ACTES DE RECHERCHE Edition 2011
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ACTES DE RECHERCHE Edition 2011 Master of Arts HES-SO en arts visuels orientation CCC_ Etudes critiques curatoriales cybermédias Valérie Anex : Et moi ? Et moi ? Et moi ? Alejandra Ballón : Le sens du bateau rouge Daniel Barney : Imagining the Middle East Nadia Bonjour : Une école dans mon quartier… Maëlle Cornut : Fabriques en tout genre Hannah Entwisle : Poetic Pragmatism and Social Practice within a Creative Democracy Vana Kostayola : National Identities in Times of Crisis. National Anarchism and Over-Identification Art Bénédicte Le Pimpec : Les microfaits. A la recherche du récit perdu Elene Naveriani : Modus Vivendi Agata Nowak : Story in Practice and Rescue for the Pathetic Man Francesco Russo : It’s not Just a Game! Implications socio-culturelles et pratiques artistiques sur le métaverse de Second Life Tilo Steireif: L’infini saturé. Artistes et ambianceurs dans le nouveau contexte urbain Melano Sokhadze : I Quit Playing Chess in Order to Become an Artist Laurence Wagner : Tante Geneviève Recherches en cours, études Master année 1 Valerio Belloni : Homebrew Art: Learning by doing with creative tools Fanny Benichou : Mud, Space & Spirit Hélène Bigot : Dispositifs de présentation en « abyme » Laure Stern-Geissbühler : Vanished into Thin Air? Formes de vies temporairement escamotées Damian Jurt : The Institution of Lost Form Orfeo Aurora Lili : The politics of sharing, healing and reappropriating our bodies, emotions and spaces Yaël Maïm : Comment arrêter d’avoir peur ? How to stop being afraid ? Joanna Osbert : En vies de femmes Sabine Rosset : « Réalise ton potentiel, sois créatif et vends-toi : parce que tu le vaux bien ! » Patricia Semmler : (Why is he here?) Why are you here? Perception et construction de l’identité Anja Spindler : From ones selves to the common Programme Master de recherche CCC | Research-based Master Programme CCC critical curatorial cybermedia Haute école d’art et de design – Genève | Geneva University of Art and Design Les Actes de recherche offrent une synthèse des recherches accomplies et en cours développées par des productions dans les médias de la reproductibilité technique et des interactions menées simultanément dans des collectivités territoriales et des plates-formes virtuelles. L’édition annuelle des Actes de recherche a pour objectif de donner les conditions optimales d’un débat d’idées aux jurys de soutenance de fin d’études et aux jurys de fin d’année académique et d’assurer une temporalité prospective aux recherches. Master of Arts HES-SO en arts visuels orientation CCC_Etudes critiques curatoriales cybermédias Valérie Anex : Et moi ? Et moi ? Et moi ? 3 Alejandra Ballón : Le sens du bateau rouge 6 Daniel Barney : Imagining the Middle East 9 Nadia Bonjour : Une école dans mon quartier… 12 Maëlle Cornut : Fabriques en tout genre 16 Hannah Entwisle : Poetic Pragmatism and Social Practice within a Creative Democracy 20 Vana Kostayola : National Identities in Times of Crisis. National Anarchism and Over-Identification Art 25 Bénédicte Le Pimpec : Les microfaits. A la recherche du récit perdu 29 Elene Naveriani : Modus Vivendi 32 Agata Nowak : Story in Practice and Rescue for the Pathetic Man 37 Francesco Russo : It’s not Just a Game! Implications socio-culturelles et pratiques artistiques sur le métaverse de Second Life 44 Tilo Steireif: L’infini saturé. Artistes et ambianceurs dans le nouveau contexte urbain 47 Melano Sokhadze : I Quit Playing Chess in Order to Become an Artist 52 Laurence Wagner : Tante Geneviève 55 Recherches en cours, études Master année 1 Valerio Belloni : Homebrew Art: Learning by doing with creative tools 59 Fanny Benichou : Mud, Space & Spirit 59 Hélène Bigot : Dispositifs de présentation en «abyme» 59 Laure Stern-Geissbühler : Vanished into Thin Air? Formes de vies temporairement escamotées 60 Damian Jurt : The Institution of Lost Form 61 Orfeo Aurora Lili : The politics of sharing, healing and reappropriating our bodies, emotions and spaces 61 Yaël Maïm : Comment arrêter d’avoir peur ? How to stop being afraid ? 61 Joanna Osbert : En vies de femmes 62 Sabine Rosset : « Réalise ton potentiel, sois créatif et vends-toi : parce que tu le vaux bien ! » 62 Patricia Semmler : (Why is he here?) Why are you here? Perception et construction de l’identité 63 Anja Spindler : From ones selves to the common 63 3 ET MOI ET MOI ET MOI ? Valérie Anex (Master of Arts en arts visuels HES-SO) Nous n’avons jamais autant été entourés par des miroirs n’est véritablement intéressé par cette profusion d’expression, qu’à notre époque. En effet, jusqu’au 20ème siècle, les miroirs à une exception non négligeable il est vrai : celle de l’émetteur étaient rares et chers. De même, posséder une image de soi ou du créateur lui-même. Cependant, plus la subjectivité me était rarissime. Seuls les personnes de rang social élevé pou- semble être sollicitée, plus cela s’exprime, plus l’effet me paraît vaient se permettre de commander l’ouvrage de leur portrait anonyme et vide. Il y a tant d’informations que nous devenons en peinture. indifférents aux contenus. L’apparition de la photographie a totalement changé le Dans ce désir de communiquer, je discerne un désir in- rapport que les êtres entretiennent avec leur propre image. tense d’éprouver, faire preuve de son existence, alors que l’uni- Cependant, il aura fallu attendre de nombreuses années avant vers qui nous entoure n’a peut-être jamais été aussi intrusif que la fabrication en série d’appareils photographiques do- et aussi anonyme à la fois. Aujourd’hui, plus besoin de parler mestiques en généralise l’usage familial. Pendant longtemps, le ou de partager des expériences avec quelqu’un pour se faire coût élevé de la photographie faisait qu’on ne pouvait se faire une idée de sa personnalité, apprendre à connaître ce qui lui tirer le portrait qu’en de rares et exceptionnelles occasions. plaît, ou ce qu’il pense du monde. Tout se fait de manière plus Rappelons-nous ces clichés d’un autre siècle où les gens po- rapide. Il suffit de consulter son profil sur un réseau social saient gravement, presque sévèrement. Au delà des contraintes pour avoir accès à l’identité que celui-ci veut transmettre au imposées par la technique, la rencontre avec le photographe monde. A l’ère de la communication à travers les réseaux so- était une affaire sérieuse. Depuis, à mesure que se démocratise ciaux, le voyeurisme et l’exhibitionnisme ne sont plus tabous. l’usage domestique de la photographie, on a vu l’apparition du En consultant même brièvement un profil, il est généralement sourire dans les portraits. Aujourd’hui, avec la venue du nu- assez aisé de distinguer quelques traits importants de la per- mérique, tout nous renvoie à notre propre image. Les miroirs- sonnalité de l’individu que l’on vient espionner. Ainsi, l’exis- écrans sont partout. Nos téléphones portables et nos balladeurs tence sur les réseaux sociaux exige l’étalage au reste du monde peuvent prendre des photos, ainsi que fixer notre image en des ingrédients de sa propre composition. Tels des produits, mouvement. Nos ordinateurs et nos disques durs contiennent nous exposons notre identité à facettes à travers des photos de des milliers de photos numériques sans jamais que nous n’en nous-mêmes, de nos vacances, la reprise de citations piochée tirions aucune. Ces ordinateurs-là, ainsi que tous les gadgets sur Internet, la mise en avant de nos goûts culinaires, sexuels, écrans sortis dernièrement, prennent eux-mêmes aussi des musicaux et cinématographiques, la mise à disposition de nos photos. Dernièrement, Internet, ayant rendu possible la com- CV, de notre parcours de formation et de manière plus géné- munication synchronisée entre la voix et l’image, nous permet rale en indexant tout ce qui nous intéresse ou nous insupporte. de nous exprimer à distance sous forme de vidéo conférence. Les identités se figent, se fixent. Les détails de notre vie privée Ainsi, le reflet de nos visages et de nos corps est devenu om- s’accumulent sur ces réseaux, qui à la différence de la vie réelle, niprésent. ne semblent pas connaître l’oubli et gardent toutes les traces de ce que nous y faisons. Avec l’avènement d’Internet, nous avons assisté à la dé- multiplication des médiums d’expression, ainsi qu’à une dé- Chaque époque aime se reconnaître et trouver son iden- mocratisation sans précédent de l’usage de la parole. Chacun tité dans une grande figure mythologique ou légendaire qu’elle peut désormais partager avec le monde son expérience intime, réinterprète en fonction des problèmes du moment : Œdipe ses états d’âme ou donner à voir l’actualité de sa vie quoti- comme emblème universel, Prométhée, Faust ou Sisyphe dienne. En effet, aujourd’hui, à partir de son téléphone por- comme miroirs de la condition moderne. Aujourd’hui, c’est table, il est possible de transposer sur le réseau le moment vécu Narcisse qui me semble symboliser le mieux le temps présent. dans une quasi immédiateté. Il s’agit d’une véritable mutation Ainsi, dans la recherche en cours que je mène, le narcissisme historique : la possibilité, presque en temps réel, de la média- figure comme une clé de lecture sur le monde qui m’entoure, tisation permanente et sychronisée de nos existences. Ainsi, désignant le surgissement d’un profil inédit de l’individu dans une photo, une séquence filmée ou la moindre pensée peut, en ses rapports avec lui-même, son corps, autrui et le monde. Nar- l’espace de quelques secondes, devenir accessible à tous. cisse peut concourrir à l’idéal type de la personnalité contem- poraine. Fasciné et replié sur soi, son indifférence au monde L’homme postmoderne est fasciné par ce que Jean Bau- extérieur lui empêche de prendre soin de son environnement, drillard appelle l’extase de la communication.