourage. Elkabbach pratique, si l’on veut, une forme de journalisme de proximité : la proximité du pouvoir », Henri Maler, Acrimed, 16 juillet 2012. (...) Résumons : IEP Paris, Europe 1, donc Lagardère, proximité du pouvoir politique. En quoi le statut de journaliste, du moins celui qui est défini par les « contraintes » de la charte de 1971, peut-il être conforme à cette carrière, comme d'ailleurs à celles des gens cités précédemment ? A chacun de se faire une opinion (!). Ou bien de proposer une nouvelle définition du journalisme en jetant par exemple Albert Camus aux orties. Mais commettre cet acte officiellement serait préjudiciable à l'hypocrisie ambiante, qui masque une dérive de la profession vers le carriérisme, le militantisme idéologique et le parti pris politique sous les oripeaux traditionnels (et usés) du statut de journaliste. Pour en revenir encore à un personnage bien connu, Bel Ami est enterré. Un rigolo, que nos actuels ambitieux devancent largement. Vive la crise !

-Patrick Cohen contre la liberté de penser (Source OJIM, extraits)

« On a le droit de penser ce qu’on veut dans les limites de la loi », sur le plateau de « C à vous » le 12 mars 2013. (note de l'auteur : les « limites de la loi » étant ce qu'elles sont, jamais les idées révolutionnaires n'auraient pu se faire entendre avant 1789 dans le cadre

189 monarchique. M. Cohen est apparemment un conservateur. Il confond en s'exprimant de la sorte « politiquement correct » et discours politique. Seule la liberté de pousser les barrières permet de contester les mille et unes digressions idéologiques dont la France, entre autres pays, est le creuset. Idéologies extrémistes comprises. Logique univoque normale pour un lauréat de l'IEP Paris ? Philosophie de l'éteignoir ? Vision du journalisme caporalisé financièrement fructueux en terme de revenus ? A chacun de juger)

Patrick Cohen est né en août 1962. Jouissant d’une réputation de journaliste appliqué dans son travail, il est l’un des chefs d’orchestre de l’information. Se camouflant derrière une neutralité de façade, Patrick Cohen s’est longtemps fait le chantre de la liberté d’expression tant qu’elle demeurait dans les limites du politiquement correct. Jusqu’à ce que le masque tombe face à Frédéric Taddéï… Le 12 mars 2013, celui-ci était en effet invité sur le plateau de « C à vous », animé par Alessandra Sublet, à l’occasion du passage de son émission « ce soir (ou jamais !) » de France 3 à France 2. L’ambiance se tend très vite et Patrick Cohen attaque bille en tête lorsque Taddéï soutient qu’il invite dans son émission des gens que l’on n’entend pas ailleurs. « Vous invitez des gens qu’on n’entend pas ailleurs et qu’on n’a pas forcément envie d’entendre… », attaque-t-il en nommant ces « gens » quelques secondes plus tard : Tarik Ramadan, Dieudonné, Alain Soral, Marc-Edouard Nabe. Taddéï répond qu’il n’y a pas d’invités qu’il refuse d’inviter par principe : « Je suis sur le service public, c’est pas à moi d’inviter les gens en fonction de mes sympathies ou de mes antipathies ». « Ce n’est pas une question de sympathie, lui rétorque Cohen. On a une responsabilité quand on anime une émission de débat, de ne pas propager des thèses complotistes, de ne pas donner la parole à des cerveaux malades ». Le débat s’envenime. Cohen glisse subrepticement du complotisme au négationnisme, Taddéï lui rétorque que personne n’a jamais tenu de propos hors la loi sur son plateau. Pour tenter de détendre l’atmosphère, Alessandra Sublet apostrophe soudain Cohen : « On a chacun le droit de penser ce qu’on veut, Patrick ! » Réponse spontanée de l’intéressé : « Non ». Puis après réflexion : « On a le droit de penser ce qu’on veut dans les limites de la loi » ! « Toutes les opinions autorisées par la loi sont défendues par la constitution ; tout ce qui n’est pas interdit est autorisé, et ce n’est pas moi, animateur de télévision, qui vais décider de ce qu’on a le droit de dire », affirme enfin Taddéï devant son adversaire de plus en plus hébété. Celui-ci grille enfin sa dernière cartouche en indiquant que certains des invités de Taddéï avaient été « condamnés plusieurs fois ». « Vous voulez que je vous fasse la liste d’un certain nombre de ministres qui ont été condamnés ? Ça ne vous a pas empêché de les inviter dans votre émission de radio le lendemain matin… », répond Taddéï du tac au tac. Cohen est au tapis. (...)

F ormation Patrick Cohen est diplômé de l’École supérieure de journalisme de Lille (59ème promotion)

Parcours professionnel 1981-1982 : Déclare avoir commencé sur Radio Paris, « une station dont le nom n’était pas formidable mais qui était l’un des espaces de liberté de l’époque, s’était tournée vers des associations, des syndicats, pour leur donner carte blanche.. » (source). Il semblerait que le nom complet de cette station soit « Radio Paris Ile-de-France », radio libre (106.7) stoppée en 1992. Radio locale de libre expression sur Paris et l’Ile de France, elle fut créée par Max Pol Fouchet, Luc Berimond et Jean-Marie Bugat alias Denis Clair en 1981 (source). Elle était autorisée jusqu’en 1992 en partage de fréquence avec Radio Lucrèce.

190 (...) 1994 : il rejoint RTL. Présentateur de journaux et animateur de l’émission « Les auditeurs ont la parole ». (...) Août 2005 : il prend les commandes de la matinale RTL Matin de 7 h à 8 h. Septembre 2006 : Présentateur du journal de 18 heures RTL Soir. Septembre 2007 : Il rejoint France Inter en tant que rédacteur en chef de la matinale et présentateur du journal de 8 h. Il est parallèlement l’un des polémistes de l’émission de télévision de Pascale Clark, « Un café, l’addition », diffusée le samedi à 13 h 45 sur Canal +. Août 2008 : il rejoint Europe 1 pour co-animer avec Marie Drucker « Europe 1 Soir » du lundi au vendredi de 18 h à 20 h. Il intervient également dans l’interview dominicale « Le Grand Rendez- vous ». Remplaçant de Marc Olivier Fogiel à la matinale (7 h – 9 h 30) pendant cette saison 2008/2009 Août 2009 : Présente « Europe 1 soir » de 18 h 30 à 19 heures Septembre 2010 : il revient sur France Inter aux commandes de la tranche 7 h – 9 h. Août 2011 : En parallèle, il rejoint l’équipe de « C à vous » présentée par Alessandra Sublet sur France 5.

(...)

Il l’a dit « J’ai fait aussi bien sur RTL que sur Europe des choses qui me paraissaient, à certains moments, assez haut de gamme. Simplement, on écrit pour son lecteur et on fabrique des reportages pour ses auditeurs, c’est la base du métier. Je suis un professionnel, je sais m’adapter à des publics différents. » (lien : http://www.ozap.com/actu/patrick-cohen-france-inter-matinale-demorand- rtl/363230) « Ça correspond à une demande, et un besoin, des auditeurs. Il ne s’agit pas de libre antenne : on essaye toujours de faire en sorte que les thèmes abordés avec eux aient été traités au cours du journal et, au besoin, on explique ou on recadre. Bref, ce n’est pas le lieu où on déverse ses humeurs ! » « Patrick Cohen, au coeur de l’info du soir » (Nord Éclair, 13/02/2009) « TF1 et LCI, sur la campagne [de l’élection présidentielle 2007], je les ai trouvés irréprochables. Autant il y a eu d’autres campagnes ou c’était discutable mais pas celle-ci. Sur Europe 1, oui, Elkabbach a dérapé plusieurs fois sur les interviews menées à l’antenne, avec des mots en trop, évidemment. » « Patrick Cohen, France Inter : « La matinale, c’est là où bat le cœur des grandes radios généralistes » (source) « Certains économistes estiment que l’immigration entraîne des recettes nettes d’environ 12 milliards d’euro ». (France inter, 29/05/2012) « Certes, il y a eu plus de passion en 2007. Avant même que la campagne 2012 soit terminée, les commentaires sont injustes. On voudrait la réduire à la polémique du halal ou celle du permis de conduire. C’est faux ! Sur France Inter, nous n’avons consacré qu’un seul sujet au halal, au lendemain du meeting de Marine Le Pen, pour recadrer le sujet. Et aucun reportage sur le permis

191 de conduire. » « Patrick Cohen : “Nous n’humilions ni les auditeurs de gauche ni ceux de droite” » (Le Point, 19/04/2012) « Nous n’humilions ni les auditeurs de gauche ni ceux de droite. Certes, avec Marine Le Pen, c’est plus difficile… » Ibid. '(...)

Sa nébuleuse Philippe Val : Lors de sa nomination à la tête de France Inter, l’ancien directeur de Charlie Hebdo a tout fait pour imposer Patrick Cohen dans la grille des programmes de la radio publique. Il semblerait qu’au delà du talent professionnel de Patrick Cohen, des liens idéologiques sous-tendent cette collaboration.

Ils l’ont dit « Encore un pas et on est dans la théorie du complot, vous ne l’avez pas franchi, mais un pas». Bernard-Henri Lévy (France Inter, 21/10/2011) « Le problème avec Cohen et Legrand, c’est qu’ils se croient intelligents. Le pire, c’est qu’ils le sont. Rien à voir avec un Mermet ou un Paoli. Nous avons affaire au fleuron de la gauche médiatique française. J’ai même la faiblesse de croire en leur honnêteté intellectuelle. Je leur reproche seulement d’officier pour le service public et de faire autant transparaître leurs dilections. » « Quelques réflexions à l’intention des Patrick Cohen, Thomas Legrand et autres représentants de la gauche médiatique préoccupés par la question de la droitisation de l’UMP » (source) (...) « Patrick Cohen fait taire la voix du peuple » le 31 mai 2015 dans Médias

Vox populi, vox Dei ? Pas pour Patrick Cohen en tout cas. Alors qu’il animait une matinale délocalisée le 29 mai à l’hôpital Georges Pompidou, avec pour invité Martin Hirsch, il n’a pas hésité à faire taire les nombreux employés de l’hôpital qui huaient le directeur général de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Entre le peuple et ses dirigeants, le journaliste n’a pas mis longtemps à choisir. Il est 8h20 ce 29 mai lorsque Martin Hirsch, directeur de l’AP-HP (75 000 agents, 7 millions de patients par an en région parisienne, Oise et Var), est interrogé en direct dans les locaux de l’Hôpital Pompidou. Alors qu’il débite un discours rassurant à l’antenne, son personnel révolté pour diverses raisons bien plus profondes que le seul sujet de l’organisation du temps du travail (rythmes de travail épuisant, moyens en baisse, réorganisations de service bâclées…) le chahute à l’antenne. La voix du peuple envahit l’espace sonore, couvrant le patron de l’AP-HP qui continue à discourir, presque déconnecté : “celles et ceux dont on entend les clameurs aujourd’hui et moi, nous avons vraiment le même souci”. Que fait Patrick Cohen ? N’écoutant que son courage… il fait taire les manifestants en leur rappelant qu’un responsable syndical CGT pourra venir s’exprimer à l’antenne. À quoi sert la clameur en effet si un discours à la radio est autorisé ? L’acte, hautement symbolique, a fait réagir Antoine Perraud sur son blog hébergé par Mediapart : “le journalisme retrouve alors le piège et les ornières qui lui font perdre, un peu plus chaque jour, sa créance dans l’esprit public :

192 apparaître en supplétif du pouvoir. Des pouvoirs. De tout pouvoir. Du premier pouvoir à passer par là…” De lui-même, Patrick Cohen (qui a récemment découpé sa carte de presse par solidarité avec une autre star de la matinale Pascale Clark) place France Inter dans la filiation de l’ORTF, selon le blogueur : “Patrick Cohen, victime d’un dispositif conçu pour dévoiler autrui mais révélant brusquement soi-même, fait taire ce qui surgit, réprime l’émeute. De sa propre initiative, il agit telles les autorités qui interdirent tout direct, au Quartier latin, au plus fort de Mai-68 : la radiodiffusion française n’est pas là pour aimanter mais pour chloroformer“. Une réalité autrement plus triste, sinon désastreuse, que la grève du service public de Radio France, menée par des journalistes privilégiés alors que les castes les plus défavorisées, CDD et autres « bouche-trous » continuent à être taillables et corvéables à merci. » Résumons : M. Cohen ne pense selon ses dires que dans le cadre autorisé par la loi, ce qui en fait donc un conformiste content de l'être et un conservateur. A travers lui, c'est l'image de RTL, Europe 1 ou de France Inter qui est éclairée, dans la mesure où il y a exercé ou y exerce encore de grandes responsabilités éditoriales. Toute idée attentatoire à l'ordre établi devrait donc logiquement lui être intolérable. Ce rôle de « policier des opinions » qu'il s'attribue, sifflant sans doute dès que la ligne rouge de la loi est franchie, fait logiquement de lui un « chien de garde » dont les patrons peuvent dormir en paix. Il ne sera jamais un trublion, ni à fortiori un traître à la cause, ajustant sans doute sa stratégie éditoriale aux commandements de la loi et à ses changements (voilà une grande conscience...). Son apparente relation amicale et professionnelle avec Philippe Val, lui-même appartenant à la mouvance BHL, autorise à supposer qu'il est enraciné idéologiquement dans l'univers des « grands journalistes parisiens » (et des réseaux qui vont avec), ce que par ailleurs ses fonctions successives tendraient à prouver.

-David Pujadas, la servilité tranquille (source OJIM) Ennemi juré des syndicalistes et de l’extrême-gauche, David Pujadas est souvent décrié comme un journaliste « servile », voire directement comme un « laquais », selon le mot de Jean-Luc Mélenchon. Habitué du club Le Siècle, le présentateur, né en décembre 1964 à Barcelone, ne présente pas moins, malgré les nombreuses critiques et reproches, une énorme longévité à la tête du journal télévisé de France 2, qu’il anime tous les soirs. Depuis la fin de l’ère PPDA, Pujadas parvient même, petit à petit, à réduire drastiquement l’écart avec le JT de TF1. Une servilité tranquille que rien ne semble pouvoir freiner.

Formation Après des études au lycée international de Ferney-Voltaire, dans l’Ain, il effectue une licence en sciences économiques à l’Université de la Méditerranée d’Aix-en-Provence. Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris, il rejoint ensuite le centre de formation des journalistes (CFJ) de Paris, en 1988, après avoir effectué un stage à Nice-Matin.

Parcours Au sortir de ses études, en 1989, David Pujadas remporte un concours de reporters organisé par TF1 et intègre le service étranger de la chaîne, privatisée depuis peu. Il couvre notamment la chute

193 de Ceausescu en Roumanie (1989), la guerre du Golfe (1991) ou encore le siège de Sarajevo (1992). En 1992 et 1993, il assure le remplacement des présentateurs des journaux du matin. De 1990 à 1994, il réalise parallèlement plusieurs enquêtes pour Charles Villeneuve, alors présentateur de l’émission « Le Droit de savoir ». Deux de ses sujets seront censurés : le premier sur Bernard Tapie, ami de Patrick Le Lay (président de la chaîne), l’autre sur le milieu de la Côte d’Azur. Il décide alors de quitter la chaîne. Mais lorsque TF1 lance en 1994 sa nouvelle chaîne d’information en continu, LCI, David Pujadas rejoint la rédaction et y présente régulièrement des journaux télévisés jusqu’en 1996. En septembre de la même année, il présente le « Grand journal » de la chaîne, de 18h à 19h. En 2000, il crée « 100 % politique », un magazine hebdomadaire qu’il coprésente avec Patrick Buisson jusqu’en 2001. C’est lors de cette année qu’il quitte le groupe TF1 et rejoint France 2, chaîne à laquelle il restera lié jusqu’à aujourd’hui. Le 3 septembre 2001, il remplace Claude Sérillon à la présentation du journal de 20 heures grâce à l’intervention du nouveau directeur de l’information, Olivier Mazerolle. Huit jours après cette nomination surviennent les attentats du 11 septembre. Pujadas est filmé par une équipe de Canal+ en train de regarder les évènements en direct. C’est là qu’il lance son fameux : « Ouah génial ! » au moment où le deuxième avion percute la deuxième tour du World Trade Center. À ses côtés, un collègue ajoute : « Alors là, c’est mieux que le Concorde, on est battus ». L’exclamation de Pujadas, filmée et rapportée par Canal+ au sein de l’émission « +Clair », fait scandale, le contraignant à des excuses. 10 ans plus tard sur Europe 1 , Pujadas expliquera que, « au moment où on le découvre ça parait cocasse. On voit un petit filet de fumée qui dépasse d’une tour ». Mais ce petit dérapage ne perturbera pas son ascension au sein du groupe public : le 15 octobre 2008, il présente son millième journal télévisé sur France 2. C’est depuis cette année d’ailleurs que son journal viendra talonner celui de TF1 présenté par , dont l’audience est en recul. David Pujadas présentera, en parallèle du JT, plusieurs émissions : « Le Contrat », une interview politique mensuelle sur LCP (saison 2005-2006) ; « Madame, Monsieur, bonsoir » sur France 5 avec Hervé Chabalier (2006-2007) ; « Les Infiltrés », magazine d’investigation de France 2 (2008- 2010). Enfin, il présente depuis 2002 les soirées électorales de France 2 ainsi que le magazine politique mensuel à succès « Des paroles et des actes » sur la même chaîne. Hormis ce « Ouah génial ! » un peu enfantin, on peut relever quelques « boulettes » journalistiques plus gênantes. Le 3 février 2004, Pujadas annonce en ouverture de son journal qu’Alain Juppé se retire officiellement de la vie politique. Au même moment, Juppé donne précisément une longue interview à TF1, dans laquelle il livre une version bien plus nuancée. Pujadas aurait-il voulu anticiper pour ne pas laisser l’information à TF1 ? Quoi qu’il en soit, suite à cette boulette, le présentateur de France 2 présentera ses excuses, ce qui n’empêchera pas la rédaction de voter, deux jours plus tard, une motion de défiance à son encontre. Olivier Mazerolle présentera sa démission, et David Pujadas sera écarté de l’antenne pendant deux semaines. Sur Europe 1 en 2011 , il rendra responsable de cette faute le service politique de la chaîne, tout en affirmant « assumer » cette erreur… Cinq ans plus tard, en 2009, Pujadas interroge, dans son JT, Xavier Mathieu, délégué CGT de

194 l’usine Continental à Clairoix après que ses collègues grévistes aient saccagé la sous-préfecture de Compiègne. Ses questions, uniquement axées autour de la violence utilisée par les syndicalistes, provoqueront une grosse colère dans les milieux d’extrême-gauche. Devant les caméras de Pierre Carles, Jean-Luc Mélenchon qualifiera, à la vue des images de l’interview, David Pujadas de « salaud », de « larbin » et de « laquais ». Acrimed publiera un long papier pour dénoncer ses méthodes journalistiques jugées complaisantes envers le patronat. Le 23 septembre 2009, il interviewe Nicolas Sarkozy en compagnie de Laurence Ferrari. Son comportement sera vivement critiqué, notamment par Acrimed, qui soulignera sa complaisance et sa mollesse à l’égard du chef de l’État. Le 30 juin 2010, dans le cadre de son documentaire « Fin de concession », le journaliste Pierre Carles attend, avec son équipe et des proches du défunt journal Le Plan B, David Pujadas à la sortie de France Télévisions pour lui remettre la « laisse d’or » et le titre de « Laquais du Siècle », en référence au club Le Siècle, dont il est membre. Les militants repeindront son scooter d’une peinture dorée à l’aide de bombes aérosols. Une « agression » qui sera vivement dénoncée dans la presse. Le 12 mars 2013, les Indigènes de la République publient un article dans lequel son livre « Agissons avant qu’il ne soit trop tard : Islam et République » est critiqué. Le mouvement lui reproche de créer un « islam imaginaire », fantasmé et manichéen. Le 7 octobre 2013, pour illustrer leur propos sur le laxisme des vendeurs d’alcool, David Pujadas et son équipe envoient des mineurs tenter leur chance dans des épiceries en caméra cachée. Dans une lettre ouverte à Thierry Thuillier, directeur de l’information de France Télévisions, le syndicat des journalistes fait alors part de son indignation : « Ce procédé nous indigne car l’équipe a effectué une mise en scène, demandant à un mineur d’enfreindre la loi pour arriver à ses fins, et de plus viole la Charte du journaliste qui stipule qu’un “journaliste s’interdit d’user de moyens déloyaux pour obtenir une information ou surprendre la bonne foi de quiconque”. » Derniers exploits du « grand professionnel » : France2 en campagne contre le Code du travail et l'impôt progressif (article Télérama 09/09/2015 par Samuel Gontier repris de Les-crises.fr du 3 octobre 2015) Nouvel exploit de David Pujadas, mardi soir au 20 heures. Il sort de sous la table « notre fameux Code du travail, si lourd avec ses près d’un kilo et demi », le brandit devant la caméra et le pose violemment devant lui pour en faire sentir tout le poids. Quelle audace ! L’utilisation de cet accessoire entièrement analogique contraste avec la surenchère d’effets numériques dans les nouveaux JT de TF1 et de M6. Le Code du travail est l’ennemi de David Pujadas et de la rédaction de France 2, cela explique sa présence sur le plateau. Déjà, le titre du 20 heures omettait de lui accorder une majuscule : « Travail : la fin du code ? » Puis le présentateur annonçait la « réforme du droit du travail : le gouvernement va faire primer la négociation sur la loi ». Et clamait son unique préoccupation : « Le Code du travail va-t-il mincir ? » Cette obsession ne date pas d’hier. Le 20 heures de France 2 a l’habitude de s’appesantir sur le poids et l’épaisseur du Code du travail, dont des piles entières illustrent de nombreux sujets consacrés à son indispensable cure d’amaigrissement. Le JT reprend ainsi l’image de la couverture du livre de l’économiste libérale Agnès Verdier-Molinié, à qui la chaîne a déjà déroulé un tapis aussi rouge que la couverture dudit Code.

195 Le JT de France 2 reprend surtout les arguments et les chiffres répétés par le Medef… et unanimement invalidés, du Monde à Slate en passant par Mediapart et même Le Figaro. Des décryptages où l’on apprend que l’édition Dalloz (en général prise comme référence) ne comporte pas seulement les articles de loi mais aussi des pages et des pages de « notes de rédaction » et de « notes jurisprudentielles », ce qui explique son surpoids. Où l’on découvre également que les Allemands sont aussi obèses que les Français, avec leurs trois mille pages. Tous ces démentis à la propagande patronale ne font pas plier David Pujadas et la rédaction du 20 heures, derniers à rester fidèles au Medef. Après un sujet expliquant que le gouvernement envisage de « bouleverser la hiérarchie existante en faisant primer la négociation sur la loi », Jean-Paul Chapel détaille en plateau certains changements concrets que la réforme entraînerait. C’est à ce moment que le présentateur brandit son pavé. « Jean-Paul, petite question complémentaire, est-ce que cela va alléger ceci : notre fameux Code du travail, si lourd avec ses près d’un kilo et demi. » « Non, David. » Malheur de malheur ! « Ce Code, il sera toujours aussi lourd avec ses quelque trois mille pages. » Trois mille pages ? C’est monstrueux ! « Merci Jean-Paul, trois mille pages, ça fait effectivement beaucoup de lecture », conclut David en tapotant son pavé. Jean-Pierre Pernaut n’aurait pas dit mieux. Après le ras-le-bol législatif, le ras-le-bol fiscal. Ça ne suffit pas à France 2 de régler son compte au Code du travail, elle s’en prend quelques minutes plus tard à l’impôt sur le revenu, dénonçant un prélèvement profondément injuste. « La baisse des impôts, suite, attaque David Pujadas. On apprend que la diminution annoncée va réduire d’un million le nombre de contribuables assujettis à l’impôt sur le revenu. On est donc largement à moins d’un Français sur deux. » Cela signifie que plus de la moitié des contribuables (les plus pauvres) ne bénéficiera pas de la baisse d’impôts annoncée par François Hollande, qui profitera seulement aux 50 % les plus riches. Mais, pour France 2, c’est l’exonération d’impôt sur le revenu qui est scandaleuse. Il faut faire payer les pauvres ! Démonstration avec « la réalité derrière les chiffres » (dixit David Pujadas), illustrée par une séquence animée. « L’impôt sur le revenu, démarre la voix off, c’était 75 milliards d’euros de recettes pour l’Etat en 2014. Pour le payer, a priori, 37 millions de contribuables. Mais tous ne le payent pas. » Oui, plus d’un sur deux, et c’est scandaleux. « L’impôt sur le revenu, un impôt progressif qui se découpe en tranche, poursuit la voix off. Plus on gagne, plus on est taxé. » Dégueulasse. Ce sont toujours les mêmes qui paient. « Au final, c’est une minorité de contribuables qui paye le plus. » C’est insensé de s’en prendre ainsi aux minorités. « Les Français qui déclarent plus de 47 000 euros ne représentent que 10 % des contribuables. Mais ces 10 % s’acquittent à eux seuls de 70 % de l’impôt sur le revenu. » C’est de la spoliation pure et simple. Et pendant ce temps-là, 50 % de privilégiés ne payent rien ! « Depuis trois ans, ses recettes [de l’impôt sur le revenu] sont en hausse pour l’Etat, plus 10 milliards d’euros entre 2012 et 2014. » D’où le légitime ras-le-bol fiscal. Et la voix off de conclure : « L’impôt sur le revenu ne représente que 8 % des 957 milliards d’euros de prélèvements obligatoires. 75 milliards, c’est donc peu… et beaucoup à la fois. » En effet… Mais d’où viennent les 92 %, les 882 autres milliards d’euros encaissés par l’Etat (et la Sécurité sociale) ? France 2 ne le dit pas, elle serait obligée d’admettre que les privilégiés qui sont exonérés d’impôt sur le revenu acquittent tout de même la TVA en faisant leurs courses, la taxe sur les produits pétroliers en faisant le plein, la CSG s’ils travaillent, etc. Autant de prélèvements non progressifs auxquels les exonérés d’impôt sur le revenu contribuent beaucoup plus fortement (proportionnellement à leurs revenus) que les martyrs de l’impôt sur le revenu, plus riches. Mais c’est à ces derniers que France 2 s’intéresse exclusivement.

196 « Alors, la pression fiscale est-elle toujours au cœur des préoccupations ? » De David Pujadas, c’est certain. « Un ministre avait utilisé l’expression de ras-le-bol fiscal. » Je m’attends à ce que le présentateur sorte une matraque de sous la table pour illustrer le « matraquage fiscal », voire un canon de 75 ou un chasseur-bombardier pour rappeler « le tir de barrage » ou « le pilonnage fiscal » évoqués par le personnel politique. Mais David Pujadas préfère dégainer un micro-trottoir pudiquement rebaptisé « carnet de route ». « A Lagny-sur-Marne, carnet de route dans la classe moyenne confrontée aux impôts. » Le reporter, une nouvelle fois très incarné, a fait la sortie des écoles pour rencontrer « des familles plutôt aisées plus touchées par les hausses d’impôt que par les baisses.… En terme d’impôt, ces dernières années, vous avez senti une baisse ? », demande-t-il à une dame. « Non, que des hausses. » « Parce que z’êtes pas dans la cible des baisses, peut-être ? » « Ah non, on n’en fait jamais partie. » Quand on vous dit que ce sont toujours les mêmes qui paient. « Et ici, on le dit sans détour. Beaucoup de ces parents qui gagnent bien leur vie jugent l’impôt inégalitaire. » Courageux, le reporter se fait l’avocat du diable, c’est-à-dire de l’Etat rapace. « En même temps, j’ai envie de vous dire, on vit dans un pays où grâce aux impôts qu’on paye on a beaucoup de choses, non ? » « C’est vrai, reconnaît un parent d’élève. Mais chacun devrait payer, même un euro, ce serait un impôt plus juste. » « Un euro symbolique, ce serait bien ? » « Oui, ce serait bien, approuve l’homme. Moi, j’ai rien, on me donne pas d’aide, j’ai absolument rien. » Pas comme ces privilégiés qui, non contents de ne pas payer un euro d’impôt, se gavent d’allocations.

« Ce discours, tout le monde ne le partage pas, notamment chez les commerçants », nuance le reporter, qui poursuit son micro­trottoir, pardon, son carnet de route, dans une boulangerie. « Je trouve normal de payer des impôts parce qu’on a des routes, des écoles, des structures qui n’existent pas dans tous les pays. » Un boulanger collectiviste ? « C’est normal de contribuer à tout ce qui permet de vivre décemment en France. » Il faudrait l’envoyer pétrir son pain dans un kolkhoze. Peut­être n’est il pas informé du dernier attentat fiscal en date : à Lagny, « les impôts locaux vont exploser de 15 % ». Décidément, tout explose : les impôts locaux, l’impôt sur le revenu, le poids du Code du travail… Heureusement que France 2 est là pour déminer le terrain. »

Un autre avis sur le même personnage repris par les crises.fr via ce lien : file:///home/alain/Documents/media%20pujadas%20lien%20video%20%C2%BB%20%5BVid %C3%A9o%5D%20Le%20Journaliste%20%28David%20Pujadas%29.html

David Pujadas est membre du club Le Siècle, où se côtoient hommes politiques, industriels, financiers et journalistes. (sélectionné par l'auteur)(...) France 2 parangon de déontologie journalistique : décidément ! On sait que M. Pujadas ne présentera plus « des paroles et des actes », son émission ayant été supprimée au profit a-t-il dit, d'une autre émission animée par Léa Salamé (lire plus loin). Sanction (improbable), changement préparatoire aux présidentielles de 2017 ? Mystère. Or, cette dernière émission a été l'occasion de constater à quel point le système est manipulé, en

197 l'occurrence au détriment de M. Mélanchon. Lire plus bas.

Il l’a dit (...) « Là j’ai trouvé que cette interview était assez réussie, assez intéressante. Évidemment, parce que c’est devenu maintenant presque inévitable, ici, là, on va dire ceci, on va dire cela. Mais moi j’ai trouvé que cette interview était pas mal », au « Grand Journal » le 25 septembre 2009, à propos de son interview (très critiquée) de Nicolas Sarkozy. (...) Ils l’ont dit « L’idée même de cette émission est scandaleuse. Dans une démocratie, un journaliste doit avancer à visage découvert. Un journaliste doit pouvoir dire à son interlocuteur qui il est, quel métier il fait, et l’informer de cette vérité simple : les propos tenus ont vocation à être porté à la connaissance du public. A l’inverse, avancer masqué, dissimuler sa fonction professionnelle, cacher le vrai but de son travail, s’apparente à du viol, à un vol, et il est extrême difficile, voire franchement impossible, de présenter cela comme du journalisme. Le mot d’espionnage serait plus adapté », Jean-Michel Aphatie, à propos de l’émission « Les Infiltrés », le 2 octobre 2008 « Une interview “assez réussie” ? Mais pour qui ? Pour Nicolas Sarkozy d’abord, parfaitement secondé dans cet exercice de communication, comme nous avons essayé de l’établir dans notre article précédent. Que David Pujadas trouve cette interview “pas mal” ne nous apprend qu’une chose : qu’il est, avec d’autres, ajusté à la fonction de faire-valoir et qu’à ce titre, sa sélection est justifiée. S’il est satisfait, c’est par comparaison avec la précédente interview, dont il déplore le style “figé”, et non le contenu. Rappelons d’ailleurs qu’en réalité, il avait à l’époque surtout regretté qu’ils aient été quatre journalistes à se partager la faveur du prince, et que telle semblait bien la cause première de sa “frustration” », Acrimed, le 6 octobre 2009, suite à l’interview Nicolas Sarkozy par Pujadas et Ferrari. « Merci, Monsieur Pujadas. Si nous ne le savions déjà, nous sommes désormais informés des “questions de base” que l’on apprend à formuler dans les écoles de journalisme. Non pas : “Qu’est-ce qui explique votre colère à la suite de la décision du tribunal ? Quel sort attend les Conti après cette décision d’une extrême… violence ?” Mais trois appels (et cela seulement…) à condamner la “violence” des salariés. Ce n’est pas un entretien, mais un cours d’instruction civique pour école maternelle », Henri Maler, Acrimed, 14 octobre 2010, suite à l’interview du syndicaliste Xavier Mathieu. « Le Pen et Pujadas, même combat », Télérama, suite au traitement médiatique du meurtre d’une petite fille, le 22 novembre 2011. » Pour info: file:///home/alain/Documents/media pujadas lien video » [Vidéo] Le Journaliste (David Pujadas).h

Et, par souci de clarté :

« Manipulations médiatiques » lors du passage de Mélenchon à DPDA le 31 mai 2016 dans Médias (extraits) Après plusieurs hésitations, Jean-Luc Mélenchon aura finalement eu son « Des paroles et des actes

198 », sur France 2, jeudi 26 mai. Une fois n’est pas coutume, la polémique n’était pas loin. En effet, quelques heures avant le tournage, le député européen du Front de Gauche s’était agacé, sur Facebook : « Sachez qu’après trois mois de « préparation », à 48 heures de l’émission, ni les intervenants ni les thèmes n’étaient fixés ni stabilisés. » Et celui-ci d’expliquer pourquoi il préfère Laurent Ruquier à David Pujadas : « Au contraire des moments d’échanges piquants mais respectueux comme ceux de « On n’est pas couché », l’émission « DPDA » est conçue comme une corrida où l’invité fait office de taureau promis au sacrifice. » Finalement, l’émission aura bien lieu. Mais pour Antoine Léaument, militant du Parti de Gauche repris par le blog de Mélenchon, l’émission a été entachée de nombreuses « manipulations médiatiques ». Premièrement, les « Français lambda » appelés à poser des questions à Mélenchon ne l’étaient pas tant que ça. Tout d’abord le boulanger favorable à la loi El Khomri, Djibril Bodian. Voilà comment Pujadas le présente : « Djibril Bodian, vous avez 39 ans, vous êtes artisan boulanger à Paris au pied de la butte Montmartre. Votre pain est réputé, vous avez gagné des prix. Vous avez plusieurs employés, 17 même je crois mais à temps partiel. » Sauf que M. Bodian n’est pas qu’un simple « boulanger parisien ». Déjà, il emploie 17 salariés à temps partiel là où « 77% des boulangeries françaises comptent entre 1 et 5 salariés », relève Antoine Léaument. Mais surtout, M. Bodian a été le boulanger de l’Élysée de 2010 à 2015, chose qui n’est, à aucun moment, précisée durant l’émission. Le deuxième invité qui a fait grincer les dents de Léaumont est une femme, Céline Imart-Bruno, présentée comme une agricultrice passée auparavant par l’« audit puis l’entreprise ». « Pensant avoir affaire à une exploitante agricole favorable à l’agriculture productiviste, Jean-Luc Mélenchon a en face de lui une personne qui avait auparavant été… directrice financière de Bolloré au Chili (comme tous les agriculteurs, c’est bien connu) », écrit le militant. En somme, encore une travailleuse tout à fait lambda… (biographie). Autre sujet de discorde : les images d’illustration utilisées sur le fond neutre de l’émission représentaient toutes des casseurs, des voitures de polices brûlées, de la fumée… « Ces photographies mettent une ambiance sur le plateau et sur l’écran de télévision. Elles associent l’action syndicale organisée à une action violente et destructrice. Elles constituent en soi une disqualification du mouvement contre la loi El Khomri », note Léaumont. Enfin, les tweets sélectionnés par l’équipe de l’émission pour faire réagir en direct Jean-Luc Mélenchon n’ont pas été choisis « innocemment ». Pour le militant, « à bien y regarder, la séquence a quasi exclusivement été composée de tweets négatifs passés à l’écran ». En revanche, les tweet positifs ou critiques de David Pujadas ont été étrangement zappés, à l’image de ces deux tweets de Caroline De Haas proposés par Antoine Léaumont. Définitivement, cette émission, très suivie, n’a pas fini de faire parler d’elle. De Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen en passant par Nicolas Sarkozy, les polémiques accompagnent chaque édition, ou presque… En janvier, une polémique du même genre avait concerné une intervenante « neutre » qui avait interpellé Alain Finkielkraut. (...) »

199 Voici ce que dit l'OJIM de cette intervenante, dont la neutralité est largement sujette à caution sous le titre: « DPDA : l’intervenante « neutre » est proche du Parti des indigènes de la République »

« Jeudi 21 janvier, une participante au public de « Des paroles et des actes », sur France 2, interpellait vivement le philosophe Alain Finkielkraut, l’accusant entre autres de mettre de l’huile sur le feu des tensions interreligieuses. Très vite, la vidéo a fait le tour du web. Sur le plateau de l’émission, David Pujadas avait présenté cette jeune femme comme une citoyenne lambda, professeur d’anglais à Noisy-le-Sec. À peine était- il précisé qu’elle figurait sur une « liste citoyenne » aux dernières régionales. Sauf que, comme l’ont fait remarquer de nombreux internautes sur Twitter, la jeune femme, Wiam Berhouma, est loin d’être une intervenante neutre. En effet, aux dernières régionales, celle-ci a bien figuré à la 18ème place de la Liste d’union citoyenne présentée en Île-de-France. Mais si l’on cherche plus loin, comme aurait du le faire l’équipe de David Pujadas, on s’aperçoit que celle-ci est en lien très étroit avec le Parti des indigènes de la République (PIR), mouvement fondé en 2005 par Houria Bouteldja et qui prône ouvertement la lutte des races. Le 31 octobre dernier, une « Marche de la dignité » était organisée pour dénoncer « les violences policières » et commémorer les 10 ans des « révoltes des quartiers populaires ». L’occasion, on l’a vu, de crier sa haine de la France à plein poumon. L’occasion également de créer un collectif, celui de la « Marche des femmes pour la dignité ». Parmi les signataires de ce mouvement, Houria Bouteldja, mais aussi… Wiam Berhouma. D’ailleurs, la jeune femme figure en bonne place sur les photos publiées par le PIR sur Facebook, tenant la banderole en tête de cortège. De quoi confirmer largement ses liens avec ce mouvement et sa « neutralité » toute relative sur le plateau de Pujadas… Une fois de plus, les internautes ont fait le travail. En revanche, les téléspectateurs de France 2 n’auront malheureusement pas eu toutes les informations en main pour comprendre la virulence et les présupposés idéologiques de son intervention. » Résumons : IEP Paris, Le Siècle, un « profond respect » pour les pouvoirs en place, on ne peut pas dire que son profil s'accorde excessivement avec les contraintes qu'égrainait Albert Camus à propos du métier de journaliste. M. Pujadas est au journalisme défini par Camus ce que l'eau tiède est au whisky sec. Son apparent succès de présentateur du 20 heures est aussi l'apparent reflet de ce que sont peut-être devenus les téléspectateurs, friands (?) de banalités d'idées toutes faites et d' « arguments raisonnables » allant toujours dans le même sens, celui du manche. Mais, entre TF1 et « la 2 », quel choix leur laisse-t-on à l'heure de la « grand- messe » ? Nous connaîtrons l'impact de ce bourrage de crânes en 2017. Notons également que lors de l'interview du Président de la République le 14 juillet, qu'il assurait « avec sagesse » en compagnie de Mme Chazal, le Premier personnage de l'Etat a pu dire qu'Israël ne possède pas la bombe atomique sans être au moins repris sur ce sujet. A noter enfin en cette fin septembre 2015 une réelle appétence à peine voilée de son journal et de lui-même pour les thèmes agités par M. Macron concernant le droit du travail, les statuts professionnels, etc... Pas de doute, les grandes carrières, cela parfois se mérite vraiment.

200 -Laurent Joffrin : socialiste libéral compatible à tous les pouvoirs (source OJIM, extraits) « Le professionnalisme de Laurent Joffrin s’adapte aux circonstances », Bakchich, 26 octobre 2007.

Laurent Joffrin, de son vrai nom Laurent (André Marie Paul) Mouchard est né en juin 1952 à Vincennes. Il est le fils de Jean Mouchard, éditeur, propriétaire des Éditions François Beauval, devenu homme d’affaires, puis gestionnaire de fortune, aujourd’hui à la retraite, et de Chantal Michelet, décédée en 1955. Personnalité de la droite nationale, Jean Mouchard fut durant une dizaine d’années l’un des principaux collecteurs de fonds du Front National par le biais de la COTELEC (cotisation électorale). L’engagement de son père auprès de Jean-Marie Le Pen a renforcé les idées politiques de Laurent Joffrin, à l’opposé des siennes : « Entre l’âge de 12 et 18 ans, j’ai passé mon temps à convaincre mon père, à argumenter, à tenter de lui démontrer qu’il avait tort », Le Nouvel Économiste, du 21 au 27 novembre 2003. Sa carrière se caractérise par des allers et retours incessant entre Libération et Le Nouvel Observateur.

Formation Laurent Joffrin a été élève au Collège Stanislas de Paris, un établissement privé catholique sous contrat d’association avec l’État. Il est diplômé de l’Institut d’Études Politiques de Paris (Science- po) et licencié en sciences économiques. Il est également diplômé du Centre de formation des journalistes de Paris (promo 1977).

Parcours professionnel Laurent Joffrin : socialiste libéral compatible à tous les pouvoirs. En 1977, il entre à l’Agence France Presse qu’il quitte très vite pour participer à la création d’un nouveau quotidien, Forum international. 1981 à 1988 : Serge July l’engage à la rédaction de Libération pour « droitiser » le quotidien. À l’origine du service économique avec Pierre Briançon, il incarne l’aile libérale du journal : « On a créé le service économique avec Pierre Briançon. Serge July avait un projet de transformation symbolique du journal, concrétisé par la nouvelle maquette et un point de vue critique de la gauche. Il voulait doubler la gauche sur sa droite. Le service économique était stratégique car on injectait du libéralisme. Je prenais des positions virulentes. Par exemple, je disais : « il faut accepter la hiérarchie des salaires. » Nous étions l’aile moderniste, “tapiste” disaient les méchants… On trouvait que Serge July n’allait pas assez vite, mais c’était utile pour lui d’avoir une droite », Yves Roucaute, Splendeurs et misères des journalistes, Calmann-Lévy, 1994. Il dirige ensuite le service « Société » avant de devenir éditorialiste et responsable de la page « Rebonds » du journal, avec Serge Daney, Gérard Dupuy et Alexandre Adler. 1988 à 1996 : Il succède à Franz-Olivier Giesbert à la tête de la rédaction du Nouvel Observateur. 1996 à 1999 : Il est directeur de la rédaction de Libération. 1999 à 2006 : Il reprend la direction du Nouvel Observateur. 2006 à 2011 : Il est nommé directeur de la publication de Libération dans le cadre du plan de relance du journal proposé par ses actionnaires, dont Édouard de Rothschild, actionnaire de référence.

201 Mais en 2011, il reprend la tête du Nouvel Observateur qu’il codirige avec Nathalie Collin. La société des rédacteurs du titre a approuvé sa nomination comme directeur de la rédaction avec 93% de votes favorables. Dans le détail, on compte 121 votes pour, 9 votes contre et 3 votes blancs ou nuls. Le 12 juin 2014, il revient à Libération où il est nommé directeur de la rédaction. En parallèle de ses activités dans la presse écrite, il est chroniqueur radio et débat le lundi et le jeudi avec Sylvie Pierre-Brossolette du Point sur France Inter. Il est également producteur de l’émission culturelle « Diagonales ». Il anime également « Les détectives de l’Histoire » sur France 5, une émission d’enquête sur des faits marquants de l’histoire récente. En mars 2014, il démissionne de son poste de directeur de la rédaction du Nouvel Observateur, après l’entrée au capital du journal du «trio BNP» (Pierre Bergé, Xavier Niel et Matthieu Pigasse) En juin 2014, il redevient patron de Libération .

Parcours militant En mai 1968, il est membre du comité d’action lycéen. En 1971, il adhère au Parti Socialiste. Membre de la dix-huitième section, il côtoie Jean Peyrelevade, Lionel Jospin et Bertrand Delanoë. Il devient par la suite secrétaire du Mouvement des jeunesses socialistes (contrôlé par les trotskistes), et plus particulièrement l’un de ses courants, le Centre d’études, de recherches et d’éducation socialiste (CERES) animé par Jean-Pierre Chevènement, Alain Gomez, Didier Motchane et Pierre Guidoni. Il siège alors à la direction des MJS dans l’équipe de Jean-Marie Pernot et constitue le club « Socialisme et Université » avec des étudiants du CERES comme Denis Olivennes et ses amis du groupe ES du Panthéon (Patrick Weil, Éric Dupin, etc.). Membre du comité de rédaction de son organe, Le Crayon entre les dents (janvier 1976 – novembre 1978), il publie alors des articles sous le pseudonyme de Laurent André (ses deux prénoms) ou de Paul Helleme (pour L.M.). Ancien membre du club Phares et Balises (« Républicains de gauche », aujourd’hui dissous), avec Régis Debray, Max Gallo, Paul Thibaud et Emmanuel Todd. Ancien membre de la Fondation Saint Simon, think tank libéral et atlantiste.

(...)

Ce qu’il gagne En 2003, au Nouvel Observateur, Laurent Joffrin indique gagner 10 000 euros bruts mensuels, Le Nouvel Économiste, du 21 au 27 novembre 2003.

Il l’a dit « Plus de cent réponses à mon papier 11 septembre. Pas une seule réfutation factuelle. Misère de la pensée conspirationniste », Twitter « La loi sur la presse établit la liberté d’expression, à de rares exceptions près, dont le racisme. C’est une bonne loi », ibid.

202 « Ménard veut à toute force libérer la parole raciste. Il est décidément de plus en plus louche », ibid. « La législation prohibe le racisme et l’incitation au meurtre. La fachosphere est-elle au-dessus des lois ? », ibid. « Ce n’est pas faire le flic que demander l’application de la loi républicaine. C’est exiger une mesure simple contre le fascisme numérique », ibid. « Violence xénophobe : peut-on exonérer des sites de haine, tel fdesouche? », ibid. « Ma cause : c’est le socialisme », « Laurent Joffrin », Le Nouvel Economiste, du 21 au 27 novembre 2003. « Cette Constitution est un moindre mal. Et il vaut mieux voter pour un moindre mal que pour un mal » (à propos du traité constitutionnel de 2005), France Inter, 12 mars 2005. « La France est révoltée. Cette révolte est justifiée, légitime. Sur elle il faudra bâtir. Mais Dieu qu’elle est mal ciblée ! Un texte noble [la Constitution européenne de 2005], qui rassemblait un continent autour des mêmes principes, ceux de la liberté et de la justice, a été pris pour bouc émissaire de la crise sociale et brûlé dans les urnes comme un parchemin maléfique », « La France révoltée », Le Nouvel Observateur, 2 juin 2005 (...) « La défiance du public a en fait une autre origine : cette partie des critiques des médias qui ne cherchent pas à les améliorer, mais, pour des raisons idéologiques complexes, à les discréditer. A l’extrême-gauche parce qu’ils les tiennent pour des agents du grand capital (pour faire court), à l’extrême-droite parce qu’ils les accusent d’être tenus par les partisans de la “pensée unique mondialiste et droit-de-l’hommiste”. Cette propagande, souvent relayée par quelques chroniqueurs aigris, a produit ses effets : une grande partie du public pense désormais être victime d’un complot général visant à travestir systématiquement l’actualité au profit de forces occultes (le pouvoir socialiste en l’occurrence, hier le pouvoir sarkozyste, mais aussi, selon l’orientation de celui qui accuse, le monde de la finance, l’ultralibéralisme, le cosmopolitisme, les juifs, les musulmans, le boboïsme, etc.) Ainsi les accusations les plus folles, protégées par le vide juridique qui préside au fonctionnement de la Toile, peuvent circuler librement, détruisant les réputations, accréditant les visions les plus complotistes de l’Histoire, faisant, en tout état de cause, le jeu des extrêmes et des adversaires de la démocratie », « La Commission Jospin et les dérives du web », Le Nouvel Observateur, 27 aout 2012 (...) « Certes l’immigration est un problème et la gauche a grand tort de le nier trop souvent. Mais en faire la source principale de la crise française, c’est recourir à une outrance propagandiste inadmissible. La crise financière, la crise écologique, la crise industrielle, la crise du commerce extérieur, la crise de l’euro, n’ont rien à voir avec la présence d’immigrés en France. Par cette proclamation brutale, on assigne aux immigrés un rôle de bouc émissaire qui reflète avant tout un préjugé ethnique », « “Le nouveau FN de Marine Le Pen n’existe pas”, Le Nouvel Observateur, 24 juin 2011 (...) « La France future sera tissée, en même temps que de christianisme ou de laïcisme, de culture musulmane, d’esprit africain ou de tradition ultra-marine. Ces apports sont un enrichissement et non une menace. Se contenter de dénoncer la burka, ce qui peut certes se comprendre, c’est refuser

203 de voir cette réalité nouvelle et à bien des égards positive. La dénonciation du communautarisme – fondée en théorie – finit par couvrir une forme d’allergie à la différence. La France est d’ores et déjà plurielle. On ne saurait le nier, à l’heure de l’Europe et de la mondialisation, qui sont par nature mélange et métissage », « Il y a aussi du rouge dans le drapeau tricolore », Libération, 27 septembre 2009 (...) « Déferlement de clichés antimusulmans hier soir, dans l’émission de Frédéric Taddéï “Ce soir (ou jamais !)”. Une opération de propagande lepéniste. La télévision française est-elle en voie de lepénisation ? Déjà le titre inspirait la plus grande méfiance : “Marine Le Pen : la montée du sentiment national”, intitulé faussement anodin qui décernait d’emblée au parti lepéniste une prééminence dans la représentation de la nation, et désignait implicitement les autres partis comme des entités moins françaises que lui (…) Sous ces auspices sciemment biaisées, le présentateur avait composé son plateau avec une rare perversité », « “France 3 : Le Pen ou jamais” », Le Nouvel Observateur, 11 mars 2011 (...) « Les seuls pays à s’intéresser à l’affaire sont la Russie, qui soutient et arme le boucher Assad, et les pays du Golfe, qui soutiennent et arment les plus extrémistes de ses opposants. Grâce à la sage non-intervention occidentale, deux ennemis déclarés des démocraties accroissent leur influence dans la région en jetant de l’huile sur le feu. Mais on se consolera : la sage non-intervention des démocraties, si elle laisse Assad libre de massacrer son peuple, a bloqué l’insupportable offensive de BHL. N’est-ce pas l’essentiel ? », «Syrie : lutter contre Assad ou contre BHL ? », Le Nouvel Observateur, 24 octobre 2012 (...) « Le crime de Bachar al-Assad change tout. Cette fois, l’intervention occidentale n’est pas une hypothèse, une tentation hasardeuse ou un impératif moral plus ou moins justifié. C’est une évidence. Saddam Hussein mis à part, aucun pays n’a fait usage de l’arme chimique au combat depuis près d’un siècle. […] Avec ses alliés, le président Obama avait solennellement déclaré que l’emploi des gaz était la ligne rouge à ne pas franchir. Que vaudrait sa parole – et celle des démocraties en général – s’il restait inerte alors que les preuves de la monstruosité s’accumulent ? Et comment pourrait-on faire pression sur l’Iran dans le domaine nucléaire si on laissait impuni l’usage par Damas d’une arme interdite ? » Le Nouvel Observateur, 27 Août 2013

Collaborations (...) En janvier 2013, il est invité à la convention nationale du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) pour débattre du phénomène Mohammed Merah : est-il un fanatique isolé ou le symptôme d’une menace plus grande ? Et plus largement : la République a-t-elle perdu le contrôle de nouveaux territoires ? Avec Alexandre Adler, le professeur Iannis Roder et l’écrivain Jacques Tamero. En 2010, il est invité au dîner organisé par « Inventer à Gauche », le club de réflexion présidé par le député-maire de Grenoble (PS), Michel Destot ; au colloque « La démocratie et ses nouveaux défis » organisé par le service culturel de l’ambassade de France en Israël se déroulant à Tel Aviv à un débat sur le thème « Comment réanimer la politique ? » ; à la table ronde organisée par la Revue civique sur le thème : « La fracture civique en question. Comment mieux associer les

204 citoyens à la vie publique ? » ; présente et anime enfin la troisième lecture de textes tirés de l’ouvrage « Histoires du peuple juif » en présence de Marek Halter au Centre Rachi d’Art et de Culture. (...) En 2008, il est invité à la « conférence annuelle des Entrepreneurs » sur le thème « La France sait- elle aimer ses entrepreneurs ? » en compagnie de Nicolas Beytout, président du Groupe DI-Les Echos, Laurence Parisot, présidente du Medef et Grégoire Sentilhes, président-fondateur de la société d’investissement Nextstage (et président depuis 2011 du G20 Young Entrepreneur Alliance). En 2004, il participe au Forum de Davos. En 2003, il planche sur « Le progressisme aujourd’hui » devant la loge Demain du Grand Orient de France. (...)

Sa nébuleuse Laurent Joffrin a été un des dix « Young leader » français de la French American Foundation en 1994. Créée en 1976 à l’occasion du bicentenaire des États-Unis, « la French-American Foundation France a pour but d’améliorer les relations entre la France et les États-Unis. Sa mission générale, en collaboration avec sa Fondation sœur à New York, est de promouvoir le dialogue et de renforcer les liens entre les deux pays ». (lire plus haut) Il a également été membre du Club Le Siècle jusqu’en 2011. Fondé en 1944, le Siècle réunit, depuis plus de 60 ans, la quasi-totalité du pouvoir politique, économique, financier ou médiatique français. Soit environ 600 personnes qui concentrent entre leurs mains l’essentiel du pouvoir. Tout gouvernement, qu’il soit de droite ou de gauche, a du tiers à la moitié de ses membres qui y appartient (Emmanuel Ratier, Au cœur du pouvoir). D’autres journalistes participent à ces dîners mensuels comme David Pujadas (France 2), Michel Field (Europe 1), (Public Sénat), Alain-Gérard Slama (Le Figaro, France Culture), Claude Imbert (Le Point), Franz-Olivier Giesbert (Le Point, France 2), Emmanuel Chain, etc.(lire plus haut) Il est actuellement, membre du conseil d’administration du think tank proche du Parti Socialiste : « En Temps Réel »( extrait du site du « think tank) : En Temps Réel est un think tank associant universitaires, représentants du monde de l’entreprise, élus et acteurs de la société civile. Ses travaux sont conduits dans trois directions:

• Comprendre, anticiper et préparer les nouvelles régulations ; • Comprendre, anticiper et préparer les nouvelles exigences de la mondialisation ; • Comprendre, anticiper et préparer les nouvelles mutations de la société française. Conçu comme un lieu de rencontre entre acteurs publics et privés soucieux de confronter leurs expériences et analyses, En Temps Réel est dédié à la construction de puissantes bases intellectuelles d’un agenda réformiste. Il n’est ni un lobby ni un centre de propositions de politiques publiques. En Temps Réel veille particulièrement à souligner la dimension internationale des enjeux auxquels est confrontée la société française. Ses différents travaux associent systématiquement des personnalités et experts reconnus et de jeunes intellectuels de talents qui façonnent aujourd’hui la pensée de demain. (...) Les travaux d’En Temps Réel sont ouverts aux membres, et dans un second temps sont accessibles en partie sur ce site.

205 Les travaux d’En Temps Réel sont financés par des contributions d’entreprises qui bénéficient d’un accès privilégié à l’ensemble de la production éditoriale (...)

• Liens

• Esprit • Fondation Jean Jaurès • Terra Nova • Telos • Institut Montaigne

(...)

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L’histoire d’En Temps Réel débute avec l’autodissolution de la Fondation Saint-Simon. La Direction de Saint- Simon refusant que l’action soit reprise, les jeunes membres décidèrent de créer une nouvelle entité, plus jeune, moins centrée sur la haute fonction publique et ouverte sur l’Europe et le monde, s’intéressant aux phénomènes de mondialisation et de régulation économique. Cette boîte à idées devait également s’inscrire dans la révolution Internet. L’an 2000 vit la naissance d’En Temps Réel, association « pour le débat et la recherche » financée intégralement par les cotisations de ses membres et des entreprises partenaires. (…) En Temps Réel adopte un positionnement de centre gauche mais revendique néanmoins une indépendance vis-à-vis des partis politiques. L’association se veut ancrée dans son époque et elle mise ainsi sur les technologies de l’information. Selon Bernard Spitz, secrétaire général d’En Temps Réel « le phénomène Internet joue un rôle capital dans la diffusion de connaissances. La facilité d’échange et le degré de communication qu’il procure permettent aujourd’hui de construire des réseaux d’individus et de think tanks. » (...)

Le bureau d’En Temps Réel est composé de Stéphane Boujnah, Président, Gilles de Margerie, Vice- président, Catherine Sueur, Trésorier, et Bernard Spitz, Secrétaire. Le secrétaire général est Laurent Saint-Martin. Plusieurs chargés de mission issus du monde universitaire et de la recherche pilotent les différents projets d’En Temps Réel. Le Conseil d’administration est composé de :

• Stéphane Boujnah, directeur général de Santander Global Banking and Markets France & Benelux • Julien Cantegreil, directeur juridique adjoint de Kering • Philippe Crouzet, président du directoire de Vallourec • Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance • Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération • Emmanuel Macron, ministre de l’Economie, de l’Industrie et du Numérique • Gilles de Margerie, directeur général adjoint d’Humanis • Olivier Nora, président du directoire des éditions Grasset et des éditions Fayard • Bernard Spitz, président de la Fédération française des sociétés d’assurances • Catherine Sueur, directrice générale de Radio France • Karim Tadjeddine, directeur associé de McKinsey Le Conseil d’Orientation aide En Temps Réel à définir ses priorités et à évaluer ses projets de recherche, il regroupe :

• Laure Adler, femme de Lettres • Renaud Dehousse, directeur du Centre Européen de Sciences-Po • Marcel Gauchet, rédacteur en chef du Débat • François Heisbourg, président du Conseil d’administration de l’International Institue for Strategic Studies

206 • Anne-Marie Idrac, ancienne Ministre • Jean-Noël Jeanneney, président des Rencontres d’Arles • Pascal Lamy, ancien directeur général de l’OMC • Nicole Notat, présidente de VIGEO • Jean Pisani-Ferry, commissaire général à la Stratégie et à la Prospective • Jean-François Rischard, ancien vice-président de la Banque Mondiale • Richard Robert, directeur de la publication de Telos • Nicolas Veron, économiste au Peterson Institurte et à Bruegel • François Villeroy de Galhau, directeur général délégué du groupe BNP-Paribas • Charles Wyplosz, professeur d’économie à l’université de Genève

Il dirige enfin, avec Denis Olivennes et Patrick Weill, le club de réflexion politique Danton (introuvable sur internet). Voici la présentation qu’en fait le journaliste Philippe Cohen : « Lors d’une réunion mensuelle, nous étions une quarantaine de hauts fonctionnaires, de journalistes, d’économistes et de chercheurs à échanger avec un homme politique ou un responsable économique. » Ils ont dit « Il est à noter qu’à peine 15 jours après la publication de l’édito de Joffrin visant Fdesouche.com, ont commencé les ennuis de Pierre Sautarel avec la Justice et ses convocations incessantes par la Police Judiciaire… » « Politis Vs Laurent Joffrin », Fdesouche.com « Reste un mystère. Quelle mouche a piqué Le Nouvel Obs pour s’en prendre ainsi à ses icônes ? La Pravda de la gauche caviar ne nous avait pas habitués à de telles audaces. Laurent Joffrin serait donc encore un journaliste à la recherche de scoops, fût-ce au détriment de ses amis ? On se met à rêver. On en oublierait presque les éditos à sens unique, la mauvaise foi, le mépris affiché, l’arrogance de caste. Mais, soudain, on se souvient des propos peu amènes de Matthieu Pigasse envers Le Nouvel Obs : un journal de vieillards « somnolents, complaisants et connivents », Robert Ménard dans « Scoop ou règlement de comptes ? » « Élevé par un père éditeur et proche de l’extrême droite, il s’est rebellé contre cet héritage en militant aux jeunesses socialistes, avant d’entrer à “Libé” en pleine euphorie mitterrandienne, puis de s’affirmer au ”Nouvel Observateur”. Celui qui s’est choisi pour pseudonyme le nom d’une station de métro cultive avec soin sa réputation de bretteur, accusant Sarkozy d’imposer à la France une “monarchie élective” et traitant le chien de garde élyséen Frédéric Lefèbvre de “roquet stipendié”. Mais le barbu à la physionomie impénétrable, qui vient de publier une “Grande Histoire des codes secrets”, est aussi homme de réseaux, au point d’en animer un, le club Danton. Une plasticité utile pour discuter avec les milliardaires qui, à l’instar d’Édouard de Rothschild et de Pierre Bergé, assurent les fins de mois de son journal. Le slogan choisi pour relancer le quotidien, “L’info est un combat”, va en tout cas comme un gant à l’admirateur de la geste napoléonienne, capable de raconter Waterloo dans tous ses détails », Les Echos n° 20503, 7 septembre 2009. « On a compris, le professionnalisme de Laurent Joffrin s’adapte aux circonstances. Ancien militant des Jeunesses socialistes, il a découvert la modernité. Il n’a cessé de multiplier les allers et retours entre le quotidien fondé par Sartre et Le Nouvel Obs avant d’être placé à la tête du premier par Édouard de Rotschild, militant de gauche bien connu qui passait ses vacances avec un certain Nicolas Sarkozy il n’y pas si longtemps. Les mauvaises langues assurent que Joffrin est allé à plusieurs reprises diriger l’hebdo de Perdriel pour gagner un peu d’argent. C’est mesquin.

207 D’abord, Laurent le Magnifique ne cherche que la vérité journalistique. Ensuite, avec Rotschild, il n’aura plus de problème de fin de mois », « Laurent le magnifique », Bakchich, 26 octobre 2007. « Pourquoi Laurent Joffrin ne fait-il pas un sujet dans Libération sur ces soirées [dîners du club le Siècle], si elles sont si anodines ? N’importe quel bon journaliste s’empresserait de faire un papier », Pierre Carles « Monsieur Laurent Joffrin, En publiant dans l’édition du mercredi 23 juin 2010 de Libération un encart publicitaire d’une page, votre quotidien commet une erreur. Cette page est constituée d’une pétition qui, en des termes outrageants et violents, soutient la déprogrammation et le boycott d’une œuvre cinématographique israélienne. Cette pétition est signée par des cinéastes israéliens, très engagés politiquement pour la cause palestinienne. Nous trouvons également dans la même page, un texte du réseau de cinémas Utopia, qui, rappelons-le, n’a pas hésité à pratiquer cette déprogrammation pour des motifs discriminatoires (…) Pour quelle raison Libération se démarque- t-il de l’avis unanime des uns et des autres, en publiant cette publicité, alors que, tout le monde considère que le comble du crétinimisme est de censurer un cinéma israélien qui s’est imposé depuis quelques années comme… l’une des forces de l’opposition en Israël ? Or, la publication de cette publicité relève de la faute. Faut-il rappeler à Libération que le boycott qui est encouragé par Utopia et consœurs est une discrimination visée aux articles 225-1 et 225-2 du code pénal ? », Lettre de à Laurent Joffrin, Président du directoire de Libération « Avec cette idée, enfin, de front républicain à l’envers, avec cette façon étrange qu’ont des éditorialistes d’habitude mieux inspirés – je pense à mon ami Laurent Joffrin – de céder à leur chantage en proposant que les autres partis parrainent, promeuvent, on dira bientôt sponsorisent, l’entrée en lice de la candidate FN, on fait un pas de plus sur la voie d’une banalisation qui est le vrai but de ces gens depuis trente ans », Bernard-Henri Lévy « Ne pas être dupe du bluff des “500 signatures”» « Dans son éditorial de la semaine, Laurent Joffrin, directeur du Nouvel Observateur et renomméditocrate barbichu, écrit que l’intervention occidentale en Syrie doit être «une évidence». Car, explique-t-il, très sûr de lui: “L’Irak mis à part, aucun pays n’a fait usage de l’arme chimique au combat depuis près d’un siècle.” Traduction: depuis que ces foutus Chleuhs ont balancé des obus au chlore sur nos tranchées circa 1915, plus personne, fors Saddam H., ne s’était abaissé à ce terrifiant niveau de barbarie. C’est totalement faux: dans la vraie vie, comme on sait, les États-Unis ont par exemple fait, il y a moins d’un demi-siècle, un usage immodéré de cette arme. L’Oncle Sam, dans sa grande bonté, a déversé sur l’indigénat vietnamien des dizaines de milliers de mètres cubes de défoliants – confectionnés par Monsanto. Et quarante ans plus tard: ces atrocités continuent de faire des victimes. […] Laurent Joffrin a décidément des trous dans la mémoire. […] nombre de ses éditoriaux des cinq dernières années, où il manque des fois de mots assez durs pour fustiger la sauvagerie du libéralisme, montrent par exemple qu’il n’a gardé aucun souvenir précis des deux longues décennies durant lesquelles il a été, au sein de l’éditocratie, entre 1984 et 2005, l’un des plus zélés propagandistes des marchés. […] Laurent Joffrin se rappelle fort bien, au contraire, qu’il n’a pas du tout exigé en 2009, après la révélation que l’armée israélienne avait balancé du phosphore blanc sur les Gazaouites, exigé que ce «crime» soit promptement châtié dans une «inévitable intervention» (et qu’il n’a bien sûr jamais proclamé qu’il fallait d’«évidence» donner un sévère «avertissement» aux «barbares» de Washington)… …Et qu’il sait que ses appels à une guerre syrienne, mesurées sous l’aune de ses retenues passées, pourraient presque apparaître comme l’esquisse d’un commencement de tartuferie. » Sébastien Fontenelle, Bakchich, 29 Août 2013

208 Résumons : Flirt discret avec les trotskystes (hypothèse qui sera forcément contestée), IEP Paris, proximité avec les milieux d'affaires, voire leurs représentants politiques officiels tel M. Sarkozy, connivence généralisée via Le Siècle et des réseaux matérialisés par exemple par le Think tank « Entre temps réel », prises de position parfaitement conformes à la doxa de l'heure dont il est un des piliers, lire son entretien avec Emmanuel Todd dans Libération à propos du livre de ce dernier , « Qui est Charlie ? », soutien inconditionnel à Israël, ce qui va souvent avec l'atlantisme, aquaboniste européiste sans hésitation, les choses allant de mieux en mieux de par le monde, et, Young leader, voilà M. Joffrin tel qu'il apparaît, à savoir toujours en phase avec l'air du temps, au moins celui qui est décrypté et soufflé à Paris et à Washington. Ses talents étant devenus indispensables à l'Obs et à Libération, il aurait quitté le premier du fait de la main mise de MM. Pigasse, Niel et Berger sur le titre sans sourciller en atterrissant dans le nouveau domaine de M. Rotschild (auquel a succédé M. Drahi), voilà qui est suffisamment calamiteux pour que « le vulgaire » s'interroge. En vérité, nous avons sous les yeux le récit de la vie de Cours telle qu'elle peut s'épanouir à l'ombre des oligarchies toutes puissantes, dont M. Joffrin est. Journalisme ? Déontologie ? Quésaco ? Appartenance, consubstantialité, oui. Carriérisme obstiné, sans doute. Plus une subtilité redoutable. )

-Denis Olivennes, l’homme des réseaux Denis Olivennes est né le 18 octobre 1960 à Paris. Il est le fils d’Armand Olivennes, poète et psychiatre, et d’une mère psychanalyste ; le frère cadet de François Olivennes, gynécologue obstétricien jouissant d’une certaine réputation. (...) Denis Olivennes a effectué sa scolarité au lycée Henri IV avant d’intégrer l’École Normale Supérieure (ENS) de Saint-Cloud en 1980, de passer une agrégation de lettres modernes et une autre de science économique et sociale, puis d’intégrer l’IEP et enfin l’ENA, d’où il sort « dans la botte ». Il intègre ensuite la Cour des comptes (promotion Montaigne, 1988, d’où est également sorti Nicolas Baverez, avec qui il écrira un livre six ans plus tard). Parcours professionnel Denis Olivennes commence sa carrière en tant qu’auditeur à la Cour des comptes. Doté d’une sensibilité de gauche, ce haut fonctionnaire est d’emblée très proche du pouvoir socialiste. Il écrit des discours pour Laurent Fabius dès la fin des années 1980 et devient, en 1992, le conseiller de Pierre Bérégovoy, ministre des Finances puis Premier ministre, tout en restant « fabiusien de cœur » (Rue89.com, 30 novembre 2010). En 1993, il rejoint le groupe Air France dont il deviendra directeur général adjoint. Cinq ans plus tard, il quitte la compagnie aérienne pour NC Numéricable, principal câblo-opérateur de télévision et fournisseur d’accès à Internet par câble dont il devient président-directeur général (1997-2000). Après un passage à Canal++ (2000-2002) où il occupe le poste de directeur général, il rejoint le groupe « Pinault Printemps Redoute » (PPR) en 2002 et devient le directeur général de la distribution du groupe. En 2003, il est nommé président-directeur général de la FNAC qui appartient à PPR. En mars 2008, il quitte la FNAC pour rejoindre Le Nouvel Observateur où il se retrouve directeur- général délégué et directeur de la publication. En novembre 2008, sans prévenir la rédaction, il réalise une interview du chef de l’État Nicolas Sarkozy. La Société des rédacteurs du Nouvel Observateur publie alors un communiqué dans lequel elle « s’élève vigoureusement contre les conditions dans lesquelles a été réalisée l’interview de Nicolas Sarkozy », un entretien réalisé «

209 sans consultation des rédacteurs en chef et des journalistes dont la compétence aurait pourtant été bien utile ». « Cet épisode a confirmé l’existence d’un fossé qui se creuse entre la rédaction et le président du directoire », concluent les rédacteurs du communiqué. En janvier 2011, Denis Olivennes quitte Le Nouvel Observateur et devient, à la place d’Alexandre Bompard (qui s’en va diriger… la FNAC), directeur du « pôle Information » du groupe Lagardère, et directeur de la radio Europe 1. Il est également « responsable opérationnel », c’est-à-dire patron de fait, de Paris Match, du Journal du Dimanche et de Newsweb, le pôle Internet du groupe Lagardère. Il a obtenu de dépendre directement d’Arnaud Lagardère, et non du numéro 2 du groupe, Didier Quillot, si bien que la presse le qualifie de « numéro 2 bis ». Certains « amis » révèlent par la bande ses éventuelles ambitions : « Avec cette nomination, le groupe Lagardère semble se préparer de plus en plus à une éventuelle victoire de DSK en 2012 (…) Est-ce Ramzy Khiroun, proche conseiller du directeur du FMI et homme de confiance d’Arnaud Lagardère, qui prépare le terrain ? » (Rue89.com, 30 novembre 2010) En novembre 2011, il est nommé président du directoire de « Lagardère Active » où il succède à Didier Quillot, qu’il évince. Il a pour mission de consolider les éditions numériques des titres de Lagardère, notamment Le Journal du Dimanche, Paris Match, Psychologies, Télé 7 jours, Elle, Public. En tant que président du directoire, il devient membre de fait du Comité Lagardère Media et de Lagardère SCA, la holding du groupe. Denis Olivennes a été promu officier de la Légion d’honneur en juillet 2008, sur le contingent de François Fillon, premier ministre.

Parcours militant « À 15 ans, il était proche de la LCR, dans ce qu’on appelle les comités rouges. Il adorait se bagarrer contre les types de l’extrême droite » (Henri Weber). À la fin des années 80, il devient une des plumes de Laurent Fabius dont il restera proche jusqu’au référendum sur la constitution européenne de 2005. Fabius étant pour le non et Olivennes pour le oui, les deux hommes s’éloignent.

(...)

Collaborations Le 23 novembre 2007, Denis Olivennes, alors président-directeur général de la FNAC, rend à Christine Albanel, ministre de la Culture, un rapport intitulé « Le développement et la protection des œuvres culturelles sur les nouveaux réseaux ». Appelé couramment « rapport Olivennes », il est à l’origine de la loi Hadopi, votée deux ans plus tard et visant à mettre un terme aux partages de fichiers ne respectant pas les droits d’auteur. L’association de consommateurs UFC-Que-Choisir a dénoncé la « surenchère répressive » du rapport.

Ce qu’il gagne Lorsqu’il quitte Canal+ en 2002, deux ans et demi après y être entré, Denis Olivennes obtient une indemnité de départ 3,2 millions d’euros (indemnité qui sera ultérieurement contestée par la chaîne). Interrogé sur France 2, en janvier 2009, il déclare que cette somme correspond à deux ans et demi de salaire. Son salaire annuel était donc de 1 300 000 euros. Soit la bagatelle de… 108 333 euros par mois.

210 Quelques mois plus tard, il rejoint le groupe PPR et gagne 940 000 euros en 2003, 1 110 000 euros en 2004, 1 290 000 euros en 2005, « sans compter une participation au régime supplémentaire de retraite, plus des stock-options, plus l’octroi d’actions gratuites » (Benjamin Dormann, op. cit. p.95). « Au moment de son départ pour Le Nouvel Observateur, ses revenus annuels, tout confondu, excèdent 1 500 000 euros » (ibid.). À peine arrivé au Nouvel Observateur, il annonce qu’il divise son nouveau salaire « par cinq ou six », par rapport à l’ancien (de 1 500 000 à 200 000 euros annuels). Mais ce qu’il ne dit pas, c’est qu’il devient également, en même temps que directeur de l’hebdomadaire, président du directoire de la société industrielle SFA appartenant à Claude Perdriel, si bien qu’il bénéficie d’un second revenu, d’environ 100 000 euros annuels. À sa nomination à la direction du Nouvel Observateur, il acquiert en outre 5% du capital de la société SFA « grâce à un crédit vendeur consenti à un taux d’intérêt inférieur à la fois au taux d’inflation et au taux d’intérêt légal de l’année » (Benjamin Dormann, op. cit. p. 102) plus la jouissance de 4% des parts de Perdriel qui n’en garde que la nue- propriété. Benjamin Dormann a ainsi calculé qu’en 2008, son revenu était de 300 000 euros (salaire de patron du Nouvel Obs + salaire de patron de SFA) + 650 000 euros de dividendes des 5% d’actions SFA + 520 000 euros d’usufruit des 4% de parts SFA = 1 470 000 euros par an… Denis Olivennes affirmait, quant à lui, qu’il ne touchait « que » 200 000 euros annuels.

Il l’a dit « Internet : allez regarder les commentaires quand c’est pas contrôlé, quand c’est pas géré, quand la parole est libre, j’ai dit un jour […] c’est le tout-à-l’égout de la démocratie […] », Intervention à l’université d’été du Medef, 4 septembre 2009 (cité par Benjamin Dormann, op.cit. p.48). « Les cinq ans qui viennent de s’écouler ont donc été ceux de la reconfiguration du groupe. J’ai désormais en charge un groupe média qui dispose de titres puissants sur des segments forts : le féminin, le parental, les news. Maintenant, cap sur l’innovation au service de la croissance », 7 novembre 2011, à l’occasion de sa nomination comme président du directoire de Lagardère Active. « Contrairement à tout ce que l’on a entendu […] et même si cette thèse est populaire dans le désarroi général de la gauche, je ne crois pas qu’il faille vouer aux gémonies le supposé capitalisme financier… Ce qu’il faut combattre avec la dernière force, c’est la déviation du capitalisme de rentiers, d’héritiers et de privilèges », Nouvel Observateur, n° 2338, 27/08/2009 (cité par Dormann, op.cit. p. 143-144).

Ils ont dit sur lui « [Denis Olivennes est] un renégat très content de lui, ancien trotskyste devenu patron », Michel Onfray, août 2005 (cité par Dormann, op. cit. p.199) « Cet énarque normalien mondain passe d’un poste à l’autre, comme une grenouille change de nénuphar », Le Canard enchaîné à l’occasion de sa nomination à la tête de la direction opérationnelle du nouveau pôle d’information de Lagardère Active, 8 décembre 2010 (cité par Dormann, op. cit. p.57). « Au cours de l’année 2000, alors que la situation financière de Canal++ est totalement dégradée, messieurs Pierre Lescure, président, Denis Olivennes, directeur général et Philippe Duranton, directeur des ressources humaines, ont fait signer à 15 cadres dirigeants de cette société des avenants à leur contrat de travail pour leur faire bénéficier de « golden parachutes » totalement exorbitants et dérogatoires du droit commun (3 ans de salaire net de toutes charges sociales et fiscales, hors de toute conditions d’ancienneté et quelle que soit la cause de la rupture du contrat

211 de travail), sans équivalents, à notre connaissance, dans une société de droit français », Conclusion de l’enquête des juges Henri Pons et René Cros du pôle financier (cité par Dormann, op.cit. p. 179)

Sa nébuleuse Denis Olivennes est membre du Siècle, un club permettant de créer « un pont entre des mondes qui s’ignorent trop en France » selon les statuts, mais qui, officieusement, permet « de gagner en puissance au sein de la société, d’être branché sur les réseaux d’influence, d’avoir reçu une bonne éducation mondaine, et bien entendu d’avoir envie de se retrouver entre élites et « gens de qualité. On ne peut pas vraiment y être admis si l’on n’ a pas compris le jeu des relations sociales et le rôle majeur du carnet d’adresses », La République des Lettres, « Select Club : Le Siècle, club de rencontres des élites françaises », 22 janvier 2008 (cité par Dormann, p. 226). Il a participé à la réunion « Bilderberg » 2009 (lire plus haut). Le groupe de Bilderberg, fondé en 1954 par le banquier américain David Rockfeller et par Josef Luns, ancien secrétaire général de l’Otan à l’hôtel Bilderberg d’Osterbeek aux Pays-Bas, est considéré comme le réseau d’influence internationale le plus puissant du monde. Ce groupe composé de « 120 milliardaires, banquiers, hommes politiques, industriels, universitaires, hauts fonctionnaires, personnalités d’influence dans le monde du travail et de l’éducation et journalistes, se réunit pendant un week-end dans un hôtel ou un centre de villégiature quelque part en Amérique du Nord ou en Europe, afin de discuter en privé des affaires du monde », Rue89.com, « Bilderberg : silence médias sur les réunions de l’élite mondiale », 11 juin 2008. Il appartient à la FAF (Franco-American Foundation), l’un des plus puissants réseaux de lobbystes franco-américain, dont l’objet est de « contribuer de manière désintéressée au développement des échanges de toute nature entre les États-Unis et la France et de permettre, par là une meilleure connaissance réciproque des deux sociétés, ceci en collaboration avec la French-American Foundation, créée à New-York le 1er août 1975 », (article 2 des statuts de la FAF). La FAF est à l’origine du « Young Leaders program », crée en 1981, dont l’objectif est « de créer et d’entretenir un réseau informel d’hommes et de femmes appelés à occuper des postes clés dans l’un ou l’autre pays », présentation de son programme « leadership » par la French-American Foundation-France (cité par Dormann, op.cit. p.230).(lire plus haut) Pendant la campagne de 2007, il rejoint les « Gracques », « un groupe de réflexion et de pression » de hauts fonctionnaires socialistes appelant à une alliance du PS avec le centre et souhaitant une rénovation de la gauche française autour des valeurs sociales libérales.(Note de l'auteur : lesquels Gracques se sont signalés en ce mois de juin 2015 par un papier virulent et sot contre la Grèce et son gouvernement actuel) Alain Minc a soutenu Claude Perdriel, patron du Nouvel Observateur, et Denis Olivennes, son directeur de la publication, dans leur tentative de rachat du groupe Le Monde en 2010, face à Pierre Bergé, Matthieu Pigasse et Xavier Niel, qui ont finalement remporté la mise. Peu de temps après l’arrivée de Denis Olivennes à la tête du pôle information Lagardère, en janvier 2011, Édouard Minc, le fils d’Alain Minc, est promu éditeur de Paris-Match. Il est aujourd’hui un proche d’Arnaud Lagardère et le numéro 2 de son groupe. (...) Résumons : Franco american foundation, Le Siècle ; Bilderberg, M. Minc, l'IEP Paris, Lagardère, un passé trotskyste si tendance par les temps qui courent, voilà l'illustration de ce que deviennent nos « élites », qui, forts de leur excellence républicaine, s'empressent de faire

212 de l'eau égalitaire de l'élitisme républicain du vin grand cru de l'arrivisme social et financier, avec brio faut-il remarquer. Quelle habileté à capter les flux financiers en tenant les beaux discours de la morale, du savoir, de la raison ! Et en homme « de gauche » en plus ! Un vrai génie. Ces brillants représentants de l'excellence française ont le droit (hélas) de quêter sans relâche les bonnes places et les excellents émoluments. Mais ils ont une bien grande et regrettable influence sur nos médias, prêchant quand ils le peuvent l'effort et le TINA alors qu' ils accèdent à des revenus somptueux hors de toute raison économique. Qui se souvient des interventions « raisonnables » de M. Olivennes, notamment à l' « Esprit Public » sur France Culture (producteur Philippe Meyer) peut à bon droit juger cette émission phare du politiquement correct comme une aimable pantomime. Nous reviendrons sur cette thématique en conclusion.

-Ruth Elkrief des idées bien tranchées (source OJIM, extraits) Ruth Elkrief est née le 1er décembre 1960 à Meknès (Maroc). Elle est la fille de Marie-Louise (née Rouach) et de Joseph Elkrief. Elle a un frère (Guy) et une sœur (Danielle). Elle est mariée à Claude Czechovski, responsable du conseil et de l’intégration des systèmes pour la région EMEA (Europe, Moyen-Orient et Afrique du Sud) et dirigeant des activités internationales de l’entreprise américaine Computer Sciences Corporation, un des leaders mondiaux des services informatiques. Ruth Elkrief met volontiers ses tribunes au service des causes qui lui sont chères, parfois au détriment de la neutralité journalistique. Elle a visiblement soutenu Nicolas Sarkozy durant la campagne présidentielle. Partisane d’une droite libérale libertaire et modérée, elle a toujours affiché une détestation du Front national. Elle défend vigoureusement les droits de l’homme en France, et ceux du sionisme en Israël. Ruth Elkrief est diplômée de l’Institut d’études politiques de Paris (1981) et du Centre de formation des journalistes (1984). A la rentrée universitaire 2004, elle a enseigné le journalisme à l’IEP de Paris. Elle est polyglotte, parle l’anglais, l’espagnol, l’hébreu et comprend l’arabe.

Parcours professionnel Ruth Elkrief débute sa carrière à Radio Chalom avant de devenir rédactrice à l’agence Associated Press, puis au service politique du Matin de Paris. Repérée par la directrice de l’information de TF1, Michèle Cotta, elle est embauchée sur la première chaîne en 1987 et devient trois ans plus tard correspondante à Washington au moment de la première guerre du golfe, avant d’être nommée chef du service politique. En 1991-1992, elle présente le journal de 23 heures le week-end. En 1994, elle participe à la création de la première chaîne d’information en continu LCI (filiale de TF1), où elle présente « Le grand Journal », aux côtés de David Pujadas, et conduit l’interview quotidienne. De 1997 à 1999, elle présente quotidiennement « Le RV de Ruth Elkrief » sur LCI, ainsi que l’émission hebdomadaire « 19 heures, dimanche » sur TF1.

213 En 2001, elle rejoint RTL pour réaliser l’interview politique du matin (du lundi au vendredi à 7h50). De 2003 à 2005, elle présente avec Pierre-Luc Séguillon « Le Grand Jury RTL-Le Monde- LCI ». En novembre 2005, Ruth Elkrief participe au lancement de la chaîne d’information en continu BFM-TV. Elle présente le tout premier journal le 28 novembre 2005 à 18h en interviewant en direct Dominique Baudis, président du CSA. Elle présente ensuite du lundi au vendredi à 18h et à 19h deux journaux de 30 minutes chacun. (...) De novembre 2006 jusqu’à fin 2007, elle présente chaque jeudi, avec Hedwige Chevrillon, de BFM, « Le Duo BFM », première émission commune d’informations économique diffusée sur BFM et BFM-TV (qui appartiennent toutes les deux au groupe NextRadioTV), dans laquelle les deux journalistes interviewent une personnalité politique. A partir de janvier 2007, elle occupe la case du 19h – 20h du lundi au vendredi (Nathalie Lévy reprenant le 18h – 19h) en animant un magazine sur l’élection présidentielle française de 2007, « Élysée 2007 » où elle arbitre notamment un débat entre deux acteurs politiques. En juin 2007, cette case horaire devient un grand journal télévisé sobrement intitulé « 19h Ruth Elkrief ». De janvier 2008 à juin 2008, elle co-présente, avec Hedwige Chevrillon et Olivier Mazerolle, « La Tribune BFM » le dimanche de 18h à 19h. (...) Depuis septembre 2010, elle anime à nouveau le « 19h Ruth Elkrief », pour une émission de débat avec un ou plusieurs invités.

Parcours militant Le 27 septembre 2010, le président de l’autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, rencontre « un groupe de personnalités juives » dont Ruth Elkrief. « Cette initiative vient d’Ofer Bronstein un militant de Shalom Akhshav résidant à, Paris et président du forum pour la paix. Parmi les personnes connues, il y avait l’ancien grand rabbin de France, le rabbin René Sirat, les journalistes Jean-Pierre Elkabbach et Ruth Elkrief, la présidente de l’Union des étudiants juifs de France Arielle Schwab, l’ancienne secrétaire d’État de Chirac Nicole Guedj, Valérie Hoffenberg, Simone Rodin déléguée de l’American Jewish Commitee à Paris, le président du Mémorial de la Shoah Éric de Rothschild, le professeur de l’École Polytechnique Alain Finkielkraut et d’autres. » (sources : www.fmradiosjuives.com ; www.lepoint.fr) En décembre 2003, Ruth Elkrief animait avec Rachid Arhab un meeting organisé par le collectif Deux peuples, Deux États pour soutenir le pacte de Genève (Israël/Autorité palestinienne). Le collectif était composé de : Les Amis de Shalom Arshav (La Paix Maintenant) – Groupe de contact européen des accords de Genève – l’hebdomadaire Marianne – Association pour un judaïsme humaniste et laïque (AJHL) SOS Racisme – Ni putes, ni soumises – Radio Shalom – Le Mouvement de la paix – Le Conseil français des musulmans laics – L’Union des familles laïques – Le mouvement des musulmans laïcs – Institut Pierre-Mendes-France – Cercle Bernard Lazare – Hachomer Hatzair – Animafac.

214 (...)

Collaborations Septembre 2013 : Invitée chez l’écrivain Marek Halter pour célébrer le Nouvel An juif (Roch Hachana) avec notamment le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, deux ministres du gouvernement : Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des Affaires étrangères, chargée de la Francophonie et Michèle Delaunay, ministre déléguée auprès du ministre des Affaires sociales et de la Santé, chargée des personnes âgées et de l’Autonomie. « Le monde politique, de droite comme de gauche était bien représenté avec Harlem Désir, Premier secrétaire du Parti Socialiste, David Assouline, Anne Hidalgo, Pierre Aidenbaum, Bernard Kouchner, Valérie Pécresse, Frédéric Lefèbvre, Nicole Guedj ou encore Jean-Jacques Curiel du Parti radical. Parmi les nombreux représentants du monde de la presse : Ruth Elkrief, Christine Ockrent, Étienne Mougeotte Alain Chouffan du Nouvel Observateur et Judith Waintraub, du Figaro. On notait également la présence de Samuel Pisar et de son épouse, de Gérard et Claude Unger, de Caroline Fourest, de Gérard Miller, de François Weil, recteur de l’Académie de Paris, des professeurs Dominique Reynié et Philippe Théry, du producteur Tarek Ben Ammar, de Duc Co Minh, président du Club d’Initiative des Français d’Origine Asiatique, de Claude Barouch de l’UPJF et de son épouse, d’Henri Cukierman et de son épouse, de Macha Méril et de Chantal Thomass. Très entouré, l’imam de Drancy, Hassen Chalgoumi, récemment victime d’une agression en Tunisie, se déplaçait difficilement avec des béquilles. À ses côtés, très protecteur, le père Alain Maillard de la Morandais. Plusieurs responsables du CRIF étaient présents : Jean-Pierre Allali et Arié Bensemhoun, membres du Bureau Exécutif, Paul Rechter, conseiller du président , et Patrick Klugman, membre du Comité directeur. » (source : crif.org) (...) En octobre 2011, elle participe à un débat avec Dov Alfon, directeur de la rédaction du journal Haaretz Israël, sur le thème : « Médias traditionnels et révoltes populaires ? » lors du Forum de Lyon organisé par le journal Libération. (...) Par décret du 11 juillet 2008 (Journal officiel du 13 juillet 2008), elle a été nommée chevalier dans l’Ordre national de la Légion d’honneur par Christine Albanel, alors ministre de la Culture. (...)

Ce qu’elle gagne Le site de l’Observatoire des médias, Acrimed, citant un article de Capital d’octobre 2001 sur les « ménages » (définition : « prestations des journalistes qui mettent leur notoriété au service de l’animation de débats en tous genres ») des journalistes : « Ruth Elkrief, bien qu’elle néglige, paraît-il, les réunions préparatoires, vaudrait 75 000 F » (soit 11 433 euros). Dans le livre Le tien du mien. Regards sur les conflits d’intérêts dans l’information, l’auteur Bertrand Verfaillie cite le chiffre de 15 000 euros pour un ménage. Selon lui, « les ménages et autres brocantes s’exercent au grand jour, en public. Mais l’argent que rapporte aux journalistes ces animations de colloques ou séminaires est rarement sur la table. Un animateur-chroniqueur d’Europe 1 avait frappé fort, en 2006, en lâchant des chiffres à l’antenne ».

215 Elle l’a dit « Ce qui m’inquiète plus, c’est la période d’égalité totale du temps de parole durant les cinq dernières semaines de la campagne. Est-ce qu’on va pouvoir faire du journalisme avec cette égalité stricte ? Je comprends le principe dicté par le CSA, mais je pense que sur cinq semaines, c’est trop long et que ce n’est pas si équitable, si justifié que cela. » Le Figaro – 24 janvier 2012 « Une règle : ni Marine Le Pen, ni Tariq Ramadan » Ruth Elkrief, BFMTV – 25 mars 2011 « Marine Le Pen continue de monter, attention ». Ruth Elkrief, BFMTV – 10 décembre 2010 « Nous avons tous envie de croire que ces révolutions, pour qu’elles restent uniques, parviendront à éviter l’écueil des précédents mouvements de libération nationalistes arabes : l’antisémitisme » Ruth Elkrief, BFMTV – 1er février 2011 « Merci aussi aux familles françaises d’origine immigrée (…) Malgré tous les discours discriminants, elles permettent à la France de voir l’avenir en rose. » BFMTV – 18 janvier 2011

Sa nébuleuse Son époux, Claude Czechovski, responsable du conseil et de l’intégration des systèmes pour la région EMEA (Europe, Moyen-Orient et Afrique du Sud) et dirigeant des activités internationales de l’entreprise américaine Computer Sciences Corporation, un des leaders mondiaux des services informatiques. Très liée à la CIA (services secrets américains), la société Computer Sciences Corporation est accusée « d’avoir aidé à organiser des vols secrets du gouvernement américain de personnes suspectes de terrorisme » vers des bases secrètes américaines situées principalement en Europe (sources : www.guardian.co.uk 1 ; www.guardian.co.uk 2). En outre, la Computer Sciences Corporation avait racheté en 2003 (avant de la céder en 2005), l’une des plus importantes sociétés militaires privées au monde, la Dyncorop International, employant « 26 000 personnes avec un chiffre d’affaires de 2,3 milliards de dollars en 2002, dont 98 % avec le gouvernement des États- Unis ». (Wikipédia) Alain Weill (membre du Club Le Siècle), président du groupe NextRadioTV, propriétaire de RMC, BFM Business, BFMTV, du Groupe 01 (ex Groupe Tests).

Ils ont dit (...) Le patron de Mediapart, Edwy Plenel, sur sa Légion d’Honneur : « Dans l’ample promotion du récent 14 juillet, on trouve donc quelques égarés, oublieux des règles de distance et d’indépendance qui, en théorie, fondent et légitiment leur identité professionnelle. L’intellectuel supposément critique et le journaliste supposément libre ne devraient-ils pas s’entêter à refuser ces distinctions étatiques qui les annexent, les apprivoisent et les circonviennent ? (…) Quant à notre métier, chaque fournée (Légion d’honneur) égrène quelques noms symbolisant sa prise en otage. On remarque, cette fois, celui de Ruth Elkrief, nommée chevalier au titre de ses “vingt-trois ans d’activités professionnelles” ». Marine Le Pen : « Vous êtes aveuglée par votre défense de la caste et des élites et votre admiration absolue que vous avez pour Nicolas Sarkozy et vous exprimez en toutes circonstances et la malhonnêteté que vous avez à présenter mes idées […], mais ce n’est pas grave, je comprends, c’est un réflexe de caste de votre part, vous défendez en sorte la classe à laquelle vous appartenez,

216 […] cela fait une grande différence et je pense que les Français ne seront pas dupes de cette grande différence. » BFMTV – 19 février 2012 Résumons : droits de l'homme, anti racisme, Israël (ce pourrait être par exemple le pedigree de Mme Sainclair, sauf son engagement à droite), liens organiques avec les Etats Unis et leur machine hégémonique via son mari ou son déroulé de carrière, proximité avec Le Siècle, honneurs officiels en France, on a du mal à voir dans cette carrière socialement brillante des éléments d'indépendance tant les relations de Mme Elkrief avec le « système » paraissent nombreux. Ceci aurait-il un rapport avec son brillant cursus? Allons, seul son grand talent lui vaut sans doute un tel parcours.

-Léa Salamé, brillante amazone du journalisme (source OJIM. Extraits) « Je ne suis absolument pas idéologue. On est dans une société qui se radicalise un peu plus ? Je revendique le gris, la nuance, la complexité. »

Dernière modification le 13/05/2016 Journaliste franco-libanaise née en octobre 1979 à Beyrouth, Léa Salamé, de son vrai nom Hala Salamé (nom inscrit dans l’annuaire de Science Po, promotion 2002), est l’étoile montante de l’information depuis qu’elle a arbitré les débats entre Éric Zemmour et Nicolas Domenach sur i>Télé. Issue de la haute bourgeoisie affairiste libanaise, elle ne cache pas, malgré son image d’objectivité incarnée auprès des médias, une idéologie libérale-libertaire, cosmopolite et mondialiste.

Le 11 septembre 2001, elle est présente à New-York lors de l’attentat sur le World Trade Center et sera blessée par la déflagration. Forte de cette expérience, elle se spécialisera dans les questions internationales, en plus de bâtir une véritable story-telling personnel (parfois contradictoire) autour de cet événement.

Sa famille Elle est la fille du politologue franco-libanais, directeur de recherches au Centre d’Études et de recherches internationales, professeur à Sciences Po, Ghassan Salamé, et de Mary Boghossian, une Arménienne née à Alep (Syrie) issue d’une très grosse famille de diamantaires avec des ramifications à Londres, Bruxelles et Rio de Janeiro. Léa Salamé est donc la petite fille du joaillier Robert Boghossian. De religion catholique grecque (melkite), la famille Salamé a quitté le Liban pour la France en 1984 au début de la guerre civile. Arrivée à 5 ans en France, elle a été naturalisée en 1988, passant son enfance dans le XVIème arrondissement de Paris. Dans un entretien, elle indique : « Je viens du Liban, 17 communautés réunies sur un territoire de la taille de deux départements français. Les tourments identitaires, je connais. Ces thèmes me touchent. Un jour, j’écrirai un livre sur le sujet. Je suis un mille-feuille d’identités. Je suis fière de mes origines : libanaise, arménienne, française. » Un métissage ethnico-culturel qui l’a complexée lorsqu’elle a débuté à la télévision se demandant « pourquoi [elle] ne faisait pas Française comme les autres, pourquoi [elle] n’avai[t] pas les yeux bleus […] et pourquoi [elle] n’étai[t] pas plus formatée pour la télé». « Qui est Léa Salamé ? » (TV Mag, 14/05/2016)

217 Né au Liban en 1951, Ghassan Salamé est titulaire d’un doctorat en lettres, d’un doctorat en sciences politiques et d’un DEA en droit. Sympathisant des idées d’extrême gauche au début des années 70, il fuit son pays natal en 1984, au moment du retrait de la force multinationale, devant « l’insécurité de Beyrouth-Ouest ». Puis il atterrit « à Paris, avec femme et enfants, après un détour par Washington » et devient, comme l’écrit La Croix du 21 octobre 2010, le « poisson pilote des élites émergentes »… et mondialisées. Sa carrière universitaire l’a conduit de l’université Saint- Joseph de Beyrouth (1978-1985) à l’Université Paris I (1985-87), puis au CNRS (1986-2004) et à Sciences-Po, où il est professeur des universités. De 2000 à 2003, il a été ministre de la Culture du Liban et président du Comité d’organisation du Sommet arabe (mars 2002) et du Sommet de la francophonie (octobre 2002). Il a ensuite été nommé conseiller politique de la Mission de l’ONU à Bagdad (juin-octobre 2003) puis conseiller spécial du secrétaire général de l’ONU (2003-2006). Il est à présent membre du conseil d’administration de : The International Crisis Group (Bruxelles), The International Peace Institute (New York), Bibliotheca Alexandrina (Alexandrie), The Open society Institute (New York) et de plusieurs autres organisations non gouvernementales. Il préside l’Arab Fund for Arts and Culture (Amman) et le comité consultatif du Programme Alliance (qui regroupe l’université Columbia avec Sciences-Po, Polytechnique et Paris 1). Il est conseiller spécial de Kofi Annan, ancien secrétaire général des Nations unies. Depuis septembre 2010, il dirige la Paris School of International Affairs de Sciences Po, « financée par la Fondation Mac Arthur à hauteur de 80 000 dollars, où les cours sont dispensés en anglais et où la quasi-totalité des étudiants sont étrangers, car le programme ambitionne de former les élites mondialisées des pays émergents », comme le note l’archiviste Emmanuel Ratier. Il publie régulièrement dans la Revue française de science politique, Foreign Policy, The Middle East Journal et Security Dialogue. Depuis 2001, Ghassan Salamé est un des rares étrangers à être membre du club Le Siècle. Léa Salamé a une sœur, Louma, qui s’est mariée en juillet 2011 avec l’influent comte Raphaël de Montferrand (L’Orient du 18 juillet 2011), énarque du Quai d’Orsay et président de la Société des Cincinnati de France et de Platform, le regroupement des Fonds régionaux d’art contemporain (Frac). Elle est actuellement chargée de communication à l’Agence France-Muséums Louvre Abou- Dabi. Ce cadre familial au cœur de l’hyperclasse mondiale n’empêchera pas Technikart d’écrire au sujet de Léa Salamé : « Immigrée, elle garde la rage de réussir » (juillet 2014). Plus réaliste, Le Monde Magazine du 30 août 2014 dira d’elle qu’elle a grandi dans « l’intelligentsia globalisée ».

Formation universitaire Dès son plus jeune âge, elle a été inscrite dans les écoles de la capitale réservée à l’élite : Saint- Louis de Gonzague puis l’École Alsacienne. « Le jour de la rentrée, c’est le festival de Cannes, le lendemain c’est l’Assemblée générale des Nations unies », note Le Monde Magazine à propos de cette école. En 2001, elle fait un an à New York University, collège en troisième année ou Master (semestre hors les murs). Elle rejoint ensuite Paris II-Assas puis Sciences Po « où elle côtoie, dans la même promo, l’écrivain Florian Zeller et l’élu socialiste, “français de relativement fraîche date”, Eduardo Rihan-Cypel. » (« Qui es-tu, Léa Salamé ? », Lesinrocks.com, 17 septembre 2013).

Parcours professionnel C’est lors de son passage à New-York qu’elle vit les attentats du 11 septembre aux premières loges.

218 « “J’ai erré en pyjama dans la rue, jusqu’à l’effondrement d’une tour. Là, j’ai cru qu’on nous tirait dessus.” Blessée par la déflagration, elle sera évacuée par les secours », confiera-t-elle dans la presse (Télé Star, Grazia, Europe 1, Pure People…). Cependant, elle fournit une version différente à Libération : « Il faisait un temps sublime. Je découvrais la ville en folie. Je planais, le bonheur absolu. J’ai cru que c’était un accident de camion. » Quoi qu’il en soit, de cette expérience naîtra un goût pour les questions internationales. « Lorsque j’avais 20 ans, je voulais être le Thierry Ardisson de la période “Rive droite/rive gauche”. Après le 11 septembre à New York, je rêvais d’être Christiane Amanpour, journaliste et reporter vedette de CNN », explique-t-elle dans Le Monde du 18 mai 2014. Grâce à de puissants appuis familiaux, et notamment ceux de son père, elle est lancée à la télévision par Jean-Pierre Elkabbach, qui lui confie, en 2004, le flash de LCP/Public Sénat. Elle présente ensuite avec lui « Paroles du Monde », toujours sur LCP/Public Sénat. Elle intègre France 24 en 2007. Avec Antoine Cormery, elle présente « La Soirée », tranche d’information en direct de 21h à minuit ; puis de 20h à minuit à partir d’octobre 2010. Elle présente également « Une semaine aux Amériques », magazine consacré à l’actualité américaine ; puis l’émission « Paris Direct », la tranche d’information phare de la chaîne. En décembre 2010, elle fait un essai sur France 3 pour être la nouvelle présentatrice du « Soir 3 ». La chaîne souhaitait promouvoir un présentateur « plutôt de sexe féminin » et « issu de la diversité ». Contactée par un Pierre Fraidenraich admiratif, Léa Salamé rejoint finalement i>Télé. De janvier 2011 à mai 2012, elle y présente « Élysée 2012 », avec Michel Dumoret, chef du service politique. Depuis septembre 2011, elle assure la présentation du « 17-20 » avec Marc Fauvelle. Depuis septembre 2012, elle dirige « On ne va pas mentir », un débat « avec le sourire et sans langue de bois ». Dès la rentrée 2013, elle anime l’émission de débats « Ça se dispute », sur i>Télé, où elle arbitre chaque semaine les échanges entre Éric Zemmour et Nicolas Domenach. En juin 2014, Le Point révèle qu’elle prendra la place, à la rentrée de la même année, de Natacha Polony dans l’émission « On n’est pas couché », diffusé sur France 2 le samedi soir. En août 2014, elle anime l’entrevue politique de 7h50 sur France Inter au sein de la matinale de Patrick Cohen. En novembre 2015, elle interroge pour le magazine GQ le banquier Matthieu Pigasse . « Parce que Léa est virevoltante et sexy », c’est ainsi qu’aurait justifié le choix de Léa Salamé pour interviewer le président de la République, François Hollande, en avril 2016, le nouveau patron de l’info de la chaîne publique française, Michel Field. Selon la Lettre A (n°1726, du 14 avril 2016), Léa Salamé a accompagné son directeur de la rédaction de France Inter, Jean-Marc Four, afin de rencontrer en décembre 2015 l’ambassadeur du Qatar à Paris, Meshal bin Hamad al-Thani. Cette entrevue a été organisée par la société Edile Consulting, choisie par ailleurs en 2016 par l’Arabie Saoudite afin de redorer sa mauvaise image en France, et dont Sihem Souid est la directrice générale. Le but de cet entretien est d’infléchir la mauvaise image du Qatar dans les médias, notamment sur des liens supposés entre cet émirat et le financement de l’État Islamique (Daech).

219 Prix et récompenses « Femme de l’année 2014 » par le magazine GQ.

Convictions politiques Les opinions politiques de Léa Salamé sont un secret de polichinelle, tant elles transparaissent dans ses prises de positions. Lorsqu’on l’interroge sur ce sujet, elle souhaite apparaître comme neutre : « je ne suis ni à droite, ni à gauche : je suis journaliste.» Pourtant, selon sa meilleure amie, Lisa Friedlander : « Moi, mon cœur penchait à gauche. Celui de Léa n’était pas de droite, non plus. Mais elle n’aime pas qu’on en parle. » (voir § Ils ont dit). Sans même s’apercevoir de son parti- pris idéologique libéral-libertaire, elle indique dans un entretien que « l’enjeu du XXIe siècle sera de trouver une nouvelle manière de vivre ensemble. On ne peut pas revenir en arrière comme le prônent les “déclinistes”. La France n’est pas une île. Nous vivons dans un univers mondialisé. Je regrette qu’il ne soit pas davantage régulé, mais nous n’allons pas fermer les frontières. » Et lors de son interview de Natacha Polony, plutôt classé à Droite, Léa Salamé a montré sa véritable idéologie : « au patriotisme souverainiste et donc exclusif » l’ancienne chroniqueuse de « On n’est pas couché », Léa Salamé « oppose un patriotisme cosmopolite. » Avant d’ajouter « le problème de l’intégration, c’est après, c’est au moment de chercher un travail ou un logement. (…) Il y a quatre fois plus de difficultés pour un Mohammed que pour un Charles ou David de trouver du travail. » Ne parler donc pas de souverainisme, de frontières ou de Nation, car si cette « idée de nation allait parfaitement au XIXème siècle», le XXIème siècle doit voir l’avènement des sociétés ouvertes et mondialisées. Des thèses que partage son compagnon Raphaël Glucksmann (voir portrait) et très proche des écrits du philosophe allemand du XIXème siècle, Johann Gottfried Herder.

Elle l’a dit « Je lui dois beaucoup » (à propos de Jean-Pierre Elkabbach), Les Inrockuptibles, 26 juin 2014 « J’ai des convictions mais, contrairement à Zemmour et à Polony, je ne suis pas une idéologue. Je suis pragmatique et je veille à ma neutralité politique. Ça ne m’empêche pas de penser que la France traverse une crise identitaire très forte et que les réponses qu’apportent Zemmour et Polony ne sont pas les bonnes, que ce pays est très dur à réformer, même si je suis très heureuse en France et très pro-européenne. » Ciné TéléObs, 27 septembre 2014 « Les gens sont pas des cons. Faut pas avoir peur d’être sérieux et de l’assumer. » TéléSphère TV – 12 novembre 2011 « J’ai fait péter le décolleté » (en off), i>Télé, août 2013 « Marine Le Pen se réfère souvent à des experts, à des spécialistes qu’on ne connaît pas mais qui défendent une France fermée, une France nostalgique, où l’on paierait sa baguette en francs. Elle a réponse à tout, elle rabroue souvent les journalistes, toujours ses opposants, cette femme est un bulldozer qui fait trembler la classe politique. » i>Télé, « Élysées 2012 » – 4 avril 2012 « La campagne présidentielle a bel et bien commencé en France et Claude Guéant en rajoute une petite couche sur les musulmans. » i>Télé, « Élysées 2012 » – 4 avril 2012 « Vous voulez tellement, vous, le juif, vous faire plus goy que le goy, c’est-à-dire plus français que français » On n’est pas couché, France 2, 4 octobre 2014 « L’émission est un vrai débat d’idées, ce n’est pas du buzz ! Zemmour et Domenach ne sont pas des imposteurs de la télé : l’un est un vrai idéologue, l’autre un humaniste militant. On y entend

220 deux voix de la France d’aujourd’hui. » Le Monde, 16 mai 2014 « Lorsque j’avais 20 ans, je voulais être le Thierry Ardisson de la période “Rive droite/rive gauche”. Après le 11-septembre à New York, je rêvais d’être Christiane Amanpour, journaliste et reporter vedette de CNN. » Le Monde, 16 mai 2014 « Le 11 septembre 2001, à quelques rues des deux tours, une gamine de 21 ans est réveillée en sursaut par un bruit violent. La veille, Léa Salamé a fait la fête. Etudiante à Sciences-Po, elle vient d’arriver pour un stage de six mois, et profite : “Il faisait un temps sublime. Je découvrais la ville en folie. Je planais, le bonheur absolu. J’ai cru que c’était un accident de camion.” Elle enfile une jupe, des tongs, un tee-shirt “et pas de soutif”, pour aller chercher en bas de l’immeuble son pain aux raisins, quand une Noire frappe à la porte : “Go down ! Go down !” Elle prend un dollar et ses clefs, achète son pain aux raisins puis «regarde la tour cramer, sans comprendre». Sans portable, elle fait la queue devant une cabine pour appeler : “Et là, un énorme tsunami de poussière nous est tombé dessus. J’ai couru vers le Nord en pensant qu’on nous tirait dessus. Je voyais des oiseaux tomber : c’étaient des hommes, mais je ne le comprenais pas”. » « Léa Salamé, timbale libanaise », liberation.fr, 14 décembre 2014 « Le jour de l’élection d’Obama, j’étais là-bas pour France 24 et c’est moi qui ai dit en direct : “Le premier président noir américain est élu.”» Idem « C’était mon obsession en négociant avec Ruquier. Je leur ai dit : “Je ne veux pas me situer politiquement, je ne jouerai pas la fille de droite.” Journaliste, je suis neutre. Je ne suis absolument pas idéologue. On est dans une société qui se radicalise un peu plus ? Je revendique le gris, la nuance, la complexité. » Idem « Quand on me voit à l’écran, on sent bien que je n’ai pas un père issu de la Creuse et une mère vendéenne. C’est la première fois que je clarifie ça, il n’y a aucune honte. Mais le plus important est surtout de dire que j’ai grandi ici, en France et que ma vie est à Paris. » « Qui es-tu, Léa Salamé ? » Lesinrocks.com, 17 septembre 2013 « J’ai été invitée à deux reprises à l’Élysée, à déjeuner avec François Hollande. C’est une personne humainement très sympathique. On peut lui reprocher plusieurs choses sur le plan politique stricto sensu, mais ni sa répartie, ni son capital sympathie. Je me suis retrouvée à sa table, à l’écouter me confier qu’il m’écoute chaque matin sur France Inter, explique-t-elle. Je peux légitimement en douter mais quand il fait référence à trois de mes récentes interviews, ça montre sa maîtrise. François Hollande peut se montrer plutôt charmant et c’est bien le vrai danger de ce genre de rencontres », « Léa Salamé : “Je dois ma carrière à la télévision à Michel Charasse. », Charles, n°15 « Pour Florian Philippot, qui m’a donné l’exclu sur France Inter au sujet de la révélation de son homosexualité par Closer, c’est différent. Il faut remonter à 2013, je présentais un débat d’actualité “On ne va pas se mentir” sur i-Télé. À l’époque, Philippot m’appelait régulièrement pour y participer, pour me dire qu’il était “scandaleux qu’un parti représentant 25 % des Français n’ait pas la parole.” J’étais de son avis mais la politique de la chaîne à l’époque était de ne pas inviter le FN. Je me suis battue avec ma direction pour infléchir cette position », Idem. « Notre échange était serré. Mais outre la tension, c’est peut-être la première fois où je me suis sentie seule sur le plateau. Je le dis d’autant plus que j’estime Aymeric Caron pour son professionnalisme. Il fait le job, il mord au mollet et ne lâche jamais. Je me rappelle sa passe d’armes avec Najat Vallaud-Belkacem au sujet de l’éducation. Mais face à Taubira, je trouve qu’il a troqué sa casquette de journaliste pour celle de militant. Je pense qu’il ne s’en est pas rendu compte, tout comme Laurent Ruquier. J’ai au final eu le sentiment de me trouver ce soir-là sur un plateau Taubira-compatible », Idem.

221 « Quand j’ai annoncé à mon père que je voulais faire du journalisme télé, il a levé les yeux au ciel. Il me rêvait diplomate, avocate, à la rigueur journaliste, mais alors de presse écrite, au New Yorker ou au Monde. Quand je lui ai dit plus tard que j’avais signé pour rejoindre Laurent Ruquier dans On n’est pas couché, je crois l’avoir achevé. » « Léa Salamé : la belle ambitieuse que l’on s’arrache » (Télé 2 semaines, n°321 du 16 au 29 avril 2016) « Cette situation [concentration des médias] me conforte dans l’une de mes convictions : le service public est aujourd’hui le seul lieu d’indépendance absolue. Je travaille à la fois sur France 2 et sur France Inter, et je peux le vérifier tous les jours. Que ce soit chez Ruquier ou sur Inter, des lieux pourtant hautement exposés, je n’ai jamais reçu une injonction ni une remarque ni un texto de l’un de mes patrons. » « Léa Salamé : « Ma génération a dit : « la connivence, ça suffit ! » teleobs.nouvelobs.com, 26/12/2015

Ils l’ont dit Lisa Friedlander, sa meilleure amie : « Moi, mon cœur penchait à gauche. Celui de Léa n’était pas de droite, non plus. Mais elle n’aime pas qu’on en parle. » « Léa Salamé : la belle ambitieuse que l’on s’arrache » (Télé 2 semaines, n°321 du 16 au 29 avril 2016) « Selon nos informations, la journaliste Léa Salamé a été interpellée lundi, en milieu d’après-midi, alors qu’elle circulait à bord de sa voiture dans le 7e arrondissement de Paris. Les policiers, qui effectuaient un contrôle de routine, ont constaté que son permis de conduire avait été invalidé faute de points, et que son véhicule n’était pas assuré », « Léa Salamé interpellée pour conduite sans permis ni assurance » leparisien.fr, 17/02/2016 « L’étoile montante. Il y a un mystère Léa Salamé (…) Certes, la trentenaire formée à l’école Elkabbach ne manquait pas d’ambition, mais sa notoriété se bornait alors aux mordus de l’info et aux aficionados des matchs Zemmour-Domenach, qu’elle arbitrait avec pugnacité et un certain talent. Brusquement, sa cote a grimpé en flèche et tout le monde se l’est arrachée. De bonnes fées se sont penchées sur son cas. D’abord Catherine Barma et Laurent Ruquier, qui l’ont propulsée sniper du samedi soir dans leur machine cathodique On n’est pas couché (France 2). Puis Laurence Bloch, patronne de France Inter, qui lui a confié les clés de l’interview de 7 h50. Bref, une trajectoire fulgurante qui mérite bien la première place de notre classement. D’autant que nous avons la vague impression que Léa Salamé est là pour longtemps », Ciné TéléObs, 30 décembre 2014, où Léa Salamé est classée « révélation de l’année 2014 » « De sa bouche entrouverte, souriante, à l’américaine, sort par exemple ceci : “Le jour de l’élection, d’Obama, j’étais là-bas pour France 24 et c’est moi qui ai dit en direct : ’Le premier président noir américain est élu.’” Le vocabulaire n’est jamais tout à fait à la hauteur de la présence ni de la notoriété. Il accompagne les rondeurs vives et l’ingénuité carrossée de Léa Salamé, nouvelle reine intermédiaire des ondes et de l’image. […] Elle aime Bret Easton Ellis “à ses débuts”, Dalva de Jim Harrison et Emmanuel Carrère comme tout le monde. Quand elle parle de Lydie Salvayre, qu’elle interviewe le jour du Goncourt, elle emploie une expression à la mode et à la con : “C’est une grande dame.” » Libération, 14 décembre 2014 « Immigrée, elle garde la rage de réussir. » Technikart, juillet 2014 « On la verra encore longtemps […] Il faut avertir le téléspectateur, c’est l’an I de Léa Salamé » Pierre Fraidenraich, Ciné TéléObs, 27 septembre 2014 « À sa sortie de Sciences-po, entre deux soirées chez Castel ou au Mathi’s, une organisation de concerts à la Cigale et pas mal de virées avec la bande d’Inculte (Olivier Rohe, dont la mère est

222 libanaise arménienne, François Bégaudeau, Jérôme Schmitt), elle confie à son daron [père] son envie de journalisme. » Les Inrockuptibles, 26 juin 2014 « On ne sait jamais si c’est par manque d’idée ou par excès de prudence, ou les deux : Léa parle d’elle comme si elle était importante et comme si elle avait 10 ans. Son père, l’intellectuel et homme politique libanais Ghassan Salamé, aurait préféré qu’elle soit journaliste à New York. C’est là, d’une certaine façon, que tout a commencé. » « Léa Salamé, timbale libanaise » liberation.fr, 14 décembre 2014 « Pas de malentendu : Léa Salamé a le droit de poser les questions qu’elle veut, c’est entendu. Mais il est urgent qu’elle-même, Laurent Ruquier et France 2 cessent de la présenter comme une journaliste neutre, désengagée, « objective », à rebours de ce que furent ses prédécesseurs dans le fauteuil de droite de ONPC, Natacha Polony et Eric Zemmour. Que cesse la tromperie sur l’emballage journalistique. Que Léa Salamé assume son habitus. Que l’on cesse enfin sur France 2 (et ailleurs) de présenter, de manière frauduleuse et hypocrite, l’objectivité journalistique comme une valeur de droite. » Bruno Roger-Petit, « Christiane Taubira face à Léa Salamé et Aymeric Caron : le petit jeu truqué de France 2 ? » Challenges, 23 février 2015

Sa nébuleuse

Félix Marquardt Elle fréquente le milieu de la nuit parisien, et en particulier les dîners très prisés de Félix Marquardt. Elle dit pouvoir compter sur ses amis « à la vie à la mort ». Parmi eux figurent Alexandra Sprung, connue à Sciences Po, qui après avoir débuté chez Publicis, codirige une entreprise de conseil en communication, Lisa Friedlander, chirurgien dentiste, ainsi que ses amis de la revue Inculte.

Olivier Guez et Raphaël Glucksmann Léa Salamé aurait été, selon la presse people, en couple avec Olivier Guez. Journaliste et écrivain, Olivier Guez assure la correspondance de la Frankfurter Allgemeine Zeitung pour la culture à Paris (voir sa biographie). « Il est juif, ce qui “ne rend pas les choses simples, sans commentaire”. Elle préfère qu’on n’écrive aucun des deux noms. Pourquoi ? “Trop tôt pour faire mon outing. Vous ne vous rendez pas compte. Ils ne nous lâcheraient plus.” Ils : la bande tabloïd à lèche-people.» « Léa Salamé, timbale libanaise » (libération.fr, 14/12/2014). Lors de la 23ème édition des Femmes en Or, en décembre 2015, elle lui rend hommage : « c’est la personne qui me supporte tous les jours et qui ne comprend pas pourquoi je me réveille à 5 heures du matin, pourquoi je travaille autant, pourquoi je croule sous le travail, qui ne comprend pas pourquoi on ne va pas plus souvent se promener, voir les églises en Italie ou se balader à Buenos Aires. » Une déclaration contredite quelques semaines plus tard par les révélations et les photos du magazine Voici , en janvier 2016 (16 janvier), montrant Léa Salamé embrassant Raphaël Glucksmann. Selon l’hebdomadaire, « les deux trentenaires ont flashé en direct l’un sur l’autre, le 14 novembre dernier, lors de l’émission spéciale On n’est pas couché, spécial attentats. Eduardo Rihan Cypel : le député socialiste, porte-parole du Parti Socialiste, fut l’un de ses très proches camarades à Sciences-Po. Léa Salamé affirme : « oui, je parle aux politiques. Oui, il m’arrive de déjeuner avec eux. Mais j’essaie de le faire le moins possible. J’en ai connu quelques- uns à Sciences-Po : Geoffroy Didier, Eduardo Rihan Cypel… Mais, globalement, je n’ai aucun ami dans ce milieu. Je ne les ai quasiment jamais au téléphone. »

223 Résumons : née dans un milieu (très) privilégié, intégrée fortement à l' « habitus familial » qui est mondialiste, libéral et atlantiste, à cheval sur les deux rives de l'Atlantique, IEP Paris, M. Elkabbach, un compagnon journaliste lui-même dans des mouvances similaires aux siennes, Mme Salamé avait tout pour du jour au lendemain être propulsée aux avant-postes des médias mainstream. Et cet esprit « libre » de tout préjugé ne manqua pas d'accuser M. Asselineau d'anti-américanisme primaire lors de l'émission « on n'est pas couché » chez Laurent Ruquier. Ce qui permet en retour de se demander si elle-même n'affiche pas un « pro américanisme primaire », ce que ses origines et son parcours expliquerait par ailleurs. Dans ce cadre, l'objectivité est forcément au rendez-vous.

-Bernard Guetta (source Wikipedia, extraits) Il est né le 28 janvier 1951 à Boulogne-Billancourt Il est un journaliste français, spécialiste de géopolitique internationale et Prix Albert-Londres 1981. (...) Avec des parents passés par le trotskisme, l’anticolonialisme et le PSU, il baigne dans un milieu très politisé et ancré dans une gauche anti-molletiste et anti-stalinienne2. Trotskiste de la Libération aux années 1950, son père est lié à la revue Socialisme ou barbarie dont il abrite des réunions à son domicile. Dès l’âge de 14 ans, Bernard Guetta est donc amené à lire les grands classiques de la littérature anti-stalinienne. Sa conscience politique est alors très précoce. Par exemple, dès l’âge de dix ans, il distribue des tracts contre la guerre d'Algérie. (...) À l’âge de 13 ans, il cherche à militer dans un parti mais, déçu par ceux qu’il visite, il atterrit à la Ligue des droits de l'homme où Daniel Mayer l’oriente vers le mensuel Après demain. Chargé de sa distribution auprès des libraires de Paris, il participe ainsi aux réunions du comité de rédaction aux côtés de Françoise Seligmann, Pierre Joxe et de Philippe Bernard. Dans ce milieu mendésiste radical-socialiste où il rencontre des personnalités comme Claude Nicolet ou Pierre Mendès France, il bénéficie d’une formation politique et intellectuelle de haut niveau qui le rattache à la mouvance réformiste de gauche (...). Amené à résider à Casablanca, il est élève au lycée Lyautey près de deux ans tout en vivant chez des grands-parents qui, durant la guerre mondiale, avaient accueilli leur cousin Charles Guetta et son ami Jean Daniel pendant plusieurs mois. De retour à Paris, il retrouve ses amis Emmanuel Todd et Jean-Pierre Cerquant4, fils et beau-frère d’un Olivier Todd qu’il considère comme « une sorte d’oncle3 » et dont la famille est très liée à la sienne. (...) Mais c’est avec son entrée au prestigieux lycée Henri-IV, Paris, où il prépare le baccalauréat, et les événements de mai 68, qu’il commence à prendre des responsabilités politiques. Organisateur de l’occupation des lycées Henri-IV et Fénelon, il devient un des leaders des comités d’action lycéens aux côtés de Michel Recanati, Maurice Najman et Romain Goupil. Se percevant alors comme un « radical à l’américaine » qui vise moins la prise du pouvoir que l’imposition des réformes nécessaires, il suscite à Henri-IV des débats entre élèves et professeurs sur la réforme de l’enseignement dont un rapport est tiré et envoyé au ministère. Il rejoint la Jeunesse communiste révolutionnaire en octobre 1968 sous l’influence de Michel Recanati. Parallèlement à son hypokhâgne (Lettres Supérieures), il siège au Comité central de la Ligue communiste. Mais son entrée au CFJ en septembre 1969 l’amène à subir l’influence de Philippe

224 Viannay et d’enseignants comme Jacques Julliard, Jacques Ozouf, François Furet ou Jean Bouvier. À l’occasion notamment des grèves étudiantes qu’il y anime, il noue avec Philippe Viannay des liens d’amitié extrêmement forts qui contribuent à l'éloigner du militantisme. À partir du début 1970, il cesse de participer aux réunions de la Ligue même s’il conserve des contacts avec certains de ses leaders tels qu’Henri Weber.

Parcours professionnel Ses liens avec Todd facilitent alors son entrée comme stagiaire au Nouvel Observateur. Entré au service "société", en juin 1971, avec Jean-Pierre Cerquin et Jacqueline Rémy, il représente, pour son chef, la nouvelle génération du service. S’il est recruté comme pigiste, en janvier 1972, son entrée coïncide avec celle du cousin de son père (Charles Guetta) au sein du conseil d’administration. Cela lui vaut d’être mal vu du reste de la rédaction jusqu’à ce que la mort de Charles Guetta (été 1972) améliore son image. Sa titularisation, contemporaine de cette évolution, le conforte dans son intégration. Au sein du journal, il couvre d’abord la jeunesse et les mouvements lycéens tout en portant un intérêt aux marginaux de tous genres (squatters, immigrés, handicapés). Proche d’Olivier Todd et d’Hector de Galard, il est alors ignoré par Jean Daniel, ce qui ne facilite pas son désir de quitter les pages "société" pour la politique et l’étranger. Mais à partir de juillet 1973, il met un pied au service "événement" en couvrant la grève de l’usine Lip. Il interviewe pour cette affaire Michel Rocard (24 septembre 1973), José Bidegain (14 janvier 1974), Jacques Chérèque (4 février 1974) et même Claude Neuschwander, il tire de cette rencontre le livre Patron mai…5 (Le Seuil, 1975). Sa présence au journal se renforce par sa participation à la couverture de la campagne présidentielle d’avril 1974 et des Assises du socialisme (octobre 1974). Mais il continue à s'intéresser aux thèmes gauchistes : la situation dans les prisons, dans l’armée et la police, les dérives de la Justice, le contrôle de l’information. Il offre d’ailleurs la parole à des leaders du PSU (Bernard Ravenel, Michel Mousel), à gauche des rocardiens. et aussi à des hommes de droite tels que Jacques Dominati ou Jean Lecanuet. De même, s’il traite moins de politique intérieure à partir de 1976, il continue à porter une attention à la contestation interne au PCF, notamment au sein des Jeunesses communistes dont il interviewe plusieurs fois le secrétaire général. Cela est lié à l’intérêt croissant qu’il porte aux questions des dissidents soviétiques, soutenu en cela par Jean Daniel et par K.S. Karol. Ayant abordé ce thème par l’interview de Leopold Trepper (décembre 1973), il en devient le spécialiste après l’affaire Pliouchtch (janvier 1976). À partir de septembre 1977, il délaisse même les questions intérieures (justice, armée, partis) pour s’y consacrer pleinement. Par ce biais, il s’intègre au service "étranger" où il traite de pays comme le Liban (août 1976), le Zaïre (avril 1977) ou le Sahara occidental (hiver 1977/1978). La question des "dissidents" lui vaut alors l’amitié d’un Jean Daniel qui l'appuie au sein d’une rédaction divisée sur le traitement de ces questions : ainsi, après s’être battu semaine après semaine pour assurer la chronique des arrestations et des grèves de la faim, il obtient son soutien pour imposer une rubrique. Il donne ainsi par deux fois la parole à Vladimir Boukovski, dénonce la condamnation d’Orlov ou le sort fait à Chtcharanski. Il offre aussi à Laurent Schwartz (22 juillet 1978) ou à Daniel Meyer (11 décembre 1978) le moyen de s’exprimer sur les atteintes aux droits de l’homme. Mais en avril 1979, il est recruté par le chef du service étranger du Monde qui lui propose un poste de correspondant à Vienne. En 1980, il rejoint la Pologne où il bénéficie des nombreux contacts que lui offre K.S. Karol.

225 Il est admis en 1981 Young Leader du lobby atlantiste en France, la French-American Foundation 6 . Correspondant à Varsovie puis à Gdansk, il reçoit le prix Albert-Londres en mai 1981. Il en tire un livre, Pologne (Arthaud, 1982). N’ayant pas obtenu de visa pour l’URSS, il passe quatre ans à Washington de 1983 à 1987 avant d’occuper le poste de correspondant à Moscou de 1988 à 1990. Rédacteur en chef de L'Expansion de 1991 à 1993, du Nouvel Observateur de 1996 à 1999, il est éditorialiste à L'Express et chroniqueur à La Repubblica, au Temps et à La Gazeta. Bernard Guetta est journaliste au Monde de 1978 à 19907. En 1990, Bernard Guetta est candidat à la direction du journal Le Monde, face à Jean-Marie Colombani et Daniel Vernet, ce dernier est finalement élu8. Il quitte alors le journal pour lequel il a travaillé pendant douze ans7. En 2011, il re-propose sa candidature au poste de directeur dans le cadre de la succession d’ Éric Fottorino 9 . En 1991, il est engagé à France Inter. Il intervient dans la matinale de France Inter, notamment avec une chronique géopolitique tous les matins à 8 h 17 après le bulletin d’information10.

Un engagement parfois polémique En 2005, il fait activement campagne pour le « oui » au référendum relatif au traité constitutionnel européen (TCE). Ses chroniques matinales sur France Inter sont souvent des plaidoyers en faveur d'une intégration européenne plus aboutie, suscitant des critiques de la part de médias tels que le mensuel Le Monde diplomatique 11 ,12, ou encore l'association de critique des médias Acrimed 13 . Son soutien à une intervention militaire de la France dans la guerre civile syrienne a lui aussi été critiqué par le site web d'Acrimed14 :

« Conflit en Syrie : les éditocrates s’habillent en kaki par Mathias Reymond, Comme les escargots lorsque tombent les premières gouttes de pluie, à chaque projet de guerre humanitaire et à chaque intention de lâcher quelques bombes, les va-t-en guerre sont de sortie. Guerre du Golfe, Yougoslavie, Kosovo, Afghanistan, guerre du Golfe la suite, Libye, les médias aiment donner la parole aux GI-Joe de la pensée géopolitique. Avec le conflit en Syrie, ils sont particulièrement nombreux… et particulièrement en forme. Les commentateurs en tous genres ont été contraints de modifier leur analyse et leur plan compte tenu de l’agenda international. Il y a un « avant » et un « après » 9 septembre. En effet, le 9 septembre la Russie propose de soumettre les armes chimiques de la Syrie à un contrôle international. Avant cette proposition, la plupart des éditocrates étaient favorables à une intervention armée (ciblée et humanitaire – sic). Après, ces mêmes éditocrates étaient – toujours – favorables à une intervention armée (ciblée et humanitaire – re-sic). L’état-major Dans une nouvelle saison de cette série répétitive, le général en chef pourrait bien être Bernard Guetta. Depuis la fin du mois d’août il a délaissé sa cape bleue ornée d’étoiles pour un ensemble kaki sur lequel il espère apposer de nombreuses médailles. Dans Libération (3 septembre 2013), il revient sur les arguments des opposants à une intervention militaire en Syrie. Sa tentative de démontage consiste à aligner quelques lapalissades cocasses dont celle-ci : « Dès lors que des gaz de combat ont bel et bien été utilisés, celui qui a pu le faire est celui qui en avait et non pas celui qui n’en avait pas, le pouvoir et non pas l’insurrection. » CQFD. Puis il ajoute d’étonnantes remarques pour un spécialiste de la géopolitique : « rien ne dit que des frappes limitées précipiteraient une guerre mondiale ou même régionale. » Mais rien ne dit le contraire non plus. La proposition russe du 9 septembre n’entame pas la virulence de ses arguments. Ainsi Bernard Guetta sur France Inter commente : « La seconde clarification apportée par ce coup de théâtre russe est qu’il est bel et bien nécessaire et non

226 pas forcément aventureux ou va-t-en-guerre de ne pas accepter l’inacceptable et d’envisager de le sanctionner par la force. » Puis il ordonne : « Il ne faut pas, autrement dit, renoncer à la force. » (10 septembre) « À l’attaque ! » aurait-il ajouté en studio, une fois le micro coupé. Le 27 août, Bernard-Henri Lévy – autre général de circonstance – se lâche dans « Le Grand Journal » sur Canal Plus : « Quand je vois les 75 % de pacifistes qui disent :’’tout sauf la guerre’’, quand j’entends ’’Paix, paix, paix’’, j’entends ’’mort, mort, mort’’. » « Et il n’y a rien d’autre de possible que la guerre ? » lui demande-t-on, « Mais tout a été tenté » réplique-t-il. C’était quelques jours avant la proposition russe acceptée par les États-Unis et la France... Sur RMC il maintient que « ne pas intervenir en Syrie serait une honte » (29 août). [1] Puis, dans Le Point (12 septembre), il s’énerve contre ce qu’il appelle « la diplomatie d’opinion » et il argumente : « François Mitterrand ne se soucia pas de ’’l’opinion’’ quand il prit la décision historique d’abolir la peine de mort. Charles de Gaulle ne commença pas par sonder, amadouer, séduire, ’’l’opinion’’ quand, élu sur un programme prévoyant la poursuite de la guerre en Algérie, il décida de faire l’inverse. […] Gouverner c’est, aussi, déplaire. » Bombarder, c’est mieux... Son collègue à la coupe au bol, le colonel André Glucksmann, est sur la même ligne : « Le mieux est d’éloigner la chute dans le pire, donc d’interdire le meurtre massif des enfants et le gazage d’une population morceau par morceau. Voilà pourquoi la réplique américano-française s’impose. » (Le Monde, 6 septembre). Une réplique ciblée et humanitaire, cela s’entend. Les sous-officiers Pour Laurent Joffrin, l’intervention est « inévitable » (Le Nouvel Observateur, 27 août), et il justifie cela avec un argument pour le moins friable : « L’absence de riposte des Occidentaux face à l’utilisation d’armes chimiques par le régime d’Assad délivrerait à tous les dictateurs de la terre un passeport pour la barbarie. » Il aurait pu avancer pareil argument pour encourager les interventions en Libye ou en Irak... Pourtant les ripostes des occidentaux, à l’époque, n’ont pas empêché le dictateur Assad de faire usage de la barbarie. Ensuite, Joffrin, spécialiste de tout et de rien, affirme que « Saddam Hussein mis à part, aucun pays n’a fait usage de l’arme chimique au combat depuis près d’un siècle. » Négationnisme ou bêtise [2] ? Le directeur du Nouvel Observateur a sans doute oublié qu’il y avait eu une guerre au Viet-Nam (petit pays, à droite sur la carte), et que durant ce conflit, l’armée des États-Unis avait usé et abusé d’armes chimiques. Puis, il ajoute, que « dans ces circonstances, il n’est qu’une solution : donner un avertissement sévère à ce régime insensé et barbare qui gaze sa propre population »... On comprend mieux pourquoi il ne sera jamais officier. Dans l’émission, « Ce soir ou jamais » (France 2, 6 septembre), Frédéric Encel, géopoliticien de la télé, pense : « Je pense qu’il y a des guerres justes. Toutes les guerres ne sont pas faites pour le fric. » Puis il explique que « la puissance doit être assumée. […] Je ne suis pas pour une guerre, je suis pour une intervention symbolique. » Ouf ! Encel est contre la guerre. Pas de quartier non plus dans « C dans l’air », sur France 5, avec deux émissions intitulées, les 2 et 4 septembre, « Y aller ou pas ? » et « Les frappes se précisent », qui n’ont donné la parole qu’à des intervenants favorables à une riposte américano-française (dont deux fois Christophe Barbier). Les petits soldats Dans Le Monde (26 août), Natalie Nougayrède semble excédée – mais la colère ne lui réussit guère : « Ne pas réagir avec fermeté à l’événement chimique syrien serait ouvrir la voie à l’ensauvagement de notre ère à l’échelle mondiale ». Puis, usant du même argument que Laurent Joffrin, elle écrit : « Ne rien faire reviendrait à donner un blanc-seing aux crimes contre l’humanité et à ruiner l’édifice de normes internationales élevé en rempart contre l’emploi d’armes de destruction massive. Le signal envoyé indirectement à l’Iran et à la Corée du Nord serait un message de laisser-faire. » Plus amusant, l’article paru sur le site de France Info, le 27 août, s’interroge : « Comment rendre légitime une intervention militaire en Syrie ? » . L’auteur envisage ici « plusieurs scénarios [qui] permettraient de passer outre les vétos russes ou chinois. » Malin. *** Évidemment Acrimed est bien incapable (et ne serait pas dans son rôle) de se prononcer sur une éventuelle intervention militaire en Syrie. De plus, les médias n’ont pas tous une attitude de suivisme dans ce conflit, mais force est de constater qu’une grande partie des chefferies éditoriales se complaisent dans leur rôle de commandants en chef des armées. Et s’il n’est pas étonnant de retrouver toujours les mêmes (Lévy, Glucksmann, Guetta, Encel...) promouvoir la guerre du haut de leur superbe ignorance, il est déplorable que du temps d’antenne ou des pages leur soient (encore) abondamment cédés pour qu’ils puissent claironner leurs opinions, plutôt qu’à des journalistes qui désireraient simplement informer sur les tenants et les aboutissants du conflit…

227 (...) • Il reçoit le prix Albert-Londres en mai 1981.

(...)

Notes et références

1. ↑ « Mon moteur, c'est la musique et le plaisir » [archive], Isabelle Mas, L'Expansion, 1 er avril 2002 2. ↑ Bernard Guetta [archive], fiche personnelle sur le site de L'Express 3. ↑ a et b Entretien de Bernard Guetta avec François Kraus le 25 mai 2004. 4. ↑ Le fils d’Henriette Nizan, belle-mère d’Olivier Todd. 5. ↑ Bernard Guetta, Patron mai…(entretien avec Claude Neuschwander), Paris, Le Seuil, 1975, 185 p. 6. ↑ French-American Foundation - Profil de Bernard Guetta [archive] 7. ↑ a et b http://www.liberation.fr/medias/01012312752-bernard-guetta-candidat-a-la-direction- du-monde [archive] 8. ↑ " Le Monde : Daniel Vernet candidat à la succession [archive]", L’Humanité, er octobre 1990. 9. ↑ http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2011/01/11/onze-candidats-a-la-direction- du-monde_1464177_3236.html [archive] 10. ↑ http://sites.radiofrance.fr/franceinter/chro/geopolitique/ [archive]. 11. ↑ Serge Halimi Contre les tsunamis, votez « oui » au référendum ! [archive] Le Monde diplomatique, février 2005 12. ↑ Pierre Rimbert Le théorème de Guetta [archive] Le Monde diplomatique, novembre 2008 13. ↑ Bernard Guetta célèbre sa propre importance [archive], Henri Maler, Mathias Reymond, acrimed.org, 21 février 2005 14. ↑ Mathias Reymond Conflit en Syrie : les éditocrates s’habillent en kaki [archive] Acrimed, 23 septembre 2013 15. ↑ La politique telle qu’elle meurt de ne pas être [archive] (ISBN 978-2-7096-3577-6). 16. ↑ interview dans l'émission Downtown, France Inter, 15 mars Résumons : gauchiste converti à l'atlantisme et « au marché » comme par exemple Serge July, Brice Couturier, Christophe Cambadelis, Jean Marie Le Guen, Lionel Jospin, André Glucksman etc... Un parcours devenu classique en France. Quelle était originellement la franchise de tels engagements ? Il reste que nombre de ces anciens « révolutionnaires » à la mie de pain ont changé d'idées, mais apparemment pas de structure mentale (lire plus haut). Les outrances de M. Guetta dans sa défense du traité de Lisbonne sur les ondes publiques l'ont montré comme le militant d'une cause plus que comme un journaliste soucieux d'une attitude déontologiquement acceptable. La présence de ce Young leader à une heure de grande écoute sur France Inter peint la station aux couleurs de la doxa. Le travail de Patrick Cohen et de Léa Salamé allant dans le même sens (lire plus haut), on sent bien que le pluralisme sur cette station publique pourrait être un sujet de débat.

Object-N 3 icolas Be ytout : la mondialisation a un visage…(source OJIM, extraits)

228 « Rien qui dépasse. La mèche proprement plaquée, une cravate sur une chemise bien mise, à fines rayures, ça va de soi, des chaussures bien cirées. Nicolas Beytout, 47 ans, directeur de la rédaction des Échos depuis 1996, a la tenue de l’emploi. Le bureau qui sied à son titre, sobre comme un livre de comptes. La maison est sérieuse, et Nicolas Beytout aussi, qui la tient bien. Bien droite », « Nicolas Beytout, le manitou », Libération, 15/09/2003 Groupe de Bilderberg, Le Siècle, Medef, Commission Trilatérale, ami intime de Nicolas Sarkozy, petit-fils de l’ancienne propriétaire des Échos, Nicolas Beytout est LE porte-voix de la pensée unique mondialiste dans les médias. Il est né en juin 1956 à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) et père de 4 enfants. Petit fils (par alliance, mais sans lien direct de parenté, étant en fait le petit-fils de Pierre Beytout) de Jacqueline Beytout (née Egger en février 1918 à Marseille), qui avait racheté à la famille de Servan-Schreiber Les Échos de l’exportation en 1963. Elle épouse en secondes noces un riche marchand d’arachide danois à Dakar, Vigggo Qvisigaard Petersen, dont elle hérita, à 46 ans, lorsqu’il mourut. Elle devait se remarier en troisièmes noces, en 1957, avec Pierre Beytout, alors patron des laboratoires Roussel. Directrice de la publication de 1966 à 1989, elle fait du journal le plus important quotidien économique français, finissant par vendre ses parts pour 885 millions de francs au groupe de presse anglais Pearson en 1988 (s’attirant alors les foudres d’Édouard Balladur, ministre de l’Économie et des finances). Pearson détient notamment le Financial Times et possède 50 % de The Economist, contrôle les éditions Penguin, est le premier groupe mondial dans l’éducation, a une participation importante dans RTL Group, produit des émissions ou séries comme Alerte à Malibu, La roue de la Fortune ou Le Juste prix.

Formation

Diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris et titulaire d’une maîtrise de droit.

Parcours professionnel

« Journaliste à L’Économie (1978–1980) et à la Correspondance économique (groupe Bérard- Quélin, fondateur du club très fermé Le Siècle), Nicolas Beytout a été journaliste puis rédacteur en chef de la Lettre des Échos (1981-1983).Par la suite, il a gravi tous les échelons dans le premier groupe de presse économique français (qui contrôle ou a édité City, Le Panorama du médecin, Enjeux, Les Dynasteurs, La Revue du praticien, L’Exportation, etc.), étant notamment chef du service économique, rédacteur en chef (nommé par sa grand-mère Jacqueline Beytout), puis directeur de la rédaction des Échos à partir de 1997. Président du comité éditorial du groupe les Échos à partir de 2000, il a également été secrétaire général (1987-1989) puis vice-président (1989-1993) de l’Association des journalistes économiques. En 2004, il rejoint Le Figaro comme directeur de la rédaction, mais suite à des tensions, il entre au groupe LVMH comme directeur du pôle médias et reprend la direction des Échos que Bernard Arnault vient de racheter.

229 Chroniqueur à RTL (1999-2002), il a collaboré à Europe 1, TF1 (avec « Les Rendez-vous de l’entreprise »), LCI (avec « l’Invité de l’Economie ») et I-Télé (« Les points sur les i », « 17 heures politique »). Il intervient désormais sur France Inter . (note de l'auteur : avec MM. Cohen et Guetta, la maison est bien gardée!)

Depuis l’été 2012, Nicolas Beytout travaille à lancer un site Internet payant couplé à un quotidien papier généraliste qui s’appellera L’Opinion (note de l'auteur : à l'heure où ce manuscrit est écrit, l'Opinion existe), « un journal qui fera de l’information et de l’analyse » et dont la ligne éditoriale sera « libérale, probusiness et proeuropéenne ». Une quinzaine d’investisseurs soutiennent le projet, dont Nicolas Beytout lui-même qui en sera le premier, majoritaire selon les statuts sur les questions éditoriales. Le numéro un de L’Opinion paraît le 15 mai 2013. Quelques mois après son lancement, le premier nouveau quotidien papier depuis InfoMatin (1994-1996), ne se vend qu’à 3000 exemplaires par jour, tout en revendiquant un nombre d’abonnés estimé à 13 500.Fin août 2014, Médiapart révèle que le quotidien est financé aux deux tiers par Bernard Arnault (à la tête du groupe LVMH), et la dynastie Bettencourt. Ce qu’il gagne : Selon Libération , Nicolas Beytout aurait gagné 1 million d’euros minimum par an en tant que PDG du quotidien Les Échos.(...) Il l’a dit « En quelques années seulement, les États-Unis ont spectaculairement réduit leur dépendance en matière d’énergie. Même chose pour l’économie : environ 600 000 emplois ont été créés dans ce pays et on va rapidement atteindre le million. Les prix de cette énergie se sont effondrés, les factures des industriels et des particuliers avec. Le gaz coûte désormais 5 fois moins cher là-bas, alors qu’en France, GDF Suez et le gouvernement jouent au ping-pong sur les hausses de tarifs. (…) Tous les économistes s’accordent à dire que le grand bond en avant dans cette technologie a boosté la croissance américaine, une perspective que la France, évidemment, ne devrait pas négliger », « L’édito de Nicolas Beytout », France Inter, 17/09/2012.« Car c’est bien la personnalité de Mario Monti et le train de réformes structurelles profondes qu’il avait engagé qui ont contribué à éloigner la crise financière et les attaques contre l’Euro. (…) Il faut dire qu’il est très impopulaire en Italie. Et pour cause : hausse des impôts, suppression de plusieurs dizaines de départements et de régions, réduction de la dépense publique, ouverture à la concurrence de certaines professions protégées, il a lancé de véritables réformes de structure », « L’édito de Nicolas Beytout », France Inter, 10/12/2012.« C’est vrai : le problème est connu, et les solutions aussi. Mais ce qui est nouveau, c’est que ce handicap récurrent de l’économie française a été aggravé par les deux vagues de hausses des impôts et des taxes décidées par le gouvernement Ayrault. Au lieu de réduire le coût du travail, on a alourdi le poids des prélèvements qui pèsent sur les entreprises jusqu’à faire reculer leurs marges à un niveau que l’Insee juge historiquement faible », « L’édito de Nicolas Beytout », France Inter, 05/11/2012.

A propos du documentaire-fiction « 2017, chronique d’une faillite annoncée » : « Je me suis dit que ce serait bien d’essayer de refaire ce type de programme pour faire prendre conscience aux Français du poids de la dette et du risque qu’il y a à pousser, en permanence et devant nous, cette énorme boule de neige », france5.fr (…)

« Alors, voter pour quoi ? Pour que la France cesse de craindre la mondialisation. Pour qu’elle aborde avec un regard neuf la modernisation et la réforme. Pour qu’elle admette l’innovation, l’adaptation aux règles quasi universelles et aux exigences nouvelles. Pour qu’elle comprenne qu’il est temps d’affronter les réalités et d’abandonner quelques-unes de nos exclusivités – nos chimères – sans que cela signifie pour autant abdiquer tout particularisme », « Une nouvelle page » Le Figaro

230 « L’indépendance éditoriale, ce n’est pas l’autonomie absolue par rapport à un propriétaire. Si vous voulez, moi, je pense que les journalistes français font parfois un contresens à imaginer que l’indépendance, c’est l’autonomie absolue. Pendant très longtemps, on a vécu en France avec l’idée qu’un journal avait une mission, ce qu’il a probablement, mais… avait une mission, qu’il n’avait pas besoin de gagner de l’argent et que, au fond, son propriétaire n’avait qu’une chose à faire (…) se taire et payer », France Culture, 06/10/2007, cité par Acrimed (souligné par l'auteur)

« Si j’étais de gauche, j’adorerais l’ouverture. Je me réjouirais de ces manœuvres qui éloignent les éléphants, fragilisent les gazelles et laissent une chance aux perdreaux de l’année », Libération, 20/07/2007.

Sa nébuleuse :

Le Siècle : membre de ce club fondé en 1944, réunissant, depuis plus de 60 ans, la quasi-totalité du pouvoir politique, économique, financier ou médiatique français. Soit environ 600 personnes qui concentrent entre leurs mains l’essentiel du pouvoir. Tout gouvernement, qu’il soit de droite ou de gauche, a du tiers à la moitié de ses membres qui y appartient. (Emmanuel Ratier, Au cœur du pouvoir). D’autres journalistes participent à ces dîners mensuels comme Laurent Joffrin, David Pujadas, Michel Field, Patrick de Carolis, Arlette Chabot, Alain-Gérard Slama, Claude Imbert, Franz-Olivier Giesbert, Pierre Assouline ou Emmanuel Chain.(lire plus haut). Groupe de Bilderberg : Invité trois fois par ce club mondialiste. « J’ai fait trois Bilderberg. Mais on ne demande pas à participer : on est invité par le comité de direction. Nous sommes installés par ordre alphabétique, il n’y a absolument aucun protocole ni décorum. Des sessions thématiques sont annoncées à l’avance avec deux ou trois orateurs qui font un exposé avant d’ouvrir le débat avec la salle. La confidentialité est un gage très grand de sincérité qui permet aux participants de dire vraiment ce qu’ils pensent (investigation.blog.lemonde.fr)». Le Groupe de Bilderberg a été fondé en 1954 à l’Hôtel Bilderberg à Osterbeek à l’invitation du Prince Bernhard des Pays-Bas, co- fondateur du Groupe avec David Rockefeller. Le Groupe de Bilderberg est sans doute l’un des plus puissants réseaux d’influence mondiale. Il rassemble des personnalités de tous les pays, leaders de la politique, de l’économie, de la finance, des médias, des responsables de l’armée ou des services secrets, ainsi que quelques scientifiques et universitaires.(Note de l'auteur : lire plus haut dans l'article réservé à Mme Okrent)

Commission Trilatérale : Membre de cette organisation privée fondée en 1973 à l’initiative des principaux dirigeants du groupe Bilderberg et du Council on Foreign Relations, parmi lesquels David Rockefeller, Henry Kissinger et Zbigniew Brzezinski. Regroupant 300 à 400 personnalités parmi les plus influentes – hommes d’affaires, hommes politiques, décideurs, « intellectuels » – de l’Europe occidentale, de l’Amérique du Nord et de l’Asie Pacifique (États dont la plupart sont également membres de l’OCDE), son but est de promouvoir et construire une coopération politique et économique entre ces trois zones clés du monde, pôles de la Triade. À l’instar du groupe Bilderberg, il s’agit d’un groupe partisan de la doctrine mondialiste, auquel certains attribuent, au moins en partie, l’orchestration de la mondialisation économique (source : Wikipédia).

MEDEF : Membre du comité Éthique du MEDEF. Nicolas Beytout a été l’animateur de plusieurs réunions : « Quand les médias plombent, quand les médias permettent », « La solidarité ou mourir : vers l’âge adulte du capitalisme », « Le capitalisme à but non lucratif : du capitalisme créatif de Bill Gates au nouveau capitalisme de Mohamed Yunus ».

231 Syndicat de la Presse Quotidienne Nationale (SPQN) : Membre de ce conseil représentant les éditeurs de la presse quotidienne nationale: Le Monde, Le Figaro, Libération, Les Échos, La Tribune, L’Humanité, La Croix, Aujourd’hui en France, France Soir, L’Equipe, Le Journal du Dimanche, L’International Herald Tribune, Paris Turf.

Nicolas Sarkozy : Il fait partie des invités au Fouquet’s le 6 mai 2007 au soir, pour fêter la victoire de Nicolas Sarkozy à l’élection présidentielle. En 2011, la Société des journalistes s’est opposée à ce qu’il devienne éditorialiste des Échos, estimant que cette décision «viole les deux textes fondateurs qui protègent l’indépendance des rédactions du groupe». Selon elle, «il n’est pas possible que Nicolas Beytout, dont l’engagement au côté de Nicolas Sarkozy est public, porte, dans et hors des publications, l’image des Échos».

Fondation de France : membre du Conseil d’Administration. La Fondation de France « offre à toute personne physique ou morale la possibilité d’agir en faveur d’une cause qui lui tient à cœur, en créant sa propre fondation. La Fondation de France respecte le désir du fondateur, que celui-ci souhaite aider les personnes les plus vulnérables, soutenir la recherche, ou encore protéger l’environnement ».

Ils ont dit : « À un deuxième niveau, Nicolas Sarkozy soigne les “seigneurs” des médias, rédacteurs en chef et éditorialistes : tel Jean-Pierre Elkabbach, qui l’a consulté avant de recruter le journaliste chargé de le suivre, et qui l’a laissé parler vingt minutes de plus en 2005, lors d’une interview, ce qui a provoqué une protestation de Chirac. Ou encore Jean-Marie Colombani, auteur d’éditoriaux flatteurs à son égard. Mais aussi Franz-Olivier Giesbert (Le Point), Karl Zéro (ex- Canal Plus), Christophe Barbier (L’Express), Jérôme Bellay (Europe1), Nicolas Beytout (Le Figaro) », « Philippe Cohen : “Si Sarkozy n’existait pas, les médias l’auraient inventé” », La Revue-médias, n°11 « Les Échos est un quotidien plus élitiste que les autres et pour lequel je prévois un grand avenir. C’est vraiment un quotidien d’élite dirigeante. Maintenant, je pense que Nicolas Beytout saura faire du Figaro le quotidien que la bourgeoisie française n’a pas. Le Figaro de Robert Hersant était davantage le quotidien des notables que celui de la classe dirigeante de ce pays », « Entretien avec Luciano Boso : Conquérir les élites de demain » La Revue-médias, n°5

« Mais les journalistes ne veulent pas voir leur rédaction associée aux idées, légèrement orientées à droite, de Beytout. D’où leur colère, hier, à le voir intronisé éditorialiste pour les différents titres du groupe (outre le quotidien, on compte Investir, Enjeux ou encore Radio Classique). “C’est aberrant, tempête un journaliste, ça veut dire que pendant la campagne, Nicolas Beytout sera le porte-parole des Échos sans être rattaché à la direction.” D’autres voient même celui qui faisait partie des invités VIP du Fouquet’s comme “le porte-parole de Sarkozy”» « Nicolas Beytout, faux départ des “Échos” », Libération, 30/09/2011

« La nouvelle fait grincer des dents aux Échos : le patron de DI Group (filiale médias du groupe de luxe LVMH, propriétaire du quotidien les Échos) va animer une émission hebdomadaire sur i-Télé à partir du 13 septembre. “Mélange des genres”, dénonce le SNJ, qui se montrera particulièrement vigilant “à tout dérapage qui pourrait porter atteinte à l’image et à l’indépendance des rédactions du groupe” », « Nicolas Beytout sur i-Télé : il y a comme un hic », Libération, 12/09/2008

232 « Nicolas Beytout propose une analyse de l’actualité, ses prises de positions ne sont pas idéologiques »(« ! » note de l'auteur, Val ce grand homme de gauche...), Philippe Val dans « Radios garanties avec conservateurs », Libération, 07/10/2012

« Le quotidien économique Les Échos, racheté fin 2007 par le groupe de luxe LVMH, a adopté une longue charte éthique destinée à garantir l’indépendance de la rédaction, notamment vis-à-vis des actionnaires. (…) La charte rappelle que le président du groupe Les Échos, Nicolas Beytout, “ne fait pas partie des rédactions” et qu’il a le droit de s’exprimer dans les médias “en tant que PDG” ou “simplement sous son nom” », « Le journal “Les Échos” adopte une charte éthique, Libération, 21/06/2010

« Comment faire campagne pour le oui à la Constitution européenne sans s’engager ouvertement dans les colonnes de son journal ? La direction du Figaro a trouvé une solution pour le moins surprenante, présentée la semaine dernière en comité de prévision du mardi par le directeur de la rédaction, Nicolas Beytout. L’idée donc : rédiger une pétition en faveur du oui et inviter la rédaction à recueillir des signatures de personnalités, puis publier ladite pétition avec la liste de ses signataires si possible nombreux dans le quotidien, la semaine prochaine. (…) De son côté, Nicolas Beytout affirmait hier que “jamais il n’a été question (…) que les journalistes signent eux- mêmes”, ni “de rabattre des signatures” » « Embrouille sur l’Europe au “Figaro” », Libération, 04/05/2005

« Mes relations avec Nicolas Beytout sont parfaitement exécrables. J’ai découvert la faceE cachée de Nicolas Beytout : perversité, arrogance, mépris, mauvaise foi », rik Izraelewicz, ancien directeur de la rédaction des Échos (lire ci-dessous), Rue89.com, 12 février 2008

Résumons : Dans ce CV, l'IEP Paris est presque un détail. Origines familiales, engagements officiels dans les « nœuds de connivence » et de l'atlantisme essentiels, un cursus voué (miraculeusement) aux (très) bonnes places de responsabilité, il est clair à travers notamment M.Beytout qu'une frange du monde médiatique est une oligarchie comme une autre, c'est à dire qu'elle est un élément visible de cette oligarchie. Et qu'en la matière, la presse ne sert pas l'oligarchie, elle est l'oligarchie.

-Érik Izraelewicz, le défenseur de l’ordre économique (Source OJIM, extraits) Note de l'auteur : prématurément disparu, M. Israelewicz avait socialement brillamment réussi. Il est à ce point symbolique d'une certaine presse qu'il a toute sa place auprès de confrères (bien vivants) du même aloi que lui. Érik Izraelewicz est né en 1954 à Strasbourg. Après une prépa HEC au lycée Kléber de Strasbourg, il intègre l’école des Hautes Études Commerciales (HEC) dont il ressort diplômé en 1976. Il est également diplômé du Centre de Formation des Journalistes (CFJ, promotion 1978) et Docteur en économie internationale (1979). Il est mort le 27 novembre 2012 à Paris, au siège du journal Le Monde, victime d’un infarctus, à l’âge de 58 ans.

233 Parcours professionnel Érik Izraelewicz commence sa carrière comme journaliste économique à l’hebdomadaire L’Usine nouvelle (1979-1981) (note de l'auteur : journal où est aussi passé M. Eric Le Boucher). Il entre ensuite au bimensuel L’Expansion (1981-1984). Il participe à la création du quotidien La Tribune de l’économie en 1985. Érik Izraelewicz intègre le service économie de la rédaction du Monde en avril 1986. Il est spécifiquement en charge des banques, des assurances et de la conjoncture financière française. En décembre 1988, il est nommé chef-adjoint du service « économie » avant d’en prendre la tête en septembre 1989. En 1991, il est nommé éditorialiste économique. Il est ensuite correspondant du journal à New York de 1993 à 1994. En 1996, il est nommé rédacteur en chef du quotidien du soir. En parallèle, il tient une chronique économique sur Europe 1. Après quatorze années au Monde, il quitte le journal en janvier 2000 pour rejoindre le quotidien économique Les Échos comme rédacteur en chef et éditorialiste, chargé de développer la rubrique « idées ». Il en devient le directeur adjoint en 2004, puis le directeur de la rédaction en 2007, pour une brève période. Il quitte Les Échos en 2008, hostile au rachat du titre par le groupe LVMH, auquel il préférait la FIMALAC de Marc Ladreit de Lacharrière (membre comme Izraelewicz du Siècle et du Bilderberg Group). Il rejoint alors La Tribune, que Bernard Arnault vient de vendre à Alain Weill, également membre du Siècle, homme d’affaire très présent dans l’audiovisuel avec son groupe NextRadioTV (RMC, BFM). Érik Izraelewicz quitte également Europe 1 pour devenir chroniqueur sur les autres médias du groupe NextRadioTV : RMC et BFM TV. Le titre étant en grande difficulté financière, Alain Weill vend en mai 2010 La Tribune à sa directrice générale, Valérie Decamps, pour un euro symbolique. Le départ d’Alain Weill entraîne, en juillet 2010, celui d’Érik Izraelewicz qui ne se sent plus autant d’affinités avec la nouvelle propriétaire. Il fait savoir qu’il est « disponible » pour d’autres fonctions et présente sa candidature aux actionnaires du journal Le Monde en janvier. Il est nommé directeur de publication du quotidien le 7 février 2011, adoubé par le comité de sélection composé de Pierre Bergé, Louis Dreyfus et Gilles Van Kote. Ce choix est ratifié par les journalistes du quotidien à 74 % des voix, par les salariés à 75 % et par les cadres à 78 %. (...)

Il l’a dit « Bref, le Danemark, c’était jusqu’à présent, avec une forte croissance, le Paradis sur terre. Un seul problème : le chômage ? Mais là-haut, le modèle toujours, il est trop bas. 3% seulement. Le pays manque en réalité de bras. La pénurie de main d’œuvre y menace la croissance. Une solution : ouvrir les frontières à l’immigration, la question a été au centre des législatives, mardi. Les électeurs ont tranché. Entre la stagnation et l’immigration… ils préfèrent la stagnation ! L’extrême-droite a obligé depuis six ans le gouvernement de centre-droit à durcir les conditions d’entrée dans le pays. Elle est sortie renforcée de ces élections. Le premier ministre sortant, Anders Rasmussen, un centriste, garde la majorité. Il va devoir continuer à s’appuyer néanmoins sur cette extrême droite pour gouverner, à restreindre encore davantage l’accueil de travailleurs étrangers. Pour l’économie danoise, c’est une très mauvaise nouvelle. Cette pénurie de main d’œuvre va y freiner la croissance. En pesant sur les salaires, elle va y handicaper la compétitivité de ses industries. Elle va aussi y poser, à terme, le problème du financement de la protection sociale, des retraites et de la santé. Bref, c’est tout le modèle qui risque de s’écrouler. En fermant la porte de leur Paradis, les Danois prennent le risque d’en faire un Enfer. Un choix qui apparaît comme un mauvais présage pour l’Europe, la France aussi. Espérons que nous ne céderons pas, nous, à la si jolie sirène de Copenhague ! », Les Échos, 15 novembre 2007.

234 « Eh bien, le choc de 87 a été plus violent, plus soudain, plus brutal que celui de 29 ; il n’a pas eu les mêmes effets. Il n’a guère affecté l’activité. Le Général De Gaulle disait que « la politique ne se fait pas à la corbeille ». L’histoire montre que l’économie non plus. La bourse a sa propre respiration, l’économie réelle la sienne. Seconde leçon : le krach de 87 n’a pas tué le marché non plus. Il aurait pu décourager les investisseurs. Ils y sont revenus, très vite. Ils ont eu raison. L’indice Dow Jones valait 2200 points le 20 octobre 87. 20 ans après, il tourne autour de 14.000 points. Il a été multiplié par 6 en 20 ans. Sacrée santé. Il est peu probable que l’on connaisse à nouveau un tel krach. On remarquera d’abord que depuis 20 ans, on n’en a plus vécu. Il y a bien eu quelques bourrasques, jamais un coup de torchon aussi violent. Un recul de 5% ou 6% et c’est maintenant déjà la panique. A tort, on le voit. La bourse reprend toujours, tôt ou tard, ses esprits : c’est la troisième leçon. », Les Échos, 19 octobre 2007.

Sa nébuleuse Érik Izraelewicz est administrateur de l’ENA depuis 2001 et membre de la Commission économique de la nation depuis 1997. Il est également membre du Conseil scientifique du Centre d’Études Prospectives et d’Informations Internationales (CEPII) depuis 1995. Il est membre du club Le Siècle depuis 2007 et appartient à l’institut Aspen France, filiale française du club américain d’essence mondialiste Aspen institute. (lire plus haut). Érik Izraelewicz a par ailleurs participé à plusieurs reprises au forum économique mondial de Davos et a participé au Bilderberg Group en juin 2012. C’est également un des rares Français à avoir suivi un stage de formation aux États-Unis dans le cadre des Young Leaders.

On dit de lui « Érik Israelewicz, éditorialiste multicarte, est l’exemple même de ces médiacrates qui circulent de radios en quotidiens, d’hebdomadaires en émissions de télévision, pour prêcher la bonne parole économique. Et qui n’hésitent pas à se servir de leurs tribunes, de leurs positions privilégiées, pour contribuer à baliser le débat économique. » ACRIMED, 20 février 2012.

Résumons : pas moins que M. Betout, feu M. Israelewicz est emblématique des personnels zélés et fort bien appointés chargé de diffuser la doxa à l'oeuvre et de structurer le discours de l'oligarchie qui la prononce. On a une fois encore beaucoup de mal à positionner dans un parcours éminemment politique l'exigence déontologique en principe portée par un journaliste. Peut-on à ce stade de l'ouvrage affirmer que les « dés (de l'information) sont pipés » ? Que chacun juge et approfondisse sa connaissance du milieu médiatique.

-Nicola Demorand, les résaux bien huilés (source OJIM, extraits)

« En une journée, Demorand n’aura fréquenté le monde extérieur que sur une centaine de mètres : la distance cumulée entre sa porte et le taxi, le taxi et Inter, et retour. » Libération, Portrait : Nicolas Demorand – Voix expresse, 22 avril 2008 Nicolas Demorand est né le 5 mai 1971 à Vancouver (Canada) de Jacques Demorand, diplomate, ancien chef de cabinet du ministre des Affaires étrangères Roland Dumas, et de Jacqueline Bouaniche, une « juive pied-noir » (supplément télé du Monde, 4 juin 2006). (...) Il a suivi ses études à Tokyo, Bruxelles, Rabat et Paris (Lycée Henri IV). Lauréat du concours

235 général de Français, agrégé de lettres modernes, titulaire d’une licence de philosophie, il a quitté volontairement l’Institut d’études politiques (IEP) de Paris, y jugeant l’enseignement « infantile ».

Parcours professionnel Nicolas Demorand a débuté sa carrière comme enseignant en lycée professionnel (Cergy) et en classes préparatoires, avant de choisir la voie du journalisme, en commençant comme critique gastronomique au Gault&Millau et comme pigiste aux Inrockuptibles. En 1997, il entre à France Culture et devient le collaborateur d’Antoine Spire, puis de Sylvain Bourneau. Il anime la tranche matinale de la station. En septembre 2006, il succède à Stéphane Paoli sur France Inter où il anime la tranche d’information matinale jusqu’en juin 2010. Le 7 juillet 2010, après treize ans passés dans le service public, il quitte subitement France Inter pour Europe 1 où il anime la tranche 18h-20h. Ce départ provoque l’ire de la Société des journalistes de Radio France qui publie un communiqué intitulé « trahison et naïveté » considérant que Nicolas Demorand « trahit le camp qui l’a fait roi sans sommation et sans en avoir informé ceux qui lui faisaient aveuglément confiance » (blog de la SDJ de Radio-France – 7 juillet 2010). L’ex-journaliste de France Inter amène dans ses bagages Olivier Duhamel qui était chroniqueur des « Matins de France Culture » et avec qui il a créé en mars 2008 la collection Médiathèque aux éditions du Seuil – une collection de textes courts sur le thème « Presse et démocratie ». Parallèlement à son activité radiophonique, il présente également la tranche 18h-20h sur la chaîne d’information en continu I-Télé (sept. 2008-avril 2009), ainsi qu’une émission de débat politique intitulée C politique sur France 5 (sept. 2009- février 2011). Ce programme est coproduit par Maximal productions, une société de Lagardère entertainment, ainsi que par Albertine productions, société dirigée par Matthieu Tarot que le site des Inrockuptibles présentait, en mai 2010, comme l’« ami et manager d’Arielle Dombasle », l’épouse de Bernard-Henri Lévy. Demorand, qui se définit lui-même comme un « juif culturel », invitera BHL sur France Inter à 7 reprises en moins de deux ans et demi. L’audience de sa tranche 18h-20h sur Europe 1 est jugée décevante (en baisse de 15 % en moyenne) quand Nicolas Demorand quitte la radio au bout de six mois pour prendre la direction de Libération, en mars 2011, où il remplace Laurent Joffrin. Alors que Renaud Dély, ancien rédacteur en chef de Libération et directeur adjoint de la rédaction de France Inter, était donné favori, la candidature de Demorand obtient 56,7 des voix de la rédaction, avec une participation de 81,1%. Mais dès juin 2011, les employés de Libération votent une motion de défiance à 78 %, avec une forte participation, exprimant ainsi des griefs multiples contre Nicolas Demorand, notamment un projet de refonte des dernières pages du journal avec un contenu plus susceptible d’attirer les annonceurs, projet qui ne serait pas en phase avec la “culture” du journal. « Moins d’un an après la motion de défiance votée contre lui, Nicolas Demorand est-il de nouveau sur un siège éjectable ? Convoquée par la Société civile des personnels de Libération (SCPL), l’Assemblée générale du lundi 2 avril [2012] semble recenser les mêmes « points de cristallisation » qu’en juin 2011. L’équipe de Libération fait état d’un « grand malaise, qui tient d’abord au sentiment d’être dépossédée du journal ». En outre, elle dénonce « l’attitude autoritaire et arrogante de la direction » et dresse un constat sans appel : « Un an après l’arrivée de Nicolas Demorand, la greffe n’a pas pris ». Communiqué de l’équipe de Libération (02 avril 2012). La liste des griefs est longue : Des “Unes” racoleuses qui tantôt défigurent Libération, tantôt vont à l’encontre des valeurs qui ont toujours été les siennes. De pseudos événements basés sur des

236 interviews et non sur des reportages et enquêtes. Un traitement éditorial partisan en matière politique, qui semble inféoder le journal au PS. La mise à l’écart de continents entiers du journal, comme le social, l’environnement, l’immigration. Des embauches de cadres répondant à une logique discrétionnaire, sur fond de précarisation croissante des pigistes. Des divergences évidentes au sein de l’équipe de direction qui conduisent à la confusion tant rédactionnelle qu’organisationnelle. À la rentrée 2012, Nicolas Demorand rejoint RTL, où il débat notamment avec d’autres chroniqueurs dans le cadre de la campagne présidentielle de 2012. Il intervient également ponctuellement lors de l’émission On refait le monde de Christophe Hondelatte. Note de l'auteur : M. Demorand a regagné France inter en 2014 (Wikipedia). Il l’a dit « Mes parents viennent d’un milieu extrêmement modeste. Je n’appartiens pas à la grande bourgeoisie, aux héritiers, à la connivence sociale. » Le Monde, « Nicolas Demorand : entre deux ondes », 21 octobre 2008. « J’invite Finkielkraut à la radio, car je préfère Dieu à ses saints, le modèle original aux déclinaisons. Finki, il creuse un sillon intellectuel qui est le même depuis le début. Il pense contre, c’est son fonds de commerce, et il y a un public pour ça. Penser contre, c’est aujourd’hui une part de marché. Ceux qui fustigeaient le consensus sont devenus les professionnels du dissensus, du contrepied. A l’inverse de ce qu’ils disent, ces gens sont installés : le martyrologue des pensées incorrectes, c’est un coup de génie marketing mais c’est désormais une vaste fumisterie, ils sont maintenant archi dominants » Les Inrocks, « Les squatteurs de médias », 11 juillet 2010 (...) « Après les «anti» et les «alter», voici les tenants de la «démondialisation» où se croisent l’extrême droite arc-boutée sur les frontières et la France d’avant ; des néo-colbertistes de la droite classique ; des souverainistes favorables à des barrières européennes ; un arc-en-ciel socialiste plus ou moins offensif ; une gauche de la gauche souhaitant lutter contre le dumping social, environnemental, fiscal dont se nourrit la mondialisation. (…) A tel point qu’elles sont reprises à droite, Nicolas Sarkozy plaidant avec vigueur pour une taxation des transactions financières, et à l’extrême droite avec Marine Le Pen qui espère récupérer par ce biais le vote des classes populaires. » Libération, « Arrogance », 7 avril 2011 « L’immigration arrive pourtant loin, très loin, dans la longue liste des sujets qui préoccupent vraiment les Français. Eux qui sont, de plus, largement favorables à ce que les étrangers votent aux élections locales. Mais ce sujet mineur passionne tellement Claude Guéant qu’il semblait important de noter que la xénophobie est désormais plus présente au sommet de l’Etat que dans le corps social. » Libération, « Indésirables », 29 novembre 2011

Sa nébuleuse Il est le meilleur ami du journaliste et animateur franco-marocain Ali Baddou. Il est membre du club Le Siècle. Plusieurs membres de ce cercle d’influence l’ont engagé durant sa carrière, d’Alexandre Bompard (Europe 1) à Édouard de Rothschild (Libération). Le conseil de surveillance du journal Libération est présidé par Anne Lauvergeon (également membre du Club Le Siècle), les actionnaires majoritaires étant Édouard de Rothschild (membre du Club Le Siècle), Carlo Caracciolo (cofondateur de La Repubblica) et Bruno Ledoux (directeur du groupe Colbert). (Depuis, on le sait, Libération a changé de mains. Chacun peut poursuivre sa propre enquête!))

Résumons : Le Siècle, des réseaux puissants, encore un « journaliste » naturellement promis

237 aux postes de décision et de direction. D'origine modeste, comme M. Barbier, M. Demorand a en tout cas fait la démonstration de sa capacité à conquérir les « bonnes places », et à soutenir le discours et l'argumentaire de l'oligarchie qui nous gouverne, ce qui paraît souvent aller de pair (!). Liberté, courage, lucidité ? On a plutôt l'impression d'une stratégie avisée, retorse, et gagnante, au moins sur le plan individuel. Pour les médias qui l'emploient à tour de rôle, son efficacité professionnelle peut être discutée. Mais quelle importance ? Son retour à Radio France montre que pour les vrais talents, il n'existe point de barrières infranchissables.

238 Conclusion

Au terme de ce petit tour dans le monde privilégié de quelques « prescripteurs » d'idées, d'idéologie (univoque l'idéologie), d' « évidences » bien orientées, dorés sur tranche comme il se doit, que chacun d'entre nous connaît tant on les voit, les aperçoit, tant ils sont cités, sollicités, des certitudes se font jour : Paris offre des lieux de connivence parfaits entre des gens de presse, et des représentants « autorisés » des mondes économique, financier et politique , qui de la sorte, dans un unanimisme apparent, s'instituent en groupes d'influence majeurs. Des événements jouent également ce rôle, telle la soirée fêtant les vingt ans de la revue de M. Bernard Henri Levy en présence du « tout Paris » et plus encore. Nous savons également que l'empreinte des Etats Unis et des puissances économiques est forte sur ces milieux via le club Aspen, les rencontres Bilderberg, ou la présence puissante des « Young leaders » à tous les niveaux de l'appareil d’État, dont nos « grands journalistes » font souvent partie. A eux les postes, les commandes, à eux les revenus élevés, à eux les honneurs des plateaux télévisés ou audio, etc... Ils sont à leur niveaux les « préfets de l'opinion », mais les préfets d'une France inféodée aux Etats- Unis (et donc à Bruxelles) et à ses priorités économiques et « sociétales », nous les appellerons sous toute réserve « agents d'influence », statut imprécis mais pertinent dont la loi n'interdit pas l'usage, et que les propriétaires privés des moyens dits d'information et l'Etat promeuvent, en gros, systématiquement. Il est licite de juger cette situation regrettable, voire insupportable pour ce qui est du fonctionnement de notre démocratie, mais tout autant, dans cette Europe atlantiste, de la qualifier de légitime, ce qui est bien le drame : quand la légitimité légale et idéologique, liée à l'imperium US, contrevient à ce que d'aucuns jugent comme une illégitimité morale, civique, ou comme une forfaiture, avec l'abandon de toute idée de l'intérêt national et de tout souci du respect des citoyens, instrumentalisés d'une manière éhontée, c'est que la fracture entre la société et ses élites ou supposées telles s'approfondit, surtout lorsque des « journalistes » fort bien payés prêchent les sacrifices et l'austérité toute honte bue à longueur d'année. Remarque enracinée dans le principe d'égalité qui est cher à l'auteur. Si les uns ont le droit de s'enrichir ou de défendre leur (haute) position sociale, cela ne devrait pas se faire au détriment des autres, qui ont moins, peu, ou rien, simple constat de bon sens (remarque irénique, certes...). Et si les uns (tous bénéficiaires confondus) s'enrichissent quand les autres s'appauvrissent, la relation de cause à effet peut paraître évidente et relève alors, selon toute apparence, d'une prédation en bande organisée. Jusqu'à (quelle?) preuve du contraire. On est donc sans doute en droit de parler, toujours sous réserve de la preuve du contraire, de captation des moyens d'information par l'oligarchie, qui sait devant la caméra prendre les traits souriants (ou crispés) de Mme Salamé, ou le ton professoral et apaisant de Mme Okrent. Ou encore le visage goguenard et sympathique (parfois) de M. Giesbert (etc...). Mais ces gens, de par l'exposition de leurs engagements, de par leurs partis pris idéologiques tranchés et de plus en plus reconnus, sont comme la grosse artillerie, qui, à l'instar des armées de type soviétique, peut un de ces jours passer de mode, pour cause d' « obsolescence », le rendement d'un tel déluge de partis pris et de propagande étant de toute évidence aujourd'hui décroissant si l'on en juge par ce qui émerge de la « toile ». Étant entendu que l'on parle de propagande quand un seul avis est diffusé au détriment de tous les autres. A force de faire connaître, via internet ou tout autre support leurs discours, leurs prises de position, leurs « fréquentations », bref, ce qu'ils sont vraiment, on pourrait dire les militants acharnés d'une cause, voire les patriciens d'un système oligarchique qu'ils défendent avec obstination et rage, ce qui n'est pas contradictoire, ils finiront par desservir cette dernière cause, et certains, qui ne sont pas nés

239 dans le cœur du monde oligarchique, risquent d'y perdre leur raison d'être, servir, et s'enrichir. On pense par exemple à quelque acteur médiatique au foulard rouge. Entre autres. Le journalisme stricto sensu tel qu'il est défini par la charte de 1971 n'étant souvent plus le coeur de la vie professionnelle de tant de « stars » offertes aux citoyens sous l'appellation à priori trompeuse « journalistes », ces dernières, du moins certaines d'entre elles, pourraient, si leur heure a passé, s'engager ouvertement en politique ou en technocratie, ou assumer officiellement leur fonction de communicants, leurs appuis, leur milieu, leur environnement social naturel ne manquant pas alors de leur ménager de bonnes places sures. Mais le diable étant, dit-on, dans les détails, c'est un système médiatique parallèle et moins connu, il vit discrètement à l'ombre de ces féodaux arrogants et omniscients, qui apparaît porteur de véritables et lourdes menaces potentielles, y compris le jour où serait réformé le monde de la presse, avec expulsion des propriétaires oligarques et libération idéologique des moyens publics d'information via par exemple la nomination de vrais professionnels attachés à la vertu d'une presse réellement libre parce que plurielle comme cela parfois était le cas il y a trente ou quarante ans (on peut toujours rêver). Il nous faut donc faire un détour, fût-il succinct, par les arcanes de la citadelle du « politiquement correct » où, confortablement installés, prospèrent des gens, telle une petite et indispensable noblesse provinciale d'ancien régime, dont le travail idéologique permanent est tout aussi nocif voire plus agressif encore que celui des grands barons du journalisme, mais certainement plus finement mis en œuvre, et par là plus difficile à décrypter car camouflé en faux pluralisme des opinions exprimées. Il convient d'évoquer des individus qui ne sont pas médiatiquement au premier plan, mais qui de par leurs fonctions, assument une responsabilité importante, voire essentielle, dans la diffusion des mêmes partis-pris idéologiques qui prévalent chez les « grands journalistes » aux « sourires plateaux » (de télévision). Car si certains « aristocrates du système médiatique » s'affichent sans complexe, d'autres, de moindre « noblesse », plus discrets, et peut-être plus efficaces sur la durée, œuvrent en toute quiétude sans pouvoir être précisément définis comme militants politiques. Ou, plus précisément, comme des soldats de l'idéologie dominante. Ces individus font de toute évidence une guerre déterminée à l'égalité, à la justice, au progrès social et à l'avenir souverain du pays. Ils sont les ennemis objectifs de l'intérêt général, tout comme ceux qui les emploient et les rétribuent, Etat (actuel) compris. Dans le cadre du service public d'information, largement payé par le budget de l'Etat, s'est par exemple créé peu à peu, à l'image de ce qu'offre le privé, un outil médiatique non plus voué à l'émancipation des esprits, mais à l'aliénation de ces derniers, au profit des pouvoirs en place, ou plus exactement du pouvoir économique et financier qui aujourd'hui tient partout les rênes dans le monde Occidental. Cet instrument de la démocratie qu'est la presse, ces cadres de la République, les journalistes, chargés en principe de défendre notre vie démocratique et de la renforcer en la nourrissant, s'attachent de toute évidence à imposer une idéologie unique, des explications du monde comme il va uniques, et à tuer dans l’œuf tout idée de contestation au nom d'une rationalité parfaitement partisane. Pour user d'un terme connu, on est en droit de les nommer « chiens de garde », mais pas seulement. Ce terme en effet est devenu partiellement inadéquat. Des chiens de garde aboient sottement quand l'idée étrangère (et dangereuse pour le job) se présente devant le portail. Les individus dont nous parlons portent et incarnent un discours qu'ils partagent de toute évidence, ils apparaissent comme des « activistes » politiques dont la déontologie journalistique n'est même plus un paravent.

240 Ils personnifient le pouvoir oligarchique, dont ils sont, au moins par les « valeurs » qu'ils véhiculent et imposent. Via leur talent souvent bien réel et leur sociabilité hors normes, ils en masquent la cruauté et l'inhumanité. Ils peuvent même pour certains, à l'occasion, donner la parole à des gens qui ne partagent pas leurs idées, voire les combattent, mais avec parcimonie bien entendu, et sans gfaire preuve d'une écoute impartiale, bien entendu. On aurait donc tort de les nommer « hommes de main » ou « mercenaires » car leurs responsabilités en la matière vont bien au-delà : ils sont pleinement impliqués à un niveau organique dans ce qui est une croisade des nantis contre ceux qui ne le sont pas. On appelait cela jadis la lutte des classes. Ils font un travail contraire à celui qui privilégierait les droits de l'homme au sens social et non sociétal du terme, à savoir informer, permettre une réflexion politique ouverte, éclairer les problématiques telles les inégalités, les dérives de la financiarisation etc... Seul un coup d'oeil sur leurs pratiques au quotidien, par exemple le choix des intervenants ou des éditorialistes quand ils sont producteurs d'émission, permet alors parfois de subodorer des choix idéologiques tranchés. Cette situation regrettable serait moyennement tolérable si ces excès, le choix univoque d'une ligne éditoriale, procédé contraire à toute déontologie digne de ce nom, ne concernaient pas aussi le service public. Chacun a droit à ses convictions, mais le devoir de réserve à ce titre pourrait prévaloir. Tel n'est apparemment pas le cas comme on l'a déjà constaté plus haut. La « commun decency » ne fait pas partie du cahier des charges du service public d'information. Sur quelques uns de ces gens là, en l'occurrence deux producteurs de France Culture, Marc Voinchet, devenu à la rentrée 2015 directeur de France Musique, et Philippe Meyer, auxquels l'auteur a prêté une attention particulière ayant été un auditeur attentif, internet ne propose rien de pertinent. Autant dire que cette absence d'informations précises peut alimenter une légitime curiosité. Il a donc fallu trouver un biais pour tenter d'approcher le « mystère » de deux de ces professionnels de grande qualité si parfaitement critiquables. Pourquoi France Culture ? Parce que c'est la radio que l'auteur écoute principalement, quand il écoute la radio. Examinons partiellement le choix des chroniqueurs.

1-Les Matins de France Culture : Ancien producteur et animateur, Marc Voinchet. M. Voinchet est remplacé depuis septembre 2015 par Guillaume Erner, transfuge de France Inter tandis que M. Voinchet a récupéré le poste de Directeur de france Musique. Intervenants façon Voinchet : Caroline Fourest, Philippe Manière, Caroline Eliacheff, Edwy Plenel, Hubert Védrine, Brice Couturier, Nicolas Martin, Matthieu Conquet, Sébastien Le Fol, Bertrand de Saint Vincent, Aude Lancelin, Jean Birnbaum, François Vey. Il semblerait que la « version Erner » ne compte plus M. Plenel. Mais le socle idéologique reste bien présent si l'on en juge à travers quelques exemples:

-Caroline Fourest (source OJIM, extraits) (...) "Caroline Fourest est diplômée de l’École des Hautes Études en Sciences sociales et titulaire d’un DESS en sciences politiques obtenu à l’Université de la Sorbonne.(...)

Collaborations Septembre 2013 : Invitée chez l’écrivain Marek Halter pour célébrer le Nouvel An juif (Roch

241 Hachana) avec notamment le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, deux ministres du gouvernement : Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des Affaires étrangères, chargée de la Francophonie et Michèle Delaunay, ministre déléguée auprès du ministre des Affaires sociales et de la Santé, chargée des personnes âgées et de l’Autonomie. « Le monde politique, de droite comme de gauche était bien représenté avec Harlem Désir, Premier secrétaire du Parti Socialiste, David Assouline, Anne Hidalgo, Pierre Aidenbaum, Bernard Kouchner, Valérie Pécresse, Frédéric Lefèbvre, Nicole Guedj ou encore Jean-Jacques Curiel du Parti radical. Parmi les nombreux représentants du monde de la presse : Ruth Elkrief, Christine Ockrent, Étienne Mougeotte Alain Chouffan du Nouvel Observateur et Judith Waintraub, du Figaro. On notait également la présence de Samuel Pisar et de son épouse, de Gérard et Claude Unger, de Caroline Fourest, de Gérard Miller, de François Weil, recteur de l’Académie de Paris, des professeurs Dominique Reynié et Philippe Théry, du producteur Tarek Ben Ammar, de Duc Co Minh, président du Club d’Initiative des Français d’Origine Asiatique, de Claude Barouch de l’UPJF et de son épouse, d’Henri Cukierman et de son épouse, de Macha Méril et de Chantal Thomass. Très entouré, l’imam de Drancy, Hassen Chalgoumi, récemment victime d’une agression en Tunisie, se déplaçait difficilement avec des béquilles. À ses côtés, très protecteur, le père Alain Maillard de la Morandais. Plusieurs responsables du CRIF étaient présents : Jean-Pierre Allali et Arié Bensemhoun, membres du Bureau Exécutif, Paul Rechter, conseiller du président Roger Cukierman, et Patrick Klugman, membre du Comité directeur. » (source : crif.org) (...) En mars 2006, elle a signé le « Manifeste des douze : Ensemble contre le nouveau totalitarisme » avec Ayaan Hirsi Ali, Philippe Val, Bernard-Henri Lévy, Irshad Manji, , Mehdi Mozaffari, Taslima Nasreen, Salman Rushdie, Antoine Sfeir et Ibn Warraq, manifeste qui dénonce l’islamisme comme « un nouveau totalitarisme ». (Texte complet : http://fr.wikipedia.org/wiki/Manifeste_des_douze). Avec Nora Barsali, Guy Bedos, Diam’s, Joey Starr, Benjamin Stora, Christiane Taubira et Lilian Thuram, elle co-signe la tribune « Abus policiers, crise de la citoyenneté », parue dans Le Monde du 18 avril 2007. En janvier 2012, elle signe l’appel « Respect pour les victimes du génocide arménien » lancé par Charles Aznavour, Robert Guédiguian, Serge Klarsfeld, Bernard-Henri Lévy et Michel Onfray. (...) À la fin 2013, elle participe à un séminaire de La Règle du Jeu, la revue littéraire de Bernard Henri- Lévy, pour protester contre la « banalisation du racisme ». La ministre de la justice Christiane Taubira est aussi présente. Sa nébuleuse La compagne de Caroline Fourest, Fiammetta Venner, est membre de Sexe et Race, une revue fondée par Rita Thalmann, de l’association féministe Les Maries-Jeannes, et signataire de la pétition Notre corps nous appartient. Caroline Fourest est membre du Conseil consultatif du Forum Anna Lindh dont l’« objectif est de contribuer au rapprochement des populations des deux côtés de la Méditerranée en vue d’améliorer le respect mutuel entre les cultures ». (http://www.euromedalex.org/fr/about). Caroline Fourest a été lauréate en 2010 du prix de la LICRA. Elle est une intervenante régulière aux journées d’été ou aux salons du livre organisés par cette ligue. (...)

242 Parti Socialiste : elle intervient régulièrement aux journées d’été du Parti Socialiste et du Mouvement des Jeunes Socialistes, proche du think tank « Terra Nova ». Terra Nova est une association française qui se définit comme laboratoire d'idées, proche de la gauche, fondé en février 2008. Il se veut progressiste et indépendant, mais est toutefois signalé comme proche du Parti socialiste 1

• Président : François Chérèque 4 . • Directeur général : Thierry Pech, ancien directeur de la rédaction du magazine Alternatives économiques et ancien directeur général des éditions du Seuil.

• Parmi les personnalités connues participant ou ayant participé à Terra Nova entre 2008 et 2010, se trouvent notamment5 : • Personnalités politiques • Personnalités issues de la société civile • Michel Rocard , président du conseil • Bernard Spitz , président de la d'orientation scientifique Fédération française des sociétés • Daniel Cohn-Bendit , député européen d’assurances (FFSA) de juillet 1994 à juillet 2014 • Anousheh Karvar , secrétaire • Bertrand Delanoë , maire de Paris de nationale de la CFDT mars 2001 à avril 2014 • Olivier Poivre d'Arvor , écrivain • Bruno Rebelle , ancien numéro 2 de • Julie Coudry , présidente de La Greenpeace International (Europe Manu Écologie) • Karim Zéribi , conseiller auprès de • Seybah Dagoma , députée de Paris (Parti la SNCF, président d'APC socialiste) recrutement • Universitaires : • Rokhaya Diallo , militante • Philippe Van Parijs , philosophe associative et fondatrice des • Bernard Manin , philosophe Indivisibles • Éric Maurin , économiste • Dirigeants d'entreprise • Philippe Aghion , économiste • Jean-Noël Tronc , président de la • Élie Cohen , économiste SACEM • Daniel Cohen , économiste • Matthieu Pigasse , codirecteur • Robert Castel , sociologue général délégué de la banque • Michel Wieviorka , sociologue Lazard en France et vice-président • Patrick Weil , sociologue de Lazard en Europe, actionnaire du journal Le Monde et du Huffington • Olivier Duhamel , constitutionnaliste Post. • Jean Peyrelevade , ancien président du Crédit lyonnais, de l'UAP et de Suez • Denis Olivennes , directeur de Europe 1 • Benoît Thieulin , directeur de l'agence La Netscouade et président du Conseil national du numérique

• Personnalités internationales • Amartya Sen , économiste • Anthony Giddens , sociologue • Joaquin Almunia , commissaire européen

243 • Francesco Rutelli , vice-président du Parti démocrate italien et ancien maire de Rome.

(...)

Ils ont dit « Selon moi, Caroline Fourest est au débat intellectuel ce qu’est Marion Jones à l’athlétisme. L’apparence est parfaite, les performances exceptionnelles. Mais heureusement pour Caroline Fourest que le dépistage des “faussaires” est moins bien organisé que les contrôles antidopages. » Pascal Boniface, Les intellectuels faussaires : le triomphe médiatique des experts en mensonge, Paris, Pocket, 2011. « Caroline Fourest, rédactrice en chef de la revue Prochoix et co-auteure, avec Fiammetta Venner d’un fort mauvais livre sur “les intégrismes religieux”, est désormais fameuse pour sa remarquable capacité de mensonge. Certains la surnomment même “la Marie Léonie de l’IMA”, depuis qu’elle a inventé de toutes pièces un “traquenard” et une agression “raciste, sexiste et homophobe” organisés contre sa personne et celle de sa collaboratrice Fiammetta Venner par l’IMA (Institut du Monde Arabe) et le Hezbollah ! » Pierre Tevanian, « Sœur Caroline est de retour ». « Nous, sous-signées, ayant assisté au “ Café littéraire ” du 31 mars, qui accueillait Caroline Fourest et Fiammetta Venner pour échanger autour de leur livre Tirs croisés, tenons à réagir à la campagne odieuse que les deux auteures mènent sur leur site internet “ Prochoix ” contre l’institution qui les a invitées, sous prétexte que cette invitation a été l’occasion d’une mise en cause de leur travail par plusieurs personnes du public. Selon les versions de Tewfik Allal, Jean- François Chalot et Fiammetta Venner, actuellement diffusés par le site Prochoix, les deux auteures ont subi, de la part d’un “petit commando”, des “attaques” d’une “agressivité rare ”, des “invectives”, des “violences”, des “véritables menaces physiques”, au point que les deux auteures ont “dû sortir sous escorte policière”. Il y aurait eu aussi des “injures racistes, sexistes et homophobes”. Nous tenons à affirmer très clairement que chacune de ces allégations est fausse. (…) Nous nous demandons s’il s’agit d’un délire ou si les auteurs de telles contre-vérités mentent délibérément et froidement, mais en tout état de cause nous certifions qu’il n’y a eu dans ce débat ni injure, ni insulte, ni attaque personnelle, ni menace, ni intimidation. Les critiques ont certes été vives, mais elles visaient des passages du livre des deux auteures invitées, qui ont été cités, le plus souvent en indiquant les pages en question. La personne de Caroline Fourest et celle de Fiammetta Venner n’ont à aucun moment été mises en cause, plusieurs intervenants prenant même la peine de distinguer entre les intentions, louables, des deux auteures, et les effets pervers de leurs écrits, qui pouvaient leur avoir échappé. » Anne-Charlotte Dommartin, Dhaouia Assoul, Djamila Bechoua, Monette Guyard, « Une campagne honteuse ». « Elle dénonce « des associations qui demandent des gymnases pour organiser des tournois de basket réservés aux femmes, voilées, pour en plus lever des fonds pour le Hamas. », 4e Cérémonie des Y’A BON AWARDS 2012 pour le prix « Les Experts Chronikers ». « Petite piqûre de rappel : il y a quelques années, Frédéric Taddeï a invité Caroline Fourest à débattre avec Tariq Ramadan. C’était l’époque où Taddeï avait bon goût et savait choisir ses invités… Depuis, Caroline Fourest s’est forgée une cuirasse de commissaire du peuple, de flic de la

244 pensée. Son fond de commerce, c’est la laïcité, la lutte contre l’extrême-droite, le racisme, l’intégrisme et pas mal d’autres choses en isme. Elle a table ouverte sur toutes les chaînes, dans toutes les radios et, comme Pascale Clark ou Rokhaya Diallo, distribue les bons points, montre la voie, organise la chasse aux sorcières. Si tu ne penses pas comme elle, tu es un fondamentaliste, un facho ou juste un salaud. En de pas si lointains temps bénis, cette dialectique permettait au moins de récupérer l’appart d’un voisin… et de lui faire gagner des vacances longues durées sous le doux soleil sibérien. Il suffisait d’en toucher un mot au Petit père des Peuples… » Marc Godin, Bakchich, janvier 2014. -Philippe Manière (sources Wikipedia) Philippe Manière, né le 15 novembre 1961 à Dijon en Côte d'Or, est un journaliste et essayiste libéral français. Il a été journaliste pendant vingt ans, directeur général du think tank libéral l'Institut Montaigne (L'Institut Montaigne, créé en 2000 par Claude Bébéar, est un think tank ("réservoir d'idées") français dont l'objectif est de concilier les enjeux de compétitivité et de cohésion sociale. Il est classé à droite par certains, sans attache partisane pour d'autres. Il est favorable à la construction européenne et d'obédience libérale, c'est-à-dire favorable à l’économie de marché. Basé à Paris, il regroupe des cadres d'entreprises, de hauts-fonctionnaires, des universitaires et des représentants de la société civile. Comité directeur Organe décisionnel, composé à 79 % d'hommes, qui s'assure de la cohérence des publications et de la qualité scientifique et éditoriale des travaux :

• président : Claude Bébéar, président d'honneur, groupe Axa • président d'honneur : Bernard de La Rochefoucauld11, fondateur, Institut La Boétie • vice-président et trésorier : Henri Lachmann, ancien Président, Schneider Electric • Emmanuelle Barbara, associée-gérante, August & Debouzy • Nicolas Baverez , économiste, avocat • Jacques Bentz12, président, Tecnet Participations • Mireille Faugère , conseillère maître à la Cour des comptes • Christian Forestier 13 , ancien recteur • Marwan Lahoud, directeur général délégué, Airbus Group • Natalie Rastoin , directrice générale, Ogilvy France et Présidente, Ogilvy One • Jean-Paul Tran Thiet14, avocat associé, White & Case • Arnaud Vaissié, PDG, International SOS, président de la chambre de commerce française de Grande-Bretagne • Philippe Wahl , président-directeur général, Groupe La Poste • Lionel Zinsou , président, PAI partners ) (...) Enfant de cadre dijonnais, diplômé de l'ESSEC et titulaire d'une maîtrise en droit des affaires de l'Université Paris II-Panthéon-Assas, il débute sa carrière de journaliste en 1984 en tant que responsable de la rubrique Finances au Quotidien de Paris puis, à partir de 1989, il prend en charge la rubrique Argent du Nouvel Économiste et la couverture de la Bourse de Paris à Europe 1. Il entre en 1990 à la rédaction du Point en tant que journaliste, puis en tant qu'éditorialiste économique (1992-2001) et rédacteur en chef adjoint (1994-1995) puis en chef (1995-2001). Il est alors également responsable de l'édition Affaires du Point réalisée avec Business Week. Il anime les Mardis de l'ESSEC de 1995 à 2001 . Durant cette période, il propose durant une saison une chronique économique quotidienne sur Europe 1 en 1997. De 1994 à 1996, il participe au programme Young leaders de la Fondation franco-américaine 1 . En 1999, il bénéficie d'une bourse de la Woodrow Wilson Foundation lui permettant d'effectuer un

245 séjour à Grinnell College (Iowa) et, en 2001, il est sélectionné pour "un mois" de résidence au centre de Bellagio (Italie) de la Rockefeller Foundation. En 2001, il devient directeur de la rédaction de La Lettre de l'Expansion et rédacteur en chef à L'Expansion tout en dirigeant le Club de l'Expansion à partir de 2002. Il a également été présentateur puis chroniqueur sur BFM de 2003 à 2010. Il tient une chronique chaque mardi dans la matinale de France Culture. Philippe Manière a quitté la presse en mai 2004 pour devenir le directeur général de l’Institut Montaigne, un laboratoire d’idées créé et présidé par Claude Bébéar 2 . Il dirigera l'Institut Montaigne durant 5 ans. Il continue cependant, pendant cette période, de tenir différentes chroniques de politiques publiques : de 2004 à 2008 dans Enjeux-Les Échos, puis dans Marianne de 2008 à 2009, et il anime entre 2003 et 2007 Les grands débats sur la radio BFM le mardi matin (...) Il est ou a été membre des commissions Pochard sur la modernisation de la condition enseignante (2007-2008), économique de la Nation (depuis 2007), Philip sur les nouveaux partenariats Universités-Grandes écoles (2008), et siège au conseil d'administration de la French-American Foundation France et de Humanity in Action (France) (depuis 2008) . Il est également membre de la la Commission Économique de la Nation. Le 2 octobre 2008, il a été fait chevalier de la Légion d'honneur par Philippe Tesson (sur proposition de Laurent Wauquiez). Le 5 janvier 2009, il quitte la direction de l'Institut Montaigne. (...) -Hubert Védrine, (source Wikipedia, extraits) né le 31 juillet 1947 à Saint-Silvain-Bellegarde (Creuse), est un diplomate et homme politique français membre du Parti socialiste (PS). Après avoir travaillé avec le président François Mitterrand, il a été nommé au Conseil d'État. Hubert Védrine est ensuite devenu ministre des Affaires étrangères sous le gouvernement Jospin, de 1997 à 2002. Il est consultant depuis 2003. (...) Depuis 2005, il est administrateur du groupe LVMH, qui appartient à Bernard Arnault 4 . Hubert Védrine est aussi membre du conseil d'administration de l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS)5 et depuis juin 2006 du Conseil d'orientation de l'Institut Aspen France. (sélectionné par l'auteur)

-Brice Couturier

Au début des années 2000, il est rédacteur en chef adjoint du mensuel Le Monde des débats (en 2001) et critique musical de Marianne. Il a été maître de conférence associé au Centre Hannah Arendt de géopolitique européenne à l'université de Marne-la-Vallée de 2001 à 2008. Sur France Culture en 2002 et 2003, il anime une émission de débats : Contre-Expertise4. À partir de décembre 2006, il est le producteur de l'émission de France Culture Du grain à moudre, avec Julie Clarini jusqu'en 2010, puis aux côtés de Louise Tourret de janvier à juillet 2011. Depuis septembre 2011, il est chroniqueur dans les Matins de France Culture. Brice Couturier appartient au comité de rédaction de la revue Le Meilleur des Mondes depuis sa création. Il est l'auteur d'articles dans les revues Communisme et Esprit. Les chroniques matinales de Brice Couturier sur France Culture font régulièrement l'objet de

246 critiques de la part de la gauche, en particulier concernant les positions économiques « néo- libérales » qu'il professe au quotidien en l'absence de tout contradicteur.

Le Meilleur des mondes est une revue d'opinion trimestrielle, abordant l'actualité de la politique internationale. Créée en 2006 par un groupe d'intellectuels, de journalistes, de philosophes et d'historiens français, la revue est un prolongement du Cercle de l'Oratoire fondé en 2001 à Paris. Elle est éditée par les éditions Denoël ; et est dirigée par le journaliste Michel Taubmann. Tout comme le groupe de pensée du Cercle de l'Oratoire, elle représente le néo- conservatisme français. Son dernier numéro (9) paraît à l'automne 2008, date à laquelle elle cesse ses publications. (...) Le noyau dur de ce groupe d'intellectuels s'est constitué après le choc provoqué par les attentats du 11 septembre 2001. Autour de Michel Taubmann, responsable alors d'Arte-Info, à Paris, et de son épouse Florence, pasteur du temple de l'Oratoire du Louvre, des réunions puis des conférences publiques ont été organisées dans l'une des salles dépendant du temple. Le groupe s'est dès lors, peu à peu, nommé le Cercle de l'Oratoire.

Soutien à la Politique étrangère des États-Unis Le groupe multiplie les interventions publiques, notamment pour soutenir la Politique étrangère des États-Unis après l'attaque du 11 septembre. … On le retrouve à présent (?) dans le Comité Orwell, sur lequel nous reviendrons plus loin. Il ne serait plus aux Matins de France Culture à la rentrée 2016, mais resterait dans la grille de la station. Ce comité se présente comme un think tank souverainiste. Que penser de ce qui peut apparaître comme un virage à 180 degrés ? Mystère. L'avenir proche décantera tout cela, étant entendu que les convictions peuvent évoluer sans que cela puisse être considéré comme négatif. Dans certains cas, la capacité a prendre en compte une réalité qui change est la marque d'une intelligence curieuse et bienvenue. A suivre donc. Nous revenons plus loin sur le comité Orwell en abordant l'intéressante démarche de Natacha Polony. En voici une expression accessible sur internet :

" Il faut tout refuser aux musulmans comme nation et tout leur accorder comme individus Article écrit par Guillaume Bigot et publié sur Le Figaro Vox le 26 juillet 2016. Alors qu’un prêtre a été égorgé par des islamistes à Saint-Etienne-du-Rouvray, Guillaume Bigot voit dans la litanie des massacres depuis un an les ferments d’une guerre civile. Il appelle nos dirigeant à retrouver le sens de l’Histoire. Dès sa fondation par Hugues Capet, le royaume de France fut travaillé par l’unité. La France n’est pas innée, elle fut acquise par les armes. Notre pays est tout entier un projet d’unification. Ce projet a réussi, il est devenu une République « indivisible », cadre juridique d’un peuple toujours prompt à se déchirer. Mais cette « volonté de vivre ensemble » qui a forgé la France n’est pas un « vivre ensemble ». La France est redevenue une volonté forte qu’il n’a jamais été bon de contrarier. Notre peuple est artificiel et ultra politique. En son sein, les divisions sont potentiellement inflammables. Les Français tolèrent mal la diversité de communautés, difficilement compatibles avec l’idéal et la dynamique nationale de l’unité. Nos élites n’aperçoivent pas le danger. Profondément américanisés, nos dirigeants ne comprennent pas le risque. La grande nation n’a jamais été homogène à la manière de l’Allemagne qui fut peuple avant de devenir État. La France ne fut jamais mono ethnique car ses tribus « de souche » aussi diverses que les migrants venus l’augmenter depuis un siècle. Les Français exogames ne veulent pas vivre « chacun chez soi» mais «unis chez eux. » À l’inverse, les Anglo- saxons ne sont guère incommodés par le voile islamique car un «wasp n’épouse pas facilement une pakistanaise ou une nigériane. Cet idéalisme naïf (« nos ancêtres les gaulois »), ce goût de l’unité abstraite (« les jardins à la française, cartésianisme, dissertation.. ») peuvent se muer en redoutable intolérance. La France est terre de mélange mais d’un mélange qui peut s’avérer détonnant. Notre fraternité peut dégénérer en férocité (les « fré-roces » disait Lacan). Après Charlie, après le Bataclan, après Nice et après ce qui viendra après, il est vital de l’empêcher. Ce danger est d’autant plus ignoré par notre classe dirigeante actuelle qui semble oublier que la France, contrairement aux Etats-Unis, notre pays n’est pas qu’une terre d’immigration. Les indigènes y restent majoritaires. Par une

247 singulière inversion, l’expression « indigènes de la République » désigne précisément les enfants des allogènes. Nous sommes dans le déni. Dans ce fantasme d’Etats-Unis, nous sommes invités à respecter les différences et l’identité de toute les communautés. Toutes sauf une… la communauté «gauloise» qui, elle, est priée de s’effacer en ruminant ses fautes (Vichy ; torture en Algérie ; etc.). Après avoir entretenu et diffusé l’auto-flagellation nationale pendant trente ans, les programmes scolaires mais aussi les médias et certains politiques ont engendré une minorité d’aliénés qui ne savent plus qui ils sont et qui se haïssent à force de ne plus pouvoir s’admirer. Jusqu’à la tragédie récente, la majorité des Français eux-mêmes n’était plus très sûr d’avoir moralement le droit de brandir leur drapeau. Certes, des Français ont commis des crimes imprescriptibles. Bien sûr, la colonisation a parfois su se montrer odieuse. Se comparer, c’est néanmoins se consoler et cesser d’expier. Jamais la France n’aura sur la conscience l‘irréparable commis par les États-Unis sur les indiens ou ne portera l’écrasante culpabilité d’une Allemagne dont le «grand conquérant» s’est suicidé, comme il avait vécu, ignominieusement, dans un bunker. Notre pays n’a pas non plus à ressasser le remords qui rongera un jour l’âme russe ou chinoise lorsque le souvenir des goulags ou de la révolution culturelle remontera à la surface de leur conscience nationale. Nos classes dirigeantes aspirent à l’universalisme juridique des Etats-Unis mais oublient qu’aux Etats-Unis d’Amérique, un patriotisme puissant soude les communautés. Tous les enfants y plaident allégeance à la bannière étoilée. Nouveau hic, le drapeau de l’avenir que brandissent nos élites n’est plus le tricolore mais celui d’une Europe sans âme, ni substance politique et dont les principales réalités sont monétaires (l’Euro, la PAC ou encore les fonds structurels). Personne n’ira mourir pour Bruxelles pour la même raison que personne ne se fera trouer la peau pour les fonds de pension. Circonstance aggravante, la globalisation est censée nanifier notre patrie. Israël, la Corée ou Singapour semblent pourtant de petites nations pleines d’allant et ceci en pleine mondialisation. Fort heureusement, la « grande nation » reste une réalité, encore engourdie mais pleine d’avenir. Une réalité qui a peu de rapport avec ce «vivre ensemble» que l’on veut nous imposer. Si l’on ne rompt pas avec ce passé qui plombe (« la repentance ») et avec cet avenir qui dissout (« la France est notre patrie, l’Europe est notre avenir »), nous allons nous réveiller dans un présent fracturé. En France, aucune minorité ne s’est jamais dressée contre la majorité sans en payer le prix. Et ce prix fut souvent celui du sang (Huguenots, Vendéens, nobles, collabos encore en 1940). C’est pourquoi, il ne faut plus jamais parler des « populations musulmanes » pour désigner nos compatriotes de confession musulmane mais d’un peuple, le nôtre dont ils doivent désormais faire partie intégrante. « Il faut tout leur refuser comme nation et tout leur accorder comme individus. Il faut qu’ils ne fassent dans l’Etat ni un corps politique ni un ordre. Il faut qu’ils soient individuellement citoyens. » Le programme de Clermont Tonnerre à l’égard des Juifs, celui de la Révolution, reste d’une brûlante actualité. C’est pourquoi, il faut assimiler les musulmans. C’est aussi pourquoi, il faudra aussi tenir à leur égard la promesse de la fraternité et de l’égalité. Il est urgent de faire l’amalgame, seul moyen pour prévenir de redoutables amalgames. »

--Edwy Plenel :

Bien qu'absent de la nouvelle équipe depuis septembre 2015, faisons l'honneur à M. Plenel d'un détour biographique et professionnel. Contacté par l'auteur pour connaître la raison de sa « disparition » du lot des chroniqueurs de l'émission, M. Plenel a précisé qu'il a décidé d'interrompre sa collaboration avec Les Matins pour se consacrer pleinement à Médiapart. Dans la mesure où Médiapart a une place spécifique dans le panorama de la presse française, on doit avant d'évoquer M. Plenel, via un portrait de l'OJIM, accorder une attention spécifique à ce journal de conception originale, porteur à minima d'une logique économique pertinente en ces temps de grave crise de la presse.

248 Précisons que, en réponse à l'auteur, qui l'avait informé de l'utilisation du travail de l'OJIM le concernant, M. Plenel dit de l'OJIM « Elle est en effet très partisane, l'OJIM, sous son apparence de neutralité, étant une officine liée à l'extrême droite. Voir par exemple ce qu'en dit un site plus ancien de critiques des médias: http://www.acrimed.org/L-extreme-droite-a-l-assaut-des-medias- et-de-la-critique-des-medias »- (Note de l'auteur : que chacun se fasse une opinion. Celle de M. Plenel n'est pas celle de l'auteur de ces lignes qui privilégie la qualité du travail fourni plutôt que les étiquettes dans ce cas précis infamante sous la plume de M. Plenel. Du reste, M. Plenel a-t-il mis en cause officiellement ce portrait comme un travail tendancieux visant à lui nuire? Pas à notre connaissance. Plus généralement, l'OJIM n'a pas fait l'objet d'une remise en cause officielle et à charge en ce qui concerne son travail méticuleux qui pourtant a donné lieu à des portraits de « grands journalistes » parfois assez durs, et cela créditerait à soi seul son sérieux). Il importe donc de faire une ou deux remarques à propos de la ligne éditoriale de Médiapart qui, à priori, n'est pas seulement celle de M. Plenel. Les co-fondateurs de Médiapart et la rédaction ont sans doute leur mot à dire sur le sujet. Ce journal affiche à la fois un regard extrêmement critique quand il s'agit de la Justice (par exemple à propos de M. Tapie ou de M. Sarkozy, en cette fin d'été notamment sous la plume de Laurent Mauduit), des mauvais coups de l'Etat (« loi sécurité ») et tient souvent un discours « de gauche », parfois oppositionnel quant à la politique de M. Hollande, même si il est de ceux qui évoque une baisse du chômage au moins problématique dans les faits sinon dans les chiffres. Et parallèlement, il est russophobe à l'extrême, « anti islamophobe », islamophile, les relations de M. Plenel avec M. Tarik Ramadan sont largement connues, donc très logiquement multiculturaliste, disons clairement communautariste, et pour préciser le tout, « droitdelhommiste », néologisme utilisé ici à dessin. (Lire le dernier billet de M. Plenel en cette mi-août 2016 à propos du Burkini, qui a provoqué pas mal de commentaires critiques dans les pages mêmes de Médiapart). Médiapart milite ainsi pour l'accueil des « réfugiés » (« Ouvrons l'Europe ») et pour le mélange et la créolisation de la société française comme la plupart de ses grands confrères de presse écrite, qui s'inscrivent de la sorte dans les thèmes récurrents du néolibéralisme et de ses agents, dont M. Soros peut passer pour archétypal. Est-ce le cas de Médiapart ? On peut souvent en avoir l'impression. Médiapart est donc apparemment à la charnière idéologique du grand combat qui se dessine pour 2017 entre la défense du social et la mise en avant du sociétal, le premier combat étant traditionnellement celui de la gauche d' « avant », qui s'adossait au concept de lutte des classes, le second s'inscrivant dans la logique « libérale libertaire » à la mode PS (Terra Nova) qui est celle de l'UE et des courants idéologiques qui portent la mondialisation version US. Le passage de M. Plenel au Monde, ainsi que sa prédilection pour le multiculturalisme et la défense acharnée du fait musulman dans notre pays pourrait laisser penser que l'homme ayant eu de grandes responsabilités dans le grand quotidien dit « de référence », poursuit un combat idéologique de « centre droit » dirait-on par courtoisie, adapté à l'actualité et à la doxa de l'époque, mais en revendiquant un ancrage à gauche. Ses prises de position actuelles autorisent à évoquer une telle éventualité. Lui seul par son travail dans la période des présidentielles pourra nous dire où il se situe vraiment, ce qui bien entendu importe grandement en ce qui concerne la ligne éditoriale de Médiapart. A contrario, le travail de M. Mauduit l'un des co-fondateurs avec M. Plenel, de Médiapart s'inscrit dans une opposition résolue aux magouilles multi-étages qui caractérisent notre vie politique. Il reste que Médiapart s'associe souvent en tant que journal aux lubies néolibérales dites « bobo » sans pour autant , même quand le journal prend la défense des salariés en lutte, éclairer toujours réellement ses lecteurs sur les racines des difficultés sociales qu'affronte notre pays. Peut-on lui

249 appliquer la formule (retranscription approximative de Bossuet) « Dieu se moque des prières de ceux qui chérissent les causes de leur malheur » ? 2017 nous dira donc si Médiapart a en réalité une stratégie proche de celle des milieux dirigeants et « européistes », ce qui est plausible, ou bien si ce journal sera capable de déboucher sur un un discours cohérent, original, porteur de perspectives acceptables susceptibles de nourrir un vrai débat. En tout état de cause, s'annonçant comme un média de gauche, Médiapart devra bien prouver à ses lecteurs la réalité de son engagement. Voici donc des extraits de l'article de l'OJIM concernant M. Plenel : « Trotskyste un jour, trotskyste toujours ? (source Ojim, extraits) « Le métissage, c’est une politique. Et, plus précisément, une politique de résistance »

« Il faudra tout de même qu’on sache qui est vraiment ce monsieur Plenel ». Cette phrase de François Mitterrand, cité par Pierre Péan et Philippe Cohen dans leur enquête La Face cachée du Monde, illustre tout le « mythe », qui s’est construit autour d’Edwy Plenel, construction à laquelle il a lui-même participé. Journaliste emblématique des années Mitterrand, mis sur écoute par l’Elysée dans l’affaire des Irlandais de Vincennes, Edwy Plenel est resté pendant dix ans le maître du Monde, avec Alain Minc et Jean-Marie Colombani. Bien qu’affaibli, en 2003, par les révélations de Pierre Péan et de Philippe Cohen, il a poursuivi sa carrière de redresseur de torts autoproclamé et de journaliste d’investigation aux méthodes contestées. Journaliste brillant pour les uns, revanchard militant peu soucieux de la vérité pour les autres, Edwy Plenel aura quoi qu’il en soit marqué le journalisme de ces trois dernières décennies. Le seul diplôme d’Hervé-Edwy Plenel, son vrai nom, né en 1952, est son baccalauréat, ce dernier ayant refusé de se présenter aux examens d’entrée à l’IEP Paris.

Parcours professionnel Il est difficile de dissocier, du moins en son début, le parcours professionnel d’Edwy Plenel de son parcours politique. Son engagement politique à la Ligue Communiste Révolutionnaire et sa profession de journaliste sont en effet intimement liées, puisqu’Edwy Plenel commence à écrire sous le pseudonyme de Krasny, dès 1969. (...) Dans Rouge, ses premiers articles concernent la question coloniale. (...) Pour Edwy Plenel, l’année 1980 marque un tournant. En quittant officiellement la LCR, Edwy Plenel cesse définitivement de n’être qu’un « camarade rédacteur » pour devenir réellement journaliste. Il entre donc au Matin de Paris et pige, à l’occasion, pour Le Monde de l’éducation. Il devient également président de l’Association des journalistes jeunesse et éducation. Ce n’est qu’en fin d’année, après l’été, qu’il entre au service éducation du Monde. Il ne quittera le journal que 25 ans plus tard. (...) Il suit pour le quotidien les grandes affaires qui marquent les années Mitterrand. Comme le dit Emmanuel Lemieux, « de l’affaire des Irlandais de Vincennes à l’attentat des services secrets français sur le Raimbow Warrior, Plenel se fit une signature dans le club des journalistes d’investigation, aux ego détestables et aux mœurs décriés » (Technikart n°69, février 2003). C’est d’ailleurs durant l’affaire des Irlandais de Vincennes, qu’Edwy Plenel est mis sur écoute, sur

250 ordre de l’Élysée. Cette mise sur écoute, ainsi que la haine réciproque des deux personnages, Mitterrand et lui, participeront largement au « mythe », soigneusement entretenu, qui entoure Edwy Plenel. Durant l’été 1991, Edwy Plenel signe un article sous le titre Un scandale à Panama. C’est son raté le plus célèbre, puisqu’il accuse le parti socialiste d’avoir touché, notamment pour la campagne présidentielle de 1988, de l’argent du général Noriega, dictateur du Panama. La source d’Edwy Plenel était fausse. Selon Pierre Péan et Philippe Cohen, Edwy Plenel ne s’est jamais réellement excusé d’avoir ainsi désinformé ses lecteurs. En 1992, dans La Part d’Ombre, Edwy Plenel « démonte le système secret mitterrandien qui double la vie politique française depuis 1981 », comme le dit Patrick Eveno (Le journal Le Monde, une histoire d’indépendance, Odile Jacob, 2001). En 1993, Edwy Plenel, à la suite du Canard Enchaîne, consacre plusieurs de ses articles, dans Le Monde, au fameux prêt sans intérêt obtenu par Pierre Bérégovoy, alors premier ministre, auprès de Roger-Patrice Pelat, pour l’achat d’un appartement, prêt dont on sait aujourd’hui qu’il n’était que la partie émergée d’un iceberg d’affairisme et de corruption (Jacques Follorou, Le dernier secret, 2008). La campagne est violente et se terminera par le suicide de l’homme politique. C’est à l’occasion des funérailles de son ancien premier ministre que François Mitterrand, dans un discours resté célèbre, dénoncera les journalistes : « toutes les explications du monde ne justifieront pas qu’on ait pu livrer aux chiens l’honneur d’un homme, et finalement sa vie ». En juin 1994, Edwy Plenel répondra à François Mitterrand, en publiant Un temps de chien, (Stock), en référence directe aux paroles du président de la République. C’est durant cette même année 1994, que le trio Minc, Colombani, Plenel prend en main les destinées du journal. Cet épisode est largement décrit par Pierre Péan et Philippe Cohen dans La Face cachée du Monde. Rédacteur en chef du Monde, en mars 1994, Edwy Plenel devient adjoint au directeur de la rédaction en septembre de la même année. En avril 1995, il reçoit le titre de directeur adjoint de la rédaction, avant d’en prendre, pour presque dix ans, la direction (...) L’absence de diplôme d’Edwy Plenel ne l’empêche pas d’être nommé, en 2006, professeur associé à l’Université de Montepellier (UFR droit et sciences politiques). Il enseigne également à l’université de Neufchâtel. En 2007, Edwy Plenel annonce un projet de site d’information et d’investigation participatif sur internet. Ce sera Mediapart, qui ouvre le 16 mars 2008. Pour cela, le journaliste réussit à lever quatre millions d’euros. Mediapart entend « inventer un nouveau partenariat journaliste-lecteur ». Pour cela, le site annonce vouloir « fortement améliorer l’écriture plurimédia », « réinventer des traitements journalistiques » et réserver à ses lecteurs « des surprises ». (...) En 2010, Mediapart se fait remarquer par ses révélations et son suivi de l’affaire Bettencourt, montrant des liens entre Eric Woerth, alors ministre du budget, la milliardaire Liliane Bettencourt et le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy. (...) En octobre 2009, Edwy Plenel est à l’origine, avec les sites @rrêt sur images, Bakchich, Indigo Publications, Rue89, Slate.fr et Terra Eco du SPIIL, du syndicat de la presse en ligne, qui compte aujourd’hui, environ 80 membres.

251 (...)

Il a dit « Pour nous, au contraire, il ne s’agit pas de réformer l’école, de l’améliorer, de la démocratiser, car, tout simplement, c’est un objectif utopique, irréalisable : l’école est par essence, par nature, par origine un appareil de sélection sociale, de diffusion de l’idéologie bourgeoise. Cette école-là, elle n’est pas amendable, il faudra la détruire », Rouge hebdomadaire, 29 mars 1974. « Notre fonction première n’est pas de rassurer les esprits et d’apaiser les consciences, mais au contraire d’éveiller et de stimuler ». Un temps de chien, Paris, Stock, 1994.(...) (...) « Le métissage, ce n’est pas une fusion, l’addition d’un et d’un, la rencontre entre deux identités dans l’illusion de leurs puretés originelles, encore moins un croisement d’espèces et de genres où la biologie aura sa part. Non, le métissage, c’est une politique. Et, plus précisément, une politique de résistance ». La découverte du Monde, Stock, 2002 « Le trotskisme comme expérience et comme héritage fait à jamais partie de mon identité, non pas comme un programme ou un projet, mais comme un état d’esprit, une veille critique faite de décalage et d’acuités, de défaites et de fidélités ». Secrets de Jeunesse, Stock 2001 « Les médias sont naturellement, majoritairement suivistes, moutonniers, conformistes », entretien avec Oumma.tv, 17 septembre 2011 « La chance de la France, c’est justement ce brassage, ce mélange. C’est cette créolisation du monde qui fait que les identités ne s’annulent pas les unes et les autres, ne se dissolvent pas, qu’elles vivent, qu’elles se fécondent, qu’elles se rencontrent, qu’elles se croisent, qu’elles se respectent », idem. (...) « Cette jeunesse n’a-t-elle pas, elle aussi, des idéaux, des principes et des valeurs ? N’est-elle pas, autant que vous et moi, concernée par le monde, ses drames et ses injustices ? Par exemple, comment pouvez-vous ne pas prendre en compte cette part d’idéal, fût-il ensuite dévoyé, qui pousse un jeune de nos villes à partir combattre en Syrie contre un régime dictatorial et criminel que vous- même, François Hollande, avez imprudemment appelé à punir il y a tout juste un an ? Est-ce si compliqué de savoir distinguer ce qui est de l’ordre de l’idéalisme juvénile et ce qui relève de la menace terroriste, au lieu de tout criminaliser en bloc en désignant indistinctement des djihadistes ? » Lettre ouverte à François Hollande, Mediapart , 23 juillet 2014. « C’est une chance pour la France d’être aujourd’hui le premier pays musulman d’Europe », 20minutes.fr, 19 septembre 2014 « Cette façon d’agiter la querelle religieuse, de stigmatiser l’islam, de s’en prendre à ses symboles : le vêtement, le voile, le halal, les mosquées, est contraire au véritable esprit de la loi sur la laïcité, qui reconnaît les cultures minoritaires (…) Ce “laïcisme” est le Cheval de Troie de l’islamophobie, il est à la laïcité ce que l’intégrisme est à la religion. Il a une similitude avec l’antisémitisme : sous prétexte de ce sectarisme laïc, on installe l’habitude d’une discrimination et d’une stigmatisation », idem. (...) « Au pas de charge, Janvier 2015 s’est transformé en Septembre 2001 : l’occasion terroriste qui

252 fait le larron sécuritaire. Le projet de loi relatif au renseignement marque une rupture sans précédent non seulement dans l’histoire politique de la gauche du demi-siècle écoulé mais aussi pour l’avenir de notre démocratie, quels qu’en soient les gouvernants demain : sans consulter ni écouter la société, sans l’entendre alors que la protestation de ses acteurs citoyens est générale, une loi bâclée et précipitée, votée dans l’urgence, risque d’offrir au pouvoir exécutif, via les services secrets et les techniques numériques, un champ d’arbitraire infini dans le contrôle des individus, de leurs communications, de leurs fréquentations, de leurs convictions, de leurs engagements, de leurs curiosités », Mediapart, 29 avril 2015. (...) Nébuleuse LCR : Daniel Bensaïd, Christophe Aguiton, Philippe Corcuff, Henri Weber, Alain Krivine, Paul Aliès, ancien élu de Pezenas (Hérault), secrétaire national adjoint à la rénovation du parti socialiste. C’est lui qui a marié Edwy Plenel et Nicole Lapierre, à la fin des années 90. C’est également grâce à lui qu’Edwy Plenel entre à la faculté de Montpellier. Nébuleuse Le Monde : Hervé Gattegno, (aujourd’hui rédacteur en chef du Point), Anne Chemin, Pascale Sauvage etc. Nébuleuse Mediapart : En plus d’Edwy Plenel, ils sont cinq à avoir fondé le site d’information : François Bonnet, Gérard Desportes, Laurent Mauduit, Marie-Hélène Smiéjan, Godefroy Beauvallet. C’est l’ancien responsable internet de la campagne présidentielle de Ségolène Royal (2007), Benoît Thieulin, qui gère l’interface du site.

Ils ont dit « Il faudra tout de même qu’on sache qui est vraiment ce monsieur Plenel. (…) Il parlera moins haut quand on saura qu’il travaille pour une puissance étrangère », François Mitterrand, cité par Philippe Cohen et Pierre Péan, La Face Cachée du Monde, Mille et une nuits, Paris, 2003 « Plenel ? Il ne m’a pas lâché pendant dix ans et j’ai fini par penser qu’il travaillait lui aussi pour les Américains », François Mitterrand, cité par Pierre Favier, La décennie Mitterrand, Le Seuil, Tome IV, 1999 « Edwy Plenel a eu l’ “honneur” d’être écouté sur ordre personnel d’un président de la République ! Notre “ego” collectif et le sien en particulier auraient pu y trouver une forme de satisfaction. Mais, on ne peut considérer les écoutes autrement que comme la forme moderne des lettres de cachet », Jean-Marie Colombani, Le Monde, 28 avril 1997. « Mitterrand avait, je ne sais pourquoi, une véritable détestation envers Plenel, qui était un très bon journaliste d’investigation », Pierre Joxe, A propos de la France, Itinéraires 1, Flammarion, 1998. « C’est un bosseur, présent dès les aurores au journal. Cet homme flamboyant sème l’inquiétude et la peur. Portant sa passion en écharpe, il offre à tous le spectacle impressionnant de ses engouements et de ses haines. (...) « Edwy Plenel restera le journaliste emblématique des “années Mitterrand”. Il est en quelque sorte à Mitterrand, mais par antiphrase, ce que Joinville fut à Saint-Louis. Ses centaines d’articles sur le sujet, qu’il a complétés par trois livres, pourraient, réunis, former l’équivalent – en négatif, bien sûr – du Livre des saintes paroles et des bons faits de notre roi Louis », ibid. « Le système Plenel ne tolère pas l’indifférence : ou on est avec lui, ou on est contre lui », ibid. (…) »

253 Wikipedia consacre également un article à Edwy Plenel que chacun a tout loisir de lire.

Ci-dessous, deux billets de l'auteur sur sur son blog Médiapart en écho à ce qui précède :

« 2017 : Le multiculturalisme honteux comme cheval de bataille du « réformisme »?

Grandes manœuvres idéologiques pour animer le piètre théâtre des ambitions politiciennes à l'ombre de l'UE

Le multiculturalisme a des défenseurs souvent honteux. Le mot qui renvoie au concept de communautarisme est d'un maniement délicat en France, mais rassurons-nous : le multiculturalisme ne serait pas du tout un problème. En tout cas, c'est ce que l'on est en droit de penser si l'on suit Thierry Pech patron du think tank Terra Nova proche du PS (l'Esprit public, France culture le dimanche 20 juin). Il a en effet notamment affirmé que c'est un débat théologique (!) car personne ne s'en réclamerait. On sait par les temps qui courent que nul ne se réclame de la théologie pour imprimer sa marque sur l'actualité, n'est-ce pas ? Passons. On a aussi pu entendre dans cette émission que le drame d'Orlando résulterait essentiellement de la vente libre des armes à feu aux Etats Unis plutôt que de l'islamisme de l'assassin, qui a pourtant revendiqué son geste au nom de l' « état islamique ». C'est fou ce que le terrorisme musulman a du mal à se faire reconnaître pour ce qu'il est dans nos médias si convenables! Thierry Pech a encore tenu à préciser que la France est une terre d'immigration, et qu'elle associe juifs, chrétiens, catholiques et protestants compris, musulmans (etc...) ce qui, de toute évidence, exclurait dans son esprit la singularité si visible de l'Islam en terre occidentale. La cause serait donc entendue : les religions ne sont pas une idéologie, l'Islam moins que toute autre (!). Le terrorisme islamiste dans notre pays n'existerait pas vraiment, l'intégration problématique d'une partie de la communauté musulmane non plus, et tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Soit. Mais il se trouve que cette petite musique pas forcément entraînante du « on est tous issus de l'immigration » est reprise par M. Plenel sur Médiapart, et par le Monde, qui donne également la parole à M. Baubérot, ombre portée de M. Plenel en matière de « Musulmans », avec à chaque fois victimisation des intéressés à la clé. Donc, si l'on comprend bien, une communauté musulmane vivrait en France le pire des sorts et, rejetée par la société française, en serait réduite au repli communautaire, mais sans faire communauté (ce qui exclue les Musulmans parfaitement à l'aise dans notre société). Soit. Ces affirmations renvoient pourtant à une autre musique, celle de l''extrême droite, qui à présent, par exemple sur l'un de ses sites internet « Polemia », affirme que la présence musulmane massive en France est le premier problème du pays. Autrement dit dit, les défenseurs « de gauche » du multiculturalisme mettent sous le boisseau le sens de leur action politique de longue haleine au détriment du social et au profit du sociétal, et l'extrême droite met en avant le danger multiculturaliste au détriment du social. Chacun prend donc très sagement ses positions de combat politiquement correctes avant les présidentielles, nul par ailleurs ne remettant vraiment en cause l'appartenance de notre pays à la zone Euro et à l'UE, seules véritables et profondes causes des difficultés actuelles de tous ordres. Soit. Parallèlement, M. Sarkozy tente d'enfourcher encore et toujours les thèmes de l'extrême droite, et

254 on doit donc supposer que M. Hollande sera ravi de prendre la tête d'une croisade républicaine et droitdlhommiste contre les « extrémistes » qui taperont à coups redoublés sur les Français musulmans, des fois qu'il soit présent au second tour, notamment si M. Sarkozy était lui-même présent au second tour, ce qui est loin d'être envisageable. Tout paraît s'organiser au profit d'une hypothèse politique improbable, mais les médias pourrait donner vie à toute perspective « convenable ». Quant au FN ? Si il fait profil bas à propos des manifestations anti loi El Khomri, on doit surtout noter l'imprécision des ses prises de positions. Mme Le Pen « comprendrait » les grévistes quand M. Collard les condamne vivement lors d'une courte interview télé sur France 2. N'oublions pas que M. Ménard a à Béziers fait montre d'un ultra libéralisme qui renvoie aux racines du FN, du temps de M. Le Pen. Cet ultralibéralisme étant la racine subliminale de la politique française depuis 1983 à l'ombre de Bruxelles, et M. Ménard se voulant proche du FN, chacun peut se poser des questions pertinentes quant au petit jeu électoraliste en cours. Revenons aux idées claires ...« Le projet multi-culturaliste consiste à renvoyer les individus à une communauté culturelle ou religieuse, hypothétique ou réelle. L’État, ensuite, négocie avec les représentants que cette communauté se donne, accepte qu’elle vive selon ses propres règles et non les règles générales, lui déléguant de fait des attributions qui appartiennent au peuple tout entier. On comprend bien les objectifs clientélistes de ce genre de pratiques. Ceci a d’ailleurs été justement dénoncé par un député socialiste, Malek Boutih. Ce multiculturalisme de projet considère donc que les individus n’ont pas d’existence hors de leur communauté de « référence » laquelle comporte toujours une dimension qui est largement mythifiée. Ce multiculturalisme est en réalité un projet pervers, qui nie l’unité politique et qui s’affirme dans les faits comme ségrégationniste car il implique que nous n’arriverons plus à vivre ensemble si chacun veut que la loi de sa communauté s’applique. Il est assez stupéfiant de constater qu’une certaine « gauche » aboutit ainsi à redonner vie à l’apartheid, une logique qui permet en réalité de comprendre sa fascination pour la légalité pure, et sa profonde haine pour la notion de souveraineté. Tout cela se tient. » (Jacques Sapir, blog Russeurope, « Désigner l'ennemi », 19 juin 2016) Si l'on admet ce point de vue, si l'on se souvient des tragédies multipliées que vivent les pays occidentaux, si l'on veut bien prendre en compte les désastres ininterrompus que connaissent les pays du Moyen orient essentiellement du fait des stratégies occidentales, on doit admettre un problème sinon de l'Islam, du moins d'une partie des communautés musulmanes ici ou ailleurs. On peut ainsi à bon droit s'interroger sur le mode d'accueil des immigrés dans nos pays, sur les politiques d'intégration, et statuer sur le fait étonnant qui consiste à mettre en cause (sans le préciser véritablement) toute politique d'intégration et d'assimilation au nom du respect de la différence. Parallèlement, à l'heure du désastre social et économique que traverse notre pays, et l'UE, au moment où tant d'exilés frappent à nos portes, on peut se demander quelle est la pertinence d'insister sur l'accueil de l'autre quand les Français de toutes origines perdent peu à peu leur état social et toute chance d'une vie meilleure pour leurs enfants. Cacher une réalité de moins en moins discrète ? On doit donc poser la question de la propagande politique, qui s'appuie sur le mensonge, pour faire durer un système austéritaire implacable au détriment de l'intérêt des citoyens. La « gauche » de gouvernement, qui est un appendice de la droite et qui, à priori, se bat plus pour conserver les bonnes places que pour défendre enfin l'intérêt général, va donc probablement se déguiser en championne d'une France républicaine qu'elle s'emploie à détruire, face à une droite extrême (ou pas ) qui, elle, campera fièrement sur des positions préparées à l'avance pour servir de repoussoir

255 ou de fausse alternative à la toute puissance des oligarchies financières et économiques. Le chœur sera parfaitement orchestré par les médias, qui continueront à nous raconter de jolies histoires mettant en scène des méchants et des gentils dans l'éternel combat fantasmatique du mal contre celui du bien. Toutes tendances confondues, la presse « mainstream » affirme par ailleurs que la politique économique Hollande marche, ce qui est soutenir dès à présent la même politique défendant les mêmes intérêts quand le successeur du président actuel sera à l'Elysée. Les tripatouillages des chiffres du chômage, accessibles sur le Net, prouvent le contraire (lire l'article de Jacques Sapir en postface), ainsi que le véritable endettement du pays ou la poursuite de la désindustrialisation de la France. Nul n'évoque notre retour dans le giron de l'OTAN si lourd de périls du fait de la stratégie guerrière des Etats Unis. Si l'on résume : le pays va mieux, le multiculturalisme est un fantasme, l'OTAN n'existe pas, la France ne fait pas la guerre et l'UE est notre horizon indépassable (lire les journaux à propos du Brexit), autrement dit, circulez il n'y a rien à voir. L'actualité médiatique se casse pourtant les dents sur la réalité : 60 % des Français soutiendraient les opposant à la loi El Khomri (en dépit du travail inlassable des grands médias), dont l'inspiration est revendiquée par M. Junker, président de la Commission européenne, et chacun peut constater qu'avec l'assentiment de nos élites élues ou pas, les gouvernements Hollande nous ont imposé la loi sécurité, l'état d'urgence non stop, et que M. Valls va bientôt imposer au pays la destruction du droit du travail dans la droite ligne des recommandations bruxelloises en usant à nouveau du 49.3. (Ce qui a été fait cet été) Autrement dit, les défenseurs « de gauche » du multiculturalisme mettent sous le boisseau le sens de leur action politique de longue haleine au détriment du social et au profit du sociétal, et l'extrême droite met en avant le danger multiculturaliste au détriment du social. Chacun prend donc très sagement ses positions de combat politiquement correctes avant les présidentielles, nul par ailleurs ne remettant vraiment en cause l'appartenance de notre pays à la zone Euro et à l'UE, seules véritables et profondes causes des difficultés actuelles de tous ordres. Soit. Parallèlement, M. Sarkozy tente d'enfourcher encore et toujours les thèmes de l'extrême droite, et on doit donc supposer que M. Hollande sera ravi de prendre la tête d'une croisade républicaine et droitdlhommiste contre les « extrémistes » qui taperont à coups redoublés sur les Français musulmans, des fois qu'il soit présent au second tour, notamment si M. Sarkozy était lui-même présent au second tour, ce qui est loin d'être envisageable. Tout paraît s'organiser au profit d'une hypothèse politique improbable, mais les médias pourraient donner vie à toute perspective « convenable ». Quant au FN ? Si il fait profil bas à propos des manifestations anti loi El Khomri, on doit surtout noter l'imprécision des ses prises de positions. Mme Le Pen « comprendrait » les grévistes quand M. Collard les condamne vivement lors d'une courte interview télé sur France 2. N'oublions pas que M. Ménard a à Béziers fait montre d'un ultra libéralisme qui renvoie aux racines du FN, du temps de M. Le Pen. Cet ultralibéralisme étant la racine subliminale de la politique française depuis 1983 à l'ombre de Bruxelles, et M. Ménard se voulant proche du FN, chacun peut se poser des questions pertinentes quant au petit jeu électoraliste en cours. Les grandes manœuvres ont donc commencé, mais les exécutants paraissent médiocres. Hélas, une vraie et claire alternative politique n'est pas encore à l'ordre du jour. Elle a prioritairement pour programme sortir de l'UE, de l'Euro et de l'Otan, et pour nom souverainisme. Une vérité médiatiquement difficile d'accès. »

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« Pourquoi le multiculturalisme devrait-il être notre horizon imposé ? Pourquoi serait-il « de gauche » ?

• 9 mars 2016 • Par pucciarellialain • Blog : Le blog de pucciarellialain Le choix du multiculturalisme est éminemment politique. Il ne doit pas être imposé sans l'aval des citoyens. On appelle cela la démocratie.

Edwy Plenel était l'invité des Matins de France Culture jeudi 3 mars pour parler de son nouvel ouvrage « Dire nous ». Le site de l'émission l'a présenté de la manière suivante : « Edwy Plenel publie "Dire nous" aux éditions Don Quichotte. L'état d'urgence et les mesures sécuritaires qui l'accompagnent mettent-ils la démocratie en danger? Dire nous, est-ce réaffirmer le commun face aux divisions? S'agit-il d'un appel à la résistance? ». Edwy Plenel a ainsi eu l'occasion d'exprimer vivement son refus des dérives autoritaires et droitières du quinquennat Hollande dans l'un des temples de la bienpensance politique, Les Matins. Il a délivré un virulent discours de dénonciation d'une « gauche » en perdition qui se serait portée du côté des sensibilités d'extrême droite, et qui s'affirme à présent l'ennemie des libertés publiques, et par voie de conséquence si l'on comprend bien, de la démocratie. Puis il a été amené à s'affirmer clairement pour le multiculturalisme, une nécessité selon lui dans un pays qui se replierait sur lui-même, avec les connotation psy négatives que le « repli sur soi » implique, nous comprenons l'isolement, la haine et/ou le refus de l' « autre », l'impossibilité d'envisager un avenir serein dans un monde accusé de tous les maux, ce qui équivaut à de la paranoïa, etc... De là à y voir par exemple le danger d'un racisme généralisé et de dérives guerrières, il n'y a qu'un pas que chacun est libre de franchir. Mais, pourquoi pas, même si la ficelle qui consiste à appliquer une grille de lecture de type psychologique, voire psychanalytique (en principe destinée à l'individu), à un état aujourd'hui et maintenant, la France, un immense « groupe d'individus », par définition pluriel, relève sans doute d'une conception polémique, et de la psy, et de la réalité politique que le propos était censé évoquer. Au-delà de ce que les mauvais esprits pourraient considérer comme une tentative de manipulation, une telle affirmation relative au multiculturalisme est très concrètement politique, dans le sens où elle vise à transformer profondément notre société en pesant sur les représentations, sur les convictions des uns et des autres, bref, comme toute action politique, elle cherche à convaincre. Sauf qu'ici, point d'élections prévues pour trancher entre les « pour » et les « contre ». Et on sait que M. Plenel n'est pas seul à revendiquer ce bouleversement, en dépit de maints signaux montrant qu'il est difficile d'imposer à une société des évolutions qu'elle récuse assez largement, surtout dans un pays démocratique, et surtout quand on ne lui demande pas son avis. On peut déplorer que M. Plenel critique le gouvernement pour ses dérives autoritaires, et que, dans le même temps, il promeuve une « révolution » civilisationnelle » d'importance en France sans proposer, au moins, le recours à une consultation populaire pour légitimer sa démarche. La considérerait-il à ce point légitime qu'elle pourrait se passer de l'onction populaire via un vote ? Ni dans un cas ni dans l'autre, la démocratie ne trouve son compte.

257 Les propos de M. Plenel, nous en resterons à l'émission, laissant à l'ouvrage le soin de se défendre tout seul, sont emblématiques de ce que l'on aurait le droit de nommer une pétition de principe droitdlhommiste, dont Médiapart est souvent le vecteur. Ces propos promouvant le multiculturalisme appellent plusieurs questions et quelques commentaires. Qui parle ? La première question est celle du statut de celui qui parle : de quelle autorité se prévaut M. Plenel pour tenter de défendre une position controversée en l'absence de tout réel débat sur le sujet, les uns (dont pas mal de dirigeants européens, Mme Merkel en tête) réclamant l'ouverture à la « différence » et y veillant via les traités ou récemment l'accueil des « réfugiés », les autres opposant le refus de cette perspective et la fin d'une immigration en principe sans objet quand il n'y a plus d'emplois à partager. Rappelons que l'UE voudrait avec la définition de quotas de répartition entre ses états membres nous enjoindre de « recevoir » avec l'assentiment et l'appui de ces mêmes « multiculturalistes » les foules d'immigrants, aussi bien celles qui sont déjà arrivées en Europe que la cohorte innombrable de ceux qui veulent faire de même (voir la « une » de Médiapart du samedi 5 mars, dans laquelle « les invités de Médiapart » s'illustrent sur le sujet). M. Plenel s'exprime selon ses convictions, sa notoriété donnant à ses propos un poids que chacun peut évaluer à son aune. Admettons pourtant que sa position médiatique lui octroie en principe une certaine « expertise » quant aux difficultés que connaît notre pays et donc une responsabilité réelle quand il s'exprime ou, on va le voir, quand il s'affiche selon Causeurs au « congrès des Musulmans de la région centre » qui a lieu les 13 et 14 mars, sans doute à Bourges avec la participation de tarik Ramadan⋅ . Que dit-il ? Si l'on admet qu'un journaliste puisse militer pour le multiculturalisme, et que le journal dont il est le directeur de publication et l'un des fondateurs fasse de même, on est parallèlement en droit d'affirmer que le multiculturalisme est non seulement dans l'air du temps médiatique, mais surtout qu'il est une idée et un fait politiques, donc très concrètement un projet. A ce titre, quand Médiapart, en la personne de M. Plenel, honore de sa présence officielle cette réunion revendiquée comme celle de Musulmans, sans mention sur l'affiche de présentation d'une appartenance au CFCM (Conseil français du culte musulman), il s'associe à la démarche des amis de M. Tarik Ramadan⋅ , et paraît de la sorte inclure très concrètement le communautarisme dans la vie politique de la France (selon Wikipedia, « L'État français ne reconnaît pas légalement les origines ethniques et religieuses (à l'exception du cas particulier des harkis) mais, devant la carence d'interlocuteurs privilégiés, dans les dernières années, les gouvernements successifs ont essayé d'organiser une représentation des musulmans français. Le ministre de l'Intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy, a créé en 2002 le Conseil français du culte musulman (CFCM) »). Faire un compte rendu éventuellement critique est un travail de journaliste, débattre (le débat est annoncé par voie d'affiche avec l'existence du « congrès ») celui d'un journaliste politique et d'un citoyen engagé dans une cause, que sa présence a sans doute l'ambition de promouvoir. Chacun appréciera ce fait hautement symbolique comme il l'entend.

Tous les grands médias militent pour le mélange l'accueil (etc...) sans toujours le dire clairement. L'affaire des « réfugiés » le prouve chaque jour. Il ne fait pas bon dans l'UE regimber quand Bruxelles intime l'ordre à ses membres d'accepter une immigration massive et subite. Un reportage sur France Culture (journal de 13h lundi 7 mars) depuis la Pologne, la Slovaquie et la Hongrie⋅ ,

258 avec le concours d'envoyés spéciaux très « professionnels », sur les « dérives autoritaires (et « xénophobes ») supposées caractériser ces états de l'UE a prouvé que ces « journalistes » auraient pu faire leur « enquête » depuis Paris sans changer une virgule de leurs commentaires. La pensée unique en la matière comme dans d'autres est la règle aussi dans les « grands médias » du service public. Mais il conviendrait alors que M. Plenel, assumant pleinement la clarté dont il a fait preuve en affichant ses convictions en la matière dans ses écrits et à la radio, et en participant au congrès des Musulmans de la région Centre (cet article est écrit le 9 mars, donc avant le congrès), nous dise pourquoi le multiculturalisme est forcément une panacée susceptible de rendre à la France le rose aux joues qu'elle perdrait en se contentant de donner à sa société actuelle bien abîmée des raisons d'espérer et de vivre par exemple avec une vraie politique de l'emploi. Peut-être s'y essaie-t- il dans son ouvrage, mais alors, que n'en a-t-il soufflé un ou deux mots pendant l'émission ! On doit noter à ce titre que les défenseurs des « droits de l'homme » à la sauce mondialiste (lire mon article « Les droits de l'homme : une idéologie réactionnaire, un sacré de circonstance » sur mon blog Médiapart et sur mon site pucciarelli.fr), tiennent en gros le même discours que M. Plenel, sous réserve d'inventaire. Quelle différence de fond existe-t-il en effet entre les envolées de Mme Merkel décidant toute seule (façon de parler) d'inviter les réfugiés à rejoindre l'Allemagne et le parti pris affirmé de Médiapart sous le titre « Ouvrons l'Europe » ? Edwy Plenel est donc pour le multiculturalisme. Son argumentaire pour soutenir cette vision de la France, qui serait déjà en voie d'accéder à cet état souhaité, ne repose à priori que sur de bons sentiments. Il faut accueillir l'autre parce que c'est l'autre. Il faut accepter sa différence parce que c'est bien. Cela nous « enrichirait », ce qui peut ne pas signifier grand chose. En quoi, pour quel projet précis ? Nous devons en rester à des propos moralisateurs et iréniques, présupposant un rousseauisme largement démenti par l'Histoire. Si l'on accepte l' « autre » sur la base du multiculturalisme, à la mode mondialisée, quand cet « autre », par une alchimie intellectuelle étrange, nous devient consubstantiel en se muant en « nous », alors, symboliquement, toute différence est abolie, et par un coup de baguette magique, nous voilà tous égaux, avec les mêmes droits, (les mêmes devoirs aussi?). Il n'y a alors plus de nation, plus de citoyens, mais une humanité de principe à la sauce biblique (ante « babélienne ») susceptible de réclamer en tout point du globe les acquis patiemment amassés par les sociétés des états dits développés. Pourquoi pas, mais pourquoi ? L'altruisme devrait-il aller (pour l'heure plus ou moins théoriquement) jusqu'au suicide collectif, le dépouillement des uns (sauf celui des possédants) n'induisant en aucune manière l'épanouissement des autres ? On accueille en conséquence le nouvel arrivant sur la base de sa différence, porteuse de cette fameuse richesse, et il ne faut sans doute pas l'intégrer, encore moins l'assimiler, mais lui permettre d'exister sur notre sol comme dans son pays d'origine, si tel est son désir, car là est la richesse, ou au moins sa source supposée. On sait que des Musulmans ne se privent pas toujours de cet attachement à leur culture originelle et aux modes vestimentaires qui vont avec, et nous serions priés de considérer cela comme un progrès pour tout le monde. Pour quelles raisons ? Par ailleurs, puisque l'autre devient « la richesse », on doit supposer que le « nous originel », à savoir la communauté nationale actuelle, c'est la « pauvreté », (l'inintelligence, le dogmatisme, l'égoïsme, l'incapacité à vivre l'empathie ou encore à nourrir l'ambition d'exister sereinement dans un monde de concorde, fraternel, etc...), l'absence de perspectives, et pourquoi pas la fin de l'histoire de France. Bref, nous sommes face à un rejet de la nation telle qu'elle est, mais pourquoi ? Outre le fait que la France a très longtemps vécu sans une communauté musulmane aussi importante, qui n'est donc pas forcément indispensable à la construction de notre avenir, celui-ci n'est valorisé dans l'optique de M. Plenel qu'à travers les « autres », vecteurs de la richesse supposée

259 on l'a dit, le passé et l'aigreur devenant la marque infamante des « moisis » (adjectifs accolé par Médiapart aux mécréants n'adhérant pas à la campagne « Ouvrons l'Europe »). Ce parti pris en dit long sur le peu de cas que font les droitdlhommistes de notre pays, de ses valeurs, de sa culture, de son devenir dans un concert des nations qui, on doit le supposer, est probablement lui-même voué à subir une vindicte identique. Et, ne les oublions pas , des Musulmans qui vivent leur vie de Français sans difficultés et dont on ne parle jamais. Doit-on à ce point mésestimer son pays pour le rêver aussi obstinément différent, « métissé », au nom d'une vision parfaitement contestable et de plus en plus contestée ? Sommes-nous face à une fracture identitaire dont les multiculturalistes seraient les révélateurs ou devant une stratégie mondialisée dissimulée sous les nobles atours moralisants des « droits de l'homme »? Si la « stratégie mondialisée n'existe pas, pourquoi nous servir un tel projet tellement idéologique, sans l'étayer d'arguments solides et le rendre acceptable ? Car, comment accepter sans broncher la répétition lassante de propos si violemment défendus si on en reste à des affirmations grandiloquentes, à des prêches ? Manque-t-on d'arguments probants chez les droitdlhommistes pour expliquer clairement et politiquement les raisons d'une telle stratégie ? Les conséquences prévisibles de ce positionnement Fracture sociétale, rupture du contrat social ? Quand la République ne reconnaît en principe que les individus, les appartenances religieuses et autres ne devant pas interférer avec la vie publiques, ce qui est le contraire du multiculturalisme à la sauce néolibérale, M. Plenel milite donc ouvertement pour une transformation radicale de notre société (sur le modèle anglo saxon?), qui porte déjà les traces bien visibles d'un apport de populations exogènes, dont une large part entend au moins partiellement le rester. On est donc en train d'installer en France deux sociétés vivant souvent côte à côte, sans pour autant s'apprécier ou vouloir faire « peuple » comme beaucoup voudraient nous le faire croire. Le FN n'a guère de souci à se faire sur ce plan là, on nourrit mécaniquement sa base électorale. L'essentialisation des Musulmans (voir l'ouvrage de M. Plenel « Pour les Musulmans ») s'est apparemment muée chez M. Plenel en essentialisation de l'individu, qui n'est plus pris dans sa singularité culturellement typée, fruit de siècles d'évolution depuis le haut Moyen Age, mais dans sa grégarité déracinée, le « Nous » effaçant le « je ». En revenons-nous au « troupeau du Seigneur » ? Mais alors, lequel ? A cette aune, l'islamophobie va passer de mode, puisque plus rien ne différencie les êtres humains. Si ce n'est toi, ce sera donc ton frère ! La Scolastique, l'Humanisme, le rationalisme, le lent mûrissement de la philosophie occidentale, aboutissant à l'individu autonome et réflexif qui ont notamment symbolisé la grandeur de la civilisation européenne, tout serait donc bon à jeter dans les poubelles de l'Histoire ? Au nom de quelle valeur supérieure ? Outre que ce choix, le « Nous » plutôt que le « Je », peut être vécu comme très inquiétant dans un monde où nos libertés individuelles sont de plus en plus menacées, ce « Nous » peut de toute évidence passer pour une gomme idéologique à priori destinée à nier notre réalité, nos vérités au nom d'une vérité nouvelle, quasiment une « Annonciation » qui, hélas, ne paraît pas porter l' « espoir » pour tous mais un risque grandissant de guerre civile. Le vieux mythe de la « table rase » n'est sans doute pas bien loin. Le multiculturalisme est ainsi un moyen réthorique civilisé et une volonté politique féroce de valoriser le « hors sol » contre l'enracinement. A ce titre, il est une illustration au moins partielle de l'idéologie néolibérale (ultralibérale?) qui ne déteste rien tant que les racines, l'acquis, l'identité. Est-ce celui que défend M. Plenel ? Le fond historique et idéologique d'un tel discours La mondialisation anglo-saxonne a fait de l'UE un grand marché sans frontières, vulnérable au

260 moindre aléas géostratégique comme le surgissement des flots d'immigrants qui continuent à se présenter à nos frontières bien fragiles. Il est de fait que la libre circulation des personnes, après celles de l'argent et des marchandises, est un pilier de l'idéologie néolibérale. Mme Merkel, lançant son appel de bienvenue aux « réfugiés », en a été une porte parole éminente. Même dans le cas où une pensée de ce type aurait d'autres racines que la volonté d'imposer un ordre économique mondial dominé par l'argent et une oligarchie toute puissante, il est difficile de ne pas faire le parallèle entre ce que disent M. Plenel, ses amis, ainsi que toute la « grande presse », et un projet politique parfaitement droitier, né aux états Unis bien avant la chute de l'URSS et traduit dans les faits par l'UE et l'Euro (Lire mon article : « Le PS et ses alliés ont tué la gauche à partir de 1983 : M. Hollande l'enterre »). Cette idéologie de combat contre les états européens, mais pas seulement, a fait le tour du monde par internet et tous les moyens de communication modernes, cinéma compris depuis au moins les années 80 du vingtième siècle. Les déclarations de Mme Merkel, qui est tout sauf inconséquente, à l'intention des « réfugiés », ont été le point d'orgue dans la confection de la doxa de l'ouverture adressée urbi et orbi à ces malheureux en quête d'une vie meilleure. Les « droits de l'homme » ont servi ici à aggraver un phénomène tragique qui, à l'expérience, se révèle dangereux pour l'existence de l'UE elle-même. Pour beaucoup de ceux qui habitent dans des aires pauvres, soumises à des conflits (dont le bloc atlantique est souvent responsable) et désireux d'accéder à une vie normale, le message de l'ouverture, de l'accueil, de la fraternité universelle a forcément un gros impact. Le flot d'immigrants actuel a aussi ses racines dans cette préparation médiatique du grand tohu bohu planétaire provoqué, que de nombreux commentateurs affectent de considérer comme un phénomène naturel auquel nous n'échapperons pas, comme il en est de l'Euro, de l'austérité, de la compétitivité alors que l'on commence à mesurer la responsabilité écrasante de la Turquie dans ce désastre humain qui est loin d'être terminé. Bref, les militants du multiculturalisme profèrent qu'ils en aient conscience ou pas un discours idéologique majeur visant jusqu'à preuve du contraire à imposer des choix parfaitement politiques antidémocratiques et antisociaux (les systèmes sociaux ne résisteront pas à l'irruption d'une population ayant besoin de tout) faits en dehors de tout assentiment populaire dans nos pays démocratiques où une élite oligarchique se mêle de juger et de décider de tout à la place des citoyens. Le biais culpabilisateur de l'Histoire Si l'on admet en outre tacitement, comme cela semble être le cas, que les pays dits riches ne sont pas légitimes à opposer leurs frontières à ceux venant de pays pauvres en guerre qui désirent se réfugier massivement chez nous, c'est que l'on accepte au fond, et sans le dire, le principe d'un accueil illimité qui signe la fin des états tels que nous les connaissons. Or, on sait bien que toute société a besoin d'un lieu spécifique pour se définir, s'organiser, pour se prendre en charge, et quand la démocratie est là, pour choisir son destin en votant, pour se défendre aussi, pour s'épanouir dans sa culture, et que la transmission de cette dernière donne à l'Ecole une importance première (lire Jacques Sapir, blog Russeurope et mon livre « Education Nationale : le naufrage tranquille », Edilivre 2014). La perspective d'une dilution sans limite de nos états dans un flot de nouveaux arrivants dont nul ne peut prévoir la fin dans la situation actuelle, c'est la mise en péril acceptée, voire souhaitée par les tenants du multiculturalisme en France, de toute organisation sociale et de tout projet national, sacrifiés sur l'autel des faux « droits de l'homme », au nom desquels seront liquidés les vrais droits

261 de l'homme (droits sociaux, droit du travail etc...). Nous sommes très vraisemblablement face à une nouvelle mouture de la lutte des classes (menée contre les salariés par les classes dirigeantes) version mondialisée. Nous sommes du moins en droit de le penser. La culpabilité relative à une histoire ancienne comme la colonisation, l'interprétation du développement économique des uns comme une spoliation de tous les autres, l'illusion que la puissance réelle ou supposée des « grandes puissances » est à même de prendre en charge la détresse et la pauvreté de la terre entière (sans jamais toucher au patrimoines des possédants), conduisent des gens bien intentionnés à mettre en cause les états, et alimentent un nouveau millénarisme. Ce dernier est évidemment nourri de grandes illusions sur la capacité des êtres humains à s'entendre convenablement au-delà des différences confessionnelles, culturelles et anthropologiques. Le multiculturalisme en France n'a pas attendu les Musulmans Il faut enfin rappeler que le discours du multiculturalisme nouvelle manière est né en France de la présence massive des Musulmans, qui n'existait pas en tant que telle dans les années soixante du XXe siècle, évidemment avant l'éclosion de la Mondialisation voulue par Washington. Le fait musulman dans notre pays a été fabriqué par l'Etat et le monde économique, les Français n'ont jamais été consultés sur le sujet, et même sans emploi à proposer, nos dirigeants et ceux qui en la matière les soutiennent comme M. Plenel, continuent à valoriser les « apports » de populations étrangères notamment sous la forme du regroupement familial et bientôt sous celle des quotas de « réfugiés » à l'ombre d'une UE très vigilante sur ce type de politique, qui en tant que telle ne relève ni de la morale ni des bons sentiments quoiqu'on nous en dise par ailleurs. La présence des Musulmans en France est contingente, elle n'obéit à aucune contrainte historique objective, indépendante de la volonté de l'Etat. L'immigration traduit aujourd'hui une stratégie (économique et politique?) des instances européennes et de leurs patrons US. Cette réalité en dit long sur la démagogie du FN qui tient des propos définitifs sur l'immigration sans vouloir réellement sortir de l'UE. Pourtant, on l'oublie peut-être, toute l'histoire de notre pays est celle du mélange fréquent avec d'autres populations essentiellement de souche européenne. Plus petit commun dénominateur, les racines judéo-chrétiennes, qui ont débouché sur des modes de société dans lesquelles le statut de la femme n'est pas celui que l'on trouve dans les pays d'islam, pour lesquelles l'état et l'autorité légale de la puissance publique, fruits de l'histoire, sont fondés en droit et en raison, les religions ayant été priées de laisser les hommes gouverner les hommes. On ne reviendra pas ici sur les discussions très vives à propos du Coran ou sur les drames de Paris et les incidents de Cologne et d'ailleurs à la fin 2015 et des tragédies ultérieures qui sont un sujet de réflexion en soi. La France a été un creuset européen, depuis qu'elle existe, et sans discontinuer. La culture française est le fruit de ces mélanges constants.On peut donc accueillir les Musulmans sans pour autant changer la règle du jeu en leur faveur, du seul fait qu'ils seraient issus de pays pauvres et qu'une fois en France, nombre d'entre eux subiraient plus que d'autres la dureté de la société actuelle. En revanche, on doit imaginer les Musulmans changer leur propre règle du jeu pour s'adapter au pays d'accueil comme beaucoup d'entre eux l'ont fait. Le muticulturalisme est un projet politique défendu sans arguments politiques : pour quelles raisons ? Après tout, on a le droit de vouloir que l'Etat, la Nation, la Citoyenneté, les frontières et la démocratie qui ne peut aller sans elles se transforment et se diluent au nom d'une vision fantasmée de l'humanité. Encore devrait-on exposer sans fard les enjeux considérables que cela induit, et cesser de donner des leçons de morale et d'exclusion mal venues au risque d'être assimilé (terme délicat dans ce contexte) à une secte détenant seule la vérité face à un océan

262 d'ignorance et d'inhumanité. En outre, ce n'est pas parce que la souveraineté a été annexée par le FN qu'elle est une revendication de l'extrême droite. Et ce n'est pas parce que M. Plenel s'affiche pour le multiculturalisme que ce dernier est une exigence de gauche. Jusqu'à preuve du contraire, on est ainsi en droit d'écouter M. Plenel avec circonspection au moins sur le plan du multiculturalisme, et de regretter que son puissant discours politique soit affaibli par des considérations qui lui sont apparemment essentielles sans pour autant paraître telle au moment où le pays est plongé dans une crise multiforme d'une ampleur inégalée, et ce dans un contexte intérieur et extérieur si périlleux. Comment se revendiquer de la gauche en fusillant le gouvernement actuel, qui serait donc de droite (ce que nous savons sans conteste), et se retrouver objectivement sur des positions politiques convergentes avec celles de la droite mondialisée (équivalent de la « gauche bobo »), ennemie du monde du travail, voire sur des positions identiques à elle, le multiculturalisme pouvant être analysé en l'état actuel du non débat comme une arme absolue contre la démocratie, les droits sociaux et l'Etat social des sociétés développées ? Comprenne qui pourra. 2017 dira qui est qui. Alain Pucciarelli (pucciarelli.fr, omnibusactu.wordpress.com)

⋅Selon Wikipedia, « Pendant l'été 2005, Tariq Ramadan obtient une invitation de visiting scholar à l'Université d'Oxford et est invité à participer à un groupe de réflexion fondé par Tony Blair sur le problème de l'extrémisme islamique au Royaume-Uni, suite aux attentats survenus à Londres le 7 juillet de la même année. En novembre 2006, le magazine EuropeanVoice lui a remis le prix d'Européen de l'année dans la catégorie des personnalités n’étant pas citoyennes d'un pays membre de l'Union européenne12. En 2000, il a été nommé l'un des sept penseurs religieux « innovateurs » du XXIe siècle par le magazine américain Time. Il fait partie de la liste des 100 penseurs les plus influents du monde (e rang) en 2004 (Time), en 2005 et 2008 (Foreign Policy et Prospect) et en 2009, 2010, 2012, 2013 (Foreign Policy). Il reçoit en 2007 le prix d'excellence décerné par le journal britannique Muslim News. Il est e dans la liste des 100 penseurs les plus influents du monde par « Global Thinkers » en 2014. Tariq Ramadan a été nommé à une chaire d'études islamiques contemporaines à l'Oriental Faculty de l'Université d'Oxford et est également attaché au St Antony’s College, de la même université (à partir du er septembre 2009)13. La manière dont il a été nommé à ce poste, grâce aux relations et à l'influence du sultan d'Oman, a été dénoncée à plusieurs reprises14,15. Il est professeur de sciences islamiques contemporaines au département des Sciences islamiques de la faculté du Qatar (attaché à la Qatar Foundation) et est chercheur (Senior Fellow) à l'université de Doshisha (Kyoto, Japon). » Note de l'auteur : il paraît proche de l'UOIF (lire sur internet), accusée d'être un vecteur officieux mais déterminé de l'idéologie islamiste.

Simple constat : le départ de M. Voinchet n'a pas changé grand chose à l'épine dorsale idéologique des « Matins » illustrée par le pedigree de ses intervenants. Reconnaissons au passage à Mme Eliacheff une neutralité politique réelle, même si elle n'a pas pu s'empêcher de dire son admiration pour un ministre de l’Éducation Nationale passager dont le travail n'a pas laissé de souvenirs immortels, Vincent Peillon pour ne pas le nommer. D'où la question de savoir si en tant que producteur, M. Voinchet est à l'origine de ce recrutement bien marqué idéologiquement. Seule la chanson modérément de gauche (avis de l'auteur) de M. Plenel manque donc aujourd'hui à l'appel (sous réserve de changements en cette rentrée 2016). Il

263 semblerait en conséquence que Les Matins soient une structure suffisamment importante pour exiger une continuité que les aléas de la gestion des ressources humaines ne doivent pas mettre en cause. Comme une ligne politique que la nouvelle « patronne » de France Culture aurait tenu à conserver, avec bien entendu l'accord supposé de sa hiérarchie. Est-ce affaire de contrats ? Des exemples paraissent prouver qu'un producteur peut se séparer d'un collaborateur quand bon lui semble (voir le sort de Yves Michaud à l'Esprit public). Ce qui amène la question suivante : qui décide réellement de quoi dans le système Radio France ? La réalité perceptible est-elle fonction des individus, de leurs poids dans la maison ? Existe-t-il pour les producteurs une réelle liberté d'orientation, de positionnement politique et économique sur les antennes publiques ? Vaste sujet que chacun pourra explorer à sa guise. Reconnaissons à M. Erner le désir d'imprimer sa marque en se fendant tous les jours d'un billet parfaitement honorable qui souligne son souci de l'équilibre et de la pondération, qualités fort nécessaires pour la campagne électorale mouvementée qui s'annonce.

-Intéressons-nous à présent à l'Esprit Public, produit et animé par Philippe Meyer. A noter que M. Meyer fut un temps un soutien officiel de François Bayrou.

Quelques collaborateurs (liste non exhaustive) : (source Wikipedia, extraits)

-Jean louis Bourlanges (source Wikipedia extraits) Il est membre permanent de l'équipe de l'Esprit public, qui varie assez peu sur la durée. Diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris en 1969, il devient agrégé de lettres modernes en 1971 et est admis à l’École nationale d'administration (ENA) en 1975. En 1988, il publie un ouvrage sur l'état de la droite française, Droite, année zéro. Il est à diverses périodes professeur de lettres en lycée, ou professeur-associé à l'Université Johns- Hopkins. Il est nommé auditeur en 1979, puis conseiller référendaire à la Cour des comptes. Depuis octobre 2002, il est professeur associé à l'Institut d'études politiques de Paris où il donne le cours « Système et vie politiques dans l'Union européenne ». (...) Soutien de François Bayrou au premier tour de l'élection présidentielle de 2007, il appelle à voter pour Nicolas Sarkozy au second tour. À la suite de l'élection présidentielle, il s'éloigne de François Bayrou et du Modem qui ne représente plus le centrisme à ses yeux. François Bayrou, par son opposition constante à la politique de Nicolas Sarkozy, et par ses propos parfois teintés d'anti- capitalisme, n'a pas la nuance et l'esprit de compromis qui caractérise le centrisme pour Jean- Louis Bourlanges. Il déclare: « entre l’UMP, le MoDem et le Nouveau Centre, les enfants de l’UDF n’ont le choix qu’entre une reddition, une secte et un camp de réfugiés. » 2. En juillet 2007, il est nommé au Comité de réflexion sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions mis en place par le Président de la République Nicolas Sarkozy. Il abandonne fin décembre 2007 son mandat de député européen3. (...) Jean-Louis Bourlanges est membre de la Commission Trilatérale Rappel : La Commission Trilatérale (parfois abrégée en Trilatérale) est une organisation privée qui fut créée en 1973

264 à l'initiative des principaux dirigeants du groupe Bilderberg et du Council on Foreign Relations, parmi lesquels David Rockefeller, Henry Kissinger et Zbigniew Brzezinski. Regroupant 300 à 400 personnalités parmi les plus remarquées et influentes – hommes d’affaires, hommes politiques, décideurs, « intellectuels » – de l’Europe occidentale, de l’Amérique du Nord et de l'Asie Pacifique (États dont la plupart sont également membres de l'OCDE), son but est de promouvoir et construire une coopération politique et économique entre ces trois zones clés du monde, pôles de la Triade. À l'instar du groupe Bilderberg, il s'agit d'un groupe partisan de la doctrine mondialiste, auquel certains attribuent, au moins en partie, l'orchestration de la mondialisation économique. -François Bujon de l'Estang François Étienne Vladimir Bujon de l'Estang, est un diplomate français, ambassadeur de France au Canada de 1988 à 1991 et ambassadeur de France aux États-Unis de 1995 à 2002, ancien vice- président de l'Institut Pasteur. Né en 1940, diplômé de l'IEP de Paris et de la Harvard Business School, ancien élève de l'ENA. Élevé en 1999 à la dignité d'Ambassadeur de France, président (Chairman) de Citigroup France de janvier 2003 à décembre 2010, Senior International Advisor de Citi France depuis janvier 2011 et membre du European Advisory Board de Citi. Président de FBE International Consultants (société de conseil en stratégies internationales) de 1992 à 1995 puis de nouveau depuis 2003, il est aussi membre du conseil consultatif international du groupe Total, membre du comité de rédaction de la Revue des Deux Mondes, vice-Chairman de la French-American Foundation (New-York), administrateur de la French-American Foundation (France) et president du Mona Bismarck American Center for art & culture (Paris, France). Il a été chargé de mission au secrétariat général de la Présidence de la République de 1966 à 1969 auprès du Général de Gaulle, et conseiller diplomatique et de défense de Jacques Chirac, alors Premier ministre, entre 1986 et 1988. Il est aussi membre du comité exécutif de la Commission Trilatérale 1 . -Sylvie Kaufman Directrice éditoriale au journal Le Monde, Young leader -Thierry Pech directeur général de la fondation Terra Nova (lire plus haut) -Marc Olivier Padis Directeur de la revue Esprit, paraît proche de M. Pech -Lionel Zinsou Lionel Zinsou est né d'un père originaire du Bénin (alors Dahomey), médecin de Léopold Sédar Senghor, et d'une mère française 1 . Il est également neveu de l'ancien président de la République, Émile Derlin Zinsou 2 . Il fait ses études secondaires au lycée Buffon, en CPGE au lycée Louis-le-Grand, puis à l'École normale supérieure. Il passe l'agrégation de sciences économiques et sociales. Laurent Fabius Premier ministre l'appelle à ses côtés comme rédacteur de ses discours3. Après avoir travaillé chez BSN, Lionel Zinsou a été associé-gérant de Rothschild & ie avant de rejoindre en 2008 le fonds d'investissement PAI Partners 4 . Membre de l'Institut Montaigne (lire plus haut « Philippe Manière ») -Eric Le boucher (lire plus haut) -Michaela Wiegel (extraits Wikipedia) Madame Wiegel est correspondante à Paris de La Frankfurter Allgemeine Zeitung, (littéralement,

265 « Journal Général de Francfort ») également appelé la FAZ, qui est un des trois plus grands quotidiens allemands. Son édition du dimanche est nommée Frankfurter Allgemeine Sonntagszeitung. Distribuée dans 148 pays, la FAZ est le quotidien allemand le plus diffusé à travers le monde (environ 1 million de lecteurs par jour). Indépendant de tout parti politique, le quotidien est de tendance conservatrice et libérale. (souligné par l'auteur). -Yves Bertoncini (extrait Wikipedia) « Yves Bertoncini est Directeur de l'Institut Jacques Delors (lire plus haut) depuis avril 2011.

(…) Il dirige l'équipe de l'Institut Jacques Delors et est responsable de la gestion du programme de travail. (...) Il est administrateur de la Commission européenne, où il a travaillé au sein des Directions générales "Education, Formation, Jeunesse" et "Politique Régionale". Il a travaillé dans les services du Premier Ministre français en tant que chargé de mission « Europe » au Centre d’analyse stratégique (2006-2009) et comme Conseiller auprès du Secrétaire général des Affaires européennes (2010-2011). Il a également travaillé pour le Ministère français des Affaires étrangères et européennes, pour l’organisation du « dialogue national pour l’Europe » (1995-1997) et à l’ambassade de France à Alger (1992-1993). Il a enfin été responsable des Affaires internationales de la Fédération Française des Sociétés d’Assurance (2002-2005). Il enseigne ou a enseigné les questions européennes au Corps des Mines (Mines Paris Tech), à l’Institut d’Etudes Politiques de Paris (2001-2011) et à l’Ecole nationale d’administration (2007- 2009). Il est l’auteur de nombreux ouvrages, articles et "policy papers" sur les enjeux européens.Il est diplômé de l’Institut d’études politiques de Grenoble et du Collège d’Europe à Bruges et a également étudié à l’IEP Paris et à l’Université de Californie à Berkeley. (...) -El Mouhoud Mouhoud El Mouhoub Mouhoud enseigne l’économie internationale et dirige le Master Affaires Internationales à Paris-Dauphine. Il est chercheur au Laboratoire d’Économie de Dauphine- DIAL IRD. Il est nommé dans le" Who's who des Économistes les plus influents", publié par l'Expansion dans le numéro double de décembre 2012-janvier 20133. Directeur du Master 212 Affaires Internationales depuis 2011, il est élu au Conseil d’Administration de l’Université Paris Dauphine en 2012 : Enseignant de l'université Paris-Dauphine. • Alain Cotta • Bernard Roy , professeur de mathématiques appliquées aux sciences de gestion • Laurent Batsch , professeur de gestion • Philippe Chalmin , professeur d'économie • Anton Brender , professeur associé d'économie - Directeur de la Recherche économique à Dexia Asset Management • Hélyette Geman (en), professeur de mathématique financière

266 • Pierre-Louis Lions , médaille Fields 1994 • Jacques Attali , économiste et homme politique • André Lévy-Lang , ancien président de Paribas • Jacques Delors , ancien président de la Commission européenne et ancien ministre des Finances • Jean-Hervé Lorenzi , président du Cercle des économistes • Yves Meyer , prix Carl Friedrich Gauss 2010 • Vladimir Arnold , professeur de mathématiques et auteur du théorème KAM; prix Lénine, prix Crafoord, prix Heineman, prix Wolf, prix Shaw • Melchior Wathelet , ministre d’État (Belgique). • Helmut Siekmann , professeur de l'université de Cologne et professeur invité à l'université de Berkeley et à Paris-Dauphine • Jean-Pierre Jouyet , ancien ministre, président de l'Autorité des marchés financiers • Christian de Perthuis , professeur d'économie, fondateur de la Chaire Économie du Climat.

Ci-dessous, un papier OJIM à propos d'une émission de l'Esprit Public de mai 2016

« France Culture, L’Esprit Public. La sérénité de l’aveuglement ? (source OJIM, extraits) On peut écouter avec intérêt l’émission hebdomadaire de commentaires politiques sur l’actualité de la semaine écoulée, « L’Esprit Public », produite et animée par Philippe Meyer sur l’antenne de France Culture, car elle dispense tous les dimanches à 11h une information raisonnable, rassurante, savante, toutes choses synonymes de sécurité intellectuelle. Nous avons à faire a priori à des gens qui savent où ils vont, mais a posteriori ?(...) La sérénité curieuse – marque de cette émission – se heurte de plus en plus aux remous internationaux et à une situation politique et sociale difficile en France même, illustrant un monde bien différent de celui qui nous est proposé par l’équipe de l’Esprit Public. Dimanche 1er mai, une obamania de bon ton Jean Louis Bourlanges, ancien député européen, « chrétien démocrate » un temps proche de M. Bayrou, est un partisan déterminé du « marché libre et non faussé », c’est un partisan historique de la Construction « européenne, » officielle qu’il a régulièrement et farouchement soutenue dans les faits mais aussi dans ses ambitions proclamées. La stratégie supposée des pères de l’UE était notamment de bâtir une puissance politique faisant d’une partie du vieux continent un interlocuteur à part entière des grandes puissances du moment. M. Bujon de l’Estang pour sa part, ambassadeur de France à la brillante carrière, est en principe porteur et défenseur de l’intérêt national. C’est là a priori le sens même de son métier. Les autres intervenants affichent des qualités différentes, mais également de bonne tenue. Pour en revenir à l’actualité de la semaine concernée, la venue de M. Obama en Grande Bretagne et en Allemagne était en soi naturelle, entre partenaires. Mais Lorsque le président des États-Unis s’est mêlé publiquement des affaires intérieures du pays hôte et de la vie de l’UE, nous devons en déduire qu’il n’était pas venu en représentant d’un pays ami, mais en patron dispensateur de conseils, d’ordres et de menaces (à peine voilées) à l’encontre du Royaume-Uni dans le cas d’un Brexit. Quelles réactions sur le plateau de l’Esprit Public ? Des commentaires de bon aloi analysant la

267 pertinence évidente des paroles de M. Obama, qui instituent de fait l’UE comme un appendice de la puissance US, dont la fragilisation serait aussi celle du « grand frère » d’outre Atlantique. Comprenons que l’avenir de l’UE intéresse au premier chef les États-Unis, qui y interviennent légitimement quand bon leur semble. On s’est gravement interrogé sur le fait que M. Obama n’a pas fait une halte à Paris. La France vient de se réinvestir totalement dans l’OTAN, et on voit mal comment M. Hollande, qui a fait partie des « Young leaders » (voir internet sous le titre « Young leaders »), pourrait au-delà des discours poser un problème quelconque à un chef d’état américain, tant son alignement atlantiste est quasi complet. Les pressions sur les anglais Ont été égrainées les menaces de l’UE contre la Grande Bretagne pour peser sur le scrutin relatif au Brexit, M. Bourlanges les déclinant avec précision. Il eût affirmé clairement sa condamnation de telles menaces, si tel avait été son avis. Ce ne fut pas le cas, ni d’ailleurs celui de ses partenaires. Cette mise en cause officielle de la liberté démocratique des Anglais face à leur destin, du fait de M. Obama et de Bruxelles, n’a pourtant choqué personne, elle a même paru parfaitement naturelle aux « experts » présent sur le plateau. Il faut croire qu’on peut soutenir l’UE sur une radio de service public en ignorant les principes de base de la vie démocratique, à savoir que le vote des citoyens a en démocratie force de loi, et qu’il importe que l’expression du vote échappe à toute pression susceptible d’en fausser la sentence. M. Obama est donc le patron, en vertu de quoi l’ « Europe » et l’expression démocratique des pays de l’UE n’existent en rien face à la volonté US (et à celle de Bruxelles), M. Bujon de l’Estang précisant dans la foulée que le risque de fragmentation de l’UE favoriserait l’ « impérialisme russe », ce qui semble être par les temps qui courent l’ « ultima ratio » bénie par Washington. Le vrai discours en filigrane, l’Europe vassale naturelle des USA Si nous traduisons simplement les propos de nos amis de l’Esprit Public, l’UE vassalisée est une évidence qui relève d’une espèce de droit naturel lié à l’imperium US. La présence de la Grande Bretagne dans l’UE aussi, et ce d’autant plus que telle est l’opinion de M. Obama. La sortie du Royaume (encore) Uni de l’ensemble communautaire serait donc une anomalie au regard du « nouvel ordre mondial » voulu par les États-Unis, du moins on le suppose. Le Brexit est récusé à la fois par Washington et Bruxelles, ce qui est par voie de conséquence l’opinion raisonnable qui, on le suppose, trace la frontière entre les populistes, les extrémistes et les gens sérieux. Pointer les dangers de l’impérialisme russe, souligne si l’on comprend bien, la nécessité de serrer les rangs derrière les États-Unis, et donc, en filigrane, derrière l’OTAN dans un processus de confrontation avec la Russie (et peut-être avec la Chine). Au total, une seule réalité susceptible d’être admise sans méfiance a été évoquée, à savoir le refus majoritaire des sociétés européennes de la signature du catastrophique traité transatlantique, et la volonté majoritaire de leurs gouvernants d’y enfermer leurs pays. M. Bourlanges a immédiatement assimilé l’hostilité des citoyens au traité à une tentation protectionniste, ce qui dans sa bouche est éminemment condamnable. On est en droit d’en déduire son appui au fameux traité. Le réel fâché avec l’Esprit Public et l’expression de « l’état profond » Quels que soient les sujets abordés par cette émission hebdomadaire, le travail des équipes réunies par M. Meyer définit une ligne politique « subliminale » que l’on peut résumer en disant qu’elle exprime la vision consensuelle de l’establishment, et qu’elle entre de plus en plus fréquemment en contradiction avec les faits. Évoquer le Brexit sans expliquer en quoi le désir de quitter l’UE peut apparaître fondé aux yeux des citoyens anglais revient à surlégitimer le discours des autorités « compétentes » face à l’ignorance supposée des citoyens. Instituer l’UE comme vassale des Etats

268 Unis, c’est soutenir la conception d’un « empire occidental » et d’un leader US « naturel » contre toute idée de souveraineté, au moment où les forces centrifuges minent l’ensemble européen et où les Etats Unis sont eux-mêmes travaillés par l’isolationnisme, forme américaine du souverainisme. Une question légitime se pose. Si l’on considère que M. Philippe Meyer donne en direct la parole à des représentants de l’ « état profond », à savoir à des personnes qui sont aussi parfois des personnages importants impliqués dans des instances internationales comme la Trilatérale ou le groupe Bilderberg et autres hauts lieux de la mondialisation néolibérale, et qui, dans tous les cas, ont à voir avec le Pouvoir économique, financier et politique au plus haut niveau, on est en droit de se demander si les « classes dirigeantes » française, européennes et mondiales n’ont que ce type d’argumentaire à opposer au chaos qui menace. Alors, le ton apaisant de cette émission peut devenir un sujet d’interrogation angoissée : n’ont-ils que cela à nous dire quand la maison brûle ? »

On constate donc que le choix des membres de l'équipe de « l'Esprit Public » répond à priori à un part pris idéologique et donc politique précis, loin de toute « tentation » de pluralisme. L'expertise ne pourrait donc se conjuguer qu'en terme de conservatisme et d'orientation réactionnaire ? Cette émission peut en effet être jugée comme un temple du conservatisme médiatique mis en exergue dans ces pages (qui se pare volontiers des plumes de la « modernité ») et de la « bienpensance » fort à la mode chez les « experts » de tout poil, ce qui induit la responsabilité de M. Meyer, qui est pour le moins engagé par cette ligne parfaitement claire. On a constaté une dérive comparable aux « Matins », émission qui compense parfois ses orientations ouvertement néolibérales, (dont, jusqu'en juin dernier, cela a été précisé, M. Couturier à travers ses billets quotidiens ou M. Manière dans son intervention hebdomadaire, étaient emblématiques), par le choix d'invités « hors doxa ». Ce choix d'une « ligne » à l'exclusion d'un pluralisme souhaitable est-il légitime sur les ondes publiques ? Ces individus discrets, politiquement fortement engagés au moins dans l'exercice de leur métier, peuvent-ils se contenter de la « morale » basique qui autorise ce qui n'est pas expressément interdit, profitant par ailleurs de la bienveillance active de leur hiérarchie ? A chacun d'en juger. En épilogue (provisoire?), les heurts et malheurs de M. Meyer face à sa hiérarchie (qui existe donc), grâce aux soins de Laurent Mauduit : « Radio France: Mathieu Gallet évince Philippe Meyer 7 juin 2016 | Par Laurent Mauduit L’une des voix les plus connues de France Inter, celle de Philippe Meyer, qui anime le samedi de 12 heures à 13 heures, l’émission « La prochaine fois, je vous le chanterai », consacrée à la chanson française, sera bientôt interdite d’antenne. Au terme d’une procédure passablement chaotique, ne respectant aucune des règles du code du travail, l’animateur a appris que son émission ne serait pas reconduite après l’été. Le motif officiel est que Radio France a choisi d’interdire à l’avenir les doubles collaborations : l’intéressé serait donc concerné puisqu’il est par ailleurs le producteur sur France Culture de l’émission « L’esprit public ». Mais au sein de la maison ronde, l’opinion dominante est qu’il s’agit d’un licenciement déguisé et que le chroniqueur fait les frais à retardement de la tribune qu’il avait signée dans Le Monde, au plus fort du conflit qui avait paralysé, début 2015, la radio publique.

269 Philippe Meyer, 69 ans, est l’une des grandes voix de Radio France. Il y a fait son entrée le 5 mars 1982, en prenant pied d’abord à France Inter. Puis, à partir de 1984, il a aussi eu une collaboration avec France Culture. Au fil des années, le chroniqueur s’est ensuite impliqué dans deux émissions qui ont connu, chacune dans leur registre, un fort succès. Sur France Inter, Philippe Meyer a ainsi commencé à animer à partir de l’année 2000 l’émission « La prochaine fois, je vous le chanterai », qui s’est installée comme l’émission vedette du samedi parmi les radios généralistes (on peut retrouver ici ses émissions les plus récentes). Et sur France Culture, depuis 1998, il est donc aussi le producteur de « L’esprit public » dont l’ambition est de contribuer à une « mise en perspective de l'actualité politique au cours d'un débat d'intellectuels engagés » (on trouvera ici les podcasts les plus récents) ; laquelle émission est aussi l’une de celles qui a la plus forte audience sur France Culture. Alors, pourquoi la direction de Radio France décide-t-elle de pousser vers la sortie l’un de ses chroniqueurs vedettes ? En fait, cela s’est fait de manière confuse. Le 26 avril, le directeur des antennes de Radio France, Frédéric Schlesinger, annonce à Philippe Meyer que son émission ne sera pas reconduite sur France Inter la saison prochaine sur décision du PDG de Radio France, Mathieu Gallet, et qu’il ne restera qu’une saison de plus à France Culture, avant d’être invité à prendre sa retraite. Motif officiel : plus de double collaboration ! Ni pour Philippe Meyer, ni pour Laure Adler.

Lire aussi • 100 000 euros pour rénover le bureau du PDG de Radio France Par La rédaction de Mediapart • Radio France : une crise très politique Par Hubert Huertas • Mathieu Gallet à l’INA: sa com’ et ses palaces épinglés par la Cour des comptes Par Mathilde Mathieu Sur le coup, Philippe Meyer, qui a travaillé à Radio France sous un statut d’intermittent depuis 34 ans, ne se rebelle pas, même si, compte tenu des audiences, les rémunérations qu’il perçoit sont trois fois plus importantes sur France Inter que sur France Culture. Tout juste demande-t-il à pouvoir rencontrer le directeur des relations humaines (DRH) de Radio France pour évoquer les conséquences matérielles et morales de sa mise à l’écart. Mais cela s’avère impossible. Le DRH de Radio France, Jean-Claude Luciani, qui est l’ancien conseiller social d’Emmanuel Macron au ministère de l’économie, ne donne pas suite. Voici le récit que Philippe Meyer en fait, le 6 juin, dans une lettre adressée au DRH : « Le 6 mai, je me suis étonné auprès de [Frédéric Schlesinger] de ne pas avoir de vos nouvelles. Il m’a indiqué qu’il vous relançait sans délai. Le 17 mai, je l’ai informé que la situation restait inchangée, il m’a répondu qu’il vous demandait à nouveau de me contacter. Le 31 mai, je lui ai indiqué que je restais sans nouvelles. Il m’a fait savoir dans la journée qu’il était allé vous voir et que vous lui aviez assuré à nouveau que vous prendriez mon attache “rapidement”. Le 3 juin, toujours sans nouvelles, j’ai eu la bonne fortune de vous croiser à la cafétéria. Je vous ai fait remarquer que vos engagements auprès du directeur des antennes n’avaient pas été tenus et que plus d’un mois était à mes yeux un délai trop long. Vous m’avez répondu : “Un mois, c’était hier” et vous avez paru trouver que cette réponse désinvolte constituait un mot d’esprit. » En somme, la présidence de Radio France a choisi de mettre Philippe Meyer dehors et de ne pas même y mettre les formes que le droit social reconnaît ordinairement – encore que le code du travail ne semble guère être en vogue par les temps qui courent dans les milieux gouvernementaux.

270 La nouvelle s’est donc aussitôt propagée dans Radio France : la direction veut sanctionner Philippe Meyer, même si le prétexte est l’arrêt des doubles collaborations. « C’est un choix éditorial », confie au Monde le directeur délégué aux antennes et aux programmes, Frédéric Schlesinger, qui promet au producteur « un rôle élargi » sur France Culture. Mais cette présentation des choses est jugée fantaisiste par beaucoup à Radio France. La vraie raison de la mise à l’écart de Philippe Meyer, c’est vraisemblablement la tribune qu’il a confiée au Monde le 27 mars 2015, sous le titre « Il faut stopper la dérive de Radio France » , au plus fort de la grève de Radio France de l’an passé – c’est du moins l’opinion dominante au sein de la maison ronde, et c’est aussi l’intuition du principal intéressé. Dans cette tribune, Philippe Meyer disait en effet, clair et net, ce qu’il pensait du PDG de Radio France, dont Le Canard enchaîné venait de révéler les dépenses somptuaires : « Les informations publiées semaine après semaine par Le Canard enchaîné ne sont pas pour rien dans la grève de Radio France, mais on aurait tort de croire qu’elles en sont la cause unique ou même principale. D’ailleurs, lorsque, il y a un an, le même hebdomadaire révéla que le premier geste du PDG fraîchement nommé à l’unanimité par le CSA avait été de réclamer à sa tutelle une substantielle augmentation de salaire, aucune vague d’indignation, de réprobation ou même de simple déception ne parcourut la Maison ronde. C’est qu’en 2014, après cinq ans d’une gouvernance médiocre, à la fois indolente et brutale, confiée par Nicolas Sarkozy à des amis ou à des complaisants, les personnels de Radio France n’accordaient d’importance qu’à une chose : avoir enfin un projet et un patron. Lors de l’arrivée de leur nouveau président, la plupart des collaborateurs avaient, comme ils l’ont aujourd’hui, conscience de l’importance des défis à relever. » Mais, au-delà de cette charge, Philippe Meyer s’était surtout appliqué à défendre le service public et à brocarder les dérives qui l’abîment : « Certaines méthodes couramment utilisées feraient même rougir dans des entreprises dont le profit est le seul but affiché. Certains manquements, s’ils n’étaient pas le fait d’une société dont l’État est l’actionnaire principal, conduiraient leurs responsables devant les tribunaux », s’indignait-il. Avec un peu plus d’un an de recul, c’est cette lucidité dont il fait aujourd’hui les frais. Mais s’il s’agit effectivement d’une vengeance, pourquoi la mener de manière aussi maladroite et aussi désordonnée, sans même se conformer, au moins dans les apparences, aux procédures normales ? La question fait sourire Philippe Meyer car même quand il en va de lui-même, le chroniqueur ne perd pas son sens de l’humour : Radio France a cela aujourd’hui de commun avec l'URSS de Staline, s’amuse-t-il, que « c’est le pays du mensonge déconcertant… »

Nous avons à présent l'impression à priori justifiée que l'uniformité des discours médiatiques est tout autant liée à l'environnement politique et économique dans lequel est actuellement immergé le « monde de la presse », qu'à la responsabilité individuelle de nombreux cadres médiatiques et médiatisés. Ces derniers sont profondément impliqués dans la bataille des idées qui fait rage, ils sont, (cela va-t-il de soi?) du côté du manche. Certains d'entre eux sont une simple émanation de l'oligarchie, et tous ces gens quel que soit leur niveau d'intervention trustent les postes de responsabilité, quelques uns les revenus astronomiques, se vautrent dans les réseaux d'influence quand ils ne sont pas, es qualité, le nœud d'un réseau, lequel, pour être efficace, ne peut qu'être lui-même l'élément d'un autre réseau, ce qui institue sans doute la connivence et le copinage en vérité d'évidence quand on a mis un pied dans l'un ou l'autre des cercles et think tanks cités plus haut.. Lorsqu'on se croise régulièrement à Paris dans des lieux choisis, « entre soi », l'indépendance et la

271 liberté d'esprit sont forcément limités. Pas les perspectives professionnelles (!). On fait partie « de la famille », et chacun choisira les connotations qu'il désire associer à ce terme. Il faut noter la combativité de ces soldats d'élite, (une armée d'officiers imbus de leur rang comme l'histoire parfois nous en a montrés sur d'autres champs de bataille, mais baïonnette au canon), mais sans s'en étonner. Certes, la controverse médiatique prend rarement une véritable ampleur sur les « grands médias », et quand tel est parfois le cas, l'intervenante mise en cause quitte le studio (querelle entre Mme Agnès Bennassy Quéré, alors chroniqueuse des Matins du temps de M. Voinchet, et M. Mélanchon), mais ce combat quotidien très concret du virtuel et du faux semblant contre les faits n'est jamais gagné quand la réalité ressemble de moins en moins à la description qui en est faite et répond peu aux explications et analyses que l'on nous fournit. On peut par ailleurs, quand on connaît les revenus des uns et des autres, leurs « fréquentations », leurs mode d'accès aux « bons emplois » frapper de nullité tout jugement de leur part sur l'austérité nécessaire, les « avantages indus » de certains salariés, et plus généralement tout jugement sur la réalité du monde comme il va. Au moins avant inventaire. Aussi faudrait-il se poser quelques questions de fond : dans un univers saturé de haute technologie, télévisions, radios, presse écrite avec ses sites internet, ne disparaîtront pas comme par enchantement. Les personnes qui tiennent actuellement le haut du pavé ont par ailleurs le droit de défendre des convictions, des intérêts, d'animer des réseaux, le malheur étant que tout paraît fait pour éliminer une vraie concurrence en terme de discours idéologique et politique. En outre, le système qui fait des producteurs les barons des chaînes de télévision ou des stations radio ne sera pas rayé d'un trait de plume. Un autre aspect du problème, et non des moindres, est, rappelons-le, que ce contexte où l'argent et son pouvoir paraissent rois s'impose dans le cadre d'une influence atlantiste prégnante, qui contrevient au concept d'indépendance des esprits, à la liberté des débats, et s'oppose dans les faits à la renaissance d'un véritable pluralisme politique. Nous subissons un totalitarisme médiatique parfaitement analysable et décryptable. On peut avancer que, dans le cadre européen, quand l'Etat s'est débarrassé de bon nombre de ses pouvoirs régaliens, que les pouvoirs oligarchiques, financiers et économiques sont tout, et entendent le rester, il est impossible d'avoir une réflexion réaliste sur ce que pourrait être une réforme de la presse, et une transformation de ses modes de fonctionnement qui ne peut être envisagée que dans un cadre national lui-même rénové, seul à même de susciter une presse moins standardisée, plus en phase avec les réalités nationales réelles et leurs exigences. En attendant, les patrons privés d'organes de presse ne se gênent pas pour user et abuser de leurs pouvoirs, contrairement à ce qui nous est parfois raconté, comme le montre cet article de l'OJIM daté du 6 octobre 2015 : « Mélange des genres : Direct Matin au service de l’empire Bolloré » « Les limites sont souvent très fines, et non moins souvent dépassées, entre la publicité et l’information. Surtout si l’actionnaire principal conçoit les médias quasi exclusivement comme un outil d’influence pour ses autres affaires, l’information étant moins prioritaire. Et comme illustration de la vision des médias selon Bolloré, son journal gratuit Direct Matin vient de se faire prendre en flagrant délit deux fois de suite. Le 24 septembre dernier, Direct Matin consacrait un grand article aux « têtes du Grand Journal » sur Canal+. Une chaîne appartenant à Vincent Bolloré soumise depuis le début de l’été à un grand

272 ménage dont l’épisode le plus marquant a été la saga des Guignols, finalement sauvés, mais qui auront perdus leur mordant en cours de route. Aucune mention de ces péripéties dans l’article de Direct Matin. Au contraire, il louait « la nouvelle équipe de l’émission [qui] s’impose sur Canal Plus » et « fait souffler un vent de fraîcheur ». Un tableau idyllique servi aux lecteurs qui ne sont pas censés savoir que le vent qui souffle dans l’émission remanié n’est pas frais mais glacial. Car l’émission est devenue aussi chaleureuse et populaire que la banquise en Antarctique. Elle signe d’édition en édition ses pires scores de l’histoire en plongeant maintenant sous la barre des 3% d’audience alors qu’elle dépassait encore les 5% de part de marché l’an dernier, voire les 8% l’année précédente, ce qui à l’époque était déjà considéré comme catastrophique eu égard au passé glorieux de l’émission… Deux semaines avant, le 8 septembre, Direct Matin avait encore apporté sa petite contribution à la bonne santé de la maison Bolloré. Il publiait une interview de Yusof Basiron, directeur du conseil malaisien de l’huile de palme, qui avait pour mission de rétablir « la vérité sur ce produit » dans les colonnes du journal et sur son site web. Mais l’interview de ce scientifique et lobbyiste n’est pas tout à fait désintéressée : la com’ du Conseil Malaisien de l’Huile de Palme est prise en charge par l’agence Havas qui appartient… à Bolloré. Pour que la boucle soit bouclée, il reste à inviter le directeur du Conseil Malaisien de l’Huile de Palme au « Grand Journal » ou pourquoi pas, à lui créer une marionnette chez les Guignols. Enfin, pour enfoncer le clou :

« Le naufrage du journalisme politique

13 mars 2016 | Par Laurent Mauduit Alain Minc a reçu samedi le prix du livre politique 2016. Cette récompense attribuée par une trentaine de hiérarques de la presse vient confirmer le triste naufrage du journalisme politique, tel qu'il est conçu dans les grands médias. C’est une information microscopique qui n’a aucun intérêt par elle-même : Alain Minc a reçu samedi le prix du Livre politique 2016. Mais c’est une information qui en cache une autre, beaucoup plus importante : elle vient confirmer que le journalisme de connivence à la française tient encore le haut du pavé, puisque c’est une belle brochette d’éditorialistes des grands médias français qui a eu la stupéfiante idée de récompenser un essayiste qui, dans le passé, a déjà été condamné pour plagiat. Un jury de journalistes a attribué samedi le prix du Livre politique à Alain Minc pour son livre Un Français de tant de souches (Grasset). Le jury a préféré ce livre à deux autres, qui étaient retenus dans la phase finale du vote : une enquête sur Patrick Buisson, Le Mauvais Génie (Fayard), par deux journalistes du Monde, Ariane Chemin et Vanessa Schneider ; et le livre Piège d’identité (Fayard), écrit par Gilles Finchelstein, un ancien collaborateur de Dominique Strauss-Kahn, proche du banquier d’affaires Matthieu Pigasse auquel il a parfois prêté sa plume. Membre du jury, l’éditorialiste du Journal du dimanche Dominique de Montvalon raconte dans ces termes sur le site Internet de la publication comment les choses se sont passées : « Après des explications de vote parfois passionnées, le livre de Minc a recueilli au 1er tour 9 voix et les autres livres, ex-æquo, 8 voix chacun. Au second tour, après de nouvelles explications de vote, l'essai d'Alain Minc a recueilli 10 voix, l'emportant donc, devançant Le Mauvais Génie d'une voix, le livre de Gilles Finchelstein n'en obtenant plus “que” 6. » Ainsi, il s’est trouvé une majorité d’éditorialistes de ce qu’il est convenu d’appeler la grande presse pour voter en faveur de l’entremetteur du capitalisme parisien, ancien conseiller occulte de Nicolas

273 Sarkozy reconverti aujourd’hui dans la campagne en faveur d’Alain Juppé, qui tout au long de sa carrière intellectuelle n’a cessé de se tromper. N’a-t-il pas annoncé la balkanisation de l’Europe quelques semaines avant que le Mur ne s’effondre ? Le 5 janvier 2008, alors qu’une crise financière historique avait déjà commencé à secouer la planète, n’a-t-il pas proféré sur Direct 8 l’une de ces âneries dont il a le secret ? « On nous aurait dit que le système financier serait régulé avec un doigté tel qu’il évitera une crise, une crise qui aurait pu être de l’ampleur des très grandes crises financières du passé. C’est quand même un univers très résilient qui finalement, sans qu’il y ait d’organe apparent de régulation, est très bien régulé, quand même. Le jeu conjugué des banques et même des gouvernements, on se dit l’empirisme en réalité prévaut au-delà des postures idéologiques, et l’économie mondiale est plutôt bien gérée. »

Lire aussi • Alain Minc se fâche avec Vincent Bolloré et Nicolas Sarkozy Par Laurent Mauduit • Vidéo. Petite fête entre amis de l'oligarchie sarkozyste Par Laurent Mauduit • Alain Minc condamné pour plagiat Par La rédaction de Mediapart • Alain Minc fait la fête dans les jardins de l'Observatoire Par Laurent Mauduit • Alain Minc phare de la pensée Par Antoine Perraud • Alain Minc en piétineur de platebandes patenté Par Antoine Perraud Mais il y a pire que la constance dans l’erreur, il y a le plagiat ! Comme je l’ai raconté dans mon livre sur Alain Minc, Petits Conseils (Stock, 2007), le 28 novembre 2001, le tribunal de grande instance de Paris a prononcé un jugement très sévère à l’encontre d’Alain Minc, estimant que dans un livre consacré à Spinoza, il avait plagié un professeur de philosophie, Patrick Rödel. Et le plagiat avait été grossier : sans se rendre compte que Patrick Rödel écrivait une fiction, au cours de laquelle un médecin conseillait à Spinoza de faire une confiture de roses pour se soigner, Alain Minc avait reproduit la recette, comme s’il s’agissait d’une histoire authentique. « La contrefaçon est constituée », avait estimé le tribunal. Dans le cas de la confiture de roses, le tribunal s'était même indigné que la recette soit « fictive et servilement reproduite » par le plagiaire. Le contrefacteur Alain Minc et son éditeur avaient été lourdement condamnés : ils ont dû solidairement « payer à Patrick Rödel la somme de 100 000 francs à titre de dommages et intérêts », plus 20 000 francs en application de l'article 700 du code de procédure civile. Lequel Patrick Rödel – qu'il m'autorise à le dire – est devenu un ami, et tient son blog sur Mediapart. Ailleurs qu’en France, le destin d’Alain Minc aurait été scellé. Tout intellectuel a le droit de se tromper ; mais se tromper constamment à cause des mêmes partis pris entraîne une disqualification immédiate dans le débat public. Mais, en France, non : Alain Minc continue de pérorer sur tous les médias. Ailleurs qu’en France, un plagiat entraîne aussi une disqualification encore plus nette et définitive. Mais en France, au pays de l’oligarchie, ce n’est pas plus le cas : non seulement Alain Minc n’est pas disqualifié, mais il est… distingué ! Cette récompense ne dit donc pas grand-chose sur Alain Minc, qui est parvenu à se fâcher avec ses deux anciens commanditaires, Vincent Bolloré dans la vie des affaires, et Nicolas Sarkozy dans la vie politique (lire Alain Minc se fâche avec Vincent Bolloré et avec Nicolas Sarkozy). Mais elle dit beaucoup sur les mœurs et usages des oligarques du journalisme parisien.

274 Quand le directeur du Figaro écrivait en cachette pour le FN Le discrédit des hiérarques du journalisme mondain est en réalité double. D’abord parce qu’ils accordent leur faveur à Alain Minc. Ensuite parce qu’ils préfèrent son essai à celui des deux journalistes du Monde, Ariane Chemin et Vanessa Schneider. Or, il suffit de feuilleter leur livre pour mesurer qu’il est pour le moins dérangeant pour… le système oligarchique, dont font partie les membres de ce jury. Dans leur livre, Le Mauvais Génie, les deux journalistes dressent en effet un récit qui permet de mieux comprendre l'influence que l’ancien journaliste de Minute, Patrick Buisson, a eu sur de nombreux dirigeants politiques, dont au premier chef Nicolas Sarkozy, mais aussi sur certains journalistes. Au fil des pages, on découvre dans quelles circonstances Patrick Buisson, qui ne cache pas son antisémitisme, a été le principal conseiller de Nicolas Sarkozy dès 2005 ; on apprend aussi qu’il enregistrait tout le monde quand il était à Minute, bien avant qu’il ne fasse de même avec Nicolas Sarkozy ; on découvre aussi dans quelles conditions il devient directeur général de la chaîne Histoire, en remerciement de la victoire sarkozyste en 2007 ; chaîne à laquelle il a donné une empreinte maurrassienne qui est toujours aujourd’hui perceptible ; ou encore, on apprend dans quelles conditions le même Patrick Buisson dicte chaque jour par téléphone à Étienne Mougeotte les « manchettes » du Figaro puis, lors du départ de ce dernier, parvient à promouvoir à sa place, comme directeur des rédactions du groupe Le Figaro, son protégé, un certain… Alexis Brézet.

Alors, bien sûr, on comprend sans peine qu’à ce récit des dérives de certains politiques français frayant sans le moindre scrupule avec une tête pensante de l’extrême droite, quelques oligarques du journalisme aient préféré récompenser Alain Minc, malgré tout le discrédit qui pèse sur lui. Même si l’on ignore par exemple le vote d’Alexis Brézet (directeur de la rédaction, Le Figaro, Le Figaro Magazine) qui était membre du jury, on peut se risquer à penser qu’il n’a sûrement pas voté pour le livre d’Ariane Chemin et Vanessa Schneider. Car, on y fait aussi, à son sujet de confondantes découvertes, concernant le passé, pas si lointain, du patron du Figaro : « En réalité, Brézet écrit aussi pour d’autres. Patrick Buisson l’a mis en contact avec Jean-Marie Le Chevallier, député européen du Front national depuis 1984. Le journaliste va devenir son nègre et rédiger en 1989 un opuscule de 120 pages, Immigration en Europe : attention danger, que le futur maire de Toulon publie aux éditions du Front national. » Mais si Alexis Brézet a vraisemblablement rejeté le livre des deux journalistes du Monde, pour lui préférer celui d’Alain Minc, il n’a pas été le seul. Il s’est même trouvé une majorité du jury pour voter dans le même sens. Qui ? En vérité, la question n’a pas beaucoup d’importance : entre les hiérarques du journalisme qui ont voté pour Alain Minc ; et ceux qui ont émis un vote contraire mais qui, ne disant rien, ont accepté d’apporter leur caution à cette pantalonnade mondaine, il n’y a pas de si grande différence. Alors, tous les petits marquis du journalisme qui ont participé à cette mise en scène méritent d’être connus. Les voici. Il s’agit de : Secrétaire général : • Francoiş Bazin, essayiste, écrivain, secrétaire général du prix du Livre politique (lire à son sujet mon billet de blog : A tous ceux qui se réjouissent de la débâcle qui vient). Membres du jury : • Émilie Aubry, journaliste, LCP- AN, ARTE • Alexis Brézet, directeur de la rédaction, Le Figaro, Le Figaro Magazine • Anna Cabana, journaliste, Le Point, BFM TV

275 • Arlette Chabot, éditorialiste • Élisabeth Chavelet, rédactrice en chef en charge des grands entretiens, Paris-Match • Michèle Cotta, éditorialiste, essayiste • Gérard Courtois, éditorialiste, Le Monde • Matthieu Croissandeau, directeur de la rédaction, L’Obs • Mathieu Deslandes, rédacteur en chef adjoint, Rue 89 • Frédéric Dumoulin, chef du service politique, AFP • Elsa Freyssenet, chef adjointe du service Politique, Les Échos • Étienne Gernelle, directeur de la rédaction, Le Point • Yaël Goosz, rédacteur en chef du service politique, France Info • Laurent Guimier, directeur, France Info • Béatrice Gurrey, grand reporter, Le Monde • Bruno Jeudy, rédacteur en chef Politique et économie, Paris Match • Laurent Joffrin, directeur de la rédaction, Libération • Marie-Ève Malouines, présidente, directrice générale LCP-AN • Julien Martin, journaliste politique, L’Obs • Dominique de Montvalon, rédacteur en chef politique, Le Journal du Dimanche • Luce Perrot, présidente – fondatrice, Lire la politique • Brice Teinturier, directeur général délégué, IPSOS France • Yves Thréard, directeur adjoint de la rédaction, Le Figaro • Valérie Toranian, directrice La Revue des Deux Mondes Tous ces noms et l’organisation du prix peuvent être consultés dans le document suivant . En vérité, la seule note triste de cette histoire, c’est que le jury de ces notables du journalisme était présidé par Costa Gavras – le pauvre, qu’est-il donc venu faire dans cette galère ? Selon de très bonnes sources, il était désolé par l’issue du scrutin. Le voici informé à ses dépens du naufrage du journalisme politique français… » Des lumières dans l'obscurité ? Autrement dit, actuellement, ouvertement ou pas, nos médias mainstream reflètent en général fidèlement la main mise des oligarchies financières, économiques et politiques occidentales sur les vieilles démocraties dont elles sont nées. Ils sont « la voix de son maître » et parfois son visage. Ce qui signifie que le journalisme de papa n'existe plus, ou si peu, et qu'il devient urgent de refonder une profession en fonction de l'évolution des grandes forces sociales, économiques, des moyens technologiques, et contre l'insupportable poids actuel de l'argent dans nos contrées dites démocratiques. Penser aussi à la formation de nos cadres, qui apparaît souvent comme un formatage « globalisé » dans le sens du vent dominant. Approcher la crise des médias, c'est donc réfléchir à la paralysie de la société, et aux moyens qui permettraient de rendre aux citoyens un pouvoir légitime. C'est pointer une crise de civilisation. Vaste sujet, que d'aucuns pourrait juger lourd d'une révolution, mais que l'on doit souhaiter sans violence. Une révolution au sens astronomique du terme en tout cas: retrouver au terme d'un long voyage dans le monde des « illusions Potemkine » qui nous cachent la réalité et les dangers du monde que l'on nous fait, les capacités de dire non et de s'empailler sur la place publique, sans être traité d'extrémiste, de populiste, d'incompétent, et de tous ces noms d'oiseaux qui déconsidèrent toute opposition au Système en place et interdisent le débat. Citons encore Laurent Mauduit, de Médiapart : « Ainsi vont la presse et l’audiovisuel français :

276 même si beaucoup de journalistes qui y officient essaient, envers et contre tout, de faire dignement leur travail, ils rencontrent, pour beaucoup d’entre eux, des difficultés croissantes. Terrible constat ! Si beaucoup de journalistes souffrent de cette situation, notamment les jeunes générations qui arrivent ; si beaucoup de citoyens ont une claire conscience des systèmes de connivence qui sont à l’œuvre, le piège est en train de se refermer : la presse et l’audiovisuel auraient besoin de faire l’objet d’une ambitieuse refondation démocratique, pour garantir ce droit à l’information, mais à l’inverse, la mainmise des milieux d’argent se renforce gravement. » Ce texte est donc une invitation à penser un changement de règle du jeu, un encouragement à s'informer autant que faire se peut, et à multiplier via internet les interventions, à proposer des idées pour se battre contre les conformismes d'airain qui nous accablent. Que chacun d'entre nous, debout, défende sa dignité et celle de ses concitoyens, pour un renouveau nécessaire qui ne passera que par un changement des mentalités, qui lui-même sera essentiellement assuré (après une réforme du système éducatif français?) par une presse libérée, plurielle, contradictoire, retrouvant sa grande ambition démocratique, informer vraiment. En sachant qu'il est vain d'imaginer les forces dominantes disposant de tous les pouvoirs accepter de gaieté de cœur de les perdre. L'enjeu est donc de taille. Et l'exemple économique donné par Médiapart pourrait être une réponse adaptée aux contraintes actuelles : rien n'interdit à des courants d'idées, à des partis politiques peu écoutés, n'ayant pas un accès quasi illimité aux médias officiels, de se lancer dans une aventure de presse numérique sur la base de l'abonnement et pourquoi pas de l'interactivité, afin de retrouver les secrets du pluralisme et de la confrontation d'idées que la France a perdus. Nul doute que nombre de journalistes marginalisés ou bâillonnés seraient ravis de s'engager dans une aventure digne d'être vécue. Je terminerai donc en pensant à tous ces journalistes exploités, pressurés, sans pouvoir, qui, dans un contexte parfois difficile, espèrent exercer un jour pleinement le métier qui les a fait rêver. A ce titre, l'exercice réel du métier de journaliste, leur ambition est la nôtre. Nous aurons besoin d'eux. Je leur dédie ces quelques pages.

Alain Pucciarelli

277 Postface

A-Présentation

B-Mondialisation p280

C-Russophobie p291

D-Du vrai journalisme ? P 304

E-Chômage et manipulations p 306

F-Imperium US p 311

G-UE et domination allemande p 321

H-Syrie : d'autres sons de cloches p 330

I-France p 342

J-Moralité ? P 355 A- présentation

Par souci de méthode, l'évocation d'initiatives individuelles ou non dans le monde médiatique est pointée en postface à travers quelques éléments d'actualité, pour ne pas alourdir un texte déjà long longueur aux dimensions du sujet traité. Et seuls des aspects pertinents ont été retenus, ce qui laisse à chacun un champ libre immense pour explorer mieux encore le sujet médias. Le choix des supports n'a pris en compte que l'intérêt des sujets traités, les étiquettes important moins que les idées, quand elles sont porteuses de réflexions utiles.

Il faut donc, sous réserve d'oublier des faits significatifs dans le cadre des moyens limités d'investigation qui, en l'occurrence, sont ceux d'un observateur libre mais seul, souligner en premier lieu quelques faits (effleurés plus haut) qui sont autant de signaux d'une possible réaction endogène dans la « corporation des journalistes », de la part d'une fraction de ces professionnels, minoritaire sans doute, mais porteuse d'un certain espoir. Si une hirondelle ne fait pas le printemps, il lui arrive de l'annoncer. Pourquoi pas ?

Il sera temps ensuite, à travers les initiatives de Natacha Polony, d'évoquer les possibles grandes manœuvres qui précèdent un très probable changement de président, et donc de gouvernement, sans pour autant présager un réel changement de ligne politique.

Enfin, en guise d'informations alternatives, quelques articles ou déclarations politiques pour ouvrir des pistes de réflexions quant à ce que pourrait être, face à la presse dite mainstream, une presse résolument opposée au credo de la première nommée. Car n'oublions pas que la liberté en matière de presse s'inscrit forcément dans le pluralisme des opinions exprimées.

La mise en cause du travail des médias devient un leitmotiv agité assez fréquemment en cette année 2016. Élise Lucet tente de se faire une réputation de journaliste brut de décoffrage, attachée à faire vivre la déontologie journalistique, Natacha Polony fait parler d'elle en promouvant un discours

278 critique intéressant, Paul Moreira ose dans un reportage télévisuel parler librement de l'Ukraine en montrant un autre aspect d'un conflit plus complexe qu'il n'y paraît, des journaux papier comme Fakir, se font une petite place, « Les (P)ièces (J)ointes » de Paul Jorion tentent depuis peu de prolonger le travail d'un blog largement reconnu par de nombreux internautes en un cursus plus traditionnel, sans doute propice plus encore à une réflexion approfondie sur le monde comme il va (mal). -Fakir : « François Ruffin à l’assaut de l’oligarchie et des médias complices le 26 février 2016 dans Médias

Depuis la sortie de son premier documentaire, mercredi 24 février 2016, François Ruffin fait beaucoup parler de lui dans les médias. Dans « Merci Patron ! », le fondateur du journal satirique Fakir montre les conséquences calamiteuses de la gestion de LVMH par le milliardaire Bernard Arnault. S’intéressant à la situation désespérée d’une famille du Nord, licenciée en 2007 après la délocalisation de leur usine textile vers les pays de l’Est, Ruffin montre l’envers du décors d’un capitalisme mondialisé sans gêne et sans remords. Militant social inspiré notamment, à l’instar de Pierre Carles, par les travaux du sociologue Pierre Bourdieu, le journaliste s’engage depuis de nombreuses années auprès des travailleurs en promouvant le protectionnisme économique, la pensée économique de Frédéric Lordon ou encore en dénonçant les multiples trahisons de la gauche. Concrètement, à la manière de ce que fait Élise Lucet dans « Cash Investigation », Ruffin s’emploie parfois, en compagnie de salariés, à acheter des actions dans des multinationales pour intervenir lors des assemblées générales, seul moyen d’interpeller directement les dirigeants sur leurs erreurs. À travers sa revue Fakir, fondée à Amiens, et ses nombreux ouvrages engagés, le réalisateur d’un jour souhaite raconter l’application froide et concrète de la pensée libérale. Né à Amiens en 1975, il est entré en 2000 au Centre de formation des journalistes (CFJ) de Paris après avoir obtenu une maîtrise de lettres. Aussitôt ses études terminées, il a créé Fakir, journal satirique militant tout d’abord local puis, en 2010, national à parution trimestrielle. Jusqu’en 2012, il a participé à plusieurs émissions de « Là-bas si j’y suis », sur France Inter. C’est avec une démarche proche de celle du documentariste américain militant Mickael Moore qu’il a entrepris la réalisation de « Merci patron ! », son premier documentaire. Sa cible : Bernard Arnault, patron de LVMH. « J’ai découvert que l’origine de la fortune de Bernard Arnault, c’était à côté de chez moi », explique-t-il à Libération . Et d’ajouter : « Depuis 2005 que je titille Bernard Arnault, il réagit de façon intelligente : il ne réagit pas. » Après un passage remarqué chez Bourdin sur RMC, François Ruffin s’est rendu sur Europe 1, où il avait prévu de faire un « attentat radiophonique ». Tout d’abord décommandé de l’émission de Frédéric Taddeï, la station d’Arnaud Lagardère a été contrainte de reprogrammer son invité, cette fois chez Jean-Michel Aphatie. L’occasion rêvée de dénoncer « l’oligarchie » sur ses propres ondes. Ainsi celui-ci a-t-il estimé au micro qu’« un salarié aussi désinvolte qu’Arnaud Lagardère aurait été licencié depuis longtemps, en n’assistant pas au conseil d’administration du fleuron de l’aéronautique européenne. Un salarié ferait ça, il serait licencié immédiatement. Votre patron au lieu d’être licencié, il a empoché deux milliards de plus-value. » Face à un Aphatie assez perturbé, le réalisateur n’a rien lâché et a préféré s’en prendre directement à

279 Lagardère plutôt que d’évoquer son film de manière générale, comme il l’avait fait chez Bourdin. L’attentat ne s’est pas limité aux mots : pendant l’émission, Ruffin a offert un Maroilles « pour remercier Arnaud Lagardère pour le plan com’ qu’il [lui] a assuré » en le décommandant de chez Taddeï, avant de quitter le plateau en lançant un os en plastique à Aphatie. Une manière symbolique d’affirmer que ce ne sont plus les médias qui, aujourd’hui lui donnent un os à ronger.

Dans son premier livre, « Les petits soldats du journalisme », il avait déjà dénoncé le système de formatage que constituaient les écoles de journalisme (il a lui­même fait le CFJ de Paris), où aucune place n’est donnée à l’engagement politique et à l’impertinence. Pour Ruffin, le sujet de son film rejoint parfaitement ce constat. En effet, ce dernier n’a pas manqué, récemment, de souligner la complaisance avec laquelle les médias présentaient Bernard Arnault, le montrant comme un investisseur et un entrepreneur alors qu’il a « fondé sa fortune sur un énorme tour de passe­passe, en 1984 : promettant de sauver le conglomérat textile Boussac, il en liquidera presque tous les actifs pour ne garder que Dior. »

Dans les médias dits mainstream eux­mêmes, des individus commencent donc, on l'a dit, à faire parler d'eux en remettant en cause bien des idées reçues sur l'actualité médiatique ou politique telle qu'elle nous est massivement présentée par télés, journaux, radios, etc..

Il faut donc se féliciter de tous ces soubresauts (la liste de ces éléments de changement n'est pas exhaustive) qui traduisent chacun à sa manière une crise déontologique profonde liée à bien des éléments et des faits portés par ce manuscrit. Mais il convient également de rappeler que sans une modification des conditions matérielles de production de l' « objet médias » (lire en début d'ouvrage), il restera bien difficile d'en appeler au courage individuel, à la conscience des professionnels ou à la raison pour induire des bouleversements certes nécessaires, mais que les seuls individus auront bien du mal à traduire dans les faits, dépendant d'un patron, d'une entreprise, de stratégies politiques qui les dépassent.

Nous sommes une fois encore devant la « contrainte système ». Mais ce dernier ne tolère­t­il pas des mises en cause de sa toute puissance pour mieux la conforter en donnant du grain à moudre aux mécontentements encore diffus qui dessinent une éventuelle grosse vague de contestation susceptible de l'emporter ? L'avenir le dira. Réjouissons­nous pour l'heure des aspects positifs de cette situation, dont les développements pourraient, sait­on jamais, nous surprendre.

Pour terminer ce long travail, qui méritera sans doute bien des mises à jour à travers par exemple la compétition électorale qui s'annonce en France, quelques articles que l'on trouve évidemment sur le Net.

280 B-Mondialisation (Brexit etc...)

- « Parler de souveraineté a plus de sens que jamais

Le texte du colloque du 18 juin du Comité Orwell

"Natacha Polony Publié le 21 juin 2016 / Économie Monde Politique Mots-clés : Brexit Comité Orwell, globalisation, mondialisation, Natacha Polony, Souveraineté

Je vais vous raconter une histoire1. Une histoire belge. Plus encore, l’histoire d’un symbole national belge, la mayonnaise qui accompagne les frites servies dans les baraques et les brasseries, et dont la recette traditionnelle fait la fierté de nos voisins. Récemment, un arrêté royal a autorisé à dénommer mayonnaise une préparation contenant 70 et non plus 80% d’huile, et 5 et non plus 7,5% de jaune d’œuf. La raison de cette modification est la demande adressée par l’industrie pour pouvoir rester compétitive face à la concurrence étrangère, qui propose des produits moins chers. Tollé chez les Belges qui dénoncent le dumping, la perte de qualité au nom du profit et protestent en invoquant la tradition, l’identité de leur cher pays qui serait menacée par les assauts de la modernité. Cette histoire est une parabole chimiquement pure des conséquences d’une mondialisation dérégulée sur un corps politique : impression de dépossession et réaffirmation identitaire. Il y a fort à parier que nos amis belges seront considérés par certains faiseurs d’opinion comme de sympathiques ringards, ou, au pire, d’ignobles chauvins en pleine dérive populiste et identitaire. On leur répondra que c’est le marché qui décide, que si le consommateur préfère payer sa mayonnaise moins cher, c’est l’essence même du libéralisme, et qu’ils ne voudraient tout de même pas interdire la mayonnaise sans huile et sans œufs. Bolchéviques, va ! Et puis, si l’on n’y prend garde, avec ces histoires de mayonnaise, on va finir par parler protectionnisme, et autres lubies xénophobes. Le repli l’aura emporté sur l’ouverture, la haine sur la générosité et l’accueil. De quel droit est-ce qu’ils préfèrent leur mayonnaise, ces Belges ? Alors nous y sommes. Parler de souveraineté a-t-il encore un sens dans un monde globalisé ? C’est la question qui nous rassemble et il n’y a pas de hasard à la poser en un 18 juin, 76 ans après un appel qui prenait justement acte de la dimension mondiale de la guerre pour en appeler à la légitimité face à la légalité qui s’était exprimée la veille à travers la demande d’armistice du Maréchal Pétain. Nous y reviendrons, mais l’homme du 18 juin est aussi celui qui déclarera le 27 mai 1942 : « La démocratie se confond exactement, pour moi, avec la souveraineté nationale. La démocratie, c’est le gouvernement du peuple exerçant la souveraineté sans entrave. » Parler de souveraineté quand le territoire national est occupé, quand l’Etat et ses rouages ont choisi de collaborer avec l’ennemi, voilà qui est compréhensible. Mais aujourd’hui ? Est-ce que ça ne relèverait pas d’une vieille rengaine masquant des obsessions plus coupables ?

Le danger souverainiste selon Joffrin, Attali, FOG, BHL… Il y a déjà plusieurs années que le qualificatif « souverainistes » est accolé à ces inclassables qui

281 naviguent entre la droite et la gauche et à qui l’on a fait rendre gorge de la tonitruante victoire du 29 mai 2005. Souverainistes, c’est quand on ne dit pas « nationaux-républicains » ou autres joyeusetés. Mais souverainistes, ça ne dit pas grand-chose au plus grand nombre. Seulement le terme a ressurgi. Souvenez-vous, c’était à l’automne dernier. Libération décide de consacrer une une à Michel Onfray après son interview dans le Figaro . Et le philosophe est accusé d’avoir dérivé vers l’extrême droite, de s’abandonner à des idées nauséabondes, rances, et tout autre adjectif cher à nos anti- fascistes au nez sensible. Quelques jours plus tard, après diverses passes d’armes par médias interposés, Laurent Joffrin lâche l’argument ultime : Onfray est sur « la pente glissante du souverainisme » . Une pente qui amène à « défendre la nation au nom de la justice sociale », mais qui, nous dit le débusqueur de déviants, « finit toujours par préférer la nation à la justice sociale ». Qui prétend protéger son peuple pour mieux détester les autres. Qui rêve de frontières quand il faudrait tendre la main, ouvrir le cœur… Amen. Le souverainisme, voilà l’ennemi. Dans un journal censément de gauche comme Libération, mais aussi dans un journal de droite libérale comme le Point. Il suffit de lire un seul éditorial de Franz- Olivier Giesbert (c’est déjà un effort) pour s’apercevoir qu’il est parti en croisade contre le souverainisme, ce nouveau fléau (parti est bien le terme : on l’a perdu depuis longtemps). Mais on pourrait citer également Bernard-Henri Lévy chez qui la lutte contre le souverainisme relève de l’exorcisme. Jacques Attali, très fier de sa dernière trouvaille, une réplique qu’il ressort dans chaque émission, face à chaque journaliste esbaudi : « Qu’est ce que c’est que cette histoire de racines. Nous ne sommes pas des radis. » Pas des chênes non plus, apparemment. C’est donc tellement dangereux, le souverainisme, qu’il faille dégainer l’arsenal intellectuel, tout ce que le pays compte de brillants esprits ? Le souverainisme, c’est la guerre, la haine de l’Autre, le repli identitaire. Le souverainisme, ce sont les heures les plus sombres de notre histoire. Bon, le mot n’existait pas, mais on comprend. Le souverainisme occupe dans le vocabulaire politique contemporain la même place que le populisme. Il veut désigner une sorte de manipulation des masses par un discours démagogique et dont ses auteurs sauraient parfaitement combien son application serait soit impossible soit éminemment dangereuse pour l’avenir du pays.

Le libre-échange apporte la paix, bien entendu ! Parce que tel est bien le sujet qui les préoccupe. Bien plus que la dimension morale mise en avant pour rejouer la pantomime de l’antifascisme. Le souverainisme est condamnable parce qu’il s’oppose à la marche du monde, parce qu’il prétend refuser l’inéluctable, qui est aussi le seul destin souhaitable. Nous sommes bien d’accord, la morale n’a pas grand-chose à voir avec tout cela. On parle de choses sérieuses. On parle d’économie. Le souverainisme se promène en général dans les articles et les sermons audiovisuels accompagné de son corollaire tout aussi sulfureux : le protectionnisme. Et les deux sont dangereux, car ils apportent la guerre quand le libre-échange, le « doux commerce » cher à Montesquieu, apporte la paix et la concorde entre les peuples. Il est d’ailleurs intéressant de constater que ce qui nous est proposé comme modèle, l’extension du libre-échange à travers différentes structures supra-nationales pour accompagner la mondialisation des échanges et la globalisation des normes et des cultures, nous est présenté à la fois comme bon moralement et comme inéluctable. Bon parce qu’inéluctable ? On nous demande de nous en réjouir parce que, de toute façon, nous n’avons pas le choix et qu’il faudra bien vivre dans ce monde-là ? Nos élites politico-médiatiques sont leibniziennes : elles nous proposent le meilleur des mondes possibles et ne lésinent pas sur les moyens de nous en convaincre. Mais deux problèmes se posent à tout esprit un minimum éveillé. Le premier : en quoi cette globalisation qui détermine actuellement l’organisation de nos économies et, par capillarité,

282 l’ensemble de nos modes de vie, est-elle inéluctable ? La mondialisation, c’est-à-dire l’augmentation des échanges et de la circulation des individus, existe à différentes échelles depuis Alexandre le Grand. Elle est un fait. Un fait qui découle aujourd’hui du développement des moyens de transports et de la révolution technologique qui transforme les informations et les capitaux en flux. Et l’on peut ajouter que la troisième révolution industrielle, celle de l’informatique, lui donne une dimension qui n’a plus rien à voir avec ce qui a précédé. Très bien. Mais la globalisation, c’est- à-dire l’uniformisation des normes et du droit pour faciliter le flux et étendre une conception unique de l’organisation des sociétés humaines, est-elle de l’ordre de la nécessité ? Pour le dire autrement, était-il obligatoire d’accompagner la mondialisation d’un mouvement de dérégulation massif qui profite aux acteurs dominants que sont les multinationales majoritairement anglo-saxonnes ?

L’économie, comme la physique, serait une science dure ! Leibniziens, nos dirigeants : ce qui est ne pouvait pas ne pas être… Je vous invite à lire sur le blog de Coralie Delaume, l’Arène nue, la traduction d’un passionnant article publié dans le Guardian . Il est signé George Monbiot et il nous prouve que ce sont les médias anglo-saxons qui nous en remontrent en matière de liberté de ton et de profondeur d’analyse. On cherchera vainement un équivalent, sur une telle longueur, appuyé sur une démonstration historique précise, dans la presse française. Que nous dit cet article ? Que l’idéologie qui domine nos vies nous est à peu près inconnue parce qu’elle ne se présente pas comme une idéologie mais comme un fait de nature. « Les tentatives visant à limiter la concurrence, nous dit Monbiot, sont considérées comme des dangers pour la liberté. L’impôt et la réglementation sont considérés comme devant être réduits au minimum, les services publics comme devant être privatisés. L’organisation du travail et la négociation collective par les syndicats sont dépeints comme des distorsions du marché qui empêchent l’établissement d’une hiérarchie naturelle entre les gagnants et les perdants. L’inégalité est rhabillée en vertu : elle est vue comme une récompense de l’utilité et un générateur de richesses, lesquelles richesses ruisselleraient vers le bas pour enrichir tout le monde. Les efforts visant à créer une société plus égalitaire sont considérés comme étant à la fois contre-productifs et corrosifs moralement. Le marché est supposé garantir que chacun obtienne ce qu’il mérite. » Le néolibéralisme fut pourtant assumé comme tel, sous ce nom, par ses concepteurs, Ludwig von Mises et Friedrich Hayek en 1938. Mais depuis, il a disparu. Quand vous prononcez ce mot dans les médias, certains se gaussent. Vous traitent quasiment de complotiste, en tout cas d’aimable plaisantin qui, bien sûr, ne connaît rien à l’économie. Parce que l’économie est une science. Une science dure. Elle s’appuie sur des lois aussi évidentes et nécessaires que les lois de la physique. La concurrence et l’autorégulation des marchés, c’est la loi universelle de la gravitation. Du coup, un doute nous saisit. Et c’est le second problème posé par cette idéologie dominante. Si la globalisation relève de la fatalité, il n’y a rien à choisir. Il n’y a pas de liberté possible face à la nécessité. Mais alors, sommes-nous encore en démocratie ? On nous demande de désirer ardemment ce qui nous est de toute façon présenté comme notre destin, sans échappatoire, parce que dans ce désir que nous développerions se trouverait l’illusion du choix, l’illusion de la liberté. En rhétorique journalistico-politique, cela donne des choses du genre : « Nous sommes les seuls à rêver encore qu’on peut – au choix – maintenir un tel niveau de charges, et donc de protection sociale, conserver des services publics non ouverts à la concurrence… », « Nos voisins, eux, se portent très bien… » On l’a bien compris, « il n’y a pas d’alternative ». Il est assez croustillant d’entendre cette antienne thatchérienne reprise aujourd’hui par un ministre de l’Economie « de gauche », poulain de Jacques Attali, ancien conseiller d’un président de la République de gauche, qui proposait de changer la vie et pour qui Margaret Thatcher incarnait un repoussoir absolu. Il est vrai que le même Emmanuel Macron fut rapporteur de la commission Attali à l’origine de la « loi

283 pour la libération de la croissance » mise en place par Nicolas Sarkozy. Qui n’en appliqua que quelques recommandations car il jugeait l’ensemble trop libéral. En effet, il n’y a pas d’alternative. Politiquement, du moins.

Où est passé le politique ? Mais s’il n’y a pas d’alternative, où est la liberté ? Où est le politique ? Qu’il faille tenir compte des contraintes du réel est une évidence et la liberté est limitée par le réel. Mais encore faut-il se mettre d’accord sur le réel, ses lois et les limites qu’elles imposent. Et l’on voit mal comment des gens qui adhèrent à un économisme dont l’objet est de se présenter comme le fruit de lois naturelles, peuvent encore se faire passer pour libéraux quand ils finissent par nier toute forme élémentaire de liberté. La question sous-jacente est donc bien celle-là, celle de la démocratie. Celle qui resurgit à chaque fois qu’un dirigeant (en général pour des raisons politiciennes, Cameron sur le Brexit, Jacques Chirac en 2005) prend le risque démesuré de demander directement son avis au peuple par un référendum. A vrai dire, c’est l’idée même de demander son avis au peuple qui paraît alors irresponsable. On nous ressortirait presque la rhétorique sur les « classes dangereuses ». Du moins a-t-on droit à la litanie habituelle : populisme, démagogie face à un peuple incapable de juger en connaissance de cause et qui, bien évidemment, se déterminera sur des critères qui n’ont rien à voir avec la question posée. Comment voulez-vous, ils n’y comprennent rien ces braves gens… Démocratie, référendum, liberté des peuples de choisir leur destin… la notion qui sous-tend ce débat est bien celle qui est au cœur de la réflexion des irresponsables, des dangereux, vous savez, ces souverainistes honnis : la souveraineté. Etre souverainiste, c’est assumer le fait que ce concept de souveraineté est crucial pour quiconque prétend penser l’organisation du corps social et politique dans un cadre à peu près démocratique. Bref, pour qui entend répondre à l’économisme, nouvelle idéologie dominante, par un concept politique. Curieusement, ce concept vieux de quatre siècle semble devenu totalement incompréhensible pour les dirigeants de nos vieux Etats-nations et pour les commentateurs chargés d’analyser leurs décisions. Alors rappelons la définition classique, celle de Louis Le Fur : « La souveraineté est la qualité de l’Etat de n’être obligé ou déterminé que par sa propre volonté dans les limites des principes supérieurs du droit et conformément au but collectif qu’il est appelé à réaliser. » La souveraineté est d’ailleurs définie au XVIème siècle par Jean Bodin pour caractériser cette puissance d’un Etat qui ne peut se résumer aux vieux concepts romains de potestas et auctoritas. Mais c’est à la révolution qu’il prend tout son sens pour nous, Français. Parce qu’à la souveraineté nationale, cette indépendance qui permet à une nation de se déterminer sans dépendre d’une autre puissance, s’ajoute la souveraineté populaire. Ce n’est plus le roi qui incarne la Nation et détermine son destin, c’est le peuple qui est son propre souverain. Oxymore extraordinaire que le peuple souverain ! Il n’est plus mineur. Il n’y a plus de sujets, donc de soumis, mais des citoyens. Des citoyens qui constituent un corps politique et déterminent par la délibération le bien commun, qui ne se réduit pas à la somme de leurs intérêts particuliers. Des citoyens qui se choisissent en conscience un destin commun. Cela s’appelle la République, et c’est la forme que prend chez nous la démocratie. Car il est bien question de démocratie. Et de Gaulle prend soin de le préciser dans la Constitution de 1958 : « Article 2 : La devise de la République est “Liberté, Égalité, Fraternité”. Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Article 3 : La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice. » Globalisation ou pas, révolution technologique ou pas, il n’est pas de démocratie sans l’exercice par le peuple de la

284 souveraineté nationale.

Pourquoi vouloir distinguer souveraineté nationale et souveraineté populaire ? Et l’on en connaît qui prennent des pincettes, qui tournent autour du pot, qui construisent des raisonnements byzantins pour distinguer souveraineté nationale et souveraineté populaire, la seconde leur semblant plus respectable, plus « gauche bon teint ». Parce que dans souveraineté nationale, il y a nation, et de la nation, on glisse facilement vers le nationalisme, surtout en une époque où les journalistes sont devenus commentateurs de patinage artistique et s’emploient essentiellement à juger des glissades et autres dérapages des uns et des autres. Mais brisons là. Quel peuple peut se dire souverain dans une nation entravée, sous domination ? Quel peuple décide de son destin quand le champ de sa souveraineté est borné à quelques domaines réservés ? Se cacher derrière son petit doigt dans l’espoir de n’être pas chassé du camp du Bien a quelque chose de pathétique. Et puis il y a ceux qui font semblant de ne pas comprendre. « Souveraineté ? Comme ce terme est vague. Mais qu’est-ce que vous entendez par là ? Ne sommes-nous pas libres dans un système démocratique garanti par la Constitution ? Pourquoi s’accrocher à un mot ? » Pour les vrais atrophiés du cervelet et les faux idiots, il est une façon simple de résumer les choses. C’est d’ailleurs celle qu’emploie Michel Onfray depuis qu’il a décidé d’assumer son souverainisme. Il l’explique dans son dernier livre, le Miroir aux alouettes. Il suffit de demander à nos aimables contradicteur quel est le contraire de souverain. Les antonymes de souverain sont : subordonné, esclave, domestique, sujet, soumis, vassal. Au moins, les choses sont claires. Je vous renvoie d’ailleurs également – et surtout – au livre de Jacques Sapir, Souveraineté, démocratie, laïcité. On nous répondra bien sûr que tout cela relève du fantasme, que nous sommes en démocratie, dans un pays indépendant dont les gouvernements élus mènent les politiques. Il n’y a pas de sujet. Tout au plus avons-nous concédé quelques délégations de souveraineté à une entité supranationale, mais elle aussi démocratique puisque nous en élisons le parlement, et uniquement dans des domaines aussi restreints que la monnaie et le budget. Une paille.

Maastricht ou l’enterrement de 1789 Il n’est besoin que de réécouter le magistral discours de Philippe Séguin devant l’assemblée nationale le 5 mai 1992 pour comprendre ce qui s’est joué lors du Traité de Maastricht, et qui est à l’origine d’une partie des crises qui minent le pays. Philippe Séguin soulignait que le fondement de notre Etat de droit, depuis deux siècle, est dans cette idée que la souveraineté nationale appartient au peuple, de sorte que ses représentants, l’Assemblée nationale en l’occurrence, n’ont aucune compétence à se dessaisir de leur pouvoir législatif et à valider par avance des textes qui n’auront même pas à être ratifiés par eux. « Aucune assemblée ne peut déléguer un pouvoir qu’elle n’exerce qu’au nom du peuple. » Ce que le peuple a fait, seul le peuple peut le défaire. En ce sens, nous dit- il, 1992 est l’enterrement de 1789. Caricature ? Dramatisation loufoque ? On nous répond d’abord que cette délégation de pouvoir est limitée. Elle ne concerne que certains domaines. L’Etat conserve ses missions régaliennes. La souveraineté monétaire, ce n’est rien, ça ne détermine pas l’identité collective. Philippe Séguin répondait par avance : la souveraineté est une notion globale et indivisible, comme un nombre premier. La découper, c’est la vider de sa signification. Le dernier à l’avoir fait était Brejnev en 1968 avec son concept de « souveraineté limitée » appliqué aux démocraties populaire. Ce qui signifiait ni souveraineté ni démocratie…

285 On nous répond également que ces délégations de souveraineté sont temporaires. Tiens donc. Pourtant, quand il s’est agit de suggérer que la Grèce devrait quitter, même temporairement, la zone euro, la réponse a été unanime : c’est impossible. Ça n’est pas prévu par les traités. Vous savez, le fameux « il n’y a pas de plan B ». Les plus batailleurs brandissent le fameux article 50 du traité de Lisbonne, qui prévoit une éventuelle sortie au bout de deux ans de négociations et d’une décision à l’unanimité des membres. Une usine à gaz propre à décourager les plus téméraires. Non, une fois qu’on est entré, on ne sort plus. D’où l’indignation de ces braves gens quand les Britanniques se permettent de voter sur le Brexit. Mais de quel droit s’autorisent-ils ce que nous nous sommes interdit ?

La base de la démocratie, c’est que le peuple peut changer d’avis Quel que soit le résultat du référendum, jeudi prochain, c’est ce vote en lui-même qui constitue la plus majeure des transgressions. Parce qu’il nous rappelle ce qu’est un contrat : une délégation temporaire de souveraineté en échange d’avantages ou de protection. Temporaire, tel est bien l’enjeu. La base de la démocratie, c’est que le peuple peut changer d’avis. Nulle génération ne peut enchaîner les suivantes, leur interdire d’exercer leur propre souveraineté. Ce qui a été fait, donc, doit pouvoir se défaire. Sans quoi il n’est pas de démocratie. La désormais fameuse sentence de Jean-Claude Junker – dont la plus grande vertu est d’exprimer sans complexe ce que d’autres préfèrent recouvrir d’un voile pudique – ce « il n’est pas de choix démocratique en dehors des traités européens » résume l’idée que ces gens se font de la démocratie. D’autant que ce transfert sans retour des compétences de l’Etat ressemble fort à un cercle vicieux. On se souvient de la merveilleuse rhétorique soviétique : le goulag, le cauchemar, les pénuries, c’est parce que le processus n’est pas arrivé à son terme et que le paradis communiste n’est pas encore totalement bâti. La technocratie ? Elle n’est qu’un mal provisoire pour préparer cet avènement. Le principe vaut pour toutes les idéologies et la construction de l’Europe néo-libérale en est une dans toute la pureté de sa définition et de ses conséquences. Elle a ses zélotes et ses prophètes. Ses grands inquisiteurs, aussi. Réécoutons un instant le discours de Philippe Séguin : « Quand, du fait de la monnaie unique, le coût de la dénonciation des traités sera devenu exorbitant, le piège sera refermé. Craignons alors que les sentiments nationaux, à force d’être étouffés, ne s’exacerbent jusqu’à se muer en nationalisme. Car rien n’est plus dangereux qu’une nation trop longtemps frustrée de la souveraineté par laquelle s’exprime sa liberté, c’est-à-dire son droit imprescriptible à choisir son destin. » Il y aura fallu moins de vingt-cinq ans. Mais nous y sommes. Et le seul argument qui reste aux grands prêtres de l’Union européenne est de renverser l’ordre des causes et des conséquences. Le mal, c’est ce nationalisme préexistant, et que l’on n’a pas assez écrasé. Donc, il faut protéger l’Europe contre ses propres démons. Ils plaideront les meilleures intentions du monde : éviter à des peuples abrutis bernés par des démagogues sans vergogne de sombrer dans une récession tragique et, qui sait, dans des guerres sanglantes.

On ne renonce pas impunément à la souveraineté C’est oublier que la récession, nous y sommes. Et que les maux dont nous souffrons, chômage de masse, déficit de la balance commerciale, désindustrialisation massive, étaient prédits par tous ceux qui avaient correctement analysé ce que signifie le processus d’intégration dans une monnaie unique d’un espace économique hétérogène. Et les souffrances engendrées par ce naufrage économique font naître des tensions dont nous voyons en ce moment la traduction. Parce qu’on ne renonce pas impunément à la souveraineté.

286 Comment imaginer qu’un corps politique qui a renoncé à ce qui fait sa raison d’être puisse ne pas imploser ? C’est à cette fragmentation que nous assistons. Fragmentation du corps politique, de la communauté nationale, largement encouragée par ceux qui ont intérêt à définitivement achever ces Etats-nations empêcheurs de commercer en rond. Au profit d’une autre souveraineté ? On connaît le mythe d’une citoyenneté européenne qui devrait se substituer par miracle aux citoyennetés nationales. C’est faire peu de cas de l’Histoire. C’est ne pas comprendre que la constitution d’une Nation à travers l’émergence d’un peuple sur un territoire déterminé est un processus lent et complexe et surtout impossible à reproduire artificiellement en l’espace de quelques années. Reste le processus inverse. Pour se débarrasser des vieux Etats-nations et de leur encombrante démocratie, saper ce qui en est le corps vivant, le peuple comme entité politique. Ce peuple qui naît en France de l’intégration de populations diverses à une histoire et une géographie, à un ensemble de valeurs et de modes de vie, sans lesquels il n’est que des individus juxtaposés dans une entité administrative neutre régie par le droit et le marché. L’accomplissement du rêve thatchérien : « Je ne connais pas la société, je ne connais que des individus. » Tout ce qui fracture la communauté nationale, tout ce qui efface la culture commune de citoyens dont les identités diverses étaient jusqu’à présent transcendées par l’appartenance commune à la Nation, sert les intérêts d’un système dont le but est fondamentalement anti-démocratique. Jusqu’à preuve du contraire, il n’est pour l’instant de véritable exercice de la démocratie que dans le cadre des Etats-nations. Nous avons donc remplacé la souveraineté nationale par… rien. Par un vide que vient remplir une inflation technocratique chargée de masquer la réalité de ce système, son objet principal : favoriser les intérêts d’entités privées et déterritorialisées, de Google à Monsanto en passant par Amazon, Apple, Philipp Morris… ces multinationales qui ont quelques 15 000 lobbyistes à demeure à Bruxelles et qui s’appliquent pour l’heure à dicter à la Commission des traités de libre-échange permettant de lisser l’espace économique et d’imposer pour les décennies futures les normes et le droit américain. Les efforts de quelques vigies ont déjà permis de faire prendre conscience de l’absence totale de transparence qui entoure les négociations et qui constitue en elle-même un total déni de démocratie. Mais le principe d’irréversibilité que nous évoquions tout à l’heure y est également à l’œuvre avec une détermination admirable, à travers ce qu’on appelle les effets de cliquet. Tout ce qui aura été négocié ne pourra plus être révisé, même par un gouvernement nouvellement élu. « Il n’est pas de choix démocratique en dehors des traités européens »…

L’économisme, ce totalitarisme L’économisme, cette idéologie de réduction des différents champs de l’action humaine à leur dimension économique, n’est donc rien d’autre qu’un totalitarisme d’autant plus efficace qu’il repose sur le consentement des individus. Qui serait contre la prospérité ? Qui serait contre la liberté ? Même quand la liberté dont il est question n’est qu’une privation des libertés politiques fondamentales qui font le citoyen au profit de la liberté minimale du consommateur, celle de choisir entre deux produits en fonction de ses pulsions immédiates et de son intérêt à court terme. Et c’est sans doute le dernier élément qui permet de comprendre l’articulation entre souveraineté et démocratie : il n’est pas de souveraineté du peuple sans souveraineté des individus, c’est-à-dire sans la capacité à exercer leur libre arbitre et à forger leur jugement sans dépendre d’autrui. Pour le dire autrement, il n’est pas de démocratie sans éducation du peuple. Rien de plus efficace, donc, pour délégitimer le peuple que de détruire le principal outil de son émancipation : l’instruction publique. Il n’y a aucun hasard à voir les différentes réformes de l’éducation nationale remplacer la

287 transmission des savoirs universels dont Condorcet faisait la condition de la formation d’hommes libres par une évaluation des compétences, terme importé de la formation professionnelle et inspiré des recommandations de l’OCDE et de la Commission européenne en matière d’éducation. L’éducation, domaine supposé régalien, dans lequel, nous explique-t-on, la France n’a pas opéré de transfert de compétences (sous entendu : elle est responsable de ses échecs). L’éducation qui est en fait l’un des principaux champs d’expérimentation pour cette extension du domaine de l’efficience économique. Il n’est besoin que de rappeler le Livre Blanc de la Table ronde des Entreprises Européennes en 1995 : « L’éducation doit être considérée comme un service rendu aux entreprises. » Les compétences, c’est ce qui permettra de former des employés adaptables (d’augmenter, pour utiliser le jargon en vigueur, leur « taux d’employabilité »). Les mêmes sur quelque lieu de la planète que ce soit, puisqu’il n’est plus question de peuple ou de nation, ces réalités du monde ancien. Des employés qui, pour se délasser, pourront offrir à Coca Cola un peu de leur temps de cerveau disponible, sur lequel les chaînes de télévision font leur beurre. L’articulation entre souveraineté nationale, souveraineté populaire et souveraineté des individus est donc indispensable pour former un authentique système démocratique. Et, à moins d’estimer que la mondialisation des échanges implique la disparition nécessaire de la démocratie, on conviendra que rien ne justifie son abandon au profit d’une technocratie déterritorialisée. Bien au contraire, il n’est de mondialisation véritablement bénéfique qu’organisée et régulée. Que ce soit sur le plan des barrières douanières (les Etats-Unis ne se sentent nullement gênés de prévoir des droits de douane de 522% sur l’acier chinois, quand l’Union européenne les fixe à 20%), ou que ce soit sur le plan du droit, à travers les réglementations visant notamment les produits agricoles protégés par une appellation d’origine. Si la mondialisation est un fait, la globalisation est une idéologie. Et comme toute idéologie, elle nécessite d’être explicitée, de voir analyser ses ressorts et ses présupposés.

« Quand on est couillonné, on dit : “Je suis couillonné. Eh bien, voilà, je fous le camp !” » Mais pour résumer ce que doit être l’exercice par une nation de sa souveraineté, c’est encore le Général de Gaulle qui en a le mieux explicité les contours face à Alain Peyrefitte : « C’est de la rigolade ! Vous avez déjà vu un grand pays s’engager à rester couillonné, sous prétexte qu’un traité n’a rien prévu pour le cas où il serait couillonné ? Non. Quand on est couillonné, on dit : “Je suis couillonné. Eh bien, voilà, je fous le camp !” » Ce sont des histoires de juristes et de diplomates, tout ça. » Nous sommes, au Comité Orwell, une association de journalistes. Parce que nous estimons qu’appartient à notre profession le soin d’expliciter les ressorts de toutes les idéologies, de mettre au jour les processus qui sont à l’œuvre derrière l’apparence des événements. Il appartient à notre profession, non pas seulement de commenter les manifestations contre la loi travail, les violences qui en découlent ou l’impuissance des gouvernants, mais de mettre en avant l’ensemble des phénomènes qui concourent à délégitimer un Etat qui, parce qu’il a depuis longtemps renoncé à sa souveraineté, n’est plus qu’une institution fantôme incapable de contrer les forces centrifuges qui déstructurent la société. Il appartient à notre profession de ressortir les différents textes de la Commission européenne ou d’autres instances supranationales réclamant une harmonisation du droit du travail pour œuvrer à la convergence des économies (ce que, une fois encore, prévoyait Philippe Séguin dans son discours de mai 1992). Il appartient à notre profession de ne pas seulement disserter sur la question de savoir si les opposants à la réforme du collège sont d’affreux réactionnaires, mais de décrire avec précision tous les ressorts de la transformation de l’Education nationale en auxiliaire de l’idéologie utilitariste, à rebours de tout le projet de l’école républicaine.

288 Il appartient à notre profession de ne pas être tributaire du flux des informations et de la superficialité qu’il facilite, mais de décrire les rouages, d’éclairer les infrastructures et non pas seulement les superstructures, pour parler en termes marxistes. Comme l’a dit très judicieusement Lincoln, « on peut mentir tout le temps à une partie du peuple, on peut mentir à tout le peuple une partie du temps, mais on ne peut pas mentir tout le temps à tout le peuple. » A moins de changer le peuple de temps en temps. Alors il nous appartient d’offrir un peu de résistance. Profitons-en, nous sommes aujourd’hui le 18 juin. Et ce mois de juin 2016 a des airs de débâcle, comme un certain mois de juin 1940. La souveraineté, la démocratie, l’émancipation des peuples : quel plus beau programme ? »

- « Brexit : vingt intellectuels eurocritiques lancent un appel pour un nouveau traité • Par lefigaro.fr TRIBUNE - Les auteurs* demandent une renégociation des traités qui s'articulerait autour de trois priorités : la souveraineté, la prospérité et l'indépendance stratégique. Le peuple britannique a exprimé souverainement sa volonté de rester maître des décisions qui le concernent. Ce vote courageux et massif est évidemment une claque pour la dérive technocratique dans laquelle l'Union européenne actuelle s'est laissé enfermer depuis au moins trois décennies, sur la base de traités marqués au coin du néolibéralisme alors triomphant (Acte unique, traité de Maastricht, traité de Lisbonne), ou de l'ordo-libéralisme allemand (traité de cohérence budgétaire dit «TSCG» de 2012). Tout montre que dans la plupart des pays européens, les citoyens n'acceptent plus d'être gouvernés par des instances non élues, fonctionnant en toute opacité.

Tout montre que dans la plupart des pays européens, les citoyens n'acceptent plus d'être gouvernés par des instances non élues, fonctionnant en toute opacité. Le vote britannique peut être une chance: il doit être l'occasion de réorienter la construction européenne, en articulant la démocratie qui vit dans les nations avec une démocratie européenne qui reste à construire. Nous demandons la réunion d'une conférence européenne sur le modèle de la conférence de Messine de 1955 qui, après l'échec de la Communauté européenne de défense (CED), a permis de remettre la construction européenne sur les rails et a préparé efficacement le traité de Rome. Cette conférence se réunirait à vingt-sept, avec un statut spécial d'observateur pour la Grande-Bretagne. Cette conférence aurait pour objet la renégociation des traités sur les trois questions cruciales dont la méconnaissance a conduit à l'affaissement de l'actuelle construction européenne: la souveraineté, c'est-à-dire la démocratie, la prospérité et l'indépendance stratégique. D'abord rendre à la souveraineté populaire et à la démocratie leurs droits dans une Europe confédérale qui serait faite de l'entente et de la coopération entre les nations: cela suppose une réorganisation profonde des compétences et, le cas échéant, du mode de désignation des institutions européennes (Conseil, Commission, Parlement, Cour de justice, BCE). Il faudrait notamment outiller le Conseil européen où vit la légitimité démocratique en le dotant des services capables de préparer et exécuter ses décisions. De même le Parlement européen devrait procéder des Parlements nationaux pour que les compétences déléguées puissent être démocratiquement contrôlées. Le paradigme néolibéral - la croyance en l'efficience des marchés - ne peut se substituer à la définition de politiques industrielles et d'un cadrage social.

289 Ensuite, rendre à l'économie européenne les clés de la prospérité en revoyant profondément les règles actuelles en matière de politique économique et monétaire. Le paradigme néolibéral - la croyance en l'efficience des marchés - ne peut se substituer à la définition de politiques industrielles et d'un cadrage social. Le modèle mercantiliste allemand (excédent extérieur approchant les 10 % du PIB) est intransposable aux autres pays et notamment à ceux de l'Europe du Sud. Il faut redéfinir un modèle européen de développement acceptable pour tous les Européens. Enfin, il faut donner à l'Europe la capacité stratégique qui lui a toujours fait défaut depuis l'origine. Nous nous rapprocherions ainsi de l'«Europe européenne» du général de Gaulle: il faudra pour cela renouer un dialogue avec la Russie, pays européen indispensable pour l'établissement d'une sécurité dont toutes nos nations ont besoin et définir des politiques ambitieuses et cohérentes de co- développement vis-à-vis de l'Afrique et au Moyen-Orient. Ce sont là les trois clés de l'avenir de l'Europe. Nous avons la conviction qu'il appartient à la France de lancer cette grande initiative qui proposera de remettre l'Union européenne sur ses pieds. Les peuples européens et pas seulement le nôtre, l'attendent. Nous faillirions à notre devoir de citoyens français mais aussi d'Européens si nous n'agissions pas pour que la France se porte aux avant-postes de cette grande tâche. Nous appelons tous ceux qui refusent le rétrécissement du champ de l'avenir à œuvrer pour réorienter la construction européenne sur ces bases nouvelles. * Liste des signataires: Marie-Françoise Bechtel, Guillaume Bigot, Jean-Pierre Chevènement, Gabriel Colletis, Éric Conan, Franck Dedieu, Alain Dejammet, Éric Delbecque, Jean-Pierre Gérard, Christophe Guilluy, Loïc Hennekinne, Paul Jorion, Jean-Michel Naulot, Michel Onfray, Natacha Polony, Jean-Michel Quatrepoint, Emmanuel Lévy, Benjamin Masse-Stamberger, Claude Revel, Henri Sterdyniak, Jacques Sapir, Paul Thibaud. » Commentaire de l'auteur : On peut adhérer au premier article de Mme Polony tout en se demandant comment les signataires de la pétition ci-dessus entendent s'y prendre pour « réformer » l'UE, car il ne s'agit pas de l'Europe mais des pays qui ont opté pour l'UE. Peu importe au fond. On sait qu'à 28, quand en principe les décisions doivent être prises à l'unanimité, imposer une réforme risque de se révéler pour le moins très difficile. Mais on sait que dans le cas de l'accueil des réfugiés et de la fixation des quotas par état membre, la Commission a mis entre parenthèses la règle de l'unanimité. Le problème se circonscrit donc, sans doute, à l'Allemagne, qui n'entend pas céder sur son leadership et qui campe sur des « positions préparées à l'avance » depuis longtemps. Et, derrière notre ami et voisin, la France aurait à faire face aux vrais patrons, à savoir les Etats-Unis d'Amérique, pour lesquels l'UE est un élément important dans la vision hégémonique qui sous-tend leur politique étrangère, et qui n'ont à priori que faire d'une « Europe puissance », si tant est que cette dernière soit le vrai souhait de l'Allemagne (cela se saurait!), premier allié des Etats Unis sur le continent européen. On sait aussi qu'il est aisé pour l'UE de mobiliser la BCE pour mettre en difficulté les banques d'un pays membre récalcitrant comme cela a été fait en Grèce. On voit donc que bien des choses bougent, que des propositions sans doute imparfaites, qui n'auraient probablement pas été popularisées par certains grands médias il y a quelques mois, peuvent peu à peu se faire une place et être proposées aux citoyens, et c'est donc très positif. La suite dira si ces frémissements seront médiatiquement et politiquement pris en compte voire, si possible, approfondis à la veille des présidentielles, et comment. Car pour l'heure, en

290 dehors de l'usage de l'article 50 du traité de Lisbonne et de la sortie ordonnée de l'UE et de l'Euro dans le cadre prévu par ce même traité de Lisbonne, on a du mal à imaginer comment peser sur le destin de l'UE. On peut par ailleurs s'interroger sur la stratégie du Figaro qui donne une place légitime à une vision de l'avenir que le camp politique qu'il représente, on va dire la droite de gouvernement, n'a officiellement pas incarnée. Souvenons-nous que le président Sarkozy a fait voter par le Congrès le traité de Lisbonne, violant de la sorte la volonté populaire exprimée lors du référendum sur le Traité Constitutionnel Européen, et que, plus généralement, les présidents de droite depuis Jacques Chirac n'ont pas remis en cause l'intégration européenne. (Note de l'auteur : J'ai envoyé un mail à Mme Polony, lui signalant que je parlerais de ses initiatives et de ses prises de position, en lui précisant que j'étais preneur d'un billet éventuel. J'espérais que l'on aurait l'occasion d'échanger sur le sujet, elle ne m'a pas répondu. J'en reste donc au constat que je fais ci-dessus.)

291 C-Russophobie

-"Quand France 2 et Etienne Leenhardt cherchent à paniquer la population (source les- crises.fr) (Extraits)

La propagande de guerre, c’est ça : le 6 avril 2016, l’ouverture du JT se fait sur cette annonce pressante : En effet, comme c’était une petite journée calme au niveau du terrorisme, ils ont dû trouver autre chose : Pujadas, ouverture : “Bonsoir à tous. Dans l’actualité ce soir, le réarmement de l’Europe face au réveil de la menace russe. Les dépenses militaires font un bond en Pologne, en Slovaquie ou dans les pays baltes. Ont-ils raison d’avoir peur ? – Etienne Leenhardt nous répondra“. J’ai du mal à voir en quoi une augmentation des dépenses militaires au fin fond de l’Europe mérite la Une (que n’a pas eu ce soir-là le référendum sur l’UE aux Pays-Bas, en revanche…), mais passons.

Par chance, les “journalistes” n’ont pas non plus évoqué le fait que l’industrie d’armement est aussi une des plus corruptrices au monde – ce qui ne peut évidemment avoir le moindre lien avec ce fait…

Pujadas : “Bienvenue à tous. C’est un virage pour l’Europe, après des années de baisse continue de l’effort militaire, le réarmement est en cours. C’est le cas de la France ou du Royaume-Uni, dont les budgets repartent à la hausse. Mais c’est la cas, bien davantage encore, pour l’Europe Centrale. En cause, le réveil de la menace russe.” Reportage : “En Pologne… : total : 40 milliards d’euros (!). En Estonie, on accueille à bras ouverts les navires de l’OTAN venus en renfort dans la région (sic.).Ca, c’est de l’information utile qui nous aurait manqué… (...) Pujadas : “Bonsoir Etienne Leenhardt : ces pays d’Europe centrale ont-ils raison d’avoir peur ?” de la puissance de la Russie dans sa zone historique d’influence”. Je n’ai pas trouvé la source de cette déclaration – si quelqu’un peut chercher et l’indiquer en commentaire, merci.

J’ai trouvé cette interview de la BBC de décembre 2015 : Russia is not trying to bring back the USSR, but “nobody wants to believe it” […] I would like to think that there is not a person on the planet crazy enough to decide to use nuclear weapons,” he said, adding that this would lead to a “planetary catastrophe

Effrayant en effet…

Que pour la seule année 2015 vous constatez que les dépenses militaires russes ont représenté plus de 20 % du budget de l’État, que vous voyez Vladimir Poutine subtiliser la Crimée à l’Ukraine il y a 2 ans sans aucune réaction de la communauté internationale.” 1/ c’est amusant, il me semblait qu’on avait lancé des sanctions contre la Russie, j’ai

292 rêvé ?

2/ mais sinon, c’est quoi alors une “réaction” : la guerre ? Qu’il n’hésite pas, ils embauchent dans l’armée ukrainienne (90 € par mois)

3/ elle avait réagi comment la “communauté internationale” (sic.) quand, en 1954, l’Ukraine avait subtilisé la Crimée à la Russie via le dictateur communiste Khrouchtchev ?

4/ il est au courant que le parlement de Crimée a voté pour, puis la population aussi ? Et que des sondages occidentaux disent que le résultat des votes est conforme à la volonté de la population ?

“Eh bien OUI, il y a de quoi être inquiet !” C’est beau la subtilité quand même…

Pujadas : “on peut effectivement parler de menace russe ?” Leenhardt : “2 opérations militaires l’Ukraine et la Syrie, à la fois limitées mais efficaces.” Sérieusement ?

Il a vu l’armée russe opérer en Ukraine ? C’est dommage qu’en 2014, on n’arrive pas à avoir d’mages quand même… Et ils ne sont pas allés jusqu’à Kiev du coup ?

Quand au rapport avec la Syrie… Après, c’est sûr que ce n’est pas comme si on avait attaqué l’Irak ou la Libye sous de faux prétexte, ou soutenu en sous-main en Syrie les terroristes ayant abattu un avion russe…

“La Russie de Poutine a atteint un de ses objectifs : elle fait à nouveau peur.” Tiens, celle-là je la mets direct dans mon Best-of des saloperies de “journalistes”, elle est vraiment belle. Il aurait fait merveille dans les médias il y a un siècle, pour parler du boche. Ou en Allemagne un peu plus tard…

Et même si très peu d’observateurs pensent qu’elle ira au delà, 1. Ah, ben oui, peu se défoncent au crack, c’est sûr, et encore moins sont “journalistes” par chance…

2. ben alors, c’est quoi le micmac dont on parle depuis 3 minutes en terrorisant la population ? notamment parce que les guerres, ça coûte cher, et que l’économie russe est au plus mal. ah pardon, j’ai cru que c’était parce que les guerres ça tuait du monde, et que la prochaine risquera même d’anéantir l’espèce humaine – je suis bête… Et ce n’est pas comme si la Russie avait perdu 20 millions d’habitants la dernière fois, hein… La guerre, ça les fait bien rire j’imagine…

293 Donc prions pour que “Poutine” n’obtiennent pas un petit crédit Sofinco, sinon, boum, la guerre…

L’OTAN a annoncé que 4 000 seraient déployés à l’année en Europe de l’Est, pour parer à toute éventualité. De quoi stopper net l’armée russe, c’est clair… Comme les 8 missiles Patriot polonais.

En tous cas, la Russie n’a en rien menacé la Pologne ou les pays Baltes, mais elle se retrouve avec plus de soldats juste à sa frontière – c’est subtil pour améliorer notre sécurité collective…

Une grande première depuis 30 ans. [Fin] Ce genre de discours, il avaient en effet les mêmes en URSS durant la guerre froide…

======Eh bien voilà donc une jolie trace pour l’Histoire du niveau intellectuel du directeur adjoint de l’information d’une grande chaîne française en 2016 – je pense que ça aidera probablement les historiens à mieux comprendre ce qui s’est passé ensuite – s’il en reste évidemment… C’est le moment où je vous renvoie au formidable discours de fin de mandat du Président Eisenhower : “Nous devons veiller à empêcher le complexe militaro-industriel d’acquérir une influence injustifiée dans les structures gouvernementales, qu’il l’ait ou non consciemment cherchée. Nous nous trouvons devant un risque réel, qui se maintiendra

294 à l’avenir : qu’une concentration désastreuse de pouvoir en des mains dangereuses aille en s’affermissant. Nous devons veiller à ne jamais laisser le poids de cette association de pouvoirs mettre en danger nos libertés ou nos procédures démocratiques. Nous ne devons jamais rien considérer comme acquis. Seul un peuple informé et vigilant réussira à obtenir que l’immense machine industrielle et militaire qu’est notre secteur de la défense nationale s’ajuste sans grincement à nos méthodes et à nos objectifs pacifiques, pour que la sécurité et la liberté puissent prospérer ensemble.” [Dwight Eisenhower, Discours de fin de mandat resté connu sous le nom du Discours du Complexe Militaro-Industriel, 17/01/1961]

Je vous ai enfin préparé une série de graphiques, que ces pantins télévisuels auraient dû faire s’ils avaient encore un peu de professionnalisme, pour informer les téléspectateurs avec quelques faits tangibles :

295 N.B. vous notez visuellement dans ce schéma que, par habitant, l’OTAN dépense donc en moyenne bien plus que la Russie… En fait, 980 $ contre 630 $/hbt, soit la bagatelle de 50 % de plus...

Eh oui, tu penses que les Russes rêvent d’un conflit avec une structure 7 fois plus peuplée et disposant d’un budget militaire 10 fois supérieur – qui ne ferait pas pareil ? (…)

296 l’Ukraine avait subtilisé la Crimée à la Russie via le dictateur communiste Khrouchtchev ?

4/ il est au courant que le parlement de Crimée a voté pour, puis la population aussi ? Et que des sondages occidentaux disent que le résultat des votes est conforme à la volonté de la population ?

“Eh bien OUI, il y a de quoi être inquiet !” C’est beau la subtilité quand même…

Pujadas : “on peut effectivement parler de menace russe ?” Leenhardt : “2 opérations militaires l’Ukraine et la Syrie, à la fois limitées mais efficaces.” Sérieusement ?

Il a vu l’armée russe opérer en Ukraine ? C’est dommage qu’en 2014, on n’arrive pas à avoir d’mages quand même… Et ils ne sont pas allés jusqu’à Kiev du coup ?

Quand au rapport avec la Syrie… Après, c’est sûr que ce n’est pas comme si on avait attaqué l’Irak ou la Libye sous de faux prétexte, ou soutenu en sous-main en Syrie les terroristes ayant abattu un avion russe…

En conséquence, si tout ceci vous choque, je vous recommande vraiment de ne pas rester inactif et d’écrire (poliment…) : • en vous plaignant au médiateur de France TV • et en vous plaignant au CSA : signaler un programme

« MH-17 : Deux ans de propagande antirusse, par Robert Parry by Les-crises.fr DT source : Consortiumnews.com, le 17/07/2016

Le 17 juillet 2016

Exclusif : Il y a deux ans, un avion de la Malaysia Airlines, le vol 17, a été abattu alors qu'il survolait l'est de l'Ukraine. Cette destruction en vol a fait 298 morts et a contribué à renforcer une campagne de propagande destinée à susciter une nouvelle guerre froide avec la Russie, écrit Robert Parry.

297 Par Robert Parry

Nous approchons du second anniversaire de l'abominable destruction en vol de l'avion de la Malaysia Airlines, est-il donc surprenant que le New York Times ait envie de célébrer l'occasion en utilisant une fois de plus cette tragédie pour matraquer sa propagande ? Il cherche, en effet, ainsi à favoriser les desseins des néoconservateurs qui veulent provoquer une nouvelle guerre froide avec la Russie, coûteuse et des plus dangereuses.

Samedi encore, ce journal a fait la preuve de son mépris pour les pratiques journalistiques normales en reprenant une assertion non corroborée selon laquelle les Russes auraient falsifié des images satellites, qui montraient des systèmes de missiles antiaériens ukrainiens dans l'est de l'Ukraine avant que l'avion de ligne ne soit abattu le 17 juillet 2014.

Une photo du missile BUK que l'ambassadeur américain en Ukraine, Geoffrey Pyatt, a publiée sur Twitter. Il voulait, de cette façon, exprimer son soutien à l'accusation selon laquelle la Russie avait installé des missiles BUK dans l'est de l'Ukraine. Toutefois cette image est, apparemment, une photo de l'Associated Press prise lors d'un salon de l'aéronautique qui s'était déroulé près de Moscou, deux ans auparavant.

Depuis cet instant, le Times et d'autres journaux occidentaux à grand tirage se sont acharnés à imputer la responsabilité des 298 victimes au président russe Vladimir Poutine pour faire plonger le monde, la tête la première, dans la dernière en date des machinations des néoconservateurs, visant à déstabiliser la Russie, puissance nucléaire, et éventuellement à provoquer « un changement de régime » à Moscou.

Même s'il est choquant de voir utilisée, au nom de la géopolitique des grandes puissances, la mort d'innocents, ce qui a été le plus troublant d'un point de vue journalistique, c'est que le Times ait laissé de côté toute prétention à l'objectivité professionnelle, tout comme il l'a fait en trompant le public américain en 2002-2003, à propos des armes fictives de destruction massive.

Dans sa dernière flambée de propagande antirusse, le Times met en avant des blogueurs qui ont eu recours à un programme informatique pour montrer que deux images satellites du gouvernement russe avaient été truquées. Il s'agit de mettre en doute la possession par l'armée ukrainienne, dans l'est de l'Ukraine, de missiles antiaériens capables d'abattre le MH-17.

Toutefois, le Times préfère passer sous silence que les renseignements occidentaux ont déjà confirmé que l'armée ukrainienne disposait, effectivement, le 17 juillet 2014, dans l'est de l'Ukraine, de puissants missiles antiaériens. En octobre dernier, un rapport des

298 services néerlandais a communiqué cet élément fondé sur des renseignements de l'OTAN, qui se fondent sur des collectes de données des satellites occidentaux, entre autres.

En effet, les services de sécurité et de renseignement militaire de la Hollande (le MIVD) ont conclu que c'étaient les forces du gouvernement ukrainien, non les rebelles séparatistes russes, qui disposaient des seules armes antiaériennes de l'Ukraine de l'est capables d'abattre le MH-17 à 10 000 mètres.

Le MIVD a procédé à cette évaluation alors qu'il enquêtait sur les raisons pour lesquelles les avions commerciaux survolaient toujours la zone de combats de l'est de l'Ukraine pendant l'été 2014. Le vol MH-17 venait d'Amsterdam et il transportait de nombreux citoyens néerlandais, ce qui explique pourquoi la Hollande a pris la tête de l'enquête.

Selon le MIVD, qui se fonde sur des « renseignements d'État secrets », l'Ukraine possédait « de puissants systèmes antiaériens » assez anciens et « un certain nombre de ces systèmes se trouvait à l'est du pays ». Toujours selon ce service, les rebelles ne disposaient pas de tels moyens.

« Avant la catastrophe, le MIVD savait qu'en plus d'une artillerie antiaérienne légère, les séparatistes avaient aussi des systèmes portables de défense aérienne de courte portée, les MANPADS, et que peut-être aussi ils possédaient des systèmes de défense antiaérienne à courte portée transportés par véhicule. Ces deux types de système sont considérés comme des missiles sol-air. En raison de leur portée limitée, ils ne présentent pas de danger pour les avions civils volant à une altitude de croisière. »

Aucun motif

En d'autres termes, les Russes n'auraient aucun motif valable de truquer des photos satellites puisque les photos sans truquage auraient mis en évidence la présence de batteries de missiles ukrainiens BUK dans cette zone. Peut-être le Times aurait-il pu réfléchir à cet élément digne d'être pris en considération en portant une appréciation sur les allégations d'experts amateurs, à propos du truquage éventuel des photos.

Au lieu de cela, le journaliste Andrew E. Kramer, qui contribue régulièrement à la campagne de propagande antirusse du Times, considère comme irréfutables les conclusions de chercheurs en armement nucléaire du Middlebury Institute for International Studies (l'Institut d'études internationales de Middlebury) même si rien ne permet de croire que ces personnes aient une compétence particulière pour utiliser ce logiciel, qui, selon son créateur, doit être employé avec une grande prudence.

Roger Crozien, inventeur du logiciel filtrant Tungstene, a mis en garde contre la hâte à considérer que « des anomalies » dans des photographies viennent de falsifications intentionnelles alors qu'elles peuvent résulter de la procédure normale de sauvegarde de l'image ou d'innocentes modifications.

Dans une interview au magazine Time, il a déclaré : « Ces filtres ont pour but de détecter des anomalies. Ils donnent tous les renseignements possibles et imaginables qu'on peut trouver dans le fichier de la photo. Et ces particularités, appelées "singularités", ne sont parfois qu'accidentelles. En effet, l'image peut très bien ne pas avoir été bien re- sauvegardée ou l'appareil avoir des caractéristiques particulières, par exemple.

« Le logiciel en lui-même est neutre : il ne différencie pas une modification d'une manipulation. Alors, quand il remarque une erreur, c'est à l'opérateur de décider si c'est un

299 truquage ou simplement un accident. »

Déceler s'il s'agit d'une manipulation intentionnelle ou d'une anomalie normale ou anodine qui peut très bien se produire quand on transfère une image d'un format à un autre, qu'on modifie le contraste ou qu'on ajoute une zone de texte ; Tout cela relève plus de l'art que de la science, comme on s'en rend compte en lisant Roger Cozien.

Si les chercheurs de l'institut de Middlebury ont acheté le logiciel Tungstene sur lequel ils se sont fondés pour faire leur rapport sur le site « armscontrolwork.com », il n'y a cependant aucune raison de penser qu'ils aient une compétence particulière dans l'étude scientifique des photographies.

Deux poids, deux mesures

Les auteurs du rapport fustigent aussi les Russes pour le manque de fiabilité de ces deux images. « Les fichiers des images sont de très mauvaise qualité, écrivent-ils, nous sommes très déçus que la Fédération de Russie, dans une affaire aussi importante, publie, en guise de preuves, des images de si mauvaise qualité... Les responsables russes doivent savoir que la publication d'images dans ce format rend plus difficile la vérification de l'intégrité de l'image. »

Le président russe Vladimir Poutine répond à des questions de citoyens russes lors de sa séance annuelle de questions réponses le 14 avril 2016. (Photo du gouvernement russe)

Cela n'empêche pas ces chercheurs de porter des jugements catégoriques sur la présence d'un nuage sur une photo et l'image prétendument plus nette de deux lanceurs ukrainiens de missiles BUK sur l'autre. Pourtant, on se demande bien pourquoi les Russes ajouteraient un nuage. (Le 17 juillet 2014, dans l'est de l'Ukraine, le temps était assez couvert, peut- être le nuage ne se trouve-t-il sur la photo que parce que la zone était partiellement nuageuse.)

Les chercheurs font remarquer, avec condescendance, que « la résolution 2166 du Conseil de sécurité demande aux États de fournir toute l'aide demandée aux enquêteurs civils et criminels. ... Selon nous, la Russie devrait fournir les images originales, sous une forme non altérée, à la JIT, l'équipe conjointe des enquêteurs, qui conduit l'enquête criminelle sur la catastrophe du MH-17, afin de permettre aux experts indépendants de vérifier leurs affirmations. »

On en convient facilement, bien sûr, mais pourquoi les blogueurs du contrôle des armes ne prient-ils pas le gouvernement américain de publier les données satellites et autres qui se rapportent à la catastrophe du MH-17 ?

Le seul vrai filtre qui doive être utilisé quand on s'intéresse au New York Times ou à certains des « journalistes citoyens » qui surgissent pour défendre les thèmes de propagande du gouvernement américain, c'est l'acharnement de leur parti-pris antirusse. Pouvez-vous vous rappeler la dernière fois où le New York Times, ou tout autre organe d'information grand public, a publié un article favorable à la Russie ou même neutre ?

Le chien américain qui n'aboie pas

De façon analogue, ni le rapport des chercheurs ni l'article du Times ne présentent la moindre critique du gouvernement américain, qui a prétendu avoir des renseignements par satellite qui montrent d'où le missile antiaérien a été lancé. Il a refusé de porter ces

300 renseignements capitaux à la connaissance du public ou manifestement même à celle des enquêteurs officiels sur le MH-17.

Le 20 juillet 2014, trois jours seulement après la catastrophe, le secrétaire d'État John Kerry est apparu dans les cinq talk-shows du dimanche, y compris « Meet the press » sur NBC où il a indiqué que des « médias sociaux » avaient impliqué les rebelles russes séparatistes de l'est de l'Ukraine, et il a ajouté : « Mais plus important encore, nous avons les images de ce lancement. Nous connaissons la trajectoire. Nous savons d'où le missile est venu. Nous connaissons l'heure. Et c'était exactement le moment où cet avion a disparu des radars. »

Deux jours plus tard, le Bureau du directeur du renseignement national a publié une « évaluation gouvernementale », citant aussi les « médias sociaux », qui impliquerait les rebelles. Ce livre blanc a aussi donné la liste de l'équipement militaire que la Russie aurait procuré aux rebelles. Cette liste toutefois n'incluait pas de lanceur de missiles BUK ou des missiles antiaériens très puissants capables de frapper le MH-17, qui volait à environ 10 000 mètres.

Des experts du renseignement américain ont, sur l'ordre du directeur de la sécurité nationale, informé quelques journalistes des grands médias. Les experts, cependant, se sont montrés moins convaincus que ne l'auraient souhaité leurs supérieurs, et ils ont fait remarquer qu'on ne savait pas encore avec certitude, loin de là, qui était effectivement responsable.

Selon l'article du Los Angeles Times : « Les agences de renseignement américain n'ont pas, jusqu'à maintenant, été capables de déterminer la nationalité ou l'identité de l'équipe qui a lancé le missile. Les responsables américains ont affirmé qu'il était possible que le SA-11, nom du missile BUK antiaérien russe, ait été lancé par un transfuge de l'armée ukrainienne entraîné à utiliser le même type de missiles. »

Cette incertitude concorde bien avec ce que m'avait dit une source mise au courant par des experts du renseignement américain peu après la destruction en vol de l'avion. Ils lui avaient parlé de ce qu'ils avaient vu dans des photos satellites à haute résolution, qui, d'après eux, montraient ce qui avait l'air d'être des membres de l'armée ukrainienne, ces derniers manœuvrant la batterie censée avoir tiré le missile.

Il y a une grande différence entre « l'évaluation du renseignement » – la référence de la communauté du renseignement américaine dans l'évaluation d'un problème, avec les éventuelles divergences entre les 16 agences de renseignement – et « une évaluation gouvernementale » comme celle de l'affaire du MH-17.

En tant qu'ancien analyste de la CIA, Ray McGovern a écrit : « La différence essentielle entre "l'évaluation du renseignement" et cette nouvelle création relativement récente, "l'évaluation gouvernementale", c'est que cette dernière est élaborée par des hauts fonctionnaires de la Maison-Blanche ou d'autres responsables politiques, non des experts confirmés du renseignement. Une autre différence significative, c'est que "l'évaluation du renseignement" propose souvent des opinions diverses, que ce soit dans le texte ou les notes de bas de page, où sont détaillés les désaccords entre les experts du renseignement, et elle indique éventuellement les points faibles ou contestables. »

En d'autres termes, une « évaluation du gouvernement » invite les journaleux politiques à fabriquer ce qu'on appelle un « dossier douteux » comme l'a fait le gouvernement britannique en employant des tactiques semblables pour vendre une cause mensongère

301 lors de la guerre d'Irak en 2002-2003.

Cependant, que le gouvernement ait dissimulé au public, et même aux enquêteurs officiels, des renseignements capitaux pour la détermination des coupables et leur mise en accusation, voilà qui a davantage de rapport avec le récent article du Times. Par exemple, ni le DSB, le Bureau de sécurité hollandais, qui a dirigé le début de l'enquête, ni le JIT, l'Équipe d'enquête conjointe, n'ont été capables de repérer l'endroit d'où le missile a été tiré.

Bien que Kerry ait assuré que le gouvernement américain connaissait cet endroit trois jours après l'accident, le Bureau de sécurité néerlandais a déclaré en octobre dernier qu'on avait réduit le territoire d'où le missile a probablement été tiré à une zone de 320 kilomètres carrés où se trouvent à la fois les rebelles et les soldats de l'armée régulière. Le JIT a promis aux familles des victimes néerlandaises qu'elle établirait cet élément plus tard dans l'année, soit plus de deux ans après la catastrophe.

Si l'on voulait appliquer la logique de Sherlock Holmes à ce problème du « chien qui n'aboie pas », on conclurait probablement que le gouvernement étatsunien s'est tu après les déclarations de John Kerry et le livre blanc – incomplet – du directeur de la Sécurité nationale, parce que les preuves qu'on découvrait et analysait peu à peu ne pointaient pas dans la direction que les propagandistes souhaitaient.

Aucune objectivité

Pourtant, ce ne sont pas les États-Unis mais la Russie qui est fustigée au prétexte qu'elle ne fournirait pas ses données dans un état impeccable, alors même que le gouvernement américain ne fournit rien du tout. Et chaque fois qu'on soulève le problème du MH-17 dans les grands médias d'information occidentaux, on n'évoque pas – ou on excuse – l'étrange silence des États-Unis tout en évitant de mentionner d'autres éléments dérangeants, comme l'annonce par le Spiegel que le service du renseignement allemand, le BND, avait découvert que les photos du MH-17 fournies par le gouvernement ukrainien « avaient été truquées ».

Photographie publiée par le New York Times, censée avoir été prise en Russie, de soldats russes qui vont, plus tard, apparaître en Ukraine. Cependant, le photographe a depuis affirmé que la photo avait, en fait, été prise en Ukraine et le département d'État a reconnu l'erreur.

Encore plus remarquable : le blackout que le Times et d'autres médias d'information ont fait sur le rapport du renseignement néerlandais au sujet de la présence, dans l'est de l'Ukraine, de batteries antiaériennes de l'armée ukrainienne, capables de détruire un avion commercial à 10 000 mètres, et sur l'absence, chez les rebelles, d'une arme aussi

302 puissante.

En outre, il y a eu des révélations officielles qui soulèvent de sérieux doutes sur l'intégrité de la JIT, qui compte dans ses rangs des enquêteurs de Hollande, d'Australie, d'Ukraine, de Belgique et de Malaisie mais qui est de plus en plus sous le contrôle de la SBU ukrainienne, une agence de renseignement et de sécurité. Cette agence est responsable de la protection des secrets du gouvernement ukrainien et elle a été impliquée dans des actes de torture et d'autres crimes de guerre contre les rebelles séparatistes russes.

Plus tôt dans l'année, un rapport intermédiaire de la JIT a dévoilé à quel point la SBU s'était rapprochée des enquêteurs néerlandais et australiens. Ces derniers ont travaillé pendant de longues périodes à Kiev, ils ont ingurgité les « preuves » de la SBU tout en appréciant l'hospitalité ukrainienne.

Même si le rapport de la JIT a été publié, son contenu a été ignoré par le Times et les autres journaux, même après que l'ONU a reçu des plaintes officielles à propos de la SBU, qui bloquerait les enquêtes des associations humanitaires dans les présumés centres de torture ukrainiens.

Que la SBU ait la prééminence sur la JIT peut avoir des incidences sur l'intégrité de l'enquête sur le MH-17, mais cet élément ne concorde pas avec la propagande qui cherche à imputer la responsabilité des 298 morts à la Russie. En effet, cela jetterait un soupçon de parti-pris et d'éventuelles manipulations par la SBU, quelles que soient les conclusions de la JIT.

Coup de chapeau obligatoire

Et apparemment aucun article du Times sur le MH-17 ne serait complet sans un coup de chapeau au site des « journalistes citoyens », le Bellingcat, qui a fait du soutien aux thèmes de propagande occidentaux contre les gouvernements russe ou syrien une industrie florissante. Bellingcat est resté le site préféré des médias occidentaux à grand tirage, même s'il écrit souvent n'importe quoi.

En se fondant sur des renseignements d'Eliot Higgins, le correspondant de 60 Minutes en Australie, Michael Usher prétend avoir trouvé le tableau d'affichage dans une vidéo d'un lanceur de missiles BUK après la destruction en vol du vol 17 de la Malaysia Airlines. Les points de repère cependant ne correspondaient pas. (Screen shot from Australia's "60 Minutes")

Dans l'article de samedi, le journaliste du Times a cité Bellingcat, c'est pour lui une façon de soutenir les gars de « armscontrolwonk com » sans mentionner que des experts scientifiques ont déjà critiqué Bellingcat pour son analyse de la photo où un logiciel avait été employé à mauvais escient pour aboutir à des conclusions antirusses, ou comme l'a évoqué Der Spiegel :

« Le groupe de recherche Bellingcat a accusé la Russie de truquer des images satellites de la catastrophe du MH-17. L'expert allemand en analyse scientifique de l'image Jens Krieze a cependant critiqué ces résultats. Il affirme qu'il est impossible de dire avec certitude si Moscou ment. » Il s'avère aussi que le fondateur de Bellingcat, Higgins, et « armscontrolwonk.com » sont tous deux liés avec un groupe de réflexion pro OTAN, l'Atlantic Council qui a été l'un des plus ardents partisans d'une nouvelle guerre froide avec la Russie. Higgins est maintenant désigné comme "membre éminent non résident de l'Atlantic Council's Future Europe Initiative" et armscontrolwonk.com décrit l'un de ses

303 journalistes, Aaron Stein, comme membre non résident de l'Atlantic Council's Rafik Hariri Center pour le moyen Orient.

Le travail de Stein sur le conflit syrien se croise avec les efforts de Higgins pour intensifier la propagande occidentale qui cherche à imputer au gouvernement syrien la responsabilité de l'attaque au gaz sarin, dans la banlieue de Damas, le 21 août 2013, ce qui s'est avéré l'une des erreurs de Bellingcat. Lors du second anniversaire de l'horrible catastrophe du MH-17, il est certes triste mais guère surprenant de voir le Times continuer à se raccrocher à n'importe quelle allégation douteuse et à la présenter à ses lecteurs sans la replacer dans un contexte approprié, mais quelle importance tant que son article contribue à donner envie à ses lecteurs d'entrer en guerre contre la Russie.

Le journaliste d'investigation Robert Parry a démonté la plupart des accusations sur l'Iran-Contra pour Associated Press et Newsweek dans les années 1980.

Source : Consortiumnews.com, le 17/07/2016. Traduit par les lecteurs du site www.les- crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source »

304 C-Du vrai journalisme ?

#PanamaPapers : le « journalisme d’investigation » du Ctrl+F

Viktor DEDAJ Vous souvenez-vous de la première fois où vous avez réussi à lacer vos chaussures sans assistance ? Peut-être pas, mais vous avez sûrement sautillé sur place avec fierté, abordé tout adulte présent dans le périmètre pour lui faire constater de visu l’exploit. Plus débrouillard, vous auriez sans doute appelé un huissier pour immortaliser ce grand moment. Et même si les versions divergent, les Anciens qui ont connu cet épisode sont unanimes au moins sur un point : vous étiez drôlement mignon. Connaissiez-vous le Consortium International des Journalistes d’Investigation ? Avouez que vous n’en aviez jamais entendu parler avant. Et pourtant, il existe depuis 1997. Basé aux Etats-Unis (à Washington - quelle meilleure base arrière pour faire des enquêtes et lancer des alertes ?), le Consortium affiche une liste de médias plus prestititigieux les uns que les autres, véritable « dream team » de la presse libre : El Pais, El Mundo, le Monde, Le New York Times, Le Washington Post, BBC, The Guardian, El Nacion... et j’en passe, d’un peu partout dans le monde. Ah la la... On se souviendra avec émotion du travail inoubliable accompli par ce Consortium du Monde Libre (*). Leur travail sur les attentats du 11 Septembre 2001 – un modèle du genre. Leur ténacité sur les armes de destruction massive en Irak – un bijou. Leur longues enquêtes sur la plus féroce et longue « tentative de crime humanitaire du 20ème siècle », et qui perdure, à savoir la tentative de blocus des Etats-Unis contre Cuba... Leur détermination à révéler les origines et relations de l’Etat Islamique – j’en pleure encore. Ah, sans oublier leur couverture des nazis en Ukraine, des charniers en Colombie, des cartels de la drogue au Mexique (où, entre 1997 et février 2016, on compte un peu plus de 200 journalistes assassinés), des tentatives de coups d’état au Venezuela... bref, la liste est tellement longue. Depuis hier, le Consortium est en surchauffe et en mode auto-congratulation maximum car voici qu’on nous annonce la plus grande révélation de tous les temps (graphiques à l’appui). Certes, certains médias français ont encore du mal à cracher le nom de leur patron présent dans la liste (Rappel : il s’appelle Drahi), mais bon, ne faisons pas la fine-bouche. Pour le reste, j’ai noté la présence de personnalités plus ou moins déjà « grillées » (une sorte de confirmation, dirons-nous) et – sans surprise, avouons-le – quelques chefs d’état qui n’étaient déjà pas en odeur de sainteté sous nos latitudes (je trouve qu’il manque un peu de Front National pour boucler la boucle). Permettez-moi de rendre un hommage appuyé à ces guerriers de l’information car il en faut du professionnalisme et de l’abnégation pour : 1 - soulever son cul de sa chaise 2 - ouvrir une enveloppe trouvée dans son casier 3 - sortir la clé USB 4 - la connecter à son ordinateur 5 - décompresser (probablement) les fichiers et 6 - lancer une recherche (Ctrl+F) sur des Giga Octets de données histoire de voir qui c’est qu’on y

305 trouve. Yep. Du grand travail d’ « investigation ». Du même niveau que celui que nous déployions pour trouver des œufs de Pâques cachés dans le jardin – et encore. Remarquons que tous les commentateurs prennent soin de préciser que « toutes ces transactions/comptes » ne sont pas forcément « illégaux », et même loin de là (sauf évidemment, dans le cas des premiers noms lâchés dans la nature, cela va de soi). Et prévenir qu’il n’y a pas obligatoirement de l’illégalité dans l’air ni de blanchiment en cause permet de laisser la porte ouverte à toute découverte un peu malencontreuse et inopinée (la présence d’un copain, quoi... Drahi, tu nous entends ?). Ils tentent de nous la jouer « super wikileaks » mais pendant ce temps, d’autres lanceurs d’alerte croupissent dans les prisons US (Chelsea Manning ?), ou ont été obligés de fuir (Edward Snowden) ou se réfugier dans une ambassade compréhensive (Julian Assange ? (**) ) et tous ont été lâchés, trahis et enterrés par ces mêmes médias une fois leur os rongé. Et je ne cite que les 3 noms les plus connus. Non. Le Consortium préfère chasser des œufs de Pâques déposés par d’autres et nous les montrer en poussant de petits piaillements de joie. On verra – un signe qui ne trompe pas – combien de ces journalistes connaîtront des « problèmes ». Car, au cas où ils ne l’auraient pas remarqué, le système se défend lorsqu’il se sent menacé. Alors autant les prévenir : l’ambassade de l’Équateur à Londres affiche complet depuis 4 ans. Viktor Dedaj « encore un effort pour vous racheter les gars » (*) A quoi vous attendiez-vous ? La fuite est gérée par un organisme qui porte le nom grandiose, mais qui prête à rire quand on connaît l’oiseau, de « Consortium international des journalistes d’investigation ». Il est entièrement financé et géré par le Centre des États-Unis pour l’intégrité publique. Leurs bailleurs de fonds comprennent : - La fondation Ford - La fondation Carnegie - La fondation de la famille Rockefeller - La Fondation W K Kellogg - La Fondation pour une société ouverte (Soros) Le Consortium International des journalistes d’investigation (ICIJ) fait partie du Projet de rapport sur le crime organisé et la corruption (OCCRP) qui est financé par le gouvernement américain à travers l’USAID. cf : http://www.legrandsoir.info/les-panamapapers-sont-un-moyen-de-chantage... (**) Le cas de Julian Assange étant à lui seul révélateur de la médiocrité de ces pseudo- investigateurs. Faut-il leur rappeler - combien de fois encore ? - que ce dernier n’a violé aucune loi (laquelle, au fait ?), et qu’il n’est pas poursuivi pour viol ou violences sexuelles par la Suède - mais a été « convoqué » par une procureure suédoise qui veut absolument l’interroger sur le sol suédois (pas sur place, à Londres, ni via une vidéo-conférence, comme proposé). Sur le sol suédois où il existe un accord d’extradition de « témoins » avec les Etats-Unis. Les Etats-Unis, où un Grand- Jury a déjà été constitué pour régler le compte à quelqu’un qui n’a violé (on tourne en rond) aucune loi couverte par une juridiction US...

URL de cet article 30186 http://www.legrandsoir.info/panamapapers-le-journalisme-d-investigation-du-ctrl-f.html

306 D-Chômage et manipulations

Comme prévu, le niveau du chômage baisserait à l'approche des présidentielles. Selon Jacques Sapir, c'est tout simplement faux.

« Chômage: manipulations et mensonges par Jacques Sapir · Les chiffres des demandeurs d’emplois, ce que l’on appelle abusivement les « chiffres du chômage », du mois de mars ont été l’occasion d‘un étalage d’autosatisfaction de la part des différents ministres du gouvernements aussi injustifié qu’indécent. Le fait que des médias aient repris de manière non critique et sans les discuter ces chiffres ajoute au scandale le désagréable sentiment d’être pris pour des imbéciles par des arriérés ne sachant visiblement pas de quoi l’on parle ni calculer. Les « journalistes » de France-2 se sont à cet égard particulièrement « distingués », si l’on veut employer ce terme, par des commentaires où l’ignorance ne le disputait qu’à la l’indécence et à la propagande, lors de leur journal de 20h du 26 avril 2016. De quoi parle-t-on ? De quoi s’agit-il ? La baisse du nombre des demandeurs d’emplois de « catégorie A » a donc été saluée à coup de trompes. Il eut mieux fallu user de la corne de brume tant les « journalistes » semblent dans le brouillard ! Rappelons donc d’abord quelques faits. Les données présentées en France ne sont pas celles du « chômage » mais uniquement celles des « demandeurs d’emploi ». Elles sont collectées par la DARES. Les données des demandeurs d’emplois sont des données administratives, et peuvent faire l’objet de corrections, en particulier quand le demandeur d’emploi ne remplit pas certaines des conditions pour se voir inscrit. Dans ce cas, il est rayé des listes et « disparaît », mais ne cesse pas pour autant d’exister comme « chômeur »… Ces données sont de plus réparties en catégories qui sont définies comme suit par la DARES[1] : « …la Dares et Pôle emploi présentent à des fins d’analyse statistique les données sur les demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi en fonction des catégories suivantes : Catégorie A : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, sans emploi ; Catégorie B : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, ayant exercé une activité réduite courte (i.e. de 78 heures ou moins au cours du mois) ; Catégorie C : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, ayant exercé une activité réduite longue (i.e. de plus de 78 heures au cours du mois) ; Catégorie D : demandeurs d’emploi non tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi (en raison d’un stage, d’une formation, d’une maladie…), sans emploi ; Catégorie E : demandeurs d’emploi non tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, en emploi (par exemple : bénéficiaires de contrats aidés). » Ainsi, le chômage réel, tel que l’on peut l’estimer à partir du nombre des demandeurs d’emploi couvre en réalité les catégories A + B + D, et l’on peut considérer que la catégorie B+D correspond à un chômage masqué statistiquement. Il convient alors de regarder comment ont évolués les accroissements.

307 Graphique 1 Accroissements en milliers des demandeurs d’emplois des catégories A+B+C

Source : DARES Si l’on s’attache uniquement aux chiffres des demandeurs d’emploi en métropole, on constate que ce chiffre, pour le mois de mars 2016 n’a pas baissé de 60 000 comme prétendu mais de 46 600. En fait, la catégorie D est restée au même niveau qu’en février à 273 000 personnes, et la catégorie B à augmenté d’environ 14 000 personnes. Rapportés aux moyennes mobiles sur 6 mois et 12 mois, chiffres qui sont importants car ils contribuent à « lisser » des données mensuelles pour éviter que l’on ne soit victime d’un accident statistique dans un sens ou dans un autre, on constate que la moyenne mobile sur 6 mois est de -3000 (donc une très faible diminution) mais que la moyenne mobile sur 12 mois est de + 4000 (soit une très faible augmentation des demandeurs d’emplois). On dira alors que même si les chiffres ne sont pas ceux qui ont été annoncés, il y a néanmoins une légère amélioration, surtout sur les 6 derniers mois. Rien n’est moins sûr, hélas. Demandeurs d’emploi, chômage et quasi-chômage Regardons maintenant les catégories C et E, qui correspondent en fait à un quasi-chômage, soit des emplois qui n’existent qu’en raison des aides (catégorie E) ou des temps partiels subis (catégorie C). Graphique 2 Accroissement des demandeurs d’emploi de catégories C et E (quasi-chômage)

308 Source : DARES On voit sur le graphique qu’il y a bien toujours un accroissement important, de 10 000 à 12 000 demandeurs d’emploi par mois suivant les moyennes mobiles utilisées, pour ces deux catégories. De fait, les chiffres mensuels, en moyenne mobile, montrent une grande stabilité depuis 2013. Cela conduit à regarder l’accroissement total du nombre des demandeurs d’emplois, toutes catégories confondues. Graphique 3 Accroissements pour les catégories A+B+C+D+E

309 Source : DARES Surprise, surprise ! Quelle que soit la moyenne mobile utilisée, sur 6 ou sur 12 mois, on constate que le nombre de demandeurs d’emploi a continué à augmenter. Assurément, le chiffre instantané a bien baissé, mais très faiblement en mars. La baisse est de – 7600 personnes. On voit que l’on est bien loin des 60 000 annoncés tant par les ministres que par la presse ! Les raisons d’une baisse Il faut alors regarder les raisons de cette baisse. La DARES ne fournit des chiffres que pour les catégories ABC. On peut les regrouper en trois catégories. La première, est la plus importantes, correspond aux reprises d’emploi déclarées. Le nombre de ces « reprises » est resté stable sur les 3 derniers mois à 100 000 personnes. En fait, on constate bien une augmentation sur un an (de mars 2015 à mars 2016), mais cette augmentation stagne depuis janvier. La variation sur février-mars est de +500 personnes… La seconde catégorie porte sur les entrées en stage. Il y a bien, ici, une légère augmentation puisque le chiffre de mars est en progression de + 1800 personnes. Par contre, la troisième catégorie, qui inclut les radiations administratives ou les radiations par défaut d’actualisation elle s’est accrue de +8 800 personnes. Graphique 4 Variations des causes de sortie des demandeurs d’emplois

Source : DARES Une première conclusion que l’on peut tirer de ces chiffres est qu’il n’y a pas de mouvement significatif d’accroissement des reprises d’emploi. Il faut bien entendu le déplorer. La variation des reprises d’emplois (+500) n’explique pas la baisse du nombre des demandeurs d’emplois. La hausse des entrées en stage a pu jouer à la marge. Et l’on sera le dernier à le regretter. Une entrée en stage peut, par la suite, déboucher sur un emploi. Mais, il faut constater que cette hausse est faible (+1800). Elle n’explique pas la totalité de la baisse des demandeurs d’emplois. Ce sont biens les « motifs administratifs » (radiation et défaut d’actualisation) qui expliquent la

310 quasi-totalité de la baisse des demandeurs d’emplois (sélectionné par l'auteur). Un observateur objectif aurait dû le constater et mettre en doute les communiqués triomphalistes des ministres. Ce même observateur objectif aurait pu poser la question du pourquoi de cette montée des baisses administratives du nombre des demandeurs d’emploi, et faire le lien avec le projet, de moins en moins déguisé, du Président François Hollande de se représenter… Bref, la publication des statistiques des demandeurs d’emplois a été une nouvelle fois l’occasion d’une énorme manipulation politique. Mais elle a aussi été l’occasion de constater que nombre de journalistes font désormais de la propagande et nullement de l’information !

[1]DARES,http://travail-emploi.gouv.fr/etudes-recherches-statistiques- de,76/statistiques,78/chomage,79/les-mots-du-chomage,1413/les-demandeurs-d-emploi-inscrits- a,9576.html »

311 E-Imperium US

-"Pour l’amiral Debray, si des accords stratégiques sont possibles, l’OTAN est une force d’occupation by Les-crises.fr DT Le Vice-amiral de la marine nationale, aujourd’hui en 2ème section, ancien président de l’Institut Charles de Gaulle, Michel Debray a notamment commandé les porte-avions « Foch » et « Clemenceau ».

Source : Russia Today, 27/06/2016

Pour l’amiral Debray, si des accords stratégiques sont possibles, l’OTAN est une force d’occupation Le Brexit, s’il est respecté, pourrait aussi bouleverser l’UE en termes militaires, explique l’amiral Debray à RT France, confiant sa vision de la sécurité en Europe, l’hégémonie américaine et l’impératif, pour un pays, d’être maître de sa défense. Pour l'amiral Debray, le Brexit aura bien évidemment des conséquences militaires, même si le Royaume-uni est dans l'OTAN et que tous les tenants de l'UE font semblant de ne pas savoir que leur défense dépend de cette dernière. Face au Brexit, selon lui, «il faudra revoir la façon dont les membres de l'Union européenne considèrent leur Défense». Si l'on en croit sa vision, une telle remise en question est plus

312 que nécessaire. Michel Debray a commandé les porte-avions Foch et Clemenceau. Il a présidé la Fondation Charles-de-Gaulle de 1998 à 1999. En 1997, il a participé à la fondation de l'Alliance pour la souveraineté de la France. Il a ensuite été membre du haut conseil du Forum pour la France de Pierre Marie Gallois.

Le choix britannique sera-t-il respecté ? Néanmoins, établissant un parallèle entre le référendum sur le Brexit et celui sur la constitution européenne de 2005 lors duquel la France et les Pays-Bas avaient voté contre mais avaient été ignorés par l'Union européenne, l'amiral se veut réaliste : «Le choix des Français et des Néerlandais a été complètement contourné par la suite et aujourd'hui, il n'en reste absolument rien. Le traité de Lisbonne a obligé la France à admettre tout ce que le peuple français avait refusé. On peut alors imaginer que le vote [du jeudi 23 juin] n'aura pas de grandes conséquences. Je souhaite que les Britanniques ne soient pas floués par leurs dirigeants, comme les Français l'ont été par les leurs.»

L'ombre américaine Dans une vision très gaullienne, l'amiral lie intimement la question de la relation du Royaume-Uni à l'UE à celle de son appartenance à l'OTAN : «Depuis les origines de la construction européenne, les Etats-Unis ont tout fait pour faire [de l'Europe] un fournisseur de supplétifs, pour que les Etats-Unis fassent la politique de Défense et que les pays européens fournissent les contingents de tirailleurs qui iraient à la boucherie s'il le faut.» Se laisser occuper par des forces armées étrangères en temps de paix n'est pas excusable

Le Brexit serait donc une épine dans le pied des Etats-Unis, qui cherchent à l'heure actuelle à renforcer l'OTAN en Europe, dans un processus que l'amiral voit affecter la France : «C'est tout à fait possible que la France accueille bientôt de nouveau des bases de l'OTAN sur son territoire. C'est possible depuis que notre président a commencé à engager des conversations avec l'OTAN pour qu'on revienne sur ce qui avait été fait du temps du Général de Gaulle en 1966, lorsque la France a fait sortir de son territoire tous les contingents étrangers qui n'avaient rien à y faire. Avoir des accords avec des Etats étrangers est absolument concevable, mais se laisser occuper par des forces armées étrangères en temps de paix n'est pas excusable. C'est un travail qui a été commencé avec Jacques Chirac, qui a été poursuivi sous Nicolas Sarkozy et qui est en train d'être achevé par François Hollande. Une nouvelle fois, les élites se moquent de l'intérêt supérieur de la patrie et du vote de leurs citoyens. Le peuple, on ne lui demande pas son avis. On ne lui a demandé son avis ni lorsque le service national a été supprimé, ni lorsqu'il a refusé la constitution européenne. Il n'y a rien de nouveau. Dès la création de la Communauté européenne de Défense (CED), qui est un projet des européens d'alors et des Américains de toujours, le projet était de réarmer l'Allemagne et d'utiliser les nations composées de pays membres de l'UE pour les mettre au service d'une politique de défense étrangère, celle de l'impérium américain.»

313 France de 2016, France de 1946 : même combat ? L'amiral Debray a pu appeler à la constitution d'un nouveau CNR, ou Comité National de la Résistance, organe qui coordonnait la résistance française pendant la Seconde Guerre mondiale. Car, selon lui : «Aujourd'hui la France n'est plus menacée par les divisions blindées de Hitler, mais par la volonté d'hégémonie des Etats-Unis. Lorsque vous voyez que l'Union européenne - qui était une union économique, et qui est aujourd'hui une union sans adjectif qualificatif - condamne la France parce qu'il n'y pas de syndicat dans l'armée française... Qui commande quoi, en France ? Un pays doit avoir la volonté de se doter de ses propres moyens de défense, voilà ma conviction.» Alors que le Premier ministre Manuel Valls a déclaré l'état d'urgence, que le plan vigipirate est à son niveau maximum et que la présence de soldats se fait plus que jamais sentir, les propos de l'amiral pourraient surprendre. Il est pourtant catégorique. «Il n'y a pas de militarisation en France depuis qu'on a supprimé le service national. Cela ne me concerne plus mais je le regrette profondément. Le service national est pour moi un service que le France rendait à ses enfants. [...] La république manque aujourd'hui de moyens militaires.»

Garder le contrôle de la capacité nucléaire, impératif de l'armée française Mais, au-delà du service militaire, il y a, pour lui, un autre élément primordial à préserver afin que l'Etat protège la souveraineté nationale : le feu nucléaire. «L'armée française se porte très mal en grande partie depuis qu'on a supprimé le service national et du fait des diminutions des ressources qu'elle subit. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni, il faut le dire, ont une obsession de contourner la volonté française de disposer de sa propre dissuasion nucléaire. C'est pour eux un objectif perpétuel : empêcher la France de se remettre au niveau où elle était parvenue à se mettre avec sa force de dissuasion nucléaire. La France doit pouvoir disposer de ses propres forces armées comme elle le souhaite et refuser de se faire inféoder par quelque organisme supranational que ce soit

Il ne faut pas rêver à la disparition des forces de dissuasion nucléaire. Ni les Russes, ni les Américains, ni Israël, ni l'Inde ou le Pakistan ne se sépareront de leurs armes nucléaires. L'intérêt de [cette] arme est justement de ne pas être employée. Elle agit par la menace de son emploi, en arme justement dissuasive. Il faut donc qu'elle existe, qu'elle soit en bon état et que nous la maîtrisions complètement. La force nucléaire française existe toujours et elle est en bon état [...] La défense doit être nationale et une défense nationale ne se traduit pas par une armée commune avec d'autres pays. La France doit son statut de membre permanent au conseil de sécurité de l'ONU à sa capacité nucléaire. Il faut que nos dirigeants en soient conscients.» Les conflits par nations interposées Garder le contrôle est d'autant plus essentiel, pour lui, que le monde de la guerre évolue et que la France semble se faire entraîner vers des terrains bien éloignés de ses propres intérêts.

314 Qu'il s'agisse de privatisation... «Le monde évolue, demain il ne sera plus celui qu'il était hier. Les conflits qui se présentent ne ressemblent pas à ceux que nous commémorons cent ans après Verdun, mais certaines caractéristiques me gênent énormément. Les sociétés militaires privées ? C'est un oxymore. Un état ne doit pas s'adresser à des gens qui veulent gagner de l'argent en vendant de la sécurité. Le rôle de l'Etat c'est de défendre son peuple et on défend son peuple avec une armée qui dépend de l'Etat et non pas avec des sociétés privées. [...] En France on sous-traite, privatise et externalise dans tous les domaines. Les militaires vont bientôt être formés par des civils.» ... de concurrence d'autres Etats... «Le Japon est en train de manœuvrer pour avoir une armée alors qu'ils ne sont pas censés en avoir. L'Allemagne, sans rien dire commence à agir à l'extérieur de ses frontières, alors qu'il est écrit noir sur blanc qu'elle ne doit pas le faire.» ... ou de problématique stratégique, la France étant amenée à faire le travail pour d'autres nations : «On agit par Etats interposés [...] La France est allée bombarder la Libye avec une énorme violence sur ordre des américains - et au mépris d'ailleurs des décisions prises au conseil de sécurité. L'armée française a fort bien rempli sa mission et l'a remplie pratiquement sans pertes, ce qui est totalement à son honneur. Mais on peut se demander quel intérêt avait la république française à entreprendre cette action. Pour le compte de qui avons nous agi ? La France est allée bombarder la Libye avec une énorme violence sur ordre des américains et au mépris des décisions prises au conseil de sécurité

Contrairement à la Libye, dans le cœur de l'Afrique, la France a des raisons d’intervenir pour le bien des populations avec lesquelles nous avons des accords depuis de nombreuses années, au Mali, en Centrafrique, au Congo-Brazzaville [République du Congo]... C'est là que les populations ont besoin de notre appui. Nous ne pouvons refuser de leur apporter notre soutien militaire sous prétexte que les Etats-Unis (nous entraînent) dans des guerres qui ne nous concernent pas. C'est une question de souveraineté nationale et celle-ci ne passe que par une armée qui obéit uniquement à la volonté des responsables nationaux.» Source : Russia Today , 27/06/2016 Les-crises.fr DT | 15 août 2016 à 3 h 00 min | Étiquettes : France, OTAN | Catégories : Crise Politique | URL : http://wp.me/p17qr1-woJ

315 Tic-tac - Source : TomDispatch.com, le 12/06/2016

Posté par Noam Chomsky, le 12 juin 2016

« Cela faisait trois mois qu'il n'avait pas mis les pieds à son bureau lorsqu'il se rendit à Prague, capitale de la République Tchèque, et fit une allocution sur le dilemme nucléaire mondial. Ses déclarations semblaient venir de militants antinucléaires, pas du président des États-Unis. En appelant à utiliser de nouvelles formes d'énergie, Barack Obama a parlé avec une rare éloquence des dangers d'une planète où les armes nucléaires se sont répandues à tel point que leur utilisation va s'avérer « inévitable ». Il a plaidé pour un « monde sans armes nucléaires » et a même affirmé : « En tant que puissance nucléaire, en tant que seule puissance nucléaire à avoir utilisé l'arme nucléaire, les États-Unis ont la responsabilité morale d'agir. » Il a même promis de prendre « des décisions concrètes » pour commencer à construire un tel monde sans de telles armes.

Sept ans plus tard, il est temps de faire le bilan de notre soi-disant premier président abolitionniste. L'arsenal nucléaire américain – 4 571 ogives (quoique bien moins que les 19 000 de 1991 lors de l'implosion du l'Union Soviétique) – reste assez puissant pour détruire plusieurs planètes de la taille de la Terre. Selon la Fédération des Scientifiques Américains, les derniers chiffres du Pentagone sur cet arsenal indiquent que « l'administration Obama a réduit les réserves moins que n'importe quel autre depuis la fin de la guerre froide, et que le nombre d'ogives démantelées en 2015 était le plus faible depuis l'arrivée au pouvoir du président Obama. » Pour mettre cela en perspective, Obama a fait significativement moins que George W. Bush en matière de réduction de l'arsenal.

Dans le même temps, notre président abolitionniste s'occupe actuellement de la modernisation du même arsenal, un projet en cours depuis trois décennies, dont le coût est estimé à au moins 1000 milliard de dollars – sans compter, bien sûr, les habituels surcoûts impromptus. Dans l'opération, de nouveaux systèmes d'armement seront produits, la première bombe atomique dite « intelligente » (c'est à dire plus précise et plus destructrice), et Dieu sait quoi d'autre.

Un seul succès antinucléaire peut lui être attribué, son accord avec l'Iran s'assurant que ce pays ne produise pas une telle bombe. Un bilan aussi dérisoire venant d'un président qui semblait sur la voie de l'abolitionnisme nous éclaire sur la réalité du dilemme nucléaire et l'emprise que la sécurité nationale a sur sa pensée (et probablement sur celle de n'importe quel futur président).

Il est effrayant que, sur notre planète, l'humanité continue d'encourager deux forces apocalyptiques, dont chacune – l'une immédiate (menace nucléaire) et l'autre sur la durée (réchauffement climatique) – pourrait mutiler voire détruire l'humanité telle que nous la connaissons. Cela devrait tous nous faire réfléchir. C'est ce dont nous parle Noam Chomsky dans cet essai extrait de son remarquable nouveau livre Who Rules the World? (« Qui dirige le monde ? »).

L'horloge de la fin du monde (Doomsday Clock) »

316 - « La réunion secrète du 11 juin 1965 au département d’état américain sur l’union monétaire européenne http://www.francoisasselineau.fr/2014/06/la-reunion-secrete-du-11-juin-1965-au.html

« Dans un article retentissant du 19 septembre 2000, le journaliste du très sérieux quotidien britannique Daily Telegraph, Ambrose Evans-Pritchard, a montré que les autorités américaines ont soutenu le processus dit de « construction européenne », ainsi que« la mise en place, dès les années 1960, d’une union monétaire. L’UPR s’en est largement fait l’écho, à la fois dans plusieurs de mes conférences publiques et par une reprise directe de cet article sur notre site : Reposant sur l’analyse d’archives du Département d’État des années 1950 et 1960, rendues publiques (« declassified ») à l’été 2000, cet article, bien que sensationnel, a été totalement passé sous silence par les médias et les partis politiques français. De fait, en dehors de l’Union Populaire Républicaine, aucun parti politique – et notamment pas le FN, DLR ou le Front de Gauche – n’explique jamais à nos concitoyens le rôle déterminant des États-Unis d’Amérique dans la prétendue « construction européenne ». Il s’agit pourtant de la clé essentielle qui manque aux Français pour comprendre les origines réelles du désastre économique, social, agricole, industriel, diplomatique, militaire et géopolitique dans lequel leur pays ne cesse de s’enfoncer. Au sein de la presse française, quelques très rares articles ont apporté au public des explications fouillées et sérieuses à ce sujet, essentiellement dans un numéro d’Historia de 2003, intitulé . ). « La CIA finance la construction européenne » (texte complet disponible sur cette page ) Le contraste entre, d’un côté l’omission systématique de ce sujet stratégique dans les grands médias et les autres partis politiques français, et de l’autre côté son explicitation précise par l’UPR, est flagrant. L’UPR s’est en effet fait un devoir, depuis sa création, de présenter au public les preuves irréfutables que la « construction européenne » ne vise pas le bien-être des peuples d’Europe, mais au contraire leur asservissement à une puissance étrangère et à une oligarchie financière et industrielle prédatrice. Faute de savoir quoi répondre sur le fond à notre démarche historique rigoureuse, qui bouleverse les schémas de pensée habituels et qui débouche sur des solutions totalement nouvelles, quelques adversaires politiques tentent de nous disqualifier avant tout débat, par le recours à la calomnie ou à la dérision. Ils appliquent la tactique du « Circulez, il n’y a rien à voir », en taxant tout bonnement l’UPR d’« antiaméricanisme primaire », voire de « complotisme ». Quelques officines se sont mêmes risquées à insinuer que l’article d’Ambrose Evans-Pritchard – qui n’est d’ailleurs pas la seule preuve que nous avançons, très loin s’en faut ! – serait fondé sur de fausses informations. Seulement voilà. L’UPR est un mouvement honnête, courageux, responsable et tenace. En particulier, l’UPR ne se laisse jamais impressionner ni soumettre par des manœuvres d’intimidation. Pour nous, seules comptent la recherche de la vérité, sa présentation pédagogique et sereine au peuple français, et les conclusions logiques qu’il faut collectivement en tirer. C’est dans cet esprit que l’un des responsables de notre mouvement, après avoir échangé directement avec les archives du Département d’État américain à Washington, est parvenu à obtenir

317 un scan de la note rendue publique ou « déclassifiée » (« declassified ») en date du 11 juin 1965, mentionnée par Ambrose Evans-Pritchard dans son article. Je tiens à l’en remercier ici publiquement. (Lire la suite sur le site de l'UPR)

- « Washington vend encore pour 1,15 milliard de dollars d’armements à l’Arabie saoudite, principal financier, fournisseur d’armes et inspirateur idéologique d’Al Qaeda et de Daesh (source : site UPR)

Lecture : 7 min Publié le 10 août 2016 dans Monde / Lien permanent Pendant la torpeur de l’été, on vient d’apprendre, ce 9 août 2016 au soir, que les États-Unis ont décidé de vendre de nouveau à l’Arabie saoudite des chars, des véhicules blindés, des mitrailleuses lourdes et des munitions, le tout pour la bagatelle de 1,15 milliard de dollars propre à satisfaire les marchands de canons états-uniens. Cette vente vient d’être annoncée aujourd’hui par le département américain de la Défense, après approbation du département d’État. Il reste à obtenir le feu vert du Congrès, ce qui constituera une simple formalité tant le sujet, et les lobbys qui sont derrière, ont neutralisé la démocratie américaine.

Commentaires Cette nouvelle vente massive d’armes américaines à l’Arabie saoudite intéresse d’autant plus les Français que François Hollande et son gouvernement se montrent les domestiques les plus serviles de Washington d’un côté, et les alliés les plus empressés de Riyadh de l’autre côté. Cela m’incite à rappeler quelques vérités sur l’Arabie saoudite.

1) L’Arabie saoudite, le vassal américain qui prêche un islam ulra-rigoriste Comme on le sait, l’Arabie saoudite est l’un des principaux « alliés » de Washington au Moyen- Orient, ou plus exactement un « vassal » puisque quelque 40 000 soldats américains stationnent en permanence dans le royaume wahhabite et que le régime s’effondrerait en quelques jours si les États-Unis lui retiraient leur soutien. Cet État, soutenu à bout de bras par Washington, est aux mains de l’un des régimes les plus obscurantistes de la planète. Il applique la charia et une vision ultra-littérale du Coran pour assurer sa domination sur la société de l’Arabie. Il est cependant à préciser que l’ensemble de la famille royale – qui compte des centaines de princes – est généralement la dernière à appliquer la lecture ultra-littérale et tendancieuse du Coran qu’elle impose au peuple. L’hypocrisie règne en maître dans les allées du pouvoir saoudien et tous les expatriés connaissent des anecdotes de corruption, de soirées libertines ou de réceptions princières où l’alcool coule à flot dans des bouteilles portant de fausses étiquettes… Je conseille à l’internaute intéressé par cette hypocrisie générale – pourtant sévèrement condamnée par le Coran (cf. la sourate 63 : Al-Munafiqun = « Les hypocrites » ) – de lire à ce sujet un livre déjà ancien (1995) mais rédigé de première main par un ancien ambassadeur de France en poste à Riyadh écrivant sous pseudo (et que je connaissais personnellement) : «

318 L’Arabie saoudite : La dictature protégée »

2) L’Arabie saoudite a décapité plus de personnes que Daesh en 2015 Entre janvier 1985 et juin 2015, environ 2208 personnes ont été victimes de la peine de mort en Arabie saoudite. En 2015, le nombre de condamnations à mort exécutées a atteint un niveau sans précédent dans le royaume : 153 personnes ont été décapitées. Du 1er janvier au 1er mai 2016, le nombre d’exécutions a déjà atteint 89 personnes. L’Arabie saoudite est un pays où sont punis de mort (liste non exhaustive ) : – l’homicide, – le viol, – le vol à main armée, – le trafic de drogue, – le détournement d’avion, – la sorcellerie, – l’adultère (100 coups de fouet « seulement » sont prévus si l’adultère est commis entre personnes non mariées, la peine de mort par lapidation est prévue pour les personnes mariées) – la fornication, – la sodomie, – l’homosexualité, – le sabotage, – le terrorisme, – la sédition politique, – l’idolâtrie – et l’apostasie (le renoncement à l’islam est puni de mort par décapitation, sauf si le condamné se repent sous trois jours). [ Source : https://en.wikipedia.org/…/Capital_punishment_in_Saudi_Arab… ] Les exécutions sont publiques et les personnes exécutées sont très généralement décapitées d’un coup de sabre, ou lapidées pour l’adultère, rarement par d’autres méthodes comme la crucifixion ou l’arme à feu. (Plusieurs vidéos enregistrées clandestinement de certaines de ces exécutions publiques circulent sur Internet, il faut avoir le cœur bien accroché pour les regarder.) L’assistance d’un avocat avant le procès et la représentation légale en salle sont régulièrement déniées aux prévenus. Il est à noter qu’en 2015, les tortionnaires de Daesh ont décapité moins de personnes que l’Arabie saoudite, selon les affirmations de M. Hillel Neuer, directeur exécutif de « UN Watch », une organisation non-gouvernementale de surveillance basée à Genève.

3) L’Arabie saoudite a largement financé et fourni en armes Al Qaeda et Daesh, et il n’est pas sûr que cela ait cessé Je renvoie ici à un long entretien de Roland Lombardi, docteur en histoire et chercheur associé à l’Institut de recherches et d’études sur le monde arabe et musulman d’Aix-Marseille Université, également membre actif de l’association Euromed-IHEDN. Il fait le point – en novembre 2015 – sur ce que le grand public peut savoir des liens plus que troubles entre l’Arabie saoudite, le Qatar, Al Qaeda et Daesh.

319 4) L’Arabie saoudite est engluée dans une sale guerre au Yémen, qui a déjà fait plus de 3200 morts civils Il convient aussi de rappeler que l’Arabie saoudite, à la tête d’une coalition arabe sunnite, mène au Yémen une guerre contre les rebelles houthis (chiites). Selon l’ONU, cette guerre, scandaleusement passée sous silence par les grands médias occidentaux, a déjà fait près de 6 300 morts, dont près de la moitié sont des civils (3 218), depuis l’intervention en mars 2015. Il ne fait aucun doute que le matériel militaire vendu ce jour par Washington servira à tuer des centaines, voire des milliers de civils yéménites innocents.

Conclusion : « L’Arabie saoudite est un Daesh qui a réussi » En conclusion, je laisserai la parole à l’écrivain algérien Kamel Daoud, par ailleurs lauréat du « Prix Goncourt du premier roman » et chroniqueur au Quotidien d’Oran. Après les attentats effroyables de Paris du 13 novembre dernier, Kamel Daoud avait publié, le 21 novembre, en anglais et en français, une très intéressante « tribune » dans le quotidien américain « The New York Times ». Dans cette tribune, Kamel Daoud affirmait que « L’Arabie saoudite est un Daesh qui a réussi ». Il vaut le coup de la lire ou de la relire en ce jour où Washington annonce la vente à Riyadh d’armements supplémentaires pour 1,15 milliard de dollars. Alors que la France a été de nouveau frappée par des attentats épouvantables, sur la promenade des Anglais à Nice et dans l’église de Saint-Étienne-du-Rouvray, il est fondamental de bien comprendre que ce sont les autorités américaines – et aussi le gouvernement français dans une moindre mesure – qui arment continuellement « le Daesh qui a réussi ». Comble du déshonneur, le 4 mars 2016 à l’Élysée, François Hollande a remis personnellement la Légion d’honneur au prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Nayef ben Abdelaziz Al Saoud. C’est ainsi le même François Hollande, qui affirme avoir des « haut-le cœur » devant un discours de Donald Trump, et qui a osé remettre notre plus haute distinction nationale au prince héritier et vice-Premier ministre de cette Arabie saoudite criminelle, qui empoisonne mentalement et financièrement l’ensemble du monde musulman et qui est à l’origine même du fondamentalisme islamique.

320 En photo :

– à gauche : un bourreau armé d’un sabre s’apprête à décapiter publiquement un condamné en Arabie saoudite.

– à droite : le président George W. Bush, sabre de décapiteur à la main, rit aux éclats avec Salmane ben Abdelaziz Al Saoud, à l’époque prince et aujourd’hui roi d’Arabie saoudite. »

-Gros plan Youngs leaders

« Qui sommes-nous - French-American Foundation... par fonzibrain

Vidéo avec Pierre Hillard sur Nicolas Dupont-Aignan qui visiblement n'est plus sur la liste des Youngs leaders cette année. http://www.french-american.org/files/liste-yl-fr-81-10.pdf http://www.french-american.org/files/liste-yl-fr-81-10.pdf

"Nous sommes reconnaissants au Washington Post, au New York Times, Time Magazine et d'autres grandes publications dont les directeurs ont assisté à nos réunions et respecté leurs promesses de discrétion depuis presque 40 ans. Il nous aurait été impossible de développer nos plans pour le monde si nous avions été assujettis à l'exposition publique durant toutes ces années. Mais le monde est maintenant plus sophistiqué et préparé à entrer dans un gouvernement mondial. La souveraineté supranationale d'une élite intellectuelle et de banquiers mondiaux est assurément préférable à l'autodétermination nationale pratiquée dans les siècles passés." David Rockefeller Président et fondateur du Groupe de Bilderberg et de la Commission Trilatérale. Président du CFR. Propos tenus à la réunion du Groupe de Bilderberg à Baden Baden en 1991 »

321 E-UE et domination allemande mercredi 13 juillet 2016 Source « L'arène nue », Coralie Delhaume http://l-arene-nue.blogspot.fr/

"Au Parlement européen, une domination allemande sans partage. « Non à l'Europe allemande !». Cette courte phrase fit un temps office de formule magique Outre- Rhin. Elle fut tour à tour utilisée par le ministre des finances Wolfgang Schäuble, par l'ancien président de la République fédérale Richard von Weizsäcker ou par le sociologue Ulrich Beck, qui en fit le titre d'un petit ouvrage.

Hélas, force est de constater que cela n'a rien conjuré. L'Europe est très allemande. Elle l'est devenue progressivement à la faveur de plusieurs événements : la réunification d'une part, la création de l'euro d'autre part, car cette monnaie favorise l'économie allemande au détriment des autres. L'élargissement à l'Est enfin, qui a intégré les PECO (pays d'Europe centrale et orientale) à l'Union européenne, PECO dont Berlin est ainsi parvenu à faire la base arrière de sa puissante industrie.

On a beaucoup dit qu'avec le Brexit, l'Allemagne perdait un allié libéral en Europe, et se retrouvait contre son gré en tête à tête avec des pays d'Europe latine tels la France ou l'Italie. A la vérité, il est probable que le départ britannique renforce encore le pays d'Angela Merkel, ne serait-ce que parce qu'il accroît sa centralité. Comme l'explique ici Alain Trannoy, directeur d’études à l’EHESS : « Cette Europe-là (…), celle qui surgit avec la sortie de la Grande-Bretagne (…) déplace ipso facto le centre de gravité de l’Union européenne vers l’Est et renforce encore la main de l’Allemagne : en plus de son poids démographique et économique, elle gagne encore en centralité. A l’élargissement à l’Est, succède le rétrécissement à l’Ouest ».

Au demeurant, la répartition des postes au sein de l'Europe institutionnelle témoigne de la domination de ce pays. Par exemple, le président de la Banque européenne d'investissement (BEI) et le directeur général du Mécanisme européen (MES) sont tous deux allemands. Ailleurs, ce sont des représentants de la zone d'influence immédiate de l'Allemagne qui ont été imposés par Angela Merkel: le polonais germanophone Donald Tusk à la présidence du Conseil et le luxembourgeois Jean-Claude Juncker (dont le charismatique chef de cabinet, Martin Selmayr, est allemand) à la tête de la Commission. Toutefois et comme expliqué ici, ce dernier voit aujourd'hui sa présence à ce poste remise en cause, cependant que sa manière de remplir ses fonctions déplaît finalement à Berlin.

Un focus sur la manière dont fonctionne l'une des institutions de l'UE, le Parlement européen, permet de faire saillir la prééminence germanique. Ce n'est pas le moindre des paradoxes, alors que l'Assemblée de Strasbourg est présentée comme un haut lieu de la démocratisation de l'Union, et qu'elle est supposée représenter les peuples européens dans leur ensemble. ***

Depuis que le Parlement européen (PE) est élu au suffrage universel (1979), il a connu quatre Présidents allemands (mais aussi, il est vrai, trois Français et trois Espagnols). Surtout, et c'est une

322 première, Martin Schulz a été réélu Président en 2014 après avoir occupé le poste de 2012 à 2014. Il s'est donc succédé à lui même, chose qui ne s'était jamais produite. Selon toute vraisemblance, il ne compte d'ailleurs pas en rester là.

Ses fonctions ne l'empêchent nullement de rester présent et très influent au sein du groupe Socialistes et Démocrates (S&D) qu'il a présidé, et que préside actuellement l'Italien Gianni Pittella. Schulz est réputé peser de tout son poids sur les votes cruciaux comme, par exemple, lors de la nomination de Jean-Claude Juncker à la présidence de la Commission. Cela a également été le cas lors du vote sur la résolution Lange sur le TAFTA, pour celui sur la commission Luxleaks (la tentative de mise sur pied d'une commission d'enquête a d'ailleurs été mise en échec), ou pour celui sur les Panama Papers. Concernant cette dernière affaire, une commission d'enquête a bien vu le jour. Le nom du Président de cette commission vient d'ailleurs d'être connu. Il s'agit de Werner Langen, un eurodéputé... allemand.

Martin Schulz peut par ailleurs compter sur plusieurs soutiens parmi les administratifs employés par son ancien groupe parlementaire. Par exemple, le Secrétaire général adjoint pour les affaires administratives et organisationnelles, Michael Hoppe, se trouve être l'ancien Secrétaire général de la délégation du SPD allemand. La directrice du personnel du groupe, Ute Muller, est en position de jouer un rôle essentiel dans le recrutement de personnel administratif au profit du S&D.

Quant aux autres groupes de l'Assemblée européenne, le plus important d'entre eux, le PPE, est présidé par l'Allemand Manfred Weber. Le Secrétaire général du groupe, Martin Kamp, est l'un de ses compatriotes. Le groupe de la GUE (Gauche unitaire européenne) est présidé par Gabriele Zimmer (Die Linke). Enfin, Rebecca Harms co-préside le groupe des Verts. La France ne dispose quant à elle que d'une seule co-présidence de groupe, celle occupée par Marine le Pen pour ENL (Europe des nations et des libertés).

Ajoutons que l'Allemagne occupe à elle seule cinq présidences de commissions (Affaires étrangères, Commerce international, Contrôle budgétaire, Emploi et affaires sociales, Transport) dont certaines des plus importantes. A titre de comparaison, la France n'en occupe que deux (Budget et Pêche). L'Allemagne dispose de 28 coordinateurs de commission alors que la France n'en compte que 8. Ces eurodéputés ont un rôle important car ils font office de porte-parole de leur groupe au sein des commissions, mais surtout parce qu'ils contribuent à répartir le travail entre leurs pairs.

(...)Pour retrouver les tableaux prévues par Mme Delhaume, se reporter sur son site

Pour finir, il faut noter que la prédominance allemande au sein des entités politiques du PE (groupes, commissions) est relayée au sein de l'administration de cette même assemblée. Par exemple, le Secrétaire général du Parlement n'est autre que Klaus Welle, ancien Secrétaire général du PPE, et qui fut en son temps un homme de confiance d'Helmut Kohl. Welle entretient avec Martin Schulz des relations complexes et semble craindre de perdre son poste au profit d'un proche de Schulz, comme expliqué dans ce long portrait paru sur Politico.eu . Très bien informé des Games of Thrones qui se jouent au sein des institutions communautaires, ce même site explique que la politisation de l'administration du Parlement européen s'est considérablement accrue sous Martin Schulz, qui multiplie les nominations de proches. « Le Président du Parlement européen a lancé un plan de réaffectation de plusieurs membres de son

323 propre cabinet au sommet de la hiérarchie administrative de l'Assemblée », raconte Politico . De fait, le poste de Directeur général du personnel du PE - un poste clé puisqu'il donne la main sur toutes les procédures de recrutement au sein de l'Assemblée - est désormais occupé par Herwin Kaiser l'ancien adjoint au Chef de cabinet de Schultz. Quant au chef de Cabinet lui-même, Markus Winkler, il vient d'être retenu pour occuper le poste de Secrétaire général adjoint du Parlement, en remplacement de l'Italienne Francesca Ratti, conformément à ce qu'avaient annoncé le Telegraph britannique ou le site italien spécialisé sur les questions européennes Eunews . ***

La domination allemande au sein du Parlement européen semble désormais sans partage. Mais elle n'est qu'une déclinaison, à l'échelle de l'une des institutions européenne, de la domination allemande sur l'Europe dans son ensemble. Il ne reste décidément pas grand chose du « couple franco-allemand », une expression qui doit faire sourire outre-Rhin, si toutefois il arrive qu'elle y soit prononcée.

Et ce n'est pas fini : « le retrait (…) des Britanniques de l'Union européenne, comme par un effet de miroir grandissant, magnifie le décalage qui existe désormais entre la France et l'Allemagne. En l'absence de Londres, Berlin paraît toujours plus grande et Paris toujours plus petite », explique ici un spécialiste de l'Ifri. Heureusement qu'il reste à la France ses victoires au football. Convenons toutefois que c'est peu de choses.

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Object 4 Libellés : Allemagne, Brexit, couple franco-allemand, Europe, Game of Thrones, Jean-Claude Juncker, Klaus Welle, Luxleaks, Manfred Weber, Markus Winkler, Martin Schulz, Martin Selmayr, Parlement européen, Union européenne

- samedi 9 juillet 2016

Barroso, Draghi et bien d'autres chez Goldman Sachs : l'Europe c'est la Paie ! (source l'Arène nue) L'affaire a fait quelques vagues : José Manuel Barroso vient d'être recruté par la banque d'affaires Goldman Sachs pour lui servir de conseiller dans la gestion du Brexit. « José Manuel va apporter une analyse et une expérience immense à Goldman Sachs, et notamment une profonde compréhension de l'Europe », a indiqué la banque dans son communiqué.

Un joli petit carnet d'adresses également, aurait-elle dû préciser, car « José Manuel » ( on est cool-raoul chez GS : on se claque des bises et on s'appelle par le prénom ) « a servi comme président de la Commission européenne de 2004 à 2014, et en tant que premier ministre du Portugal de 2002 à 2004 ».

324 Et quel président de la Commission fut il ! Comme l'explique ici l'eurodéputé Emmanuel Maurel, c'est sous son règne, par exemple, qu'a été lancé le projet de Traité de libre- échange transatlantique : « le TAFTA est plutôt une idée européenne, en tout cas au départ. C'est la Commission Barroso qui a ouvert ce débat, en partant du constat d'une croissance faible et d'un niveau de chômage élevé, et parce que les économistes de la Commission sont incapables d'imaginer autre chose que de la dérégulation pour y remédier. Ils ont donc recherché quel était le grand marché qui pourrait tirer la croissance européenne, et dont le modèle serait proche du nôtre. La Commission s'est naturellement tournée vers les États-Unis, d'autant que José Manuel Barroso est lui-même un atlantiste éperdu ». ***

Éperdu, on peut le dire. Et ça n'a pas peu joué dans certains des choix qu'il a faits en tant que Premier ministre lusitanien. Il y a quelques jours était publié en Grande-Bretagne le rapport Chilcot, qui rappelle à notre bon souvenir les conditions dans lesquelles s'effectua l'invasion de l'Irak en 2003. Le moment est donc idéal pour rappeler le rôle que « José Manuel », ami de Tony Blair, joua dans cette affaire.

Dans un portrait sans complaisance de José Manuel Barroso, Jean Quatremer explique par exemple ici : « alors Premier ministre du Portugal, [Barroso] accueille avec empressement, le 16 mars 2003 aux Açores, le fameux « sommet » réunissant George W. Bush, Tony Blair et José María Aznar, au cours duquel la guerre [en Irak] fut lancée ». Le journaliste de Libération précise ici : « [Barroso] a ensuite joué un rôle trouble dans le transfert des prisonniers vers Guantanamo, laissant les avions de la CIA emprunter les aéroports et l’espace aérien portugais. Jamais il n’a regretté son soutien indéfectible à George W. Bush ». Ainsi, de deux choses l'une : soit Jean Quatremer s'est brutalement mué en « europhobe complotiste » voyant la main diabolique des Zétazuniens et de la CIA à l’œuvre partout. Soit - et c'est le plus probable - « Jojo-Manu » a donné les gages nécessaires pour lui permettre d'être recruté à terme par une grande banque américaine. Ce qui est désormais chose faite. Ceci dit, il y a ceux qui vont se finir chez Goldman Sachs, et il y a ceux qui y commencent.

Quel meilleur endroit, en effet, pour s'initier au beau métier d'Européen professionnel ?

Mario Draghi, notre Banquier central, a donc fait GS d'abord, et l'Europe ensuite. Plus précisément, il a œuvré au sein de la banque d'affaires de 2002 à 2005. Or en 2000, la filiale britannique de GS, Goldman Sachs International, avait vendu au gouvernement grec de Kóstas Simítis des « conseils » et autres « solutions » lui permettant de masquer une partie de sa dette, et de remplir les critères aptes à qualifier le pays pour l'euro. Certes, c'était deux ans avant l'arrivée de Draghi. Mais celui-ci peut-il vraiment, comme il l'a toujours affirmé, n'en avoir rien su ? Les produits dérivés à base d'obligations grecques utilisés pour l'entourloupe ont tout de même été conservés par GS jusqu'en 2005, date à laquelle ils ont été revendus à la National Bank of Greece. Pendant tout ce temps, Draghi occupait les fonctions précises de....« vice-président pour l'Europe-Goldman Sachs International, entreprises et dette souveraine »....

325 ***

En tout cas, l'Italien a eu tout le temps de regretter son « ignorance ». Car le moins que l'on puisse dire, c'est que l'appartenance grecque a l'euro lui a donné du boulot.

La Banque centrale européenne, en effet, a été aux avants-postes du travail de sape entrepris contre le gouvernement Syriza entre janvier et juillet 2015. C'est elle avant tous les autres - avant même le ministre allemand Wolfgang Schäuble - qui a obtenu la capitulation d'Alexis Tsipras et la signature par celui-ci du mémorandum de juillet 2015. Elle était la seule, en effet, à disposer des instruments techniques permettant d’affaiblir suffisamment le pays, et de l'obliger à rendre les armes.

Or Mario Draghi n'y est pas allé de main morte. Dès le début du mois de février 2015, à peine Tsipras arrivé aux responsabilités, la BCE coupait l'accès des banques commerciales grecques à la procédure de refinancement normal. Elle les réduisait à se financer via la liquidité d'urgence ( Emergency Liquidity Assistance, ELA ), les mettant ainsi à la merci d'une Banque centrale seule capable de réévaluer régulièrement le plafond de cet ELA. La BCE le fit d'ailleurs au compte gouttes, et toujours en fonction de la tournure prises par les négociations entre la Grèce et ses créanciers.

Enfin, sitôt connue la décision d'Alexis Tsipras d'organiser le référendum du 5 juillet 2015, le plafond de l'ELA fut bloqué, et les banques grecques contraintes de fermer. Le but était bien sûr de générer un sentiment de panique et de peser sur les résultats du scrutin. Ce fut en vain, et le « Oxi » l'emporta largement. Mais les banques hellènes étaient déjà fort mal en point, et le pays à bout de fatigue. On connaît la suite : le « non » fut converti en « oui », le référendum oublié, et le mémorandum signé.

***

Il serait dommage, tant qu'on en est a se rappeler le temps du maquillage des comptes publics grecs, de ne pas évoquer l'un de ceux qui, en tant que gouverneur de la Banque centrale hellénique jusqu'en 2002, y participa. Lucas Papademos, par ailleurs ancien vice- président de la Banque centrale européenne (2002-2010) fut ensuite nommé premier ministre en Grèce pour y prendre la tête d'un gouvernement de technocrates (pardon, d'un gouvernement « d'union nationale ») chargé de résoudre.... la crise de la dette. Lucas Papademos est passé par Goldman Sachs.

Il serait dommage, tant qu'on en est à se rappeler l e temps des gouvernements de technocrates (pardon, des gouvernements « d'union nationale ») dans les pays d'Europe du Sud, de ne pas évoquer celui de Mario Monti, ancien conseiller de la banque d’Italie, ancien commissaire européen, et devenu président du Conseil en Italie en 2011. Mario Monti est passé par Goldman Sachs.

Il serait dommage, tant qu'on en est à.... Bon, ça suffit maintenant. Il y en a d'autres. Pour savoir qui ils sont, on consultera par

326 exemple cet article du site Rue89, ou celui-ci, paru dans Le Monde.

Après ça, si l'on n'en a pas encore marre, si l'on souhaite faire une thèse dessus voire si l'on ambitionne de devenir à terme un spécialiste mondialement reconnu du sujet, on pourra voir ce documentaire d'Arte daté de 2012, consacré à Goldman Sachs. (...) [ Nota : merci d'éloigner les enfants avant de cliquer sur la vidéo car rien ne permet d'affirmer avec certitude qu'il ne s'agit pas en réalité d'un film d'Hitchcock ]. »

-"Face à l’opposition de 11 états de l’est-européen, le Gouvernement français est impuissant à obtenir la réforme de la directive européenne sur les travailleurs détachés (source site UPR)

Lecture : 8 min Publié le 11 août 2016 dans Europe / Lien permanent Face à l’opposition de 11 états de l’est-européen, le Gouvernement français est totalement impuissant à obtenir la réforme de la directive européenne sur les travailleurs détachés « qui fait des ravages majeurs dans le monde ouvrier » selon Manuel Valls lui-même. Lors de sa campagne électorale pour l’élection présidentielle de 2012, François Hollande n’avait pas seulement déclaré que « mon adversaire, c’est la finance » (dans son discours du Bourget du 22 janvier 2012). Il avait aussi promis « une nouvelle politique commerciale en Europe, qui fera obstacle à la concurrence déloyale, qui fixera des règles strictes en matière sociale, en matière environnementale, de réciprocité. Une contribution écologique sera installée aux frontières de l’Europe pour venir compléter ce dispositif » [1]. En bref, il avait ainsi promis aux électeurs une « nouvelle politique en Europe », en faveur d’une « Europe sociale », donc cette fameuse « autre Europe » qui joue les Arlésiennes depuis un tiers de siècle. Quatre ans après ces belles paroles, qu’a-t-il obtenu ? La réponse est simple : RIEN. Confrontés à des taux d’impopularité record, les gouvernements français, belge et allemand s’inquiètent de plus en plus du coût de la main d’œuvre à l’Est. En France, le Premier ministre Manuel Valls a notamment « menacé » de ne plus appliquer cette directive. Ce qui prouve au passage qu’il lui aura fallu 4 ans pour découvrir que cette directive porte un très grave préjudice à l’économie française en général, et au niveau de vie des Français en particulier. Quel en est l’enjeu ? Un travailleur «détaché» est un salarié envoyé par son employeur dans un autre État membre en vue d’y fournir un service à titre temporaire. Et ledit travailleur «détaché» est alors rémunéré dans des conditions qui dérogent au droit commun du pays dans lequel il travaille. Les cotisations sociales ( patronales et salariales) demeurent au régime du pays d’origine de l’employeur auteur de la prestation de service internationale. En revanche, si le salarié détaché travaille en France, son salaire proprement dit reste assujetti au respect de la double protection du SMIC français et /ou, si il est plus favorable, du minima conventionnel en vigueur.

327 Mais en tout état de cause, le préjudice est et reste patent pour notre pays qui se voit privé de cotisations qui sont intégralement versées au pays d’origine de l’entreprise qui vient prester. Et, surtout, le coût total du travail est ainsi drastiquement abaissé au détriment des entreprises françaises qui sont, elles, assujetties au régime élevé qu’impose notre protection sociale supérieure. La concurrence au nom de laquelle ces « prestations de service internationale » ou « PSI » (c’est le nom officiel pour les travailleurs détachés) ont été autorisées est donc bel et bien une concurrence déloyale, même si elle ne porte pas sur le salaire stricto sensu versé au salarié détaché. Cependant, encouragées par l’impuissance des parquets, puis des tribunaux, la complexité des procédures et leur durée, nombre de ces entreprises violent allègrement leur obligation de respecter le « noyau dur » de rémunération et payent en réalité des salaires inférieurs aux minimas français applicables. Et les restrictions budgétaires et les effectifs chroniquement faméliques de l’Inspection du Travail ne peuvent que les encourager à frauder. On notera toutefois que le régime de sanction a été récemment réformé et que, désormais, des amendes administratives dissuasives et relativement rapides viennent renforcer l’arsenal répressif des services de contrôle. Quoi qu’il en soit, l’actuelle directive, datant de 1996 [2] et complétée par une directive d’application de 2014, est dénoncée par la plupart des partis sociaux-démocrates ou d’autres tendances « de gauche » de l’Union Européenne comme étant un puissant moyen de « dumping fiscal et social » au profit des entreprises, et au détriment des individus et de certains États. Placée sous la pression insistante d’États membres d’Europe occidentale comme la France, la Commission Européenne a donc élaboré un projet législatif visant à modifier cette directive sur les travailleurs détachés qui fait grief à l’Ouest [3]. Elle l’a présentée aux États-membres le 8 mars 2016. Seulement voilà : deux mois après, le 11 mai, on a appris que 11 des 28 États-membres de l’Union européenne (dont 10 d’Europe de l’Est) ont décidé de faire front commun contre ce projet de la Commission européenne visant à modifier cette directive sur les travailleurs détachés. Onze parlements nationaux ont donc « adressé un carton jaune » [sic !] en mettant l’initiative en échec avec des motifs très variables [4] .

Commentaires Ces rebondissements confirment, encore et toujours, les analyses de l’UPR : 1) Il ne faut pas croire naïvement les promesses de campagne des candidats européistes. Tant que nous serons dans l’Union Européenne, le pouvoir de décision du chef de l’État est à peu près réduit à néant sur toutes les grandes décisions. L’essentiel est déterminé de façon juridique en dehors de nos frontières par des technocrates non-français et non-élus. La démocratie nationale n’est plus qu’un simulacre, un espace théâtral qui sert à canaliser la colère des Français et qui ne débouche sur rien, tant que l’on reste dans le théâtre européen en question. 2) L’Union Européenne fait cohabiter des États ayant des intérêts nationaux fondamentalement divergents. Quels que soient les embrassades et les sourires bonasses affichés par les ministres et chefs d’État devant la presse internationale, et quels que soient les mécanismes institutionnels de l’UE, par ailleurs terriblement lourds et inefficaces, il est tout bonnement impossible de contenter tous les pays membres.

328 3) L’Union Européenne crée des inégalités croissantes entre ses propres États membres, dont les tissus économiques, les traditions politiques et syndicales, les conceptions juridiques sont extraordinairement différentes. Comme l’a reconnu la Commission européenne elle-même, « ces vingt dernières années, le marché unique s’est élargi et les écarts salariaux se sont creusés, ce qui a malheureusement incité les entreprises à recourir au détachement pour tirer profit de ces écarts » [5] . Par exemple, une heure de travail coûte en moyenne 40 euros à l’employeur au Danemark et 39 euros en Belgique, alors qu’elle ne coûte que 3,8 euros en Bulgarie, 4,6 euros en Roumanie ou 8,4 euros en Pologne, selon les données Eurostat pour 2014. Cet « écart » en termes législatif, économique ou culturel, mène la construction européenne à sa perte et ne profite en bout de course qu’à une minorité. Lorsque l’on lit ces chiffres, comment peut-on contester que l’Union Européenne ne fonctionne pas et ne peut pas fonctionner ?

« Désobéir » est une « mélenchonnerie » M. Valls aura beau affirmer que la directive sur les travailleurs détachés est « un dispositif européen qui fait des ravages majeurs, terribles, dans le monde des salariés, le monde ouvrier » [6] et demander des aménagements, le problème persistera toujours. Quant à « désobéir » à la directive existante, c’est une « mélenchonnerie » à laquelle le Premier ministre ne croit pas lui-même. Il sait en effet très bien que si le gouvernement français s’aventurait à piétiner le droit européen, la Commission européenne et d’autres États-membres défèreraient aussitôt la France devant la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) et que celle-ci condamnerait notre pays, sous astreinte financière journalière, à respecter ses engagements juridiques. Car il n’y a que deux solutions – et deux seulement – avec l’Union européenne : soit on y reste et on en applique le droit, soit on fait comme les Britanniques et on en sort. Mais prétendre rester dans l’UE sans en appliquer le droit, c’est un mensonge éhonté, du même acabit que prétendre accoucher d’une « autre Europe ». Et puisque le gouvernement français a décidé que la France doit rester dans l’Union européenne et qu’il a même annoncé publiquement qu’il ne demanderait jamais leur avis aux Français sur cette question [7], le blocage, une nouvelle fois, est complet.

Conclusion Alors que le mandat de François Hollande touche – heureusement ! – à sa fin, les Français doivent bien comprendre que tous les candidats à la présidentielle qui leur proposeront « une autre Europe » en 2017 ne leur offriront en réalité que de couler avec le Titanic de l’Union Européenne. Équipe de rédaction de l’UPR Patrick Bloch et Antoine Silvestre, avec relecture de Sandro G. et François Asselineau ————————————- Sources : [1] http://www.lafranceagricole.fr/…/presidentielle-francois-ho…

329 [2] http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do… [3] http://europa.eu/rapid/press-release_IP-16-466_fr.htm [4] https://www.euractiv.fr/…/lest-sinsurge-contre-le-projet-d…/ [5] http://europa.eu/rapid/press-release_MEMO-16-467_fr.htm [6] http://www.lemonde.fr/…/que-contient-la-directive-europeenn… [7] https://www.upr.fr/…/segolene-royal-la-dictature-sans-vergo…

330 D-Syrie, d'autres sons de cloche

« Q atar ken nedy », neveu de JF Kennedy, s'exprime sans manière

by brunobertezautresmondes « L’avocat Robert Kennedy junior, neveu de l’ancien président américain John F. Kennedy, a révélé dans un article pour le magazine Politico les véritables causes de la guerre en Syrie.

La racine du conflit armé en Syrie, provient en grande partie du refus du président syrien Bachar al-Assad du passage d’un pipeline de gaz du Qatar vers l’Europe.

« La décision américaine. d’organiser une campagne contre Bachar al-Assad n’a pas commencé avec les manifestations pacifiques du printemps arabe en 2011, mais en 2009, lorsque le Qatar a offert de construire un pipeline pour 10 000 millions de dollars qui traverserait l’Arabie Saoudite, la Jordanie, la Syrie et la Turquie «

Ce projet aurait veillé à ce que les pays arabes du Golfe aient un avantage décisif sur les marchés mondiaux de gaz et aurait renforcé le Qatar, un proche allié de Washington dans la région, a déclaré Kennedy junior.

Le président syrien Bachar al-Assad, a rejeté le projet au motif que cela nuirait aux intérêts de son allié russe, le plus grand fournisseur de gaz naturel vers l’Europe. Un an plus tard, Al-Assad a commencé à négocier avec l’Iran pour construire un autre gazoduc qui transporterait le gaz de l’Iran vers le Liban et le pays perse serait devenu un des plus grands fournisseurs de gaz vers l’Europe, a expliqué l’avocat.

Immédiatement après le refus du projet initial, les agences de renseignement américaines, Le Qatar, l’Arabie Saoudite et le régime israélien ont commencé à financer la soi-disant opposition syrienne et à préparer une révolte pour renverser le gouvernement syrien, a dit M. Kennedy, qui a cité des données de divers rapports de renseignement auxquels il a eu accès. Dans cet objectif, la CIA a transféré six millions de dollars à la télévision britannique Barada dans le but de préparer des reportages en faveur du renversement du président syrien, a-t-il ajouté.

La CIA a utilisé les membres du groupe extrémiste État islamique pour protéger les intérêts des Etats-Unis sur les hydrocarbures et instrumentaliser les forces radicales pour réduire l’influence de (l’ancienne) Union Soviétique dans la région a conclu le jeune avocat Robert Kennedy.

Pendant ce temps, les Etats-Unis poursuivent leur soutien financier, logistique et militaire aux groupes d’opposition armés, qui ont échoué à renverser le gouvernement syrien, malgré cinq années de guerre.

Les États-Unis essayent même d’obtenir la levée des sanctions qui empêchent l’envoi

331 d’armes anti-aériennes au territoire syrien dans le but de renforcer le front de groupes armés qui luttent contre l’armée arabe syrienne. Sources:http://www.politico.eu/article/why-the-arabs-dont-want-us-in-syria-mideast- conflict-oil-inte rvention/ http://www.hispantv.com/newsdetail/siria/216231/siria-crisis-transferencia-gas-catar-eeuu- isis

Traduction: Fawkes News http://fawkes-news.blogspot.fr/2016/02/un-membre-du-clan-kennedy-revele-la.html wikistrike.com brunobertezautresmondes | 29 février 2016 à 12 h 09 min | Catégories: Non classé | URL: http://wp.me/p5XrE6-4Xz »

-« L’ambassadeur de l’Inde confirme : la guerre en Syrie a été fomentée de l’extérieur (source Le grand soir)

18 février 2016

Alia ALLANA L’ancien ambassadeur indien à Damas le fait comprendre dans un rapport significatif : la représentation occidentale selon laquelle le président syrien Assad devait être renversé par une insurrection populaire, n’est pas viable. La guerre a été importée du dehors, entre autres par les pays du Golfe et Al- Qaïda. Les Etats-Unis y ont collaboré en soutenant le Front Al- Nusra. Assad a sous-estimé le danger – parce qu’il pensait que son peuple le suivrait. De 2009 à 2012, V. P. Haran a été ambassadeur de l’Inde en Syrie. Il s’en est entretenu avec le magazine indien Fountain Ink, plusieurs fois primé, expliquant comment certains des médias ont amplifié la révolte, et sur l’évidence de la présence d’Al-Qaïda sur le terrain dès les premiers jours du conflit. L’évaluation de l’ambassadeur confirme l’analyse du journaliste américain Seymour Hersh selon laquelle Assad n’avait à craindre aucune opposition militante dans son propre peuple. A quoi ressemblait la Syrie lors de votre arrivée en janvier 2009 ? V. P. Haran : La Syrie était un pays pacifique sans tensions internes. L’économie syrienne se portait bien, avec un taux de croissance moyen de 5%. Le taux de chômage était d’environ 8% mais les Syriens sans emploi pouvaient en trouver un dans les pays du Golfe. Il existait cependant un pourcentage élevé de chômage chez les diplômés. Le niveau de la dette extérieure de la Syrie se maintenait à un taux confortable de 12,5% du PIB. Le créancier principal était la Russie, qui avait annulé la plus grande partie de cette dette. La sécheresse dans le nord-est représentait le problème

332 majeur entrainant une délocalisation massive des populations vers le sud et le sud-est. Et comment vivait-on à Damas ? Les diplomates ont tendance à mener une vie retirée mais je me rendais dans le centre-ville, parfois en taxi, pour prendre un thé dans un café et discuter avec les gens. C’étaient de merveilleux moments et des jours heureux. Le maintien de l’ordre ne posait jamais de problème. Mes collègues féminines m’expliquaient qu’elles pouvaient porter des bijoux et rentrer chez elles à pied à deux heures du matin en toute sécurité. Dans certains quartiers, les restaurants restaient ouverts jusqu’à cinq heures du matin. On avait l’impression qu’il n’y avait jamais de problèmes de sécurité dans les rues. Cela était supposé être dû à la mukhabarat (la police secrète militaire) mais il me semblait que les gens se sentaient responsables de la sécurité collective. Quand je suis arrivé à Damas, on m’a raconté qu’une personne sur deux appartenait à la mukhabarat. C’est une surestimation grossière. Il existe une police secrète fonctionnant très efficacement à l’intérieur du pays mais je n’y ai jamais eu affaire directement. Une seule fois en quatre ans de présence j’ai fait l’objet d’une filature, à Media, dans la province d’Idlib. Une jeep nous a suivis, mais sans intimidation. Aviez-vous anticipé un « Printemps arabe » en Syrie ? Lors de la situation tendue en Tunisie et en Egypte, le président Bashar al-Assad est passé à la télé pour préciser que les conditions politiques et économiques étaient différentes en Syrie. Il a exprimé sa conviction que la Syrie ne suivrait pas le même chemin. C’était également l’évaluation générale de la communauté diplomatique. Bashar al-Assad était un dirigeant populaire et c’est en partie la raison pour laquelle il est encore au pouvoir. Il n’existe pas d’opposition interne adéquate et un grand nombre de problèmes en Syrie ont été créés par des intervenants étrangers tentant de se débarrasser d’un régime dérangeant. Dans un sondage réalisé dans le monde arabe en 2009, 67% des votants l’ont élu en tant que personnalité arabe la plus populaire. La communauté diplomatique elle-même, tout comme les diplomates occidentaux, s’accordaient sur le soutien qu’il recevait de la part de 80% des Syriens. Il avait initié des réformes en 2000 mais n’avait pu les mener à bien à cause de l’opposition du parti Baas. Ce n’était pas non plus un antagonisme sunnites–chiites. Jetez un coup d’œil aux chiffres : il y a plus de 50% de musulmans sunnites en Syrie, et les Kurdes, les Druzes, les Maronites, les Assyriens, les Alaouites et quelques autres composent le reste. Bashar al-Assad reçoit un soutien total de la part des minorités et même une forte proportion des musulmans sunnites se déclare en sa faveur. Mais à l’époque de mon départ en 2012, la Syrie avait beaucoup changé. Si les premières années de mon mandat avaient ressemblé au paradis, les choses ont commencé à se détériorer dès le début de l’année 2011. Vous souvenez-vous des premières manifestations de 2011 ? En février, alors que le Bahreïn connaissait des mouvements de protestations, certaines ONG ont tenté d’organiser des manifestations à Damas. Il y en a eu deux, deux week-ends de suite, mais il n’y eut pas plus de 20 ou 30 participants. Les journalistes et les membres de la communauté diplomatique étaient nettement plus nombreux que les manifestants. Puis, en mars 2011, les enfants ont tagué les murs de l’école et il y a eu une grande manifestation. La semaine suivante, il y a eu une manifestation à Latakieh et ensuite, chaque vendredi, quelque chose se produisait. Rapidement, certains quartiers de Latakieh, d’Homs et de Hama sont devenus chaotiques mais Alep resta calme et ceci préoccupa énormément l’opposition, qui ne réussissait pas à soulever la population d’Alep contre le régime ; aussi ont-ils envoyés des bus chargés de gens vers Alep. Ces gens mettaient le feu dans les rues, puis s’en allaient. Les journalistes répandaient ensuite

333 l’information selon laquelle Alep s’était soulevée. A ce propos, il faut ajouter ceci : parmi les medias, certains ont exagéré en montrant la Syrie sous un jour négatif. Parfois, on a rapporté des choses qui ne s’étaient pas produites. Par exemple, j’étais en conversation avec un Sheikh important quand mes collègues ont commencé à m’appeler frénétiquement, m’informant que ce Sheikh jouerait un rôle dans les manifestations devant se dérouler cet après-midi-là. Mais rien de tout cela ne s’est produit ; en fait à ce moment-là, lui et moi déjeunions ensemble. Il y a eu beaucoup d’exagération dans les medias. Il y a eu un exemple marquant. A Idlib, des extrémistes sunnites se sont rendus à Alep et ont exhorté la population à rejoindre l’opposition. Les gens d’Alep les ont battus et forcés à partir. La foule est devenue ingérable et la police a dû intervenir pour en reprendre le contrôle. Les extrémistes sunnites ont dû se réfugier dans une maison sous la protection de la police qui leur a fourni des uniformes leur permettant de s’échapper sans être lynchés. Damas a-t-il beaucoup changé pendant cette période ? Je me souviens d’un incident le 14 avril 2011, alors que j’accomplissais ma promenade quotidienne jusqu’au stade situé à environ deux kilomètres. En chemin, j’ai dépassé la boulangerie devant laquelle je passais chaque jour et j’ai remarqué qu’il y avait une longue queue devant cette boutique habituellement si calme. Au retour, il y avait toujours la queue et j’ai demandé pourquoi. Les gens voulaient s’approvisionner en pain parce qu’ils avaient entendu dire qu’il allait se passer quelque chose. Le jour suivant, qui était pourtant un vendredi, rien ne s’est produit. Lorsque la situation a empiré au cours de la seconde moitié de 2012, je remplaçai ma promenade au stade par une promenade autour du parc du quartier de Mezze. Un jour, une moto arrivant à toute vitesse, a tourné le coin de la rue en faisant hurler son moteur. Puis est arrivée une jeep de la sécurité qui a manqué le virage pris par la moto, ayant perdu sa piste. Ne pouvant la retrouver, ils sont entrés dans le parc pour voir si des gens avaient vu quelque chose. C’est alors qu’on nous a dit que ceux qui étaient sur la moto avaient planifié des attentats. A Mezze, tout près du quartier où vivaient les diplomates, il y avait un champ de cactus où les rebelles s’étaient introduits en creusant un tunnel. Ils y avaient établi un camp d’où ils tiraient des fusées incendiaires en direction du cabinet du Premier ministre. Ensuite les forces de sécurité s’y sont introduis pour détruire ce camp. C’était une opération ciblée et lors d’une discussion avec une personne vivant dans un appartement disposant d’une vue sur l’endroit, celle-ci m’a dit qu’ils avaient pris pour cible un bâtiment et l’avaient détruit complètement. Une énorme cache d’armes et de munitions a été découvert dans ce bâtiment. Mais certaines régions du pays sont restées calmes ? Les commanditaires étrangers de l’opposition n’ont pas pu le digérer. Ils ont envoyé à la frontière jordano-syrienne un groupe ayant pris d’assaut deux postes de sécurité. Ils y ont tué tout le monde, certains d’entre eux de la manière la plus brutale, dans le style d’Al-Qaïda. Le gouvernement ne l’a pas immédiatement mentionné mais un membre de la communauté diplomatique a confirmé qu’il s’agissait d’Al-Qaïda en Irak. Il est évident qu’Al-Qaïda en Irak était présent en Syrie dès avril 2011. Al-Qaïda était là dès la toute première semaine, et sinon la première semaine, dès fin 2011 quand les drapeaux d’Al-Qaïda firent leur apparition. Ce sont ces groupes soutenant l’opposition à travers la frontière. A Raqqa les combattants vinrent du nord et il est clair qu’il s’agissait d’Al-Qaïda. Assad a dit dès le début qu’il s’agissait de terroristes. Pourquoi n’y a-t-il eu personne pour le

334 croire ? Les gens n’avaient pas l’esprit ouvert. Quel pouvait être l’intérêt pour Al-Qaïda en Irak de créer le chaos en Syrie ? Un grand nombre d’actions ont été dirigées de l’extérieur, notamment par les pays du Golfe. Al Jazzera aussi y a joué un rôle. En avril, ayant emmené un invité à l’amphithéâtre de Bosra puis à Sweida, j’ai dû emprunter l’autoroute vers la frontière jordanienne. Nous étions en route entre environ 9 heures 30 et 10 heures 30. Le même jour, un correspondant d’Al Jazzera a été prié de quitter la Syrie en empruntant la même route. A des intervalles de quelques secondes, il a signalé des check points. Prise de panique, mon ambassade m’appela parce qu’ils croyaient ce qu’ils voyaient à la télé. Je leur ai dit que je n’avais rencontré qu’un seul check point. Pourquoi le gouvernement syrien ne présente-t-il pas de meilleures preuves de la présence de terroristes ? Nous leur avons demandé pourquoi ils n’informaient pas mieux les médias et ils nous ont répondu que personne ne les croyait. Ils avaient de très mauvais services de relations publiques et de traitement des médias. Cela dit, il y eut aussi des excès de la part du gouvernement. La Syrie a des forces de police très inadéquates ce qui fait que lorsque les problèmes sont survenus, le gouvernement a été forcé de déployer des forces de sécurité pour traiter les problèmes habituellement dévolus à la police. Des excès ont été commis par certains des militaires et quelques- uns d’entre eux ont été mis aux arrêts ou en prison mais ceci n’a pas été publié. Bashar al-Assad a trainé, non seulement à mettre en œuvre des réformes mais également à annoncer les changements entrepris. Par exemple, lorsqu’une réforme a été mise au point pour réduire la primauté du parti Baas, elle n’a été annoncée que trois mois plus tard. Son service de relations publiques n’a pas été bon, il n’a pas su gérer la crise. • Source. (Traduction Horizons et débats) Illustration : Alep avant la guerre. »

-Opération “Timber Sycamore” : la guerre secrète de la CIA en Syrie est principalement financée par les Saoud, par Maxime Chaix by Les-crises.fr DT

-http://www.les-crises.fr/operation-timber-sycamore-la-guerre-secrete-de-la-cia-en- syrie-est-principalement-financee-par-les-saoud-par-maxime-chaix/

Lescrises.fr [Re-publication de cet article du 28 janvier 2016 le 21 août 2016

335 Source : Maxime Chaix, 24-01-2016

Un article du New York Times [en français ici] vient de dévoiler le nom de code de la guerre secrète multinationale de la CIA en Syrie : il s’agit de l’opération Timber Sycamore, ce qui peut signifier « Bois de Platane » ou « de Figuier sycomore ». En 1992, les chercheurs syriens Ibrahim Nahal et Adib Rahme avaient publié une étude selon laquelle, « [b]ien que la largeur des cernes soit influencée par les facteurs du milieu, le bois de Platane d’Orient peut être classé parmi les espèces à croissance relativement rapide par rapport au hêtre ou au chêne. » Les groupes rebelles majoritairement jihadistes, qui ont proliféré en Syrie à partir de l’été 2011, pourraient donc être considérés comme des « platanes d’Orient » du fait de leur « croissance rapide » – sans qu’un lien ne soit forcément établi entre le nom de code de cette opération clandestine de la CIA et ce phénomène biologique. Il est également possible que « Sycamore » fasse référence non pas au platane mais au figuier sycomore, dont le « bois peut servir de combustible et le frottement de deux branches permet d’allumer un feu ».

Essentiellement, le New York Times a révélé dans cet article que l’Arabie saoudite a financé à hauteur de « plusieurs milliards de dollars » la guerre secrète de la CIA en Syrie. D’autres contributeurs étatiques à cette campagne de l’Agence sont cités par ce journal. Il s’agit de la Turquie, de la Jordanie et du Qatar. Or, bien que le montant exact des contributions de chaque État impliqué dans ces opérations n’ait pas été dévoilé, le Times nous informe que l’Arabie saoudite en a été le principal financeur. D’après ce journal, « [l]es hauts responsables états-uniens n’ont pas révélé le montant de la contribution saoudienne, qui constitue de loin le principal financement étranger de ce programme de fourniture d’armes aux rebelles combattant les forces du Président Bachar el-Assad. Néanmoins, des estimations ont indiqué que le coût total des efforts de financement et d’entraînement [des rebelles] atteignait plusieurs milliards de dollars. »

Le Times confirme ainsi les informations du Washington Post, que j’avais

336 analysées quelques semaines avant les attentats du 13-Novembre. En effet, en juin 2015, ce quotidien révéla que la CIA avait « mené depuis 2013 contre le régime el- Assad “l’une [de ses] plus grandes opérations clandestines”, dont le financement annuel avoisine le milliard de dollars. D’après ce journal, cette intervention secrète (…) s’inscrit dans un “plus vaste effort de plusieurs milliards de dollars impliquant l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie”, c’est-à-dire les trois États notoirement connus pour soutenir les factions extrémistes en Syrie. » Grâce au New York Times, nous savons à présent que l’Arabie saoudite a été, « de loin », le principal soutien étatique de cette guerre secrète – notamment à travers l’achat massif et la livraison, par les services spéciaux saoudiens (GID), de missiles antichars TOW de marque Raytheon à des groupes affiliés à al-Qaïda, dont l’Armée de la Conquête.

Toujours selon le Times, le chef de station de la CIA joue un rôle diplomatique plus important que l’ambassadeur des États-Unis en Arabie saoudite. Ainsi, entre le GID et la CIA, « l’alliance reste solide, puisqu’elle est renforcée par une liaison entre maîtres-espions. Ministre de l’Intérieur saoudien, le prince Mohammed ben Nayef a succédé au prince Bandar dans l’approvisionnement en armes des rebelles [en Syrie]. Il connait l’actuel directeur de la CIA John O. Brennan depuis l’époque où ce dernier était le chef de station de l’Agence à Riyad dans les années 1990. D’anciens collègues ont déclaré que ces deux hommes étaient restés proches (…) Le poste occupé autrefois par M. Brennan à Riyad est, bien plus que celui de l’ambassadeur US, le véritable lien entre le pouvoir états-unien et le royaume [des Saoud]. D’anciens diplomates se souviennent que les discussions les plus importantes ont été systématiquement menées via le chef de station de la CIA [dans la capitale saoudienne]. »

Ces informations du New York Times renforcent la notion d’« État profond supranational » liant les hauts responsables des services spéciaux des États-Unis et de l’Arabie saoudite, ce qu’explique Peter Dale Scott dans son dernier livre. Ainsi, cet auteur démontre que les relations états-uno-saoudiennes constituent une véritable « boîte noire » :

« Dans les années 1980, William Casey, le directeur de la CIA, prit des décisions cruciales dans la conduite de la guerre secrète en Afghanistan. Toutefois, celles-ci furent élaborées hors du cadre bureaucratique de l’Agence, ayant été préparées avec les directeurs des services de renseignement saoudiens – d’abord Kamal Adham puis le prince Turki ben Fayçal. Parmi ces décisions, nous pouvons citer la création d’une légion étrangère chargée d’aider les moudjahidines afghans à combattre les Soviétiques. En clair, il s’agit de la mise en place d’un réseau de soutien opérationnel connu sous le nom d’al-Qaïda depuis la fin de cette guerre entre l’URSS et l’Afghanistan. Casey mit au point les détails de ce plan avec les deux chefs des services secrets saoudiens, ainsi qu’avec le directeur de la Bank of Credit and Commerce International (BCCI), la banque pakistano-saoudienne dont Kamal Adham et Turki ben Fayçal étaient tous deux actionnaires.

Ce faisant, Casey dirigeait alors une deuxième Agence, ou une CIA hors canaux, construisant avec les Saoudiens la future al-Qaïda au Pakistan, alors que la hiérarchie officielle de l’Agence à Langley “pensait que c’était imprudent”. Dans La Machine de guerre américaine, j’ai situé le Safari Club et la BCCI dans une succession d’accords conclus dans le cadre d’une “CIA alternative” ou d’une “deuxième CIA”, datant de la

337 création en 1948 du Bureau de Coordination Politique (OPC pour Office of Policy Coordination). Ainsi, il est compréhensible que George Tenet, le directeur de la CIA sous George W. Bush, ait suivi le précédent de [William] Casey [, le directeur de l’Agence sous Reagan,] en rencontrant une fois par mois environ le prince Bandar, l’ambassadeur d’Arabie saoudite aux États-Unis – mais sans révéler le contenu de leurs discussions aux officiers de la CIA chargés des questions saoudiennes. »

Dans l’article du Times, le prince Bandar est présenté comme le principal architecte de cette politique de soutien à la rébellion en Syrie. En effet, ce journal confirme que « [l]es efforts saoudiens furent dirigés par le flamboyant prince Bandar ben Sultan, qui était alors le chef des services secrets [du royaume, et] qui demanda aux espions saoudiens d’acheter des milliers [de mitrailleuses] AK-47 et des millions de munitions en Europe de l’Est pour les rebelles [en Syrie]. La CIA a facilité certains de ces achats d’armements pour les Saoudiens, dont un vaste deal avec la Croatie en 2012. Durant l’été de cette même année, ces opérations semblaient hors de contrôle à la frontière entre la Turquie et la Syrie, les nations du Golfe transmettant de l’argent et des armes à des factions rebelles – y compris à des groupes dont les hauts responsables états-uniens craignaient qu’ils soient liés à des organisations extrémistes comme al-Qaïda. »

Ainsi, la guerre secrète de la CIA et de ses partenaires étrangers en Syrie a fortement encouragé la montée en puissance de Daech, que le Pentagone et ses alliés bombardent depuis septembre 2014 sans grande efficacité, le tout sur fond de polémiques. À partir de juillet 2012, à travers les politiques profondes du prince Bandar, les « platanes » jihadistes en Syrie ont connu une « croissance relativement rapide », avec le soutien actif de la CIA et de ses partenaires. Or, Bandar est si proche de l’Agence que l’on ne peut réellement dissocier ses actions clandestines de celles des services spéciaux états-uniens, du moins lorsqu’il était ambassadeur de l’Arabie saoudite à Washington (1983-2005) puis directeur des renseignements saoudiens (2012-2014). Dix jours avant les attentats du 13- Novembre, j’avais publié un article intitulé « La guerre secrète multinationale de la CIA en Syrie », dans lequel j’écrivais :

« [E]n juillet 2012, le prince Bandar était nommé à la tête des services spéciaux saoudiens, ce qui avait été analysé par la plupart des experts comme un signe de durcissement de la politique syrienne de l’Arabie saoudite. Surnommé “Bandar Bush” du fait de sa proximité avec la dynastie présidentielle du même nom, il était ambassadeur à Washington à l’époque des attaques du 11-Septembre. Depuis plusieurs années, cet homme intimement lié à la CIA est accusé par l’ancien sénateur de Floride d’avoir soutenu certains des pirates de l’air désignés coupables de ces attentats. Jusqu’à ce qu’il soit poussé vers la sortie en avril 2014, le Guardian souligna que “Bandar avait dirigé les efforts saoudiens visant à mieux coordonner les livraisons d’armes aux rebelles combattant el-Assad en Syrie. Néanmoins, il a été critiqué pour avoir soutenu des groupes islamistes extrémistes, risquant ainsi le même “retour de bâton” que celui des combattants saoudiens d’Oussama ben Laden rentrant au pays après le jihad contre les Soviétiques en Afghanistan dans les années 1980 – une guerre sainte qui avait été autorisée officiellement. (…) En 2014, un parlementaire états-unien avait déclaré sous couvert d’anonymat que la CIA était “bien consciente que de nombreuses armes fournies [par l’Agence] avaient terminé dans de

338 mauvaises mains.” En octobre 2015, l’éminent expert de la Syrie Joshua Landis affirma qu’“entre 60 et 80 % des armes que les États-Unis ont introduites [dans ce pays] sont allées à al-Qaïda et les groupes qui lui sont affiliés” ».

En d’autres termes, la CIA et ses alliés turcs et pétromonarchiques ont grandement favorisé la montée en puissance de ces groupes extrémistes en Syrie, dont al-Qaïda et Daech. Pour autant, cette politique profonde multinationale fut- elle délibérément choisie par la Maison Blanche ? La réponse à cette question n’est pas évidente. Comme je l’avais souligné en août 2015, l’ancien directeur du Renseignement militaire du Pentagone (DIA) Michael Flynn avait dénoncé sur Al- Jazeera l’irrationalité stupéfiante de la Maison Blanche sur le dossier syrien. À cette occasion, il révéla que les responsables de l’administration Obama avaient pris la « décision délibérée » de « faire ce qu’ils font en Syrie » ; en d’autres termes, ils auraient choisi de soutenir des milices anti-Assad que la DIA décrivait à partir de 2012 comme noyautées et dominées par des forces jihadistes. Dès cette année-là, Flynn et son agence informèrent la Maison Blanche du risque de voir émerger un « État Islamique » entre l’Irak et la Syrie du fait du soutien occidental, turc et pétromonarchique à cette rébellion.

Afin de clarifier ses propos, il a ensuite expliqué à un journal russe que le gouvernement des États-Unis avait soutenu jusqu’à présent « une telle diversité de factions [anti-Assad qu’] il est impossible de comprendre qui est qui, et qui travaille avec qui. La composition de l’opposition armée syrienne, de plus en plus complexe, a rendu toute identification considérablement plus difficile. Pour cette raison, (…) du point de vue des intérêts américains, nous devons (…) prendre du recul et soumettre notre stratégie à un examen critique. À cause de la possibilité, très réelle, que nous soutenions des forces liées à État islamique (…), en même temps que d’autres forces anti-Assad en Syrie. » Selon le général Flynn, lorsqu’il dirigeait la DIA au Pentagone, cette agence recensait « autour de 1 200 groupes belligérants [en Syrie]. » De ce fait, le général Flynn pense « vraiment que personne, y compris la Russie, n’a une compréhension claire de ce à quoi nous avons affaire là-bas, mais sur le plan tactique, c’est vraiment très important de le comprendre. Une vision unilatérale de la situation en Syrie et en Irak serait une erreur. »

À cette complexité du terrain s’ajoute le traditionnel mode opératoire de l’Agence, qui est celui du « déni plausible » visant à dédouaner le gouvernement des États- Unis de toute action criminelle en ayant recours à des agents privés et/ou étrangers. Dans mon article sur la guerre secrète de la CIA en Syrie, j’avais souligné que

« [l]e caractère multinational des opérations anti-Assad a aussi été une source majeure de confusion. Tout d’abord, bien que de nombreux services occidentaux et moyen-orientaux aient été conjointement impliqués dans ce conflit, il reste difficile de penser cette guerre secrète sous un angle multinational. En effet, les médias et les spécialistes ont eu tendance à dissocier les politiques syriennes des différents États clandestinement engagés dans la déstabilisation de la Syrie. Il est vrai que le renoncement des États-Unis à intervenir directement a suscité de vives tensions diplomatiques avec la Turquie et l’Arabie saoudite. Par ailleurs, l’hostilité du roi Abdallah à l’égard des Frères musulmans a engendré des dissensions majeures entre, d’un côté, le royaume saoudien et, de l’autre, le Qatar et la Turquie – ces tensions s’étant atténuées après l’intronisation du roi Salmane en janvier 2015.

339 Du fait de ces divergences, les politiques syriennes des États hostiles au régime el- Assad ont été trop peu analysées sous leur angle multinational. Plus exactement, les opérations occidentales ont été dissociées de celles des pays moyen- orientaux. Or, les services spéciaux de ces différents États ont mené jusqu’à présent des actions communes et coordonnées, dans l’opacité abyssale de la classification. En janvier 2012, la CIA et le MI6 ont lancé des opérations clandestines d’approvisionnement en armes des rebelles entre la Libye, la Turquie et la Syrie, avec de l’aide et des financements turcs, saoudiens et qataris. (…) [I]l s’est avéré que ces armements ont été livrés “presque exclusivement” à des factions jihadistes, selon le parlementaire britannique Lord Ashdown. D’après le grand reporter Seymour Hersh, “[l]’implication du MI6 a permis à la CIA de se soustraire à la loi en classant sa mission comme une opération de liaison.” Les actions de l’Agence en Syrie sont-elles mieux contrôlées aujourd’hui ? La question reste ouverte, mais la doctrine du “déni plausible” traditionnellement mise en œuvre par la CIA pourrait être un élément de réponse.

(…) Même si ce mode opératoire tend à brouiller les pistes, le rôle central de la CIA dans cette guerre secrète multinationale [en Syrie] ne fait plus de doute. En octobre 2015, le New York Times expliqua que “[l]es missiles antichars TOW de fabrication américaine ont fait leur apparition dans la région en 2013, à travers un programme clandestin [de la CIA] mené par les États-Unis, l’Arabie saoudite et d’autres alliés. Celui-ci vise à aider des groupes d’insurgés “sélectionnés” par l’Agence à combattre le gouvernement syrien. Ces armes sont livrées sur le terrain par des alliés des Américains, mais les États-Unis approuvent leur destination. (…) Des commandants rebelles ont éclaté de rire lorsqu’on les a questionnés sur la livraison de 500 TOW en provenance d’Arabie saoudite, déclarant qu’il s’agissait d’un nombre ridicule comparé à ce qui est réellement disponible. En 2013, l’Arabie saoudite a commandé [à Washington] plus de 13 000 [TOW].”

(…) À la suite de l’entrée en guerre de la Russie, un ancien conseiller du Pentagone a confirmé au Washington Post que le recours à des partenaires étrangers impliquait le “déni plausible”, ce qui permet de couvrir les opérations de la CIA en Syrie : “Fabriqués par Raytheon, les missiles [TOW] proviennent principalement des stocks du gouvernement saoudien, qui en avait acheté 13 795 en 2013 (…) Puisque les accords de vente nécessitent que l’acheteur informe les États-Unis de leur destination finale, l’approbation [de Washington] est implicite, selon Shahbandar, un ancien conseiller du Pentagone. D’après lui, aucune décision n’est requise de la part de l’administration Obama pour que ce programme puisse continuer. “II n’y a pas besoin d’un feu vert américain. Un feu orange est suffisant”. “Il s’agit d’un [programme] clandestin et il peut techniquement être démenti, mais c’est le propre des guerres par procuration.”” Ainsi, la doctrine du “déni plausible”, qui implique des tierces parties sur lesquelles on peut rejeter la faute, semble expliquer pourquoi le rôle de la CIA et de ses alliés occidentaux dans cette guerre secrète est [à ce point] refoulé, déformé ou minimisé. »

Dans cet article, j’ajoutais que, « [c]ontrairement au mythe de l’“inaction” [militaire] occidentale contre le régime de Bachar el-Assad, la CIA a été massivement impliquée en Syrie, dans le cadre d’une intervention clandestine subventionnée par des budgets classifiés, mais également étrangers. Or, ces financements extérieurs et les milliards de dollars qu’ils mobilisent ne sont pas supervisés par le Congrès US, cette institution n’ayant pas le pouvoir d’exercer son

340 contrôle sur des politiques ou des budgets étrangers. » En se basant sur les déclarations d’un parlementaire états-unien, le New York Times vient de confirmer cette absence de transparence due au recours à des financements étrangers :

« Tandis que l’administration Obama voyait cette coalition comme un argument séduisant pour le Congrès, certains parlementaires, comme le sénateur Ron Wyden – un Démocrate de l’Oregon –, ont demandé pourquoi la CIA avait besoin de l’argent saoudien pour financer cette opération, selon un ancien officiel états-unien. M. Wyden a refusé de répondre à nos questions, mais son équipe a publié une déclaration exigeant une plus grande transparence : “Des hauts responsables ont déclaré que les États-Unis sont en train de renforcer les capacités militaires opérationnelles de l’opposition anti-Assad. Or, les citoyens n’ont pas été informés sur les modalités de cette politique impliquant des agences états- uniennes, ou des partenaires étrangers avec lesquels ces institutions coopèrent. »

À l’aune des révélations du New York Times sur l’opération Timber Sycamore, et sachant que le soutien de la CIA et de ses alliés en faveur d’al-Qaïda en Syrie est dorénavant de notoriété publique – y compris en France –, il est indispensable que les citoyens occidentaux demandent des comptes à leurs parlementaires. Comme l’avait courageusement dénoncé la parlementaire états-unienne Tulsi Gabbard trois semaines avant les attentats du 13-Novembre, « des armements US vont dans les mains de nos ennemis, al-Qaïda et ces autres groupes, des groupes islamistes extrémistes qui sont nos ennemis jurés. Ce sont des groupes qui nous ont attaqués le 11-Septembre, et nous étions censés chercher à les vaincre, mais pourtant nous les soutenons avec ces armes pour renverser le gouvernement syrien. (…) Je ne veux pas que le gouvernement des États- Unis fournisse des armes à al-Qaïda, à des islamistes extrémistes, à nos ennemis. Je pense que c’est un concept très simple : vous ne pouvez vaincre vos ennemis si, en même temps, vous les armez et vous les aidez ! C’est absolument insensé pour moi. » Il est donc urgent que les puissances occidentales élaborent et mettent en oeuvre des politiques plus rationnelles et pragmatiques afin de lutter efficacement contre le terrorisme, sans quoi cette forêt de « platanes » continuera de s’étendre dangereusement.

Maxime Chaix

Source : Maxime Chaix , 24-01-2016 »

- « Des rebelles syriens « modérés » ont décapité un enfant by Les-crises.fr DT Le photographe qui a immortalisé le petit Osmane blessé à Alep par les forces russo-syriennes fait apparemment partie du groupe qui a commis le forfait. Preuves avec photos à l'appui. Réjouissons nous donc de l'utilisation déplorable qui a été faire de ce cliché dans tant de « grands journaux » et sur les télévisions : l'enfant est blessé, c'est terrible. Le photographe est le même qui a immortalisé la décapitation d'un enfant de 13 ans dont a peu entendu parler. D'autres documents montrent des enfants morts, mais ces derniers ne font pas les unes. Autrement dit, seuls comptent les morts d'enfants dans un camp, mais pas dans l'autre.

341 On appelle cela de la vile propagande, la tragédie en cours ne faisant pas le tri entre des supposés « bons » et des supposés « méchants ». Notons que décapiter un pré-ado au petit couteau souligne la gentillesse et la qualité morale de ceux qui ont commis cette abomination. Merci au Figaro et à l'AFP qui ont sorti cette info peu reprise.

Lire aussi :

Pour le financement des rebelles syriens, les États-Unis sont fortement dépendants de l’argent saoudien [New York Times]by Les-crises.fr DT

Autre aperçu

"http://www.ojim.fr/le-petit-omrane-quand-lafp-se-rend-complice-dune-mise-en-scene/

Note de l'auteur : des vidéos prouvent la proximité du photographe avec les assassins, il paraît simplement faire partie de la bande

Chacun se souvient de la photo du « petit Aylan » de septembre 2015, monument de propagande relayé complaisamment par les gros médias et dont l’Ojim s’était fait l’écho. La journaliste du Monde – journal d’habitude peu friand de photos choc – Emmanuelle Chevallereau avait vendu la mèche naïvement « Nous avons cherché le meilleur moyen de la présenter, avec un titre qui disait qu’elle serait peut-être la photo qui permettrait la prise de conscience de l’Europe ». On était loin de l’information… Après le petit Aylan, voici le petit Omrane, heureusement vivant, et la fable dont il est le héros malgré lui. Le petit Omrane a échappé aux vilains bombardements d’Alep des vilains syriens gouvernementaux (ou des vilains russes au choix). De bonnes âmes l’ont recueilli et mis dans un avion pour l’étranger où il sera soigné de ses traumatismes. Margot pleure dans sa chaumière. Retour brutal au réel : tout est mis en scène, le photographe est un ami des islamistes, les gros médias et l’AFP se sont laissés (volontairement ?) berner pour servir la propagande des néo- conservateurs américains et européens. La mise en scène tout d’abord, d’une indécence absolue. Puis la personnalité du photographe : le lièvre a été levé par un journaliste syrien indépendant Bahar Kymyongur, avant que Le Parisien ne lui consacre un article détaillé où l’on apprend que Mahmoud Rslan est un militant activiste proche des réseaux islamistes et… qui ne cache pas sa sympathie pour Nourredine Al-Zinki, un groupe qui a décapité un enfant en juillet. L’AFP a joué son rôle habituel de désinformation dans l’affaire : Christophe Schmidt adjoint à la direction de l’information le reconnaît implicitement dans sa déclaration au Parisien : « C’est aussi une guerre de l’information avec beaucoup de propagande ». Beaucoup de propagande de l’AFP et des médias dominants. »

342 F-France

- « Emmanuel Todd : "Si je fais la somme de ce que les socialistes ont fait, le bon concept est violent et doux à la fois : il s'agit du fascisme rose"

Conflits sociaux violents, CGT, Parti socialiste, droite, Front national, Europe, Emmanuel Todd décrypte pour Atlantico le dérèglement politique que traverse la société française.

Entretien Publié le - Mis à jour le 3 Juin 2016 image: http://www.atlantico.fr/sites/atlantico.fr/files/styles/une/public/images/2015/05/emmanuel_todd_11 _2014.jpg

Atlantico : François Hollande se rêvait comme un président social-démocrate, pourtant, les rapports sociaux, entre syndicats ont rarement été aussi violents. Entre une CGT jusqu'au- boutiste, ou un Medef qui l'accuse de terrorisme, ou des agressions de policiers par des jeunes. Comment analysez-vous cette conflictualité, cette violence des rapports sociaux en France ? Emmanuel Todd : Je voudrais vraiment en parler comme chercheur, c’est-à-dire en avertissant que je n'ai pas trouvé la solution et que je suis réellement conscient du fait que l'on a ici un problème d'interprétation de ce qui se passe. On a un sentiment d'évolution systémique, de mutation, de tout ce à quoi vous venez de faire allusion. Mais la mutation générale, la montée de conflictualité, la violence même, ne me pose pas de problème de compréhension. C’est-à-dire qu'il y a longtemps que moi, ou d'autres, ont perçu le blocage du système.

343 Le Bloc MAZ, constitué des classes moyennes, des personnes âgées, très importantes, et des ex- catholiques, donnaient une sorte de base électorale à une forme de conservatisme politique qui permettait à l'oligarchie supérieure, aux 0.1%, de faire ce qu'ils voulaient. Le résultat est une société bloquée, une belle au bois dormant qui laisse pourrir sa jeunesse. Un système social immobile, qui condamne les jeunes et le monde ouvrier à la destruction sociale. Il est donc normal d'assister à la montée d'une certaine violence. Ce système de domination va jusqu'à bloquer le système culturel, et va jusqu'à la télévision. Je travaille de chez moi, je passe donc mon temps devant toutes sortes de chaînes, Itéle, Bfm, france2 etc…Et en fait, tout cela, qui est contrôlé par le haut, fabrique l'image d'une France qui n'existe pas pour tout le monde. C'est une France irréelle pour beaucoup de gens et en particulier pour les jeunes. L'image produite par ce système télévisuel est déroutante pour les jeunes des classes moyennes inférieures. Tout ce monde de gens joviaux qui se posent des problèmes d'enneigement des stations de sport d'hiver, ou "Un dîner presque parfait", comme si tout le monde songeait à faire des petites bouffes. C'est un monde un peu crétin, mais qui produit des tas d'images. Et qui est également une source de tensions.

Mais cette situation est-elle spécifique à la France ? Ce qui est spécifique de la France, c'est son état d'immobilité sociale. Lorsque l'on pense que l'on se dirige vers une présidentielle dans laquelle s'affrontent Hollande, Sarkozy, Le Pen, Mélenchon et que le seul réel changement peut provenir du jeune espoir Alain Juppé, cela ferait hurler de rire dans n'importe quel pays du monde. Pourtant, notre pays est plus jeune que les autres, et le taux de fécondité a baissé à peine pendant la crise, ce qui est un vrai un signe de vitalité. A l'inverse, l'Espagne ou l'Italie sont dans une situation d'implosion démographique. Est-ce que la France est le pays le plus immobilisé d'Europe, ou est-il le seul pays vivant ?

Je regardais BFM dimanche. Je ne fais pas de critique générale de la chaîne, j'aime beaucoup Ruth Elkrief. Je regardais l'interview de Philippe Martinez par Apolline de Malherbe et Edwige Chevrillon. On avait l'impression de voir deux Manuel Valls à l'écran, face à un Martinez dont on se demandait s'il allait perdre son sang-froid. On y a vu également Philippe Doucet, un socialiste. Il y avait un phénomène de retard à l'allumage dans la prise de conscience. Philippe Doucet suggérait, en brandissant des affiches, que le CGT faisait mitrailler les permanences du PS. Il s'agit d'un univers de fous où la violence verbale venait de gens qui se pensent être les défenseurs raisonnables d'un système démocratique. Ils étaient forcés de reconnaître un petit problème au départ ; que le parti socialiste n'avait pas été élu pour casser le code du travail. Mais ce qui est frappant, c'est qu'ils ne voyaient pas l'énormité que cela représente pour la science politique. Parce qu'en fait, nous traversons une rupture systémique. Parmi les instruments du droit constitutionnel, on avait la distinction entre le mandat impératif et le mandat représentatif. Tout le monde est aujourd'hui d'accord sur le fait que seul le mandat représentatif permet un fonctionnement normal des démocraties libérales, avec des citoyens qui votent, qui élisent des représentants qui prennent des décisions librement à l'intérieur des lignes générales préférées par les électeurs. Or, les intervenants ne semblaient pas se rendre compte que le comportement actuel de François Hollande et du PS suggère l''existence d'un troisième mandat ; le mandat "jemenfoutiste". Ici, l'élection devient parodique, les électeurs votent, mais il est entendu dans l'esprit du grand parti politique de gauche que ce que dit l'électeur n'a aucune importance, et qu'il a donc le droit de faire exactement le contraire. Ce qui est tolérable à droite, comme Jacques Chirac en 1995, mais avec Hollande, c'est quand même plus compliqué. C'est une rupture. Parce que s'il y a des lois, il y

344 a aussi l'esprit des lois. Actuellement, le respect des règles constitutionnelles formelles nous aveugle sur le fait que l'esprit des instituions est bafoué. Il y a une évolution des mentalités, dans la Ve République, qui fait que le corps électoral ne compte plus. Quelle évolution des mentalités a permis cette dénaturation ? L'article 4 de la constitution nous indique que les partis politiques concourent à l'expression du suffrage, mais là, en pratique, cet article a été aboli. Le parti socialiste participe à la dénaturation du suffrage, c'est un problème constitutionnel. C'est à partir de ce cadre conceptuel qu'il faut comprendre l'attitude d'action anormale de la CGT. Je crois que François Hollande ou Manuel Valls ne sont pas conscients du fait qu'ils sont en train de détruire le droit constitutionnel français. Mais je ne crois pas non plus que la CGT soit consciente de ce qu'elle représente. Martinez était calme. Il a indiqué qu'il défendait les salariés et le code du travail. Mais la vérité profonde est que la CGT est en train de défendre la constitution. C'est ça qui est terrible.

Les gens pensent que je suis super à gauche, ce qui est faux, parce que j'ai été membre du parti communiste pendant deux ans lorsque j'étais gamin. Mais j'ai eu, par la suite, une solide carrière anticommuniste, en prédisant l'effondrement de l'Union soviétique, en écrivant "La chute finale" ou en associant le communisme à une variante de la schizophrénie dans "le fou et le prolétaire". Mon travail sur les systèmes familiaux ramenait le communisme à la préexistence d'un système familial autoritaire et égalitaire. Je suis un anti-communiste radical. Donc, si je dis du bien de la CGT, cela ne doit pas être mal compris. C'est la CGT dans sa fonction actuelle de force, nouvelle et inattendue, qui, par effet de vide et de positionnement aléatoire, se trouve défendre la démocratie libérale en France. Nous devons deux choses à la CGT. D'une, plus personne ne nous parle de l'Islam. C'est le transfert du mot radical de l'islamisme vers le militantisme ouvrier. Tous ceux qui croyaient qu'on pouvait faire n'importe quoi en désignant un bouc émissaire sont tout d'un coup, par volatilité, passés au radicalisme de la lutte des classes. La CGT a fait sortir la France de ce tunnel ethnicisant dans lequel le drame des attentats l'avait mise.

Vous faites référence à l'emploi du mot "terrorisme" employé par Pierre Gattaz lors de son interview au journal Le Monde ? Les socialistes ou Pierre Gattaz, c'est pareil. Je commence à avoir la nostalgie de Laurence Parisot, que l'on n'imagine pas sombrer dans cette ineptie. Mais le tunnel ethnique emmenait la France beaucoup plus sûrement vers les problèmes que l'affrontement actuel sur le code du travail. La deuxième chose est que la CGT et l'hostilité de la population face à la loi El khomri ont mis le Front national totalement en porte à faux. Depuis le début de cette crise, le FN vasouille. Si le parti socialiste pense que ses électeurs doivent lui obéir, alors on comprend leur concept de pédagogie ; c'est la stratégie du maître qui doit faire comprendre aux enfants, par l'obéissance. Le même problème de crise de représentation se pose à propos du FN. Parce que les cadres du parti sont des gens d'extrême droite, et on l'a senti au moment de la crise. Ils voulaient de l'ordre. Face à un évènement réel, les cadres du FN sont justes des gens très à droite, et ils se foutent de leurs électeurs ouvriers. Le PS méprise son électorat, mais le FN aussi. Même si Florian Philippot a fait du rétropédalage, il était déjà trop tard.

La menace que fait peser le parti socialiste à la démocratie se voit à travers son attitude face à la liberté d'expression. J'ai vraiment été touché face à la purge à l'Obs, et au licenciement d'Aude

345 Lancelin. Non pas parce qu'elle me permettait de m'exprimer, avec d'autres, parce que je suis un enfant de l'Obs, mais j'ai vu la mise au pas de ce journal par le pouvoir socialiste. J'ai vu, presque en même temps, la suppression de l'émission de Fréderic Taddeï, "Ce soir ou jamais". Ils osent faire des choses que Nicolas Sarkozy n'aurait pas osé faire. J'ai dit des choses cent fois pires sur Nicolas Sarkozy que sur François Hollande, et je n'ai jamais eu aucun problème. Le PS est probablement plus dangereux pour la liberté d'expression que la droite. Ce n'est pas l'intolérance des gens d'extrême gauche, qui n'en auraient pas les moyens. Les socialistes sont beaucoup plus intolérants, en fait, que les gens de droite. Ce n'est pas un hasard. Si je fais la somme de ce que les socialistes ont fait, en termes de contrôle de la presse, d'inversion des valeurs de la gauche sans tenir compte de leur électorat, le bon concept est un concept violent et doux à la fois ; il s'agit du fascisme rose, le mot rose évoquant la douceur du processus.

Dans un tel climat, comment percevez-vous l'approche libérale qui se profile au travers des programmes avancés par les candidats à la primaire de la droite et du centre ? J'ai senti une crise d'identité de la droite en voyant ses candidats perturbés par le fait que les socialistes n'avaient pas été élus pour faire ça. La droite est en pilotage automatique lorsqu'il s'agit de critiquer la CGT, ce sont des gens de droite et complètement estimables en tant que tels. Mais on sent que ce que fait le PS est un problème pour eux, cela devrait donc être également un problème pour les chercheurs. Je peux très facilement faire un numéro sur le thème de François Hollande est "méchant" ou "débile" mais ce n'est pas le problème. Le problème est de savoir pourquoi le PS fait une politique tellement à droite, et surtout sur les implications du détraquage du système politique que cela induit. Cela passe, comme je l'ai déjà dit, par le mot "radicalisation". Il y a quelques mois, nous avions le radicalisme islamique. On le dénonçait et on le combattait. Mais aujourd'hui, selon les socialistes, tout est radicalisé. Tout le monde est en train de prendre conscience du fait que le parti socialiste, pour des raisons mystérieuses, se comporte comme un parti de droite. Mais cela produit une dérive générale de tout le système politique. Cela pose un problème existentiel d'autodéfinition à la droite classique. Tous les candidats de la droite classique font de la surenchère libérale. C'est un effet du glissement à droite du PS. La question est pourquoi ? Quand on voit la gauche allemande, elle a fusionné avec la droite au gouvernement, la question est donc réglée. En ce qui concerne les Etats Unis, il y a le phénomène Bernie Sanders, mais il ne va pas gagner la primaire. Mais les thématiques de gauche, comme le protectionnisme et les inégalités vont être représentées à droite par le parti républicain, par Donald Trump. Avec une dose d'usage de xénophobie. En Angleterre, tout le débat sur le Brexit se passe à droite, la gauche ne participe pas au débat. L'anomalie du système politique français est que les zones d'implantations territoriales de la droite, le bassin parisien, ou la façade méditerranéenne, sont les vieilles zones égalitaires qui ont fait la révolution française. A l'inverse, les zones d'implantation du PS sont les vieilles zones catholiques hiérarchiques, qui pensent que le pouvoir vient d'en haut. Le PS est un parti d'un genre nouveau, organisé comme l'église catholique ancienne. Avec des électeurs qui votent, des députés qui se foutent de ce que votent les électeurs, où les cadres supérieurs du PS se foutent de savoir ce que pensent les députés, et le Président et ceux qui l'entourent se foutent de ce que pense le reste du PS. Il y a, en France, une sorte de détraquage général qui fait que la droite, d'après son implantation territoriale, devrait passer à la gauche du PS. Il y a une erreur de positionnement. L'ensemble des paramètres sont extrêmement volatils. Il y a un an, nous étions dans le terrorisme islamiste et on célébrait l'union nationale, un an après, on est dans la lutte des classes et "les

346 jeunes caillassent les flics". Il doit y avoir un sens aux choses, mais il faut avant tout constater cette volatilité.

Vous faites référence à l'électorat de droite. Comment comprenez-vous le fait que Nicolas Sarkozy attire un électorat jeune et plutôt de catégories CSP -, alors que les autres candidats, comme Alain Juppé, François Fillon ou Bruno Le Maire monopolisent les suffrages des CSP + ainsi que des plus de 65 ans ? Cela me gêne de le dire, car j'ai donné des preuves de mon hostilité à Nicolas Sarkozy, mais cela suggère qu'il est plus proche du positionnement anthropologique réel de la droite. Enfin, d'une partie de la droite. La droite est tiraillée entre ce positionnement qui est plutôt indiqué par la géographie des valeurs dans le pays et qui tire la droite à gauche, et le vieillissement du pays, qui tire la droite à droite. Mais cela veut dire que le système de représentation français est confronté au problème de l'agrégation des volontés électorales. La droite commence à avoir des difficultés à agréger son électorat. Entre une tendance jeune populiste et une tendance -vieux conservateur libéral-.

La faiblesse démographique allemande a été un moteur de la décision d'Angela Merkel favorisant l'arrivée massive de migrants dans le pays. Le Brexit est alimenté par la crainte des Britanniques de voir toujours plus de migrants intra-européens arriver dans le pays. Les tendances démographiques sont-elles en train de se venger de l'Union européenne ? L'Union européenne était un projet fou, tous les démographes savent bien que les sociétés ne sont pas en convergence. Il suffit de regarder les indicateurs de fécondité. Et quand il y a convergence, c'est vers le bas, vers une insuffisance, en dehors des îlots que sont la France, l'Angleterre, et la Scandinavie. Là ou les femmes ont le droit de faire des enfants et d'avoir un travail intéressant.

La démographie dit d'abord que les nations européennes existent toujours, et que l'unification par la monnaie ne va pas marcher. Ce n'est même pas la peine d'aller plus loin, c'est pour cela que j'avais prédit l'échec de l'euro. C'est donc bien la revanche de la démographie. Les variables démographiques ont la particularité d'être lentes mais irréversibles avec des phénomènes d'accélération quand les ruptures générationnelles se font. C'est très lent avant d'apparaître, mais, en général, quand cela apparaît, c'est trop tard, les problèmes sont d'une telle massivité qu'aucun phénomène migratoire ne va pouvoir les résoudre. En France, on ne le voit pas, parce que le pays n'a pas de problème démographique. L'Allemagne, malgré sa rationalité, est tombée dans le piège du court-termisme économique. Elle est le vrai pays d'immigration en Europe, obsédée par son problème de main d'œuvre. Les destructions opérées par l'austérité dans l'Europe du sud, sont, de ce point de vue-là, fonctionnelles pour l'Allemagne, qui cherche à récupérer la main d'œuvre qualifiée des économies en décomposition. En Allemagne, il manque pratiquement un tiers d'enfants chaque année. Mais là, avec cette immigration massive en provenance de Syrie, d'Irak, et d'Afghanistan, de systèmes patrilinéaires avec des niveaux élevés d'endogamie de départ, cela ne sera pas gérable pour l'Allemagne. Cela va produire des phénomènes de ségrégation, de stratification, de violence. Mais il ne faut pas sous-estimer le pragmatisme allemand. La société allemande pourra s'organiser mais le prix à payer sera l'émergence d'une société de castes, avec un système politique et policier extrêmement dur. Tout est possible. Propos recueillis par Nicolas Goetzmann

347 Read more at http://www.atlantico.fr/decryptage/emmanuel-todd-fais-somme-que-socialistes-ont- fait-bon-concept-est-violent-et-doux-fois-agit-fascisme-rose-2718343.html#E5PO65DXl0jvSgHr.99

Emmanuel Todd est un historien, anthropologue, démographe, sociologue et essayiste. Ingénieur de recherche à l'Institut national d'études démographiques (INED), il développe l'idée que les systèmes familiaux jouent un rôle déterminant dans l'histoire et la constitution des idéologies religieuses et politiques. Read more at http://www.atlantico.fr/fiche/emmanuel-todd-1617292#qkJoAMIPZ2GSHkyL.99

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- « Laïcité par Jacques Sapir · Published · Updated http://russeurope.hypotheses.org/5182 La question de la laïcité revient avec force dans le débat politique actuel à l’occasion des polémiques sur le « burkini ». J’en veux comme preuve le fait que sur le carnet RussEurope il y a eu, du 15 au 18 août, correspondant à la publications de notes sur le « burkini » et la laïcité, plus de 76 000 connexions, soit en 4 jours le tiers de la moyenne mensuelle. Pourtant, la notion de laïcité est elle-même mal comprise et en découlent confusions et erreurs, qui ne font qu’obscurcir le débat. Les interventions intempestives d’une partie de la « gauche », tenant un discours du genre « libéral-libertaire », ne font que rajouter à la confusion. Il faut rappeler un certain nombre de principes, qui avaient été élaborés dans un ouvrage que j’ai publié au début de cette année[1], pour permettre une discussion au fond. La laïcité principe d’organisation politique. Ce qui fonde la laïcité, c’est la nécessité de dégager l’espace public de thèmes sur lesquels aucune discussion raisonnable c’est-à-dire fondée sur la raison ne peut avoir lieu. La laïcité est donc un principe d’organisation de l’espace politique, et par extension de l’espace publique. C’est l’une des leçons chèrement apprise par la France (et une partie de l’Europe) lors des guerres de religion du XVIe siècle. La laïcité ne se comprend que pour qui conçoit le « peuple » comme une assemblée politique et non ethnique ou religieuse, et elle apparaît comme le pendant de la souveraineté. En effet, la souveraineté, en faisant entrer la question du pouvoir dans le monde profane, impose en réalité le principe de laïcité. Tel est l’enseignement d’auteurs comme Bodin, Hobbes et Spinoza. Ce qui permet la laïcité, c’est la distinction entre sphère publique et sphère privée. Tant que cette distinction n’existe pas, on ne saurait parler de laïcité. De ce point de vue la laïcité est le contraire du totalitarisme qui, lui, prétend asseoir une vision totale en niant la distinction entre ces deux sphères. La laïcité et la démocratie partagent donc les mêmes préalables. Mais la distinction entre ces sphères est mouvante, historiquement déterminée. Cela impose de reformuler constamment les matérialisations de ce principe. Certaines de ces matérialisations sont contenues dans la loi. On parle beaucoup et trop de la loi de 1905. Mais cette loi n’est pas à proprement parler une loi de laïcité ; elle n’est qu’une loi de

348 séparation de l’église et de l’État, de plus édictée dans un contexte particulier, qui vise à une forme de pacification de la question religieuse. De ce point de vue, les rappels, à la loi de 1905 sont inopérants car ils identifient et cantonnent la laïcité à des règles juridiques particulières alors que la laïcité est un principe politique qui peut, selon les sociétés et les époques, prendre des formes juridiques différentes. Un principe n’est pas une valeur Une autre confusion vient de l’assimilation de la laïcité avec une valeur individuelle, comme l’est la tolérance. Or, la question de la tolérance ne fixe que les limites qu’un individu s’impose à lui- même, mais non des principes. Un principe politique organise un espace et se matérialise en règles spécifiques. Certaines de ses règles peuvent être des règles de liberté (la liberté de culte par exemple) mais d’autres sont des interdictions. Un des problèmes majeurs que rencontre aujourd’hui le principe de laïcité vient justement de l’incapacité de nombreuses personnes à se représenter la société autrement qu’à travers le rapport qu’elles ont directement avec cette dite société. D’où, bien évidemment, l’idéologie « libéral-libertaire », qui ne fait que donner forme à l’individualisme le plus crasse. Or, dans le même temps que les sociétés capitalistes modernes « produisent » l’individualisme (au sens vulgaire du terme) de la manière la plus brutale, elles imposent – à travers la réalité de la densité sociale[2] – la nécessité de penser la société à travers une vision holiste. Il convient alors de ne pas la transformer en une nouvelle religion, comme l’a tenté, après d’autres, Vincent Peillon[3]. Ces termes recouvrent la tentative de sacraliser un certain nombre de principes. Ils oublient que la laïcité est un principe politique et non une position philosophique[4], même si il y a une philosophie qui peut s’inspirer de ce principe. Sur le principe, la reconnaissance des deux sphères de la vie des individus et l’appartenance de la religion à la sphère privée, par contre il n’y a pas à transiger. C’est bien dans une exclusion de la place publique des revendications religieuses et identitaires que pourra se construire la paix civile. De la séparation entre sphère publique et sphère privée Cette séparation, pourtant, ne saurait être stricte. D’une part en raison de la contribution de nos valeurs individuelles à notre vie en société, et d’autre part en raison des habitudes, coutumes, et comportements, qui constituent de ce point de vue le soubassement historique de TOUTE société, mais aussi les bases de leurs différences. Cela explique – en partie – la spécificité « française » du débat, mais aussi la sensibilité légitime de la société française à la question du « burkini ». L’un des facteurs importants dans la reconfiguration de la séparation entre sphère privée et sphère publique a été la reconnaissance (oh combien tardive) de l’égalité entre hommes et femmes. Cette reconnaissance s’inscrit, dans les sociétés d’Europe occidentale à la fois dans l’histoire longue (de «l’amour courtois » à la volonté des maris de préserver la vie de leurs épouses par des formes de contrôle des naissances dès le XVIIIe siècle[5]) et dans l’histoire « courte », marquée par la 1ère guerre mondiale et les mouvements qui ont associés la lutte pour des droits politiques, sociaux, et démocratiques (avortement, contraception) dans la seconde moitié du XXe siècle. Cela implique qu’une attention particulière doit être consacrée à ce qui, dans des comportements, peut constituer une tentative de remise en cause de cette égalité, et en particulier par des tentatives de marquage « au corps » visant à stigmatiser une soi-disant « infériorité » des femmes. La question de l’égalité entre hommes et femmes se devrait de trouver une application juridique plus explicite. Rappelons que le principe en est inscrit dans le préambule de la Constitution[6]. Tout « marquage au corps », dès lors qu’il est porteur de ségrégation, est une atteinte au principe d’égalité. C’est

349 d’ailleurs bien comme cela que l’interprètent des personnes issues ou vivant dans des sociétés de tradition musulmane[7]. Très clairement, sur ce point, la loi est défaillante. La séparation des sphères privées et publiques est donc aussi toujours socialement contextualisée, historiquement et géographiquement. Méfions nous donc des anachronismes qui cherchent à présenter comme invariant des formes nécessairement mouvantes ; nous ne sommes plus en 1905. La paix religieuse et la souveraineté La question de la paix religieuse est aujourd’hui un élément clef de la paix civile. Cette question implique que des règles soient clairement tracées pour empêcher des provocations. Cette paix implique qu’en contrepartie le libre exercice des cultes soit garanti, bien entendu dans le cadre de la loi. Cette paix implique aussi une intolérance absolue par rapport au soi-disant « délit de blasphème ». Il convient, ici, de se rappeler les mots écrits par John Locke, dans son Essai sur la Tolérance : « «Il est dangereux qu’un grand nombre d’hommes manifestent ainsi leur singularité quelle que soit par ailleurs leur opinion. Il en irait de même pour toute mode vestimentaire par laquelle on tenterait de se distinguer du magistrat et de ceux qui le soutiennent ; lorsqu’elle se répand et devient un signe de ralliement pour un grand nombre de gens…le magistrat ne pourrait-il pas en prendre ombrage, et ne pourrait-il pas user de punitions pour interdire cette mode, non parce qu’elle serait illégitime, mais à raison des dangers dont elle pourrait être la cause?»[8]. L’amour que l’on doit avoir pour la liberté individuelle n’interdit nullement, que dans certains contextes, le pouvoir politique puisse procéder à une interdiction, au nom de l’ordre public. C’est très précisément ce dont il est question à propos du « burkini ». Je reprends alorss une des expressions de Bernard Bourdin, théologien et philosophe, dans un dialogue que nous avons eu ensemble, et qui sera publié à la fin de l’année[9]. Quand il dit « il n’y a pas de parti politique du royaume de Dieu », c’est aujourd’hui une idée fondamentale. Elle signifie à la fois que l’on ne peut prétendre fonder un projet politique sur une religion, et que la démarche du croyant, quel qu’il soit, est une démarche individuelle, et de ce point de vue elle doit être impérativement respectée. Mais, elle ne s’inscrit pas dans le monde de l’action politique qui est celui de l’action collective. C’est bien ici une des fondations de la laïcité. Cependant, comment devons-nous réagir face à des gens qui, eux, ne pensent pas cela, soit qu’ils considèrent que le « royaume de Dieu » peut avoir un parti politique (et on le voit des intégristes chrétiens aux Etats- Unis aux Frères Musulmans) soit qu’ils considèrent que les deux cités, pour reprendre Augustin[10], sont sur le point de fusionner, comme c’est le cas de courants messianiques et millénaristes comme les salafistes ? On voit bien ici le problème. Ces courants, pour des raisons différentes, contestent – par des méthodes elles aussi différentes – l’idée même de laïcité. Or, cette idée est essentielle à la formation d’un espace politique, certes traversé d’intérêts et de conflits qui donnent naissance aux institutions, mais néanmoins gouverné par des formes de raison, espace politique indispensable à la construction de la souveraineté et de la nation. Faut-il donc les laisser faire, au nom des libertés individuelles qui sont une application de la raison, en sachant qu’ils sont en réalité porteurs de principes absolument antagoniques qui, s’ils triomphaient, rendraient impossible l’existence de ce type d’espace politique – et donc les libertés individuelles – au nom desquelles, en particuliers ceux qui considèrent que le « royaume de Dieu » peut avoir un parti politique, prétendent avancer ? La question est moins compliquée avec les courants qui prétendent à la fusion entre les « deux cités ». Ceux-là, en un sens, se mettent directement hors-jeu. D’ou, de mon point de vue, la nécessité impérative de ne pas se concentrer exclusivement sur ces courants (les salafistes en particulier) et de fonder l’organisation politique sur ce que j’ai appelé « l’ordre démocratique »[11].

350 La laïcité n’est pas un cadre juridique et ne se réduit pas à la loi de 1905, c’est l’une des leçons du débat actuel. Mais il faut aussi comprendre que les frontières entre sphère privée et sphère publique ont changé, à la fois du fait des évolutions de la société et du fait des mutations techniques. Pourtant, la notion de frontière, elle, demeure. Elle est fondamentale pour la démocratie et contre le totalitarisme. La laïcité se matérialise différemment selon le contexte historique et culturel de chaque nation. La souveraineté, elle, nous impose de penser le « peuple » comme source de cette souveraineté et ce « peuple » est une construction politique, avec son histoire et ses traditions héritées de combats passés. Plus la souveraineté se délitera et plus les individus chercheront dans des appartenances de substitution, comme les appartenances religieuses, des remèdes à la perte du sentiment d’appartenance national. Plus elle se renforcera et plus la pacification de la société pourra progresser. Ce n’est que depuis que la souveraineté est ouvertement bafouée, contestée, que nous constatons cette remontée du problème religieux qui cache, en réalité, une forme de sentiment identitaire.

Notes [1] Sapir J., Souveraineté, Démocratie, Laïcité, Paris, Michalon, 2016. [2] E. Durkheim, Les règles de la méthode sociologique, PUF, coll. Quadriges, Paris, 1999 (première édition, Paris, 1937). [3] Ce terme fut utilisé par Vincent Peillon, qui fut Ministre de l’Éducation Nationale de 2012 à 2014. Peillon V., Une religion pour la République, Seuil, La Librairie du XXIe siècle, janvier 2010. [4] Bodin J., Colloque entre sept sçavants qui sont de différents sentiments des secrets cachés des choses relevées, traduction anonyme du Colloquium Heptaplomeres de Jean Bodin, texte présenté et établi par François Berriot, avec la collaboration de K. Davies, J. Larmat et J. Roger, Genève, Droz, 1984, LXVIII-591. Il sera fait dans cet ouvrage référence à ce texte comme Heptaplomeres. [5] A. Burguière, « Le changement social: histoire d’un concept », in Lepetit, (ed.), Les Formes de l’Expérience. Une autre histoire sociale, Albin Michel, Paris, 1995, pp. 253-272. [6] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do? cidTexte=LEGITEXT000006071193&dateTexte=&categorieLien=cid [7] https://environnement-energie.org/2016/08/16/un-vetement-pas-comme-les-autres/ http://www.mondafrique.com/les-theories-fumeuses-d-une-marocaine/a-lattention-des-defenseurs- du-burkini/ http://fr.le360.ma/blog/le-coup-de-gueule/burqa-plage#.V7LtEl4rTNv.twitter [8] Locke J., Essai sur la Tolérance, Paris, Éditions ressources, 1980 (1667) [9] Ce livre sera publié au Cerf cet hiver. [10] Saint Augustin, La Cité de Dieu, Trad. G. Combés, revue et corrigée par G. Madec, Paris, Institut d’études augustiniennes, 1993. [11] Voir Sapir J., Souveraineté, Démocratie, Laïcité, Paris, Michalon, 2016 et, Idem, Les économistes contre la démocratie – Les économistes et la politique économique entre pouvoir, mondialisation et démocratie, Albin Michel, Paris, 2002.

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- « Ces rapports de la Cour des comptes que les médias ignorent

Aides à la presse, un scandale qui dure

Source Le Monde Diplomatique, Novembre 2014, pages 22 et 23 source ( www. monde - diplomatique .fr/)

Instaurées en France dès la fin du XVIIIe siècle pour « encourager la libre communication des pensées entre les citoyens », les aides de l’Etat à la presse n’étaient destinées qu’aux publications d’intérêt général. Elles profitent désormais aux groupes puissants, sans que leur contribution au débat démocratique saute aux yeux. Pourtant, les procureurs les plus inflexibles de la réduction des dépenses publiques restent cois… par Sébastien Fontenelle

Fustiger la dépense publique en exhortant à la réduire est devenu une discipline journalistique à part entière dans la presse française. Certains s’illustrent par l’excellence de leurs performances en la matière : on pense ici à Franz-Olivier Giesbert, qui reste rarement plus de deux semaines sans proclamer, dans l’hebdomadaire Le Point, que « la France doit cesser de dépenser plus qu’elle ne produit. Autrement dit, faire maigre (1) ». Le propriétaire du Figaro, le sénateur (Union pour un mouvement populaire) et avionneur Serge Dassault, réclame lui aussi régulièrement qu’« on supprime toutes les aides », car « il ne faut pas que l’Etat aille donner de l’argent » (2) — sauf naturellement quand la puissance publique débloque 1 milliard d’euros pour moderniser l’avion de chasse produit par l’industriel, comme en janvier dernier…

352 Cette dénonciation obsessionnelle des libéralités étatiques s’appuie — tradition déjà ancienne — sur les rapports annuels de la Cour des comptes, dont la publication suscite, tous les douze mois, moult commentaires. Dans les intervalles, M. Didier Migaud, ancien député socialiste nommé président de la Cour en 2010 par M. Nicolas Sarkozy, dispense avec une régularité de métronome conseils et maximes. Il en ressort qu’« il est impératif de ne pas relâcher l’effort » consenti après 2012 par M. François Hollande et, « désormais, de freiner davantage la dépense » publique. Cela lui vaut d’être adulé par Le Figaro, Le Monde, Les Echos, Europe 1, RTL, où ses prêches font l’objet d’un véritable culte (3). Mais il arrive que les mêmes professionnels se montrent moins empressés de porter partout la bonne parole des magistrats de la Cour des comptes. En 1985, par exemple, ces vénérables enquêteurs adressent un rapport consacré au fonctionnement des mécanismes d’aide publique à la presse au député socialiste Christian Goux, qui a sollicité leur avis sur ce sujet trop méconnu (4). Le document compte une petite vingtaine de pages, augmentées de plusieurs annexes. Il décrit ces mécanismes et en évalue « la cohérence, l’efficacité et les effets ». La conclusion est accablante : les administrations impliquées dans la gestion des dispositifs de nantissement de la presse écrite n’ont jamais procédé à une analyse précise de cet assistanat, qui représente pourtant « une charge importante et croissante pour les finances publiques » ; le coût ne cesse de croître, puisque son montant est passé de 3,3 milliards de francs en 1970 à 5,2 milliards en 1981, puis à 5,6 milliards en 1984 — l’équivalent de 1,6 milliard d’euros actuels, en tenant compte de l’inflation. Ces provendes représentent « près de 14 % du chiffre d’affaires du secteur ». Une partie est distribuée directement aux journaux : aide au développement, à la diffusion, subventions aux publications à faibles ressources publicitaires. Des aides indirectes — taux de TVA réduit, exonération de taxe professionnelle (depuis 1844…), tarifs postaux préférentiels — les complètent. La survie de la plupart des titres d’information générale et politique dépend déjà étroitement du maintien de cette perfusion d’argent public. Selon la Cour — dont la sévérité feutrée impressionne —, les aides sont attribuées sans discernement à des publications extrêmement disparates, et personne ne vérifie leurs « effets à l’égard des entreprises ». Par ailleurs, leur distribution subit « une dérive constante par rapport aux objectifs initialement fixés » par le législateur, qui avait pour principale intention, en l’institutionnalisant, de « permettre aux citoyens de disposer de l’information la plus large possible, et d’être ainsi en mesure de participer à la vie publique ». La Cour s’étonne, notamment, de ce que le phénomène de « concentration croissante » soit si peu pris en compte. Les besoins réels des journaux varient grandement selon qu’ils sont adossés ou non à des groupes industriels. Le régime des aides à la presse devrait mieux « prendre en considération la situation économique créée dans la concurrence par l’apparition de groupes ou d’entreprises d’une dimension accrue ». En résumé, il conviendrait que « le problème du rapport entre le coût des soutiens accordés et leur efficacité à l’égard des entreprises » qui en bénéficient soit « désormais posé ». Il faudrait que « les modalités des aides et leurs critères d’attribution » soient « révisés », afin qu’elles aillent en priorité aux publications qui en ont le plus besoin. Cette nécessaire et urgente adaptation pourrait d’abord se fonder, suggèrent les magistrats financiers, sur « des critères relatifs au contenu des publications ». Ils notent en particulier que « le caractère d’information politique et générale et la place respective consacrée aux pages rédactionnelles et aux pages publicitaires constituent des critères objectifs », dont « l’application se traduirait par une redistribution des aides qui reconnaîtrait l’importance majeure accordée à la presse écrite comme moyen d’information pour les citoyens et instrument de nature à développer chez eux les facultés d’analyse et de jugement des événements ».

353 Ces observations et préconisations, qui pointent une gabegie caractérisée au moment même où la presse dominante dit en chœur la nécessité de réduire les prodigalités d’un Etat trop dépensier (les socialistes ont alors pris le virage de la rigueur depuis deux ans), devraient soulever un immense enthousiasme éditorial. Tout au contraire : trop occupés, peut-être, à pester contre les « avantages acquis » des ouvriers et des fonctionnaires, les grands titres français restent discrets sur le rapport de la Cour des comptes. Alors directeur du Monde diplomatique, Claude Julien relèvera seul quelques années plus tard ce qui ressemble assez à la mise en évidence d’une conséquente tartuferie : « La presse la plus prospère, qui, dans la répartition des aides publiques, se taille la part du lion, est aussi celle qui chante avec le plus d’enthousiasme les vertus d’un libéralisme économique proscrivant toute intervention de l’Etat. » Le journaliste ajoute que, en cas de réforme du système, elle « combattrait bec et ongles tout projet novateur » (5). Comme le souligne en 1995 le sénateur de centre droit Alain Lambert, auteur d’un nouveau rapport sur les aides à la presse, les principaux bénéficiaires du système considèrent ses mannes comme un « avantage acquis (6) ». Leur remise en cause serait regardée par eux comme un casus belli. On n’informe donc guère sur les subventions à l’information. Et cette occultation dure, tandis qu’aucun gouvernement n’ose briser le tabou d’une rente où l’Etat sponsorise, à grand renfort de milliards (de francs, puis d’euros), la confection de libelles, manchettes et éditoriaux consacrés à la dénonciation de ses folies dépensières. Lorsque la Cour des comptes publie, en septembre 2013, un énième rapport sur les aides publiques à la presse (7), son contenu ressemble à s’y méprendre à celui paru vingt-huit ans plus tôt. Ses auteurs observent ainsi que ces aides, dont l’efficacité était déjà jugée plus que douteuse en 1985, n’ont toujours « pas démontré leur utilité ». Puis de relever, parmi les nombreux facteurs qui expliquent ces « résultats décevants », des « contradictions dans la politique de l’Etat », une « mauvaise évaluation des aides » et un « ciblage encore insuffisant des aides sur la presse d’information politique et générale ». La répétition des griefs indique la longévité d’un système que ses organisateurs, non moins que ses récipiendaires, savent inefficace et inéquitable. Il profite le plus souvent aux journaux et magazines qui en ont le moins besoin, comme les hebdomadaires consacrés aux programmes de télévision, plutôt qu’à la presse d’information politique et générale. Entre 2009 et 2011, 5 milliards d’euros ont été engloutis dans le secteur, soit en moyenne 1,6 milliard par an. Ce montant représente près de 15 % du chiffre d’affaires de cette industrie — une situation analogue à celle du milieu des années 1980. D’ordinaire, la presse, drapée dans une ombrageuse défense de l’intérêt commun, trouve des mots assez durs pour dénoncer de tels gaspillages. Mais lorsque la Cour des comptes rend public son rapport de 2013, Le Monde relègue son traitement en pages intérieures. Le Point et Le Figaro réussissent la performance d’expliquer que les millions d’euros dont les pouvoirs publics les gratifient sont en réalité, pour une part importante, « des subventions versées à des entreprises publiques (8) » comme La Poste. Puis les quotidiens retrouvent la routine de leurs appels à réduire la dépense publique, tandis que l’hebdomadaire regagne celle de ses couvertures sur les « vrais rentiers » (11 septembre 2014) : les fonctionnaires, par exemple. De 2009 à 2013, Le Monde a été doté par l’Etat de 90 millions d’euros. Durant la même période, Le Figaro du sénateur Dassault a été nanti de 85,9 millions — cependant que Le Point devait se contenter de 22,9 petits millions… Sébastien Fontenelle Journaliste. Auteur d’Editocrates sous perfusion, Libertalia, Paris, 2014.

354 (1) Franz-Olivier Giesbert, « La réforme ou le déclin », Le Point, Paris, 23 janvier 2014. L’ancien directeur de l’hebdomadaire est aujourd’hui éditorialiste. (2) I-Télé, 13 février 2011. (3) Lire Sébastien Rolland, « La Cour des comptes, cerbère de l’austérité », Le Monde diplomatique, novembre 2013. (4) Cour des comptes, « Rapport sur les mécanismes d’aide publique à la presse », Paris, 29 septembre 1985. (5) Claude Julien, « Les aides publiques à la presse », Le Monde diplomatique, février 1990. Lire aussi « Liberté », Le Monde diplomatique, août 1988. (6) Sénat, « Rapport général fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le projet de loi de finances pour 1996 adopté par l’Assemblée nationale », Paris, novembre 1995. (7) Cour des comptes, « Les aides de l’Etat à la presse écrite », Paris, 18 septembre 2013. Lire aussi le « Rapport public annuel 2013 », 12 février 2013, p. 626. (8) « Confusions et contre-vérités sur les aides à la presse », article publié sur le site du Figaro, 3 mars 2014 ; « Et les aides à la presse ? », Le Point, 23 janvier 2014. (8) « Confusions et contre-vérités sur les aides à la presse », article publié sur le site du Figaro, 3 mars 2014 ; « Et les aides à la presse ? », Le Point, 23 janvier 2014.

En perspective

• Projet pour une presse libre Pierre Rimbert, décembre 2014 Alors que la presse française titube, l’exigence s’affirme d’un modèle radicalement différent. Quel serait son cahier des charges ? Produire une information de qualité soustraite à la loi du marché comme aux pressions du pouvoir. Surprise, les outils nécessaires à la mise en place d’un tel système sont sous nos yeux. →

• Qui veut encore financer la presse ? Marie Bénilde, février 2010 Aperçu Comme des ours en équilibre sur un bloc de glace menacé par la fonte, les éditeurs de presse s’activent pour sauver leur industrie. Fascinés par Internet, ils s’interrogent : comment financer l’information à l’ère numérique ? →

• Sociétés de rédacteurs, un rêve de journaliste , mai 2007 Imposer aux entreprises de presse un statut de société à but non lucratif : élaborée il y a quarante ans par des journalistes, cette proposition n’a guère inspiré les candidats au premier tour de l’élection (...) →

355 Pour info sur le travail du « Diplo » :

• Dossier Internet Grand marché transatlantique

• Envoyés spéciaux de la guerre d’Espagne Anne Mathieu, août 2016

• « Brexit », les raisons de la colère Paul Mason, août 2016

• Aux origines ouvrières du Front populaire Gérard Noiriel, juin 2016

- « La provoc annuelle de "Challenges" : le palmarès des fortunes

• 11 août 2016 • Par YVES FAUCOUP • Blog Médiapart: Social en question "Challenges" vient de publier, comme chaque année, son palmarès des 500 plus grosses fortunes de France. Les 12 en tête du classement possèdent une fortune de 194 milliards d'euros, qui a progressé de 28 milliards en un an, soit + 16,9 %. L'étalage de richesse, auquel se livre le magazine du fric, ne pose pas que la question de l'indécence : ici comme ailleurs, il joue une fonction de sidération. En effet, comment ne pas s'incliner devant une telle démesure. Challenges fait preuve d'une certaine pudeur : le patrimoine global des 500 Français les plus riches "n'a presque pas évolué en un an", écrit-il. Sans pour autant publier le chiffre : en 2014, c'était 390 milliards ; en 2015, 460 et en 2016 on ne sait, sinon une petite courbe qui laisse presque transparaître une légère baisse. Je me coltine le calcul et je trouve 458, 6 milliards. Donc une très légère baisse (on aura noté que les 500 possèdent une fortune supérieure au budget de l'Etat). Challenges est un peu déchiré : on veut faire miroiter la richesse, en ménageant les riches qui n'aiment pas plus que ça s'exhiber, tout en ne voulant pas avouer une baisse. Or cette baisse est toute relative, car elle exprime la difficulté d'évaluer le patrimoine réel de ces gens-là, la bourse ayant connu de fortes fluctuations en 2015 (les valeurs boursières ont baissé de 20 % en un an). Donc l'évaluation de Challenges serait plutôt le signe d'une progression des fortunes, si en valeur absolue le montant global du patrimoine est resté à peu près le même. Un vent favorable, ça tient tellement à peu, et le portefeuille d'actions explose. Le Fmic ! En tous cas, les 12 plus riches ont vu, eux, leur patrimoine s'accroître de 28 milliards en un an (et ils sont passés de 20 Mds en 1996 à 194 Mds aujourd'hui, patrimoine qui a presque décuplé en 20 ans). Et cette légère stagnation des 500 ne doit pas dissimuler le fait que leur fortune a progressé de

356 18 % en deux ans, de 15 % en 2014, de 25 % en 2012 (voir Challenges du 10 juillet 2014) . Le magazine note que pour entrer dans le palmarès il faut désormais posséder 100 millions d'euros : en 2014, il fallait posséder 74 millions pour faire partie du club des 500. Avec un tact certain, le magazine nomme ce niveau de richesse le Fmic : "fortune minimum d'insertion dans le classement" ! Le Smicard qui devra vivre plus de 7000 ans pour atteindre ce niveau de fortune (sans rien dépenser pendant cette éternité) appréciera. Challenges glisse en passant que Mme Bettencourt, à l'époque du bouclier fiscal instauré par Nicolas Sarkozy, échappait à l'ISF. Sans toutefois, nous rappeler ce que Le Canard enchaîné avait révélé à savoir que le fisc avait dû rembourser 30 millions d'euros à la dame, toujours pour la même raison. Challenges loue Pierre Gattaz qui a si gentiment répondu aux questions que le magazine lui posait. Et étrille François Hollande qui "n'aime pas les riches", sorte de sparadrap du capitaine Haddock. Le gratin du gotha Laurence Parisot à Saint-Barth Nous avons droit à peu près aux mêmes chapitres chaque année : les riches vivent parfois dans des enclos bien gardés. Une année c'était la villa Montmorency (où le "gratin du gotha", Bolloré, Afflelou, Lagardère, Sarkozy-Bruni, se cache des regards des manants) ou la villa Saïd, à Paris. L'avenue du Monopoly (Foch) où tel immeuble est estimé à 1,7 milliard. Cette fois-ci c'est la rue de Grenelle qui est à l'honneur, dans le VIIème arrondissement où se dissimulent de luxueuses résidences à 23 millions d'euros. Et comme ces richesses exorbitantes il faut bien les dépenser un peu, alors petit tour dans les paradis perdus, pas pour tout le monde : Saint-Barth, sur un rocher des Caraïbes, prisé, entre autres, par Laurence Parisot qui y possède une "mai-son". Ce que cette liste nous donne à voir c'est que beaucoup de titulaires de fortunes sont des héritiers. L'idéologie de beaucoup d'entre eux (déversée sans cesse dans nos médias par des propagandistes parfois eux-mêmes héritiers comme Nicolas Beytout, ex-Les Échos, aujourd'hui patron de L'Opinion ou Ghislaine Ottenheimer, la dame de Neuilly, justement rédactrice en chef de Challenges), c'est le self-made-man, celui qui a le sens des initiatives, de l'audace (mot qu'ânonne sans cesse Mme Ottenheimer), qui s'est construit avec la force du poignet : il faut accréditer l'idée que c'est la volonté, le courage, la prise de risque qui seraient à l'origine de ces succès. Or ce n'est pas le cas de Parisot, ni de Gattaz, ni d'Ernest-Antoine Sellière, et le palmarès nous rappelle opportunément que parmi les 12 premiers, 9 sont des héritiers (Bettencourt, Arnault, Mulliez, Hermès, Dassault, les frères Weitheimer, Pinault, Bolloré et Perrodo) soit les 3/4 ! Riches philanthropes Comme récemment Valeurs actuelles, Challenges, juste avant de consacrer un article à l'ISF dans ce dossier, publie une page de publicité en faveur de la Fondation Caritas France, avec ce slogan : "Créer sa fondation orientée pauvreté et exclusion". On fait fort dans le cynisme. Peut-être parce que l'on a mauvaise conscience : alors on va chercher des philosophes, moralistes sans éthique. Pascal Bruckner qui a osé écrire : "il n'est rien de choquant à ce que des personnes célèbres ou riches consacrent une partie de leur temps aux indigents, façon de remercier la fortune des bienfaits dont elle les a gratifiées". Pour lui, "diffamer les donateurs dans des pamphlets furieux est une satisfaction aussi creuse que frivole". Et de glorifier Bill Gates, "le héros de l'offrande spectaculaire assortie d'une grande modestie dans le maintien" (La sagesse de l'argent, Grasset). Et André Comte-Sponville de venir à la rescousse en décanillant Merci patron !, film trop simpliste à son goût. Il lui reproche de n'offrir qu'"une approche morale, pour des problèmes surtout économiques". Il est vrai qu'il a publié en 2007 Le capitalisme est-il moral ?, qui prenait acte que

357 l'économie a ses lois, et la morale les siennes. Morale de cette histoire qui défrisera Comte-Sponville : la possession de telles fortunes n'est pas seulement immorale parce qu'elles sont le plus souvent héritées (quitte à ce que le désormais titulaire ait su la faire fructifier) mais par le fait même qu'elles atteignent de tels montants. On ne rappellera jamais assez qu'un individu qui a épuisé tous ses droits au chômage, et qui galère au RSA, perçoit officiellement 524,68 € par mois, amputés aussitôt de 61,67 € s'il perçoit par ailleurs une allocation-logement. Soit une allocation de 463,01 € par mois s'il n'y a aucune autre ressource. Et le Smic est à 1143,72 € nets mensuels. Aucun rapport ? Mais on nous dit que c'est grâce à ces fortunes accumulées que les citoyens ont du travail. On nous dit que les PDG ont des salaires astronomiques (avec stock-options, parachutes dorés et retraite-chapeau) et les propriétaires des patrimoines stratosphériques parce qu'ils assurent le développement de leur entreprise et créent de l'emploi (bien que certains coulent leur boite ou sont reconnus "incapables majeurs"). Pourtant si l'infortuné est jeté sur le carreau c'est bien parce que ce modèle économique est injuste, et efficace par pour le plus grand nombre mais seulement pour ceux qui en tirent pleinement profit. L'infortuné est traité de la sorte, pas par un système social qui déraille mais bien par une économie libérale, autorisant par ailleurs, et justifiant, ces écarts de fortune. Les Caïmans sont au Paradis Même Challenges est gêné aux entournures : alors le magazine fait un geste, il cite Philippe Askenazy qui, dans Tous rentiers ! Pour une autre répartition des richesses (Odile Jacob), constate que les "riches finissent par lasser et choquer" en captant une part croissante du revenu national. Challenges interroge également Gabriel Zucman, auteur d'un passionnant ouvrage sur La richesse cachée des nations, Enquête sur les paradis fiscaux (La République des idées, Le Seuil, 2013). Il constate que les fortunes supérieures à 100 millions d'euros affichent "un rythme de croissance effréné" : de 8 à 10 %. Alors beaucoup s'évadent fiscalement : il évalue à 8635 milliards de dollars les fortunes (mondiales) personnelles détenues en Suisse, Îles Caïmans, Singapour ou Luxembourg, soit 41 % d'augmentation entre 2011 et 2014. Je note que dans son livre il donnait le chiffre de 5800 milliards $ pour 2013 (masse d'argent dissimulé sur les 73000 milliards de patrimoine mondial financier). C'est dire la progression de cette arnaque sur le dos des citoyens qui règlent leurs impôts au centime près. La seule France aurait 500 milliards $ évadés (590 milliards d'euros, dit Antoine Peillon, grand reporter au très gauchiste journal la Croix) : ce qui prive le fisc français d'au moins 85 milliards d'euros chaque année, sans doute davantage. Soit un montant supérieur au déficit du budget de l'État. Or les économistes en cour ne cessent d'expliquer que c'est parce que le Smic est trop élevé et le RSA distribué à trop d'assistés que l'économie va mal (l'évasion fiscale c'est pourtant 10 fois le budget du RSA). Jamais les Beytout, Dessertine, Ottenheimer, Lenglet, Fiorentino, (Jean-Marc) Daniel, Verdier-Molinié, Sylvestre et bien d'autres, qui chassent en escadrilles, tous ces détricoteurs du droit social au service des oligarques, ne vous diront que l'économie française est ainsi délestée. Ni non plus que les fortunes démesurées recensées par le palmarès de Challenges sont intolérables en démocratie. . Challenges, du 7 juillet au 24 août 2016. Ajout du 12 août : Inégalités de revenus et Capital Dans Le Capital au XXIème siècle, Thomas Piketty démontre que les inégalités de revenus

358 s'accroissent quand les revenus du capital augmentent plus vite que la croissance. Un économiste du FMI vient d'essayer de démontrer qu'il n'en est rien, à partir d'une étude effectuée sur 19 pays développés. Et qui annonce en premier cette info en France ? : Challenges sur son site le 9 août. Il faut aller voir sur Le Monde ou Les Échos pour découvrir que l'économiste se demande tout de même si à plus long terme la thèse de Piketty ne pourrait pas être vérifiée. On attend cependant la réponse de Piketty. Sur ces questions des inégalités, à noter que Joseph Stiglitz, Prix Nobel d'économie, a déclaré en septembre 2015 : "Les inégalités sont à l’origine de la crise et freinent la reprise des pays industrialisé". Et aussi : "Les inégalités résultent de choix politiques, et non d’une mondialisation échappant aux Etats, comme on l’entend parfois." Billet n° 273 Contact : [email protected] Lien avec ma page Facebook Tweeter : @YvesFaucoup [Le blog Social en question est consacré aux questions sociales et à leur traitement politique et médiatique. Voir présentation dans billet n°100. L’ensemble des billets est consultable en cliquant sur le nom du blog, en titre ou ici : Social en question. Par ailleurs, tous les articles sont recensés, avec sommaires, dans le billet n°200]

359 G-Moralité ?

En guise de conclusion forcément provisoire à ce qui est une saga, celle de l'aventure démocratique en Occident, nous donnons la parole une fois encore à Noam Chomsky, qui, tout américain qu'il est, a rarement les honneurs de la grande presse, puisqu'il faut encore l'appeler ainsi. Pourquoi ? Parce que nous avons le droit de penser que l'hégémonie US est pour beaucoup dans la prise en main de nos société par les logiques financières et économiques privées, ce que Monsieur Chomsky dénonce vivement. Mais il n'est certes pas interdit de penser que le règne des Etats-Unis est un moyen commode pour nos propres élites mondialisées de se mouler dans un système qui les avantage à un point rarement atteint dans l'histoire de France, et de l'Europe. C'est de toute évidence le triomphe du fric contre ceux qui en ont peu ou pas, et de plus en plus contre ceux qui en ont un peu, j'ai nommé les classes moyennes. Rendons aux technocrates français, majoritairement réformistes, d'avoir joué un rôle essentiel dans le construction de cette UE à la mode yankee. On se demande encore pourquoi M. Mitterrand à la fin de sa vie a dénoncé la guerre implacable que nous mèneraient les Etats-Unis, dont il a été un si fidèle serviteur en proposant avec succès la vassalisation institutionnelle de la France via le traité de Maastricht. Si ce qui apparaît à la fin de ce travail soulève de vrais et immenses problèmes, quoiqu'on en pense par ailleurs, nous sommes face à une crise économique sociale et politique sans précédent en temps de paix européenne. Cette crise nous aurait alors été imposée par nos propres responsables depuis au moins une trentaine d'années, juchés sur de « grands médias » non pas « aux ordres », mais dans leurs hautes sphère pleinement engagés dans un combat idéologique et politique au service des puissants, ce qui leur ôte toute prétention au « journalisme », car ils sont devenus des acteurs politiques de pleine responsabilité et donc fauteurs de propagande. Comme toute crise majeure, elle donne donc ses couleurs au monde médiatique, à présent élément puissant de l' « état profond » qui nous dirige, et qui va avec les présidentielles de 2017, essayer sans doute de poursuivre son bonhomme de chemin sur notre dos à travers des candidatures trompeuses. Pour ceux qui liront quelques unes de ces pages, puisse nos mauvais pressentiments être un simple cauchemar. Toutefois, en espérant sans illusion un sursaut, voici donc à nouveau Monsieur Chomsky qui cadre parfaitement notre propos :

-Source : The 4th media, David Barsamian , 02-12-2014 (repris sur Les-crise.fr)

« Les États-Unis se sont depuis longtemps arrogé le droit d’utiliser la violence pour atteindre leurs objectifs, mais ils n’ont plus maintenant les moyens de mettre en œuvre leurs politiques. Cet article est une adaptation de Soulèvement, un chapitre de Systèmes de pouvoir : conversations à propos du soulèvement général contre l’empire US, le recueil d’interviews de Noam Chomsky par David Barsamian paru début 2013 (avec nos remerciements pour l’éditeur, Metropolitan Books). Les questions sont de Barsamian, les réponses de Chomsky. Barsamian. Les États-Unis ont-ils toujours le même niveau de contrôle qu’autrefois sur les ressources énergétiques du Moyen-Orient ? Chomsky. Les grands pays producteurs d’énergie sont toujours fermement sous le contrôle des dictatures soutenues par l’Occident. Donc, effectivement, le progrès réalisé par le Printemps arabe est limité, mais il n’est pas négligeable. Le système dictatorial contrôlé par l’Occident est érodé. En fait, il est érodé depuis un certain temps. Ainsi, par

360 exemple, si vous retournez cinquante ans en arrière, les ressources énergétiques, principale préoccupation des planificateurs américains, ont été pour la plupart nationalisées. Il y a toujours eu des tentatives pour changer cela, mais elles n’ont pas réussi. Prenez l’invasion américaine de l’Irak, par exemple. Pour tout le monde, sauf un idéologue borné, il est assez évident que nous avons envahi l’Irak, non pas par amour de la démocratie, mais parce que c’est la deuxième ou troisième plus grande source de pétrole dans le monde, et que l’Irak se trouve au cœur de la plus importante région productrice. Vous n’êtes pas censé le dire. Ce serait considéré comme une théorie conspirationniste. Les États-Unis ont subi une sérieuse défaite en Irak de la part du nationalisme irakien , la plupart du temps par une résistance non-violente. Les États-Unis pouvaient tuer les insurgés, mais ils ne pouvaient pas faire face à un demi-million de personnes manifestant dans les rues. Étape par étape, l’Irak a été en mesure de démanteler les contrôles mis en place par les forces d’occupation. En novembre 2007, il devenait assez évident que les objectifs des États-Unis seraient très difficiles à atteindre. Et à ce moment là, curieusement, ces objectifs ont été explicitement dévoilés. Donc, en novembre 2007, l’administration Bush II a présenté une déclaration officielle à propos de ce que devrait être tout arrangement futur avec l’Irak. Il y avait deux exigences majeures : l’une, que les États-Unis soient libres de mener des opérations de combat à partir des bases militaires qu’ils conserveront ; et l’autre que soient encouragés les flux d’investissements étrangers vers l’Irak, en particulier les investissements américains. En janvier 2008, Bush a explicité cela clairement dans une de ses déclarations. Quelques mois plus tard, face à la résistance irakienne, les États-Unis ont dû renoncer. Le contrôle de l’Irak est en train de s’évanouir sous leurs yeux. La guerre en Irak était une tentative de rétablir par la force quelque chose comme l’ancien système de contrôle, mais elle a été repoussée. En règle générale, je pense que les politiques américaines restent les mêmes depuis la Deuxième Guerre mondiale. Mais la capacité de les mettre en œuvre décline. Barsamian. Le déclin est-il dû à la faiblesse économique ? Chomsky. En partie parce que le monde est en train de se diversifier. Il dispose de centres de pouvoir multiples. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis étaient vraiment à l’apogée de leur puissance. Ils avaient la moitié des richesses du monde, et tous leurs concurrents avaient été gravement endommagés ou détruits. Ils avaient une position de sécurité incroyable et élaboraient des plans pour diriger le monde, ce qui n’était pas irréaliste à l’époque. Barsamian. Est-cela qu’on a appelé la grande aire de planification? [zone à subordonner aux intérêts économiques des US, NdT] Chomsky. Oui. Juste après la Seconde Guerre mondiale, George Kennan, chef du personnel de la planification de la politique du département d’État des États-Unis, et d’autres, en ont esquissé les détails, puis ils ont été mis en œuvre. Ce qui se passe actuellement au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et dans une certaine mesure en Amérique du Sud nous ramène tout droit à la fin des années 1940. Le premier grand succès de la résistance à l’hégémonie américaine a eu lieu en 1949. C’est lorsque se produisit un événement appelé la perte de la Chine, cette expression est significative. C’est une formulation très intéressante, et jamais contestée. Il y eut beaucoup de discussions pour savoir qui était responsable de la perte de la Chine. C’était devenu un problème national énorme. Mais c’est une phrase très intéressante. Vous ne pouvez perdre que quelque chose qui vous appartient. Cela était tout simplement pris pour un fait acquis : nous possédons la Chine et si elle se dirige vers l’indépendance, c’est que nous l’avons perdue. Plus tard apparurent les préoccupations au sujet de la perte de l’Amérique

361 latine, puis la perte du Moyen-Orient, la perte de…certains pays, le tout basé sur la prémisse que nous possédons le monde et que tout ce qui affaiblit notre contrôle est une perte pour nous et nous nous demandons comment le récupérer. Aujourd’hui, si vous lisez, disons, des revues de politique étrangère ou si vous écoutez les débats républicains ridicules, vous verrez qu’ils se demandent : Comment pouvons-nous éviter de nouvelles pertes ? Par ailleurs, la capacité de préserver le contrôle a fortement diminué. En 1970, le monde était déjà ce que l’on appelait tripolaire économiquement, avec un centre industriel en Amérique du Nord, aux États-Unis, un centre européen basé en Allemagne, à peu près comparable en taille, et un centre en Asie de l’Est, basé au Japon, qui était alors la zone de croissance la plus dynamique dans le monde. Depuis cette époque, l’ordre économique mondial est devenu beaucoup plus diversifié. Il est donc plus difficile pour nous de mener à bien nos politiques, mais les principes sous-jacents n’ont pas beaucoup changé. Prenez la doctrine Clinton. La doctrine Clinton disait que les États-Unis avaient le droit de recourir à la force unilatéralement, afin d’assurer un accès sans restriction aux marchés clés, à l’approvisionnement en énergie et aux ressources stratégiques. Cela va au-delà de tout ce que George W. Bush a dit. Mais c’était dit posément , sans arrogance ni agressivité, donc cela n’a pas causé beaucoup d’émoi. La croyance dans cette vocation persiste jusqu’à ce jour. Elle fait aussi partie de la culture intellectuelle. Juste après l’assassinat d’Oussama ben Laden, au milieu de toutes les acclamations et des applaudissements, il y eut quelques commentaires critiques remettant en question la légalité de l’acte. Depuis des siècles, il y avait quelque chose appelé la présomption d’innocence. Si vous appréhendez un suspect, c’est un suspect et non un coupable, jusqu’à preuve du contraire. Il doit être traduit en justice. C’est un principe essentiel de la loi américaine, vous pouvez remonter à la Magna Carta [Grande Charte,promulguée en Angleterre en 1215 pour protéger les libertés, NdT]. Donc quelques voix se sont élevées disant que nous ne devrions peut-être pas jeter aux orties les fondements de la loi anglo-américaine. Cela a conduit à un grand nombre de réactions furieuses de colère et de mécontentement, mais les plus intéressantes sont venues, comme d’habitude, de l’extrême du centre-gauche du spectre politique. Matthew Yglesias, un commentateur de gauche-libéral bien connu et très respecté, a écrit un article dans lequel il se moque de ces points de vue. Il a dit qu’ils étaient incroyablement naïfs et stupides. Puis il a expliqué la raison. Il a dit : L’une des principales fonctions de l’ordre institutionnel international est précisément de pouvoir légitimer l’utilisation de la force militaire meurtrière par les puissances occidentales. Bien sûr, il ne parle pas de la Norvège. Il vise les États-Unis. Donc, le principe sur lequel repose le système international est que les États-Unis ont le droit d’utiliser la force à volonté. Parler de la violation du droit international par les États-Unis ou quelque chose du même genre est incroyablement naïf et complètement stupide. Incidemment, j’étais la cible de ces remarques, et je suis heureux de reconnaître ma culpabilité. Je pense que la Magna Carta et le droit international valent la peine qu’on leur accorde une certaine attention. Je mentionne simplement que pour illustrer cela, aussi bien dans la culture intellectuelle, que dans ce qu’on appelle l’extrême du centre-gauche de l’échiquier politique, les principes à la base de ces pratiques prédatrices n’ont pas beaucoup changé . Mais la capacité de les mettre en œuvre a été fortement réduite. Voilà pourquoi vous entendez tout ce discours sur le déclin américain. Jetez un oeil à l’édition de fin d’année de Foreign Affairs, le journal phare del’establishment. Sa page de couverture demande, en caractères gras, L’Amérique est-elle finie ? C’est

362 la plainte classique de ceux qui croient que tout leur appartient. Si vous croyez que vous devriez tout posséder et si quoi que ce soit vous échappe, c’est une tragédie, et le monde s’effondre. Donc, l’Amérique est-elle fichue ? Il y a longtemps nous avons perdu la Chine, nous avons perdu l’Asie du Sud-Est, nous avons perdu l’Amérique du Sud. Peut-être que nous allons perdre le Moyen-Orient et les pays d’Afrique du Nord. L’Amérique est -elle finie ? C’est une sorte de paranoïa, mais c’est la paranoïa des super-riches et des super- puissants. Si vous n’ avez pas tout, vous n’avez rien, c’est une catastrophe. Barsamian. Le New York Times dit que le dilemme de la politique des Printemps arabes vient de la difficulté à concilier les objectifs américains contradictoires, que sont le soutien à un changement démocratique, le désir de stabilité, et la crainte des islamistes, qui sont devenus une force politique puissante. The Times identifie ces trois objectifs des États- Unis. Qu’en pensez-vous ? Chomsky. Deux d’entre eux sont exacts. Les États-Unis sont en faveur de la stabilité. Mais vous devez vous rappeler ce que signifie la stabilité. Stabilité signifie se conformer aux ordres américains. Ainsi, par exemple, l’une des accusations contre l’Iran, la grande menace pour la politique étrangère, prétend que ce pays cherche à déstabiliser l’Irak et l’Afghanistan. Comment ? En essayant d’étendre son influence dans les pays voisins. Alors que nous, par contre, nousstabilisons les pays en les envahissant et en les détruisant. J’ai parfois cité une de mes illustrations favorites de ce fait, qui me vient d’un très bon analyste libéral de politique étrangère, James Chace, très connu et ancien rédacteur en chef de Foreign Affairs. En s’exprimant au sujet du renversement du régime de Salvador Allende et de l’imposition de la dictature d’Augusto Pinochet en 1973, il a écrit que nous devions déstabiliser le Chili dans l’intérêt de la stabilité. Cela n’est pas perçu comme une contradiction, et ce n’en est pas une. Nous avons dû détruire le système parlementaire, afin d’obtenir la stabilité, ce qui signifie qu’ils font bien ce que nous disons. Donc, oui, nous sommes en faveur de la stabilité dans ce sens technique. La préoccupation par rapport à l’islam politique est comme la préoccupation qui naît de tout développement indépendant. Vous devez vous préoccuper de tout ce qui est indépendant, car cela peut vous ruiner. En fait, c’est un peu paradoxal, parce que, traditionnellement les États-Unis et la Grande-Bretagne ont fortement soutenu le fondamentalisme islamique radical, pas l’islam politique, en tant que force pour contrer le nationalisme laïc, qui est la véritable préoccupation. Ainsi, par exemple, l’Arabie saoudite est l’État fondamentaliste le plus extrême dans le monde, un État islamique radical. Il a un zèle missionnaire, propage l’islam radical au Pakistan et finance la terreur. Mais ce pays est le bastion de la politique américaine et britannique. Ils l’ont toujours soutenu contre la menace du nationalisme laïc venant d’Égypte avec Gamal Abdel Nasser, ou d’Irak avec Abd al-Karim Qasim, parmi beaucoup d’autres. Mais ils n’ aiment pas l’islam politique, car il peut devenir indépendant. Le premier des trois points, notre aspiration à la démocratie, a les mêmes accents de sincérité que Joseph Staline parlant de l’engagement de la Russie pour la liberté et la démocratie dans le monde. C’est le genre de déclaration qui vous fait rire quand vous l’entendez des bouches des commissaires ou des religieux iraniens, mais vous hochez poliment la tête, peut-être même avec crainte, quand vous l’entendez de la part de leurs homologues occidentaux. Si vous regardez les faits, l’aspiration à la démocratie est une mauvaise plaisanterie. C’est même reconnu par les plus grands savants, même s’ils ne l’expriment pas de cette façon. L’un des principaux chercheurs sur la soi-disant promotion de la démocratie est Thomas Carothers, plutôt assez conservateur et très respecté, un néo-reaganien, pas un libéral flamboyant. Il a travaillé au département d’État de Reagan et écrit plusieurs livres étudiant le cours qu’a suivi la promotion de la démocratie, qu’il prend très au sérieux. Il dit, oui, c’est un idéal américain profond, mais il a une histoire cocasse. Toutes les administrations

363 américaines sont schizophrènes. Elles ne soutiennent la démocratie que si celle-ci satisfait leurs intérêts stratégiques et économiques. Il décrit cela comme une étrange pathologie, comme si les États-Unis avaient besoin d’un traitement psychiatrique ou quelque chose de ce genre. Bien sûr, il y a une autre interprétation, mais qui ne peut pas venir à l’esprit d’un intellectuel bien formaté et bien éduqué. En Egypte, plusieurs mois après sa chute, le président Hosni Moubarak se retrouvait dans le prétoire, faisant face à des poursuites pour des activités criminelles. Il est inconcevable que des dirigeants américains soient un jour tenus de rendre compte de leurs crimes en Irak ou au-delà. Est-ce que cela va changer un de ces jours prochains ? Il s’agit essentiellement du principe Yglesias : le fondement même de l’ordre international réside dans le droit des États-Unis à utiliser la violence à volonté. Alors, comment pouvez- vous incriminer quelqu’un ? Barsamian. Et personne d’autre n’a ce droit ? Chomsky. Bien sûr que non. Mais peut-être nos clients le font-ils ? Si Israël envahit le Liban et tue mille personnes en détruisant la moitié du pays, alors d’accord, ça va. C’est intéressant. Barack Obama était sénateur avant d’être président. Il n’a pas fait beaucoup en tant que sénateur, mais il a fait certaines choses, dont une qui le remplit de fierté. En effet, si vous regardez son site Web avant les primaires, il a souligné le fait que, lors de l’invasion israélienne du Liban en 2006, il avait co-parrainé une résolution du Sénat demandant que les États-Unis ne fassent rien pour empêcher les actions militaires d’Israël tant qu’elles n’avaient pas atteint leurs objectifs, et demandant aussi de censurer l’Iran et la Syrie parce qu’ils soutenaient la résistance à la destruction du sud Liban par Israël (pour la cinquième fois en vint-cinq ans). Donc, Israël hérite du droit à la violence. Les autres clients aussi. Mais les droits résident vraiment à Washington. Voilà ce que signifie posséder le monde. C’est aussi naturel que l’air que vous respirez. Cela ne peut pas être remis en question. Le principal fondateur de la théorie contemporaine des relations internationales, Hans Morgenthau, était vraiment une personne tout à fait décente, un des très rares politologues et spécialistes des affaires internationales à critiquer la guerre du Vietnam, pour des raisons morales, non tactique. C’est très rare. Il a écrit un livre intitulé Le but de la politique américaine. Rien qu’avec le titre vous pouvez deviner ce qui va suivre. Les autres pays n’ont pas de buts. Le but de l’Amérique, par contre, est transcendant, il s’agit d’apporter la liberté et la justice au reste du monde. Mais c’est un bon élève, comme Carothers. Alors il a étudié les dossiers. Il a dit que, après avoir analysé le cas, il semblait que les États-Unis n’avaient pas été à la hauteur de leur finalité transcendante. Mais ensuite il dit que critiquer notre but transcendant, c’ est tomber dans l’erreur de l’athéisme, qui nie la validité de la religion pour des motifs similaires, ce qui est une comparaison pertinente, car c’est une croyance religieuse profondément ancrée. C’est si profond que cela devient difficile à démêler. Et remettre cela en question provoque une quasi-hystérie, et mène souvent à des accusations d’anti-américanisme ou de haine de l’Amérique, concepts intéressants qui n’existent pas dans les sociétés démocratiques, mais seulement dans les sociétés totalitaires, et chez nous, où ils sont simplement considérés comme acquis. David Barsamian | 8-12-2014 The US Still Thinks it Owns the World ) (Traduit par JJ pour vineyardsaker.fr) Noam Chomsky est un théoricien politique et activiste américain, professeur de l’institut de linguistique au Massachusetts Institute of Technology (MIT). Outre son travail en linguistique, Chomsky est internationalement reconnu comme l’un des intellectuels publics les plus critiques en vie aujourd’hui. Chomsky continue d’être un critique sans complexe à

364 la fois de la politique étrangère américaine et de ses ambitions d’hégémonie géopolitique et du tournant néolibéral du capitalisme mondial, qu’il identifie en termes de guerre de classe menée par les élites contre les besoins et les intérêts de la grande majorité. David Barsamian est un journaliste radio arméno-américaine, écrivain, fondateur et directeur de Radio Alternative, un programme hebdomadaire d’entretien syndiqué du Colorado Boulder, relayé par quelque 150 stations de radio dans divers pays. Source : The 4th media, David Barsamian , 02-12-2014 Les-crises.fr DT | 16 août 2016 à 4 h 30 min | Étiquettes : Hégémonie, USA | Catégories : Crise Démocratique | URL : http://wp.me/p17qr1-xq1

-sur Le blog de Liliane Held-Khawam

" Les grands hommes appellent honte le fait de perdre et non celui de tromper pour gagner. " Machiavel Nicolas (1469-1527) Florence-Italie par LHK

-Panama Papers, HSBC, cartels mexicains et… Hillary Clinton. Par Nomi Prins

Nomi Prins Les Panama Papers ont révélé l’existence de milliers de paradis fiscaux offshore créés par HSBC. Vaguement condamnée pour blanchiment, la banque a contribué à la campagne d’Hillary Clinton qui n’a trouvé aucune odeur particulière à cet argent. Les banques et les politiciens se sont toujours entraidés, mais les Panama Papers ont révélé l’existence de milliers de paradis fiscaux offshore créés par HSBC. Cela complique la tâche des Etats qui souhaiteraient protéger HSBC. Certains membres des services du renseignement du monde entier pensent que les Etats-Unis ont décidé de publier les Panama Papers parce que le Panama ne se pliait pas à leurs exigences en matière d’information. Par ailleurs, il y a moins de banques américaines impliquées dans les Panama Papers que celles de nombreux pays concurrents des Etats-Unis. Banques et politiciens forment un réseau complexe, qui implique de nombreux acteurs majeurs que nous continuerons à analyser au fil des mois… Le gouvernement américain joue les durs en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et de paradis fiscaux offshore. Mais les grandes banques impliquées payent volontiers afin de faire partie du club des criminels, et ne doivent régler que de modestes amendes lorsqu’elles se livrent à des pratiques frauduleuses ou pas tout à fait légales (voir le dernier procès de Goldman Sachs, qui s’est soldé par un accord à l’amiable de cinq milliards de dollars en avril). Les professionnels de l’évasion fiscale et les blanchisseurs de capitaux créent des sociétés écrans pour dissimuler ou transférer des milliards de dollars. Les banques les aident car elles y trouvent leur compte. Mais si vous osez retirer ou transférer 10 000 dollars de votre compte en banque pour

365 emmener votre famille passer des vacances de rêve aux îles Caïman, votre banque fait un rapport. Les retraits d’espèces sont surveillés plus étroitement encore… les banques américaines font des rapports pour “activité suspecte” sur toute personne retirant plus de 3 000 dollars en espèces.

Deux poids, deux mesures concernant les informations bancaires Dans le cadre de la lutte mondiale visant à récupérer l’argent logé dans les paradis fiscaux, les pays collaborent afin de soutirer des informations auprès des banques. C’est en tous cas ce que raconte le gouvernement Obama afin de mettre la main sur nos informations bancaires. Pourtant, en pratique, les retraités américains vivant à l’étranger, comme mon père, constatent que les versements de la Sécurité sociale ou de leur fonds de pension sont passés au crible, en quête d’infamies inexistantes, tandis que ceux qui sont à la solde des cartels transfèrent du liquide via les guichets de banques internationales sans être inquiétés le moins du monde. Le gouvernement Obama a montré la voie à d’autres gouvernements, afin d’exiger des banques offshore qu’elles divulguent des informations concernant les actifs dissimulés (grands ou petits). Les Etats-Unis ont gagné la bataille contre les banques suisses afin qu’elles dévoilent des informations jusque-là secrètes concernant leurs clients. Mais les Etats-Unis n’offrent aucune réciprocité. L’an dernier, ce pays a été propulsé à la troisième place au palmarès mondial du secret bancaire, devant les îles Caïman et le Luxembourg, et juste derrière la Suisse et Hong Kong, Selon le Financial Secrecy index, l’indice d’opacité financière créé par l’ONG Tax Justice Network (TJN). Depuis des années, des états comme le Delaware, le Wyoming et le Nevada sont des paradis nationaux du secret bancaire. Ils hébergent de plus en plus de sociétés écrans pour le compte de “clients confidentiels” étrangers. Les Etats-Unis, tout en dénonçant ce genre de pratiques à l’étranger, sont en passe de devenir un paradis fiscal de première classe. L’emplacement géographique de ces états américains n’a peut-être pas le même attrait esthétique que les Alpes ou le sable blanc des îles Caïman, mais les personnes intéressées y viennent pour cacher leur argent, pas pour bronzer ou faire du ski. Las Vegas, avec sa faune délurée et ses tours Trump plaquées or qui poussent comme des champignons, est un paradis fiscal américain en pleine expansion. Ces sociétés écrans n’ont que faire du glamour, la négligence du gouvernement leur suffit bien. Derrière ce semblant de coopération visant à localiser “l’argent qui disparaît”, les gouvernements nationaux ont laissé leurs banques se livrer à une concurrence acharnée afin de capitaliser sur les paradis fiscaux internationaux. Les banques ont ensuite fait de généreuses donations aux personnalités politiques qui les avaient aidées (comme je le prouve dans mon livre All the President’s Bankers). Résultat ? Votre compte fait peut-être l’objet d’une surveillance quotidienne, mais les milliardaires ou organisations terroristes internationales qui blanchissent des fonds par le biais de votre banque sont traités comme des VIP et consciencieusement ignorés. Leur argent est dissimulé dans un labyrinthe complexe de sociétés écrans, souvent créées par de grandes banques qui s’appuient sur le réseau mondial des paradis fiscaux.

La créativité et l’entraide au service de l’évasion fiscale Quel est le point commun entre HSBC, les cartels mexicains et Hillary Clinton ? Réponse : ils ont tous mis au point des moyens “créatifs” afin que des sommes d’argent échappent à la surveillance du fisc, des régulateurs, des investisseurs ou du système judiciaire. Commençons par HSBC. Pour devenir une grande banque internationale, il faut être un grand blanchisseur d’argent. Comme beaucoup d’autres banques qui offrent à prix d’or des services dits

366 “d’optimisation fiscale”, HSBC gagne de l’argent en contournant ou en violant les lois, pour se procurer et conserver ses clients VIP. Si elle est prise la main dans le sac, il suffit de payer l’amende. C’est un système qui marche : les amendes ne représentent qu’une fraction du profit que leur rapportent ces clients. Il fonctionne aussi pour les gouvernements qui infligent ces amendes, et passent ainsi pour les “gentils”. Cette facilitation du blanchiment de l’argent de la drogue n’est pas nouvelle. HSBC est entrée en bourse à Hong Kong le 3 mars 1865, et à Shanghai un mois plus tard. Ce sont les guerres de l’opium en Asie qui ont élevé HSBC au statut d’acteur mondial. Aujourd’hui, c’est la cinquième plus grande banque au monde. En 2010, HSBC a été vaguement condamnée pour blanchiment d’argent. Le gouvernement américain lui a ordonné de renforcer son plan anti-blanchiment. En 2012, HSBC a ensuite conclu un accord amiable, prévoyant le versement de 1,92 milliards de dollars aux Départements américains de la Justice et du Trésor. Un accord qui fait figure de récompense pour avoir blanchi l’argent des narcotrafiquants et violé les sanctions infligées par les Etats-Unis aux clients situés en Libye, au Soudan et en Birmanie. Dans le cadre de cet accord, HSBC a également accepté un “deferred prosecution agreement“*, c’est-à-dire qu’elle a promis de s’améliorer à l’avenir. Pas un employé de la banque n’a été condamné ou incarcéré. Jack Blum, expert en criminalité financière en col blanc et en évasion fiscale internationale, a fait la déclaration suivante, concernant cet accord de 2012 : “Dès le lendemain, HSBC a recommencé à faire la même chose”. HSBC faisait passer les profits avant la légalité, et le gouvernement n’a rien fait pour l’en empêcher. Et voici un fait intéressant : HSBC a également versé entre 500 000 dollars et un million de dollars à la Fondation Clinton en 2014. Ladite fondation a accepté cette somme sans scrupules, bien que l’on ait découvert en 2012 qu’HSBC violait les sanctions américaines. * accord passé avec les autorités américaines selon lequel une société objet d’une enquête pour délinquance économique accepte de s’acquitter de sanctions financières Nomi Prins »

367 Liste des sites et blogs consultés et/ou utilisés

Le choix de mettre en exergue certains sites et blogs est la simple traduction d'une pratique, celle de l'auteur, qui s'attache à trouver des informations pertinentes en dépit d'obédiences idéologiques différentes voire opposées, affichées ou non. Car, en effet, le Net offre une palette plurielle, contradictoire, et donc d'essence démocratique, d'idées, d'analyses, de propositions aussi qui ouvrent sur une liberté de réflexion qui, on l'a dit, est dans les faits proscrite par la « grande presse » décrite dans les pages qui précèdent. Les idées extrémistes, violentes et/ou racistes n'ont évidemment pas leur place ici. Les analyses rationnelles, qu'elles rendent compte lucidement de faits politiques, économiques sociaux, voire religieux peuvent par contre figurer dans cette liste non exhaustive, mais indicative pour ceux qui n'ont pas ou peu la pratique du Net.

Sites et blogs utilisés pour la rédaction de cet essai : www.acrimed.org, www.arretsurimages.net http://www.article11.info/, http://www.anti-k.org, [email protected]

, http://brunobertez.com/author/brunobertezautresmonde s/ www.causeur.fr www.comite-valmy.org l-arene-nue.blogspot.com, www.liberation.fr melenchon.fr lemonde.fr www.monde-diplomatique.fr, www.legrandsoir.info, les-crises.fr, https://lilianeheldkhawam.com www.ojim.fr,

368 https://www.mediapart.fr,

Mondialisation.ca, omnibusactu.wordpress.com www.pauljorion.com pucciarelli.fr russeurope.hypotheses.org, blog de Jacques Sapir

Russia Today, https://www.rt.com

( https://blogs.mediapart.fr/annie-lacroix-riz/blog ) www.francoisasselineau.fr, https://www.upr.fr

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