Études Mongoles Et Sibériennes, Centrasiatiques Et Tibétaines, 45
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Études mongoles et sibériennes, centrasiatiques et tibétaines 45 | 2014 Épopée et millénarisme : transformations et innovations Édition électronique URL : https://journals.openedition.org/emscat/2265 DOI : 10.4000/emscat.2265 ISSN : 2101-0013 Éditeur Centre d'Etudes Mongoles & Sibériennes / École Pratique des Hautes Études Référence électronique Études mongoles et sibériennes, centrasiatiques et tibétaines, 45 | 2014, « Épopée et millénarisme : transformations et innovations » [En ligne], mis en ligne le 30 juin 2014, consulté le 13 juillet 2021. URL : https://journals.openedition.org/emscat/2265 ; DOI : https://doi.org/10.4000/emscat.2265 Ce document a été généré automatiquement le 13 juillet 2021. © Tous droits réservés 1 SOMMAIRE Éditorial La rédaction L'épopée, un outil pour penser les transformations de la société Sous la direction de Florence Goyet et Jean-Luc Lambert Introduction Florence Goyet et Jean-Luc Lambert De l'épopée canonique à l'épopée « dispersée » : à partir de l'Iliade ou des Hōgen et Heiji monogatari, quelques pistes de réflexion pour les textes épiques notés Florence Goyet La « tradition épique » bouriate change tout en étant facteur de changement Roberte Hamayon Altaj-Buučaj, héros épique de l’entre-deux siècles Clément Jacquemoud L’expression politique dans une version de Camara Laye de l’épopée mandingue Mamadou Kouyaté Figures parallèles de l’exemplarité héroïque entre confirmation et réfutation dans l’épopée peule au Foûta Jalon Alpha Ousmane Barry Que pense la parole des femmes ? Les enjeux du dialogue dans la version récente d’une tradition épique de l’Inde méridionale Claudine Le Blanc L’épopée médiévale comme référence dans les mouvements militants de l’Inde du Nord : la mobilisation de la geste d’Alha-Udal Catherine Servan-Schreiber Vers l’étude du « travail épique » dans le Livre de Dede Korkut Monire Akbarpouran L’épopée nord-samoyède (Arctique sibérien). Comment trouver une solution à l’alliance dans une société devenue opulente ? Jean-Luc Lambert Note sur les épopées dolganes (Arctique sibérien) Yann Borjon-Privé Postface Jean Derive Millénarismes et innovation rituelle en Asie du Nord Sous la direction de Charles Stépanoff Introduction Charles Stépanoff Études mongoles et sibériennes, centrasiatiques et tibétaines, 45 | 2014 2 Power for the Powerless : Oirot/Amursana Prophecy in Altai and Western Mongolia, 1890s-1920s Andrei A. Znamenski « Épîtres » altaïennes : histoire et vie des textes du mouvement religieux Ak-jaŋ Dmitry Arzyutov Contested Souls : Christianisation, Millenarianism and Sentiments of Belonging on Indigenous Rural Yamal, Russia Vera Skvirskaja Épilogue L’exaltation des Roerich au Petit Tibet, ou à la naissance du New Age Dany Savelli Études mongoles et sibériennes, centrasiatiques et tibétaines, 45 | 2014 3 Éditorial La rédaction 1 Ce numéro réunit deux thématiques qui s’entrelacent dans l’histoire de l’Asie Intérieure – les épopées et les mouvements millénaristes –, mais qui n’ont pas encore fait l’objet de travaux joints. Puisse leur réunion dans ce numéro semer les germes d’une réflexion attachée à définir ce qui les rapproche et ce qui les distingue, et à comprendre les raisons et les mécanismes de leurs rencontres dans ces régions. 2 La première partie rassemble les communications présentées lors de la Journée d’étude organisée à l’EPHE en novembre 2013 par Jean-Luc Lambert et Florence Goyet dans une perspective pluridisciplinaire et comparative sur le thème de « l’épopée comme outil pour penser les transformations de la société ». La seconde partie regroupe les articles réunis par Charles Stépanoff sur le thème du millénarisme en Asie Intérieure comme facteur d’innovation religieuse. 3 À la lecture des articles, la notion d’« outil pour penser les transformations de la société » éclaire de façon très féconde non seulement les épopées mais aussi les mouvements millénaristes d’Asie Intérieure. Les unes comme les autres expriment les dynamiques complexes par lesquelles les sociétés de ces régions réagissent – rejet, adoption et adaptation, ou innovations et changements internes – aux courants religieux qui les ont traversées dès les premiers siècles de notre ère (zoroastrisme, puis christianisme et bouddhisme, plus récemment islam), et dont la propagation a accompagné, plus tard, les changements politiques et les pressions coloniales. On voit de grandes figures historiques de ces sociétés fusionner avec des personnages divins de ces religions. On voit des entités célestes apparaître à l’origine de la naissance terrestre des héros épiques ou de la vocation des prophètes et de leur mission terrestre de remise en ordre de la société. C’est précisément le décalage entre les réalités de ces sociétés et les idéaux qu’exaltent les textes épiques et les discours millénaristes qui révèle ce rôle d’« outil de pensée » collectif inconscient face à des transformations inéluctables. 4 Outre ce trait commun de fonction, les épopées et les mouvements millénaristes semblent partager également un trait de structure en ce que leur élaboration repose sur l’incarnation de leurs idéaux dans des personnages singuliers, héros épiques ou prophètes. Il est remarquable que, dans ces régions au substrat chamanique avéré, ces Études mongoles et sibériennes, centrasiatiques et tibétaines, 45 | 2014 4 phénomènes se développent aux dépens du chamanisme, et que les personnages de héros et prophètes se définissent par opposition à celui du chamane autant qu’à celui du représentant du pouvoir colonisateur. 5 Tous ces traits se trouvent réunis de façon particulièrement exemplaire dans le bourkhanisme, mouvement millénariste surgi au début du XXe siècle dans la région de l’Altaï. A. Znamenski avait, dans son livre Shamanism and Christianity (1999), mis en évidence l’impact du christianisme dans l’émergence de ce mouvement ; il souligne ici celui du bouddhisme à la lumière de l’émergence d’un mouvement similaire contemporain chez les Mongols occidentaux bouddhisés. A. Vinogradov, quant à lui, en repérait tous les ingrédients constitutifs dans la tradition épique et remarquait l’influence du peintre russe Nicolas Roerich sur son développement (Ak Jang in the context of Altai religious tradition, 2003). On trouvera ici même, dans la contribution de C. Jacquemoud, un exposé des références au bouddhisme, au bourkhanisme et au christianisme trouvées dans une épopée altaïenne, dans celle de D. Arzyutov, des traces de l’influence de Roerich dans des épîtres altaïennes, et dans celle de D. Savelli, un éclairage sur la singulière composition mystique que Roerich réalisa d’éléments appartenant à ces différentes traditions. BIBLIOGRAPHIE Vinogradov, A. 2003 Ak Jang In The Context Of Altai Religious Tradition. A Thesis submitted to the College of Graduate Studies and Research […] Department of Religious Studies and Anthropology, University of Saskatchewan [http://ecommons.usask.ca/handle/10388/etd-01192005-154827] Znamenski, A. 1999 Shamanism and Christianity: Native Encounters with Russian Orthodox Missions in Siberia and Alaska, 1820-1917 (Westport, Conn.: Greenwood Press). Études mongoles et sibériennes, centrasiatiques et tibétaines, 45 | 2014 5 L'épopée, un outil pour penser les transformations de la société Sous la direction de Florence Goyet et Jean-Luc Lambert NOTE DE L’ÉDITEUR Ce numéro a été publié avec le soutien du Centre de recherche sur les civilisation de l'Asie orientale - CRCAO Études mongoles et sibériennes, centrasiatiques et tibétaines, 45 | 2014 6 Introduction Florence Goyet et Jean-Luc Lambert 1 Le point de départ de cette journée a été la rencontre entre l’interrogation comparatiste de Florence Goyet et celle des spécialistes de la Sibérie autour du genre épique. Tous les peuples sibériens n’ont pas développé une poésie épique, bien loin de là, mais on parle habituellement d’épopées dans six grands ensembles : Nord- Samoyèdes (Nénètses, Énètses, Nganassanes), Ougriens de l’Ob (Khantes et Mansis), Bouriates, Turcs de Sibérie méridionale (Altaïens, Chors, Touvas, Khakasses), Yakoutes (Yakoutes et Dolganes), et à la limite occidentale de la Sibérie chez les Komis du Nord. Or, pour ces différentes traditions, nous ne disposons pas, au niveau des études sibériennes, d’analyse comparée. L’un des enjeux de cette journée est précisément de travailler dans cette perspective comparative en sollicitant des spécialistes des ces différentes aires autour d’interrogations communes. 2 Ce travail au niveau régional fait immédiatement surgir une interrogation : est-il même légitime de parler d’épopée au niveau global de la Sibérie ? Pour répondre à cette question, on ne peut en réalité se tourner vers la tradition critique sur l’épopée comme genre. Les critiques qui s’intéressent au genre de façon théorique ont beaucoup de mal à fournir une définition de ce que serait une épopée « en général ». Les définitions qui ont servi depuis Aristote à opposer ce genre à d’autres genres – en général à la tragédie – ont été remises en question violemment dans les années 1970 par le comparatiste Etiemble, qui a montré que tous les traits tenus pour définitoires du genre depuis Aristote ne s’appliquaient en réalité qu’à la tradition occidentale. Cependant, de façon pragmatique, on a continué à cataloguer comme épopées un certain nombre de textes, en appliquant des critères de plus en plus lâches mais auxquels les épopées sibériennes correspondent bien. Dans tous les cas, en effet, il s’agit en Sibérie de longs chants versifiés, à thème héroïque, qui parlent de mariage et de conflits. À la différence des épopées occidentales, cependant, en Sibérie, il n’y a jamais un seul grand texte avec de nombreuses ramifications internes, mais une multitude de chants. Les contextes d’exécution sont eux aussi très divers en fonction des sociétés. Ainsi les Samoyèdes les chantent simplement pour le plaisir et n’importe quand, tandis que dans l’Altaï ou chez les Bouriates il y a une saison pour chanter l’épopée, et un effet en est attendu, notamment pour l’obtention du gibier ; les chants ob-ougriens sont chantés quant à eux Études mongoles et sibériennes, centrasiatiques et tibétaines, 45 | 2014 7 sur des sites cultuels, et ce sont alors les dieux locaux qui sont supposés s’exprimer et raconter leur propre histoire.