Histoire Du Velay Pendant La Guerre De Cent Ans. Les Grandes
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Les Grandes Compagnies en Velay 1358 - 1392 PUBLICATIONS DE LA SOCIÉTÉ DES ÉTUDES LOCALES N° 8 Section de la Haute-Loire JACQUES MONICAT Archiviste aux Archives Nationales HISTOIRE DU VELAY PENDANT LA GUERRE DE CENT ANS Les grandes Compagnies "r- 1 I en Velau .7 1358 - 1392 SECONDE ÉDITION AVEC PIÈCES JUSTIFICATIVES ET UNE CARTE HORS TEXTE PARIS LIBRAIRIE ANCIENNE HONORÉ CHAMPION ÉDOUARD CHAMPION, ÉDITEUR 5, QUAI MALAQUAIS VIe, 1 928 Tpu? droits réservés AVANT - PROPOS i l'histoire militaire de la guerre de Cent ans est écrite S dans ses grandes lignes, nombre d'opérations secondaires demeurent encore ignorées. Le Velay, qui ne vit aucune bataille célèbre, que les armées anglaises semblaient même avoir évité, posait un problème inté- ressant à résoudre. On savait par les beaux travaux de Dom Vaissete, de Siméon Luce, de Denifle, de Delachenal et de M. Coville que Robert Knolles et les Compagnies avaient traversé le Velay de 1359 à 1365. Toutefois on manquait de détails sur ces passages de routiers. D'autre part les faits militaires postérieurs à 1365 étaient en grande partie inconnus. Les historiens du Velay, Arnaud, Mandet, Truchard du Molin se sont bornés à reproduire Froissart et Dom Vaissete, et les érudits locaux contemporains délaissent en général cette attachante période. Encore moins étudiée que l'histoire militaire est celle des conséquences de la guerre de Cent ans. Cependant à une époque où chaque pays a encore son orga- nisation et sa vie propre, il nous paraît impossible de séparer les faits militaires de l'étude des institutions. Les uns et les autres sont objets de réactions réciproques. Un orage qui s'abat sur le roc ou sur un sol mouvant est loin de produire les mêmes effets. Ce n'est qu'après avoir reconstitué dans chaque province les événements militaires dont elle fui témoin et déterminé leur influence sur ses institutions et sa vie qu'il sera possible de faire un tableau complet de la France pendant la guerre de Cent ans. Pour suivre ce programme dans le cadre du Velay, nous donnons tout d'abord un aperçu général du pays à la veille de l'invasion. Aperçu forcément très sommaire car nous serons amenés, en étudiant les répercussions de la guerre, à revenir avec détails sur ces notions préliminaires. Puis, pour plus de clarté, dans une première partie, nous retraçons uniquement les faits militaires dont le Velay fut le théâtre pendant la seconde moitié du XIVe siècle, Nous montrons • que ce pays subit l'invasion étrangère de 1358 à 1392. Le récit de ces événements qui se réduisent à des exploits de routiers, malgré tous nos efforts, manque parfois de cohésion. C'est en effet, le plus souvent à l'aide de brèves mentions relevées dans un compte, un inventaire, des lettres de rémission, un arrêt du Parlement, et signalant d'une façon indirecte la présence des ennemis sans indication des circonstances qui ont précédé ou suivi, qu'il nous a fallu reconstituer le passage des Compagnies en Velay. Les faits d'origine extérieure étant connus, dans une seconde partie, nous étudions, pour la même période, le pays où ils se sont déroulés en notant leurs répercussions au triple point de vue politique, social et économique. Enfin, dans notre conclusion nous nous efforçons de condenser les résultats de notre étude. 4 Aux Archives Nationales, les registres du Trésor des Chartes et du Parlement criminel, que nous avons dépouillés un à un pour la période qui s'étend de 1358 à 1392, les diverses collec- tions du département des manuscrits de la Bibliothèque Nationale et notamment la collection Doat, les archives départementales de l'Hérault, où nous avons consulté une copie des registres de la sénéchaussée de Nîmes et de Beaucaire exécutée au XVIIIe siècle, les archives départementales de la Haute-Loire et celles de l'Hôtel- Dieu du Puy nous ont fourni la plus grande partie de notre documentation. L'incendie qui a détruit au XVIIe siècle les archives munici-- pales du Puy nous a privé d'une foule de pièces connues seule- ment par d'anciens inventaires. Nous sommes aussi très redevables à des recueils de documents encore inexploités comme les preuves de L'Histoire de Nîmes de Ménard, les preuves de la nouvelle édition de L'Histoire générale de Languedoc, les Preuves de la Maison de Polignac, le Spicile- gium Brivatense. INTRODUCTION ITUÉ entre les monts du Vivarais à l'Est et la Margeride à s l'Ouest, arrosé par deux grands cours d'eau, la Loire et l'Allier, que sépare la chaîne montagneuse qui porte son nom, le Velay affecte la forme d'un hexagone presque régulier Nous connaissons d'une façon précise ses limites qui, jusqu'à la Révolution, furent celles du diocèse du Puy. Il est borné au Nord, du côté du Forez, de Montarclier au confluent de la Loire et de la Semène, par le chaînon de Saint-Bonnet le-Château, et les contreforts du mont Pilat jusqu'à Saint-Sau- veur-en-Rue ; à l'Est et au Sud-Est, du côté du Vivarais, par la chaîne des Boutières, la rivière du Lignon et les plateaux du Mézenc, d'Arlempdes à Goudet, par la Loire, et jusqu'à Rauret et Jonchères par la ligne $e division des eaux entre les bassins de la Loire et de l'Allier ; au Sud-Duest du côté du Gévaudan, par le cours de l'Allier, depuis Jonchères jusqu'à Saint-Bérain ; à l'Ouest, du côté de l'Auvergne, par le chaînon de la Durande, les montagnes de Fix et d'Allègre, le ruisseau de l'Arzon et la chaîne principale du Forez, jusqu'à Mon- tarcher 2. Placé sur le rebord oriental du Massif Central, le Velay 1. Congrès scientifiques de France, 22" session tenue au Puy en sep- . tembre 1855. Le Puy, 1855-1856, 2 volumes in-octavo. T. i, notes de MM. les abbés CORNUT et VOISIN sur La géographie historique du Velay, pp. 604-625. 2. Les limites de l'ancien Velay sont données avec exactitude par la carte du diocèse du Puy gravée en 1778 par ordre des Etats de Languedoc. Bibliothèque nationale. Gec 753, feuille 6, s'ouvre à la fois sur Toulouse et la vallée du Rhône. C'est avant tout une région de passage unissant la France du Nord à celle du Midi. Clef des routes qui, au travers du Vivarais, dévalent des sommets au couloir du Rhône, par le Forez, le val de Loire et le Gier, le Velay converge vers Lyon. De cet antagonisme entre la montagne et le fleuve provient l'extrême diversité qui est la caractéristique essentielle du pays. Jamais territoire d'une aussi faible surface (250.000 hec- tares) n'offrit d'aspects plus variés. Des solitudes désertiques du Mézenc on passe sans interruption à la région du Mégal, où d'immenses rochers en forme d'aiguilles semblent naître sous les pas. Ce sont les cratères rougeâtres, les laves aux lignes fantastiques et les lacs bleus des environs du Puy ; se déroulent ensuite les froides et tristes planèzes des monts du Velay que prolongent les forêts et les prairies des plateaux de Craponne et de Montfaucon. A part la vallée de la Loire et les plateaux de Cayres et de Tence, le sol du Velay est trop tourmenté pour être fertile. Le seigle et l'avoine sont les cultures dominantes du pays qui produit de la vigne et peu de froment. Au xive siècle, la seule ville importante était la capitale. Le Puy devait sa fortune à son rôle politique, au pèlerinage célèbre dont il était le siège, à sa situation sur la route du Midi et de l'Empire. Dans les campagnes, certaines agglomérations groupées autour d'un château, comme Yssingeaux, Espaly, Bouzols, ou d'une abbaye, comme Le Monastier, portaient le nom de « villes closes », mais n'étaient que des centres agricoles. Ce pays était habité par une population de race celtique, et méridionale d'esprit et d'allure. La société, le clergé mis à part, comprenait les nobles, grands propriétaires fonciers qui, au début du xive siècle, se comportaient dans leurs domaines en véritables souverains. Au Puy, une riche bourgeoisie gran- dissait et prenait conscience de sa force. La condition des gens de métier était modeste. Plus pauvres encore devaient être les cultivateurs, serfs, pour la plupart, La situation géographique du Velay ne fut pas sans influence sur son organisation politique. Bien qu'au point de vue administratif il fît partie du Languedoc, il tenait par cer- tains côtés plus à la France du Nord qu'à celle du Midi. C'est ainsi que la monarchie capétienne y pénétra beaucoup plus tôt que dans les autres provinces du Sud. Gouverné d'abord par des comtes particuliers, le Velavr, au ixe siècle, fut réuni au comté d'Auvergne, puis attribué vers 950 à Guillaume Tête d'Etoupe, comte de Poitiers. Mais trente ans plus tard le comte d'Aquitaine n'eut plus que des droits de suzeraineté sur le Velay où les comtes de Clermont usurpèrent son pouvoir. En 1162, à la prière de l'évêque du Puy, persécuté par la Maison de Clermont, la royauté qui, depuis le xe siècle, n'avait cessé d'enrichir et de protéger l'église vellave, intervint. Guil- laume, comte du Puy, fut vaincu et fait prisonnier par Louis VII. A sa mort, arrivée en 1169, tout le comté de Velay passa entre les mains de l'évêque '. Ce prélat étendait sa domination non seu- lement en Velay, mais encore sur une partie du Vivarais, de l'Auvergne, du Gévaudan et du Forez. La ville du Puy et les châteaux d'Espaly, de Fix, de Jonchères, d'Arzon, de Mons près Craponne, de Monistrol, d'Yssingeaux, de Lapte, de Beau- jeu, de Charbonnier, de Cayres, de Chapteuil, de Mercœur, de- Mézères, de Retournac, lui appartenaient en propre 2.