Connaissance Et Gestion Durable Des Dunes De La Côte Atlantique
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CONNAISSANCE ET GESTION DURABLE DES DUNES DE LA CÔTE ATLANTIQUE MANUEL RÉCAPITULANT LES ENSEIGNEMENTS DU PROJET EUROPÉEN LIFE-ENVIRONNEMENT DE «RÉHABILITATION ET GESTION DURABLE DE QUATRE DUNES FRANÇAISES » Direction-coordination : Jean FAVENNEC Articles rédigés par : Helena Granja Hervé Thomas Gilles Granereau Marie-Claire Prat Guy Estève Pascal Jarret Jean Favennec Christine Micheneau Philippe Richard Bernard Hallegouët Jean-Marc Thirion Dah Dieng Catherine Yoni François Veneau Marc-Henri Duffaud Pierre Barrère Christian Lahondère Guillaume Février Françoise Rozé Patrick Lebon Sylvie Métayer Raphaël Jun Jean-Noël Salomon Loïc Gouguet. Patrick Dauphin Joachim Oyarzabal LES DOSSIERS FORESTIERS n°11 Octobre 2002 Édité par l’Office national des forêts 2, avenue de Saint-Mandé - F - 75570 Paris cedex 12 www.onf.fr LE MOT DE LA RÉDACTION L’ aventure a commencé en 1979 quand Jacques Leblan a convaincu les professeurs Barrère et Koechlin de l’Université de Bordeaux de réfléchir avec l’Office National des Forêts sur la gestion des dunes littorales qui étaient confiées à cet établissement. Une aventure qui a bousculé certaines habitudes mais qui a passionné beaucoup de ceux qui on vu se définir progressivement un véritable génie écologique pour les dunes. Puis Jean Favennec, un de ces passionnés, a fédéré les acquis de cette collaboration et l’expérience des forestiers en prenant la tête de la mission ONF-Littoral. Avec lui, nous avons été persuadés que la démarche européenne était propice à l’élargissement et au renforcement de ce type d’évolution innovante. Nous avons alors vécu une autre aventure, celle de rentrer dans un programme européen. Un premier programme NORSPA (LIFE Environnement 92) a abouti au colloque de Bordeaux en 1996, et maintenant, cette publication est le résultat d’un second programme LIFE Environnement 95. Ce qui me réjouit le plus dans cet ouvrage, c’est de voir la conjonction de trois réussites. Tout d’abord, la diversité des auteurs et des angles de vue illustre le succès des exigences de Bruxelles. Pour monter le dossier, il fallait afficher des collaborations. Au-delà de l’ouverture volontaire déjà réalisée, il a fallu s’associer à d’autres pays, d’autres régions, d’autres disciplines. Un peu artificiellement au début. Mais ce livre démontre que cette association a porté ses fruits. Ensuite, il est frappant de constater que la plupart des articles de ce livre s’articulent, se répondent, comme les instruments dans un orchestre. C’est bien sûr la dune qui a écrit la partition et il faut remercier l’Union Européenne d’avoir financé le concert. Mais sans les qualités sobres de chef d’orchestre de Jean Favennec, tout ceci n’aurait pas pu aboutir. Enfin, il y a réellement, dans ce manuel, des éléments pratiques de méthodes qui méritent d’être diffusés afin que d’autres acteurs, sur d’autres sites, bénéficient des études et de l’expériences que ce programme LIFE a permis. En publiant cet ouvrage, l’Office National des Forêts est bien dans sa vocation de gestion durable des espaces naturels, au-delà des lisières. Jean-Hugues BARTET Ingénieur Général du Génie Rural, des Eaux et des Forêts. AVANT-PROPOS Ce volume sur la connaissance et la gestion durable des dunes de la côte atlantique française vient à la suite de celui intitulé “Biodiversité et protection dunaire”, publié en 1997. Tous les deux consignent des résultats d’investigations obtenus dans le cadre de projets LIFE qui ont réuni des chercheurs venus d’horizons variés. La lecture des différents articles consacrés à des thèmes spécifiques conduit à des réflexions générales sur la nature des dunes littorales et sur les principes de leur gestion. Il est d’abord important de souligner que, dans leur grande majorité, les dunes de la côte atlantique française, et la remarque est valable pour l’ensemble des côtes du nord-ouest de l’Europe, constituent fondamentalement un héritage. Elles ont atteint dans leur évolution un stade de maturité. Les formes mobiles qu’elles peuvent présenter aujourd’hui résultent dans la plupart des cas du remaniement d’un stock sableux accumulé en d’autres temps. Sur le littoral aquitain, les grands empilements dunaires, ceux des dunes dites anciennes, datent des deux ou trois millénaires qui ont suivi la fin de la grande transgression postglaciaire. La mer, tandis que son niveau remontait, avait repoussé devant elle des sédiments qui s’étaient déposés sur la plate-forme continentale émergée pendant la période froide. Lorsque ce niveau se stabilisa, il y a environ 5 000 ans, se formèrent d’amples plages, bien alimentées en sable que le vent remettait en mouvement avant de l’accumuler sous la forme de grandes dunes que l’on peut qualifier de primaires. L’étude des minéraux rares a montré que le sable de ces dunes ne provient pas des sables dits des Landes sur lesquelles elles se sont avancées, mais bien du tri, par les vagues, de sédiments venus de l’avant-côte. A cette époque, le rivage se situait beaucoup plus à l’Ouest que l’actuel. C’est dans les premiers siècles de l’ère chrétienne, probablement dès la période gallo-romaine, une fois épuisée la réserve en sable de l’avant-côte et sur un littoral caractérisé par une haute énergie marine et éolienne, que la houle et le vent commencèrent à attaquer la première génération de dunes, attaque qui se manifeste toujours aujourd’hui. En « cannibalisant » avec l’aide de la mer ses propres dépôts, le vent édifia de nouvelles dunes, dites modernes, de nature secondaire car provenant d’un remaniement de congénères plus anciennes qu’elles ont chevauchées en s’avançant vers l’intérieur des terres. Elles seraient encore vives et mobiles aujourd’hui si elles n’avaient pas fait l’objet d’une vaste entreprise de fixation intégrale au cours du XIXème siècle par un boisement systématique en pins maritimes. Pour l’essentiel, les dunes de Bretagne relèvent aussi d’un héritage. Il existe un accord pour penser qu’elles se sont formées lors d’une période de baisse temporaire, de l’ordre de 4 à 5 m, du niveau de la mer, intervenue vers 3000-2000 B.P. Le vent a pu alors balayer de gros volumes de sable sur des espaces qui étaient exondés. Leur submersion postérieure mit fin à son action et les dunes furent spontanément fixées par une pelouse. Les déplacements de sable signalés par la suite s’expliquent par des remaniements. Au Moyen Age, ils sont probablement dus à des actions humaines qui ont déstabilisé le couvert végétal. Au XVIIème et XVIIIème siècle, c’est la péjoration des conditions climatiques liées au Petit Age glaciaire, caractérisé par une multiplication des épisodes tempêtueux, qui est sans doute à mettre en cause. Il y a longtemps que les dunes des côtes de l’Europe du nord-ouest ont été modifiées par des actions humaines, tant dans leur couvert végétal que dans leur modelé. Le pâturage des pelouses dunaires a introduit des changements dans leur composition floristique. Surtout, on s’est efforcé un peu partout de fixer les dunes mobiles. Sans doute leur déplacement pouvait-il menacer d’ensevelissement des habitations, des champs, des voies de communication. Au XVIIème siècle, des intendants recommandaient de planter de l’Oyat pour freiner l’avancée des sables sur les rivages du nord de la France. Plus tard, les étendues de sable vif ont été perçues comme le symbole de la misère des sociétés rurales qu’elles avoisinaient. D’où les travaux de fixation de grande ampleur qui suivirent en France la signature du décret impérial du 14 décembre 1810. Ainsi, la vaste forêt homogène de pins maritimes qui, depuis la fin du Second Empire, s’étend sur plus de 80 000 hectares de dunes modernes en arrière de la côte d’Aquitaine a-t-elle été substituée à un écosystème naturel de grandes dunes mobiles. Et pour protéger cette forêt de l’ensablement, une dune calibrée, répondant à un “profil idéal”, véritable rempart de sable, a même été édifiée tout le long du rivage à l’aide de palissades et de plantations d’Oyat. L’état de maturité des dunes dont on a parlé ne signifie pas immobilité. Si celle-ci domine aujourd’hui, elle est insolite et elle s’explique par les manipulations dont les dunes ont fait l’objet au cours du temps. Actuellement, le regard que la société porte sur le milieu dunaire est en train de changer. On commence à voir dans la dynamique éolienne que l’on a longtemps essayé de brider la source d’une remarquable identité paysagère et d’une grande richesse floristique. Il est fort probable que, si elle avait lieu aujourd’hui, la gigantesque entreprise de fixation par boisement des dunes mobiles de la côte d’Aquitaine se heurterait à l’opposition d’associations de défense de la nature. Des manifestations seraient organisées, comme celles qui, il y a quelques années, ont exprimé une hostilité à la construction de barrages sur la Loire , menacée de perdre ainsi les caractères d’un fleuve “sauvage”, le dernier en France. La preuve en est que dans les pays d’Europe où existent encore des champs de dunes mobiles, elles font l’objet d’une protection dans le cadre de parcs nationaux, comme en Espagne celui du Coto de Doñana ou en Pologne celui de Slowinski. On va même quelquefois plus loin. En Angleterre, dans la réserve naturelle d’Ainsdale, près de Southport, sur la côte de la mer d’Irlande, les arbres d’une forêt de pins noirs, plantés au début du XXème siècle, ont été abattus sur une quinzaine d’hectares pour tenter de redonner à des dunes une mobilité que le boisement leur avait fait perdre.