SOMMAIRE CAMEROUN

HISTORIQUE...... 3 1) Le Cameroun indépendant ...... 3 2) Les débuts de la présidence de ...... 4 3) Les débuts du multipartisme ...... 5 4) 1997, double échéance électorale et troubles politiques ...... 6 5) L’instauration du Commandement Opérationnel...... 6 6) La crise anglophone ...... 7 7) Un changement de millénaire dans la continuité ...... 8 FICHE PAYS ...... 12 I. Situation générale ...... 12 II. Economie...... 13 III. Population ...... 13 1) Démographie...... 14 2) Groupes ethniques...... 14 3) Femmes...... 15 4) Enfants ...... 16 IV. Langue ...... 17 V. Education ...... 17 1) Généralités ...... 17 2) Structure...... 18 VI. Religion ...... 18 VII. Médias ...... 19 1) Publications...... 21 3) Radio et télévision ...... 21 VIII. Structure politique...... 22 IX. Elections ...... 23 1) Système électoral ...... 23 2) Résultats des élections ...... 23 X. Partis politiques...... 25 XI. Syndicats...... 26 XII. Associations et groupes de défense des droits de l’homme ...... 27 XIII. Justice...... 28 1) Généralités ...... 28 2) Structure...... 28 3) Peine de mort ...... 29 4) Homosexualité ...... 29 XIV. Service militaire...... 30 XV. Forces de sécurité...... 30 XVI. Agents de persécution...... 30 XVII. Détention et torture...... 31 1) Législation et pratique...... 31 2) Conditions de détention ...... 31

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3) Torture et traitements cruels, inhumains ou dégradants...... 32 XVIII. Groupes à risques ...... 33 XIX. Réfugiés ...... 34 1) Accueil dans le pays ...... 34 2) A l’extérieur du pays...... 34 XX. Documents d’identité et déplacements ...... 34 CHRONOLOGIE...... 36 BIBLIOGRAPHIE ...... 54 1) Ouvrages...... 54 2) Revues...... 54 3) Rapports...... 54 4) Etudes ...... 54 5) Presse ...... 54 6) Sites Internet ...... 55

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Historique

En 1472, alors que les caravelles du navigateur portugais Fernando Po remontent l’estuaire du fleuve Wouri, les marins sont tellement étonnés d’y voir nager des milliers de crevettes qu’ils baptisent le fleuve « Rio dos Camarões », rivière des crevettes. Camarões a subi au cours des siècles plusieurs transformations pour devenir aujourd’hui Cameroun.

A partir du littoral atlantique reconnu par les Portugais, la pénétration européenne a d’abord été le fait des commerçants, missionnaires et explorateurs anglais au cours du XIXème siècle. Une fois son protectorat reconnu en 1884, l’Allemagne établit peu à peu son autorité sur ce territoire et y investit largement. Les Allemands découpent de façon arbitraire une sorte de vaste triangle dont la pointe nord atteint le lac Tchad en zone sahélienne, et la pointe sud-est les rives de la Sangha en pleine forêt équatoriale.

Etat charnière entre l’Afrique occidentale et l’Afrique centrale, le Cameroun est souvent présenté comme une " Afrique en miniature " de par son extrême variété écologique, climatique, ethnique, religieuse et linguistique. Le pays occupe une position particulière sur la scène africaine : colonie allemande depuis 1884, le Cameroun est démantelé en 1918 et confié à la France (quatre cinquième du territoire) et à la Grande-Bretagne (deux bandes de territoire le long de la frontière avec le Nigéria. Héritier de ce double passé colonial, unique en Afrique, le Cameroun compte dans les provinces de l’ouest une importante minorité anglophone dans un Etat majoritairement francophone.

Le Cameroun fut aussi le seul pays de l’empire colonial français d’Afrique « noire » à accéder à l’indépendance dans la violence. Une guérilla anti-coloniale est orchestrée par l’UPC (Union des Populations du Cameroun), parti créé à Douala en 1948 par Ruben Um Nyobe. En 1955, le parti est officiellement dissous pour agitation subversive, ce qui l’incite à lancer une insurrection armée dans l’Ouest du Cameroun français.

1) Le Cameroun indépendant

Le Cameroun oriental accède à l’indépendance le 1er janvier 1960. , un Peulh de Garoua, élevé dans la religion musulmane, est nommé président du nouvel Etat (il occupait déjà ce poste depuis 1958 dans le cadre de l’autonomie du Cameroun accordé par la puissance coloniale).

Les premières élections législatives ont lieu en avril 1960 et sont remportés par l’Union Camerounaise, parti du président Ahidjo. En mai, Ahidjo est élu président de la République par les membres de la nouvelle assemblée.

En 1961, après un référendum organisé sous l’égide de l’ONU, le sud du territoire britannique (actuellement les provinces du Nord-Ouest et du Sud-Ouest) opte pour le rattachement au Cameroun tandis que sa partie nord était intégrée au Nigéria. Le Cameroun devient un Etat fédéral. Le Cameroun Occidental (ex-Sud Cameroun britannique) conserve son ancienne assemblée ainsi que son assemblée de chefs traditionnels. Le Cameroun Oriental possède

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également sa propre assemblée. Dans chacun des deux Etats, le système judiciaire reste inchangé : la procédure d’origine anglaise reste donc applicable au Cameroun Occidental, celle d’origine française continue à régir le Cameroun Oriental.

Depuis son arrivée au pouvoir, le Président Ahidjo s’est attaché à réunir tous les partis politiques présents sur le territoire camerounais. La création le 1er septembre 1966 de l’Union Nationale Camerounaise (UNC) marque « de facto » la naissance du système de parti unique.

Le 20 mai 1972, par voix référendaire, les deux Cameroun sont réunifiés sous le nom de " République Unie du Cameroun ". Ahmadou Ahidjo assume la présidence de la nouvelle République fédérale tandis que John Foncha en devient le vice-président.

En avril 1975, le Président Ahidjo est réélu à la tête de l’Etat. Il nomme Paul Biya comme Premier Ministre. L’UNC remporte la majorité des sièges à l’Assemblée lors des élections présidentielles de mai 1978, ce malgré l’insatisfaction des Camerounais face au parti unique et à la faible représentativité des politiciens anglophones au sein du gouvernement.

Le 4 novembre 1982, Ahmadou Ahidjo démissionne, pour raisons de santé, de ses fonctions de président de la République, après avoir dirigé d’une main de fer le Cameroun pendant un quart de siècle.

Son Premier ministre, Paul Biya, le remplace, en vertu de la Constitution.

2) Les débuts de la présidence de Paul Biya

Le nouveau Président est un Béti-bulu de la Province du Sud. Il est catholique (la rumeur veut qu’il soit également membre important de l’organisation occulte de la Rose-Croix). Paul Biya nomme Premier ministre.

En août 1983, le Président Biya annonce qu’une tentative de coup d’Etat a été déjouée. Deux conseillers de l’ancien président Ahidjo sont accusés d’avoir participé au putsch et sont arrêtés. Le Premier ministre Maigari et le Ministre de la Défense sont démis de leurs fonctions. Quelques jours plus tard Ahmadou Ahidjo renonce à la présidence de l’UNC et quitte le Cameroun pour le Sénégal.

Biya est alors élu président de l’UNC. Il est reconduit dans ses fonctions de chef de l’Etat en janvier 1984, date à laquelle il décide de supprimer le poste de Premier Ministre.

Le 28 février 1984, Ahmadou Ahidjo est condamné par contumace dans le cadre de la tentative de coup d’Etat d’août 1983.

Le 6 avril, le gouvernement fait de nouveau face à une tentative de coup d’Etat, orchestrée cette fois par des membres de la Garde Républicaine, menés par le colonel Saleh Ibrahim. La rébellion est matée par les forces loyalistes après 3 jours de combats intenses. 51 mutins seront condamnés à mort. Suite à cette tentative de putsch, plusieurs membres du gouvernement seront démis de leurs fonctions et 12 membres du bureau politique du comité exécutif de l’UNC seront évincés.

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En mars 1985, l’UNC est rebaptisé Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC, ou CPDM en anglais).

En avril 1988, Paul Biya, seul candidat à sa propre succession est réélu avec 98,75% des suffrages. Le RPDC remporte la majorité des sièges à l’Assemblée.

3) Les débuts du multipartisme

C’est à la fin des années 80, qu’apparaît le Social Democratic Front (SDF), première formation d’opposition dirigée par l’anglophone . Le SDF a pris une part active dans le combat pour le multipartisme. Une manifestation est d’ailleurs organisée à Bamenda, le 26 mai 1990. Le rassemblement dégénère et la police ouvre le feu, faisant 6 morts. Au cours des mois suivants, tout l’Ouest anglophone est la proie de troubles divers, occasionnant prés de 300 morts.

Le processus de démocratisation tant demandé par la population est initié lors de la conférence franco-africaine de La Baule en 1990 et conduit à l’adoption d’une loi sur le multipartisme et de lois " libérales " (liberté d’association, d’expression, etc.) en décembre 1990.

Au cours de l’été 1991, le refus du président Biya d’organiser une conférence nationale de préparation des élections à venir provoque une grève générale dans tout le pays.

Les premières élections législatives pluralistes ont lieu le 1er mars 1992. Cependant de nombreux partis, dont le SDF, refusent d’y participer, estimant que le scrutin ne sera pas équitable. Le RDPC remporte 88 sièges, l’UNDP 68, l’UPC 18 et le MDR 6. Le RDPC doit faire alliance avec le MDR pour obtenir la majorité absolue à l’Assemblé nationale. Les élections sont contestées par 32 partis.

Les premières élections présidentielles sont organisées le 16 octobre 1992. Le scrutin uninominal majoritaire à un tour est adopté. Le Président Biya est réélu avec 39,9% des voix après un scrutin qualifié d’ « hautement défaillant » par le Département d’Etat américain. John Fru Ndi, leader du SDF obtient officiellement 35,9% des voix mais conteste ces résultats. L’affaire est portée devant la Cour Suprême qui confirme la victoire de Paul Biya, provoquant de nombreuses manifestations dans tout le pays et particulièrement dans le Nord-Ouest, bastion du SDF. John Fru Ndi est assigné à résidence.

En 1993, une alliance informelle de partis d’opposition organise une campagne de manifestations et demande qu’une nouvelle élection présidentielle soit organisée. Bien que cette alliance soit accusée par le pouvoir d’inciter à la rébellion, le gouvernement annonce l’instauration d’un débat sur la réforme constitutionnelle. Des projets d’amendements constitutionnels sont annoncés en mai 1993 mais le débat sur la réforme constitutionnelle est finalement suspendu en novembre de la même année. Au cours de la seconde moitié de l’année 1993, l’opposition organise de nombreuses grèves et manifestations. Les autorités répondent par l’arrestation de nombreux militants. En décembre, les fonctionnaires lancent une grève générale suite à l’annonce par le gouvernement de réductions importantes des salaires.

Le 18 janvier 1996, le Président promulgue des amendements à la Constitution, révisant notamment la limitation du mandat présidentiel, jusque là de 5 ans, renouvelable sans limite à

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7 ans, renouvelable une fois. La nouvelle Constitution introduit un système très centralisé reposant sur l’autorité du Président. Le chef de l’Etat et son parti (dominé par l’ethnie de Paul Biya, les Beti-Bulu) gardent le contrôle sur tous les rouages du pouvoir.

Les premières élections municipales ont lieu le 21 janvier 1996. Le scrutin est jugé libre et équitable par les observateurs internationaux bien que le SDF n’ait pas pu présenter de candidat dans toutes les municipalités pour des raisons procédurières. L’opposition remporte 104 municipalités sur 336 mais le gouvernement s’assure du contrôle des conseils municipaux en nommant par décrets des représentants du gouvernement à la tête de l’exécutif local dans 20 grandes villes, notamment dans les 6 principales communes remportées par le SDF. Pour protester contre ces nominations, le SDF et l’UNDP lancent une opération " villes mortes " largement suivie en province mais en partie ignorée à Douala et Yaoundé. 40 membres du SDF sont arrêtés pour avoir manifesté contre ces décrets.

4) 1997, double échéance électorale et troubles politiques

Au début de l’année, John Fru Ndi et Bello Bouba Maïgari, les deux principaux leaders de l’opposition, annoncent leur alliance contre le président Paul Biya et son parti pour les élections législatives et présidentielles de 1997.

A l’occasion des élections législatives, le gouvernement a refusé à nouveau la création d’une commission électorale permanente indépendante à laquelle appellent les partis politiques d’opposition, les évêques du Cameroun et les observateurs nationaux et internationaux

Le 17 mai, les élections législatives se déroulent dans le calme mais les observateurs indépendants du Commonwealth et de la Francophonie dénoncent des fraudes. La Cour suprême enregistre de nombreux recours dans les jours qui suivent. L’opposition réclame l’annulation du scrutin. Le 24 mai, les résultats des élections donnent le RDPC de Paul Biya très largement majoritaire avec 116 des 180 sièges à pourvoir.

Le 4 juin, la Cour suprême rejette la demande d’annulation générale des élections législatives déposées par quatre formations d’opposition. L’annulation n’est décidée que dans trois circonscriptions d’abord acquises au RDPC, correspondant à 7 sièges.Le 6 juin, Le RDPC disposera de 109 des 180 sièges de l’Assemblée. Après les élections partielles du 3 août, le RDPC obtient la majorité absolue avec 116 sièges.

Le 12 octobre 1997, les Camerounais vont aux urnes élire leur président. Paul Biya est le seul candidat. Le SDF, l’UNDP, l’UDC et l’Union du Peuple Africain ont décidé de boycotter cette élection pour protester contre l’absence d’une commission électorale indépendante. Paul Biya est réélu avec 92,6% des voix.

5) L’instauration du Commandement Opérationnel

Dans la province Orientale et principalement à Douala , face à une vague de violences sans précédent le président Paul Biya met sur pied le 20 février 2000 un Commandement Opérationnel (CO).Cette unité est composée d’éléments de la gendarmerie, de l’armée de l’air et de terre et de la police. Dès le mois de juin 2000, l’archevêque de Douala, Mgr. Tumi désigne le Commandement Opérationnel comme étant responsable de la disparition de 500 personnes. Les membres du CO continueront à commettre des exactions jusqu’en 2001. Le 23 janvier 2001, 9 jeunes sont

CRR – Centre d’information géopolitique 6 31/05/2006 interpellés à leur domicile à Douala, dans le quartier de Bépanda, pour le vol d’une bouteille de gaz. L’affaire est dénoncée par de nombreuses ONG. Un Comité pour les « neuf disparus de Bépanda » (C9) se constitue, il demande aux autorités que le lumière soit faite sur ces disparitions et que les coupables soient punis. Leurs manifestations sont violemment réprimées.

Le 8 mai, 8 militaires sont inculpés dans le cadre de l’enquête sur les 9 disparus de Bépanda. Le 18 octobre, le procès est annulé pour vice de procédure. L’affaire sera ré-ouverte en avril 2002 et renvoyée devant un tribunal militaire. Le 9 juillet 2002, le tribunal militaire de Yaoundé condamne 2 gendarmes pour leur implication dans la disparition des « 9 de Bépanda ». Les 6 autres gendarmes impliqués dans cette affaire sont acquittés.

Dans ce climat d’impunité, les services de sécurité continuent à recourir abusivement à l’usage de la force1. A la mi-mars 2002, des centaines de personnes sont arrêtées et détenues au cours de l’Opération Harmattan, menée par la police dans le cadre de la lutte contre le crime. Le Bureau national de la sécurité rapporte que 2792 personnes ont été détenues pour interrogatoire et que des stupéfiants ont été saisis. Les autorités annoncent également que deux personnes ont été tuées dans des fusillades avec la police. Rafles policières soudaines, perquisitions de domiciles, vérifications de voitures et d’identité se succèdent. Certaines sources accusent la police d’arrestations arbitraires et d’humiliations.

Le 17 avril 2002, la section camerounaise de l’ONG « Nouveaux Droits de l’Homme » dénonce la disparition de 9 individus détenus à la brigade territoriale de gendarmerie de Bafoussam (280 Km à l’ouest de Yaoundé). Les neuf personnes, placées en garde à vue depuis le 14 mars, étaient accusées de « meurtre, vol aggravé et port d’arme ».

Les provinces du nord sont en proie à une situation d’insécurité généralisée, causée par les " coupeurs de route " (bandits de grands chemins responsables de centaines d’assassinats). La Brigade anti-gang de la gendarmerie chargée de rétablir l’ordre dans le nord du pats est particulièrement répressive ; ses agents auraient exécuté plusieurs centaines de personnes entre 1998 et 2000.

6) La crise anglophone

La population anglophone au Cameroun est estimée à 20 à 25% de la population soit 2 à 3 millions de personnes. Le premier parti anglophone à s’être constitué est le SDF, créé en 1980 dans la clandestinité. Il s’ouvre rapidement aux Bamilékés francophones mais continue de revendiquer son identité anglophone dans la modération. L’évolution « nationale » du SDF et sa « francophonisation » latente ainsi que la maladresse du pouvoir et ses méthodes autoritaires en ce qui concerne la question des provinces anglophones ont conduit certains militants à constituer une nouvelle structure plus radicale dans son opposition au régime francophone de Paul Biya.

Du 27 au 31 mars 1997, le Southern National Council (SCNC), mouvement indépendantiste créé en 1993, lance une série d’attaques armées contre les forces de l’ordre et des administrations dans la province du Nord-Ouest. Ces opérations font au moins 13 morts et 20 blessés de part et d’autres. Le 29 mars, un groupe armé non identifié s’attaque aux forces

1 Un jeune détenu âgé de 22 ans, Sylvestre Likeng Oum, décède au cours de sa garde à vue entre le 2 et le 5 novembre 2001 dans le commissariat de Sécurité Publique d’Edéa.

CRR – Centre d’information géopolitique 7 31/05/2006 de sécurité dans différentes localités de la province du Nord-Ouest (anglophone), faisant une dizaine de morts dont 3 gendarmes. L’opposition accuse le gouvernement d’être à l’origine de ces attaques, dans le but de " créer une situation de confusion " à la veille des élections législatives du mois de mai 1997. 300 personnes sont arrêtées.

Au mois d’avril 1999 s’ouvre le procès devant un tribunal militaire de 65 " anglophones " détenus depuis plus de deux ans à la suite des évènements de mars 1997. En octobre, le tribunal militaire rend son jugement : 3 militants sont condamnés à perpétuité, 34 autres inculpés se voient infliger des peines d’emprisonnement allant de 1 à 20 ans. Au moins 8 personnes sont mortes en détention des suites de mauvais traitements avant l’ouverture du procès.

Ce verdict n’affecte en rien l’activisme des militants du SCNC , lesquels proclament le 30 décembre 1999 à la radio d’Etat la naissance de la " République du Cameroun méridional " présidée par le magistrat Ebong Frederick Alobwede. Six leaders du SCNC sont immédiatement arrêtés pour être finalement relâchés sans jugement en mars 2001.

Le malaise anglophone perdure. Le SCNC a été interdit en mai 2001 suite à l’auto proclamation de la « République du Cameroun Méridional » mais ces militants sont toujours actifs. Le 1er octobre 2001, trois militants sécessionnistes sont tués et cinq autres blessés lors d’une manifestation, le jour du 40ème anniversaire de la réunification des Cameroun anglophone et francophone. Les deux vice-présidents du parti sécessionniste anglophone Southern Cameroon National Council (SCNC), sont arrêtés, dix-huit militants du Southern National Youth League (SCYL), l’organisation de jeunesse de ce parti sécessionniste, subissent le même sort. Au lendemain de cette manifestation la presse anglophone fait état de 4 morts, 15 blessés et 200 arrestations.

Le 28 septembre 2002, Albert Mukong, ancien directeur de Human Rights Defence Group et proche du SCNC est arrêté à Ayukaba (province du Sud-Ouest). Il est conduit à la gendarmerie de Mamfé, où il est resté détenu jusqu’à sa remise en liberté sous caution le 22 octobre. Il est accusé, de même que 7 membres du SCNC, de réunions illégales, troubles à l’ordre public, banditisme et sécession.

Le SDF, fait également les frais de la répression anti-anglophones. En janvier 2002, des militants du SDF, sont victimes d’agressions de la part de sympathisants du RDPC (Rassemblement démocratique du peuple camerounais), le parti au pouvoir. Le SDF se voit refuser des autorisations de meetings dans les provinces du Sud pour « menace de troubles à l’ordre public ».

7) Un changement de millénaire dans la continuité

Le Cameroun aborde le changement de millénaire dans un climat de tension.

Malgré une amorce de redressement économique, la moitié de la population continue de vivre en dessous du seuil de pauvreté, dans un pays considéré par les observateurs internationaux comme un des plus corrompu de la planète.

Sur la voie de la démocratisation, le Cameroun est encore loin de satisfaire à tous les critères d’un Etat de droit : dans un rapport de février 2000, les Nations Unies dénoncent l’utilisation de la torture et des mauvais traitements " d’une manière massive et systématique " dans les

CRR – Centre d’information géopolitique 8 31/05/2006 lieux de détention. Les exécutions extrajudiciaires sont fréquentes, en particulier dans le Nord. En outre, les conditions carcérales sont assimilables à des mauvais traitements et la mortalité y est très élevée.

Malgré la suppression de la censure en 1990 et l’existence d’une presse dynamique et critique, ainsi que la levée du monopole d’Etat sur l’audio-visuel en avril 2000, les entraves à la liberté de la presse exercées par les autorités se poursuivent2. En 2001, RSF a rapporté les cas de 2 journalistes incarcérés. Deux autres avaient été interpellés, deux agressés et un journaliste avait été menacé par des policiers. En 2002, un journaliste est incarcéré, quatre ont été interpellés, un autre agressé. En 2003, un journaliste a été incarcéré, un autre interpellé et deux journalistes ont été menacés, sans compter les diverses pressions et entraves qu’ont pu subir des journalistes et certains directeurs de publications.

En décembre 2000, suite à la pression exercée par les partis d’opposition, les autorités annoncent la création d’un Observatoire National des Elections (ONEL) chargé, entre autre, d’encadrer l’inscription des électeurs et le dépouillement des urnes. Le comité central de l’ONEL est composé de 11 membres désignés par le Président, lesquels nomment des représentants dans les provinces et districts du pays. Les partis d’opposition ainsi que les observateurs internationaux s’accordent à dénoncer le manque d’impartialité de l’ONEL qui est tout de même instauré en octobre 2001.

Les élections municipales de janvier 2002 sont ajournées pour des raisons d’organisation et ont finalement lieu le 30 juin, en même temps que les élections législatives. Le RPDC remporte 133 des 180 sièges à l’Assemblée Nationale et 286 mairies sur 336. Le SDF, qui a fait élire 21 députés, demande à ses conseillers municipaux fraîchement élus de ne pas siéger en signe de protestation contre les « fraudes massives orchestrées par le parti au pouvoir ». Le Nord-Ouest du pays, où le SDF avait remporté une quarantaine de communes, s’enflamme à l’annonce de cette décision. A la mi-juillet, après la signature d’un accord avec le gouvernement, John Fru Ndi met fin au boycottage pourramener le calme.

En 2003, l’activité politique des partis d’opposition et la répression menée par les autorités et les forces de sécurité s’accroissent à l’approche de l’élection présidentielle de 2004. La presse fait également les frais de ce climat préélectoral. Les journaux se déchaînent contre le chef de l’Etat qui répond par la manière forte, à coups de censure et d’interdictions3.

Le cardinal Christian Tumi, archevêque de Douala, qui avait déjà dénoncé les exactions du Commandement Opérationnel en 2001, fait une « sortie médiatique » remarquée dans le mensuel La Paix dans lequel il met en garde contre les risques liés à une organisation frauduleuse des élections et à une trop forte concentration du pouvoir par une seule ethnie au Cameroun. Le prélat sera aussitôt pressenti par nombre de ses concitoyens comme un futur candidat à la présidentielle, ce qu’il réfutera ultérieurement.

L’année 2003 est également marquée par de graves incidents à Douala au cours du mois de juillet. Le passage à tabac d’un bend-skinneur (conducteur de moto-taxi) par des policiers serait à l’origine d’émeutes ayant occasionné 3 morts et 36 blessés.

La réforme de l’Observatoire National des Elections en décembre 2003 marque le coup d’envoi de la campagne présidentielle. Selon le nouveau texte adopté par le parlement, les

2 Cf. chapitre « Médias » dans la fiche pays. 3 Cf. chapitre « Médias » dans la fiche pays.

CRR – Centre d’information géopolitique 9 31/05/2006 membres de l’ONEL sont nommés, pour 3 ans, après consultation des formations politiques. Cependant l’organisation des élections reste en les mains du Ministère de l’Administration Territoriale (Ministère de l’Intérieur).

En mars 2004, le SDF et l’Union démocratique camerounaise (UDC) décident de se regrouper au sein d’une Coalition pour la Réconciliation et la Reconstruction Nationale (CRRN) en vue des élections présidentielles. Le 15 septembre, les membres de la CRRN se réunissent pour choisir le candidat qui représentera l’opposition aux élections présidentielles. Le chef de l’UDC, Amadou Ndam Njoya, est élu. Mais le chef du SDF, John Fru Ndi, refuse ce choix et décide de se porter également candidat, mettant ainsi fin à cette union des partis de l’opposition et à l’opportunité de voir Paul Biya quitter le pouvoir.

Face à une opposition désunie et sans moyens (les financements publics en faveur des partis politiques ont été gelés pour cause de « contentieux administratif »), le RDPC fait largement usage de sa position de parti au pouvoir. Le président Biya sillonne le pays pour s’assurer du soutien des chefs traditionnels de toutes les régions et a largement recours aux médias publics.

Au terme d’une campagne électorale déséquilibrée et en l’absence de challenger de poids, Paul Biya est réélu le 11 octobre 2004 avec 70,92% des voix. Les observateurs étrangers font état de fraudes notamment de votes multiples de partisans du RDPC et de dénis d’enregistrement d’électeurs potentiellement favorables à l’opposition.

Après avoir affiché une stabilité de plus de 20 ans, le système politique camerounais commence à s’effriter. Le Président Biya a 71 ans et en aura 78 à la fin de son mandat. La question de son remplacement commence à se poser. Cependant, ce sujet est tabou et plusieurs journalistes en ont fait les frais. Le président Biya passe de longues périodes en dehors du pays et en 2004 un journal a même annoncé son décès. Les rumeurs concernant le chef de l’Etat ne perturberaient pas la vie politique camerounaise si elles n’étaient pas doublées d’attaques venant du RDPC. En 2003, de hauts cadres du parti au pouvoir avaient dénoncé les maux qui rongent le parti et donc le pays : corruption, tribalisme, népotisme, criminalité.

Alors que la question anglophone a ressurgi à l’occasion d’une manifestation estudiantine en mai 2005, beaucoup s’accordent à dire que si Paul Biya est en partie responsable de la mauvaise gestion du pays, il est également le garant de sa stabilité.

Par ailleurs, au plan intérieur, l’année 2005 au Cameroun est notamment marquée par la volonté du pouvoir de mettre en œuvre des moyens de lutte contre la criminalité (avec l’instauration, au mois de février, d’unités de police spécialisées, les E.S.I.R.) et contre la corruption et les détournements de fonds publics, avec la mise en place d’un système informatique de gestion des personnels de l’Etat, de pouvoirs d’investigation accrus accordés à la Cour des Comptes (dont, par ailleurs, le mode de désignation des membres est remanié) et les arrestations, sous des accusations de détournements, opérées à la fin de l’année et au début de 2006, de certains hauts fonctionnaires ainsi que de plusieurs responsables d’entreprises publiques.

Enfin, au plan juridique, la promulgation au mois de juillet 2005 de la loi portant Code de procédure pénale, lequel doit entrer en vigueur le 1er août 2006, apparaît, notamment avec la mesure du retour du juge d’instruction en charge de l’information judiciaire à la place du

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Parquet, comme étant de nature à mettre la protection des libertés individuelles et collectives au Cameroun au niveau des normes internationalement reconnues et acceptables.

Il devrait en être bientôt de même par la volonté, tout au moins proclamée par les autorités camerounaises devant les instances internationales compétentes, d’améliorer de façon significative les conditions carcérales dans l’ensemble des établissements du pays (conditions sanitaires et de surpopulation carcérale, séparation des prévenus et des condamnés, voire séparation des sexes par quartiers de détention) qui restent, encore à l’heure actuelle, très préoccupantes et souvent en dessous des normes internationales communément admises en la matière.

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Fiche pays

I. Situation générale

Dénomination officielle : République du Cameroun depuis 1984 (en 1961 : " Etat fédéral ", en 1972 : " République unie du Cameroun "). Drapeau : Trois bandes verticales verte, rouge, jaune avec une étoile jaune à 5 branches au milieu de la bande centrale rouge. Fête nationale : 20 mai Capitale : Yaoundé. Superficie : 475. 650 km2. Climat : le Cameroun se caractérise par une grande variété de climats et de végétations : au nord, paysages sahélo-soudaniens de plaines et plateaux ourlés par massif de l’Adamaoua, pays sec à la végétation de savane ou de steppe ; au sud, des forêts équatoriales, avec climat chaud et humide ; à l’ouest, de hautes terres volcaniques. Les précipitations vont décroissant de la côte vers l’intérieur et du sud vers le nord et atteignent leur maximum pendant l’été boréal sous l’influence de la mousson qui envahit tout le pays. Divisions administratives : quatre niveaux de déconcentration créés de manière discrétionnaire par le président de la République : les provinces (ou régions) avec à leur tête, un gouverneur nommé par le président de la République, sont au nombre de 10 4 ; les départements ; les arrondissements ; les districts. Les Préfets et sous-préfets représentent le pouvoir central. La décentralisation est constituée par le Conseil régional et les communes dont les membres sont élus. Cependant l’institution de " communes à régime spécial ", en vigueur dans les grandes villes depuis les élections municipales de 1996, permet au président de la République de garder le contrôle sur ces communes (notamment celles passées à l’opposition) en nommant le chef de l’exécutif municipal. Principales villes : Douala (capitale économique ; 2 millions d’habitants), Yaoundé (1 million d’habitants), Bafoussam (Ouest), Bamenda (nord-Ouest), Limbé, Edéa (Sud), Kumba (Sud-Ouest), Garoua (Nord), Maroua (Extrême nord). La population urbaine (environ 50% de la population totale) réside pour moitié dans les deux plus grandes villes du pays : Douala et Yaoundé.

La question de la péninsule de Bakassi

En décembre 1993, les autorités camerounaises découvrent la présence de troupes nigérianes sur la péninsule de Bakassi, zone frontière de 1000 km2 située à l’extrême sud-ouest de la Province du Sud-Ouest, majoritairement occupée par des pêcheurs nigérians. De son côté, le Nigeria accuse le Cameroun d’incursion sur son territoire La péninsule de Bakassi, potentiellement riche en pétrole et en eaux poissonneuses, devient alors l’enjeu d’une dispute juridique entre les deux pays. En février 1994, le gouvernement camerounais demande au Conseil de Sécurité de l’ONU, à l’Organisation de l’Unité Africaine et à la Cour Internationale de Justice de trancher l’affaire. Les hostilités reprennent entre 1996 et 1998. En juin 1998, la Cour Internationale de Justice se déclare incompétente pour juger l’affaire.

4 L’Extrême Nord, le Nord, l’Adamaoua, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest (provinces anglophones), l’Ouest, Le Littoral, le Centre, l’Est et le Sud

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Les procédures reprennent en 1999 et en octobre, la Cour Internationale de Justice reconnaît la souveraineté du Cameroun sur la péninsule en se basant sur un accord datant de 1913 passé entre le Royaume-Uni et l’Allemagne. Le Nigeria réfute cette décision et refuse de retirer ses troupes. Une commission mixte dirigée par un représentant spécial des Nations-Unies a été créée en novembre 2002 afin de trouver une résolution pacifique à cette crise.

Environnement international : Membre de l’ONU, de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA), du FMI, de l’OMC, de l’agence Intergouvernementale de la Francophonie (AIF) , du Commonwealth, de la Communauté économique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC), de la Zone Franc (CFA), de la Banque Africaine de Développement (BAD).

II. Economie

Monnaie : France CFA (1 FCFA = 0,0015800 € au 09/05/05). Taux de chômage : 30% (IEPF5, 2003) Inflation : 1,2 %. (CIA, 2004) PNB/hab. : 1900 $ (CIA, 2004) PIB : 26,4 milliards de dollars (IEPF, 2003) Croissance : 4,9% (IEPF, 2003) Principales ressources : Pétrole, bauxite, bois, café, cacao, bananes, coton, caoutchouc, aluminium. L’agriculture représente 43,7% du PNB, l’industrie 20,1%, les services 36,2% (CIA, 2004).

Le Cameroun a connu une activité économique relativement soutenue en 2003, qui a fait de lui, avec près de 50% du PIB sous-régional, la « locomotive » de la croissance de la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale). Le PIB réel du pays a progressé de 4,5% en 2003. La poursuite des efforts d’assainissement des finances publiques et des réformes structurelles a favorisé une croissance principalement tirée par la consommation intérieure privée.

Selon la Banque Mondiale, la dette extérieure du Cameroun s’élevait à 8,502 milliards de dollars à la fin de 2002. Un réaménagement de la dette du Cameroun dans le cadre du Club de Paris a été accepté, en janvier 2001. Il s’agit d’un accord intérimaire en attendant le « point d’achèvement » de l’ « initiative d’allègement de la dette » des pays pauvres très endettés (PPTE), qui devrait se traduire par l’annulation d’une partie de la dette pouvant atteindre 2 milliards de dollars6.

III. Population

Population : 16, 1 millions d’habitants (IEPF, 2003) Densité : 31,6 hab./Km2. Indicateur de développement humain7 : 0,501. Rang : 141ème sur 177 (UNHD8, 2003)

5 Institut de l’Energie et de l’Environnement de la Francophonie. 6 Source : Banque de France, Rapport zone Franc – 2003. 7 IDH : il mesure le niveau moyen auquel se trouve un pays et comprend trois variables : l’espérance de vie, le niveau d’éducation (mesuré par le taux d’alphabétisation et le taux de scolarisation) et le niveau de vie (PIB/habitant). 8 United Nations Human Development Reports.

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Taux de natalité : 34,67 pour mille Taux de mortalité : 15,4 pour mille (CIA, 2005) Indice de fécondité :4,6 enfants par femme (UNHD, 2004) Population urbaine : 50,6% (UNHD, 2002)

1) Démographie

Croissance démographique : 1,93 % (CIA, 2005) L’espérance de vie est de 46,8 ans. (UNHD, 2002) La mortalité infantile est de 68,26 pour mille (CIA, 2005)

2) Groupes ethniques

La Constitution de 1996 protège les droits des minorités et des populations autochtones. Dans cette " Afrique en miniature " qui compte plus de 250 ethnies répartis On distingue 3 grands groupes ethniques : Bantou (Béti, Bassa, Bakundu, Maka, Duoala, Pygmées…), Semi- Bantou (Bamiléké, Gbaya, Bamoun, Tikar…) et Soudanais (Foulbé, Mafa, Toupouri, Arabes- Choas, Massa, Mousgoum…).

Les Bamilékés, majoritaires à l’Ouest, estimés à 4,5 millions de personnes (18% de la population). Ce peuple doit sa notoriété, et parfois la crainte qu’il inspire, à son rôle pendant la guerre d’indépendance, à son dynamisme économique et à son expansion géographique dans les plaines agricoles à la périphérie de leurs montagnes. Ils contrôlent le port de Douala, capitale économique et poumon du pays. Les Bamilékés sont très présents dans l’opposition du SDF (dont le leader John Fru Ndi est originaire de la province du Nord- Ouest).

Les Bétis (environ 3,5 millions) majoritaires au sud et au centre (autour de Yaoundé), dont est issu l’actuel président de la République (groupe des Bétis-Bulus) et qui dominent le pouvoir politique, administratif, militaire et policier du pays ; 16 postes ministériels sur 50 sont occupés par des Bétis-Bulus.

Les Peuls (ou Foulbés), environ 10 % de la population, musulmans implantés dans le nord. Essentiellement éleveurs. Tensions ethniques entre les Foulbés (musulmans), les " " (animistes). Les chefs coutumiers du nord, les Lamibé, exercent un énorme pouvoir sur « leurs »r sujets, les soumettant parfois au paiement de la dîme et au travail forcé. L’esclavage pratiqué dans certaines régions du nord est surtout exercé par des Peuls sur des Kirdis.

Les Kirdis (" païens "), ainsi nommés par les Foulbés musulmans pour désigner les peuples non-musulmans, qui regroupent une quarantaine de groupes ethniques et cinquante langues différentes. Pour la plupart animistes, une petite minorité de Kirdis a été christianisée et islamisée.

Parmi les autres ethnies islamisées : les Mbororos, les Kotokos, les Mandaras, les Wandalas, les Founbams, les Arabes-Choas (ou " Arabes noirs "), etc.

Des troubles ethniques et ancestraux opposent des Kotokos à des Arabes-Choas dans l’Extrême nord, ayant occasionné au total plusieurs centaines de victimes entre 1992 et 1995. Ce conflit à l’origine ethnique, circonscrit géographiquement, a acquis une dimension politique, les Arabes-Choas appuyant le RDPC et les Kotokos étant réputés favorables au

CRR – Centre d’information géopolitique 14 31/05/2006 parti d’opposition UNDP (à majorité peuhl). Une « tchadisation » du problème est également apparue, chaque camp ayant ses appuis de l’autre côté de la frontière.

Depuis une quinzaine d’années, les Mbororos (ou Bororos) de la province du Nord-Ouest sont victimes de spoliations de leurs terres. Une campagne de terreur est menée, notamment, par Al hadji Baba Ahmadou Danpullou, propriétaire terrien multimillionnaire, proche du RDPC. Regroupé en association, les Mbororo ont réussi, avec l’aide d’ONG internationales, à faire valoir leurs droits devant la justice camerounaise.

Les Bakas (tribus Pygmées), entre 50.000 et 100.000, vivent essentiellement dans la forêt équatoriale. Certains sont encore nomades. Il n’y a pas de discrimination légale à leur encontre mais ils sont souvent méprisés des autres ethnies et parfois soumis à des pratiques proches de l’esclavage.

3) Femmes

Les femmes ont accès à la vie publique, bien que sous-représentées dans la vie politique : 3 des 50 postes ministériels et 10 des 180 sièges de l’Assemblée nationale sont occupés par des femmes.

La violence domestique reste fréquente et non punie par la loi en tant que telle. Les familles des victimes ou les villageois se font généralement justice eux-mêmes. La loi reconnaît les mêmes droits aux hommes et aux femmes mais certaines dispositions du code civil et du code commercial donnent le droit au mari de s’opposer à l’exercice professionnel de sa femme " dans l’intérêt de la famille ". Aussi certains employeurs demandent l’autorisation du mari avant de recruter une femme.

Le mariage : selon le code civil camerounais, un mariage qui aurait été « contracté sans le libre consentement des deux époux encourt la nullité ». De plus, l’article 52 de l’Ordonnance 81-02 du 2 juin 1981 sur l’état-civil précise que l’âge minimum légal pour se marier est de 15 ans pour les femmes et de 18 ans pour les hommes. Malgré la loi qui prévoit l’émancipation légale à 15 ans, certaines fillettes, notamment en zones rurales, sont mariées dès l’âge de 12 ans (source : C.I.S.R.(Canada), 5 mai 2005, réf. : CMR43544.F). Par ailleurs, au Cameroun, la polygamie reste autorisée par la loi, et la polyandrie interdite. En cas de divorce, c’est le mari qui décide de la garde des enfants de plus de 6 ans.

Il n’existe pas de code national de la famille. Le droit coutumier est beaucoup plus discriminatoire envers les femmes, considérées dans beaucoup de régions comme la « propriété » de leur mari. La pratique de mariages forcés et/ou précoces (dont la plupart sont célébrés en vertu du droit traditionnel ou coutumier plutôt que du Code civil) est fréquente dans certaines régions, notamment rurales, singulièrement dans le Nord du pays, « moyennant finances ». Le mari estime avoir " acheté " sa femme (cf. rapport du Département d’Etat américain, 2005).

Les mutilations génitales féminines (M.G.F.) : les droits à l’intégrité corporelle et à la santé sont, en théorie, protégés en vertu de la Constitution camerounaise et du Code pénal et le Cameroun est signataire de plusieurs conventions internationales visant à promouvoir les droits des femmes et des jeunes filles, notamment de la Convention dite ‘ CEDAW ‘, de la Convention relative aux droits de l’enfant, de la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples et de la Charte africaine des droits de l’enfant.

CRR – Centre d’information géopolitique 15 31/05/2006

Toutefois, les M.G.F. ne font encore l’objet, à l’heure actuelle, d’aucune loi en particulier et, si le gouvernement camerounais désapprouve publiquement ces pratiques « coutumières », l’excision et, parfois, l’infibulation ne sont pas expressément interdites par la loi et se pratiquent encore, notamment dans certaines parties de l’Extrême-Nord et du Sud-Ouest du pays . S’il est estimé, de plusieurs sources concordantes, qu’environ 20 % des femmes y sont victimes de pratiques de M.G.F., (source : C.I.S.R.(Canada), 25 mai 2005, réf. : CMR43538.F), cependant, cette proportion peut varier considérablement, au Cameroun comme dans d’autres pays africains, selon la localisation géographique, l’appartenance ethnique, religieuse, et le niveau socio-culturel, voire économique, du milieu proche dans lequel évolue la jeune fille exposée à ces pratiques « coutumières » mutilantes.

La prostitution est un phénomène grandissant au sein de la société camerounaise. De plus en plus de jeunes filles y ont recours, la plupart du temps par « nécessité vivrière », notamment pour pouvoir financer leurs études. (Selon le CICR, environ 50% des lycéennes se prostituent). La prostitution est officiellement illégale9 mais les autorités « ferment les yeux » sur cette pratique. La police procède parfois à des arrestations mais les prostituées sont immédiatement libérées. Depuis plusieurs années, des réseaux mafieux envoient de jeunes camerounaises se prostituer en Europe. Les jeunes femmes quittent leur pays avec la promesse d’un emploi ou d’un mariage en Europe. A leur arrivée sur le sol européen, leurs documents d’identité leur sont confisqués et elles sont contraintes de se prostituer. Au delà de cette prostitution « forcée », un phénomène est récemment apparu, notamment chez certains couples des classes moyennes et urbaines de Douala ou de Yaoundé où, pour « améliorer les revenus du ménage », il arrive que le mari incite sa propre épouse à aller, avec l’assentiment de celle-ci, dans un pays d’Europe, pour une durée limitée (sous couvert d’un visa de tourisme), aux fins de s’y livrer à la prostitution, « en devises fortes ».

4) Enfants

Age de la majorité : 20 ans. La scolarité est obligatoire jusqu’à 14 ans.

Les enfants ne sont pas autorisés à travailler avant 14 ans (article 86 du code du travail). Un décret présidentiel précise les tâches qu’un enfant entre 14 et 18 n’est pas autorisé à accomplir (lourde manutention, travaux dangereux ou nuisibles à la santé, tâches contraires à la moralité). Le travail journalier ne peut excéder 8 heures et l’employeur doit pourvoir à la formation du mineur. Mais le gouvernement n’a pas les moyens de contrôler l’application de ces mesures.

Le Cameroun est une plaque tournante du trafic d’enfants en Afrique de l’Ouest. Les enfants viennent des pays voisins, tels que le Bénin, la Centrafrique, le Gabon et le Nigeria mais également des provinces du nord du Cameroun. Ils sont envoyés à Douala et Yaoundé pour servir de domestiques ou partent vers d’autres pays limitrophes où ils seront « exploités », dans les plantations de cacao notamment. Si les autorités camerounaises parviennent à démanteler certains réseaux de trafic d’enfants (en juillet 2005, 6 personnes, dont un policier gabonais, ont été arrêtées alors qu’elles tentaient de faire passer des adolescents au Gabon), la

9 L’article 294 du Code Pénal prévoit des peines d’emprisonnement allant de 6 mois à 5 ans ainsi qu’une amende pour toute personne qui se prostitue mais également pour celui qui aide ou incite à la prostitution. La peine peut aller jusqu’à 10 ans d’emprisonnement lorsque la victime de proxénétisme à moins de 21 ans.

CRR – Centre d’information géopolitique 16 31/05/2006 législation10 concernant l’interdiction de l’esclavage reste trop rarement appliquée aux camerounais, notamment en raison de la forte corruption des agents de l’Etat chargés de faire respecter la loi.

La plupart des observateurs rapportent de nombreux viols et sévices sexuels en prison sur des mineurs de la part d’autres détenus et/ou des autorités pénitentiaires11. Il n’y a pas de statistique sur les abus sexuels commis sur les enfants dans le cadre familial mais ils constituent l’une des priorités des organisations camerounaises des droits de l’enfant.

De nombreux enfants des rues survivent dans les grandes villes telles que Yaoundé et Douala. Un certain nombre d’entre eux sont désignés comme « enfants-sorciers ». Le phénomène des enfants sorciers existe parmi de nombreuses sociétés d’Afrique de l’Ouest et est particulièrement récurrent depuis plusieurs années. Si une famille rencontre des difficultés particulières (décès, maladie, échec) et qu'un enfant de cette famille présente une particularité, il est alors parfois désigné comme « enfant-sorcier », responsable des malheurs qui s'abattent sur le reste de la famille. L'enfant est alors maltraité et souvent chassé de son foyer. Ces enfants sont particulièrement vulnérables.

IV. Langue

Langues officielles : français et anglais. Environ 25% des Camerounais sont anglophones 260 langues vernaculaires sont en usage : bassa, douala , ewondo et boulou chez les Fang- Béti, feefée, medumba et ghomalu chez les Bamiléké, mungaka chez les Bali, foulbé, arabe, etc…

V. Education

1) Généralités

Analphabétisme : 31,5% (23% pour les hommes, 40% pour les femmes) selon les estimations faites par le Fond pour la Population des Nations Unies (UNFPA) en 2004. Le Cameroun enregistre un des meilleurs taux de scolarisation en Afrique mais la situation varie d’une région à l’autre. Entre 1998 et 2002, 76% des enfants étaient scolarisés en primaire12. L’éducation, gratuite dans les écoles publiques, est dispensée dans les deux langues officielles.

Depuis quelques années, le système éducatif camerounais qui faisait jusqu’ici figure de référence dans la région, est en pleine déliquescence et de nombreux lycéens préfèrent passer leur baccalauréat au Tchad. Il n’existe aucune restriction légale à la liberté d’enseigner. Mais des " informateurs " gouvernementaux sont présents sur les campus et beaucoup de

10 Textes relatifs à l’interdiction du travail forcé et de l’esclavage : Loi n°. 96/06 du 18 janvier 1996 amendant la Constitution du 2 juin 1972 ; loi n° 92/007 du 14 août 1992 (partie I, section 2 (3)) du Code du Travail ; article 293 du Code Pénal, prévoyant des peines d’emprisonnement de 10à 20 ans pour les personnes coupables d’esclavagisme. 11 Source : rapport de la FIDH mai 1998. 12 Source : UNICEF.

CRR – Centre d’information géopolitique 17 31/05/2006 professeurs pensent que l’adhésion au SDF peut compromettre leur carrière. Les discussions politiques libres sont bridées par la présence de forces de sécurité sur les campus à Yaoundé.

2) Structure

L’école publique est gratuite. Les établissements privés sont subventionnés par le gouvernement.

De nombreuses écoles primaires et secondaires sont dirigées par des congrégations religieuses (l’enseignement catholique est très présent dans le sud) et les établissements privés confessionnels (catholiques, protestants et coraniques) ont toujours compté parmi les meilleures écoles du pays13.

L’enseignement supérieur continue d’être essentiellement d’Etat. L’Eglise catholique dirige la seule institution privée d’enseignement supérieur du pays. Le ministère de l’éducation veille à ce que les programmes des écoles confessionnelles soient conformes aux normes des écoles publiques.

En 1998, le gouvernement a fait fermer 180 écoles primaires et secondaires " clandestines ", surtout à Douala et dans les régions acquises à l’opposition, qui accueillaient environ 50.000 enfants. En 1999, des douzaines d’autres ont été fermées. Ces écoles qui fonctionnent sans autorisation gouvernementale se sont multipliées avec la détérioration du secteur public.

VI. Religion

Chrétiens : environ 50% (Catholiques et protestants) ; Musulmans : environ 25% ; Animistes ou (" Païens ") : environ 25% (bien qu’un petit nombre de " Kirdis " ait été islamisé ou christianisé); petite minorité Baha’ï. Les Témoins de Jéhovah, interdits de 1970 à 1990, sont autorisés depuis le processus de démocratisation des années 90.

Les Chrétiens sont surtout présents dans le sud et l’Ouest du pays (les habitants des provinces anglophones sont majoritairement protestants), les Musulmans dans les provinces du Nord, les animistes dans les régions rurales, dans tout le pays.

La Constitution garantit la liberté de religion et de culte qui est respectée dans la pratique. Les communautés religieuses doivent être déclarées auprès du ministère de l’Administration territoriale. Cette autorisation n’a jamais été refusée. Une douzaine d’autorisations auraient été délivrées.

D’une façon générale, les différentes communautés religieuses présentes au Cameroun cohabitent en bonne entente.

Le Nord a toujours été un espace ouvert d’échanges, de migrations et de conquêtes : La conquête musulmane menée par Ousman Dan Fodio au début du XIX siècle l’a soumis à la domination des Peuls (ou Foulbés), dont les chefferies détiennent toujours une position politique dominante. Dans les provinces du Nord, les discriminations de la majorité musulmane à l’encontre des animistes sont fortes et très répandues. Certains chrétiens du

13 Source : rapport annuel 2005 du Département d’Etat américain.

CRR – Centre d’information géopolitique 18 31/05/2006

Nord se plaignent également des Musulmans. Des conflits violents opposent parfois les animistes aux autres groupes religieux.

Les missions chrétiennes, présentes sur tout le territoire, agissent en toute liberté. Pendant la campagne présidentielle de 1997, l’Eglise catholique a publiquement soutenu le candidat de l’opposition en critiquant la corruption et la mauvaise gestion des affaires par le pouvoir en place.

L’Eglise catholique gère des écoles primaires, le seul établissement privé d’enseignement supérieur, la plus ancienne station de radio privée, un des rares groupes de presse privée moderne du pays et une publication bi-hebdomadaire. Les peuples christianisés ont été scolarisés de bonne heure et ont constitué une part importante des élites post-coloniales. Les Chrétiens échappent parfois difficilement aux clivages ethniques qui divisent le pays : En 1999, le Vatican a nommé un Bamiléké archevêque de Yaoundé, ce qui a provoqué de vives critiques et des manifestations de la part des Bétis (détenteurs du pouvoir politique).

La pratique de la sorcellerie est une infraction punie par le code pénal.

VII. Médias

La Constitution garantit la liberté d’expression et de la presse. La loi du 19 décembre 1990 relative à la Communication sociale, amendée en janvier 1996 en vue de la suppression de la censure et complétée par des arrêtés portant accès des partis politiques aux médias publics de l’audiovisuel soit en période de campagne électoral, soit en période normale, a largement contribué à la libéralisation de la presse.

Mais le code pénal prévoit des peines d’emprisonnement et de lourdes amendes pour diffamation, insultes, outrage et " propagation de fausses nouvelles ". Ces dispositions sont fréquemment utilisées contre les détracteurs du gouvernement. Opposants politiques et journalistes sont victimes d’interpellations, de garde-à-vue, d’arrestations, d’intimidations, de condamnations, d’agressions, de suspension, d’interdictions d’exercer, de retrait d’accréditation pour des journalistes étrangers. De ce fait, beaucoup de journalistes pratiquent aussi l’autocensure.

Les journalistes sont mal payés et parfois enclins à accepter de l’argent en échange d’interviews ou d’un article orienté. De plus, les journalistes n’ont souvent pas de contrat et sont à la merci de leur directeur qui leur impose la ligne rédactionnelle

Depuis la fin du parti unique en décembre 1990, des journalistes camerounais ont été internés à 102 reprises. Depuis 1979, le journal Le Messager a connu 527 saisies et censures de ses écrits, La Nouvelle Expression, 243.

En parallèle à un arsenal judiciaire servant à contrôler la presse, les autorités ont développé depuis 1999, des mécanismes de strangulation économique et de harcèlement fiscal qui accroissent les difficultés des journaux déjà affaiblis par la crise économique. En juin 1999, La Nouvelle Expression s’est vue redevable d’un impôt de 49 millions de francs CFA (76 000 euros). En 2000, le Messager, s’est retrouvé sous le coup d’un redressement de l’ordre de 41 millions de francs CFA (61500 euros) au titre de la TVA prélevée sur les insertions

CRR – Centre d’information géopolitique 19 31/05/2006 publicitaires. En 2004, La Nouvelle Presse reçoit un avis de redressement fiscal de l’ordre de 72 000 millions de francs CFA (110 000 euros). Ce contrôle intervient après la publication par ce journal d’un certain nombre d’article sur la Première dame.

Le 13 janvier 1998, la condamnation de Pius Njawé, directeur de l’hebdomadaire Le Messager et figure emblématique de la presse privée au Cameroun, à deux ans de prison ferme pour " propagation de fausses nouvelles " sur la santé du président Biya, avait soulevé la réprobation de toute la presse nationale et internationale. Cette peine avait été réduite à un an en appel. Le 12 octobre 1998, Pius Njawé a été gracié et libéré.

Daniel Atangana et Thierry Mbouza, journalistes du bi-hebdomadaire Dikalo, sont condamnés, le 18 juillet 2000, par le tribunal de Yaoundé à 6 mois de prison. On leur reproche d’avoir publié, en novembre 1998, un mémorandum signé par 81 transporteurs routiers, qui comparaient leur syndicat à une « structure fantôme que dirige un certain Pierre Simé et qui aide les transporteurs expatriés à piller le Cameroun ».

Le 31 juillet 2001, l’affaire Haman Mana défraie la chronique. Ce dernier, directeur du journal Mutations est arrêté et gardé à vue pendant deux jours pour avoir publié 21 décrets réorganisant l’armée.En janvier 2002, Georges Baongla, directeur de publication du Démenti est arrêté et incarcéré pour escroquerie. On lui reproche d’avoir extorqué 10 millions de francs CFA à un fonctionnaire du Ministère de l’Economie et des Finances. D’après le journal, il s’agit d’une « fausse affaire tissée par le pouvoir » après la publication de plusieurs articles dénonçant des malversations financières de la part du Ministre. Georges Baongla est libéré le 1er juillet.

Dans la nuit du 13 avril 2003, la disquette qui contient l’édition du lendemain du quotidien privé Mutations est saisie par la Gendarmerie dans les ateliers de la Société de presse et d’édition du Cameroun (SOPECAM, publique). Le quotidien titrait en une « Après-Biya : incertitudes de fin de règne ». Le lendemain, le directeur de publication de Mutations, Haman Mana est interpellé puis libéré le lendemain. Le 16 avril, des exemplaires du journal sont saisis dans les kiosques de Yaoundé.

Le 10 janvier 2005, le rédacteur en chef du bimensuel Le Jeune Observateur, Jules Koum Koum, est condamné à 6 mois de prison ferme pour diffamation. Dans un article, il avait remis en cause les intentions réelles et la bonne gestion des entreprises par la Compagnie Professionnelle des Assurances (CPA). Il est remis en liberté le 9 février 2005, après un mois d’incarcération. Guibaï Gatam et Abdoulaye Oumaté, respectivement directeur de publication et journaliste de L’Oeil du Sahel, sont condamnés le 26 avril 2005 à 5 mois de prison ferme et 5 millions de francs CFA pour diffamation. Ils avaient dénoncé les exactions et rackets des forces de l’ordre sur les populations. L’un des deux journalistes aurait fui le Cameroun.

Le 3 avril 2000, la signature par le premier ministre du décret d’application de la loi du 19 décembre 1990 libéralisant le secteur audio-visuel a mis fin au monopole d’état sur la radio et la télévision (cf. L’Etat du Monde, 2001). Cependant, la libéralisation du secteur audiovisuel se poursuit lentement. Quelques nouvelles radios et télévisons privées ont été autorisées à émettre. En revanche, la station Freedom FM, propriété du groupe Le Messager, n’a toujours pas obtenu de licence d’exploitation.

Le 14 mars 2003, la station de radio Magic FM est fermée. Elle est accusée « d’outrage au Président de la République », « appel à la sédition » et « propagation de fausses nouvelles ».

CRR – Centre d’information géopolitique 20 31/05/2006

Le 14 novembre 2003, Radio Véritas, la station catholique de l’archidiocèse de Douala, lancée le 1er novembre, cesse d’émettre sur ordre des pouvoirs publics (le cardinal Tumi, archevêque de Douala, est connu pour avoir dénoncé les exactions commises par le Commandement Opérationnel et pour ses prises de positions politiques). Le 12 décembre, le Ministère de la Communication autorise la station à émettre à nouveau, à condition qu’elle respecte son « caractère confessionnel » et se soumette à « la tutelle de l’archidiocèse de Douala ».

Dans la semaine du 22 décembre 2003, une dizaine de radios et télévisions privées de l’Ouest et du Nord Ouest du pays reçoivent l’ordre de fermer au plus tard le 31 décembre, sous prétexte qu’elles ne disposaient pas d’ « autorisation officielle pour fonctionner ».

Plusieurs sources s’accordent à souligner que, malgré la persistance de la répression à l’encontre des médias, les médias publics se sont attachés à traiter la campagne présidentielle de 2004 avec équité. Pour la première fois, les Camerounais ont pu suivre, sur des médias publics, l’opposition critiquer sévèrement le Président Biya.

1) Publications

Sur environ 400 journaux déclarés, une quinzaine paraissent régulièrement. La décision de novembre 1999 de soumettre à l’impôt les sociétés de presse pourrait menacer l’existence de nombreuses publications.

Gouvernementales : Le CameroonTribune (quotidien en français et en anglais).

Indépendantes : La presse privée, principalement hebdomadaire, est très dynamique. Mutations (tri-hebdomadaire, Douala ), Le Messager, La Nouvelle, L’Expression, Cameroon Post, l’hebdomadaire catholique, L’Effort camerounais, Le Front Indépendant (Douala), La Galaxie, La Détente, Le Serment (son directeur Anselm Mballa a été condamné en juillet 1999 à six mois de prison pour diffamation). L’hebdomadaire La Plume du jour a été suspendu par les autorités en septembre 1997 ; le journal Générations a été suspendu (emprisonnement de son Directeur Vianney Ombe Ndzana).

3) Radio et télévision

Le 3 avril 2000, la signature par le Premier ministre Peter Mafany Musonge du décret d’application de la loi du 19 décembre 1990 libéralisant le secteur audio-visuel a mis fin au monopole d’Etat sur la radio et la télévision (cf. L’Etat du Monde, 2001).

CRTV : Cameroon Radio-Television / Office de Radiodiffusion-Télévision camerounaise (monopole d’Etat jusqu’au décret du 3 avril 2000) sous tutelle directe du ministère de la Communication. Elle couvre 80% du territoire et dispose de stations régionales dans chacune des 10 provinces.

Quelques stations de radio : Radio Télévision Siantou -RTS, Magic FM, Equinoxe (Douala), Radio Star, Radio Batcham (Bafoussam).

CRR – Centre d’information géopolitique 21 31/05/2006

L’Eglise catholique émet sur une station de radio privée. Radio Véritas est la station de l’archidiocèse de Douala.

Agences : CamNews.

VIII. Structure politique

Constitution du 18 janvier 1996 (a remplacé celle du 2 juin 1972). Nature de l’Etat : République " unitaire décentralisée ". Nature du régime : Régime semi-présidentiel.

Président de la République : depuis la Constitution de 1996, il est élu pour sept ans et rééligible une fois. Antérieurement : mandat de 5 ans renouvelable pour une période illimitée. Paul Biya occupe cette fonction depuis 1982.

Premier ministre : nommé par le président de la République depuis 1990. Peter Mafany Musonge occupe ce poste depuis le 19.9.96 (confirmé après les élections du 7.12.97).

Parlement bicaméral : L’Assemblée nationale est composée de 180 députés élus pour cinq ans, et présidée par ; Le Sénat est composé de 100 membres dont 70 élus et 30 désignés par le Président de la République pour un mandat de cinq ans.

Les chefferies traditionnelles Les chefferies sont des entités anciennement indépendantes qui épousent les contours des royaumes pré-coloniaux et dont certaines se sont constituées depuis le 13ème siècle. Elles s’organisent autour de la figure emblématique du chef, désigné selon les régions par les appellations de Fo, Mfon, Lamido ou Mey. Dans les royaumes musulmans, les monarques, portent parfois le titre de sultan. Les chefs traditionnels camerounais sont des auxiliaires de l’administration. Ils sont placés sous la tutelle du ministère de l’Administration Territoriale (lequel a des compétences équivalentes à celles d’un ministère de l’Intérieur). Représentants légaux de l’Etat, ils sont chargés de certaines tâches telles que la collecte des impôts ou la rédaction d’actes administratifs. Les chefs traditionnels ont un rôle très important dans l’Ouest et le Nord du Cameroun. Dans le Sud, la population est plutôt organisée en société acéphale mais les chefs traditionnels y jouent tout de même un rôle. L’organisation en chefferies ne se cantonne pas à la campagne, les grandes villes sont également découpées en circonscriptions placées sous l’autorité d’un chef. A leurs fonctions administratives s’ajoute un rôle politique. En effet, les chefs traditionnels sont souvent chargés de la distribution des cartes d’électeurs et les bureaux de votes sont fréquemment établis à leur domicile. Les chefs traditionnels ont la possibilité d’interdire les activités politiques d’un parti à l’intérieur de leur circonscription. Ils peuvent également adresser au ministère de tutelle des rapports sur certains fonctionnaires locaux (policiers, professeurs…), ce qui peut conduire au renvoi ou à la mutation de l’agent. Selon de nombreuses sources consultées, les chefs traditionnels sont très souvent proches du parti au pouvoir, le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC). De par les pouvoirs que celui-ci a bien voulu leur accorder, on peut conclure que non seulement ils encouragent les décisions ou agissements des autorités étatiques en place, mais qu’il existe

CRR – Centre d’information géopolitique 22 31/05/2006 même une alliance entre les deux pouvoirs au-delà d’une simple complicité de fait. Il arrive par exemple qu’il y ait imbrication entre administration moderne et pouvoir traditionnel avec cumul des fonctions : ainsi, le roi de l’ethnie Banjoun a occupé le poste de préfet dans la capitale régionale de Bafoussam. Selon le rapporteur spécial au Cameroun de la Commission des droits de l’Homme de l’ONU; de nombreux témoignages font état de détentions arbitraires et de mauvais traitements (notamment envers les opposants politiques), qui seraient pratiqués par certains chefs traditionnels dans des prisons « privées » se situant dans les palais mêmes. Selon l’Union Nationale pour la Démocratie et le Progrès(UNDP), parti rangé dans l’opposition jusqu’en 1997, et dont certains militants y ont été emprisonnés, les prisons situées dans les palais des chefs traditionnels de Rey Bouba, Gashiga, Bibemi et Tcheboa sont réputées pour la dureté des conditions de détention et les mauvais traitements subis par les détenus. Selon d’autres sources, certains chefs traditionnels du Nord disposeraient de milices privées, qui seraient tolérées par les autorités gouvernementales. Par ailleurs, certaines sources font état d’activités de nature « mafieuse » de la part de certains chefs traditionnels, qui n’hésitent pas, comme dans la province de l’Adamaoua (Nord Cameroun), à envoyer des commanditaires « coupeurs de routes », chargés de leur rapporter le butin récolté sous la menace, à leur palais.

IX. Elections

1) Système électoral

Régi par la Loi électorale du 16 décembre 1991.

Les élections législatives sont soumises à un scrutin direct mixte à majorité simple dans les circonscriptions uninominales et à majorité absolue dans les circonscriptions où le système de liste est appliqué.

Le Président de la République est élu par scrutin majoritaire à un tour.

En décembre 2000, suite à la pression exercée par les partis d’opposition, les autorités annoncent la création d’un Observatoire National des Elections (ONEL) chargé notamment d’encadrer l’inscription des électeurs et le dépouillement des urnes. Le comité central de l’ONEL est composé de 11 membres désignés par le Président, lesquels nommeront des représentants dans les provinces et districts du pays. L’ONEL est réformé en décembre 2003. Selon le nouveau texte adopté par le Parlement, ses membres sont nommés pour 3 ans après consultation des formations politiques. Cependant l’organisation des élections reste en les mains du ministère de l’Administration Territoriale (ministère de l’Intérieur).

2) Résultats des élections

Premières élections législatives pluralistes de mars 1992 : le SDF décide de boycotter le scrutin, estimant que celui-ci ne sera pas équitable. L’UNDP et l’UPC y participent. Les observateurs internationaux ont jugé dans l’ensemble que cette consultation avait été libre et équitable. A l’issue du scrutin, le RDPC remporte 88 sièges, l’UNDP 68, l’UPC 18 et le MDR 6 sièges. Le RDPC doit faire alliance avec le MDR pour recueillir la majorité absolue à l’Assemblée nationale.

CRR – Centre d’information géopolitique 23 31/05/2006

Premières élections présidentielles pluralistes du 16 octobre 1992 : le scrutin uninominal majoritaire à un tour est adopté. Dans son rapport sur les droits de l’Homme de 1996, le Département d’Etat américain qualifie ce scrutin de " hautement défaillant ". Le 21 octobre, John Fru Ndi, le candidat du SDF, déclare qu’il a remporté les élections avec 38,57% des suffrages. Deux jours plus tard, la Commission nationale de recensement annonce la victoire du président sortant avec 39,9% des voix contre 35,9% pour le SDR et 19,5% pour l’UNDP. Ce résultat, entériné par la cour suprême, est suivi de nombreuses manifestations, parfois très violentes dans la région du Nord-Ouest, bastion du SDF.

Premières élections municipales de 1996 : l’opposition remporte 104 municipalités sur 336. Scrutin libre et équitable. Le gouvernement s’est assuré le contrôle des conseils municipaux remportés par l’opposition en nommant par décrets des représentants du gouvernement à la tête de l’exécutif local dans 20 grandes villes, notamment dans les 6 principales communes remportées par le SDF (Yaoundé, Douala, Bamenda, Bafoussam).

Elections législatives du 17 mai 1997 : les partis d’opposition (SDF et UNPD) dénoncent de nombreuses irrégularités, y compris des actes d’intimidations sur les électeurs, et demandent l’annulation des élections. Trois semaines après le scrutin, la Cour suprême déclare le RDPC vainqueur avec 109 sièges sur 180, contre 43 pour le SDF, 13 pour l’UNDP, 5 pour l’UPC et 3 pour des petits partis. Les élections sont annulées dans 7 circonscriptions. Lors des élections partielles du 3 août 1997, le RDPC les remporte toutes, obtenant la majorité absolue de 116 sièges sur 180.

Elections présidentielles du 17 octobre 1997 : les trois principaux partis d’opposition boycottent le scrutin en raison des irrégularités de l’élection législative et de leur propre incapacité à se mettre d’accord sur un candidat unique. Ils entendent ainsi dénoncer la loi électorale en vigueur. L’absence d’observateurs internationaux rend difficile l’appréciation portée sur l’équité de cette consultation. Il semble cependant que les arrestations se soient poursuivies dans les rangs de l’opposition. Le 23 octobre, la Cour suprême déclare Paul Biya vainqueur à 92,57% des suffrages avec une participation de 80%. Selon le Département d’Etat américain (rapport 1999), ces élections n’ont été " ni libres, ni équitables ".

Elections municipales et législatives du 30 juin 2002 : les élections municipales qui devaient avoir lieu en janvier 2002 sont ajournées pour des raisons d’organisation et ont finalement lieu le 30 juin en même temps que les élections législatives. Le RPDC remporte 133 des 180 sièges à l’Assemblée Nationale et 286 mairies sur 336. Le SDF, qui a fait élire 21 députés, demandent à ses conseillers municipaux fraîchement élus de ne pas siéger en signe de protestation contre les « fraudes massives orchestrées par le parti au pouvoir ». Le Nord-Ouest du pays, où le SDF avait remporté une quarantaine de communes, s’enflamme à l’annonce de cette décision. A la mi-juillet, après la signature d’un accord avec le gouvernement John Fru Ndi met fin au boycottage pour faire rétablir l’ordre.

Election présidentielle d’octobre 2004 : en mars 2004, le SDF et l’Union démocratique camerounaise (UDC) décident de se regrouper au sein d’une Coalition pour la Réconciliation et la reconstruction Nationale (CRRN) en vue des élections présidentielles ; ils seront rejoint par d’autres partis parmi lesquels le MLDC, le PPC, le MDP et l’UPC. Le 15 septembre, les membres de la CRRN choisissent, Amadou Ndam Njoya, chef de l’UDC, pour représenter l’opposition aux élections présidentielles. Le chef du SDF, John Fru Ndi, refuse ce choix et décide de se porter également candidat. Paul Biya est réélu le 11 octobre 2004 avec 70,92% des voix. Les observateurs étrangers font état de fraudes, notamment de votes multiples de

CRR – Centre d’information géopolitique 24 31/05/2006 partisans du RDPC et de déni d’enregistrement d’électeurs potentiellement favorables à l’opposition.

X. Partis politiques

Le Multipartisme a été introduit par la loi de 19 décembre 1990. Il existe une centaine de partis politiques.

Le gouvernement " d’unité nationale ", a été formé en janvier 1998. Il s’agissait d’une coalition du RDPC, de l’UNDP, de l’UPC (K) et de la Nouvelle Convention (NC).

Le gouvernement formé le 9 décembre 2004 est composé de 41 ministres membres du RDPC, 2 représentants de l’UNDP, un membre de l’UPC, un autre de l’ANDP et un représentant du MDR.

Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) : ancien parti unique (a remplacé en 1985 l’Union nationale camerounaise) : parti au pouvoir depuis l’indépendance, présidé par le président Paul Biya, à majorité Béti-Bulu (ethnie du président), très présent dans les provinces du centre et du sud. Social Democratic Front (SDF) : principal parti d’opposition, créé en 1990. Il est basé à Bamenda. Le SDF constitue la deuxième force politique à l’Assemblée nationale. Il est très implanté dans les provinces du Nord-Ouest, du Sud-Ouest et du Littoral. Non-violent, il prône l’instauration d’un Etat fédéral plutôt que la sécession des provinces anglophones. Le SDF est actuellement dirigé par l’anglophone John Fru Ndi Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP) : dirigé par l’ancien Premier ministre Bello Bouba Maïgari, principale formation d’opposition « nordiste », à majorité Peuhle. Union des populations du Cameroun (UPC) : créé en 1948, c’est le parti qui a mené la guérilla anti-coloniale. Il est aujourd’hui divisé en une demi-douzaine de factions rivales dispersées sur l’échiquier politique camerounais, chacune revendiquant l’héritage de son fondateur Ruben Um Nyiobe (tué en mai 1958). Sont notamment issus de ce mouvement : 1. UPC(K) « gouvernementale », de tendance réformiste, dirigé par Augustin-Fédéric Kodock, ministre d’Etat exclu du parti en mai 1966 (1,44% des voix aux élections législatives de 1997). 2. UPC(N), faction « historique », dirigée par Ndeh Ntumazah, réformiste anglophone (2,5% des suffrages en 1997). 3. UCP " MANI DEM " (manifeste national pour l’instauration de la démocratie), tendance marxiste, dirigé par Michel Ndoh qui prône une « opposition ferme » au président Biya. 4. Parti de la solidarité du peuple (PSP) de tendance marxiste, mais dont le leader Ngouo Woungly Massaga (alias " commandant Kissamba ") s’est rallié au régime du président Biya en 1991. 5. Regroupement des forces patriotiques (RPF) de Emah Otu Hygin. Union démocratique du Cameroun (UDC) : dirigé par Ndam Njoya, ancien ministre de l’ancien président Ahmadou Ahidjo, l’UDC a fait partie de la coalition qui a boycotté l’élection présidentielle de 1997. Il trouve son principal soutien dans l’ouest du pays. Mouvement pour la défense de la République (MDR) : très implanté dans l’Extrême nord. Il fait partie de la coalition gouvernementale avec le RDPC et l’UPC (K).

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Alliance Nationale pour la Démocratie et le Progrès (ANDP) : parti politique du Grand Nord, créé en septembre 20002 par 5 anciens ministres originaires des provinces septentrionales.

Dans les provinces anglophones :

Southern Cameroon National Council / Conseil national du Cameroun méridional (SCNC) : mouvement sécessionniste créé dans la clandestinité en 1985 sous le nom de All Anglophone Conference, légalisé comme parti au moment de l’ouverture démocratique de 1990. En 1995, il lance une pétition pour la tenue d’un référendum non-officiel sur l’indépendance des provinces anglophones. Il est tenu pour responsable des violences de mars 1997 dans les provinces du nord-ouest. Le 30 décembre 1999, le président de son comité stratégique, Ebong Frederick Alobwede, autoproclame sur les ondes l’indépendance de la " République camerounaise méridionale ". En mai 2000, le SCNC a été interdit mais ses membres sont toujours actifs. Son principal dirigeant est Ette Otun Ayamba. Southern Cameroon Youth League (SCYL): (La ligue des jeunes du Cameroun méridional), est affiliée au SCNC, malgré le déni en ce sens d’un dirigeant de cette « branche jeunesse », un dénommé Ebenezer Akwangkabwa, lequel, sur un site Internet aux couleurs du S.C.Y.L. déclare disposer pour son organisation d’une « branche armée », la SOCADEF (Southern Cameroon Defence Force) dont le seul « fait d’armes » semble jusqu’ici être l’ « exfiltration » jusqu’au Nigeria (Abuja) de cette personne depuis un hôpital de Douala dans lequel ce détenu avait été admis pour soins en 2003.

XI. Syndicats

La liberté syndicale est inscrite dans la Constitution du 2 juin 1972 ainsi que dans le Code du travail de 1992.

A côté des syndicats à vocation générale tels la CSTC - Confédération syndicale des travailleurs du Cameroun (ancien syndicat unique affilié au RDPC) et l’USTC - Union syndicale des travailleurs du Cameroun (créée en 1995), il existe de nombreux syndicats à vocation sectorielle, notamment le puissant Syndicat des chauffeurs d’autobus, de taxis et de cars ou le Syndicat national des enseignants du supérieur.

En 1998, la CSTC s’est scindée en deux, la faction réformiste de Benoît Essiga ayant finalement été élue en avril 1999 à la tête du syndicat, lors d’une conférence tenue sous les auspices de l’Organisation internationale du travail (OIT). Le gouvernement ne reconnaît pas cette nouvelle direction et refuse désormais toute discussion avec la CSTC.

Le droit de grève est reconnu par le Code du travail, mais seulement après une procédure d’arbitrage obligatoire. Les fonctionnaires, les employés du système pénitentiaire et les militaires et agents chargés de la sécurité nationale n’ont pas le droit de grève. Aux mois de janvier et de février 2003, Benoît Essiga, président de la Confédération syndicale des travailleurs du Cameroun (CSTC), et 13 autres syndicalistes au moins ont été arrêtés et maintenus en détention durant plusieurs jours à chaque fois. Les autorités les ont accusés d’être responsables de déraillements de trains qui s’étaient produits dans la province du Centre. Ils ont de nouveau été arrêtés mi-avril, avant d’être remis en liberté au mois de

CRR – Centre d’information géopolitique 26 31/05/2006 mai. Il s’agissait de prisonniers d’opinion, pris pour cibles en raison de leurs activités syndicalistes non violentes14.

L’esclavage et/ou le travail forcé sont interdits par la Constitution et le Code du travail, mais ils continuent d’être pratiqués, sans intervention réelle des autorités de Yaoundé, dans certaines régions du nord, notamment dans le Lamida (chefferie musulmane) de Rey Bouha. Ils sont généralement exercés par des Peuls (Foulés) sur des compatriotes d’ethnie Kirdi.

Dans le Sud et l’Est, les Bakas (Pygmées), y compris les enfants, sont parfois soumis à des pratiques quasi-esclavagistes de la part de compatriotes d’autres ethnies.

XII. Associations et groupes de défense des droits de l’homme

La Constitution de 1996 " protège les droits des minorités et des populations autochtones ".

La nouvelle législation de 1990 sur les libertés publiques abroge l’ordonnance du 12 mars 1962 " portant répression de la subversion ". la loi de 1997 relative à la liberté d’association garantit ce droit sous réserve de l’article 16(1), à savoir l’obtention d’une autorisation préalable du Ministère chargé de l’Administration territoriale (MINAT, équivalant au ministère de l’Intérieur).

La loi garantit la liberté de réunion. Dans la pratique ce droit est restreint : les autorités refusent fréquemment l’autorisation préalable aux meetings de l’opposition ou de groupes critiques et font régulièrement usage de la force pour disperser ces réunions.

La loi garantit la liberté d’association. Dans la pratique, ce droit est généralement respecté. Plus de 150 partis politiques agissent en toute légalité, ainsi qu’un grand nombre d’associations nationales et internationales qui opèrent en toute liberté. Cependant des militants d’associations de défense des droits de l’Homme, notamment celles dénonçant les exactions des forces de sécurité dans les provinces du nord, sont souvent victimes de menaces, d’intimidations et d’agressions.

Amnesty International souligne dans ses rapports de 2000 et 2004 que les militants des droits de l’homme qui dénoncent les exactions commises dans le nord du pays sont en butte au harcèlement et sont la cible de menaces et d’intimidation, y compris sur les membres de leur famille. C’est notamment le cas des membres de la MDDHL qui tentaient de dénoncer les exécutions extra-judiciaires perpétrées par la Brigade anti-gang en 1999, ainsi que des membres du Human Rights Defence Group, de la MDDHL et de l’ACAT, soupçonnés d’avoir aidé la Fédération Internationale des Droits de l’Homme, dont les bureaux sont à Paris, à élaborer un rapport sur la torture au Cameroun qui a été publié au mois d'octobre 2003.

14 Source : Amnesty International, rapport 2004.

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Groupes de défense des droits de l’Homme

Le Comité national des droits de l’Homme (« autorité administrative indépendante » créée par Décret présidentiel en 1990). Le Comité de l’ONU pour les droits de l’Homme a dénoncé en octobre 1999 son manque d’indépendance vis-à-vis du gouvernement. Parmi les organisations les plus actives : Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT), la délégation camerounaise a été créée en 1993. Elle est dirigée par Madeleine Afité. L’ACAT a été particulièrement active dans la dénonciation des exactions commises par le Commandement Opérationnel. Les membres de cette organisation sont fréquemment l’objet de pression de la part des autorités. Mouvement pour la défense des droits de l’homme et des libertés (MDDHL), organisation non-gouvernementale nationale, basée à Maroua, une des rares ONG opérant dans l’Extrême- Nord et souvent victime de menaces et d’intimidations de la part des autorités. Son président est Abdoulaye Math Human rights Defence Group (HRDG), ONG nationale basée à Bamenda. Sa directrice est Franka Nzoukekang. Albert Mukong était le fondateur du HRDG Collectif National contre l’Impunité (CNI), créé en avril 2001 pour dénoncer les exactions du Commandement Opérationnel. Son dirigeant est Djeukam Tchameni Nouveaux Droits de l’Homme (NDH), dirigé par le Dr Hilaire et Kamga. L’ONG dispose de 3 bureaux à Yaoundé, Douala et Bafoussam. Autres ONG : Ligue pour les droits et les libertés (LDL), Conscience Africaine-Cameroun, Centre international pour la recherche de la Paix-Cameroun (CIRP), African Human rights Campaign (AHRD), Solidarité pour la promotion des droits de l’Homme (PRODHOP), l’Association des femmes contre la violence, l’Association camerounaise pour les droits de l’enfant, le Comité d’action pour les droits des femmes et des enfants (CADEF), The Cameroun National Association for Family Welfare (CAMNAFAW), Tribes without frontiers (TSF) - (Tribus sans frontières) , l’Association camerounaise des femmes juristes. etc.

XIII. Justice

1) Généralités

Le droit coutumier et le droit moderne cohabitent dans le système juridique camerounais. Le droit de l’ex-Cameroun sous administration française et le droit de l’ex-Cameroun sous administration britannique (dans les deux provinces de l’ouest) restent en vigueur tant qu’ils ne sont pas abrogés de manière expresse par la législation post-coloniale.

2) Structure

Le droit national est très influencé par le droit français, même si dans les provinces de l’ouest, certains éléments du droit britannique s’appliquent (comme le recours sur la légalité de la détention préventive). En droit camerounais, il y a présomption d’innocence, le droit à la défense est garanti, éventuellement par commission d’office pour les personnes sans ressources. La qualité des avocats commis d’office étant souvent inégale, le Barreau et certaines ONG comme l’Association camerounaise des femmes juristes, offrent parfois gratuitement leur concours.

La nouvelle constitution de 1996 garantit la séparation des pouvoirs. Le président de la République est le garant de l’indépendance de la justice. Il nomme les magistrats du Conseil

CRR – Centre d’information géopolitique 28 31/05/2006 supérieur de la magistrature qu’il préside. Dans la pratique, l’indépendance de la justice est difficile à établir. De source judiciaire, on indique que, dans les dossiers " sensibles ", le juge s’informe auprès des autorités de l’attitude à adopter.

La plus haute instance judiciaire est la Cour suprême. Ses membres sont nommés par le président de la République. Il existe une cour d’appel dans chacune des 10 provinces et des tribunaux de première instance dans chacune des 58 divisions administratives. Une loi adoptée en avril 1998 a étendu la compétence des tribunaux militaires à toute infraction, même commise par des civils, impliquant des armes à feu. Le Conseil constitutionnel, dont le droit de saisine est restreint, a été instauré par la constitution de 1996.

Le droit coutumier repose sur les traditions du groupe ethnique dominant dans la région. Il est administré par les autorités traditionnelles de ce groupe. Cependant le droit coutumier ne peut s’exercer qu’avec l’accord des deux partis, le droit national s’appliquant dans les cas contraires. En outre le droit coutumier n’est valide que s’il n’est pas contraire à la justice, à l’équité et à la bonne conscience. Les tribunaux coutumiers restent très présents dans les zones rurales (souvent par méconnaissance du droit civil national) pour régler des litiges fonciers ou domestiques. La plupart des tribunaux traditionnels autorisent un recours en appel auprès d’une juridiction supérieure traditionnelle.

La justice camerounaise est marquée par sa lenteur, son inefficacité et sa corruption. Les détenus attendent parfois plusieurs années un jugement définitif. Une personne peut rester incarcérée sans jugement des mois, voire des années avant d’être libérés faute d’éléments à charge.

3) Peine de mort

Maintenue pour les crimes d’homicide prémédité, vol aggravé et trahison15.

En février 2003, 7 personnes sont condamnées à mort après avoir été reconnues coupables du meurtre d’un agent de police. En juin 2003, une infirmière s’est vue infliger la peine capitale. Elle avait été reconnue coupable d’avoir contaminée par le virus du Sida, les 2 enfants de son ancien compagnon, auxquels elle avait injecté son propre sang. (Amnesty International, Rapport 2004)

Au mois de juillet 2004, un responsable du ministère de la Justice a indiqué que les condamnations à mort n’étaient plus appliquées mais, en règle générale, commuées en peines de réclusion à perpétuité à la suite des recours en grâce déposés devant le président de la République. L’agent de l’État a déclaré que 27 recours étaient à l’étude, mais n’a fourni aucun renseignement sur les personnes encore sous le coup d’une condamnation à la peine capitale. Les dernières exécutions remontent à 1997.

4) Homosexualité

L’homosexualité est illégale.

15 Source : www.abolition.fr

CRR – Centre d’information géopolitique 29 31/05/2006

L’article 347 bis du Code Pénal prévoit une peine d’ « emprisonnement de six mois à 5 ans et une amende de 20.000 à 200.000 francs CFA pour toute personne qui a des rapports sexuels avec une personne de son sexe ». Le 25 mai 2005, 15 jeunes hommes et 2 femmes, accusés d’homosexualité, ont été arrêtés dans un bar de Yaoundé.

XIV. Service militaire

Armée de métier.

XV. Forces de sécurité

L’Armée : 23500 hommes : Terre 21 500, Marine 1 300, Air 300). Une absence de plus de 30 jours au sein de l’armée camerounaise est considérée comme une désertion. La peine encourue par les déserteurs peut aller jusqu’à 6 mois de prison.

La Gendarmerie : la Brigade anti-gang (appelée aussi Groupement mobile d’intervention - GMI), unité spéciale de l’armée et de la gendarmerie sous la direction du Colonel Pom, créée en 1998 dans les provinces du nord, de l’extrême nord et de l’Adamaoua pour lutter contre les " coupeurs de route ", sorte de bandits de grand chemin responsables de l’assassinat de plusieurs centaines de personnes au cours des dernières années.

La Police nationale. Le Service de sécurité présidentielle (ou Garde présidentielle). La DGRE, direction générale des renseignements. Milices privées des Lamibés (chefs traditionnels des provinces du Nord et de l’Extrême nord) opérant avec l’accord tacite du gouvernement Le Commandement Opérationnel : créé par décret présidentiel le 20 février 2000, pour mettre fin au grand banditisme régnant dans le pays et en particulier à Douala, le Commandement Opérationnel (CO) est composé d’éléments des différentes unités (gendarmerie, armée de l’air et de terre, police).

XVI. Agents de persécution

La Brigade anti-gang, qui s’attaque aux " coupeurs de route " ou présumés tels. Depuis sa création en 1998, entre 300 et 800 personnes innocentes auraient été exécutées de façon extra- judiciaire, estimation confirmée par le Comité national camerounais des droits de l’Homme (gouvernemental) La police. La gendarmerie. La Garde présidentielle. Les milices privées des Lamibés dans les provinces du nord. (Les hommes de main des Lamibés s’appellent les Dobaris.) Le Commandement Opérationnel

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XVII. Détention et torture

1) Législation et pratique

L’administration pénitentiaire est rattachée au Ministère de l’Intérieur.

La loi prévoit que " nul ne peut être maintenu en détention au-delà de 72 heures sans être présenté à une autorité judiciaire qui procèdera à son inculpation ou ordonnera sa mise en liberté ". Une loi de 1999 permet de prolonger la détention administrative de 15 jours pour combattre le banditisme et restaurer l’ordre public. Dans la pratique, la détention administrative est illimitée et arbitraire. Dans les deux provinces anglophones, il existe un droit de recours sur la légalité de la détention et la libération sur caution mais qui est rarement accordée.

Les partisans de formations d’opposition (notamment les membres du SDF), des journalistes et des militants des droits de l’homme sont harcelés, arrêtés, emprisonnés.

La pratique courante de " l’arrestation du vendredi" permet de maintenir les gens en garde-à- vue jusqu’au lundi en toute légalité. Ces arrestations, sous de fallacieux prétextes, sont souvent le résultat de règlements de compte privés. La loi relative à l’interdiction de la torture, promulguée le 10 janvier 1997, punit d’emprisonnement à vie celui qui, par la torture, cause involontairement la mort d’autrui, aucune circonstance « exceptionnelle » ne pouvant être invoquée pour justifier la torture, pas même l’ordre d’un supérieur ou d’une autorité publique. Policiers et gendarmes ne cessent de violer cette loi, et font rarement l’objet de poursuites judiciaires. Dans un rapport de février 2000, un rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture confirme que la torture et les autres formes de mauvais traitements sont utilisés « d’une manière massive et systématique » dans les locaux de la police et de la gendarmerie camerounaise, tant à l’égard des personnes appréhendées pour des motifs politiques que de droit commun. Les détenus sont souvent enjoints de verser des pots-de-vin à leur geôlier pour que cessent les mauvais traitements. Les nouveaux arrivants doivent également payer les anciens prisonniers pour pouvoir partager leur cellule.

Les représentants gouvernementaux continuent d’infliger des graves abus physiques aux anglophones survivants et incarcérés à la suite des évènements de mars 1997, en particulier dans les prisons de Nkondengui et Mfou et à Brigade de gendarmerie du Lac de Yaoundé. Au moins huit d’entre eux sont morts en détention des suites de ces mauvais traitements

2) Conditions de détention

Le Cameroun compte 73 établissements pénitentiaires, dont 10 prisons centrales jouant le rôle de maisons d’arrêt. En novembre 1996, selon l’Observatoire international des prisons, le Cameroun comptait 15.863 détenus dont plus de 75% en attente d’un jugement définitif. En 2004, la prison de Bamenda comptait 501 détenus, 295 d’entres eux étaient en détention provisoire. A la mi-2002, les nombres de détenus s’élevait à 20 000 à alors que la capacité totale des prisons est de 6749.

Le taux de mortalité dans les prisons reste très élevé en raison des mauvais traitements infligés par les forces de sécurité, en particulier en détention préventive, et des conditions carcérales très éprouvantes assimilables à une forme de traitement cruel, inhumain et dégradant : la surpopulation est extrême et les conditions d’hygiène déplorables. Les détenus

CRR – Centre d’information géopolitique 31 31/05/2006 ne sont pas nourris et ne peuvent compter que sur leur famille lorsqu’elle a les moyens de leur envoyer de la nourriture et qu’on lui laisse accéder au prisonnier. Les détenus n’ont également pas accès aux soins médicaux. Dans la plupart des prisons, les condamnés à mort doivent porter des chaînes aux pieds. 35 personnes sont décédées à la prison New Bell de Douala au cours des huit premiers mois de l’année 2003 16.

La prison centrale de Nkondengui (Yaoundé) a connu une certaine amélioration à la suite des travaux sanitaires financés par l’Union européenne en collaboration avec l’archidiocèse de Yaoundé et des ONG. Elle est divisée en plusieurs quartiers attribués selon la catégorie sociale, et de fait selon les moyens financiers du détenu. Elle compte 6 quartiers spéciaux, dont ceux des femmes, des mineurs ou des condamnées à mort (qui ici ne sont pas attachés) et deux " quartiers populaires ". Dans les deux quartiers " populaires " règne la surpopulation, la saleté, les problèmes de santé, la drogue. Les mineurs peuvent parfois suivre des cours et passer leurs examens. L’enseignement est dispensé par les aumôniers de la prison, des détenus et des enseignants mandatés par des ONG.

A la prison centrale de New Bell (Douala), dont les locaux vétustes datent de 1932, les médicaments sont à la charge des détenus. Les principales maladies sont la tuberculose, les dermatoses, la gale et le Sida. La prostitution y est fréquente. Le régisseur corrobore aussi les informations faisant état de torture et d’enchaînement des prisonniers récalcitrants. Les détenus sont battus, fouettés et enchaînés dans leurs cellules. La plupart des observateurs rapportent de nombreux viols et sévices sexuels en prison sur des mineurs de la part des autres détenus et des autorités pénitentiaires, même si les mineurs sont parfois détenus dans des cellules à part. Il existe très peu de prisons pour femmes et les femmes partagent parfois les cellules des hommes.

Depuis l’accord de décembre 1998, le CICR peut visiter toutes les prisons d’Etat. Cependant fin 1999, le gouvernement a refusé à l’envoyé spécial des Nations Unies l’accès aux cellules de la Brigade anti-gang. Pendant 7 ans, le CICR avait refusé d’obtempérer aux conditions restrictives d’accès aux prisons imposées par le gouvernement camerounais.

Prisons privées dans le nord :

Dans la province du Nord et de l’Extrême Nord, certains Lamibés (chefs traditionnels) possèdent des prisons privées, tolérées par le gouvernement. Ces chefs rançonnent leur "sujet " et pratiquent certaines formes d’esclavage. Les " prisons " dans les palais des chefs traditionnels de Rey Bouba (dont le Lamibé est un membre influent du parti au pouvoir), Gashiga, Bibemi et Tchéboa ont la réputation de faire subir des traitements particulièrement mauvais à leurs détenus. Des membres de l’UNDP qui en ont été victimes témoignent que certains de leurs co-détenus en sont morts.

3) Torture et traitements cruels, inhumains ou dégradants

Parmi les méthodes utilisées : technique de la " bastinade " (frapper le détenu sur la plante des pieds), technique de la " balançoire " où la victime est suspendue à une barre passée entre ses mains préalablement liées derrière les jambes et frappée souvent sur les parties génitales. Ce traitement est souvent infligé en détention provisoire à des militants politiques pacifistes arrêtés pour de brèves périodes lors de manifestations antigouvernementales ou de meeting

16 Cf. « Cameroun. La torture : Une réalité banale, une impunité systématique”, FIDH, octobre 2003.

CRR – Centre d’information géopolitique 32 31/05/2006 d’opposition. A la Brigade du Lac, siège de la gendarmerie, et au Commissariat de la police judiciaire à Yaoundé, le rapporteur de l’ONU a relevé sur les détenus " des coups de machettes et de chicote ". Les victimes se voient souvent refuser tout soin médical. Certains détenus sont morts des suites de leurs blessures.

Les exécutions extra-judiciaires restent fréquentes, notamment dans le nord du pays lors d’opérations menées par la Brigade anti-gang, par la gendarmerie et par la garde présidentielle. Au cours des années 2000 et 2001, les organisations de défense des droits de l’homme ont dénoncé les exactions commises par le Commandement Opérationnel à Douala. Cette unité s’est rendue coupable de la disparition de centaines de personnes.

XVIII. Groupes à risques

Le Cameroun apparaît pour beaucoup d’observateurs comme un pays stable. La pérennité du régime en place depuis plus de 20 ans est minutieusement entretenue par le président Biya et son entourage. Sous couvert de pluralisme politique et de processus de démocratisation, le RDPC parvient à étouffer toute contestation qu’elle vienne de l’opposition politique ou de la société civile.

Les membres des partis d’opposition sont régulièrement victimes d’arrestations. Les rassemblements organisés par ces partis sont souvent marqués par l’intervention, souvent « disproportionnée », des forces de sécurité. Les membres du SDF sont particulièrement visés par cette répression. Ce parti, pourtant autorisé et (faiblement) représenté à l’Assemblée nationale, est non seulement la deuxième force politique du pays mais c’est également une organisation majoritairement anglophone qui renvoie aux autorités le spectre du sécessionnisme (même si le SDF n’a aucune velléité indépendantiste).

Le pouvoir en place a décidé de traiter le « malaise » anglophone par des méthodes autoritaires. Le parti anglophone indépendantiste SCNC a été interdit en mai 2000. Les militants du SCNC et des autres mouvements anglophones sécessionnistes ont fait l’objet de nombreuses arrestations. Le 1er octobre 2001, trois militants sécessionnistes ont été tués et cinq autres blessés lors d’une manifestation, interdite par les autorités, organisée par le SCNC le jour du 40ème anniversaire de la réunification des Cameroun anglophone et francophone.

Si la presse fait régulièrement échos de la répression pratiquée à l’encontre de l’opposition politique, elle dénonce également la violence quotidienne des forces de sécurité et la corruption qui gangrène l’administration et la justice. Cette liberté de ton déplait aux autorités qui multiplient les manœuvres d’intimidation et de harcèlement (amendes, arrestations, saisies de publication…) à l’encontre des journalistes indépendants.

Les militants d’associations de défense des droits de l’homme sont la cible du gouvernement camerounais et ce particulièrement depuis 1999, année durant laquelle le Mouvement pour la défense des droits de l’homme et des libertés (MDDHL) a dénoncé les exactions commises dans la province du Nord par la Brigade anti-gang. Le harcèlement à l’encontre des défenseurs des droits de l’homme passe notamment par des perquisitions dans les locaux des ONG, des interdictions de sortie du territoire et des menaces téléphoniques.

CRR – Centre d’information géopolitique 33 31/05/2006

Compte tenu des conditions de détention dramatiques au Cameroun, les détenus (dans les commissariats, les brigades de gendarmerie et les prisons étatiques ou privées du nord du pays) sont particulièrement vulnérables. 35 personnes sont décédées à la prison New Bell de Douala au cours des huit premiers mois de l’année 2003.

Enfin, les femmes, en raison des violences spécifiques dont elles sont susceptibles de faire l’objet en tant que telles (Cf. la rubrique n°3 ‘ Femmes ‘dans le chapitre III : ‘ Population ‘ ) non pas de la part des autorités étatiques camerounaises mais émanant de certains éléments de la société civile, peuvent éventuellement être regardées comme appartenant elles aussi, et également sous réserve de circonstances cumulatives particulières, à un « groupe à risques ».

XIX. Réfugiés

1) Accueil dans le pays

Le Cameroun est signataire de la Convention de Genève de 1951 relative au statut des réfugiés et du Protocole de 1967. La loi contient des dispositions permettant d’accorder le statut de réfugiés au titre de la Convention de Genève.

Début 2000, le HCR devait entamer un programme de rapatriement et estimait que 20.000 Tchadiens allaient rentrer. En 2004, le Cameroun accueillait environ 60.000 réfugiés, 17 000 d’entres eux étaient arrivés en 2002. La communauté tchadienne compte environ 30.000 personnes mais la majorité d’entre elles sont intégrées aux communautés rurales et n’ont jamais été enregistrées. Elles ne bénéficient donc pas d’un titre de séjour permanent.

Le Cameroun accueille une importante communauté d’immigrés nigérians, qui, souvent, se plaignent de discriminations (spécialement visés par les contrôles d’identité « sécuritaires » dans les grandes villes et les arrestations pour séjour irrégulier)17.

2) A l’extérieur du pays

Il y a environ 32 800 camerounais réfugiés dans le monde. 0,5% ont obtenu le statut de réfugié en France18. En 2003, environ 8000 camerounais avaient cherché asile dans un pays industrialisé19.

XX. Documents d’identité et déplacements

Un système de carte d’identité a été instauré au Cameroun dans les années 1970. Les cartes d’identité sont délivrées par les services de police. Le port de ce document est obligatoire pour les citoyens camerounais.

Il est très facile de se procurer de faux documents d’identité (actes de naissances, etc…) au Cameroun. Des formulaires vierges sont en vente sur les marchés des grandes villes. Il est possible d’obtenir le cachet d’une administration en soudoyant un fonctionnaire20.

17 Cf. Rapports annuels US Committee for Refugees 15 Cf. La rubrique n°3 ‘ Femmes ‘dans le chapitre III : ‘ Population ‘ 18 Source: COMEDE, 2005 19 US Commitee for Refugees, 2004

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La loi ne prévoit aucune entrave à la liberté de circulation. Mais les barrages de police et points de contrôle par les forces de sécurité sont fréquents dans les villes et sur les grands axes routiers. Les forces de sécurité en profitent pour pratiquer couramment l’extorsion de fonds.

20 Source: « Fact-finding mission to Cameroon (23 january to 3 february 2001)”, Danish Immigration Service

CRR – Centre d’information géopolitique 35 31/05/2006

Chronologie

1884 Le Cameroun est placé sous protectorat allemand.

1916 Au cours de la Première guerre mondiale, les alliés français et britanniques conquièrent le Cameroun : le pays est divisé en deux zones.

1922 Le Cameroun est placé sous mandat de la Société des Nations (SDN) : les 4/5ème du territoire sont placés sous tutelle de la France (" Cameroun français "), la zone nord et sud-ouest sous administration britannique (" Cameroun septentrional et méridional ").

1948

10 février Création de l’Union des populations du Cameroun (UPC) à Douala par Ruben Um Nyobe, parti marxiste-léniniste issu de la mouvance syndicale CGT.

1955 Dissolution officielle de l’UPC pour " agitation subversive ". L’UPC lance alors une insurrection armée dans l’ouest du Cameroun français en pays bassa et bamiléké.

Début de la guerre d’indépendance.

L’armée française déploie plusieurs milliers d’hommes pour lutter contre la rébellion. Elle vient rapidement à bout des maquis implantés en pays bassa mais la résistance est beaucoup plus vive en pays bamiléké.

1958

Mai Ruben Um Nyobe est tué dans une embuscade.

Son successeur Félix-Roland Moumié est empoisonné à Genève par les services secrets français.

1960

1er janvier Proclamation de l’indépendance du Cameroun.

21 février Référendum constitutionnel.

5 mai Election d’Ahmadou Ahidjo à la présidence de la République. Charles

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Assalé est nommé Premier ministre, Louis Kémayou Happi est élu président de l’Assemblée.

20 septembre Admission à l’ONU.

1961

11 et 12 Plébiscite – Le nord du Cameroun britannique rejoint la Fédération du février Nigéria ; le sud opte pour le rattachement à l’Etat camerounais, les deux constituant une Fédération.

14 août Adoption de la Constitution fédérale. Ahidjo est président, (Cameroun méridional) vice-président.

1965

23 mars Réélection d’Ahmadou Ahidjo à la présidence et de John Ngu Foncha à la vice-présidence.

13 mai Démission de John Ngu Foncha du poste de Premier ministre de l’Etat fédéré du Cameroun occidental. Il est remplacé par Augustin Ngomjua.

1 juin M. Ahanda devient Premier ministre du Cameroun oriental en remplacement de M. Assalé.

Novembre Le Dr. Simon Tchoungi devient Premier ministre du Cameroun oriental.

1966

1er septembre Création de l’Union nationale camerounaise (UNC), parti unique regroupant les partis d’opposition (sauf l’Union des populations du Cameroun, UPC) et les formations dominantes de chacun des Etats : L’Union camerounaise (UC) du président Ahidjo et le Kameroun National Democratic Party (KNDP) du vice-président Foncha.

1967

31 décembre M. Muna est nommé Premier ministre du Cameroun occidental.

1970

28 mars Election présidentielle – Ahmadou Ahidjo est reconduit dans ses fonctions. M. Muna devient vice-président et reste Premier ministre.

Août Ernest Ouandié, dernier chef rebelle en activité est capturé.

1971

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15 janvier Ernest Ouandié est fusillé à Bafoussam.

1972

20 mai Référendum pour l’Etat unitaire (97% de oui). La " République fédérale du Cameroun " devient la " République unie du Cameroun ".

1973

18 mai Election de l’ Assemblée nationale.

1er juillet Retrait de l’Organisation commune africaine, malgache et mauricienne (OCAM).

Décembre Grève des étudiants.

1975

5 avril Réélection d’Ahmadou Ahidjo à la présidence de la République.

30 juin Paul Biya est nommé au nouveau poste de Premier ministre.

1976

Juillet Mot d’ordre de grève générale lancé par l’UPC (Union des populations du Cameroun) – Nombreuses arrestations.

1978

28 mai Elections législatives.

1980

5 avril Réélection d’Ahmadou Ahidjo.

1982

4 novembre Démission d’Ahmadou Ahidjo.

6 novembre Paul Biya devient président de la République. Bello Bouba Maïgari est nommé Premier ministre.

1983

29 mai Elections législatives.

23 août Luc Ayang devient Premier ministre.

27 août Ahmadou Ahidjo démissionne de la présidence de l’UNC.

CRR – Centre d’information géopolitique 38 31/05/2006

14 septembre Paul Biya est élu président de l’UNC.

1984

14 janvier Paul Biya est élu président de la République.

25 janvier Suppression du poste de premier ministre.

28 février Condamnation à mort par contumace d’Ahmadou Ahidjo, accusé de complot contre la sécurité de l’Etat.

6 avril Tentative de coup d’Etat militaire du colonel Saleh Ibrahim.

1985

21-24 mars L’UNC devient le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC).

1988

24 avril Réélection de Paul Biya.

1990

Février Arrestation de l’ancien bâtonnier Yondo Black, de Anicet Ekane et d’autres, coupables d’avoir voulu créer un parti politique d’opposition.

Décembre L’Assemblée nationale adopte lors de la session dite des libertés, une série de lois libérales dans le domaine de la création, des associations, des partis politiques, des journaux, etc.

5 décembre Vote de la loi instaurant le multipartisme.

1991 Grève générale de six mois dans tous le pays.

1992

1er mars Premières élections législatives pluralistes : 88 sièges pour le RDPC, 68 sièges pour le parti d’opposition, l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP). Les observateurs internationaux jugent cette consultation globalement satisfaisante.

9 avril est nommé Premier ministre.

11 octobre Paul Biya est réélu président (39,9%) devant John Fru Ndi (35,9%), candidat du Social Democratic Front (SDF). Manifestations et incidents violents notamment dans la région de Bamenda. Les résultats sont

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contestés par l’opposition qui estime avoir gagné. Le Département d’Etat américain qualifie le déroulement de ce scrutin de " hautement défaillant ".

27 octobre l’Etat d’urgence est décrété dans le Nord-Ouest. John Fru Ndi est assigné à résidence jusqu’à la fin de l’année.

1994

Janvier Conflit inter-ethnique entre Kotokos et Arabes-Choas dans le nord du pays.

Conflit frontalier avec le Nigéria pour la Péninsule de Bakassi.

1995

23 décembre Le Cameroun se dote d’une nouvelle constitution : mise en place d’un régime semi-présidentiel et d’un parlement bi-caméral. L’élaboration de ce projet avait rencontré une vive opposition des partis d’opposition.

Adoption de la loi supprimant la censure.

1996

18 janvier Promulgation de la Nouvelle Constitution.

21 janvier Les élections municipales donnent lieu à quelques incidents notamment à Garoua : victoire du RDPC de Paul Biya qui remporte 65% des communes.

4 mars Quatre personnes ont été tuées et plusieurs dizaines de blessés lors d’affrontements inter-ethniques entre les tribus Bambili et Babanki dans le nord-ouest.

12 mars Le prix du pain augmente de 30% à Yaoundé et Douala, de 70% à Maroua (extrême nord).

20 avril Titus Edzoa présente sa démission du secrétariat général de la présidence et du ministère de la Santé et sa candidature à l’élection présidentielle.

6 mai Les deux principaux partis d’opposition lancent une opération " villes mortes " largement suivie en province mais en partie ignorée à Douala et Yaoundé. L’opposition proteste contre la nomination par le gouvernement de délégués à la place de maires élus dans les grandes villes, alors que certains conseils municipaux sont passés à l’opposition en janvier. 40 membres du SDF sont arrêtés pour avoir manifesté contre ce décret.

9 mai Vianey Ombe Ndzana, directeur de publication de l’hebdomadaire

CRR – Centre d’information géopolitique 40 31/05/2006

Génération est condamné à 5 mois de prisons ferme et 9 millions de FCFA de dommages et intérêts pour " injure et diffamation ". C’est le quatrième journaliste à être condamné à une peine de prison ferme au cours des douze derniers mois.

16 mai On apprend qu’au moins huit personnes ont été tuées, soixante blessés et 2.000 autres déplacées à la suite d’un conflit foncier entre deux villages voisins dans le nord-ouest.

21 mai L’Allemagne conclut avec le Cameroun un accord de rééchelonnement sur 25 ans d’une dette de 250 millions de dollars. L’accord signé à Yaoundé reprend les dispositions arrêtées par les créanciers du Club de Paris en novembre.

28 août La radio nationale annonce que le Cameroun aura besoin de 30.000 tonnes de céréales dans les prochains mois pour éviter la famine qui menace les deux provinces du nord.

10 septembre L’UPC (Union des populations du Cameroun) créée en 1948 s’enfonce dans la division, à la suite d’un congrès dit de réconciliation qui ne rassemble qu’une partie de ses quatre factions.

10 septembre Peter Mafany Musonge, anglophone originaire de la province du Sud- Ouest et membre du RDPC est nommé Premier ministre en remplacement de Simon Achidi Achu.

3 octobre Titus Edzoa et son conseiller Thierry Atangana sont condamnés à 15 ans de prison ferme avec confiscation de tous leurs biens et à 350 millions de FCFA de dommages et intérêts pour détournements de fonds. Leurs avocats avaient quitté la salle en signe de protestation contre le déroulement du procès.

Novembre De violents affrontements ont éclaté début novembre dans le nord du pays, à l’occasion de la visite d’un député de la circonscription, membre de l’opposition : 2 morts et une trentaine de blessés.

1997

6 janvier John Fru Ndi et Bello Bouba Maïgari, les deux principaux leaders de l’opposition s’allient contre le président Paul Biya et son parti pour les élections législatives et présidentielles de 1997.

29 mars Un groupe armé non-identifié s’attaque aux forces de sécurité dans différentes localités de la province du Nord-Ouest (anglophone), faisant une dizaine de morts dont 3 gendarmes. L’opposition accuse le gouvernement d’être à l’origine de ces attaques, dans le but de " créer une situation de confusion " à la veille des élections législatives. 300 personnes sont arrêtées.

26-31 mars Série d’actions violentes du Southern Cameroon National Council

CRR – Centre d’information géopolitique 41 31/05/2006

(SCNC) dans la province du Nord-Ouest contre les forces de l’ordre et des administrations : au moins 13 morts et 20 blessés de part et d’autre.

5 mai La presse rapporte qu’un civil et trois officiers de l’armée, arrêtés dans le cadre de l’enquête sur les attaques armées dans le Nord-Ouest, ont été torturés à mort.

17 mai Les élections législatives se déroulent dans le calme mais les observateurs indépendants du Commonwealth et de la francophonie dénoncent des fraudes. La Cour suprême enregistre de nombreux recours dans les jours qui suivent. L’opposition réclame l’annulation du scrutin.

24 mai Les résultats des élections donnent le RDPC de Paul Biya très largement majoritaire avec 116 des 180 sièges.

4 juin La Cour suprême rejette la demande d’annulation générale des élections législatives déposées par quatre formations d’opposition. L’annulation n’est décidée que dans trois circonscriptions d’abord acquises au RDPC, correspondant à 7 sièges.

6 juin Le RDPC disposera de 109 des 180 sièges de l’Assemblée. Après les élections partielles du 3 août, le RDPC obtient la majorité absolue avec 116 sièges.

Une dizaine d’opposants sont arrêtés lors d’une manifestation.

1998

13 janvier Condamnation de Pius Njawé, directeur de l’hebdomadaire Le Messager, à deux ans de prison ferme pour " propagation de fausses nouvelles ". L’hebdomadaire avait publié un article évoquant la santé du président Biya.

27 janvier Condamnation de Séverin Tchounkeu, journaliste et directeur du tri- hebdomadaire L’Expression à trois ans de prison avec sursis et à 500.000 FCF d’amende pour " diffamation ".

14 avril La cour d’appel réduit la peine de Pius Njawé à un an de prison.

12 octobre Pius Njawé est libéré suite à la grâce présidentielle.

1999

17 janvier Hilaire Tshudjo Kamga ; Secrétaire général de l’organisation non- gouvernementale Conscience Africaine, est gravement blessé par des hommes armés. H.T Kamga avait été menacé à plusieurs reprises par téléphone.

Avril Ouverture du procès devant un tribunal militaire de 65 " anglophones "

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détenus depuis plus de deux ans à la suite des évènements de mars 1997.

27 avril La cour d’appel confirme la condamnation à 15 ans d’emprisonnement de Titus Edzoa, ancien ministre de la Santé et secrétaire général de la présidence, condamné en première instance en 1997 pour " détournement de fonds et corruption ". Titus Edzoa est détenu dans un quartier de haute sécurité.

9 juin Les gendarmes et la police dispersent violemment une manifestation pacifique d’étudiants de l’université de Yaoundé, rassemblés pour réclamer la réparation d’une chaussée dangereuse. Plusieurs étudiants sont battus à coups de bâtons et de crosse de fusil.

Octobre A Bafoussam (province de l’Ouest), quatre employés municipaux ont été battus en public de 50 coups de bâtons sur la plante des pieds par des gendarmes, sur ordre du gouverneur de la province Admadou Tidjani, surnommé " Pinochet " par les habitants.

Le tribunal militaire a rendu son jugement : 3 anglophones condamnés à perpétuité, 34 autres inculpés se voient infliger des peines d’emprisonnement allant de 1 à 20 ans. Au moins huit autres personnes étaient mortes en détention des suites de mauvais traitements avant l’ouverture du procès.

30 décembre Autoproclamation à la radio d’Etat de la " République du Cameroun méridional " par le Southern Cameroon National Council (SCNC) par le président de son Comité stratégique, le magistrat Ebong Frederick Alobwede.

2000

Janvier Arrestation de Ebong Frederick Alobwede et de ses lieutenants.

Fin janvier Mboua Massok, l’un des dirigeants du parti Programme Social pour la Liberté et la Démocratie (PSLD) a été arrêté en même temps qu’un dirigeant étudiant, Guy Simon Ngakam ; tous deux auraient été passées à tabac par les policiers.

20 février Instauration du Commandement Opérationnel à Douala.

Avril Promulgation de la loi de 1990 mettant fin au monopole de l’Etat sur la radio et la télévision.

11 avril « Reporters sans frontières » proteste contre la condamnation du journaliste Michel Pekoua à six mois de prison ferme pour diffamation.

Mai Visite du secrétaire général de l’ONU au Cameroun. A l’issue de rencontres avec les leaders de l’opposition avec lesquels il a discuté du problème anglophone, Kofi Annan a réaffirmé l’unité d’un Cameroun " multiethnique et multilinguistique ". Une centaine de personnes

CRR – Centre d’information géopolitique 43 31/05/2006

auraient été arrêtées dans les villes de Kumba et Muyuka avant la visite de K. Annan pour leur appartenance présumée au SCNC.

Interdiction du SCNC.

Les corps de neuf personnes, qui auraient été tuées par des membres du Commandement Opérationnel, sont découverts dans un village proche de Douala

Juillet Daniel Atangana et Theirry Mbouza, journalistes de Dikalo, sont condamnés à 6 mois d’emprisonnement pour diffamation. Ils avaient publié des déclarations accusant la société Nationale des Hydrocarbures (SNH) de détournement de fonds.

Août Demande de dialogue adressée au gouvernement par le SCNC posant comme condition la reconnaissance de la République autoproclamée du Cameroun méridional et la libération de Ebong Frederick Alobwede.

14 septembre Mathew Titiahonjo Mboh, membre du SCNC, meurt dans la prison de Bafoussam (province de l’Ouest), faute d’avoir reçu les soins dont il avait besoin.

Novembre découverte d’un charnier contenant au moins 36 corps dans un cimetière de Douala.

Arrestation de 3 partisans de la SCYL à Nkwen

Début 13 personnes détenues sans inculpation ni jugement sont exécutées peu Décembre de temps après que la brigade antigang eut reçu du Ministère de la défense l’ordre de relâcher 77 détenus, incarcérés dans un entre de détention administré par la brigade de Maroua (Province du Nord).

2001

Janvier Dans son communiqué de presse aux Chefs d’Etats réunis à Yaoundé au sommet France- Afrique, la Ligue Camerounaise des Droits de l’Homme (LCDH) tire la sonnette d’alarme sur « l’esclavage et le commerce des enfants au Cameroun ».

23 janvier Neuf jeunes sont interpellés à leur domicile de Douala par le Commandement Opérationnel (C.O.) pour le vol d’une bouteille de gaz. Il s'agit de Marc Etaha, Frederic Ngouffo, Chatry Kuete, Eric Chia, Jean Roger Tchiwan, Kouatou Charles, Chia Effician, Kouatou Elysee et Kuate Fabrice.

Mars Les médias estiment que les jeunes interpellés à Douala, portés disparus depuis janvier, ont vraisemblablement été exécutés. Ils les désignent comme « les neuf de Douala » ou «les neuf de Bépanda-omnisport» (du nom d’un quartier populaire de Douala).

CRR – Centre d’information géopolitique 44 31/05/2006

La Ligue Camerounaise des Droits de la Personne (LCDP) dénonce les exactions commises par le Commandement Opérationnel.

7 avril Le président Paul Biya procède à une vague de limogeages dont celui du général de brigade Philippe Mpay, chef du Commandement Opérationnel de Douala et commandant de la deuxième région militaire du pays. Ph. Mpay retrouve cependant un poste sensible et important en tant que commandant militaire de la région de Bamenda, le fief de l’opposition anglophone.

A Douala, une manifestation organisée par le Comité pour les « neuf disparus de Bépanda » (le C9), est violemment réprimée. Des représentants de petites formations politiques et des jeunes du quartier de Bépanda participaient à ce rassemblement. Une vingtaine de manifestants est interpellée et plusieurs personnes sont blessées. Dans le quartier Nkongmodo à quelques kilomètres, une manifestation parallèle est organisée, toujours pour réclamer la vérité sur le sort des neufs jeunes de Bépanda. Une vingtaine de personnes, dont Anicet Ekane, le dirigeant du MANIDEM (Mouvement Africain pour la Nouvelle Indépendance et la Démocratie) et Victorin Hameni Bieuleu, le Président de l’UFDC (Union des Forces démocratiques du Cameroun), sont interpellés lors de ces manifestations.

16 avril Création à Douala du Collectif National contre l’Impunité (CNI). Cet organisme s’est donné pour objectif « de recenser tous les crimes de sang impunis commis par les agents de l’Etat contre des citoyens, d’œuvrer pour que les coupables soient jugés et punis par des juridictions nationales ou internationales, pour que les victimes et familles des victimes soient dédommagées ».

26 avril Arrestations à Douala d’Olivier Sande et de 4 membres du Collectif National contre l’Impunité (CNI); il s’agit De Djeukam Tchamni, Sindjoun Pokam, Djino Leandre et Peter William Mandio. Les quatre hommes sont interpellés alors qu’ils organisent, pour le compte de leur association créée mi-avril, les « funérailles des martyrs » à la mémoire des victimes du régime Biya depuis 1984. Le Tribunal d’Instance de Douala les inculpe de « participation à des manifestations interdites ». Ils encourent une amende de 5.000 à 100 000 francs CFA ou une peine de 15 jours à 6 mois d’emprisonnement pour «troubles à l’ordre public».

27 avril Un remaniement ministériel vient sanctionner certains ministres cités dans des affaires de corruption.

8 mai Les 4 responsables du Collectif National contre l’Impunité (CNI) et Olivier Sande sont remis en liberté sous caution.

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9 mai Huit militaires sont inculpés dans le cadre de l’enquête sur les « neuf disparus de Douala » : le colonel Bobbo Ousmanou, ex-commandant de la Légion de gendarmerie du Littoral, le capitaine Jean-Jacques abah ndzengue,le capitaine Appolinaire Onana Ambassa, le sous-lieutenant Eyong, l’adjudant-chef Houag, le maréchal des logis-chef Evondou, le chef de bataillon Yerimou et l’adjudant-chef Adroumpaï.

Juin Albert Mukong, président d’une association de défense des droits de l’Homme camerounaise et membre du parti Social Democratic Front (SDF), reçoit la somme de 95.7 millions de F CFA de l’Etat camerounais pour indemnisation de sévices subis à la fin des années 80.

7 juillet Réélection pour 5 ans du président Paul Biya à la tête du parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC). P. Biya est seul candidat à sa propre succession.

La Conférence épiscopale camerounaise publie une déclaration sur l’insécurité, la corruption et le respect de la loi et des droits de l’homme. Ce texte est signé par l’archevêque de Yaoundé, Mgr André Wouking.

31 juillet Le directeur du journal Mutations, Haman Mana est placé en garde à vue pour avoir publié le texte de décrets de loi présidentiels classés « secret défense » et portant sur la réforme de l’armée. Il refuse de révéler ses sources.

nuit du 20 au Rémy Ngono, journaliste de la station privée RTS, est brutalisé par des 21 août policiers. On lui reproche son ton critique à l’égard des forces de l’ordre dans son émission quotidienne « Coup franc ».

22 août Georges Baongla, journaliste de l’hebdomadaire Le Démenti, est arrêté pour « publication de fausses nouvelles », après la publication d’un article le 14 août mettant en cause le ministre de l’Economie dans une affaire de détournement de fonds.

1er octobre Trois militants sécessionnistes sont tués et cinq autres blessés lors d’une manifestation, le jour du 40ème anniversaire de la réunification des Cameroun anglophone et francophone. Martin Luma et Nfor Ngala nfor, les deux vice-présidents du parti sécessionniste anglophone Southern Cameroun National Council (SCNC), sont arrêtés. Frida Litongo, Chief Ayamba et James Sam Sabum, militants du Southern National Youth League (SCYL), un autre parti sécessionniste, subissent le même sort. Au lendemain de cette manifestation la presse anglophone fait état de 4 morts, 15 blessés et 200 arrestations.

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La Ligue Camerounaise des Droits de l’Homme dénonce la continuation d’actes de terrorisme d’Etat du régime de Paul Biya dans la journée du 1er octobre à Kumbo (province du nord-est); Elle dénombre des dizaines de tués, des milliers de blessés ainsi que des arrestations massives notamment de journalistes.

18 octobre Le procès des officiers impliqués dans les bavures perpétrées par le Commandement Opérationnel est annulé pour vice de procédure.

5 novembre Un jeune détenu âgé de 22 ans, Sylvestre Likeng Oum, décède au cours de sa garde à vue entre le 2 et le 5 novembre 2001 dans le commissariat de Sécurité Publique d’Edéa.

17 novembre Les 18 militants sécessionnistes anglophones appartenant au Southern Cameroun National Council (SCNC) arrêtés le 1er octobre sont libérés.

Décembre L’ACAT-France demande l’ouverture d’une enquête complète et impartiale sur les circonstances du décès durant sa garde à vue du jeune Sylvestre Likeng Oum début novembre. Il aurait été soumis à des actes de torture et serait mort des suites de ses blessures.

11 décembre Le Collectif National contre l’Impunité (CNI), créé le 16 avril à Douala, dépose officiellement plainte devant les tribunaux belges contre Paul Biya pour crimes contre l’humanité. Cette plainte vise notamment les exécutions extrajudiciaires qui se sont déroulées sous la responsabilité du Commandement Opérationnel (C. O.). Elle concerne également des faits commis par le « Groupement polyvalent d’intervention de la Gendarmerie » (GPIG). La plainte déposée par le Collectif vise, outre le Président Biya, Marafa Yaya, actuel secrétaire général de la Présidence, Amadou Ali, ministre de la Défense et Eban Otong, gouverneur de la province du Littoral et le général Philippe Mpay, commandant du Commandement Opérationnel au moment des faits.

2002

Janvier Des militants du Social Democratic Front (SDF), premier parti d’opposition, sont victimes d’agressions de la part de sympathisants du RDPC (Rassemblement démocratique du peuple camerounais), le parti au pouvoir. Le SDF se voit refuser des autorisations de meetings dans les provinces du Sud pour « menace de troubles à l’ordre public ».

9 janvier Le directeur de l’hebdomadaire « Le Démenti », Georges Baongla est écroué. Il avait été condamné en octobre 2001 à 5 ans de prison et à une forte amende pour « escroquerie ». « Le Démenti » avait dénoncé, à plusieurs reprises, des malversations financières (détournements de fonds publics) de la part du ministre de l’Economie et des Finances.

12 janvier Djeukam Tchameni est exclu du Collectif National contre l’Impunité, l’organisation dont il est le Président. Six membres du CNI l’accusent

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d’utiliser le collectif à des fins personnelles et de placer sa famille aux postes de responsabilité.

15 janvier Olivier Sande, l’un des signataires du communiqué de presse faisant état de l’exclusion de Djeukam tchameni, déclare au journal Le Messager qu’il regrette son geste. Olivier Sande révèle avoir reçu de l’argent pour destituer Djeukam. Le journal souligne qu’il peut s’agir une tentative de déstabilisation du CNI orchestrée par le pouvoir.

16 janvier Arrestation d’Abdoulaye Math, Président du Mouvement de la défense des droits de l’homme et des libertés (MDDHL), à Yaoundé. A la veille d’une importante conférence internationale sur les droits de l’homme, son passeport et tous ses documents lui ont été confisqués.

1er mars Le directeur de publication de l’hebdomadaire Le Front Indépendant, Peter William Mandio, est interpellé à Yaoundé et interrogé pour avoir évoqué dans un article une affaire de mœurs impliquant des hauts fonctionnaires de la présidence (il n’avait pourtant mentionné aucuns noms). Jacques Blaise Mvie, directeur de publication de la Nouvelle Presse, recherché par les forces de l’ordre pour le même motif, se réfugie dans la clandestinité.

4 mars Libération de Peter William Mandio qui «doit rester à la disposition de la justice ».

Mi-mars Des centaines de personnes sont arrêtées et détenues au cours de l’Opération Harmattan, menée par la police dans le cadre de la lutte contre le crime. Le Bureau national de la sécurité rapporte que 2 792 personnes ont été détenues pour interrogatoire et que des stupéfiants ont été saisis. Les autorités annoncent également que deux personnes ont été tuées dans des fusillades avec la police. Rafles policières soudaines, perquisitions de domiciles, vérifications de voitures et d’identité se succèdent. Certaines sources accusent la police d’arrestations arbitraires et d’humiliations.

17 avril La section camerounaise de l’ONG Nouveaux-Droits de l’Homme dénonce la disparition de neuf individus détenus à la brigade territoriale de gendarmerie de Bafoussam (280 km à l’ouest de Yaoundé). Les neuf personnes, placées en garde à vue depuis le 14 mars, étaient accusées de « meurtre, vol aggravé et port d’arme ». L’affaire de Bafoussam intervient environ un an après l'affaire des «neuf de Douala » dans laquelle les forces de l’ordre étaient impliquées.

18 avril Jacques Fame Ndongo, le ministre de la Communication, assure à l’AFP que les détenus arrêtés en mars à Bafoussam sont bel et bien vivants.

21 avril Le procès des neuf gendarmes camerounais accusés d’être impliqués dans l’affaire des « neuf disparus de Douala » s’ouvre devant le tribunal militaire de Yaoundé.

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28 mai Le tribunal militaire de Yaoundé a entendu pour la première fois les gendarmes qui doivent répondre « d’assassinat, complicité d’assassinat et violation des consignes » dans l’affaire des « disparus de Douala ». L’audience a finalement été renvoyée au 11 juin 2002.

30 juin Elections municipales et législatives suivies de manifestations dans la province du Nord-Ouest.

9 juillet Le tribunal militaire de Yaoudé condamne 2 gendarmes pour leur implication dans la disparition des « 9 de Bepanda ». Les 6 autres gendarmes impliqués dans cette affaire ont été acquittés.

10 septembre Shiynyuy Georges, militant du SCNC, est interpellé par des gendarmes à Kumbo (province du Nord-Ouest). Il décède en garde à vue le 16 septembre en garde à vue alors qu’on le transférait vers Bamenda.

28 septembre Arrestation à Ayukaba (province du Sud-Ouest) d’Albert Mukong, ancien directeur de Human Rights defence Group et proche du SCNC. Il a été conduit à la gendarmerie de Mamfé, où il est resté détenu jusqu’à sa remise en liberté sous caution le 22 octobre. Il était accusé, de même que 7 membres du SCNC, de réunions illégales, troubles à l’ordre public, banditisme et sécession.

2003

Janvier et Benoît Essiga, président de la Confédération syndicale des travailleurs février du Cameroun (CSTC), et 13 autres syndicalistes au moins ont été arrêtés et maintenus en détention durant plusieurs jours à chaque fois. Les autorités les ont accusés d’être responsables de déraillements de trains qui s’étaient produits dans la province du Centre

5 février Une rencontre d’hommes politiques du nord Cameroun, organisée à Yaoundé, à l’initiative de l’ANDP, est interdite.

14 avril Les forces de sécurité empêchent la publication du journal Mutations et saisissent le disque informatique contenant l’édition du jour du quotidien. Ce numéro comportait un article au sujet de la succession du président Paul Biya. Le directeur de publication et plusieurs journalistes sont arrêtés et placés en détention durant une courte période. Deux jours plus tard, des membres des forces de l’ordre habillés en civil retirent des kiosques des exemplaires de Mutations

Juillet Violences à Douala suite au passage à tabac d’un conducteur de moto- taxi par des policiers.

Novembre Les autorités harcèlent et menacent des défenseurs des droits humains soupçonnés d’avoir aidé la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), dont les bureaux sont à Paris, à élaborer un rapport sur la torture au Cameroun qui a été publié au mois d'octobre

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Décembre Réforme de l’Observatoire National des Elections (ONEL)

2004

12 janvier Jean-Jacques Ekindi et d’autres chefs de file du Front des forces alternatives (FFA), un parti d’opposition, sont arrêtés à Douala par la police mobile paramilitaire et placés en détention durant de courtes périodes. Ils ont été empêchés de lancer une pétition publique en faveur d’un scrutin présidentiel libre et équitable.

Mars Création d’une Coalition pour la Réconciliation et la reconstruction Nationale (CRRN) regroupant le SDF et l’Union démocratique camerounaise (UDC) en vue des élections présidentielles.

6 juillet Plusieurs centaines de gendarmes antiémeutes ont interrompu une marche pacifique à Yaoundé, la capitale. Au nombre des manifestants qui auraient été agressés figuraient John Fru Ndi, le dirigeant du SDF, ainsi que des députés de ce parti.

11 juillet Deux correspondants locaux de la BBC ont été arrêtés par des soldats sur la presqu’île de Bakassi. Alors qu’ils étaient officiellement autorisés à s’y rendre, ils ont été accusés d’espionnage, ont vu leur matériel et leurs documents confisqués durant une courte période et ont été placés en résidence surveillée dans la ville de Limbe jusqu’au 16 juillet

10 août La police et la gendarmerie ont cerné un groupe de sympathisants de la CNRR durant plusieurs heures dans le but de les empêcher de participer à une marche. Un manifestant qui était passé au travers du cordon de sécurité aurait été frappé à coups de poing et fouetté

20 août Près de Bamenda, la capitale de la province du Nord-Ouest, John Kohtem, un dirigeant du SDF, a été battu à mort, apparemment par des partisans d’un député, dirigeant local du RDPC. À la suite des protestations massives formulées par des militants du SDF, 11 personnes ont été arrêtées en septembre dans le cadre de l’enquête sur cet homicide. Fin 2003, aucune inculpation n’avait été prononcée contre le député ni les 11 autres personnes

31 août Quelque 300 militants de l’opposition manifestent à Yaoundé, à l’appel de la Coalition pour la Réconciliation et la reconstruction Nationale (CRRN)

9 septembre 11 personnes sont interpellées dans le cadre de l’assassinat de John Khontem, responsable local du SDF assassiné dans la nuit du 20 au 21 août 2004 à Bamenda. La semaine suivante, l’opposition avait organisé plusieurs manifestations pour demander l’arrestation du chef du village de Balikumbat, membre du parti au pouvoir, qu’elle accuse d’être à l’origine du meurtre.

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15 septembre Le chef de l’UDC, Amadou Ndam Njoya, est choisi pour représenter la Coalition pour la Réconciliation et la reconstruction Nationale (CRRN) aux élections présidentielles. John Fru Ndi refuse ce choix et décide de se porter également candidat.

14 octobre Le Président Paul Biya est réélu avec 70,92% des voix. 80% des électeurs se sont rendus aux urnes.

8 novembre Le Comité national exécutif du SDF prononce l’exclusion de plusieurs cadres du partis qui avaient soutenu, lors de l’élection présidentielle, la candidature d’Adamou Ndam Njoya, de l’UDC, préféré à John Fru Ndi pour représenter la Coalition de l’opposition.

2005

3 janvier Mutinerie à la prison de New Bell à Douala. Les affrontements entre détenus ont fait un mort. La répression par les gardiens conduit au décès par balle de 4 autres prisonniers.

7 janvier A la suite du décret présidentiel portant commutation de peines (à l’occasion du Nouvel An), 793 parmi les détenus à New-Bell bénéficient de la grâce présidentielle et sont libérés ( en deux vagues)

17 janvier 45 détenus parmi les quelques 1500 de la prison centrale de Bafoussam (prévue pour 300 places) parviennent à s’évader ; 5 autres fugitifs sont rattrapés puis hospitalisés en ville.

18 février 7 gendarmes en poste à Douala (brigade d’Akwa-Nord), sont suspendus de leurs fonctions et arrêtés après s’être rendus coupables de tortures ayant entraîné la mort le 8 février d’un chef d’agence bancaire, Emmanuel Moutoumbi, arrêté le 17 janvier 2005 sous l’accusation par un supérieur de détournements de fonds, et depuis lors gardé à vue.

20 février Lancement par le Délégué général à la Sûreté Nationale, Edgard Alain Mebe Ngo’o des ESIR (équipes spéciales d’interventions rapides) unités de police spécialisées dans la lutte contre le grand banditisme, déployées dès lors à Yaoundé puis à Garoua et à Douala.

26 avril 2 journalistes de « L’œil du Sahel » ont été condamnés pour diffamation à 5 mois de prison et à une amende de 5 millions de francs CFA (7620 euros) par le Tribunal de Maroua. En janvier 2005, ils avaient dénoncé les exactions et rackets commis par les forces de l’ordre sur les populations. Par peur d’être arrêtés, les 2 journalistes ne se sont pas présentés au tribunal.

Avril et mai De multiples revendications estudiantines (bourses, etc), portées notamment par l’Addec (assoc. De défense des droits des étudiants camerounais), ainsi que celles de certains enseignants universitaires pour le paiement de diverses primes, occasionnent des grèves, blocages puis fermetures des Universités de Yaoundé I (campus de Ngoa Ekelle)

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et II, de Douala et de Buéa.

24 mai De violents affrontements à Molyko, la cité universitaire de la ville de Buéa, entre étudiants, « casseurs », et forces de l’ordre occasionnent un mort (un chauffeur de taxi) et une cinquantaine de blessés parmi les forces de l’ordre (parmi lesquelles le sous-préfet de Buéa). 14 août 53 détenus de la prison centrale de Buéa mettent à profit la confusion créée par la prise en otage d’un gardien pour s’évader. Quatre des fugitifs sont tués et sept sont repris dans les heures qui suivent.

25 et 26 août Rencontre tripartite (Cameroun/ Centrafrique/ Tchad) à Yaoundé de concertation sous-régionale sur l’insécurité transfrontalière, faisant suite aux opérations conjointes menées par l’armée camerounaise et leurs homologues centrafricains (FACA) le 15 juin 2005 à Tamoneguezé (district camerounais d’Ouli) et le 5 juillet à Sagani (RCA) contre des « rebelles Zakawas » et « coupeurs de route » enlevant fréquemment contre rançon des membres d’une communauté locale d’éleveurs Bororo

27 septembre Dans le procès de l’affaire Moutombi (janvier 2005) le tribunal militaire de Douala requalifie les faits de torture retenus à l’encontre de plusieurs des sept gendarmes inculpés en « tolérance d’une atteinte aux droits individuels ».

Au cours d’une conférence de presse au siège du parti à Yaoundé, le Secrétaire général du S.D.F., le Pr. Tazoacha Asonganyi, dénonçant notamment « le culte de la personnalité qui a pour corollaire l’infaillibilité du chef », annonce ne plus briguer à sa propre succession lors de la Convention du parti prévue en février 2006. (par ailleurs, plusieurs sources évoquent la personne de Bernard Muna, ancien Secrétaire général exclu puis réhabilité du parti, et membre-fondateur du S.D.F., comme étant susceptible de vouloir disputer à J. Fru Ndi la présidence du parti.

13-14 Faisant suite à celui organisé les 10-11 octobre à N’Djamena, la Banque octobre mondiale organise à Yaoundé, deux ans jour pour jour après l’acheminement du premier barril, un séminaire d’évaluation-clé de l’oléoduc Tchad-Cameroun, afin de délivrer un éventuel « rapport d’achèvement » (confirmant ainsi implicitement des rumeurs sur le désengagement de cette institution internationale dans ce projet

9 décembre Fonction publique : l’instauration du ‘S.I.G.I.P.E.S.’(système informatique de gestion intégrée des personnels de l’Etat et de la Solde) est l’objet de polémiques, ayant, d’une part, fait apparaître l’émargement de 7000 fonctionnaires fictifs, d’autre part, de nombreux autres fonctionnaires protestant « d’erreurs » engendrées par le nouveau système dans le virement automatique des salaires sur des comptes bancaires ( dont, pourtant, les coordonnées ont normalement dues être fournies par les intéressés). 2006

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21 février Lancement par le président Paul Biya d’une vaste opération de lutte contre la corruption et les détournements de fonds publics ; dès le lendemain, plusieurs directeurs généraux de firmes étatiques camerounaises (immobilier, crédit foncier) sont arrêtés.

22 mars Verdict dans l’affaire Moutoumbi (janvier 2005) : le tribunal militaire de Douala condamne le commandant Anatole Banem ainsi que les autres gendarmes inculpés qui étaient sous ses ordres à des peines allant de six mois de réclusion militaire à dix ans d’emprisonnement ferme

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Bibliographie

1) Ouvrages

Dictionnaire géopolitique des Etats, sous la Direction de Yves Lacoste, Flammarion,1998. "Mondes Rebelles", éditions Michalon, 1999 et 2001. " L’Etat de Droit ", Centre d’Etudes de l’Afrique Noire (CEAN), Avril 1997. " Les minorités dans le monde ", Joseph Yacoub, édition Désclée de Brouwer, 1998. "World directory of Minorities ", Minority rights Group International, 1997. "Regional Survey in the World : Africa South of the Sahara – Cameroon", Europa publications, 2000.

2) Revues

Politique Africaine, « La presse privée et le pouvoir au Cameroun », Thomas Atenga, n°97 – mars 2005.

3) Rapports

Etats du Monde (2001-2005). Département d’Etat américain : Rapports annuels. Amnesty International : Rapports annuels. ; " Cameroun – mépris flagrants des droits de l’homme " ", septembre 1997 ; " Cameroun – Exécutions extra-judiciaires dans les provinces du Nord et de l’Extrême-Nord ", décembre 1998 ; Bulletin d’information du 29 février 2000 : " Cameroun : Un expert des Nations unies confirme que la torture est pratiquée de manière massive et systématique ". Reporters sans Frontières : Rapports annuels . Observatoire international des prisons : Rapport annuel 1998. US Committee for Refugees, World Refugee Survey : Rapports annuels 2000 et 2004 FIDH : " Cameroun : arbitraire, impunité et répression ", Mai 1998 ; « Cameroun : Peur au ventre et chape de plomb », juillet 2001 ; “Cameroun : La Torture: une réalité “banale”, une impunité systématique”, Mission Internationale d’enquête n°370, octobre 2003 United Kingdom: Immigration and Nationality Directorate / Home Office, United Kingdom: “Country Assesment - Cameroun”, 1999-2003; « Report of fact-finding mission to Cameroon, 17-25 january 2004», Journaliste en Danger : “Létat de la liberté de la presse en Afrique Centtrale- Rapport 2004 » Commonwealth Observer Group : « Cameroun présidential Election - 11 october 2004”

4) Etudes

« Relations entre les chefferies traditionnelles et les autorités étatiques au Cameroun » Service Documentation & Recherches (OFPRA), 06/10/2003 « Cameroun : chronologie janvier 2001-mai 2002 », Service Documentation & Recherches (OFPRA), 05/06/02

5) Presse

Jeune Afrique Economie : " Ces sécessionnistes qui menacent le Cameroun ", 14 avril 1997.

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La Documentation française : Afrique Contemporaine- " Tendances actuelles de l’Islam au Cameroun ", 2ème trimestre 2000. Presse internationale. Dépêches d’agences. Afrique Express

6) Sites Internet www.France-cam.cm/Cameroun : site de l’Ambassade de France au Cameroun. www.ipu.org/parline-fr : base de données PARLINE www.survival-international.org : site de l’ONG Survival.

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