Histoire De Champier Et De Sa Région
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Gaston LAURENCIN Histoire de Champier et de sa région EDITIONS DU CNRS Nous remercions vivement Monsieur J. Revole et l'ensemble de la municipalité de Champier qui ont favorisé et soutenu la réalisation de cet ouvrage. 7ème Circonscription du CNRS : Ain, Allier, Ardèche, Cantal, Côte-d'Or, Doubs, Haute-Loire, Haute-Saône, Jura, Loire, Nièvre, Puy-de-Dôme, Rhône, Saône-et-Loire, Yonne. © Copyright C.N.R.S. Paris. I.S.B.N. 2.222.02841.8 A ma femme, A mes enfants, A mes petits-enfants. G. LAURENCIN AVANT-PROPOS Champier, modeste village de sept cents habitants, situé dans la région des Terres Froides, sur la route Lyon-Grenoble ne présente rien de particulier qui puisse solliciter la curiosité des touristes en quête de pittoresque ou de souvenirs. Ni château, ni abbaye, ni église pour retenir l'attention ; aucun événement marquant, aucune grande bataille, aucune rencontre de personnages célèbres ne justifie la moindre men- tion dans l'histoire générale ; le paysage lui-même formé de collines modérées couvertes de taillis paraît bien pâle à côté des Alpes presti- gieuses dont on aperçoit dans le lointain les cimes enneigées. Cette apparence est trompeuse : Champier, ignoré de l'Histoire, a un long passé dont ce livre essaye de soulever les voiles. Il faut que le lecteur se rende compte des difficultés d'une telle entre- prise et de ses limites. L'histoire n'est pas une oeuvre d'imagination ; elle ne peut se fonder que sur des documents authentiques. Si certaines villes, plus importantes que notre petite commune sont tellement riches en archives, que les spécialistes n'ont jamais fini d'en dresser l'inven- taire, Champier est un peu comme un voyageur sans bagages : les archi- ves de la mairie se réduisent aux registres d'Eglise sous l'Ancien Régime, aux registres d'état civil et aux délibérations du conseil municipal depuis la Révolution. Cependant il faut noter une relique d'une valeur inestimable : un beau parcellaire du XVIIe siècle. Pour compléter la documentation, il faut aller glaner de rares informations aux archives départementales de l'Isère, du Rhône, de la Savoie, dans les biblio- thèques de Lyon, Grenoble, Vienne, parfois même aux archives natio- nales. Il est évident que je ne serais jamais venu à bout de ce livre, si je n'avais été aidé par les recherches de Ferdinand Badin, faites à la fin du siècle dernier. Cette oeuvre importante, restée manuscrite, se trouve à la Bibliothèque de Grenoble : elle constitue un précieux recueil de docu- ments sur l'histoire de notre région. Malheureusement elle n'a jamais été connue des habitants de Champier. Je remercie les membres de l'Université qui m'ont aidé de leurs conseils et encouragé dans mon entreprise ; je remercie également Monsieur le Maire et la municipalité de Champier qui ont participé à la publication de cet ouvrage. Je n'ai pas la prétention d'avoir résolu toutes les énigmes d'un passé souvent obscur : les futurs chercheurs auront encore matière à aiguiser leur sagacité. Mais je m'estimerai grandement satisfait, si mes compatriotes se passion- nent pour l'histoire de leur petit pays. G.L. LIVRE I LA PERIODE GALLO-ROMAINE ET LES "SIECLES OBSCURS" Champier est situé dans une vallée qui brise la chaîne des collines et permet une communication facile entre la plaine du Liers et le plateau d'Eclose et de Badinière. I — La période gallo-romaine C'est plus d'un siècle avant notre ère que les Romains firent la con- quête de notre région où régnait la tribu des Allobroges. L'Empire Romain devait durer jusqu'au milieu du cinquième siècle où il s'écroula sous la poussée des invasions barbares. C'est une banalité d'affirmer que cette civilisation qui brilla d'un vif éclat a laissé dans notre histoire une empreinte ineffaçable : Rome nous a donné sa langue, son droit ; elle nous a appris à tracer des routes, à construire des temples, des théâ- tres, en un mot à bâtir des cités organisées. Dans des villes comme Vienne, Lyon, Bourgoin il suffit de creuser le sol pour voir surgir des poteries, des statues, des mosaïques, des inscriptions, vestiges de ce loin- tain passé. Notre région, qui était à l'écart des grandes voies romaines et qui fut pendant longtemps d'une pénétration difficile, était déjà un centre d'habitation à l'époque gallo-romaine et nous en trouvons encore quel- ques traces : • Une villa romaine à Lanconnay C'est ainsi qu'en 1893 Ferdinand Badin découvrit les fondations d'une construction gallo-romaine au sud-est du carrefour de Lanconnay, au croisement des routes de Champier à la Côte-Saint-André et de la Tour-du-Pin à Serrières. Les vestiges se trouvaient à environ 150 mètres dudit carrefour. Cette terre porte le nom de Couvent et faisait autrefois partie d'un communal, terrain vague, landes et bruyères où les habitants menaient paître leurs troupeaux. C'est l'état même du terrain qui a conservé à tra- vers les siècles les ruines d'une villa romaine et il faut se rappeler que c'est seulement au XIXe siècle qu'on a entrepris de défricher systémati- quement la plaine de la Blache et du Liers. Une portion du terrain en question était pleine de débris de maçonnerie, ce qui la rendait peu propre à la culture : son propriétaire voulut la miner. Le travail fit découvrir quantité de tessons de poterie auxquels on ne prêta d'abord aucune attention. Mais lorsqu'on connut la nature des objets trouvés, on prit des mesures pour recueillir ceux qu'on découvrirait encore. • Description des lieux Par l'examen des fondations, il a été permis de reconstituer à peu près la disposition des bâtiments. Grossièrement on peut dire que la villa (en latin villa désigne la ferme) était constituée de deux corps de bâtiments parallèles séparés par une cour : à droite était la maison d'habitation et à gauche les bâtiments ruraux. Le sol de trois pièces était recouvert d'une sorte de mosaïque formée d'un mélange de mor- tier et de petits morceaux de tuiles brisées. Un aqueduc, dont il serait facile encore de retrouver les traces, amenait dans cette habitation les eaux de la fontaine qui flue actuel- lement au nord du pré dit des Serves. Il se dirigeait du nord au sud en longeant le bas du coteau de Lanconnay. Il avait un peu moins d'un kilomètre de longueur ; il n'était pas constitué par des tuyaux mis bout à bout, mais fait en béton avec une couverture en pierres erratiques et mesurait 15 centimètres carrés environ de vide. Un abreuvoir en maçon- nerie avec un revêtement intérieur en mosaïque recueillait l'eau au nord de la villa. Les bâtiments furent détruits par un incendie, comme le prouvent les nombreux morceaux de charbon trouvés sur toute la surface bâtie. Le choix du lieu était particulièrement heureux puisqu'on avait de l'eau en abondance : eau potable venant de la source des Serves et eau courante du ruisseau de Vauchesse tout proche. Au moment des labours, quand la terre est fraîchement retournée, les curieux trouveront facilement l'emplacement signalé et ils pourront VOIES ROMAINES Les voies romaines contournent La région des Terres Froides LA VILLA ROMAINE DE LANCONNAIS Plan schématique constater que les débris de briques, de tuiles sont répandus sur une grande surface, ce qui laisse supposer qu'il y a peut-être eu plusieurs constructions. • Les objets trouvés 1) un petit buste en bronze servant d'applique à un vase, avec la lame également en bronze, sur laquelle il était soudé. 2) une pièce de monnaie, fort usée, à l'effigie de l'empereur Vespasien, fondateur de la première famille Flavienne qui régna de 69 à 79. 3) une grosse brique en terre rougeâtre portant l'estampille de CLARIANUS, potier célèbre de la vallée du Rhône. 4) un fragment de fond de vase, en terre grise portant l'estam- pille de SEVVO, potier dont l'atelier se trouvait à Vienne et qui fabri- quait dans les premiers temps de l'occupation romaine. 5) un autre fragment de fond de vase en terre grise portant le sigle FECIT. 6) un autre fragment de vase gris cendré portant le sigle MICAM. Nous insistons sur ces objets parce qu'ils fournissent un repère chronologique. Il n'y a pas d'erreur possible : cette villa est bien de l'époque romaine. On trouve encore beaucoup d'autres objets moins significatifs : des tessons de poterie d'origine italienne ou grecque, de la vaisselle brisée, des tuiles romaines, un grand nombre de morceaux de marbre et de pierre sous formes de tablettes et enfin des instruments agricoles ou domestiques : une houe, un gros trident, un fer de lance, deux haches, deux serpes, deux pelles à feu, deux crémaillères, une clochette à boeufs etc. • Autres vestiges trouvés à Champier Ferdinand Badin signale des vestiges de bains ou abreuvoir au bois Pitou, un vase à trois pieds gris cendré jaune trouvé au Gouin à Flévin, des tuiles romaines au Gouin, au Mas de Combayoud. Nous-mêmes, nous avons trouvé des tuiles romaines au Bois Pitou, aux Grolles (à l'emplacement de la piste d'autocross). La seule conclusion que l'on puisse tirer de ces découvertes est assez décevante : dans notre région, à l'époque gallo-romaine, il y avait certainement des habitations dispersées, mais y avait-il un village ? C'est peu probable. • Les noms de lieux d'origine latine Pourtant le mot Champier (1) vient certainement du latin : c'est un dérivé de campus. Ce nom latin désigne la plaine, dans son sens premier, ce qui ne convient guère pour désigner notre région au relief plutôt tourmenté.