Humanisme Et Cinema
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SEMAINE DE LA PENSÉE MARXISTE HUMANISME ET CINEMA Débat du 11 décembre 1961 sous la présidence de Georges SADOUL avec la participation de Louis DAQUIN Jean ROUCH Serge YOUTKEVITCH Armand GATTI Claude CHABROL Jean-Paul LE CHANOIS René CLAIR Grégori TCHOUKRAI Centre d’Etudes et de Recherches Marxistes, 64, boulevard A.-Blànqui, Paris (130- GOBelins 2542. rJl’ ' ' * t ','Jii^ :JÆ^ ■'■■yjî ■ '■(*. "^1 ■ ‘•'ûN ^ ^ 1 La semaine de la pensée marxiste Organisé par le Centra d'Etudes et de Recherches Marxistes, avec le concours de l’Union des étudiants communistes, de la Fédération de Paris du Parti communiste français et de l’Université Nouvelle, les débats de la Semaine de la Pensée marxiste ont touché près de 20.000 personnes attirés à la Mutualité par le caractère original de cette confrontation entre marxistes et non- marxistes sur le thème général : HUMANISME ET DIALECTIQUE La soirée du cinéma, sur le thème Huma nisme et Cinéma, était placée sous la ' pré sidence de Georges Sadoul. Elle fut prolon gée dans Clarté, le journal de l’Union des étudiants communistes, par un dialogue Tchotikraï-Chabrol. Dans ce tiré à part de la Nouvelle Critique vous trouverez le compte rendu intégral de la soirée. Pendant la Semaine de la Pensée marxiste (7-14 décembre 1961), se sont tenus six grands débats publics à la Mutualité, à Paris, et 35 séminaires et groupes d’études plus spécialisés. Le Centre d’Etudes et de Recherches Marxistes publie l’ensemble des travaux de la Semaine. Le lecteur trouvera à la fin de ce tiré à part, la liste des diverses publications prévues. Tiré à part de La N O uv elle Critique, N° 133 Demande de participation aux travaux du C.E.R.M. Je désire adhérer au C.E.R.M. et participer aux travaux de la section de NOM ..... ........... PRENOM ........... ADRESSE ......... PROFESSION ..... Indiquer si possible vos travaux en cours (thèses, essais ou études déjà publiés) ............................................. ..................... Pour les étudiants, indiquer la discipline Toute adhésion est soumise à l’agrément de la section intéressée et du secrétariat. LA COTISATION yYNNUELLE ................................. 20 NF représente l’adhésion à une seule section de travail du C.E.R.M. et donne droit à la libre entrée aux Soirées Scientifiques. POUR CHAQUE SECTION SUPPLEMENTAIRE .... 10 NF COTISATION POUR LES ETUDIANTS ................... 5 NF SECTIONS : Physique, mathématiques, chimie-biologie, biolo gie, sciences de la terre, géographie, histoire, études asiatiques et africaines, médecine, sciences juridiques, arts et littératures, lin guistique, études ibero-américaines, langue et civilisation russes, études germaniques, sciences économiques, psychologie, sociologie, philosophie, pédagogie. A retourner au Secrétariat du C.E.R.M., 64, boulevard Auguste- Blanqui, Paris (13'). - Tél. : GOB. 25A2 - C.C.P. Paris 5.549.74. • ...»>•. '' ■'.'* î-.' ' ■'''■'^î.»v;. •• • • -J.- Semaine de la pensée marxiste Humanisme et cinéma Chacun sait que les adages, surtout latins, sont chaque jour un peu plus dépassés. Ainsi le progrès technique (magnéto phones, sténotype) a voulu que les mots faits pour voler soient appelés à demeurer. C’est pourquoi nous sommes heureux de pouvoir publier, après enregistrement, l’intégralité du débat qui a réuni sur ce thème, sous la présidence de Georges Sadoul : Serge Youtkevitch, Gregory Tchoukhraï, Claude Chabrol, René Clair, Louis Daquin, Armand Gatti, Jean-Paul Le Chanois et Jean Rouch. Il n’est pas question de présenter ce débat, ce dont s’est précisément chargé Georges Sadoul, mais de formuler quelques remarques. 1°). — Georges Sadoul s’est montré perspicace en concluant qu’il serait bon de lire et relire ces échanges lorsqu’ils seraient publiés. Cette lecture apparaît même plus féconde que la simple audition. C’est naturel. Il s’agit de propos formulés librement par des praticiens et des créateurs réfléchissant sans souci ora toire, sur des problèmes qui sont leur pain quotidien. La place de l’homme dans leurs films, ils en vivent, ils en crèvent un peu chaque jour. Ils s’usent à dire ou à ne pas pouvoir dire ce qu’ils ont envie d’exprimer. Et l’on notera sur ce point la discordance entre le difficile examen de conscience des Français et la séré nité des Soviétiques. Mais qu’il soit succinct ou développé, impro visé ou élaboré, le propos sonne et touche juste parce qu’il cor respond à une réflexion vécue, à une quête de l’essentiel qui, sans didactisme, nous apporte, nous apprend beaucoup. 2°). — Ce débat vient à point. Le cinématographe, beau coup disent encore qu’ils ne savent pas ce que c’est, notamment si c’est un langage, ce qui, par ignorance ou coquetterie, débou che sur le vieux 7népris pour les sous-produits littéraires et dra matiques projetés au peuple dans des baraques plus ou moins foraines. En réalité, le cinéma, c’est-à-dire ceux qui le font et ceux qui le voient, mûrit, devient adulte par suite du rajeunis sement des générations de créateurs et de public, c’est-à-dire conscient et responsable, et l’un des problèmes est justement de savoir comment sont assumées ces responsabilités. Il doit s’affirmer en tant gu'art, art spécifique sans référence, sans rapport de forces avec les autres arts. Mais art de masse, donc enseigne lumineuse d'une culture populaire, creuset où se for gent le rêve, la réflexion, la communication de millions d’êtres. Ces considérations ne sont pas abstraites. Le meilleur roman g de la saison se situe tout entier dans le sillage du Potemkinei. .2 e Et, ce soir de décembre 1961, cinq mille jeunes environ étaient O venus remplir à craquer les salles de la Mutualité pour entendre sSs St! parler d'Humanisme et Cinéma. Ce public est une réponse viru lente à tous ceux qui dénaturent les problèmes de la jeunesse. Il est la conscience du cinéma. 3°). — Ce débat n’est pas un débat. La question est trop générale et trop facile. Imagine-t-on quelqu’un venu déclarer que l’homme n’avait rien à faire dans ses films ? Les micros se seraient bouchés les oreilles. Et c’est très bien ainsi. Il s’agit d’une introduction à d’autres débats, de la prise d’un contact qu’il convient de garder et d’amplifier, d’une série de déclara tions des droits de l’homme au cinématographe. Ces échanges illustrent encore à quel point les discussions, ou les virtualités de discussion, naissent bien souvent à partir de faux problèmes ou de malentendus gui pourraient être aisé ment dissipés. Exemples : lorsque Gatti proclame « les chefs d’œuvre du passé, je m’en fous »; lorsque Daquin se laisse oppo ser par Cinéma 61 à Truffaut sur le plan des rapports entre le créateur et le public; lorsque Tchoukhrat déclare que la diffé rence entre la jeune génération des réalisateurs français et russes réside dans leur prise de position à l’égard des anciens. Alors au contraire que l’on peut reprocher à la génération fran çaise un culte du langage, de l’expression spécifique issue de la culture des chefs-d’œuvre, au détriment de la vigilance morale et sociale, c’est-à-dire précisément du réalisme : trop pour le cinéma et pas assez pour l’homme. " Voici justement le thème possible d’un autre débat : « Humanisme et nouvelle vague ». Tout le monde étatit d’ac cord sur les fins — l’humanisme — et sur les moyens — une expression spécifique — il s’agirait d’élucider les contradictions manifestes entre le jeune cinéma et la réalité. L’analyse dialec tique, l’explication par les structures, les contradictions et les servitudes de la société même où naît et grandit cette vague sans mer, y trouveraient leur compte, avec leur conclusion néces sairement léniniste et révolutionnaire. A la limite, on poserait que la nouvelle vague est réaliste par son irréalisme. Et chan ger de cinéma, ce n’est pas très facile — Le Chanois, Daquin le savent bien, qui ne tournent pas ce qu’ils veulent — si l’on ne change pas d’abord les structures. 1. Allusion à La Place Rouge, de Pierre Courtade, Ed. Julliard. 4°). — A noire tour de n’avoir pas peur des bons sentiments, de promouvoir l'esthétique de V ajfirmation dont parle YoutkevitclP, d’assumer franchement une vigilance de boy-scout. Les cinéastes français présents ont formulé des déclarations gui les engagent. Il nous appartient d'en prendre acte; de veiller sur elles comme un mari jaloux, un espion de cœur; de traquer l’étrange alchimie d'où naît l’œuvre et de temps à autre le chef-d’œuvre : un équilibre personnel entre un humanisme qui n’avale pas sa langue et une langue universelle qui « n’arnaque pas » le public, entre le réalisme — souvent malgré soi (Citizen Kane), plus vrai que nature —, la vision intime et le message implicite. Jean Marc Aucuy. GEORGES SADOUL. — Je voudrais rappeler quelques idées générales qui vous paraîtront peut-être des vérités premières. Mon maître Léon Moussinac — et je suis très heureux qu’il soit ici ce soir, lui qui fui à la fois le fondateur, avec Delluc, des cri tiques indépendants en France et dans le monde, et l’un des premiers théoriciens du cinéma — écrivait en 1945 une phrase que je ne me lasse pas de rappeler, et que je paraphrase en disant que nous entrevoyons aujourd’hui le temps où le cinéma pandendra au sommet de sa découverte, lorsque les hommes auront atteint le sommet de la liberté, et que le cinéma dans sa forme accomplie dira l’unité humaine, il est créé pour cela. Oui, je crois que nous allons vers un temps que nous entrevoyons, un temps qui sera celui non seulement d’un cinéma pour tous, mais aussi d’un cinéma fait par tous.