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France Télévisions N°170

Édito p.03 par Sophie Deschamps, présidente de la SACD Retrouvez Tribune de Pascal Rogard p.04 toutes les France Télévisions : l’heure du choix informations sur

Dossier www.sacd.fr

© France Télévisions Android Iphone© France Télévisions et les auteurs : p.06 fais ci et fais pas ça ! Le “made in France” a la cote en fiction p.10 France Télévisions : p.12 des missions de service public et des obligations La redevance, un modèle européen p.14 à géométrie variable Rejoignez-nous sur assemblée générale p.15 3, 2, 1... votez ! Facebook www.facebook.com/SACD.fr RENCONTRE p.18 Pierre Jolivet, auteur “inconsolable et gai”

AGENDA p.20 Suivez-nous sur Festivals et spectacles du printemps 2015 Twitter ACTION CULTURELLE p.22 @SACDParis Les fonds SACD SOMMAIRE ÉDITO

Chaque création est une œuvre

par SOPHIE DESCHAMPS, présidente de la sacd

Le numérique est-il une chance pour les auteurs ? Oui, au regard de la créa- tivité que cela a engendré dans les œuvres, que ce soit en spectacle vivant ou en audiovisuel, ou même en transversalité entre les répertoires. Non, sous l’angle du développement du piratage et le non-respect du droit

© LN P hotographers d’auteur que le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, considère, de mauvaise foi, comme un frein à la diffusion des œuvres. Étrangement, en même temps que la révolution numérique s’installait, le mot œuvre disparaissait au profit du mot contenu. Cette confusion entre œuvres et contenus n’est pas anodine. Cela sert à dire que les œuvres sont une marchandise, un flux que l’on peut s’approprier et dont on peut disposer à loisir. Car cela n’est pas nécessaire de protéger et sou- tenir un contenu, demande-t-on à un bol de défendre la soupe qu’il contient ? Le mot contenu nie la diversité des talents et la nécessité de renouveler sans cesse la création. « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde », a dit Albert Camus. Il avait raison. Chaque création est une œuvre unique, une mélodie particulière qu’elle soit musicale, littéraire, théâtrale, chorégraphique, radiophonique, cinématogra- phique ou télévisuelle. Le CSA va prochainement nommer la nouvelle présidence de France Télévi- sions. Ce n’est pas une mince responsabilité, 60 % de la création audiovisuelle française dépend de FTV. Le conseil pensera-t-il contenus ou œuvres ? Pen- sera-t-il gestion ou programmation dans l’examen des candidatures ? La gestion est un métier, la programmation est un talent. L’un ne peut exister sans l’autre à la tête de FTV. Car il s’agit bien de redonner du souffle à la créa- tion, du plaisir renouvelé aux publics de tous âges et de tous milieux. La création ne peut se contenter de vivre sous la contrainte du marketing commandé par l’audience. Elle doit être une proposition d’auteurs. Car aujourd’hui, l’innovation, ce n’est plus tant le numérique que l’originalité des œuvres. Le financement de la création en spectacle vivant et en audiovisuel ne doit plus être une variable d’ajustement précarisant l’avenir. En audiovisuel comme en spectacle vivant il est urgent de remettre au centre les auteurs, la pensée, les œuvres, la liberté et le foisonnement.

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France Télévisions : l’heure du choix

par Pascal Rogard, Directeur général

D’ici quelques semaines, les huit sages du Conseil Bref, dans ce contexte instable et incertain, France Supérieur de l’Audiovisuel procéderont à la désignation Télévisions est à la croisée des chemins et jouera son du futur président – ou de la future présidente – de avenir dans les cinq prochaines années. Les projets France Télévisions pour les cinq prochaines années, des candidat(e)s à la présidence devront être à la une nomination examinée à la loupe. hauteur de cet enjeu. Sans négliger de dessiner une

gence E nguerand © A gence C’est évidemment une lourde responsabilité véritable ambition pour la création. pour le CSA qui récupère un pouvoir qu’il avait dû En effet, pour les auteurs, de l’audiovisuel, du cinéma abandonner au profit du président de la République ou du spectacle vivant, l’avenir du service public est à l’occasion de la réforme du service public lancée aussi et évidemment un enjeu crucial. Quelques par Nicolas Sarkozy en 2008. Désormais, au nom de chiffres en attestent : avec 400 millions d’euros l’indépendance nécessaire du service public, le choix investis chaque année dans la création patrimoniale, de celui ou de celle qui présidera France Télévisions France Télévisions assure aujourd’hui le financement ne sera plus entre les mains du politique. Mais, ne de plus de 50 % de la fiction française ; elle nous y trompons pas, c’est bien la place particulière investit aussi 60 millions d’euros dans les œuvres de France Télévisions au sein du paysage audiovisuel cinématographiques ; elle joue un rôle primordial français qui rend cette nomination à la présidence du dans le financement de l’animation française et la groupe public si capitale. Car elle peut vouloir dire un diffusion des œuvres de spectacle vivant… C’est dire la changement de cap, des réorientations stratégiques, responsabilité du service public dans le financement des identités éditoriales en mouvement pour un et la diffusion de la création et plus largement groupe qui fédère cinq chaînes nationales, représente – on l’oublie fréquemment – dans l’organisation du encore une part d’audience de près de 30 % et se doit secteur créatif et culturel dans notre pays. d’être la télévision de la proximité et du lien social. À cet égard, il faut rappeler que France Télévisions est N’oublions pas non plus que nombreux sont ceux, et le seul groupe audiovisuel français à avoir signé dès notamment les pouvoirs publics et les parlementaires, 2011 avec la SACD, les organisations professionnelles qui continuent de s’interroger sur l’identité des chaînes de scénaristes, de réalisateurs et de producteurs une du groupe, et son financement, parfois même sur le charte de développement de la fiction. En paraphant nombre de chaînes, et sur l’évolution d’un auditoire cet accord, le service public a accompli un pas qui a davantage vieilli que celui des chaînes privées important en faveur des auteurs et des conditions et demeure relativement âgé : en 2013, 52,8 % des de création et de développement des œuvres. Non téléspectateurs en France avaient plus de 50 ans ; sur seulement, France Télévisions a, de fait, normalisé France 2, c’est 71 % et sur France 3, on atteint le chiffre en partie les pratiques contractuelles en n’examinant de 75 %. Au-delà de ces défis spécifiques, France désormais que les projets qui ont fait l’objet d’une Télévisions n’est pas non plus à l’abri des mutations option de contrat rémunérée. Mais, elle a aussi profondes du paysage audiovisuel : développement accepté de reconnaître au profit des auteurs un droit à de l’économie numérique, atonie continue du marché dédit lors de l’arrêt par le diffuseur d’une convention publicitaire, élargissement du nombre de chaînes sur de développement. Il faudra à l’évidence aller plus la TNT, nouveaux usages… loin dans l’avenir mais il faut aussi savoir saluer

4 SACD • LE MAGAZINE • printemps 2015 « Une parole respectée de l’État ; un financement assuré ; un projet ambitieux »

et reconnaître les avancées positives lorsqu’elles création ne doit pas être une contrainte mais une existent et qu’elles mettent en valeur la spécificité chance et une opportunité. Mais ne soyons pas naïfs. du service public. Sans critiquer gratuitement France Quels que soient les efforts des uns et des autres, Télévisions ni écorner son image, il faut parler vrai et les talents des décideurs de France Télévisions et la ne surtout pas manquer de lucidité sur l’avenir très créativité des auteurs, rien ne pourra se faire si l’État incertain du groupe public. La télévision publique a ne tient pas ses engagements, tous ses engagements. cette spécificité de devoir être la télévision de tous les publics. Cette mission de service public va la Ces dernières années ont malheureusement été contraindre à devoir se réinventer, à être conquérante marquées par des revirements, des avenants et imaginative pour être ce média républicain et de imprévus au contrat d’objectifs et de moyens et des proximité qui éclaire une société en quête de repères. trajectoires financières non respectées. Pire, la taxe sur le chiffre d’affaires des fournisseurs d’accès à C’est aussi le sens du rapport qui vient d’être remis au Internet, qui devait abonder le financement de France gouvernement par Marc Schwartz et qui a servi pour Télévisions pour compenser la perte de ressources construire la feuille de route de France Télévisions publicitaires, reste désormais dans les caisses de jusqu’en 2020 dont Fleur Pellerin, ministre de la Bercy ! Culture et de la Communication, a présenté au côté Dans ces conditions, il paraît difficile pour les de Michel Sapin et Emmanuel Macron les orientations dirigeants de l’audiovisuel public de pouvoir début mars. Au programme notamment : plus construire une stratégie durable sans visibilité sur d’audace, plus d’innovation, plus de création. les moyens et un cadre qui devra être respecté. L’État Nous sommes convaincus que c’est à travers la actionnaire doit gagner en fiabilité et respecter ses création, dans toute sa diversité et son originalité, engagements pendant toute la durée du mandat du que le service public renforcera son identité, sa président. singularité et sa légitimité. C’est bien d’une stabilité et d’un financement Les engagements financiers en faveur de la création conforté autour d’une contribution à l’audiovisuel devront à ce titre être non seulement maintenus mais public – nouveau nom de la redevance – modernisée, accrus pour tenir ce pari du renouvellement. Mais, dont les dirigeants de France Télévisions ont le ils devront aussi s’accompagner de prises de risque plus besoin. Car c’est une anomalie qu’à l’heure et d’objectifs d’audace. Audace sur la diversité des de la multiplication des supports et de l’accès aux genres comme des formats. Audace sur les choix de programmes du service public sur plusieurs écrans, programmation. Audace encore sur les sujets traités. seule la possession d’une télévision justifie le Les auteurs sont prêts à relever ces défis et à être paiement de la contribution à l’audiovisuel public. les partenaires d’un service public qui doit aller plus Une parole respectée de l’État ; un financement loin dans les relations qu’il noue avec les créateurs assuré ; un projet ambitieux pour la création ; en associant davantage des professionnels reconnus un(e) dirigeant(e) qui fait le pari de l’audace et de pour l’aider à réfléchir à sa ligne éditoriale et à la la restructuration : les ingrédients sont maintenant valorisation de la programmation des œuvres. La connus pour que le ciel s’éclaircisse au-dessus de responsabilité de France Télévisions à l’égard de la France Télévisions.

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France Télévisions et les auteurs : fais ci et fais pas ça !

France Télévisions est-elle toujours la maison des créateurs ? Certains en doutent, tant les points de friction sont nombreux et les critiques parfois virulentes. Mais les mêmes gardent espoir, tandis que d’autres sentent le renouveau poindre et la plupart espèrent des évolutions de la prochaine présidence. En cinq points, les recommandations au service public de nombreux auteurs dont nous avons changé les prénoms pour une plus grande liberté de ton. par carole Villevet

Plus de risques Il faut revenir à une télévision de de faire de l’audience et d’avoir de tu prendras, plus l’offre et refaire confiance aux au- l’audace en même temps. « France 1 teurs », souligne Marie, scénariste. Télévisions prendra à nouveau d’audace tu auras des risques quand on ouvrira les À ces maux, plusieurs causes. de l’audience, quand le ser- Les mots reviennent comme un leit- Pour certains, France Télévisions vice public s’autorisera à casser et motiv dans la bouche des auteurs. n’a pas de réflexion sur la diver- segmenter les audiences », estime Depuis plusieurs années, France sité. Le groupe public se contente Ronan, scénariste. Télévisions manque d’audace dans du renouvellement de ses succès. sa fiction, ne prend plus de risques Pour preuve, ces chiffres : en 2014, Cela dit, l’idée de l’audace fait son éditoriaux. Alors même que son 11 séries ont été reconduites, et seu- chemin dans les chaînes, apparais- statut de service public et sa res- lement 4 ont été lancées en dévelop- sant de plus en plus comme une ponsabilité d’être le premier com- pement sur France 2 et France 3. démarche impérative et un pari manditaire de fictions en France lui Pour d’autres, les chaînes sont plus qui peut se révéler payant. « Cela imposent le devoir d’être à la pointe sclérosées que frileuses. « France évolue dans le bon sens, souligne de la créativité, de l’innovation, des Télévisions est bloqué par des Jeanne, scénariste, parce qu’il y tendances. « Les auteurs ne veulent contraintes budgétaires énormes et a aujourd’hui plus de confiance plus travailler pour un service public enfermé dans le fait de vouloir plaire entre diffuseurs et auteurs, malgré de la commande. Aujourd’hui, la fri- à tous les publics », estime Caroline, quelques réflexes conservateurs. losité de France Télévisions nuit à la scénariste. La faute à l’audience ? Le décalage dans la prise de liberté connaissance et donc à la tolérance, Sans doute ! D’aucuns jugent que sur l’espace d’expression entre les et le service public met les auteurs l’État joue un rôle contradictoire en séries étrangères et les séries fran- dans une situation d’auto-censure. demandant à France Télévisions çaises est moins grand. »

6 SACD • LE MAGAZINE • printemps 2015 eroux / France 3 / L eroux P hilippe © Certains auteurs confirmés demandent aujourd’hui à travailler sur Plus belle la vie.

Le formatage trouver une certaine liberté, un La solution ? Les auteurs la trouvent tu banniras, les confort de travail, une manière de dans la multiplication des cases, le 2 traiter différemment les sujets de bannissement de l’audience à tout genres tu multiplieras société. » « Je n’ai jamais eu pour prix. « Il faut réinventer l’éditorial, mission de renouveler le public prendre le risque de segmenter le Au titre des critiques les plus sou- de France 3, rétorque de son côté public, ne pas être paternaliste avec vent entendues, la disparition de Anne Holmes, directrice de la fic- le public car cette attitude vieillit certaines cases (access hebdoma- tion sur la chaîne. Pour autant, l’audience », ajoute Georges. Il est daire, deuxième partie de soirée) et nous le rajeunissons peu à peu, d’ailleurs suivi dans sa réflexion de certains genres (la fiction jeu- arrêtant certaines séries vieillis- par bon nombre de ses confrères, nesse notamment) est largement santes comme Louis la Brocante qui adhèrent à l’idée de la ministre déplorée par les auteurs… voire, et Famille d’accueil. Mais pourquoi Fleur Pellerin de segmenter les aussi, par les responsables de la stopperions-nous des fictions qui publics, de ne pas se poser systé- fiction des chaînes ! La politique du réunissent 4 millions de téléspec- matiquement la question de l’au- « tout séries », l’invasion du 52 mn tateurs ? » dience, pour investir des espaces et du genre policier inquiètent socioculturels différents et, au final, aussi les auteurs. Enfin, certains Aujourd’hui, les auteurs accusent étonner, innover, inventer… ne comprennent pas pourquoi France Télévisions d’être implici- France 3 se refuse à parler aux plus tement responsable du manque Et puis, les auteurs se demandent jeunes en prime time, alors même de renouvellement des créateurs, si la politique du « tout séries » ne que des séries comme Plus belle la qui ne peuvent plus se former sur favorise pas les grands groupes vie (PBLV) attirent en nombre un l’access et la fiction jeunesse, véri- audiovisuels, et donc, le forma- public jeune en access. « La chaîne tables laboratoires de création, tage. « Aujourd’hui, les groupes préfère se cantonner au public des ainsi que sur des cases moins ex- sont privilégiés au détriment de la plus de 50 ans, regrette Chris- posées. « Produire plus de séries, diversité », estime Marie. « On a le tophe, scénariste. Ce choix, à mon c’est bien, mais cela réduit les sentiment que France Télévisions sens, brise la création, appauvrit la champs d’expression et concentre distribue du travail à tous les pro- fiction et a des conséquences inat- les talents des auteurs et des co- ducteurs, par peur du retour du tendues. Ainsi, certains auteurs médiens. C’est, à terme, un pro- bâton », s’inquiète, de son côté, confirmés demandent aujourd’hui blème crucial pour l’emploi », pré- Caroline. Et le projet ne prime pas à travailler sur PBLV, espérant y vient Georges, réalisateur. sur le producteur. »

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Ton inter- fin de non-recevoir non motivées, poste de directeur de collection. ventionnisme, avec des avis subjectifs déguisés « Avec le développement de la 3 en vérités objectives. « J’ai le sen- série, ce poste devient primor- tu freineras timent fort d’une prise d’autorité du dial car il concentre les exigences Ronan, scénariste d’une série à diffuseur sur l’ensemble de la pro- artistiques. Le directeur de collec- succès, se souvient des longues duction, note pour sa part Georges. tion doit porter la ligne éditoriale discussions qu’il a eues avec France Cela complique d’autant le travail de la série. Le diffuseur, lui, doit Télévisions dans la phase d’écri- des auteurs qui ne savent plus qui seulement avoir un regard sur les ture. « Il y a eu beaucoup de débats est l’interlocuteur prépondérant, le grands enjeux de l’histoire, les sur des points où nous n’étions pas producteur ou la chaîne. L’autorité questions de sociétés, les grandes d’accord, notamment parce que la du producteur doit se clarifier et le lignes des personnages. » chaîne poussait à faire une série diffuseur doit être remis à sa place plus populaire et plus grand public d’éditeur. Nous verrons les choses Pour sa part, le directeur de la que ce que je voulais. Imaginer que s’améliorer si les diffuseurs ac- fiction de France 2, Thierry Sorel, les auteurs sont des génies est ceptent de laisser filer une autorité regrette l’interventionnisme mais faux, et je reconnais volontiers avoir qu’ils se sont arrogée ». Et l’auteur- le justifie tant que le travail sur la besoin de discussions, de contacts, réalisateur de redéfinir les qualités dramaturgie n’est pas abouti. Et il de remise en cause. Toutes les évo- de chacun des acteurs de la fiction : applaudit des deux mains l’analyse lutions sur l’écriture de la série, « la créativité va à l’auteur/réalisa- de Jeanne : « Quand des produc- je les ai acceptées, parce que je teur, la vaillance au producteur et tions investissent sur des direc- considérais qu’elles ne nuisaient la perspicacité au diffuseur. Chacun teurs de collection expérimentés pas à la série. » Mais si les auteurs son rôle, chacun son ambition. » et compétents, le conseiller de s’accommodent de débats et de dis- programmes n’a plus à intervenir cussions pour le bien du projet, ils Pour Jeanne, l’une des solutions au quotidien et il retrouve sa place sont en désaccord profond avec des réside dans la valorisation du de superviseur. »

Animation : le dangereux recours aux adaptations

En animation, France Télévisions privilégie les adaptations d’une manière exagérée et les chiffres sont pour le moins parlants. En 2014, les adaptations ont concerné 67 % du minutage des œuvres diffusées toutes chaînes confondues. Sur France 5, ce pourcentage est monté à 75,7 % et sur France 3 à 81,3 %*. Une telle politique pénalise la rémunération des auteurs, puisqu’une part du droit d’auteur revient à l’auteur de l’œuvre originale. En réponse à cette accusation, le directeur délégué à l’animation, Pierre Siracusa, admet que, dans un contexte très concurrentiel, il est moins risqué de proposer au jeune public des héros qu’ils connaissent. Mais il revendique et défend aussi ses choix quand il commande des adaptations d’œuvres écrites par des auteurs comme Claude Ponti, de la littérature classique ou du patrimoine culturel. Cela dit, il reconnaît que les producteurs, financeurs et diffuseurs doivent davantage inciter à l’émergence de nouveaux talents et de nouvelles licences, comme Les As de la jungle ou Les Grandes Grandes Vacances. Et il rejoint les auteurs qui veulent valoriser le développement d’œuvres originales. « Nous développons les outils qui vont favoriser la création originale. D’une part,

nous essayons de mieux financer les pilotes. D’autre part, sur des projets qui nous Les As de la jungle semblent prometteurs, nous commençons par financer une série courte ou un sur France 3. one-shot, avant de s’engager sur une série plus longue. » © Masters films / Vanilla Seed / TAT Productions

* Source : OPCA 2014

8 SACD • LE MAGAZINE • printemps 2015 Charte : quatre ans après, Ton équipe, tu en danger. Or c’est le propre de un bilan sauras renouveler cette discipline que de savoir par- plutôt positif 4 tager la fragilité de la création », Pour les auteurs, l’organisation regrette Georges. En juillet 2011, France Télévisions, mise en place au sein du groupe la SACD, le Groupe 25 images, public n’est pas propice à l’innova- Beaucoup considèrent d’ailleurs l’USPA et le SPI signaient une charte tion et la prise de risques. La faute, que le renouvellement des équipes relative au développement de la d’abord, à une ambiance peu favo- contribuerait au renouvellement fiction. Quatre ans après, le bilan rable à l’exaltation. « Nous devons des idées… « Sur la fiction, il faut est globalement positif. La charte faire face à une direction inquiète avoir des gens avec des mandats a moralisé l’accueil des projets et qui est dans la pyramide de la peur clairs pour une durée déterminée. généralisé les pratiques contrac- et non de la création. De fait, cela Il faudrait mettre des personnalités tuelles. Désormais, quand un pro- entraîne le repli et les personnels illuminées à ces postes, des pro- ducteur propose un projet à France de FTV sont angoissés alors qu’ils fils comme Didier Decoin, Claude Télévisions, il a préalablement devraient être enthousiastes », de Givray ou Nicolas Traube. Au- signé avec l’auteur une option de constate Marie. jourd’hui, dans les directions de contrat rémunérée, proportionnelle fiction des chaînes, il n’y a pas as- au travail engagé. Cette nouvelle France Télévisions est confronté à sez de diversité dans les profils », pratique a néanmoins son revers l’instabilité des têtes dirigeantes renchérit Christophe. et les auteurs notent quelques et, dans le même temps, à la bu- effets pervers. D’une part, certains reaucratisation des conseillers D’autres, enfin, réclament le retour producteurs essaient de contour- de programmes, estiment les au- d’un binôme à la tête de FTV : un(e) ner l’accord en proposant à France teurs. « On ne peut que constater gestionnaire d’un côté, un homme Télévisions des projets moins la fonctionnarisation des équipes ou une femme de programmes de aboutis qu’un synopsis. À l’inverse, qui n’ont pas envie de prendre des l’autre, exclusivement dédié(e) à sa d’autres producteurs font beaucoup risques et ne savent pas se mettre tâche, avec une vision à long terme. travailler les auteurs en amont, avant de signer un contrat d’option. Enfin, on observe une baisse des tarifs des rémunérations des auteurs sur les séries. Les produc- teurs provisionnent-ils les dédits Tes budgets moyens de sa croissance », relève aux auteurs que France Télévisions un auteur. Sur ce genre, on ne peut est censé payer ? La question est à la création, 5 plus penser restreindre les bud- posée… L’autre point positif de la tu augmenteras gets. Il faut absolument augmen- charte est qu’elle a permis le droit ter le volume de production. » Les à l’échec, en acceptant les condi- Thierry Sorel le regrette : les bud- auteurs, à juste titre, se disent très tions du dédit. Certes, ce dispositif gets de la fiction de France 2 ont affectés par la baisse du volume n’a pas eu d’effet sur son objectif dangereusement baissé ces der- de commandes. D’autant qu’ils premier, le renouvellement de la nières années, ce qui a contraint sont aussi victimes d’une baisse de fiction et il a multiplié le nombre de la chaîne à abandonner toutes les leur rémunération, et ce, sur l’en- développements arrêtés prématu- cases dédiées au genre en de- semble des formats. « Aujourd’hui, rément. Mais il a permis d’accélérer hors du prime time. Et les cases on demande aux auteurs plus les différentes étapes de l’écriture. de prime time ont, elles, souffert d’investissement, donc plus de tra- Ainsi, les commandes de saison 2 de la baisse de l’investissement, vail en termes artistiques. Dans le interviennent généralement plus avec une case en moins (celle du même temps, leur rémunération vite, souvent avant la diffusion de la lundi) et une augmentation des baisse. La fiction a déjà beaucoup saison 1. Ce système a également rediffusions (30 % en 2015). « Si souffert de la maîtrise des coûts, favorisé le retour de la saisonnalité on veut créer une fiction innovante, alors même que c’est le genre le des séries et a autorisé les auteurs audacieuse, qui s’exporte et qui ré- plus identifiant pour les chaînes et à s’investir dans une série suscep- ponde aux vœux de Fleur Pellerin, aujourd’hui, le plus prometteur », tible d’être interrompue. © Masters films / Vanilla Seed / TAT Productions il faut donner à cette industrie les conclut Jeanne.

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Le “made in France” a la cote en fiction La fiction française est en plein renouvellement et s’exporte de mieux en mieux ; le service public prend largement sa part dans le mouvement et les acheteurs étrangers… achètent ! par pascal marion

Avant même que le premier épi- qualité de la nouvelle fiction fran- Or justement, pour Mathieu Béjot, sode ne soit diffusé sur France 2 çaise est reconnue à l’étranger. délégué général de TV France le 18 mars dernier, la série Les International (TVFI), l’association Témoins était déjà vendue à une Dans ce contexte, la fiction de des exportateurs de programmes dizaine de pays, et, selon L’Express, service public a-t-elle une iden- audiovisuels français, « France faisait un tabac en VO sur une chaîne tité comme il existe une patte Télévisions devrait profiter de sa sous-titrée en Australie. Mieux : Canal + ? Pas franchement, même déconnection des audiences, vu la les États-Unis lui tourneraient au- s’il est évident que le service public suppression de la publicité, pour tour… Un flic à la retraite, incarné ne peut se permettre les audaces innover davantage » en proposant par Thierry Lhermitte, reprend du de Canal + pour séduire le public. des fictions qui se déroulent dans service pour épauler une jeune Pigalle, la nuit, du même tandem des milieux socio-professionnels consœur dans une mystérieuse Hadmar-Herpoux, qui nous fait différents de ceux que l’on voit enquête. Marc Herpoux, co-scéna- visiter les clubs de strip-tease sur d’habitude, en mettant en lumière riste de la série avec Hervé Hadmar, fond de guerre de territoires entre la diversité raciale, l’intégration qui la réalise, se réjouit d’un tel suc- les clubs du quartier, en est un bon des handicapés, comme le fait cès. Leur recette ? « S’inspirer des exemple. Sachant néanmoins que depuis longtemps la Grande-Bre- séries nordiques et y joindre un per- cela ne paie pas à tous les coups tagne par exemple. On en prend sonnage très français, qui n’est pas et sur tous les plans. Pour l’anec- le chemin avec des polars à l’an- beaucoup dans l’action et porte en dote, un producteur américain, crage local fort, comme Chérif, sur lui une certaine abstraction. Thierry emballé, avait acheté la série pour France 2, basé sur l’histoire d’un Lhermitte ici est une silhouette, un la diffuser dans son pays. Échec. flic de terrain lyonnais. Ou avec peu comme Alain Delon dans les Aux yeux du public américain, Candice Renoir, une femme flic films de Jean-Pierre Melville. » Pigalle, c’est le Moulin-Rouge et de 50 ans, boulotte, qui a vécu un Montmartre, pas les peep-shows temps à Singapour. Depuis deux ou trois ans, la fic- et les mafias parisiennes ! Autre tion française se renouvelle, une audace de Canal + : Maison close, Nathalie Bobineau, directrice dé- tendance fortement initiée par les qui raconte la vie d’un lupanar peu léguée à la distribution à France créations originales de Canal +. Et, après la Commune de . Les Télévisions Distribution, met en selon une étude du Centre National deux séries ont un thème com- avant la grande diversité de la fic- du Cinéma et de l’image animée mun : le sexe. Rédhibitoire sur tion télévisuelle française du ser- (CNC), parue en 2013, « les séries, une chaîne publique. Autre thème vice public. La diversité, ce sont téléfilms et films d’animation fran- délicat : « les scénarios qui portent d’abord des formats multiples : çais se sont très bien exportés au un regard politique sur les pro- séries d’une heure, mini-séries de cours de l’année 2012, avec des blèmes sociaux des petites gens 2 x 90 mn ou même des séries plus ventes atteignant 127 millions sont mal venus, explique Marc longues. C’est aussi une grande d’euros, en hausse de 14,8 % par Herpoux, même si les fictions variété de contenus : polar, drame rapport à 2011. » La progression concernant le monde politique ne social, grande fiction patrimoniale se poursuit depuis. Désormais, la posent pas de problème. » et grandes adaptations.

10 SACD • LE MAGAZINE • printemps 2015 © Bernard Barbereau F T V Barbereau © Bernard

Nicolas Le Floch (France 2).

En matière de diversité il faut noter trentaine de pays. Les acheteurs France Télévisions Distribution que la France produit davantage étrangers s’intéressent davantage exporte depuis très longtemps en de séries qu’auparavant. Long- aux films dits « en costumes » Europe. L’Europe centrale et l’Eu- temps, elle leur a préféré les uni- – appelés ainsi parce que l’intrigue rope du sud, avec notamment l’Ita- taires. « Or, vendre des unitaires fait revivre le passé et que les lie, achètent bien. Les deux conti- est très difficile, poursuit Nathalie acteurs sont vêtus de costumes nents américains sont aussi plutôt Bobineau. Je préfère construire de naguère ou jadis. Ces fictions demandeurs. Mais l’Asie reste le une offre avec du volume. Cela plaisent « à condition d’être de continent où la fiction française permet aux diffuseurs linéaires la grande œuvre patrimoniale », s’exporte le moins, sauf au Japon, de rassurer leurs annonceurs précise Nathalie Bobineau. France très friand d’adaptations de polars. quand la case de diffusion est ins- Télévisions a bien vendu les contes Surprise : la langue française n’est tallée. » Linéaire qui, depuis peu, et nouvelles du xixe siècle, les pas forcément un obstacle. Si s’oppose au « délinéarisé », ou sagas Maupassant, notamment les chaînes généralistes ont tou- programmes à la demande. Grâce en Europe. Pour Mathieu Béjot, la jours du mal, il existe une quan- aux plateformes comme Amazon, France a une carte à jouer dans tité de chaînes pointues à travers Hulu ou Netflix, le marché de la ce domaine. « Voyez Versailles sur le monde dont le public n’est pas VOD est en forte croissance et a Canal +. Ou Nicolas Le Floch, sur rebuté par les sous-titres. imposé un découpage nouveau du France 2, qui s’exporte bien en Eu- paysage audiovisuel international. rope centrale et en Europe orien- Il semble donc que l’audiovisuel De nouveaux couloirs s’ouvrent, se tale. » Et, bien sûr, incontournables français, et son service public multiplient, et donnent des oppor- à l’export : les séries policières. en particulier, n’ont jamais eu tunités de travailler avec bien plus Mais le polar moderne doit corres- autant d’atouts en main. Cela est de partenaires qu’auparavant. pondre à de vrais codes tels qu’ils d’autant plus important que, dans apparaissent dans les romans. un marché devenu global, des fic- Alors, au final, que peut-on ex- Comme, par exemple, Accusé ou tions de qualité émergent chaque porter ? France Télévisions vend Le Passager, sur France 2, et les jour du monde entier. Mais il faut peu de comédies à l’internatio- Mary Higgins Clark, sur France 3. aussi savoir que le temps où l’on nal : l’humour s’impose diffici- Ingrédients indispensables, selon comptait sur la seule qualité fran- lement d’un pays à l’autre, à de Nathalie Bobineau : un rythme çaise pour exporter est révolu, le rares exceptions près comme Fais soutenu, une action rapide ou le marketing fait désormais partie pas ci, fais pas ça, qui a séduit une crédit d’auteurs très reconnus. du jeu, sans limite…

printemps 2015 • LE MAGAZINE • SACD 11 dossier

France Télévisions : des missions de service public et des obligations Parce qu’il doit être exemplaire en termes d’offre culturelle, de diversité sur ses antennes, d’investissement dans la création d’œuvres, le groupe France Télévisions est soumis à un régime d’obligations copieux et précis. par Isabelle Repiton

Toutes les chaînes de télévision établies en France Des obligations de diffusion sont soumises à la même loi, celle de 1986, régulière- ment modifiée. Elle comporte un ensemble de règles Le groupe doit diffuser 70 % d’œuvres audiovisuelles pour favoriser sur les antennes la diffusion d’œuvres d’origine européenne dont 50 % d’expression originale françaises et européennes diverses et, en amont, as- française (EOF). Cette obligation doit être respectée surer le financement de leur production. aux heures de grande écoute : entre 18 et 23 heures, Si ces « quotas » de diffusion et de production sont ins- ainsi que le mercredi, le samedi et le dimanche entre crits dans les directives européennes, la loi française 14 et 18 heures. Et se décliner, chaîne par chaîne, au et ses décrets d’application les renforcent et les pré- moins au niveau prévu par la loi : 60 % d’œuvres euro- cisent, au nom de « l’exception culturelle ». péennes, dont au moins 40 % d’expression originale Le régime de France Télévisions, lui, va au delà de française. Et enfin, inclure des inédits sur France 2, ce socle légal commun. Contrepartie du financement France 3 et France 5 :120 heures par an commençant public dont bénéficie la télévision publique, ce régime entre 20 h et 21 h. spécial doit lui permettre de remplir les missions parti- culières qui lui sont assignées, d’exemplarité en terme Pour les œuvres cinématographiques, le quota est de de diversité des oeuvres proposées par exemple, et de 60 % d’œuvres européennes, dont 40 % d’EOF, à res- soutien à la création. pecter aux heures de grande écoute, avec un démar- Il est consigné dans une série de textes : rage du film entre 20h30 et 22h30. n un Cahier des charges établi par l’État et publié par Chaque jour, une des chaînes du groupe doit proposer décret. Sa modification la plus récente est intervenue une émission culturelle en première partie de soi- le 26 décembre 2014. rée. Le cahier des charges précise qu’il peut s’agir de n un Contrat d’objectifs et de moyens signé entre le retransmissions de spectacles vivants, d’œuvres de groupe et les pouvoirs publics pour 5 ans, outil de fiction axées sur la découverte et la connaissance (no- pilotage de la gestion. Il chiffre les missions et les tamment les adaptations littéraires, les biographies, objectifs et fixe les indicateurs qui les mesurent. Le les reconstitutions historiques), d’émissions musi- contrat 2010-2015 a fait l’objet d’un avenant, signé en cales, de magazines, de documentaires de culture et novembre 2013, qui arrive à échéance cette année. d’événements culturels exceptionnels. n des accords, avec les organisations professionnelles de producteurs et d’auteurs fixent notamment des Le cahier des charges précise, genre par genre, les engagements d’investissement dans la création. Car règles de diffusion. Par exemple, pour : selon son cahier des charges, « France Télévisions doit n le spectacle vivant : France Télévisions doit diffu- être l’un des premiers investisseurs dans la création ser des spectacles lyriques, chorégraphiques et dra- audiovisuelle et cinématographique d’expression ori- matiques en veillant à traiter équitablement chacun ginale française ». de ces trois genres, grâce aux programmations de Ces obligations s’appliquent à la fois au groupe, et par France 2, France 3, France 4 et France ô. Elle diffuse chaîne et par genre, notamment ceux qui concernent également des émissions d’au moins 52 minutes, qui les auteurs de la SACD : fiction, cinéma, animation, présentent « le florilège de tels spectacles », avec des spectacle vivant. extraits.

12 SACD • LE MAGAZINE • printemps 2015 France Télévisions : des missions de service public et des obligations

Pour limiter leur relégation au cœur de la nuit, la dif- fixé à457 millions d’euros par an dont 57 pour le ci- fusion de ces spectacles et émissions fait l’objet d’une néma et 400 millions pour les œuvres patrimoniales notation selon un système de 0 à 3 points qui tient audiovisuelles. compte de leur horaire de diffusion : - 3 points si la diffusion débute en première partie de Ce montant global se décline, pour certains genres, en soirée, les après-midi du week-end, de vacances sco- engagements garantis annuellement : laires et de jours fériés, - 29 millions d’euros pour l’animation - 0 point avant 10 h ou après 22 h45 ; - 15 millions pour le spectacle vivant - 2 points lorsqu’elle débute entre 10 h et 22 h45 et - 87 millions pour le documentaire n’est pas valorisable à trois points. Le cahier des charges prévoit un score minimal annuel Pour la fiction, il n’existe pas d’accord spécifique sur de 100 points à atteindre, mais c’est le conseil d’ad- un montant. Mais c’est le genre pour lequel l’investis- ministration qui fixe la limite. Elle était de 200 points sement est le plus élevé : de l’ordre de 250 millions en 2013. France Télévisions déclare avoir obtenu d’euros. Une charte, signée notamment par la SACD 326 points en diffusant 133 spectacles différents. en 2011, encadre également le rôle de France Télé- visions dans le processus de développement (com- n l’animation : le groupe a renouvelé son engage- mande, déroulement, décision de mise en production) ment à diffuser 4 000 heures par an de production et dans ses relations avec les scénaristes, réalisateurs française d’animation sur ses chaînes, notamment et producteurs. France 4, contre 2 100 heures dans l’accord précédent. Ce cadre strict est destiné à faire de FTV le fer de lance Le volume de diffusion minimum sur France 5 comme de la création française, en soutenant sa production et sur France 3 est de 700 heures. En 2013, il a diffusé en lui garantissant une large exposition. 4 430 heures de programmes jeunesse. Un cadre qui risque d’évoluer Des obligations d’investissement Toutefois, le rapport Schwartz sur l’avenir de France France Télévisions doit consacrer chaque année Télévisions, remis au gouvernement le 4 mars der- 20 % du chiffre d’affaires annuel de l’exercice précé- nier, a dénoncé : des objectifs et des missions par- dent à la production d’œuvres audiovisuelles patri- fois contradictoires ; des règles empilées au fil des moniales européennes ou d’expression originale fran- années ; un « cahier des charges trop dense et trop çaise et 3,5 % à la production cinématographique. précis » ; un contrat d’objectifs et de moyens trop Cette contribution, pour l’audiovisuel, doit être réalisée « long », qui fige la souplesse d’adaptation de l’entre- à 95 % avec des entreprises indépendantes du groupe. prise. Les ministres Fleur Pellerin (Culture et Com- Ces pourcentages inscrits au cahier des charges sont munication) et Emmanuel Macron (Économie, Indus- complétés d’un engagement en valeur absolue garanti trie et Numérique) se sont engagés à simplifier ce dans le COM 2011-2015 ainsi que dans les accords cadre. Dans l’immédiat, c’est celui que le futur pré- signés entre France Télévisions et les organisations sident de France Télévisions trouvera à son arrivée. professionnelles. Quant au niveau d’investissement, le risque existe qu’il soit révisé à la baisse, comme il l’a déjà été en Compte tenu de la baisse des recettes de France 2013, sous la contrainte financière qui va peser sur Télévisions, la contribution, précédemment fixée à un groupe, auquel le ministre des Finances, Michel 480 millions d’euros par an, a été révisée à la baisse. Sapin, a promis après 2015 des ressources publiques Pour la période 2013-2015, son montant annuel est « au mieux » stables.

printemps 2015 • LE MAGAZINE • SACD 13 dossier

La redevance, un modèle européen à géométrie variable

Le financement du service public de la redevance n’est pas aussi ne sont pas prises en charge par le de télévision par une redevance consensuel qu’on le dit. groupe de télévision publique, mais spécifique est un modèle répandu L’Allemagne a pris acte des chan- que la BBC ou la Radio télévision en Europe. On distingue souvent, à gements de mode de réception de publique suisse doivent assumer. tort, une Europe du nord vertueuse, la télévision, pour élargir l’assiette Isabelle Repiton qui finance bien sa télévision pu- de la redevance à tous les appareils blique, avec une redevance affectée connectés. En Suède, cet élargis- élevée, et des pays du sud qui au- sement adopté en 2013, contesté Montant de la redevance raient abandonné la leur à la publi- par un contribuable, a été annulé audiovisuelle en Europe (en €) cité, avec une redevance trop faible. par la Cour suprême en 2014 et la Entre les deux, la France, avec un loi doit être révisée. En France, le FRANCE DOM 86 financement mixte, où la part de gouvernement français a promis BELGIQUE la publicité, supprimée après 20 h de mettre à l’étude cet élargisse- WALLONNE 100 en 2009, s’est réduite, sans que ment cette année. ITALIE 114 le montant de la redevance ait été adapté en conséquence. Enfin, les groupes publics ont des FRANCE MÉTROPOLITAINE 136 périmètres très variables, même si En fait, le paysage a évolué. L’Es- la norme de deux grandes chaînes GRANDE-BRETAGNE 180* pagne a supprimé à la fois la rede- généralistes est commune à la plu- ALLEMAGNE 216 vance et la publicité sur la RTVE, part des bouquets publics. Mais la et créé des taxes qui s’appliquent redevance française finance non SUÈDE 220 à tous, pour la financer. Mais la seulement France Télévisions, mais Finlande a fait la même chose en aussi Radio France, l’audiovisuel SUISSE 432 2013. En Grande-Bretagne, le sujet extérieur… Autant de missions qui * 145,5 £. taux de change moyen 2014 : 1£ pour 1,24 €.

GRANDE- ALLEMAGNE BELGIQUE ESPAGNE FRANCE BRETAGNE ITALIE SUISSE SUÈDE France SRG SSR Groupe audiovisuel ARD, ZDF RTBF RTVE BBC RAI SVT Télévisions (SRF, RTS,RSI..) Budget 2013 M €* 6 500 324 845 3 100 6 122 2 807 1 500 438 Part de ressources publiques dans total recettes en % 92 71 95 79 72 63 71 92** Publicité Oui Oui Non Oui*** Non Oui Oui Non Périmètre du groupe public : nombre de chaînes 22 4 6 15 23 17 7 7 6 Chaînes généralistes 2 2 2 2 2 3 = 2 par zone linguistique 1 Chaînes ou stations régionales 9 Non Non 11 2 3 - Non Chaînes thématiques ou ciblées 10 2 3 2 6 11 1 4 Chaîne internationale 1 Non 1 Non Oui Non Non 1 Radios Oui 5 Non Non Oui Non 17 Non

* Sources : rapport sur l’avenir de France Télévisons coordonné par Marc Schwarz (février 2015) + sociétés. ** À l’inverse de la tendance à la baisse dans le reste de l’Europe, la SVT a vu sa dotation publique augmenter de 34 millions d’euros en 2014. Elle représente désormais 94,5 % de son financement. *** Avant 20 h.

14 SACD • LE MAGAZINE • printemps 2015 assemblée générale

18 juin 2015 3, 2, 1... votez !

Comme chaque année, l’Assemblée Générale sera un grand moment de rassemblement, le 18 juin prochain. C’est une occasion unique de débattre des grandes orientations prises par la SACD pour défendre vos droits et choisir les actions à mettre en œuvre en faveur de vos créations. Un rendez-vous à ne pas manquer.

Le jeudi 18 juin 2015, à 14h30, et l’ensemble du matériel de vote. • Vote sur place tous les associés de la SACD sont Les associés convoqués par voie Les associés pourront voter lors convoqués à l’Assemblée Géné- postale pourront exprimer leurs de l’Assemblée Générale, en rale Ordinaire. Pour approuver les votes par correspondance postale séance sur présentation de leur comptes et le rapport d’activité ou électronique ou en venant en carte de membre (voir p.18 pour de l’année écoulée, évoquer des séance. Ceux convoqués par voie obtenir sa carte de membre) ou, questions posées par les auteurs* électronique ne pourront exprimer à défaut, d’une pièce d’identité. mais aussi, bien sûr, élire les nou- leurs votes que par correspon- veaux membres du conseil d’admi- dance électronique ou en venant Le mode de vote choisi pour l’As- nistration et des commissions de en séance. semblée s’appliquera à l’ensemble contrôle du budget et du droit de des scrutins concernant ladite communication. Les associés ont donc le choix assemblée : le vote des résolutions Cette année, 20 postes sont à entre 3 modes de vote : et les élections des candidats aux pourvoir, au sein des trois ins- (cf. schéma p.18) instances statutaires. En Assem- tances (voir p.16). blée Générale Ordinaire, les déci- • Vote électronique sions (élection des candidats aux Au cours des semaines écoulées, Le vote électronique sera ouvert à différentes instances et approba- différents auteurs ont fait acte de tous les associés, du 18 mai 2015 à tion des résolutions) sont acquises candidature pour ces différents zéro heure au 15 juin 2015 à midi à la majorité relative des voix des postes. Leurs CV et déclaration (heure de Paris), sur un site dédié votants, à l’exception de la déci- d’intention peuvent être consultés dont les modalités d’accès figure- sion concernant la répartition des sur l’espace auteur du site sacd.fr. ront sur les convocations. sommes provenant de la rému- Ils sont également à la disposition nération pour copie privée (affec- des auteurs au siège de la SACD ou • Vote par voie postale tées à des actions culturelles) qui peuvent vous être adressés par la Les associés pourront voter par requiert la majorité des deux tiers poste, sur demande. correspondance postale, selon les (art. L 321-9 du CPI). Chaque associé est invité à voter modalités et au moyen du matériel pour l’élection de ces nouveaux de vote qui leur seront adressés membres. Au moins 30 jours avant avec la convocation. * Pour pouvoir être inscrites à l’ordre du l’Assemblée Générale (art. 35-1 Leurs votes devront parvenir au jour de l’Assemblée Générale Ordinaire, des statuts), il reçoit une convo- siège de la SACD au plus tard le les questions écrites des associés doivent cation individuelle par voie pos- 15 juin 2015 à midi (heure de Paris), parvenir au conseil d’administration sous tale (ou électronique pour ceux c’est-à-dire 3 jours avant la tenue pli recommandé avec avis de réception, qui l’ont expressément demandé), de l’Assemblée Générale (art. 37-II au plus tard 45 jours avant l’assemblée (art. avec l’ordre du jour de l’Assemblée des statuts). 34-II des statuts), soit le lundi 4 mai 2015.

printemps 2015 • LE MAGAZINE • SACD 15 assemblée générale Plus d’informations Direction administrative et financière Tél. 01 40 23 44 09 – [email protected] Vous pouvez consulter les statuts sur le site www.sacd.fr – La SACD – l’organisation ou dans l’espace Téléchargement. 1. ÉLISEZ VOS REPRÉSENTANTS Le rôle des différentes instances de décision

conseil d’administration commission de commission du droit 31 contrôle du budget 9 de communication 6

13 postes à pourvoir 3 postes à pourvoir 4 postes à pourvoir Durée du mandat : 3 ans Durée du mandat : 3 ans Durée du mandat : 3 ans

disciplines postes à pourvoir disciplines postes à pourvoir disciplines postes à pourvoir

Metteur(se) en scène d’œuvres dramatiques 1 Auteurs(es) d’œuvres Auteurs(es) d’œuvres Compositeur(trice) dramatique 1 de l’audiovisuelles 3 du spectacle vivant 2 Auteur(e) d’œuvres chorégraphiques 1 Auteurs(es) d’œuvres Auteur(e) des Arts du Cirque 1 Le rôle de la Commission audiovisuelles 2 Scénaristes et/ou réalisateurs(trices) de contrôle du budget d’œuvres cinématographiques 2 Le rôle de la Commission Scénaristes d’œuvres télévisuelles 3 - Consultation pour avis sur de contrôle du budget Réalisateurs(trices) d’œuvres télévisuelles 2 l’adoption du budget par le Auteur(e) d’œuvres d’animation 1 Conseil d’administration - Saisie par l’associé auquel Auteur(e) de créations interactives 1 - Suivi de l’exécution du budget est opposé un refus de et rédaction d’un rapport communication des documents Le rôle du conseil d’administration présenté en Assemblée visés aux art. 35-III et 35-IV Générale des statuts, elle émet des - Définir la politique de la société - Réunion une fois par mois avis motivés ensuite notifiés - Arrêter le budget annuel au demandeur et au Conseil - Déterminer, pour les droits relevant de la gestion d’administration collective, les barèmes et les clés de répartition - Présentation d’un rapport - Procéder au classement des oeuvres d’activité à chaque Assemblée - Se prononcer sur l’admission de nouveaux Générale associés À compter du 17 avril 2015, - Réunion au moins une fois - Décider, s’il y a lieu d’accorder une assistance les rapports et les comptes par trimestre judiciaire ou sociale à un membre de la société sociaux de l’exercice 2014 - Définir les conditions d’attribution du seront consultables à la SACD, ainsi budget d’action culturelle dans les différents que sur votre espace auteur accessible à partir du site www.sacd.fr répertoires Direction administrative et financière 11 bis rue Ballu, 75442 Paris Cedex 09 De 9h à 17h45, du lundi au jeudi et de 9h à 17h, le vendredi. Retrouvez toutes les informations sur l’espace auteur du site www.sacd.fr

dates à retenir 04.04.2015 > Clôture des candidatures 17.04.2015 > Mise à disposition des dossiers des candidats, des rapports et comptes sociaux de l’exercice 2014. Les dossiers des candidats seront accessibles sur l’espace auteur du site www.sacd.fr et disponibles au siège de la SACD. Ils pourront également vous être adressés par la poste à votre demande. Contact : Muguette Henry - Tél. 01 40 23 44 09 – [email protected] 18.05.2015 > Ouverture du vote par correspondance postale ou électronique pour l’élection des candidats et le vote des résolutions de l’Assemblée Générale Ordinaire 15.06.2015 > Clôture des votes par correspondance ou par voie électronique (à midi heure de Paris) 18.06.2015 > 14h30 Assemblée Générale Ordinaire au Théâtre de l’Œuvre (55 rue de Clichy - Paris 9e)

16 SACD • LE MAGAZINE • printemps 2015 assemblée générale

2. comment voter

membres sacd

3 modes de vote

par courrier ou en ligne ou assemblée générale

Du 18 mai au 15 juin 2015 Du 18 mai au 15 juin 2015 Jeudi 18 juin 2015 à 14h30 à midi (heure de Paris) à midi (heure de Paris) au Théâtre de l’Œuvre à l’aide de l’enveloppe T https://vote.election-europe.com/ (55 rue de Clichy - Paris 9e) reçue avec la convocation Elections-SACD/

vote

Pour élire

Conseil d’administration Commission de Commission du droit contrôle du budget de communication 13 postes à pourvoir 3 postes à pourvoir 4 postes à pourvoir

L’accès à l’Assemblée : Tout associé pourra participer à l’assemblée (qu’il ait ou non voté préalablement par voie électronique ou postale) sur présentation de sa carte de membre ou, à défaut, d’une pièce d’identité.

Si vous n’avez pas encore reçu votre carte de membre, merci de bien vouloir en formuler la demande par mail ou par courrier, accompagnée d’une photographie d’identité (mentionnant vos nom et prénom) au : Pôle Auteurs Utilisateurs - 11 bis rue Ballu - 75442 Paris Cedex 09 Mail : [email protected] - Tél. : +33 (0)1 40 23 44 95 Retrouvez toutes les informations sur votre espace auteur du site www.sacd.fr

printemps 2015 • LE MAGAZINE • SACD 17 rencontre

Pierre Jolivet, auteur “inconsolable et gai” Le lauréat du Prix Henri-Jeanson 2014 – reçu en janvier dernier à la SACD – occupe une place singulière dans le cinéma français. Alors que Jamais de la vie, son dernier film, vient de sortir en salles, il répond à nos questions sur son travail d’auteur et de metteur en scène. propos recueillis par guillaume regourd

Vous partagez avec Henri Jeanson un même refus de car je préfère, en tout cas comme créateur, quand les vous cantonner à un seul type de cinéma. Qu’est-ce choses sont différentes de que ce qu’elles semblent qui explique que vous passiez, d’un film à l’autre, de être. En fait, j’ai les avantages et les inconvénients la comédie au drame ou bien au policier ? d’un statut qui s’est construit avec les années. Nous Je me reconnais dans cette phrase : « L’homme est un ne sommes pas si nombreux à avoir obtenu des succès animal inconsolable et gai. » Je suis par nature Jean- dans plusieurs genres. Je ne suis pas enfermé dans un qui-rit et Jean-qui-pleure. Je n’ai pas pu jusqu’ici me seul cinéma. Cela ouvre des possibilités. Et en même résoudre à ne faire que pleurer ou que rire. Je passe temps, elles sont difficiles à transformer et il faut de l’un à l’autre. convaincre à nouveau à chaque film.

Vos deux derniers films, Mains Armées et Jamais de S’appuyer sur des partenaires de confiance comme la vie, sont plus sombres que les précédents. Est-ce à Vincent Lindon, Roschdy Zem ou François Berléand, dire que Jean-qui-pleure a pris le dessus ? avec qui vous avez souvent collaboré, est-ce une ma- Non, il est simplement devenu très difficile pour moi nière de vous renouveler sans vous perdre ? de produire des comédies. La façon dont j’écris ces C’est beaucoup plus simple que ça : il y a des gens films-là n’est plus à la mode. Je n’écris pas de films avec lesquels j’aime bien travailler. Je suis, par nature, comiques, j’écris des comédies. Or le climat est da- plutôt fidèle. Parce que je suis trop angoissé et qu’il vantage au premier degré. Les décideurs veulent pou- faut être très sûr de soi pour changer de collabora- voir rire dès la lecture du scénario et comprendre les teurs à chaque fois. Je ne travaille néanmoins pas avec impulsions comiques tout de suite. Les trois scènes de les mêmes depuis trente ans. Dans Jamais de la vie, il Ma petite entreprise qui se sont avéré les plus drôles n’y a que des nouveaux : Olivier Gourmet, Valérie Bon- du film n’étaient pas les plus drôles à la lecture du neton, Julie Ferrier, Bénabar… Et j’ai par ailleurs écrit scénario. Deviner ce que j’allais en faire réclamait de le film tout seul, sans Simon Michaël. l’imagination. C’était ces scènes-là que les financiers voulaient supprimer. Justement, comment écrivez-vous ? J’écris par session, quotidiennement. Je commence Il vous est donc plus facile de faire des films noirs ? par 2 ou 3 heures de préparation pendant lesquelles J’arrive à financer des films plus noirs, oui. Mais j’ai j’accumule de l’énergie par exemple en faisant du put- toujours pensé que le polar était une bonne façon de ting dans mon bureau ou en jouant à des jeux vidéo. parler de tout, sans ennuyer. Et en même temps, j’es- Mais surtout, aucun exercice intellectuel. Je m’ « auto- saye à chaque film de tordre le cou au genre. Mains touille », jusqu’à que je sente que je suis chargé et là Armées est un thriller mais avec une intrigue familiale, j’écris 4 ou 5 pages sans m’interrompre. Et je me pose Ma Petite entreprise est un film social et une comédie... toujours une deadline, quitte à aboutir à quelque chose Ce qui peut d’ailleurs, là aussi, compliquer les choses. de pas terrible. Cela fournit de la glaise pour continuer Plus le genre est marqué, plus les financiers ont l’im- à sculpter. Pour ce qui est de ma relation avec Simon pression que le film est lisible et qu’ils parviendront Michaël, cela fait vingt ans que nous travaillons en- à toucher le public. J’y vois un vrai problème culturel semble, depuis Fred. Nous nous voyons tous les jours.

18 SACD • LE MAGAZINE • printemps 2015 Repères

1982 et 1985 : Scénariste du Dernier combat et de Subway, réalisés par Luc Besson 1985 : Premier long-métrage Strictement personnel, nommé au César de la Première œuvre 1986 : Le Complexe du kangourou 1989 : Force majeure 1997 : Fred 1998 : En plein cœur 1999 : Ma petite entreprise 1999-2000 et 2003-2005 : Président de l’ARP 2002 : Le Frère du guerrier 2007 : Je crois que je l’aime 2011 : Mains armées 2015 : Jamais de la vie © LN P hotographers

Les choses se sont calées très naturellement entre on en voit un où les acteurs ne jouent pas, ils sont. Com- nous. Lui, c’est un vrai flic, il travaille les dossiers, lit ment capter la vie ? Et aussi l’interpréter, sinon c’est énormément, enquête sur le sujet et les personnages. du documentaire… Je danse en permanence sur cette Je suis beaucoup moins terre-à-terre, je m’évade et il frontière. Jamais de la vie est tourné sur un parking de me ramène. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir des idées supermarché en banlieue. Je trouve cet endroit assez fortes et originales. beau mais je refuse de filmer de manière sophistiquée des personnages dont je recherche la vérité et la simpli- Vous êtes moins terre-à-terre, dites-vous, et pour- cité. À quel moment suis-je esthétisant ? Décider quoi tant c’est vous le metteur en scène… faire de l’espace, le transcender, l’abîmer ou simple- Alors attention, quand j’écris je ne pense pas du tout ment tenter de le retranscrire, choisir où se mettre…, au metteur en scène. Si j’ai une vertu, c’est celle de c’est un casse-tête constant. Et c’est une question de savoir compartimenter. De la même manière quand je mise en scène, pas d’écriture. Cela passe par l’œil. réalise, je ne pense pas au scénariste : il ne me vient jamais à l’esprit de peser le fait que j’ai travaillé deux Vous écrivez tous vos films et ne tournez que des scéna- semaines sur une scène à la réécrire quatre fois. Pa- rios originaux. L’engagement dont vos films témoignent reil, quand je deviens monteur, je me fiche du réali- passe-t-il aussi par le fait d’être un auteur complet ? sateur. Je n’ai aucun pathos avec mon travail. Si une Si je n’ai pas fait d’adaptation, c’est que l’occasion ne scène ne fonctionne pas, je la coupe. s’est pas présentée. J’ai essayé quelques fois d’obte- nir les droits de livres mais je n’ai pas réussi pour des Cela signifie-t-il qu’il n’y a jamais de souffrance ? raisons de coût. Et quand vous êtes marqué auteur, Je ne parlerais pas de souffrance mais d’épreuve. La comme c’est mon cas depuis mon premier film, vous plus difficile, c’est le tournage. À l’écriture, on peut ne recevez quasiment plus de scénarios. J’adorerais, toujours revenir en arrière. Au montage aussi. Quand comme aux États-Unis, faire chaque semaine mes on tourne dans un décor, on doit attraper l’émotion courses parmi quinze scénarios très bien écrits. Les après laquelle on court dans le temps imparti. Après, producteurs qui financent une écriture ont une idée c’est trop tard. Le danger est permanent. Si souffrance conceptuelle précise et ils se disent que je vais emme- il y a, et à toutes les étapes, c’est de ne pas réussir ner le projet ailleurs, vers mon propre univers. Quant à à faire mieux. Je pense savoir reconnaître quand cela mon engagement politique, il est naturel : je suis davan- se passe bien. Mais je reste toujours habité par une tage en empathie avec la grande majorité des Français certaine frustration que ce ne soit pas encore mieux. qui souffrent qu’avec les élites. Je reste le gamin de Maisons-Alfort qui devait faire une heure et demie de Vous posez-vous la question du réalisme ? transports pour aller voir un film dans Paris et dont les Chaque jour, à chaque scène. On voit trop de mauvais copains avaient des parents chauffeur de bus ou gara- films où la vie ne s’écoule pas à l’image. Et tout à coup, giste. On est ce qu’a été notre jeunesse.

printemps 2015 • LE MAGAZINE • SACD 19 AGENDA

Festivals

mai juin

THÉÂTRE DANSE e 5 édition 27 MAI > 03 JUIN CIRQUE CINEMA CONCERTS

LA VILLE SANS VOIX

— Samuel Achache Mathurin Bolze Sandrine Bonnaire Richard Brunel Jeanne Candel & Lionel Dray Les Chiens de Navarre Bertrand Leclair Micha Lescot Édouard Louis Éric Massé Christian Rizzo

Dave St Pierre Conception © KOLLEBOLLE.COM Samira Sedira — > 22 mai 01 juin 2015 www.comediedevalence.com Tel. 04 75 78 41 70

Festival du Jamais lu Festival de Cannes ô 4 vents Rencontres Ambivalence(s) Processus Cirque Dirigé par Marcelle Le Pavillon des Avec une ouverture chorégraphiques Proposée à la Dispositif de soutien à Dubois (assistée Auteurs de la sur la création internationales Comédie de Valence la recherche, l’inno- d’un artiste invité) le SACD – situé à la internationale pour de Seine-Saint- Ambivalence(s) vation et la création festival (qui a lieu à Pantiéro – est un les tout-petits, Denis invite chaque dans le domaine des Montréal) propose lieu incontournable du cirque, de la Inscrites au cœur année les écritures Arts du cirque lancé en aux jeunes auteurs de où les auteurs et danse, des lectures, de la Seine-Saint- contemporaines les juin 2014, Processus théâtre une tribune l’ensemble des des spectacles Denis, déployées plus singulières à se Cirque a pour vocation pour la lecture de professionnels du participatifs, sur une dizaine de révéler en révélant de susciter la création leurs textes inédits. monde du cinéma Ô 4 Vents convie les théâtres quadrillant la ville. Pour sa d’œuvres de cirque Pensées par des se rencontrent, jeunes spectateurs tout le territoire, cinquième édition le innovantes en lien metteurs en scène échangent et (jusqu’à 11 ans) les Rencontres festival programme avec des recherches et portées par la voix débattent des et leurs parents chorégraphiques 10 spectacles et applications en de comédiens, ces enjeux qui animent dans 10 lieux se veulent par (théâtre, danse, matériaux et procédés, lectures théâtrales la création d’exception du définition ouvertes cirque, musique, ainsi que dans les font jaillir des cinématographique. 4e arrondissement de sur le monde. performance…), domaines scientifiques langues, des formes, La SACD soutient et Paris pour découvrir Chaque année, dont 7 créations du applicables au cirque. des styles très encourage toutes les toute la richesse elles permettent Collectif artistique Il permet la rencontre variés, mais tous écritures de cinéma, du spectacle vivant l’émergence et la de la Comédie. entre des auteurs empreints d’une notamment par le jeune public. reconnaissance Parmi les artistes de cirque (8 lauréats envie commune : Prix du scénario Du 22 mai au 1er juin 2015, de chorégraphes invités cette année : désignés pour cette celle d’interroger, au (qu’elle a initié en Paris. français et Dave Saint-Pierre, première édition), des moyen de la fiction, 1994), remis lors www.o4vents.fr internationaux et Christian Rizzo, Les scientifiques, et des le monde dans de la cérémonie de constituent à ce chiens de Navarre structures culturelles. lequel nous vivons. clôture du Festival, titre un rendez-vous et Jean-Christophe L’aboutissement de Pendant une dizaine le Prix SACD remis incontournable Meurisse, Sandrine leurs travaux est pré- de jours, les Écuries à un long métrage de la danse Bonnaire… senté à l’Académie Fra- sont le théâtre francophone en contemporaine. Du 27 mai au 3 juin, tellini (coproductrice d’œuvres fraîchement clôture de La L’édition 2015 réunit Valence. avec la SACD), sous achevées, de projets Quinzaine des 25 compagnies www.comedie forme de déambula- éditoriaux spéciaux, Réalisateurs et le venues de 15 pays. devalence.com tions, dans le cadre du d’événements Prix SACD remis à Du 5 mai au 13 juin. festival Les Impromp- communautaires, de un long-métrage www.rencontres tus (du 2 au 14 juin). lectures jeune public en compétition choregraphiques.com Une rencontre sur la et de master-classes. à La Semaine de recherche en cirque est Du 1er au 9 mai, Montréal la Critique. Elle proposée le 12 juin de (Québec). soutient également 14h30 à 17h30 (entrée www.jamaislu.com la programmation de libre sur réservation au l’ACID à Cannes. 01 72 59 40 30) Du 13 au 24 mai. Les 4, 5, 11 et 12 juin, www.festival-cannes.com Académie Fratellini, La Plaine-Saint-Denis.

20 SACD • LE MAGAZINE • printemps 2015 AGENDA

spectacles

juillet avril

Festival d’art Festival du Film Série, Séries La Tectonique La lettre Joffrey lyrique d’Aix en Court en Plein Air Créé à Fontaine- des nuageS des sables Verbruggen - Provence de Grenoble bleau en 2012, sur Créé au Théâtre Le projet de La Liberté Cette année encore, Depuis 1978 et l’enthousiasme d’une Graslin de Nantes le Lettre des sables Récompensé en la SACD apporte pour la 38e année équipe composée de 7 avril 2015 et libre- est né d’une triple 2011 par le Magritte son soutien au cycle consécutive, l’équipe créateurs de séries ment adapté de Cloud rencontre entre (César belge) du d’ateliers Opéra de la Cinémathèque de premier plan, Tectonics du dra- Daniel Mesguich, meilleur espoir en création qui se de Grenoble organise Série Series est un maturge portoricain le compositeur masculin, en 2013 tient du 24 juin au le Festival du Film forum de réflexion José Rivera, l’opéra Christian Lauba par le Premier prix 3 juillet, en préam- Court en Plein Air. dédié à la création, jazz La tectonique des et le saxophoniste du jury au Dinard bule du festival. Ces Organisé autour pour tous ceux nuages est composé Richard Ducros Comedy Festival, et ateliers dédiés à d’une sélection de qui conçoivent les par Laurent Cugny, à l’issue d’une le Prix du Public au la création d’opéra films réalisés dans séries : scénaristes, sur un livret de Fran- création commune Festival de Mâcon sont l’occasion pour l’année écoulée, le réalisateurs, com- çois Rancillac, avec au Printemps des en 2014, ce jeune de jeunes créateurs festival affirme sa positeurs, produc- de textes chantés de Arts de Monte-Carlo. comédien de 26 ans (compositeur, chef singularité avec la teurs, diffuseurs… Yann-Gaël Poncet. Il C’est sur une idée a suivi des cours de d’orchestre, drama- projection en plein air C’est également un s’agit là d’un projet de Richard Ducros comédie à Bruxelles turge, metteur en et au cœur de la ville rendez-vous ouvert de longue haleine que Daniel Mesguich avant de venir mener scène, scénographe des courts-métrages au public, l’oppor- puisque l’œuvre fut a transcendé les la vie d’artiste à etc.) de bénéficier en compétition. tunité de découvrir d’abord créée en grands classiques Paris. Dans son seul d’un environnement Une cinquantaine des séries des quatre version de concert au de la science-fiction en scène Liberté (mis propice aux ren- de films (venus coins de l’Europe, festival Jazz à Vienne pour imaginer cette en scène par Anne contres et au partage du monde entier) leurs secrets de en juillet 2006, puis intrigue entre passé Bouvier) il entraîne d’expériences, d’être concourent pour une fabrication et de ren- présentée au Théâtre et futur. Soutenu par avec tendresse le accompagnés sur dizaine de prix lors contrer leurs acteurs de la Ville à Paris le Fonds de Création public dans une des projets, d’assis- de cinq séances de et créateurs, au et enregistrée avec lyrique le spectacle aventure des temps ter au processus projection, en cours de projections, succès en 2010. Pour est créé au Théâtre modernes décalée de répétition des salle en début de rencontres, ateliers, cette version opéra, national de Bordeaux et loufoque où productions du soirée, puis en événements spéciaux Laurent Cugny, au le 25 avril. rodent les esprits festival. L’un des plein air dès 22h. et soirées. Lors de piano, est entouré Du 25 au 30 avril, des grands artistes ateliers est modéré Pendant six jours, le cette quatrième d’une dizaine de Théâtre national de du plat pays et par le compositeur festival attire plus de édition aura lieu la musiciens tandis Bordeaux. d’ailleurs. Fabio Vacchi, invité à 10 000 spectateurs. 12e Journée de la que les trois rôles Jusqu’au 13 juin, partager sa pratique Du 7 au 12 juillet. Création organisée chantés sont tenus les vendredis et samedis, de l’opéra et de la http://festival. par l’Association par David Linx, Laïka Théâtre de Dix heures, création. cinemathequedegrenoble.fr pour la Promotion de Fatien et Yann-Gaël Paris, puis en tournée en Du 2 au 21 juillet. l’Audiovisuel (APA), le Poncet. Ce spectacle France. www.festival-aix.com 2 juillet au Théâtre de a reçu le soutien du Fontainebleau. Fonds de Création Du 1er au 3 juillet, Lyrique. Fontainebleau. Les 28 et 29 avril, www.serieseries.fr Grand Théâtre d’Angers.

printemps 2015 • LE MAGAZINE • SACD 21 Action culturelle

Fonds SACD Tout au long de l’année, la SACD, via son action culturelle, soutient la création au travers de fonds financés par la Copie privée.

Écrire pour la rue Fonds de création lyrique Depuis quelques années, la SACD, en partenariat avec La SACD apporte son soutien à la création et à la produc- le ministère de la Culture – DGCA –, a mis en place un tion d’œuvres dramatiques et lyriques contemporaines, dispositif d’accompagnement des écritures originales dans le cadre de fonds gérés par l’Action culturelle : le pour l’espace public dans leur phase d’élaboration, FCL, initié par la SACD, est chargé d’attribuer une aide “Écrire pour la rue”. Il s’agit de reconnaître la singularité aux projets professionnels de création et de reprise de ces écritures et d’inciter les démarches innovantes, d’ouvrages lyriques contemporains d’expression franco- avec des rencontres artistiques élargies. Pour la pre- phone. Cette aide concerne l’opéra, le théâtre musical et mière fois, cette année, l’aide comporte deux volets : la comédie musicale. n une bourse de recherche et d’écriture directement Une commission composée de deux représentants du versée par la SACD aux artistes concepteurs ministère de la Culture – DGCA – deux représentants n une aide pour l’accompagnement de la démarche de l’ADAMI, un représentant du FCM, deux représen- d’écriture versée par la DGCA à la structure d’accueil tants de la SACD se réunit deux fois par an, en juin et en avec laquelle les artistes concepteurs souhaitent colla- décembre. borer (résidence, mise en relation avec des collabora- teurs susceptibles d’enrichir le projet, mises en situa- Date limite de dépôt des dossiers : le 15 mai 2015. tion contextuelles...). Les projets doivent être présentés conjointement par Pour consulter les résultats du Fonds musique de les artistes concepteurs et la structure d’accueil qui scène et du Fonds Théâtre, rendez-vous sur apportera son soutien à la démarche d’écriture. www.sacd.fr à la rubrique Soutiens.

Date limite de dépôt des dossiers : le 15 mai 2015.

Déposez votre dossier en ligne sur le portail des soutiens de la SACD et de l’association Beaumarchais-SACD : http://soutiens.beaumarchais.sacd.fr.

Magazine des auteurs SACD N°170 • Printemps 2015 11 bis, rue Ballu - 75442 Paris cedex 09 Administrateurs délégués : [email protected] Catherine Cuenca (création interactive) Directeur de la publication : Tél. : 01 40 23 44 55 Frédéric Fort (arts de la rue) Pascal Rogard Philippe Goudard (arts du cirque) Conseil d’administration Daniel Larrieu (danse) Rédactrice en chef : 2014-2015 Sophie Loubière (radio) Catherine Vincent Présidente : Pascal Mirleau (animation) Sophie Deschamps Georges-Olivier Tzanos (animation) Coordination éditoriale : Caroline Collard Première vice-présidente : Administrateurs : Louise Doutreligne Jean Becker, Denise Chalem, Conception graphique : Sylvie Coquart-Morel, Luc Dionne, Dimaj Studio Vice-présidents : Michel Favart, Joëlle Goron, Victor Haïm, Louis Dunoyer de Segonzac (musique) Philippe Hersant, Laurent Heynemann, Impression : Escourbiac (Graulhet) Jean-Paul Farré (théâtre) Luc Jabon, Jean-Louis Lorenzi, Caroline Huppert (télévision) Jean Marboeuf, Franck Philippon, Couverture : Claire Lemaréchal (télévision) Dominique Probst, François Rollin, Le Goff & Gabarra Bertrand Tavernier (cinéma) Christiane Spièro.

22 SACD • LE MAGAZINE • printemps 2015 Avantage Adhérents SACD

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