Étude originale
Distribution des espèces de Striga et infestation des cultures céréalières dans le nord de la Côte d'Ivoire
Charles Konan Kouakou1,2 2 Résumé Louise Akanvou Les cultures ce´re´alie`res sont pour la plupart infeste´es par des espe`ces de Striga dans le nord 1 Irie Arsène Zoro Bi de la Coˆte d’Ivoire. Dans cette e´tude, les espe`ces de Striga, leur re´partition, abondance et 2 Rene Akanvou intensite´ d’infestation ont e´te´ de´termine´es. Les surfaces de ce´re´ales infeste´es ont e´te´ 1,2 Hugues Annicet N'da estime´es. Les donne´es ont e´te´ collecte´es a` travers des enqueˆtes extensives et intensives. 1 Universite Nangui Abrogoua Des e´chantillonnages ont e´te´ re´alise´s dans des champs cultive´s. Selon la carte des zones Unite de formation et de recherche d’infestation de Striga actualise´e, les zones infeste´es couvrent le nord du pays de 8˚47,17’ a` des sciences de la nature 10˚38,84’ de latitude nord et de 2˚47,68’ a` 7˚55,20’ de longitude ouest. La zone infeste´e 02 BP 801 occupe une superficie cultivable de 3 191 850 ha. Un total de 71,8 % des villages situe´s Abidjan 02 dans cette zone sont infeste´s par Striga spp. L’hypothe`se d’e´volution des infestations Côte d'Ivoire suivant un gradient nord-sud a e´te´ confirme´e. Les infestations ont commence´ en zone de
Pour citer cet article : Kouakou CK, Akanvou L, Zoro Bi IA, Akanvou R, N'da HA, 2015. Distribution Tirés à part : C.K. Kouakou des espèces de Striga et infestation des cultures céréalières dans le nord de la Côte d'Ivoire. Cah Agric 24 : 37-46. doi : 10.1684/agr.2015.0734 doi: 10.1684/agr.2015.0734
Cah Agric, vol. 24, n8 1, janvier-fe´ vrier 2015 37 found parasitizing upland rice. S. hermonthica is a major threat to cereal crop production in northern Coˆte d’Ivoire where it severely infested 57.2% (268,250 ha) of lands under maize (108,160 ha), millet (38,300 ha), sorghum (30,360 ha) and upland rice (91,430 ha). The infestation rates under millet, maize, sorghum and upland rice were 65.9%, 56.5%, 51.0% and 40.5%, respectively. Striga has today become a major national threat to the production of these cereals as well as to food security in endemic areas. Key words: Coˆte d’Ivoire; distribution; infestations of Striga hermonthica, S. asiatica, S. aspera; maize; rice; sorghum. Subjects: pathology; soils; vegetal productions.
nCoˆte d’Ivoire, neuf espe`ces de se´dougou et Bouna (Valentin, 1988). La pluviome´trie varie d’est en ouest de Striga (Orobanchaceae) ont e´te´ La baisse du niveau de fertilite´ des 1 000 a` 1 650 mm/an. Les sols ferrali- E re´pertorie´es dont trois pe´ren- sols et la re´duction du temps de tiques forment la classe dominante des nes et six annuelles (Mohamed et al., jache`re, couple´es au potentiel invasif sols de cette zone (Le´veˆque, 1983). 2001). Parmi les espe`ces annuelles, des Striga (Mohamed et al., 2006) Striga gesnerioides (Willd.) Vatke a e´te´ ont favorise´ la dispersion du parasite observe´ dans lpomoea eriocarpa R. Br. au sud de cette ligne, avec de se´ve`res (Convolvulace´es) pre`s de Korogho, et infestations note´es autour de Korhogo Collecte des données Striga forbesii Benth. dans les plaines et Ferkesse´dougou (Johnson et al., Deux me´thodes d’enqueˆtes extensive et inonde´es du nord (Rodenburg et al., 1997). intensive (Berner et al., 1997)onte´te´ 2010). Striga hermonthica (Delile) Le Striga constitue aujourd’hui une utilise´es. Les enqueˆtes et les visites de Benth. a e´te´ enregistre´ au nord des contraintes majeures de la pro- terrains ont eu lieu en 2008, 2010 et 2011. d’Odienne´,a` Bouna, Tengre´la, Boun- duction ce´re´alie`re et repre´sente donc diali, Korhogo et Ferkesse´dougou. une menace a` la se´curite´ alimentaire. Striga aspera Benth. a e´te´ observe´ a` Bien que le Striga soit suspecte´ eˆtre Boundiali. Striga asiatica (L.) Kuntze, une forte contrainte a` la production Étendue des zones infestées a` fleur jaune, a e´te´ trouve´ dans les ce´re´alie`re en zone de savanes, aucune par les espèces de Striga cultures de riz pluvial et de maı¨sau e´tude n’a e´te´ initie´e pour connaıˆtre Centre dans les localite´s de Bouake´ et l’e´tendue, le degre´ des infestations et Les techniques d’enqueˆtes extensives a` Brobo, mais a` un faible niveau les superficies infeste´es. Il s’agira dans utilise´es ont pris en compte deux d’infestation (Riches et al., 1994 ; cette e´tude de : facteurs : l’hypothe`se d’un gradient Johnson et al., 1997). Striga brachy- – Recenser les espe`ces de Striga nord-sud des infestations de Striga et calyx Skan a e´te´ occasionnellement pre´sentes ; la particularite´ socioculturelle des observe´ dans le riz pluvial (Johnson – De´terminer leur re´partition, leur groupes ethniques Se´noufo et Lobi et al., 1997). S. hermonthica et abondance et intensite´ d’infestation ; qui pratiquent une agriculture itine´- S. aspera sont les espe`ces les plus – Estimer les superficies cultive´es en rante. Les axes sud (routes principa- dommageables (Johnson et al., 1997). ce´re´ales qu’elles infestent. les) des villes suivantes, Odienne´, S. hermonthica exerce ses attaques sur Madinani, Boundiali, Korhogo, Diko- le maı¨s, le mil, le sorgho et le riz dougou, Tafire´, Kong, Bouna et Bon- pluvial, dans les zones bien draine´es. doukou ont e´te´ conside´re´s. Le pas S. aspera devient important dans les d’e´chantillonnage a e´te´ fixe´ a` 20 km. zones hydromorphes ou` il attaque Matériel et méthode Les villages situe´sa` cet intervalle ont se´ve`rement, par endroits, le riz et le fait partie de l’enqueˆte. Le nombre de maı¨s. Il infeste e´galement le fonio Zone d'étude paysans rencontre´s a varie´ de5a` 10 (Riches et al., 1994). Les infestations selon la taille des villages. Ces pro- de Striga ont commence´ dans la partie La zone d’e´tude coı¨ncide avec les ducteurs devaient re´pondre par oui ou nord de la Coˆte d’Ivoire avec la re´gions administratives suivantes : non a` deux questions, notamment migration des e´leveurs peuls des pays Folon, Kabadougou, Bagoue´,Poro, « Connaissez-vous le Striga ?A` quel limitrophes, notamment le Mali, le Tchologo, Hambol, Gbeˆkeˆ,Bounkani degre´ l’avez-vous vu infester votre Burkina Faso et la Guine´e qui sont de et Gontoubo (figure 1). En fonction des champ de ce´re´ales ? ». Des photos et gros foyers de Striga (Kouassi, 1989). parame`tres climatiques, cette zone a e´te´ des e´chantillons de Striga permettant Ces infestations suivies d’une aggrava- subdivise´e en trois zones e´cologiques : aux paysans d’appre´cier leur connais- tion des dommages se sont pour- – Savane soudanienne ; sance du parasite ont e´te´ utilise´s. Un suivies au nord de la ligne passant par – Savane sub-soudanienne ; GPS , de re´fe´rence «Arpentar»,a Odienne´, Boundiali, Korhogo, Ferkes- – Savane guine´enne. permis de localiser les diffe´rents sites.
38 Cah Agric, vol. 24, n8 1, janvier-fe´ vrier 2015 11˚0’00"N 8˚0’00"w 7˚0’00"w 6˚0’00"w 5˚0’00"w 4˚0’00"w 3˚0’00"w
MALI 11˚0’00"N N BURKINA-FASO Tengréla Niellé 10˚0’00"N
MINIGNAN FOLON 10˚0’00"N Samatiguila TCHOLOGO BAGOUE Madinani
ODIENNE FERKESSEDOUGOU BOUNDIALI KORHOGO KABADOUGOU PORO Kong BOUNA 9˚0’00"N Dikodougou Tafiré BOUNKANI 9˚0’00"N GUINEE
HAMBOL
TOUBA 8˚0’00"N MANKONO KATIOLA BONDOUKOU SEGUELA
GONTOUGO 8˚0’00"N
GBEKE GHANA BOUAKE
MAN
7˚0’00"N DAOUKRO BOUAFLE
DALOA YAMOUSSOUKRO 7˚0’00"N DUEKOUE ABENGOUROU DIMBOKRO
GUIGLO
6˚0’00"N GAGNOA ADZOPE
AGBOVILLE 6˚0’00"N SOUBRE DIVO
ABOISSO DABOU ABIDJAN 5˚0’00"N
A T L A N T I Q U E SASSANDRA 5˚0’00"N
LIBERIA N A E SAN-PEDRO C O LÉGENDE Tabou Ville de la zone d’étude Limite d’État Limite de district 4˚0’00"N Zone d’étude Limite de région 4˚0’00"N Capitale d’État Limite administrative de la zone d’étude ECHELLE : 1 / 4 000 000 Plan d’eau Chef-lieu de région
8˚0’00"w 7˚0’00"w 6˚0’00"w 5˚0’00"w 4˚0’00"w 3˚0’00"w
Figure 1. Carte de la Côte d'Ivoire (Afrique de l'Ouest) montrant la zone d'étude.
Figure 1. Map of Côte d'Ivoire (West Africa) showing the study area.
Cah Agric, vol. 24, n8 1, janvier-fe´ vrier 2015 39 Degré d'infestation de Striga spp. – Abondance des espe`ces : rapport (N’klo, 2001), a e´te´ applique´. Les ` ´ dans les cultures céréalières du nombre d’individus d’une espece foreˆts classees, le parc national de au nombre total des individus de ce la Comoe´,lesjache`res et les zones Sur la base des re´sultats de l’enqueˆte taxon dans l’e´chantillonnage ; non cultivables ou` le Striga n’est pas extensive, des villages et des champs a` – Densite´ des espe`ces : nombre rencontre´ ont e´te´ exclus. Les super- l’inte´rieur de l’aire de re´partition de d’individus par unite´ de surface ; ficies infeste´es des cultures de maı¨s, Striga ont e´te´ caracte´rise´s. Le mode de – Note de pre´sence de Striga :de´finie mil, sorgho et riz pluvial ont e´te´ se´lection des villages a e´te´ l’e´chantil- selon une e´chelle de 1 a` 9(Akanvou calcule´es en prenant en compte les lonnage syste´matique (Valentine et al., et al., 2006): statistiques nationales et en affectant le 2009). Les villages ont e´te´ choisis a` 1 = infestation tre`s faible (1 a` 10 taux d’infestation de´termine´ lors des partir de transects distants de 25 km, plants de Striga); enqueˆtes et des visites de terrains. partant des villes retenues et oriente´s 3 = infestation faible (10 a` 30 dans les quatre directions cardinales plants) ; suivant quatre axes routiers. Un e´chan- 5 = infestation moyenne (30 a` 50 Analyse des données tillon de quatre villages a e´te´ fixe´ par plants) ; axe routier. Le premier village a e´te´ 7 = infestation forte (50 a` 100 Les coordonne´es ge´ographiques des se´lectionne´ a` l’aide d’une liste de plants) ; sites ont e´te´ incorpore´es au logiciel nombres ale´atoires. Les autres ont e´te´ 9 = infestation tre`s forte (plus de 100 ArcGIS 10.0 (ESRI, 2011) pour la se´lectionne´sdefac¸on syste´matique, en plants). re´alisation des cartes d’infestation observant une distance de 6 km, puis et de re´partition des espe`ces de passant au village le plus proche. Au Striga, ainsi que pour la de´termina- moins un paysan a e´te´ interroge´ au Superficies infestées par tion des superficies infeste´es. Des hasard dans chaque village a` l’aide d’un Striga spp. statistiques descriptives et des tabu- questionnaire. A` l’inte´rieur des champs lations ont e´te´ re´alise´es pour re´sumer de ce´re´ales identifie´s, les espe`ces de Les superficies infeste´es ont e´te´ de´ter- les caracte´ristiquesdeszonesinfes- Striga ont e´te´ recense´es syste´matique- mine´es a` partir de la carte actualise´e te´es.LetestdeKhi-carre´ ae´te´ ment. Les parame`tres ci-dessous ont e´te´ des zones d’infestation. Le taux applique´ pour de´celer une diffe´rence retenus pour de´terminer le degre´ moyen de 70 %, repre´sentant les statistique entre les proportions des d’infestation : terres cultivables de la zone d’e´tude espe`ces de Striga recense´es. Le
Tableau 1. Zones et niveaux d'infestation de Striga en Côte d'Ivoire. Table 1. Areas and levels of Striga infestation in Côte d'Ivoire.
Localités Nombre Nombre Nombre % de villages Zones agro- % de villages de villages de villages de villages infestés écologiques infestés par zone prospectés infestés non infestés par localité agro-écologique
Bouna 16 16 0 100,0 Nord-est 50,0 Bondoukou 13 0 13 0,0
Tengrela 14 14 0 100,0 Boundiali 16 8 8 50,0 Korhogo 20 19 1 95,0 Dikodougou 4 1 3 25,0 Nord-centre 79,6 Nielle* 5 5 0 100,0 Ferkessedougou 8 8 0 100,0 Kong 6 4 2 66,7 Tafire** 7 7 0 100,0
Madinani 4 2 2 50,0 Odienne 15 2 13 13,3 Nord-ouest 49,2 Samatiguila 3 1 2 33,3 Minignan 3 3 0 100,0
Total 134 90 44 - - -
Taux (%) de villages infestes*** 71,8
* : la localité de Niellé appartient au département de Ferkessédougou. ** : la localité de Tafiré appartient au département de Niakaramandougou. *** : pourcentage moyen de villages infestés. Les villages de Bondoukou sont exclus du calcul car ils n'appartiennent pas à la zone infestée.
40 Cah Agric, vol. 24, n8 1, janvier-fe´ vrier 2015 logiciel SPSS version 16.0 (SPSS, 2007) morphotypes a` fleurs jaune et rouge Discussion ae´te´ utilise´. ont e´te´ rencontre´sdansunmeˆme champ de riz pluvial. A` Tafire´, seul le morphotype a` fleur rouge a e´te´ trouve´ Cette e´tude a permis de mettre a` jour la Résultats dans des gramine´es sauvages. S. ges- carte d’infestation des cultures par les nerioides ae´te´ rencontre´ a` Korhogo et a` Striga. Les zones infeste´es s’e´tendent Ferkesse´dougou dans Tephrosia ele- entre 8˚47,17’ et 10˚38,84’ de latitude Étendue et degré gans Schum. (Fabaceae). nord, et 2˚47,68’ a` 7˚55,20’ de longitude d'infestation des céréales L’abondance et l’intensite´ d’infestation ouest. La de´termination de l’e´tendue et par les espèces de Striga de S. hermonthica, S. aspera et S. du degre´ des infestations a e´te´ forte- asiatica dans les ce´re´ales sont pre´- ment recommande´e par le colloque de Les zones etle niveau des infestationsde sente´es dans le tableau 2. S. hermon- la FAO (Organisation des Nations Striga ont e´te´ de´termine´s(tableau 1). Le thica a infeste´ se´ve`rement 88 % des Unies pour l’alimentation et l’agricul- taux moyen de villages infeste´sestde champs a` une fre´quence de 97,1 % et ture) pour l’ame´lioration de la gestion 71,8 %. Tengre´la, Nielle´,Ferkesse´dou- une densite´ de 19,8 pieds/m2. S. de Striga en Afrique (Kouassi, 1989). gou et Tafire´ ont pre´sente´ le plus grand aspera a infeste´ faiblement 7 % des L’hypothe`se d’e´volution nord-sud des nombre de champs infeste´s(100%), champs a` une abondance relative de infestations de Striga en Coˆte d’Ivoire suivis de Korhogo 95 % (19/20) et Kong 2,0 % avec 4,8 pieds/m2. S. asiatica a (Kouassi, 1989 ; Johnson et al.,1997)a 66,7 % (4/6), Boundiali 50 % (8/16) et e´te´ observe´ faiblement a` une fre´- e´te´ confirme´e. A` travers cette e´tude, des Dikodougou 25 % (1/4). Toutes ces quence de 0,9 % dans 5 % des champs villages extreˆmement infeste´sa` Ten- localite´s sont situe´es au centre-nord, et a` une densite´ de 2,9 pieds/m2. gre´la et Nielle´, aux frontie`res ivoiro- avec un taux d’infestation de 79,6 % Aucune diffe´rence significative n’a e´te´ burkinabe´e et malienne ont e´te´ obser- (66/80). Le nord-ouest et le nord-est ont trouve´e entre les fre´quences de S. ve´s. D’apre`s Kouassi (1989) les infesta- e´te´ moyennement infeste´s, avec un taux aspera et S. asiatica (Khi-carre´ = 12, tions se seraient propage´es depuis ces d’infestation variant entre 49,2 et 50 %, a` ddl1 = 10, p2 = 0,285). pays pour atteindre la Coˆte d’Ivoire. l’exception des localite´s de Minignan et Ces localite´s appartiennent au domaine de la savane soudanienne dont le Bouna infeste´es a` 100 %. La localite´ de Superficies infestées par Bondoukou n’a pre´sente´ aucune infes- climat est sec (N’klo, 2001) et favorable tation. La carte des zones infeste´es par Striga spp. a` l’expansion de Striga. Des villages Striga spp. a e´te´ actualise´e(figure 2). se´ve`rement infeste´s ont e´galement e´te´ La superficie des zones infeste´es par le Ces zones couvrent le nord de la Coˆte observe´sa` Korhogo, Ferkesse´dougou, Striga ae´te´ de´termine´e(tableau 3). La d’Ivoire a` partirde8˚47,17’a` 10˚38,84’ de Tafire´, Kong et Dikodougou, situe´s zone infeste´e couvre une surface latitude nord et de 2˚47,68’ a` 7˚55,20’ de plus au sud, dans le domaine de savane totale de 6 350 650 ha dont 70 % longitude ouest. sub-soudanienne. Ceci indiquerait que (4 445 460 ha) constituent l’espace les infestations ont aujourd’hui atteint cultivable. Un total de 71,8 % de cette pre`s de la moitie´ du domaine de savane Répartition, abondance superficie (3 191 850 ha) sont poten- sub-soudanienne. Plusieurs facteurs et degré d'infestation tiellement infeste´es. La zone de Striga expliqueraient la propagation des ae´te´ divise´e en deux zones dont des espèces de Striga infestations de Striga dans les cultures 56,2 % (1 793 830 ha) repre´sente de ce´re´ales. Le syste`me de culture Quatre espe`ces ont e´te´ recense´es : l’ancienne zone infeste´e. La nouvelle itine´rante pratique´ dans ces zones est S. hermonthica, S. aspera, S. asiatica zone infeste´e s’e´tend sur une super- consommateur de nouvelles terres et S. gesnerioides (figure 3). S. hermon- ficie de 1 398 020 ha. (N’klo, 2001) et aurait favorise´ la thica a montre´ une re´partition re´gio- Les superficies infeste´es des cultures de disse´mination de Striga. La migration nale. Il a e´te´ trouve´ dans les cultures de maı¨s, mil, sorgho et riz pluvial ont e´te´ des paysans lobis de Bouna, entre 1970 maı¨s, de mil, de sorgho et de riz pluvial. de´termine´es (tableau 4). Au total, et 1990, pour acce´der a` des terres plus Des types a` fleur blanche ont e´te´ 57,2 % (268 250 ha) des surfaces fertiles (Dugue´ et al., 2003) et la forte observe´sa` Kodolkaha (9˚30,98’ N, emblave´es sous ces ce´re´ales ont e´te´ pression sur le foncier exerce´e par ces 5˚28,12’ O) et a` Katiofi (9˚24,38’ N, se´ve`rement parasite´es. Les attaques du paysans a re´duit les temps de jache`re et 5˚35,31’ O), deux localite´s proches de mil par S. hermonthica ont e´te´ plus a appauvri les terres arables, accen- Korhogo. S. aspera est restreint au importantes avec 65,9 % (38 300 ha) tuant ainsi les infestations. Ces obser- centre-nord, principalement a` Boun- des terres ensemence´es infeste´es. Les vations corroborent celles de Berner diali, ou` il infeste le maı¨s, et a` Korhogo infestations du maı¨s ont concerne´ et al. (1995). La transhumance des le riz pluvial. Il a e´te´ observe´ a` 56,5 % (108 160 ha) des superficies e´leveurs peuls du Burkina Faso et du consacre´es a` cette ce´re´ale en zone Mali s’est fortement accrue pendant la Ferkesse´dougou et Tengre´la dans des ´ gramine´es sauvages. Des types a` fleur infeste´e. Egalement 51,0 % (30 360 ha) pe´riode 1969-1974 (Le Guen, 2004)et blanche ont e´te´ rencontre´sa` Nondara des superficies cultive´es en sorgho et aurait contribue´ a` la disse´mination des (9˚31,95’ N, 6˚31,68’ O), Boundiali. 40,5 % (91 430 ha) en riz pluvial ont graines de Striga (Kouassi, 1989). Ces Striga asiatica,a` fleur jaune, a e´te´ e´te´ se´ve`rement infeste´es. observations sont similaires a` celles de observe´ a` Korhogo dans les cultures de Berner et al. (1994) et Abdulai et al. maı¨s et de riz pluvial et a` Tengre´la dans 1 ddl = degre´ de liberte´ (2006). Une enqueˆte mene´e sur les celles de riz. A` Boundiali, les deux 2 p = probabilite´ changements socio-e´conomiques en
Cah Agric, vol. 24, n8 1, janvier-fe´ vrier 2015 41 11˚0’00"N 8˚0’00"w 7˚0’00"w 6˚0’00"w 5˚0’00"w 4˚0’00"w 3˚0’00"w
MALI 11˚0’00"N N BURKINA-FASO Tengréla Niellé 10˚0’00"N
MINIGNAN 10˚0’00"N Samatiguila
Madinani ODIENNE FERKESSEDOUGOU BOUNDIALI KORHOGO
Kong BOUNA
9˚0’00"N Dikodougou Tafiré 9˚0’00"N GUINEE
8˚0’00"N KATIOLA BONDOUKOU 8˚0’00"N GHANA
BOUAKE 7˚0’00"N
YAMOUSSOUKRO 7˚0’00"N 6˚0’00"N 6˚0’00"N
ABIDJAN 5˚0’00"N A T L A N T I Q U E N A 5˚0’00"N LIBERIA E C O
LÉGENDE Ville de la zone d’étude Limite d’État Limite de district
4˚0’00"N Ancienne zone infestée Limite de région Nouvelle zone infestée Limite administrative de la zone d’étude 4˚0’00"N Capitale d’État Limite des zones infestées ECHELLE : 1 / 4 000 000 Chef-lieu de région Plan d’eau
8˚0’00"w 7˚0’00"w 6˚0’00"w 5˚0’00"w 4˚0’00"w 3˚0’00"w
Figure 2. Carte actualisée des zones infestées par les espèces de Striga en Côte d'Ivoire.
Figure 2. Updated map of Striga infested zones in Côte d'Ivoire.
42 Cah Agric, vol. 24, n8 1, janvier-fe´ vrier 2015 11˚0’00"N 8˚0’00"w 7˚0’00"w 6˚0’00"w 5˚0’00"w 4˚0’00"w 3˚0’00"w
MALI 11˚0’00"N N
Tengréla BURKINA-FASO
Niellé 10˚0’00"N
MINIGNAN 10˚0’00"N Samatiguila
Madinani KORHOGO FERKESSEDOUGOU ODIENNE BOUNDIALI
Kong BOUNA
9˚0’00"N Dikodougou Tafiré 9˚0’00"N GUINEE
8˚0’00"N KATIOLA BONDOUKOU 8˚0’00"N GHANA
BOUAKE 7˚0’00"N
YAMOUSSOUKRO 7˚0’00"N 6˚0’00"N 6˚0’00"N
ABIDJAN 5˚0’00"N
A T L A N T I Q U E N 5˚0’00"N LIBERIA A E C O LÉGENDE Limite d’État Striga hermonthica Limite de district Striga aspera Limite de région 4˚0’00"N Striga asiatica Limite administrative de la zone d’étude
Limite des zones infestées 4˚0’00"N Striga gesnerioides Plan d’eau Ville de la zone d’étude Capitale d’État ECHELLE: 1 / 4 000 000 Chef-lieu de région
8˚0’00"w 7˚0’00"w 6˚0’00"w 5˚0’00"w 4˚0’00"w 3˚0’00"w
Figure 3. Carte de répartition des espèces annuelles de Striga en Côte d'Ivoire.
Figure 3. Map of the distribution of annual Striga species in Côte d'Ivoire.
Cah Agric, vol. 24, n8 1, janvier-fe´ vrier 2015 43 Tableau 2. Abondance et intensité d'infestation des espèces de Striga en Côte d'Ivoire. Table 2. Abundance and degree of infestation of Striga species in Côte d'Ivoire.
Espèces Nombre Abondance Nombre de Note de Densité Degré d'infestation de plants relative (%) parcelles présence ou nombre de Striga de Striga échantillonnées moyen de plants de (pieds/m2) échantillonnés Striga par parcelle échantillonnée (erreur standard)
S. asiatica 70 0,9 5 14,0 (4,3) 2,9 Infestation faible S. aspera 160 2,0 7 22,9 (8,5) 4,8 Infestation faible S. hermonthica 7848 97,1 88 89,2 (6,0) 19,8 Infestation forte
Total 8078 100,0 100 - -
Khi-carre de Pearson* 12,0 ns ddl = 10 P = 0,285 ddl : degré de liberté ; ns : non significatif ; p= probabilité de commettre l'erreur alpha. * : L'existence d'une différence entre les fréquences de S. asiatica et S. aspera a été testée au seuil de 5 % (erreur alpha).
Tableau 3. Superficies infestées par les espèces de Striga au nord de la Côte d'Ivoire. Table 3. Farmlands infested by Striga species in northern Côte d'Ivoire.
Zones infestées par les espèces Superficies de la zone Superficies cultivables Superficies cultivables de Striga infestée par Striga (ha) dans la zone potentiellement infestée (ha)* infestées (ha)**
Anciennes zones infestees (1974-1997) 3 569 100 2 498 360 1 793 830 Nouvelles zones infestees (1997-2011) 2 781 550 1 947 100 1 398 020
Total 6 350 650 4 445 460 3 191 850 ha : hectare * : superficies cultivables dans la zone infestée = superficie de la zone infestée au Striga x 70/100. ** : superficies cultivables potentiellement infestées = superficies cultivables dans la zone infestée x Taux (%). d'infestation (% villages infestés). Les superficies infestées ont été arrondies.
Tableau 4. Superficies des cultures de maïs, mil, sorgho et riz pluvial infestées par le Striga dans le nord de la Côte d'Ivoire. Table 4. Maize, millet, sorghum and upland rice farmlands infested by Striga in northern Côte d'Ivoire.
Céréales Superficies moyennes Pourcentage moyen Superficies (ha) emblavées sur de superficies infestées moyennes la période 1997 – 2011* (erreur standard) (ha) infestées
Maïs 191 365 56,5 (2,84) 108 160 Mil 58 117 65,9 (4,50) 38 300 Sorgho 59 563 51,0 (4,52) 30 360 Riz pluvial 225 798 40,5 (4,67) 91 430
Total 534 843 57,2 268 250 ha = hectare *Source : Countrystat (2013) Les superficies moyennes infestées ont été arrondies.
44 Cah Agric, vol. 24, n8 1, janvier-fe´ vrier 2015 Coˆte d’Ivoire coı¨ncidant avec l’apparition S. hermonthica est l’espe`ce la plus remerciements sont adresse´s au SAFGRAD et la propagation des plantes parasites a abondante rencontre´e. Cette observa- pour le financement de cette e´tude. souligne´ les effets de la crise de 2002 tion corrobore celle de Kouassi (1989). (Kouakou & Akanvou, 2009, communi- S. aspera et S. asiatica ont e´te´ cation personnelle). La culture du coton faiblement repre´sente´es. Toutefois utilise´e en rotation avec les ce´re´ales pour S. aspera serait occasionnellement Références juguler les attaques du parasite a e´te´ important a` Boundiali. Ces observa- abandonne´e. Les postes de controˆles tions sont en accord avec celles de Abdulai MS, Denwar NN, Haruna M, 2006. Combating the menace of Striga hermonthica phytosanitaires de semences en prove- Johnson et al. (1997). infestation: An integrated approach adopted in nance des pays voisins ont e´te´ supprime´s Une autre innovation de l’e´tude est North-Eastern Ghana. Journal of Agronomy 5:617- pendant la crise, occasionnant l’introduc- l’estimation de la superficie des zones 20. tion de semences contamine´es par Striga infeste´es a` environ 3 191 850 ha et Akanvou L, Akanvou R, Toto K, 2006. Effets des spp. Le de´partement de Bondoukou, ou` divise´e en deux zones. L’ancienne variétés de maïs et de légumineuses dans la lutte aucune espe`ce de Striga n’a e´te´ obser- zone Striga (1 793 830 ha) prend en contre Striga hermonthica en zone de savane de ve´e, n’est pas a` l’abri des infestations, car compte la pe´riode 1974-1997 ou` le côte d'Ivoire. Agronomie Africaine 18:13-21. il enregistre une migration importante de parasite a e´te´ signale´ dans les cultures Berner DK, Cardwell KF, Faturoti BO, Ikie FO, Williams OA, 1994. Relative roles of wind, crop paysans lobis qui y ont introduit la ce´re´alie`res (Merlier, 1974) jusqu’a` la seeds, and cattle in dispersal of Striga spp. Plant culture du sorgho. La carte des zones pe´riode ou` de fortes infestations ont Disease 78:402-6. infeste´es ainsi actualise´e permettra de e´te´ de´couvertes autour de Korhogo et Berner DK, Kling JG, Singh BB, 1995. Striga contenir le parasite et mener des actions Ferkesse´dougou par Johnson et al. research and control: A perspective from Africa. de lutte pre´ventive pour aider les (1997). La nouvelle zone d’extension Plant Disease 79:652-60. paysans des zones infeste´es a` se´curiser du Striga (1 398 020 ha) couvre la Berner DK, Winslow MD, Awad AE, Cardwell KF, leur production ce´re´alie`re. pe´riode 1997-2011. S. hermonthica Mohan Raj DR, Kim SK, 1997. Striga research Trois espe`ces de Striga (S. hermon- constitue la principale contrainte a` la methods – A manual. 2nd edition. Ibadan (Nigeria): International Institute of Tropical Agriculture (IITA). thica, S. aspera et S. asiatica) observe´es production ce´re´alie`re. Un total de http://iita.titaninternet.co.uk/cms/details/Striga.pdf dans les cultures de maı¨s, mil, sorgho et 57,2 % soit 268 250 hectares des cultu- Botanga CJ, Kling JG, Berner DK, Timko MP, 2002. de riz pluvial ont de´ja` e´te´ recense´es res de maı¨s, mil, sorgho et riz pluvial Genetic variability of Striga asiatica (L.) Kuntz (Riches et al., 1994 ; Johnson et al., dans le nord de la Coˆte d’ivoire ont based on AFLP analysis and host-parasite interac- 1997). Cependant, c’est la premie`re fois e´te´ se´ve`rement infeste´es par cette tion. Euphytica 128:375-88. que l’existence de S. asiatica a` fleur espe`ce. Countrystat, 2013. http://www.countrystat.org/ rouge parasitant le riz pluvial a e´te´ home.aspx?c=CIV&ta=107CPD010&tr=7 re´ve´le´eenCoˆte d’Ivoire. Les deux Dugué P, Koné FR, Koné G, 2003. Gestion des morphotypes de S. asiatica a` fleurs ressources naturelles et évolution des systèmes de jaune et rouge ont e´te´ observe´sdans production agricoles des savanes de Côte d'Ivoire - Conclusion Conséquences pour l'élaboration des politiques des meˆmes champs a` Nondara, Boun- agricoles. In : Jamin JY, Seiny Boukar L, Floret C diali. Botanga et al. (2002) ont fait des (eds). Savanes africaines : Des espaces en muta- observations similaires a` Gbe´gourou, La pre´sente e´tude a permis d’actualiser tion, des acteurs face à de nouveaux défis. Actes du colloque, mai 2002, Garoua, Cameroun. Prasac, au Be´nin. L’apparition de S. hermon- la carte des zones infeste´es par les N'Djamena, Tchad - Cirad, Montpellier, France. thica a` fleur blanche a` Kodolkaha et a` espe`ces Striga en Coˆte d’Ivoire. Elle a http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/12/88/92/ Katiofi serait due a` une mutation confirme´ l’hypothe`se d’e´volution PDF/T109Dugue.pdf survenue au sein de populations a` nord-sud des infestations de Striga et ESRI, 2011. ArcGIS Desktop: Release 10. Redlands fleur rose. Ces observations corrobo- permis d’identifier S. hermonthica (USA): Environmental Systems Research Institute. rent celles de Ramaiah et al. (1983). Ces comme e´tant l’espe`ce la plus abon- Johnson DE, Riches CR, Diallo R, Jones MJ, 1997. mutations, qui sont des e´ve´nements dante et la plus dommageable dans les Striga on rice in West Africa; Crop host range and ´ ´ cultures ce´re´alie`res. Cette e´tude, the potential of host resistance. Crop Protection genetiques apparaissant de fac¸on 16:153-7. spontane´e, indiqueraient la forte varia- approfondie, permettra de cir- bilite´ au sein de S. hermonthica et conscrire les infestations de Striga et Kouassi B, 1989. Striga in Côte d'Ivoire. In: Robson TO, Broads RH (Eds.). Proceedings of the FAO/OAU expliqueraient le potentiel invasif de de prote´ger les zones non infeste´es African Government Consultation on Striga control. cette espe`ce, comme mis en e´vidence par la mise en œuvre d’actions visant a` Maroua (Cameroon): FAO. http://books.google.es/ par Mohamed et al. (2006). Cela serait a` e´viter sa propagation. & books?id=x0WMSFETzS4C&pg=PA44&hl=fr&- source=gbs_toc_r&cad=3#v=onepage&q&f=- l’origine de sa dispersion dans toute la false. Consulté le 05/01/2013 zone infeste´e. S. aspera a` fleur blanche Le Guen T, 2004. Le développement agricole et ae´te´ trouve´ a` Nondara. Ce serait Remerciements pastoral du nord de la Côte-d'Ivoire : Problèmes de e´galement la premie`re fois que de Ce travail est le fruit de la collaboration entre coexistence. Les Cahiers d'Outre-Mer 226- 227:259-88. http://com.revues.org/563 telles observations ont e´te´ faites. Cette le Centre national de recherche agrono- espe`ce comme la pre´ce´dente est allo- ˆ Lévêque A, 1983. Étude pédologique et des mique (CNRA) de Cote d’Ivoire et l’Agence e game. Striga gesnerioides a seulement nationale d’appui au de´veloppement rural ressources en sols de la région du nord du 10 e´te´ trouve´ dans Tephrosia elegans parallèle en Côte d'Ivoire. Cartes des unités morpho (ANADER) de Coˆte d’Ivoire. Les auteurs - pédologiques et des paysages morpho – pédolo- (Fabaceae), il n’a pas encore e´te´ remercient since`rement le colonel Traore´ giques. Partie ivoirienne des feuilles de Niellé, de observe´ dans le nie´be´ en Coˆte d’Ivoire. Bassimory, ex-Directeur re´gional Nord de Tengréla et de Tienko. Paris (France) : ORSTOM. Ce re´sultat est en accord avec celui de l’ANADER, qui a facilite´ l’exe´cution des Merlier H, 1974. Végétation adventices des rizières Riches et al. (1994). enqueˆtes et des visites de terrains. Nos pluviales de Côte d'Ivoire. Deuxième symposium
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