La Décentralisation Au Mali : Mutations Politiques Locales Et Changements Sociaux
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UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL LA DÉCENTRALISATION AU MALI : MUTATIONS POLITIQUES LOCALES ET CHANGEMENTS SOCIAUX MÉMOIRE PRÉSENTÉ COMME EXIGENCE PARTIELLE DE LA MAÎTRISE EN SCIENCE POLITIQUE PAR SIMON GODIN-BILODEAU FÉVRIER 2010 UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL Service des bibliothèques Avertissement La diffusion de ce mémoire se fait dans le respect des droits de son auteur, qui a signé le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche de cycles supérieurs (SDU-522 - Rév.01-2006). Cette autorisation stipule que «conformément à l'article 11 du Règlement noa des études de cycles supérieurs, [l'auteur] concède à l'Université du Québec à Montréal une licence non exclusive d'utilisation et de publication de la totalité ou d'une partie importante de [son] travail de recherche pour des fins pédagogiques et non commerciales. Plus précisément, [l'auteur] autorise l'Université du Québec à Montréal à reproduire, diffuser, prêter, distribuer ou vendre des copies de [son] travail de recherche à des fins non commerciales sur quelque support que ce soit, y compris l'Internet. Cette licence et cette autorisation n'entrainent pas une renonciation de [la] part [de l'auteur] à [ses] droits moraux ni à [ses] droits de propriété intellectuelle. Sauf entente contraire, [l'auteur] conserve la liberté de diffuser et de commercialiser ou non ce travail dont [il] possède un exemplaire.» AVANT PROPOS La décentralisation représente un concept à géométrie variable pouvant prêter à des interprétations multiples. La réflexion peut être posée du point de vue de l'autonomie confiée à des pouvoirs locaux ou à des échelons inférieurs de l'administration, de la mise en place de procédures de délibérations et de budgets participatifs, de la subordination de l'appareil administratif par des organes élus par la population, de la sous-traitance à des organismes communautaires de certaines charges jusque-là assumées par l'État, de la privatisation des entreprises et des services publics ou de la répartition des pouvoirs parmi les membres de J'exécutif (hauts fonctionnaires, ministres, chef du gouvernement). Au Mali, les questions soulevées par la décentralisation concernent avant tout les paramètres hérités des prérogatives de commandement des agents de l'administration territoriale et du «centralisme démocratique» qui régit les rapports entre militants de la base jusqu'au sommet du parti unique. Le système prend la forme d'une pyramide administrative inspirée des rapports de subordination hiérarchiques qui prévalent dans l'armée et les compétences attribuées aux pouvoirs locaux sont continuellement remodelées par la valse effrénée des changements de garde à la tête de l'État. Ainsi, le processus de communalisation en cours au Mali n'est en rien comparable à celui déjà emprunté par les municipalités nord-américaines et les enjeux liés aux rapports pouvoirs/territoire suivent des trajectoires historiques qui sont bien distinctes à ce pays. La décentralisation malienne doit être située par rapport aux différentes représentations du pouvoir qui prévalent dans l'imaginaire de la société ainsi qu'aux divers mouvements de contestation qui ont secoué la scène politique depuis le début des années 1990. La réforme s'inscrit dans l'esprit d'une doctrine participative d'inspiration populiste (mobilisée par le gouvernement, mais aussi - dans une moindre mesure - par les bailleurs de fonds) qui a pour ambition de répondre à certaines revendications « populaires» par la refondation démocratique de la sphère publique au niveau local. Les mutations de l'État sont étroitement imbriquées aux changements iii sociaux et les réformes de décentralisation constituent des aspects parmi d'autres des processus de formation de l'État. À ce titre, la transformation des dispositifs d'administration territoriale représente un sujet potentiellement « explosif» et les conflits susceptibles d'émerger sont largement tributaires des rivalités entre les différentes composantes sociales qui influencent le cours de la vie politique locale ou nationale. Le plus souvent, la littérature sur la décentralisation au Mali est le fait d'auteurs provenant du milieu de la « coopération au développement» (institutions financières internationales, agences de développement, organisations non gouvernementales, consultants privés) et de la « société civile l » (mouvement associatif et groupes de pression) où la réforme est presqu'exclusivement abordée sous l'angle des cibles de développement à atteindre grâce à l'accroissement de la participation populaire et à l'appropriation des initiatives locales de développement. La réforme est exposée en citant une chronologie des actions déployées et en énumérant les mécanismes d'appui mis à la disposition des acteurs impliqués dans le processus. L'analyse tend alors à être focalisée sur la contribution des organismes de coopération internationale dans « la prise en charge par la population de son propre développement », d'une manière telle que l'institutionnalisation des pouvoirs d'État et l'action politique des acteurs est presque entièrement passée sous silence. D'ailleurs, les communautés locales sont souvent idéalisées d'après une image qui les conçoit comme des entités homogènes et sans conflit dont les membres parlent tous d'une seule et même voix. La perspective adoptée a pour effet d'occulter les luttes sociales et les rivalités entre acteurs qui se déploient dans l'arène locale tout en proposant une analyse technicisée et dépolitisée des enjeux par des exigences de « renforcement des capacités », « d'appui à la mise en œuvre» ou de « bonne gouvernance ». Notre intention est de montrer que les processus de décentralisation s'insèrent dans des espaces aux rapports de force déjà bien structurés et que ces réformes sont 1 Sur les ambiguïtés liées à l'appellation « société civile}) dans le contexte malien, voir: Roy, 200Sa. IV susceptibles d'engendrer des mutations politiques pouvant (ré-)activer certains conflits locaux. La transformation des structures d'ancrage du pouvoir central dans la sphère locale entraîne une recomposition des luttes sociales et un repositionnement des acteurs dans l'arène politique locale. La décentralisation ne relève pas simplement de paramètres techniques ou jurid iques et prend sa source dans une plural ité d'idéologies qui façonnent l'action politique en imaginant et réinventant des modalités d'exercice du pouvoir tant au niveau de la sphère locale que de l'État central. Si l'influence de la pensée néolibérale sur la conception contemporaine des politiques publiques n'est plus à démontrer, celle apportée par le courant néo-traditionaliste reste encore peu abordée dans la recherche en sciences sociales. Pourtant, l'idéologie communautaire mobilisée par l'État dans la promoüon de sa réforme n'est pas sans conséquence sur la voie localement empruntée par la décentralisation. Les rapports entre pouvoirs locaux et pouvoirs d'État font l'objet de différentes lectures par les acteurs (suivant leur positionnement stratégique dans l'arène locale) et sont constamment retravaillés par les groupes sociaux en lutte pour le contrôle des nouvelles instances municipales. À ce titre, la question domaniale constitue sans doute la démonstration par excellence des divers rapports de force entre acteurs sociaux qui se dessinent dans le nouveau contexte de pluralisme juridique et institutionnel apporté par la décentralisation. L'appropriation de la terre est intimement liée à l'action politique (ou à la capacité d'influencer les décideurs) et l'arène communale devient un site de confrontation/collaboration entre di fférents « groupes stratégiques» impliqués dans les enjeux fonciers. Nous tenons à remercier plusieurs personnes qui ont contribué de différentes façons à la réalisation de ce mémoire. Nous sommes d'abord redevables à notre famille et à nos amis, sans qui nos études à la maîtrise n'auraient jamais été possibles. Nous remercions Mme Chantal Rondeau, professeure au département de science politique de l'Université du Québec à Montréal, qui nous a largement appuyé lors de la phase préparatoire au projet de recherche. Nous soulignons aussi le concours apprécié des membres du personnel de la Direction nationale de l'agriculture (DNA) du Mali, de l'antenne du Projet de réduction de la pauvreté (PRP) de Kolokani et de l'ONG Kilabo à v Bamako qui nous ont introduit aux enjeux soulevés par la décentralisation. Une mention particulière à Mme Lydia Rouamba, dont les corrections, les observations et les commentaires ont été vivement appréciés tout au long de nos travaux de recherche. Enfin, nous tenons tout spécialement à remercier notre directrice de recherche, Mme Nancy Thede, professeure au département de science politique de l'Université du Québec à Montréal, sans qui la rédaction de ce mémoire n'aurait jamais pu se réaliser. Ses pistes de réflexion et ses judicieux conseils nous ont été d'un grand secours pour surmonter les impasses et peaufiner notre analyse. TABLE DES MATIÈRES AVANT PROPOS ii LISTE DES ABRÉVIATIONS __ ._ _._ ix RÉSUMÉ xi INTRODUCTION _ _ _ . CHAPITRE 1: HISTORIQUE DE L'ADMINISTRATION TERRlTORIALE ET DES RÉFORMES DE DÉCENTRALISATION _ 23 1.1 Les modalités d'occupation du territoire pendant la période précoloniale 23 1.2 La colonisation française et l'invention des pouvoirs « coutumiers » _ _ 25 1.3 La décentralisation et la « révolution active» de Modibo Keïta _ 27 lA Les pouvoirs locaux sous le régime militaire et le parti unique de Moussa Traoré ~ .. 29 1.5 Conclusion 34 CHAPITRE Il : CONTEXTE ET DESCRlPTION DE LA RÉFORME __ _ . 37 2.1 La décentralisation dans la perspective des mouvements sociaux de 1980-1990 37 2.1.1 L'ajustement structurel et l'essor de la « société civile» locale _ 37 2.1.2 Le « problème du Nord» et les Accords de Tamanrasset_._ _ _ 38 2.1.3 Les « événements» de mars 1991 et la naissance du « mouvement démocratique» 39 2.104 La décentralisation à la Conférence nationale souveraine de 1991 _ 40 2.1.5 La crise de légitimité de l'État et la montée des revendications sociales. __ _._ 42 2.1.6 La décentralisation: impulsion du gouvernement ou des bailleurs de fonds ? 43 2.2.