La Boîte Noire De L'historiographie Interculturelle Belge. Les Allers-Retours D'emma Lambotte Entre Liège Et Anvers
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View metadata, citation and similar papers at core.ac.uk brought to you by CORE provided by Repository of the University of Namur Institutional Repository - Research Portal Dépôt Institutionnel - Portail de la Recherche researchportal.unamur.be RESEARCH OUTPUTS / RÉSULTATS DE RECHERCHE La boîte noire de l’historiographie interculturelle belge Gonne, Maud Published in: TTR: Traduction, Terminologie, Rédaction Author(s) - Auteur(s) : Publication date: 2018 Document Version Publicationle PDF de date l'éditeur - Date de publication : Link to publication Citation for pulished version (HARVARD): Gonne, M 2018, 'La boîte noire de l’historiographie interculturelle belge: Les allers-retours d’Emma Lambotte Permanententre Liège link et Anvers- Permalien (1895-1950) : ', TTR: Traduction, Terminologie, Rédaction, VOL. XXXI, Numéro 2, p. 167- 194. Rights / License - Licence de droit d’auteur : General rights Copyright and moral rights for the publications made accessible in the public portal are retained by the authors and/or other copyright owners and it is a condition of accessing publications that users recognise and abide by the legal requirements associated with these rights. • Users may download and print one copy of any publication from the public portal for the purpose of private study or research. • You may not further distribute the material or use it for any profit-making activity or commercial gain • You may freely distribute the URL identifying the publication in the public portal ? Take down policy If you believe that this document breaches copyright please contact us providing details, and we will remove access to the work immediately and investigate your claim. BibliothèqueDownload date: Universitaire 23. Jun. 2020 Moretus Plantin Document généré le 22 nov. 2019 07:19 TTR Traduction, terminologie, rédaction La boîte noire de l’historiographie interculturelle belge. Les allers-retours d’Emma Lambotte entre Liège et Anvers (1895-1950) Maud Gonne Minorité, migration et rencontres interculturelles : du binarisme à la Résumé de l'article complexité L’historiographie traditionnelle a eu tendance à réduire la complexité de la nation Minority and Migrant Intercultural Encounters: From Binarisms to belge à l’interaction (conflictuelle) entre communautés francophone et Complexity néerlandophone (ou flamande). Cette approche binaire a marginalisé la pluralité d’un Volume 31, numéro 2, 2e semestre 2018 territoire national diglossique fragmenté en parlers flamands, wallons et germaniques, où seule une élite minoritaire utilisait le français. Dans cette URI : https://id.erudit.org/iderudit/1065573ar configuration asymétrique, les échanges, déplacements et traductions entre les différentes cultures minoritaires révèlent des dynamiques bien plus complexes que la DOI : https://doi.org/10.7202/1065573ar seule confrontation entre une langue dominante et une langue dominée. En se penchant sur les allers-retours d’Emma Lambotte (1876-1963) – peintre, auteure, Aller au sommaire du numéro traductrice, chroniqueuse, salonnière et activiste wallonne – entre Anvers et Liège, cet article tâche d’entrouvrir la boîte noire de l’historiographie interculturelle belge via l’introduction inédite d’une perspective minoritaire wallonne. Éditeur(s) Association canadienne de traductologie ISSN 0835-8443 (imprimé) 1708-2188 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Gonne, M. (2018). La boîte noire de l’historiographie interculturelle belge. Les allers-retours d’Emma Lambotte entre Liège et Anvers (1895-1950). TTR, 31 (2), 167–194. https://doi.org/10.7202/1065573ar Tous droits réservés © Maud Gonne, 2019 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ La boîte noire de l’historiographie interculturelle belge. Les allers-retours d’Emma Lambotte entre Liège et Anvers (1895-1950) Maud Gonne F.R.S. – FNRS Université de Namur / Université catholique de Louvain Résumé L’historiographie traditionnelle a eu tendance à réduire la complexité de la nation belge à l’interaction (conflictuelle) entre communautés francophone et néerlandophone (ou flamande). Cette approche binaire a marginalisé la pluralité d’un territoire national diglossique fragmenté en parlers flamands, wallons et germaniques, où seule une élite minoritaire utilisait le français. Dans cette configuration asymétrique, les échanges, déplacements et tra duc- tions entre les différentes cultures minoritaires révèlent des dynamiques bien plus complexes que la seule confrontation entre une langue dominante et une langue dominée. En se penchant sur les allers-retours d’Emma Lambotte (1876-1963) – peintre, auteure, traductrice, chroniqueuse, salonnière et acti viste wallonne – entre Anvers et Liège, cet article tâche d’entrouvrir la boîte noire de l’historiographie interculturelle belge via l’introduction inédite d’une perspective minoritaire wallonne. Mots-clés : Wallonie, minorité, Emma Lambotte, traduction, boîte noire, théorie de la complexité Abstract Traditional historiography has tended to reduce the complexity of the Belgian nation to the (conflictual) interaction between French and Dutch (or Flemish) communities. This binary view, however, systematically mar- gin alized the plurality of a diglossic national territory fragmented into Flemish, Walloon, and German variants, where only a minority elite spoke French. The exchanges, travels and translations between the different mi- nor ity cultures within this asymmetrical configuration reveal a much more complex dynamics than the mere confrontation between a dominant and a dominated language. Focusing on Emma Lambotte’s (1876-1963) trips Minorité, migration et rencontres interculturelles/Minority and migrant intercultural encounters 167 Maud Gonne between Antwerp and Liège—as a Walloon painter, writer, translator, chronicler, salonnière and activist—this article aims to open the black box of Belgian intercultural historiography by introducing a unique Walloon minority perspective. Keywords: Wallonia, minority, Emma Lambotte, translation, black box, complexity theory Introduction Considérée comme l’archétype du carrefour culturel, où les mouve- ments, médiations et compromis entre langues germaniques et ro- manes sont plus visibles que nulle part ailleurs (Leerssen, 2014, p. 1395), la Belgique est un exemple classique pour l’étude des rela- tions interculturelles, des échanges littéraires et des traductions. La plupart de ces recherches se sont intéressées à l’interaction plus ou moins conflictuelle entre francophones et néerlandophones, qui n’a cessé de monopoliser la scène politique belge jusqu’à nos jours1. Selon la version historique en vigueur, l’espace linguistique et culturel belge aurait en effet été caractérisé, depuis l’indépendance en 1830, par une diglossie franco-flamande : un peuple flamand pratiquant les dialectes se serait progressivement opposé à une élite francophone au pouvoir au cours d’un long processus d’émancipation qui aurait finalement mené au tracé d’une frontière linguistique en 1962, et au principe de monolinguisme territorial. Il y aurait pourtant lieu de dépasser cette vision binaire qui semble justifier, plutôt que d’expliquer, l’actuelle configuration de la Belgique2. Jusqu’au-delà de la Deuxième Guerre mondiale, le contexte culturel et linguistique belge est bien plus complexe que la seule confrontation entre une langue dominante (le français) et une langue dominée (le flamand). Derrière une illusion de binarité, l’historiographie nationale a marginalisé la pluralité d’un territoire hétérogène, fragmenté en dialectes flamands, wallons et allemands, 1 Voir entre autres De Geest et Meylaerts (2004) et Buelens (2011). 2. C’est-à-dire un pays « divisé », avec le néerlandais comme langue officielle au nord, le français comme langue officielle au sud et un bilinguisme officiel franco- flamand dans la région de Bruxelles-capitale. Il faut également compter sur une minorité germanophone à l’est. Pour plus d’informations sur la configuration politico-linguistique de la Belgique, y compris sur les compétences attri buées aux régions (flamande, wallonne, bruxelloise) et communautés (flamande, germa- nophone et francophone, rebaptisée fédération Wallonie-Bruxelles en 2011), consulter le site officiel Belgium.be (s. d.). 168 TTR XXXI 2 La boîte noire de l’historiographie interculturelle belge où seule une élite minoritaire parlait le français3. Comme l’affirme le sociolinguiste Michel Francard : Au moment de l’indépendance de la Belgique, la majorité de la population wallonne ne parle pas français, mais une langue régionale romane (wallon, picard, lorrain, champenois) ou germanique. De ce point de vue, on l’ignore parfois, Wallons et Flamands des classes populaires et des régions rurales se sont vu imposer, par la bourgeoisie francophone qui a cimenté l’État belge, une langue différente des parlers d’une majorité de la population. (1998, p. 16) Cette politique linguistique s’est avérée, au départ, peu probléma- tique pour une population qui s’identifiait alors à une communauté locale – où les dialectes étaient les langues