Balzac, Honor
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« Les romans mis en pièces»: étude sur la pratique de l’adaptation théâtrale à la fin du XIXe siècle. Le cas d’Émile Zola (1873-1902). by Geneviève De Viveiros A thesis submitted in conformity with the requirements for the degree of Doctor of Philosophy Département d’Études Françaises University of Toronto © Copyright by Geneviève De Viveiros 2009 « Les romans mis en pièces »: étude sur la pratique de l’adaptation théâtrale à la fin du XIXe siècle. Le cas d’Émile Zola (1873-1902). Geneviève De Viveiros Doctor of Philosophy Degree Département d’études françaises University of Toronto 2009 Résumé Le XIXe siècle marque la consécration d’une nouvelle tendance au théâtre : la représentation de pièces tirées de romans. En France, cette pratique connaît, surtout dans la seconde moitié du siècle, une popularité sans précédent. La thèse est une étude historique de ce phénomène. La première partie situe la pratique de l’adaptation dans le contexte culturel de la deuxième moitié du XIXe siècle. La deuxième partie étudie les conditions qui entourent la production de ce type de pièce (lieux de représentation, auteurs, éditeurs). Nous nous intéressons aussi dans cette partie au discours critique et à la perception des adaptations théâtrales dans le milieu littéraire. Enfin, la troisième partie se concentre sur les adaptations théâtrales tirées des œuvres d’Émile Zola et représentées à Paris entre 1873 et 1902. Zola fut l’un des auteurs les plus adaptés sur scène au cours de cette période. En cherchant à situer l’œuvre et la participation du chef de file de l’école naturaliste dans ce phénomène théâtral, nous étudions d’abord les positions de Zola à l’égard de la pratique de l’adaptation telles qu’elles s’expriment à travers les chroniques dramatiques et les entrevues qu’il publia ii dans les journaux. Le deuxième chapitre de cette partie examine la production des adaptations de ses romans et de ses nouvelles représentés à la scène. Notre analyse porte, en dernier lieu, sur la réception de ces œuvres dans la presse à la fin du XIXe siècle. Enfin, nous soulignons dans la conclusion que la pratique de l’adaptation au théâtre participe au développement d’une « culture de l’image » dont le cinéma s’avère le successeur au XXe siècle. iii Remerciements Je tiens à remercier mes co-directrices, le professeur Dorothy Speirs et le professeur Yannick Portebois, ainsi que le professeur Anthony Glinoer, membre de mon comité, pour leur aide précieuse et leurs conseils éclairants lors de la mise en œuvre de ce projet. Leurs connaissances, leur soutien, leur enthousiasme et leur générosité ont fait de cette thèse une expérience enrichissante et inoubliable. Je remercie aussi le professeur David Baguley pour avoir généreusement accepté d’être examinateur externe. Enfin, je remercie mes parents et mes amis pour leur soutien inconditionnel durant ces dernières années. Cette thèse n’aurait pu être réalisée sans leurs encouragements. Mes remerciements vont aussi à mes collègues du Centre d’études sur le XIXe siècle français Joseph Sablé et du Collège Loretto qui ont partagé mes angoisses et mes joies et avec qui j’ai eu la chance d’avoir des discussions passionnantes qui ont su m’inspirer tout au long de ce processus. La réalisation de ce travail a été rendue possible grâce à l’appui financier du Conseil de ressources en sciences humaines du Canada, du gouvernement de l’Ontario et du Département d’études françaises de l’Université de Toronto. iv Liste des annexes Annexe I : Liste des journaux et des revues examinés Annexe II : Tableau (Adaptations théâtrales 1840-1902) Annexe III : Iconographie Annexe IV : Lettre adressée aux directeurs du Figaro Annexe V : Le Figaro, 14 janvier 1881 v Introduction 1 2 Introduction Loin de s’estomper après la Révolution, la « théatromanie » dont est empreinte l’époque des Lumières continue de se développer largement au cours du siècle suivant. Comme le témoigne le critique René Doumic dans son analyse de la production dramatique du XIXe siècle dans L’Histoire de la langue et de la littérature française: « La période de notre théâtre est une des plus brillantes qu’il y ait eu dans notre littérature dramatique. Depuis plus d’un siècle et demi, on n’avait jamais vu sur notre scène ni pareille fécondité, ni pareille vigueur de production1 ». En plus de devenir un divertissement fort apprécié de la population, le théâtre exerce une véritable fascination sur la société de cette époque qui ne se limite pas seulement au plaisir d’assister à la représentation de spectacles. Fréquemment, la littérature de fiction fait honneur à l’univers du théâtre. Nombreux sont, en effet, les romanciers qui ont recours à l’emploi de techniques théâtrales dans l’écriture de leur roman. Honoré de Balzac, par exemple, se montre un fervent utilisateur de procédés dramatiques qu’il applique abondamment à l’ensemble de son œuvre romanesque qui est divisée en « Scènes» et qui adopte le titre très évocateur de « Comédie humaine2 ». Des 1 René Doumic, « Le Théâtre » dans J. Petit de Julleville, Histoire de la langue et de la littérature française, Paris : Colin, 1900, p.82. 2 L’utilisation d’une « structure dramatique » au même titre que la récurrence du lexique théâtral au sein du roman balzacien ont été soulignées par plusieurs chercheurs dont René Guise (« Balzac et le théâtre », Balzac, Nancy : Presses universitaires de Nancy, 1994, pp.105-131). Toutes deux s’expliqueraient par l’ambition qu’avait le romancier d’écrire une œuvre « vraie » ayant pour objet la « peinture » de la société et des mœurs de son temps. Ainsi, comme l’a mentionné Anne-Marie Baron, Balzac en écrivant la Comédie humaine aspirait à créer « une forme romanesque qui soit à la fois théâtre et roman, […] capable de donner en même temps la sensation visuelle et auditive d’un spectacle concret et les explications circonstanciées d’un long récit ». Voir Balzac cinéaste, Paris : Meridiens Klincksieck, 1990, p.18. 3 nouvelles et des romans comme Sarrasine, Les Comédiens sans le savoir ou Illusions perdues sont, de fait, truffés de renvois et de références au monde du théâtre. Dans son compte rendu de Quentin Durward de Walter Scott paru en 1823, Victor Hugo, quant à lui, se prononce en faveur d’une esthétique « dramatique » qui permettrait de rendre fidèlement par le biais de la forme romanesque le « drame bizarre » de la vie, où se « mêle[rait] le bon et le mauvais, le beau et le laid, le haut et le bas ». D’ailleurs, pour Hugo, le roman idéal constituerait : Un long drame, où les descriptions suppléeraient aux décorations et aux costumes, où les personnages pourraient se peindre par eux- mêmes, et représenter, par leurs chocs divers et multipliés, toutes les formes de l’idée unique de l’ouvrage3. Abondants sont les exemples de romanciers qui, au cours de cette époque, s’inspirent de thèmes reliés à la profession d’acteurs, de directeurs et d’auteurs dramatiques pour la composition de leurs œuvres. Inversement, le roman marque profondément aussi à son tour le répertoire théâtral de cette période. Tout au cours du XIXe siècle, comme l’a souligné Jean-Marie Thomasseau, « le roman sert d’inépuisable réservoir d’intrigues pour le théâtre 4». Les adaptations théâtrales, pièces tirées d’œuvres narratives (romans et nouvelles) figurent abondamment alors dans le répertoire dramatique. Bien qu’à la base, l’action 3 « Quentin Durward ou l’Écossais à la cour de Louis XI », La Muse française, no1, juillet 1823. Sur l’idéal du « roman dramatique » de Hugo, voir Éléonore Roy-Reverzy, Le Roman au XIXe siècle, Paris : Éditions SEDES, 1998, p.66. 4 Jean-Marie Thomasseau, « Théâtre et roman populaire ou les fils entremêlés de l’écheveau », Rocambole, 20, 2002, p.11. 4 « d’adapter » soit à l’origine de toute création dramatique5, la transformation de romans contemporains en pièces de théâtre constitue, quant à elle, une pratique qui se serait développée en France à ce moment précis de l’histoire littéraire. L’inventaire établi par Charles-Beaumont Wicks sur le théâtre du XIXe siècle ainsi que les répertoires des pièces déposées à la censure entre 1800 et 1906 constitués par Odile Krakovitch à partir des fonds des Archives nationales6, rassemblent de fait un nombre impressionnant de titres d’œuvres théâtrales inspirées de romans. Selon nos recherches, les premières adaptations représentées sur les scènes des théâtres parisiens au cours du XIXe siècle sont d’abord tirées d’œuvres étrangères et de romans du XVIIIe siècle. L’inventaire établi par Krakovitch fait mention, par exemple, d’une représentation d’un mélodrame tiré de Manon Lescaut de l’abbé Prévost en 1820 et d’un vaudeville d’après les Puritains d’Écosse de Walter Scott joué en 18257. C’est surtout à partir de 1840 que la pratique de l’adaptation connaît en France un développement important et que l’on constate l’augmentation de pièces tirées d’œuvres romanesques françaises et contemporaines figurant dans les programmes des 5 Comme l’indique A.F. Benhamou, toute « écriture dramatique serait à sa naissance adaptation ». Voir l’article « adaptation » dans Michel Corvin, Dictionnaire encyclopédique du théâtre, Paris : Larousse- Bordas, 1998, p.25. 6 Charles-Beaumont Wicks, The Parisian stage: Alphabetical indexes of plays of the nineteenth-century. Alabama: University of Alabama Press, 1950. Odile Krakovitch, Les pièces de théâtre soumises à la censure (1800-1830), Paris : Archives nationales, 1982 et Censure des répertoires des grands théâtres parisiens (1835-1906). Inventaire des manuscrits des pièces (F18 669 1016) à et des procès-verbaux des censeurs (F21 966 à 995), Paris : Archives nationales, 2003. 7 Manon Lescaut et le chevalier des Grieux, mélodrame en 3 actes par Gosse représenté au Gymnase le 16 novembre 1820 et L’Exilé, vaudeville en 2 actes d’Artois, Anne et de Tully, représenté le 9 juillet 1825 au théâtre des Variétés.