Des Missionaires
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DePaul University Via Sapientiae Felix Contassot France 1959 VIE Matérielle: Des Missionaires Follow this and additional works at: https://via.library.depaul.edu/contassot Recommended Citation VIE Matérielle: Des Missionaires. https://via.library.depaul.edu/contassot/21 This Article is brought to you for free and open access by the France at Via Sapientiae. It has been accepted for inclusion in Felix Contassot by an authorized administrator of Via Sapientiae. For more information, please contact [email protected]. La vie matérielle des Missionnaires Félix CONTASSOT cm. 1959 L’étude que nous avons entreprise sur les conditions de la vie matérielle de nos missionnaires, avant la Révolution, ne peut être qu’un essai, et elle présentera tout au plus une humble contribution à l’Histoire de la Congrégation de la Mission, en ayant pour thème un sujet qui n’a pas encore été traité. L’objet de cette étude, en effet, est de chercher à connaître ce que fut la vie matérielle de nos missionnaires, chose nécessairement mouvante, et influencée par les progrès de la civilisation contemporaine, progrès dont il n’est pas toujours facile de suivre l’évolution. La vie est un mouvement, un mouvement tantôt accéléré, tantôt au ralenti. Pendant ce premier siècle et demi de l’histoire de la Mission, autre assurément fut le mode de vie des contemporains de Monsieur Vincent, autre celui des missionnaires de la fin de l’Ancien Régime. En un siècle, et parfois en beaucoup moins de temps, la vie et les institutions se transforment. Ceux qui parmi nous ont connu la fin du siècle dernier, et comparent les progrès accomplis dans tous les domaines, par exemple, pour les moyens de locomotion, l’éclairage, la médecine, etc., ne peuvent pas ne pas constater que la vie actuelle est infiniment différente de celle de 1900. Toute proportion gardée, une évolution analogue, plus lente, il est vrai, moins révolutionnaire, mais cependant assez accusée, s’est accomplie de la fondation de la Mission à la Révolution française. Si, par exemple, un missionnaire de 1630 mettait dix à douze jours de voyage pour se rendre à Lyon, le même voyage accompli vers 1785 ne demandait plus que cinq jours et demi, et aujourd’hui, il faut à peine cinq heures d’exprès. Une évolution semblable s’est fait sentir dans l’hygiène, la tenue extérieure, l’habillement, la nourriture, etc… Pour bien juger de cette évolution et en suivre les phases principales, il aurait fallu pouvoir la connaître par des faits nombreux et précis. Or, les archives de la Mission, les circulaires des supérieurs généraux, les autres documents comme la correspondance et les entretiens de saint Vincent, ne nous livrent que des vues fragmentaires, épisodiques. On s’est efforcé d’y suppléer, dans la mesure du possible, par ce que nous enseignent l’histoire profane contemporaine et les études qui furent faites sur la vie quotidienne du temps des rois Louis XIII à Louis XVI inclus, bien qu’elles ne touchent que de fort loin à la vie interne des communautés religieuses. Malgré ses lacunes, cette étude d’ensemble sera sans doute suffisante pour nous donner au moins une idée approximative de ce que fut, en général, la vie de nos premiers missionnaires et, par incidence, leur esprit d’abnégation dans leurs travaux apostoliques ou dans leur vie de communauté, non moins que leur esprit de pauvreté et de simplicité, légué par le saint Fondateur. Si d’aventure, au cours de cet exposé historique, il nous arrive de signaler un certain nombre d’abus, dénoncés par les supérieurs généraux dans leurs lettres circulaires, il faudra se ressouvenir [3] qu’on ne peut juger de la Communauté toute entière par les écarts de quelques particuliers, que les Supérieurs se devaient de flageller pour ramener les délinquants à résipiscence et mettre la Congrégation en garde contre les influences extérieures, en des temps où ne manquèrent pas les crises de tous genres, intellectuelles, spirituelles et morales. On n’a généralement pas à signaler le bien qui s’accomplit ; il s’opère dans l’humilité et le silence. Aussi, malgré les défaillances de quelques esprits plus remuants, plus soucieux d’adaptation, d’une adaptation inopportune à un siècle dégénéré, que du maintien de l’esprit primitif, esprit de pauvreté et de simplicité évangélique, nous serons en droit de constater que, malgré quelques faiblesses — il y en a à toutes les époques, — la Congrégation de la Mission, dans son ensemble, est vraiment demeurée digne de son Fondateur, saint Vincent de Paul ! [4] Chapitre Premier Les biens temporels de la Congrégation Ch. I. LES BIENS TEMPORELS DE LA CONGRÉGATION 1. Ressources financières ............................................. 4 Fruits du ministère ......................................... 5 Honoraires de messes ................................... 7 Fondations ................................................... 11 Coches publics ............................................. 13 Aides, gabelles ............................................. 14 Union de bénéfice ........................................ 15 Domaines et fermes ..................................... 16 2. Aperçu général sur la situation financière ............... 17 3. L’Administration du temporel ................................... 23 Les procès ................................................... 33 I. Ressources financières Une Congrégation religieuse pour subsister ne peut se passer d’un minimum de biens temporels. Il lui faut assurer son administration et ses services généraux, le recrutement, la formation et la subsistance de ses membres, la marche de ses maisons et de leurs œuvres. 1. Les fruits du ministère Ses ressources financières proviennent généralement des fruits du travail de ses membres, des honoraires de messes, des revenus des capitaux et des fondations, de dons et de legs. En ce qui concerne la Congrégation de la Mission pour la période antérieure à la Révolution, la question se pose de savoir de quelles ressources elle pouvait disposer ? Elle se pose d’autant plus que l’on sait par ailleurs que, d’une part, la théologie de l’époque n’admettait pas la fructification de l’argent ni la valeur morale du prêt à intérêt, donc du placement des capitaux, et que, d’autre part, Monsieur Vincent avait fortement insisté sur la gratuité du ministère et des fonctions de la Mission. En effet, sous Ancien Régime, demander un intérêt pour le placement ou le prêt de son argent, était considéré comme de l’usure, condamnée par la morale. Ce n’est pas le lieu de traiter ici ce problème, qui depuis longtemps faisait couler des flots d’encre et mettait aux prises les moralistes. Monsieur Vincent nous est lui-même témoin de l’opinion courante. Consulté par le supérieur du Mans sur un cas particulier, en 1657, il lui répondit : «Vous me demandez si un tuteur qui a 10.000 écus à son mineur les peut mettre à intérêt, attendu que la justice le condamnera à payer le même intérêt. La Sorbonne se trouve assez empêchée à résoudre cette difficulté, voyant, d’un côté, que les meilleurs casuistes condamnent cette usure, et, d’un autre, que les cours souveraines l’autorisent, surtout à l’égard des mineurs. Néanmoins communément ces Messieurs les docteurs sont d’avis que les tuteurs, non plus que les autres, ne peuvent et ne doivent pas lever lesdits intérêts, mais trouver quelque biais pour éviter que la justice les oblige à les payer eux-mêmes à leurs mineurs, comme serait de faire assembler les parents, afin que par leur consentement ils fassent ordonner que l’argent qu’ils ont soit mis en fonds de terre, ou en rentes constituées. C’est ce que vous pouvez conseiller à celui duquel vous parlez ; et si déjà il l’avait donné à intérêt, il est à propos qu’il fasse faire sommation à ses débiteurs d’avoir à lui payer le principal dès le terme échu, et, s’ils ne le font pas, qu’il obtienne sentence contre eux pour le payement dudit intérêt, parce qu’alors il lui sera plus loisible de le recevoir.» (VI, 272-273). Des consultations de ce genre ne manquaient point et dans ses réponses Monsieur Vincent fait preuve de la plus grande prudence, n’ignorant point les controverses en question. En 1658, il mandait au supérieur [5] de la maison de Saintes «Je vous prie de me marquer les espèces d’usures dont vous désirez la résolution. Je vous répondrai à chacune, et, en attendant, suivez les maximes de la Sorbonne, sans jamais parler au désavantage de ceux qui ont des opinions contraires ; aine vous les honorerez et chérirez comme nos Pères. Ne dites point à personne ce que je vous écris, si ce n’est aux nôtres, sous le secret, et jamais à d’autres» . (VII, 226). Monsieur Vincent ne serait-il pas, dans son for intérieur, partisan de la légitimité du prêt à intérêt ? Et la règle, qu’il conseille, ne serait-elle pas seulement une sûreté valant mieux suivre l’opinion la plus commune ? Pour assurer leur subsistance, les missionnaires ne pouvaient non plus compter sur les fruits de leur ministère qui, sur l’ordre même de Monsieur Vincent et d’après les usages observés strictement dans la Compagnie, devait être absolument gratuit. Monsieur Vincent tenait farouchement à cette règle. En 1638, il mande à M. Lucas : «Vous avez bien fait, Monsieur, de ne pas accepter les offres de monsieur le vicomte de Soudé, et ferez bien de n’écouter jamais la proposition de nous nourrir ; c’est une règle fondamentale de notre petit Institut». (I, 431). Au sujet d’une mission qui se donnait à Coulommiers, en 1647, il adressait au supérieur, M. Delville, cette admonestation : «Vous me mandez que Madame de Longueville veut faire les frais. O mon Dieu 1 Monsieur, faut-il commencer du temps de Monsieur Delville et du mien et par Monsieur Delville la dissipation et la ruine de l’esprit de la Mission ! O Jésus ! à Dieu ne plaise que vous soyez l’instrument d’un tel malheur ! Nous ne sommes pas moins obligés à faire gratis nos missions, que les Capucins à vivre aumônes.