diffusion Jean-René POUILLY LE MOT DU METTEUR EN SCÈNE LES RITALS _MARIO PUTZULU

dapter à la scène Les Ritals de François Cavanna BIO D E MAR IO PUTZULU est un projet à la racine duquel il n’est pas étonnant de trouver un homme préoccupé de Il naît en 1952 , obtient une Licence de racines (mais pas seulement), le fondateur et philosophie en 1975, fait successivement et directeur de la revue RADICI, Rocco Femia. parfois parallèlement différents métiers : En 2016, il proposa à B. Putzulu et à G.Daltin surveillant de lycée, manutentionnaire, ouvrier spécialisé, professeur auxiliaire de d’intervenir à la Mutualité de Paris lors des français, de philosophie, vendeur, régis- conférences sur l’émigration italienne avec seur, comédien, professeur des écoles.. un extrait du texte de F. Cavanna. L’émotionA et les rires de l’assistance furent une merveilleuse THÉATRE invitation à poursuivre le travail. De 1986 à 1988 il suit une formation “Théâ- G. Daltin composa les musiques et B. Putzulu fit l’adaptation tre des Deux Rives” (Rouen) avec Catherine qui fut donnée dans une lecture mise en espace en octobre Delattres et Michel Bézu 2017 à Toulouse. Ce fut une extraordinaire complicité entre la salle et la scène, un accueil magnifique du public. Nouvel Il joue dans 19 pièces dont : encouragement pour en faire un spectacle théâtral. œMonsieur de Pourceaugnac de Molière C’est à ce moment de l’aventure que je suis invité comme œMartiens go homme de Fredric Brown metteur en scène. œL’ î le d e s e s c l a v e s de Marivaux œFlora de Yoland Simon J’ai la conviction que les personnages de F. Cavanna ont œMichu, Les Rouquins, Maman revient pau- la noblesse de ces « gens de peu » au sens que leur donna vre orphelin de Jean-Claude Grumberg Pierre Sansot : « Ils possèdent un don, celui du peu, comme œUbu roi d’Alfred Jarry d’autres ont le don du feu, de la poterie, des arts martiaux, œQue d’espoir d’Hanokh Levin des algorithmes. » œL’ é v e n t a i l de Goldoni J’ai la conviction que les personnages de F. Cavanna ont œLa ronde d’Arthur Schnitzler la densité tragique et comique des personnages d’Angelo œThat moment de Nicoleta Esinencu Beolco dit Ruzante. Je sais que le talent de F. Cavanna n’a pas besoin de la scène Il écrit et met en scène : mais j’ai la conviction que la scène a besoin de ses person- Bébert “Y’a que moi!” nages. Leur humanité qui est la nôtre, complexe, faite de petitesse et de grandeur, de cruauté et de tendresse, d’égoïsme Il met en scène : L’émission de Télévision de Michel Vinaver et de générosité nous aidera peut-être à nous reconnaître Grand peur et misère du III ème Reich de dans les émigrés d’aujourd’hui, nous aidera peut-être à les Bertold Brecht recevoir avec respect, nous aidera peut-être à nous souvenir pour embellir l’avenir. LES RITALS LE MOT DE _BRUNO PUTZULU

BIO D E BRUNO PUTZULU es situations, les mots de François Cavanna réson- Bruno Putzulu est né en 1967 à Pont Audemer dans l’Eure. nent encore et encore Après une formation au Conservatoire National Supérieur d’art dramati- aujourd’hui... Ces «Ritals», que de Paris, dans la classe de Philippe Adrien, il entre comme pension- ne cessent de se décliner... naire à la Comédie-française où il restera 12 ans. Ce roman interroge la grande Au théâtre il a joué dans 23 pièces dont : histoire, nous ramène à nos - «En attendant Godot» de Samuel Beckett petites histoires. - «Georges Dandin» de Molière Je suis heureux que mon frère Mario puisse - «Ruzante» de Angelo Beolco faire la mise en scène. C’est grâce à lui que - «Caligula» de Albert Camus L je suis comédien. - «Occupe-toi d’Amélie» de Feydeau Heureux aussi de partager cette aventure Dernièrement au théatre dans «L’Attentat», une adaptation du roman de Yasmina Khadra. Mise en scène de Franck Berthier, et au théâtre de avec mon ami Rocco Femia, et d’être l’Atelier à Paris dans « Votre maman » de Jean-Claude Grumberg mise en sur scène avec mon camarade Gregory scène par Charles Tordjman. Daltin. Au cinéma et à la télévision il a tourné dans 54 films avec entre autres : Comme dans la famille Cavanna, mon père , , Jean-Pierre Améris, Olivier Peray, était/est italien. Arrivé en France depuis Jean-Luc Godard, Jean-François Richet, , Jean-Char- sa Sardaigne, après la deuxième guerre les Tacchella, , Serge Lalou, Claude Berri, Brice Cauvin, mondiale, il y rencontra une jeune fille jean-Marc Moutout, Jean-Pierre Mocky, Florent Emilio Siri, James Ivory, française, ma mère, qui lui donna trois Stéphane Giusti, Sophie Blondy, Gerard Jourd’hui, ... enfants, Mario, Luigi et Bruno. - Césarisé en 1999 pour «Petits désordres amoureux» Porter ce roman sur une scène de théâtre - Il chante aussi. En 2018 sortira son deuxième album. Il écrit ses textes. me semble important, nécessaire, cela fait Il a écrit une chanson pour Johnny Holliday « Ma vie », que ce derneir a sens. Chez Cavanna l’humour est tou- chantée sul l’album « Le cœur d’un homme ». Il a aussi écrit un livre avec Philippe Noiret « je me suis régalé – conversa- jours présent, dans les situations, dans tion entre Philippe Noiret et Bruno Putzulu » aux éditions Flammarion. les mots. Une langue directe, poétique. - Bruno Putzulu chante aussi. En 2018 sortira son deuxième album dont il Une langue qui s’adresse à tout le monde, a écrit les textes. alors quel meilleur endroit qu’une scène de théâtre pour parler à tout le monde... LES RITALS LE MOT DE _GRÉGORY DALTIN

BIO D E GREGOR Y DALTIN orsque Bruno Putzulu m’a proposé d’écrire la musique du spectacle les « Ritals » d’après le Grégory Daltin effectue ses études musicales au roman de François Cavanna et de partager la CRR et CESMD de Toulouse. Professeur Assistant scène avec lui, je me suis appuyé en grande au Conservatoire de Bordeaux puis au CRR et partie sur l’héritage populaire de l’accordéon CESMD (conservatoire et conservatoire supérieur de français et italien en écrivant la dizaine de thè- Toulouse) et à l’ISDAT (Institut supérieur des arts de mes qui constituent la trame musicale de cette Toulouse). libre adaptation théâtrale. Musicien soliste dans des programmations de François Cavanna fait dans son roman une magnifique des- musique classique, contemporaine, jazz, musiques cription de l’accordéon et des bals musette. A cette période, improvisées, Grégory Daltin a collaboré entre autres L les musiciens italiens et français partageaient régulièrement avec L’Orchestre National du Capitole de Toulouse, la scène des brasseries et autres endroits dédiés à la danse. l’Ensemble de musique contemporaine Pythagore, Je me suis inspiré de la tradition de ces grands accordéo- l’Orchestre de la Cité d’Ingres, l’Orchestre de Chambre de Toulouse, l’ensemble MG21…Il partage nistes franco-italiens qui ont assuré les heures de gloire des régulièrement la scène avec des artistes nationaux bals musette afin de rendre hommage au large patrimoine et internationaux de premier plan dans les domaines musical qu’ils ont laissé. du Jazz, de la musique classique et des musiques Ce sont aussi tous mes souvenirs d’enfant avec cette mandoline improvisées. et les chansons que me chantait mon « Nonno », mon grand- En 2013, il enregistre avec le violoniste Simon Milone père italien, qui vont nourrir la composition de la musique. un disque de créations pour Accordéon et Violon. La « Fisarmonica » l’accordéon en italien a été pour beaucoup En 2014, il créé le DALTIN Trio. de ces « ritals », dont ma famille fait partie, un compagnon Il a joué sous la direction de Bernard Kontarsky, de voyage et parfois l’unique bien qu’ils choisirent d’amener Tugan Sokhiev, Gilles Colliard, Benoit Fromanger, avec eux lorsqu’ils quittèrent leur terre natale. Florentino Calvo. Nombreux sont les enregistrements J’ai composé cette musique des Ritals en lui donnant des à son actif dont certains sous le label Harmonia accents essentiellement dansants, et chantants, me rappelant Mundi. En 2014, il est arrangeur et conseiller musical pour le les fins de repas familiaux où ça chantait au son de l’accordéon spectacle d’ouverture de la nouvelle Scène Nationale et de la mandoline au rythme des tarentelles, des valses... d’Albi. Et oui, « Un italien ça chante! », écrivait si justement François En 2015, il a écrit la musique du spectacle de Cavanna. marionnettes «Bella» de Marina Montefusco. En Avec Bruno nous voulions surtout que l’adaptation théâtrale 2016, il est artiste-associé à la Scène Nationale d’Albi. et la composition musicale rendent hommage à cette histoire L’année 2018 marquera sa collaboration avec l’acteur de l’immigration italienne. Je dédie cette musique à mes Bruno Putzulu autour de l’œuvre de grands-parents Gino et Sara qui sont les témoins de cette François Cavanna « Les Ritals » dont il écrira la grande histoire Italienne. musique du spectacle. LE MOT DU PRODUCTEUR LES RITALS _ROCCO FEMIA

’est avec un immense plaisir et L’idée est toujours le besoin et le devoir de une certaine fierté que j’ai voulu mémoire, de rappeler celui qui a été l’un des donner la parole à ce texte emblé- plus importants mouvements migratoires en matique de François Cavanna. France, avec plusieurs millions de personnes Un récit drôle et émouvant arrivées entre 1860 et 1960. Déjà au début où Cavanna nous raconte son des années 30, les Italiens sont près d’un enfance italienne des bords de million en France, soit 7% de la population Marne, sa « Ritalie Nogentaise » hexagonale. comme il l’appelait. C’est le bonheur popu- laire,C l’élégance prolétaire, la richesse des Le parcours autobiographique de François humbles dans toute sa splendeur. Et puis il Cavanna avec la complicité du metteur en ne faut pas oublier que ces Ritals ont contri- scène Mario Putzulu, du comédien Bruno bué à faire la France et leur rendre hommage Putzulu et de l’accordéoniste Grégory Dal- grâce à ce texte magnifique c’est la moindre tin, donne à voir et entendre une dimension des choses. humaine rare et riche d’émotion, parfois Et qui mieux que Bruno Putzulu et Grégory même décapante. Enfin du Cavanna. Daltin pour lui donner vie ? Il était logique De ce point de vue, cette adaptation théâtrale que ces deux-là se rencontrent autour de entre aussi en résonance avec le parcours l’Italie. Le père de Bruno Putzulu était origi- des migrants cherchant aujourd’hui à gagner naire de Sardaigne, celui de Grégory Daltin l’Europe. On a l’impression de revoir sur de Trévise. scène ces hommes et ces femmes vivant Cette production revient, en quelque sorte, sur leur peau le non facile prix de l’intégra- sur l’émigration italienne en France, au tra- tion. Les Ritals veut être, dans une période vers d’une écriture originale comme celle de brumeuse comme celle que nous vivons, le Cavanna qui prend une résonance particulière geste fraternel d’un grand écrivain à l’égard à l’heure de la crise de l’immigration dans de ceux que la misère des temps condamne nos sociétés. à chercher leur pain dans l’exil.

R É SIDE NCE D E C RÉATION > JANVIER- FÉVRIER 2018

S P E CTACLE EN TOUR N ÉE > À PA RTIR D ’OCTOBRE 2018 LES RITALS LE PARCOURS DE LUIGI CAVANNA (papa de François Cavanna)

«Mon père n’aimait pas beaucoup se raconter. Mais de temps en temps, quand il se laissait aller, il me disait. On ne sait jamais pour- quoi ça venait dans la conversation. Enfin bref, par recoupements, j’ai pu retracer toute son histoire». FRANÇOIS CAVANNA, fils de Luigi.

uigi Cavanna est né en 1880 à Bet- tola, commune de la province de Plaisance, en Italie. Issu d’une famille d’ouvriers agri- coles, il vient une première fois en France en 1912 à la recherche d’un travail. Il trouve alors des emplois de maçon sur différents chantiers et s’installe à Nogent-sur-Marne. LAu cours de la Première Guerre mondiale, Luigi doit intégrer les rangs de l’armée italienne. À l’issue du conflit, il revient à Nogent-sur-Marne et se marie avec Marguerite Charvin, employée de maison originaire de la Nièvre, qui perd au passage sa nationalité française. Leur fils, Fran- çois, nait le 22 février 1923 à Paris. Dans les années 30, risquant d’être renvoyé en Italie, Luigi demande sa naturalisation française. Il l’obtint en 1939, et Marguerite, sa femme, la récupère également. Devenu écrivain et dessinateur humoristique, François Cavanna a publié en 1978 Les Ritals. Ce qui devait être un livre autobiographique et une saga sur les Italiens devient le récit de l’iti- néraire migratoire de son père : LES RITALS

« J’étais parti pour raconter les Ritals, je crois qu’en fin de compte j’ai surtout raconté papa (…) Papa est garçon, mais il est pas vraiment l’arpète. Il a plus l’âge. Les arpètes, il les engueule, oui, plus fort que les compagnons, même. Petit compa- gnon, ça s’appelle, qu’il est. Ça veut dire qu’il se tape un boulot de compagnon et touche une paie de garçon. » (François CAVANNA, 1978, Les Ritals).

ENTRETIEN AVEC FRANÇOIS CAVANNA © Atelier du Bruit - 2008 https://vimeopro.com/user36345481/histoire-geographie-1re-2015-webdocs/video/126389152 LES RITALS FRANÇOIS CAVANNA ECRIVAIN ET DESSINATEUR HUMORISTIQUE FRANÇAIS. 1923-2014

PAR MACHA SÉRY (LE MONDE)

rôle de parcours suivi par cet autodi- les humiliations de ceux qui ne furent « ni des héros dacte dont la prose figure aujourd’hui ni des traîtres ». Cet épisode, il le relatera dans Les dans les manuels scolaires. Russkoffs (prix Interallié 1979). Avec Maria, Cavanna Né en 1923, François Cavanna, fils achèvera sa trilogie autobiographique. Maria était d’un terrassier italien et d’une femme cette jolie et chantante Ukrainienne qui avait égayé de ménage originaire de la Nièvre, les noires années de la guerre et dont il était tombé a grandi à Nogent-sur-Marne où il éperdument amoureux. Séparés par les événements a subi le racisme réservé aux reje- en 1945, il traîna, à son retour en France, un « cafard tons d’immigrés. Dans Les Ritals, il racontera cette poisseux » sur les quais de Seine. Il passa des années enfanceD en marge du Front populaire, le ghetto à essayer de la retrouver, ignorant tout de son sort, familial, les fugues à vélo et sa passion viscérale ce qui est l’objet précis de Maria. pour la littérature. Cet ardent défenseur de la langue Imaginatif, il trouva un emploi de dessinateur à Zéro, française ne cessera de rendre hommage à l’école un journal vendu à la criée. Il rencontre Georges républicaine et aux maîtres qui lui avaient inculqué Bernier avec qui il rêve de créer leur propre journal. le désir d’apprendre. En 1960, les conditions sont favorables. Le premier Postier en 1939, maçon trois ans plus tard, il fut, le numéro paraît le 9 septembre. Hara-Kiri, « journal jour de ses 20 ans, enrôlé dans le Service du travail bête et méchant ». obligatoire (STO) puis expédié dans une usine d’ar- Il a l’œil et le flair, Cavanna, pour rassembler des mement à Berlin. Il y connut la faim, la souffrance et talents, aimanter autour de lui des fils de prolos, LES RITALS

FRANÇOIS CAVANNA ECRIVAIN ET DESSINATEUR HUMORISTIQUE FRANÇAIS. 1923-2014

bourrés de talent. Topor, Gébé, Cabu, Reiser, Wolinski les aigreurs de la nostalgie. Il collaborera d’ailleurs : une génération comparable à celle qui donna nais- à Charlie Hebdo lorsque le titre fut relancé par Phi- sance à la comédie italienne. Les cadets admirent lippe Val en 1992. cet ainé charismatique, capable de raconter pendant Parallèlement au journalisme, Cavanna s’adonnait deux heures la guerre de Cent Ans et d’expliquer les à l’écriture. Son premier livre, Les Ritals, grand suc- hauts faits derrière les noms de chaque station de cès populaire adapté à la télévision, l’avait imposé métro. Dans cette compagnie de noceurs, de tru- comme un écrivain de premier ordre. Cavanna blions provocateurs qu’il laisse entièrement libres possédait, en effet, un style magnifique, singulier, de leurs mots et leurs dessins, ce fin lettré, passionné mélange d’oralité et de lyrisme sec. Un Rabelais d’histoire, ne boit ni ne fume. Mais il n’est jamais le moderne, estimait Pierre Desproges. Défenseur dernier à s’indigner. des animaux, militant anti-corrida, écologiste de la Parallèlement au mensuel, Hara-Kiri Hebdo, créé première heure, Cavanna se proclamait « à gauche en février 1969, se frotte à l’actualité politique. Et de la gauche ». La vie ne l’épargna pas. Derrière ses force le respect d’une intelligentsia qui, jusque-là, airs bourrus, ses bacchantes de Gaulois et ses coups se pinçait le nez. En novembre 1970, alors que le de gueule, c’était un tendre, Cavanna, un géant aux général de Gaulle vient de mourir, Hara-Kiri Hebdo pieds d’argile, un féministe qui aimait les femmes titre : « Bal tragique à Colombey : 1 mort ». Scan- et ne savait pas toujours choisir. dale, interdiction et poursuite de l’aventure sous le Vers la fin de sa vie, il habitait un petit studio rue des nouveau titre Charlie-Hebdo. Trois-Portes non loin de la place Maubert à Paris, à Chef d’orchestre, cheville ouvrière, mentor, Cavanna l’endroit même où jadis se tenaient les fiévreuses est tout cela. Il tient que l’humour est «un coup réunions de rédaction. Dans Lune de miel, paru en de poing dans la gueule», un uppercut donné à la 2010, il témoigna de son combat contre la maladie bêtise, un camouflet à l’arrogance. L’arrivée de la de Parkinson, des efforts qu’il déployait pour conti- gauche au pouvoir marque le début du déclin de nuer à écrire, ces pattes de mouche qu’il arrachait l’hebdomadaire. Il disparaît le 23 décembre 1981. aux tremblements. N’empêche, il se voyait rivé à son Le mensuel, lui, paraîtra jusqu’en 1986. L’aventure écritoire jusqu’à 100 ans. aura duré vingt-cinq ans. Pourtant il n’éprouvait pas Il nous a quitté le 29 janvier 2014 à Créteil. LES RITALS LES ITALIENS EN FRANCE : JALONS D’UNE ÉMIGRATION

’arbre généalogique de plu- La France, terre d’accueil sieurs millions de Français À la fin du XIXe et au début du XXe siècles, comporte une branche ita- les émigrants franchissent pour moitié lienne, même si celle-ci n’est l’océan vers les Amériques. Mais derrière pas toujours visible ou bien les États-Unis et l’Argentine, la France identifiée en raison d’une constitue la troisième destination. La progressive francisation des proximité géographique, le déficit natu- patronymes qui, quelles que rel de la population française et les besoins soient les époques, traduit l’intégration de main-d’œuvre liés à la croissance de jusqu’àL la dilution au sein de la société. l’économie expliquent cette attraction. L’immigration transalpine est en effet De 63 000 en 1851, le nombre des Italiens ancienne, mais ce n’est qu’au milieu du passe, à la veille de la guerre, à 420 000 XIXe siècle que l’immigration devient mas- soit 36% des étrangers et plus de 1% de sive et continue jusqu’aux années soixante la population en France. Ils sont pour- du siècle suivant. tant, selon les services italiens, 1,8 mil- lions à avoir franchi les Alpes entre 1873 Une nation d’émigrants et 1914. Alors que l’unité politique de la Pénin- La politique de fermeture des frontières sule prend forme avec la proclamation du du régime fasciste à partir de 1927 n’y fait royaume d’Italie, en 1861, s’amorce l’un rien, leur nombre ne cesse de s’accroître des plus importants mouvements migra- pour atteindre le chiffre record de 800 000 toires de l’histoire ; un véritable « Ulysse en 1931 - sans doute un million en incluant collectif » qui voit pendant un siècle 26 les saisonniers et les clandestins - soit 7% millions d’Italiens quitter l’Italie. de la population hexagonale. En 1913, année culminante de la «grande émigration» d’avant la Première Guerre Visages d’Italie mondiale, ils sont 872 000 à partir. L’Ita- Les Italiens qui franchissent les Alpes sont lie connaît un fort accroissement de sa pour huit sur dix d’entre-eux originaires du population que son économie ne parvient Nord de la Péninsule. En 1914, ils sont Pié- pas à absorber. Pour beaucoup, le choix montais à 28% dont une très large part de se pose entre «voler ou émigrer» selon la la province frontalière de Cuneo. Viennent formule de l’évêque de Plaisance, mon- ensuite des Toscans (22%), les Lombards seigneur Scalabrini. (12%) et les Émiliens. Les Méridionaux sont peu nombreux sauf à Marseille où LES RITALS

les pêcheurs napolitains forment une Leur présence n’y est que rarement exclu- communauté bien structurée. sive ce qui conduit à nuancer le tableau, Après la Première Guerre mondiale, les plutôt américain, de «petites Italies». Il n’en très nombreux migrants originaires de reste pas moins que ces espaces urbains Vénétie, qui jusqu’alors délaissaient la sont marqués de leur empreinte. Cavanna France, se font plus nombreux et repré- évoque à propos de la rue Saint-Anne de sentent 31% des entrées. Nogent où résident les «Ritals», «un monde qui n’a rien à voir». «Petites Italies» Par la suite, on dira pourtant qu’ils sont Dans un premier temps, les Italiens s’ins- «presque même». À ce moment, il est vrai, tallent pour les deux tiers d’entre-eux dans le flux migratoire transalpin s’est tari. Ils le Sud-Est de la France. En 1911, ils repré- n’ont pas pour autant disparu comme leur sentent 20% de la population des Alpes- invisibilité pourrait le faire croire et l’his- Maritimes et un quart de la population toire de ces millions de migrants gagne à marseillaise. Pour des raisons de proxi- être mieux connu. mité géographique et d’offres d’emploi la grande région lyonnaise, de Saint-Étienne jusqu’aux Alpes, les accueille. Progressivement, c’est dans l’ensemble de l’Hexagone que l’immigration italienne Stéphane Mourlane essaime. Maître de conférences en histoire Ainsi, les Italiens se regroupent-ils en fonc- contemporaine tion de leurs origines régionales dans les à l’Université d’Aix-Marseille. mêmes quartiers, les mêmes rues. Une production RADICI Rocco FEMIA 10, rue Espinasse - 31000 Toulouse Licence n° 2-1067281

Diffusion Jean-René POUILLY KARAVANE PRODUCTIONS Tél. 01 40 16 54 30 - [email protected]

La production souhaite aller partout à la rencontre du public sans distinction de lieu, dès lors qu’il peut accueillir artistiquement ce projet. Nous serons ravis de vous aider à le concrétiser.