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J.S. BACH SONATES POUR CLAVECIN OBLIGÉ ET VIOLON BWV 1014 - 1019 CHIARA BANCHINI VIOLON JÖRG-ANDREAS BÖTTICHER CLAVECIN TERRITOIRES ZIG-ZAG JOHANN SEBASTIAN BACH (1685-1750 SONATES POUR CLAVECIN OBLIGÉ ET VIOLON DISQUE 2 : BWV 1014 – 1019 DISQUE 1 : SONATE N°4 EN DO MINEUR, BWV 1017 : 1 I. LARGO 2 II. ALLEGRO SONATE N°1 EN SI MINEUR, BWV 1014 : 3 III. ADAGIO 1 I. ADAGIO 4 IV. ALLEGRO 2 II. ALLEGRO 3 III. ANDANTE SONATE N°5 EN FA MINEUR, BWV 1018 : 4 IV. ALLEGRO 5 I. LARGO 6 II. ALLEGRO SONATE N°2 EN LA MAJEUR, BWV 1015 : 7 III. ADAGIO 5 I. DOLCE 8 IV. VIVACE 6 II. ALLEGRO 7 III. ANDANTE UN POCO SONATE N°6 EN SOL MAJEUR, BWV 1019 : 8 IV. PRESTO 9 I. ALLEGRO 10 II. LARGO SONATE N°3 EN MI MAJEUR, BWV 1016 : 11 III. ALLEGRO 9 I. ADAGIO 12 IV. ADAGIO 10 II. ALLEGRO 13 V. ALLEGRO 11 III. ADAGIO MA NON TANTO 12 IV. ALLEGRO 14 - CANTABILE BWV 1019A CHIARA BANCHINI VIOLON JÖRG-ANDREAS BÖTTICHER CLAVECIN ZZT ZZT 302 © Susanna Drescher © Aurel Salzer © Aurel VOIX, STRUCTURES ET UNIVERS EXPRESSIFS DANS LES SONATES DE BACH POUR CLAVIER ET VIOLON ZZT 302 Pour Jean-Sébastien Bach, la composition a toujours représenté, outre les obligations de service et sa fonction d’indispensable gagne-pain, une quête de possibilités et de dimensions nouvelles dissimulées dans le matériau musical. Il a épuisé jusqu’à leurs dernières limites les traditions liées au genre ou à l’interprétation, et les a même souvent poussées au-delà. Bien que Bach ait étudié en profondeur la mu- sique de ses prédécesseurs et de ses contemporains, les défis que, dans ses œu- vres, il lance aux exécutants aussi bien qu’aux auditeurs, vont la plupart du temps à l’encontre de toutes les habitudes et du style prédominant à l’époque. C’est à tra- vers ces défis mêmes que le credo artistique de Bach, selon lequel « tout doit être possible à faire », trouve sa réalisation d’une manière souvent radicale. Ceci vaut tout particulièrement pour la musique de chambre de Bach, dans laquelle presque toutes les œuvres parvenues jusqu’à nous sont placées sous le signe de l’expérimentation structurelle et instrumentale. Les Six sonates pour clavier et vio- lon occupent à cet égard une place particulière. Non seulement les difficultés tech- niques et la complexité de l’écriture y sont poussées jusqu’à des sommets insoupçonnés jusque là, mais, dans cet ensemble d’œuvres, Bach tourne radicale- ment le dos à tous les modèles formels utilisés à l’époque. Ces pièces n’obéissent en rien au modèle sacro-saint de la sonate pour violon tel que le XVIIIème siècle com- mençant le reconnaît dans l’opus 5 de Corelli, qui prône une division des tâches à travers la confrontation d’une partie supérieure et d’une basse continue, jugée par Bach bien trop conventionnelle. Celui-ci, violoniste expérimenté lui-même aussi bien que virtuose du clavier, fait au contraire des instruments les deux artisans égaux d’une construction strictement polyphonique, qui par là-même confère au mouvement de sonate un caractère éminemment concertant. Cet aspect-là n’apparaît nulle part avec autant d’évidence que dans le second Ada- gio de la Sonate en Fa mineur. Aucun des deux instruments ne possède à propre- ZZT ment parler la conduite de la voix principale : bien au contraire, avec les lents 302 trémolos de doubles cordes au violon et les arpèges du clavecin, sont confrontés deux « modèles d’accompagnement » typiques, ce qui confère au morceau un cli- mat presque irréel. Bien que ce mouvement avance avec détermination, le rythme ex- térieur semble suspendu. Bach fait d’un modèle novateur, qu’il avait déjà exploité de manière beaucoup plus simple dans la première version BWV 1018a, le cœur même de sa sonate. Dans les autres mouvements s’affirme une suprématie du clavecin. Le violon, dans l’introduction aux accents de lamento, ne fait d’abord que broder autour du dense discours de son partenaire une série de cantilènes discrètes, avant de se trouver de plus en plus impliqué dans le travail motivique de l’instrument à clavier. L’Adagio introductif de la Sonate en Mi majeur compte peut-être parmi les pages les plus étonnantes de la littérature violonistique. Un clavecin ferraillant vient déranger le chant délicat du violon d’une manière si rustre que la musique semble presque raconter une histoire. On pourrait s’imaginer ce mouvement comme une variante sérieuse de la confrontation père/fille dans la « Cantate du café » ou bien l’intituler, en une sorte de raccourci poétique : « La Belle et la Bête ». C’est dans cette indépendance de deux partenaires pourtant indissociables l’un de l’autre que réside sans nul doute l’originalité de ces sonates. La partie de clavecin, en particulier –même si, d’un bout à l’autre, elle a été conçue comme accompagnement du violon– produit l’effet d’une partie « complète » et paraît imiter par moments les In- ventions à deux voix du compositeur. Il n’est donc en rien surprenant que le clave- ciniste, dans la Sonate n°6, prenne en charge à lui seul l’Allegro central. Du point de vue de la distribution des voix, les Sonates pour clavier et violon de Bach se ré- vèlent étonnamment proches de ses Sonates en trio pour orgue BWV 525-530. Tandis que dans ces dernières, deux parties supérieures, confiées à deux claviers indé- pendants, sont confrontées à une basse jouée par la pédale, ce même modèle, dans le cas des sonates, est pris en charge par la partie de violon et la main droite ZZT du claveciniste, pour les parties supérieures, et par la main gauche pour la partie 302 de basse –dont Bach indique qu’elle peut être soutenue ad libitum par un instru- ment à cordes basse. Que Bach n’ait cessé de retravailler ces sonates, même après 1725 –date à laquelle elles furent réunies en un recueil provisoire–, c’est ce que confirment les nombreuses différences présentes dans les sources manuscrites qui s’échelonnent jusqu’aux dernières années de la vie du compositeur. La genèse de ces œuvres coïncide en quelque sorte avec leur aboutissement stylistique et l’im- pression qu’elles produisent à l’oreille –aucune complaisance sonore, mais la joie d’un travail partagé. Leur beauté, leur génie propre, ne tiennent pas uniquement aux idées inspirées de Bach, mais sont le résultat d’une technique de composition rigoureuse et de l’exploration exhaustive de toutes les possibilités dialectiques du matériau musical. II Au sein même de l’ensemble, chaque sonate possède un caractère très différencié. La Sonate en Ut mineur BWV 1017 met tout particulièrement l’accent sur la combinaison de trois voix indépendantes –ce qui n’exclut pas, dans les mouvements lents, une écriture empreinte d’une vocalité expressive, tandis que les parties fuguées, ra- pides, rappellent par leur caractère résolument concertant le jeu en trio de l’orgue. La prédilection de Bach pour la tonalité tragique de Si mineur, lorsqu’il aborde des compositions de caractère élégiaque ou héroïque, est attestée par quelques unes de ses œuvres les plus importantes. L’Adagio initial de la Sonate en Si mineur com- mence par un prélude du clavecin sur un mouvement descendant, tandis que la partie de violon semble se dégager lentement de notes tenues et pesantes. Les deux mouvements rapides, en revanche, se présentent comme des fugues possé- dant un caractère résolument concertant : le premier Allegro, vigoureux et même parfois enjoué, contraste avec le mouvement final, plus contenu et plus sombre. Ca- ractérisé par une série de soupirs qui viennent briser le discours musical, le délicat ZZT Andante en Ré majeur n’échappe pas lui non plus à ce climat général de mélancolie. 302 La Sonate en Fa mineur est, sans aucun doute, la plus « introvertie » de toutes dans ses mouvements lents. En revanche, les deux Allegros pourraient servir d’exemple de la façon dont Bach, à partir de cellules motiviques précises, parvient à dévelop- per des thèmes de vastes dimensions, auxquels il insuffle une extraordinaire énergie rythmique. On ne pourrait imaginer plus saisissant contraste que la Sonate en La majeur, dont l’introduction, presque irréelle et comme nimbée de brume, évoque l’impression d’une promenade matinale à travers les bois encore humides de rosée. Suit un Allegro enjoué qui, malgré les considérables difficultés d’exécution, ne se départit à aucun moment de sa légèreté. Comme dans de nombreuses œuvres de musique de chambre de Bach, l’aspect proprement concertant se combine dans ce mouvement avec une forme tripartite dissimulée, dans laquelle la section centrale possède un caractère fortement modulant. Le troisième mouvement oppose à une basse motorique un violon presque timide, qui semble ne jamais oser prendre son élan. Le Presto conclusif est, en revanche, en dépit d’une écriture extrêmement serrée, d’un caractère enjoué et résolu. Le violon semble danser sur tous les registres ; ins- trument à cordes et clavecin fusionnent ici d’une manière tellement organique que l’on a parfois du mal à saisir le moment où la voix principale passe de l’un à l’autre. La Sonate en Mi majeur se caractérise par une grande richesse de contrastes, qui explique sans doute la faveur dont elle jouissait sur la scène musicale à l’époque de Mendelssohn. Après un premier mouvement à la fois massif et tendu à l’extrême, l’Allegro qui suit apparaît presque, dans ses inflexions, d’une naïveté désarmante. L’Adagio ma non tanto, avec ses doubles cordes mélancoliques et ses amples lignes mélodiques sur des accords tout juste effleurés, s’adresse directement au cœur.