L'"Individu" Et La "Démocratie" Au Xixe Siècle Roumain
Total Page:16
File Type:pdf, Size:1020Kb
www.ssoar.info L’"Individu" et la "Démocratie" au XIXe siècle roumain Alexandrescu, Raluca Veröffentlichungsversion / Published Version Zeitschriftenartikel / journal article Empfohlene Zitierung / Suggested Citation: Alexandrescu, R. (2013). L’"Individu" et la "Démocratie" au XIXe siècle roumain. Annals of the University of Bucharest / Political science series, 15(1), 51-67. https://nbn-resolving.org/urn:nbn:de:0168-ssoar-390141 Nutzungsbedingungen: Terms of use: Dieser Text wird unter einer CC BY-NC-ND Lizenz This document is made available under a CC BY-NC-ND Licence (Namensnennung-Nicht-kommerziell-Keine Bearbeitung) zur (Attribution-Non Comercial-NoDerivatives). For more Information Verfügung gestellt. Nähere Auskünfte zu den CC-Lizenzen finden see: Sie hier: https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0 https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/deed.de L’« INDIVIDU » ET LA « DÉMOCRATIE » AU XIX E SIÈCLE ROUMAIN RALUCA ALEXANDRESCU "INDIVIDUALS" AND "DEMOCRACY" IN THE ROMANIAN XIX TH CENTURY POLITICAL THOUGHT Abstract Representing democracy and the development of the political persona in the XIX th century Romanian political discourse means, first of all, to focus the analysis on the implications the concept of democracy could provide. In the first half of the XIX th century, the concept of Romanian democracy and its place within political discourse are conditioned by philosophical and historiographical discontinuities between the periods, the intellectual sources, as well as the political and institutional framework of that time. Within that context, democracy should be regarded as a fundamental concept to political and institutional development in the beginning of the XIX th century. The present article goes on this path, analysing some examples of political discourse during the period of establishment of the fundamental democratic institutions in the Romanian modernity. Keywords: democracy, modernity, political culture, political thought, 1848 Romanian Revolution, political institutions. Nous nous proposons, dans le texte qui suit, de donner quelques pistes d’analyse possibles du devenir de l’individu en tant que construction intellectuelle, dans la première moitié du XIX e siècle roumain, notion que nous nous proposons d’envisager par le biais d’un concept qui en est indissociable dans l’histoire des idées politiques, surtout après la Révolution française. C’est à cette époque de la pensée politique postrévolutionnaire que se fait de plus en plus sensible l’effort d’identifier méthodologiquement les frontières de ce qu’on appelle les Anciens et les Modernes. C’est avec Benjamin Constant 1 que les différences prennent ensuite un nom, qui est celui de la Liberté, envisagée à travers la composition, par la modernité, d’un double espace d’existence de 1 Voir, par exemple, le texte de Constant: De l’esprit de conquête et de l’usurpation dans leurs rapports avec la civilisation européenne , in Benjamin Constant, Œuvres , texte présenté et annoté par Alfred Roulin, Bibliothèque de la Pléïade, Gallimard, Paris, 1957, pp. 957-1062. 52 RALUCA ALEXANDRESCU l’individu : l’espace public, celui de l’action politique dans la cité, et l’espace privé, articulé soit dans la famille, soit dans la petite communauté qui représente le mieux les intérêts propres de l’individu. Le XIXe siècle, longtemps perçu, et à tort, comme le siècle du positivisme exclusif, est en fait un vaste laboratoire où sont posés les grands principes de la théorie et de la technique démocratique libérale 2 selon un schéma encore valable, dans les grandes lignes, pour nos systèmes politiques actuels. C’est de ce grand laboratoire que sort, finalement, la démocratie 3 comme véhicule pour l’individu, conçu dans ses rapports non seulement avec une verticale des hiérarchies et des institutions, mais aussi dans une horizontale communautaire4. Notre recherche se situe donc sur ces assises conceptuelles qui placent les questions de la démocratie libérale et de l’individu moderne dans un rapport d’interdépendance. La pensée politique roumaine de la moitié du XIX e siècle – que nous nous proposons d’envisager, brièvement, dans cette perspective de création et/ou d’adoption de ces concepts – fonctionne sur des schémas qui ne sont pas encore bien établis du point de vue de la méthode ou de l’instrumentaire conceptuel utilisés. Néanmoins, il serait utile de rappeler que le concept de démocratie, qui apparaît au début du siècle dans des contextes particuliers, mais pas aussi fréquents que l’on pourrait imaginer, contribue d’une manière décisive à l’articulation de la place de l’individu à l’intérieur du discours intellectuel roumain. Pour retracer le trajet de ces deux notions qui vont de pair, pour ce qui est des sens primordiaux de l’histoire des idées politiques modernes et de la modernité elle-même, il convient donc de proposer une vision sur ce que c’est que la « démocratie »5 dans la première moitié du siècle, afin de déceler, finalement, la place de l’individu dans l’architecture hésitante de la pensée politique roumaine de cette période. Pour ce faire, nous tentons de mettre à contribution une méthodologie pratiquée par l’histoire conceptuelle telle que, d’une part, James Farr 6 (qui 2 Pour une vision extrêmement riche en suggestions et pistes d’analyse concernant le XIX e siècle, v. Pierre Rosanvallon, Le moment Guizot , Gallimard, Paris, 1985, pp. 11-15 et suiv. 3 Nous allons tenir compte aussi d’une généalogie de la démocratie, telle qu’elle est retracée par R. A. Dahl, qui identifie quatre grandes sources de l’amalgame démocratique moderne : la Grèce antique, la tradition républicaine néo-romaine des cités italiennes de la Renaissance, l’idée de représentation et les institutions qui en découlent, ainsi que la logique de l’égalité politique. (Robert A. Dahl, Democracy and its critics , Yale University Press, New Haven and London, 1989, p. 13). 4 V. Giovanni Sartori , Teoria democra ţiei reinterpretat ă, Polirom, Ia şi, 1999, pp. 255-266. 5 Pour l’étude des significations et des occurrences du terme de « démocratie » en roumain jusqu’au début du XIX e siècle, v. Daniel Barbu, « Democra ţia în române şte. Istoria veche a cuvântului » [« La démocratie en roumain. L’histoire ancienne du mot »], in Studia Politica , II, 4, 2002, pp. 969-978. 6 James Farr, « Understanding conceptual change politically », in Terrence Ball, James Farr, Russel L. Hanson (eds.), Political Innovation and Conceptual Change , Cambridge University Press, 1989, p. 25. L’« INDIVIDU » ET LA « DÉMOCRATIE » AU XIX E SIÈCLE ROUMAIN 53 retrace méthodologiquement l’histoire conceptuelle à l’aide de quelques passages obligés dans la démarche scientifique : l’explication des sens et des références du concept analysé ; le rapport de celui-ci aux concepts similaires et apparentés ; et la mise en contexte de ce concept, soit du point de vue des acteurs, soit du point de vue des institutions mobilisées dans une période de temps ou dans l’élaboration précise du concept) et d’autre part, Quentin Skinner 7 la pratiquent. L’exposition polémique que celui-ci fait de ses théories nous intéresse au plus haut degré, compte tenu de son potentiel plus fécond, surtout pour la période qui nous intéresse dans la pensée politique roumaine, tout en proposant une lecture qui tienne compte, dans la compréhension d’un texte politique, non seulement du texte en soi, mais aussi de son auteur et du non-dit de ses intentions, cachées peut-être dans l’image d’un passé et d’un présent intellectuel qui agit en correspondance avec lui, avec ou contre lui, et sur lequel l’auteur, à son tour, peut – ou non – agir. C’est dans ce parcours, qui n’est jamais à sens unique, que se laissent dévoiler, d’une manière beaucoup plus généreuse, les sens du concept de démocratie – et, par conséquent, une certaine place de l’individu – dans le discours politique roumain de l’époque. En effet, comment comprendre les écrits d’un Ionic ă T ăutul 8, par exemple, écrivain moldave actif dans les années trente du XIX e siècle – et donc contemporain, dans le sens strictement chronologique du terme, de François Guizot et d’autres – sans procéder à un aperçu sur l’environnement intellectuel de son temps qui, dans les Principautés roumaines, n’a pas encore intégré le discours intellectuel toutefois largement pratiqué en Europe? Comment percevoir, finalement, la portée générale de son œuvre ou de celle des autres auteurs que nous invoquerons, sans les intégrer tous dans cette approche de l’histoire des idées qui s’ouvre, ensuite, dans un concept tout aussi profitable pour notre analyse, celui d’« horizon d’attente » ?9 Notre démarche peut s’enrichir de cet effort qui situe – pour continuer notre exemple – Ionic ă T ăutul dans un univers intellectuel qui, à l’époque où il écrit, encore dominé par le poids de la culture grecque 10 , essaie de forger une langue littéraire nationale et une terminologie 7 Quentin Skinner in Visions of Politics , I , Regarding Method , Cambridge University Press, 2002, p. 79 : « if we wish to understand any such text, we must be able to give an account not merely of the meaning of what was said, but also of what the writer in question may have meant by saying what was said. A study that focuses exclusively on what a writer said about some given doctrine will not only be inadequate, but may in some cases be positively misleading as a guide to what the writer in question may have intended or meant ». 8 Ionic ă T ăutul, Scrieri social-politice [ Ecrits socio-politiques ], préface, étude introductive, notes par Emil Vârtosu, Editura Ştiin ţific ă, Bucarest, 1974. 9 Cf. Cristophe Prochason, « Héritages et trahisons : la réception des œuvres », in Mil neuf cent , 12/1994, p. 10. 10 Voir, dans ce sens, l’ouvrage concernant l’influence grecque sur l’enseignement dans les Principautés roumaines au XVIII e et début du XIX e siècle d’Ariadna Camariano-Cioran, Academiile domne şti din Bucure şti şi Ia şi, [ Les Académies princières de Bucarest et de Jassy ] Editura Academiei RSR, Bucarest, 1971.