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Rev. Elev. Méd. vét. Pays trop., 1981, 34 (2): 221-230.

Le parc national --Saint Floris (R.C.A.) Végétation et faune

par B. PEYRE DE FABREGUES

Institut d'Elevage et de Médecine Vétérinaire des Pays tropicaux, 10, rue Pierre-Curie, 94704 Maisons-Alfort Cedex

RÉSUMÉ

Le parc national Manovo-Gounda-Saint Floris, situé dans le Nord du territoire de la République Centrafricaine, abrite une grande diversité d'animaux sauvages qui présentent un attrait réel pour le tourisme de vision que l'on voudrait y développer. L'extension et la valeur fourragère des formations végétales pâturables p~rmettraie~t aisément l'accroisse!llent de la p<>pulation animale globale. Mais diverses especes de grands mammifères, parm1 lesquelles l'éléphant et la girafe, sont en danger de régression par suite de l'importance du braconnage. Diverses possibilités sont envisagées qui pourraient permettre de dévelop­ per le tourisme de vision et d'accentuer la lutte contre le braconnage.

GÉNÉRALITÉS En République Centrafricaine; le parc national Manovo-Gounda-Saint Floris, créé en Dans le monde entier, la création et la 1977, répond à cet objectif mais son équipe­ protection de parcs nationaux et de réserves ment en gardes-chasse et en moyens d'action totales s'inscrit dans le cadre de la lutte contre est encore considérablement insuffisant pour la réalité destructrice qui accompagne l'expan­ contrer efficacement les conséquences désas­ sion économique et démographique dont le treuses du braconnage. Après la recrudes­ rythme s'est brutalement accéléré au cours des cence des massacres d'animaux des années dernières décennies. 1960 à 1970, la destruction semble s'être Des interrogations sont désormais apparues, ralentie, mais de l'immensité du parc et de la qui concernent de plus en plus de monde. proximité des frontières du Tchad et du Sou­ Parmi elles, se dégage la question concernant dan, résulte encore le problème permanent : le les modalités de protection, voire de sauve­ braconnage. garde d'espèces animales et végétales mena­ Le parc national, dont la surface avoisine cées de disparition, qui sont une part fonda­ 1,75 million d'hectares, occupe, dans le Nord mentale d'un capital commun à l'humanité ... · Centrafricain, une partie de la Préfecture du Pour les espèces animales, l'Afrique a la Bamingui- dont le chef-lieu est chance de détenir la plus grande diversité de N'Délé. grands mammifères. Cela lui confère la res­ Issu de la réunion de l'ancien parc national ponsabilité et le devoir d'en assurer la survie et Saint Floris, avec les domaines et territoires non pas seulement la possibilité d'en tirer compris entre ce parc, les rivières Bahr Aouk, parti. Manovo, et la crête du massif des

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Bongo, il est. parmi les plus vastes et les plus LE MILIEU NATUREL riches en animaux des parcs nationaux d'Afrique tropicale au Nord de l'équateur. La présence et la répartition spatiale des ' Il a été créé, d'une part pour protéger le formations végétales du parc. national sont milieu naturel et, en particulier, la faune sous la dépendance d'un ensemble de facteurs sauvage encore abondante dans cette région, écologiques parmi lesquels les éléments pré­ et, d'autre part pour permettre une certaine pond~rants sont le climat, la topographie et « exploitation de ce capital naturel » à des fins l'altitude, l'hydrographie et les sols. Ces élé­ touristiques .et d'information-éducation des ments interfèrent étroitement entre eux et, centrafricains eux~mêmes. dans le parc national, leurs gradients respectifs Le développement du tourisme de vision sont. tous orientés selon une direction générale pourrait, en faisant connaître et apprécier Sud - Sud-Est, Nord - Nord-Ouest. l'incontestable richesse qu'est pour la Centra­ En effet, le parc national s'étend sur le frique sa faune sauvage, participer utilement versant Nord du massif des Bongo (versant au développement national. tchadien), sa région de plus haute altitude (780 En accord avec ces objectifs et dans le cadre à 800 m) du Sud au Sud-Est bét;téficiant des de la coopération Franco-Centrafricaine un précipitations, les plus ,abondantes (Î' supé­ programme intitulé « Protection et aménage­ rieure à 1 300 m), des températures maximales ment du parc national Manovo-Gounda-Saint moins élevées et des reliefs les plus favorables Floris», sur financement FAC, est actuelle­ au ruissellement exoréique. Au contraire, sa ment en cours. région de plûs basse altitude, du Nord au

PARC NATIONAL MANOVO GOUNDA SAINT FLORIS ~

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GEOGRAPHIE DU PARC NATIONAL

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Nord-Ouest reçoit moins de précipitations (P supportent des formations végétales bien dis­ de l'ordre de 900 mm), subit des températures tinctes, elles-mêmes diversement recherchées maximales torrides et présente une topogra­ par les espèces d'animaux sauvages. La végé­ phie bloquant le plus souvent tout ruisselle­ tation est constituée : ment ( dépressions endoréiques inondées pen­ par des futaies forestières sèches, carac­ dant plusieurs semaines à plusieurs mois tous térisées par une strate arborée aux cimes les ans). jointives et par l'extrême rareté des plantes Cette dernière particularité (important sec­ vivaces dans le sous-bois herbacé, qui sem­ teur endoréique où poussent des formations blent surtout servir de refuge aux animaux herbeuses dépourvues d'arbres et saisonnière­ craintifs, i ment inondables) fait que le parc national - par des savanes arborées et arbustives à constitue un ensemble relativement original tapis herbacé où vivaces et annuelles se parmi les savanes du nord centrafricain. concurrencent et qui semblent parcourues, en Ce contexte écologique entraîne une impor­ saison des pluies, par la plupart des herbivo­ tante différenciation des sols qui, à leur tour, res,

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par des savanes herbeuses inondables, médian, représenté par le piémont. Il est constituées de graminées vivaces souvent hau­ séparé des plateaux par un escarpement brutal tes et puissantes, sans aucun végétal ligneux ; atteignant presque 100 mètres de dénivella­ c'est Je domaine de prédilection de toutes les tion, parfois verticale. Ce piémont est réguliè­ antilopes en saison sèche. rement bien que faiblement pentu et est relati­ Du point de vue géomorphologique, le parc vement sec car son réseau hydrographique est national se présente comme un vaste ensemble exoréique. La végétation y est constituée de de bassins versants collectant, sur le flanc savanes arborées - arbustives, dominées par Nord du massif des Bongo, des eaux qui des combrétacées. Leurs physionomies sont aboutiront au Lac Tchad. variables et leurs structures complexes. Les La topographie de ces versants n'est pas une ligneux les plus représentés y sont Terminalia pente régulière. Une coupe Sud Sud-Est/Nord laxijlora et Anogeissus leiocarpus, Nord-Ouest ( cf. fig.) montre que se succè­ - un ensemble illuvial. C'est ·celui du dent: Nord, représenté par des dépressions endoréi­ - un ensemble éluvial. C'est celui du sud, ques, plates ou légèrement concaves, où le représenté par les plateaux dont les hauteurs phénomène dominant est l'engorgement, voire forment . des dômes peu marqués, à sommets la submersion, répétés tous les ans et relative­ sub-horizontaux et à bordures très faiblement ment durables (plusieurs semaines ou même pentues vers les rivières qui les parcourent. mois). Les eaux de ruissellement provenant Les phénomènes dominants y sont liés au des ensembles en amont s'accumulent ici, ruissellement provoqué par une forte pluvio­ entraînant, dans les dépressions, une inonda­ métrie sur des reliefs tabulaires disséqués et tion saisonnière régulièrement renouvelée qui aux sols peu perméables. La végétation y est est très sélective pour la végétation. Celle-ci constituée de savanes arborées où dominent est en général une savane herbeuse dense et Isoberlinia doka, Erythrophleum suaveolens; recouvrant · complètement le sol. Les grami­ Afzelia africana, Burkea africana, Terminalia nées vivaces les plus représentées y sont laxijlora, Hyparrhenia rufa, Vetiveria nigritana, Jardinea - un ensemble colluvial. C'est le secteur congoensis, Vossia cuspidata.

Profil Sud Sud-est . Nord Nord-ouest du parc.

. SUD 8' 19' N NORD 21· 44' E . Ensembie 1 g· 43' N 11/uvia/ 21' 21' E Ensemble Ensemble ...-__,.__ illuvial eolluvia/ 1 .. ;; .f. ! 1 I! ...... ~ Ë i "' .. .. C -: :. .. ! .. ! m .. :i; .: ...... e .. I! Il ! . :!! ! l; 1 "' .. 1 .. f 0 fil ! = m i ... ~ "' !J: ...

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LA VÉGÉTATION psychologiques. Par exemple, si 'l'insécurité ET SA VALEUR PASTORALE semble régner sur les pâturages les plus recher­ chés, ils se retireront alors dans des endroits plus tranquilles bien que d'attrait fourrager Pour les herbivores sauvages, la valeur four­ bien moindre. ragère des formations végétales dépend de Au niveau de la constitution de leur ration, divers facteurs dont les principaux sont la les animaux de taille élevée peuvent ingérer composition floristique, le stade de développe­ des feuillages d'arbustes. C'est le cas des ment des plantes au moment du broutage, girafes, élans de Derby, hippotragues, rhino­ l'abondance relative des plantes consomma­ céros et surtout éléphants. Mais ces derniers bles dans le pâturage et, enfin, les animaux ont un comportement très particulier dû à la eux-mêmes. Ils n'ont pas tous, en effet, les diversité des prélèvements perm~s par leur mêmes préférences ni les mêmes possibilités trompe. de collecte de leur ration de fourrage. Au pâturage en effet, l'éléphant saisit une La présence simultanée d'espèces différen­ brassée d'herbe, la secoue (eau, terre?) et tes a son importance pour l'attrait du pâtu• l'enfourne dans sa bouche. Dans ces condi­ rage. Les animaux semblent préférer les pâtu• tions, il ne trie pas brin à brin I De même pour rages où les plantes appétées sont denses mais les sommités d'arbustes qu'il arrache. Cela ce n'est pas toujours obligatoirement le cas. explique que sa nourriture soit si grossière Dans une végétation donnée dont le tapis qu'une grande partie peu ou pas digérée se pâturable est composé de plusieurs plantes retrouve tout à fait reconnaissable dans les alibiles, le degré possible du choix entre diver­ · fèces. Mais, quand il consomme par exemple ses plantes a une importance certaine. Il en des fruits, la précision de sa trompe lui permet résulte souvent qu'une plante consommée à un de les cueillir un à un, délicatement, sur l'arbre stade précis dans certaines conditions même (ex. : Diospyros, Tamarindus, etc ... ). d'environnement peut ne plus l'être dans un Cela explique sans doute qu'il parvienne à se environnement différent. constituer ainsi une ration d'une concentration Le stade de développement de la plante a convenable pour ses besoins. Les' autres aussi une très grande importance pour son consommateurs de feuilles collectent brin à appétibilité. En outre, la valeur nutritive d'une brin, si ce n'est feuille à feuille, les composan­ plante est étroitement liée aux stades de déve­ tes de leur ration, c'est en particulier le cas des loppement, eux-mêmes déterminés par la sai­ girafes et des élans de Derby. son (en général l'entrée en vie active débute en saison humide, tandis que la dessiccation ou Pour les animaux consommateurs d'herbe, un important ralentissement du métabolisme la difficulté découle des variations considéra­ correspondent à la saison sèche) par les condi­ bles de densité des herbages. Ainsi, les cobes tions stationnelles (degré et durée d'inonda­ et, en règle générale, toutes les antilopes de tion ou d'humidité des sols par exemple) et par petite taille, sont très bien adaptés à brouter le passage des feux, qui peuvent provoquer au ras du sol et ont une dentition caractérisée l'apparition de repousses très appétées en par la puissance des incisives. Ils peuvent général. Après feu, les repousses des grami­ cisailler ou arracher de l'herbe même rase qui est, en général, très riche. Leur ration sera nées vivaces constituent « l'herbe » la plus recherchée en saison sèche ; elles ont une donc relativement aisée à collecter en toute haute valeur nutritive. saison dans des herbages en montaison ou en L'animal enfin intervient, primo, par ses repousses. habitudes de consommation (son régime) liées Au contraire, l'hippopotame dont les incisi­ à sa physiologie digestive et à ses caractéristi­ ves sont recourbées et non coupantes, est très ques physiques (taille, mâchoires, dentition). mal adapté pour exploiter l'herbe rase. Il ne Ainsi, par exemple, hippopotames et cobes peut pas non plus ingérer trop de pailles sèches apprécient tous deux des graminées en vert car il lui faudrait alors en consommer une mais il s'agit d'espèces bien différentes. quantité énorme pour y trouver le~ nutriments Secondo, les groupes d'animaux où les indivi­ nécessaires à ses besoins. dus eux-mêmes peuvent réagir différemment, Cela explique sans doute que l'hippopotame soit en raison d'un état physiologique particu­ ne s'éloigne guère des dépressions longuement lier (parfois pathologique) soit pour des motifs inondées (où il trouve, de plus, le milieu

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aquatique qui lui est nécessaire) où poussent VALEUR ALIMENTAIRE les grands herbiers à Vossia cuspidata. Cette graminée a en effet la particularité d'offrir une En saison sèche, la valeur alimentaire .des masse végétale très importante, restant lon­ éléments fourragers disponibles semble satis­ guement aqueuse, constituée de chaumes faisante si l'on s'en tient aux résultats des semi-flottants, de haute. taille, emmêlés en analyses bromatologiques effectuées (op. cit.), échevaux qui peuvent être très aisément hap­ du moins pour les éléments énergétiques et pés par la large bouche de l'hippopotame. En protéiques. · outre, ces chaumes sont cassants, ne nécessi­ Pour les repousses graminéennes après feux, tent pas un cisaillement pour être prélevés et la concentration énergétique des échantillons ne sont pas creux mais remplis d'une moelle analysés est, en moyenne, de 0,69 (extrêmes parenchymateuse qui augmente le volume 0,49 et 0,8~) Unités Fourragères par kg de ingéré. matière sèche; Celle des matières protéiques Du point de vue de l'affouragement, l'étude digestibles, pour les mêmes échanti1lons analy­ phyto~écologique réalisée par l'Institut sés e.st de 72 ( extrêmes 23 et 195) grammes par d'Elevage et de Médecine Vétérinaire des kg de matière• sèche. Pays Tropicaux (*) conclut que dans l'ensem­ Pour les éléments fourragers provenant des ble, loin. de. se concurrencer, les herbivores arbustes, le taux moyen d'Unités Fourragères sauvages du parc national paraissent,. au est de 0,77 (extrêmes 0,41 et 0,91) UF par kg contraire, se compléter au niveau de l'utilisa­ .de matière sèche, tandis qu'ils contiennent 70 tion de la production fourragère naturelle. De ( extrêmes .Tr et 163) grammes de. matière.s sorte que la diversité des.espèces animales sur protéiques digestibles par' kg de matière sèche. un même pâturage permet son exploitation Ces estimations, sommaires, car elles ne optimale et réalise certainement l'équilibre portent que sur un faible nomore d'échantil­ écologique le meilleur. lons analysés doivent être complétées par le Les estimations de la productivité fourra­ fait que, d'instinct, les animaux sauvages gère des formations herbeuses à la période la savent, au pâturage, choisir les éléments qui plus difficile, c'est-à-dire en fin de saison constitueront la ration convenant le mieux à sèche, permettent de penser que la quantité leurs besoins. Les besoins eh énergie et matiè­ des repousses consommables, après feux, est res protéiques Sont donc certainement couverts suffisante pour couvrir convenablement les le plus souvent. Cela contribue probablement à besoins des animaux. expliquer l'excellent état des herbivores que Le potentiel de repousse après feux préco­ l'on peut observer, et, dont, en saison sèche, la ces atteint sa valeur maximale, de l'ordre de ration est exclusivement composée de repous­ 180 à 220 kg de matière sèche par ha, dans les ses herbacées et/ou arbustives. formations végétales des savanes herbeuses En ce qui concerne les éléments ·minéraux situées dans des conditions stationnelles favo­ (cf. analyses in op. cit., les insuffisances qui rables. Comme il s'agit de repousses grami­ semblent exister sont, probablement, compen­ néennes vertes et appétées, on peut admettre sées par l'exploitation spontanée de « terres qu'il n'y a pas de pertes, la totalité de cette salines » constituées par de petites zones production peut être consommée. d'affleurements minéraux. Assez no.mbreuses La surface totale occupée par les·formations dans · le parc national, elles sont assidûment végétales des. savanes herbeuses pouvant offrir visitées par .les herbivores. cette production maximale représente de 24 à·· 27 p. 100 du territoire du parc selon la pluvio­ sité de l'année. Pour la plupart, elles sont LES GRANDS ANIMAUX DU PARC situées dans les secteurs nord et centre. C'est NATIONAL du reste dans ces régions que s'observent, en Si l'on se limite aux espèces de grande taille saison sèche, les plus grandes concentrations qui sont les plus attrayantes pour le tourisme d'animaux sauvages, parmi lesquelles domi­ de vision, on dénombre dans le parc national : nent les antilopes et les éléphants. - un oiseau : l'autruche : Struthio camelus (L.) (*) Etude phyto-écologique .et cartographie du parc national Manovo-Gounda-Saint Floris, R. C. A., mars - une quinzaine de mammifères herbivores : 1981 : 146 p. + carte. I. E. M. V. t. /C. T. F. T. l'éléphant:.. Loxodonta africana (Blum.), 226 - Retour au menu

la girafe: Giraffa camelopardalis (L.), réparties régulièrement, jamais en troupeaux. l'hippopotame : Hippopotamus amphibius Consomment des feuillages et peut-être des (L.), herbages. le rhinocéros : Diceros bicornis (L. ), - Hippopotames : Environ 1400 individus, le buffle : Syncerus cafter (Sparrman), dont 1200 rassemblés durant la saison sèche au l'élan de Derby: Taurotragus derbianus moins, dans l'ensemble des mares allant de (Gray), Gata à la Vakaga-Ouandjia. Consomment des le cobe defassa : Kobus ellipsiprymnus graminées hautes, denses et fraîches, Vossia (Ogilby), cuspidata principalement. le bubale: Alcelaphus buselaphus (Pallas), - Rhinocéros : Quelques dizaines ? Très l'hippotrague : Hippotragus equinus difficiles à observer, vivent isolés. Consom­ (Demarest), ment probablement des feuillages. Recher­ le damalisque : Damaliscus lunatus chent les zones accidentées. (Burchell), - Buffles : Effectif 8 à 10 000. Semblent le cobe de Buffon : Kobus Kob (Erxleben), plutôt concentrés sur les plateaux où ils for­ le guib harnaché : Tragelaphus scriptus ment de grands troupeaux et dont ils semblent (Pallas), ne pas s'éloigner. Consommateurs d'herbe le redunca : Redunca redunca (Pallas), surtout en zone humide et peut-être parfois de l'ourebi: Ourebia ourebi (Zimmerman), feuilles. les cephalophes: Cephalophus rufilatus - Elans de Derby : Effectif 1 000 ? Plutôt (Gray), Sylvicapra grimmia (L.). rassemblés sur les plateaux où ils se répartis­ - quelques animaux omnivores : sent régulièrement par petits groupes. les singes : Patas Cercopithecus patas (Schre­ Consommateurs de feuilles ( Gardenia) et ber), Tantale C. tantalus (Ogilby), Colobe peut-être d'herbe. Colobus guereza (Rüpell), Galago Galago - Cobes defassa : Effectif 5 à 6 000. Sem­ senegalensis (Geoffroy), blent ne pas s'éloigner trop des cours d'eau et le babouin: Papio anubis (Fischer), des savanes herbeuses dont ils pâturent l'herbe le phacochère : Phacochoerus aethiopicus ou les repousses fraîches. (Pallas). - Hippotragues : De 1 000 à l 200 têtes ? Très disséminés en petits troupeaux. Principa­ - les grands carnivores : lement consommateurs de feuillages. le lion: Panthera leo (L.) très commun, - Bubales: Seraient plus de 10 000. C'est l'hyène tachetée : Crocuta crocuta (Erxle­ probablement l'antilope la plus représentée ben) très commune, dans le parc national. Répartition très régu­ le lycaon: Lycaon pictus (Temminck), lière, jamais en troupeaux de plus de quelques le léopard ou panthère : Panthera pardus têtes. Consommateurs d'herbe. (L.) rare, le guépard: Acinonyx jubatus (Scheber) très - Damalisques : Effectif 1 500 à 2 500 sans , rare. doute. Très mobiles, ils semblent quitter le parc à certaines saisons. Consomment princi­ - et une multitude d'oiseaux, parfois de palement de l'herbe. grande taille ( ex. Pélican, Marabout etc ... ) et constituant d'importantes colonies. - Cobes de Buffon : Plus de 10 000. Ne Les effectifs des herbivores, estimés par les s'éloignent pas des zones humides où ils pâtu• spécialistes qui résident et travaillent en per­ rent les savanes herbeuses et les prairies maré­ manence dans le parc national ( en particulier cageuses. Consommateurs exclusifs d'herbe. J. L. TEMPORAL)<*> sont les suivants: Guibs (300 ?), Réduncas (500 à 1 000 ?) - Eléphants : Effectif 2000 à 3000. Sem­ Ourebis (500 ?) et Cephalophes (1000 ?) sont blent migrer saisonnièrement hors du parc des mammifères de petite taille, très mobiles, national. Consommateurs de feuilles, d'herbe difficiles à observer et à dénombrer. Très et de paille. Forment d'importants troupeaux. disséminés, ils sont surtout observés en sous­ - Girafes: Effectif 600 à 800. Semblent bois, peut-être à cause de leur caractère crain­ tif. Consomment sans doute de l'herbe et des feuilles? (*) J. L. TEMPORAL, Chef du projet « Protection et aménagement du Parc National Manovo-Gounda-Saint Singes et babouins, également très nom­ Floris» Rép. Centrafricaine (Projet FAC). breux (les babouins seraient plusieurs mill,iers)

227 - Retour au menu font une grande consommation de prod~ction représente, un jour ou l'autre, un danger pour de ligneux .. qu'ils peuvent cueillir partout les touristes eux-mêmes. (fruits, graines, fleurs et même feuilles). La responsabilité des massacres incombe Les phacochères, très nombreux (plus de aux braconniers étrangers ou non et aux abat­ 3 000) retournent le sol à. la recherche des tages « officiellement » exécutés, il y a peu racines et tubercule.s qui constituent une part d'années, à des fins commerciales. La part importante de leur alimentation. prise, sur le territoire national, par la chasse, dans les domaines autorisés reste très réduite, et n'aurait jamais atteint la cinquantaine d'éléphants dans une année. PROTECTION DES ANIMAUX De semblables constatations concernant les SAUVAGES diminutions d'effectifs peuvent être faites, portant sur des nombres moindres mais tout « Plus de 12 000 éléphants ont été tués sur le autant significatifs pour les espèces, sur les territoire de la République Centrafricaine en girafes et les 'rhinocéros en particulier. 1980, en raîson du comme,rce de l'ivoire» ... C'est ainsi que débute le .texte d'une brève information de « Marchés Tropicaux » ( du 27 /1/81 - p. 493). Cette information fait suite LUTTE CONTRE LE BRACONNAGE à d'autres signalant, tour à tour, le projet de création. avec ~iège à N'Délé, du futur C'est donc d'urgence que doit se renforcer la I. C .. A. F. (Institut Centrafricain d' Aménage­ lutte, efficace, contre le braconnage. Elle est ment de la Faune ---, .M. T. 25/1/80), l'ordon­ déjà entreprise mais dotée de moyens insuffi­ nance interdisant l'abattage des éléphants sants encore. Au niveau local, comme au (M. T. 11/04/80), l'adhésion, à compter du niveau mondial, l'organisation de moyens de 25/11/80, de 1~ R C. A., à la convention sur. le sauvegarde <;te l'irremplaçable patrimoine commerce international des espèces sauvages, qu'est la « vie sauvage » doit faire l'objet dite « convention de W aship.gton ». d'informations et d'actions nombreuses et Ces informations corroborent, officielle­ appuyées. Les medias le soulignent encore ment, la constatation faite sur le terrain de la insuffisamment dans le pays. dramatique régression des. effectifs de certai­ Il faut informer et éduquer les populations nes espèces et montreraient qu'on s'en préoc­ sur cette question très importante pour leurs cupe sérieusement si, sur le terrain, des mesu­ descendants. Il faut mettre en place des équi­ res concrètes d'intensification de la lutte pes de gardes, motivées, encadrées et surtout étaient prises ... soutenues. Le soutien de leur gouvernement On ne connaît pas le taux de diminution des devra être · effectif et rapide tant pour les effectifs. Cependant, J. L. TEMPORAL, fai­ conflits qui ne manqueront pas de naître entre sant état de comptages, régulièrement répétés eux et les populations locales (pêcheU:rs en par lui-mênie au long du. même itinéraire, particulier) que pour la satisfaction normale de durant 7 années consécutives, estime que les leurs besoins essentiels, afin ... qu'ils ne soient éléphants y ont diminué de 35 à 50 p. 100. En pas eux-mêmes enclins à braconner par esprit outre, ceux qui restent sont devenus beaucoup de lucre ou, plus simplement, pour améliorer plus craintifs. De sorte que d'une part, ils ne leurs conditions d'existence. s'approchent plus jamais, en plein jour, du De l'immensité du parc national .· et de la campement de la Gounda, par exemple, mal­ contiguïté avec la frontière du Tchad, découle gré l'attrait du pâturage voisin. D'autre part, à en partie le problème du braconnage. la moindre alerte, les troupeaux rencontrés Comment, en effet, surveiller efficacement s'éloignent rapidement sous le couvert de la un tel territoire où, de surcroît, la végétation savane boisée voisine. des savanes, arborées, herbeuses ou même Par ailleurs, la découverte de nouveaux marécageuses, rend les déplacements lents et cadavres ou , squelettes, principalement difficiles. d'éléphants tués par les braconniers dans le En outre, l'éloignement de la capitale (le parc, n'est pas rare et les rencontres avec les point d'entrée du parc est à plus de 700 km de braconniers eux-mêmes surviennent quelque­ ) ne facilite pas les interventions offi­ fois. Du reste ,on peut crnindre que cela cielles, ni même la venue des touristes dont

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l'affluence pourrait certainement contribuer à ensuite en l'emploi raisonné du feu pour brûler éloigner les braconniers. des parcelles déterminées à certaines saisons. L'action internationale pour la sauvegarde La repousse ainsi programmée assurera de des grands animaux sauvages a été, bien meilleures conditions d'affouragement aux souvent, insuffisante ou différée, alors que herbivores en même temps qu'elle favohsera certaines populations d'animaux s'amenuisent les rassemblements d'animaux attirés par les à un rythme inquiétant. meilleurs pâturages. Ce dernier point est à rechercher dans un but de développement du Leur reconstitution demandera beaucoup de tourisme de vision. ' temps et pourrait même n'être plus possible pour certaines espèces, telles, en R.C.A., que le rhinocéros blanc et le crocodile. Pour Enfin, la programmation d'aménagements d'autres, on ne possède qu'une information d'infrastructure et en particulier, l'améliora­ insuffisante sur la situation actuelle des effec­ tion de certaines pistes existantes et l'ouver­ tifs. Mais il reste essentiel de mettre fin aux ture de nouvelles pistes doivent faciliter les massacres actuels avant que de nombreuses déplacements des touristes, les attirer en leur espèces disparaissent complètement et que donnant accès à de nouveaux secteurs intéres­ sants tout en contribuant à faciliter le contrôle l'équilibre soit irrémédiablement perturbé. anti-bracon,iage. Au niveau international, l'un des moyens d'action consiste à interdire le commerce des Cependant, l'importance et la· nature de:s produits animaux qui sont la motivation du difficultés d'accès au parc national dues à l'était braconnage. L'embargo ou le contrôle sévère des pistes et à l'éloignement de la capitale,, des importations d'ivoire, de poils de girafe, peuvent faire douter qu'il exerce un attrait de cornes de rhinocéros, de peaux de panthè­ suffisant pour que se développe un véritable res, devraient être étendus aux objets d'art ou tourisme de masse seul capable de rentabiliser de luxe et aux produits de pharmacopée dont les investissements, tant en installations qu'en ils sont les matières premières. Le commerce personnel de surveillance. Sa situation géogra­ de ces articles doit être contrôlé même s'ils phique défavorable car trop proche d'une viennent d'Orient. Ce n'est, en effet, un secret frontière internationale où les braconniers res­ pour personne que depuis longtemps les objets teront longtemps encore nombreux et actifs, sont fabriqués en Asie à partir de matières risque de freiner le développement du tou­ premières africaines car on sait bien que, faute risme et de rendre malaisée la· pérennité du d'animaux, celles-ci ne peuvent plus venir parc national ; c'est pourtant l'ensemble le d'Asie. plus riche en animaux si on le compare aux parcs nationaux des états d'Afrique de Au niveau centrafricain, dans les objectifs l'Ouest. de protection et de mise en valeur du parc national, les interventions susceptibles de Par suite, la mise en valeur et la protection contribuer à la sauvegarde des animaux sauva­ de la faune de la République Centrafricaine ges peuvent consister en premier lieu à équiper par la création de parcs proches de la capitale à nouveau les services nationaux de protection où les animaux seraient introduits devrait être de la faune sauvage. On a noté, au niveau du envisagée. Sur une (ou des) surface moindre Ministère des Eaux et Forêts, Chasses et que celle du parc Manovo-Gounda-Saint Flo­ Pêches, une prise de conscience de l'impor­ ris, abritant éventuellement une moindre tance des parcs nationaux qui doit, mainte­ variété d'espèces, choisie pour ses formations nant, passer rapidement à des réalisations végétales convenables, la surveillance, la pro­ concrètes. tection des animaux aussi bien que l'accès et la Ensuite, quand le braconnage aura été sup­ visite des touristes étant facilités, on pourrait, primé, ou au moins réduit à un niveau toléra­ semble-t-il atteindre le double but de protec­ ble et que les animaux auront retrouvé des tion de la faune et de développement touristi·· conditions de milieu favorables à l'augmenta­ que avec des résultats au moins aussi intéres­ tion de leurs effectifs, on pourra envisager des sants que ceux constatés, depui~ longtemps mesures de gestion pastorales. Cette « ges­ déjà, en Afrique orientale, et notamment au tion » des pâturages naturels consistera Kenya (Nairobi National Park ou 01 Dointo d'abord en la limitation des feux incontrôlés, Sapuk par exemple, près de Nairobi).

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SUMMARY

'I:he national wildllfe reserve of Manovo•Gounda-Saint Floris (C.A. R.). Vegeta­ tion and wildllfe.

The national wildlife reserve of Manovo-Gounda-Saint Floris in the north of the Centrafrican Republic harbours a great variety of wildlife which could constitute an attractive touristic spot. '. . The extension and the fodder value of grazed veg~tation could enable a wildlife increase.. But various species of large mammals Iike the elephant and the giraffe are endangered becal\Se of poaching. . , Various possibilities are reviewed which could develop touristic activities and reduce poaching. ·

RESUMEN

El parque nacional Manovo-Goupda-San. Floris. Vegetacion y fauna

El parque nacional Manovo-Gounda-San Floris, situado en el norte del territorio de la Repûblica Centroafricana, posee una gran diversidad de animales salvajes que tienen 1un atractivo cierto para el turismo de vfai6n que se querria desarrollar. La exterisi6n y el vaior alimenticio de las formaciones vegetales pacederas permitirian facilmente el crecimiento de la poblaci6n aniinal global. Pero varias especies de grandes mamiferos, entre las. cuales el elefante y la jirafa, peligran de regresi6n a consecuencia de la importancia de la caza furtiva. , Se planean varias posibilidades ·que podrian permifü el desarrollo del turismo y aumentar la lucha contra la caza furtiva.

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