Le Baroque Et Le Classicisme
Total Page:16
File Type:pdf, Size:1020Kb
LE BAROQUE ET LE CLASSICISME L’Italie, terre natale de la Renaissance, est le pays où, dès le milieu du XVIe siècle se développe un nouveau style architectural et artistique : le baroque. Rome, surtout, mais aussi Venise et Florence sont des villes d’où ce nouveau mouvement se répand pour gagner, bientôt, toute l’Europe catholique. Il y brillera pendant deux siècles, c’est-à-dire jusqu’à la moitié du XVIIIe. Le terme – baroque – que les historiens de l’art ont attribué postérieurement à ce style, vient de la langue portugaise. Le mot barroco y désigne une pierre de forme irrégulière, ou encore, comme l’indique le dictionnaire Le Petit Robert, une perle de forme irrégulière. Selon le dictionnaire cité, l’adjectif est utilisé pour déterminer quelque chose qui est d’une irrégularité bizarre, quelque chose de choquant, étrange, excentrique. Le côté choquant, dramatique, théâtral et la surcharge décorative sont les principaux traits caractéristiques de l’architecture et des arts baroques. L’illustre maître du baroque italien Gian Lorenzo Bernini24, en français dit le Bernin, que l’on a surnommé le second Michel-Ange, dans sa sculpture Extase de Sainte-Thérèse (église de Sainte Marie des Victoires à Rome), crée une véritable scène de théâtre à laquelle assistent des spectateurs placés sur les côtés de la composition. Cette œuvre d’une étonnante sensualité, qui est le parfait exemple de l’esprit baroque, réunit dans un rapport étroit la sculpture, la peinture et l’architecture. L’objectif de l’esthétique baroque est de frapper les sens, les émotions. Son rôle est de rendre stupéfait le spectateur. L’édifice qui répond peut-être le mieux à cet objectif est la basilique Saint-Pierre de Rome. Tous ceux qui 24 Le Bernin (1598-1680), peintre, sculpteur et architecte, est l’auteur, entre autres, du baldaquin de la basilique Saint-Pierre et de la colonnade place Saint-Pierre de Rome. 80 se sont un jour retrouvés face à ce monument ont été fascinés par ses dimensions colossales. Son intérieur est encore plus étonnant. La richesse et la diversité des décors sont éblouissantes. Le monumental, les colonnes torses et les frontons spectaculaires caractérisent l’architecture baroque. La sculpture met en valeur les draperies et les modelés réalistes. En ce qui concerne les matériaux, les artistes utilisent le bronze et les marbres colorés. Le nu de la Renaissance disparaît. La peinture met en scène des épisodes dramatiques en des couleurs chaudes et vives tout en exploitant le jeu des lumières et de l’ombre. L’Église catholique romaine voit dans le baroque, qui est né après les troubles causés par la Réforme, un très bon moyen pour reconquérir ses fidèles. Elle l’encourage, récupère son côté dramatique, qui provoque de fortes émotions, et elle s’en sert pour promouvoir des thèmes religieux avec lesquels il s’accorde à merveille. La naissance du baroque à Rome se situe à la même époque que la naissance de la Compagnie de Jésus (fondée en 1537 par Ignace de Loyola) dont l’objectif est de renforcer l’influence catholique affaiblie pendant la Réforme et d’évangéliser le Nouveau Monde. C’est la raison pour laquelle l’art baroque est souvent assimilé à l’art jésuite et que son esthétique, qui est une esthétique de la Contre- Réforme, se heurte à de fortes résistances dans les pays conquis par la Réforme. D’ailleurs, la France reste également très réservée face au baroque. A tel point que les projets de renouvellement de la façade du Louvre, présentés par le grand Bernin, l’un des génies du baroque italien, que Colbert a invité en France (1665), sont rejetés par Louis XIV. Le baroque commence à apparaître en France dès le règne d’Henri IV et durant les années à venir, il y prendra une forme spécifique et deviendra, surtout à l’époque de Louis XIV, un outil extrêmement important pour l’affermissement du 81 pouvoir royal. Les commandes du roi, orientées vers le soutien de l’absolutisme, inspirent le développement d’une interprétaton originale de motifs classiques. Selon Colbert, l’un des principaux ministres du Roi-Soleil, il y a deux manières d’affermir le pouvoir et le prestige d’un monarque : les guerres et l’architecture. Colbert réorganise non seulement l’administration de l’État et l’armée, mais aussi les arts. En créant l’Académie royale de peinture et de sculpture en 1648, dont la direction est confiée à Charles Le Brun, il les institutionnalise. Même si les arts et l’architecture français ont puisé dans les modèles italiens, les artistes, encouragés par le roi, cherchent à se libérer des influences étrangères et à développer leurs propres formes de style. En France, la dialectique classique-baroque se manifeste de la façon la plus originale. L’influence du baroque romain est nette surtout dans les églises édifiées sous le règne de Louis XIII. L’église Saint-Paul–Saint-Louis à Paris, construite entre 1627 et 1641, dont l’aspect s’inspire de l’église de Gesù à Rome, est un très bel exemple de style jésuite. Le Val-de-Grâce est considéré comme la meilleure réalisation de l’architecture baroque en France. L’église de la Sorbonne, érigée entre 1635 et 1642 par Lemercier, a une façade à deux ordres typiquement baroque, dominée par une élégante coupole. 61) Val-de-Grâce. 82 Le Grand Siècle, celui du règne de Louis XIV, est marqué par le triomphe du classicisme. Le roi construit beaucoup en dirigeant lui-même les travaux, en discutant les plans, en imposant son goût. Il aime la régularité, la grandeur, le faste uni à la distinction. Pour réaliser ses desseins, il trouve deux hommes qui partagent ses vues : Colbert et Le Brun. L’un multiplie les Académies et contribue à fixer la doctrine classique, l’autre regroupe sous sa direction tous les artistes les plus illustres de l’époque et réalise ainsi cette unité dans la décoration qui est le trait distinctif du style Louis XIV. Le roi ordonne la construction d’un immense et fastueux palais qui doit être le symbole de sa puissance. Dès le début de son règne, des travaux sont entrepris à Versailles, où Louis XIII a fait construire, en 1624, un pavillon de chasse. Pour l’agrandir, Louis XIV emploie deux architectes de talent : Louis Le Vau et Jules Hardouin-Mansart. La création des magnifiques jardins à la française - avec des parterres, des bassins, des jets d’eau, des sculptures disposées au fond des bosquets et le Grand Canal - est confiée à André Le Nôtre. Autour du château, une élégante ville se développe. Dans le parc, le roi fait construire, pour sa favorite Madame de Montespan, le Grand Trianon. Ses successeurs vont ajouter le Petit Trianon (Louis XV) et le hameau de la Reine, édifié pour Marie Antoinette, épouse de Louis XVI. La Grande Galerie, aujourd’hui connue sous le nom de la Galerie des Glaces25, inaugurée en 1684, est conçue par Jules Hardouin-Mansart et décorée par Charles Le Brun. Les peintures de la voûte représentent les exploits de Louis XIV. La galerie, lieu de passage, de rencontres, d’attente, doit éblouir les visiteurs du monarque jouissant en Europe d’une extraordinaire influence politique et artistique. 25 Le 28 juin 1919, le traité de Versailles, mettant fin à la Première Guerre Mondiale, est signé dans cette galerie. 83 62) Le château de Versailles et sa Galerie des Glaces. En 1682, après vingt ans d’itinérance, le Roi-Soleil fixe sa résidence à Versailles. Cadre de vie, le nouveau château est aussi un instrument politique où l’étiquette et le luxe sont au service d’une tentative de domestication de la haute noblesse. Vu de loin, ce monde semble ordonné et luxueux. Il dissimule pourtant un manque de confort, une absence d’hygiène et une gêne occasionnée par la permanence des travaux. L’hiver, il y fait tellement froid que le vin gèle dans les verres. À Paris, les grands architectes construisent de nombreux hôtels particuliers, comme les hôtels Lambert et Lauzun conçus par Louis Le Vau dans l’île Saint-Louis. L’hôtel Guénégaud dans le Marais, parfait exemple d’un palais parisien du XVIIe siècle, est l’œuvre de François Mansart. Mais les réalisations qui fondent en Europe la réputation de l’art français, à part Versailles, sont la Colonnade du Louvre (fig. 63) et l’Hôtel des Invalides. 84 63) La Colonnade du Louvre est réalisée entre 1667 et 1670 d’après le projet de Claude Perrault, frère aîné de Charles, auteur des Contes. La façade Est, qui est considérée comme l’un des chefs-d’œuvre du classicisme français, se distingue par ses lignes horizontales, sa sobre ordonnance et son aspect grandiose. Les colonnes accouplées et le fronton triangulaire central reprennent des éléments essentiels de l’architecture antique. Le vaste ensemble des Invalides comprend l’Hôtel des Invalides, le Dôme et l’église Saint-Louis. C’est Louis XIV qui décide de sa construction, confiée à Libéral Bruant en 1671. L’Hôtel des Invalides est destiné à hospitaliser les soldats blessés et à donner asile aux vieux invalides, souvent réduits à la mendicité. Le Dôme, édifié entre 1679 et 1706, qui devait être réservé à l’usage personnel du roi, est la meilleure œuvre de Jules Hardouin-Mansart. 85 64) Le Dôme des Invalides. Même si Louis XIV, humilié par la fuite de la famille royale, obligée en janvier 1649 de quitter Paris pour Saint- Germain-en-Laye, n’affectionne pas la capitale, il l’a profondément marquée. Il veut que Paris ressemble à Rome. Alors, les églises sont surmontées de coupoles ornées de fresques, au-dessus de l’autel de Val-de-Grâce, un baldaquin 86 est érigé comme à Saint-Pierre de Rome.