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BATMAN BEGINS DOSSIER - INTERVIEW ::: BLOOD SISTERS OF LESBIAN SIN LAURENT MELKI BLOODRAYNE TROMA FOREVER : DEMON SPIRIT Citizen toxie DESTINATION FINALE 3

FOG 2005 PIN-UP : GARGOYLE TIFFANY SHEPIS

HEARTSTOPPER

HOSTEL

L’EVENTREUR DE N-Y

LE CABINET DU Dr CALIGARI

LE CHÂTEAU DE YUREK

LE CROCODILE DE LA MORT

LE LABYRINTHE DE PAN

LE PACTE DU SANG

MASSACRE A LA TRONCONNEUSE : LE COMMENCEMENT

METAMORPHOSIS

REGAL D’ASTICOTS

SOUDAIN LES MONSTRES

X-TRO

HISTOIRES EXTRAORDINAIRES : Hellraiser The Call Within BIOGRAPHIE : sommaire

3 / CINE HORREUR MOVIES Fog 2005 3 Hostel 4 Régal d’Asticots 7 Soudain… les Monstres 8 Metamorphosis 10 Le Labyrinthe de Pan 12 Bloodrayne 14 HeartStopper 17 Blood Sisters of Lesbian Sin 18 Begins 19 Démon Spirit 21 Le Crocodile de la Mort 22 Le Cabinet du Docteur Caligari 24 L’éventreur de New York 25 X-Tro 27 Destination Finale 3 29 Le Château de Yurek 31 Massacre à la Tronçonneuse : Le Commencement 32 Gargoyle Wings of Darkness 34 Le Pacte du Sang 35

36 / HISTOIRES EXTRAORDINAIRES Hellraiser : The Call Within, de David Roué

42 / LES DOSSIERS DE CINE HORREUR Laurent Melki - Illustrateur Culte

51 / PIN-UP : TIFFANY SHEPIS

55 / FUTURES SORTIES

56/ PRODUITS DERIVES

59 / TROMA FOREVER Citizen Toxie MERCI A LAURENT MELKI pour son

60 / SOUVENEZ-VOUS… « Père NoHell » illustrant le verso de ce numéro ! 61 / IL N’Y A PAS QUE LE CINEMA… VENEZ RETROUVER L’EQUIPE DE 62 / BIOGRAPHIE CINE HORREUR SUR LE FORUM Joe Dante D’HORREUR.COM ! Pour discuter de vos films cultes, 64 / TABLEAU DE NOTATION de vos acteurs ou réalisateurs préférés avec d’autres passionnés, rendez-vous sur : http://www.horreur.com/forum/

Ciné Horreur Webzine - Fondateur : Horreur Team Rédacteur en chef : Stéphane Erbisti ([email protected]). Rédacteurs : Lionel Colnard, Gerald Giacomini, Stéphane Jolivet, Stéphanie Aveline, Vincent Dumenil, Jeremie Marchetti, Colin Vettier, Christophe Jakubowicz, Yann Le Biez, Cédric Frétard. Mise en page : Stéphane Erbisti Relecture et Correction : Stéphanie Aveline. Merci à David Roué pour sa nouvelle « Hellraiser The Call Within »

Texte et Design Copyright Ciné Horreur. Les illustrations appartiennent à leurs auteurs respectifs. 2

CINE HORREUR MOVIES

FOG (The Fog)

Réalisateur : Rupert Wainwright Scénario : Cooper Layne, d’après les personnages créés par Pays : Etats-Unis Année : 2005 Musique : Casting : Tom Welling, Maggie Grace, Selma Blair, DeRay Davis, Kenneth Welsh, Adrian Hough Genre : Spectres

L’île d’Antonio Bay s’apprête à fêter les "pères" fondateurs de leur communauté. Mais ce que les habitants ignorent, c’est qu’un terrible secret entoure le développement de l’île. Un mystérieux brouillard fait alors son apparition, des objets sont rejetés sur la plage et les morts se multiplient. C’est à ce moment là que choisit de revenir dans la ville Elizabeth Williams qui est la proie d’horribles cauchemars.

Faire un remake du film de Carpenter aura fait hurler les aficionados de ce " Fog " qui en 1980 jouait la carte de l’é- pouvante suggérée au moment où commençait à triompher le règne du gore (" Vendredi 13 "). Pourtant l’idée n’est pas plus sotte que de refaire " Zombie " (" L’armée des morts ") ou un " Massacre à la tronçonneuse 2003 " qui étaient por- teur d’une critique sociale. " Fog " de Carpenter, même s’il met à mal les bases "légendaires" des Etats-Unis (avec des ancêtres qui ont caché un secret inavouable), ne rentrait pas tout à fait dans la même catégorie.

Le choix de Rupert Wainwright ("Stigmata") semble être le bon, nous don- nant à voir des scènes magnifiques comme ce bateau sortant du brouillard et arrivant à déclencher une certaine ambiance angoissante, portée par la musique en adéquation de Graeme Revell (" Sin City ", " Freddy contre Jason "). Ce qui fait que ce " Fog 2005 " bénéficie d’un classicisme qui rend sa vision supportable. Heureusement d’ailleurs, car tout en expliquant sous forme de flash-back la raison de la vengeance des fantômes, l’his- toire n’est pas d’une limpidité exemplaire. Notamment vers la fin où l’on sent bien que le problème de rythme implique d’accélérer le pas. Le même genre de problème auquel a été confronté " Nuits de terreur " dont le final au sein d’un phare affichait déjà une filiation évidente avec " Fog ".

Mais les quelques retouches scénaristiques de cette version ne sont pas les plus heureuses : le phare qui perd en importance (lui, le point de mire de l’original), regrettable aussi que du même coup le personnage de Ste- vie Wayne, autrefois tenu par Adrienne Barbeau, ne soit plus au cœur de l’intrigue. Mais dans sa globalité, la majorité des scènes de l’original sont retenues (le brouillard tentant de s’en prendre au fils de Stevie Wayne, le mort qui se relève à la morgue…). Reprendre des scènes phares ne suffit pas à éviter le manque d’épaisseur des personnages, interprétés par des acteurs quasiment tous mauvais.

3 Il faut dire que mettre des acteurs de série n’était pas un choix judicieux : Tom Welling (la série "Smallville"), Maggie Grace (la série "Lost")… L’intrigue fait porter tout son poids sur Maggie Grace, qui manque cruellement d’émotions. Malheureusement cette blondinette accumule les bourdes et nous fait mourir de rire en corroborant le dicton qui veut qu’une blonde ne peut pas faire deux choses à la fois et qui nous la fait trébucher toute seule dans l’eau, ainsi qu’étant incapable de changer le levier de vitesse (panique quand tu nous tiens) !

Pendant que le réalisateur soigne l’ambiance, on a ainsi droit à ce genre de scènes qui fera décrocher le spectateur - ainsi que sa mâ- choire (autre exemple : ce type en train de se transformer en squelette qui continue à se mouvoir et ouvrir la bouche). Dommage car contrairement à l’affreux " Hantise ", ce Fog cuvée 2005 sait se montrer raisonnable au niveau des effets numériques, préférant nous montrer des ombres dans le brouillard. A noter que contrairement à leurs devanciers, ceux de Wainwright n’usent plus de crochets mais à leur contact, les victimes se consument. Au final, " Fog 2005 " n’est pas la purge annoncée, contenant des scènes magnifiques, et la me- nace que confère le brouillard est palpable. John Carpenter producteur n’a pas à avoir honte de ce film même si cela ne s’imposait pas.

Gérald Giacomini

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HOSTEL (Hostel)

Réalisateur : Eli Roth Scénario : Eli Roth Pays : Etats-Unis Année : 2005 Musique : Nathan Barr Casting : Jay Hernandez, Derek Richardson, Eythor Gudjonsson, Barbara Ne- deljakova, Jan Vlasak, Jana Kaderabkova, Jennifer Lim, Lubomir Bukovy, Jana Ha- vlickova, Rick Hoffman, Petr Janis, Takashi Miike, Patrik Zigo, Milda Jedi Ha- vlas, Martin Kubacak…

Genre : Tueurs Fous

Paxton et Josh, deux étudiants américains, parcourent l’Europe avec la ferme intention de s’éclater. C’est en Hollande qu’ils font la connaissance d’un Islandais, Oli, qui n’hésite pas très longtemps pour se vautrer avec eux dans la démesure : alcool, drogues, prosti- tuées… Mais un soir qu’ils rentrent trop tard et trouvent la porte de leur hôtel close, un homme les héberge et leur parle d’un endroit où tous leurs fantasmes seraient réalisables. Pour ce faire, nos trois amis doivent se rendre à des milliers de kilomètres, à Prague très précisé- ment. Dès le lendemain matin, ils prennent le premier train qui les mènera vers l’impensable…

Fermez les yeux. Et remontez le temps, à l’époque où le cinéma de genre brillait sans s’encombrer d’artifices. Exit la censure systémati- que, les effets numériques, l’égocentrisme et les manières. " Hostel " nous ouvre les portes de l’humainement impensable. D’une cruauté physique et psychologique "intelligemment" contrôlée, Eli Roth, bien loin de son fantasmatique " Cabin fever ", nous entraîne dans un paysage où la torture autorisée se monnaye au prix fort.

Grand admirateur du cinéma de genre asiatique, Eli Roth avait à cœur après sa première réalisation (" Cabin fever ") de changer de re- gistre et de frapper un grand coup. Il avait prévenu qu’il voulait marquer les esprits, adoubé par un Tarantino surexcité à l’idée de coif- fer la casquette de producteur. Le projet a germé dans l’esprit du cinéaste, en apprenant qu’un site web thaïlandais proposait de se faire tuer en échange de fortes sommes d’argent, reversées aux famille des victimes volontaires ; ces dernières pour la plupart étant des personnes très malades, d’une grande pauvreté, dépressives, se disant prêtes à se "sacrifier" pour assurer un avenir financier à leurs descendants. Du snuff en toute légalité en quelque sorte.

4 Au-delà de l’horreur de cette réalité, le réalisateur n’en garde que l’horrible intention mais côté profit. Il y est pourtant bien question d’autorisation, mais un droit que s’accorde seul le pou- voir mis en place. Difficile de classer " Hostel " dans une catégorie bien définie, tant le film oscille constam- ment entre plusieurs gen- res.

On embarque ainsi tout d’a- bord dans un road-movie les trente premières minu- tes, histoire d’installer les personnages et plus parti- culièrement leurs portraits psychologiques. Les péri- péties de nos trois "étalons" basculent rapidement vers la comédie excentrique et l'humour potache, où tous les abus sont permis. Cependant flotte déjà un parfum étrange, une effluve annonciatrice de leur sort à venir : la prise de drogues maladroite, la drague en véritable épreuve de force, et le sexe un exercice physique sans réelle beauté. Les plans sont crus, la caméra dopée et tournoyante. La tension est palpable et le mauvais trip ne fait alors que commencer.

Prenons place à présent à bord du train qui mène nos trois gaillards à l’Est. Une scène intéressante mais presque dommageable au film tant ce qu’elle contient ne laisse aucun doute sur les intentions et l’impli- cation de l’un des protagonistes. C’est tout de même à ce moment précis que le film va basculer et nous faire entrer de plein pied dans le vif du su- jet. Arrivés à l’hostel (équivalent d’une auberge de jeunesse), ils vont dé- couvrir que la colocation est de mise et que les jeunes femmes slaves ne sont pas spécialement farouches. A l’image de Natalya et Svetlana, deux bombes anatomiques livrées à leurs seules pulsions. Les deux actrices sont excellentes ; au-delà de leurs physiques, leur jeu est impeccable et nous les présente telles deux mantes religieuses contemporaines.

La disparition d’Oli nous permet enfin de découvrir le paysage slovaque : une campagne sinistre, ombrageuse, abritant l’antre du mal sur une terre désolée. Rapidement la notion de survival devient une évidence pour nos deux étudiants, et c’est avec la disparition de Josh que nous allons enfin franchir la frontière de l’anecdotique pour découvrir l’horrible réalité.

Hostel ne traite pas seulement du trafic d’êtres humains, mais pousse la réflexion bien au-delà en observant le comportement des instigateurs : des hommes blasés par le pouvoir, en quête d’adrénaline, guidés par la recherche du plaisir ultime puisque interdit. A l’image de cet homme d’af- faires, chirurgien raté et frustré (Jan Vlasak: " swimming pool - la piscine du danger ") terriblement lucide sur le pourquoi de son intention, renfor- çant ainsi sa monstruosité. C’est également une réalité sociale que le ci- néaste nous propose : la pauvreté et les dérives qu’elle peut entraîner, témoin la délinquance juvénile et ces enfants prêts à tuer pour quelques malheureux bonbons. Le tout orchestré par une autorité en place qui ferme les yeux.

Ajoutez à cela une interprétation générale de grande qualité, avec princi- palement des acteurs locaux aux faciès improbables et de circonstances, un "client" américain dont Eli Roth nous dresse un portrait pas vraiment

5 flatteur, et le clin d’œil du cinéaste à Miike qu’il aime tant. Hormis son talent artistique indénia- ble, Takeshi se paie le luxe d’apparaître dans un caméo savoureux : quelques secondes qu’il éclabousse d’une classe folle, accompagné d’une réplique qui fait froid dans le dos.

Et qu’en est-il de la réputation sulfureuse et gore dont " Hostel " fait l’objet ? Eli Roth opte pour un mélange de visible et d’invisible. On assiste ainsi à plusieurs scènes "hors-champs", mais la bande son est suffisamment "lourde" et efficace pour provoquer le malaise. L’occasion d’observer une mise en scène minutieuse et quasi-chirurgicale, l’art d’une suggestion sa- vamment réfléchie à l’image de " Massacre à la tronçonneuse ". Un film référence auquel le réalisateur emprunte aussi un certain visuel, le sang en plus : les décors sont sales, habités tantôt par le silence, tantôt par les cris : de véritables antres de boucheries, éclaboussées de sang du sol au plafond. La partie visible existe cependant avec quelques effets spé- ciaux bien sentis : charcutage de doigts à la tronçonneuse, ainsi qu’une scène d’énucléation particulièrement éprouvante.

Le plongeon final nous mène dans une course poursuite à la mise en scène énergique, un jeu du chat et de la souris au millimètre près. Le temps de voir défiler les nombreuses geôles emplies de leurs méfaits : un diaporama sanglant qui renvoie aux vitrines sexuelles d’Amsterdam. Terrible cons- tat puisque ici la chair n’est plus l’image du désir mais d’une mort démembrée. Place alors au rape and revenge que je vous tairais tant le discours est spontané et irréfléchi.

"Hostel " est un film méticuleux sur bien des points, une empreinte insi- dieuse qui n’en finit pas de trotter dans la tête. Une forte probabilité à de- venir culte. Christophe Jakubowicz

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6 REGAL D’ASTICOTS fet inverse qui se produit et le film est un échec commercial.

(The Worm Eaters) "Régal d’asticots " aurait très bien pu être une production "Troma Films". On retrouve en effet tout l’univers de la firme Réalisateur : Herb Robins créatrice du Toxic Avenger dans ce film. Humour lourdingue, Scénario : Nancy Kapner, Herb Robins personnages bien débiles, situations cocasses et "trash". Sans Pays : Etats-Unis oublier des acteurs pas au top, qui surjouent et en deviennent Année : 1977 risibles, mais c’était sûrement voulu. Pour interpréter Herman Musique : Théodore Stern Umgar, le paysan qui comprend les vers de terre, c’est le réali- sateur Herb Robins lui-même qui s’est attribué le rôle. C’est Casting : Herb Robins, Lindsay Armstrong Black, Joseph Sacket, d’ailleurs lui qui s’en sort le mieux, et les séquences où il "cause" Robert Garrison, Muriel Cooper, Carla Ziegfeld... avec ses petits amis font baigner le film dans une atmosphère Genre : Comédie Trash très étrange, les prenant dans ses mains, les embrassant, les ap- pelant par des prénoms bien spécifiques, différenciant les mâles Herman Umgar est un personnage excentrique, un peu benêt, qui des femelles sans aucune difficulté. Il fallait quand même oser un adore la nature. Il possède également le don étrange de pouvoir tel sujet ! communiquer avec les vers de terre, qu’il élève dans sa vieille bicoque. Le maire de la ville et ses associés veulent faire aména- ger le lac et faire construire des bâtiments sur les terres aux alen- tours de la demeure d’Umgar. Mais celui-ci, cachant un titre de propriété donné par son père, n’entend pas qu’on vienne toucher à sa nature. Avec ses amis rampants, il prépare une drôle de sur- prise aux habitants de la ville…

Pape de la série Z, Ted V. Mikels est un nom bien connu des ama- teurs de films fauchés. Ce touche à tout, qui passe aussi bien du métier d’acteur à celui de réalisateur, producteur ou bien encore scénariste est le responsable de films comme " The Corpse Grin- ders ", " The Astro Zombies " ou " Blood Orgy of the She-Devils " par exemple. Mikels est un bon ami d’Herb Robins et il décide d’aider ce dernier à réaliser un film. Ce sera " The Worm Ea- ters ", alias " Régal d’asticots ". Pour la promotion du film, Mikels mise tout sur l’aspect peu ragoûtant de faire manger des vers à des humains pour attirer le public dans les salles. Mais c’est l’ef-

7 Mais ce n’est que le début, car les séquences qui vont suivre vont franchir les limites de l’incroyable ! En effet, suite à une ingestion accidentelle de vers de terre par une femme de petite vertu venue divertir Herman, celui-ci va découvrir que faire manger des vers à des humains les transforment en créatures mutantes, mi-homme (le torse et la tête), mi-lombric (le reste du corps, dans un beau costume en caoutchouc qui vous fera hurler de rire, vu la ringardise des effets spéciaux !). Il ne lui en faut pas plus pour définir son moyen de vengeance face au Maire et à ses acolytes, ce qui nous vaudra des scènes bien "gerbantes" d’ingestion de lombric, "gerbantes" car très réalistes, je pense d’ailleurs qu’elles ne sont pas truquées et que les protagonistes prennent bien les vers de terre dans leur bouche (ils ne vont pas jusqu’à les avaler, je vous rassure…). Effets répulsifs garan- tis !

Le summum de l’hilarité étant l’apparition de trois pécheurs qu’on a entrevus au tout début du film, devenus des mutants eux aussi, et réclamant des femmes mutantes pour se reproduire. Les voir ramper par terre, se traîner à la force des bras, engoncés dans leur costume de caoutchouc est un grand moment ! Une comédie Trash que n’aurait pas renié la Troma, je vous l’avais dit !

Mis à part ça, " régal d’asticots " a un côté amateur qui peut déplaire, il faut juste savoir qu’on nage en plein territoire du film Z pour l’ap- précier, ce qui ne sera peut-être pas à la portée de tout le monde. Le film n’a certes rien d’un chef-d’œuvre mais il mérite bien d’être le premier titre de la nouvelle collection de Bach Films, intitulée "les inédits du mauvais goût", collection qui permettra à nouveau de dé- couvrir des films méconnus, oubliés, qui n’ont jamais bénéficié d’une grande publicité par chez nous. Une collection en partenariat avec Horreur.com en plus, ça ne se refuse pas !

Stéphane Erbisti

QQQ QQQ SOUDAIN LES MONSTRES (The Food of the Gods)

Réalisateur : Bert I. Gordon Scénario : Bert I. Gordon / HG Wells Pays : Etats-Unis Année : 1976 Musique : Elliot Kaplan Casting : Marjoe Gortner, Pamela Franklin, Ida Lupino, Ralph Meeker, Jon Cypher, Belinda Balaski, Tom Stoval Genre : Animaux Dangereux

Morgan, un joueur de football professionnel et son ami Davis ont décidé de passer quelques jours de détente sur une île canadienne quasiment déserte. Rapidement, Davis disparaît mystérieusement. Morgan décide alors d’exa- miner les alentours et se fait attaquer par un poulet géant. S’étant sorti diffici- lement des ergots acérés du gigantesque volatile, notre héros fait la connais- sance d’une fermière des environs qui lui fait une bien étrange révélation. En effet, la terre de l’île recèle une étrange matière oléagineuse ("la nourriture des dieux") qui, mélangée aux aliments, a la particularité de faire grandir tout animal qui l’absorbe. Morgan, comprenant vite (car il est très intelligent pour un sportif !) que l’île est infestée de bêtes aux proportions inimagina- bles va tenter, en compagnie des autochtones, touristes et autres financiers peu scrupuleux désirant exploiter la substance extraite du sol, de survivre aux assauts des bestioles affamées devenues très agressives…

8 Si vous ne connaissez pas Bert I. Gordon, laissez-moi en quelques mots vous en dresser le portrait : c’est tout simplement l’homme qui aime les grosses bestioles. En effet, dans la plupart de ses longs métrages, on ren- contre une ou plusieurs créatures gigantesques (des vers, des abeilles, des rats, des guêpes, parfois même des humains,…) qui attaquent des gens. Mais c’est quoi son problème au père Bert ? Il a quelque chose de petit qu’il aimerait voir grandir ?

Trêve de plaisanterie, en 1965 déjà, Gordon avait porté à l’écran une par- tie du roman de H.G. Wells (The Food of the Gods, de 1903) dans son film "Village of the giants " avec Ron Howard et Beau Bridges. Et c’est avec "Soudain…les monstres ", que Gordon revient à ses premières amours : le film avec des bêtes géantes, un genre qu’il n’avait plus abordé depuis une dizaine d’années. Ici, il reprend juste le thème de base, à savoir : une matière provenant de la terre d’une île et qui mêlée à de la nourri- ture fait grandir de façon gigantesque toutes les créatures qui la consomment. Pour cette énième adaptation d’un roman de Wells (connu pour être, entre autres, l’auteur de La machine à explorer le temps, L'île du docteur Moreau, L'homme invisible et du célébris- sime La guerre des mondes), Gordon met un peu plus l’accent sur les scènes gore, notamment celles avec les rats, principal fléau du film, et ne lésine pas sur l’hémoglobine. Cela étant, rien n’a vraiment changé par rapport à ce qu’il faisait dans les années cinquante : le scénario (quel scénario ?) est incohérent, les scènes d’action sont grossièrement bâclées, les personnages sont stéréotypés à mort (Bensington le financier véreux et Lorna, sa secrétaire dévouée, en tête) et les effets spéciaux sont catastrophiques. Mais justement c’est ce qui constitue le point fort du film !

Les trucages sont tellement simplistes et périmés qu’ils sont décela- bles en un coup d’œil, ce qui entre en totale contradiction avec l’ap- proche plus ou moins sérieuse qu’a voulu prendre Gordon à travers un message à caractère écologique relatif à la préservation de la Terre et de ses richesses. Mais c’est pour notre plus grand plaisir ! Allez pour rire un peu : imaginez quelqu’un se faisant attaquer par un poulet géant qu’un gros plan généreux nous révèle être en fait un homme engoncé dans un costume mimant le volatile, et bien cela fait sourire, croyez-moi !

Parmi les grosses bestioles, on rencontre ainsi pêle-mêle : des guê- pes, des chenilles, des vers, des moustiques, des poulets et des rats, véritables vedettes du film. La plupart du temps, le réalisateur utilise subtilement (suis-je bien sérieux ?) tantôt des séquences où de vrais rongeurs apparaissent, tantôt des modèles réduits complètement cheap pour nous y faire croire ! Néanmoins il y a pire : quand le héros du film (whouah quel charisme d’ailleurs !) tire sur les rongeurs, des images de rats vivants assis sur une maquette de bâtiment superbement mal faite et parsemée d’impacts de balles, sont utilisées ! Merci monsieur Gordon pour cette offrande !

Notons que le film a reçu la dinde d’or, récompensant le plus mauvais film de tous les temps dans la catégorie nanar avec des rongeurs et qu’Ida Lupino (réalisatrice du " Voyage de la peur ") est venue se perdre dans ce conglomérat de n’importe quoi. Elle avait faim ou bien est-ce une copine du père Bert ? J’allais oublier de vous dire qu’une suite de ce film existait (" Gnaw " ou "Food of the gods : part 2"). Réalisé en 1989 par Damian Lee, cet ersatz raconte l’histoire de rats de laboratoire qui trouvent refuge dans un campus et y sèment la pagaille. A voir donc, mais bon vu le pitch ça à l’air aussi sympathique que le premier ! Cette farce cinématographique est facile, certes. Son histoire est hallucinante, on est d’accord. Pourtant, un certain charme suranné s’en dégage tellement c’est naïf et hyper mal fait à la fois. Ainsi, les fans de nanars devraient être comblés, en revanche ceux de Wells de- vront passer leur chemin par peur de faire des cauchemars truffés de poulets géants ! Vincent Dumenil

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9 METAMORPHOSIS (Metamorphosis, The Alien Factor)

Réalisateur : Glenn Takakjian Scénario : Glenn Takakjian Pays : Etats-Unis Année : 1993 Musique : John Gray Casting : Matt Kulis, Patrick Barnes, Katherine Romaine, Greg Sullivan, Tara Leigh, Dianna Flaherty, Marcus Powell, Tony Gigante, George Gerard Colucci Genre : Savants Fous

Suite officielle puis officieuse de " The deadly spawn " (1983), "Metamorphosis " est à ce jour le seul film écrit et réalisé par Glenn Takakjian. Le tournage, débuté en 1987, rencontra des problèmes de productions tels que le film ne put être terminé qu'en 1990, avant d'être présenté dans divers festivals et de finir dans la filière direct-to-video en 1993. Six années: voilà un parcours et une ténacité qui étonnent, s'agissant d'une pe- tite série B fortement mâtinée de Z... Mais le résultat, lui aussi, est plutôt étonnant. Car si " Metamorphosis ", comme on s'en doute lorsqu'on se le procure pour deux ou trois petits euros, présente les tares multiples d'un nanar avéré, il dispense éga- lement de ces générosités qui le distingueront de nombre de ses congénères, et qui permettront aux amateurs de passer un moins mauvais moment qu'il n'était possible de l'imaginer.

John Griffen, un veilleur de nuit de la Talos Corporation, société de recherche scientifique, répond à une alerte de surveillance et se rend sur les lieux du dysfonctionnement. Le docteur Elliot Stein, défiguré, surgit alors d'un laboratoire et lui tombe dans les bras. Procé- dant à une inspection du laboratoire plongé dans l'obscurité, le veilleur de nuit est victime à son tour d'une mystérieuse créature…

Le Docteur Viallini, directeur de l'établissement, fait appel à deux gros bras pour neutraliser le danger. La nature de ce dernier est ex- pliqué par Nancy Kane: voilà quelques temps, la Talos Corporation s'est vue confier des tissus d'origine extraterrestre que le Docteur Michael Foster a injecté à des cobayes. Mais tout a mal tourné lorsqu'il s'est fait mordre par l'un d'eux, et que son corps a commencé à subir une épouvantable mutation…

Allons au plus court: le plus joli atout de " Métamorphosis " réside dans ses effets spéciaux, distribués entre la confection, l'animation de ses créatures, et les effets gore. Cela ne signifie évidemment pas qu'on est en présence d'un blockbuster science fictionnel dernier mo- dèle, ni d'un Uncut Movie, mais que le budget de la production, pour restreint qu'il fût, a entièrement été mis à profit en vue du plaisir qu'on pouvait en tirer en terme d'imagerie, délices qu'on trouve rarement à ce niveau dans une telle catégorie de nanar.

Si le thème de la mutation flirte avec celui du très sérieux " La mouche " de Cronenberg (un scientifique se transforme en monstre de façon visqueuse et sanglante, ici bien entendu sans aucune recherche de profondeur émotionnelle ou intellectuelle), il n'oublie donc pas d'orner ses chairs à vifs de mixages improbables: par exemple, des spores à la " " ressemblant vaguement à des face hug- gers morts... ou plutôt à des biftecks cuits, pisseurs et dentus! Idem pour les cobayes sur lesquels sont testés les tissus extraterrestres, et qui eux doivent plutôt leur ascendance à un Muppet Show croisé avec " La petite boutique des horreurs "...

Quelques plans dans le laboratoire de recherche de Michael Foster, dès le premier flash-back s'ouvrant sur un air dégénéré de clavecin synthétique, suffisent à donner un bon aperçu de ces créatures farfelues, malveillantes et gloutonnes, aux couleurs tranchées de bon- bons Haribo. Mine de rien, le sourire qui nous vient aux lèvres n'est pas seulement celui de l'ironie, mais celui de la sympathie: sachant parfaitement à quoi s'en tenir sur les malformations de son bébé, Takakjian ne s'est pas trop pris au sérieux et a su assortir ses défauts obligés de légèreté et de fantaisie, lesquelles lui permettent de marier ou d'alterner avec souplesse le méchant et l'amusant.

La touche d'humour ne sera pas toujours bienvenue (on se demande parfois si elle est toujours volontaire), mais dans ces cas-là le réali-

10 sateur semble faire tout ce qu'il peut pour contrebalancer ses tares. A défaut de cohérence ou de crédibilité dans les événements ou l'in- terprétation des acteurs, le gore intervient ainsi comme un lot de consolation. Par exemple, lorsque Michael Foster est mordu, il ne trouve rien de mieux pour prévenir la contamination que de se faire verser de l'acide sulfurique sur la plaie! C'est idiot, oui, mais les plaies saignent, brûlent et dégoulinent abondamment, spectacle qui présente des effets assez réussis pour détourner notre attention de son point de départ... et d'arrivée, car cela n'aura servi à rien !

Évolution à rebondissements de la mutation, croquages de têtes, giclures sanglantes présenteront les mêmes avantages et inconvé- nients. Certes, ils ne combleront pas les amateurs de purs films gore, et d'autres parleront de cache-misère scénaristique. Pourront-ils se consoler avec l'animation du monstre mutant dans sa phase finale? Le stop motion à la Ray Harryhausen a de quoi étonner en tout cas, et finit de susciter une indulgence admirative chez votre serviteur devant la débauche d'imagination dont a fait preuve Takakjian et son équipe pour user de bouts de chandelles!

Nanar oblige, " Métamorphosis " contient néanmoins assez de perles de nullité pour en faire un collier. Les personnages, servis par des acteurs pour le moins inégaux, sont tous sans exception d'énormes clichés, et les dialoguent atteignent fréquemment un haut niveau de ridicule. Le premier prix revient sans conteste aux filles du veilleur de nuit, deux cruches cosmiques (l'une d'elle, Dianna Flaherty, a tourné dans "Toxic") aux réparties terrassantes de stupidité. Elles hanteront les couloirs de la deuxième partie du film, consacrée au chassé-croisé avec le monstre, de leurs séances de jogging et de leurs blondesques exclamations, leur rôle prépondérant dans la des- truction du danger laissant à penser que la Terre est naturellement immunisée contre toute invasion extraterrestre, car il était difficile de piocher un plus rédhibitoire échantillon de l'espèce humaine... Viennent ensuite Brian, navrant petit ami de l'une des deux cruches; puis cravate jaune et cravate rouge, alias Mitchell et Jarrett, les deux nettoyeur du Dr Viallini, tout à fait cocasses dans leur démonstration de gros dur à cuire viril et revêche; et enfin le docteur Michael Foster, heureusement à peine entrevu avant sa mutation, qui lui va beaucoup mieux qu'au naturel! Le niveau remonte avec le Dr Viallini, salaud interprété de façon relativement convaincante par Marcus Powell, ain- si que le docteur Nancy Kane, malheureusement vite expédiée dans la seconde partie, et le docteur Elliot, sympathique ado attardé scientifique, au verbiage technique savoureusement déroutant.

La construction du scénario est également à double tranchant. Autant la première partie, construite sur des flashs back aller et retour, parvient à maintenir un dynamisme intéressant, autant la seconde peine à maintenir le rythme. Assez embêtant quand il s'agit du mo- ment où la chasse est ouverte, et qu'il faut justement ne pas lâcher le spectateur ! On se console (ou pas) avec une scène finale bourrée d'effets spéciaux naviguant entre le moche (le faisceau du fusil atomique), le réussi (un sourire à faire pâlir la Joconde) et le désopilant, la toute dernière image frappant quant à elle très fort dans l'exagération « godzillesque » à deux sous.

On l'aura compris, " Métamorphosis " réserve aux amateurs ce que l'on peut trouver de mieux et de pire dans un nanar. Des ingrédients divers, et qui seront sans aucun doute diversement appréciés selon les goûts... Mais c'est ce fourre-tout, emprisonné dans d'étroites limi- tes, qui lui vaudra peut-être une place de choix dans votre rayon réservé au Z.

Stéphane Jolivet

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11 LE LABYRINTHE DE PAN (El Laberinto del Fauno)

Réalisateur : Guillermo Del Toro Scénario : Guillermo Del Toro Pays : Espagne Année : 2006 Musique : Javier Navarrete Casting : Ivana Baquero, Doug Jones, Sergi Lopez, Ariadna Gil, Maribel Verds, Įlex Angulo, Roger Casamajor, Cesar Bea, Federico Luppi, Manolo Solo... Genre : Conte féerique sombre

1944, alors que la seconde guerre mondiale touche à sa fin, la petite Ofelia déménage en pleine campagne Espagnole, accompagnée de sa mère enceinte et de son beau-père, militaire franquiste faisant régner la terreur en débusquant et torturant les résistants de la région. Fervente lectrice de contes de fées, la jeune enfant est entraînée par une petite fée dans l’antre du Faune, créature magique et sage. Réin- carnation de la princesse d’un royaume oublié, Ofelia de- vra surmonter trois épreuves pour accéder à ce monde dont elle rêve tant, et depuis si longtemps…

Entre d’admirables blockbusters tel " Hellboy " ou " Blade 2" et des coups de maître plus personnels comme "L’échine du diable " ou " Cronos ", Guillermo Del Toro ne chôme pas, s’imposant comme l’un des plus grands talents du cinéma fantastique actuel, rejoignant le clan des fan- boys revitalisant en bloc le genre que nous chérissons tel- lement. Un nouveau petit détour par l’Espagne cette année avec ce " Labyrinthe de Pan " qui, ce ne sera pas une sur- prise, frise le chef-d’œuvre : fort ce Del Toro !

Complément évident (et volontaire) de " L’échine du dia- ble ", " Le labyrinthe de Pan " reprend un cadre historique similaire, à savoir une Espagne rongée par la guerre et la terreur franquiste, le liant adroitement au monde de l’en- fance et du surnaturel : guère de spectres enfantins ici, de renvois à " Los Olvidados " ou aux deux chef-d’œuvres de Serrador – " Les révoltés de l’an 2000 " et " La Résidence " - , mais une nouvelle variation du thème de "Alice au pays des horreurs", comme le furent en leur temps " Lemora ", "La Compagnie des Loups " ou " Phenomena ". Même si le monde réel a sa violence et sa barbarie, le monde des contes de fées n’est pas tout blanc tout blanc et possède également ici, sa noirceur et son côté obscure ; logique.

Grand passionné de monstres, Del Toro soigne les appari- tions des rares créatures du film, dont le fameux Faune (qui ne n’entretient que des similitudes physiques avec Pan et rien d’autres), sans aucun doute la plus belle créature cor- nue jamais vue sur un écran de cinéma depuis le Darkness de " Legend " (c’est dire si ça remonte à longtemps !), homme bouc semi végétal tour à tour tendre et rassurant, carnassier et sévère, dont l’ambiguïté ne le rend qu’encore plus fascinant. Admirablement animé, incarné par un Doug Jones en très grande forme (il endosse également le cos-

12 tume du Pale Man), il de- vient le libérateur, pour Ofelia, d’une réalité de plus en plus lourde à porter et à subir : un beau père qu’elle exècre et une mère ma- lade, affaiblie par l’enfant qu’elle porte ; la guerre ne semble cependant pas af- fecter Ofelia, blottie dans son petit monde.

Tout aussi fascinant mais quand même bien moins sympathique, le Pale Man est au cœur d’une des meil- leures (et une des plus im- pressionnantes) scènes du film : son design tout bon- nement hallucinant joue sur le terrain de Barker et de Goya (et là, la référence au peintre ibérique est totale- ment volontaire de la part de Del Toro, puisqu’il s’est inspiré du tableau "Saturne dévorant ses enfants"), allant à l’encontre même de l’image type de l’Ogre (ce qu’il est évidemment), gros barbu gargantues- que friand de marmots trop curieux. Ayant littérale- ment " la peau sur les os", c’est justement son côté "jamais vu" qui dérange au plus haut point, véritable cauchemar sur pied qui semble immergé du cerveau le plus malade qui soit.

Del Toro se perfectionne techniquement de film en film (ça se sent), s’autorisant de nombreuses (et très jolies) transitions en utilisant murs, arbres ou sol, et une photographie des plus léchées.

Rien à redire sur les acteurs, parfaits (mention spé- ciale à la petite Ivana Baquero, déjà habituée aux productions fantastiques espagnoles récentes), dont un Sergi Lopez très à l’aise en salaud intégral (comme les affectionne Del Toro !), sans doute le fasciste le plus redoutable que nous ait apporté le cinoche depuis le Amon Goeth de " La liste de Schindler ". C’est d’ailleurs avec la servante Mercedes, venant en aide secrè- tement aux résistants au péril de sa vie, que le personnage du Colonel Vidal alimente une sous intrigue parfois bien trop envahissante, occultant l’argument fantastique et ralentissant parfois le long-métrage. Certains seront ravis par la crudité et la violence très graphique qui habite cette partie, avec tortures et douloureux sévices au programme (entre autres, un tranchage de joue bluffant et une tête réta- mée à coup de bouteille, sans plans de coupes, rappelant un certain passage traumatisant de " Irréversible "). Del Toro ne résiste pas à tisser des liens entre les deux mondes (le monde cruel et chaotique des adultes à l’imaginaire féerique des en- fants), avec de nombreux symboles et métaphores de toutes sortes : ce batracien géant niché dans un arbre (dont la forme évoque…des Trompes de Fallope !!) qu’il souille sans cesse renvoie à ce bébé ne faisant plus de mal à sa mère qu’autre chose, et l’Ogre, et vous l’au- rez deviné, représente peu dignement cette vermine fasciste qu’est Vidal, dévorant l’innocence tout comme le Colonel franquiste compte bien dévorer l’âme de son nouveau fils pour le pourrir de ses idées malveillantes. Dans un épilogue beau à pleurer, le doute concernant l’existence véritable des créatures et du royaume d’Ofelia persiste, laissant le spectateur opter entre optimisme mélancoli- que et pessimisme "Brazilien".

Une merveille. Jérémie Marchetti

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13 D’Uwe Boll, je n’ai pas encore eu la joie de voir son " House of the Dead ", film catastrophique paraît-il, à en croire l’avis de mon col- lègue et des lecteurs. J’ai vu par contre " Alone in the Dark (2005) " que j’ai trouvé plutôt sympa et divertissant, ne méritant pas, pour ma part, sa réputation de navet, même si ça ne vole pas bien haut. En tout cas, on peut dire qu’Uwe Boll aime adapter des jeux vidéos au cinéma, puisque après ces deux films, il a enchaîné BLOODRAYNE avec l’adaptation du jeu " Bloodrayne " et que ses projets pour 2007/2008 sont également deux adaptations de jeu vidéo, avec (Bloodrayne) "Postal " et " Far Cry " !! Il me semble également que son film "in the name of the king : a dungeon siege tale " est basé sur la sé- rie des jeux "dungeon siege", les spécialistes confirmeront. Bref, Réalisateur : Uwe Boll on ne peut pas reprocher à Uwe Boll de ne pas avoir de la suite Scénario : Guinevere Turner dans les idées et de ne pas suivre une ligne directrice pour sa car- Pays : Allemagne / Etats-Unis rière. L’acharnement dont il fait l’objet en ferait presque un mar- Année : 2005 tyr. Martyr qu’il convient de réhabiliter ici ! Musique : Henning Lohner Casting : Kristanna Loken, Michelle Rodriguez, Matthew Davis, En effet, la vision de Bloodrayne vient tout chambouler. Du jeu Ben Kingsley, Michael Madsen, Billy Zane, Udo Kier, Meat Loaf, vidéo, je ne connaissais que la jaquette, vu dans un magasin, et Michael Paré... qui m’avait attiré l’œil, au vu de cette héroïne vampire plutôt Genre : Vampires sexy. Sa version "live", interprétée par Kristanna Loken, dont on avait déjà pu admirer la silhouette dans " Terminator 3 " où elle Un cirque retient prisonnière Rayne, jolie femme devenue mi- était le T-X, est franchement très réussie. Niveau ressemblance, humaine, mi-vampire, après que sa mère se soit fait violer et as- costume et arme, rien à dire, c’est du quasi identique. Très bon sassiner par Kagan, le roi des Vampires. Parvenant à s’échapper, choix d’actrice donc. Rayne n’a plus qu’un but : retrouver Kagan pour l’anéantir, afin de venger sa mère. Ce dernier a également un but : retrouver trois Kristanna joue donc Rayne, une Dhampir, créature moitié hu- talismans qui, une fois réunis, lui permettraient d’être insensible maine, moitié vampire. Une créature plutôt rare sur notre Terre, aux trois facteurs pouvant détruire les membres de sa race : so- étant considérée comme une aberration chez les Vampires et leil, eau, croix. Dans sa quête, Rayne fait la connaissance d’un trio donc éradiquée. Rayne a survécu et a été élevée dans un cirque, de chasseurs de vampires, mené par Vladimir. Tous trois font par- où ses talents de cicatrisations sont mis à rude épreuve chaque tie de la société de Brimstone, société désirant également la fin du soir, afin de divertir le public. Mais hormis ce don de régénéra- règne de Kagan. Mais celui-ci a appris l’existence de Rayne et sait tion des tissus grâce au sang (qu’il soit humain ou animal), notre qu’elle est en possession de l’un des talismans. Il ordonne à ses héroïne n’a pas de super pouvoirs particuliers. Une souplesse ac- hordes d’aller la tuer et de ramener l’artefact magique… crue peut-être, mais la Sélène des " Underworld " me semble bien plus dangereuse que Rayne. Celle-ci nous apparaît donc plus fra-

14 gile, plus proche de nous en somme. C’est vrai qu’on aurait aimé que Rayne soit plus puissante mais n’oublions pas qu’elle a des gènes humains en elle, c’est donc logique qu’elle soit moins forte qu’un vrai vampire.

Accompagnant la jolie Kristanna, on retrouve toute une brochette d’acteurs bien connus des spectateurs : Michael Madsen (" La Mu- tante ") en tête, jouant Vladimir, chef des chasseurs de vampire et membre d’une confrérie décidé à détruire Kagan. Madsen nous la joue un peu "bourru", et n’a pas de charisme particulier. Il est accompagné par Michelle Rodriguez (" Resident Evil "), toujours aussi sexy, et par Matthew Davis (" Urban Legend 2, coup de grâce "), beau gosse qui ne résistera pas aux charmes de Rayne. Pour incarner le Roi des Vampires, Boll a fait appel à Ben Kingsley, qu’on ne présente plus. Le célèbre acteur nous fait une composition toute en froideur, sans réelle émotion, une composition sobre, qui correspond bien à son rôle.

On retrouve également avec plaisir notre bon Udo Kier (" Chair pour Frankenstein "), interprétant un prêtre, gardien de l’un des talis- mans. Toute petite apparition pour Billy Zane (" Le Fantome du Bengale "), qu’on oubliera vite. Notons également le personnage joué par Will Sanderson, avec son excellente coupe de cheveu, acteur habitué des réalisations d’Uwe Boll. Tous ces acteurs sont à leur place et même si on ne retiendra pas grand chose de leur prestation dans ce film, ils assurent le minimum syndical pour que le spectacle soit au rendez-vous et faire du film un divertissement de qualité.

De qualité, oui, vous avez bien lu. Cette quête de vengeance, mêlée à la recherche des talismans, est un très bon divertissement, nous entraînant dans un univers médiéval, dans le style de celui de " Ladyhawk " par exemple. Costumes d’époque, village assiégé, forte- resse noire imprenable, forêt, repaire secret, artefact magique, gardien monstrueux, vampires, tueur de vampires, combat à l’épée, éro- tisme, action, émotion, nous avons là tous les éléments permettant à ce film d’héroïc fantasy gore d’être la meilleure réalisation d’Uwe Boll à ce jour. Franchement, " Bloodrayne " mériterait une sortie sur nos écrans. Bien sûr, il ne rivalise en rien avec des fresques comme "Le Seigneur des Anneaux ", il lui manque un souffle épique et un peu plus d’émotion pour y arriver. Mais Uwe Boll peut être fier de son film. Vous trouverez toujours des gens pour le descendre (les goûts et les couleurs) mais j’ai vraiment été agréablement surpris et je n’ai pas regretté sa vision. Peut-être même que je m’en ferai une seconde (sûrement d’ailleurs), parce que des combats aussi gores dans ce genre de production, ça ne court pas les rues ! Même " Braveheart " peut aller se rhabiller !

Car oui, lecteurs, tu as bien lu. "Héroïc Fantasy Gore". C’est vraiment l’appellation qui convient le mieux à ce film. Décapitations, dé- membrements, geyser de sang, coup d’épée sanglant et j’en passe, " Bloodrayne " porte bien son nom, les incrédules n’en reviendront pas ! C’est même tellement gore que la première version sortie en DVD était "cut". Mais en mode "unrated", ça saigne grave, ça en de- vient même hallucinant. Pourtant, nous sommes bien dans " Bloodrayne ", pas dans " Premutos ". Quoique…

15 L’explication à ces débordements inattendus en terme de FX gores ? Simple. Il suffit de lire le nom du superviseur des effets spéciaux (et réalisateur de seconde équipe également) : Olaf Ittenbach. L’Allemand le plus gore de la planète n’a pas calmé sa soif de sang dans cette grosse production. Je ne sais pas si Uwe Boll savait à quoi s’attendre mais franchement, merci monsieur Ittenbach parce que le spectacle est vraiment barbare, jubilatoire, et de grande qualité. Mais pour faire taire les mauvaises langues, les FX participent au suc- cès du film, ils ne sont pas le film. Reconnaissons quand même à Uwe Boll d’avoir su mener à bien ce projet.

Très bonne surprise donc de la part de ce réalisateur si décrié. Un peu plus de lyrisme lors des scènes d’émotions aurait encore fait ga- gner un galon au film. Mais " Bloodrayne " est une belle réussite, mêlant aventure et gore dans une parfaite alchimie. On retiendra la prestation de Kristanna Loken, même si on a parfois l’impression qu’elle peine un peu à donner du volume à son personnage. En tout cas, moi je suis partant pour un bloodrayne 2 si c’est de même qualité !

Stéphane Erbisti

QQQQ QQ LES MONSTRES DE LA NUIT VOLUME 8

Notre ami Eric Escofier vient de terminer le numéro 8 de son fanzine Les Monstres de la Nuit.

Pour ce nouveau numéro, Eric a décidé de nous parler de la carrière du prolifique réalisateur anglais John Gilling , qui nous a livré de très bons films comme "L'invasion des Morts Vivants", "La Femme Reptile", "L'impasse aux Violences" ou "Dans les Griffes de la Momie" par exemple.

Ce numéro nous présente également un interview de la déesse Ingrid Pitt.

On commande ce volumineux numéro directement à Eric pour la modique somme de 15 euros frais de port compris.

Rendez-vous sur son site pour le contacter : http://monstresdelanuit.tripod.com/monstres.htm

16 HEART STOPPER (Heart Stopper)

Réalisateur : Bob Keen Scénario : Vlady Pildysh & Warren P. Sonoda Pays : Canada Année : 2006 Musique : Eric Cadesky & Nick Dyer Casting : Meredith Henderson, Nathan Stephenson, Robert Englund, Ja- mes Binkley, Michael Cram, Mark Day, Laura DeCarteret, Scott Gibson Genre Tueurs Fous

Chambers, un tueur en série est exécuté sur la chaise électrique. Le soir même où on l'emmène dans un hôpital pour l'autopsie, l'ambulance recueille une jeune fille suicidaire du nom de Sara. Arrivé à l' hôpital, Chambers revient à la vie et se met à massacrer toutes les personnes qu'il croise.

naître que le modus operandi du tueur est souvent le même: il arrache le coeur de ses victimes, que ces dernières contemplent avant de rendre l'âme. Cela n'empêche pas no- tre tueur très bourrin (ce qui semble à la mode, comme les récents slashers " Venom" et encore plus " See no evil ") de pratiquer des variations: objets plantés dans l'oeil, ou encore la grosse scène choc du film avec un écartèlement d'un corps d'un blessé dans la salle d'opération; salle qui se transforme vite en véritable charnier.

Simple et efficace dans son déroulement, " Heartstoppper ", aurait mieux fait d'être un film muet plutôt que d'avoir droit à une véritable litanie de lieux communs: "Je ne veux pas mou- rir" récité par tout un tas de futurs victimes ou encore le ver- biage du tueur ("qui sème le vent récolte la tempête"). D'ail- Plus connu pour ses travaux d'effets spéciaux leurs, concernant ce dernier il est ironique de voir en lui la (" Hellraiser "," Candyman ", " Warlock 2: the armageddon ", " Dog Sol- représentation du Mal (au sens religieux du terme) car une diers "), Bob Keen oeuvre de temps en temps dans la réalisation de sé- tempête se déchaîne au moment où il se relève d'entre les ries B du genre. Jusqu'à ce jour, aucun de ses films n'est passé à la pos- morts comme si le Ciel voulait récupérer cette âme maléfi- térité (qui se souvient de " Proteus ", réalisé en 1995 ? Peu de monde.). que qui essaie d'échapper à son terrible destin. Cette symbo- Ce n'est certainement pas avec son dernier né " Heartstopper" que Bob lique est maladroitement utilisée, mais on n'est pas à une ma- Keen va encore passer dans la cour des grands. Ce n'est pas surprenant ladresse prêt. vu l'échec de ses confrères dès qu'ils s'essaient à la réalisation: John Bruno (" Virus "), Steve Beck (" 13 fantômes ", " Le vaisseau de l'an- goisse ", Phil Tippett (" Starship Troopers 2: heros de la fédération "). Grâce à la sincérité d'un réalisateur modeste et à la présence d'un Robert Englund qui ne cabotine pas pour une fois, deve- Mais Bob Keen doté d'un modeste budget de 3 millions de $ s'en sort nant une sorte de produit d'appel pour pas mal de films ré- bien mieux car il reste modeste dans ce qu'il propose aux spectateurs: cents (" 2001 maniacs "), " Heartstopper " est ce qu'on nomme une histoire simpliste d'un tueur en série. Bob Keen se donne à fond un pur produit d'exploitation, qui ne passera pas à la postéri- dans l'aspect gore de son long-métrage comme pour camoufler la va- té, car brassant trop un air de déjà vu (" Shocker " rencontrant cuité d'un scénario inexistant. Même si le début de l'intrigue se la joue le slasher hospitalier), mais qui est généreux en scènes go- mystérieuse entre des relations quasi paranormales entre le tueur res. Un plaisir à réserver pour les amateurs les plus acharnés Chambers et la jeune Sara, une fille mal dans sa peau. L'équipe du film toutefois. est consciente des clichés utilisés dans cette histoire prétexte (fille sui- cidaire et névrosée que personne ne croit, une mère peu soucieuse de Gérald Giacomini sa progéniture, tueur exécuté sur la chaise électrique et comme Horace Pinker dans " Shocker " revient à la vie) et se rattrape sur le sordide et la violence des meurtres. QQQ QQQ

Car " Heartstopper " comporte son lot de meurtres gores. Il faut recon- 17 BLOOD SISTERS OF LESBIAN SIN (Sisters of Sin)

Réalisateur : Greg Griffin Scénario : Lou Aguilar Pays : Etats-Unis Année : 1997 Musique : John Graves Casting : Justin Gorence, Lara Daans, Heather Lee McIntyre, Alisa Christen- sen, Jenna Johns, Martin King, Lawrence Curtis, James W. Bates, Kurt Hull... Genre : Troma Movies

Que se passe-t-il lorsque l’équipe technique qui, un an plus tard, sera res- ponsable de " Sucker: the vampire " se fait les dents dans le monde du ciné- ma ? A l’instar de son second essai, il ne se passe strictement rien.

Johnny Blake – dit "le moine" - est chasseur de démon de son état. Aidé de sa secrétaire, il combat les forces du mal au bénéfice de l’humanité.

Un beau jour une belle femme lui rend visite, lui expliquant qu’un maléfice pèse sur sa famille : lors de leur 21ème anniversaire, ses deux sœurs ont dis- paru. La date fatidique approchant pour la demoiselle, elle vient quérir pro- tection et réconfort auprès du bellâtre.

Bien sûr le scénario ne s’arrête pas là. Cependant, afin de ne pas tuer dans l’œuf les deux seuls rebondissements du film, il me semble préférable de ne pas en dévoiler plus.

Disposant d’un scénario aussi palpitant et riche en rebondissement qu’un Teckel atteint de surcharge pondérale, Sisters of Sin, est large- ment décevant. Lent au possible, l’histoire ne décolle jamais bien haut : on attend une clé de voûte pour donner un intérêt à l’histoire, mais rien ne vient. Le film se lambine et s’étire avec difficulté jusqu’à une fin pénible et dénuée d’intérêt.

Pourtant le concept n’est pas dénué d’intérêt : des sœurs unies par le péché… En fait, si, malheureusement, le concept lui-même est bancal et suranné. Afin de ne pas se fâcher, passons rapidement sur la réalisation. Peu énergique, le plus souvent bancale, elle n’est ici que le véhicule du scénario. Ainsi aucun plan n’est intrinsèquement beau. Chaque prise de vue sert à conter l’histoire, et n’a aucune au- tre prétention. Tout au moins pourra-t-on apprécier la cohérence de l’ensemble : un script mou desservit par une mise en scène molle.

Mais arrêtons là les choses qui fâchent, et passons aux aspects positifs du métrage… A vrai dire, elles sont assez difficiles à trouver ces qualités. La vision même de Blood sisters of the lesbian sin , se justifie difficilement. C’est triste à dire – et croyez moi, j’en suis le premier attristé – mais la seule raison pour laquelle le visionnage du métrage de Greg Grif- fin se justifient est la plastique de ses actrices.

Les demoiselles sont fort bien présentées, le plus souvent habillées de façon très stimulante. Tous les goûts trouverons de quoi se flatter la rétine, de la rousse plantureuse et innocente, à la brune maléfique et manipulatrice, le réalisateur s’est fait plaisir… et nous fait plaisir du même coup.

S’il est vrai que les actrices sont belles, le jeu de la totalité de l’affiche laisse passablement à désirer. Blood Sisters of Lesbian Sin est donc ennuyeux à mourir, si ce n’est, vous l’aurez compris, pour les quelques créatures fantasmatiques qui peuplent son casting.

Cependant, afin de tempérer le ton de cette critique, il ne faut pas perdre de vue qu’il s’agit là du premier (et seul) long métrage de Greg Griffin. Alors, "haut les cœurs !"

Colin Vettier

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18 BATMAN BEGINS

Réalisateur : Christopher Nolan Scénario : Bob Kane, David S. Goyer & Christopher Nolan Pays : Etats-Unis Année : 2005 Musique : Ramin Djawadi, James Newton Howard, Mel Wesson & Casting : Christian Bale, Michael Caine, Liam Neeson, Katie Holmes, Gary Oldman, Cillian Murphy, Tom Wilkinson, Rut- ger Hauer, Ken Watanabe, Mark Boone Junior, Linus Roache, Morgan Freeman, Larry Holden, Gerard Murphy... Genre : Super-Héros

Depuis quelques années, les grands studios hollywoodiens ont décidé que l’été était une période propice pour contrac- ter une indigestion d’adaptation de comics au cinéma. Ces adaptations qui vont du plutôt bon (" spiderman ") au très mauvais (" Daredevil ", " Alien vs Predator "), aboutis- sent pour la plupart sur de franchise. Et Batman en est une qui avait disparu des écrans depuis déjà longtemps. Peut- être était-ce préférable, vu ce que Joel Schumacher avait fait du défenseur de Gotham.

Quoiqu’il en soit, Christopher " Memento " Nolan a décidé de ressortir la chauve-souris de son placard, probablement avec une idée en tête : ARRETER les pantalonnades ridicu- les en cuir sadomasochiste avec des acteurs incapables !

En ce qui concerne le scénario, comme le titre l’indique, Batman Begins est un retour aux sources de la franchise. Un vrai, pour une fois !

Après la mort de ses parents, le jeune Bruce Wayne hérite d’un empire économique im- pressionnant. Mais n’étant pas encore en âge de prendre la tête de la corporation, Bruce vagabondera de longues années. Ses pas le mèneront vers Ra's Al Ghul et la communauté des ombres, un clan de ninjas en charge de faire régner une justice expéditive sur le reste du monde.

Lorsqu’il revient à Gotham City, Bruce décou- vre une ville rongée par le crime et la corrup- tion…

Pour les fans de Batman (dont je fait parti), l’arrivée d’une nouvelle équipe aux commandes a été un véritable soulagement. Batman méritait effectivement que quelqu’un de compétent lui redore la chauve-souris ! Apres deux épisodes plus représentatifs de Bur- ton que du vengeur masqué, et deux carnavals ridicules, le travail promettait d’être colossal.

En outre Christopher Nolan est un réalisateur ingénieux qui s’est déjà illustré lors d’un exercice de style périlleux, "Memento", et d’un polar intelligent "Insomnia". Mais lorsque les premières images de la Batmobile ont pointé le bout de leur nez… petit pincement au cœur. Les clowneries ne finiront donc jamais ?

A dire vrai, Nolan signe un métrage féroce et très respectueux du matériau original, quand bien même certains éléments demeurent dis-

19 cutables (Batman dans un tank a 200kmh sur l’auto- route ?!). Le principal atout du film est d’avoir éjecté les précédents Bruce Wayne auxquels une huître aurait pu don- ner des leçons d’estime de soi. Batman Begins signe l’avènement d’une nouvelle ère, celle d’un Batman violent, argneux, assoiffé de vengeance… en un mot, le VRAI justi- cier masqué. Christian Bale ne joue pas Batman, il EST Batman !

Ainsi lorsqu’il s’adresse à un vilain, l’homme chauve-souris crache ses mots, tous les traits du vi- sage tendus par la haine. La rage peut alors se lire dans ses yeux. En ce qui concerne les scènes d’affrontement avec l’ennemi, encore une fois, la mythologie inventée par Bob Kane est respectée. Le vengeur attend dans les ténèbres et se jette littéralement sur ses proies. Ici pas de catch, mais des combats rapides et efficaces, le Dark Knight frappe vite et fort !

Mais Batman ne serait rien sans Gotham et sa faune. Ainsi la ville est représentée comme un amas de buildings étouffant, ville tentacu- laire qui se serait développée trop rapidement. Le design même des rues, des bâtiments… est suffocant, sombre et poisseux. Le fait que tout puisse arriver à chaque coin de rue, est parfaitement rendu à l’écran. Un travail d’orfèvre.

Qui dit Batman dit aussi, évidemment, commissaire Gordon. Là encore, la fibre substantifique du comics est atteinte. Gordon, un des seuls flics de Gotham à ne pas avoir succombé à la corruption, est un individu maigre, aux traits tirés. Le visage de Gary Oldman re- flète sa désillusion, sa fatigue. Un homme sur la brèche à n’en pas douter, mais un fervent défenseur de l’ordre public – si tant est qu’il puisse faire quelque chose à son niveau.

Bien sûr vous retrouverez aussi Alfred, le fidèle serviteur de Monsieur Wayne. Michael Caine est lui aussi parfait dans son rôle. Le film de Nolan recèle bien d’autres surprises, notamment d’un super-vilain que tout les fans reconnaîtront : docteur Crane.

Alors, Batman Begins, un chef d’œuvre ? Enfin une adaptation valable ? …

Oui… et non. L’aspect graphique est de loin le plus poussé. Même les cabrioles de Peter Parker et de Sam Raimi ne sont pas aussi res- pectueuses du matériau original que Nolan l’est.

Cependant, certains choix sont discutables, principalement celui de la Batmobile. Certes plus ‘crédible’ lors des poursuites, plus dis- crète aussi, mais largement moins stylée que la voiture au long capot du dessin animé !

Cependant là où le bât blesse réellement, c'est la bande originale. Pour faire simple, elle est ABSOLUMENT INFECTE. Carton rouge à Hans Zimmer qui tente de nous refiler sa bouillie réchauffée, déjà entendue mille fois. La musique ressemble effectivement à s’y mé- prendre au score de Spider Man , et de fait à celui de la grande majorité des films rythmés par (sans compter tous les précédents scores de Monsieur Zimmer) !

Bêêrkh ! Vraiment, la musique gâche l’aspect général jouissif du film. Quel dommage. Espérons que la suite corrigera le tir.

Colin Vettier

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20 dévoile la face cachée de son sacerdoce: après avoir oc- cis une gentille institutrice dévouée à sa mission et aimée de tous, il sort un revolver et tire sur les petits enfants paniqués. Deux fins limiers de la police sont alors char- gés d'une enquête qui s'annonce difficile, car personne n'a vu le visage de ce monstre lâche et ignoble. L'un de ces deux policiers, américain d'origine d'Europe de l'Est, est connu pour ses méthodes musclées, et est en butte à l'ostracisme de ses collègues bureaucrates. Mais il tombe amoureux de la maman d'une des petites rescapées du massacre, et rien ne l'arrêtera dans sa quête de justice.

On peut dire que le réalisateur de " Ripper ", " Monolith " et " Octopus ", producteur de l'un des films du trop rare David de Coteau, a commencé sa carrière avec un brio rarement égalé. Le début de " Demon spirit " frappe tout de suite très fort: image tremblante indiquant que le dis- tributeur a souhaité ajouter un effet technique à la hau- teur du projet... comptine d'enfants nous renvoyant à des références multiples du genre... massacre ne cédant ja- mais à la facilité du gore, les enfants abattus s'effondrant au ralenti sans la moindre tâche de sang... Innovation, culture, finesse d'approche sont donc indéniablement au rendez-vous de ce régal d'exception, qu'on réservera aux fins gourmets.

Le mérite ne revient pas uniquement à John E. Eyres, dont les talents se sont probablement développés dans le milieu des films d'entreprises internes et en gardent l'incomparable dynamique. " Lucifer ", a.k.a. "Good night, god bless", est le fruit d'un véritable travail d'équipe, où chacun a visiblement donné le meilleur de lui-même. Ed DEMON SPIRIT Ancoats, le scénariste, a d'ailleurs tellement donné qu'il (Lucifer) n'a plus rien écrit par la suite, préférant passer à autre chose et produire des projets ambitieux comme " Dark Planet " ou " Spoiler ". Malgré, donc, une histoire cons- Réalisateur : John E. Eyres truite sur un schéma en apparence simpliste, il faudra Scénario : Ed Ancoats plusieurs visionnages pour comprendre le choix des vic- Pays : Grande Bretagne times du tueur, et l'on est ébloui par la façon dont les cli- Année : 1987 chés sont détournés, porteurs en cela de messages anti- Musique : Paul Stuart Davis conformistes: par exemple, Joe Yamovich, loin d'être le Casting : Frank Rozelaar-Green, Emma Sutton, Jared Morgan, Alan Ro- Harry Callahan que les autres s'imaginent, s'avère être un wlands, Jane Price, Alister Meikle, David Charles, Eamonn Collinge, Ken homme très gentil, capable de patience, frappant à la Gregg, Nickie Rainsford, Gordon Robertson... porte avant d'entrer, serrant la main après une entrevue, aimant caresser les chiens et même faire des ballades Genre : Diable et Démons dans la nature.

Doté d'un suspens extrêmement subtil, d'un montage Le voilà enfin, LE film. Celui qu'on cherchait depuis toujours, peut-être parfois déroutant, de cadrages sans esbroufe et d'une même sans le savoir. Celui que tout vrai fan du genre se DOIT d'avoir vu au ambiance dominicale par temps gris qui colle parfaite- moins une fois dans sa vie. Le film ULTIME, inoubliable, qui nous marquera ment au sujet, " Demon spirit " multiplie avec un sens à jamais dans notre âme et dans nos tripes. Un concentré d'horreur MAL- inouï de la concision les dialogues informatifs ou émou- SAIN et JOUISSIF. Un pur monument de trouille, jubilatoire et déjanté, au- vants sur la psychologie des personnages ou le déroule- tant que référentiel, intelligent et sans concession. Un véritable coup de ment de l'enquête, alors que le tueur, lui, agira sans par- grolle en plein bide. Un authentique coup de matraque dans la tronche. Un ler jusqu'à la fin, préservant le mystère sur son identité TGV qui vous défonce la rétine de plein fouet et vous ravage le cortex. Un tout du long avant de nous la jeter au visage. Ce silence A380 qui explose tout sur son passage avant de s'écraser dans votre frappe aussi ses victimes traumatisées, comme si elles en COEUR. Bref, une hallucinante et apocalyptique révolution du genre, sinon étaient contaminées. La musique phénoménale de Paul du cinéma en général, injustement passée sous silence et dont il est impos- Stuart Davis suggère d'ailleurs sa nature démoniaque par sible de sortir indemne. ZE chef-d'oeuvre. un gargouillis rappelant celui de nos intestins lors d'une

Un prêtre en soutane fait irruption dans une cour d'école londonienne et 21 gastro-entérite, ce qui renforce l'idée de contamination et prouve la cohérence d'ensemble du projet. On ne s'étonne plus alors des apparitions-disparitions de cet assassin aux caracté- ristiques virales, quasi immatérielles, et la dernière scène du film, assumant pleinement l'héritage de la saga de "L'exorciste ", achève de nous transporter dans un spasme mystique effrayant.

Si Mandy est d'accord, hasardons-nous enfin à dire que les amateurs d'horreur pure et dure trouveront leur compte dans un étalage de violence très appréciable: présentations de cha- pelet, rien de moins, mais aussi coups de poignard jouant habi- lement de la suggestion et laissant notre imagination faire le reste. Une porte, une main et un corps transpercés sur lesquels le réalisateur évite heureusement de trop s'attarder. Des cris et des coups de feu qui nous laissent pantois, peu après nous avoir arraché du sommeil. Heureusement, le scénario n'oublie pas de ménager quelques moments de pause, qui totalisent d'ailleurs la quasi totalité du métrage, ainsi que des traits d'humour volontaires qui sont les bienvenus dans cet univers étouffant. Les deux hommes attachés, sur les slips desquels John Vanomich a écrit "Have a nice day", nous rappellent ainsi toute la vitalité humoristique du cinéma britannique. Si vous n'avez pas encore compris que vous avez affaire à une perle, c'est que vous êtes des spectateurs vraiment difficiles, ou peu ré- ceptifs ! Aussi, plutôt que de célébrer les sempiternels " Massacre à la Tronçonneuse " et autres pseudo films cultes, osez donc décou- vrir à prix cassé ce film unique, audacieux et faussement monotone... Ou bien offrez-le à celles de vos connaissances qui souffrent d'in- somnies. Après tout, Noël approche. Pensez-y !

Stéphane Jolivet QQQQQQ

LE CROCODILE DE LA MORT (Eaten Alive / Death Trap)

Réalisateur : Tobe Hooper Scénario : Alvin L. Fast, Kim Henkel et Mardi Rustam Pays : Etats-Unis Année : 1976 Musique : Tobe Hooper, Wayne Bell Casting : Neville Brand, Mel Ferrer, Carolyn Jones, Marilyn Burns, William Finley, Robert Englund & Stuart Whitman Genre : Tueur fou et Crocodile affamé

Judd est un ancien du Vietnam qui tient le " Starlight Hotel " au bord d'une nationale située au fin fond de la campagne améri- caine. Tout irait pour le mieux s'il n'était pas un détraqué sexuel qui tue ses clients à coups de faux et les précipite dans le marais jouxtant son bouge. Dans ces eaux agitées, surnage un croco- dile, en provenance d'Afrique selon le maître des lieux, doté d'un féroce appétit et de mâchoires acérées, prêtes à déchique- ter tout ce qui passe à leur portée. Passeront dans cet hôtel : une ancienne prostituée qui semble n'être en fait qu'une demoiselle en fugue (interprétée par Marilyn Burns, tout juste échappée de la tronçonneuse de Leatherface), un couple en crise avec leur petite fille, un beauf du coin désirant "s'accoupler" avec une mi- gnonne du terroir, le père et la sœur de la jeune fille en fuite pré-citée. Mais qui survivra au reptile dont la faim semble insa- tiable?

22 Juste après le triomphe de " Massacre à la Tronçonneuse ", Tobe Hooper est de retour avec un film d'horreur encore plus malsain et gore dans lequel il décide de ne rien suggé- rer et de montrer de multiples atrocités, rare- ment vues au cinéma jusqu'alors. Revenir après son chef-d'œuvre de l'horreur et tenter de faire mieux était un pari risqué, mais Tobe s'en sort avec les honneurs. Même si à sa sor- tie, " Le crocodile de la mort " était interdit aux moins de 18 ans car jugé extrêmement violent et déviant.

Certes, dans ce film bercé par une musique parfois simpliste, un montage souvent foireux, des dialogues pesants au début, on a du mal à retrouver l'ambiance ô combien glauque de "Massacre" dont "Le crocodile" semble appa- remment se réclamer. Mais la photo, les éclai- rages et l'histoire sont la marque de fabrique de l'auteur : violent, cru, cruel et parfois dé- bordant d'un humour noir corrosif. Comme par exemple, dans la scène du début qui voit une prostituée se faire virer par la patronne de la maison close qui l'emploie sous prétexte qu'elle refusait de céder aux propositions d'un de ses clients (joué d'ailleurs par un tout jeune Robert Englund hilarant en "redneck" obsé- dé!) désirant "essayer quelque chose de diffé- rent" !!!

Ce qui en revanche dénote un peu, ce sont les trop rares apparitions du crocodile, dont on ne voit que la gueule et la queue de manière furtive et la fin trop prévisible du film. Mais l'ensemble constitue un spectacle très diver- tissant pour ceux qui désirent passer une sympathique soirée. Au grand dam de ses nombreux fans, lors des années suivantes l'ami Hooper a commencé à entacher sa filmo- graphie d'affreux petits navets. Quoiqu'il en soit il aura prouvé avec "Le crocodile de la mort" (également connu sous les titres : "Death Trap"/"Horror Hotel"/"Horror Hotel Massacre"/"Legend of the Bayou"/"Murder on the Bayou"/"Starlight Slaughter") qu'il n'était pas le réalisateur d'un seul film, ce qui n'est déjà pas si mal ! Vincent Duménil

QQQQ QQ 23 LE CABINET DU Dr. CALIGARI (DAS KABINETT DES DOKTOR CALIGARI )

Réalisateur : Robert Wiene Scénario : Carl Mayer, Hans Janowitz Pays : Allemagne Année : 1919 Musique : Giuseppe Becce Casting : Werner Kraus, Conrad Veidt, Lil Dagover, Friedrich Feher, Han Von Twardowski, Rudolf Lettin- ger, Rudolf Klein-Rogge Genre : Classique Culte

Franzis et Alan sont les meilleurs amis du monde et amoureux tous deux de la jolie Jane. Leur amitié n’en souffre pas du fait qu’ils attendent de celle-ci qu’elle fasse son propre choix. Inséparables, il se rendent à la fête foraine de la ville où des meurtres sont perpé- trés depuis plusieurs jours, les victimes étant tuées toutes de la même façon. Au sein de la foule, ils sont harangués par le Docteur Caligari, qui exhibe Cesare un somnambule, capable de prédire les évènements futurs. Alan se prête au jeu et questionne le phéno- mène quant à la date de sa mort :"Vous vivrez jusqu’à l’aube". Terrorisés, les deux compères quittent la fête et se séparent le soir même. Mais au cœur de la nuit, Alan surprend quelqu’un dans sa chambre, et meurt poi- gnardé dans son lit…

Une éternité que je n’avais pas été autant ébloui. 73 minutes de grâce et de fascination absolue pour ce film reconnu comme le premier de l'ère expression- niste. D’autres distinctions peuvent ainsi lui être dé- cernées : sans conteste le premier film muet de genre, et sans aucun doute le premier slasher de aux couleurs exquises. La copie est délicatement teintée, tantôt de bleu, d’o- l’histoire du cinéma. Réalisé en 1919, " Le cabinet du rangés, de parme, ou bien encore d’un vert vaporeux (Argento !). Vous ne Docteur Caligari " est le reflet de l’angoisse d’un rêvez point. Des scènes désormais d’anthologie parsèment cet ovni cinémato- peuple, d’une Allemagne déroutée psychologique- graphique : l’enlèvement de Jane, les poursuites dans les rues… autant d’in- ment, qui sort de la guerre. Le film "découpé" en 6 telligence scénique que l’on retrouvera plus tard dans des films tels La Mo- actes, ne peut rappeler en aucun cas une quelconque mie (1932) ou encore Dracula (1931). Un véritable thriller défile sous nos mise en scène théâtrale. yeux, et l’on se surprend à attendre fiévreusement la fin tant l’intrigue nous tient en haleine. Les amoureux de l’art expressionniste et poétique seront aux anges : la quasi-totalité des décors sont Bon nombre de réalisateurs feraient bien de s’inspirer du dénouement de ce l’œuvre d’Herman Warm, talentueux peintre de cette film, remarquable d’ingéniosité. Je n’en ai toutefois pas terminé avec l’hallu- époque. De splendides toiles géométriques peintes cination : au regard de la scène finale qui pourrait laisser augurer d’une servent le film et insufflent un caractère féerique à suite ! Visionnaire et précurseur, assurément, définitivement. l’ensemble du long métrage (on pense notamment à

Tim Burton de nos jours). Robert Wiene est un précur- Précipitez-vous donc sur ce film qui nous offre ce que le cinéma a de plus seur sur bien des points. A une époque où le cinéma beau : l’aliénation de l’âme. présentait des acteurs au jeu excessif et théâtral, pro- che du mime, ce film est résolument contemporain Christophe Jakubowicz dans le sens noble du terme. L’interprétation est d’une qualité exceptionnelle, les maquillages outran- ciers (les yeux charbonneux) servent parfaitement la palette de sentiments, distillés avec une rare convic- QQQQQQ tion.

Nous devenons témoins malgré nous d’une peinture 24 Seulement voilà : Fulci est le pape du gore, et le naturel reprend le dessus. Fidèle à lui-même, "Lo Squartatore di New-York" est dénué d’humour et privilégie les scènes chocs. Œuvre sanglante et urbaine, l’histoire s’ouvre sur le pont de New-York que Fulci avait déjà filmé comme un symbole apocalyptique pour parachever "l’enfer des zom- bies".

Ici, il s’agit d’un passage, d’une invitation à embarquer dans la Big Apple, terrain de jeu d’un maniaque affublé d’une voix de canard et éventreur de jolies dames. La ville de New-York nous est présentée comme vénéneuse, glau- que, violente et déviante.

Une déviance qui balaie l’ensemble du métrage, à com- mencer par tous ses protagonistes. Afin de ne laisser au- cune possibilité au spectateur de s’attacher, voire s’identi- fier à un personnage, Fulci choisit de mettre l’accent sur la psychologie de chaque participant : un flic plutôt laxiste et fréquentant Kitty, une prostituée (Daniela Doria : " La Mai- son près du Cimetière ", " Frayeurs ", " The black cat "), l’épouse nymphomane d’un médecin (Alexandra Delli L’EVENTREUR DE NEW YORK Colli : " La Terreur des Zombies "), un psychologue friand (Lo Squartatore di New York ) de "littérature" homosexuelle (Paolo Malco, le père de " La Maison près du Cimetière "). Une occasion supplémen- Réalisateur : Lucio Fulci taire donc de voir que Fulci était fidèle à ses acteurs. La table est donc mise, ne reste plus qu’au réalisateur de Scénario : Gianfranco Clerici, Vincenzo Mannino, Lucio Fulci, nous mettre en appétit. Le menu se fera alléchant et tien- Dardano Sacchetti dra toutes ses promesses. Au menu, tous les entremets Pays : Italie propres au giallo, à commencer par un égorgement en Année : 1982 bonne et due forme suivi bien plus tard par des coups de Musique : Francesco De Masi couteaux bien sentis. Entre les deux, Fulci ne peut s’empê- Casting : Jack Hedley, Almanta Suska, Howard Ross, Andrea Occhipinti, cher de revenir à ses premières amours, à savoir le gore, Alexandra Delli Colli, Paolo Malco, Cinzia de Ponti, Cosimo Cinieri, Danie- le poisseux, l’ultra violence en somme : éventration, coups la Doria, Babette New, Zora Kerova, Paul E.Guskin, Antone Pagan, Josh de rasoir… le tout mâtiné d’un esthétisme jusque là discret Cruze, Marsha MacBride chez Fulci, témoin une lame de rasoir déchirant le téton Genre : Tueurs Fous / Giallo d’un sein, ou scarifiant un globe oculaire.

New-York est en état d’alerte. Un psychopathe sévit dans la ville en éven- Le cinéaste, comme chacun le sait n’a jamais eu la recon- trant ses victimes. Le policier Fred Williams, chargé de l’enquête ne tarde naissance d’un Dario Argento ou plus en amont d’un Mario pas à recevoir les appels d’un mystérieux interlocuteur affublé d’une voix Bava, vêtus tous deux d’éloges faits à leur égard sur le de canard, et qui prétend être le responsable de cette vague de crimes… sens inné de la couleur et plus précisément de leur photo- graphie. Pourtant Fulci saura se souvenir de cette palette Nous sommes en 1982, et Lucio Fulci réalise cette année là son 41e film. qu’il distillera à travers une scène choc au cours de la- Pour beaucoup de cinéphiles amoureux du Maître, " L’Eventreur de New- quelle le bas-ventre d’une jeune femme subira les assauts York " est considéré comme étant son ultime réussite cinématographique. de notre psychopathe. Une scène particulièrement difficile Slasher, thriller, giallo ? A première vue, le film pourrait sembler hésiter à tourner dixit le chef-opérateur, due en partie aux reflets sur le genre alloué mais il n’en est rien. Si l’on veut à tout prix être respec- d’un néon rouge, extérieur au tournage. Et pourtant Fulci tueux des codes, alors il s’agit bien d’un giallo, genre que Fulci avait déjà saura s’en servir à son avantage, incluant les flashs rou- abordé avec " L’emmurée vivante " quelques années auparavant. Et le geoyants de cet imprévu, mêlé à l’ambiance verdoyante moins que l’on puisse dire est qu’il s’agit d’un genre qui lui réussit plutôt de la scène : sauvage et esthétique. bien. On en viendrait à regretter que Fulci n’ait pas persévéré davantage dans cet exercice. 25 Il s’amuse également à nous mener là où il veut, et surtout quand il le veut, alternant les scènes simplement dialoguées et celles purement saignantes, pour nous immerger dans un flots de détails déstabilisants : forcément on hésite, on croit tenir le tueur, et finalement notre erreur apparaît, évidente, et ce bien des fois. Rusé, Lucio introduit un person- nage à part entière, un "latin lover" d’apparat, adepte de bondage et autres perversions sensorielles et tactiles. L’homme est amputé de deux doigts : mais qui est-il ?

Les appels du meurtrier, avec cette voix si particulière ont-ils un sens ? Certains verront dans ce choix vocal une occasion de rire, et pourtant ce détail trouvera son explication à la toute fin du métrage : pas grotesque pour un sou. Tout comme le scénario, de bonne facture, malgré des dialogues parfois à la limite du suppor- table. Un reproche récurrent chez Fulci, qu’on lui pardonnera une fois de plus. Il est un montreur d’images, point. Et il le démontre une fois de plus par une mise en scène efficace, utilisant les zooms et des plans fixes de toute beauté.

"L’Eventreur de New-York " respire le sang et le sexe. Ce qui lui vaudra entre autres une interdiction totale en Angle- terre où l’oeuvre sera jugée pornographique, et choquante pour le pays qui venait de subir à l’époque les méfaits d’un psychopathe national. L’occasion de découvrir aussi que le cinéaste filme aussi bien la mise à mort que l’érotisme. On retrouve ainsi Zora Kerova (" cannibal ferox " et "anthropophagous " entre autres) en "performeuse" dans un peep-show, scène magnifiée par des éclairages or et nuit : un bijou dans un écrin en quelque sorte. Une autre séquence mettant en scène l’épouse nymphomane aux prises avec le "latin lover" est un véritable morceau de choix. Au delà de la plas- tique irréprochable d’Alexandra Delli Colli, Fulci filme d’une façon telle, que la séquence devient tour à tour sensuelle, sexuelle, char- nelle, et ce malgré la réalité éprouvante du propos qui défile à ce moment précis. Une manière pour Fulci, donc, de prouver que son regard sur le sexe n’était pas si malsain que l’époque pût le dire.

En effet, le film en plus d’être taxé de pornographique, fût également la cible des ligues féministes et de certaines critiques qui virent à travers celui-ci un message prônant et la misogynie, et l’avilissement de la femme. Heureuse- ment les années feront le reste, et aujourd’hui, " L’Eventreur de New-York " restera comme un film précieux dans la filmographie du Maître.

Déviant, sadique, cruel et pervers, tels sont les caractères de ce film que Ful- ci nous propose, pour nous amener, nous, simples spectateurs, à ce senti- ment fort singulier qui nous émeut tant : l’excitation.

Christophe Jakubowicz

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26 X TRO

Réalisateur : Harry Bromley Davenport Scénario : Harry Bromley Davenport, Iain Cassie, Michel Parry, Robert Smith Pays : Grande Bretagne Année : 1983

Musique : Harry Bromley Davenport, Shelton Leigh Palmer planète bleue. Les méchants aliens se feront donc discrets (" The thing " Casting : Philip Sayer, Bernice Stegers, Danny Brainin, sera d’ailleurs un cuisant échec), ce qui n’empêche pas au british Harry Maryam d'Abo, Simon Nash, Peter Mandell, Anna Win Bromley Davenport (eh ben !) de livrer un si charmant "Anti-ET". Genre : Extraterrestres belliqueux Difficile de trouver un film, voire quelque chose ressemblant de près ou

de loin à " Xtro ", surtout que nous sommes en territoire british, là où le Menant jusque là une vie de famille paisible, Sam Philips cinéma anglais se voulait avant tout porté sur les vampires, les fantô- est happé par une force extra-terrestre sous les yeux de mes et d’autres mythes plus classiques. Un cinéma qui n’était pas dans son fils et disparaît pendant trois longues années. Sa sa meilleure forme d’ailleurs, la Hammer venant ainsi de "décéder" femme Rachel a refait sa vie avec un autre homme, mais le dans les seventies. Il faudra attendre " Hellraiser " pour que le cinoche souvenir de son ancien mari pèse encore sur elle. Mais que anglais reparte sur de bonnes bases. s’est-il réellement passé ?? Non loin de la ville, un extra- terrestre attaque un couple puis engrosse une jeune femme Se voyant discerner la Licorne d’or au Festival fantastique de Paris, le à son domicile : elle donne naissance à Sam, qui semble film de Davenport se voit porté par un budget particulièrement faiblard bien déterminé à retrouver sa petite famille… et une réalisation terne plus proche du cinéma bis italien. Là où le petit

Grâce à "E.T" et à "Rencontres du troisième type", Steven budget aurait pu l’handicaper considérablement, il s’en dégage au Spielberg nous prouvait que les extra-terrestres n’étaient contraire une aura étrange qui va donner toute sa force à l’atmosphère pas nécessairement des horribles monstres gluants venus poisseuse du film. du fin fond de l’espace pour nous éradiquer, mais d’adora- bles créatures qui avaient hâte de découvrir notre chère 27 Disparu depuis trois ans, Sam revient auprès de sa famille et tente de panser la blessure qui affecte sa femme et son enfant depuis ces trois années de mystère. Il tient particu- lièrement à rester auprès de son fils Tony et de sa femme Rachel, totalement désemparée, ce qui n’est pas du goût du nouveau compagnon de celle-ci, particulièrement anti- pathique envers Sam. Mais celui-ci n’est plus humain de- puis bien longtemps : capturé par des extra-terrestres, il est devenu une créature de l’espace et cherche à repren- dre sa progéniture, à qui il donne des pouvoirs surnaturels étonnants.

Si son scénario n’a rien de grandiose, " Xtro " est un film authentiquement "space" dans les deux termes ! Parfois on se demande même ce qui s’est réellement passé par la tête des quatre ( !?!) scénaristes tant certaines idées pa- raissent aussi fantaisistes qu’étranges : pourtant, rien de bien négatif dans tout cela, car " Xtro " n’est jamais, même involontairement, drôle. Et ça, pour un film à petit budget, c’est plutôt un pari gagné !!

Dans ce climat malsain se balançant entre un cadre rurale et un cadre urbain, se déroulent des tableaux bizarres et surréalistes d’où surnage un certain malaise : un petit gar- çon vampirisé par son père dans une ruelle glauque, un clown nain grimaçant (dont les grimaces rappellent par- fois Tim Curry) tue un concierge avec un Yo-yo lumineux pourvu de lames tranchantes, une jeune fille au pair fran- çaise (très jolie Myriam d’Abo, futur James Bond Girl quand même !!) servant de couveuse pour des œufs extra- terrestres, des jouets prenant vie, un Alien quadrupède paumé dans la forêt, des œufs de serpents dévorés peu proprement, un homme faisant l’amour à sa femme alors qu’il se trouve en pleine transformation physique peu ra- goûtante, une conclusion quasi-onirique, une femme ac- couchant littéralement d’un homme… Le clou étant ce Big Jim grandeur nature prenant soudain vie pour buter une vieille rombière, baïonnette à la main !!

Si l’actrice principale Bernice Stegers vous dit quelque chose, c’est bien normal puisqu’elle fut deux ans plus tôt l’héroïne nécrophile du très intéressant "Baiser macabre". Une actrice qui, physiquement, ressemble étrangement à Claire Higgins, la Julia des deux premiers " Hellraiser ". En définitive, un beau petit morceau de série B horrifique totalement "autre".

Jérémie Marchetti

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28 DESTINATION FINALE 3 (Finale Destination 3 )

Réalisateur : James Wong Scénario : James Wong, Glen Morgan Pays : Etats-Unis Année : 2006 Musique : Shirley Walker Casting : Mary Elizabeth Winstead, Ryan Merriman, Kris Lemche, Amanda Crew, Alexz Johnson, Texas Battle, Jesse Moss , Chelan Simmons, Tony Todd... Genre : Slasher surnaturel

Avant de monter sur un gigantesque roller coaster, Wendy, a le pressentiment qu’un accident va survenir. Prise de pani- que, elle descend avec d’autres camarades de classe. Peu de temps après, sa prédiction se produit et elle assiste im- puissante à la mort de ses amis. Très vite, les survivants de l’accident vont s’apercevoir qu’avoir échapper à la Mort n’est pas forcément une sinécure car le destin rattrape bru- talement les survivants les uns après les autres.

Il y a des films dont on sait à quoi s’attendre avant de les vi- sionner. Sans prétentions aucunes, " Destination Finale 3 " est de ceux là, offrant au spectateur ce qu’il est venu cher- cher : frissons et humour. Le concept trouve finalement son équilibre dans ce 3ème opus, dans lequel on retrouve les compères à l’origine de la saga : James Wong (" Destination Finale ", " The One ") et Glen Morgan(" Willard "). On peut donc considérer ce film comme une forme de rattrapage par rapport à un premier épisode qui se révélait bien gentillet eut égards aux possibilités du concept. La leçon est retenue et la copie ren- due est supérieure à ce que l’on pouvait espérer. Après le très débridé " Destination Finale 2 ", la série poursuit sur le même chemin. Ceux qui ont donc apprécié le précédent seront comblés d’aise. Le public visé est clairement celui des jeunes ados en manque de sen- sations fortes. Excessivement fun, la mise en scène des meurtres se révèle tellement jubilatoire qu’on en redemanderait bien encore.

On ne change pas une histoire qui gagne (à la base, on retrouve toujours une personne qui à la vision d’un accident à venir et qui fait descendre du manège une partie des passagers. La Mort ne tardera pas à réclamer les morts manquants à l’appel). Sans liens aucuns avec les précédents (exit A.J Cook- " Ripper ", " Wishmaster 3 "-, qui ne rempile pas, et Tony " Candyman " Todd qui se contente d’inter- venir uniquement via sa voix mais pour en bénéficier il faut visionner le film en vo), " Destination Finale 3 ", fait donc office de quasi re- make comme l’ont été en leurs temps les premiers "Vendredi 13". Le concept reposant sur une formule qui semble répétable à l’infini.

Comme on commence à en avoir l’habitude maintenant, on a droit à une tétanisante séquence d’introduction censée marquer les esprits et surpasser la précédente. Pari globalement réussi même si le carambolage de " Destination Finale 2 " reste la meilleure séquence à ce jour de la saga. L’accident du roller coaster est malgré tout spectaculaire tout en étant délibérément exagéré (la série est émaillée ainsi de scènes un poil cartoonesque mais moins poussé ici que pour le second Final Destination). Un spectacle à visionner impérative- ment sur grand écran pour ressentir ce vertige de la scène du manège.

La jeune fille qui a prédit l’accident, Wendy (Mary Elizabeth Winstead : " Le cercle 2 ", " Black Christmas 2006 "), dispose d’un élément nouveau pour tenter d’empêcher les prochaines morts. Elle a prise des photos juste avant l’accident, et des éléments indiquant com- ment les personnes vont mourir y apparaissent (une pirouette scénaristique piquée au mythique "La malédiction"). Un apport au scéna- rio qui tente de donner une cohérence à l'histoire et par la même occasion éviter les signes à répétition auxquels avaient droit A.J Cook et qui intervenaient à n’importe quel moment du récit. Wendy n’a ainsi pas d’autres visions et doit se concentrer sur les objets de son environnement pour parer la menace. Le danger peut toujours venir de partout, comme dans cette boutique ou sont entreposés diffé- rents outils de bricolage, et où nous, pauvres spectateurs sommes à l’affût de tout objet potentiellement mortel.

Le récit n’est quand même pas à prendre au sérieux car certaines des morts sont plus burlesques que terrifiantes. Comme celles de deux bimbos (des sortes de Paris Hilton totalement superficielles, dont le ravissante Chelan Simmons, aux charmes dévastateurs...) qui se font grillées en prenant leur UV. Une scène jubilatoire et assez longue (largement supérieur à ce que l’on a vu dans le désastreux

29 Ci-dessus : Chelan Simmons - Un atout de charme pour Destination Finale 3

"Urban Legend 3 ") mais qui est loin d’être la seule. Wong et Morgan s’amusant comme des gamins à inventer des morts inédi- tes. Et passé, les premiers trépassés, difficile de prévoir l’ordre des victimes malgré la bonne volonté de Wendy accompagnée de son copain de mésaventure Kevin (Ryan Merriman : " Le cer- cle 2 ", " Halloween Resurrection "). Comme dans tout bon film se rapprochant de la mouvance des slashers, les personnages sont très stéréotypés comme on en a l’habitude dans ce type de films : les bimbos , le sportif, le dragueur….. mais joué par des acteurs globalement convaincants. Quant on sait que la sélection des ac- teurs a eut lieu au dernier moment, cela tient du miracle.

Mené sans temps morts, " Destination Finale 3 ", ne laissera pas le spectateur se reposer jusqu’ à oser le final le plus spectaculaire de la trilogie. Wong et Morgan ont donc mené à bon port ce troisième chapitre, qui n’hésite pas à donner dans les morts gores (cela deve- nant une surenchère) comme le second. On pardonnera donc les redites (la scène de l’enterrement) pour se concentrer sur ce qui fait le charme et la force de cette série digne des meilleurs slashers d’antan. Alors, pourquoi bouder son plaisir. La Grande Faucheuse n’at- tend plus que vous…

Gérald Giacomini

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30 LE CHÂTEAU DE YUREK Une équipe de quatre jeunes artistes se rend à une audition organisée par le fameux producteur Yurek en vue d’être rete- (A Cena col Vampiro ) nus pour son prochain film. Une fois l’audition terminée, Yurek Réalisateur : Lamberto Bava les fait conduire à son château pour les rencontrer autour d’un Scénario : Luciano Martino dîner. Seulement, une fois arrivés, nos jeunes gens ne se dou- Pays : Italie tent pas qu’ils sont là pour tout autre chose, à savoir un face à Année : 1988 face avec un authentique vampire qui va leur expliquer que Musique : Simon Boswell l’audition n’avait pour seul but que de trouver des personnes Casting : George Hilton, Patrizia Pellegri- capables de mettre fin à son interminable existence… no, Riccardo Rossi, Isabel Russinova, Va- leria Milillo, Yvonne Scio, "Dinner with the Vampire ", re-titré chez nous " Le château de Daniele Aldrovandi... Yurek " pour la télévision ou encore "Vampire" pour la distribu- Genre : Vampires tion VHS, fait partie de la série Brivido Giallo : quatre films ré- alisés pour la télévision par Lamberto Bava. Les trois autres ti- tres étant " La maison de l’Ogre ", " Outretombe " et enfin "Deux amants diaboliques ". Paraît-il que les montages TV seraient différents des montages réservés à la distribution pri- vée, à savoir censurés, pour " Le château de Yurek " en tout cas il semble que non. Pourtant cette production, remise dans son contexte, semble plutôt osée, si on considère le direct-to-tv de l’époque. Concernant l’histoire, on ne sait pas vraiment s’il faille en rire ou en pleurer : une trame plus que prévisible à partir des 5 premières minutes et qui se vautre dans le com- promis et la simplicité durant tout le reste du film. Mais n’est-ce pas ce qu’on attend d’un long métrage de ce type produit pour la télévision (et donc l’audience) ? Effectivement je pense qu’il faille chercher les qualités de ce film ailleurs. Commençons par les acteurs, ou dirions nous plutôt les figu- rants. La recette est simple : un vampire démago et poussié- reux secondé par un apprenti aux dents longues et un servi- teur bossu plutôt orienté bouffon sympathique. Ajoutons à cette fine équipe une fiancée dont l’euphorie (hystérie ?) se rapproche plus de la pathologie que de la situation elle-même. Pourtant du comique de situation il y en a : le reste du casting se compose d’une chanteuse, une danseuse, une comédienne et un… comique ! Il est vrai que l’on y ressent de fortes capaci- tés à anéantir un être surnaturel et quasi immortel. Ce contraste recèle toute la subtilité du film, si subtilité il y a, c’est-à-dire divertir quitte à se rapprocher volontiers des Charlots contre Dra- cula plutôt que de "Nosferatu". "Nosferatu", le mot clef plus lié aux images qu’au reste. Effectivement, la première chose que l’on retien- dra de ce film est le look sympathiquement gothique du vampire, volontiers emprunté aux clichés les plus populaires du genre. Ajou- tons à cela une bonne dose d’hémoglobine, chose inouïe jusqu’alors si l’on considère la filmo des pseudo nosferatus en manque de sang de la télévision (le vampire de Hooper qui se régale de sang frais hors cadre et l’épisode de Buck Rogers mettant en scène le même genre de maquillage en sont de bonnes illustrations). Malheureusement, le "stop motion" de l’époque viendra desservir les dési- ratas du maquilleur : on se souviendra toujours de la scène où Yurek arbore une main en pâte à modeler qui change d’aspect. N’est pas Ray Harryhausen qui veut, et encore moins De Rossi, la scène finale en témoignant bien. La réalisation quant à elle est égale à la musique : plutôt fade et sectaire. On ne s’embarrasse guère de travailler les lumières, ce qui compte c’est de mettre en avant les splendides mosaïques multicolores du château, qui, du coup, ne fait pas trop transylvanien. Peu importe, mis dans son contexte le décor se prête d’avantage à une production hors normes. C’est au travers de ses splendides vitraux que ce dernier nous fera entrevoir ici et là quelques techniciens en arrière plan, sans doute paumés entre les toilettes et la cuisine. Reste de bonnes idées, à savoir le film dans le film et la scène ou Yurek télécommande les variateurs de lumière avec sa main griffue. Lamberto Bava en profitera pour contredire totalement son récit en nous montrant l’horrible vampire reflété dans une glace du château, beau plan mais pas très crédible. Pourtant ça n’est pas la crédibilité qu’il faut chercher ici mais le divertissement. Et à l’aide d’une (ou deux, ou 10) bouteille de bière vous arriverez sans doute à passer un bon moment. En définitive, ce film nous apporte ce que le télés- pectateur veut : se fendre la poire en se régalant de sang. Pour les autres, on espérera juste voir Yurek mourir (de rire) assez vite, au risque de se retrouver aussi poussiéreux que lui . Lionel Colnard

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31 MASSACRE A LA TRONCONNEUSE : LE COMMENCEMENT (The Texas Chainsaw Massacre : The Beginning)

Réalisateur : Jonathan Liebesman Scénario : Sheldon Turner Pays : Etats-Unis Année : 2006 Musique : Steve Jablonsky Casting : Jordana Brewster, Taylor Handley, Diora Baird, Matthew Bomer, R. Lee Ermey, Andrew Bryniarski... Genre : Survival / Genèse d’un Mythe

1939. Une femme découvre un nourrisson ayant une malformation au visage dans une poubelle. Elle le recueille et l’emmène dans sa grande demeure. Le petit Thomas Hewitt grandit avec son handi- cap, qu’il cache sous un masque de cuir artisanal et devient garçon boucher dans la plus grande entreprise de la région. 1969. Avant de partir pour le Vietnam, deux amis, Eric et Dean, dé- cident de passer un dernier week-end avec leurs petites amies Chrissie et Bailey. Ils se rendent dans une région du Texas où l’en- treprise embauchant Thomas Hewitt vient de déposer le bilan. Vic- time d’un grave accident de voiture, trois d’entre eux vont devenir la proie du shérif Hoyt, qui va les emmener dans sa demeure où ils vont être confrontés à la folie furieuse des occupants, dont le mons- trueux et bestial Thomas Hewitt, devenu adepte du maniement de la tronçonneuse. Chrissie, qui a tout vu, va tenter de venir en aide à ses amis…

1974. Tobe Hooper lance à la face du monde le monstrueux Leatherface et sa famille de dégénérés dans le définitivement culte "Massacre a la Tronçonneuse ". 2003. Marcus Nispel propose un remake du classique de Tobe Hooper avec " Massacre a la Tronçonneuse 2003 ". Une nouvelle version qui renoue avec le film d’horreur brutal et sans concession et qui, sans jamais atteindre la folie de son modèle, recueille néanmoins les suffrages positifs du public et cartonne au box office.

Deux films qui font du tueur au masque de peau humaine une entité pour les fans de films horrifiques, qu’ils soient de l’ancienne ou de la nouvelle génération. Mais une question reste en suspens, qui ne trouve aucune réponse, que ce soit dans le film de 74 ou de 2003 : comment Leatherface est-il devenu Leatherface justement ? Fort du succès du film de Marcus Nispel, le producteur Michael Bay décide de produire une séquelle. Mais au fil de l’avancement du projet, la séquelle se transforme en préquelle et va enfin répondre à cette question existentielle !

Ce nouveau volet va donc nous présenter les per- sonnages vus dans le film de Nispel, en ce qui concerne la famille de Leatherface.

Notre tronçonneur fou a évidemment eu une en- fance difficile, on pourra rapprocher sa naissance de celle du "Pingouin" dans le " Batman le defi " de Tim Burton. Né avec une difformité physique au niveau du visage, abandonné par ses parents dans une poubelle, le petit Thomas Hewitt sera donc recueilli par une jeune femme et conduit dans la maison de l’horreur. Pour cacher sa difformité, il portera durant son adolescence un demi masque de cuir sur le visage. Adolescent, il aura un pen- chant pour l’automutilation. Devenu adulte, Tho- mas travaille dans l’abattoir de la région, dissimu-

32 lant toujours la partie atteinte de son visage. La fermeture de l’abattoir sera l’élément déclencheur de sa folie. Pas très content de son patron, Thomas ne trouvera rien de mieux que de l’exploser à coup de masse pour lui faire comprendre son mécontentement. La scène qui s’ensuit est très belle, puisqu’on voit Thomas se saisir d’une tronçonneuse et marcher seul sur une route désertique, image qui a servi sur l’affiche du film. La photographie est très belle et la séquence est très poétique.

Je ne vous raconterai pas comment le shérif Hoyt est devenu shérif justement, parce que cette séquence est mémorable, teintée d’un humour très noir et jouissif ! Car il n’était pas shérif au départ ce cinglé de Hoyt, mais alors pas du tout…d’ailleurs, il ne s’appelait même pas Hoyt…

Vous découvrirez également comment Old Monty a eu les jambes sectionnées, l’obligeant à se déplacer en fauteuil roulant. Bref, de nombreux éléments basés sur la vie antérieure des personnages principaux nous sont proposés et ça apporte vraiment un "plus" au film, on en sait plus sur eux, on fait un peu partie de leur famille et ce n’est pas pour déplaire.

Niveau violence, cette préquelle est un cran au-dessus du film de 2003. Certains coups font très mal, sont très réalistes, notamment les coups de masse ou les coups de matraque donnés par Hoyt. Leatherface et sa tronçonneuse ne lésineront pas non plus sur les effets go- res, même si ceux-ci ne sont pas filmés en pleine lumière. Mais ce n’est pas de la suggestion cette fois, on aura droit à un tronçonnage de corps humain, à une perforation de ventre par la lame du diabolique engin, à un découpage et prélèvement de visage style "les yeux sans visage", et autres petites joyeusetés bien sympathiques que je vous laisse découvrir.

L’ambiance est bien poisseuse également, de nombreuses séquences se déroulent dans la maison et la crasse est bien au rendez-vous. Jonathan Liebesman a traité son film avec sérieux, et on n’a pas trop envie de rire pendant la vision. La plupart des sourires qui se dessi- neront sur nos visages seront dus au personnage du shérif Hoyt, qui, bien qu’étant très cruel, en fait tellement qu’il en devient un peu "cartoonesque". Mais dans l’ensemble, c’est à un vrai film d’horreur pur et dur que Jonathan Liebesman nous invite à suivre, et on pour- ra trouver que son film n’est pas si éloigné que ça de " Wolf Creek " par exemple… Pourtant, le début laissait prévoir le pire, avec ce groupe d’ados et les éternels clichés de la nana aux gros seins, des baisers langou- reux, des plans sur le jean taille basse de l’héroïne. Mais heureusement, la suite prend une toute autre tournure…

Pour remplacer Jessica Biel, c’est la toute aussi jolie Jordana Brewster qui a été choisie. On avait pu la voir dans " The Faculty " en 98 ou dans " Fast and Furious " en 2001. Les autres acteurs interprétant le reste de la petite bande ne sont pas bien connus, et ont surtout une carrière à la télévision. On a surtout vu Matthew Bomer dans la série " Tru Cal- ling " par exemple. En tout cas, ils assurent plutôt bien dans ce nouveau volet de Massacre à la Tronçonneuse.

Le film propose également quelques clins d’œil au film de 74, comme une course poursuite dans la nuit entre Jordana et Leatherface armé de son tronçonneuse, ou bien une petite scène de repas familial, où Jordana, encore elle, se retrouve en bien mauvaise posture. Néanmoins, cette scène, très attendue par les fans, ne res- tera pas dans les annales comme l’avait fait celle du film de Tobe Hooper. Mais je ne pense pas que c’était non plus le but de Jonathan Liebesman, sûrement cons- cient qu’il était impossible de faire mieux au niveau de l’hystérie et de la folie que la scène culte du repas du film de 74.

"Soyez les témoins de la naissance de la peur" affiche le slogan américain. C’est un slogan fort judicieux au vu du résultat à l’écran. J’ai trouvé cette préquelle bien supérieure au film de 2003, qui m’avait laissé sur ma faim. Certes, toujours rien de comparable avec le film de Tobe Hooper, qui reste réellement unique, mais un vrai bon film d’horreur, méchant, violent, bien réalisé, bien interprété, et qu’on regarde avec plaisir.

Stéphane Erbisti

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33 GARGOYLE (Gargoyle : Wings of Darkness)

Réalisateur : Jim Wynorski Scénario : Lon Lonescu Pays : Etats-Unis Année : 2004 Musique : Neal Acree Casting : Michael Paré, Sandra Hess, Fintan McKeown, Kate Orsini, Tim Abell, William Lan- glois, Petri Roega, Rene Rivera Genre : Monstres volants

En 1592, Roumanie, des villageois sont tourmentés par un démon qui a la forme d’une gar- gouille. Ils réussissent finalement à l’enfermer dans un tombeau. Mais en 2004, une série de tremblements de terre libère la créature que tout le monde pensait disparue. Deux agents de la CIA qui ont été envoyés à Bucarest pour une affaire d’enlèvement, se retrouvent confrontés à un événement qui les dépassent: des meurtres d’une rare violence sont commis. Malheu- reusement pour eux, ils ne savent pas que les créatures qu’ils vont rencontrer sont redoutables…

"Gargoyle " (à ne pas confondre avec le film de 1972), bénéficie d’un scénario simple et alléchant. Malheureusement pour nous, spectateurs, la marchandise n’est pas à la hauteur de ce que l’on pourrait espérer. Le film commence très rapidement: on assiste à une première scène d’action dès la deuxième minute. Ce qui frappe immédiatement, ce sont les gargouilles. En images de synthèse, assez bien réalisées -pour un film à aussi petit budget- mais qui sont vites dé- crédibilisées par un jeu d’acteur très médiocre. Témoin, les scènes où les per- sonnages doivent tirer sur les créatures : on a l’impression que les protagonis- tes vident leurs chargeurs à côté ou tombent avant que quelque chose ne les touchent. Etonnant !

Le film continue sur sa lancée et nous livre tout naturellement des scènes d’ac- tion qui paraissent lentes (un comble!). Parmi elles, on peut citer la toute pre- mière où un projectile met exactement deux secondes pour atteindre sa cible. Le même scénario se répète plusieurs fois dans le film.

On pourrait donc tout de suite penser que " Gargoyle " privilégie les scènes d’actions –aussi ratées soient-elles– mais encore une fois, ce n’est pas le cas. Les dialogues sont nombreux et la plupart du temps inutiles, et les scènes d’actions sont rares. Sont-elles alors sanglantes? Oui, si vous n’êtes pas exi- geants, et que vous considérez que de la peinture rouge diluée dans de l’eau représente le sang. Pire encore, on pourrait avoir l’impression que des seaux –censés représenter l’hémoglobine– sont lâchement jetés contre les murs.

Non content de nous livrer des situations cocasses, Jim Wynorski ("Ghoulies 4", "Raptor" et bientôt "Komodo vs Cobra") réussit aussi à nous faire sourire du début à la fin. Michael Paré ("Le village des damnés", "Bad Moon") et Sandra Hess ("Beastmaster 3") restent impas- sibles même devant les créatures. On a plus l’impression qu’ils sont présents dans le film pour se ‘montrer’ qu’autre chose : belles dents blanches, beaux sourires, bien coiffés et ce, même quand ils utilisent une arme. Si vous avez l’occasion de voir les dix premières minutes de " Gargoyle ", cela suffit amplement : vous pourrez vous faire un avis global sur l’intégralité du film. Au final, " Gargoyle " est un film rempli d’incohérences, pas effrayant une seule seconde et contenant des dialo- gues insipides (on retiendra la scène où le ‘bad boy’ lance pendant quelques secondes des "Fuck" à tout va). Jim Wynorski lorgne même sur "Alien" (les œufs) et sur "Bats" (la scène finale). Bien sur, on gardera à l’esprit que ce film a été produit pour la télévision, par la chaîne Sci-Fi Channel. Mais quand même... A ne regarder de préférence qu’une fois son cerveau mis de côté ou durant une longue nuit d’hiver… Yann LeBiez

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34 LE PACTE DU SANG (The Covenant)

Réalisateur : Renny Harlin Scénario : J.S. Cardone Pays : Etats-Unis Année : 2005 Musique : Tomandandy Casting : Steven Strait, Sebastian Stan, Laura Ramsey, Taylor Kitsch, Toby Hemingway, Jessica Lucas, Chace Crawford, Wendy Crewson Genre : Sorcellerie masculine pour ados

Caleb, Tyler, Pogue et Reid sont les descendants des familles qui fondè- rent leur ville à l’époque des sorcières de Salem. Chacun d’eux est l’héri- tier de grands pouvoirs magiques qui se transmettent à l’aîné de chaque famille. Le lendemain d’une fête étudiante illégale sur une plage non loin de la ville, le corps d’un universitaire visiblement mort d’une overdose est retrouvé dans sa voiture. Immédiatement, les soupçons se portent sur les quatre mystérieux garçons qui eux, savent que quelque chose cloche au sein de leur école et que quelqu’un en veut probablement à leurs pou- voirs. C’est dans ce climat tendu que Caleb s’éprend d’une énigmatique nouvelle étudiante qui se sent constamment épiée et rencontre Chase, un nouveau qui semble en savoir plus qu’il en a l’air sur les quatre amis.

Bon… On sait bien que quand on va voir un film de Renny Harlin, on ne va pas assister à la projection d’un grand film. On s’attend plutôt à se vider la tête devant une pellicule divertissante, généreuse et efficace mais sans grande originalité. Ben figurez vous qu’avec « Le Pacte du Sang », Renny Harlin ne remplit même pas ce contrat pas- sé licitement avec le spectateur. La dernière réalisation de l’auteur des plutôt bons « 58 minutes pour vivre », « Ford Fairlane », « Au Revoir à Jamais », « Peur Bleue » et de sympathiques navets comme « Profession : Profiler », « L’Exorciste au Commence- ment » et « Driven » est un échec total au capital sympathie niveau zéro.

Déjà, il y a ce scénario, qui à l’image du pitch, est dénué de toute originalité et apparaît comme une resucée d’Harry Potter pour grands ados mal dans leur peau, ou de « Dangereuse Alliance ». Si ce n’était que ça, passe encore, mais le problème est qu’il n’y a aucun enjeu dans tout le film et que l’on se contrefiche totalement du sort des quatre garçons dont le seul véritable but est de préserver leur secret ancestral (on a vu plus palpitant !). Et lorsque arrive le traditionnel face à face final, on a plus hâte que ça se termine au plus vite qu’autre chose. Bref, on se croirait dans l’un des mauvais films de David DeCoteau, le casting masculin composé de beaux gosses ne faisant que renforcer la comparaison avec les films de ce réalisa- teur.

Impossible, donc, de rentrer dans le film à moins de n’avoir jamais été au cinéma de sa vie, chose plutôt ardue de nos jours. Impossibili- té renforcée par des acteurs d’une insipidité si affligeante qu’il en devient difficile de distinguer les personnages principaux. Et la dis- tinction de se faire carrément impossible lorsque le chef maquilleur leur fait mettre des lentilles noires façon « métalleux » en colère lorsque les quatre ados s’énervent et que le chef des costumes les accoutre façon « Matrix » ou « Blade » lorsqu’ils sortent le soir.

Les effets spéciaux tout en CGI rappellent les téléfilms catastrophes fauchés du samedi soir. Ils se limitent à quelques boules d’énergies translucides pas du tout impressionnantes et à deux, trois cascades, allez soyons gentils, plutôt marrantes. La réalisation de Renny Har- lin est vraiment basique et jamais inventive excepté au niveau de quelques décors et éclairages qui donnent un petit aspect gothique pas désagréable au film, mais là j’essaie vraiment de positiver… Cédric Frétard

QQ QQQQ 35 HISTOIRES EXTRAORDINAIRES

HELLRAISER : THE CALL WITHIN

Par David Roué

« Pourquoi vous me faites mal… » L’enfant James Bergson ressentait une douleur incroyable, se sentait souillé, avili, alors que son oncle se rhabillait derrière lui. « Ne t’inquiète pas, c’est fini… Tout ira bien maintenant. Et ne parles jamais de ça à personne. »

Tu parles que tout allait bien… La souffrance ne s’efface pas. La souffrance appelle la souffrance. On y goûte une fois par ha- sard, ou à cause du destin, et elle vous poursuit à jamais. On reste caché dans son propre enfer personnel, ou alors on s’ouvre au monde pour y déverser sa douleur, pour en appeler de nouvelles, et finalement pour jouir de ce mal quotidien.

James Bergson avait 13ans. Son enfance se termina brutalement. Il ne le savait pas encore mais sa quête de souffrance commen- çait de façon soudaine. Devenu autre après cette fête familiale d’un mois d’été comme un autre, on dut le changer de collège à plusieurs reprises. Il n’était pas déjà un enfant modèle, mais son adolescence fut infernale. A 18 ans, il avait déjà testé une quin- zaine d’établissement, il décida de prendre un job et un appart. Pour mieux s’abrutir dans une vie qui l’anesthésiait. Jusqu’à son vingtième anniversaire.

J’avais passé 7 années dans le coma. A refouler ce qui voulait sortir de moi. A refouler ce qu’aujourd’hui je ressens de tout mon être. Quand j’y repense, je me dis que sans cette soirée providentielle, je ne serai peut-être pas là où mes ténèbres m’ont mené.

Intérieur nuit - un bar à strip-tease miteux aux néons rouges et à l’atmosphère étouffante. James Bergson fêtait son vingtième anniversaire en compagnie de quelques collègues. L’atmosphère enfumée, la chaleur les poussent à commander whisky sur whisky. James n’arrivait pas à partager la joie de ses « amis ». Il sentait qu’il lui manquait quelque chose. Du fric ? Il bossait de- puis deux ans dans une usine d’équarrissage, un boulot à la con comme on dit, mais un boulot qui paye. Des filles ? Il n’en man- quait pas, il se dénichait sans problème sa gonzesse mensuelle avec sa belle gueule d’ange. Des rêves ? La drogue lui en fournis- sait à la demande. C’est pourquoi la révélation de ce soir-là fut un électrochoc pour lui.

Jimmy Carlson… Dire que sans lui j’en serais peut-être pas là aujourd’hui. Il avait vraiment l’alcool mauvais, et quand il s’en est pris à une des filles, il a bien fallu que quelqu’un s’interpose. Je dis pas que la fille était spécialement belle, excitante ou un truc comme ça. Mais y’a des choses qui se font pas.

6 mètres sur 5, une petite scène de strip-tease d’un petit bar miteux pour des petits cons minables. Effrayée, sur la droite de la scène, deux strip-teaseuses à l’âge indéfini, trop maquillées. Raide défoncé, sur la gauche de la scène, barrant la porte vers les coulisses, Jimmy, colosse d’un bon mètre 90, primate décérébré en manque de sexe et en trop plein d’alcool. Entre les deux, Ja- mes Bergson, gringalet d’à peine 170 centimètres, joli visage aux cheveux blonds en bataille, expression déterminée dans le re-

36 gard.

« Tu crois pas que t’as assez fait de conneries pour aujourd’hui Jimmy ? _ Fous-moi la paix James… J’suis p’têt pas capable de faire envie à ces poufiasses, mais j’peux encore très bien t’écharper si tu te mets entre elle et moi ! » Disant cela, il avait éclaté sa bouteille de whisky sur le mur. Et la tenait maintenant d’une poigne ferme, menaçant James de sa vindicte. Mais James ne bougea pas.

Le goût du sang sur les lèvres, dans la bouche, sur la langue. Le goût de mon sang. Quelle sensation…

On se souvient toujours de son premier orgasme. Tout comme on se souvient de son premier poing dans la figure. Et celui de James fut gratiné. Il en tomba à la renverse, complètement sonné. Mais aussi, et cela lui paraissait étrange, presque ravi. Il voyait parfaitement clair maintenant. Il se sentait revivre, après un deuil de 7ans. Presque aussitôt il se releva. Fixa d’un air un peu hébété le poing gauche de Jimmy, ensanglanté de son propre fluide. Regarda autour de lui, ses potes s’étaient barrés, les strip-teaseuses aussi, le patron du bar fixait la scène d’un regard pervers. Enfin, il tourna son regard vers le colosse. « C’est tout ce que tu peux faire p’tit branleur ? »

Le réveil aux urgences de l’hôpital du Sacré Cœur fut très douloureux. Non seulement James était immobilisé sur un lit, un bras dans le plâtre et le visage salement amoché, mais des décharges de souffrance intense le relançaient dès qu’il tentait de faire un mouvement.

Toute une journée durant, il lutta. Pour apprivoiser cette douleur. En se remémorant petit à petit l’affrontement sanglant qui l’a- vait mené là. Le premier coup de poing en plein plexus solaire. Le premier coup de tesson sur la pommette droite. Les mèches de cheveux collées par le sang. Le moment où, alors qu’il tentait de reprendre son souffle, à terre, Jimmy lui tordit le bras jus- qu’à ce qu’un craquement lui signifiât que son os venait de se briser. La terreur qui le saisit lorsqu’il s’aperçut qu’un bout dudit os dépassait bizarrement de sa peau, avec beaucoup de sang tout autour. Ce moment, douleur se confondant avec une sensation étrange de plénitude et d’accomplissement, comme si toute sa vie n’avait été qu’un arc tendu vers cet instant, ce moment où il se laissa glisser dans un abîme de souffrance.

Oh bien sûr, j’avais déjà connu l’orgasme. Sexuel s’entend. Et spirituel aussi, par le biais de toutes les substances illicites qui existaient. Depuis mon dépucelage jusqu’à cette bastonnade, ma vie ne se résumait qu’à une quête effrénée de sexe et de dro- gues. Je me cramais le cerveau tout en essayant de ressentir ces sentiments que l’on juge essentiels à la vie. Mais je ne vivais pas, je survivais. Et j’essayais de combler le vide que je sentais en moi. Je ne demandais pas grand-chose d’autre, et la seule perspective de vivre m’effrayait. Ce soir-là, alors que cet abruti de Jimmy me lardait de coups, s’acharnait sur moi comme un chien sur son os à mœlle, alors que je sentais mon visage se morceler et le sang couler à flot, alors que je sentais des convul- sions me parcourir, je sentais aussi quelque chose qui montait en moi. Ce n’était pas du plaisir. Ce n’était pas de la douleur. Ce n’était pas de la peur. C’était tout ça à la fois .

Extérieur jour - Sortie d’hôpital une semaine plus tard. Jimmy qui attend. Avec deux, trois autres collègues. Ils se tenaient en demi-cercle, prêts à souhaiter bon rétablissement, bon retour au boulot, de plates excuses. Et James, qui paraissait normal, qui était pourtant profondément changé. Il suivit néanmoins ses collègues en ville, un pot dans un bar puis retour à son appart, tran- quille. Le lendemain, il quittait son boulot. Il quittait la ville. Il se réfugiait dans une résidence familiale inhabitée.

Ben oui, y’a des fois, faut savoir ce qu’on veut. Est-ce que je pouvais décemment continuer toute ma vie à fréquenter des imbé- ciles et à m’abrutir dans une société qui ne voulait pas de moi ? Les coups de Jimmy m’avaient ouvert les yeux. Mais je n’ai pas eu le courage d’affronter les autres. Et surtout de m’affronter moi. J’ai eu peur.

Une forêt paumée au milieu de montagnes. Une cabane paumée au milieu de la forêt. 4 mois entiers volés à James par ce lieu perdu. Et James en avait assez. Il avait essayé par cette fuite de se soustraire à ses pulsions. Mais ces pulsions devenaient de plus

37 en plus pressantes. Exigeaient du sang. Le sien. Celui des autres. Et ses nuits se peuplaient de cauchemars.

" Dans une vaste décharge de voitures je marche je marche sans m’arrêter il est près de minuit la lune est rouge sang elle brille dans un ciel sans étoiles / en face de moi quelque chose ou quelqu’un, une statue qu’on dirait de pierre blanche revêtue d’une sorte de combinaison noire / je me rapproche et la statue s’anime et se place dans la lumière et je peux voir sa face hideuse une face tourmentée comme celle d’un démon de l’enfer / je vois nettement les replis de peau flasque et blanche qui entourent une bouche emplie de lames de rasoir couvertes de sang / je vois nettement les chaînes qui sont reliées à ses membres et qui tirent vers l’arrière la peau de son crâne / je vois nettement ses bras décharnés, ses jambes écorchées de se traîner à terre / je vois sa peau de supplicié et je vois un troisième bras sortir de sa poitrine qui tient son cœur battant comme s’il l’offrait à qui voulait le malaxer / mais ce n’est pas un démon je le sens il n’a pas volonté de faire le mal il veut juste m’aider il veut juste me faire souf- frir me faire souffrir. »

Ces cauchemars récurrents, ce leitmotiv ignoble avait commencé dès la première nuit de ma nouvelle vie solitaire. Je savais que ces créatures qui m’apparaissaient étaient en mesure de m’offrir ce que cherchait inconsciemment, mais je refusais de l’admet- tre. Car je refusais encore d’admettre ce qui était en moi. Et quand bien même l’aurais-je admis, comment retrouver la trace de telles entités dans le monde où je vivais alors ?

« Je suis livré aux flammes sur un immense bûcher entouré par une populace avide de souffrance mais soudain la populace dis- paraît et je tombe à terre / mon corps entier est noir, consumé, brûlé au dernier degré et j’avance face contre terre je me traîne en laissant derrière moi un chemin de cendres / et l’on me prend, l’on me relève, et je sais que la créature qui me fait face est res- ponsable de mon tourment avec son sourire gravé dans sa chair qui lui déforme la face et ses orbites vides et son nez tranché et l’ouverture de son crâne qui laisse entrevoir un amas de gelée rougeâtre / et je l’aime pour ce qu’il me fait subir oh oui je l’aime »

Au bout de quelques mois j’avais en quelque sorte accepté mon existence : ermite le jour et observateur de cet univers de souf- france et de plaisir la nuit. Cependant je n’imaginais pas vraiment que tout cela eût pu un jour devenir réel : j’avais fini par me persuader que dans ces montagnes perdues rôdaient les reliques d’esprits anciens qui prenaient plaisir à me tourmenter en me montrant ce à quoi j’aspirais sans oser l’accomplir à ma misérable échelle d’humain. Jusqu’à ce qu’un des rêves me prouve le contraire.

« Je me tiens debout dans le grenier d’une maison abandonnée depuis des lustres semble-t-il au vu de la puanteur des lieux et de la crasse omniprésente / je fais quelques pas sur un sol visqueux puis baissant les yeux m’apercevant que je marche sur une fine épaisseur de sang frais je / non je ne peux rien faire je suis soudain paralysé / je ne contrôle plus mon corps je suis immobilisé un court instant jusqu'à ce que devant moi apparaissent trois silhouettes dans un flash lumineux qu’on dirait tiré d’un vieux film d’horreur / elles se rapprochent et alors que deux d’entre elles restent en retrait de sorte que je ne suis pas en mesure de voir à quoi elles ressemblent, l’une des créatures se fiche devant moi et je vois oh oui je vois / sa peau blafarde son vêtement noir comme de cuir tailladé sur le torse son visage couvert de ce qui semblent être des épingles et soudain sa voix s’élève comme d’outre-tombe une voix grave et sans nuance comme celle de la mort elle-même / quel dommage de perdre une once de souf- france James Bergson tu es pour nous une mine d’or / une autre voix s’élève alors que je remarque que les deux silhouettes der- rière la créature n’en font qu’une, une monstruosité siamoise reliée par un amas de chair qui s’ouvre, dévoilant un fœtus aux bras malingres, aux jambes informes et à la tête suintante dont s’échappent ces paroles que je n’oublierai jamais / la boite James Bergson cherche la boîte nous répondrons à ton appel trouve la boîte »

A ce moment précis, James s’éveilla en ayant en tête l’image de la boite de Pandore permettant d’appeler ces créatures qui le fascinaient et l’effrayaient tant à la fois.

Je savais que dans cet univers, j’allais enfin être en mesure de vivre pleinement, de vivre simplement ce pour quoi j’avais été programmé. Bien sûr, à ce moment-là je n’avais qu’une idée floue de qu’était ce programme. Tout était trop frais, trop nouveau pour que je saisisse les implications de l’appel que je m’apprêtais à réaliser. En moi se combattaient encore toutes les contra- dictions inhérentes à ma nature. Mais je décidais toutefois de sortir de ma retraite et de me mettre en quête de cette boîte. Il me

38 fallait également, je le savais, tenter de m’abandonner à mes pulsions, de manière à me montrer digne de l’honneur qui m’était fait. Il me fallait soumettre au silence la partie de moi qui s’y refusait encore.

« Tu as déjà vu ceci ? »

James Bergson déambulait depuis l’aube dans les rues les plus sordides de la ville. Il avait tenté de reproduire sur un bout de pa- pier l’image qu’il avait eu mentalement de la boîte. Mais il se rendait compte qu’aborder les gens dans la rue n’était pas la bonne méthode. On le prenait pour un fou, pour un junkie… Et ici personne ne s’arrêtait pour un fou. Ni pour un junkie.

J’ai quand même passé près d’un mois à parcourir les rues les plus glauques, les lieux les plus mal famés de la ville. Une quête inlassable. Mais finalement, c’est au moment où je m’accordais un peu de détente que cette quête prit fin.

Intérieur jour. Une chambre d’un hôtel de passe. Le papier peint qui se décollait des murs. James allongé sur le lit. Et la prosti- tuée qui se passait un gant de toilette entre les jambes dans la salle de bain.

« T’as été violent tu sais… Très violent, ça te fera un sacré supplément. - J’ai les moyens, t’en fais pas, soupira James d’une voix lasse. »

La pute avait des yeux trop grands et un corps qui accusait des années d’une vie lasse. Ayant fini sa toilette intime, elle s’avança dans la chambre et s’allongea aux cotés de James. Le regard de la fille se posa sur le dessin que James avait déposé sur la table de nuit avant de se déshabiller.

« Eh… Tu m’avais pas dit que tu connaissais Donovan Morow, c’est lui qui t’a laissé admirer sa collection ?» L’instant d’après, la main de James serrait le cou de la pauvre fille, lui enjoignant de lui dire tout ce qu’elle savait sur ce Dono- van Morow.

Il s’est avéré que Donovan Morow était un industriel retraité qui consacrait sa fortune à ses deux petites passions : les jeux sa- diques avec les prostituées et la collection d’objets anciens aux réputations maléfiques. Enfin, c’est tout ce que la fille savait de lui. Elle ne l’avait eu qu’une fois comme client, et au vu de la lueur de terreur dans ses yeux, je me doutais qu’il n’avait pas exi- gé d’elle la simple passe habituelle. Apparemment le grand plaisir de ce cher monsieur consistait à ne pas informer les prosti- tués du traitement qu’il aimait à leur faire subir et de jouir de leur surprise et de leur terreur devant ses perversions. La fille n’avait jamais osé porter plainte : une de ses amies s’y était risquée, on l’avait retrouvé suicidée peu de temps après. Le gros problème pour atteindre Donovan résidait là : une résidence privée sous surveillance constante, et des relations, beaucoup de relations influentes dans des milieux peu recommandables. La fille me laissa sans même demander son petit cadeau. Et je m’en- dormais, la tête dans les étoiles de mon enfer personnel.

« Je flotte entre deux mondes dans une toile d’araignée géante est-ce le ciel au-dessus et l’enfer en dessous ou peut-être l’inverse qui sait / cela importe peu / je sens que des crochets se plantent dans ma main gauche dans mon pied droit puis dans leurs oppo- sés je me sens écartelé mes bras mes jambes veulent se détacher du reste de mon corps ce sera le cas dans quelques secondes 5 4 3 2 / non cela n’arrive pas / venu du néant auquel un filet de chair infini le rattache un nouvel être se tient devant moi le reliquat de son corps est ce filet de chair qui l’empêche de se perdre dans l’univers qui l’entoure et la partie de lui qui me fait face oh mon dieu / c’est une tête qui a été humaine qui en a les caractéristiques mais qui semble sculptée dans une argile meuble et que les six bras qui l’entourent passent leur temps à pétrir en long et en large de sorte que son visage se tord se déforme se défait sans jamais revenir à ce qui aurait été sa position initiale / ses lèvres aussi se distordent et comme dans un murmure extatique j’entends ces mots REJOINS-NOUS REJOINS-NOUS REJOINS-NOUS REJOINS-NOUS REJOINS-NOUS... »

Int nuit. Le Drakkar Vaudou, une boîte tendance hardcore du centre de la ville. Un endroit plus ou moins licite où, à la tombée de la nuit, les bourgeois et les candides venaient jouer à se faire peur et à ressentir les délicieux frissons de l’interdit. Au centre de la salle principale, une cage en acier dans laquelle dansait une fille nue, les bras entourés de bracelets en cuir bardés de clous, un collier de pointes hérissées autour du cou. Sur les côtés, quelques couples vêtus d’habits noirs ou déjà dévêtus se fouettaient

39 mollement, sans réelle conviction. Au plafond, suspendu par un harnais de cuir, un androgyne la bouche fermée par un bâillon. Accoudé au bar, des simili-punks, des putes au look gothique et des messieurs respectables qui tentaient vainement de camoufler une érection naissante. Tout un décorum savamment étudié pour donner l’illusion de la transgression au riche oisif, au fils de médecin respectable, à la fille de diplomate en goguette. Mais le vrai spectacle n’était pas au rez-de-chaussée.

Il était dans la 3ème salle du sous-sol cet espèce de gros porc vicieux, tout au fond de l’endroit le plus sordide de la boîte, une gamine d’à peine une dizaine d’année sur ses genoux. Il mattait un pauvre diable, un clochard appâté par l’argent sans doute, se faire littéralement écharper sur scène.

Le cadre était lugubre, le spectacle était pathétique et fascinant : un homme accroupi se faisait fouetter par un jeune homme vi- goureux dont le corps enduit d’un pigment blanc le rendait semblable à un vampire ; les lanières du fouet était hérissées d’une multitude de petits clous, de pointes diverses et de minuscules éclats de verre, si bien que chaque coup arrachait non seulement des hurlements de douleur mais aussi une bonne partie de la peau du pauvre bougre qui se faisait châtier.

Je restais sans bouger quelques minutes qui me parurent des heures ; à en voir le sang qui ruisselait sur la scène, la « cérémo- nie » devait avoir commencé depuis quelques temps déjà. M’avançant un peu dans la pénombre, je fus en mesure de vérifier mes suppositions : en contrebas de la scène, soustrait à ma vue jusqu’à ce moment, un amoncellement de cadavres, une dizaine au moins, tous dans un état effroyable. Il semblait que l’enfer déchaîné ici par Morow n’eût pas de limite ; curieusement, alors que le reste de la boîte ne m’avait jusqu’alors semblé qu’un pitoyable pis-aller pour petits-bourgeois en mal de vivre, je com- mençais à considérer les choses sous un autre angle, et à rêver moi aussi de me retrouver sur la scène…

James se déplaça d’un pas de côté et s’assit sur l’un des fauteuils en skaï, tout près de la scène. Se mit à jouir avec la dizaine de convives du spectacle de la souffrance. A la différence que, là où les autres personnes présentes eussent rêvées d’être à la place du bourreau, lui se voyait à la fois victime et tortionnaire. Sa douce rêverie était bercée par les hurlements baroques de la fille qui venait de remplacer l’homme décédé sous les coups, fille qui comme de bien entendu avait une voix perçante. Une voix qui acheva de plonger James dans le sommeil.

« Le bras élastique qui se tord qui se tord / le bras élastique un fouet à la main / le bras élastique qui fouette mon corps / le bras élastique et je suis suspendu à un crochet de boucher qui me tient la tête en bas et me fait tourner à 360 degrés et le fouet pendu au bras, à ce bras, à mon bras, le fouet m’arrache la peau, mon sang qui jaillit, mon sexe qui se tend, mon sang qui s’écoule, mon sexe qui pulse impatient, mon sang qui est une mer infinie et rouge, et je jouis d’un orgasme salvateur et suicidaire alors que le fouet tombe à terre et que le bras / mon bras tente de s’introduire dans ma bouche pour saisir mon cœur / mes poumons / mes intestins et les tirer hors de moi / oh quelle douleur, quel plaisir, quelle chaleur en moi »

Le rêve était éloquent : j’étais prêt à devenir l’un des leurs. Mentalement du moins. Je voulais souffrir et faire souffrir. Je vou- lais la clé de la jouissance ultime. Lorsque que je me réveillai, mon pantalon était taché au niveau de l’entrejambe. Jamais en- core je n’avais eu autant de plaisir. Mais alors que je regardais autour de moi, je me rendis compte que je n’étais plus dans là salle poisseuse où le sursaut du sommeil m’avait pris.

Int Jour - Une chambre luxueuse d’un château princier. Allongé sur le lit, James Bergson. En face de lui, assis sur une chaise, le toisant d’un regard à la fois admiratif et haineux, Donovan Morow.

« Comment se fait-il… Qu’est-ce donc qu’ils trouvent chez vous que je n’ai pas ? » Encore groggy, James avait du mal à saisir ce que Morow laissait filer entre ses dents. Soudain, il se leva, et lui tournant le dos, commença à élever la voix.

« Cela fait des années que je les sers sans relâche, que j’organise orgie sur orgie sur orgie sur orgie en leur honneur, des années que des litres de sang pur furent versés grâce à moi pour eux. Mais jamais ils ne m’ont proposé cet ultime récompense qu’ils se proposent de vous accorder ! »

40 Donovan Morow se retourna énergiquement et se rua sur James, le saisissant à la gorge.

« Qu’est-ce qu’il y a en vous de si précieux ? Qu’est-ce qui les fait croire que vous pourriez être leur égal, qu’est-ce qui les em- pêche de penser que moi j’en serais digne ? »

Il était au bord de l’apoplexie. James lui demanda calmement : « Comment êtes-vous au courant ? - Mais que croyez-vous donc, que vous êtes le seul à qui ils apparaissent ? Sauf que vous ne les avez vu qu’en rêve !Moi je les ai vu de mes yeux ! Je les ai appelé et ils ont répondu à mon appel ! Oh quelle joie ç’a été pour moi d’enfin contempler ces dieux, ces démons, peu importe, d’enfin me sentir comblé ! Mais quelle déception quand ils m’apprirent qu’ils ne me voulaient ni comme un des leurs ni comme l’un de leur « pensionnaires ». J’étais investi d’une mission autrement plus importante, entretenir leur culte et convertir un cercle d’initié pour rechercher de nouvelles sources de souffrances… » Mais déjà, je ne l’écoutais plus. A ce moment, je venais juste d’apercevoir, dans une vitrine à l’épreuve des balles, une boîte. La boîte.

« Montrez-la moi… Je veux la toucher.

- Vous allez faire bien plus que la toucher, ricana-t-il mesquinement. Vous allez l’utiliser. Vous allez les rejoindre. Vous ne pou- vez pas savoir à quel point je vous hais pour cela. Pour ce privilège qu’ils ne m’accorderont sans doute jamais. Mais soit. A une condition toutefois. Lorsque l’heure sera venue pour moi, je voudrais que vous intercédiez avec eux afin qu’ils m’accueillent, ne serait-ce que comme spectateur passif. La souffrance des autres est ma source de plaisir ultime et je sais qu’à leur côté je me sentirai enfin exister pleinement. »

Terminant son monologue, Donovan avait retiré avec force précaution l’étrange objet de son socle et le tendit à James.

Je me rappelle encore le moindre frisson qui me parcourut alors que je la tenais dans le creux de mes mains. La boîte de Pan- dore était entre mes mains. Je ne sais combien de temps je restai à la fixer, fasciné, hypnotisé. L’ignoble Donovan s’en était al- lé. Et finalement…

Int nuit : James au centre de la pièce. Le mécanisme entre ses mains se déstructure, se restructure. Les murs s’effondrent sans fracas. Des portes s’ouvrent sur le néant. James se voit entouré petit à petit par une assemblée. Les Cénobites. Tous réunis au- tour de lui. Comme pour une antique cérémonie païenne. James n’ose bouger. « La boite… Tu as ouvert la boite. Nous voilà. »

Une ombre majestueuse s’avançait vers lui, découvrant dans un halo de lumière une face blanche bardée d’épingles et des ma- nières aristocratiques. Le prince d’une autre dimension que James n’allait pas tarder à rejoindre.

« T u as trouvé le puzzle. »

James se reprit et annonça d’une voix forte.

« J’ai répondu à votre appel. »

Pinhead esquissa un sourire. Tout du moins, ce que James interpréta comme un sourire. « Les ténèbres en toi dévorent ton âme, James Bergson. Les ténèbres en toi ont un incroyable pouvoir ; ta souffrance est un ca- lice pur au sang duquel nous allons nous abreuver. Car parmi nous, James, parmi nous tu vas enfin trouver la place dont tu es digne. Et tu goûteras à la saveur de nos jouissances. »

Autour de James, les cénobites avaient disparu. Il était enveloppé d’un halo de ténèbres, et la face de Pinhead s’éloignait. « Bienvenu, James Bergson, bienvenue.. »

41 Je n’ai plus la notion du temps. Je me suis enfin abandonné aux ténèbres qui me rongeaient. Je ne suis plus qu’un réceptacle de douleur. De douleur. Et de plaisir…

Epilogue

Donovan venait d’ouvrir la boîte de Pandore pour la dernière fois. Enfin, ce qu’il avait réclamé lui était accordé. Il venait de faire son entrée dans le monde de la souffrance orgasmique. Au paroxysme de la douleur, tiraillé dans sa chair et dans son âme par des instruments de tortures inhumains, il ne pouvait détacher son regard du cénobite qui lui faisait face. Son corps était à vif, celui d’un écorché. Ses mains et ses pieds étaient traversés de longs clous rouillés. Ses bras étaient comme ses jambes perforés de structures métalliques. Son sexe semblait avoir été arraché par une mâchoire inhumaine. Son torse était ouvert de l’aine au sommet de la poitrine et laissait voir des organes suintants et purulents. Comme si son corps était dévoré de l’intérieur depuis une éternité par un parasite. Sa colonne vertébrale était scindée en deux par une grande lame d’acier. Chaque pas lui coûtait une once de souffrance qu’il appréciait en passant sa langue sur des lèvres charnues. Car son visage était resté le même que celui de son existence humaine. Son visage était celui de James Bergson.

FIN

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RETROUVEZ PINHEAD ET SA HORDE DE CENOBITES DANS LE ROMAN DE CLIVE BARKER QUI A INSPIRE LE PREMIER FILM DE LA SAGA HELLRAISER !

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42 LES DOSSIERS DE CINE HORREUR

LAURENT MELKI, DESSINATEUR CULTE

Melki.

Laurent Melki.

Un nom aussi connu des passionnés de cinéma fantastique et de vidéos cassettes que celui de Dario Argento, son ré- alisateur préféré.

Rappelez-vous, l'année 82 : Paris, une affiche haute en couleur illumine les murs de la capitale. " Creepshow " fait son show et le visuel est encore présent dans tous les esprits.

Dans les vidéos clubs, de splendides jaquettes horrifiques viennent orner les rayons des étagères. " 2000 Maniacs ",

43 "La Baie Sanglante ", " Week-end Sauvage ", " Parasite ", " Pyromaniac ", "Mais qu'avez-vous fait à Solange " et bien d'autres encore. Des jaquettes au design flamboyant, qui nous faisait rêver et qui parfois s'avéraient bien meil- leures que le film lui-même.

Tous ces dessins, ces affiches étaient réalisés par la même personne : Laurent Melki.

Aujourd'hui, Laurent ne dessine plus d'affiches de films d'horreurs. La passion pour ce genre ne l'a pas quitté mais il ne trouve plus son compte dans la pro- duction actuelle. Il s'est orienté vers une autre forme d'affiche, celle des specta- cles. Spectacles de cirque, spectacles d'artistes. Un autre monde féerique s'ou- vre à lui. Car comme il le dit lui-même, « de l’épouvante au clown blanc, il n'y a qu'un trait ».

Pour ce dossier, plutôt que de raconter la vie de Laurent, il nous a semblé beau- coup plus intéressant de faire parler l’intéressé lui-même. Et il en a des choses à dire…

NDR : Aux toutes dernières nouvelles, une société a contacté Laurent pour qu’il reprenne ses activités concernant le cinéma d’horreur !!!!

* Bonjour Laurent et merci d'avoir répondu à nos questions. Pour la première, peux-tu nous présenter le parcours que tu as suivi afin de devenir illustrateur ? (école de dessins ou autres…)

Tout d'abord, je tenais à te féliciter pour la pertinence de tes questions. J'ai ré- pondu à pas mal d'interviews "bateaux" mais là, tu tapes dans le mille, ce qui me pousse à croire que tu as bien étudié - et que tu apprécies" - ton "sujet" !

Mon parcours : tu pourras en avoir un aperçu sur mon site : http://www.melki. org , mais, pour être plus précis, je dessinais depuis toujours sur mes cahiers de cours, de la maternelle à la terminale. Au début, j'étais un passionné de BD. J'en ai donc adopté le style : dessins à la plume et encre de chine tout d'abord, à la "Gotlib", à la "Franquin"; j'allais à toutes les conventions sur la bande dessi- née : à la Mutualité, même à Angoulème.

J'ai un gros défaut, lorsque j'apprécie le travail de quelqu'un, que ce soit un il- lustrateur ou un acteur, je suis vraiment "fan", et je fais tout mon possible, par mon travail, pour le rejoindre, et le rencontrer à un moment. J'ai donc pris le train pour Angoulème, en 1975, pour aller rencontrer mes idoles de l'époque : Fred, Franquin, Gotlib, et Loro (déjà un style de dessins vampiriques), et leur montrer mes petits Mickeys, et avoir leur avis - et avoir surtout des dessins dé- dicacés - véritable trésor de guerre, dont je tapissais ma chambre. Bien vite, mes dessins se sont obscurcis, les yeux se sont injectés, les dents ont poussé et les plaques tombales ont commencé à grincer. Je tombais dans le côté obscur de la Force ! 44 J'ai encore aujourd'hui un flipper "King Rock" (de la marque Gotlib !) que j'ai entièrement customisé en cercueil, avec fleurs de Lys, poignées et tentures rou- ges. Mes parents, pour me calmer, m'inscrivirent aux cours du Louvre, pour ses cro- quis de nus - j'ai du apprendre à me servir d'autres outils : fusains, gouache, bref, j'avais le béret et la barbe du peintre qui poussait, pas trop mon style ! Ensuite, vinrent les quatre années d'ESAG, après le Bac, où nous apprenions les bases de la composition, de la chromatologie, des axes de communication, mais toujours le fusain, et les croquis de nu !

Je passais mon temps à leur rendre des dessins morbides ou ultra violents, des chats aux yeux rouges, des flics américains à tête de zombies (qui préfiguraient déjà le "maniac cop" !!), ce qui m'a occasionné un passage devant le directeur, pour "non conformité à l'éthique de l'école"!

A la thèse de fin d'année, j'ai présenté " la baie sanglante ", en affiche cinéma 120*160, aboutissement d'une collaboration parallèle avec "Hollywood Vidéo", premier éditeur de cassettes vidéos des années 80, pour lequel j'ai réalisé le pre- mier volet de ma carrière, volet que je ne fermerais jamais, et pour lequel j'ai eu beaucoup de rencontres, de joies, d'émotions, dans le foisonnement de folie fan- tastique de ces années là : je réalisais mon rêve ! Dessiner des affiches origina- les de films d'épouvante qui m'avaient fait rêver - ou plutôt cauchemarder !

* Si tu devais définir ton style ?

Je dirais "hyper réaliste allégorique, à tendance maniaco-artistique, commercia- lement incorrect..." mais je me soigne !

* Y’a t’il d’autres illustrateurs que tu vénères, qui t’ont inspiré ?

Le mot "vénère" est presque faible lorsque j'évoque la perfection du trait, la patte de légende d'un certain Casaro (Rambo, pleins de sous-Rambo, de Gialli italiens...), et Mascii, l'orfèvre en matière de ressemblance, d'impact, le "patron" des illustrateurs des années 70-80 avec les productions "Canon", sans oublier les artistes créatifs, inventeurs de mondes qui n'appartiennent qu'à eux : Boris Vallejo, Frazetta (le père de l'Héroïc Fantasy), et, bien sûr, notre Druillet natio- nal au graphisme hyper chargé et flamboyant.

* Pourquoi te spécialiser dans la création d’affiche ?

J'ai vite compris que la bande dessinée n'était pas pour moi : dessiner mille fois le même personnage dans autant de cases exiguës, que d'aucun ne découvrira, faute d'acheter l'album.

Tout l'inverse de l'affiche : un seul dessin, le plus travaillé possible, l'aboutisse- ment d'une idée, poussée à la perfection, fait pour accrocher l'oeil, pour inter- peller, que l'on le veuille ou non, l'affiche s'impose - si elle est réussie, on s'en rappellera. 45 Une bonne affiche doit synthétiser en un coup d'oeil l'essence même du film ou du spectacle, et les fixer à jamais dans notre inconscient collectif… pas une mince affaire !

L'affiche amène, par sa facture même - illustration, composition - une deuxième notion artistique, qui peut renforcer la valeur de l'oeuvre qu'elle défend. C'est une "valeur ajoutée", une oeuvre d'art à part entière; elle doit être la vision d'un artiste sur le travail d'un autre artiste.

* Dans les années 80, tu es devenu l’illustrateur culte des fans de films d’hor- reurs, notamment grâce à la magnifique affiche de Creepshow, mais également de nombreuses jaquettes de Vhs qui nous faisait rêver (elles le font toujours !) dans les vidéos clubs. Le cinéma fantastique et toi, c’est une histoire d’amour ou juste une opportunité qu’on t’a donné ?

Je te remercie de tant d'éloges, mais c'est la preuve que si l'on insuffle la pas- sion que l'on a en nous, sincèrement, et que l'on va jusqu'au bout, dans la réali- sation de son art, dans le seul but de donner du plaisir - et du désir - à ceux qui la verront, alors cette passion sera partagée, et l'oeuvre appréciée.

Je crois que le maître mot ici est bien "sincérité". Un illustrateur qui ne "sent" pas son sujet, n'y adhère pas, et réalisera peut-être une affiche correcte, mais qui ne touchera pas en profondeur les amateurs pour qui elle est destinée, et ne res- tera qu'un "support".

Tu as bien compris que c'est la passion du cinéma fantastique et du dessin qui m'a amené à choisir ce métier.

* Quels sont les affiches de films d’horreurs dont tu es le plus fier ?

A l'époque, et encore aujourd'hui, l'émotion que j'ai éprouvé de voir ma pre- mière affiche en 4m par 3 sur les murs de Paris ne s'effacera pas : il s'agissait bien sûr de " creepshow ", mon premier film cinéma à budget, à casting, et d'au- teur(s) : Stephen King, George Romero, avec, je dois dire un succès immédiat de l'affiche, suite certainement à l'énorme battage publicitaire de l'époque, et un style plutôt nouveau : le horror-movie-cartoon.

Style que l'on retrouvera plus tard avec " freddy 3 et " le cauchemar de fred- dy ". Je me rappelle, dans une moindre mesure, être resté en arrêt, de longues minu- tes, devant l'affiche du Festival du Film Fantastique du Grand Rex, que j'avais enfin réalisé, après y être allé une bonne dizaine d'année durant, voir trois films d'horreur de suite. Une époque fabuleuse.

* A partir de quels éléments réalisais-tu ces affiches ? Affiche américaine, pho- tos, ta propre vision ?

46 C'est très variable. Quand on a de la chance, la version "3 étoiles" du métier pourrait être : salle de projection privée, photos du film, brief de la production. La version favelas : même pas une cassette vidéo, une seule photocopie noir et blanc d'une photo de plateau floue, et un résumé écrit en taïwanais.

Le résultat doit être le même : donner l'impression qu'il s'agit d'un chef d'oeu- vre, et ne jamais être en deçà du film (pour certains, ça aurait été difficile ! Ri- res...)

Lorsqu'on me fait confiance - c'est comme les spectacles aujourd'hui, Laurent Gerra, le Cirque Bouglione ou les films de Belmondo -je peux exprimer ma propre vision du film, y apporter mon univers. C'était le cas de tous les films vidéos des éditeurs indépendants, pour lesquels j'ai développé le style d'illustra- tions fantastiques que tu connais, et que je concevais comme des tableaux.

* Question bête mais pas tellement au vu de certaines jaquettes de films (pas les tiennes) : regardais-tu le film sur lequel tu devais travailler ? t’inspirait-il pour la réalisation de l’affiche, son ambiance ?

Évidemment, voir le film est le carburant de l'imagination - quand il est bon, ça te donne des ailes, et il faut être du niveau - mais quand le film est nul, il n'y a plus qu'à imaginer le même film tourné par Dario Argento, y mettre ses cou- leurs, sa folie, et transformer le navet en citrouille géante.

Inventer un slogan accrocheur : "suppliez le pour qu'il vous tue d'abord", puis un bon titre " pyromaniac " ! Un film que j'ai eu l'impression de faire tout seul ! Mais un bon résultat... En fait, imaginer le film idéal que l'on aimerait voir, et en réaliser l'affiche qui nous donnerait l'envie d'y aller. Ça, c'est du Fantasti- que !

* Quelle place tient l’affiche par rapport au film lui-même pour toi ?

L'affiche doit être aussi artistique que le film. C'est un spectacle parallèle, une bande annonce en une image, elle doit impérativement transcender le film, le rendre incontournable.

J'ai un rapport très charnel à l'affiche : lorsque j'avais une quinzaine d'année, les affiches racontaient ce qu'on allait voir, ou donnaient une vision magnifiée de ce qui se cachait derrière. Elles étaient narratives, colorées, exultantes, et elles reflétaient en plus du film, la vision de leur créateurs, voir la fabuleuse affiche d'Inferno de Dario Argento.

Malheureusement, je trouve qu'avec les studios de création, les "créateurs" ne créent que du "photoshop", des montages photos, et sont, semble t'il, beaucoup plus timorés, ou n'ont plus la latitude et la liberté de délirer.

Le cinéma est une telle industrie que c'est devenu avant tout une affaire de sous, où l'on ne prend plus le moindre risque, et où tout est pasteurisé, pour ratisser le 47 plus large, où beaucoup d'affiches se ressemblent, ne racontent plus rien, res- semblent de plus en plus à la une des magazines, et ne prennent en fait qu'un seul risque : celui de lasser. Certains distributeurs et producteurs recommencent à se rendre compte qu'une bonne affiche doit se démarquer des autres, avoir énormément d'impact, et atti- rer les spectateurs.

* Si je te dis que pour certaines VHS que tu as illustré, ton affiche est meilleure que le film, ça te fait plaisir ?? (Rires)

Et comment ! C'est mon but, donner la meilleure image d'une oeuvre - aussi ra- tée soit-elle !

Cela m'a d'ailleurs desservi à une époque, avec Scherzo Vidéo, les gens repé- raient facilement mon style, et se doutaient - à tort ou à raison - qu'ils ne trouve- raient pas forcément la même qualité, la même vision dans la boite !

* Pourquoi ne pas avoir mis plus d’affiche de films d’horreurs sur ton site ? Il n’y a même pas Creepshow, juste Freddy 4 ! tu veux mettre cette partie de ta carrière de côté ??

Bien sûr que non… Un site doit être le reflet de ce que tu fais au moment "T". Internet, c'est l'information à la minute. Il n'y a pas de place pour le passé. J'ai fait ce site pour présenter le Laurent Melki d'aujourd'hui. La demande a changé et l'on risquerait de ne me cataloguer que dans ce style là. Ceci dit, devant les multiples sollicitations que je reçois, il faut bien que je me rende compte qu'une génération d'amateurs de fantastique m'a considéré comme le représentant de cette période.

Je te promets de créer une sorte "d'alcove", où je présenterai une grande partie de mes affiches d'épouvante ! (chose faite depuis peu, avec l'ajout de la rubrique "culte" ! Merci Laurent !! NDR)

* Connais-tu approximativement le nombre d’affiches que tu as réalisé au cours de ta carrière ?

A une période, avec l'explosion de la vidéo et de ses petites productions de films de série B, qui sortaient fièrement dans le commerce et entamaient une nouvelle vie en vidéo après le cinéma ("2000 maniacs", "soeurs de sang", "trauma", "frissons", "le venin de la peur"...), je travaillais sous perfusion. Cela pouvait aller jusqu'à 4 affiches par mois, le public répondait présent, car il pou- vait enfin assouvir sa soif d'interdit, car ces films, pour la plupart, étaient inter- dits en salle aux moins de 18 ans, n'étaient pas tous distribués au cinéma, et ne passaient jamais à la télévision. D'ailleurs, un éditeur vidéo (René Château -

48 NDR), avait choisi comme slogan : les films que vous ne verrez jamais à la té- lévision !". Pour l'anecdote, je me souviens, à la sortie en salle de ce qui, pour moi, repré- sente le vrai film d'épouvante : "Suspiria", de Dario Argento, être allé le revoir et avoir filmé en super-huit (!!) la scène des ressorts, et celle des yeux verts - la qualité était immonde mais j'avais réussi à avoir le film chez moi, bien avant la démocratisation de la vidéo ! Pour répondre à ta question, j'ai bien dû faire deux cents affiches d'épouvante !

* Combien de temps prend la réalisation d’une affiche ? Avec quels matériels travailles-tu ? (pinceau, aérographe…)

Pour une affiche de jaquette vidéo ou de cinéma, il faut le temps de visionner le film, faire des esquisses, choisir la meilleur, dessiner le projet au crayonné, puis effectuer la mise en couleur. Ce processus peut mettre d'une semaine à un mois. Ma technique est simple : crayonné au crayon sec, puis gouache en aquarelle au petit pinceau, en couches successives, puis aérographe pour les fonds, et pour soutenir les couleurs.

* L’orientation de ta carrière a changé avec les ans, où tu sembles plus te consacrer à illustrer "des personnes", des acteurs, les rendant le plus réaliste possible. Pourquoi ce changement ?

Excellente question ! Il faut bien dire que l'âge d'or du fantastique (productions indépendantes, festi- vals (Avoriaz, Grand Rex), magazines, films sortis en salle pour un public de connaisseur, véritables réalisateurs passionnés et filmant avec les tripes plutôt qu'avec 15 directeurs de productions et essors de la vidéo) est, hélas, derrière nous. Les films fantastiques actuels ne sont plus des films d'artistes mais des com- mandes de studios, qui ne bousculent plus les codes du genre... bien au contraire, les cantonne à des films pour teenagers américains décérébrés, allant au ciné le samedi soir pour renverser Cindy sur les fauteuils, derrière un bol de pop-corn XXL.

L'horreur est aseptisé, le fantastique s'est fast-foodisé et le vrai sang des vampi- res de la Hammer, des templiers morts vivants, détecteurs de battements de coeur, ou giclant de l'imaginaire visionnaire d'un Dario Argento ou d'un Lucio Fulci, s'est transformé en ketchup.

Moins de films, un style qui s'essouffle, un public lassé, trop "daubérisé", j'ai dû changer mon pinceau d'épaule, et ai pris d'assaut la presse des magazines, tout d'abord en réalisant des couvertures pour l'Express, Le Point, Vsd, (Mad Mo- vies, Impact, toxic également ! NDR) avec quelques incartades dans le charme et les pin-ups : couverture de Lui avec Danièle Gilbert, Anne Sinclair ou Va- nessa Paradis, mais aussi Les Folies Bergère, les Hot D'or.

Que l'on dessine Freddy ou Bernard tapie, la méthode est la même : c'est la 49 quête de la ressemblance. C'est ce qui m'a toujours fasciné : aller plus loin que la photo, l'hyper réalisme, le trompe l'oeil. A force de dessiner des stars télés, des acteurs, des chanteurs, je me suis spécia- lisé dans les portraits de stars, pour pouvoir accéder aux affiches de films à cas- ting, et aux affiches de spectacles.

Mis en confiance, ceux qui me confiaient des affiches de films fantastiques m'ont confié des films de renom comme "La Piscine" avec Delon, puis "Le Pro- fessionnel", "Le Solitaire", et d'autres films de Belmondo.

* J’ai lu que tu vénères Belmondo et Delon. tu les as rencontré pour la réalisa- tion des affiches de Fil à Film ? Comment ont-ils apprécié ton travail ?

Comme je te l'ai dit, étant maxi fan de Jean-Paul Belmondo, j'ai eu l'occasion, en réalisant tous ses films récents pour Fil à Film, de le rencontrer. Je lui ai présenté, au théâtre Marigny, l'affiche du "Solitaire" et celle du "Professionnel".

Il était fidèle à lui-même, écharpe blanche, costume clair, sourire à la bouton- nière, entouré, tel le Roi Soleil, d'une vingtaine de sujets. Il a adoré, et m'a confirmé son goût pour l'illustration et la mise en scène graphique, magnifiant le personnage.

Tout l'inverse de Delon.

Même écharpe blanche, sourire aux oubliettes, yeux Python 357 (nuance de bleu), m'annonçant lors d'une interview qu'il donnait au festival du film Policier de Cognac, dont j'avais fait l'affiche, alors que je lui demandais pourquoi il n'avait, à l'instar de Bebel, jamais fait appel à un illustrateur pour sa série de "pourri de flic dans la peau d'un flic qui dort" : "je fais tout moi-même, je pro- duis, je joue, je choisis moi-même la photo et je fais l'affiche". Don't Acte !

Mais lorsque plus tard, je lui ai montré l'original de "la piscine", il était très ému de voir Romy Schneider et m'a simplement gratifié d'un "mille merci".

La rencontre avec des gens d'exception ne peut que te faire évoluer. C'est un des cadeaux de ce métier.

* Quelle affiche de film ou de spectacle rêverais-tu d’illustrer ?

Faire l'affiche du prochain Bruce Willis, un petit Spielberg, la Reine Margot 2 le retour, Rambo 4, de la prochaine comédie musicale qui cartonnera pendant 10 ans, et beaucoup d'affiches de spectacle.

Évidemment, si Dario Argento lit ces lignes, il peut être sûr que je lui ferais un

50 chef d'oeuvre digne de sa folie visuelle !

* Sur quels projets travailles-tu en ce moment ?

Je viens de terminer la nouvelle affiche du Cirque d'hiver Bouglione, pour la troisième année consécutive.

Tu vois, la magie de ce métier, c'est de faire rêver.

De l’épouvante au clown blanc, finalement, il n'y a qu'un trait…

* Que peut-on te souhaiter pour l’avenir ?

D'aller comme je l'ai toujours fait, où mes envies me portent, essayer de redon- ner à l'affiche illustrée la place qu'elle mérite, en offrant une alternative aux af- fiches-marketing qui banalisent notre imaginaire... et pourquoi pas, que la mode des films d'horreurs revienne, avec son cortège d'abominations, pour que je re- prenne mes mauvaises habitudes !!

* La classique pour la dernière : si tu as eu le temps de surfer un peu notre site, qu’en penses-tu ?

Raaaahhh !! Ca donne envie d'aller au ciné se faire une toile bien rouge... C'est hyper complet, très visuel, pleins de photos, super logo, j'ai aimé les avis des internautes ! Il y a des fidèles…

Un autre truc que j'ai adoré, c'est la section "musique de films". C'est très rare et pourtant, la musique d'épouvante tient une place prépondérante dans l'univers et le succès d'un film... Elle crée le climat autant que les images. A quand une interview ou un dossier sur "les Goblin", géniaux compositeurs de la musique de Suspiria, ou d'Emerson, avec son opéra baroque dans Inferno et Frizzi avec la musique martelante de "frayeurs".

J'avais d'ailleurs, pour le dernier festival du Grand Rex, composé la musique diffusée à l'entracte, sévérement pompée sur Frayeurs - le public défonçait les fauteuils en suivant la batterie !!

Comme tu l'as compris, je suis aussi fou de musique de films...mais...je ne vais pas te raconter ma vie !!

Voilà Stéphane, mon feutre donne des signes de faiblesses (Laurent m'a envoyé cette interview par écrit, soit 9 pages de textes !! NDR). J'espère que tu t'en sor- tiras à retaper tout ça ! Encore merci de ton intérêt et de ta fidélité ! Amicalement Laurent Melki !

MERCI A LAURENT POUR LE TEMPS PASSE SUR L’ INTERVIEW ! 51 CINE HORREUR PIN UP : TIFFANY SHEPIS

Tiffany Shepis. Un nom que connaissent bien les Filmographie Sélective fans de cinéma indépendant, de films à faible budget, 2007 - Dark Reel et les amateurs de jolies filles également ! 2007 - Neowolf Cette Scream Queen, née le 11 septembre 1979, a 2006 - The Queen of Screams déjà une carrière bien remplie et une filmographie 2006 - Dorm of the Dead impressionnante, même si la plupart de ses films sont inédits par chez nous. 2006 - Pretty Cool 2 2006 - Man versus Woman Ayant eu l'opportunité de l'interviewer, Horreur.com 2006 - Nightmare Man vous propose donc une rencontre avec Tiffany She- pis, plantureuse créature qui ne mâche pas ses mots 2006 - Abominable mais qui s'avère extrêmement sympathique ! 2006 - Revenge Live

2006 - Hoodoo for Voodoo * Bonjour Tiffany. Vous avez débuté votre carrière dans " Tromeo et Juliet " de la Troma, comment avez- 2005 - The Basement vous eu cette opportunité ? 2005 - Boobies

2005 - Sludge J’ai grandi en étant une ENORME fan de Troma. Donc quand j’ai vu le casting pour un rôle dans 2004 - Corpses leur nouveau film " Troméo & Juliet " j’ai su que ma place était là-bas. Je m’y suis rendue, je suis tombée amoureuse de Troma et le reste fait partie de l’histoire. 2004 - The Deviants

2004 - Devils Moon * Comment considérez-vous Lloyd et sa firme ? Vous avez joué dans plusieurs films de la Troma, et ce n'est pas vraiment le meilleur moyen de se faire connaître du plus grand nombre. Vous êtes 2004 - The Hazing une fan du cinéma indépendant ? 2004 - Home Sick

Je suis fan de cinéma indépendant, pas tant pour l’aspect pécunier, mais plutôt pour l’aspect cru 2003 - Detour dans lequel les choses y sont faites. De plus sans un studio sur le dos, ils ont plus de chance d’arri- ver à exprimer ce qu’il veulent vraiment. Faire des conneries aussi sanglantes que l’on veut, aussi 2003 - The Ghoul tarées que l’on veut… ou aussi chiantes que l’on veut, cela sans jamais voir la bobine du responsa- 2003 - Delta Delta Die ble du studio débarquer pour exiger certains plans. Le hic c’est que ça risque d’être plus dur de vendre le résultat. 2003 - Bloody Murder 2

* Y a-t-il une raison particulière qui vous a poussé à devenir actrice ou est-ce juste un coup du ha- 2002 - Vinyl Dolls sard ? 2002 - Embrace the darkness 3

C’est vraiment venu de nulle part. Je n’ai jamais eu cette passion malsaine. J’aimais juste le ciné- 2002 - Ted Bundy ma et j’ADORAIS les films d’horreur, donc je me suis dit… qu’est-ce que je peux faire d’autre de toute façon ? 2002 - Death Factory 2002 - Scarecrow * Comment vous décririez-vous à quelqu'un qui n'a jamais vu vos films ? 2001 - Pretty Cool Heuuuuu, je fais majoritairement des films d’horreurs assez moyens et j’ADORE mon travail ! 2000 - Citizen Toxie

* Est-ce que vous admirez quelqu'un dans cette industrie, quelqu'un que vous avez imité pour de- 2000 - Emmanuelle 2000 venir ce que vous êtes ? 1999 - Some Fish can Fly Aaahhh, je ne crois pas qu’imiter soit une bonne chose, cependant je pense que Brinke (Brinke 1998 - Shampoo Horns Stevens, ndr) fut d’une grande influence sur ma carrière. Je veux dire, regardez-la, elle a fait quel- 1997 - The Tromaville Café que chose comme 300 films, et travaille toujours… je ne peux pas vraiment en dire autant à propos de beaucoup de monde à Hollywood ! 1996 - Troméo et Juliet

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* Quel est votre film favori ?

Aucune idée. Un peu du genre de "Dark Remains", qui botte bien le cul. C’est pas encore sor- ti, mais ça vaut le coup de le voir à sa sortie.

* Celui que vous détestez le plus ?

Ce film idiot avec Lindsey Lohan où elle perd sa bonne fortune. Putain, j’ai dû me le farcir dans un avion. Bon Dieu, qui est res- ponsable de cette MERDE!??!!

* Comment décririez-vous le rôle des femmes dans les films d'horreurs ?

Le rôle de la femme dans les films d’horreur a vraiment changé au travers des années. Je veux dire, avant c’était la nana qui pleure dans les bras des héros ou celle qui se met toute nue et crève. Maintenant, sans dire que ça a complètement changé, il semble qu’il y ait vraiment plus de femmes fortes dans les films. Vous savez, où la nana botte des culs au lieu d’attendre qu’un mec se bouge pour le faire à sa place !

* A votre avis, ce genre de film ne dégrade-t-il pas les femmes en les rendant constamment victimes ?

Non. Si je pensais ça, je ferais mieux de changer de carrière.

* Vous êtes une Sream Queen. A votre avis, quelles sont les principales qualités qu'une scream queen doit posséder, mis à part un physique avantageux ?

Ce truc de "Scream Queen" est loin d’être aussi aisé que ce qu’on pense. Faire des films en général, c’est DUR, essayer de faire un micro budget sous une chaleur à crever au milieu du désert, couverte de sirop de maïs, et se faire attaquer par les insectes… et en plus la paye est proche du minima. Il vaut mieux être patient et vraiment, vraiment aimer ce qu’on fait. Vaut mieux aussi être assez forte, j’vous l’dis, car les flingues et toutes les MERDES qui vont avec les films d’horreurs sont LOIN d’ETRE LE- GER… et puis, je pense qu’il va sans dire qu’il vaut mieux savoir crier. C’est un job ardu.

53 * Quelles sortes de relations entretenez-vous avec vos fans ? Votre blog est vraiment excellent car vous sem- blez prendre le temps de répondre à vos fans. Est-ce important pour vous ?

Très important pour moi ! Les fans sont ma seule rai- son d’être.

* Dans " Death Factory ", votre beauté en prend un sé- rieux coup avec ce maquillage de monstre. Est-ce la première fois où vous avez été choisie pour un rôle qui n'utilisait pas que vos charmes ?

Je leur ai demandé si je pouvais jouer le monstre. Et, qu’est-ce que vous entendez par là, je trouve que mon monstre était plutôt sexy ! lol

* Y a-t-il un rôle particulier que vous aimeriez jouer ? Un genre de film que vous aimeriez tester ? Une comé- die musicale, un drame ou autre...?

J’aime jouer d’une façon générale, donc quelque soit le job qui se présente à moi, quelque en soit le genre, je le ferai. Cependant ma passion est l’horreur. J’espère jouer un Vampire bientôt, je n’arrive pas à croire que personne ne m’a encore proposé un rôle de vampire jusqu'à maintenant !

* Quelle est votre définition d'un bon film d'horreur ?

Sang/Nichons/ et Tiffany Shepis… haha mais en géné- ral le sang et les seins vont de paires avec. Haha.

* A votre avis, est-ce que le cinéma d'horreur - voir même le cinéma en général - peut tout montrer à son public ? Y a-t-il des limites qu'il ne doit pas franchir par rapport au jeune public ?

Je ne pense pas qu’il en reste. Putain, regarde des trucs comme " The devils rejects " ou "Hostel " ! Je veux dire, des gamins de 13 ans vont voir ces trucs. L’audience a été dé- sensibilisée. Dingue… que ça ait pris autant de temps pour arriver.

* Quels sont vos projets pour le futur ? Un nouveau film ? Des envies de réaliser peut- être ?

Je viens juste de finir le tournage de " NyMpha " en Italie. Je joue une femme qui viens des USA pour entrer dans les ordres en tant que nonne dans un couvent de fous. Les chose n’y sont pas du tout catholiques… des trucs déments s’y déroulent. Je vais aussi commencer à travailler dans quelques semaines sur "Dark Reel " dans lequel je joue avec Lance Henricksen, Ed Furlong, et Tony Todd. Un projet vraiment excitant...

* Un mot pour vos fans français ?

Ouais, quand est-ce que l’un d’entre vous va m’écrire un rôle et me ramener en France du même coup! J’ai pas mis les pieds en France en 5 ans… C’est VRAIMENT trop long. Et assurez vous d’aller sur http://www.tiffany-shepis.com Vous déchirez les mecs ! Tiffany !

MERCI A TIFFANY SHEPIS POUR SA BONNE HUMEUR ! Interview : Stéphane Erbisti et Colin Vettier / Traduction : Colin Vettier

54 FUTURES SORTIES

HOSTEL 2

Eli Roth continue le tournage de la séquelle de son film culte Hostel, remplaçant cette fois les garçons en vadrouille par des jeunes filles étudiantes en art, qui décident de partir en week-end ensemble. Elles croisent en chemin un mannequin qui les invite à venir en République Tchèque pour se divertir. Le résultat ne sera pas celui espéré…

Les fans de cinéma Bis retrouveront avec grand plaisir l’actrice culte Edwige Fenech, ainsi que le réalisateur Ruggero « Cannibal Holocaust » Deodato. Jay Hernandez, uni- que survivant du premier film, sera également de la partie !

Eli Roth nous promet un film encore plus violent et malsain que le premier volet, qui devrait nous en apprendre plus sur cette secte de tueurs…

Hostel 2 est toujours produit par Quentin Tarantino…

LA COLLINE A DES YEUX 2

Fort du succès du film d’Alexandre Aja, le producteur Wes Craven et son fils se sont mis en charge d’écrire le scénario de la séquelle, qui devrait être réalisée par Martin Weisz.

Le film nous contera l’histoire de soldats de la garde nationale s’approchant un peu trop de la mine des mutants…

Le teaser donne bien envie en tout cas : http://www.foxatomic.com/#PAGE_101:movie=/cols/cols_1800_1_hhe2clip. flv&movie_id=1801

Sortie aux Usa au printemps 2007

BLOODRAYNE 2

Personnellement, "bloodrayne" fut une très bonne surprise, venant de la part d'un réalisateur si décrié qu'Uwe Boll. Bien gore, fun, cette adaptation d'un jeu vidéo à succès méritait bien une suite !

C'est désormais chose acquise, puisque Uwe Boll vient d'annoncer la mise en chantier du second volet ! Le tournage devrait débuter le 22 novembre au Canada.

Côté casting, on ne retrouvera pas Kristanna Loken dans le rôle titre. C'est l'actrice Natassia Malthe qui lui succédera.

L'histoire mixera western et horreur, puisque l'action se déroulera dans la ville de Déli- vrance, située dans l'ouest sauvage. Rayne devra lutter contre l'incarnation du mal absolu : Billy the Kid !

55 PRODUITS DERIVES

En moins de 2 ans, Neca en est déjà à la série 5 de sa gamme Cult Classics !! Une vitalité et des qualités qui désignent la firme comme le digne successeur de McFarlane, qui s’est malheureusement assagi depuis un bon moment ; et on ne cessera jamais de le répéter ! Comme d’habitude, on assiste à une belle alter- nance entre grands films cultes et films cultes…à en devenir : Saw et Shaun of the Dead ont ainsi droit aux honneurs ; Shaun débarque en bi pack avec son pote Ed (rappelons qu’un Shaun « Classique » faisait parti de la série précédente), fusil et pelle en main ; et le Jigsaw est décliné en deux versions (tête de cochon ou sans) mais cependant toujours accompagné de la fameuse « Jigsaw Puppet »…qui aura droit à son bobblehead d’ailleurs. Pas du travail de cochon ! silence. Personne n’est parfait !

56 Pour les plus nostalgiques, Leatherface revient en force sans son maquillage de travelo, mais n’apporte pas grand-chose par rapport à la fameuse figurine de McFarlane (issue de l’une des premières séries Movies Maniac), que tout bon fan du boucher masqué possède déjà. Neca rattrape le coup en faisant faire peau neuve au tueur texan avec un box set craspect à souhait adapté de « Massacre à la tron- çonneuse : le commencement », ren- voyant aux figurines les plus gores de McFarlane. La série se conclue sur le Ash de « Army of Darkness » (McFarlane s’en était déjà occupé…qu’importe pour Ne- ca !), avec tête « cartoon » en sus ; et Han- nibal Lecter, enrubanné dans sa camisole et son masque de circonstance...

57 Condamné à de piteuses reproductions vendues pour trois sous sur Ebay, le petit Chucky a bien du soucis à se faire…sauf pour cette année, Neca et Sideshow Toys ayant livrés quasiment au même moment leur version du psycho- pathe en plastique : mauvaise pioche pour Neca, leur Chucky étant pourvu d’un semi coup de girafe, d’une coupe à la Mireille Darc et de bras presque aussi longs que le corps ! Reste l’ajout de la fameuse boîte « good guy » et une version grande taille parlante qui évite de nous faire plonger dans la déprime. Pour l’année prochaine, le fan verra la famille réunie au complet dans un box qui s’an- nonce particulièrement sympa (manque plus que Glen- da…). Sideshow, plus soigné, se lance dans le Chucky quasi-taille réelle : presque 40 cm ! On se demande bien ce qui les a empêché d’aller jusqu’au bout de leur mission (contrairement à la Jigsaw Puppet a eu droit à sa véritable taille). Deux Chucky donc, un « classique » (au visage as- sez manqué : le petit Charles semble avoir trop mangé de brioche !!) et un « cicatrisé » bien meilleur. Pas de chance cependant malgré le soin apporté à l’objet : les accessoires manquent à l’appel (même pas de petit couteau) et celui-ci a choisi de faire vœu de silence. Personne n’est parfait !

Jérémie MARCHETTI

58 TROMA FOREVER

CITIZEN TOXIE (The Toxic Avenger 4)

Réalisateur : Lloyd Kaufman Scénario : Patrick Cassidy, Trent Haaga, Lloyd Kaufman Pays : Etats-Unis Année : 1999 Musique : Wes Nagy Casting : Debbie Rochon, Lisa Terezakis, David Mattey, Heidi Sjursen & Ron Jeremy, Julie Strain Genre : Troma Cult

Un culte de Troma, un chef-d’œuvre du TRES mauvais goût et des blagues sca- to et irrévérencieuses. Le Toxic Avenger est de retour !

A Tromaville, la mafia des couches culottes prend en otage une classe d’handi- capés. Toxie, aidé de son fidèle compagnon, Gras du cul, va tenter de les arrêter. Mais les malfrats déclenchent une bombe qu’ils ne peuvent désamorcer. Afin de sauver l’école de Tromaville, le compagnon de Toxie va donc avaler la bombe alors que le Toxic Avenger s’enfuit avec deux jeunes handicapés. Sous l’effet de l’explosion deux dimensions parallèles vont se croiser et Toxie va être projeté à un Amortville où son alter égo, Noxie, fait régner la terreur avec un Sergent Kabukiman cocaïnoman. Noxie quant à lui va se retrouver dans un Tromaville où tout n’est que gaîté, et va profiter de la réputation de Toxie pour commettre quelques larcins…

Le film s’ouvre sur une prise d’otage d’anthologie où Toxie va éclater un malfrat avec une bible et un extrait du patriot act ! Tout le métrage repose sur des clin d’œil malicieux tant vers d’anciens Troma (apparitions d’acteurs fétiches de la Troma comme Lemmy de MotörHead) que vers d’autres bobines comme "Star wars épisode I" ou même "Citizen Kane", pour ne citer que lui. Le film se regarde donc avec les deux yeux grands ouverts pour tenter de percevoir toutes les références qui le ponctuent. Mais Citizen Toxie ne constitue pas qu’une vitrine des inspirations diverses et variées du réalisateur, c’est un Troma dans toute sa splendeur. Il cumule les scènes très gore (d’ailleurs plutôt bien menées, considérant que c’est un Troma) les vannes pourries (l’apparition de l’homme dauphin et autres super héros complètement débiles) et les propos absurdes mais non dénués d’idées politiques.

Mais le thème reste résolument humoristique. Certaines scènes où l’on découvre la vie du Toxic avenger sont à ce titre, tout bonnement jouissives autant que profondément débiles (Toxie fait le clown avec un plot sur la tête pour amuser sa femme… qui est aveugle !). Le rythme quant à lui, est fort soutenu et l’on ne s’ennui jamais, puisque tout les ingrédients s’y imbriquent parfaitement. Toxic Avenger IV pourrait s’apparenter à une succession de claques dans la figure (ou plutôt de balai-serpillière !) pendant ses quelques 100 minutes.

La musique du métrage est comme à l’habitude, résolument punk-rock et cadence énergiquement Citizen Toxie de gros riff bien gras.

Après 15 ans d’absence des écrans, Toxie nous revient donc avec un métrage purement rock’n’roll et prouve à ceux qui n’y croyaient pas, sa forme phénoménale. Troma était en bonne santé au moment de tourner ce petit bijou et cela s’en ressent. L’énergie que dégage Citizen Toxie est assez impressionnante. Alors, comme toujours chez Troma, ce film va rendre les fans encore plus accros, mais risque aussi de convertir nombre de réfractaires.

Un bon métrage pour s’initier à Troma puisqu’il regroupe tous les ingrédients qui ont fait le succès de la société. Chacun étant largement identifiable (les femmes, le sang et l’humour décadent).

Un culte de plus à leur actif ! COLIN VETTIER

59 Souvenez VOUS ...

Tout comme au cinéma, le monde des jeux vidéos a bien évi- demment connu son premier jeu gore ; pas un jeu de tir d’ail- leurs, contrairement à ce que l’on pourrait croire, mais du pur jeu de combat. Prenons donc notre machine à voyager dans le temps pour se transporter en 1987, où Palace, à peine sorti de « Cauldron » 1 & 2, revient en force sur l’Amstrad CPC avec «Barbarian».

Calqué sur l’univers de « Conan le Barbare » (ainsi, la version Atari St est moins belle, mais pourvue des bruitages de «Kalidor» !), le jeu s’ouvre sur une démo annonçant les com- bats qui attendent le joueur : deux guerriers, des épées, des muscles, de la tactique. « Barbarian » a beau être violent (et barbare…évidemment), il n’est pas pour autant bourrin, pas fa- cile d’ailleurs d’éviter les coups de lames…voire d’en donner ; roulade, petit saut, coup de pied, et même tournoiement de l’é- pée !

Pas de protection, quoique les épées peuvent se rencontrer (détail très sympa): il est évident que l’on peut terrasser son ad- versaire « simplement », mais l’intérêt de « Barbarian » (et qui ne sera jamais repris dans les jeux de combats qui se succé- dèrent par la suite : un comble !), c’est de pouvoir décapiter son adversaire !! L’effet a beau paraître inoffensif aujourd’hui, la surprise et la jubilation sont toujours de mise.

Inutile de rappeler toute la stratégie dont il faut faire preuve et le combat acharné qu’il faut mener pour arriver à ce splendide tranchage de tête ; et comme un peu d’humour noir ne fait jamais de mal, un gnome traverse le terrain pour ramasser le corps du décapité avant de shooter dans la tête du malheureux !

Au final ? Un jeu toujours aussi efficace de nos jours, et carrément jouissif à deux joueurs : la licence aura un futur bien moins brillant, sa suite étant plus orientée action/aventure et son remake PS2 une cata. Triste…

Jérémie MARCHETTI

60 IL N’Y A PAS QUE LE CINEMA

* Présentation : Joël Houssin est né en 1953. Dès 1975, il publie un roman intitulé « Locomotive Rictus » ainsi que plu- sieurs nouvelles dans la revue Fiction. A partir de 1981, il incorpore la collection « Anticipation » de l’éditeur Fleuve Noir, collection dans laquelle il va publier la plupart de ses œuvres, principalement des romans de science-fiction. Au cours de sa carrière, il recevra d’ailleurs un Grand Prix de la SF française, un prix Apollo ainsi qu’un Prix de l’Imaginaire. Malgré son succès, Joël Houssin n’a plus rien publié depuis 1990, au niveau de la science-fiction. Houssin a également écrit de nombreux polars, comme la série « Le Doberman » par exemple, dont il tirera un scénario pour l’adaptation cinématographique ré- alisée par Jan Kounen en 1997. Parallèlement, il écrit de nombreux scénarios pour des séries télévisées, telles « Navarro » ou « Le Commissaire Moulin ».

* L’Histoire : Bernard n’en peut plus : coincé avec sa femme dans un monstrueux bouchon autoroutier, sous un soleil accablant, avec le radiateur de la voiture qui ne va pas tarder à rendre l’âme, il sent qu’il va bientôt cra- quer. Par chance, il tombe sur un groupe de vacanciers bien sympathiques qui le remorque jusqu’à l’aire de repos la plus proche. Malheureusement pour le petit groupe, des créatures étranges et avides de chairs humaines attendent dans les bois alentours, tapies dans l’ombre pour mieux frapper…

* Critique : Joël Houssin délaisse donc les univers science-fictionnels avec « L’autoroute du Massacre », cauchemar urbain sur fond de départ en va- cances, avec tout ce que cela sous-entend. Des kilomètres de bouchons, des voitures totalement immobilisées, un soleil de plomb, les nerfs qui lâchent. Les nerfs, ce sont ceux de Bernard, le personnage principal. Houssin décrit tellement bien ses pensées et son comportement qu’on comprend le personnage et ce qu’il ressent dans une telle situation. Celui qui s’est déjà retrouvé coincé dans un gigantesque bouchon en plein été s’identifiera très facilement avec Bernard.

En parallèle avec les mésaventures de Bernard, Houssin, à chaque fin de chapitre, nous présente l’univers et la vision de « L’aîné » et du « Cadet ». Deux créatures dont on ne sait pas grand chose, si ce n’est que leur apparence ressemble à un « morceau de chair translucide et frémissante, avec un cou de tortue surmonté d’une tête grotesque ». Les créatures ont également une large bouche munie d’une triple ran- gée de dents aiguisées, ainsi que de crochets aux bouts de leurs doigts. Et surtout, elles sont dotées d’un féroce appétit, voulant découvrir le goût des « bonnes choses vivantes », à savoir, les humains. C’est cette mise en parallèle qui rend très sympathique la lecture du livre. En effet, les deux créatures voient sous un autre angle ce qu’on vient de vivre avec Bernard, ou nous font prendre de l’avance sur les humains quand elles tuent un membre du groupe, car nous, nous savons ce qui vient d’arrivé, à la différence du reste du groupe qui s’étonne de ne pas voir revenir leurs amis…

Outre Bernard et sa femme, Houssin nous présente un groupe de vacanciers composé de deux suédois, d’une américaine, et de deux fran- çaises. On sourira à plusieurs reprises quand les pensées de Bernard iront plus vers Sandrine, l’une des jeunes filles françaises, que vers sa femme. Retenu sur une aire de repos, Bernard se liera vite d’amitié avec ses nouveaux amis. Mais bientôt, la disparition de certains partis en forêt va semer le doute et l’inquiétude parmi le groupe. Un tueur serait-il présent dans les bois ? Serait-ce le gros homme qui a tenté de violer la femme de Bernard aux W.C. ? Nos protagonistes ne sont pas aux bouts de leur surprise.

« L’autoroute du Massacre » ne nous présente pas de scènes véritablement gores. Quelques descriptions d’éventrations, de viscères dé- goulinants le long de corps nous sont proposées mais dans l’ensemble, on aurait pu s’attendre à plus. Nos deux monstres ont bien un appé- tit vorace mais manger revient à manger et les scènes de tueries sont souvent semblables quand aux résultats finals.

Malgré ça, l’ouvrage se lit d’une traite, est écrit dans un style très abordable et facile à lire. On veut en savoir d’avantage sur ces monstres, d’ou viennent-ils, qui sont-ils ? Et surtout, comment vont faire nos héros pour se sortir de ce cauchemar ? Réponse aux péages de « l’Autoroute du Massacre »… Stéphane ERBISTI

61 CINE HORREUR BIOGRAPHIE : Joe Dante

Originaire du new-Jersey, le jeune Joe naît juste après la seconde guerre mondiale et développe précoce- ment un goût pour les freaks-movies qui vont devenir sa marque de fabrique bien plus tard. C’est ainsi que très jeune, il écrit pour plusieurs fanzines spécialisés tout en continuant ses études de dessinateur. Sa pre- mière expérience cinématographique sera en 1968, où il s’amuse avec un ami à réaliser un montage de 7 heures comprenant plusieurs extraits de films cultes des années 50. C’est précisément grâce à ce travail (" ") que Roger Corman le remarque et l’engage pour réaliser du montage de bandes- annonces. En 1974, il collabore au montage d’une comédie ("Lâchez les bolides") toujours aux côtés de Corman qui lui propose deux ans plus tard de réaliser son premier film en co-réalisation avec Allan Ar- kush : ce sera " Hollywood Boulevard " qui lui permettra de toucher son premier salaire de ré- alisateur et de commencer véritablement son métier.

Tout va s’enchaîner très vite et les années 80 seront ses années fastes. Mais avant cette décen- nie, il réalise " Piranhas " en 1978, une série B fort sympathique qui surfe alors sur la mode des monstres aquatiques, à l’instar du phénoménal succès planétaire du film de Spielberg "Les dents de la mer". En 1981, il sort son second film de genre qui reste à ce jour l’un des fleurons du genre lycanthrope : " Hurlements " revisite le genre et propose des effets spéciaux et nova- teurs rarement égalés depuis en terme de transformation. Spielberg qui l’a remarqué depuis "Piranhas" lui propose alors de réaliser un épisode de " La Quatrième Dimension " en 1983, un an avant de sortir LE film qui allait asseoir définitivement le talent de Dante : le raz de marée "Gremlins " déferle sur la planète et permet à Joe d’exprimer tout son amour pour les freaks qu’il chéri ssait depuis son enfance. Il remporte ainsi le Saturn Award du meilleur réalisateur. Le succès aidant, Dante enchaîne les films et en 1985 sort " Explorers " ainsi qu’un épisode cette fois-ci pour la télévision, "L’homme invisible" pour la série " La Quatrième Dimen- sion ". La TV qu’il commence à adopter puisqu’il réalise en 1986 quelques épisodes pour la série " Amazing Stories " produite par Spielberg.

Il revient au cinéma en 1987 avec " L’aventure intérieure " () avant de retourner à la TV une fois de plus. Tout juste réalise t’il une comédie noire " Les banlieusards " qui sera son dernier film avant d’entamer une nouvelle décennie.

En 1990 il réalise la suite de son "Gremlins" et reprend les mêmes ingrédients pour " Gremlins 2 : la nouvelle génération ", toujours produit par l’ami Steven. Les années 90 arrivent et une nouvelle fois, Dante se retourne sur son enfance afin de réaliser "Panic sur Florida Beach " qui relate la présentation d’un film de monstres dans une petite ville. Or le succès cette fois-ci n’est pas au rendez-vous et Joe fait une parenthèse au cinéma pour se consacrer au petit écran. Il ne reviendra au ciné qu’en 1998 avec " ", un film à l’humour sans doute trop noir et au discours trop anti-militaire, puis que le film est un ratage au box-office. De nouveau il reste 5 années loin des plateaux de ciné et revient alors en 2003 avec " Les Looney Toons passent à l’action ", un film où il mélange de vrais acteurs avec les personnages de Bugs Bun- ny et Daffy Duck. Apparaît ainsi au casting Brendan Fraser dont il s’est souvenu après "la mo- mie" de Sommers sur lequel il avait planché quelques années auparavant sans que son projet arrive à terme. En 2005, Mick Garris qui planche sur " Masters of horror " pense inévitable- ment à lui pour former l’équipe des 10 "maîtres" de la première saison, et il réalise ainsi le seg- ment " Homecoming ".

62 Joe Dante revendique plusieurs influences et notamment celles de James Whale ("La fiancée de Frankenstein", Jean Cocteau ("La belle et la Bête") et bien sûr Roger Corman. Homme éclec- tique et éternel rêveur, il participe aussi à de nombreux docu- mentaires, notamment en 1997 avec " les deniers du culte " qui réunit entre autres Doug Headline ("Broceliande"), ou encore en 2006 avec " Trapped ashes " qu’il co-réalise avec Sean S. Cunningham ("Vendredi 13"), Ken Russel ("Gothic", "Les dia- bles"…) etc… Il produit également des œuvres du genre comme "Flesh and blood : the Hammer heritage of horror " en 1994 ou bien encore " Le fantôme du Bengale " en 1996.

Ajoutons à ses divers talents ci-dessus évoqués, celui de l’écriture égale- ment, à travers des scénarios souvent remplis de bons mots, qu’il lui arri- vera aussi de prononcer puisque l’homme se fait aussi acteur au cours de sa carrière. Témoins ses incursions en 1976 dans "Cannonball", "Piranhas" en 78, "Gremlins", "La nuit déchirée" de son pote Garris ou bien encore chez son ami John Landis ("Le loup-garou de londres") par deux fois en 91 et 94 pour deux comédies dont "Le flic de Beverly hills 3".

Très marqué par le monde de l’enfance, Joe Dante reste un éternel ado- lescent et le montre parfaitement à travers son œuvre dès qu’il s’aventure sur le terrain des comics ou autres freaks (en 1989 il fût entre autres inté- ressé pour réaliser "Batman" qui le sera finalement par Tim Burton). Il est également un homme fidèle dans ses amitiés et ses relations profes- sionnelles, témoins ses amis , Robert Picardo et William Schallert que l’on retrouve autant dans "Gremlins" que "Hurlements" par exemple.

Pour l’heure, Joe Dante enchaîne sur la seconde saison des " Masters of Horror " pour le futur segment " The screwly solution " avant de s’atta- quer pour 2007 à " The greatest Show Ever " pour la télévision, que mon collègue Stéphane Erbisti ne manquera sûrement pas de suivre puisque est annoncée au casting une certaine Traci Lords…

Christophe Jakubowicz

63 TABLEAU DE NOTATION

Note des rédacteurs / 6 des films traités dans « Ciné Horreur Movies »

Lionel Stéphane Gérald Christophe Colin Jérémie Stéphane Vincent Stéphanie Cédric Yann E J BATMAN BEGINS 4 4,5 4 5 5

BLOOD SISTERS OF LESBIAN SIN 2

BLOODRAYNE 4

DEMON SPIRIT 1 0

DESTINATION FINALE 3 4 4 5 4,5 4,5 4 4 1 4

FOG 2005 2 3 3 2 1

GARGOYLE 1

HEARTSTOPPER 3

HOSTEL 5,5 5 5 5 4,5 5 1,5 4,5 3 5

L’EVENTREUR DE NEW YORK 5 4 4,5 5 4,5

LE CABINET DU DOCTEUR CALIGARI 3 5,5 6 5,5 6 6

LE CHÂTEAU DE YUREK 3,5 3 3,5 5

LE CROCODILE DE LA MORT 4 4 4 4 4,5 3,5

LE LABYRINTHE DE PAN 4,5 5 5,5 5

LE PACTE DU SANG 2

MASSACRE A LA TRONCONNEUSE : LE 5 COMMENCEMENT

METAMORPHOSIS 1 2

REGAL D’ASTICOTS 3 3 3 3 3

SOUDAIN LES MONSTRES 4 4 4

X TRO 3 4 3,5 4 3,5

64 WEBZINE CINE HORREUR N° 7

JOYEUSES FETES A TOUS NOS LECTEURS !