Rapport hebdomadaire sur la situation des droits de l’Homme et justice Semaine du 25 au 29 février 2008

I. Sommaire

ƒ Violations des droits de l’Homme rapportés par les Officiers des droits de l’Homme et justice (ODH&J) : Police nationale burundaise, PNB, (204) ; Force de Défense Nationale, (FDN), (0) ; Service National de Renseignement, (SNR), (0) ; administration locale (03). ƒ Abus de droits de l’Homme recensés par les ODH&J : Palipehutu FNL de Agathon Rwasa et FNL dissidents (40). Cette semaine, les ODH&J ont enregistré vingt-neuf (29) nouveaux cas, contre quatre (4), la semaine précédente. ƒ Poursuite et fin, le 26 février 2008, de la formation des Magistrats et auxiliaires de justice de la Mairie de , débutée le 19 février 2008. Cette formation s’inscrit dans le cadre de la consolidation de la paix en matière de justice. Du 26 au 27 février 2008, s’est tenue également une formation sur l’utilisation des registres sur la justice juvénile en province de Ngozi.

II. Situation sécuritaire, politique et sociale

La situation sécuritaire a été perturbée dans certaines localités des provinces Bubanza (excepté le chef lieu) et Bujumbura rural. Néanmoins, malgré certains incidents enregistrés, un climat relativement calme a régné dans d’autres endroits de ces mêmes provinces et d’autres provinces du pays (Centre, Nord), notamment en provinces de Cibitoke, Muramvya, Bujumbura Mairie et . Dans les provinces du Sud, la panique, causée par des membres de la communauté Batwa, soupçonnés de banditisme armé, en commune de Matana (Bururi), et une bande organisée, accusée de terroriser la population de la commune (Bururi), a conduit à l’arrestation de certains éléments de ce groupe dans la commune de Matana, à l’intensification des patrouilles de la police et à l’organisation des rondes nocturnes par la population de cette localité.

La situation politique a été dominée par les négociations menées au sein du Parlement, relatives à l’opportunité et aux procédures de remplacement de la première vice-présidente de cette institution, Mme Alice Nzomukunda.

III. Situation des droits de l’Homme

- Violations attribuées aux membres de la PNB : deux-cent quatre (204) cas de violations de droits de l’Homme ont été recensés, soit une légère hausse, comparativement au nombre (191) de violations de droits humains rapporté la semaine dernière. Ce sont un (1) cas d’atteinte au droit à la vie (tentative d’assassinat au droit à la vie en province de Kirundo), dix (10) cas d’arrestation et détention arbitraire), cent quarante-sept cas (147) de détention illégale, trente et une cas (31) de détentions de mineurs dans la même cellule que les adultes, quatre (4) cas d’atteinte à l’intégrité physique (un cas d’usage excessif de la force et trois cas de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants) et un (1) cas d’atteinte à la propriété (province de Kirundo). S’agissant du cas d’usage excessif de la force, survenu en province de Makamba, dans la nuit du 22 au 23 février 2008, un policier a tiré sur un détenu qui tentait de s’évader du cachot de la Police de Sécurité Intérieure/Police Judiciaire de Makamba et l’a atteint au niveau de l’épaule droit. Le fugitif a été reçu des soins de santé à l’hôpital de Makamba durant la même nuit. Bujumbura, , B.P. 1490 * Tél. (257) 2221 48 82 * Fax (257) 2221 64 30 * 1

- Violations attribuées à l’administration locale et aux enseignants : Trois (3) cas de violations de droits humains, commis par des autorités administratives (2) et un enseignant (1), ont été rapportés par les ODH&J cette semaine. Dans un des cas, celui d’arrestation et détention arbitraire/atteinte au droit à la liberté et à la sécurité, rapporté en commune Murwi, province de Cibitoke, une autorité civile de cette province, en complicité avec ses gardes de la PNB, ont arrêté une femme à son domicile, sans motifs précis. Cette femme a été libérée le 24 février 2008 par ladite autorité. Dans un autre cas, les ODH&J ont appris le cas de viol d’une élève par un enseignant de la province de Kayanza qui a été commis en juillet 2007. Les ODH&J continueront à faire le suivi de ces cas.

- Abus attribués aux membres du Palipehutu FNL/Rwasa : trente-sept (37) d’abus de droits humains, imputés aux membres du Palipehutu FNL/Rwasa, ont été recensés durant cette semaine, contre quatre (4), la semaine précédente. Ce sont sept (7) cas d’homicide, (Bujumbura rural et Bubanza), seize (16) cas de vols, dont la moitié (8) ont relevés dans la province de Bujumbura Rural, quatre (4) cas de coups et blessures et huit (8) cas d’enlèvement. Un (1) cas d’abus de droits humains a été commis par des dissidents FNL basés à Randa. Un de ces cas d’abus de droits de l’Homme, une atteinte au droit à la propriété, a été également répertorié en province de Makamba. En effet, selon une autorité policière de cette province, les membres du Palipehutu FNL/Rwasa de la colline de Rukambasi, commune de Vugizo, province de Makamba ont pris des chèvres dans sept (7) ménages des communes de Vugizo et de Nyanza- Lac (Makamba).

Les membres du Palipehutu FNL/Rwasa ont continué de s’illustrer dans le rançonnement de la population dans plusieurs localités des provinces de l’Ouest et du Sud. Ces éléments du Palipehutu FNL/Rwasa commettraient aussi des actes de viol, qui ne seraient pas portés devant les autorités judiciaires dans la quasi-totalité des cas, par peur des représailles. Toutefois, la DDH&J du BINUB et l’OHCDH-B n’en ont enregistré que très rarement. Ce fut pourtant le cas cette semaine de deux cas de viol collectif attribués à des membres du Palipehutu FNL/Rwasa, l’un ayant été commis sur une femme majeure et l’autre sur une mineure. Par ailleurs trois (3) abus ont été attribués aux prétendus FNL dissidents, dont un (1) cas d’homicide et deux (02) cas d’atteinte à l’intégrité physique en province de Bubanza.

Violences sexuelles : le nombre (12) de viols, recensé au cours de la période sous ce rapport, est en baisse, par rapport à celui, (26), de la semaine dernière, [il convient d’ajouter les deux viols attribués à des membres du Palipehutu FNL/Rwasa et un viol commis par un enseignant]. Les auteurs ont été appréhendés uniquement dans cinq (5) cas et six (6) victimes ont reçu des soins de santé. Dans six (6) cas, les victimes sont des mineurs. Par ailleurs, dans trois (3) cas, ces actes de viol ont été le fait de mineurs sur d’autres mineurs. C’est notamment le cas de viol collectif de deux garçons, âgés de 16 et 17 ans, sur une mineure de 15 ans, relevé en commune de Rango, province de Kayanza. Un cas de tentative de viol a été également répertorié en commune Burambi, province de Bururi.

Les cas de viol restent malheureusement souvent sans suite, ce qui renforce l’impunité (les auteurs ont été arrêtés dans un tiers de cas cette semaine). En outre, selon les informations recueillies par les ODH&J à l’antenne Muyinga de la Society for Women Against Aids in Africa (SWAA), sur 61 cas de viol enregistrés par cette organisation depuis le 1er janvier 2008, uniquement huit (8) cas ont été portés à la connaissance de la police. Ces données ont été mises à jour sur base des statistiques du Sous- Commissariat provincial de la Police Judiciaire de Muyinga.

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Droit à l’éducation : la commune de Rango en province de Kayanza connaît des difficultés techniques et financières quant à la scolarisation de 40.000 enfants en âge de scolarité. En vue de pallier ce problème, les parents de cette localité ont aidé à la construction de 14 autres écoles supplémentaires, qui restent néanmoins inachevées et inequipées en bancs pupitres. Les enseignants de certaines classes équipées sont obligées d’accueillir jusqu’à 260 élèves par classe, ce qui explique le taux élevé d’abandon scolaire.

Par ailleurs, le phénomène d’intimidations à l’égard d’enseignants, non originaires de la localité, à l’école primaire de Murambi, en commune de Muhuta, province de Bujumbura rural, observé depuis janvier 2008, est resté récurrent durant la semaine couverte par ce rapport. Les présumés auteurs de ces intimidations seraient des écoliers de cette école primaire et leurs parents, d’une part, et des hommes armés non identifiés en tenue militaire, d’autre part. Selon une autorité administrative, une solution serait en cours d’étude par les intervenants dans le domaine de l’éducation et l’administration communale de la commune Muhuta (Bujumbura rural).

Droits sociaux et économiques : en vue de faire le suivi des droits sociaux et économiques des malades retenus dans des hôpitaux pour non paiement et de l’impact de la mesure présidentielle portant gratuité des soins d’accouchement et de santé pour les enfants de moins de 5 ans, les ODH&J se sont rendus dans trois hôpitaux publics du pays : l’hôpital Prince Régent Charles, l’hôpital Prince Louis Rwagasore (Bujumbura Mairie) et l’hôpital de Kiganga, en province de Muramvya. Dans le premier, cette mesure a eu un impact positif, car, peu (10 à 15 patients indigents sur 600 reçus en moyenne par mois) sont retenus à cet hôpital pour non paiement. Par contre, dans le second, des difficultés sont observées (rupture de stock des médicaments et sous-équipement en matériel médical), qui résulte en ce que cet hôpital n’a pas pu accueillir ces catégories vulnérables, que durant une courte période. Le troisième hôpital fait face à des contraintes particulières dans la mise en application de la mesure présidentielle. Il connaît néanmoins, depuis juillet 2007, un retard de paiement des factures, par le Ministère de la Santé, à hauteur de 15 millions de francs burundais, par le Ministère de la Santé.

Droit de l’enfant : selon les informations recueillies auprès des autorités policières par les ODH&J, un (1) cas d’infanticide, recensé le 20 février 2008, en commune Mabanda, province Makamba, a été porté à leur connaissance. La présumée coupable, une femme de 21 ans, a été arrêtée le lendemain et détenue au cachot de femmes de cette province.

Droit d’asile : selon les autorités administratives de la commune Mabanda, en province de Makamba, deux burundaises, mariées à des tanzaniens, ont été battues, dépouillées de leurs biens et chassées de la Tanzanie par deux milices tanzaniennes, connues sous le nom de « BASUNGUSUNGU » et « BANAMUGAMBA ». Elles ont été sauvées par des membres de la police tanzanienne qui les ont par la suite acheminées vers la commune Mabanda, province Makamba, où elles ont bénéficié d’une assistance de la PARESI.

IV. Administration de la Justice et Justice

Les visites effectuées par les ODH&J dans les différents centres de détention et prisons du pays ont permis de faire le constat de la récurrence des lacunes liées à l’administration de la justice. En effet, un nombre non négligeable de détention arbitraire, détention illégale et de détention de mineurs dans la même cellule que les adultes restent invariablement observés dans les établissements pénitenciers visités.

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En outre, M. Nestor Nijimbere, ex-pensionnaire de la prison de Rumonge et ancien militaire originaire de la colline Samvura, commune Mabanda, province de Makamba, a été de nouveau arrêté, le 25 février 2008, sur mandat d’arrêt délivré par le procureur de la République à Makamba. Il est actuellement détenu au cachot de la police de sécurité intérieure/police judiciaire de Makamba.

Pour rappel, M. Nijimbere avait été arrêté le 30 mai 2004 et placé en détention à la prison de Rumonge le 01 juin 2004 où il devait purger une peine à perpétuité pour avoir tenté d’assassiner son épouse après l’avoir amputé de ses deux bras. Dans le cadre de la grâce présidentielle accordée par le président de la République du Burundi, matérialisée par le décret N° 100/13 du 17 janvier 2008, M. Nijimbere avait été relaxé le 31 janvier 2008, après avoir été déclaré atteint de troubles mentaux, par une commission médicale ad hoc mise sur pied par le ministère de la Justice.

Monitoring du dossier de Kinama : selon le procureur près le tribunal de grande instance en Mairie Bujumbura, l’instruction pré juridictionnelle du dossier Kinama a été clôturée et transmis au tribunal de grande instance de Bujumbura Mairie pour fixation.

V. Activités de sensibilisation et de promotion des droits de l’Homme

La DDH&J du BINUB et l’OHCDH-B ont mené plusieurs activités notamment :

- Deux sessions de formation sur l’utilisation des registres pour mineurs, dans les parquets, tribunaux et prisons, tenues les 26 et 27 février 2008, par l’Unité Justice du BINUB dans les enceintes du BINUB Ngozi-Muyinga. Quatre différents registres ont été élaborés. Après un mois, une session d’évaluation sera organisée au bénéfice des utilisateurs de ces registres en vue d’éventuelles modifications. Des autorités judiciaires et policières, le personnel pénitentiaire, les membres des comités communaux de protection de l’enfance et l’ONG Terre des Hommes ont participé à cette formation. - Fin, le 26 février 2008, de la formation des magistrats et auxiliaires de justice de la Mairie de Bujumbura, débutée le 19 février 2008.Cette formation a été la dernière, après celles organisées au bénéfice des mêmes bénéficiaires dans tout le pays, dans les provinces de Ngozi, Gitega, Cibitoke, Muramvya et Makamba. Cinq cent vingt et un (521) magistrats, sur cinq cent quatre-vingt (580) magistrats et auxiliaires de justice, ont bénéficié de ces formations à travers tout le pays.

VI. Réunion avec les partenaires

Rencontre hebdomadaire avec les partenaires : cette rencontre a réuni les ODH&J, les partenaires travaillant dans le domaine des droits de l’Homme et les autorités burundaises, (les représentants de la PNB, de l'Etat Major des FDN, du SNR, du parquet général de la République, du ministère de la Solidarité nationale ainsi que de HRW.). Les ODH&J ont fait part au représentant de la PNB, de l'Etat Major de la FDN et du Parquet Général de la République de neuf (9) nouvelles allégations de violations des droits humains par les agents de la FDN et PNB.

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