Marius MOUTET1 19 Avril 1876 -- 29 Octobre 1968 Député
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Marius MOUTET1 19 avril 1876 -- 29 octobre 1968 Député : 1914-1928, 1929-1940, 1945-1947 Sénateur : 1947-1968 Ministre des Colonies : 1936-1938 Ministre de la France d’Outre-mer : 1946-1947 Marius MOUTET 1876-1968 De l’affaire DREYFUS à la construction européenne Figure emblématique de la SFIO, Marius MOUTET aura connu trois Républiques. Quand il naît sous la IIIème, à Nîmes, ses choix politiques sont déjà fixés ! « Dans la petite ville où nous habitions, ma famille, comme toutes les autres familles, se divisait très simplement entre les ‘’ blancs’’ et les ‘’rouges’’. Mes parents faisaient partie des rouges et j’étais très fier qu’ils aient été partisans de la fondation de la République ». A vingt ans, il adhère au groupe des étudiants socialistes de Lyon. Deux ans plus tard, il fonde avec Edouard HERRIOT la première section lyonnaise de la Ligue des Droits de l’Homme. En 1914, il se présente à la députation dans le Rhône et sa campagne est marquée par le soutien de Jean JAURES qui prononcera à cette occasion son dernier discours, à la veille de l’attentat du Croissant. Fervent défenseur des droits de l’homme, il plaide en 1917 en faveur de Joseph CAILLAUX devant le Sénat réuni en Haute-Cour de Justice. Devenu député de la Drôme en 1929, Marius MOUTET se voit confier à plusieurs reprises le portefeuille des Colonies et met en place une politique sociale et économique marquée par des décisions hautement symboliques, comme la suppression du bagne de Guyane ou la nomination d’un gouverneur noir des Colonies, Félix EBOUE. En 1940, Marius MOUTET fait partie du groupe des ‘’80’’ qui refuse les pleins pouvoirs au Maréchal PETAIN. En 1946, il est chargé de négocier avec le gouvernement de HO CHI MINH. Ministre des Territoires d’outre-mer, il fait également voter l’article 8 de la Constitution de 1946, qui prévoit l’évolution des populations d’outre mer vers l’indépendance. En 1947, il entre au Conseil de la République comme représentant du Soudan, puis à partir de 1948 de la Drôme. Débute alors une nouvelle période de sa carrière, largement consacrée à la construction européenne. Membre de plusieurs instances européennes et internationales (Assemblée consultative du Conseil de l’Europe, Assemblée de l’Union de l’Europe occidentale, Groupe français de l’Union interparlementaire), il place au premier rang de ses préoccupations l’organisation de la sécurité et de la paix. Doyen du Sénat, il décède le 29 octobre 1968, à quatre-vingt-douze-ans. Les Nouvelles du Sénat – Histoire de Marius MOUTET 1 « Marius Achille MOUTET est très certainement une figure de second plan du socialisme français. Les premiers rôles ont été tenus par Jean JAURES, Léon BLUM, Vincent AURIOL ou Paul RAMADIER. Mais il est devenu, au fil des années, un des spécialistes, voire le spécialiste des questions coloniales ». Jean Pierre GRATIEN « Marius MOUTET un socialiste d’outre-mer » l’Harmattan p. 10. 2006 Ministre des Colonies, 4 juin 1936 et 13 mars 1938 Marius MOUTET, fut le premier socialiste à gérer l’Empire colonial français en tant que ministre des Colonies dans le gouvernement du Front populaire. Spécialisé dans les questions algériennes et coloniales, Marius MOUTET devint le 4 juin 1936, ministre des Colonies dans le premier cabinet de Front populaire présidé par Léon BLUM*, et c’est ce même poste qu’il Léon BLUM retrouva, le 13 mars 1938, dans le second cabinet BLUM. Marius MOUTET et la suppression du bagne de Cayenne En 1936 avec l’arrivée du Front populaire, deux hommes engagés présidaient aux destinées du bagne : le ministre des Colonies, Marius MOUTET (1876-1968), adhérent à la Ligue pour les droits de l’homme, et le garde des Sceaux, Marc RUCART (1893-1964), membre du comité d’honneur…de l’Armée du salut. Sous leur houlette, le projet de suppression du bagne Marc RUCART fut déposé à l’Assemblée nationale fin décembre 1936. Le texte, qui portait la signature de deux abolitionnistes de la première heure – Charles PEAN2 et Gaston MONNERVILLE – proposait d’abroger le « doublage » et de supprimer le bagne par « extension ». En d’autres termes, tous les convois vers la Guyane devraient être stoppés et tous les libérés pourraient désormais prétendre au rapatriement. En revanche, les prisonniers purgeant leur peine devraient demeurer dans la colonie jusqu'à la fin de l’exécution de celle-ci. Il a fallu attendre six mois pour que la Chambre ne consente à examiner le projet, en juin 1937. Le ministre des Colonies Marius MOUTET, très en verve, monta au créneau. « La France était avec l’URSS la dernière puissance mondiale à maintenir la peine de travaux forcés » martela t-il. De son côté, le député Gaston MONNERVILLE qualifia le bagne de « retentissante faillite coloniale » *…+, le budget annuel du bagne, cet énorme complexe carcéral entravait, selon lui, le développement de la Guyane et freinait l’apport des capitaux étrangers, 2 notamment en provenance des Etats-Unis. Las ! Le déficit de l’Etat et la chute du Front populaire remisèrent le projet au fond des placards. *…+ Le 17 juin 1938, dans le cadre de la loi sur le redressement financier, la transportation outre-mer fut enfin abolie. Comme la remarque l’historienne Danielle DONET-VINCENT dans La Fin du bagne (Editions Ouest-France, 1992), « Ce fut un subterfuge politico-économique -- et non un argument moral – qui fit tomber le bagne guyanais ». Christelle DEDEBANT « Les dernières années du bagne de Guyane » GEO mag 21/03/2019 Marius MOUTET, un parlementaire résistant en 1940 et Vichy Le 14 mai 1939, lors du congrès de la SFIO, il déclare que, « chaque concession ‘’aux puissances de l’Axe’’ nous rapproche de la guerre ». En 1940, Marius MOUTET est l’un des quatre-vingt parlementaires qui refusent les pleins pouvoirs à Philippe PETAIN. Il entre dans la clandestinité, puis se réfugie en Suisse pour échapper à l’arrestation, un de ses fils étant interné à sa place à Vals-les-Bains, par le régime de Vichy en guise de représailles. « Je savais qu’en accomplissant simplement notre devoir, non par intelligence ou par calcul parce que mus par un simple réflexe de loyauté et de bon sens, par un instinct naturel nous ne pouvons pas nous déshonorer par un vote infâmant, et j’étais certain qu’ayant raison nous finirons par avoir raison. » Marius MOUTET, ministre de la France d’outre-mer et la loi de départementalisation : 19 mars 1946 Mars 1946 ne peut donc que marquer le début d’une bataille pour la départementalisation effective des « confettis de l’Empire » Le 14 mars 1946, se déroule à l’assemblée le débat relatif à la transformation des « quatre vieilles colonies » en département français. A la surprise générale Marius MOUTET déclare : « Pour les vieilles colonies, il ne peut y avoir de législations différentes de celles de l’Algérie ». Il exprime ainsi sa volonté de ne pas traiter les Guyanais, les Guadeloupéens, les Martiniquais et les Réunionnais à égalité avec les citoyens français et de s’opposer au combat de ces derniers pour la décolonisation de leur pays. Eugène ROUSSE 1928-2019 historien réunionnais « ça s’est passé un 30 mars 1947 » Le Président du gouvernement provisoire de la République Félix GOUIN**, le ministre de la France d’Outre-mer Marius MOUTET et celui de l’intérieur André LE TROQUER*** ont signé les trois courts articles qui sortent la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion du statut colonial qu’ils Félix GOUIN André le Troquer connaissent depuis trois siècles. 3 Dès 1870, les sénateurs Pierre-Alexandre ISAAC de la Guadeloupe et Vincent ALLEGRE de la Martinique avaient déposé au Sénat un projet de loi concernant la départementalisation de leurs territoires respectifs, suivis en 1915 par les députés Achille René-BOISNEUF de la Guadeloupe et Joseph LAGROSILLIERE de la Martinique et, en 1919, par le député Henry LEMERY (Martinique). La départementalisation de ces territoires finalement acquise par la loi du 19 mars 1946 signifiait que le droit applicable en métropole dans les départements l’était également de plein droit dans les Dom (sauf mention expresse faite par le législateur), même si la Constitution de 1946 prévoyait la possibilité d’adaptation du régime législatif et administratif métropolitain au contexte local et si la mise en pratique de ce principe devait s’avérer extrêmement complexe. Véronique DIMIER «De la France coloniale à l’outre-mer » Pouvoirs 2005/2 (n°113) --Le combat parlementaire face à l’attitude de Marius MOUTET Au plan parlementaire, le combat ne sera pas facile. L’extrême lenteur du gouvernement à appliquer la loi du 19 mars 1946 conduit le député réunionnais Raymond VERGES à dénoncer à la tribune de l’Assemblée nationale l’attitude de Marius MOUTET « On est en droit de croire que Monsieur le Ministre de la France d’Outre-mer veut, en dernière analyse ne nous donner que la paille des mots pour maintenir, en fait, le régime méprisable qu’on flétrit du nom de colonialisme ». Cette dénonciation n’empêche pas Marius MOUTET de rassembler le 10 juillet 1947 au ministère de la France d’Outre-mer tous les députés des DOM pour tenter de les persuader que « dans l’opération assimilation, les vieilles colonies sont perdantes… ». TEMOIGNAGES « Quand les gouvernants sont contre… » 24 mars 1946 Journal fondé en 1944 par Raymond VERGES --Le scepticisme de Marius MOUTET face aux lois nouvelles de la départementalisation Concernant l’application de ces nouvelles lois, le scepticisme de Marius MOUTET ministre de la France d’outre-mer, qui ne croit pas possible l’application immédiate « dans un délai aussi bref de transformer purement et simplement le régime, politique, administratif, financier et douanier de toutes ces vieilles colonies » non seulement l’entrée en vigueur des lois et décrets est fixée au 1er janvier 1947 (puis par trois lois ultérieures dont l’entrée en vigueur fut reportée au 31 mars 1948).