Université d’Antananarivo

Faculté de Droit, d’Économie, de Gestion et de Sociologie

Département de Sociologie

MÉMOIRE DE MAITRISE

««« Du réel au virtuel du lien intrafamilial à travers la téléphonie mobile»

(Cas de la Commune Urbaine d’)

Réalisé par RAKOTONDRAMASY Hanitriniaina Tiana

Membres du jury :

Président : Mme ANDRIANAIVO Victorine, Maître de Conférences

Juge : M. ETIENNE Stefano Raherimalala, Maître de conférences

Encadreur : M. RANDRIAMASITIANA Gil Dany, Professeur

Date de soutenance : Lundi 16 septembre 2013

Année universitaire : 2011-2012

««« Du réel au virtuel du lien intrafamilial à travers la téléphonie mobile»

(Cas de la Commune Urbaine d’Antsirabe)

REMERCIEMENTS

« Ny taon-trano tsy efan’irery »

(Une personne n’arrive pas à construire une maison)

C’est comme une maison, ce mémoire n’a pu être mené à son terme sans l’aide de plusieurs personnes .La solidarité dont nous avons bénéficié auprès d’eux a en effet à la fois bénéfique et stimulant.

Ainsi, il nous est injuste premièrement de ne pas reconnaitre la grâce divine qui nous a comblées durant toutes ces années pour que nous puissions actuellement présenter les fruits de tous les efforts et les patiences.

De prime abord, comment pouvons-nous oublier, Professeur RANDRIAMASITIANA Gil Dany l’encadreur, vos appuis les plus précieux ? Grâce à vous, nous savons nous orienter vers cette option et mettre fin à ce deuxième cycle en Sociologie. Sans votre aide, l’effort n’aboutit à rien. Nous vous sommes reconnaissante d’avoir accepté de diriger ce modeste mémoire.

Puis, nous exprimons nos vifs remerciements à Monsieur RANDRIANARISON Alphonse Olivier, Vice président de la Délégation Spéciale de la commune Urbaine d’Antsirabe pour nous avoir accueillie dans sa circonscription. Toutes les discussions qui se sont échangés dans divers endroits s’avèrent plus utiles et intéressantes

Enfin, ce qui n’est pas du tout moindre, nous renouvelons notre gratitude envers les parents et les amis Nous nous sentons redevable envers vous qui ont accepté de contribuer à la réalisation de ce mémoire.

En bref, nous avons contracté une dette énorme envers vous et de simples mots ne suffisent pas à vous éprouver nos reconnaissances mais que la grâce et la bénédiction vous soient toujours accordées et intarissables.

SOMMAIRE

REMERCIEMENTS

INTRODUCTION GÉNÉRALE

PREMIERE PARTIE : «APPROCHE CONCEPTUELLCONCEPTUELLE,E, CONTEXTUELLE ET METHODOLOGIQUE » Chapitre 1 : LA COMMUNICATION ET LA FAMILLE DEUX NOTIONS « SOCIOLOGIQUES » Chapitre 2 : ANTSIRABE : LE CARREFOUR DU MODERNE ET DU TRADITIONNEL Chapitre 3 : APPAREILLAGE METHODOLOGIQUE

DEUXIEME PARTIE :« LE VECU ANTSIRABEEN EN TERMES DE COMMUNICATION » Chapitre 4 : LA PRESENTATION DES RESULTATS D’ENQUETE Chapitre 5 : ANALYSE MULTIDISCIPLINAIRE DE L’IMPLICATION DE LA TÉLÉPHONIE MOBILE DANS LE LIEN INTRAFAMILIAL

TROISIEME PARTIE :« VISION PROSPECTIVE POUR UNE NOUVELLE ÈRÈREE COMMUCOMMUNICATIONNELLENICATIONNELLE » Chapitre 6 : RATIONALISATION A OUTRANCE COMME UNE ÉPÉE DE DAMOCLÈS Chapitre 7 :QUEL AVENIR POUR LA FAMILLE DE DEMAIN ?

CONCLUSION GÉNÉRALE

INTRODUCTION GÉNÉRALE

La mondialisation est effective, le développement de la technologie, incessant ; la société de communication et d’information, émergente…Telles sont les caractéristiques de la troisième révolution : celle de la numérique. D’où, l’an 2000 constituait la charnière de l’histoire planétaire. « Le XXIème siècle sera religieux »1 a dit MALRAUX A. ; cette prophétie s’avère irréfutable si l’on parle de la profusion exponentielle des nouveaux groupements religieux de nos jours. Certes, nous ne pouvons pas nier la rationalisation à outrance de la vie humaine à travers les différents progrès scientifiques. La « démocratisation de l’éducation » ne constitue plus une abstraction après la conférence de Jomtien Thaïlande. Celle de la culture 2 s’est renforcée par le biais de la technologie qui prône une « société de savoir et d’information »3. En effet, la deshumanisation est partout. Cette transformation sociale si profonde nous permet de rejoindre au questionnement d’ ENRIQUEZ 4 quand il s’était demandé sur l’avenir de la société dans son ouvrage principal « nouvelles technologies pour quel changement ? » en 1982. A son époque, l’auteur a su déjà imaginer à notre période qui survalorise l’informatisation de la vie et l’hyper individualisation de la société.

Quant à la société malgache, l’omniprésence des NTIC commence à se faire remarquer. En effet, la dialectique acculturation/ déculturation s’avère monnaie courante à la population. Pourtant, les médias en tant que « porteurs d’idéologies »5 connaissent des « pouvoirs »6, qui influent beaucoup sur l’environnement socio-spatial des Malgaches. La petite institution sociale (la famille) commence d’en être paralysée et dépendante dans le maintien de son lien intergénérationnel.

1 MALRAUX A ., la métamorphose des Dieux , Paris, éd Colin, 1957 2 BOURGEON D., marketing de l’art et de la culture , Paris, Ed Seuil, 2009 3 MATTELART A ., l’invention de la communication , Paris, éd Flammarion, 2007 4 ENRIQUEZ, nouvelles technologies pour quel changement , Pari s, éd Épi 1982 5 BAKTHINE , esthétique de la création verbale , Paris, éd Gallimard, 1984 6 SCHUDSON M ., les pouvoirs des médias , éd Horizons, 1995

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Vu la recrudescence de ces phénomènes relatifs aux NTIC (consommation, invention de divers produits intéressants, réduction des prix de l’appareil voire gratuité des services…), nous avons l’intention d’investir dans ce domaine. La cellule familiale est ainsi choisie comme population d’étude pour y déterminer les impacts. D’ailleurs, il se peut que deux ou trois générations de socialisation différente y soient cohabitées. Et cette variable spatio-démographique nous facilite l’étude diachronique de la perception ainsi que l’importance de cette civilisation dans la communauté.

Motif de choix du lieu d’investigation

Géographiquement parlant, cette investigation a été effectuée dans la Commune Urbaine d’Antsirabe pour diverses raisons. Primo, elle constitue la deuxième ville de , ce qui lui revêt la caractéristique d’hétérogénéité « critère d’un monde mondialisé »7 et de syncrétisme social.

Secundo, Antsirabe par ses sites et sources thermales, est un pôle touristique qui fait une des réputations de l’île.

Tertio, la ville est notre ville natale donc, à l’instar des chercheurs qui se livrent à une étude in situ pour des raisons multiples, nous la choisissons comme terrain d’étude.

Problématique

Mais comme Antsirabe devient un carrefour occidentalo-traditionnel, dans quelle mesure pourrait-on dire que la généralisation des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication a-t-elle pu changer la nature de la communication intrafamiliale ?

7 DEFARGES PM., la mondialisation , Paris, éd PUF, 1997

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Objectif général

Ainsi, essayer de mesurer l’influence des NTIC sur le changement social (ROCHER G .) et surtout sur le domaine culturo-mental des Malgaches, c’est-à-dire déterminer le rapport modernité/traditionalité fait l’objet de notre objectif général.

Objectifs spécifiques

Du point de vue microsociologique, nous voulons analyser la perception ainsi que le degré de consommation en technologie en fonction des variables extérieurement déterminantes (groupe d’appartenance, âge,…). Puis, nous tentons de catégoriser la famille malgache via la nature interactionnelle : « médiatisée ou verbale »8 qu’elle entretient dans le quotidien, et face à cela, de proposer quelques pistes de réflexion vis-à-vis de l’envahissement technologique à Madagascar.

Hypothèses

Telle est la problématique à laquelle la présente étude tâche de répondre hypothétiquement en avançant que : l’émergence des NTIC conjuguée avec la chute vertigineuse du prix des appareils réduit considérablement l’inégalité de tous les ménage s. En plus, les NTIC survalorisent à la fois le capital culturel et le capital économique aussi bien de chaque individu que de la famille . Enfin, nous avançons que la virtualité du lien intrafamilial est un signe observable de l’effectivité de la mondialisation qui nous impose un fossé numérique et un fossé culturel.

8 GOFFMAN E ., les rites de l’interaction , Paris, éd minuit, 1974

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Aperçu sur la méthodologie et les repères théoriques

Pour y arriver, nous veillons à ce que le type d’échantillonnage soit représentatif. Les soixante dix neuf enquêtés proviennent ainsi de deux couches sociales différentes : bourgeois et prolétaires. Du point de vue intellectuel et économique, ils constituent « deux classes diamétralement opposées »9. Nous tirons au hasard les personnes à enquêter, préalablement identifiés dans le registre des Fokontany étudiés : Antsenakely : le quartier civilisé et Antsongo, le traditionnel. Ensuite, les données recueillies ont été recoupées avec les différentes statistiques, archives, documents divers. Ainsi, des observations ainsi que des entretiens semi-dirigés ont été effectués étant donné que le « présentéisme »10 est capital tout comme « l’enquête qui relève d’une question/réponse »11 dans les sciences sociales.

Quant à l’exploitation des données obtenues, quelques approches ont été mobilisées. En effet, des emprunts interdisciplinaires (histoire, anthropologie, science exacte…) nous servent des fonds référentiels.

Ensuite, nous faisons recours à l’analyse fonctionnelle dans l’appréhension des fonctions 12 aussi bien latente que manifeste de la téléphonie mobile. La mobilisation de diverses méthodes et démarches qui est celle de l’hypothético-déductive considérée comme « un ensemble de procédés rationnels au moyen desquels, on tire des lois générales »13 nous débarrasse de la connotation dans l’investigation de ce fait social. A plus forte raison, elle remet en considération le relativisme culturel 14 qui prône que « toute culture ou élément culturel doit être évalué dans son contexte ». Et le contexte ici, c’est que la communication sociale médiatisée constitue un « phénomène social total »15 dont l’étude est polyphonique.

9 MARX K ., le capital , Paris, éd Verlag Von Otto Meisner, 1867 10 MAFFESOLI, les temps des tribus, Paris, 3è éd Table ronde, 1988 11 CHAMPAGNE P ., initiation à la pratique sociologique , Paris, éd Dunod, 1989 12 MERTON R ., éléments de théorie et de méthode sociologique , Paris, éd Plon, 1965 13 FERREOL G., dictionnaire de la sociologie , Paris, éd Colin, 1995 14 BOAS F., race, language and culture , Paris, éd Colin, 1940 15 MAUSS M. , anthropologie et sociologie , Paris, éd PUF, 1964

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S’agissant des cadres théoriques, nous empruntons le conformisme 16 de MOSCOVICI pour traduire les comportements culturels de nos enquêtés. En bref, le conformisme est une attitude consistant à modifier sa position ou ses idées dans la direction de celle des autres. Il se présente soit par la complaisance (on se conforme pour éviter les sanctions), soit par l’identification (pour rester membre de l’entité), soit par l’intériorisation de la norme. ALLPORT de son côté, l’explique par le « besoin de similarité »17 . Il est à noter que le conformisme fait partie des attitudes typiquement malgache. Ainsi, le principe « aza miala amin’ny maro » relève d’un conformisme social accentué.

En second lieu, nous essayons de faire une extrapolation situationnelle des américains vers la logique malgache dans la consommation technologique comme étant une « culture du pauvre »18 . A dire vrai, c’est une théorie forgée par HOGGART R. qui prône qu’un capital matériel objectivé en termes bourdieusien, reste seulement une source de plaisir, mais qui est sans rapport avec la vie de tous les jours pour une certaine strate sociale : « les exclus »19 Donc, combinée avec la tolérance traditionnelle, la culture du pauvre peut expliquer pourquoi la majorité de la population malgache consomme aveuglement sans songer à s’insurgir contre les manifestations ridicules et l’absurdité de la presse (journal Basy Vava…), de la radio, de la télévision…

Enfin, nous considérons aussi le « déshumain »20 de REDEKER comme une référence théorique dans notre travail. Le déshumain affirme que dans la logique de la « mondialisation de la communication »21 l’information circule sans aucun obstacle, nous sommes tous des conducteurs d’information, l’effacement du corps est unanimement accepté…Le contact charnel est ainsi réduit voire inutile aussi bien dans la famille que dans la société. Nous pouvons le constater dans les diverses transformations qu’a connues la société malgache via le développement du télé- enseignement, la vidéo conférence…

16 MOSCOVICI S., la psychologie sociale, une discipline en mouvement, Paris , 1970 17 ALLPORT, the construction of attitude , Paris, éd Harmattan, 1935 18 HOGGART R , la culture du pauvre , Paris, éd Minuit, 1970 19 LENOIR F. et ETCHECOIN M-F., l’enquête , Paris, éd Code de Vinci, 2004 20 REDEKER R. , le deshumain , Paris, éd itinéraires, 2000 21 MATTELART A. Op cit,

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Limite de la recherche

Loin d’être une recherche et analyse exhaustive, la présente investigation a connu diverses faiblesses qui peuvent être recensées comme ses limites. Ces incidents peuvent être classés en deux divisions dont la première émane du chercheur tandis que la seconde de l’extérieur :

A- Incompétence du chercheur -la documentation : Faute de moyens, nous ne pouvons pas en étoffer la connaissance. Il s’agit des documents de la dernière apparition et ceux les plus anciens surtout les références malgaches. Déjà, RANAIVOARIVONY , un sociologue malgache a soulevé ce problème quand il avance que les limites de la recherche sociologique africaine sont « l’ignorance de la réalité, la maladresses méthodologique des chercheurs… »22 . -l’enquête sur terrain : étant donné que l’usage du téléphone relève en grande partie de la vie privée, l’observation faite n’est pas du tout rigoureuse. Nous nous contentons ainsi de la réponse des enquêtés quant au sujet le plus entretenu via l’appareil. Par contre, l’hésitation des enquêtés signalent que leur dire n’est pas du tout fiable. -le traitement des données : malgré les publications diverses relatives à la technologie et le téléphone, diverses expressions évoquées durant l’enquête ne sont pas traduites en termes universels. B- - difficultés dues à l’extérieur

-les données : il nous est difficile de récolter quelques informations sur divers points clés. Il s’agit surtout des données quantitatives qui concernent par exemple le nombre des abonnés en téléphonie mobile à Madagascar, l’évolution de ce secteur depuis l’an 2000. -les enquêtés : comme le thème évoque la modernité, la civilisation, certains enquêtés (les âgés, les moins instruits,…) ayant entendu le mot téléphone deviennent réticents à la conversation.

22 RANAIVOARIVONY G-P, Approche sociologique du développement et ressources humaines , Genève, 1971

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Plan

Pour conclure, notre intention porte sur la remise en question de l’approche conceptuelle, contextuelle et méthodologique (première partie ), de l’analyse du vécu antsirabéen en termes de communication intrafamiliale (deuxième partie ) et d’ une vision prospective pour une nouvelle ère communicationnelle (troisième partie ) face à la nouvelle injonction mondiale : « DU RÉEL AU VIRTUEL… ».

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PREMIERE PARTIE :

«APPROCHE CONCEPTUELLE, CONTEXTUELLE ET MÉTHODOLOGIQUE »

« …parce qu’on ne crée pas à partir de rien »

RANDRIAMASITIANA G D

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Introduction partielle

La sociologie est une science sociale qui comprend plusieurs domaines variés comme : la politique, l’économie, la culture, l’histoire, de la parenté... Aussi, constitue-elle un lieu par excellence de l’inter, de la multi mais aussi de la transdisciplinarité ; on peut dire alors qu’elle ne se limite pas à un seul cadre de référence. Et cette diversité d’approches qui nous permet d’entreprendre une étude sociologique de la nouvelle forme du lien intrafamilial. Via les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication, la famille actuelle assigne une virtualisation excessive du rapport quotidien d’autorité, de soumission mais aussi de coopération. Néanmoins, cette dépendance technologique connaît différentes implications sociales suivant le temps et l’espace ; à cet égard, une étude comparative entreprise dans deux espaces géographiques diamétralement opposés (urbain et périphérique) nous permet de se pencher sur l’analyse fonctionnelle de cette néo exigence sociale. Pour mieux l’apprendre, explicitons les positions des grands auteurs experts en « famille » puis « communication ». En deuxième partie sera présentée la délimitation géographique de nos terrains d’étude.

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Chapitre 1 :

LA COMMUNICATION ET LA FAMILLE :

DEUX NOTIONS « SOCIOLOGIQUES »

Le concept de famille ainsi que celui de la communication ont déjà passionné bon nombre de sociologues depuis des siècles, à plus forte raison à nos jours. Bien que la première ne cesse de contourner aux diverses anomalies (divorce, mariage précoce, recomposition, ..), elle reste toujours un garant de l’avenir et une institution sociale. Notre étude est consacrée à l’évolution du lien intra familial après l’intervention technologique au sein de cette institution primaire. Ainsi, cette recherche est loin d’être exploratoire vu l’existence des grands penseurs dont les œuvres font l’objet de cette partie. Pour ce faire, nous essayerons d’aborder le domaine de la « famille » en l’exposant selon les différentes théories en premier lieu. Ensuite, une présentation conceptuelle du mot « communication » sera faite.

Section 1 : la famille comme institution sociale de base

Depuis longtemps, des philosophes et sociologues se sont déjà intéressés au concept famille . Il évolue suivant un axe spatio-temporel et aussi les courants d’idées avec lesquels il est analysé.

Du mot romain « familia », le mot désigne » l’ensemble des esclaves et de la domesticité attachée à une même maison »23 .Considérée comme une réalité sociologique vivante, la famille est en perpétuelle évolution et ce, l’histoire montre qu’à toute transformation de la civilisation correspond un éclatement et un remodelage de la cellule familiale.

23 TEINDRAS G . in « la jeunesse dans la famille et la société moderne », Paris, éd Gallimard, Tome 2, 1961.

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A- généralités D’une manière générale, une famille est un groupe social formé d’au moins deux personnes, et comprenant : - Soit un couple marié ou non, et le cas échéant, ses enfants célibataires (eux-mêmes sans enfants) ; - Soit un parent isolé et ses enfants célibataires de moins de 25 ans n’ayant pas d’enfants (on parle alors de famille monoparentale).

Toute communauté admet auparavant une famille patrilinéaire, reconnaissant diverses relations qui peuvent être dérivées du lien du mariage, lien biologique de consanguinité dès fois du lien social. A cet effet, ladite parenté tient compte de l’ensemble des relations de filiation (exogamie…) et celle d’alliance. Ce qui peut affirmer que la famille étendue regroupe plusieurs personnes occupant chacune un statut propre malgré la mécanicité de la société d’antan. Et c’est au sein de laquelle que la prohibition de l’inceste de Claude Lévi-Strauss trouve son véritable fondement. D’où, la famille est pour lui, un groupe social 24 . Les membres sont unis par :

- Les liens légaux ; - Les droits et les obligations de nature économique ou religieuse ; - Un réseau précis et interdit sexuel, et un sens variable et diversifié de sentiments psychologiques tels que l’amour, l’affection, le respect, la crainte, etc.

Mais, ce type de famille qui « permet à plusieurs personnes de vivre ensemble »25 ayant subi, au fur et à mesures des années, une transformation sociale telle que l’urbanisation et l’industrialisation , connait une nucléarisation massive. Maintes raisons socio-économiques à savoir la fragilisation du couple liée à l’évolution des mœurs (adoption du concubinage, relation extraconjugale…), les mutations de l’appareil productif ( division sociale du travail, fémininisation du travail…), la modification des cadres juridiques (banalisation du divorce, accroissement de la fécondité illégitime…) ; permettent de définir

24 STRAUSS CL., les structures élémentaires de la parenté , Paris, éd Plon, 1949 25 RADCLIFFBROWN , « Systèmes familiaux et matrimoniaux en Afrique », Paris, éd Gallimard, 1953,

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la famille d’aujourd’hui comme une institution sociale à la fois juridique et morale (DURKHEIM E .) et « pour qu’il y ait famille, il n’est pas nécessaire qu’il ait cohabitation et il n’est pas suffisant qu’il ait consanguinité. Mais il faut… qu’il y ait des droits et des devoirs, sanctionnés par la société, et qui unissent les membres dont la famille est composée »26 .

Les membres d’une famille sont principalement soumis à 4 droits et devoirs :

- Le devoir de venger les offenses faites à un parent (vendetta) - Le droit de chaque parent sur le patrimoine familial ; - Le droit de porter un certain nom ; - Le devoir de participer à un certain culte.

Quant aux instituts qui travaillent directement dans la démographie comme l’INED (Institut National Des Études Démographiques), « une famille est un groupe de personnes liées par des liens de filiation et d’alliance ». Ainsi, celui-ci distingue la famille au sens du recensement (INSEE) de la famille élargie qui comprend également les oncles, les grands-parents,….

S’agissant de la solidarité familiale, elle s’exprime ainsi de manière variable selon les sociétés et les époques. La notion de vivre ensemble qui tient avant en considération celle de l’espace, prend une tout autre forme. Dans la conjoncture actuelle qui met en valeur l’effectivité de la mondialisation et ses agents, la famille admet un « vivre ensemble temporel »27 . Mais que l’on veuille ou non, la perturbation forte inquiétante qu’a connue notre famille dégénère en véritable crise et troubles comportementaux des ses membres. Un ménage dysfonctionnel constitue une grande ouverture à la déviance qui mérite à ce moment une punition collective. Conscient de cette anomalie, divers organismes professionnels travaillent dans le but d’appuyer les familles face à la démission parentale. Nous pouvons ici citer le SOS Vonjeo ny fianakaviana à titre d’exemple local. C’est ce que FABLET D. appelle « la suppléance familiale »28 . Celle-ci consiste en une intervention visant à

26 DURKHEIM E, les règles de la méthode sociologique , Paris, éd PUF, 1895 27 Journal des anthropologues , n°128-129, 2012 28 FABLET D., la suppléance familiale au soutien à la parentalité , Paris, éd Harmattan, 2010

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assurer une action éducative complémentaire de l’éducation intrafamiliale. Le collectif a ainsi l’obligation de « travailler avec la famille »29 tout en lui accordant l’apport extrafamilial puisque l’encrage culturel et éducatif du milieu auquel appartient un individu contribue bel et bien à son développement.

B- la famille : une voie pour l’intégration sociale

Dans la philosophie malgache, la notion de famille est prise au sens large du terme. Est membre d’une famille alors, tous ceux qui sont issus de l’alliance et de la consanguinité. D’où, la famille étendue peut compter jusqu’à une centaine de membres. En voici quelques caractéristiques.

- Pour les Malgaches, la famille à part sa tâche de reproduction, reste le « principal soutien »30 aussi bien pour les parents que pour les enfants. D’un côté, les parents qui sont sources de vie, protecteurs… assurent et garantissent l’existence intergénérationnelle. Ainsi, être orphelins ou abandonnés par ses parents constitue un malheur incomparable pour les victimes. C’est là que les autres membres de la famille doit prendre leur responsabilité tout en astreignant à la loi universelle de sa communauté, transposée par le proverbe « aza manao vain-drahalahy tsy mba maharary ».

De l’autre, les enfants souvent appelés « sombiniaina » (morceau de la vie), constitue toute une richesse pour les parents. Ce sont eux en termes marxistes qui vont constituer la force productive étant donné que la grande île ne connaît pas assez le développement de la mécanisation du secteur primaire. En plus, avoir des enfants implique l’obtention de la reconnaissance sociale. Ce sont eux qui garantissent la transmission du flux vital ; avec la notion de redevabilité, ils garantissent les jours de vieillesse, la mort, l’enterrement ainsi que l’entretien de la terre ancestrale. C’est la raison pour laquelle une femme stérile est socialement stigmatisée, il y a un manque de respect envers elle, en plus, l’infertilité est jusqu’à nos jours considérée comme une grave malédiction. Pour y faire face, on procède au « ala faditra ». Dans la plupart des cas, ce problème s’est atténué par l’adoption.

29 OTT L , « travailler avec la famille », Paris, éd ères, 2010 30 SOAVELOMANDROSO R. « nos enfants, ces inconnus », Tananarive, éd Tsipika ,2001

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- la famille est à l’origine de tout compromis. Car chaque membre du groupe participe à une même vie, ils partagent tous un sentiment d’appartenance ; d’où « raha voadona ny aty, maharary ny afero ». Cette tendance parentale confirme l’existence et la persistance du clientélisme, ou plutôt « havanisme » au sein de toutes les institutions existantes surtout publiques. En effet, que ce soit à l’école ou au travail voire au tribunal, tout un chacun de nous est au moins témoin de cette corruption familiale une fois dans notre vie. Pourtant, le mode de production actuel commence à être régi par l’esprit capitaliste qui met en exergue la compétence et l’efficience.

- la famille est une institution intégratrice de l’individu. « Ny hazo no vanon-ko lakana, ny tany naniriany no tsara » dit un proverbe malgache. Donc, que l’individu soit suffisamment éduqué, sachant respecter et garder les normes et valeurs de la société, c’est que la famille a bien joué ses rôles. Par extrapolation à la vie nationale, seuls ceux qui ont reçu une éducation appropriée font de bons citoyens. A cet égard, « le dysfonctionnement social n’est qu’un reflet de celui de la famille »31 .

Néanmoins, la mondialisation a laissé des séquelles au sein de la famille. Pour cela, la dernière a connu, depuis peu de temps, un changement chronotopique aussi bien au niveau de la forme que du contenu. Le tableau ci-après synthétise la perception antérieure et actuelle de la famille malgache.

31 FFKM , Fanabeazana sy tari-dalana ho olom-pirenena vanona , Antananarivo, éd FEPSEP 1993

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Tableau n° 1: comparaison chronotopique de la famille

AVANT PRESENT

Composition Grand parents, parents et enfants Parents et enfants célibataires

> famille étendue ou patrilinéaire > famille nucléaire

Formation Par lignage, alliance et aussi pacte du En principe par alliance et « pacte sang d’argent »

Relation Directe et partout Indirecte et occasionnelle

> famille contractualiste > famille statutaire

Habitat ou Tout un hameau ou un village Un appartement voire une chambre résidence pour les locataires citadins

Transmission Histoire légendaire et mythique Prise en compte de la réalité de > valorisation du monde idéel > matérialisation de l’éducation l’éducation

Niveau Un faible écart de connaissance Un clivage référentiel très aggravé intellectuel > similitude intellectuelle > fossé de génération intergénéra- tionnel

Système de Prise en considération de l’expérience Survalorisation de l’intellectuel et de valeurs de vie et du statut inné l’argent conjugué avec quelques statuts acquis

Mode de Féodal avec un fort taux de souci de Capitaliste et recherche de profit production l’intérêt commun, notion de « valin- individuel tanana et valim-babena » > spécificité de rôle et notion d’une > similitude fonctionnelle et notion famille concurrente d’une famille associative

Source : réflexion personnelle, 2013

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Nonobstant la vicissitude du monde familial d’aujourd’hui, la famille malgache s’est singularisée dans sa pensée que :

 la bénédiction ou malédiction parentale peut affecter tôt ou tard la vie de la victime ;  les tristes périodes (la mort…) constituent au moins une contrainte de rencontre physique ;  les gendres restent encore une richesse d’où la réduction de la taille de famille est une « norme hors norme » ;  -la redevabilité est un devoir intergénérationnel malgré la cherté de la vie et quelque soit sa nature et  l’abandon des vieux et leur envoi aux maisons de retraite constitue un esprit inhumain.

Nous abondons dans le sens de SIMMEL et de CUSSET lorsqu’ils disent que : « en dehors des grands systèmes sociaux, il y a en effet une infinité de formes relationnelles et d’actions réciproques humaines qui peuvent paraître négligeables mais qui n’en contribuent pas moins à produire la société telle que nous la connaissons ». Et CUSSET a repris les lignes ci-après de SIMMEL G. (1999). « Les hommes se regardent et sont jaloux les uns des autres ; ils s’écrivent des lettres ou déjeunent ensemble ; ils ont eux des contacts pleins de sympathie ou d’antipathie, au-delà de tout intérêt perceptible ; la gratitude suscitée par un acte altruiste se prolonge en créant un lien indissoluble ; s’habillent et se parent les uns pour les autres ; toutes ces mille relations qui se jouent personne à personne, brèves ou durables, conscientes ou inconscientes, fugaces ou lourdes de conséquences, parmi lesquels ces exemples ont été choisis tout à fait au hasard, nous relient sans cesse les uns autres…Et l’auteur a ajouté : ce sont les pas infiniment petits qui produisent la cohésion de l’unité historique, les actions réciproques tout aussi voyantes de personne à personne qui produisent la cohésion de l’unité sociale. Tous les contacts physiques et psychiques, les échanges de plaisir et de douleur, les conversations et les silences, les manifestations d’intérêt communs ou opposés qui se produisent sans cesse –voilà tout d’abord ce qui fait la prodigieuse solidité

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du tissu social, sa vie fluctuante, avec laquelle ses éléments trouvent, perdent, déplacent sans cesse leur équilibre »32

Section 2 : la communication : un pilier du lien social (CUSSET) C- Généralités 33 Historique

Du latin cum qui signifie avec et munus, commun. Communication c’est synonyme de communion, de rapport mutuel dans la langue française à la fin du XIVe (1390). Ainsi, communiquer dérivant même de communicare est partager, communier.

En XVI (1507) : par métonymie, elle désigne la chose qu’on communique.

A partir de (1677) : désigne l’espace en passant d’un lieu à un autre d’où la notion de voies de communication (route, canaux..), donc on ne communique plus quelqu’un, d’abord quelque chose.

Dans la Déclaration de Droit de l’Homme et des Citoyens en 1789, le mot communication devient un emblème de la démocratie « la libre communication de pensée et des opinions est un droit le plus précieux de l’homme »34

Au XIXe, on la considère comme réseaux ou moyens de communication (transport, télégraphe…) : un ensemble de voies de com. ou ensemble des moyens de transmissions permettant la diffusion d’information ;

Vers le début du XXe, on assiste à la communication de masse ou encore mass média qui manipule des foules atomisée, passive et naïve.

A la fin du XXe, le mot communication s’abrège en COM, et le terme prend une valeur technique qui renvoie à la Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication pour être associée au terme réseau : un développement des réseaux informatiques.

32 CUSSET P-Y, le lien social , Paris, éd colin, 2007 33 SACRISTE V. , culture et communication , Paris, Ed Foucher, 2010 34 DDHC , art 11

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Les médias sont compris comme des agents de suggestivité qui ont une influence certaine sur les opinions ; donc des agents de manipulation.

Point de vue global

Acte quotidien, la communication est un phénomène omniprésent dans la société. Elle peut s’effectuer de façon directe ou médiatisée, être interindividuelle, organisationnelle ou interculturelle.

La communication est développée à partir des travaux de SAUSSURE et BARTHES 35 ; composée de conversation, de média, de téléphone, de texto, de lettre… Durant les années 1980, C.R. BERGER 36 propose une définition généraliste qui reste de nos jours une base connue des sciences de la communication : " La science de la communication cherche à comprendre la production, le traitement et les effets des symboles et des systèmes de signes ».

Donc, il y a communication lorsqu’il y a une émission et réception permanente involontaire et non contrôlée des messages (PATO ALTO ) et lorsque l'on donne une signification au message, aux signaux, ce qui permet de le coder et décoder. C’est ainsi qu’elle se définit comme l’étude des systèmes de signes linguistiques ou non. La rétroaction ou feedback, un concept forgé par Robert WIENER 37 apporte un concept essentiel à toute théorie de la communication. Le feedback est un outil utilisé à des fins de reconnaissance, ce qui signifie que l'on a compris le message émis. Elle peut être positive ou négative, et renvoie au fait de comprendre ou non le message

Il existe ainsi quatre facteurs de communication interdisciplinaire :

-physique : selon l'endroit dans lequel on se trouve, on ne communique pas de la même façon ;

35 SAUSSURE et BARTHES , elements of semiology , New York, éd Oxford University Press, 1967 36 BERGER C.R., communication and reality : an introduction communication research , New York, éd Oxford University Press, 1996 37 WIENER R., sciences de l’information et de la communication , Paris, éd Larousse, 1993

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-culturel : selon le style de vie, les croyances et les valeurs ;

-socio-psychologique : relations de statuts des interlocuteurs ;

-temporel : selon le moment où nous nous exprimons (exemple : enterrement différent d'un mariage).

En bref, La communication est le passage obligé pour entrer en relation avec autrui . Le Modèle de MATILDA et JOHN RILEY 38 l’a caractérisée par la notion de « réciprocité et inter-influence entre les individus ». La communication est donc ici appréhendée comme un phénomène dynamique et complexe et non mécanique.

D- les Malgaches : homo communicans de nature

Caractérisée depuis longtemps avant l’invention du SORABE, par une tradition orale, la société malgache ne peut jamais se passer de la famille à la société de la communication surtout verbale.

Sans aucun doute, la famille qui détient le rôle principal et primordial dans la transmission du capital culturel, exigé par le vivre ensemble social fait recours au maximum à la communication. Les géniteurs enrichis des représentations sociales qui est « savoir de sens commun, socialement élaboré et partagé, construit pour et par la pratique et qui concourt à la structuration de notre réalité. Connaissance du réel qu’elles contribuent à édifier les représentations sociales sont donc produits et processus d’une élaboration tant psychologique que sociale »39 ; oralement inculquées sont ainsi les transmetteurs d’office. Être parent, surtout pour les individus de sexe masculin lui contraint à assumer des responsabilités quasi-universelles comme :

- assumer la reproduction du flux vital ;

- garantir la protection physiologique du nouvel être ;

- assumer la transmission intergénérationnelle du système des valeurs collectif.

38 MATILDA et RILEY J., communication de masse et systèmes sociaux , Paris, éd Colin, 1965 39 FERREOL G., Op cit .

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Et cette dernière n’est ni moindre ni facile à jouer. Le verbal y est important voire indispensable. Néanmoins, le droit à la parole se soumet aux règles qui sont d’ores et déjà implicites. D’où, la notion des statuts innés évoqués ci-dessus est remise en question. Aussi, les réprimandes en raison d’anomalie comportementale, des congratulations à titre de récompense et de félicitation, des coopérations requises par la production familiale… font tous appel à la communication. On peut même dire que la verbalisation du quotidien est source du bon fonctionnement du ménage. Chaque individu est récepteur d’informations et interlocuteur d’une conversation, en général, physique et humaine.

A ce qui est social, le verbal tient encore sa grande place. Remontant à l’époque du lignage où presque les villageois se sont tous apparentés, le dialogue est le moteur même de la bonne marche de la société. Tout se règle par le truchement de la conversation, c’est ainsi que « tsy misy tsy vitan’ny fifampiresahana » nous apprend un dicton. Aussi, la résolution des différends de tout genre, les problèmes sociaux nécessite-t-elle le recours à la communication. Même le principe du « fihavanana dont la notion repose sur cette idée de condition commune qui découlant de l’ancestralité est également étendue aux voisins qui, se nourrissant des produits d’un même terroir ont le sentiment de partager une même substance »40 s’y fonde. C’est dans le principe de cette oralité que le proverbe « institution sociale le plus popularisée »41 ainsi que le « kabary » font la spécificité de la communauté.

De la royauté à nos jours, le besoin de présence physique anime encore l’âme sociale. Durant la royauté par exemple, les nobles et les rois avaient l’habitude de communiquer directement au peuple via le « kabary » ou à défaut des messages rapportés. De leur côté, le peuple doit s’y présenter parce que la présence constitue non seulement un signe de respect mais aussi d’approbation. Et en cas d’absence, l’auteur s’est contraint à la notion du remplaçant, plus tard de l’argent.

40 OTTINO P., les champs de l’ancestralité à Madagascar , Paris, éd Karthala, 1998 41 RAMIANDRASOA F ., tradition orale et histoire, Paris, 1967

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Au temps de la république, les dirigeants sont mieux jugés, malgré les circulaires, notes, décisions, arrêtés, décrets… à titre de décret et de publication présidentielle, en se présentant de manière physique devant les dirigés. Voyons à titre de preuve l’importance de la propagande, le candidat fréquemment en contact direct avec la population pourrait lui facilement changer l’avis au dernier moment. Ainsi, plus il s’est familiarisé à ses lecteurs, plus il a la chance d’être élu.

Du côté social, les Malgaches ne supportent ni l’individualisation ni l’enfermement. La cohabitation sociale est renforcée par la discussion et la présence physique. Ainsi, à chaque moment de leur vie (période de joie mais surtout de tristesse), on s’invite et l’autre partie est dans l’obligation de rendre hommage à cette invitation par sa présence. La philosophie malgache même est nourrie par la philosophie maussienne. A cet effet, ils ont dit que « izay mahavangivangy, tia havana » et le plus effrayant c’est le fait de juger comme « tsy mba manao ny fanaon’ny olona ». Ce jugement social constitue bel et bien une contrainte pour tous les membres de la société quel que soit son groupe d’appartenance. Cette fois-ci la présence du sentiment d’appartenance évoquée dans la partie précédente est encore validée : c’est la malgachéité .

En guise de conclusion, nous ne pouvons jamais nous passer de la communication. Que ce soit société primitive ou civilisée, la communication est son pilier. Mais avant d’aborder une passionnante étude ayant trait à l’aspect de la communication intrafamiliale malgache d’aujourd’hui, délimitons un peu notre terrain d’investigation qui est la fameuse ville d’eaux. Donc, voici figurera dans la partie ci-après une approche monographique de la ville d’Antsirabe

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Chapitre 2 :

ANTSIRABE : LE CARREFOUR DU MODERNE ET DU TRADITIONNEL

En un mot, Antsirabe fait partie de la réputation de la grande ile. A part ses richesses culturelles et économiques, elle est connue par des histoires politiques. Peuplée de nombreux et hétérogènes habitants, elle constitue un foyer par excellence d’interculturalité. Du XIXème siècle à nos jours, Antsirabe ne cesse de connaitre un dynamisme spatial, culturel et surtout technologique. A cet effet, maintes évolutions la qualifient comme un terrain propice à la mondialisation.

Section 3 : Ville d’eaux et ville du métissage

A- Historique et traits caractéristiques 1- brève historique

Antsirabe est jusqu’à ce jour la deuxième ville de Madagascar. Elle est surnommée « le vichy malgache » à cause de nombreuses sources d’eaux thermales ou minérales en exploitation aujourd’hui.

Le nom Antsirabe signifie « là où il y a beaucoup de sel » (any sira be). Ces noms proviennent évidemment de la découverte de ses eaux riches en chlorure de sodium qui ont fait la richesse d’Antsirabe en tant que ville thermale.

A la fin du XIXème siècle, des missionnaires norvégiens viennent s’y installer. A cette époque, Antsirabe est devenue une sorte de vichy de l’hémisphère Sud. Ainsi, tous les beaux édifices à savoir la gare, l’hôtel des thermes, le poste, la cathédrale…, font appel à tous les styles connus de l’administration française.

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En plus, Antsirabe réunit tous les atouts d’un haut lieu de tourisme : des sources thermales de réputation internationale telles que le lac d’Andraikiba à 7km de la ville, celui de réputé par la légende de Rabeniomby et Volahanta, à 18 km, la facilité d’accès, des sites naturels…

Aujourd’hui, les thermes d’Antsirabe ne fonctionnent pratiquement plus. Par contre, la ville est riche d’une activité industrielle grâce notamment à la production de coton, fruits et légumes et aussi de l’eau minérale gazeuse Visy Gasy.

2- Délimitation géographique

La ville d’Antsirabe se trouve dans la région de Vakinakaratra, une Région qui fait partie de la Province Autonome d’Antananarivo, au centre de Madagascar. Elle est reliée à la capitale par la route nationale RN7 et culmine à 1540m d’altitude avec les coordonnées suivantes : 47°04 de longitude EST et 19°52 de latitude SUD.

La Commune est classée parmi les communes urbaines. Elle dispose d’une superficie de 122 km 2, administrativement délimitée comme suit :

Au Nord : La Commune Rurale d’

Au Sud : La Commune Rurale de

A l’Est : La Commune Rurale d’

A l’Ouest : La Commune Rurale d’ et Belazao .

La Commune d’Antsirabe I est composée de 59 Fokontany répartis dans 6 circonscriptions administratives, dénommées pour les besoins de la cause « Faritra », à savoir : Antsenakely Andraikiba, Ampatana Mandriankeniheny, Antsirabe Afovoany Atsinanana Ambohimanarivo, Manodidina ny Gara Ambilombe, Mahazoarivo Avarabohitra, Soamalaza Mahatsinjo et leurs populations respectives sont représentées dans le tableau suivant.

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Tableau N° 2 : Démographie de la population d’Antsirabe

FIRAISANA POPULATION 2003 PROJECTION 2008 POPULATION 2013

SOAMALAZA MAHATSINJO 23675 29 026 35 588

MAHAZOARIVO 41277 50606 62048 AVARABOHITRA

AMPATANA MANDRIANKENIHENY 13250 16 245 19 917

MANODIDINA NY GARA 24185 29651 36355 AMBILOMBE

4 A. 41092 50379 61769

ANTSENAKELY ANDRAIKIBA 37129 45520 55812

TOTAL 180608 221 427 271 489

Source : Plan d’Urbanisme Directeur C.U. Antsirabe, 2011

B- La communication antsirabéenne a) Transport :

Il existe plusieurs moyens de transport terrestre dans la Commune Urbaine Antsirabe et les pousse-pousse constituent une de ses particularités. Lors du dernier recensement en 2004, ces derniers comptent 5545, on peut dénombrer 30 taxis villes et les vélos se chiffrent à 14 000. Ces derniers sont l’un des moyens de transport le plus utilisé par la population.

Par ailleurs, le transport en commun comme les « taxi-Be » commence à avoir ses places dans la vie quotidienne de la population. Le transport ferroviaire (MADARAIL) constitue un atout considérable pour la ville, notamment pour le transport des marchandises des grandes usines implantées dans la ville.

Cependant, la ville d’Antsirabe ne dispose pas d’aéroport digne de cette deuxième ville nationale. L’aérodrome est surtout utilisé par les opérateurs privés. Il n’y a pas de liaison aérienne régulière desservant la ville.

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b) Communication :

a°) Presse écrite : Dans la Commune, les presses lues par la population sont publiées à Antananarivo en dehors de la gazette « Ngah » qui est imprimée et publiée sur place. Les principaux journaux sont Midi Madagascar, Ny Vaovaontsika, Tribune, La Gazette, Express et Gazetiko

b°) Radio : La Commune peut être à l’écoute de la capitale car la radio nationale, et la radio Don Bosco y sont captées. De plus, des chaînes FM privées sont installées à Antsirabe comme la RTA, Radio Haja, Feon’ny Mpitily, FM Foi et la Feomeva. Au total, il existe 07 radios privées dont certains ont une tendance évangélique.

c°) Télévision : Les chaînes télévision contribuent à améliorer l’image de l’audiovisuel. Antsirabe capte la chaîne de la Télévision nationale ; de plus il existe 4 chaînes privées à savoir RTA et 3 chaînes de télévisions étrangères (TVF, Canal Satellite et Parabole Madagascar).

d°) téléphone : Auparavant, le secteur était monopolisé par TELMA. Actuellement, l’on remarque dans la ville, l’implantation de téléphonie mobile ; ce secteur fait l’objet d’une forte concurrence entre Orange et Airtel. Ce secteur est en pleine expansion d’année en année malgré les coûts de communication assez élevés par rapport au pouvoir d’achat de la majorité de la population. Dans le domaine de la télécommunication, la ville bénéficie également du développement de l’Internet par DTS et par la présence de Cybercafés et des centres de formation

Enfin, Antsirabe avons-nous dit, est la deuxième grande ville de Madagascar et dispose d’un tissu industriel significatif opérant dans plusieurs activités. Plusieurs industries de grandes renommées et pourvoyeuses d’emplois se sont y installées à savoir la Brasserie STAR, la Société TIKO, la Société SOCOLAIT, la SEER, la KOBAMA qui sont toutes des agro-industries ; la COTONA, la COTTON, LINEA, QUARELLE M/car, M KLEINCOOL CONCEPT, NNOVA, CCC travaillant dans le domaine de la confection et la SOBA, la SACIMEM comme producteurs des PPN. Cependant, beaucoup de facteurs restent à régler pour un véritable développement industriel, citons quelques facteurs bloquants : le secteur industriel n’est pas intégré à la ville (matières premières importées, produits finis exportés, en particulier le textile) ; l’absence

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d’informations pour les prises de décision ; l’insuffisance de la capacité de production actuelle en eau et en électricité ; le manque de main d’œuvre qualifiée (demande supérieure à l’offre) ; l’insuffisance de moyens financiers en raison de la lourdeur du système d’accès au crédit moyen et à long terme pour les investissements importants.

Section 4 : Monographie des Fokontany étudiés

C- Antsenakely : le quartier chic de la ville

Etant donné qu’il occupe le centre de la ville, il était un carrefour de rencontre et d’échange commercial, communicationnel et culturel des habitants et des alentours. « A partir de 1868, les missionnaires norvégiens, notamment TG Rasaas, vont considérablement changer la physionomie de la localité en introduisant l’eau potable et en traçant des rues »42 . Plus tard, quelques édifices tels que l’église cathédrale vont décorer la parcelle avec leur style d’architecture très occidental.

Étalé sur une superficie de 5ha, Antsenakely est limité par :

. FKT Avaratsena au Nord ;

. FKT Ampatana au Sud ;

. FKT Atsimotsena à l’Ouest et

. FKT Ambavahadimangatsiaka à l’Est.

Administrativement parlant, le FKT est dirigé par des autorités dont l’organigramme est le suivant :

42 Echos de l’Himo , n°3, 2007

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Figure n°1 : Organigramme du FKT 1 Président

Adjoint du président

Secrétaire

Trésorier

Comités

Sécurité Santé Doléances

Sources : enquête personnelle, 2013

A l’instar des villes modernes, l’endroit abrite plusieurs infrastructures faisant l’objet de la civilisation.

En premier lieu, nous trouvons les écoles qui par ses fonctions de socialisation d’une part, favorisent l’intégration sociale diminuant petit à petit l’écart informationnel séparant les riches et les pauvres. Elles transmettent ainsi un capital culturel incitant à l’uniformisation de la connaissance. Ce constat vérifie le taux élevé de la population alphabétisée au sens onusien du terme (« est alphabétisée, une personne qui est capable de lire et d’écrire en comprenant un exposé simple et bref des faits en rapport avec sa quotidienne »43 ), au sein du FKT. Ce taux s’élève à 70%. D’autre part, comme l’école cimente les structures sociales hiérarchisées, elle est inégalitaire. La plupart des infrastructures (5/6 écoles) sont toutes privées. A cet effet, l’accès s’avère difficile vu le coût de la scolarisation. Ce qui permet de dire que l’école favorise aussi l’exclusion sociale.

43 ONU , 1951

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En deuxième lieu, quatre monuments cultuels figurent au sein de cette localité. Voyons la profusion exponentielle des nouveaux groupements religieux, la multiplication incessante de l’effectif des « croyants », la vision de Malraux s’est vérifiée quant à la religiosité de ce siècle.

Le pullulement religieux peut s’expliquer par trois raisons. Tout d’abord, c’est le fruit de l’article 10 de la DUDH, 1948 sur la notion du libéralisme religieux. Puis, il est lié à l’avènement de l’Etat républicain prônant la laïcité dans son principe. Enfin, le problème de pauvreté constitue un moyen de séduction efficace pour attirer les gens cherchant coûte que coûte la guérison et les solutions dès fois, moins analysées.

Cette situation nous donne l’idée sur le quotidien des citadins tiraillés entre l’écho et l’impérative mondiale, la politique et la tendance nationale ainsi que les différentes crises socio-économiques qui entravent du jour au lendemain leurs efforts.

En outre, on y trouve aussi l’édifice du bain thermal d’ qui fait la réputation de la ville d’eaux. Cet endroit revêt un aspect touristique et thérapeutique. Quant au tourisme, ce sont les étrangers qui viennent visiter en général ce site. Le tarif contribue à la recette budgétaire de l’endroit. En même temps, eux en tant que « passeurs », diffusent des normes et valeurs étrangères telle que la photographie, etc. C’est pour cela que la ville d’Antsirabe est vue sculptée sur plusieurs arts en papier, bois, pierre… ; vendus tout autour de la ville en guise de souvenir. S’agissant de la fonction thérapeutique, cette attitude confirme le syncrétisme de notre société qui est loin de s’emparer des anciennes habitudes en facilitant la vie avec les créatures diverses (plante, eau…) adopte moins les manières de vivre occidentales qui tout rationalisent.

Enfin, le quartier est celui commercial. C’est pourquoi, les occupants sont une population commerçante. Composée des nationaux et étrangers, voici l’évolution démographique du FKT :

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Tableau n°3 : la démographie d’Antsenakely

0-5 ans 6-17 ans 18 -60 ans 60 ans et Total/Sexe plus

H F H F H F H F H F

Antsenakely 107 102 497 512 800 300 25 35 1429 1549

Source : PCD CUAbe, 2011.

Avec une taille de ménage de 3 à5 personnes ;

Nombre de toits : 475

Nombre d’habitants étrangers de sexe masculin 27 et féminin 12

Pourcentage des jeunes : 65%

A part les grands bâtiments jouxtant les rues avec leurs activités purement commerciales comme la restauration, la banquerie, la librairie…, Antsenakely a eu un grand marché local accueillant une centaine des pavillons et de demi- détaillants. Marginalement, le secteur informel, disant caractéristique d’une ville suite au chômage, au sous-emploi, « l’expansion du non travail »44 ; commence à inonder les rues et les coins. En général, les actifs sont des chômeurs, des migrants de l’exode rural, sans travail qui « a été une condition naturelle et indispensable de la vie humaine, le principal fondement de l’existence et de l’évolution de la société », en essayant de gagner de l’argent qui est « le signe de la promotion sociale »45 : on n’existe que par lui seul. Cette affirmation est ratifiée par le proverbe malgache « ny vola no maha-Rangahy ».

D- Antsongo : l’aliéné du processus de développement

Situé à 3 km du centre ville, le FKT d’Antsongo est difficile à rejoindre faute d’une réhabilitation des routes qui sont en bitumes et en terre. Ce nom s’est fait entendre aux alentours des années 50 quand les occupants se sont rendus compte que leur

44 RAMBAUD , société rurale et urbanisation , Paris, éd Seuil, 1969. 45 GEORGES T., la jeunesse dans la famille et la société modernes , Paris, éd Gallimard, Tome 2, 1961.

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terroir constitue juste une parcelle émergée des rizières. C’est donc une partie de 3ha 200m2 visible et vivable d’une immense plaine.

Administrativement parlant, le Fkt2 est entouré par :

Au Nord : le FKT de Voajanahary ;

Au Sud : le FKT d’Andafiatsimo Star ;

À l’Ouest : le FKT de Tsivahatrinikamo et

à l’Est : le FKT de Mahazoarivo.

D’une manière globale, les 500 toits y existants et résumés dans le tableau ci-après se déclarent tous issus d’un ancêtre commun d’où la notion de lignage y est fortement constatée.

Tableau n° 4 : la situation démographique d’Antsongo

0-5 ans 6-17 ans 18 -60 ans 60 ans et Total/Sexe plus

H F H F H F H F H F

Antsongo 374 399 720 769 889 1307 120 13 9 2103 2315

Source : Source : PCD CUAbe, 2011

Chaque ménage est en moyenne composé de 5 à 8 personnes. Ce qui prouve que les habitants ne sont pas encore privilégiés, d’une part des différentes méthodes contraceptives, signe de modernité ; de l’autre, à l’instar des sociétés primitives, ils conservent jusqu’à maintenant l’esprit traditionaliste qui prône l’enfant comme une marque de prestige social.

Quant à leur profession, 95 % de la population se rattachent à la terre qui, de nature très variée, est fertile à presque toutes les cultures. Voici un tableau résumant les activités journalières du peuple.

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Tableau n°5 : les activités agraires du FKT

Type Observation

CULTURE Type traditionnel Rendement très faible VIVRIÈRE Système de production archaïque (Riz, mais, Type moderne Rendement élevé manioc, patate douce, haricot, (SRI : système de Conviction partielle de la part des agriculteurs pomme de Riziculture Intensif) terre…) Techniques et moyens insuffisamment informés (SRA : Système de Riziculture Amélioré)

Rendement faible,

CULTURE DE Type traditionnel Pour la consommation et vente locale RENTE Dégradation de la production en qualité et en Légumes et quantité fruits Type moderne Rendement élevé mais prix de revient un peu cher pour le traitement, surveillance, matériels… (greffages, bouturage) manque de professionnalisme

Source : enquête personnelle, 2013

Néanmoins, on y constate la fuite de force qui de temps en temps approuve le « mythe du salariat »46 (PAVAGEAU J .), qui s’explique par le faible taux d’intérêt accordé par les jeunes à tout ce qui est travail agraire. Ce phénomène peut valider le pourcentage élevé des jeunes qui s’évadent au centre ville et y viennent gonfler d’année en année les chômeurs, etc.

S’agissant de l’élevage, cette localité en est aussi très favorable de par ses étendues de parcours. En général, l’élevage bovin, porcin et ovin est le plus pratiqué mais de faible échelle et de type familial. Le rendement fait l’objet consommation durant les fêtes et les cérémonies traditionnelles (exhumation, funérailles, mariage…) et de petit commerce

46 PAVAGEAU J ., jeune paysan sans terre , Paris, éd Harmattan, 1981

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pendant les périodes de soudure. Mais, toutes les observations assignées à l’agriculture tiennent aussi place dans cette deuxième activité principale.

D’une manière générale, cette localité n’a d’infrastructures dignes de « modernité ».

Dans le domaine sanitaire par exemple, la population doit rejoindre les Fokontany voisins en cas de besoin urgent. Aucune institution en la matière n’y est installée jusqu’à aujourd’hui ; aussi, ce sont les tradi praticiens qui s’occupent et vont secourir les villageois.

En termes d’éducation, l’endroit a eu quelques bâtiments mais ce sont tous des privés et n’ont que le niveau primaire. Cette situation n’aboutit qu’à un découragement populaire à la scolarisation et l’enseignement en général. Ce qui ne nous impressionne pas si la population alphabétisée ne constitue que 20% du total.

En ce qui concerne le sport et les loisirs, les habitants n’ont pas beaucoup d’alternatives que les plus usuels et popularisés. Ce constat est aggravé par le taux d’électrification qui est encore très faible au niveau du Fokontany. Les raisons les plus évoquées restent dans le fait que les démarches à suivre pour la demande s’avèrent trop compliquées, une fois branché, le coût est cher mais en évidence ceci ne constitue pas encore un besoin vital pour les enquêtés. Voici quand même un récapitulatif des loisirs de la population.

Tableau n°6 : catégorisation des loisirs locaux

Les aisés minoritaires La majorité

Enfants Bandes dessinées, jeux Cannette, cerf volant, nage, électroniques

Jeunes Film, karaoké, Football, jeux de carte, jeux à la chance,

Adultes Lecture des journaux, club, « folklores», combat de coq, spectacle payant, « vakodrazana »

Source : enquête personnelle ,2013

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Sur le plan cultuel, il n’y a jusqu’à ce jour de grandes églises sur la place et cette situation aux nouveaux groupements religieux tels que le pentecôtiste, le témoin de Jéhovah ainsi que « vahao ny oloko » (libérez mon peuple) d’y trouver un bon endroit d’installation. Comme l’urbain est loin à rejoindre, bon nombre des habitants (plus de 70%) se contentent de l’ouverture des portes desdites églises nouvelles.

Quant à ce qui est de la tradition, une population très conservatrice y attache beaucoup d’importance. Son âme est animée par la tradition orale, la rumeur…On n’est pas loin de l’état théologique ou métaphysique 47 de COMTE. Ainsi, plusieurs endroits ne peuvent pas être fréquentés avec tel ou tel aliment, couleur, objet, etc. Des plantes, rochers, voire même maisons sont dites hantées et restent inoccupées. La croyance en « Zanahary » et « Razana » leur interdit de transgresser les us et coutumes à savoir l’exhumation, « ala faditra », le « joro ».

47 COMTE A., de la physiologie sociale , Paris, éd des Œuvres, 1813

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Chapitre 3 :

APPAREILLAGE METHODOLOGIQUE

Section 5 : cadre technique

Documentation

Il s’agit d’un travail de recherche basé sur la documentation concernant le thème. En effet, livres, manuels, brochures, sites internet…, tout ce qui peut être une source informationnelle a été consulté. Cette phase du travail nous a permis de compléter et de collecter les informations aussi bien pour la conception théorique que l’élaboration du canevas. Non seulement vitale, cette étape s’avère de rigueur pour tous ceux qui prétendent être chercheurs. C’est ainsi que SALLENAVE a dit en substance qu’ « une vie sans livre est un avorton de vie »48 . Sans la documentation, ce travail constitue une simple énumération éclectique dépourvue de l’essence sociologique dont l’acteur est un « historien du présent par opposition à l’historien, sociologue du passé »49 .

Observation

Nous avons choisi cette méthode qui est « élémentaire »50 pour une nette appréhension de la réalité. Ainsi, force nous est de collaborer étroitement avec cinq opérateurs (taxi phone) pour pouvoir suivre de près l’usage fonctionnel du téléphone portable. En plus, ce travail nous permet de collecter quelques données relatives aux dépenses personnelles consacrées au téléphone. L’observation ainsi que l’analyse des gestes et les comportements de chaque acteur durant le discours téléphonique débouchent sur l’appréhension de la nature de l’interaction quotidienne des familles antsirabéennes.

48 SALLENAVE D., nous, on n’aime pas lire , Paris, éd Gallimard, 2009 49 CHAMPAGNE P., la sociologie , Paris, éd Milan, 1998

50 SERVIER J., méthode de l’ethnologie , Paris, PUF, 1986

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Tableau n°7 : les opérateurs (taxi phone) observés et enquêtés SEXE INTERVALLE DEBUT DE SERVICE NIVEAU D’AGE CARRIERE INTERESSANT D’INSTRUCTION

E1 féminin [18 – 24 ans [ 2009 Appel Seconde

E2 féminin 25ans 2007 Appel Niveau secondaire

E3 masculin [24 -35 ans [ 2011 Appel CEPE

E4 masculin [24 -45 ans [ 2011 Crédit Niveau secondaire

E5 masculin 19 ans Janvier 2013 Crédit Terminal

Source : enquête personnelle, 2013

Déroulement de l’enquête

L’enquête s’est déroulée à partir de la fin du mois de mars au début du mois d’avril. Pour cela, nous avons réalisé deux travaux interdépendants :

La pré-enquête :

Elle a été effectuée en premier lieu à Antananarivo. Cette phase nous sert à la « formulation du questionnaire et la vérification de ce qui doit être fermé ou ouvert »51 et celle des hypothèses et à la restitution du canevas du projet. Nous avons eu l’occasion de recueillir des informations quasi diversifiées suite à l’adoption d’un entretien libre.

51 BEITONE A. et Aliî , Sciences sociales , Paris, éd Dalloz, 2009

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Tableau n° 8 : renseignements généraux des pré-enquêtés. PRE – ENQUETE

SEXE INTERVALLE D’AGE SITUATION MATRIMONIALE NIVEAUD’ TOTAUX

INSTRUCTION

MARIE + 45 ANS DIVORCE DIVORCE VEUF (VE) PRIMAIRE RELIGIEUX 18 –24ANS SUPERIEUR 24–45ANS CELIBATAIRE SECONDAIRE 2 4 4 2 5 - - 3 2 3 5 10 MAS MAS 3 5 4 3 4 5 - - 5 5 2 2 FEM 5 9 8 5 9 5 - 3 7 8 7 22

Source : enquête personnelle, 2013

L’enquête sur terrain :

Plusieurs étapes ont été adoptées pour pouvoir mener à terme le travail. En effet, nous sommes en premier lieu obligés de nous présenter aux autorités locales telles que le Vice- président du PDS de la Commune, les deux chefs FKT au sein desquels l’enquête va être entreprise, aux dirigeants des grands opérateurs mobiles pour demander leur autorisation.

Tableau n°9 : les autorités enquêtées SEXE FONCTION DÉBUT DE CARRIERE

1 masculin Vice président du PDS Nov. 2012

2 masculin Chef FKT 1 1994

3 masculin Chef FKT 2 2004

4 masculin Responsable régional du TELMA -

5 masculin Responsable régional de l’AIRTEL -

Source : enquête personnelle, 2013

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En deuxième lieu, nous avons collecté des données monographiques et statistiques aux divers centres (Service de Communication de la ville, Service de la VOIRIE, les sièges régionaux des opérateurs mobiles) indiqués par les premiers.

Enfin, nous procédons à l’enquête proprement dite dont ci-après les critères retenus « questionnaire, échantillon, choix des enquêtés »52 .

Questionnaire :

Nous avons choisi les questionnaires de type fermé pour obtenir des réponses précises. Par contre, quelques diversités optionnelles faisant preuve de celles de l’intellectuel, de la géographie ou autres critères ont nécessité un type semi-dirigé. En effet, le questionnaire est spécifique pour la catégorie enquêtée (cf annexe questionnaire)

Échantillonnage : nous avons mené notre étude auprès de deux Fkt dont le premier représente ceux les plus développés et civilisés de la ville et l’autre au contraire le moins développé presque sur tous les plans.

Nous avons enquêté dans l’ensemble soixante dix neuf individus qui semblent avoir répondu à l’exigence de la représentativité. En détail, ils se résument comme le montre le tableau suivant :

52 CHAMPAGNE A., Op cit.

37

Tableau n° 10 : renseignements généraux des enquêtés FKT SEXE AGE STATUT NIVEAUD’ TOTAUX MATRIMONIAL INSTRUCTION

MARIE ionde la FEMININ + 45 ANS DIVORCE DIVORCE VEUF (VE) PRIMAIRE RELIGIEUX MASCULIN MASCULIN SUPERIEUR 10 18 ANS – 18 24 ANS – 24ANS- 45 CELIBATAIRE

FKT 28 20 16 10 10 12 21 15 7 5 - 14 26 8 48 1

FKT 14 17 3 8 13 7 7 17 4 3 - 18 8 5 31 2

42 37 19 18 23 19 28 32 11 8 - 32 34 13 79

Source : enquête personnelle, 2013

Remarque : FKT1 Fokontany d’Antsenakely

FKT 2 pour celui d’Atsongo

38

Conclusion partielle

Si l’humanité est depuis les origines marquée par l’unité biologique, elle accède aujourd’hui à l’unité sociale grâce aux progrès technologiques dont nous avons tous été témoins au cours du dernier demi-siècle. L’un des changements les plus marquants est la propagation généralisée mais presque inégale des nouvelles technologies de l’information et de la communication ; avec lesquelles le monde se transforme rapidement, les frontières deviennent de plus en plus perméables et les hommes peuvent joindre instantanément n’importe lequel de ses semblables.

En effet, la communication coexistant avec l’apparition de la société dite primitive perdure et est influencée par l’évolution de la structure de la dernière. Elle se fait partout présente et prend différentes formes : directe, médiatisée…Malgré notre incapacité de ne pas se communiquer dans la vie courante, certains chercheurs mettent l’accent sur le respect de l’incommunication qui traduit selon eux la volonté de garder la différence et la liberté des autres car même le ménage n’en est qu’une cohabitation.

Celui-ci, composé des membres chronologiquement restreints admet et aspire à un vivre ensemble harmonieux. Le groupe domestique est ainsi l’incarnation vivante de la cohabitation mais aussi des conflits intergénérationnels. Paralysé par le développement technologique et l’imaginaire social, le lien intrafamilial s’est de temps en temps fragilisé aussi bien dans les villes que les périphéries comme nous montre le cas de la Commune Urbaine d’Antsirabe dont la monographie permet de lui classer comme le carrefour occidentalo-traditionnel.

Aussi, les séquelles de l’usage et de la domestication de la téléphonie mobile font-elles l’objet de cette deuxième partie. Le téléphone au service de la communication intrafamiliale, quels en sont les portée et limite ? Sont-elles les mêmes dans des Fokontany structuralement opposées ? La partie suivante y répondra.

39

DEUXIEME PARTIE :

« LE VECU ANTSIRABEEN EN TERMES DE COMMUNICATION »

« La société, malade de ses communications » METAYER Gérard

40

Introduction partielle

Jusqu’à l’heure actuelle, la population malgache s’attache beaucoup à la famille. Mais, d’une manière évidente, la famille n’a pas encore une place noble à Madagascar. Il y a demi-siècle, tout était à inventer si l’on parle de la famille. Cependant, l’avenir lui appartient si elle sait le saisir dans le cadre de la mondialisation qui ne cesse d’étouffer les pays pauvres.

Malgré tout cela, nous restons optimistes en disant que l’aventure ne fait que commencer. Nous sommes les enfants du XXème siècle ; trop jeunes pour être acteurs du siècle d’espoir mais assez adultes pour être touchés par l’écrasement familial vis-à-vis de ce gigantesque changement amené par l’avènement de l’ère des NTIC.

Paralysée par les impératives de la mondialisation (uniformisation de l’information, consommation à outrance des produits technologiques,…), le lien intrafamilial devient de temps en temps médiatisé.

Cette deuxième partie du mémoire consiste ainsi à la présentation des données collectées et ensuite à des analyses et interprétation sociologique.

41

Chapitre 4 :

LA PRESENTATION DES RESULTATS D’ENQUETE

Cette partie constitue la base de notre réflexion car la scientificité de la Sociologie a été vérifiée par des recherches sur terrain. Ainsi, la collecte d’information est entremise par le biais de diverses techniques.

Figure n°2 : Modélisation de la consommation en téléphone

Société productrice Pays développés : producteurs Firmes multinationales : distributeurs Entreprise des bourgeoises compradores : importateurs et

Relationàdes fins

économiques

Flux commercial commercial Flux

Couche aisée Dépense exorbitante Société consommatrice : mais non productive État : usage informationnel Entreprise : usage professionnel Société : usage collectif Famille : usage intergénérationnel Famille appartenant aux couches défavorisées

Source : travail personnel, 2013

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Ainsi, les raisons de l’utilisation du téléphone sont multiples. Le schéma nous présente que chacune des couches sociales a son propre mode de fonctionnement pour l’appareil. En général, les couches aisées l’exploitent pour des raisons pures et simples productives via la multiplication de leur réseau communicationnel car « les riches cherchent à multiplier leur réseau pour des profits »53 GOUROU tandis que les pauvres l’utilisent comme un moyen de divertissement et de conformisme.

Section 7 : Présentation des résultats qualitatifs Pour pouvoir expliquer ces différences majeures entre ces deux strates sociales, procédons par la manipulation des variables qui montrent que les riches sont quasi-consommateurs de la technologie alors que l’une partie s’avère un peu réticente.

NB : 1EF1 : enquêtée numéro n°1 du FKT1

1EM6 : enquêté numéro n°6 du FKT1

C- Les avantages de la possession du téléphone

Elle améliore la communication intrafamiliale parce que :

Par la diminution considérable des tarifs et des coûts des produits téléphoniques, tout

le monde peut en disposer, donc toute la famille est quasi-connectée ; en effet, toute information circule promptement et que toute distance géographique devient si réduite voire annulée. C’est dans cette direction qu’ 1EF7 a raconté que « comme ma mère était en voyage, elle ne cesse de me réveiller tous les matins par les appels….c’est pareil, je lui souhaite bonne appétit le midi ; et le soir, toutes les deux terminent la journée par une conversation téléphonique. Pour moi, son absence n’est que physique »

L’utilisation des appareils mobiles permet un gain de temps car on n’est plus obligé

53 GOUROU : c’est un expert d’un domaine surtout de l’informatique. Il s’agit ici de John Cormack (gourou de la programmation informatique en 3D) et de Michael Porter en management

43

de se déplacer pour rendre visite à un parent, de recommander via le poste des lettres familiales, de faire apporter par des transporteurs-chauffeurs des messages. De même pour les commissions quotidiennes telles que ce cas ; « ma femme détient un grossiste à Vatofotsy. Moi, je suis fonctionnaire, comme je ne travaille pas les samedis, je me charge de l’approvisionnement. Avant, si la liste de commande élaborée le vendredi soir est incomplète, nous ne pouvons rien faire que d’attendre mon retour et refaire la course après. A cela, je sors à 8h, rentre à 11h puis repars à 13h ; actuellement, cet incident s’est réglé via le téléphone. Je ne fais la commission que toute la matinée et l’après-midi, je peux lui aider pour les inventaires ou autres. » 1EM10 Il est alors plus sécurisant que modernes.

En cas de mission ou de voyage qu’effectue un membre de la famille, l’appareil essaie de combler le vide imagino-affectif et informatif (entre les amoureux et les couples), donc il assume en même temps une fonction psychologique et communicationnelle; que METAYER G. désigne par une fonction de « prévention médico-sociale »54

Via les différents services offerts (club, appel moins cher, transfert rapide d’argent…) par les opérateurs généralement en concurrence, le téléphone constitue une voie de recours et de secours efficient en cas d’accident, de naissance, de bonheur, de malheur, etc.

D- Les inconvénients du téléphone

En réalité, le téléphone ne fait que la détériorer puisque : Elle est une source de querelle . Des fois, les messages envoyés ou reçus revêtent des caractères difficilement à encoder par les parents et les vieux, les jeunes en abusent pour pouvoir transmettre leur complicité dans le bien mais aussi dans le mal. Nous avons par exemple les abréviations comme 586 : je t’aime, 2m1 pour demain… Elle renforce également des relations mensongères intrafamiliales ;

Elle constitue aussi une dépense inutile par l’achat obligatoire des recharges pour

54 METAYER G., la société malade de ses communications , Paris, éd Dunod, 1980

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pouvoir bénéficier de l’offre. Une mère s’est plainte en racontant que « mes filles, l’une 16 ans et l’autre 13ans ont économisé leur goûter et l’offrande dominicale (rakitra) seulement pour acheter du crédit »1EF3 . A part les crédits, le domaine ne cesse de s’évoluer, donc pour être au top de la nouvelle technologie, il faut posséder les derniers cris, de vraie marque dont le prix s’avère très exorbitant. Mr X a vécu la même chose en économisant toute une année pour préparer le jour d’anniversaire de son fils unique (14ans) qui lui a déjà réclamé à titre de cadeaux le téléphone i- pod qui vaut à peu près à 2 000 000ar ( 1EM13 ) .En plus, le problème de l’insécurité ou le vol incite les usagers à changer de temps en temps de téléphone. Dans ce cas, GUSTAVE Le Bon a raison quand il souligne l’ « irrationalité des individus et leur capacité à être manipulés »55 .

Puis, la présence du téléphone assigne un trouble mental au niveau de tout un chacun. En réalité, les appels inconnus ainsi que les messages des anonymes entrainent tout le temps de la nervosité et du stress…« moi, quand je fais du club, je veille jusqu’à ce que ça se termine, dès fois à 23h ou même 24h. Et le matin, j’ai mal à la tête, mes yeux tous rouges… » E1F5 ; En plus, les consommateurs connaissent une forte dépendance en la matière, c’est ainsi que BILL Gates appelle la cette génération comme l’ « I- generation » car elle ne peut plus se passer de cette drogue électronique du matin au soir, de la famille à l’église. C’est une sorte d’électronisation de la vie humaine .

L’appareil ne permet plus d’avoir une vie privée paisible et tranquille . Par exemple, en téléphonant chez un taxiphone, au moins cinq personnes sont au courant de la conversation : le propriétaire de l’appareil, le passant, l’autre client, le grand opérateur auquel le réseau appartient et enfin le destinataire. Il est dit que « les messages ainsi que les contenus d’appel sont enregistrés pour des raisons sécuritaires. Ces informations peuvent être consultés en cas de problème du genre diffamation publique, intoxe… seulement sous une audience du tribunal », responsable TELMA .Donc, tout est public avec le téléphone.

Socialement parlant, le téléphone n’est qu’un facteur de trouble et problème social .

C’est à cause de cet appareil que le kidnapping s’est développé ces derniers temps ; voyons aussi le grand trouble qu’a connu le pays via les messages et les appels ayant trait au club

55 LE BON G., , psychologie des foules , Paris, éd Alcan, 1985

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satanique, ainsi que les messages terrorisants venant des « dahalo ». En fait, la relation téléphonique revêt dans la plupart des cas des masques hypocrisiques. C’est alors un facteur d’ « anomie sociale » (DURKHEIM E).

Enfin, l’usage abusif de cet appareil affecte également notre construction identitaire

dont la langue fait partie intégrante. On constate que les SMS ainsi que les abréviations envoyés dénaturent progressivement la langue. En effet, la métathèse 56 (variantes graphiques de la langue) a considérablement accepté pour pouvoir économiser l’espace mais laisser le maximum d’information. Pourtant, la « langue est non seulement l’outil propre de chaque membre de la société, mais sa possession vaut appartenance… nées avec les sociétés qui les forgent et qu’elles expriment, les langues peuvent être entrainées par leur déclin, suivre leur mutation ou partager leur disparition »57 .

En bref, le téléphone n’est ni bon ni mauvais en soi, seulement l’utilisation peut déterminer son devenir. Il peut être bénéfique aussi bien pour chaque individu que la société toute entière. Néanmoins, il est source des maux sociaux en cas de mal exploitation. Mais qui sont en général les consommateurs et essayons de définir qualitativement leurs points de vue.

Section 8 : Quantification perceptionnelle

En réalité, quand une famille admet (surtout sur le plan économique), ou connait (par des voies naturelles) une frontière un peu large entre ses membres, le recours à l’utilisation du téléphone s’avère très signifiant. Voici quelques données qui illustrent ces constats. Comme nous voulons mener une étude comparative, force nous est alors de présenter l’un après l’autre les résultats quantitatifs recueillis durant la descente sur terrain.

56 RAJAONARIMANANA N ., grammaire moderne de la langue malgache , Paris, colloque ILNACO, 2001

57 BIJELJA R. et BRETON R ., du langage aux langues , Paris, éd Gallimard, 1997

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E- la variable espace

Tableau n° 11 : Utilisation du téléphone suivant l’espac e ants se perdent JEUNES ADULTES TOTAUX

FKT 1 FKT 2 FKT 1 FKT 2 FKT1 FKT 2

Foyer à une seule 3 1 4 - 7 1 chambre

Foyer à deux chambres 9 3 6 6 15 9

Chaque membre de la 10 4 8 7 18 11 famille a sa chambre

TOTAUX 22 8 18 13 40/48 21/31

Source : enquête personnelle, 2013

NB : nous considérons dans la colonne des jeunes toute personne moins de 24 ans et adultes celle qui a plus de 24 ans

Ainsi, lorsque les membres se sont distanciés par des frontières murales plus encore géographique, toute forme de relation intime : partage du problème familial, des difficultés de la journée, des petits secrets d’ordre amoureux ou amical…se dissout peu à peu. Quand cette relation n’existe pas, une carence affective ou morale survient, d’où la raison d’être de la quête d’autres rencontres. Par impossibilité de contact physique, les gens s’orientent à des liens de type virtuel tel que l’utilisation du téléphone. En effet, l’interaction commence à admettre l’ « effacement du corps »58 et la médiatisation de la relation. Telle est la caractéristique de la société moderne de nos jours.

Par peur, les adolescents n’osent accrocher l’appareil ayant un appel anonyme ou amoureux devant ses parents ; c’est pourquoi, ils sont rares à l’utiliser quand le foyer est constitué d’une seule chambre. En général, on s’y tous connait.

De même pour les parents, ils sont obligés seulement d’opérer des contacts de travail et de famille, les autres sont interdits devant les enfants.

58 REDEKER R. , le deshumain , Paris, éd itinéraires, 2000

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Chez un foyer à deux chambres, de petits secrets aussi bien pour les enfants que les parents commencent à soulever dans l’autre pièce sans l’abri de l’autre. En effet, ce sont les bêtises de l’école, de rue qui sont le contenu de la conversation chez les adolescents tandis que les caprices et les affaires du jour pour les adultes.

Enfin, toutes les carences relationnelles et affectives vont se combler via le téléphone quand la liberté spatiale est reconnue au sein de la famille. C’est dans leur chambre l’adolescent essaie de libérer ses instincts relationnels tout en avouant ses sentiments, ses difficultés…à un proche que ce soit ami ou petit copain. Du coté des parents, ce sont les sujets « tabou » qui sont abordés durant les contacts enfermés. Cette nouvelle attitude de la famille approuve que « ce n’est plus la conscience qui détermine l’existence mais au contraire c’est l’inverse »59 MARX K.

F- La variable âge

Tableau n°12 : influence de l’âge des parents sur l’utilisation du téléphone par leurs enfants . Réponse 20 - 35 ans 35 - 45 ans Plus de 45ans Totaux

Fkt 1 Fkt 2 Fkt 1 Fkt 2 Fkt 1 Fkt 2

OUI 10 3 7 1 5 2 22 6

NON 6 7 4 5 5 6 5 18

TOTAUX 16 10 11 6 10 8

Source : enquête personnelle, 2013

Que l’on veuille ou non, la variable âge joue un rôle prépondérant dans le déroulement de la vie quotidienne. Ici, il est très explicatif lorsque la liberté d’employer un téléphone pour un adolescent est fonction de l’écart d’âge des parents, chef de famille et celui de l’enfant.

En effet, pour des parents moins âgés, c’est –à- dire que la cohorte entre eux et ses progénitures ne dépassent pas deux décennies, on dirait qu’ils sont au courants du besoin de

59 MARX K., Op cit.

48

ces derniers. Ces enfants qui éprouvent du « besoin d’estime de soi et d’appartenance »60 , réclament de temps en temps la conformité à leur camarade tant dans l’apparence extérieure que les avoirs. D’où, l’importance de la mode, de la possession du téléphone, du changement de « look » dans toutes les circonstances. Sur ce point, il s’agit ici d’un conformisme que le psychologue ALLPORT a expliqué, avons-nous dit, par le « besoin de similarité »61 ressenti par chaque individu. Néanmoins, la similarité n’existe qu’au se in d’une société reconnaissant la solidarité mécanique ; faut-il alors une société électro-mécanique ?

Au moment où le décalage entre les deux générations s’avère un peu distant, c’est-à-dire dans l’intervalle de vingt à trente ans, les parents éduqués dans un monde encore éloigné de la technologie paraissent réticent dans l’utilisation. Ils se réfèrent toujours à la bonne marche de leur vie sans l’intermédiaire de ces appareils. A cet égard, ils sont tentés de comparer leur époque à celle de leurs descendants et n’en voient que de la complexité et du caprice.

G- La variable instruction

Tableau n° 13 : Utilisation par rapport à l’intellectuel Niveaux NOMBRE

FKT 1 FKT 2

Primaire 9/14 11/18

secondaire 17/26 7/8

supérieur 6/8 4/5

Source : enquête personnelle, 2103

Ce tableau peut nous révéler que l’utilisation du téléphone est en un monde « sans frontière ». Sans parler des produits de haute gamme où l’accès et la manipulation exige des compétences ne serait-ce que linguistique, le téléphone est facile et pratique pour toute catégorie de la population.

60 MASLOW , motivation and personality , Eyrolle, éd Organisation, 1954 61 ALLPORT, the construction of attitude , Paris, éd Harmattan, 1935

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A cet effet, les analphabètes se contentent tout simplement d’un aspect utilitariste qui sert l’appareil pour décrocher et passer un appel. Pour eux, il suffit de leur montrer une fois pour toutes les deux touches pouvant servir à un appel et c’est fait. En général, la raison de sa possession reste en le besoin de communication verbale qui tourne autour des activités domestiques et de relation de type simple (entre famille et amie). C’est à ce stade que l’étude menée aux États Unis par le sociologue HOGGARD R . a été vérifié sur la terre malgache. Après avoir enquêté sur la raison d’être des médias auprès de la couche défavorisée qui ne sait même pas à quoi servent-ils, le chercheur a publié qu’ils les consomment seulement pour le plaisir, donc, c’est la « culture du pauvre »62 .

S’agissant de ceux qui ont un niveau moyen, ils l’utilisent pour des raisons diverses dont le loisir (chansons, face book, club,…) tient une place importante. Le poids du groupe des pairs leur est signifiant que ce soit au niveau de la communication directe ou virtuelle. Pourtant, citadins et campagnards ne prouvent pas les mêmes désirs pour ce sujet. Les premiers aiment beaucoup la communication indirecte (par honte ou faute de temps ?) tandis que les seconds s’intéressent à celle directe pour transmettre un message.

H- Variables inhérentes aux consommateurs

Tableau n° 14: effectifs des consommateurs en fonction du service Critères FKT 1 FKT 2

MASC FEM MASC FEM

Au courant de différents 19 14 7 4 usages du téléphone

Exigence de marque et 18 14 4 3 des accessoires

En consommer plus de 5 16 14 2 1 ans

Source : enquête personnelle, 2013

62 HOGGARD R ., Op cit.

50

Nous avons admis que suivant le développement de la science définie comme …., le téléphone remplit de temps en temps plusieurs fonctions auparavant inimaginable telles que :

- la transmission instantanée de l’information 63 (E Van CLEEF ) par verbe, écrit , maintenant avec photo ;

- le transfert immédiat de l’argent via les divers services : orange money, airtel money, mvola… ;

- le moyen de divertissement ( BOURGEON D.) 64 et d’acculturation par les jeux solitaires, enregistrement quelconque plus la capacité de connexion à l’internet (facebook, réseaux sociaux…) ;

- la facilitation des conditions de vie à travers l’achat, les commissions… ;

- le facteur d’un trouble ou d’un fonctionnement social par la diffusion des événements ou faits divers tels le club satanique, le kidnapping….

Ainsi, le présent questionnaire présume compter les enquêtés qui savent au moins deux d’entre eux. La réponse nous confirme que le facteur géographique (les citadins sont mieux informés que les autres), intellectuel (les instruits sont beaucoup influencés et pratiquants que les analphabètes), etc. ont joué des rôles importants dans la fluidité de l’information. En effet, 68,75% de la population du FKT 1 opposition à 25,48% du FKT2 ont utilisé lé téléphone en d’autres fonctions que l’appel.

Quant aux marques de l’appareil et des accessoires, quelques données fournies par les opérateurs mobiles locaux ont vérifié ces constats. D’après eux,

 69 % des clients sont intéressés par des marques simples dont le prix de l’appareil est inférieur à 50 000Ar ;  25% attirés par la marque moyenne [50 000Ar – 100 000Ar [ ;  6% le haut de gamme (plus de 100 000Ar)

Source : Compagnie Airtel et TELMA Antsirabe, 2012

63 CLEEF EV., géographie des télécommunications , Paris, éd PUF, 1984 64 BOURGEON D., Op cit.

51

D’une manière évidente, ces chiffres soulèvent la situation économique de chaque ménage. A vrai dire, la consommation en technologie qui s’avère dans la plupart des cas un caprice, exige un surplus d’argent qui est considéré comme « l’un des langages spontanément universels, intégrant toute chose, toute activité dans une échelle unique de valeurs : combien ca coûte ? C’est l’un des grands vecteurs de la mondialisation en conférant un prix à tout »65 . C’est pourquoi, ce sont les citadins, esclaves de la mondialisation non seulement dans la pensée mais aussi dans la pratique qui en consomment et les plus dépenseurs. Leur attitude s’explique par :

o le complexe de supériorité qui se veut être unique et intéressant ; o le « conformisme par peur » d’être délaissé par ses semblables ; o le besoin d’être toujours au courant de toute l’actualité ; o l’incarnation de l’esprit de concurrence forgé par le capitalisme ; o la satisfaction de leur situation car « noblesse oblige ».

De l’autre côté, ces informations relèvent du problème de manipulation. Nous sommes tous conscients que, plus l’appareil est sophistiqué, plus la manipulation doit être appropriée. A cela, prenons l’exemple du dernier cri qui n’affiche que langues : l’anglais et le chinois mandarin. La complexité exige la maitrise de la langue de production à part les vocabulaires technologiques, les sigles, le mode de fonctionnement…

En ce qui concerne la durée de la consommation, elle dépend de plusieurs raisons.

Tableau n° 15: les services les plus attirants Coût (prix) 65%

Qualité de service 49%

Facilité d’utilisation 78%

Source : Airtel Antsirabe, 2012

En effet, la population s’est beaucoup familiarisée au téléphone puisque le coût du service, réglé par la loi de l’offre et de la demande puis de la concurrence, connaît du jour au lendemain une réduction. Ce qui vérifie notre premier postulat. Quand le

65 BEFARGES P- M., la mondialisation , Paris, éd PUF, 1997

52

prix diminue, l’effectif des consommateurs augmente. D’ailleurs, l’aspect très pratique que revêt le téléphone de nos jours intéresse bon nombre de consommateurs. Souvenons le type des années 90 qui est trop long (surnommé enfin « tapa-mofo ») et qui n’a connu que des fonctions très limitées. Par contre, notre appareil à nous apparaît comme le « fée magique » de Cendrillon et des autres mythes. De moins en moins volumineux, plus pratique, partout fonctionnel, la fée magico-électronique nous débarrasse de toute difficulté et imperfection humaine : quelle véritable transformation sociale.

En guise de conclusion, la société d’aujourd’hui, même celle sous développée comme la notre a été fortement divisée par le développement de la technologie. Pour cela, notre société a connu une néo stratification conditionnelle dans laquelle la « société bourgeoise moderne a mis en place des classes nouvelles, de nouvelles conditions d’oppression »66 . Ce qui revient à dire que l’accélération de changements sociaux durant le dernier siècle, la multiplication des effets visibles de ces modifications sur les individus, mais aussi, en retour l’influence des réactions de ces derniers sur la société toute entière, « rendent indispensables des études et une réflexion de nature psycho-sociale puisque l’évolution n’est pas seulement biologique et il insiste sur l’aspect psychologique de forces sociales »67 . Et cette affirmation nous conduit à la partie d’interprétation-réflexion.

66 MARX K. et ENGELS F ., manifeste du parti communiste , Paris, tome 1, éd Gallimard, 1965 67 WARD F. , Psychic factors in civilisation , USA, éd Ginn&Company, 1897

53

Chapitre 4 :

ANALYSE MULTIDISCIPLINAIRE DE L’IMPLICATION DE LA TÉLÉPHONIE MOBILE DANS LE LIEN INTRAFAMILIAL

A vrai dire, l’analyse sociologique de la famille et ses fonctionnements a ouvert un vaste champ de recherche. Plusieurs directions sont en effet possible surtout dans le contexte actuel où l’on assiste à la complexification du lien intrafamilial. Conjugué avec l’omniprésence des NTIC, étudions le changement progressif qu’a connu la famille malgache en termes de relation .

Section 9 : Aspect psychologique du changement « le lien familial à la merci de la technologie »

« La technologie n’est une bonne ou mauvaise chose en soi. Seule l’utilisation peut déterminer son devenir »68 . Ainsi, on ne peut pas faire un préjugé sur l’utilisation du téléphone ou « l’appareil social vital » du dernier siècle. De nos jours, il est partout, dans toutes ses formes de relation (travail, tribunal, confession, étude…). Il est vrai que cette dernière génération approuve totalement de l’ addiction 69 qui réaffirme qu’il soit vital.

I- Depuis même à la formation de la famille

Le jeune homme et la jeune femme, qui se contentent auparavant du facteur romantique qui soit l’employé de la poste, un ami de classe ou de travail, un parent

68 BONJAWO J. L’internet pour l’Afrique , Paris, éd Kartala, 2003 69 VALLEUR M ., les nouvelles formes d’addiction , Paris, éd Flammarion, 2003

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de même génération, ont recours au téléphone. Dans ce cas, les premiers gestes de séduction étaient l’envoi d’un bout de papier manuellement signé pour demander un rendez-vous. Actuellement, celui-ci se transforme en la demande d’un numéro téléphonique. (54,04% de nos enquêtés l’ont affirmé en disant que leur union commence via un message du téléphone.

En effet, le téléphone malgré l’absence physique qui peut être déjà significative (voir section10) permet d’éviter la « déclaration suicidaire », disaient les enquêtés. On est quasiment en sécurité après les messages remplis de métaphores, de poèmes ou des mots d’amour (tu me manques, pourquoi tu ne me réponds pas ?, où étais-tu le jour de …, etc.), des appels incessants, des voix murmurantes et séduisantes,…avant de franchir le grand pas : la déclaration proprement dite. En outre, le téléphone réduit au maximum l’espace. « il est honteux aujourd’hui si le futur conjoint me demande un numéro et que je réponds je n’en dispose pas », affirme une enquêtée. D’où, il est présent dès même la première rencontre.

J- Indispensables au bon déroulement des cérémonies

Ensuite, lorsque les deux se disent prêts à un engagement mutuel qualifié de mariage : « un contrat par lequel un homme et une femme se donnent légitimement l’un et l’autre le droit d’accomplir les actes nécessaires à la procréation et à l’éducation des enfants, et s’obligent à la vie commune »70 , le téléphone sert d’un accélérateur d’informations telles que la confirmation des invitations, du lieu et date de la cérémonie…Déjà, les félicitations et transfert du « tso-drano » pour ceux qui ne peuvent pas venir sont faits via airtel money, orange money ou m’vola dont 39,76% des enquêtés citadins sont habitués à l’utilisation.

K- Vital dans l’éducation

Au fur et à mesure que le temps passe, le couple est voué à la transmission de la vie, qui est une essence du mariage selon la théologie catholique et

70 FONSEGRIVE G . , mariage et union libre, Paris, éd Kartala, 1904

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l’esprit malgache. « Ny anambadian-kiterahana » (littéralement, on se marie pour avoir des gendres), dit un de ses proverbes. C’est au moment de l’accouchement et de la naissance que le téléphone est indispensable selon 41,00% des enquêtés. Il est efficace ici pour se renseigner sur l’état de la porteuse et du nouveau-né, sur les différentes commissions relatives (achat de médicaments, déclaration de naissance, apport de nourriture ou accessoires…).

La vie familiale se trouve ainsi dépendante du téléphone jusqu’à ce que l’enfant grandisse : relation famille-école. A l’âge adolescent, l’enfant malgache possède déjà son propre téléphone pour pouvoir informer leurs parents sur leur situation spatio- temporelle, financière…mais aussi pour rejoindre leur groupe de pairs 71

L- Une condition sine qua non pour entretenir la cohésion

Suite à la cherté de la vie, tous les membres de la famille ne se retrouvent plus que le soir, dès fois tous les week-ends à condition que le père ne rejoigne ses camarades et les enfants leurs amis. Pour cela, le père, pour la recherche de survie, sort trop tôt pour ne rentrer que trop tard. Il se livre à la recherche de l’argent qui s’érige aujourd’hui à la hauteur d’une dimension sociale puisqu’ « on n’existe que par lui seul, à forte raison, il donne la seule possibilité de survivre, la clé des plaisirs, des divertissements et du confort »72 .

Quant à la mère, elle doit s’engager aussi à d’autres activités rémunératrices que celles qui lui étaient réservées traditionnellement pour améliorer le budget familial. Voyons cette mère qui a déclaré que « je travaille à Mandaniresaka, environ 40minutes de chez moi, je sors le matin après avoir préparé le déjeuner et fini les tâches ménagères. A ce moment-là, mes enfants viennent juste de se réveiller, ils se précipitent eux aussi à leur emploi du temps. Il m’est arrivé presqu’au chemin, je me souviens de recommandations diverses telles que où est-ce que j’ai mis la clé, leur cahier est déjà signé, l’écolage par ici ou par là…Donc, je dois

71 MEAD M ., le fossé des générations , Paris, Ed Denoel, 1971. 72 GEORGES TEINDERAS et YANN THIRAU , Op Cit.

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faire recours à mon portable pour transmettre tous ces détails à ma fillette âgée de 13 ans» 1EF9 . Les enfants s’orientent dans leurs tâches quotidiennes qui sont l’étude et le service ménager (marché, cuisson, lessive…). En effet, la maison devient « une machine à habiter »73 . A cet égard, même la grande famille a des difficultés pour se rassembler que durant les festivités : nouvel an, exhumation, événement funéraire…Le téléphone contribue ainsi considérablement au déroulement de la vie quotidienne mais aussi occasionnelle.

En bref, la conséquence de l’invasion technologique n’est que la transformation de toutes les relations humaines y comprise celle de la famille.

Section 10: Vision dialectique culture/ économie « Téléphone : un capital culturel au profit du capital économique »

« L’homme occidental a cru bon de diffuser sa civilisation et sa culture par sa puissance militaire, idéologique et économique »74 BALANDIER G . (2003). Ce constat s’avère irréfutable si l’on se réfère au monde malgache généralement envahi par des pratiques étrangères. On est de nature homoconsumericus en ce sens que la consommation n’est que la « pratique, fréquentation, possession, utilisation »75 .

En réalité, 92,08% de notre population d’enquête (FKT1) dispose d’un appareil, qu’il soit le plus simple « foza » ou le dernier cri « gamme ». Par contre, le téléphone revêt un aspect pur et simple économique de sorte qu’il part de la demande (en 2000, ± 5 % des malgaches l’utilisent et en 2012, ± 70) et fait une offre (découverte de marque, de style, et aussi de fonction : écran couleur, polyphonie, Bluetooth, vidéo internet…). Ainsi, il constitue un déficit soit un bénéfice. En général, les dépenses monétaires y afférentes paraissent très exorbitantes.

73 GEORGES TEINDERAS et YANN THIRAU, Op cit. 74 BALANDIER G ., civilisés, dit-on , Paris, éd PUF, 2003 75 BOURGEON D ., Op cit.

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M- La culture des pauvres

En premier lieu, la plupart des malgaches disposent un téléphone tout simplement par plaisir. C’est ce que HOGGARD R. résume dans son étude. La culture des pauvres s’explique par le fait que les dits pauvres cherchent à avoir quelque chose dans leur vie pour se satisfaire même si celle-ci ne lui sert de rien dans le quotidien. Par honte ou complexe, nos enquêtés ne fournissent de réponses crédibles à ce questionnaire.

Citons un passage de LALLEMENT qui rejoint en partie l’idée de Hoggart et ses semblables : « le capital ne se réduit pas à un ensemble de richesses matérielles. Il faut lui adjoindre le capital culturel (capacités intellectuelles, biens culturels possédés…) et le capital social (relations sociales)…. Les classes dominantes se distinguent aujourd’hui par une riche dotation en capital ? Ainsi, les dominants-dominants (bourgeoisie d’État) sont pourvus d’un fort patrimoine de capital économique, culturel et social. Les dominants-dominés (professions libérales) sont mieux équipés en capital culturel mais moins riches en capital économique. Les classes dominées disposent, quant à elles, d’un maigre capital économique accumulé par ascèse et sacrifice (petite bourgeoise). A l’extrémité de l’échelle sociale, les exclus ne possèdent aucune forme de capital exigible dans le monde urbain »76 .

N- L’exigé - exigeant

En second lieu, ceux qui ont un niveau intellectuel un peu avancé, ou les issus de la couche aisée cherchent à se différencier à partir de leur téléphone compliqué. Or, la complexité est fonction du prix. Alors, ils commencent à satisfaire de leur coté le besoin d’estime. Cette situation renforce la reproduction des inégalités car naturellement, « les individus sont également indifférenciés du point de vue de l’héritage culturel et économique »77 .

76 LALLEMENT M ., découverte de la sociologie , cahier français, la documentation française, n° 247, 1990. 77 BOURDIEU P . inégalités des chances, Paris, éd Colin, 1973

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En outre, l’utilisation de cet appareil exige d’une part la présence d’électricité, qui jusqu’à maintenant l’apanage des villes et seulement des couches aisées. D’une autre part, l’achat de recharge que soit par carte de crédit ou transfert immédiat d’un téléphone à un autre, ou encore par post payé fait l’objet d’une fortune car il est vrai que qu’ « au XXIème siècle, tout s’achète ».78

Enfin, posséder du téléphone exige un renforcement du réseau social. Celui-ci est dysfonctionnel en cas de non-ouverture aux autres sauf pour les loisirs (écoute des chansons, divertissement solitaire…). Il faut alors au moins un autre appareil pour qu’il y ait un récepteur quelle que soit la nature du message : verbal ou écrit.

Par extrapolation à la vie malgache, chaque membre de la famille doit en disposer pour rester en connexion. Considérons une famille de quatre membres, nous pouvons déjà imaginer le coût de revient pour leur fonctionnement ne serait-ce que les coûts de recharge.

D’un coté, c’est un caprice qui dépense beaucoup d’argent, donc renforce la pauvreté. Ainsi, le téléphone divise la société en deux vastes camps ennemis, en deux grandes classes diamétralement opposées : la bourgeoisie et le prolétariat. Ce n’est qu’un facteur d’aliénation. De l’autre coté, il est indéniable que l’existence du téléphone au sein de chaque ménage est un signe de « développement : un processus d’accomplissement humain social »79 . Il réduit l’espace, le temps et bien plus l’écart entre la couche la plus aisée et celle défavorisée. Tout le monde peut en jouir quelle que soit la marque de l’appareil.

O- Un outil détourné de ses fonctions

D’un autre point de vue, suite à la généralisation de l’insécurité qui sévit dans toute la société actuelle, la perte de téléphone ne constitue plus une surprise pour les victimes (27,75% ont du d’en acheter au moins une fois dans leur vie). Peut-être, ce cas permet la recrudescence des ventes illicites et du secteur informel de cet appareil tout

78 MARX K., le capital , Paris, éd Verlag Von Otto Meisner, 1867 79 RANAIVOARIVONY GP , Op cit.

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au long de la rue. Néanmoins, racheter un signifie dépenser encore et une dépense équivaut à une perte pour l’économie du ménage.

En concluant hâtivement, le téléphone en tant que capital culturel objectivé revêt un double sens économique. Il est présent dans la société pour distinguer les riches et les pauvres, pour accumuler du profit (société productrice ou importatrice) et justifier la perte (société consommatrice). Aussi, l’émergence du téléphone, conjuguée avec la chute vertigineuse du prix des appareils est-elle une chance pour la société pour s’uniformiser du point de vue extérieur.

Section 11 : Approche altermondialisante « La famille : un terrain propice pour la mondialisation »

Des progrès technologiques ont transformé la manière dont nous faisons les affaires, nous communiquons, nous vivons. C’est ainsi que « l’évolution des techniques et celles des structures sociales sont souvent présentées dans une relation de causalité »80

Nous avons déjà présenté que nous vivons dans une société de consommation mais aussi de l’information (MATELLART A .). Ce sont les deux aspects que la mondialisation veut s’imposer à la planète pour que toutes les relations humaines se transforment en relations commerciales de types client-fournisseur.

P- En fait, qu’entend-on par mondialisation ?

Jusqu’à ce jour, le terme mondialisation fait preuve d’objet de controverse. Chaque acteur le définit et l’appréhende selon ses logiques profitaires.

SISMONDI définissait déjà ce que l'on appelle mondialisation dans ses Nouveaux Principes d'économie politique (1819) : « Le genre humain ou toute cette partie

80 ENRIQUEZ et LEVY A. , les nouvelles technologies pour quel changement ? , Paris, éd Épi ,1982

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du genre humain qui commerce ensemble et qui ne constitue plus en quelque sorte qu'un seul marché »81 .

En 1919, JOHN MAYNARD KEYNES citait la mondialisation d'avant-guerre en écrivant dans Les Conséquences économiques de la paix : « un habitant de Londres pouvait [en 1914], en dégustant son thé du matin, commander, par téléphone, les produits variés de toute la terre [...] et s'attendre à les voir bientôt déposés à sa porte ; il pouvait, au même instant, et par les mêmes moyens, risquer son bien dans les ressources naturelles et les nouvelles entreprises de n'importe quelle partie du monde [...] »82 . Les nouvelles technologies d'alors (téléphone et télégraphe) représentaient la fameuse « mort de la distance »83 désignée par comme l'élément constitutif de la mondialisation.

Néanmoins, l'utilisation du terme en tant que tel s'est généralisée dans les années 1980, à une époque où les contraintes liées au développement des échanges commerciaux et financiers entre économies nationales sont devenues plus fortes et ont réduit les marges de manœuvre des politiques économiques des États.

Dans sa publication annuelle Les Perspectives de l'économie mondiale, le Fonds monétaire international ( F.M.I.) définit la mondialisation comme « l'interdépendance économique croissante de l'ensemble des pays du monde, provoquée par l'augmentation du volume et de la variété des transactions transfrontières de biens et de services, ainsi que des flux internationaux de capitaux et [...] la diffusion accélérée et généralisée de la technologie ».

Mais, elle rejoint à l’hypermodernité qui n’est que « la phase de la modernisation des sociétés ayant amplifié à l’extrême les dynamiques en cours depuis le moyen-âge »84 .

Selon la conférence de Jomtien, la mondialisation implique l’accroissement des interdépendances des pays et des individus. Ainsi, elle renvoie à la

81 SISMONDI, nouveaux principes d’économie politique , Paris, éd Jeheber, 1819 82 JOHN MAYNARD KEYNES, théorie générale de l’emploi, de l’internet et de la monnaie , Paris, éd Payot, 1919 83 FRANCES CAIRNCROSS, The Death of Distance , Boston, éd Harvard business School Press, 1997 84 ASCHER F ., la société hypermoderne , Paris, éd de l’Aube, 2004

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diversification des individus par le biais de l’accès aux NTIC, mais aussi à l’uniformisation du peuple par l’influence des flux commerciaux et culturels.

Quant à BOURGEON D 85 ., il la définit comme le développement des NTIC et qui entraîne une diversification des activités du champ culturel et leur interdépendance croissante avec le reste de l’économie.

S’agissant de BONJAWO J 86 ., la mondialisation n’est que l’émergence de la nouvelle économie de l’uniformisation au niveau mondial suite aux changements révolutionnaires du domaine de la science et de la technologie.

En bref, la mondialisation suggère l’abolition de diverses frontières prises dans leurs dimensions attractionnelles au profit de l’évolution technologies et du lien virtuel.

C’est pour cette raison que ENRIQUEZ (Op cit) fait remarquer que le monde assiste aujourd’hui à la troisième révolution industrielle où sont effectifs « la multiplication des médias, l’envahissement de l’informatique, la création de la biotechnologie ».

Q- Une société familiale occidentalisant

En réalité, il semble difficile pour la famille malgache d’ évoluer en dehors de cette fameuse mondialisation avec ses spécificités. Actuellement, le deshumain envahit la plus petite institution sociale. Nous avons appris dans le FKT 1 que 42,08% des enquêtés disposent du poste téléviseur, 78,17% de la radio, 92,00% du téléphone dont l’usage principal consiste en la satisfaction symbolique du manque relationnel.

A cet égard, 64% des enquêtés sont déjà habitués à tisser une relation virtuelle via les différentes émissions radiophoniques ou télévisées. Il y a en même certains qui disent que cette relation se renforce de plus en plus suivant la fréquence des dédicaces. Mais que ce soit radio, poste téléviseur ou téléphone, qui est-ce qui n’est pas fruit de la mondialisation et

85 BOURGEON D, Op cit. 86 BONJAWO J, l’internet : une chance pour l’Afrique, Paris, éd Kartala 2003

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lequel d’entre eux n’assigne pas « l’effacement du corps »87 , constituant le devise de ce courant ?

Ce qui prouve que la famille même, par sa consommation excessive en produits technologiques constitue bel et bien un terrain propice dans l’effectivité de la mondialisation. Mais, que l’on veuille ou non, le développement de la technologie va de pair avec celui de l’imaginaire social concrétisé par différentes maux et anomalies sociaux, faisant l’objet de la dernière présentation.

Section 12 : analyse sociologique

« le changement de la nature du lien intrafamilial est une source du dysfonctionnement social »

La famille à travers ses droits et obligations morales constituent par excellence un lieu d’intégration de l’enfant. C’est au sein de laquelle que le futur être social initie et apprend d’une façon reproductive les valeurs sociales. Mais, il y essaie déjà de prendre part à la protection du patrimoine culturel, du latin patrimonium qui désigne « le bien commun d’un groupe humain, considéré comme un héritage transmis de génération en génération » ( BOURGEON D ). Ici, nous parlons du patrimoine culturel immatériel tel que la représentation sociale, les pratiques dont le fameux Fihavanana en fait partie intégrante. D’ailleurs, « le fihavanana devrait être considéré comme humanitaire à protéger », dixit Pedro .

Par contre, « ces amitiés réelles sont plus rares »88 suite à l’évolution numérique qu’a connue le monde. Ainsi, la virtualité du lien familial a causé beaucoup d’anomalies sociales dont font partie :

87 REDEKER R ., Op cit . 88 RABENARIVO Soavelomandroso , Nos enfants, ces inconnus , Antananarive, éd Tsipika, 2001

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R- L’individualisation de la famille contemporaine

Elle débouche tôt ou tard sur la nucléarisation de la famille. Cependant, cette situation remet en question le principe de parenté prôné dans diverses expressions courantes comme « velona iray trano, maty iray fasana » ; « aleo very tsikalakalam-bola toy izay very tsikalakalam-pihavanana » ect. Depuis longtemps, la parenté est considérée comme « le socle fondamental de la vie sociale »89 . Ainsi, la communauté malgache assigne une grande importance à la présence physique dans toutes les circonstances d’où la raison d’être du « solon-tena » ou remplaçant dans les absences.(cf section 3)

S- L’agrandissement du fossé entre les générations .

Dans toutes les situations, ce sont les parents qui assurent la transmission intergénérationnelle de l’éducation. Certes, devant la dissolution ou la défaillance de la famille actuelle, les enfants se réfugient sous la protection d’un groupe de pairs qui lui comble en partie de leur besoin de reconnaissance, insatisfait de leur foyer.

En plus, c’est auprès de celui-ci que les enfants apprennent les manières d’agir et de faire. MEAD M le désigne par « culture cofigurative »90 Les parents qui sont « titulaires de droits et d’obligations, finalisés en raison de leur statut de parents »91 ; en sont privés. La situation la plus inquiétante consiste en l’inversion du rôle que commence à vivre la famille de nos jours. Ce sont les enfants qui donnent leçons aux adultes à cause de l’immensité du clivage référentiel connu par deux générations successives, voyons le cas de la manipulation des appareils technologiques.

T- L’inexistence de la vie privée .

Le but général de la mondialisation réside dans le fait que le monde reste un « village planétaire » où tout se connaît et s’interdépend ; car « nous tous, nous

89 PIERROT M ., Madagascar, la grande île secrète , Paris, éd Autrement, 2003 90 MEAD M. , fossé des générations , Paris, Ed Denoel, 1971 91 CATHERINE S. , les visites médiatisées pour des parents séparés , Paris, éd Harmattan, 2010

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sommes des conducteurs d’information »92 . Par contradiction, plusieurs procédés ayant trait au fonctionnement de la vie sociale font appel au principe de personnalisation. Voyons par exemple la carte d’identité nationale qui comporte chacune des numéros spécifiques, les chèques et papiers bancaires avec leurs codes, les mails et messages électroniques par le mot de passe…Ce qui fait penser que la société, malgré l’uniformisation universelle de la mondialisation, cherche à garder une vie privée.

Mais pourquoi vouloir cacher quelque chose si l’on ne fait rien d’illégal ? Justement, « c’est pour garder la vie privée parce que son respect est un droit d’avoir la paix, d’être libre » FABROT B . « la sécurité sur l’internet » (2001). D’ailleurs, le code civil dans son article 9 stipule que « chacun doit à sa vie privée »93 . A cet effet, les sentiments, l’histoire de la vie familiale ainsi que les comportements privés peuvent être personnellement gardés.

U- L’individualisation des êtres humains .

La démission parentale dans leur devoir débouche sur la participation majeure de diverses institutions telles que l’école, l’église, et même l’État. Pourtant, elle reste encore l’institution humaine à la fois la plus idéalisée et la moins prise en compte dans la société. A cet égard, les enfants n’appartiennent ni aux institutions ni aux familles, ils relèvent de la société toute entière.

92 REDEKER R . Op cit 93 FABROT B ., la sécurité sur l’internet , Paris, éd Horizons, 2001.

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C’est pour cela que le proverbe africain a dit que « il faut un village pour élever un enfant ». Par contre, cette fonction par excellence de la société a été réduite dans l’effectivité de l’utilisation des matériels informatiques tel le téléphone. Le silence et l’isolement sont désormais l’apanage des riches. Ce qui réfute l’argument d’’Aristote en disant que « l’homme est un animal social » et celui de Paul CHAUCHARD , lorsque l’auteur dit en substance « qu’un être social souffre toujours d’être isolé »94 . Voyons la manipulation des écouteurs pour toutes les catégories d’âge qui veulent se renfermer dans leur monde musical, distractif…en bref, solitaire. 70,83% de nos enquêtés en disposent pour s’isoler en cas de bruit mais aussi de solitude.

V- L’hypocrisie sociale . D’après les opérateurs enquêtés (43,33%), le téléphone fait partie du trouble conjugal. En tant que couple, la femme et l’homme se connaissent et ont le droit de tout savoir. Par contre, cette idée est fausse dans l’utilisation du téléphone. Chacun pense que c’est un « bien propre qui s’oppose à un bien commun tant en ce qui concerne sa propriété que sa gestion »95 . En effet, l’appareil est source de mensonge voire d’adultère. Quant à la société, rien ne remplace la relation face à face pour qu’on puisse se parler à voix vive. Dès fois, le téléphone est fait par hypocrisie, pour atténuer la lourdeur de l’erreur.

W- La généralisation de la pathologie sociale .

METAYER G . n’a-t-il pas raison quand il avance l’existence d’une « société, malade de ses communications » (1980) ? Actuellement, la plupart des individus vivent sous la dépendance de la technologie. De la vie, même à la conception (bébé in vitro…) à la mort exige la présence de ces matériels.

Ce qui est étonnant dans ce gigantesque changement, c’est que les produits technologiques ne se limitent plus du passé (enregistrement de récit de vie, de message important à titre de testament…) mais aussi se préoccupent du présent (catalyseur et accélérateur de la

94 CHAUCHARD P., sociétés animales et sociétés humaines , Paris, 3è éd PUF, 1970 95 SACRANO JP , Dictionnaire du droit patrimonial de la famille , Paris, éd Colin, 2008

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communication sociale….) plus encore ils se soucient de l’avenir en le prévenant (catastrophe…). C’est vraiment une nouvelle prévention médico-sociale ?

En dépit de sa force, la technologie ayant beaucoup transformé et mouvementé la vie familiale et aussi l’histoire du monde, présente ses limites comme l’ampleur de la fracture numérique, la dénaturalisation de condition de vie humaine, etc. Ces constats nous amènent au chapitre suivant dont la vérification des hypothèses fait l’objet.

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Conclusion partielle

Comme la sociologie est devenue, dans nos sociétés modernes, une science sociale autonome, ses concepts et analyses sont pratiquement passés dans le langage courant. Elle est par nature une science critique, visant à déduire ses méthodes par le truchement de la statistique, l’observation et l’entretien.

Ayant privilégié les méthodes susmentionnées dans l’étude de l’évolution du monde virtuel au sein des ménages préalablement choisis, la première phase de ce volet met en évidence les régularités tendancielles des citadins et des conurbains en matière de consommation technologique. En effet, tandis que l’appareil mobile a joué plusieurs rôles (social, économique, culturel…) pour les familles modernes, il n’a pas gagné sa juste place au sein de l’autre.

Néanmoins, nous ne pouvons nier que la consommation de la téléphonie mobile constitue d’ores et déjà un phénomène social total. Le nouvel « appareil social vital » a laissé des implications non seulement sur la conjoncture concrète, mais aussi sur l’imaginaire social. Comme un symbole de richesse, de savoir, …, le téléphone creuse davantage le fossé social.

Cette critique sera plus approfondie et personnalisée dans la dernière partie de ce mémoire. En tant qu’apprenant-chercheur, force nous est d’avancer nos propres interprétations à la problématique avant de nous lancer aux essais de perspectives qui closeront définitivement ce travail. Tels sont l’objet de la partie qui suit.

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TROISIEME PARTIE :

« VISION PROSPECTIVE POUR UNE NOUVELLE ÈRE COMMUNICATIONNELLE »

« Chercher à en savoir plus pour prendre la bonne décision.

A défaut, éviter la plus mauvaise » PETR Christine

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Introduction partielle

En ce XXIème siècle, les moyens de communication et d’information se multiplient et grâce aux découvertes scientifiques, l’homme est arrivé au stade de l’audio- visuel qui survalorise « une société de savoir et de communication » (MATTELART A.) .

Nous avons constaté dans la partie analytique que la société longtemps hiérarchisée par l’appartenance socio-économique de ses membres admet actuellement un nouveau critère : celui de la consommation en NTIC. Consommation inclut ici la possession, la manipulation ainsi l’appropriation des appareils électroniques. A cet effet, les couches défavorisées constituent un des groupes les plus réticents à l’égard de la technologie. Cela s’explique fort bien tant par leur situation socio-économique que par leur position culturelle. Par contre, les couches aisées connaissent une forte dépendance électronique. Ce qui revient à dire que les NTIC leur sont « un moyen de répression »96 (MARX K .) aussi bien pour l’information que pour l’expression. L’instinct grégaire (instinct qui pousse l’homme ou les animaux à s’assembler en perdant momentanément toute l’individualité) entre en jeu dans leurs conditions existentielles.

D’une manière évidente, l’insertion des NTIC parmi les instruments d’intégration sociale voire internationale a brusquement changé le rapport riche/ pauvre, élite/ masse, enseignants/enseignés…. Un changement structuro-fonctionnel a été constaté au sein de toutes les institutions vivantes (famille, école, État…) C’est la raison pour laquelle le contenu de cette dernière partie se penche beaucoup sur les perspectives d’avenir dont les sources sont le chercheur (section 15), la société via l’église catholique et l’UNICEF (section 16) ainsi que les enquêtés classés suivant leur appartenance fonctionnelle ou géographique (section 17).

96 MARX K ., le capital , Paris, éd Verlag Von Otto Meisner, 1867

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Chapitre 6 :

RATIONALISATION A OUTRANCE COMME UNE ÉPÉE DE DAMOCLÈS

De temps en temps, l’homme cherche à avoir une vie plus confortable dépourvue d’un effort physique. Dans ce cas, il essaie de dominer au maximum son environnement voire son monde idéel. Dans les pays développés, cette scientifisation à outrance a eu des objectifs très spécifiques et mesurés ; par contre, les pays en développement ne font qu’en consommer aveuglement sans se poser des questions. Et cette attitude leur prive de l’essence de l’humanité et de l’intelligence. Néanmoins, cette forme d’addiction 97 revêt toujours un caractère positif ou négatif selon les victimes. Pour les uns, avons-nous dit, elle est bénéfique mais pour les autres, on ne constate que des inconvénients tels que notre cas dans la consommation en téléphonie mobile.

Section 13 : Dimension technique, économique et sociale

D’une manière à l’autre, on ne peut pas nier que l’émergence de la technologie est un signe de progrès pour la société. On a évoqué ci-dessus l’aspect positif et négatif de ces moyens. Personnellement, nous constatons trois caractéristiques majeures sur la présence du téléphone au quotidien :

A- Il accélère la transmission mais détourne le contenu du message

Que l’on veuille ou non, la société du XXIe siècle est une société de l’information qui circule à grande vitesse via les différents moyens de communication. C’est pourquoi, on qualifie l’information comme un « savoir collectif »98 . Néanmoins, dans la plupart des cas, cette information se diffuse d’une manière involontaire et se détourne quelques fois de la réalité comme le montre le schéma ci-après.

97 VALLEUR M. Op cit. 98 SCHUDSON M., le pouvoir des médias , éd Horizons, 1995

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Figure 3 : transmission téléphonique d’un message

LOCUTEUR Appel 1

Relation directe (à voix vive)

Message intégral (bien structuré ou détaillé) : intonation nette (question, sentiment…), description originale, injonction stratégique et formelle (accord entre les deux) Appel 2

Relation semi-directe : discours rapporté « on m’a dit que… »

Message partiel : intonation faible, description moins détaillée mais plus attirante (invention des vocabulaires), injonction impérative Appel 3 Relation distanciée « paraît-il que… » et rumeurs

Message quasi-détourné de la réalité : pas d’intonation, information détournée de l’originale, injonction totale.

Source : travail personnel, 2013

En effet, par l’insuffisance ou la mauvaise qualité du réseau, le malentendu de l’interlocuteur, ou tout autre bruit, le message peut être mal transmis et mal compris. Dès fois, on jongle avec des mots ne serait-ce qu’à travers la homonymie. Et plus, il y a l’intention de l’interlocuteur à inventer quelque chose pour rendre la conversation ou le message plus attrayant.

Certes, ces incidents entravent non seulement le récepteur mais aussi tous ceux qui sont concernés par l’information. Du point de vue conjugal par exemple, il est déclaré pendant l’enquête que la plupart des désaccords (47,80%) au sein du foyer sont dûs à des malentendus durant la conversation téléphonique.

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A- le téléphone est pur et simple un usage économique

A vrai dire, le téléphone comme non seulement un produit mais « un agent de la mondialisation » 99 est incontournable à la logique du marché, c’est-à dire du profit. A travers les publicités ainsi que les marketings faits par la société productrice, elle investit des « capitaux culturels mais plutôt économiques »100 , capital culturel en ce sens que ces moyens sont tous porteurs d’idéologie 101 par excellence et capital économique du fait que leur objectif final consiste en la recherche de la plus value. Ainsi, de l’achat à la réparation ou mode de fonctionnement (crédit, achat d’accessoires,…), un calcul économique est fait.

Sans avoir l’intention à cet aspect économique de l’usage du téléphone, la société consommatrice comme la nôtre en utilise beaucoup dans le quotidien. Cependant, des pertes et bénéfices sont toujours enregistrés de chaque côté pour une seule vente d’un appareil mobile. Voyons ce que montre la figure ci-après.

Figure 4 : l’aspect économique du téléphone

Achat d’un Accessoires : -électricité, - Achat de appareil puce, -carte mémoire recharge

ARGENT ARGENT ARGENT

PROFIT DES

Producteurs Sociétés intermédiaires Distributeurs

Dépense des utilisateurs ou

consommateurs

Source : travail personnel, 2013

99 Journal des anthropologues, 2012 100 BOURGEON D ., Op cit. 101 BAKTHINE, Op cit.

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A cet effet, on pense que l’usage du téléphone fait aussi partie des facteurs qui aggravent notre pauvreté. Il n’est pas un besoin fondamental de la société vu que les membres réclament jusqu’à maintenant la présence physique et un contact charnel. Voyons le résultat d’enquête (cf. section 6) qui affirme qu’à l’instar des affaires de grosse somme, des discussions à caractère intime, de la vie privée, etc. la discussion ne fait jamais l’objet d’une conversation téléphonique. Ce qui permet de le classer comme un caprice de dépense car au moins les coûts y afférents peuvent combler en partie nos besoins.

B- L’utilisation du téléphone débouche sur la classification catégorique de la société

Ici, c’est la société même qui est classée de moderne ou de traditionnelle dans son attachement aux différents produits technologiques dont le téléphone fait partie. Seulement, le fait de dire moderne désigne et sous-entend les couches aisées et les élites tandis que celles défavorisées se caractérisent par la primauté de la tradition et la nécessité d’une « resocialisation à partir des NTIC » ( LAZAR ). Voici un tableau résumant cette catégorisation.

Tableau n°16: classification de la société par rapport à la consommation téléphonique

CRITÈRES COUCHE AISEE COUCHE DEFAVORISEE Position vis-à-vis Partisans voire même Opposants ou amateurs du téléphone dépendants Pourcentage Taux élevé voire la totalité de Taux faible excepté des diffuseurs la population (collaborateurs de la couche bourgeoise) Appareil utilisé A fonction multiple, dernier Simple, les moins chers revêtant cri, « gamme », « top », l’aspect utilitariste, « foza », « oay « luxe »… oay », « tapa-mofo »… Nature de la Communication ouverte et Communication jalouse et adversaire relation collaboratrice Côté social Expression de rapport de Appareil de séduction, de force, d’habileté technologique divertissement et de conformisme et de distinction sociale Point de vue Création du profit Charge improductive économique Apport Moyen d’ouverture, de Moyen d’exhibitionnisme et intellectuel recherche et d’expression d’égocentrisme Source : travail personnel, 2013

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En fait, le « relâchement du lien social » ( DURKHEIM E .) que l’on veuille ou non aboutit à celui de la famille. La famille fait partie constituante de la société. Elle incarne les diverses normes que cette dernière lui impose déjà.

Ce sont les habitudes ainsi que les manières de vivre apprises par chaque individu au sein de son foyer qui lui poussent à agir de telle ou telle façon sans pour autant trop s’écarter de la valeur ou savoir commun.

Par contre, « la famille étant l’institution humaine à la fois la plus idéalisée et la moins prise en compte »102 connaît de temps en temps un déséquilibre relationnel vis-à-vis de ses membres à cause du décès, défaillance psychologique, travail, relation extraconjugale des parents. En plus, la notion du divorce constitue un phénomène social total laissant ses impacts non seulement au niveau de la famille mais aussi de la société. Certes, lorsque ce lien conjugal est rompu ou de mauvaise qualité, il y a une forte ouverture à toutes les déviances, confusions de rôle voire la déstructuration psychique de l’être en devenir. En d’autres termes, « les liens qui nous attachent les uns aux autres assurent notre place intergénérationnelle, notre sentiment d’appartenance ainsi que notre sécurité intérieure »103 . A cet effet, on pense que c’est à la famille, elle-même qu’il faut apporter du soutien pour que la technologie définie comme « créateurs de valeurs informationnelles »104 (WACKERMANN G. ) lui soit bénéfique mais non un moyen de déstructuration. Ensuite, quelques recommandations vont à l’encontre de la société surtout aux élites dans le but de sauver les futures générations de cette impérative mondiale.

En bref, l’utilisation du téléphone dans le contexte malgache où la totalité de la population n’est pas encore en mesure de la rationaliser renforce davantage non seulement les problèmes économiques de chaque ménage mais aussi les valeurs communes de la société. Ce constat nous amène à la partie qui se livre à la résolution personnelle de ce problème.

102 OTT L. , travailler avec les familles , Paris, éd ères, 2010 103 SAVOUREY M., re-créer les liens familiaux , Lyon, éd Chronique, 2008 104 WACKERMANN G. , la logistique mondiale : transport et communication , Paris, éd Marketing, 2005

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Section 14 : critique constructive

La solution avancée consiste beaucoup en l’amélioration de la condition de la vie familiale qui nous semble trop paralysée par les progrès technologiques. A cet égard, nous proposons que : A- Il faut une famille requalifiée Qui prétend ne pas avoir rêvé une famille idéale pour faire face à cette vie trop mouvementée ? Voici un tableau soulevant les différences entre la famille idéale et celle réelle pour une dizaine d’enfants âgés de cinq à quinze ans.

Tableau n° 17 : conception de la famille Famille réelle Famille idéale

• Vit dans une crise sur tous les plans • S’engage psychologiquement • Pauvre et esclave de l’argent • Source de bonheur, de paix, de • En quête permanente du bonheur sécurité… économique • Riche et doté d’un travail décent • Oublie dans la plupart des cas ses • Soignante et assume ses devoirs devoirs (civisme, politesse, • Responsable envers les enfants discussion…) • Composée d’un père et mère • Ne se voit que dans un peu de temps officiellement déclaré dès fois seulement pour se critiquer • Accorde plus d’importance à l’argent qu’à la progéniture

Source : enquête personnelle, 2013

Voyons d’après ce tableau que même les petits, ils ont déjà leur aspiration et conception de la famille qui peut combler leurs besoins apparemment insatisfaits de la situation actuelle. Dans cette même logique, MICHELLE SAVOUREY 105 a proposé huit besoins des enfants qui méritent d’être comblés pour qu’ils grandissent normalement. Ils sont plutôt d’ordre psychologique tels que :

 besoin d’être écouté et entendu ;  besoin d’être tenu suffisamment informé à la mesure de leur maturité ;  besoin d’être compris dans les réactions et sentiments ;

105 SAVOUREY M., Op cit.

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 besoin d’être encouragé et soutenu quand les sentiments sont difficiles à exprimer ;  besoin d’être protégé des enjeux relationnels ;  besoin d’avoir le droit à des sentiments contradictoires ;  besoin d’être respecté dans leur propre rythme et enfin  besoin d’être encouragé dans l’expression de leurs besoins spécifiques.

Et cette liste nous permet de confirmer le résultat de l’enquête concernant la famille idéale car la plupart des enquêtés veulent que celle-ci soit psychologiquement engagée. De toute façon, on est quasi en sécurité chez soi, c’est pourquoi les malgaches disent que « mamy ny mody ».

En revanche, la donne a totalement changé. Nombreux sont les problèmes à affronter dans la famille. Du côté des parents, on en a beaucoup évoqué, mais du celui des enfants, on a l’alcoolisme, la drogue, la fugue… qui sont en réalité accentués par « le fossé de la génération »106 en termes de communication. Pour tout cela, il faut :

a) une reparentalisation

Faut-il encore rappeler qu’ « en naissant, un enfant transforme deux adultes en parents »107 ? En effet, les parents ne doivent être ni démissionnaires ni abandonnés comme ce que l’on a constaté chez la famille d’antan. Ils sont par leur statut acquis un engagement envers leurs enfants. Ainsi, dans le quotidien doivent être :

- modèles comportemental et décisionnel car l’imitation s’avère la première nature des enfants et ce sont auprès de ces « être-là »(EDEGUEUR ) qu’ils commencent à savoir et imiter le monde extérieur ;

- responsables de soi et de ses actes vis-à-vis de leurs petits , car c’est un critère d’un vrai adulte ;

- autoritaires mais non pas dominants , c’est-à-dire les parents doivent faire preuve d’une compétence en matière de directives. Pour ce faire, il faut récompenser l’enfant au moment

106 MARGARET M . Op cit. 107 DOLTO F ., paroles pour les adolescents , , Paris, éd Gallimard , 2003

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où il le faut (après avoir rendu un service, en cas de réussite…) mais aussi le punir si c’est nécessaire (désobéissance, bêtise…) ; en réalité, ce sont les parents eux-mêmes qui exposent leur enfant au pire en le gâtant excessivement. Mais, « zaza tiana tsy itsitsiana rotsan-kazo » dit la sagesse locale. Il ne faut quand même de l’abus du pouvoir car « la violence est toujours signe d’impuissance » (GANDHI).

b) une communication intergénérationnelle

En général, les parents essaient d’enfermer au maximum leur enfant. Il semble qu’ils ont peur de leur ouverture qui peut entraver l’intimité de la relation familiale. Ils ont peur que leur enfant leur dénonce un jour après avoir comparé et appris quelque chose de nouveaux chez leurs pairs. Peut- être aussi, c’est dû au complexe d’Œdipe non résolu que certains enfants s’attachent à leur parent le plus longtemps possible. Par contre, il ne faut pas oublier que l’adolescence qui est un passage séparant l’enfance et l’âge adulte ; elle se ressemble ainsi à « une seconde naissance » 108 qui remet en cause plusieurs structures. Elle est par excellence une période d’ouverture qui se ferait progressivement. Ainsi, cette mutation exige le fait de quitter peu à peu la protection familiale pour celle de la société.

Pour que cette ouverture soit normale, quelques bagages (les trois savoirs) concernant la vie méritent d’être acquis par un adolescent :

- le savoir vivre est donc primordial. Ce type relève des règles de la vie sociale, le respect du consensus social.

Dans la société, il existe des normes et valeurs qui régissent l’interaction sociale. Ce sont des catégories, des tableaux de pensée qui ne sont pas des représentations exactes de la réalité mais, qui, pour les besoins de la recherche, accentuent délibérément certains traits. « L’idéal type »109 :

- ne reflète pas le réel mais facilité l’analyse de ses composantes ; - n’a pas pour seul usage l’analyse de contenu et de l’orientation des formes sociales ;

108 DOLTO F ., Op cit. 109 WEBER M ., essai sur la théorie de la sociologie , Paris, éd Plon, 1965

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- ils prennent également de déceler des causalités ;

Et les quatre idéal-type fondamentaux sont :

• l’action traditionnelle, • l’action affective ; • l’action rationnelle en valeur et • l’action rationnelle en finalité.

Celui-ci est résumé par la notion de la « conscience collective . »( DURKHEIM E. )

- le savoir faire est aussi nécessaire . Ce deuxième type se rapporte aux techniques, à la technologie et prend de plus en plus une place au niveau de la communication, de la médicine, des NTICs… C’est alors l’intelligence et la capacité d’abstraction du monde dans le but d’améliorer voire de rendre confortable la vie humaine.

- le faire savoir est utile . Ceci est axé sur la pédagogie, donc demande une certaine capacité et compétence. Elle désigne la manière adéquate d’inculquer ou d’intérioriser des statuts.

- Nous avançons enfin le savoir relationnel qui n’est pas moindre cependant la plupart des parents en sont démissionnaires. Rares sont les parents qui tissent une communication ouverte avec leurs enfants en ce qui concerne l’amour, la sexualité…Par contre, ils sont avides d’en informer à cet âge, avons-nous dit. Et justement, c’est pour combler ce vide informationnel que bon nombre d’adolescents sont devenus accros au téléphone qui à son tour risque de les mal informer, d’où la recrudescence des actes relatifs à la masturbation, le viol, la pédérastie, l’homosexualité, etc.

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C- Il faut une société engageante et engagée

On vient de mentionner que la structure ou le fonctionnement d’une société à laquelle un individu appartient peut déterminer non seulement l’image mais aussi le comportement de celui-ci. A cet égard, les enfants n’appartiennent ni aux institutions telles que l’école, l’église… ni aux familles ; plutôt, ils relèvent de la société toute entière. « Il est inutile ainsi de renvoyer sans cesse des injonctions éducatives qui, de toute façon, semblent dépasser beaucoup les possibilités réelles des familles d’aujourd’hui »110 . Au contraire, pour l’inconduite de l’un de ses membres, il faut la mise en application de la punition collective pour obliger le groupe à exercer des représailles plus dures et plus efficaces : c’est l’apport extrafamilia l. Chacun se construit en fonction de son entourage culturel et éducatif. Pour cela, il faut que :

1) la société soit engageante

En bref, Madagascar est une île de consensus. De la famille à la plus grande institution (État), on en cherche et parle toujours.

Avant même que la nouvelle administration occidentale soit implantée dans le pays, les villageois appliquent le Dina dont la considération était unanime. Tout le monde s’y soumet et la vie sociale fonctionne. Chacun assume ses rôles en fonction de son statut, ainsi, les parents et les personnes âgées qu’ils soient membres de la famille ou non sont source d’éducation verbale, gestuelle, morale, comportementale, expérientielle,… et les cadets reçoivent ces éducations. C’est pourquoi, pour un jeune homme ou femme qui va se marier par exemple est tout d’abord jugé par son groupe d’origine et puis de ses ascendants.

Plus tard, autrement dit à l’époque de la royauté, RANAVALONA avait ce qu’on entend par le code des 305 articles. Celui-ci étant plus institutionnalisé régit la société entière. Homme et femme, adulte et jeune le respectent et les enfants ont un vrai modèle à suivre. Ce qui ne nous étonne pas s’ils arrivent à collaborer dans les travaux immenses à l’instar de l’irrigation du Betsimitatatra ; puis partagent tous le même sentiment d’existence. L’entraide via « le fihavanana » ainsi que le « valin-tanana » constitue leur

110 OTT L., Op cit

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culture identitaire. Ils se soucient beaucoup de l’avenir de la future génération. On en constate à travers le dicton « izay adala no toa an-drainy »… Ainsi, ils cherchent à avoir une bonne progéniture en ce sens que celle-ci portera et élèvera le nom patrimonial.

Depuis la période coloniale à nos jours, on a diffusé le modèle occidental en matière d’administration. S’agissant de l’État, on a la loi, la constitution…qui régissent globalement le pays. Elles s’avèrent rigides car la transgression fait l’objet d’une détention voire d’un emprisonnement. Quant aux différentes institutions, on a le règlement intérieur et la discipline dont le non respect débouche sur un renvoi ou l’exclusion de l’auteur. On constate pour ce dernier aspect que les sanctions sont presque destructives par contre le contenu de ce qu’un individu doit suivre ne lui est même pas demandé, ce qui veut dire que c’est une contrainte pour lui. Sachant que l’humain accepte car il le veut soit par peur soit par conformisme mais un jour, il se sent trop contraint, le seuil de la tolérabilité lui est dépassé, il s’éclate et c’est la catastrophe totale. C’est le cas de la fugue, suicide, divorce, etc.

Tout cela nous permet d’avancer que face à cette imposition de la mondialisation, cette « révolution culturelle »111 qui est irréversible, notre génération a besoin d’un modèle collectif. Il semble que les enfants se perdent dans cette contradiction existentielle , à la maison, ils se sont obligés de faire ou de suivre une telle ou telle règle ; à l’extérieur, tout le monde (amie, média…) lui incite à le faire ? Où est-ce qu’ils vont ? Ainsi, il importe que la société soit :

 disciplinée et homogène, c’est-à-dire quand c’est interdit, il le faut pour tous que ce soit adulte ou jeune ;  unifiée et exprime un sentiment national pour l’avenir des futurs ;  éducatrice car quoiqu’on dise, les moyens de communication conjuguée avec le développement incessant de la technologie débouchent sur une maturation précoce de la génération actuelle. Il faut alors qu’elle la prenne en charge ;  conservatrice de la culture identitaire étant donné que ce problème d’acculturation est le fruit de la dévalorisation de la culture locale. Il faut toute une société pour la

111 RANDRIANTSIFERANA , les mass médias dans le monde urbain , mémoire de maîtrise, département de sociologie, 1984

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valoriser par l’organisation des concours, spectacles gratuits ou appui pour les artistes par exemple. 2) La société est engagée

Par opposition à l’ancienne communauté, notre société s’est fortement individualisée. Chacun est vraiment pour soi. L’isolement ainsi que la concurrence font partie de nos devises : c’est le modernisme. Néanmoins, notre société est dite hybride.

 traditionnelle au sens que jusqu’à aujourd’hui, on veut d’une manière ou d’une autre l’appui de l’autrui sur toutes les formes (conseil, prêt…). Si une affaire commence à s’aggraver, on procède à l’accord à l’amiable en vertu du « Fihavanana »112 , ou du moins de la malgachéïté. En cas de difficulté ou autre, on se retourne à la prière, aux divers us et coutumes (sorcellerie, cultes aux ancêtres…).  Moderne au point qu’on cherche maintenant à se détacher du commun (souci d’apparence, intérêt à la célébrité et à l’intellectuel…) ; on occidentalise le quotidien (manière de manger, de parler, de faire…). On consomme beaucoup les produits manufacturés et la technologie. Le raisonnement des capitalistes dans la recherche des profits commence à gagner du terrain avec tout qui se vend et s’achète actuellement. Ici, 1EF4 nous a révélé que « du travail aux cérémonies, je tâche à soigner ma fémininité en cherchant ce qui est original. Je consulte toujours mon styliste tant pour les linges de maison que pour les habits vestimentaires. Moi, j’aime la création unique ». Seulement, il est à remarquer que c’est une femme qui se marie avec un indien. A cet égard, on a du mal à comprendre notre société. Cependant, il ne faut pas nier que Madagascar est encore un pays sous développé, sous entendu traditionnel.

Donc, la collaboration reste encore un moyen pour se sortir de cette impasse. On demande alors à nos élites de s’engager pleinement envers sa nation. Il est de même juste qu’elles lui doivent quelque chose : c’est la redevabilité citoyenne. Pour ce faire, nos intellectuels dans le domaine de la technique ou technologie auraient du :

112 OTTINO P ., Op cit

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 travailler fort pour limiter l’accès des mineurs aux productions culturelles dévalorisantes à l’instar de la pornographie, les groupes des bandes… En fait, les informaticiens arrivent à détecter et cibler à partir de quelques renseignements les utilisateurs d’un appareil, donc, il faut procéder de cette même manière pour les biens de la descendance ;  atténuer les effets biopsychologiques du téléphone. Il est dit que la radioactivité émise par cet appareil dégénère totalement les neurones, et c’est pareil pour la vibration qui paralyse les nerfs et les sens. Il est alors strictement nécessaire de les atténuer car la non-utilisation de ce mobile semble inimaginable vu l’augmentation incessante des effectifs du consommateur ; il y en a quelques uns qui sont devenus accros ;  organiser diverses portes ouvertes ou manifestations relatives aux nouveautés et découvertes semblant positives pour le pays. Sur ce point, la technologie ne sera pas l’apanage des couches aisées et les intellectuels, mais au contraire, la connaissance peut être à la portée de tous d’où la démocratisation de la technologie et des informations.

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Chapitre 7 :

QUEL AVENIR POUR LA FAMILLE DE DEMAIN ?

Pourquoi cherche-t-on du confort et des moyens pour ne pas trop dépenser l’énergie humaine ? C’est seulement parce qu’on veut allonger au maximum l’espérance de vie ? Et cette longue chance de vie, c’est notre demain. Nous ne pouvons ainsi garder les bras croisés face à la modernité qui est censée être le facteur indispensable pour un meilleur avenir. Que devons-nous faire alors ?

Section 15 : engagement des tierces parties

Tout d’abord, nous désignons par « tierses parties », toute institution qui n’est pas engagée directement dans la réalisation de cette recherche, c’est-à- dire qui ne fait pas partie de la population d’enquête. Il s’agit des organismes, des églises, les écoles, etc.

Nous avons mentionné que l’un des changements les plus marquants de cette décennie est la propagation généralisée bien qu’inégale des NTIC. Cette passionnante évolution ouvre de nouvelles voies vers la transformation des méthodes d’apprentissage, de l’innovation…En effet, les mass médias définis comme « avènement puis diffusion des techniques modernes de communication »113 contribuent essentiellement à la démocratisation de la culture qui fait de l’enfant un adulte précoce et des adultes, des enfants attardés. Donc, le monde mondialisé, on assiste non seulement à une inversion des rôles mais aussi à une complexification interactionnelle. Les générations se communiquent rarement et se comprennent mal. Sachant que la « génération numérique »114 est celle qui est née après 1980 a eu un répertoire communicationnel universel, dont le mot d’ordre est « l’information mais non la communication ».

113 FERREOL G ., dictionnaire de la Sociologie , Paris, éd Colin, 1995 114 UNICEF, l’adolescence : l’âge de tous les possibles , 2011

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C’est pourquoi, la famille de nos jours est celle qui loin d’être idéale qui favorise la relation et la communication physique. Elle prend la forme d’une famille qui nous présente ce tableau.

Tableau n°18 : types de famille du XXIème siècle Type Caractéristiques

P : chef de l’établissement ou le directeur qui impose les disciplines à suivre et prend la décision en cas de sanction ou renvoi

M : éducatrice ou enseignante qui se soucie dans la majorité des cas de ses rentabilités à la fin du mois et non de école l’avenir de ses subordonnés

E : élèves qui sont contraints de travailler et de faire semblant d’être gentilles et obéissants

Un endroit qui se ressemble à un hôtel où chaque membre ne doit pas forcément avoir des relations. Chacun arrive pour se détendre et sort pour rejoindre ses préoccupations. pension Le fonctionnement se réfère au passé. les parents éduquent leurs gendres selon la manière dont ils sont éduqués (conte, légende), la modernité connaît une limité infranchissable musée L’argent est le but principal de chaque membre. Les parents évoquent toujours la notion de business et de rentabilité à toute sorte de discussion. Les enfants s’y conforment en le réclamant en contre partie d’un service quelconque usine L’apparence extérieure occupe une grande place au sein de la vie familiale. Le père avec leur ‘vendredi magnifique et ses amis’, la mère avec la tendance vestimentaire, les enfants et les technologies salon P : chef de corps qui ordonne sans commentaire

M : chef de service qui transmet l’ordre et donne l’audience pour toute discussion avec le père

E : exécuteurs qi doivent mettre en considération les hiérarchies implicites caserne P : commissaire dont seule la présence soulève la loi et la prison

M : l’enquêtrice à qui l’hésitation et les contradictions font l’objet d’une preuve tangible pour une punition

E : les criminels qui en général n’ont pas raison commissariat L’environnement familial est exposé à la grossièreté et aux maux. En effet, ni la franchise ni la confiance n’ont trouvé de place enfer Notion de collaboration (tâches ménagères, travail d’école, partage…)

Notion de protection (foyer de droit et de devoir) idéale

Notion de discussion (compréhension mutuelle)

Source : conférence-débat CFAF, 2013

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En bref, l’église surtout catholique suppose redonner la valeur de la famille d’aujourd’hui en organisant les « écoles des parents » qui consistent à informer les cibles sur la demande éducationnelle vis-à-vis de l’invasion numérique. En plus, elle insère dans le programme depuis l’année scolaire 2010-2011 une matière intitulée EVA (Éducation à la Vie et à l’Amour). Cette matière ne consiste uniquement à l’éducation morale mais aussi sexuelle car cette dernière forme est délaissée par de nombreuses familles.

S’agissant de l’organisme international, plus précisément l’UNICEF, il s’efforce de mener sa part dans cette lutte collective. Comme les médias, abréviation du néologisme mass médium né aux EU 1923, qui signifie au milieu, « intermédiaire entre deux parties »115 (Mc LUHAN ) ont rempli plusieurs fonctions qui sont :

 « fonction de surveillance qui collecte et diffuse l’information tout à l’intérieur qu’à l’extérieur des sociétés ;  fonction de mise en relation des parties de la société dans l’interprétation de l’information et à la prescription des conduites sociales ;  fonction de transmission culturelle, c’est-à-dire diffuser les normes, valeurs en un mot l’héritage social et  fonction de distraction (pour s’amuser ou s’évader ) »116

Ces fonctions latentes ou manifestes de la communication de masse assignent des dysfonctions qui influent sur la génération présente et future. Ainsi, l’UNICEF a pris comme défi en tant que société mondiale la conception et la création des expériences en ligne pour les adolescents. « Il s’agit de les aider à saisir les occasions de la vie, tout en limitant les dangers, qui sont partiellement véhiculés par les technologies numériques »117 . Pour ce faire, un hyperforum (outil de dialogue qui utilise toutes les possibilités visuelles et interactives du réseau des réseaux) de l’avenir est organisé. D’où, un débat sur le « which world ? »118 est en ligne sur l’internet pour que tout le monde s’exprime.

115 Mc LUHAN , le village global, transformations de la vie sur terre et des médias au XXIème siècle , New York, Oxford University Press, 1989 116 WRIGHT , structure et fonction de la communication dans la société , Paris, éd Colin, 1973. 117 UNICEF , Op cit 118 HAMMOND A ., quel monde pour demain ?, Paris, éd Horizons, 1998

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En bref, tout s’est rendu compte que la révolution numérique admet la présence des absents . La contraction temporelle ainsi que la mort de la distance constituent des transformations inédites sans avoir parlé de l’immédiateté de l’information. Pourtant, nul ne peut nier que la numérisation est une évolution de la dématérialisation et de la déshumanisation. Chaque entité tâche ainsi d’affronter ce dilemme technologique . Qu’en est-il pour les enquêtés ?

Section 16 : les enquêtés et leur « ce qu’il faut faire » Dans cette rubrique, les propositions avancées émanent de la population d’enquête. Pour une nette appréhension, les perspectives recueillies seront regroupées en deux thèmes dont le premier concerne la famille tandis que le second, la communication et la mondialisation.

D- Comment sauver la famille ? a) les autorités

L’inflation étouffe de plus en plus la situation économique de chaque ménage, et donc le bon fonctionnement de ce dernier est tributaire de l’économie. En d’autres termes, « c’est l’infrastructure qui détermine la superstructure »119 . Les enquêtés ont mis l’accent sur l’autonomie financière des jeunes avant de s’engager dans le contrat du mariage étant donné que seule l’insuffisance peut expliquer la détérioration progressive de la relation intrafamiliale. Les parents sortent très tôt pour ne rentrer que très tard. Les jeunes mères abandonnent dès la naissance leur enfant faute de moyen nécessaire. La grande famille ne s’entraide plus et n’est plus source de conseil ; chacun est pour soi : on s’achemine vers l’idéologie capitaliste. Ainsi, le dysfonctionnement familial (diminution du taux de mariage, abandon du foyer, orphelinisation volontaire de beaucoup d’enfants,…) reflète la vulnérabilité du pays qui ne permet pas à sa population surtout future de jouir les droits fondamentaux : expression, information, avoir une famille… Pour un avenir meilleur, il faut que les jeunes contractants d’un mariage soient :

119 MARX K . Op cit

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• majeurs ; • financièrement autonomes ; • bénéficiaires au moins d’une éducation morale.

b) les enquêtés du FKT1

Étant donné que la cohésion familiale est affaiblie par :

— l’immaturité des parents, c’est-à-dire les jeunes de nos jours ne sont pas encore prêts à un engagement conjugal au moment où ils l’ont contracté. Leur union est généralement liée à la contrainte d’une grossesse précoce ; — la diffusion des méthodes contraceptives qui ébranle le lien sacré du mariage et le principe de la virginité. Le couple est plus exposé à l’adultère que celui de la société primitive ; — la diffusion des valeurs étrangères influant beaucoup sur la mentalité malgache. En réalité, l’isolement et l’enfermement de chaque membre dans sa chambre diminuent considérablement le poids qu’a connu la famille.

Face à ces situations, nos enquêtés suggèrent que :

 l’État doit contrôler l’invasion massive des étrangers aux comportements problématiques tels que « le cas d’un allemand qui a coopéré illicitement avec un national pour exporter de l’héroïne à Maurice »120 ou « celui du Maître Patrick Warve, un avocat retraité français qui se déclare compétent pour les paperasses l’obtention du visa et de la nationalité française »121 qui incitent indirectement les autochtones à adopter leur mode de vie (réduction de taille de ménage, recomposition familiale, système de concubinage…) ;  les médias doivent être censurés en matière d’émissions cinématographiques ;  les parents tâchent de comprendre leurs enfants dans à manière de penser et d’agir de ces derniers pour que ceux-ci ne soient pas trop extravertis.

120 MIDI MADAGASCAR , n° 9036, mercredi 8 mai 2013 121 EXPRESS DE MADAGASCAR , n° 5553, jeudi 20 juin 2013

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c) les enquêtés du FKT2

Compte tenu de la solidarité familiale qui est paralysée par la fuite des jeunes vers les villes en raison de la quête de travail, de poursuite d’étude…, ils ne souhaitent que la décentralisation effective d’infrastructures comme l’école, les industries, le marché… En bref, la ville ne plus être le monopole de ces agents de civilisation.

Comment affronter l’émergence de la mondialisation ? a) les autorités

Les questions relatives à la mondialisation intéressent nos enquêtés. Ils avancent de leur part plusieurs définitions dont nous allons proposer quelques unes :

E1 : mondialisation c’est la manière de « mondialiser le monde »

E2 : c’est « l’ère de la technologie et de ses élites »

E3 : c’est « la primauté de l’économie, le savoir et la compétence »

Cependant, ces bonnes définitions revêtent des caractéristiques qui nécessitent une prudence intellectuelle dans la pratique car la mondialisation laisse des retombées négatives pour le pays.

En principe, la technologie et les progrès scientifiques sont menés dans le but de rendre la condition de vie humaine plus confortable. Les points forts et faibles sont mesurés. Par contre, ces études sont faites dans les circonstances occidentales où la civilisation est unanimement acceptée, la population est majoritairement alphabète, la demande sociale en ces matières est fortement constatée. Donc, les produits sont bienvenus dans leur société. De l’autre côté, dans le contexte malgache, ces exigences ne sont pas réunies. Le peuple est tiraillé entre la tradition et la modernité, la ville s’est beaucoup distinguée de la campagne 122 et cette situation a des séquelles sur « les enjeux centraux d’un développement raisonné à l’heure de la mondialisation et la raréfaction des ressources de la planète », l’illettrisme frappe la majorité silencieuse…

122 BANQUE MONDIALE , Madagascar pour un dialogue sur les enjeux du développement , juin 2013

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 Par conséquent, certaines inventions ne sont pas encore adaptées au contexte local. Le coût est un facteur d’appauvrissement tandis que le signifiant contrecarre les mentalités et cultures originales. Nous abondons dans le sens de BLOCH quand il dit que « la révolution industrielle, la communication à l’échelle mondiale… menacent l’identité que l’homme a héritée des cultures primitives »123 . En effet, la promotion de la culture constitue une nécessité absolue vu que la modernité nous paraît un culturocide.

b) Les FKT1 et FKT 2

Différents moyens remettent en cause le principe de la malgachéîté. A part l’exclusion numérique qui sépare davantage les riches et les pauvres, un fossé numérique est constaté entre les générations successives. La culture élite-masse commence à se différencier. La société connait une hiérarchisation électronique dont la couche qui se trouve au plus haut degré est les culturocrates 124 (BAJOIT ).

Face à cela, les enquêtés estiment que ce qu’il faut faire maintenant c’est de maîtriser l’apport culturel de la technologie car

 La médiatisation de la communication intrafamiliale ou intragroupale dégénère petit à petit l’interaction verbale qui est le « signe d’une certaine intimité ». Et c’est dans cette direction que sont organisées, même une fois par an, les réunions familiales à travers la valorisation de « ny terak’i … », « zanaka am_pielezana ». Il faut ainsi renforcer ces pratiques afin que « des conventions, des règles de procédure qui servent à orienter et à organiser le flux des messages émis »125 soient respectées via la reconnaissance intergénérationnelle.

 Enfin, la familiarisation avec les médias électroniques débouche sur des difficultés à gérer les interactions sociales. Aussi, avons-nous du mal à reconnaître les

123 BLOCH , Op cit 124 BAJOIT , le changement social : approche sociologique des sociétés occidentales contemporaines , Paris, 2D Colin ,2003 125 GOFFMAN E ., les rites de l’interaction , Paris, éd minuit, 1974

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informations douteuses ou peu fiables dans les communautés en ligne. Les enquêtés envisagent ainsi la conscientisation des personnes qui sont morales ou physiques à dénoncer clairement les nouvelles manies sociales. Pour cela, les informations douteuses doivent être censurées et les autres éditées et publiées pour que l’actualité soit à la portée de tous.

En résumé, les chercheurs du XXème siècle ont presque conclu leurs ouvrages par dire que la science sera l’avenir de la société. Moins d’un siècle plus tard, « le futur nous semble incertain tandis que le passé se voit absorbé dans un présent permanent »126 a souligné LAPLANTINE F. Le temps s’est beaucoup contracté tout comme les frontières qui deviennent plus perméables que l’on pouvait imaginer. La mondialisation au lieu de tout uniformiser renforce davantage l’écart de culture et de connaissance entre les mondialisateurs et les mondialisés. Pour cela, nous ne pouvons faire qu’atténuer ses impacts par la valorisation de nos identités culturelles pour qu’au moins les deux puissent se reconnaître et admettent une cohabitation culturelle .

126 LAPLANTINE F. Journal des Anthropologues , Paris, n° 128-129, 2012

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Conclusion partielle

En bref, l’insularité de Madagascar ne lui permet pas vivre en dehors de l’environnement international qui a été ces derniers temps trop mouvementé. Nous pouvons dire que ce siècle est un siècle technologique compte tenu de l’évolution impressionnante de ce secteur. De l’occident aux pays moins avancés, la science se fait partout entendre.

Néanmoins, pour un pays mal préparé à la rationalisation comme le nôtre, elle assigne plus d’inconvénients que d’avantages. Nous imitons, nous nous conformons aux valeurs étrangères qui nous appauvrissent culturellement et étouffent économiquement car la majorité de la population n’est pas encore en mesure de faire un triage culturel . C’est pourquoi, maintes entités locales et internationales se rendent compte et mener des activités diverses pour faire face à cette menace.

Pour ce, des forums en ligne sont organisés pour limiter les aspects nocifs de cette culture de vitesse . Le monde entier en connexion peut s’y exprimer et proposer des perspectives. De notre terre, des institutions œuvrant dans le domaine de l’éducation ainsi que l’humanité mettent en place des conférences –débats. Cette mesure prouve encore une fois que la population malgache est « homoloquens »127 . Quant aux enquêtés, ils s’expriment clairement que l’omniprésence des NTIC est source du dysfonctionnement familial.

127 HAGEGE C., l’homme de parole, Paris, éd Fayard, 1985

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CONCLUSION GÉNÉRALE

Ces derniers temps, le monde assiste à l’émergence d’une économie créative source du développement durable, à la mondialisation croissante du marché des loisirs, de l’avènement des NTIC,…Nous pouvons dire que nous vivons une période de l’histoire du monde particulièrement mouvementée, dans une société de l’information qui présente autant d’avantages que des inconvénients dévalorisants, formant une réalité irréversible. Tout évolue rapidement et la communication instantanée renforce l’agitation permanente de nos existences.

On dirait que ces progrès technologiques ont transformé la manière dont nous communiquons et nous vivons. D’ailleurs, ses développements et conséquences sont exponentiels. Ce qui permet d’avancer que le christianisme, la colonisation et la modernité sont les trois facteurs historiques contemporains ayant exercé sur la société malgache.

Une société exprimée par l’unité plurielle, la communauté malgache est la somme d’alluvions ethniques les plus diverses qui se sont rencontrées et stratifiées pour former un monde nouveau aux caractères si particuliers : voilà son insularité.

Madagascar, un pays naturellement riche et mystérieux, est un territoire à vocation agricole, à une population ethniquement diversifiée mais spirituellement unie, conserve tant de patrimoines endémiques tels le Fihavanana quelle que soit sa forme et ses manifestations. Mais, il est aussi un pays à caractère de soumission que ce soit dirigeants ou dirigés. C’est pourquoi, son économie reste tributaire des crises politiques à répétition. Il est administrativement décentralisé en vingt deux régions dont Vakinakaratra , notre terrain d’étude fait partie.

En bref, la Commune Urbaine d’Antsirabe, inscrite dans la région pré énoncée constitue la ville d’eau de l’île. Ainsi, elle est classée parmi la deuxième ville célèbre du pays. Composée d’une population hétérogène, cette circonscription connaît aussi des spécificités démographiques, économiques et surtout culturelles.

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On y observe une conservation intense de la tradition qui s’occidentalise de temps en temps, de même pour le lien social.

En général, la famille antsirabéenne connaît à l’instar des autres, une dénaturalisation dès la formation même. L’union libre et la dissolution du mariage y sont constatées. Bien que souvent brisée ou monoparentale, la famille reste encore le principal soutien des enfants 128 . En vertu du réseau parental, les enfants exclus ou abandonnés ont recours à l’usage des matériels technologiques pour maintenir le contact, ceux du foyer pour le renforcer. D’où, la raison d’être du téléphone.

Un appareil inventé par Alexander GRAHAM BELL, physicien américain d’origine anglaise en 1892, considéré comme « système de diffusion de l’information avant de devenir l’outil de conversation interpersonnelle », envahit dans toutes les dimensions de la vie sociale.

Dès fois, il prend une considération survalorisée en tant qu’ appareil social vital et constitue désormais un besoin physiologique de chaque individu. On ne peut pas nier qu’il réduit beaucoup la distance géographique et fait circuler les informations sans obstacles, en effet, il garantit l’égalité des chances de tous ;ici, l’hypothèse n°3 est semi- vérifiée quand 48,60% nos enquêtés approuvent le téléphone comme moyen d’intégration informationnelle . En plus, le téléphone est garant de la relation amicale, fraternelle, conjugale voire sociale ; il assure la sécurité existentielle quotidienne (morale, financière…). En un mot, c’est vraiment un signe de progrès et peut-être une chance pour le développement social.

Par contre, mal exploitée et manipulée, le téléphone ne fait que creuser davantage le fossé entre les parents et nouvelles générations, les riches et les pauvres…d’où la dichotomie sociale est renforcée (confirmation de l’hypothèse n°2 ). A part cela, il n’assigne que la grande fracture numérique conjuguée avec la disparition progressive du lien réel (physique…) et la nature linguistique au profit du lien virtuel qui revêt l’hypocrisie, l’isolement des individus, la formation des styles langagiers codifiés, l’inexistence de la vie privée.

128 SOAVELOMANDROSO R., nos enfants les inconnus , Antananarivo, éd Tsipika, 2001

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En résumé, la montée en puissance de la technologie risque de stratifier la culture de masse et celle élitiste. Elle aggrave le processus de production, mode de diffusion et surtout de consommation : le but final de la mondialisation. Ce constat contribue à la confirmation à 78,40 % de nos postulats qui attribuent beaucoup d’inconvénients que des bienfaits au téléphone mais aussi aux NTIC, en général. Nous parlons beaucoup dans ce mémoire du passage irréversible de la société au monde du virtuel ; mais qu’en est-il concrètement de la rencontre virtuelle à la cohabitation réelle ?

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TABLE DES MATIERES REMERCIEMENTS SOMMAIRE INTRODUCTION GÉNÉRALE ...... 1 PREMIERE PARTIE :«APPROCHE CONCEPTUELLCONCEPTUELLE,E, CONTEXTUELLE ET METHODOLOGIQUE » Introduction partielle ...... 9

Chapitre 1 : ...... 10

LA COMMUNICATION ET LA FAMILLE : ...... 10

DEUX NOTIONS « SOCIOLOGIQUES » ...... 10 Section 1 : la famille comme institution sociale de base ...... 10 Section 2 : la communication : un pilier du lien social (CUSSET) ...... 17 Historique ...... 17 Point de vue global ...... 18

Chapitre 2 : ...... 22

ANTSIRABE : LE CARREFOUR DU MODERNE ET DU TRADITIONNEL ...... 22 SECTION 3 : Ville d’eaux et ville du métissage ...... 22 1- brève historique ...... 22 2- Délimitation géographique ...... 23 a) Transport :...... 24 b) Communication : ...... 25 Section 4 : Monographie des Fokontany étudiés ...... 26 Chapitre 3 : ...... 34

APPAREILLAGE METHODOLOGIQUE ...... 34 Section 5 : cadre technique ...... 34 Conclusion partielle ...... 39

DEUXIEME PARTIE : « LE VECU ANTSIRABEEN EN TERMES DE COMMUNICATION » Introduction partielle ...... 41

Chapitre 4 ...... 42

LA PRESENTATION DES RESULTATS D’ENQUETE ...... 42 Section 7 : Présentation des résultats qualitatifs ...... 43

96

Section 8 : Quantification perceptionnelle ...... 46 Chapitre 4 : ...... 54

ANALYSE MULTIDISCIPLINAIRE DE L’IMPLICATION DE LA TÉLÉPHONIE MOBILE DANS LE LIEN INTRAFAMILIAL

...... 54 Section 9 : Aspect psychologique du changement ...... 54 Section 10: Vision dialectique culture/ économie ...... 57 M- La culture des pauvres ...... 58 N- L’exigé - exigeant ...... 58 O- Un outil détourné de ses fonctions ...... 59 Section 11 : Approche altermondialisante ...... 60 P- En fait, qu’entend-on par mondialisation ? ...... 60 Q- Une société familiale occidentalisant ...... 62 Section 12 : analyse sociologique ...... 63 R- L’individualisation de la famille contemporaine ...... 64 S- L’agrandissement du fossé entre les générations ...... 64 T- L’individualisation des êtres humains ...... 65 U- La généralisation de la pathologie sociale ...... 66 Conclusion partielle ...... 68

TROISIEME PARTIE : « VISION PROSPECTIVE POUR UNE NOUVELLE ÈRÈREE COMMUNICATIONNELLE » Introduction partielle ...... 70

Chapitre 6 : ...... 71

RATIONALISATION A OUTRANCE COMME UNE ÉPÉE DE DAMOCLÈS ...... 71 Section 13 : Dimension technique, économique et sociale ...... 71 A- le téléphone est pur et simple un usage économique ...... 73 B- L’utilisation du téléphone débouche sur la classification catégorique de la société ...... 74 Section 14 : critique constructive ...... 76 il faut une famille requalifiée ...... 76 a) une reparentalisation ...... 77 b) une communication intergénérationnelle ...... 78 C- Il faut une société engageante et engagée ...... 80 1) la société soit engageante ...... 80 2) La société est engagée ...... 82

Chapitre 7 : ...... 84

QUEL AVENIR POUR LA FAMILLE DE DEMAIN ? ...... 84

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Section 15 : engagement des tierces parties ...... 84 Section 16 : les enquêtés et leur « ce qu’il faut faire » ...... 87 D- Comment sauver la famille ? ...... 87 a) les autorités ...... 87 b) les enquêtés du FKT1 ...... 88 c) les enquêtés du FKT2 ...... 89 E- Comment affronter l’émergence de la mondialisation ? ...... 89 a) les autorités ...... 89 b) Les FKT1 et FKT 2 ...... 90 Conclusion partielle ...... 92 CONCLUSION GÉNÉRALE……………………………………………………………. 93 BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………. . 98 INDICATIONS ANNEXES

98

BIBLIOGRAPHIE

1- OUVRAGES GENERAUX

1. ALLPORT , the construction of attitude , Paris, éd Harmattan, 1935 2. BAJOIT , le changement social : approche sociologique des sociétés occidentales contemporaines , Paris, 2D Colin ,2003 3. BAKTHINE , esthétique de la création verbale , Paris, éd Gallimard, 1984 4. BALANDIER G ., civilisés, dit-on , Paris, éd PUF, 2003 5. BIJELJA R. et BRETON R ., du langage aux langues , Paris, éd Gallimard, 1997 6. BOAS F ., race, language and culture , Paris, éd Colin, 1940 7. BOUDON R ., l’inégalité des chances, Paris, éd Colin, 1973 8. CATHERINE S. , les visites médiatisées pour des parents séparés , Paris, éd Harmattan, 2010 9. CHAMPAGNE P ., initiation à la pratique sociologique , Paris, éd Dunod, 1989 10. CHAMPAGNE P., la sociologie , Paris, éd Milan, 1998 11. CHAUCHARD P., sociétés animales et sociétés humaines , Paris, 3è éd PUF, 1970 12. COMTE A., de la physiologie sociale , Paris, éd des Œuvres, 1813 13. DOLTO F ., paroles pour les adolescents , Paris, éd Gallimard 2003 14. DURKHEIM E ., les règles de la méthode sociologique , Paris, éd PUF, 1895 15. FABLET D., la suppléance familiale au soutien à la parentalité , Paris, éd Harmattan, 2010 16. FONSEGRIVE G ., mariage et union libre , Paris, éd Kartala, 1904 17. GEORGES TEINDERAS et YANN THIRAU , la jeunesse dans la famille et la société modernes, Paris, éd Gallimard, Tome 1, 1961 18. GEORGES TEINDERAS et YANN THIRAU, les sources du comportement, Paris, éd Gallimard, Tome 2, 1961 19. GOFFMAN E ., les rites de l’interaction , Paris, éd Minuit, 1974 20. HAGEGE C ., l’homme de parole , Paris, éd Fayard, 1985 21. HAMMOND A ., quel monde pour demain ?, Paris, éd Horizons, 1998 22. KEYNES JM., théorie générale de l’emploi, de l’internet et de la monnaie , Paris, éd Payot, 1990 23. LALLEMENT M ., découverte de la sociologie , cahier français, la documentation française, n° 247, 1990. 24. LE BON G ., psychologie des foules , Paris, éd Alcan, 1985 25. LENOIR F. et ETCHECOIN M-F., l’enquête , Paris, éd Code de Vinci, 2004 26. LEVI- STRAUSS , les structures élémentaires de la parenté , Paris, éd Plon, 1949

99

27. MAFFESOLI, les temps des tribus, Paris, 3è éd Table ronde, 1988 28. MALRAUX A ., la métamorphose des Dieux , Paris, éd Colin, 1957 29. MARX K. et ENGELS F ., manifeste du parti communiste , Paris, tome 1, éd Gallimard, 1965 30. MARX K ., le capital , Paris, éd Verlag Von Otto Meisner, 1867 31. MASLOW , motivation and personality , Eyrolle, éd Organisation, 1954 32. MAUSS M. , anthropologie et sociologie , Paris, 4è éd PUF , 1964 33. MEAD M. , fossé des générations , Paris, Ed Denoel, 1971 34. MERTON R . éléments de théorie et de méthode sociologique , Paris, éd Plon, 1965 35. MOSCOVICI S., la psychologie sociale, une discipline en mouvement, Paris , 1970 36. OTT L , travailler avec la famille , Paris, éd ères, 2010 37. OTTINO P., les champs de l’ancestralité à Madagascar , Paris, Kartala, 1998 38. PAVAGEAU , jeune paysan sans terre , Paris, éd Harmattan, 1981 39. PIERROT M ., Madagascar, la grande île secrète , Paris, éd Autrement, 2003 40. RADCLIFFBROWN , systèmes familiaux et matrimoniaux en Afrique , Paris, Ed PUF, 1953

41. RAJAONARIMANANA N ., grammaire moderne de la langue malgache , Paris, colloque ILNACO, 2001 42. RAMBAUD , société rurale et urbanisation , Paris, éd du Seuil, 1969. 43. RAMIANDRASOA F ., tradition orale et histoire , Paris, 1967 44. RANAIVOARIVONY G-P, Approche sociologique du développement et ressources humaines , Genève, éd Kartala, 1971 45. SALLENAVE D., nous, on n’aime pas lire , Paris, éd Gallimard, 2009 2- SAUSSURE et BARTHES , elements of semiology , New York, éd Oxford University Press, 1967 46. SAVOUREY M., re-créer les liens familiaux , Lyon, éd Chronique, 2008 47. SISMONDI , nouveaux principes d’économie politique , Paris, éd Jeheber, 1918 48. SOAVELOMANDROSO R. « nos enfants, ces inconnus », Tananarive, éd Tsipika, 2001 49. WARD F., , Psychic factors in civilization , USA, éd Ginn&Company, 1897 50. WEBER M ., essai sur la théorie de la sociologie , Paris, éd Plon, 1965

3- OUVRAGES SPECIFIQUES

51. 52. ASCHER F ., la société hypermoderne , Paris, éd de l’Aube, 2004 53. BERGER C.R., communication and reality : an introduction communication research , New York, éd Oxford University Press, 1996 54. BONJAWO J. l’internet pour l’Afrique , Paris, éd Kartala 2003 55. BOURGEON D., le marketing de l’art et de la culture , Paris, Ed Seuil, 2009

100

56. CLEEF E V., géographie des télécommunications , Paris, éd PUF, 1984 57. DEFARGES PM., la mondialisation , Paris, PUF, 1997 58. ENRIQUEZ et LEVY A. , les nouvelles technologies pour quel changement ? Paris, éd Épi ,1982 59. FABROT B ., la sécurité sur l’internet , Paris, éd Horizons, 2001. 60. FRANCES CAIRNCROSS, the Death of Distance , Boston, éd Harvard business School Press, 1997 61. HOGGARD R ., la culture du pauvre , Paris, éd Minuit, 1970 62. MATILDA et RILEY J ., communication de masse et systèmes sociaux , Paris, éd Colin, 1965 63. MATTELART A ., l’invention de la communication , Paris, éd Flammarion, 2007 64. Mc LUHAN , le village global, transformations de la vie sur terre et des médias au XXIème siècle , New York, Oxford University Press, 1989 65. METAYER G ., la société malade de ses communications , Paris, éd Dunod, 1980 66. RANDRIANTSIFERANA , les mass médias dans le monde urbain , Antananarivo, mémoire de maîtrise, département de sociologie, 1984 67. REDEKER R. , le deshumain , Paris, éd itinéraires, 2000 68. SACRISTE V., communication et médias , Paris, Ed Foucher, 2007 69. SCHUDSON M ., les pouvoirs des médias , Paris, éd Horizons, 1995 70. VALLEUR M ., les nouvelles formes d’addiction , Paris, éd Flammarion, 2003 71. WECKERMANN G ., la logistique mondiale : transport et communication, Paris, éd Marketing, 2005 72. WIENER R ., sciences de l’information et de la communication , Paris, éd Larousse, 1993 73. WRIGHT , structure et fonction de la communication dans la société , Paris, éd Colin, 1973.

4- OUVRAGES METHODOLOGIQUES

74. BEITONE A. et Alii , sciences sociales , Paris, éd Dalloz, 2009 75. BEITONE, méthode des sciences sociales , Paris, 6è Ed Sirey, 2009 76. GRAWITZ G., méthodes des sciences sociales , Paris, Ed Dalloz, 10è, 1996 77. R. QUIVY et LC CAMPENHOUDT , manuel de recherche en Sciences sociales , Paris, Ed Dunod, 2006 78. SERVIER J., méthode de l’ethnologie , Paris, PUF, 1986

101

4- REVUES ET PUBLICATIONS

79. Autrement, 2003 80. BANQUE MONDIALE , Madagascar pour un dialogue sur les enjeux du développement , juin 2013 81. Échos de l’Himo , n°3, 2007 82. EXPRESS DE MADAGASCAR , n° 5553, jeudi 20 juin 2013

83. FFKM , Fanabeazana sy tari-dalana ho olom-pirenena vanona, Antananarivo, éd FEPSEP 1993 84. Journal des anthropologues , n°128-129, 2012 85. MIDI MADAGASCAR , n° 9036, mercredi 8 mai 2013 86. UNICEF, l’adolescence : l’âge de tous les possibles , Paris, éd Payot, 2011

5- WEBOGRAPHIES

87. www.prb.org, consulté en mai 2013 88. www.hf.caltch.edu/ which world, consulté le 20 mai 2013 89. www.polyscience.net, consulté en avril 2013 90. http//multitude.samzdat.net, consulté le 17 juillet 2013 91. www.francophonie.org, consulté le 17 juillet 2013

10 2

INDICATION DES TABLEAUX OU FIGURES

Tableau n°1: comparaison chronotopique de la famille ...... 14 Tableau n°2 : Démographie de la population d’Antsirabe ...... 24 Tableau n°3 : la démographie d’Antsenakely ...... 29 Tableau n°4 : la situation démographique d’Antsongo ...... 30 Tableau n°5 : les activités agraires du FKT ...... 31 Tableau n°6 : catégorisation des loisirs locaux ...... 33 Tableau n°7 : les opérateurs (taxi phone) observés et enquêtés ...... 35 Tableau n°8 : renseignements généraux des pré-enquêtés...... 36 Tableau n°9 : les autorités enquêtées ...... 36 Tableau n°10 : renseignements généraux des enquêtés ...... 38 Tableau n°11 : Utilisation du téléphone suivant l’espace ...... 49 Tableau n°12 : influence de l’âge des parents sur l’utilisation du téléphone par leurs enfants...... 50 Tableau n°13 : Utilisation par rapport à l’intellectuel ...... 51 Tableau n°14 : effectifs des consommateurs en fonction du service ...... 50 Tableau n°15 : les services les plus attirants ...... 54 Tableau n°16 : classification de la société par rapport à la consommation téléphonique ...... 75 Tableau n°17 : conception de la famille ...... 77 Tableau n°18 : types de famille du XXIème siècle ...... 86

Figure n°1 : Organigramme du FKT 1 ...... 27 Figure n°2 : Modélisation de la consommation en téléphone ...... 44 Figure n°3 : transmission téléphonique d’un message ...... 73 Figure n°4 : l’aspect économique du téléphone ...... 74

LISTE DES ACRONYMES

CFAF : Centre de Formation Aroupi Faravohitra

COM : communication

CUAbe : Commune Urbaine d’Antsirabe

DUDH : Déclaration Universelle des Droits de l’Homme

EF : enquêté de sexe féminin

EM : enquêté de sexe masculin

EVA : Éducation à la Vie et à l’Amour

FKT : fokontany

FMI : Fond Monétaire International

INED : Institut National Des Études Démographiques

INSEE : Institut National de la Statistique et des Études Économiques

KOBAMA : Koba Malagasy

NTIC : nouvelles technologies de Communication et de l’Information

PCD : Plan du Développement Communal

PDS : Président de la Délégation Spéciale

PPN : Produits de Premières nécessités

PUD : Plan d’Urbanisme Directeur C.U. Antsirabe

RTA : Radio Télévision Antsirabe

TELMA : Télécom Malagasy

UNICEF : United Nations Educational Scientific and Cultural Organization (Fonds international des Nations Unies pour l’enfance)

ANNEANNEXESXESXESXES

I- QUESTIONNAIRES POUR LES ENQUETES

1°- Renseignements généraux :

Age : moins de 15 ans

[15 -24 ans]

[24 – 45 ans]

Plus de 45 ans

Sexe : masculin

Féminin

Occupation : étudiant

Secteur I

Secteur II

Secteur III

2°- Mampiasa finday ve ianao, nanomboka oviana?

(Avez-vous utilisé le téléphone, depuis quand ? Est-ce un cadeau ou par achat personnel ? Qu’est-ce qui change dans votre vie depuis ? )

3°- Hatraminin’izay, inona no tena fiovana tsapanao ?

(Depuis cela à nos jours, vous avez changé combien de téléphone pour quelle raison ?)

4°- Inona no tena ampiasanao finday ?

A quoi vous sert le téléphone dans la vie courante :

Jeux et divertissements

Taches ménagères

Relation familiale

Relation amoureuse

Travail ou étude

Santé et sécurité

Autres à préciser

5°-Resam-pianakaviana toy ny ahoana no mety ampiasana finday ?

(Quel type de dialogue familial est possible par téléphone ?)

Commission

Réprimandes

Éducation

Faveur

Autres à préciser

6°- Raha resaka momba ny fitiavana, fady...inona no mety kokoa aminao : miresaka amin’ny finday sa fomba hafa, toy ny inona ?

(Qu’est-ce qui vous met à l’aise pour un sujet d’amour, d’affaire, tabou…)

Face à face

Par téléphone

7°- Samy manana efitrtano manokana ve ny mpianakavy, raha eny, dia isaky ny inona no miresaka sy mifanakalo hevitra?

(Au sein de la famille, avez-vous chacun une chambre personnelle et un lieu de rassemblement, si oui, à quel moment ?)

Tous les matins

Pendant le déjeuner

Tous les soirs

Tous les week-ends

Ou tout s’arrange par téléphone ?

8°- Inona no mety hitranga raha tsy mampiasa finday iray na roa andro ianao ?

(Qu’est-ce qui pourra se passer si vous serez privé du téléphone un ou deux jours ?)

9°- Misy fepetra manokana ve ny finday ampiasanao ?

(Est-ce que vous avez des exigences particulières pour votre mobile ou non ?)

Marque

Prix

Fonction

Autres à préciser

10°- Aminao, nahoana no lasa tsy afa-misaraka amin’ny fiainam-pianakaviana ny finday?

(D’après vous, pourquoi le téléphone devient-il indispensable au sein du ménage malgache ?)

11°- Firy taona no tokony hanana sy hampiasa finday ny ankizy?

(A quel âge un enfant doit en disposer ?)

12°- Mbola ilaina ve ny fifampitsidihan’ ny fianakaviana ankehitriny ? Nahoana ary inona no mety hahasolo izany raha sendra ny tsy fahafahana?

(Quant à la grande famille, combien de fois vous lui passez pour dire le bonjour ? A défaut, quel moyen vous le substituez?)

13°- Inona no mety ho lafy ratsin’ny fampiasana finday ?

(Le téléphone présente –t-il des inconvénients pour)

La vie personnelle

La vie familiale

La vie sociale

14°-Afaka mandroso soson-kevitra ve ianao mba hanamafisana ny fifandraisan’ny mpianakavy izay asavorovoron’ny fanatontoloana sy ny fandrosoan’ny siansa ?

(Proposez quelques solutions pour améliorer le lien familial et puis social)

II- MODELE QUESTIONNAIRE POUR LES SOCIETES OPERATRICES DE LA TELEPHONIE MOBILE

Antsirabe, le 11 avril 2013

A Monsieur le Responsable,

J’ai l’honneur, dans la réalisation de mon stage universitaire concernant « l’évolution du monde virtuel dans la communication intrafamiliale antsirabéenne », de solliciter de votre haute bienveillance de bien vouloir m’accorder quelques renseignements sur :

1) Nombre de puces et d’appareils vendus en -2000 : -2005 : -2010 :

2) Pourcentage des clients s’intéressant à la marque : - Simple (dont le prix est inférieur à 50 000Ar) : - Moyenne [50 000Ar-100 000Ar [ : - Haut de gamme > 100 000Ar :

3) Age minimum et maximum des abonnés

4) Les raisons d’achat les plus évoquées 5) Nombre des abonnés en post payé en 2012 :

Prépayé en 2012 :

6) Le service le plus attirant : - Réduction des prix - Club (à préciser) - Information (santé, loisirs, sécurité…) - aspect économique de l’appareil (transfert et retrait d’argent…)

Dans l’attente d’une suite favorable de votre part, veuillez agréer Monsieur le Responsable, mes respects les plus distingués.

L’intéressée, RAKOTONDRAMASY H. Tiana

III- GUIDE D’ENTRETIEN

Que pensez-vous des concepts ci-après :

- Acculturation - Anomie sociale - Communication - Famille - Génération gap - Identité communautaire - Lien familial - Mondialisation - Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication - Transformation sociale

Impétrante : RAKOTONDRAMASY Hanitriniaina Tiana Adresse : lot VA 30 Tsiadana Tana 101 GSM : 033 13 712 00 E-mail : [email protected] Titre : DU RÉEL AU VIRTUEL DU LIEN INTRAFAMILIAL A TRAVERS LA TELEPHONIE MOBILE (cas de la Commune Urbaine d’Antsirabe) Nombre de pages : 98 Nombre de tableaux : 18 Nombre de figures : 5 Domaines d’étude : Sociologie de la communication, Sociologie des médias, Sociologie de la famille, sociologie urbaine. Mots clés : communication, NTIC, technologie, virtualité, lien familial, modernité, traditionalité, mondialisation

Résumé : Intégré dans un village planétaire, agité d’une histoire si particulière que mouvementée dans la logique impérative de ladite « mondialisation », Madagascar dans toute sa globalité ne peut pas se passer de l’émergence de la technologie. C’est pour ainsi déterminer les retombées de cette acculturation soi-disant imposée sur la scène du quotidien intrafamilial malgache, que se propose à étudier ce mémoire de maîtrise. Confrontée dans la partie empirique aux résultats d’enquête beaucoup plus approfondis, la conclusion provisoire débouche sur une révélation d’une société hétérogène, plus précisément hybride dans sa nature et ses représentations. A cet effet, la modernité y compris les NTIC est considérée comme une néo valeur sociale du XXIème siècle dont la non intégration fait l’objet d’une pure et simple aliénation au sens marxiste du terme. Ainsi, la société via ses représentants et les enquêtés font appel à la conscientisation collective pour l’atténuation des séquelles que doit impliquer la modernité à la société ou à la future génération dont l’avenir semble hyper virtualisé.

Encadreur : Professeur RANDRIAMASITIANA Gil Dany