N°5 JANVIER 2O12

L'USINE KUHLMANN MEMOIRE HUMAINE D'UN SIECLE DE FABRICATION DE MATIERES COLORANTES SYNTHETIQUES C'était l'affiche de l'Espace Aragon, samedi 3 vail que le plaisir un peu nostalgique de revenir décembre 2O11 dans ces lieux désertés. On les voit reproduire avec "15 et 17" sont des nombres liés aux deux films pré- une sorte d'émotion les gestes d'antan. Julien sentés, samedi 3 décembre, à l'Espace Aragon, Soudet, pendant le débat, expliquait qu'il ne les devant un public fourni, puisque 176 entrées ont été avait jamais filmés en gros plan, comme cela se fait enregistrées. lors d'interview, cars ils n'étaient pas interviewés, Le premier : "Le mystère de l’Atelier 15" date de mais acteurs. 1957 ; commandé par l'INRS (Institut national de la Dans le public, fort nombreux, beaucoup d'anciens recherche et de la sécurité), il a été tourné par le de Kuhlmann, d'enfants d'anciens. La salle était grand cinéaste Alain Resnais et son assistant André attentive mais pas silencieuse, car des souvenirs Heinrich. Il met l'accent, sous une forme fiction- étaient évoqués, des anecdotes rapportées au fur et nelle, sur les maladies professionnelles dont étaient à mesure que défilaient les images. Le débat aurait victimes des salariés de l'usine Kuhlmann. Bien que pu être plus passionnant entre les "acteurs", les jeu- datant de plus de 50 ans, il a gardé son actualité nes "créateurs" du second film et le public qui avait d'exemple face aux produits dangereux pour la tant de chose à dire, mais l'absence de micro a santé manipulés dans l'industrie encore de nos empêché les échanges. Dommage ! jours. C'était pourtant une bonne surprise que de tels films Le second "Le Bâtiment 17" a été réalisé par Julien attirent tant de spectateurs. Soudet, assisté par 3 de ses camarades de l'Ecole Louis-Lumière (école de préparation aux métiers de l'image) de Noisy-le-Grand. Il a été tourné sur la fri- che industrielle de l'usine Kuhlmann qu'est le bâti- ment 17, aujourd'hui désaffecté mais toujours Compte rendu de la causerie du 7 octobre 2O11 debout. C'était la troisième concernant Les abattoirs de la ville ont fonc- cité des Landaus ont poussé C'est un documentaire dont les acteurs sont quatre les années 60-80 ; on note tionné jusqu'aux années 60 sur des terrains inoccupés. moins de présents que lors de avant d'être utilisés comme D'autres disparitions ont été retraités qui ont travaillé il y a 20 à 40 ans dans cet la première et la deuxième, entrepôts des services munici- relevées, celles des pompes à atelier. Ils évoquent tout aussi bien la dureté du tra- mais de nouveaux participants, paux. eaux, des urinoirs, pissotières, ce qui a orienté différemment Déhais, couramment appelé vespasiennes que les nostalgi- les prises de parole. La causerie "Déhais Courtepointe" sera un ques regrettent... Vous allez découvrir le numéro 5 a traité essentiellement des entrepôt d'objets en plastiques. La prochaine causerie aura conversions, transformations Commentry, qui fabriquait des lieu, vendredi 6 avril 2012, à d'Oissel-Histoire, et en cette période qui se sont produites ces charpentes métalliques et réparait partir de 17h30 à l’ ancienne économiquement et socialement années là : les wagons, fermera en février 64. école Mongis. Le thème en difficile pour les familles osseliennes, L'usine Plantrou a délaissé Azolacq, usine d'engrais s'est sera : fêtes et animations de l'industrie textile pour la vente installée sur les friches de la notre ville. nous espérons que ces pages vous de pavés, avant de céder la première usine Kuhlmann, fin 67. intéresseront et vous divertiront. place aux Coopérateurs de Le stade du Rougemont est Ainsi vous prendrez connaissance Normandie. devenu une zone de petites entre- e La filature Leverdier devenue prises et commerces de gros. Erratum du n° 4 du 4 et dernier épisode de l'étude ensuite De Menibus (dont le Quant aux deux cinémas, leurs historique réalisée par Vincent directeur, monsieur Leverdier, destins furent bien différents : d'Oissel-Histoire : Berment sur "Oscellus", d'un portrait se promenait à cheval dans l'Eldorado qui cessera son acti- Page 1 Dans le compte rendu de la causerie du 7 avril d'Edouard Turgis, maire et écrivain Oissel) est devenue Entrepose, vité dans les années 65-66 fut Bambina et Darty. démoli et son emplacement 2011, il est indiqué "la ferron- e au XIX siècle et d'une information devint un parking, alors que le nerie de Gustave Lesueur, or il rétrospective sur la pratique de la La Quinoleïne s'est installée au Capitole lui, cessait son activité s'agissait de la ferronnerie d’Eugène Lesueur". pêche en à Oissel. début des années 60 à l'empla- dans les années 70 puis devint cement de la Cotonnière. une entreprise de matériel de Gustave Lesueur était quant à En ce début de mois de janvier, le Fanfani (qui fabriquait des cha- sécurité. lui, fermier rue Déhais. bureau de la Société d'Histoire peaux dans les années 30, et Page 4 à la 3e colonne, il est d’Oissel vous présente ses meilleurs qui pendant la Seconde Guerre De nombreuses carrières ont écrit "elle consacra toute son mondiale a fabriqué ou réparé été plus ou moins comblées activité à la vie de l'Union vœux pour l' année 2O12. des uniformes allemands) s'est avant d'être construites d'habi- locale CGT. unitaire." il fallait reconverti dans la confection de tations, c'est le cas de la cité lire CGTUnitaire. Pour le Bureau chemises, puis est devenu Uta, Boieldieu. D'autres cités, La CGTU était issue de la scission Ixo, Gavrovik avant sa fermeture comme la cité des Oiseaux, la de la C.G.T. qui s'est opérée en Le Président, René Courtois 1921.

éditorial définitive dans les années 80. cité des Violettes (vers 1973), la Mais où était donc Oscellus ? (4e partie) Oissel était (très probablement) (bientôt rebaptisé sainte Catherine du Mont) par Normands et le second de la Neustrie. l'Oscellus des Normands Gosselin d'Arques et sa femme Emmeline. Dans (*) : Ainsi Torhulmus était peut-être l'île de Þórr Dans les premiers numéros de Oissel-Histoire, ce texte qui énumère les dons faits au monastère, (Thor ou Tor), comme Tor villam peut avoir été le nous avions vu l'arrivée des Vikings dans nous trouvons cette mention à Oscellus : domaine foncier de Þórr, ce qui peut laisser pen- la vallée de la Seine et la construction de "Sed et insulam super alveum Sequanae quam ser qu'un Normand appelé Þórr s'était rendu maî- leur forteresse dans l'île d'Oscellus plus de dicunt nomine Torhulmum, alio quidem vocabulo tre au moins de Tourville et de cette île. Il pour- cinquante ans avant la naissance de Oscellum." rait alors s'agir de Torf, personnage dont la Normandie (911). Nous avions vu aussi " Et aussi l'île de la Seine nommée Torhulmus, ou Guillaume de Jumièges dit qu'il a donné son nom les positions des historiens sur la question de encore Oscellus. " à plusieurs domaines appelés Tourville et qu'il a la localisation d'Oscellus, positions rendues contradictoires par la médiocrité des textes Là encore, nous pouvons affirmer qu'il s'agit eu un fils nommé Turold, si tant est que ce fils et de l'époque. Nous avions illustré ces contra- d'Oissel car les cessions successives de l'île nous le père d'hugues (qui donna la pêcherie en 1026) dictions par l'énigme du chemin emprunté permettent de la suivre à travers les siècles. Après puissent avoir été la même personne. par Weland pour rejoindre Oscellus en 861. l'avoir possédée 570 ans, l'abbaye l'échangea le 3) Enfin, qu'Oscellus-Torhulmus n'est pas le Aujourd'hui, nous tenterons de présenter 18 juillet 1600 avec d'autres biens contre son nou- contenu du méandre de Couronne (Corhulmus), quelques éléments du raisonnement qui veau site de Quevilly, celui de la montagne sainte autre affirmation de l'abbé Lebeuf pourtant large- nous conduit à cette conclusion : Catherine ayant été détruit en 1597. Le contrat ment reprise jusqu'à nos jours. Oissel était l'Oscellus des Normands. d'échange précise " …l'île de Bédane, qui consiste Alors, quelle île proche d'Oissel Un Oscellus réapparait dans en vingt-cinq acres de terres labourables, trois pourrait bien avoir été Oscellus ? l'Histoire à partir de 1O26 : acres de prés, avec une oseraie… ". Elle fut ensuite revendue le 15 juillet 1857 à MM Contrairement à l'avis des historiens rappelé par c'est Oissel Lefrançois, Lenormand et autres, nous dit Turgis, les dimensions des îles proches d'Oissel ne En 861, l'île d'Oscellus est évacuée et le site Édouard Turgis, précisant qu'il en avait vu les me semblent pas incompatibles avec le nombre des retourne à l'anonymat duquel l'avait tiré la titres et que l'île d'Oscellus - Torhulmus est Normands d'Oscellus (en supposant même que la construction de la forteresse de Bernon. En 1026 aujourd'hui l'île sainte Catherine (photo ci- forteresse de Bernon ait eu pour objet d'abriter ses - 165 ans plus tard -, un Oscellus revient dans contre), l'île qui aujourd'hui porte le pilier de l'auto- hommes). Alors, combien pouvaient-ils être ? l'histoire avec la charte d'une donation au profit route A13. Sydroc ayant quitté Bernon en 856, il restait peut- de l'abbaye de Saint-Ouen par Hugues, fils de Que peut-on en déduire ? être une centaine de navires en 861, si tant est Turold, et par sa femme Oda : qu'une partie de cette flotte n'ait pas aussi quitté la "Hac ergo sententia animati, ego Hugo Turoldi 1) D'abord, que cet Oscellus du XIe siècle - Seine, Bernon ayant juré fidélité à Charles le filius, et Oda uxor carissima mihi, tradimus quan- donc notre Oissel - est le seul Oscellus à être Chauve à Verberie en 858. Il ne devait donc pas y dam piscariam inter Tor villam et Oscellum jamais réapparu dans la vallée de la Seine avoir plus de 5 000 hommes, avec leurs armes et sitam, habitatoribus coenobii, Rotomagi statuti, depuis 861. De plus, situé en bord de Seine, il leurs réserves de vivres, peut-être leurs bateaux était dès 1026 éponyme d'une île qui portait avec du bois pour les radouber ou encore des che- strictement le vaux (à titre de comparaison, les hommes de même nom latin Wéland devaient être entre 10 000 et 15 000 - plus que l'île des de 260 bateaux - quand ils ont eu raison des assié- Danois, contraire- gés en les affamant). ment aux topony- À cette époque, les grandes îles devant Oissel pou- mes de Perossel, vaient, comme aujourd'hui, compter plus de 10 hec- d'Hosceil et de tares et donc contenir sans problème un fort de 5 Valoisel opposés par hectares, ce qui parait suffisant pour abriter 5 000 l'abbé Lebeuf à cette hommes (ces hommes robustes vivaient de longues conclusion (ces périodes à 50 dans leurs bateaux d'environ 100 m²), toponymes men- au moins en période de siège (celui de l'été 858 par tionnés dans des Charles le Chauve a duré moins de trois mois). textes de 1206, 1216 Notons aussi qu'une telle forteresse serait de la taille et 1220, faisaient de celle d'Aggersborg, la plus grande forteresse référence à des lieux Viking connue à ce jour. situés près de Ainsi, l'île sainte Catherine, avec ses 28 acres (un Bougival). Sans être peu plus de 11 hectares), a parfaitement pu conve- les seuls arguments nir. Elle a d'ailleurs été souvent citée comme étant en faveur d'Oissel l'île de Bernon, du fait de l'identité de nom avec (nous avons vu la cette dernière dans la charte de 1030. Mais d'autres Lîle Sainte-Catherine, vue aérienne de 1963. proximité de Pîtres îles pourraient aussi y prétendre. Guilmeth pense in honore sancti Petri apostolorum principis, et et la concentration d'armes Vikings dans la Seine par exemple que l'île saint Martin, aujourd'hui Sancti Audoeni precipui Christi confessoris, ut entre et Pîtres), il est difficile d'imaginer reliée à Oissel, a dû être bien plus grande à cette eam habeant possidendam in perpetuum, pro nos- que ce faisceau cohérent de ressemblances soit époque qu'elle ne l'était au XIXe siècle et qu'elle trarum redemptione animarum." une coïncidence et, en l'absence d'arguments pourrait bien être l'île des Normands. D'autres îles "En conséquence, moi, Hugues, le fils de Turold, aussi convaincants en faveur d'un autre lieu, il comme l'île Mayeux ou l'île aux Bœufs peuvent et Oda, ma chère femme, pour la rédemption de parait naturel d'identifier Oissel à l'Oscellus de 861. encore avoir été assez vastes à l'époque pour conte- nos âmes, nous offrons de manière définitive aux nir une forteresse de cinq hectares. Pour clore défi- habitants du monastère suivant la règle de Rouen 2) Ensuite, qu'Oscellus serait bien un nom nitivement cette question de la localisation situé sous le patronage de saint Pierre prince des d'origine gauloise ou gallo-romaine, contraire- d'Oscellus, des études complémentaires sur les tex- apôtres et de Saint Ouen confesseur de Christ, ment à l'hypothèse de Depping, et Torhulmus un tes et une campagne d'exploration géophysique ou une pêcherie se trouvant entre Tourville et nom donné par les nouveaux arrivants, puisque le de fouilles devraient être menées. Par exemple, on Oissel." nom d'Oscellus apparait en 856 alors que celui de pourrait chercher dans nos îles les vestiges d'un Oscellus étant l'ancien nom d'Oissel et Tor villam Torhulmus n'apparait qu'en 1030. Pour renforcer rempart et d'un fossé de 700 ou 800 m de périmètre celui de Tourville-la-rivière, il ne fait aucun doute cette hypothèse, notons que Torhulmus est d'ori- (René Houdain avait d'ailleurs observé des vestiges que cette charte concerne notre ville (c'est donc la gine nordique : hulmus vient de holmr qui veut pouvant avoir appartenu à de tels ouvrages dans l'île plus ancienne mention attestée). dire île. (*). Enfin, alors que la chronique de sainte Catherine), voire peut-être ceux d'un puits. Quatre ans plus tard, en 1030, un deuxième texte Fontenelle donne les noms des chefs Normands et Une joute épistolaire comme celle qui opposa évoque Oscellus. Il s'agit d'une charte souscrite pas celui d'Oscellus, les annales de Saint-Bertin, l'abbé Lebeuf à Pierre Nicolas Bonamy me parai- par Robert 1er, duc de Normandie et père du futur quant à elles, ignorent largement les noms des trait aussi propice à l'émergence de la vérité. Guillaume le Conquérant, pour la fondation du Normands mais mentionnent Oscellus, comme si monastère bénédictin de la Sainte Trinité du Mont le premier auteur était plutôt familier des Vincent BERMENT ([email protected]). LA PECHE PROFESSIONNELLE A OISSEL

La pêche professionnelle a eu une grande saisonniers ou occasionnels, pratiquaient la située à Oissel). Ces 4 pêcheurs professionnels importance pour la ville d'Oissel, jusqu'à pêche à l'épervier, au filet de traîne ou fixe et au étaient : l'arrivée de la Seconde Guerre mondiale et "l'occupation". gord (nasse). Ils devaient être "inscrits mariti- - Joseph Osmont, habitant 23, passage Jules-Verne mes" comme on disait à l'époque, c'est-à-dire - François Lesueur, 29, rue de la Paix Nous avons retrouvé dans les archives muni- avoir l'autorisation du Préfet pour pouvoir exer- - Victor Osmont, 29, quai de Rouen cipales des documents du XIXe siècle qui y cer, et s'acquitter d'une redevance de droit de - Roger Héricher, 8, route des Roches. faisaient référence, documents auxquels renouvellement chaque année. Mais encore à la même époque de nombreux viennent s'ajouter des témoignages du XXe Pourquoi la pêche s'est-elle éteinte ? On cite pêle- pêcheurs occasionnels, possédant des barques à siècle, et des écrits issus d'autres archives. mêle la pollution, le dragage de la Seine qui a fond plat et exerçant parallèlement un autre Voici quelques exemples de poissons qui modifié le milieu aquatique et la circulation métier, pratiquaient la pêche saisonnière sur étaient "pêqués" en Seine : intense sur le fleuve. Sans doute y a-t-il aussi le fleuve, notamment celle de l'éperlan en mars et avril. La plupart de ces pêcheurs (professionnels ou occasionnels) habitaient les maisons qui longent la Seine. Quant au poisson, il était vendu et consommé sur place, le surplus étant vendu aux alentours, par exemple aux halles d'. Une publication sur Oissel et la Seine est en cours d'élaboration. Elle apportera davantage de précisions, de témoignages, de documents concernant la pêche professionnelle, la pêche de loisirs et autres activités liées au fleuve, comme les transports fluviaux, les liaisons entre les deux rives, les loisirs … Toutefois, la connaissance du passé, du "comment c'était", a tout à gagner du maximum de documentation et de témoignages possibles à recueillir.

Aussi, si vous avez des souvenirs, des témoi- gnages, des documents, des photos que vous souhaitez partager, contactez la Société d'Histoire de Oissel. Référents : Gérard Liégeard : 06 35 64 00 66 Brigitte Hermse-Vicente : 02 35 65 27 01 Entre l’île Adam et l’île aux beufs, gords (nasses) et trémillons (filets) dans le bras de Seine. Nelly Wender : 02 35 92 40 01 - l'éperlan qui annonçait l'arrivée du printemps d'autres raisons… Christian Lenord : 02 76 52 63 98 - l'anguille qui appréciait les abords des égouts En 1934, il ne restait que 4 pêcheurs profes- René Courtois : 06 22 59 09 06 - l'ablette, l'épinoche..., sionnels, à temps plein, à Oissel. Selon Bien entendu, les documents originaux vous les pêcheurs les prenaient au filet avec des "Oissel-Adresses" de 1934 (répertoire seront restitués après que nous en ayons pris nasses, ou à la ligne. d'adresses des habitants d’Oissel et de leurs connaissance et copie le cas échéant. Les pêcheurs professionnels, à temps plein, professions, édité par l'imprimerie G. Delarive, Le destin tragique d'un pêcheur d'éperlans osselien Oissel-Histoire a rencontré Jeanne His, une filet de forme conique, garni de plomb, l'Union Normande. Sous la violence du osselienne octogénaire qui lui a conté la vie appelé épervier, qu'il lançait à la main. Pour choc, la barque chavira et tous deux, Gaston de son beau-père : Gaston His. effectuer la manœuvre il fallait être debout et Marius, tombèrent à l'eau. "Il était charbonnier à Oissel, et chaque sur la plateforme et garder l'équilibre, ce qui Malheureusement, mon beau père se noya et année, pendant trois ou quatre semaines, au demandait une certaine adresse. Bien sûr ce son corps mutilé fut retrouvé 11 jours plus mois de Mars, il s'adonnait à sa passion : filet, il le raccommodait (ou ravaudait tard à Saint-Adrien. Il avait 55 ans et laissait pêcher avec son ami Marius, du matin au comme on disait à cette époque) et en resserrait sa famille dans le désarroi, celle-ci n'ayant soir, l'éperlan, quand celui-ci, venant de la les plombs. reçu aucune indemnisation ; la compagnie de mer, remontait la Seine à cette époque pour Il prenait une bonne quantité d'éperlans chaque transport fluvial n'ayant pas reconnu sa respon- "la fraye". année : une partie de ses prises allait pour sa sabilité dans cet accident. Marius parvint à Il a commencé à pêcher très jeune avec son famille, l'autre était vendue aux amis. Les rejoindre la rive et put sauver sa vie. Dès père. Pendant la Seconde Guerre mondiale la éperlans de 12 à 15 centimètres et plus cette date, la pêche à l'éperlan effectuée par pêche avait été interdite par les allemands. étaient marinés ; les plus petits, que l'on les osseliens a rapidement cessé." Pour pouvoir pêcher, il renouvelait son per- appelait "les petits clous" étaient consommés mis de pêche chaque année ; son lieu de en friture. Dans tous les cas leur goût était Oissel-Histoire remercie Jeanne His de ce pêche se situait devant les quais d’Oissel délicieux. témoignage émouvant. Cette activité était jusqu'au portique de Kuhlmann. Il utilisait Mais cette pêche était aussi dangereuse. très dangereuse et d'autres drames liés à le une barque plate qu'il protégeait chaque année Comme ce jour de Mars 1956, près du portique pêche en Seine et dont nous n'avons pas en enduisant l'extérieur avec du brai (goudron de Kuhlmann, lorsqu'au moment de lancer connaissance ont dû se produire antérieurement. pâteux résidu de la distillation du charbon). son épervier, donc debout dans sa barque, Pour attraper les éperlans il se servait d'un celle-ci a été percutée par une péniche de PORTRAIT PIERRE-EDOUARD TURGIS Pierre-Edouard Turgis a été Maire d'Oissel de nement de l'Empire. Rappelons qu'à cette époque 1867 à 1885, date de sa disparition. les élections se faisaient au "suffrage censitaire" Son prénom Pierre-Edouard a été communé- (système dans lequel le droit de vote était ment simplifié en "Edouard" afin d'éviter la réservé aux contribuables versant un montant confusion avec celui de son père "Pierre minimal "cens" d'impôt). Turgis" lequel fût aussi Maire d'Oissel de 1843 Le résultat de l'élection lui fut favorable et il fut à 1848. élu Conseiller général de 1861 à 1871 ; puis il Pierre Edouard Turgis est né le 1er novembre refusa de solliciter un nouveau mandat à cette 1815 à Rouen, pendant un court séjour que sa fonction. mère y faisait. Décidant de s'établir définitivement à Oissel, il Sa famille habitait Elbeuf, ville où son père était fut élu en tête de liste, membre du Conseil à la tête d'une importante manufacture de drap. municipal de la ville, le 22 juillet 1865, et par beaucoup d'autres choses, il a fait agrandir Il effectuera, avec succès, ses études au Lycée décret impérial, du 19 juin 1867, il fut nommé l'école des garçons et fait construire l'école des filles. de Rouen, puis à Paris. Dès son retour à Maire, en remplacement de Monsieur Potel qui Tout au long de son mandat, il a agi pour sou- Elbeuf, il entreprit de se former aux différentes avait démissionné pour raison de santé. tenir l'action sociale de la "Société de secours phases de la fabrication de drap. Dès cette épo- Edouard Turgis exerça son mandat de maire mutuel Saint-Martin". que il commença sa carrière dans l'industrie jusqu'à sa mort le 18 septembre 1885. Ses Il dirigeait la ville avec un certain paternalisme textile, soit comme fabricant de tissu, soit funérailles eurent lieu le 22 septembre en pré- désintéressé. Il était fortement attaché aux comme entrepreneur filateur. sence d'une énorme assistance parmi laquelle valeurs humaines. Il fut conseiller municipal à Elbeuf de nombreux Osseliens et Osseliennes étaient Grand témoin de son époque, Edouard Turgis de 1843 à 1845. venus lui rendre un dernier hommage. nous a légué, ainsi qu'aux générations qui nous En février 1849, la deuxième république, Dans ces années de la seconde moitié du XIXe suivront une œuvre littéraire et historique ines- encore fragilement constituée après la révolu- siècle, la bourgeoisie française s'enrichissait timable qui s'est traduite par la rédaction et la tion de 1848, le nomma chef du "deuxième des fruits de la révolution industrielle. Edouard publication de deux livres : bataillon de la légion de la garde nationale Turgis était issu de cette classe sociale, mais - le premier, publié en 1874 "Souvenirs de l'oc- d'Elbeuf". Il conserva ce grade et cette affecta- s'était attaché à s'occuper de la "chose publi- cupation allemande - Oissel et le canton de tion jusqu'au 22 juin 1855, date à laquelle la que" de façon pleinement altruiste. Il était sen- Grand-Couronne" rend compte des très durs garde nationale fut dissoute par l'Empereur… sible aux difficultés de vie que rencontraient combats que l'armée française a menés contre et les gardes nationaux licenciés. ses administrés dont beaucoup étaient pauvres. les Prussiens pour stopper leur avancée, et de De juin 1866 à janvier 1871, il siégea à la Au début de son mandat de maire, en 1870 et la façon barbare avec laquelle se sont comportés Chambre de Commerce d'Elbeuf en tant que 1871, il lui a fallu affronter l'arrogance et la ces derniers pendant l'occupation qui a suivie. vice-président. férocité de l'envahisseur prussien, qui exigeait - Le second, publié après sa mort en 1886 En 1860, il perdit prématurément son épouse et un tribu sans limites de la ville et de ses habi- "Oissel, glanes, traditions, souvenirs, faits décida d'aller vivre momentanément à Oissel, tants, notamment en denrées alimentaires. Les contemporains" nous informe de l'histoire de dans la propriété familiale (le Château de la pillages de l'occupant ont provoqué la famine la cité… déjà, et comment on vivait dans notre Péreuse). En fait, il y resta jusqu'à la fin de sa vie. dans la population durant ces presque deux ville au XIXe siècle ; comment est arrivé le En 1861, poussé par ses amis osseliens, il se années de guerre. M. Turgis en a témoigné chemin de fer à Oissel ; des transports sur la présenta à l'élection du Canton de Grand- dans son livre publié en 1874 "Souvenir de Seine ; de l'ancienne église, puis de la Couronne, dont Oissel faisait partie, contre le l'occupation allemande". construction de la nouvelle etc. Conseiller général sortant, candidat du gouver- Durant ses 18 ans de mandat de maire, entre C'est un véritable héritage intellectuel et histo- Le Chateau de “La Péreuse”, que l’on appellera plus tard de “la Marquise” appartenait au 19e siècle à la famille Turgis. rique que nous a laissé Edouard Turgis et beau- coup de villes de la région nous l'envient. Nota : nous nous sommes beaucoup inspirés de la notice bibliographique rédigée par Monsieur E. Maille et publiée en 1886 au début du second ouvrage d'Edouard Turgis pour retracer la chronologie de sa vie.

PRECISION OSSELIENNE Le nom d'une partie de la rue, appelée "Grande rue" autrefois, allant de l'église jusqu'au "bout de la ville" a été remplacé par la dénomination "rue Turgis" sur proposition du Maire d'alors, Monsieur Antoine Potel, approu- vée par délibération du Conseil municipal en date du 6 mai 1861. Ce même jour, c'est au total 26 rues d'Oissel qui se sont vues attribuer un nom ou en ont changé. Donc la “rue Turgis” honorait la mémoire de Pierre Turgis et non celle d’Edouard. Même si aujourd’hui, c’est le nom d’Edouard Thurgis qui vient en premier à l’esprit.